SEANCE DU 22 JANVIER 2002
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 163, présenté par M. Darcos au nom de la commission des
affaires culturelles, est ainsi libellé :
« Après l'article 43 I, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 1er de la loi n° 97-179 du 28 février 1997 relative à
l'instruction des autorisations de travaux dans le champ de visibilité des
édifices classés ou inscrits et dans les secteurs sauvegardés est complété par
un alinéa ainsi rédigé :
« Une commission départementale du patrimoine est instituée dans chaque
département. Elle est présidée par le représentant de l'Etat dans le
département ou son représentant. Elle comprend en outre le directeur régional
des affaires culturelles ou son représentant, un architecte des Bâtiments de
France affecté dans le département désigné par le préfet, deux membres élus par
le conseil général en son sein, un maire désigné par le président de
l'association départementale des maires et deux personnalités qualifiées
désignées l'une par le préfet et l'autre par le président du conseil général.
»
« II. - L'article 13
bis
de la loi du 31 décembre 1913 sur les
monuments historiques est ainsi modifié :
« 1° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« En cas de désaccord soit du maire ou de l'autorité compétente pour délivrer
l'autorisation ou le permis de construire, soit du pétitionnaire avec l'avis
émis par l'architecte des Bâtiments de France, la commission départementale du
patrimoine émet un avis qui se substitue à celui de l'architecte des Bâtiments
de France. La commission émet son avis dans un délai de deux mois à compter de
sa saisine, après avoir entendu l'architecte des Bâtiments de France et, s'ils
en font la demande, le pétitionnaire et le propriétaire de l'immeuble classé ou
inscrit concerné. »
« 2° Dans le quatrième alinéa, les mots : "le représentant de l'Etat dans la
région" sont remplacés par les mots : "la commission départementale du
patrimoine".
« III. - L'article L. 313-2 du code de l'urbanisme est ainsi modifié :
« 1° Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :
« En cas de désaccord entre, d'une part, l'architecte des Bâtiments de France
et, d'autre part, soit le maire ou l'autorité compétente pour délivrer
l'autorisation, soit le pétitionnaire sur la compatibilité des travaux avec le
plan de sauvegarde et de mise en valeur ou sur les prescriptions imposées au
propriétaire, la commission départementale du patrimoine émet un avis qui se
substitue à celui de l'architecte des Bâtiments de France. La commission émet
son avis dans un délai de deux mois à compter de sa saisine, après avoir
entendu l'architecte des Bâtiments de France et le pétitionnaire s'il en fait
la demande. »
« 2° Dans le cinquième alinéa, les mots : "le représentant de l'Etat dans la
région" sont remplacés par les mots : "la commission départementale du
patrimoine".
« IV. - L'article 71 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la
répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et
l'Etat est ainsi modifié :
« 1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« En cas de désaccord soit du maire ou de l'autorité compétente pour délivrer
le permis de construire, soit du pétitionnaire avec l'avis émis par
l'architecte des Bâtiments de France, la commission départementale du
patrimoine émet un avis qui se substitue à celui de l'architecte des Bâtiments
de France. La commission émet son avis dans un délai de deux mois à compter de
sa saisine, après avoir entendu l'architecte des Bâtiments de France et le
pétitionnaire s'il en fait la demande. »
« 2° Dans le troisième alinéa, les mots : "le représentant de l'Etat dans la
région" sont remplacés par les mots : "la commission départementale du
patrimoine".
« V. - Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du
présent article. »
Le sous-amendement n° 357 rectifié, présenté par MM. Ostermann et Lardeux, est
ainsi libellé :
« I. - Rédiger comme suit le début du texte proposé par le 1° du II de
l'amendement n° 163 pour le troisième alinéa de l'article 13
bis
de la
loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques :
« En cas de désaccord du maire ou de l'autorité compétente pour délivrer
l'autorisation ou le permis de construire avec l'avis émis par l'architecte des
Bâtiments de France, [...]. »
« II. - Rédiger comme suit le début du texte proposé par le 1° du III de
l'amendement n° 163 pour le quatrième alinéa de l'article L. 313-2 du code de
l'urbanisme :
« En cas de désaccord du maire ou de l'autorité compétente pour délivrer
l'autorisation ou le permis de construire avec l'avis émis par l'architecte des
Bâtiments de France, la commission [...]. »
« III. - Rédiger comme suit le début du texte proposé par le 1° du IV de
l'amendement n° 163 pour le deuxième alinéa de l'article 71 de la loi n° 83-8
du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes,
les départements, les régions et l'Etat :
« En cas de désaccord du maire ou de l'autorité compétente pour délivrer
l'autorisation ou le permis de construire avec l'avis émis par l'architecte des
Bâtiments de France, [...]. »
L'amendement n° 593, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Après l'article 43 I, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 1er de la loi n° 97-179 du 28 février 1997 relative à
l'instruction des autorisations de travaux dans le champ de visibilité des
édifices classés ou inscrits et dans les secteurs sauvegardés est complété par
deux alinéas ainsi rédigés :
« Une section de la Commission régionale du patrimoine et des sites est
instituée pour l'examen des recours prévus par l'article 13
bis
de la
loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques, l'article L. 313-2 du
code de l'urbanisme et le deuxième alinéa de l'article 71 de la loi n° 83-8 du
7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes,
les départements et les régions.
« Elle est présidée par le préfet de région ou son représentant. Elle
comprend, en outre, deux représentants de l'Etat, trois titulaires d'un mandat
électif et quatre personnalités qualifiées nommés par arrêté du préfet de
région. Les personnalités qualifiées sont désignées, à raison de deux par le
préfet et de deux par les collectivités territoriales, pour leur compétence en
matière d'architecture et de patrimoine. Un décret en Conseil d'Etat détermine
les conditions de désignation des membres de la section et ses modalités de
fonctionnement. »
« II. - Le deuxième alinéa de l'article 13
bis
de la loi du 31 décembre
1913 sur les monuments historiques est ainsi rédigé :
« En cas de désaccord soit du maire ou de l'autorité compétente pour délivrer
l'autorisation ou le permis de construire, soit du pétitionnaire avec l'avis
émis par l'architecte des Bâtiments de France, le représentant de l'Etat dans
la région émet, après consultation de la section de la Commission régionale du
patrimoine et des sites, un avis qui se substitue à celui de l'architecte des
Bâtiments de France. Le recours du pétitionnaire s'exerce à l'occasion du refus
d'autorisation de travaux. Si le représentant de l'Etat infirme l'avis de
l'architecte des Bâtiments de France, le maire ou l'autorité compétente est
fondé à délivrer l'autorisation ou le permis de construire initialement refusé.
Les délais de saisine du préfet de région et ceux impartis à la section, au
préfet ou au maire, ou à l'autorité compétente, pour statuer sont fixés par
décret en Conseil d'Etat. »
« III. - Le quatrième alinéa de l'article L. 313-2 du code de l'urbanisme est
ainsi rédigé :
« En cas de désaccord entre d'une part l'architecte des Bâtiments de France et
d'autre part soit le maire ou l'autorité compétente pour délivrer
l'autorisation, soit le pétitionnaire sur la compatibilité des travaux avec le
plan de sauvegarde et de mise en valeur ou sur les prescriptions imposées au
propriétaire, le représentant de l'Etat dans sa région émet, après consultation
de la section de la Commission régionale du patrimoine et des sites, un avis
qui se substitue à celui de l'architecte des Bâtiments de France. Le recours du
pétitionnaire s'exerce à l'occasion du refus d'autorisation de travaux. Les
délais de saisine du préfet de région et ceux impartis à la section et au
préfet pour statuer sont fixés par décret en Conseil d'Etat. »
« IV. - Le deuxième alinéa de l'article 71 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983
relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements,
les régions et l'Etat est ainsi rédigé :
« En cas de désaccord soit du maire ou de l'autorité compétente pour délivrer
le permis de construire, soit du pétitionnaire avec l'avis émis par
l'architecte des Bâtiments de France, le représentant de l'Etat dans la région
émet, après avis de la section de la Commission régionale du patrimoine et des
sites, un avis qui se substitue à celui de l'architecte des Bâtiments de
France. Le recours du pétitionnaire s'exerce à l'occasion du refus
d'autorisation de travaux. Les délais de saisine du préfet de région et ceux
impartis à la section et au préfet pour statuer sont fixés par décret en
Conseil d'Etat. »
« V. - Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du
présent article. »
La parole est à M. Darcos, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement
n° 163.
M. Xavier Darcos,
rapporteur pour avis.
Cet amendement, tendant à insérer un article
additionnel, reprend les termes de la proposition de loi relative à la création
d'une commission départementale du patrimoine adoptée par le Sénat le 14 juin
dernier sur l'initiative de notre collègue M. Pierre Fauchon.
Le texte, qui visait à améliorer la procédure de recours contre les avis
conformes des architectes des Bâtiments de France, introduisait deux
modifications : l'ouverture du recours aux pétitionnaires et la création d'une
commission départementale composée paritairement de représentants de l'Etat et
de représentants des collectivités territoriales et dotée d'une compétence
décisionnelle pour les recours.
L'Assemblée nationale a examiné deux amendements, qui avaient reçu au fond un
avis favorable de la commission des lois. Le premier a été repoussé, et le
second, qui reprenait la proposition de loi adoptée par le Sénat, a été retiré
au bénéfice de l'engagement pris par le Gouvernement d'inscrire à l'ordre du
jour de l'Assemblée nationale le texte adopté par le Sénat. Mais cet engagement
n'a pas été tenu.
La commission des affaires culturelles estime donc nécessaire de reprendre
l'initiative et d'obliger le Gouvernement à tenir ses promesses. Ce dispositif
a toute sa place dans le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui
puisqu'il permet d'infléchir les pratiques administratives dans le sens
souhaité par nos concitoyens qui veulent un Etat cherchant à expliquer plutôt
qu'à convaincre ou à imposer.
M. le président.
La parole est à M. Ostermann, pour défendre le sous-amendement n° 357
rectifié.
M. Joseph Ostermann.
Ce sous-amendement concerne la saisine de la commission d'appel, dès lors
qu'un désaccord s'instaurerait entre l'autorité chargée de délivrer les permis
de construire et les architectes des Bâtiments de France. Le sous-amendement n°
357 rectifié tend à réserver la saisine de la commission d'appel au maire ou à
l'autorité chargée de délivrer l'autorisation de construire et non au
pétitionnaire.
M. le président.
La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 593.
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Cet amendement tend à améliorer la procédure de
recours contre les avis conformes des architectes des Bâtiments de France sur
les projets de travaux dans les espaces protégés. Il vise à créer une section
au sein de la commission régionale du patrimoine et des sites chargée
d'examiner ces recours.
Cette section assure une représentation paritaire de l'Etat et des
collectivités locales sous la présidence du préfet de région. L'avis de la
section ne se substitue pas à celui de l'architecte des Bâtiments de France
mais il est destiné au préfet de région qui reste compétent pour infirmer ou
confirmer l'avis de l'architecte des Bâtiments de France. L'Etat doit conserver
cette compétence afin de rester le garant de la protection des espaces protégés
face aux autres préoccupations économiques ou sociales.
Enfin, cet amendement tend à modifier le régime du recours contre l'avis
conforme de l'architecte des Bâtiments de France en ouvrant ledit recours au
pétitionnaire. Celui-ci peut exercer un recours direct, non pas contre l'avis
de l'architecte des Bâtiments de France, mais simplement contre le refus du
projet de travaux par l'autorité décentralisée, fondé sur l'avis conforme.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 163 et 593, ainsi que
sur le sous-amendement n° 357 rectifié ?
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
La commission est favorable à l'amendement n° 163 qui
reprend, pour l'essentiel, la proposition de loi adoptée en juin dernier par le
Sénat.
Elle estime en effet que, pour la cohérence du texte, il vaut mieux réaffirmer
clairement, dans des dispositions identiques, la position adoptée par le Sénat
voilà six mois seulement.
En conséquence, nous souhaiterions, sauf avis contraire de M. Darcos,
rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, que M.
Ostermann retire son sous-amendement pour nous permettre de nous en tenir
strictement à ces dispositions.
La position de la commission est identique en ce qui concerne l'amendement n°
593 du Gouvernement. Monsieur le ministre, la commission des lois salue le
geste d'ouverture du Gouvernement à l'égard du Sénat sur ce point, mais, là
encore, elle préfère respecter la ligne adoptée au mois de juin dernier et
espère que le Gouvernement acceptera de tenir compte de la volonté de constance
manifestée par le Sénat.
M. le président.
Monsieur Ostermann, succombez-vous à la supplique de M. le rapporteur ?
M. Joseph Ostermann.
Oui, monsieur le président, et je retire le sous-amendement n° 357
rectifié.
M. le président.
Le sous-amendement n° 357 rectifié est retiré.
Monsieur le ministre, l'amendement n° 593 est-il maintenu ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Je souhaite le retrait de l'amendement n° 163 au
profit de l'amendement n° 593 du Gouvernement que je maintiens pour les raisons
que j'ai exposées et sur lesquelles je ne reviens pas.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 163.
M. Yves Dauge.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Dauge.
M. Yves Dauge.
La question du rôle des architectes des Bâtiments de France est bien connue.
Elle a été évoquée à maintes occasions, notamment lors du débat sur la loi
relative à la solidarité et au renouvellement urbains. Derrière cette question
se dissimule le souhait de nombreuses personnes de voir disparaître le
privilège des architectes des Bâtiments de France. Il faut le dire
franchement.
En revanche, pour notre part, nous souhaitons vivement que leur rôle soit
reconnu et maintenu. Je souscris pleinement aux propos qu'a tenus M. Lardeux en
ce sens à l'instant. L'Etat a des responsabilités éminentes s'agissant du
patrimoine. A l'évidence, je n'exclus pas que d'autres organismes puissent
aussi intervenir dans ce domaine.
Le rôle de la France dans ce domaine est important sur le plan international.
Vous le savez certainement, notre législation et nos pratiques en la matière
sont citées en exemple dans le monde entier, notamment grâce à l'UNESCO.
En outre, je dirai que les conflits sont très peu nombreux. Les chiffres de la
direction de l'architecture en témoignent. Vous pouvez les vérifier. Chaque
dossier suscite évidemment de nombreuses discussions avec l'architecte des
Bâtiments de France. Cependant un accord est trouvé dans l'immense majorité des
cas. Dans le département d'Indre-et-Loire je ne connais pas d'exemple de
négociation qui n'ait pas abouti. Chacun y met du sien !
L'architecte est évidemment dans une position de force puisqu'il dispose de
l'arme du
veto.
A présent, vous voulez améliorer le dispositif de recours, ce qui se comprend
bien, mais, pour ma part, je suis très opposé à l'instauration d'une commission
départementale. Il existe déjà une commission régionale du patrimoine et des
sites. Appuyons-nous sur les institutions existantes !
Je ferai par ailleurs observer que ces questions doivent être traitées de
préférence au niveau régional. Je ne suis pas antidépartementaliste, mais je
considère qu'il y a plus de recul, moins d'intérêts mêlés. Vous le sentez bien,
il s'agit d'une affaire délicate. Par conséquent, il faut absolument s'appuyer
sur la structure régionale existante.
Le Gouvernement a bien fait de proposer une section chargée d'examiner les
recours, avec une représentation parfaitement équilibrée entre les élus.
Enfin, je suis quelque peu surpris de lire dans l'amendement de M. Darcos -
mais peut-être ai-je mal compris - que la commission qu'il propose d'instituer
est présidée par le préfet. Puis le président disparaît et il n'est plus
question que de la commission. C'est donc elle qui décide.
Je préfère la solution qui s'inscrit dans la logique de l'autorité de l'Etat
dans cette affaire, afin que ce soit le président, donc le préfet, qui, après
avis de la commission, décide en dernier recours. C'est plus clair et plus net.
Il n'est pas bon de se s'effacer derrière les commissions. Elles sont les
bienvenues pour nous aider à régler des conflits. Mais, dans cette affaire,
laissons l'Etat responsable.
Mme Annie David.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme David.
Mme Annie David.
L'avis émis sur un permis de construire par un architecte des Bâtiments de
France n'est actuellement guère discutable. Des recours sont certes possibles,
mais dans des conditions difficiles.
Notre objectif est de prendre en compte l'avis des collectivités et de
permettre une plus grande facilité des recours.
Or le dispositif proposé dans cet amendement pourrait donner lieu à certaines
dérives dans les choix effectués. Je pense en particulier à d'éventuelles
dérives politiques. Là encore, il revient à l'Etat de garantir une certaine
cohérence sur le plan national.
Pour cette raison, nous pensons que le transfert de la totalité des
compétences à une commission départementale n'est pas souhaitable. Nous
souhaitons que les compétences soient partagées entre une commission
départementale et les architectes des Bâtiments de France, qui devraient
travailler en partenariat et de façon concertée.
Nous voterons donc contre cet amendement.
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lachenaud.
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Il m'est difficile de me prononcer contre cet amendement puisqu'il émane de
mon collègue Xavier Darcos, rapporteur pour avis. Je le ferai pourtant très
clairement et très sincèrement, guidé par mon expérience de maire, de président
de conseil général et d'ancien directeur responsable de l'action des
architectes des Bâtiments de France sur l'ensemble du pays pendant de
nombreuses années.
Nous devons prendre une certaine distance et faire le bilan des soixante-dix
dernières années de l'action menée par les architectes des Bâtiments de France
dans les secteurs protégés. Il s'agit de savoir si ce bilan a été globalement
positif dans les sites protégés et leurs abords. Si on analyse la situation
dans les villes et les villages, la réponse est « oui ».
Comme le disait tout à l'heure notre collègue Yves Dauge, les incidents ne
sont pas si nombreux. Je peux en témoigner car j'ai souvent été sollicité pour
mener une action de médiateur. Certes, il peut y avoir des conflits et parfois
des erreurs de jugement. Mais l'institution française de l'architecture des
Bâtiments de France repose en substance sur le jugement que porte un homme de
l'art, qui possède une formation, une culture propres, qui a l'habitude de
traiter les dossiers à l'écart des pressions. Car il est bien évident que toute
toute décision de construire donne lieu à des débats, à à des pressions et à
des conflits d'intêrets. C'est ce qui rend le métier d'architecte des Bâtiments
de France très difficile à exercer. Il serait caricatural de considérer que les
débats se résument à des oui et des non !
Quel maire n'est pas intervenu sur un dossier important et n'a pas mené une
action de médiation, lorsqu'il s'agit, par exemple, de construire un édifice
aux abords d'une cathédrale ou dans un secteur particulièrement protégé et
intéressant sur les plans architectural et historique ?
Comme ils le reconnaissent souvent eux-mêmes, les pétitionnaires sont plus
gênés par les délais et les contradictions que par les refus. N'oublions pas
qu'un dialogue s'établit entre le pétitionnaire et l'architecte des Bâtiments
de France.
L'architecte des Bâtiments de France n'est pas un roi isolé. Il travaille en
équipe, reçoit les pétitionnaires, mène le processus d'instruction du permis de
construire, notamment avec les autres administrations, avec lesquelles il est
souvent en désaccord. Il y a toute une dialectique et tout un dialogue dans
l'instruction des permis de construire en France. Avec la mesure proposée, nous
risquerions de rendre les opérations encore plus longues et conflictuelles.
Déjà très émue, la profession serait alors démotivée. Dans l'esprit des
architectes des Bâtiments de France, l'amendement Fauchon n'est pas passé
inaperçu. Ils sont très inquiets et à juste titre, car le dialogue qu'ils
entretiennent avec les pétitionnaires ne sera pas facilité. Il sera au
contraire pénalisé par la procédure de recours telle qu'elle est proposée dans
l'amendement n° 163.
Je regrette de ne pouvoir suivre la commission. Je tenais à en expliquer très
sincèrement les raisons.
M. Robert Bret.
C'est le bon sens !
M. Philippe Marini.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini.
Je voudrais exprimer une opinion contraire à celle de M. Lachenaud.
J'administre pour ma part une ville dont le territoire est couvert, pour la
plus grande partie, par les zones de protection d'édifices classés ou inscrits.
Après quinze années de mandat de maire, je puis, dans l'ensemble, rendre
hommage à l'action, au savoir et aux manières de procéder des architectes des
Bâtiments de France. Selon mon expérience, il s'agit, dans la plupart des cas,
de professionnels qui jouent un rôle extrêmement utile en matière de conseil,
de mise en valeur, ainsi que de bonne compréhension des exigences du cadre
urbain et de l'esthétique.
Cela étant, bien entendu, l'architecte des Bâtiments de France, comme tout un
chacun, comme le maire lui-même, ne jouit pas de l'infaillibilité, et il est
des situations où un désaccord peut légitimement s'exprimer. Ainsi, il est tout
à fait concevable qu'un maire, connaissant très précisément sa ville et le
contexte historique et animé d'une volonté de mise en valeur et de
préservation, puisse ne pas du tout être de l'avis de l'architecte des
Bâtiments de France, par exemple sur la remise à jour ou non des pans de bois
d'une maison, sur le respect, en situation de covisibilité, d'un édifice
historique voisin ou sur tout autre cas de figure que nous sommes susceptibles
de rencontrer dans nos communes et dans nos paysages.
Il est donc nécessaire qu'une voie de recours soit prévue, mais celle-ci doit
être accessible au plus près de la réalité. En effet, pourquoi passer à
l'échelon régional si l'on peut rester à celui du département ? Pourquoi
refuser, monsieur le ministre, le dispositif très ouvert et très collégial qui
a déjà été adopté par le Sénat et qui est de nouveau préconisé par la
commission des affaires culturelles ? La commission dont il est question est
parfaitement pluraliste, et chacun y participera avec sa sensibilité esthétique
: on ne peut prétendre que sa composition puisse susciter des jeux d'influence
ou engendrer je ne sais quelle confusion.
Ainsi, l'amendement prévoit que la commission départementale du patrimoine
comprendra, outre le représentant de l'Etat dans le département ou son
représentant, le directeur régional des affaires culturelles ou son
représentant, un architecte des Bâtiments de France, deux membres élus par le
conseil général, un maire désigné par le président de l'association
départementale des maires et deux personnalités qualifiées, l'une étant
désignée par le préfet, l'autre par le président du conseil général. Un très
large pluralisme sera donc assuré, et nous avons l'assurance que toutes les
sensibilités esthétiques et historiques pourront s'exprimer. Pourquoi
faudrait-il que le monopole en la matière soit accordé à un préfet ? Mes chers
collègues, j'ai beaucoup d'estime et de respect pour les préfets qui ont servi
dans le département que je représente ; il est d'illustres préfets, mais pour
quelle raison seraient-ils infaillibles ?
En réalité, la responsabilité sur le plan local de l'architecte des Bâtiments
de France tient au fait qu'il s'agit d'un homme de l'art, mais le préfet,
représentant de l'Etat dans le département, n'est pas un homme de l'art, pas
davantage en tout cas que le maire de la commune ou que le président du conseil
général : c'est un fonctionnaire d'autorité, qui adoptera peut-être une
position pour le seul motif de faire plaisir ou de déplaire à Pierre ou à Paul.
Je préfère de beaucoup, pour ma part, que l'on instaure une commission
départementale pluraliste, émettant un avis et s'exprimant par un vote. Cela
représenterait, à mon sens, une meilleure garantie pour les pétitionnaires et
pour les maires, ainsi que pour le respect de nos paysages, de notre patrimoine
historique et de notre identité.
C'est la raison pour laquelle, en ce qui me concerne et à rebours de l'opinion
certainement très légitime, mais que je ne partage pas, de notre collègue
Jean-Philippe Lachenaud, je voterai avec conviction l'amendement qui a été
présenté tout à l'heure par M. Darcos.
M. Xavier Darcos,
rapporteur pour avis.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Darcos, rapporteur pour avis.
M. Xavier Darcos,
rapporteur pour avis.
Je crois nécessaire de
bien préciser que, pour la commission des affaires culturelles, il ne
s'agissait pas du tout de dresser ici un réquisitoire contre les architectes
des Bâtiments de France, ni d'émettre des doutes sur leurs compétences ou sur
la pertinence de leurs avis.
Nous ne cherchons nullement, monsieur Dauge, à alimenter un conflit potentiel
avec eux. Il nous a simplement paru logique et conséquent de reprendre, à
l'instar d'ailleurs de la commission des lois de l'Assemblée nationale, un
texte voté par le Sénat et approuvé par le Gouvernement, mais qui n'a
finalement pas été adopté, et de mettre en conformité avec son intitulé le
projet de loi que nous examinons depuis si longtemps.
En effet, puisqu'il s'agit de démocratie de proximité, quoi de plus logique,
dans les très rares cas où apparaît un conflit entre l'architecte des Bâtiments
de France et les élus d'une commune, qu'une commission pluraliste, comme vient
de l'expliquer très clairement notre collègue Philippe Marini, se réunisse pour
discuter ?
Je suis tout à fait surpris que ce point suscite un tel débat. Je crois en
tout cas de mon devoir de redire, au nom de la commission des affaires
culturelles, que nous ne faisons pas du tout ici le procès des architectes des
Bâtiments de France.
M. Philippe Richert.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert.
Cet amendement représente tout simplement pour nous l'occasion d'évoquer une
nouvelle fois les voies de recours contre une décision. Ce n'est ni la
procédure ni le travail des architectes des Bâtiments de France qui font
aujourd'hui l'objet du débat : ces derniers continueront, demain comme hier, à
faire leur travail avec les compétences et le savoir qui sont les leurs, afin
de protéger nos espaces et nos monuments.
Voilà plusieurs années, une procédure de recours a été instaurée. Or, lorsque
pour la première fois nous avons été amenés, par le biais de l'examen d'une
proposition de loi, à créer une telle procédure, cela a suscité l'émoi de
l'ensemble des intervenants dans le domaine du patrimoine.
Nous avions alors mis en place une commission régionale, en prévoyant une
possibilité de recours uniquement ouverte aux maires et aux autorités qui
délivrent les permis. En effet, par cette restriction, nous souhaitions prendre
un peu de recul et éviter que les recours ne soient formés en trop grand
nombre. Trois ans plus tard, nous pouvons constater, les uns et les autres, que
les décisions des architectes des Bâtiments de France n'ont fait l'objet que
d'une dizaine de recours chaque année.
Cela étant, la proposition qui est aujourd'hui formulée répond en fait à trois
objectifs différents.
L'amendement vise en premier lieu à rééquilibrer la composition de la
commission. En effet, lors de l'examen de la proposition de loi que j'ai
évoquée, nous avions souhaité que les collèges soient équilibrés. Or nous avons
constaté, lors de la publication des décrets, que cette volonté n'avait pas été
respectée. Je crois d'ailleurs savoir que Mme le ministre de la culture et de
la communication est favorable à ce rééquilibrage de la commission.
L'amendement prévoit en deuxième lieu que le recours pourra désormais être
introduit non seulement par l'autorité qui délivre le permis, mais également
par le pétitionnaire lui-même : c'est là une mesure tendant à favoriser
l'exercice de la démocratie, à laquelle Mme le ministre de la culture et de la
communication s'était aussi déclarée favorable. Les différentes parties sont
donc d'accord sur l'essentiel.
L'amendement a pour objet, en troisième lieu, d'instaurer une commission
départementale. C'est précisément ce point qui fait débat, certains souhaitant
maintenir une commission régionale assortie d'un conseil départemental. Le cas
échéant, nous pourrions aborder à nouveau ce sujet en commission mixte
paritaire.
En tout état de cause, les trois dispositions prévues par l'amendement n° 163,
à savoir le rééquilibrage de la commission, le passage à l'échelon
départemental et la possibilité, pour le pétitionnaire, de former un recours,
ne devraient pas, à mon sens, amener un blocage. Je conclurai mon intervention
en réaffirmant notre soutien aux architectes des Bâtiments de France.
M. Pierre Fauchon.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fauchon.
M. Pierre Fauchon.
Ceux qui ont suivi l'évolution de ce dossier savent que j'y suis
particulièrement intéressé et que je me trouve être à l'origine de la
proposition de loi examinée et adoptée voilà quelques mois par la commission
des affaires culturelles.
Cela étant, à ce stade du débat, si je n'ai pas grand-chose à ajouter aux
excellents propos tenus par MM. Marini et Richert, je voudrais préciser quel
esprit sous-tendait mon texte.
A la suite des orateurs qui m'ont précédé, je tiens tout d'abord à rendre
hommage au travail des architectes des Bâtiments de France. Ceux-ci disposent
de peu de moyens, alors qu'ils doivent traiter de multiples problèmes, qu'ils
passent beaucoup de temps sur les routes et qu'ils assument de leur mieux une
lourde charge.
Cependant, il n'en demeure pas moins que, avec le dispositif de protection des
sites dans un rayon de 500 mètres et le concept singulier de « covisibilité »,
qui prête parfois à des interprétations dont le moins que l'on puisse dire est
qu'elles relèvent du pittoresque, on aboutit à des décisions tout à fait
étranges. Je ne donnerai pas d'exemples à cet égard, pour ne pas prolonger à
l'excès un débat qui, paraît-il, dure depuis déjà trop longtemps...
M. Philippe Marini.
C'est un débat important !
M. Alain Gournac.
Très important !
M. Pierre Fauchon.
Quoi qu'il en soit, ces décisions ne sont plus comprises ni admises, si bien
que l'on en arrive, je peux en témoigner dans mon département, à ne plus
demander d'autorisation, parce que l'on sait que la réponse sera toujours
négative. On entre alors, en pratique, dans une zone de non-droit...
M. Yves Fréville.
Absolument !
M. Pierre Fauchon.
... et le système ne fonctionne plus, plus personne n'introduisant de
recours.
Je crois donc, comme M. Marini, que l'on doit installer des commissions, qui
doivent bien entendu être départementales, monsieur le ministre, puisque le
département représente par excellence la proximité : il est superflu d'y
insister, d'ailleurs les architectes des Bâtiments de France oeuvrent à
l'échelon départemental.
J'ajouterai que, dans mon esprit, cela permettra de sortir de cette relation,
qui vient de si loin dans notre histoire, entre l'autorité et l'administré,
selon laquelle la première décide et le second s'exécute, fraude ou biaise...
Nous allons entrer dans l'ère de la coresponsabilité. Les élus locaux, dont
vous avez parlé tout à l'heure, monsieur le ministre, sont, tout autant que
d'autres, responsables de ce qui se passe sur le territoire qu'ils représentent
et soucieux de veiller à ce que l'on n'y fasse pas n'importe quoi. Se
développeront alors, après quelques années, une pratique, une analyse des
problèmes, un dialogue, un échange de points de vue qui permettront de dégager
des lignes de conduite stables, alors que celles-ci, actuellement, changent au
gré du fonctionnaire investi de l'autorité.
Si nous votons cet amendement, la démocratie de proximité progressera de
manière importante, à la plus grande satisfaction de tous ceux qui, comme nous
tous, sont attachés à la beauté et au charme de nos paysages.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. Patrick Lassourd.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd.
Maire d'une petite commune dont 95 % du territoire est compris dans un rayon
de 500 mètres autour d'une dizaine de maisons inscrites, je veux souligner
l'importance que peut avoir l'intervention de l'architecte des Bâtiments de
France pour la préservation et la mise en valeur du patrimoine.
Or, parfois, les choses se passent d'une façon curieuse et je constate qu'il y
a une très grande différence d'un département à l'autre.
Je voterai l'amendement proposé par M. Darcos. Compte tenu de mon expérience
et de ce que je vois dans mon département, je vais tenter de vous dire pourquoi
la proposition qu'il présente est nécessaire. En Ille-et-Vilaine, l'architecte
des Bâtiments de France se moque totalement des délais réglementaires.
M. Yves Fréville.
Tout à fait !
M. Patrick Lassourd.
Actuellement - et j'en ai parlé ce matin au préfet - deux permis de construire
datant respectivement du 7 septembre et du 8 octobre dernier n'ont reçu aucune
suite. Si nous sommes contraints de mettre en place des contrepouvoirs, des
commissions de contestation, c'est - et là je m'adresse au ministre qui
représente le Gouvernement - parce que l'Etat ne se comporte pas bien, qu'il
s'agisse de sa fonction ou de sa responsabilité en la matière. Comment
expliquer que nous soyons confrontés à des architectes des Bâtiments de France
versatiles, qui, à quelques mois d'intervalle, donnent des réponses différentes
à la même question concernant le même terrain, le même bâtiment ? Comment
peut-on concevoir des architectes des Bâtiments de France qui cultivent le
mépris le plus total vis-à-vis des élus et des pétitionnaires et qui font
preuve d'un égal mépris en ce qui concerne les délais ?
M. René-Pierre Signé.
C'est un problème local !
M. Patrick Lassourd.
Il s'agit d'un problème général, mon cher collègue ! Je suis ici pour le
dénoncer. Si les architectes des Bâtiments de France se comportaient bien, nous
ne serions pas obligés de mettre en place ce type de commission. L'Etat,
quelque part, est responsable en n'y consacrant pas les moyens suffisants, tant
sur le plan matériel que sur le plan humain, et en n'obligeant pas les
architectes des Bâtiments de France à respecter la réglementation en
vigueur.
M. Jean Bizet.
Très bien !
M. Alain Gournac.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gournac.
M. Alain Gournac.
J'ai écouté l'ensemble de mes collègues, notamment MM. Marini et Fauchon, et
je soutiendrai la proposition de M. Xavier Darcos.
Je viens d'entendre le mot « contre-pouvoir », que je ne voudrais pas voir
subsister. Nous n'instaurons pas un contre-pouvoir. Nous mettons simplement en
place la possibilité, pour le pétitionnaire, de s'exprimer, de savoir ce qui se
passe, de connaître les motifs pour lesquels il y a un blocage.
Certains ont dit que la situation varie d'un département à l'autre. Je suis
élu du département des Yvelines où les choses se passent formidablement
bien.
M. René-Pierre Signé.
C'est ce que je disais !
M. Alain Gournac.
Il ne s'agit pas d'une question de personne. En effet, nous avons changé trois
fois d'architecte des Bâtiments de France et, à chaque fois, nous sommes tombés
sur des gens compétents, avec qui on pouvait discuter.
M. René-Pierre Signé.
Il y a des élus heureux !
M. Alain Gournac.
Ce texte a surtout pour objet d'améliorer les choses et de donner la
possibilité de s'exprimer.
La dernière fois que cette question a été évoquée ici même, les architectes
des Bâtiments de France avaient mal perçu le message du Sénat. Je ne voudrais
pas qu'aujourd'hui la même situation se reproduise. Je déclare qu'ils font un
travail formidable. La proposition de M. Darcos n'a rien à voir avec la qualité
du travail réalisé par les architectes des Bâtiments de France.
Plusieurs sénateurs du RPR.
Très bien !
M. Robert Bret.
Ce n'est pas ce que disent certains de vos collègues !
M. René-Pierre Signé.
Voilà la pluralité de la droite !
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Chacun le constate, ce sujet suscite de nombreuses prises de parole, et il
fera sans doute encore couler beaucoup d'encre.
Monsieur le ministre, soyez plus attentif aux attentes des élus que sont les
sénateurs. Ils bénéficient d'une véritable expérience de terrain et ils se font
l'écho de l'expérience vécue par l'ensemble des élus locaux, les maires et les
conseillers généraux. Il serait bon que vous vous inspiriez de leurs
propositions et de leur réflexion.
M. Patrick Lassourd.
Très bien !
M. Alain Vasselle.
Je me réjouis que l'on instaure cette commission départementale. En effet, les
professionnels qui y siégeront permettront, sans aucun doute, d'émettre un avis
objectif sur le projet concerné, en tout cas certainement plus objectif que si
l'on s'en remettait à une seule personne, quelles que soient sa bonne volonté
et les précautions quelle aurait prises. Cependant, je ne voudrais pas que
cette nouvelle disposition législative entraîne un allongement du délai
d'instruction des dossiers. En effet, comme M. Lassourd l'a très justement dit,
nous souffrons, à l'heure actuelle, de l'inertie dont fait souvent preuve
l'architecte des Bâtiments de France, non parce qu'il souhaite cette inertie
mais parce qu'il manque de moyens pour agir.
J'en ai fait l'expérience dernièrement, puisque le conseil général de l'Oise a
lancé des opérations - elles ont d'ailleurs causé quelques difficultés ou
quelques aventures judiciaires à certains maires - d'intérêt départemental de
restauration des monuments historiques que sont les églises, qu'elles soient
classées ou non classées, qu'elles soient inscrites ou non à l'inventaire. J'ai
constaté qu'il y avait des divergences de vues entre le conservateur régional
des monuments historiques et l'architecte des Bâtiments de France. Menant cette
opération dans mon canton, j'ai dû réunir l'architecte des Bâtiments de France,
le conservateur régional des monuments historiques et les représentants de la
DRAC, la direction régionale des affaires culturelles. En qualité d'élu, ainsi
ai-je dû prendre l'initiative de réunir à la fois des représentants de l'Etat,
c'est-à-dire des services de la DRAC, le conservateur régional et l'architecte
des Bâtiments de France pour qu'ils puissent enfin parler d'une seule voix pour
satisfaire les besoins de nos collectivités.
Cette expérience que j'ai vécue et qui remonte à une huitaine de jours
démontre, à mon avis, la nécessité de mettre en place une commission
départementale qui permettra d'éviter de faire traîner en longueur des avis et
de bloquer ainsi un certain nombre de dossiers.
C'est la raison pour laquelle M. Darcos, fort de l'expérience que chacun lui
connaît, et la commission des lois ainsi que la commission des affaires
culturelles n'ont pas agi d'une façon aventureuse en faisant cette proposition.
Le Sénat serait heureusement inspiré de voter la disposition qui lui est
proposée.
Cependant monsieur le ministre, si entre-temps vous pouviez conforter les
moyens des architectes des Bâtiments de France, chacun ne pourrait que s'en
féliciter.
MM. François Gerbaud et Philippe Marini.
Très bien !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 163, accepté par la commission et repoussé
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 43 I, et l'amendement n° 593 n'a plus d'objet.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
L'amendement n° 263 rectifié, présenté par M. Ambroise Dupont et les membres
du groupe des Républicains et Indépendants, et ainsi libellé :
« Après l'article 43 I, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La première phrase du deuxième alinéa du III de l'article 9 de la loi
n° 2001-44 du 17 janvier 2001 relative à l'archéologie préventive est ainsi
rédigée :
« Sont exonérés du paiement de la redevance, sur décision de l'établissement
public, les travaux d'aménagement exécutés par une collectivité territoriale ou
un établissement public de coopération intercommunale, lorsque cette
collectivité ou cet établissement public de coopération intercommunale est doté
d'un service archéologique agréé par l'Etat dans des conditions définies par
décret en Conseil d'Etat et qu'elle ou il réalise, à la demande de
l'établissement public, les opérations archéologiques prescrites. »
« II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées, à due
concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
L'amendement n° 404 rectifié, présenté par M. Richert et les membres du groupe
de l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Après l'article 43 I, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La première phrase du deuxième alinéa du III de l'article 9 de la loi
n° 2001-44 du 17 janvier 2001 relative à l'archéologie préventive est ainsi
rédigée :
« Sont exonérés du paiement de la redevance, sur décision de l'établissement
public, les travaux d'aménagement exécutés par les collectivités territoriales
ou leurs groupements pour eux-mêmes, lorsque ces collectivités ou ces
groupements sont dotés d'un service archéologique agréé par l'Etat dans des
conditions définies par décret en Conseil d'Etat et qu'ils réalisent, à la
demande de l'établissement public, les opérations archéologiques prescrites.
»
« II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées, à due
concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est M. Ambroise Dupont, pour défendre l'amendement n° 263
rectifié.
M. Ambroise Dupont.
Il s'agit de réparer une petite omission dans la loi du 17 janvier 2001
relative à l'archéologie préventive.
Cette loi permet aux collectivités locales d'être pour partie ou pour le tout
exonérées de la redevance archéologie préventive lorsqu'elles disposent d'un
service archéologique qui réalise tout ou partie des opérations préventives sur
des terrains aménagés par elles.
Cependant, la loi ne prévoit rien pour les communautés de communes qui, par
délégation, auraient ce pouvoir. Il me semble que c'est une lacune car les
communautés de communes ou les communautés d'agglomération sont aujourd'hui
souvent chargées de l'urbanisme.
M. le président.
La parole est à M. Richert, pour présenter l'amendement n° 404 rectifié.
M. Philippe Richert.
Cet amendement répond aux mêmes objectifs que le précédent et ne présente avec
celui-ci qu'une différence de formulation : M. Ambroise Dupont vise les
établissements publics de coopération intercommunale alors que je mentionne les
groupements. Les deux concepts se rejoignant, je retire mon amendement au
profit de celui qu'il a présenté.
M. le président.
L'amendement n° 404 rectifié est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 263 rectifié ?
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
La commission émet un avis favorable sur l'amendement n° 263
rectifié qui, comme l'amendement n° 404 rectifié, vise à réparer un oubli. Si
M. Richert a accepté de retirer son amendement, il reste associé à
l'initiative.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 263 rectifié ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Pour ne rien vous cacher, si M. Richert avait
maintenu son amendement, j'aurais émis un avis favorable et j'aurais levé le
gage. Puisqu'il l'a retiré, je n'en ai plus la possibilité...
Même si l'amendement n° 263 rectifié me semble moins convaincant, j'émettrai
néanmoins un avis favorable.
M. Michel Charasse.
Et le gage ?
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Et j'irai jusqu'à lever le gage !
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 263 rectifié
bis
, présenté par M.
Ambroise Dupont et les membres du groupe des Républicains et Indépendants, et
ainsi libellé :
« Après l'article 43 I, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« La première phrase du deuxième alinéa du III de l'article 9 de la loi n°
2001-44 du 17 janvier 2001 relative à l'archéologie préventive est ainsi
rédigée :
« Sont exonérés du paiement de la redevance, sur décision de l'établissement
public, les travaux d'aménagement exécutés par une collectivité territoriale ou
un établissement public de coopération intercommunale, lorsque cette
collectivité ou cet établissement public de coopération intercommunale est doté
d'un service archéologique agréé par l'Etat dans des conditions définies par
décret en Conseil d'Etat et qu'elle ou il réalise, à la demande de
l'établissement public, les opérations archéologiques prescrites. »
Je mets aux voix l'amendement n° 263 rectifié
bis
, accepté par la
commission et par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 43 I.
Article additionnel avant l'article 43 J