SEANCE DU 30 NOVEMBRE 2001
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. SERGE VINÇON
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Loi de finances pour 2002.
- Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
1
).
Economie, finances et industrie
SERVICES FINANCIERS (ET CONSOMMATION) (p.
2
)
M. Bernard Angels, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme
Odette Terrade, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques
pour la consommation et la concurrence ; M. Yves Coquelle.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.
Vote des crédits réservé.
Articles 66 et 67. - Adoption (p.
3
)
Suspension et reprise de la séance
(p.
4
)
industrie (et poste) (p.
5
)
MM. Jean Clouet, rapporteur spécial de la commission des finances ; Francis
Grignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques pour
l'industrie ; Jean Besson, rapporteur pour avis de la commission des affaires
économiques pour l'énergie ; Pierre Hérisson, rapporteur pour avis de la
commission des affaires économiques pour les technologies de l'information et
La Poste ; Pierre Laffitte, Max Marest, Yves Coquelle, Pierre-Yvon Trémel,
Jean-Pierre Raffarin, Gérard Delfau, Roger Rinchet, Ladislas Poniatowski.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.
Crédits du titre III. - Vote réservé (p.
6
)
Crédits du titre IV (p.
7
)
MM. Yves Coquelle, le secrétaire d'Etat.
Vote des crédits réservé.
Crédits des titres V et VI. - Vote réservé (p.
8
)
Article 67
quater
(p.
9
)
M. Yves Coquelle,
Adoption de l'article.
Suspension et reprise de la séance (p. 10 )
PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS
PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES,
COMMERCE ET ARTISANAT (p.
11
)
MM. Auguste Cazalet, rapporteur spécial de la commission des finances ; Gérard Cornu, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Joseph Ostermann, Mme Odette Terrade, MM. Bernard Dussaut, Serge Mathieu, Christian Demuynck, Pierre-Yvon Trémel.
Suspension et reprise de la séance (p. 12 )
M. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au
commerce, à l'artisanat et à la consommation.
Vote des crédits réservé.
Article additionnel avant l'article 67 bis (p. 13 )
Amendement n° II-35 rectifié bis de M. Michel Bécot. - MM. Michel Bécot, le rapporteur spécial, le secrétaire d'Etat, Gérard Cornu, Jean-Philippe Lachenaud, Yves Fréville. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 67
bis.
- Adoption (p.
14
)
Article 67
ter
(p.
15
)
Amendements n°s II-24 de la commission et II-9 rectifié bis de M. Georges Mouly. - MM. le rapporteur spécial, Gérard Delfau, le secrétaire d'Etat, Mme Odette Terrade, MM. Jean Chérioux, Gérard Delfau, Yves Fréville, Gérard Cornu. - Adoption de l'amendement n° II-24 rédigeant l'article, l'amendement n° II-9 rectifié bis devenant sans objet.
Suspension et reprise de la séance
(p.
16
)
COMMERCE EXTÉRIEUR (p.
17
)
MM. Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances ; Michel
Bécot, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Mme
Odette Terrade, M. François Marc.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat au commerce extérieur.
Crédits du titre III (p. 18 )
M. Auguste Cazalet, au nom de la commission des finances.
Rejet des crédits par scrutin public.
Crédits des titres IV à VI. - Rejet (p.
19
)
CHARGES COMMUNES
ET COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR (p.
20
)
MM. Yves Fréville, rapporteur spécial de la commission des finances pour les
charges communes ; Paul Loridant, rapporteur spécial de la commission des
finances pour les comptes spéciaux du Trésor ; Thierry Foucaud, François
Marc.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.
CHARGES COMMUNES (p.
21
)
Crédits du titre Ier (p.
22
)
Amendement n° II-36 du Gouvernement. - Mme le secrétaire d'Etat, M. Yves
Fréville, rapporteur spécial. - Adoption.
Rejet des crédits.
Crédits du titre II. - Adoption (p.
23
)
Crédits du titre III. - Rejet (p.
24
)
Crédits du titre IV (p.
25
)
Amendement n° II-37 du Gouvernement. - Adoption.
Rejet des crédits.
Article 64 ter (p. 26 )
Amendement n° II-23 de la commission. - M. Yves Fréville, rapporteur spécial ; Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR (p.
27
)
Article 35 - Adoption (p.
28
)
Article 36 (p.
29
)
Amendement n° II-39 du Gouvernement. - Mme le secrétaire d'Etat, M. Paul
Loridant, rapporteur spécial. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles 37 à 41. - Adoption (p.
30
)
Article 41
bis
(p.
31
)
Amendement n° II-38 du Gouvernement. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article 42 - Adoption (p.
32
)
Services du Premier ministre
I. - SERVICES GÉNÉRAUX (p.
33
)
MM. François Marc, rapporteur spécial de la commission des finances ; Thierry
Foucaud, Yann Gaillard.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.
Vote des crédits réservé.
Article 77 (p. 34 )
Amendements n°s II-41 à II-46 de la commission. - M. le rapporteur spécial, Mme
le secrétaire d'Etat, MM. Jean-Philippe Lachenaud, Maurice Blin. - Adoption des
six amendements.
Adoption de l'article modifié.
II. - SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DE LA DÉFENSE NATIONALE (p. 35 )
MM. Michel Moreigne, rapporteur spécial de la commission des finances ; Gérard
Delfau.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.
Crédits des titres III et V. - Adoption (p.
36
)
Suspension et reprise de la séance
(p.
37
)
III. - CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL (p.
38
)
M. Claude Lise, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme
Marie-Claude Beaudeau.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.
Crédits des titres III et V. - Adoption (p.
39
)
IV. - PLAN (p.
40
)
MM. Claude Haut, rapporteur spécial de la commission des finances ; Jean-Paul
Alduy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Mme
Evelyne Didier.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.
Crédits des titres III, IV et VI. - Adoption (p.
41
)
Budget annexe des monnaies et médailles
(p.
42
)
M. Bertrand Auban, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme
Marie-Claude Beaudeau.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.
Adoption des crédits figurant aux articles 33 et 34.
Budget annexe des Journaux officiels (p. 43 )
M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme
Marie-Claude Beaudeau.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.
Adoption des crédits figurant aux articles 33 et 34.
3.
Transmission de propositions de loi
(p.
44
).
4.
Ordre du jour
(p.
45
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. SERGE VINÇON
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
LOI DE FINANCES POUR 2002
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2002 (n° 86, 2001-2002), adopté par l'Assemblée nationale. [Rapport n° 87 (2001-2002).]
Economie, finances et industrie
SERVICES FINANCIERS (ET CONSOMMATION)
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
les services financiers (et la consommation.)
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Bernard Angels,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, madame la
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les crédits des services financiers,
dont l'identification est difficile dans le bleu budgétaire, restent
relativement stables, à 10,5 milliards d'euros.
Je tiens à saluer l'effort de sincérité budgétaire réalisé par le ministère
sur ses crédits. Je constate que mes remarques pour l'appeler à davantage
d'orthodoxie budgétaire ont été prises en compte, ce dont je me réjouis, bien
entendu. Plusieurs milliards d'euros, tant en dépenses qu'en recettes, ont été
rebudgétisés en trois ans.
Quelques points mineurs restent à souligner. Tout d'abord, je fais miennes les
observations de la Cour des comptes qui, dans son rapport sur l'exécution des
lois de finances pour 2000, relève un nombre important de fonds de concours
modestes ou inactifs et se prononce pour la budgétisation totale des dépenses
et recettes des hypothèques. J'appelle d'ailleurs à la nécessaire réforme du
régime archaïque de rémunération des conservateurs des hypothèques.
Je m'interroge ensuite sur la pertinence de l'inscription des dépenses
informatiques les plus lourdes, correspondant à des projets pluriannuels, en
fonctionnement plutôt qu'en investissement.
Dans un contexte où chacun déplore la baisse des investissements de l'Etat,
l'inscription des programmes informatiques les plus lourds en investissement,
conformément aux règles du plan comptable général, permettrait à chacun de
prendre en compte une définition rénovée de ce qu'est aujourd'hui un
investissement.
Je m'interroge également sur la nécessité de maintenir sur le budget des
charges communes plutôt que sur celui du ministère les frais de poursuite et de
contentieux des administrations fiscales. Les réponses que j'ai reçues à ce
sujet ne m'ont pas entièrement convaincu.
Enfin, je crois qu'une réelle individualisation des missions du ministère est
nécessaire. En effet, la pratique actuelle consistant à fondre les moyens de
fonctionnement de l'industrie, des PME et de certaines services financiers dans
une enveloppe commune n'est pas acceptable.
S'agissant des grands chantiers engagés par Bercy, le ministère de l'économie
et des finances sera le maître d'oeuvre de la nouvelle gestion publique induite
par la loi organique du 1er août 2001, qu'il s'essaie d'ores et déjà à traduire
dans son fascicule budgétaire pour 2002. J'y insiste, c'est une très bonne
chose.
Un certain nombre d'agrégats, qui ne sont pas tous, loin de là, des missions
et des programmes au sens de la loi organique, présentent des objectifs et des
indicateurs souvent chiffrés.
Si les résultats sont inégaux et doivent être nuancés, je note que les
directions qui réussissent le mieux l'exercice sont celles qui ont signé des
contrats d'objectifs moyens avec, au premier rang, la direction générale des
impôts. Elles ont, en effet, davantage réfléchi à la définition de leurs
missions et aux moyens de les évaluer, et je regrette que les directions
chargées du recouvrement de l'impôt n'aient pas adopté les mêmes objectifs et
indicateurs de résultats.
Participant pleinement de la nouvelle gestion publique, la réforme du
ministère de l'économie et des finances ne mérite pas - je tiens à le souligner
- l'opprobre dont on l'accable trop souvent.
Je résumerai, pour ma part, la situation ainsi : malgré une volonté affirmée
de réforme, celle-ci peine à trouver son chemin. Le programme de modernisation
affiche un pragmatisme mesuré, mais 92,5 millions d'euros y seront tout de même
consacrés en 2002. Le catalogue de mesures prises et à prendre est
impressionnant, comme le montre le relevé de décision du dernier comité
technique paritaire du 18 octobre.
Je terminerai mon propos en dressant quelques constats.
Premier constat, les conditions de la réforme sont réunies. Le grand ministère
de Bercy, qui a absorbé l'industrie mais aussi les PME, peut faire jouer les
synergies entre les différentes directions. De la même manière, le rôle et
l'action d'un « M. Réforme » en la personne de M. Pêcheur, secrétaire général
du ministère, disposant de véritables leviers sur les moyens à la fois
budgétaires et humains, se révèlent essentiels.
Deuxième constat, les nouvelles technologies n'ont pas encore suffisamment
pénétré le fonctionnement des services du ministère.
Certes, son site Internet est un succès. Il a renforcé la communication du
ministère ainsi que sa culture de service avec la mise en ligne de 540
formulaires touchant aux formalités des entreprises, ou avec le lancement de
téléprocédures pour lesquelles le ministère de l'économie et des finances est
en pointe par rapport aux autres administrations.
J'ajouterai cependant quelques bémols : ces services, y compris lorsqu'ils
s'adressent à de grandes entreprises, n'ont pas encore trouvé leur public.
En ce qui concerne l'usage des nouvelles technologies, seuls 60 000 agents
sont connectés et le plan qui prévoit d'en connecter 180 000 d'ici à juin 2002
me semble ambitieux.
Enfin, si le projet d'informatique commune aux directions a pris quelque
retard, il n'en demeure pas moins indispensable.
Troisième constat, le ministère de l'économie et des finances doit mieux
maîtriser sa sous-traitance. Un récent rapport de l'inspection générale des
finances a montré que ce n'était pas le cas à la direction de la communication.
De même, l'incident survenu en septembre dernier lors de l'envoi des feuilles
d'imposition aux contribuables mensualisés me conduit à penser que la
sous-traitance doit faire l'objet d'une attention plus importante de la part
des gestionnaires de contrats.
Quatrième et dernier constat, je regrette que les très nombreuses
expérimentations initiées par Bercy n'aient pas toutes abouti à des mesures
concrètes. On peut saluer la création, le 1er janvier 2002, d'une direction des
grandes entreprises au sein de la direction générale des impôts, ainsi que le
projet de fusion des services financiers à l'étranger.
Pour le reste, seul un petit nombre d'expérimentations, au demeurant fort
intéressantes, ont jusqu'à présent donné lieu à évaluation, bilan, et surtout
décision.
En conclusion, la réforme du ministère me paraît au coeur de la modernisation
de l'Etat. S'agissant en effet du ministère de l'économie et des finances,
compte tenu des compétences exceptionnelles dont il dispose, sa gestion doit
être exemplaire et montrer le chemin aux autres administrations.
Cette exemplarité doit également se manifester dans l'application de la
nouvelle loi organique relative aux lois de finances. Conformément à l'article
57 de ce texte, et un mois seulement avant la date d'application de cette
disposition, il serait bon, me semble-t-il, que le ministère me transmette les
rapports de l'inspection générale des finances que j'ai demandés.
Au vu de tous les points largement positifs de votre budget, madame le
secrétaire d'Etat, à titre personnel, j'invite le Sénat à l'adopter.
M. le président.
La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Odette Terrade,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan pour
la consommation et la concurrence.
Monsieur le président, madame la
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, c'est avec le souci permanent d'assurer
la protection du consommateur que la commission des affaires économiques et du
Plan a examiné les crédits consacrés à la consommation et à la concurrence. Ces
derniers atteignent 192 millions d'euros, au service d'un champ de
responsabilité que vous savez très large.
L'augmentation de 2,2 % des crédits - après une hausse de 5 % l'an passé -
manifeste la volonté du Gouvernement de préserver les moyens de contrôle de la
direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression
des fraudes, la DGCCRF, et d'accroître les moyens de l'Agence française de
sécurité sanitaire des aliments, l'AFSSA, ce dont je me félicite car la
priorité accordée à la sécurité sanitaire y gagne en crédibilité.
Ces crédits doivent également servir à soutenir l'action du mouvement
consumériste et celle de l'Institut national de la consommation, l'INC.
Je tiens à souligner, à ce propos, le rôle déterminant des associations de
consommateurs, qui leur fournissent information et soutien et qui les
représentent auprès des pouvoirs publics dans des instances sans cesse plus
nombreuses.
Madame la secrétaire d'Etat, je sais que vous comptez de plus en plus sur
elles pour accompagner votre politique, notamment le passage à l'euro, et pour
couvrir un champ d'intervention en pleine expansion. C'est pourquoi je déplore
que la subvention qui leur est accordée reste la même en 2002, pour la
troisième année consécutive, et ne représente que les trois quarts de son
niveau de 1990.
De surcroît, je regrette que les centres techniques régionaux de la
consommation, les CTRC, aient subi en 2001 une régulation budgétaire
compromettant leur précieuse présence de proximité auprès des
consom-mateurs.
J'attire également l'attention du Gouvernement sur la nécessité de donner à
l'INC les moyens de son redressement.
En effet, l'INC ne peut assurer efficacement ses missions, confirmées dans le
décret d'avril dernier, avec une subvention stabilisée à un niveau moitié
moindre que voilà dix ans !
Il lui faut sortir d'une crise qui a commencé en 1994, qui se traduit encore
par un déficit avéré en 2000 et annoncé en 2001 et dont le cumul épuisera
quasiment les réserves de l'établissement. Une dynamique est engagée, madame la
secrétaire d'Etat. Je demande au Gouvernement de la concrétiser. Un complément
annuel de subvention de plus de 1 million d'euros s'impose dès lors que le
contrat d'objectifs doit être respecté par l'INC.
En outre, aux dires de l'INC, seule une subvention exceptionnelle
significative peut lui permettre de développer son lectorat et d'équilibrer
ainsi durablement son activité éditoriale. Je compte sur vous, madame la
secrétaire d'Etat, pour aider cet établissement public industriel et
commercial, à l'occasion du vote du projet de loi de finances pour 2002 ou de
la loi de finances rectificative de 2001, car je connais les engagements du
Gouvernement en faveur des mouvements de consommateurs.
Permettez-moi maintenant de formuler quelques réflexions sur la politique de
protection des consom-mateurs.
La protection physique du consommateur passe par la nécessité de garantir la
sécurité des produits et des aliments. Il s'agit aujourd'hui d'une
préoccupation majeure pour nos concitoyens, dont la confiance a été ébranlée
par la multiplication des crises - je pense notamment à l'ESB,
l'encéphalopathie spongiforme bovine et le développement des
biotechnologies.
En réponse, la mobilisation des pouvoirs publics est restée forte en 2000,
avec l'intensification des contrôles tant nationaux que communautaires et
l'élaboration de nouvelles normes communautaires en matière de sécurité et de
traçabilité.
Je me félicite notamment de la nouvelle directive relative à la sécurité
générale des produits, mais je rappelle qu'il est urgent de créer une autorité
alimentaire européenne et d'harmoniser les réglementations relatives à la
sécurité alimentaire.
Au sujet de la traçabilité, je m'inquiète de son caractère très partiel,
souligné par le Conseil national de l'alimentation dans un récent avis. Il
conviendrait, madame la secrétaire d'Etat, d'établir, en concertation avec les
filières, les principes mêmes de la traçabilité et de préciser sa finalité,
informative ou sanitaire.
Pour ce qui est de la protection économique du consommateur, j'attire votre
attention sur trois aspects.
D'abord, il est impératif de renforcer la prévention du surendettement,
notamment par une meilleure information des consommateurs sur les dangers des
crédits renouvelables.
Ensuite, au titre de la protection des cyberconsommateurs, le chiffre
d'affaires du commerce électronique a encore triplé en France l'an passé, mais
la sécurisation des paiements et la protection des données personnelles sur le
réseau sont loin d'être assurées.
Enfin, l'introduction de l'euro sous la forme fiduciaire appelle une vigilance
particulière. Pour que cet événement ne signifie pas l'exclusion de
consommateurs parmi les plus vulnérables, il faut poursuivre l'effort de
pédagogie et surveiller les prix, afin d'éviter absolument une perte de pouvoir
d'achat.
Mes chers collègues, je serai plus brève sur la politique de la concurrence.
Je soulignerai surtout le rôle croissant et convergent des autorités nationales
et communautaires en amont et en aval du mouvement de concentration qui s'est
poursuivi en 2000. Je tiens à ce que les règles de concurrence soient
respectées dans la mesure où elles garantissent les intérêts des
consommateurs.
En conclusion, mes chers collègues, prenant acte de la volonté dont fait
preuve ce budget de préserver les moyens de la politique de la concurrence et
de la consommation, à titre personnel, je voterai ces crédits.
La commission des affaires économiques a, quant à elle, émis un avis
défavorable à l'adoption des crédits consacrés à la concurrence et la
consommation dans le projet de loi de finances pour 2002.
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Coquelle.
M. Yves Coquelle.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce
projet de budget des services financiers pour 2002 présente deux
caractéristiques essentielles.
Pour la première fois depuis de longues années, les effectifs budgétaires du
ministère ne sont pas en réduction. Malheureusement, il n'y a pas eu non plus
de création, malgré les besoins.
Cela paraît trancher quelque peu avec la situation des années antérieures. En
fait, ce n'est pas tout à fait le cas.
Quoi qu'il en soit, ce gel des effectifs budgétaires, à l'exception de ceux de
la direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des
fraudes, ne constitue pas réellement une avancée dans le fonctionnement des
services financiers de l'Etat.
Concernant l'Institut national de la consommation, l'INC, son conseil
d'administration unanime manifeste son inquiétude et souhaite un complément de
subvention au titre de l'année 2002 afin d'accomplir sa mission de service
public.
Ce budget s'inscrit pleinement dans le cadre d'une modernisation et d'une
restructuration de nos administrations financières qui ne peut manquer de nous
poser quelques questions, c'est la seconde caractéristique de ce budget.
La mise en oeuvre du dispositif Copernic, est au coeur de la conception du
budget 2002 des services financiers. Il s'agit ainsi de réduire quelque peu
l'implantation des différents services financiers sur le territoire sous
prétexte de rationaliser la définition des objectifs et des moyens
d'intervention.
Va-t-on assister à la disparition de certaines perceptions, notamment en
milieu rural, avec toutes les conséquences que cela implique sur la vie de nos
concitoyens dans la France profonde ?
Les enjeux ne sont pas secondaires : le réseau des centres des impôts,
l'implantation des services du Trésor public sont à la base des mouvements
économiques dans le pays ; par ailleurs, une bonne part de la gestion des
collectivités locales et des grands services publics dépend de l'efficacité des
services de la comptabilité publique, notamment dans leurs missions de conseil
et d'aide à la décision.
Nous étions très circonspects sur les attendus de la défunte « mission 2001 »,
nous sommes aujourd'hui très interrogatifs sur la portée des orientations qui
seront prises dans le cadre du programme Copernic.
Ce programme ne reçoit d'ailleurs pas l'adhésion des personnels, qui sont
pourtant un élément indispensable à la réussite de tout changement.
Nous ne sommes pas convaincus, madame la secrétaire d'Etat, que le devenir des
services publics réside dans une réduction de leur implantation ou de leurs
compétences de proximité, comme cela semble être la règle avec la montée en
charge du programme Copernic.
La France est, en effet, un pays où l'aménagement du territoire présente des
caractéristiques suffisamment particulières pour nécessiter des dispositions
spécifiques.
Cet enjeu d'aménagement du territoire, auquel sont très sensibles les élus
locaux - nombre de mes collègues en font quotidiennent l'expérience - couplé à
l'enjeu de l'action syndicale des personnels, soucieux de promouvoir un service
public de proximité pleinement efficace, nous amène naturellement à ne pas
voter les crédits des services financiers pour 2002.
Nous sommes contre ce budget, malgré les quelques efforts réalisés en matière
de réduction de la précarité du travail et de reclassement des agents, efforts
qui ne font cependant pas oublier l'essentiel, c'est-à-dire que les
administrations financières doivent être présentes sur le terrain et disposer
des moyens matériels et humains nécessaires à leur intervention.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat au budget.
Tout d'abord, je tiens à remercier le
rapporteur spécial, M. Angels, de sa contribution à l'étude du budget des
services financiers que nous examinons ce matin.
Ce budget s'articule autour de quelques orientations essentielles : le souci
de transparence, de lisibilité du budget et de simplification, la réforme de
l'Etat au service des citoyens, et le passage à l'euro.
M. le rapporteur spécial a beaucoup insisté dans son rapport sur la difficulté
de cerner, d'une année sur l'autre, le périmètre de ce que nous avons coutume
d'appeler les services financiers.
J'avoue que les calculs sont en effet souvent complexes. Je crois au demeurant
que les chiffres que vous présentez, et surtout les tendances qu'ils dessinent,
ne sont pas en contradiction avec ceux qui figurent dans le bleu budgétaire.
En tout cas, je partage votre souhait que la présentation budgétaire, issue de
la nouvelle loi organique, nous dispense, à l'avenir, d'établir des passerelles
aussi multiples qu'éphémères.
Toutefois, vous l'avez dit, notre effort de lisibilité est réel. Nous avons
regroupé, cette année, dans un nouvel agrégat « service de l'action régionale
pour la sécurité et la compétitivité industrielles » les moyens du réseau des
directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement,
les DRIRE, ainsi que sa structure de pilotage, la direction de l'action
régionale et de la petite et moyenne industrie, la DARPMI, afin d'assurer une
meilleure connaissance du couple missions-moyens de ce service.
Un autre effort de sécurité budgétaire, en quelque sorte, que vous avez
vous-même souligné a été réalisé avec l'achèvement de la rebudgétisation
entreprise depuis quelques années, en particulier dans le budget de 2001.
Il reste, certes, encore quelques fonds de concours. Treize d'entre eux ont
été supprimés en 2000 et 2001, et ceux qui demeurent ne sont pas, sur le fond,
contestés par la Cour des comptes.
Vous avez également insisté sur les conséquences de la mise en oeuvre de la
loi organique relative aux lois de finances, y compris pour le budget même du
ministère des finances. Il va de soi que le ministère des finances s'impliquera
totalement dans cette démarche, à la fois comme maître d'oeuvre et également
comme point d'application, en quelque sorte, de cette réforme.
Nous avons déjà engagé cette réforme, comme en témoigne la création de
l'Agence « France-Trésor » et la présentation dans le budget des charges
communes de la préfiguration du programme de la dette publique.
J'en viens maintenant à la modernisation du ministère. Pour ne rien vous
cacher, je vous ai trouvé un peu pessimiste, monsieur le rapporteur spécial, et
ce pour plusieurs raisons.
D'abord, le lancement de la démarche vers la constitution de « l'e-ministère
», c'est-à-dire l'utilisation accrue des nouvelles technologies, constitue pour
notre ministère un objectif tout à fait essentiel au cours des prochains mois
et des prochaines années. Evidemment, tous les objectifs ne sont pas atteints,
mais je crois que beaucoup a déjà été fait.
Il va de soi qu'il s'agit, pour nous, d'offrir des services supplémentaires
aux citoyens sans faire disparaître les autres modalités de contact avec eux.
Par ailleurs, conformément à votre souhait, monsieur le rapporteur spécial,
tous les agents du ministère de l'économie et des finances auront accès, en
2002, au réseau Intranet du ministère.
D'une manière générale, vous limitez l'aspect concret de la réforme et de la
modernisation. Je crois que c'est injustifié, d'autant que les orientations qui
ont été définies lors du comité technique paritaire ministériel du 18 octobre
en ont encore élargi l'impact.
Je voudrais à ce titre préciser quelques points.
D'abord, nous avons tiré, je crois, les conclusions des expérimentations que
nous avons engagées, et nous avons retenu le principe de plusieurs
généralisations : d'abord, MININFO, le réseau d'information destiné aux
entreprises ; ensuite, l'accueil coopératif interdirectionnel, avec des
intranets communs et, à chaque fois que cela est possible sur le plan
immobilier, des accueils communs ; enfin, un rapprochement entre les centres
des impôts et les recettes des impôts, ce qui facilite la vie des
entreprises.
Il en est de même avec la direction des grandes entreprises, installée à
Pantin, qui est d'ores et déjà opérationnelle mais qui ne fonctionnera à plein
régime qu'à partir du 1er janvier 2002. Il s'agit, là encore, de la
préfiguration de l'interlocuteur fiscal unique pour les 22 000 plus grandes
entreprises nationales.
Par ailleurs, seront mis en place de nouveaux centres d'appel téléphonique
pour la direction générale des impôts, la DGI, après celui qui a été ouvert à
Lille cette année. Il en sera de même pour les centres d'encaissement de la
direction générale de la comptabilité publique, la DGCP. Le premier a été
ouvert à Créteil, et d'autres centres devraient se développer dans les mois qui
viennent.
Plus important encore, le système Copernic, projet d'informatique fiscale, est
bien avancé, monsieur Coquelle. Il permettra aux contribuables de bénéficier
d'un certain nombre de réalisations concrètes telles que le portail fiscal
d'information ou le système d'accès au dossier fiscal. Ce projet, je tiens à le
souligner, a été bâti en étroite concertation avec les personnels et leurs
représentants, et, d'après les indications qui me sont parvenues, les agents du
ministère des finances y adhèrent très fortement : engagés dans la réforme de
modernisation, ils savent que l'outil informatique est un outil structurant et
qu'il constitue le point nodal de la réforme.
Tout cela devrait permettre de résoudre et de faire oublier rapidement les
difficultés rencontrées en matière tant d'impôt sur le revenu que de taxe
d'habitation. Pour toutes ces modernisations, nous avons délibérément choisi
une démarche qui se veut progressive, fondée sur le dialogue et sur la
concertation. Nous continuerons de progresser rapidement, en gardant toujours
comme objectif l'amélioration du service rendu à nos concitoyens.
Je serai brève s'agissant de l'aménagement et de la réduction du temps de
travail. Je soulignerai seulement que, là aussi, nous avons choisi une démarche
participative et un dialogue approfondi sur les plans tant national que local.
Nous avons procédé par expérimentations, et nous avons beaucoup appris. Nous
pouvons nous féliciter aujourd'hui du fait que plus de 80 % des agents du
ministère des finances bénéficient de l'aménagement et de la réduction du temps
de travail, sans que le ministère ait dérogé au décret fondateur de l'ARTT du
25 août 2000. Nous sommes en effet restés strictement dans les limites de ce
texte, mais nous avons intégré les difficultés propres à certains métiers, ce
qui est normal, ainsi que les astreintes d'horaires qu'ils comportent. C'est le
cas, par exemple, de certains informaticiens et de certains personnels des
douanes.
Mme Terrade s'est notamment consacrée, dans son rapport, à la politique de la
consommation et elle a insisté sur l'évolution des moyens affectés aux
associations de consommateurs. Je voudrais la rassurer : la stabilité des
crédits, qu'elle a soulignée, ne doit pas faire perdre de vue que les moyens
disponibles pour les associations de consommation doivent également tenir
compte des reports de crédits non consommés apparus dès l'année 2000, qui ont
également joué positivement sur les moyens disponibles de ces associations au
cours de l'année 2001.
S'agissant des difficultés rencontrées par les centres techniques régionaux de
la consommation, sur lesquelles vous avez insisté, vingt et un centres
techniques ont pu être financés en 2000 contre vingt en 1999. Le centre
technique régional de la région Centre n'a en effet été relancé qu'au cours de
l'année 2000. Il ne bénéficiait d'aucun financement depuis 1997 en raison d'une
activité trop réduite.
J'insiste sur le fait qu'il n'y a pas eu de reports de crédits sauf dans des
cas très particuliers, à savoir quand leur fonctionnement interne ne permettait
pas de mettre en oeuvre les financements qui, pour autant, avaient été prévus
dans le budget. Quoi qu'il en soit, je remercie Mme Terrade de l'avis positif
qu'elle a bien voulu donner sur ce budget des services financiers, comme M. le
rapporteur spécial.
Au-delà du projet Copernic, M. Coquelle s'est interrogé sur la question du «
gel de l'emploi public au ministère des finances », pour reprendre son
expression. Il faut regarder la réalité de l'évolution des emplois.
Comme chacun le sait, il y a, d'une part, les créations et les suppressions
d'emplois telles qu'elles figurent dans le budget. Nous allons, en 2002 comme
l'année dernière, procéder à des redéploiements d'effectifs pour les missions
que nous avons jugées prioritaires, et notamment vers la direction générale de
la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.
Monsieur le sénateur, en termes de gestion des effectifs au ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie, nous procédons à 6 600
recrutements, au sein desquels, je tiens à le souligner, près de 1 700
recrutements seront destinés à réduire le taux de nos vacances d'emploi. Il
s'agit vraiment d'une montée en puissance de nos effectifs en 2002 afin, d'une
part, de remplacer les personnels qui partiront à la retraite et, d'autre part,
de pourvoir les emplois vacants qui n'étaient pas pourvus. Ainsi, sur le plan
humain, les moyens croîtront en 2002 par rapport à cette année.
J'ai omis de dire que nous avons redéployé des emplois au profit non seulement
de la DGCCRF, ce qui est bien légitime compte tenu des tâches de surveillance
et de sécurité sanitaire et alimentaire qu'elle mène, mais aussi des centres
techniques de contrôle des véhicules, la mise en oeuvre de l'aménagement du
temps de travail ayant conduit à affecter des effectifs supplémentaires au
contrôle des poids lourds. Il s'agissait également d'une priorité en matière de
sécurité.
Je tiens à remercier les intervenants des jugements qu'ils ont bien voulu
porter sur ce projet de budget. Au sein du ministère des finances, nous
considérons que la réforme de l'Etat est, certes, un objectif en soi, mais, ce
qui est important, c'est de l'appliquer au quotidien, de la faire vivre.
Au-delà des grands mots et des grands principes, nous pensons que la réforme de
modernisation est bien engagée et que les agents du ministère y adhèrent. Nous
espérons que nos concitoyens pourront très vite en prendre la mesure, y compris
dans leur vie et leurs relations quotidiennes avec nos services.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
Je rappelle au Sénat que les crédits concernant l'économie, les finances et
l'industrie seront mis aux voix aujourd'hui même à la fin de l'examen des
crédits affectés au commerce extérieur.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 281 480 691 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV :
moins
16 419 950 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 156 306 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 55 098 000 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 1 100 370 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 346 268 000 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
J'appelle en discussion les articles 66 et 67, qui sont rattachés pour leur
examen aux crédits affectés aux services financiers.
Articles 66 et 67
M. le président.
« Art. 66. - Les périodes de scolarité passées par les fonctionnaires civils,
avant le 1er janvier 2001, en qualité d'élève fonctionnaire d'un établissement
de formation avant leur nomination en qualité de fonctionnaire stagiaire sont
prises en compte dans la constitution du droit et la liquidation de la pension
attribuée au titre du code des pensions civiles et militaires de retraite, si
elles ont donné lieu lors de leur accomplissement au prélèvement de retenues
pour pension.
« Les pensions des personnels retraités placés dans la même situation, ou
celles de leurs ayants cause, sont révisées, sous réserve que les intéressés en
fassent la demande dans le délai d'un an à compter de la publication de la
présente loi. La révision prend effet au plus tôt au 1er janvier 2001. » -
(Adopté.)
« Art. 67. - Il est créé un Comité des normes de comptabilité publique, chargé
d'émettre un avis préalable sur les règles applicables à la comptabilité
générale de l'Etat. Ce comité consultatif est placé auprès du ministre chargé
du budget. Son président est nommé par le ministre chargé du budget.
« Le Comité des normes de comptabilité publique est composé de représentants
de l'administration, de professionnels comptables et de personnalités
qualifiées.
« Le Comité des normes de comptabilité publique traite de toutes questions
d'ordre comptable relevant de l'Etat ou de ses établissements publics de type
administratif et organismes assimilés. Il a pour missions :
« - d'émettre un avis préalable sur les projets de normes de comptabilité
publique qui lui sont présentés par les services du ministère de l'économie,
des finances et de l'industrie ;
« - de proposer toutes mesures relatives à la présentation et à l'exploitation
des comptes publics visant à donner une image sincère et fidèle de la situation
patrimoniale et financière des organismes publics, à faciliter l'analyse des
coûts des politiques publiques, et à assurer la cohérence avec les règles de la
comptabilité nationale concernant les administrations publiques.
« Il peut être consulté sur toute autre question intéressant la comptabilité
publique, en particulier sur les projets de normes élaborés par des organismes
internationaux.
« Le Comité des normes de comptabilité publique élabore un rapport d'activité
annuel qui est déposé sur le bureau des assemblées parlementaires. » -
(Adopté.)
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant les services financiers (et la consommation).
Mes chers collègues, en attendant l'arrivée de M. le secrétaire d'Etat à
l'industrie, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures dix, est reprise à dix heures
quinze.)
M. le président. La séance est reprise.
INDUSTRIE (ET POSTE)
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
l'industrie (et La Poste).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean Clouet,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je
souhaite commencer mon propos comme un conte de fée : « Il était une fois... »
Il était une fois, dans la structure gouvernementale française, un ministère
parmi les plus importants. Ce ministère a eu comme ministres des hommes
remarquables et il comptait, comme débouché, pour l'un des plus grands corps de
l'Etat. Ce ministère, nous le cherchons en vain de nos jours : c'était celui de
l'industrie. Mais il a été progressivement phagocyté par le ministère des
finances. Il n'a donc plus ni budget ni, en dépit des qualités des hommes qui
en ont la charge, le même prestige qu'autrefois. De ce fait, ses services
risquent de devenir moins attirants.
J'ai noté cette perte d'expertise, que vous semblez en voie de combler, si mes
informations sont exactes, en créant un nombre important de postes d'ingénieurs
des mines, qui devraient donc en renforcer la capacité technique. Par ailleurs,
un Conseil de développement économique et de stratégie industrielle vient
d'être créé - mais il n'a pas encore fait ses premières armes - auprès du
secrétaire d'Etat à l'industrie et du secrétaire d'Etat aux petites et moyennes
entreprises. Nous verrons ce qu'il en adviendra !
En l'absence du budget, il est difficile d'avoir un rapporteur du budget : il
y a donc des chasseurs d'agrégats.
On va à la chasse aux agrégats dans le budget du ministère de l'économie, des
finances et de l'industrie, et l'on trouve quatre agrégats spécifiques à
l'industrie. Cette année, cependant, un cinquième agrégat apparaît, qui n'est
pas spécifiquement industriel puisqu'il est partagé avec les PMI et
l'environnement : c'est celui qui finance les directions régionales de
l'industrie, de la recherche et de l'environnement, les DRIRE.
Si je mets de côté ce demi-agrégat, en quelque sorte, par rapport à l'année
dernière, les quatre agrégats spécifiques sont en recul d'environ 3,6 %, ce qui
en soi n'est pas considérable et, de surcroît, n'a guère de signification,
notamment parce que les reports de crédits sont particulièrement importants.
Même dans le cas de l'Agence nationale de valorisation de la recherche,
l'ANVAR, on a pu constater qu'ils représentaient, avec le produit du
remboursement des avances, à peu près autant que les crédits prévus pour cette
année.
On constate donc d'importants reports et - vous nous éclairerez sans doute à
cet égard, monsieur le secrétaire d'Etat - des transferts du budget de la
défense en cours d'exercice. Ces transferts ne sont pas chiffrés, mais ils
atteindraient 150 millions à 160 millions d'euros.
De surcroît, ces agrégats sont extrêmement évolutifs en cours d'année et, par
rapport à l'année dernière, ils ont un périmètre « déformable ». On a vu ainsi
apparaître un médiateur de La Poste : je n'ai rien contre les médiateurs ni
contre La Poste, mais je me demande en quoi c'est un problème industriel.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat à l'industrie.
C'est à la mode !
M. Jean Clouet,
rapporteur spécial.
Ensuite, en matière de sûreté nucléaire et de
radioprotection, des transferts de crédits ont été opérés en provenance du
budget de la défense, et le secrétariat d'Etat aux petites et moyennes
entreprises a reçu des crédits de l'Agence pour la création d'entreprises.
Alors, que reste-t-il dans ces agrégats ? Naturellement, le rapport écrit en
donne des tableaux tout à fait complets, mais il est frappant de constater que
les crédits sont consacrés plutôt à l'apurement du passé qu'à la construction
du futur. En effet, la seule subvention octroyée aux Charbonnages de France
atteint un quart du total des crédits, qui s'établit à 16 milliards de
francs.
Par ailleurs, certains crédits ne concernent pas vraiment l'industrie : je ne
comprends pas pourquoi on s'obstine à vous faire financer les transports de
presse pour une somme relativement importante, puisqu'elle doit approcher les
300 millions d'euros.
En conclusion - et ce n'est pas une surprise, nous en avons déjà parlé - les
crédits du secrétariat d'Etat à l'industrie m'apparaissent comme une sorte de
tirelire d'appoint circonstancielle : on y importe des crédits venus
d'ailleurs, par exemple de la défense, et on en exporte d'autres, de sorte
qu'il est très difficile, à partir de ces quatre agrégats, de se faire une idée
de la politique industrielle de la France et de la façon dont elle est
financée. Je me répète d'une année sur l'autre, mais peut-être un jour
aurons-nous vraiment connaissance du total de la participation publique à la
politique industrielle. C'est une lacune que vous comblerez certainement,
monsieur le secrétaire d'Etat, et je vous en remercie.
M. le président.
La parole est à M. Grignon, rapporteur pour avis.
M. Francis Grignon,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan pour
l'industrie.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, malgré l'optimisme de M. le secrétaire d'Etat, les crédits
demandés au titre de l'industrie dans le projet de loi de finances pour 2002,
qui s'établissent à 1 958 millions d'euros, sont en baisse de 4,9 %.
Comme l'an dernier, on nous annonce des reports en cours d'exercice pour
préserver les capacités d'engagement de l'Etat. Cette argumentation me laisse
personnellement sceptique, la présence de ces reports montrant davantage
l'incapacité de l'Etat à mettre en oeuvre des politiques efficaces pour
consommer les crédits budgétaires que la conduite d'une véritable stratégie
industrielle. Pourtant, les sombres perspectives pour 2002 s'agissant de
l'industrie manufacturière incitent moins que jamais à baisser les bras.
J'aimerais insister sur l'importance des masses budgétaires dont nous
discutons. Parmi celles-ci figurent les crédits « offensifs » de soutien à
l'innovation, comme ceux de l'ANVAR, qui voit sa dotation budgétaire stagner ;
ou encore les crédits « défensifs » de réindustrialisation, particulièrement
vitaux pour les territoires actuellement touchés par les restructurations
industrielles : je pense non seulement au cas Moulinex, aux salariés et au
département concernés, auxquels je m'associe, mais aussi à l'hémorragie
silencieuse de certains secteurs industriels comme le textile, l'habillement et
la chaussure.
Avec la mise en oeuvre des accords de Marrakech et l'accord envisagé avec le
Pakistan, le phénomène de délocalisation observé dans ce secteur risque de
s'amplifier. La commission des affaires économiques s'inquiète d'ailleurs
vivement de la perte d'attractivité économique du territoire français, constat
désormais partagé dans tous les rangs, des rapports du Sénat au rapport
Charzat.
Dans la construction navale, fragilisée par le dumping sud coréen, quelle
position défendra le Gouvernement lors du prochain Conseil « industrie » sur le
mécanisme défensif temporaire proposé pour la construction navale française et
européenne ?
Dans le secteur automobile, à l'échéance de septembre 2002, le système actuel
de distribution sera réformé, le règlement européen arrivant à échéance. La
Commission européenne entend distendre les liens entre la vente et
l'après-vente automobile, car elle estime qu'il en résulte des entraves
concurrentielles sur le marché automobile européen. La France est
particulièrement concernée, car, sans parler de la construction automobile, la
distribution automobile y représente 4 200 concessionnaires et 15 000 agents,
soit 230 000 emplois, largement répartis sur le territoire. Le Gouvernement
entend-il défendre à Bruxelles le lien entre la vente et l'après-vente
automobile ?
Pour conclure, permettez-moi d'évoquer la mise en place du brevet
communautaire et la réforme du brevet européen.
La France souffre d'un déficit en matière de brevets, qui est désormais
reconnu. La commission des affaires économiques s'est prononcée pour la réforme
linguistique du brevet européen et pour la création d'un brevet communautaire.
Ces réformes n'auront cependant d'effet que si elles sont accompagnées d'un
vaste plan national de sensibilisation des chercheurs, des industriels et des
juridictions à l'importance de la propriété industrielle.
Au-delà de la mise en musique technique, qui est du ressort de l'Institut
national de la propriété industrielle, l'INPI, de l'ensemble de ces mesures,
c'est sur l'élan politique de ce « plan brevets » - un plan que nous appelons
de nos voeux - que j'aimerais vous entendre, monsieur le secrétaire d'Etat.
Quels sont vos projets et quelle est votre détermination ?
Peu convaincue par ce budget, la commission des affaires économiques a émis un
avis défavorable à l'adoption des crédits de l'industrie inscrits dans le
projet de loi de finances pour 2002.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Besson, rapporteur pour avis.
M. Jean Besson,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan pour
l'énergie.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers
collègues, la commission des affaires économiques du Sénat s'est toujours
montrée soucieuse d'une ouverture raisonnée des marchés de l'énergie, dans
l'intérêt des consommateurs. C'est compte tenu de cette orientation générale
que j'ai, en son nom, examiné le budget qui nous est soumis.
A titre personnel, vous le savez, monsieur le secrétaire d'Etat, je l'approuve
sans réserve.
Dans cette courte intervention, je souhaite vous faire part de quelques-unes
des préoccupations de notre commission qui concernent les principales sources
d'énergie consommées par les Français : l'électricité, le gaz, le pétrole et
les énergies renouvelables.
S'agissant du secteur électrique, notre attention s'est portée cette année sur
la nécessité de voir fonctionner rapidement le fonds du service public de la
production d'électricité. Ce fonds doit servir à compenser les surcoûts qui
résultent, pour l'opérateur historique, de l'obligation d'achat prévue par la
loi de février 2000. Cette question est d'autant plus importante qu'un récent
décret a fixé un prix de rachat très favorable pour l'électricité d'origine
éolienne.
Notre commission souhaite que ce fonds fonctionne dès que possible. J'ai
relevé avec intérêt que, devant la commission de la production et des échanges
de l'Assemblée nationale, vous aviez, monsieur le secrétaire d'Etat, évoqué la
possibilité de faire figurer sur les factures adressées aux consommateurs le
coût exact qui leur est imputé au titre du développement des énergies
renouvelables. Cette innovation pourrait-elle entrer en vigueur prochainement
?
Un autre grand chantier est également ouvert dans le secteur électrique,
celui de la « mise à plat » des relations entre les collectivités concédantes
et le réseau de transport d'électricité. Comme vous le savez, les autorités
concédantes ont quelque peine à obtenir l'inventaire des réseaux qui leur
appartiennent puisque Electricité de France considérait jusqu'à récemment
encore que les lignes concédées étaient sa propriété. Que comptez-vous faire,
monsieur le secrétaire d'Etat, pour soutenir les légitimes revendications des
communes et des collectivités concédantes ?
Dans le secteur pétrolier, c'est principalement la desserte de notre pays en
carburants qui nous préoccupe. Nous observons, en effet, une diminution du
nombre de stations-service. Je vous le demande solennellement, au nom de notre
commission, les fonds dont dispose le comité professionnel de la distribution
des carburants sont-ils suffisants pour enrayer une évolution que d'aucuns
considèrent comme inéluctable ?
Permettez-moi, enfin, d'évoquer le secteur des énergies renouvelables.
Notre attention a été appelée par le rapport d'activité de la Commission de
régulation de l'électricité, la CRE, sur l'intérêt du système dit des «
certificats verts ». Ces certificats permettent de payer plus cher de
l'électricité produite à partir d'énergies renouvelables. Envisagez-vous,
monsieur le secrétaire d'Etat, de recourir en France à ce système plus
transparent que les mécanismes en vigueur ?
Nous souhaitons également que les pouvoirs publics prennent en compte la
nécessité de combler le retard qui commence à se creuser, en France et à
l'étranger, dans le secteur de la pile à combustible. L'office parlementaire
d'évaluation des choix scientifiques et technologiques a présenté récemment,
sur ce point, des conclusions fort éclairantes que nous nous devions d'évoquer
à l'occasion de la discussion de ce budget.
Enfin, s'agissant des éoliennes, je tiens à vous faire part d'interrogations
exprimées par plusieurs de nos collègues. La construction de fermes éoliennes
s'accélère, souvent sans être souhaitée par la population, qui trouve à redire
lorsqu'elle se trouve dans leur voisinage. Ces machines seraient bruyantes et
dangereuses pour les oiseaux. Ne conviendrait-il pas, en conséquence, de revoir
les conditions dans lesquelles il est loisible de les construire, le cas
échéant après une enquête publique ?
En conclusion, permettez-moi de préciser, monsieur le secrétaire d'Etat, que,
contrairement à la proposition de son rapporteur pour avis, la majorité de la
commission des affaires économiques a émis un avis défavorable à l'adoption des
crédits de l'énergie inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Hérisson, rapporteur pour avis.
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan pour
les technologies de l'information et La Poste.
Monsieur le président,
monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les crédits consacrés à La
Poste et aux technologies de l'information s'élèvent à 438 millions d'euros, en
hausse de 2,2 %, auxquels il faut ajouter 4 milliards d'euros de prise en
charge - en totalité pour France Télécom et en partie pour La Poste - des
retraites. On y cherche en vain les 500 millions de francs que l'Etat, lors du
comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire
qui s'est tenu à Limoges, le 9 juillet dernier, a annoncé vouloir affecter à la
couverture du territoire en téléphonie mobile !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Oh !
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Les crédits demandés pour l'Autorité de régulation
des télécommunications, l'ART ; soit 16 millions d'euros, classent la France au
dernier rang européen. Il en coûte, en France, pour la régulation des
télécommunications, 1,75 franc par an et par habitant, contre 2,25 francs en
Espagne, 2,95 francs en Italie, et 3,51 francs en Grande-Bretagne, soit deux
fois plus.
Je souligne, au passage, monsieur le secrétaire d'Etat, que la question de la
retraite des membres du collège de l'ART, maintes fois soulevée auprès de la
direction du budget, n'est toujours pas réglée.
Or le besoin de régulation est croissant, qu'il s'agisse du « dégroupage » de
la boucle locale, confiné aux grandes villes faute de tarifs attractifs malgré
de nombreux effets de manche, ou des forfaits d'accès illimité à Internet, pour
ne citer que les deux cas les plus voyants.
Dans le secteur postal, attendons-nous, en 2001 et en 2002, à une forte
dégradation des résultats de l'opérateur, à l'image du véritable effondrement
du résultat d'exploitation - moins 29 % - et du résultat net - moins 38 % - en
2000. Quelle est la cause de ces résultats ? C'est le coût du passage aux 35
heures !
Il faut aussi noter, en prime, des indicateurs de qualité de distribution du
courrier dégradés : 73 % seulement à J + 1, contre un objectif de 80 %.
Quels artifices, quels « événements exceptionnels » allez-vous trouver, en
2001 et en 2002, pour maquiller la déconfiture des comptes postaux ? A coup
sûr, vous allez mettre en avant la vente de l'immobilier postal, sur l'air de
Tout va très bien, madame la marquise,
avec l'objectif d'atteindre les
180 millions d'euros de résultats déclenchant le mécanisme d'intéressement
signé avec les personnels. Belle avancée sociale, mais gare aux risques de
conflit si le mécanisme venait à s'enrayer !
Sur le même air du « tout va très bien », l'ouverture à la concurrence, que
vous auriez si bien négociée à Bruxelles, réduira, au-delà de 2006, le monopole
au courrier de 50 grammes, une « étape décisive » de libéralisation étant
prévue en 2009, ce qui signifie, pour beaucoup d'Etats membres, une ouverture
totale à la concurrence. Il est vrai que, d'ici là, les échéances seront
passées... A résister trop obstinément, la France a dû lâcher prise plus qu'il
n'aurait été souhaitable. Que cela serve de leçon pour le gaz !
Ma question est simple : qu'avez-vous fait et que comptez-vous faire pour
préparer La Poste ?
Je ne cite plus que pour le compte rendu officiel de nos travaux la loi
postale « virtuelle », à la discussion de laquelle vous vous étiez, un temps,
engagé dans cet hémicycle : c'était en février 1999.
Quant à nous, nous avons pris nos responsabilités et fait nos propres
propositions dans plusieurs rapports et propositions de loi. Je rappellerai,
notamment, le rapport du sénateur Gérard Larcher, que vous aviez taxé de
vouloir privatiser La Poste, monsieur le secrétaire d'Etat, alors qu'il n'en
est pas question, en tout cas dans ce rapport.
L'immobilisme condamne La Poste. Les charges de retraites sont une véritable
bombe à retardement puisque, à compter de 2010, le rapport retraités sur actifs
égalera puis dépassera 1 ; le tabou de la sociétisation et de la filialisation
des services financiers condamne l'opérateur à une solitude fatale ;
l'aménagement postal du territoire fait peser sur lui et, de plus et plus, sur
les communes, 3,5 milliards de francs de surcoût par an, alors que le besoin
d'adaptation du réseau est patent : 2 000 bureaux ont moins d'une heure
d'activité par jour, alors que les zones urbaines et périurbaines sont mal
couvertes par le réseau postal.
Pourquoi refuser obstinément la fixation du prix du timbre à 50 centimes
d'euro ? Ce serait une mesure de simplification pour les consommateurs et une
bouffée d'oxygène pour La Poste qui en a le plus grand besoin ? Il va de soi
que la marge de manoeuvre dégagée devrait, à mon sens, être affectée au
financement de l'aménagement postal du territoire.
Quant au secteur des technologies de l'information, il est affecté par
l'éclatement de la « bulle Internet ».
Les conditions d'introduction de l'UMTS en Europe ont une lourde
responsabilité dans ce marasme. Je ne reviendrai pas sur le prix des licences
en France, que nous avons modifié avant hier, dans cet hémicycle, dans une
optique d'aménagement du territoire et de solidarité.
L'expérience de la téléphonie mobile de deuxième génération nous montre que
des zones d'ombre subsistent, même à maturité du marché, puisque, aujourd'hui,
ce sont au moins 1 500 communes, soit 8,2 % du territoire, qui ne sont pas
couvertes. Je ne parle pas en termes de population, car nous ne pouvons mettre
en parallèle des populations sédentaires et une téléphonie mobile.
Les mesures réelles, réalisées par l'ART, font apparaître, d'ailleurs, un taux
inférieur : 20 % environ du territoire ne seraients pas couverts.
Vous avez pris la liberté d'annoncer, le 9 juillet dernier, 500 millions de
francs de financement des collectivités locales pour parfaire cette couverture.
C'est de la péréquation inversée : les collectivités les plus riches ont eu le
GSM immédiatement, et sans débourser un sou ; les départements ruraux devront
attendre, et payer !
Vous avez, depuis, précisé, monsieur le secrétaire d'Etat, que les opérateurs
s'étaient engagés à payer plus, et à alléger d'autant la facture pour les
collectivités. Oui, mais... seuls deux opérateurs sur trois auraient, selon nos
informations, pris de tels engagements, et encore s'appliquent-ils, selon eux,
non pas exclusivement à la couverture des zones d'ombre, mais bien à
l'amélioration du réseau en général. Alors, monsieur le secrétaire d'Etat, qui
a raison, qui a tort ? Où se situe la vérité ? Que contiennent ces fameuses
lettres des opérateurs, dont le Gouvernement semble si friand ces derniers
temps ?
Vous comprendrez, dans ces conditions, que la commission des affaires
économiques et du Plan ait émis un avis défavorable à l'adoption des crédits de
La Poste et des technologies de l'information.
(M. le rapporteur spécial
applaudit.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 24 minutes ;
Groupe socialiste, 25 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 13 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 6 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 10 minutes.
Je vous rappelle que, en application des décisions de la conférence des
présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix
minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
j'évoquerai moins les chiffres de ce budget que des préoccupations concernant
des aspects de la tutelle du secrétaire d'Etat.
Tout d'abord, le potentiel des écoles qui dépendent de votre département
ministériel, monsieur le secrétaire d'Etat, est-il suffisamment connu et
reconnu ? Il s'agit, en effet, des écoles des Télécom, réunies dans le cadre du
groupe des écoles des télécommunications, le GET, et des écoles des Mines, qui
constituent ensemble, probablement, le fleuron de l'enseignement supérieur
français et dont la capacité et les qualités sont universellement connues, tant
du point de vue pédagogique que du point de vue de la recherche. Leur
compétence, dans ce domaine, est probablement plus large que leur nom ne le
laisse deviner puisqu'elle s'étend, notamment, à toutes les nouvelles
technologies de l'information et de la communication et à des domaines aussi
prioritaires que celui des matériaux. Même si cela paraît un petit peu « rétro
» de le souligner, ces matériaux sont indispensables : on ne fait rien sans
matériaux, en particulier les ordinateurs, les puces et autres.
On peut citer également le domaine de l'environnement, notamment
industriel.
Pourtant, et malgré une stratégie de création d'entreprises et de
développement de l'innovation largement reconnue, le taux d'augmentation de
leur budget est nettement inférieur, d'après ce que nous en savons, à celui,
par exemple, qui est consacré, dans le budget pour 2002, à l'enseignement
supérieur universitaire au titre de la recherche : le taux d'augmentation
serait, là, de l'ordre de 10 %. Il y a là une anomalie.
Peut-être, monsieur le secrétaire d'Etat, pourrait-on compenser d'une certaine
façon cette anomalie en ménageant un lien plus fort, avec, par exemple,
l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME : ses
crédits ont été fortement augmentés, mais les rapporteurs, dans leurs rapports
écrits, font part d'une incertitude quant à la capacité de l'Agence à utiliser
valablement cette augmentation de crédits. Il y a là une synergie possible, qui
pourrait, de surcroît, nous garantir la qualité de l'emploi de ces moyens.
Pour ma part, je me félicite de constater que des organismes oeuvrant dans des
domaines aussi essentiels que le développement durable, question qui nous
concerne au premier chef, ont les moyens de leur action.
Ma deuxième remarque porte sur la stagnation des crédits de la recherche
industrielle et de l'innovation. De ce point de vue, l'évolution du chapitre
66-01 est inquiétante, car ses crédits, qui passent de 279 millions à 282
millions de francs, enregistrent une augmentation bien moindre que l'inflation.
C'est d'autant plus préoccupant que l'innovation reste la pierre angulaire de
touche du processus qui pourra nous faire rebondir vers une dynamique
industrielle, donc vers des créations d'emplois.
M. Jean Clouet,
rapporteur spécial.
Nous en avons vraiment besoin !
M. Pierre Laffitte.
Or celle-ci est actuellement fort menacée, cela a été rappelé tout à l'heure,
par l'éclatement de la « bulle Internet » et par la timidité d'un certain
nombre de fonds de capital-risque.
L'innovation en France a donc besoin d'être soutenue. A cet égard, monsieur le
secrétaire d'Etat, je m'inquiète de constater que les crédits de l'ANVAR, eux
aussi, restent stables.
Or, grâce notamment à la loi sur l'innovation et la recherche, pour laquelle
le Sénat a beaucoup fait - nous avions même arrêté la pendule en fin de session
pour pouvoir l'adopter conforme, malgré nos réserves sur des points comme le
manque de percée dans le domaine des stock-options - nous assistons
actuellement, Dieu merci ! à un indiscutable changement de climat, et c'est
très important !
Nous observons désormais, dans les milieux de la recherche et de l'innovation,
un mouvement assez fort. Les jeunes générations manifestent la volonté de créer
des entreprises et, par conséquent, ont le besoin d'être appuyées, y compris du
point de vue de la recherche industrielle. C'est là une préoccupation majeure !
Or l'ANVAR - entreprise publique que la plupart des pays européens nous envient
et commencent à imiter - est fondamentale dans le système mis en place.
C'est donc avec plaisir que je constate que vous êtes favorable à la création
de bons de souscription en actions de l'ANVAR, qui permettront à cet organisme
d'assurer une forme de « capital-amorçage ». Et c'est bien ce qui manque le
plus cruellement aux jeunes entreprises. Comme l'ANVAR a des compétences
d'ordre beaucoup plus scientifique, technique et industriel que financier,
cette forme de structure financière d'appui aux entreprises nous engage, j'en
suis convaincu, dans la bonne voie.
Cependant, le budget reste en stagnation. Je sais bien que des avances
remboursables arrivent à échéance, et c'est tant mieux, mais il me paraît
positif que celles-ci puissent également devenir des sources de profits
considérables pour l'Agence : cela incitera ses cadres à se montrer plus
incisifs, et probablement à prendre davantage de risques lorsque se dessinera
la perspective de recettes élevées. C'est donc une très bonne formule.
J'en viens à la gestion des licences UMTS. Je tiens tout d'abord à féliciter
le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie d'avoir largement
étalé dans le temps les prélèvements en matière d'UMTS, contre lesquels, à
cette même tribune, je m'élevais voilà exactement un an. Il a eu raison de
faire marche arrière -
perseverare diabolicum,
même si
errare humanum
est
- et le Sénat, notamment par la voix de M. Hérisson, est d'accord sur
ce point.
Pourtant, il faudrait aller plus loin encore dans la gestion des fréquences.
J'avais souhaité que nous ayons une vision globale dans ce domaine et que cette
question fasse l'objet d'un débat.
Je n'ignore pas que nous ferons pousser des cris d'orfraie à certains si nous
leur expliquons que, pour utiliser la télévision numérique hertzienne
terrestre, il faudra payer les fréquences, surtout si l'on ajoute que les prix
varieront selon qu'il s'agira de consacrer ces fréquences aux
télécommunications ou à de nouvelles chaînes destinées éventuellement à faire
s'exprimer davantage de baladins. Il ne me paraîtrait pas normal, en tout cas,
de ne pas demander un paiement ; ce point mérite réflexion.
Dans cette perspective, j'organise à Sophia-Antipolis, le 17 décembre
prochain, une grande réunion internationale sur le spectre. Il sera bon que
l'ensemble des régulateurs réfléchissent, à l'échelon européen, aux solutions
que l'on peut apporter à ce problème des fréquences.
Je conclus, parce que mon temps est limité, mais je voudrais tout de même
insister sur le fait que les points que j'ai évoqués, même s'ils sont
relativement mineurs en termes budgétaires, ne sont pas négligeables.
(Applaudissements sur l'ensemble des travées.)
M. le président.
La parole est à M. Marest.
M. Max Marest.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
quelle est notre ambition industrielle ? Telle est la question qui se pose tout
naturellement à travers le projet de loi de finances pour 2002.
L'industrie est l'un des piliers majeurs de notre économie. En effet, ce
secteur représente une part importante du produit intérieur et, en termes
d'emplois directs, occupe 18 % de la population active.
Le budget que vous nous présentez aujourd'hui, en baisse pour la première fois
depuis quatre ans, manque d'ambition et reflète le caractère essentiellement
défensif de la politique industrielle française, alors même que notre industrie
est désormais entrée dans une zone d'incertitude liée au ralentissement
économique.
Ce ralentissement a été illustré récemment par les difficultés d'entreprises
appartenant à de grands groupes, tels Danone et Bata, mais aussi de bien
d'autres entreprises plus modestes ; il est lié au prix de la main-d'oeuvre non
qualifiée.
Sur ce point précis, le commissaire européen chargé des affaires économiques
reconnaît que la période actuelle « est l'une des plus incertaines que l'on ait
connue au cours des trente dernières années ». Or la France affronte le
ralentissement économique sans aucune réserve ni aucun degré de liberté.
Pour 2002, le Gouvernement a retenu trois priorités pour le secteur de
l'industrie : la préparation de l'avenir par le soutien des programmes de
recherche ; la modernisation dans l'accompagnement des mutations industrielles
et de la formation des PMI ; la mise en oeuvre d'une politique énergétique
indépendante, équilibrée et transparente.
Mais ces priorités affichées, louables sur le fond, sont dotées de moyens
budgétaires en diminution. On notera par exemple que, en matière de recherche
et d'innovation, véritables moteurs de la compétitivité de notre industrie,
l'effort consenti est très insuffisant. En effet, il semble que, au motif d'une
sous-utilisation des crédits de 2001 - due à la non-utilisation des crédits
destinés à l'innovation et au développement industriel local, non-utilisation
dont il serait intéressant de connaître les raisons - la dotation en crédits de
paiement diminue de 9,68 %.
Par ailleurs, au-delà de l'effort réel en faveur de la formation des nouveaux
ingénieurs dont la France manque cruellement - effort que nous ne pouvons que
saluer, monsieur le secrétaire d'Etat -, les crédits de l'industrie semblent
plus généreusement tournés vers l'accompagnement des conséquences des mutations
industrielles.
Plus particulièrement, dans le domaine énergétique, malgré la priorité
affichée, les objectifs du Gouvernement sont de moins en moins lisibles : alors
qu'il est primordial de mener et de développer une politique cohérente dans ce
domaine, l'attentisme du Gouvernement apparaît de plus en plus
irresponsable.
En effet, dans le contexte actuel d'accroissement des coûts énergétiques, la
politique énergétique de la France doit permettre aux entreprises et aux
citoyens d'accéder à l'énergie la plus sûre et la plus compétitive possible.
Cet objectif peut être en partie atteint - nous le savons - grâce au recours à
l'énergie nucléaire, véritable pilier de l'indépendance énergétique de la
France, qui respecte les impératifs de l'écologie en permettant notamment de
réduire chaque année, en Europe, les émissions de gaz à effet de serre de
quelque 700 millions de tonnes.
Dans ce contexte, l'attentisme du Gouvernement, accentué par les réticences
affichées au sein de sa majorité sur ce dossier, est plus que contestable. En
effet, aucune action n'a été menée pour exporter notre savoir-faire dans ce
domaine, et aucune mesure n'a été prise pour le lancement du prototype de l'EPR
-
European Pressurized Reactor
-, plus sûr et produisant moins de
déchets, et ce malgré les perspectives favorables en Europe du Nord ou en
Asie.
De plus, les ambiguïtés, les contradictions du Gouvernement fragilisent la
position française sur les questions énergétiques au sein de l'Union
européenne, notamment en raison du retard pris par notre pays pour libéraliser
le marché du gaz.
Or la France ne peut continuer à faire cavalier seul dans un marché mondial
énergétique en pleine ébullition, marqué par de fortes évolutions structurelles
et commerciales chez les acteurs du secteur, lesquelles rendent indispensables
les fusions-acquisitions et, éventuellement, les extensions d'activités.
Vous me permettrez également de dire quelques mots sur l'industrie textile,
qu'a évoquée M. Grignon tout à l'heure et qui est vitale en termes d'emplois et
particulièrement fragilisée par la concurrence de pays bénéficiant d'un moindre
coût du travail. En effet, un grand nombre d'entreprises de la filière ont
disparu du territoire français depuis 1998, et ce phénomène de délocalisation,
dénoncé par le Sénat depuis plusieurs années, s'est poursuivi ces derniers mois
par le recours à une production située au Maghreb, en Europe de l'Est et en
Turquie.
Ces difficultés sont aujourd'hui accentuées par les évolutions parfois
inquiétantes de la conjoncture internationale. Ainsi, la conférence
ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce, qui s'est déroulée à Doha
du 9 au 13 novembre, a vu la conclusion d'un accord textile, certes spécifique,
avec le Pakistan - accord qui s'inscrit dans le contexte géopolitique actuel -
et l'adhésion formelle de la Chine à l'OMC. Ces deux éléments vont renforcer la
concurrence internationale de manière significative.
Face à de telles évolutions, il est primordial que notre pays rétablisse la
compétitivité et l'attractivité du site « France ». En effet, depuis ces deux
dernières années, certaines analyses ont pu montrer une dégradation de la
compétitivité relative du territoire français pour l'accueil des
investissements, notamment industriels.
Cette dégradation de l'attractivité du territoire français a également été
mise en lumière par un sondage effectué l'année dernière pour le MEDEF auprès
d'un échantillon de 350 dirigeants de filiales françaises de groupes
internationaux, représentant tous les types d'entreprises.
Les atouts de la France tiennent aux caractéristiques structurelles du marché
français. Mais, en termes d'image, la France recueille un solde d'opinions
négatives plus important que celui des opinions positives, contrairement à ses
voisins européens. Ainsi, les principaux handicaps identifiés sont le poids des
prélèvements obligatoires, les rigidités sociales et les 35 heures, cités par
plus de 85 % des personnes interrogées.
Cette étude montre que les deux tiers des chefs d'entreprise ne choisiraient
pas la France si leur entreprise avait à faire aujourd'hui le choix d'une
implantation en Europe, et que 44 % des personnes interrogées envisagent une
délocalisation d'une partie des activités françaises de leur groupe.
Cette analyse a été également reprise dans de nombreux travaux du Sénat, non
seulement dans le rapport sur « la fuite des cerveaux, mythe ou réalité » ou
dans le rapport d'information sur la mondialisation, mais aussi et surtout dans
le rapport sur l'attractivité du territoire français de Michel Charzat,...
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Excellent rapport !
M. Max Marest.
... parlementaire socialiste, qui liste les faiblesses de la France, en
particulier en matière d'attractivité économique, et propose quelques solutions
pour y remédier, solutions auxquelles nous adhérons.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Moi aussi ! Je suis d'ailleurs le seul membre du
Gouvernement à y adhérer !
M. Max Marest.
Hélas, monsieur le secrétaire d'Etat !
Que chacun d'entre nous se reporte ne serait-ce qu'au résumé de ce rapport
!
Tous ces travaux ont permis d'élaborer une multitude de propositions, dont la
plupart sont restées lettre morte.
Force est de constater qu'il est aujourd'hui devenu essentiel de tenir compte
de toutes ces évolutions et de les anticiper en améliorant notre environnement
juridique, fiscal et économique.
En effet, aucune mesure fiscale n'est prise pour renforcer la compétitivité de
la France. Pourtant, le ministre des finances lui-même a rappelé ces derniers
temps, à juste titre, que « ce sont les entreprises qui créent les emplois et
qu'il faut donc, dans notre politique générale, les inciter et non les
dissuader ».
Le projet de budget de votre secrétariat d'Etat ne retranscrit pas les
recommandations préconisées et dissuade en quelque sorte les entreprises, que
ce soient les grands groupes ou les PMI.
Les dépenses publiques s'accélèrent et le déficit s'accroît. Les dernières
informations diffusées ce matin par la presse et la radio le confirment, le
chômage progresse. Les moteurs de la croissance sont éteints et le recul des
investissements est patent.
En conclusion, votre ambition pour l'industrie nous paraît plus que modeste :
vous n'incitez pas, monsieur le secrétaire d'Etat.
Quelle ambition industrielle pour la France ? « D'une part, consolider
l'enracinement national de nos entreprises. D'autre part, renforcer la vocation
mondiale de la France ; cela signifie en faire un lieu d'accueil attractif pour
les investisseurs étrangers à la recherche d'une implantation durable,
créatrice d'emplois et de richesses. » Je viens de citer M. Charzat, monsieur
le secrétaire d'Etat : c'est lui qui, dans son rapport, écrit ces lignes sous
le titre « Améliorer notre image et la promouvoir ».
Vous n'incitez pas : c'est une des raisons essentielles pour lesquelles le
groupe du RPR ne votera pas ce budget.
(M. le rapporteur spécial et M.
Chérioux applaudissent.)
M. le président.
La parole est à M. Coquelle.
M. Yves Coquelle.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
projet de budget de l'industrie pour 2002, hors La Poste et les
télécommunications, enregistre une baisse de 3,6 % par rapport à celui de 2001.
Ce repli accuse le caractère restrictif des crédits consacrés à un secteur
d'activités qui représente, pourtant, 17 % de la population active et 21 % de
la valeur ajoutée brute.
Cette faiblesse des moyens, qui vous contraint, monsieur le secrétaire d'Etat,
à vous limiter à quelques priorités, réduit le champ d'intervention de la
politique de l'Etat.
Soulignons à cet égard la hausse de 3,7 % des autorisations de programme en
faveur de la reconversion des bassins miniers et sidérurgiques à travers le
fonds d'industrialisation des bassins miniers et le comité de pilotage de
l'industrie, qui favorisent l'implantation de nouvelles industries, la création
de centres de transferts technologiques et la promotion de programmes de
formation dans les zones fortement sinistrées.
Toutefois, on ne peut que regretter la diminution du soutien public en
direction de la construction navale, conséquence de l'interdiction des aides à
la commande à l'intérieur de l'Union européenne.
En matière de construction navale, la France et d'autres pays européens
disposent de capacités de production importantes et d'une main-d'oeuvre
qualifiée, capable de concevoir, comme sur les chantiers de Saint-Nazaire, des
pétroliers et des chimiquiers de type E3, c'est-à-dire économiques, écologiques
et européens.
Ces pays sont soumis à une concurrence déloyale des Etats-Unis, du Japon, de
la Corée, voire de la Norvège, qui continuent à financer directement leurs
propres chantiers navals et, ainsi, à soutenir l'emploi.
Seule une véritable politique industrielle menée en collaboration avec
d'autres pays européens permettrait de faire face à cette concurrence. C'est
d'autant plus nécessaire qu'il est urgent de renouveler une partie de la flotte
afin de sécuriser nos océans et d'éviter de nouvelles catastrophes maritimes
ainsi que de nouveaux drames écologiques, comme ceux qui ont été causés par le
naufrage de l'
Erika
.
Au rang des priorités - et nous nous en félicitons -, figurent la formation
ainsi que la recherche industrielle, l'innovation et les nouvelles technologies
de communication. Ce sont autant d'actions de nature à améliorer la
compétitivité des entreprises et, indirectement, à favoriser l'emploi.
Il n'en demeure pas moins que ces mesures principalement incitatives ne
peuvent se substituer à une véritable politique industrielle capable, par les
moyens de régulation appropriés, de conforter notre industrie. Le secteur de
l'énergie, comme celui de La Poste et des télécommunications, est révélateur
d'une orientation politique qui, loin d'être contrainte par le mouvement actuel
de libéralisation des économies, semble, au contraire, en épouser la
logique.
La loi de modernisation et de développement du service public de l'électricité
du 10 février 2000 ne laisse pas au seul marché le soin de réguler un secteur
aussi stratégique, mais elle n'est pas respectée. Elle nous donne pourtant,
dans un contexte dominé par l'idéologie libérale, quelques moyens permettant,
aussi limités soient-ils, de préserver un service public de l'électricité. Nous
attendons ainsi toujours la mise en place d'une tarification spéciale à
destination des foyers les plus modestes.
L'échec californien de la libéralisation du secteur de l'électricité devrait
pourtant nous inciter à plus de prudence et à reconnaître la nécessité de
préserver le statut public d'EDF.
Nous ne nions pas que, dans le contexte actuel, le développement international
d'EDF soit une nécessité. Encore faut-il que l'ouverture du marché de
l'électricité ne débouche pas sur une impitoyable guerre des prix ! Or, malgré
les baisses de tarifs qu'elle leur a consenties, EDF a encore perdu de nombreux
gros clients industriels cette année.
Les conséquences en termes de diminution des recettes de cette situation ne
doivent pas être négligées : entrave à la programmation des investissements et
accroissement de la facture d'électricité des petits consommateurs.
Ces remarques resteraient également pertinentes appliquées à d'autres secteurs
comme celui du gaz ou de La Poste et des télécommunications. Je n'ai
malheureusement pas le temps de m'y attarder aujourd'hui.
Nous attendons toujours que soit entrepris le programme de construction de
l'EPR, le réacteur de nouvelle génération, qui conforterait notre indépendance
énergétique. Ce serait là une mesure forte et concrète !
Monsieur le secrétaire d'Etat, dans la mesure où la conjoncture économique
donne des signes d'essoufflement inquiétant, où les plans sociaux se
multiplient, où l'emploi industriel se détériore, où les industriels révisent à
la baisse leurs investissements pour 2002, nous aurions besoin d'un réel
volontarisme politique s'appuyant sur un budget suffisant pour soutenir la
croissance et développer l'emploi. Le présent projet de budget n'est pas
suffisant, et le groupe communiste républicain et citoyen s'abstiendra donc.
(Mme Terrade applaudit.)
M. le président.
La parole est à M. Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
nous abordons l'examen du dernier projet de budget de l'industrie, de La Poste
et des télécommunications de la légistature. C'est la raison pour laquelle il
ne m'apparaît pas pertinent de nous limiter à discuter des crédits qui leurs
sont affectés pour l'exercice 2002.
D'une part, ceux-ci témoignent, en réalité, du maintien des capacités du
secrétariat d'Etat à poursuivre les orientations prioritaires d'une politique
industrielle ambitieuse pour la France ; d'autre part, à l'heure du bilan, il
convient de mettre toute évaluation en perspective sur l'ensemble des cinq
années de ce gouvernement.
A ce titre, monsieur le secrétaire d'Etat, je l'affirme, votre bilan est
bon.
De 1997 à 2002, les crédits consacrés à l'industrie ont augmenté de plus de
3,5 % sur la période quand, à périmètre comparable, ils diminuaient de plus de
5 % lors de la législature précédente. D'ailleurs, le résultat est là : la
courbe de l'emploi industriel, après plusieurs années de déstructuration, s'est
inversée à partir de 1999. Elle demeure positive avec, par exemple, un solde de
plus de 70 000 emplois salariés en 2000, hors BTP et agroalimentaire, ce qui
est sans précédent depuis 1974.
Pour autant, nous déplorons encore récurremment de grandes restructurations
industrielles. Leur traitement social autant qu'économique doit retenir toute
notre attention.
Monsieur le secrétaire d'Etat, quatre axes ont constitué l'armature de votre
politique : l'économie et l'innovation, qui orientent résolument l'industrie
française vers l'avenir et la mettent en situation de relever les défis de la
modernité et d'une compétition internationale toujours plus vive ; un Etat plus
proche, comme en témoignent les contrats de plan Etat-régions ; une énergie
moins chère et plus diversifiée ; des services publics pour tous, et je tiens à
dire que vous avez assuré avec énergie leur défense et leur adaptation au
niveau européen, dans le sens d'un véritable ressourcement des principes qui
les animent
Nous notons avec satisfaction que votre projet de budget pour 2002 comporte 33
millions d'euros de mesures nouvelles en dotations ordinaires et crédits de
paiement, correspondant à vos quatre priorités pour cette année : la formation,
l'innovation, la restructuration et la sécurité.
La croissance et l'emploi sont les priorités affirmées du gouvernement de
Lionel Jospin depuis 1997.
A ce titre, l'innovation a constitué et constitue encore le fer de lance de
votre politique industrielle. Vous parlez à cet égard, avec raison, de «
bataille de l'innovation ». Seule l'innovation, en effet, permet de créer
l'environnement le plus favorable à l'initiative, à l'investissement, au
développement des compétences et des qualifications de ceux et de celles qui
entreprennent et réussissent, de ceux et de celles qui contribuent à
l'avènement d'une « société de l'intelligence ».
Nous ne pouvons qu'approuver une telle politique, tournée vers l'avenir et qui
intègre une réflexion stratégique globale, notamment sur les technologies clés
de demain, en se préoccupant de leur transposition aux niveaux régional et
microéconomique.
Dans le projet de budget pour 2002, je me félicite donc que le soutien à
l'innovation soit maintenu, particulièrement en ce qui concerne les PME et les
PMI. Les crédits publics représentent 12 % de l'effort d'innovation de notre
pays et se situent largement en « amont », c'est-à-dire là où les financements
externes sont plus difficilement mobilisables. L'ANVAR, dont on parle beaucoup
ce matin, disposera à cet égard d'une capacité d'engagement accrue.
Peut-être serait-il néanmoins opportun de reprendre la réflexion sur la
possibilité d'instituer un crédit d'impôt innovation, sur le modèle du crédit
d'impôt recherche, qui existe depuis 1982 et dont nous connaissons le
succès.
M. Pierre Laffitte.
Tout à fait !
M. Pierre-Yvon Trémel.
La formation des ingénieurs, qui est une autre de vos priorités, participe
naturellement du soutien à l'innovation. La hausse de 12,5 % des subventions à
Supélec, celle de 13 % au groupement des écoles de télécommunications comme
l'augmentation des bourses dans les écoles des mines vont dans le bon sens.
Votre politique énergétique, monsieur le secrétaire d'Etat, pourrait être
qualifiée de « complète ». Elle est basée sur la diversification et la maîtrise
de l'énergie, ce qui constitue une stratégie sage, même si les cours mondiaux
ont retrouvé un niveau supportable. Le nucléaire conserve une place importante
dans notre production électrique.
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Tant mieux !
M. Pierre-Yvon Trémel.
A ce titre, nous nous devons de saluer la restructuration intervenue avec la
naissance, cette année, d'un pôle français à dimension mondiale, AREVA,
regroupant Framatome, la Gogema et CEA-Industrie.
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Très bien !
M. Pierre-Yvon Trémel.
Il n'en demeure pas moins que l'accent doit être mis sur les énergies
renouvelables afin d'atteindre l'objectif de 12 % de la consommation
énergétique totale de l'Union européenne. Nous n'en sommes encore qu'à 2 % en
France !
Je veux soulever deux questions relatives au gaz, et tout d'abord celle de la
desserte gazière.
L'amélioration de la desserte gazière est un enjeu d'aménagement du
territoire, notamment pour les communes rurales. La loi du 2 juillet 1998 a
institué un plan triennal visant à parfaire le raccordement en gaz naturel des
communes non encore desservies et qui en font la demande.
Lors de l'examen de ce texte, notre groupe avait fait adopter un amendement
invitant le Gouvernement à remettre chaque année au Parlement un rapport sur
l'état de la desserte du territoire en gaz. A défaut de rapport, pourriez-vous,
monsieur le secrétaire d'Etat, nous dresser un premier bilan sur ce point ?
Le Gouvernement a préparé un projet de loi relatif à la modernisation du
service public du gaz naturel dont l'objectif est de transposer la directive
gazière. Ce texte traduit bien l'ambition de conjuguer une ouverture maîtrisée
à la concurrence et un service public performant et de qualité. Toutefois, le
Gouvernement a choisi d'introduire d'ores et déjà certaines dispositions de ce
texte concernant la cession du réseau de transport dans le projet de loi de
finances rectificative. Pourriez-vous nous indiquer l'architecture qui vous
semble devoir être retenue à ce stade ?
J'en viens à présent au budget de La Poste et des télécommunications, dont les
dotations augmentent de 2,2 %, nouvelle hausse qui intervient, rappelons-le,
après celles qui avaient été décidées en 2000 et en 2001 et qui atteignaient
respectivement 4,6 % et 1,6 %.
Je saluerai tout d'abord l'accord politique intervenu lors du Conseil européen
des ministres du 15 octobre dernier sur la directive postale, qui constitue un
compromis au regard des impératifs croisés que nous avons de progresser
raisonnablement sur le volet de la libéralisation, afin de faire face aux
contraintes internationales tout en maintenant un service universel et un
service public de qualité. Nous devons pour une grande part à votre pugnacité,
monsieur le secrétaire d'Etat, que la programmation du « tout libéral » dans le
secteur postal ait été écartée, de même que la libéralisation totale et
immédiate des nouveaux services.
M. Jean-Pierre Raffarin.
C'est pourtant plus libéral !
M. Pierre-Yvon Trémel.
A la place, nous avons obtenu une ouverture progressive et maîtrisée du marché
postal, qui permet le maintien d'un service de qualité en termes tant de
prestations fournies aux usagers que de présence territoriale. Ainsi ont été
préservés un niveau et un périmètre de services réservés compatibles avec le
maintien d'une péréquation tarifaire suffisante pour assurer la sauvegarde du
service public.
La position commune adoptée à Bruxelles doit maintenant être soumise au
Conseil de l'Union européenne, puis au Parlement européen. Je suis certain que
vous tiendrez, monsieur le secrétaire d'Etat, à nous fournir ce matin des
éléments sur les suites à attendre, à court et à moyen termes, de cette donne
nouvelle.
Bien entendu, l'accord obtenu ne saurait nous faire oublier la nécessité de
chercher à améliorer toujours davantage la qualité de notre service public.
C'est l'une de vos préoccupations constantes.
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
En effet !
(Sourires.)
M. Pierre-Yvon Trémel.
L'été dernier, certains dysfonctionnements locaux ont été constatés,...
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Oh oui !
M. Pierre-Yvon Trémel.
... mais ils restent fort heureusement ponctuels au regard de l'ensemble.
Or que nous révèle cet ensemble ? La Poste, qui couvre trois métiers -
courrier, colis et logistique, services financiers - a réalisé d'importants
efforts d'adaptation et d'innovation. Elle est devenue le premier opérateur
postal européen pour le trafic et le deuxième pour le chiffre d'affaires, ce
dernier ayant augmenté de 5 % par an entre 1996 et 2000.
Par ailleurs, depuis 1997, La Poste n'a pas, fait rarissime ! relevé ses
tarifs de base.
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Vous laissez cette initiative à d'autres !
M. Pierre-Yvon Trémel.
Sous votre tutelle, monsieur le secrétaire d'Etat, le prix du timbre est resté
inchangé, quand il avait augmenté de 7 % entre 1993 et 1996.
En outre, La Poste a embauché 4 000 agents supplémentaires, elle résorbe
l'emploi précaire, elle a assuré l'instauration de la réduction du temps de
travail sans aide de l'Etat, elle entretient sur notre territoire un maillage
exceptionnel de 17 000 points de contact, elle a ouvert de nouveaux bureaux
dans les zones urbaines sensibles et, enfin, elle apporte ses services à deux
millions de titulaires de revenus sociaux.
Au total, le contrat d'objectifs et de progrès 1998-2001 passé entre La Poste
et l'Etat, dont l'exécution arrive maintenant à son terme, débouche sur un
bilan positif.
Certes, et je suis d'accord sur ce point avec M. le rapporteur pour avis, la
situation financière de La Poste appelle la vigilance et la contrainte
extérieure est très prégnante.
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Absolument !
M. Pierre-Yvon Trémel.
Le rôle de l'Etat est donc bien de continuer à veiller à ce que La Poste reste
à la pointe de l'innovation dans un climat international qui restera
difficile.
Nous devrons aussi nous interroger sur la nouvelle relation qui s'établira
entre l'Etat et La Poste dans l'optique du contrat d'objectifs et de progrès
qui est actuellement en préparation. Je sais, monsieur le secrétaire d'Etat,
que vous avez souhaité procéder à une large consultation à propos de ce futur
contrat, mais j'aimerais que vous nous présentiez d'ores et déjà quelques
grandes orientations, tant les questions touchant aux retraites, à l'aide à la
presse ou à la présence territoriale méritent de faire l'objet d'un débat.
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Bonne remarque !
M. Pierre-Yvon Trémel.
En ce qui concerne les télécommunications, monsieur le secrétaire d'Etat, je
voudrais vous dire tout l'intérêt que nous portons au problème de l'égalité des
territoires devant l'internet à haut débit et la couverture en relais de
téléphonie mobile. Le thème a déjà été évoqué ici à de nombreuses reprises :
pourriez-vous nous dire, à la suite des annonces faites par deux des opérateurs
concernés, de quelle manière l'Etat entend prendre en considération la donne
nouvelle et répartir le financement, s'agissant notamment des collectivités
locales ?
En ce qui concerne le développement commercial de l'internet à haut débit pour
les particuliers, celui-ci passe par l'accès forfaitaire illimité, qui fait
l'objet d'une demande insistante. Pouvons-nous espérer apporter très bientôt
une solution à cette question, monsieur le secrétaire d'Etat ? Ne serait-il pas
possible, par exemple, d'envisager de mettre en place un forfait d'un coût
inférieur à deux cents francs ?
Je conclurai mon intervention en évoquant les équipementiers. Ces derniers se
trouvent actuellement dans une situation très difficile. Ainsi, hier encore, de
nouvelles suppressions d'emplois ont été annoncées dans le département des
Côtes-d'Armor. Vous avez organisé une table ronde sur ce sujet voilà quelques
jours, monsieur le secrétaire d'Etat : pourriez-vous nous en présenter les
conclusions ?
Enfin, j'aimerais que vous m'indiquiez si vous entendez rechercher une
solution pour remédier à la situation de blocage que connaissent certains
fonctionnaires de France Télécom ayant choisi de conserver leur grade de
reclassement en 1993. Ce problème ne peut perdurer et je souhaiterais donc que
nous puissions le résoudre.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous portons un jugement positif sur le projet
de budget que vous nous présentez. Le groupe socialiste le votera, car les
orientations que vous avez défendues au cours de ces dernières années et que
vous défendrez encore en 2002 permettront, nous en sommes convaincus, de
conclure la législature sur un bon bilan pour l'industrie, La Poste et les
télécommunications françaises.
(Applaudissements sur les travées
socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
voudrais indiquer en préambule que j'approuve entièrement le travail de qualité
qui a été présenté par nos rapporteurs, MM. Clouet, Grignon et Hérisson.
MM. Francis Grignon, Jean Clouet,
rapporteur spécial
et
Pierre Hérisson,
rapporteurs pour avis.
Merci !
M. Jean-Pierre Raffarin.
J'estime que deux mots sont insuffisamment pris en compte dans votre projet de
budget, monsieur le secrétaire d'Etat : « territoire » et « création ».
En ce qui concerne le territoire, je voudrais dire que, en tant qu'élu de
terrain, je vois évoluer notre économie de manière préoccupante.
Voilà quelques années, quand je souhaitais me pencher sur les perspectives de
l'emploi en Poitou-Charentes, je demandais aux responsables des grands groupes
quelle était leur stratégie pour leurs établissements situés dans ma région.
Aujourd'hui, de très grandes unités y sont implantées, mais je n'en connais
pas les actionnaires. Certaines d'entre elles sont à vendre et cherchent à
rejoindre un autre groupe ; nous rencontrons beaucoup de difficultés pour
enraciner dans notre région un certain nombre d'activités économiques, sociales
et industrielles.
Cette nouvelle donne fait qu'il est de plus en plus nécessaire de construire
des réseaux territoriaux autour de nos grosses PMI, lesquelles sont, en
réalité, le moteur de notre croissance régionale. Or, de ce point de vue, je
crois que l'on sous-estime le rôle des chambres de commerce et d'industrie. Il
conviendrait, à mon sens, d'orienter leur action et de les aider à se
développer, afin qu'elles puissent être des têtes de réseau pour nos PME, tant
il est vrai que leur vocation et leur enracinement territoriaux sont plus
affirmés que ceux des organisations professionnelles.
De plus, le réseau des chambres de commerce et d'industrie est performant
quand il s'agit d'aider les PME à se tourner vers l'international, à se
moderniser et à former leur personnel. Nous devons donc lui permettre de se
renforcer et de s'adapter aux évolutions.
Or, pour la cinquième année consécutive, l'encadrement du budget des chambres
de commerce et d'industrie aboutira, par la stabilisation du niveau de l'impôt
additionnel à la taxe professionnelle, à une réduction de leurs moyens
d'action. Comment peut-on leur demander de jouer leur rôle quand elles ont à
supporter les conséquences du passage aux 35 heures et l'augmentation de leurs
charges ?
En effet, leurs recettes stagnent mais leurs charges sont de plus en plus
lourdes ! Cela entraîne une asphyxie, et je crains beaucoup que les PME ne
perdent le bénéfice d'un réseau de compétences important et bien ancré dans la
région. Je tenais, monsieur le secrétaire d'Etat, à attirer votre attention sur
ce sujet.
S'agissant encore du territoire, je voudrais, à la suite de l'un des orateurs
qui m'ont précédé à cette tribune, demander que La Poste prenne davantage en
considération les élus locaux. Trop souvent, des maires ne sont informés d'un
changement dans les activités postales exercées sur le territoire de leur
commune que le jour même où celui-ci intervient. Que l'on respecte ces
représentants de la République, qui se trouvent en première ligne ! Certes, je
comprends que la modernisation ait ses exigences, mais adopter une attitude
d'ouverture et de concertation s'impose.
En ce qui concerne maintenant la création, ce point a été fort bien développé
par M. Laffitte tout à l'heure. Dans ce domaine, on voit bien quelle peut être
aujourd'hui la stratégie de la France dans l'optique de la mondialisation : au
rebours de la banalisation, de la standardisation, de la globalisation, du
gigantisme auquel la taille de notre marché intérieur ne nous destine pas, nous
devons miser sur l'intelligence, l'innovation, la création, la valeur ajoutée.
Si l'on veut que la France puisse exister dans cette économie qui est en train
de muer, il convient de jouer la carte de l'intelligence, de l'innovation, et
de tous nous mobiliser !
(M. Hérisson, rapporteur pour avis, ainsi que M. Pelletier
applaudissent.)
M. Pierre Laffitte.
Très bien !
M. Jean-Pierre Raffarin.
Comment accepter que, en période de croissance, le taux de création
d'entreprises baisse dans ce pays ? Les derniers chiffres sont encore
catastrophiques à cet égard ! Les créateurs sont démotivés, démobilisés. Nos
universités ne sont pas en mesure aujourd'hui d'attirer les créateurs du monde
entier qui pourraient choisir la France comme lieu où s'incarne la société de
l'intelligence. Dans l'histoire, lorsque notre pays a été rayonnant, cela a
toujours tenu à la force des idées, à la promotion de l'intelligence !
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous vous trouvez au coeur d'une stratégie
d'une importance essentielle, qui doit viser à faire en sorte que la création
dans le domaine industriel soit, pour la France, un vecteur de développement.
Nous pourrons, je le crois, remobiliser les créateurs et les forces vives de
l'économie, mais ce sera en offrant un horizon, en fondant, sur ces valeurs de
l'humanisme qui rassemblent les habitants de notre pays, un dynamisme plus
créateur qui permettra aux individus de se libérer, d'entreprendre !
M. Pierre Laffitte.
Très bien !
M. Jean-Pierre Raffarin.
Pour cela, la recherche et l'innovation doivent vraiment apparaître comme des
priorités pour l'avenir dans notre stratégie nationale.
Par conséquent, le rôle que vous avez à jouer, monsieur le secrétaire d'Etat -
même si je souhaite que ce soit pour une durée limitée
(Sourires)
- est très important.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR,
ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
nous examinons pour la dernière fois de cette législature le budget de
l'entreprise publique La Poste, et il serait tentant d'esquisser un bilan.
Le résultat serait contrasté. A l'actif figureraient une progression
importante du chiffre d'affaires, particulièrement au titre des services
financiers, un repositionnement de l'entreprise à l'échelle européenne et
mondiale grâce à des rachats, notamment dans le domaine du colis et de
l'express, des accords de partenariat commercial noués avec quelques grands
opérateurs publics et privés, et pas seulement en Europe du Sud. Bref, La Poste
est une entreprise exerçant de nombreux métiers et qui a conquis des parts de
marché dans un univers très concurrentiel où le néerlandais TPG et l'allemand
Deutsche Post cherchent à évincer leurs rivaux.
Une entreprise, ai-je dit ; mais, s'agissant de l'entreprise publique, celle
qui est chargée par la loi de 1990 d'assumer des missions de service public, le
bilan est moins flatteur.
Tout se passe comme si la tension entre les deux logiques de cette entreprise
« mixte » qu'est La Poste ne cessait de miner l'accomplissement des missions
d'aménagement du territoire et de cohésion sociale dont elle demeure chargée.
Cela commence à provoquer un véritable malaise non seulement parmi les
postiers, mais aussi parmi les élus locaux, sans parler des usagers...
Pour l'heure, contentons-nous d'un rapide constat. Comme je l'avais annoncé au
Sénat, la mise en place de la réduction du temps de travail à moyens constants
- c'était inique ! - a dégradé les conditions de travail des salariés et
amplifié un recul significatif de l'offre de services aux usagers :
transformation d'agences postales en agences communales croupions, qui demain
seront entièrement à la charge des communes les plus pauvres ; regroupement des
bureaux de plein exercice, avec disparition de la fonction de receveur ;
réduction drastique de l'amplitude des horaires d'ouverture des bureaux en
milieu rural, et même parfois en ville ; fermeture inopinée de bureaux
centraux, notamment à Toulouse ; multiplication des tournées « à découvert »,
c'est-à-dire non effectuées, pour employer un langage plus commun.
Le signe le plus tangible de cette dégradation du service, c'est bien sûr la
baisse de qualité inquiétante que subit de façon accélérée l'acheminement du
courrier. Durant l'été, un épisode a cristallisé le mécontentement : la
fermeture brutale, annoncée le 28 juillet, de plusieurs centaines d'agences
postales au mois d'août est apparue aux élus comme la confirmation d'une
volonté affichée de désengagement. Il paraît que tel n'était pas le cas. Dont
acte, mais rien de concret, depuis, n'a prouvé le contraire...
Simultanément, l'annonce du projet d'alliance entre la Caisse des dépôts et
consignations et les caisses d'épargne a obscurci l'avenir de La Poste. Malgré
mes demandes et vos paroles rassurantes, monsieur le secrétaire d'Etat, je
n'ai, pas plus que mes collègues parlementaires, pu me faire une idée, fût-elle
succincte, de ce que veulent vraiment les promoteurs de l'initiative et le
Gouvernement.
Tout d'abord, je ne comprends pas comment on peut vouloir renforcer un « pôle
financier public » en créant une société privée cotée en bourse qui absorberait
une grande partie des avoirs et de l'autonomie des caisses régionales
d'épargne. Sans doute mon incompréhension est-elle due au fait que je suis mal
informé ! Il est clair, en revanche, que ce projet met La Poste dans une
position très délicate. En effet, l'entreprise publique semble n'avoir le choix
qu'entre une marginalisation de ses services financiers et une fuite en avant
vers la création d'une banque postale, ce que le secteur bancaire n'acceptera
pas. Que veut, sur ce point, le Gouvernement ?
Je pensais pouvoir trouver une réponse à cette question dans le contrat qui
devait être conclu entre l'Etat et La Poste pour la fin de l'année, mais il
semble que cette échéance soit repoussée. Jusqu'à quand ? Vous me le direz sans
doute, monsieur le secrétaire d'Etat...
Reste, bien sûr, l'accord que vous avez signé sur le projet de directive
européenne et que le Parlement européen doit confirmer avant son adoption
définitive. Je me suis exprimé abondamment sur ce sujet au moment de la
négociation. Disons, simplement, que mon appréciation sur le résultat est moins
optimiste que la vôtre. Mais je prends cette signature comme une donnée de
fait, et c'est la raison majeure pour laquelle je dis que, désormais, pour le
service public postal, l'échéance et là. Et bien avant 2009, à mon sens !
Je n'en tire d'ailleurs aucune conclusion défaitiste. La Poste est une
entreprise en progression, même si elle est fragile, je l'ai dit au début de
mon propos. L'attachement que lui porte la nation demeure considérable et
constitue un atout décisif dans la préservation par La Poste de son marché
intérieur, l'un des plus importants au monde.
Les postiers ont une formidable aptitude à faire évoluer leur métier et à agir
dans le secteur concurrentiel, sans perdre leur culture de service public. Mais
il appartient aux pouvoirs publics - Gouvernement et Parlement - de prendre le
temps d'évaluer la nouvelle donne - je ne suis pas le premier à utiliser cette
formule à cette tribune aujourd'hui - et de proposer un autre équilibre pour
maintenir un service public postal de proximité dans le contexte européen. Je
ne puis, ici, me livrer à cet exercice, car le temps m'est compté. Cependant,
je le ferai avant même les échéances électorales et j'espère que vous
accepterez alors, monsieur le secrétaire d'Etat, mon invitation à venir
éclairer ce débat de façon décisive et avec votre expérience irremplaçable.
Aujourd'hui, je vous écouterai avec une attention soutenue, tant les questions
ici évoquées sont celles que se posent les usagers, les postiers et les élus
locaux.
(Applaudissements sur les travées du RDSE et sur les travées
socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Rinchet.
M. Roger Rinchet.
Monsieur le secrétaire d'Etat, compte tenu du temps très court qui m'a été
imparti, je ne dirai que quelques mots sur l'ensemble de votre projet de budget
pour 2002, mais aussi sur votre bilan, que je trouve très bon et inspiré par le
modernisme.
Vous avez su soutenir la recherche ainsi que l'innovation et encourager le
développement industriel. Jamais, depuis plus de vingt-cinq ans, nous n'avions
connu une période aussi riche en création d'entreprises et d'emplois et, même
si, aujourd'hui, nous ressentons un léger fléchissement, notre industrie
résiste bien. De plus, vous avez eu la volonté de relancer la politique des
énergies renouvelables, un moment délaissée, parfois dénigrée, et même traitée
de folklorique par certains. C'est ce point que je souhaiterais développer
aujourd'hui.
Le sujet des énergies renouvelables étant lui-même très vaste, je me
contenterai de faire quelques remarques sur l'une de ces énergies, le solaire,
sous ses deux aspects, thermique et photovoltaïque.
Le solaire, il est vrai, n'en est qu'à ses débuts, même si, sur le plan
thermique, il est utilisé empiriquement depuis que l'homme existe sur terre.
Certes, les résultats en la matière sont encore très modestes, mais il faut
savoir que nous ne sommes qu'au début d'une très grande aventure qui, grâce au
développement de la technique et à la volonté des hommes, devrait nous conduire
vers des résultats bienfaisants pour la planète et infiniment plus intéressants
que ceux que nous connaissons aujourd'hui.
Vous avez eu le mérite, monsieur le secrétaire d'Etat, de donner des signes
forts de votre volonté de faire progresser l'énergie solaire, pour laquelle, il
faut bien le reconnaître, nous avons un énorme retard par rapport à tous nos
voisins européens, et ce malgré un ensoleillement moyen supérieur aux pays de
l'Europe centrale ou septentrionale. Il faut accentuer notre effort, même si
cette voie est difficile, car les résultats ne peuvent s'évaluer à l'année à
l'intérieur d'un budget qui, bien entendu, est annuel.
Il faut admettre et faire comprendre à tous ceux qui, par intérêt immédiat ou
dans un esprit de conservatisme, s'en tiennent aux énergies classiques qu'en
matière d'énergie solaire plus qu'ailleurs entre les semailles et la moisson
s'écoule un certain temps qui, aux yeux des impatients, peut paraître très
long.
C'est pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, il faut continuer à soutenir
l'action de l'ADEME, injustement critiquée dans certains médias et qui est
l'élément moteur du développement des énergies renouvelables dans notre pays.
C'est, en particulier, grâce à l'aide de l'ADEME que les collectivités locales
peuvent bénéficier des aides de l'Union européenne, aides qui, souvent, sont
prolongées par les régions.
Pour que le solaire photovoltaïque décolle, il faut s'inspirer de ce qui se
fait dans des pays comme l'Allemagne en ce qui concerne l'obligation de rachat
par EDF de l'électricité photovoltaïque à des tarifs incitatifs. Cela n'aura
pas beaucoup d'incidence sur le budget d'EDF, mais ce sera un très grand
encouragement pour tous ceux qui oseront produire de l'électricité solaire.
Les communes et les particuliers qui s'investissent dans le solaire doivent
nécessairement être aidés pour s'équiper. Si cette aide est maintenue, les
vocations naîtront et l'augmentation sensible des commandes fera rapidement
baisser le prix de revient des capteurs et de tous les appareils spécifiques en
matière d'énergie solaire, de sorte qu'après un certain temps l'aide ne sera
plus nécessaire.
Votre rôle, comme le nôtre, est également de communiquer sur les vraies
énergies renouvelables et propres, comme l'est, par excellence, le solaire.
Personnellement, je vais de colloque en symposium à travers l'Europe pour
expliquer ce que nous pouvons faire dans une petite commune de 4 000 habitants
et pour essayer de démontrer que le solaire, tout comme le développement
durable, est l'affaire de tous, y compris de ceux qui n'ont pas de gros
moyens.
Je ne prendrai que deux exemples. Un toit solaire installé voilà dix-huit ans
déjà sur notre centre sportif et nautique nous a permis de réduire de 75 % la
note énergétique et d'économiser ainsi plus de 2 millions de francs nets,
c'est-à-dire investissements déduits. Dès 2002, l'installation d'un toit
solaire photovoltaïque de 250 mètres carrés sur le bâtiment de nos services
techniques permettra de fournir l'électricité nécessaire au bâtiment et à
l'alimentation de trois véhicules électriques. Tout cela n'est pas du folklore
!
J'ai calculé que, si chaque commune de France faisait le même effort, au
demeurant très modeste puisque nous comptons bien le doubler ou le tripler dans
les années à venir, ce sont au moins 6 milliards de kilowattheures solaires que
nous pourrions produire dans notre pays et, annuellement, 1 500 000 tonnes de
gaz carbonique que nous ne rejetterions pas dans l'atmosphère, soit plus de 10
% de l'effort national nécessaire pour respecter le protocole de Kyoto.
Je vous remercie de m'avoir permis de chanter mon credo car je suis de ceux
qui considèrent que l'avenir de la planète est l'un des sujets les plus
préoccupants des décennies futures, mais aussi l'une des tâches les plus nobles
des responsables politiques que nous sommes.
Nous devons, pour reprendre un mot de Paul Delouvrier, « voir plus loin pour
voir plus juste ». C'est en effet à la planète qu'habiteront nos petits-enfants
que nous devons penser.
J'ajouterai, enfin, quelques mots. Le solaire, c'est l'énergie de demain pour
de multiples raisons.
Ecologique, d'abord, car, c'est l'énergie la plus propre et la plus pérenne.
Le soleil brillera encore pendant un certain nombre de milliers d'années et
nous n'avons donc pas lieu d'être inquiets à cet égard.
Economique, ensuite, car, lorsque la technologie, qui évolue chaque jour, aura
encore progressé, ce sera une énergie très bon marché, et sera alors créée une
véritable industrie du solaire créatrice d'emplois.
Politique, en outre, car plus aucun pays n'aura son destin entre les mains de
quelques pays producteurs d'énergie fossile ou nucléaire.
Humaine, car c'est le solaire qui libérera les peuples - je pense à nos amis
africains, pourtant comblés par la présence du soleil - qui n'ont pas accès,
faute de moyens, aux énergies classiques.
Ma petite commune étant jumelée avec un village tchadien, nous avons envoyé
aux habitants de celui-ci quelques mètres carrés de capteurs. C'est la première
fois que, dans cette région, l'électricité est produite ainsi. Ce modeste
exemple est un symbole ! C'est aussi et surtout pour cela que nous devons mener
le combat pour l'énergie solaire.
(Applaudissements sur les travées
socialistes et sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Poniatowski.
M. Ladislas Poniatowski.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la
discussion du projet de loi de finances pour 2002 nous offre l'occasion de nous
intéresser à l'actualité du marché de l'énergie et à la politique que mène le
Gouvernement dans ce secteur essentiel pour la compétitivité de notre économie
et le bien-être de nos concitoyens.
Au Sénat, nous sommes frappés du manque de réactivité de la politique conduite
par la majorité plurielle. Si l'immobilisme peut tenir lieu de volonté
politique, alors, monsieur le secrétaire d'Etat, vous êtes dans le vrai. Si
l'ambition, le courage et la détermination sont des vertus à cultiver, vous
vous trouvez, je le crains, dans l'erreur, et je vais m'efforcer de le
démontrer, comme je l'ai fait à plusieurs reprises ici même ainsi que lors de
votre audition en commission.
J'illustrerai mon propos avec l'exemple offert par votre incapacité à prendre
des décisions qui sont urgentes pour le secteur gazier français. Cette
impuissance se manifeste dans deux dossiers clés : d'une part, la transposition
de la directive gazière de 1998 et, d'autre part, le dossier de l'adaptation du
statut de GDF. Cette impuissance est d'autant moins excusable que ces deux
sujets pouvaient être traités séparément et que vous les avez associés afin de
justifier, je le crains, grâce au retard pris sur l'un, votre incapacité à
résoudre l'autre.
Comme vous le savez, mes chers collègues, la France aurait dû transposer la
directive de 1998 portant libéralisation - très progressive ! - du marché
gazier avant le mois d'août 2000 : je dis bien « 2000 ». Le Gouvernement a,
comme il l'avait fait pour le secteur de l'électricité, choisi de déposer, le
17 mai 2000, un projet de loi sur le bureau de l'Assemblée nationale, à titre
de « pierre d'attente ». Ce texte, vous n'en serez pas surpris, est resté sur
le bureau de l'Assemblée nationale et il est fort à parier qu'il y demeurera
quelque temps et que la « pierre d'attente » ne deviendra pas une clef de voûte
de sitôt.
Je crois, pour ma part, que la transposition de cette directive aurait, au
contraire, permis de clarifier un certain nombre de questions graves, à
l'instar du sort des contrats à long terme dont chacun connaît l'importance sur
le marché gazier. Nous assistons bel et bien à une démission de l'exécutif - et
je pèse mes mots, monsieur le secrétaire d'Etat -, à qui il revient de procéder
à l'inscription de cette transposition à l'ordre du jour du Parlement.
Mais il s'y refuse obstinément, malgré nos appels réitérés. De ce fait, la
directive est juridiquement applicable, sans que l'on sache exactement ce qui
est d'application directe et ce qui ne l'est pas. On s'en remet à Gaz de France
pour établir un tarif provisoire de l'accès au réseau, un « provisoire » qui
tend d'ailleurs à s'éterniser, notez-le bien, puisqu'il dure depuis près d'un
an et demi. On navigue un peu à vue, en attendant les élections.
Bref, le Gouvernement « fait le mort » et ne souhaite qu'une chose : c'est que
la Commission européenne le menace afin de pouvoir dire à sa majorité
plurielle, ou tout au moins à certains des membres de celle-ci, qu'il n'y est
pour rien et que c'est contraint et forcé qu'il procède à cette
transposition.
Certes, la Commission européenne ne dit rien car d'aucuns sont encore plus en
retard que nous en Europe : tant mieux, et pourvu que ça dure encore un peu.
Mais, je vous le demande, où est le courage politique, où se trouve l'ambition
pour la France dans cette attitude où la crainte le dispute à la duplicité ? Au
demeurant, cette politique a déjà eu un effet néfaste sur Gaz de France puisque
l'Espagne, qui, elle, a procédé à une transposition plus effective, a usé -
vous l'avez lu dans la presse - de son pouvoir de rétorsion pour interdire à
notre opérateur historique d'étendre ses activités au-delà des Pyrénées.
J'observe en outre que, lorsque le Gouvernement veut, il peut parfaitement !
La meilleure preuve en est que le projet de loi de finances rectificative
prévoit le transfert de l'Etat à Gaz de France de la propriété du réseau
gazier, moyennant un acompte de 180 millions d'euros. Permettez-moi de
considérer, monsieur le secrétaire d'Etat, que cette réforme tend davantage à
permettre au Gouvernement d'empocher une coquette recette supplémentaire en ces
temps de baisse des rentrées fiscales qu'à donner les moyens à Gaz de France de
mener à bien une stratégie industrielle cohérente. J'observe d'ailleurs que nul
ne sait avec précision quel sera le solde de cette opération pour Gaz de France
: on verra plus part, sans doute !
Vous vous apprêtez à utiliser ici ce que, lors de l'examen d'un texte portant
transposition de diverses directives, j'avais déjà appelé la « législation par
appartements » et le tronçonnage des textes. Hélas ! les problèmes demeurent
posés dans leur globalité, même si vous tentez d'en résoudre une partie en
fonction de l'intérêt du Gouvernement et au détour d'un texte portant diverses
dispositions.
J'en termine, mes chers collègues, avec la question de la transposition de la
directive de 1998, en soulignant que, du train où vont les choses, les Quinze
auront adopté une nouvelle directive de libéralisation avant que celle-ci n'ait
été transposée, puisque l'expérience prouve que le Gouvernement est libéral à
Bruxelles, tout comme nous, et malthusien à Paris, tout comme sa majorité
plurielle ! Qu'y aurons-nous gagné, sinon d'avoir perdu trois, voire quatre ans
?
Venons-en à l'adaptation du capital de Gaz de France aux ambitions qui sont
les siennes. Ses ambitions, nous les connaissons : tout comme Electricité de
France, Gaz de France souhaite accroître ses activités sur les marchés
étrangers. Cette entreprise veut servir 15 millions de clients dans le monde en
2005 et doubler de taille en nouant des partenariats aussi bien en amont qu'en
aval de son activité de distribution gazière.
Le personnel de Gaz de France est déjà à pied d'oeuvre. Les prises de
participation en Amérique du Sud, - au Mexique, en Argentine et en Uruguay -
sont très importantes. En Europe, l'entreprise participera à la privatisation
de l'opérateur historique de Lituanie, comme nous venons de l'apprendre par la
presse.
Pour mener cette politique, Gaz de France doit réaliser des investissements
colossaux. Songez que, sur le 1,9 miliard d'euros investi en 2000, près du
quart l'a été en prises de participations à l'étranger et en créations de
filiales.
Pour renforcer ses positions, Gaz de France doit accroître ses réserves et sa
production et ne plus être quasi exclusivement un vendeur. Bref, Gaz de France
doit se diversifier.
C'est précisément pour cette raison que se pose la question des moyens dont
l'Etat dotera Gaz de France pour parvenir à ses fins. Lui permettra-t-on
d'émettre des quasi-fonds propres tels que des titres participatifs ?
Procédera-t-on à sa sociétisation, c'est-à-dire à sa transformation en société
à capitaux publics ? Telles sont les questions auxquelles nous souhaiterions
obtenir des réponses claires si possible.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Aujourd'hui ?
M. Ladislas Poniatowski.
Comme vous le voyez, monsieur le secrétaire d'Etat, notre propos n'est
nullement empreint d'idéologie. Nous ne vous demandons pas plus la
privatisation de Gaz de France que nous n'avions souhaité, voilà trois ans, la
privatisation d'Electricité de France !
Non, le Sénat est parfaitement conscient des enjeux humains et industriels qui
conditionnent le développement futur de Gaz de France. C'est ce développement
qui permettra, peut-être, demain, de payer les retraites de ses agents ! Le
dogmatisme, monsieur le secrétaire d'Etat, n'est pas de ce côté de l'hémicycle,
il est chez certains de vos amis pour lesquels le marché et le profit sont, par
essence, des mots tabous !
Permettez-moi de conclure mon propos sur une ultime observation.
Lorsque nous interrogeons les dirigeants des grands établissements publics
français du secteur de l'énergie, nous les sentons tous prêts à partir à la
conquête des marchés étrangers. Monsieur le secrétaire d'Etat, fiez-vous plus à
leur sens des affaires qu'aux vieilles lunes qui ont votre oreille et qui ne
contribueront à rien d'autre qu'à rendre précaire un avenir qui pourrait être
florissant pour cette entreprise nationale et pour notre pays.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR
et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
(Applaudissements sur les travées
socialistes.)
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat à l'industrie.
Monsieur le président, mesdames,
messieurs les sénateurs, pour répondre à vos interventions, et en particulier à
celles des excellents rapporteurs MM. Clouet et Grignon, mon ami Jean Besson et
M. Hérisson, je structurerai mon propos autour de deux points essentiels.
Tout d'abord, ce projet de budget est au service d'une compétitivité
économique que la France a déjà conquise et qu'elle doit conforter.
Ensuite, nous menons effectivement une politique de stratégies industrielles,
contrairement à ce qu'ont affirmé à cette tribune les détracteurs de cette
réalité.
Bref, je crois, pour reprendre l'expression excellente de M. Trémel, que je
vous présente un bon bilan, un bilan inspiré par le modernisme, comme l'a
souligné M. Rinchet.
Ce budget est au service de la compétitivité économique.
Il intègre tout d'abord des mesures nouvelles importantes qui s'élèvent - ces
chiffres n'ont pas été cités à la tribune, et je le regrette - à plus de 33
millions d'euros en dépenses ordinaires et en crédits de paiement, et qui
correspondent à quatre priorités caractérisant notre stratégie industrielle :
formation, innovation, reconversion et sécurité.
La première priorité concerne la formation.
Former les ingénieurs qui contribueront de manière décisive à la compétitivité
de l'industrie française est une nécessité ; M. Laffitte l'a souligné avec
brio, comme à son habitude. La France s'enorgueillit d'un réseau d'écoles
d'ingénieurs de très bon niveau. Mais il faut former plus d'ingénieurs, les
former aux technologies nouvelles - à celles de l'information et de la
communication, et aux biotechnologies, notamment - et les former aussi beaucoup
plus clairement à l'entreprenariat et à la prise de risques dans la société
économique.
A cet objectif essentiel qui prépare ô combien l'avenir, le projet de budget
apporte une réponse d'envergure : les crédits consacrés à la formation des
ingénieurs augmenteront de 7,8 % en 2002.
M. Gérard Delfau.
Très bien !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Au total, mesdames, messieurs les sénateurs, les
crédits pour la formation des ingénieurs auront augmenté, depuis 1997, soit en
cinq ans - écoutez ce chiffre, car il est très significatif -, de 37 %.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
J'en viens à la deuxième priorité qu'est l'innovation.
A l'évidence, l'innovation devient de plus en plus le facteur clé de notre
compétitivité industrielle. Les crédits publics représentent 11,2 % du
financement de l'innovation des entreprises, soit la deuxième source de
financement, la part de l'autofinancement se situant aux alentours de 73 ou 74
%.
Messieurs Grignon, Laffitte et Marest, j'ai pu mesurer le rôle déclencheur et
structurant de ces crédits au regard de la concurrence internationale lors de
la conférence de presse que j'y ai consacrée cette semaine, conjointement avec
les présidents d'un certain nombre d'entreprises concernées. A cette occasion,
ces derniers ont pu confirmer le rôle décisif de ces crédits tant dans le passé
que pour l'avenir, en vue de les encourager à innover, à se lancer dans une
stratégie très offensive de politique industrielle, bref, à vouloir être les
meilleurs, les
leaders
mondiaux dans leurs créneaux.
Le présent projet de budget consolide l'action volontariste entreprise depuis
1997.
La capacité d'engagement de l'ANVAR est accrue à 235 millions d'euros au
total. Elle intègre évidemment les remboursements d'avances, remboursables en
cas de succès, et la mobilisation des reports.
M. Clouet a souligné combien ce projet de budget était en effet aussi
l'expression d'un rattrapage des reports de crédits qui sont indispensables et
qui démontrent bien notre action volontaire. En effet, s'il y a report, c'est
que nous n'avions pas pu, malgré nos efforts, mettre en oeuvre sur les
exercices précédents les crédits abondants d'une politique industrielle
d'ensemble forte et ambitieuse.
Les autorisations de programme sur le chapitre essentiel 66-01 sont portées à
282 millions d'euros, soit 1 850 millions de francs. C'est la première fois
qu'un tel chiffre est atteint ! Lors de mon arrivée au secrétariat d'Etat à
l'industrie, en 1997, elles s'élevaient en effet à 1 500 millions de francs
seulement ! On ne peut donc pas donner de leçons à cet égard à ce gouvernement,
qui a porté en cinq ans les crédits de l'innovation industrielle et des
encouragements à l'innovation industrielle de 1 500 millions de francs à 1 850
millions de francs, et qui a ainsi montré le chemin d'une véritable politique
d'avant-garde - une politique d'« en-avant », dirais-je, si je m'exprimais en
termes militaires - en ce qui concerne l'encouragement à l'innovation
industrielle.
Ces dotations d'un niveau jamais atteint permettront de poursuivre la réforme
engagée depuis 1998, d'une part, pour faire émerger de façon collective avec
les chercheurs et les entreprises les priorités de l'innovation grâce aux
quatorze réseaux nationaux de recherche mis en place - le premier, le réseau
national de recherche en télécommunications a été mis en place en mars 1998 -
et, d'autre part, pour renouveler les entreprises bénéficiaires en mettant
l'accent sur les entreprises petites et médianes. En effet, nous constatons
que, par rapport à ce qui se passe chez certains de nos partenaires de l'Union
européenne, et notamment chez notre voisin et principal concurrent qu'est
l'Allemagne, les entreprises médianes ne sont pas assez nombreuses en
France.
Cette démarche porte d'ailleurs ses fruits : en 2000, 200 millions de francs
de plus qu'en 1999 ont été engagés sur le chapitre 66-01. Nous engageons donc
beaucoup mieux les crédits, par ailleurs beaucoup plus abondants. Dès
maintenant, les petites et moyennes industries disposent de 30 % des aides dès
notification, ce qui répond à l'une des demandes qui avait été formulée à cette
tribune par les sénateurs, monsieur le rapporteur général.
La troisième priorité concerne les restructurations.
Pour 2002, je vous propose d'augmenter la capacité d'intervention au titre des
restructurations de 3,7 % et de la porter à 43,5 millions d'euros, au profit
des crédits de politique industrielle hors CIRI, le comité interministériel de
restructuration industrielle, et du Fonds d'industrialisation des bassins
miniers, le FIBM, auquel tant de sénateurs sont à juste titre attachés.
Je viens de mettre en place un nouveau dispositif dédié à la reconversion
industrielle qui trouvera sa première application en région Basse-Normandie.
Les sociétés chargées de la réindustrialisation rendront compte en toute
transparence aux services de l'Etat et aux élus, donc aux sénateurs. Le
Gouvernement s'est doté d'une gamme complète de moyens permettant de coordonner
les interventions nécessaires à la revitalisation des bassins d'emploi touchés
par des fermetures d'établissement, en associant les entreprises concernées.
La quatrième priorité est celle de la sécurité.
Le nouvel inventaire de référence des déchets radioactifs par l'Agence
nationale des déchets radioactifs est financé en totalité dans le projet de
budget pour 2002. C'était bien nécessaire étant donné la multiplicité des
sources radioactives dans l'industrie, le secteur médical, les professions
libérales - que sais-je encore ?
Le laboratoire national d'essais regroupera et développera d'ici à 2003 les
moyens de la métrologie française, qui est une des priorités du ministère de
l'industrie depuis cinq ans.
Le souci de la sécurité s'illustre tout particulièrement - j'en ai discuté
hier et ce matin même avec M. Jean-Pierre Masseret, et M. Yves Coquelle l'a
évoqué - dans l'accentuation de l'effort engagé depuis trois ans pour
accompagner la mise en oeuvre des dispositions nouvelles du code minier,
dispositions que je vous avais soumises voilà deux ans et que vous avez votées,
à l'unanimité, mesdames, messieurs les sénateurs. Ainsi, les crédits de
paiement pour la sécurité dans les mines sont multipliés par deux.
S'agissant de l'ennoyage du bassin ARBED, j'ai tenu, hier, une réunion très
positive et productive. Elle a été vécue comme telle par les élus locaux et les
élus nationaux concernés, ainsi que par les associations représentant la
population. Cette réunion a permis d'avancer, dans la mesure où a été fixé un
délai de trois ans avant tout ennoyage pour répondre aux enjeux de sécurité
publique et pour étudier la poursuite des pompages par les collectivités.
Je veux réaffirmer ici que c'est la sécurité des personnes et des biens qui,
aux yeux du Gouvernement, prime sur toute autre considération, notamment de
coût et de budget. La sécurité sous le contrôle des experts est pour nous un
absolu ; je le dis tout particulièrement à l'intention des sénateurs
concernés.
Naturellement, l'ensemble des recommandations des experts, et notamment celles
qui concernent la sécurité des personnes et des biens, seront mises en oeuvre
pendant ce délai de trois ans que j'ai décidé d'accorder hier, pour trouver une
solution au problème humain et économique grave auquel nous sommes confrontés
depuis des années.
Toutes les solutions, y compris le comblement, seront étudiées pour le
traitement des zones à risque. Les décisions seront toujours prises, comme je
l'ai fait depuis 1997, en concertation permanente avec les élus concernés, sur
des bases objectives relevant, la plupart du temps, de l'expertise technique
internationale ou nationale, de manière que tout ce que nous ferons soit guidé
par l'objectivité et le souci, je le répète, d'assurer la sécurité.
Outre ces mesures nouvelles importantes, mon budget est marqué par une gestion
attentive de l'ensemble des crédits. Des baisses de crédits sont ainsi prévues
sur cinq chapitres ciblés, en raison de l'existence de reports ou de nouvelles
réalités.
Concernant la construction navale, monsieur Grignon, si la réintroduction d'un
mécanisme d'aide spécifique devait être décidée à l'échelon communautaire,
cette aide devrait concerner également les méthaniers. C'est ce que j'ai fait
valoir aux commissaires européens concernés.
Par ailleurs, monsieur Grignon, nous sommes conscients de l'importance du lien
entre vente et après-vente pour l'ensemble des acteurs de la filière automobile
et pour les questions de sécurité. J'ai clairement indiqué à la Commission
européenne que le Gouvernement ne saurait accepter une remise en cause de ce
principe. Je l'ai fait en concertation permanente avec les constructeurs
automobiles français.
L'une des plus belles industries françaises, toujours en croissance en 2001,
l'industrie automobile, mérite que l'on se batte pour elle, et j'attends les
propositions qui seront formulées par la Commission au début de 2002. Mais j'ai
bien cadré le débat : pour le Gouvernement français, il ne s'agit en aucun cas
de renoncer à ce que vous avez, à juste titre, défendu dans votre
intervention.
Au total, pour 2002, les crédits de l'industrie s'élèveront à 730 millions
d'euros en autorisations de programme ; ils sont donc stables. Ils atteindront
2 295 millions d'euros - moins 3,6 % - en dépenses ordinaires et en crédits de
paiement. Ils participent ainsi à la réduction des prélèvements, élément de
compétitivité des entreprises, tant demandée dans cette enceinte.
Mesdames, messieurs les sénateurs, notre politique est une politique de
stratégie industrielle, structurée autour de quatre axes.
Le premier est l'économie de l'innovation. C'est - je le disais au début de
mon propos - la clé de la compétitivité d'aujourd'hui et des emplois de demain
dans tous les secteurs.
Dans le textile, par exemple, monsieur Grignon, nous ne surmonterons la
concurrence des pays émergents que par un effort accru d'innovation et de
montée en gamme. Je vous annonce d'ailleurs que je mettrai en place un
quinzième réseau national d'innovation, le réseau d'innovation sur le textile
habillement. Je l'installerai officiellement, avec son comité d'orientation,
dès le mois de janvier prochain, montrant ainsi que je crois à l'avenir d'un
secteur que l'on aurait tort de considérer comme un secteur traditionnel, voire
comme un secteur du passé. Au contraire, bien des actions innovantes peuvent
être menées dans ce secteur ; nous en discuterons avec ses représentants.
Par ailleurs, comme le Premier ministre vient de le rappeler, nous avons
réalisé, en quatre ans, des évolutions décisives, qui doivent être poursuivies,
pour faire de la France l'économie numérique la plus dynamique d'Europe.
Dans l'appropriation des technologies de l'information et de la communication
par les entreprises, les territoires et les particuliers, nous accusions un
retard très important. Ce retard est très largement derrière nous : les
technologies de l'information et de la communication représentent aujourd'hui 6
% de notre produit intérieur brut.
Les entreprises se sentent partie prenante dans l'économie numérique. La part
de la France dans le commerce électronique a doublé : d'après une étude très
récente menée par le SESI, le service statistique du ministère de l'industrie,
50 % des Français se sentent concernés par le numérique dans leur vie
quotidienne.
Le projet de loi sur la société de l'information, que j'ai présenté en conseil
des ministres le 13 juin dernier, définit un cadre clair et précis, un
véritable cadre de confiance du développement des technologies de l'information
et de la communication.
Ces évolutions se sont appuyées sur l'action continue et déterminée que j'ai
conduite pour faire baisser les tarifs d'accès à Internet, à la téléphonie fixe
et mobile.
Nous sommes maintenant parmi les pays les moins chers d'Europe pour l'accès à
Internet. Nous allons poursuivre dans cette voie pour que, rapidement, puisse
entrer en vigueur un tarif forfaitaire d'accès illimité inférieur à deux cents
francs par mois. Nous montrerons ainsi que nous restons le pays le moins cher
s'agissant de l'accès massif et populaire à cette forme de diffusion de la
culture, et nous ferons de cet accès facile au Net par les petites et moyennes
entreprises un instrument offensif de notre vie économique.
A M. Poniatowski, qui s'inquiétait de nos résultats en la matière, je
répondrai que la table ronde que j'ai tenue mardi avec les opérateurs a permis
de confirmer - de l'avis même des industriels, opérateurs et fabricants de
terminaux - les atouts dont la France dispose et d'ouvrir les bases d'une
démarche partenariale pour les préserver.
J'ai annoncé ce matin même, mesdames, messieurs les sénateurs, la signature de
l'accord que j'ai négocié avec les trois opérateurs mobiles et qui va permettre
d'accélérer le programme prévu cet été, à Limoges, lors du comité
interministériel d'aménagement du territoire, pour le système GSM.
J'ai, par ailleurs, annoncé ce matin une réduction de la participation
publique et des collectivités locales et de l'Etat. Ces derniers n'auront plus
désormais, grâce à cet accord scellé depuis quelques heures, qu'à financer les
pylônes nécessaires à la diffusion et à l'achèvement de la couverture des 1 480
communes identifiées comme non couvertes lors du comité interministériel
d'aménagement du territoire. Ils n'auront donc à débourser qu'une somme de 400
millions à 500 millions de francs au lieu du milliard de francs prévu dans
l'esquisse précédente ; j'ai ainsi réduit de moitié la participation publique.
Par ailleurs, les opérateurs Orange et SFR se sont engagés à financer les
équipements actifs pour 500 millions de francs chacun.
En deux ans - et non pas trois, comme cela avait été envisagé voilà quelques
semaines - les 1 480 communes concernées seront ainsi couvertes par au moins un
opérateur et, pour la moitié d'entre elles, par deux opérateurs.
Voilà un progrès très significatif, qui témoigne de ce partenariat qui s'est
instauré avec les opérateurs et les industriels, partenariat fructueux qui
augure bien de l'avenir de toutes ces technologies.
Je suis également très confiant dans l'avenir de l'UMTS. Je crois que, grâce à
la politique très sage en matière de prix des licences que nous avons définie
M. Fabius et moi-même, la France devrait se placer au premier rang des pays
d'Europe qui doteront leurs entreprises - notamment les PME et les PMI - et les
particuliers de la capacité d'utiliser ces moyens. La compétitivité des
premières s'en trouvera accrue, tandis que les seconds en bénéficieront dans
leur vie quotidienne en termes de communication et d'accès à la culture.
Je crois pouvoir dire que, grâce à cette politique, qui contraste avec la
position adoptée par certains de nos partenaires européens, nous avons pris les
moyens d'être les premiers et les meilleurs, lorsque la technologie le
permettra, au cours des toutes prochaines années.
Monsieur Laffitte, sachez que j'ai engagé, depuis près de cinq ans, un effort
vigoureux en faveur des biotechnologies, effort qui se traduira, en 2002,
conformément à une décision prise par M. Fabius et par moi-même, par un
financement supplémentaire de 500 millions d'euros en faveur des entreprises de
ce secteur grâce à la mobilisation de 100 millions d'euros par l'Etat. M.
Schwartzenberg a évidemment participé à ce mouvement positif en faveur des
biotechnologies.
Notre ambition est de placer les biotechnologies françaises à la première
place européenne d'ici à cinq ans. Je sais que vous souscrivez à cet
objectif.
S'agissant des brevets, monsieur Grignon, je vous répète combien je partage
les conclusions de l'excellent rapport que vous m'avez transmis voilà quelques
mois. Vous connaissez l'action déterminée que je mène depuis quatre ans dans ce
domaine et vous avez approuvé les accords de Londres à cet égard. Il faut
maintenant que nous transformions ensemble l'essai à l'échelon européen en
renforçant, sans accepter ce que l'on appelle la « nationalisation » du
problème par les différents Etats membres, le rôle de l'office européen des
brevets et en modernisant son fonctionnement, c'est-à-dire en le rendant plus
rapide dans ses décisions.
Il nous faut poursuivre dans cette voie. A titre personnel, je pense,
mesdames, messieurs les sénateurs, que le rapport Charzat constitue une
excellente feuille de route pour l'action gouvernementale dans les mois et les
années à venir, centrée sur une politique favorable à l'initiative
entrepreneuriale, à la simplification, aux encouragements fiscaux
indispensables et à la reconnaissance des succès des créateurs et des
innovateurs.
Cette politique permettra, je le pense, aux entreprises spécialisées dans les
technologies nouvelles de trouver la voie de la croissance. Elle permettra
également d'encourager les chefs d'entreprise à prendre des risques. Une
économie moderne de croissance, favorable à l'emploi, doit aller dans ce sens
de manière très claire.
Notre deuxième stratégie, c'est un Etat plus proche.
C'est un Etat à l'écoute des élus, des partenaires sociaux et des entreprises.
J'y suis évidemment très attentif.
C'est un Etat plus proche des entreprises en région. Les engagements ambitieux
pris dans le cadre des contrats de plan - FDPMI et ATOUT, procédures bien
connues - sont entièrement respectés à travers une dotation de près de 110
millions d'euros en autorisations de programme.
Depuis 1997, dans ce domaine, les crédits ont progressé de 6,4 %, et 5
milliards de francs permettront d'assurer la dynamique régionale des
technologies clés définies par plus de six cents experts indépendants. Il
s'agit, en quelque sorte, de l'armature de la prospective active dans nos
entreprises. Cela concerne notamment les régions en mutation.
M. Raffarin a évoqué le rôle des chambres de commerce et d'industrie, que nous
essayons de dynamiser. Après quelques vicissitudes, il faut le reconnaître,
elles devraient présenter prochainement un projet de portail économique.
Les ressources des CCI sont considérables : 21 milliards de francs par an,
dont 6,3 milliards de francs provenant de l'impôt additionnel à la taxe
professionnelle. Ce sont donc 6,3 milliards de francs de charges pesant sur les
entreprises. Cette somme doit être réellement mobilisée, utilisée
intelligemment. Beaucoup a déjà été fait, mais beaucoup reste à faire, par
exemple dans l'
e-business
, dans l'encouragement à la mise en réseau des
entreprises, dans la formation, dans l'organisation de la sous-traitance, que
sais-je encore...
Naturellement, je compte sur les chambres de commerce et d'industrie pour
aller dans le sens d'un plus grand dynamisme à cet égard, grâce aux fonds
importants dont elles disposent. A titre de comparaison, 6 milliards de francs,
cela correspond aux crédits publics qui, sous forme de crédit d'impôt ou de
crédits budgétaires, sont consacrés à l'innovation en France. Les chambres de
commerce disposent donc, en fait, d'une force de frappe qui équivaut à l'action
de l'Etat en matière d'innovation. Elles doivent utiliser ces fonds avec toute
la conscience que leur importance justifie.
Troisième stratégie : une énergie moins chère et plus respectueuse de
l'environnement, thème qu'a brillamment évoqué M. Jean Besson, rapporteur pour
avis.
Avec le nucléaire, la France dispose - M. Besson l'a souligné avec une
conviction que nous partageons - d'une énergie qui est parmi les moins chères
du monde et qui rejette beaucoup moins de gaz à effet de serre. Nous avons
conforté cet acquis, et M. Marest l'a reconnu : le CEA bénéficiera d'une
subvention globale de 923,6 millions d'euros, consolidant l'effort intervenu en
2001.
Notre avance technologique ne pourra d'ailleurs perdurer que si les Français
ont le sentiment qu'il s'agit de sujets pleinement inscrits dans le débat
démocratique. Je l'ai dit et je le répète : loin de craindre la transparence,
nous l'appelons de nos voeux. C'est en ce sens que le gouvernement de M. Jospin
a toujours agi en ce qui concerne le nucléaire.
Dans le même temps, nous avons conduit une politique sans précédent en faveur
des énergies renouvelables : elles représenteront, en 2010, 21 % de notre
production, chiffre qui traduit bien notre volontarisme en ce domaine.
M. Rinchet, à juste titre, a souligné l'importance de l'énergie solaire. Elle
profitera clairement de ces engagements ambitieux, notamment d'un projet de
directive que j'ai fait accepter par nos partenaires de l'Union européenne sous
présidence française, visant à faire passer le niveau des énergies nouvelles
renouvelables en France de 15 % à 21 %.
Grâce aux tarifs d'achat très avantageux consentis par EDF en faveur de
l'énergie solaire, notre pays participera à cet effort volontariste.
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
C'est un gadget !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Accrue en loi de finances rectificative, la capacité
d'intervention de l'ADEME est ainsi consolidée à hauteur de 37 millions
d'euros.
Monsieur Besson, concernant l'éolien,...
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Autre gadget !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... nous travaillons, mon excellent collègue M. Cochet
et moi-même, à une simplification et à une amélioration des procédures, avec
notamment un objectif : convaincre les populations locales - ce qui est parfois
difficile, j'en conviens - de l'utilité d'installer des machines éoliennes, en
particulier en les associant plus étroitement aux décisions qui précèdent leur
mise en place.
Quatrième stratégie : des services publics de qualité pour tous. Cela signifie
le respect de certaines exigences : droit à l'électricité, absence
d'augmentation du prix du timbre - j'y reviendrai dans un instant -, tarifs
téléphoniques particuliers pour les plus démunis, etc.
Voilà quelques exemples de ce qui a marqué l'action du gouvernement de M.
Jospin, une action solidaire, résolument favorable au développement des
services publics, conforme aux engagements politiques que nous avons pris dès
juin 1997.
Monsieur Besson, monsieur Trémel, en ce qui concerne le gaz, le Gouvernement a
choisi de transférer le réseau de transport à Gaz de France, ce qui va
conforter cette entreprise publique. Nous aurons prochainement l'occasion de
parler de ces sujets ici même.
Monsieur Trémel, le plan de desserte gazière que j'ai arrêté en avril 2000
permettra à 1 600 nouvelles communes d'être raccordées en trois ans.
Croyez-moi, les maires qui voient arriver le gaz dans leur commune sont
extrêmement satisfaits. Nous recevons d'ailleurs régulièrement des lettres
d'élus qui tiennent à nous féliciter de cette bonne décision qu'est la
programmation triennale de l'élargissement de la desserte en gaz. Nous avons
effectivement doublé le rythme de desserte gazière de nos petites communes
rurales.
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Reste le problème du prix du gaz !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Il faudra, monsieur Poniatowski, donner le plus vite
possible à Gaz de France les moyens d'une entreprise moderne, présente en
amont, au niveau de la production.
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Et il faudra aussi baisser les tarifs !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le service public est un combat de conviction, et
c'est un combat pour des valeurs. Nous le menons, autour du Premier ministre,
auprès de nos partenaires européens, pour que l'Europe se construise sur nos
valeurs, et ce sont des valeurs élevées.
Monsieur Hérisson, nous venons de franchir une étape avec l'accord du 15
octobre dernier sur la directive postale. La libéralisation totale du secteur,
voulue par certains de nos partenaires européens, a été écartée.
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Pas voulue par nous !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Vous nous avez peut-être rejoints dans cet objectif
tendant à écarter la libéralisation, après avoir été prolixes dans l'autre sens
au cours de ces dernières années !
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
C'est exactement l'inverse !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Je vous invite à vous référer aux termes précis de
l'accord du 15 octobre. L'adaptabilité du service public postal est reconnue.
Au total, dans les huit années qui viennent, nous avons la garantie que moins
de 10 % du chiffre d'affaires de La Poste seront mis en concurrence.
Monsieur Trémel, nous veillerons, dans le prochain contrat d'objectifs et de
progrès en cours de négociation avec La Poste, à ce que cette entreprise
publique qui nous est si chère puisse continuer à se développer dans les
conditions actuelles, en s'appuyant sur ce qui a fait son succès, à savoir la
qualité et la proximité, auxquelles M. Delfau est particulièrement attaché.
Le Gouvernement est bien évidemment opposé à tout démantèlement de La Poste.
Il est favorable au développement de ses activités financières, dans le respect
des règles tant nationales qu'européennes de la concurrence. Ce développement
ne remettra en cause ni l'unité de La Poste ni celle du réseau.
Dès à présent, nous avons fait le choix de reconduire dans le projet de loi de
finances pour 2002 les engagements financiers de l'Etat, qui concernent en
particulier la prise en charge par celui-ci de l'évolution de l'excédent du
poids des retraites de La Poste.
Les élus nationaux et locaux seront associés, le moment venu, aux discussions
du contrat d'objectifs et de progrès de La Poste. Je l'ai dit la semaine
dernière devant l'Association des maires de France - vous étiez présent,
monsieur Hérisson - et je le répète aujourd'hui devant la Haute Assemblée, ce
qui est un honneur pour moi : je tiendrai cet engagement de la manière la plus
absolue.
Monsieur Hérisson, je n'ai pas augmenté le prix du timbre depuis 1997...
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Vous laissez à d'autres le soin de le faire !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... et je n'ai pas l'intention de le faire,
contrairement à vous.
Je trouve choquant, permettez-moi de le dire - la confiance qui règne entre
nous me permet de m'exprimer très franchement - que la majorité sénatoriale
puisse prôner publiquement, officiellement, l'augmentation du prix du timbre,
qui pèse sur les ménages,...
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Non : 90 % des envois postaux concernent les
entreprises !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... y compris donc sur les plus démunis, et qui pèse
sur le développement de ce moyen de transmission de l'information, de la pensée
et de la culture.
Non, il ne faut pas augmenter le prix du timbre si l'on veut être cohérent
avec une politique de solidarité à l'égard des ménages, notamment des plus
démunis d'entre eux,...
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Démagogie !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... et je suis choqué que la majorité sénatoriale
formule une telle proposition.
J'indique à MM. Trémel et Delfau, qui m'ont interrogé sur cette question, que
le contrat d'objectifs et de progrès - la loi l'appelle « contrat de plan »
mais il me semble légitime de montrer qu'il s'agit d'un contrat de progrès -
devra répondre à trois objectifs : premièrement, conforter le développement de
La Poste sur tous ses métiers ; deuxièmement, faire en sorte que La Poste
continue à assurer et à développer les missions de service public sur tout le
territoire, évidemment sous des formes modernisées, adaptées à notre époque,
car le maintien des principes essentiels du service public sur tout le
territoire exige le dynamisme ; troisièmement, garantir - et c'est également
important compte tenu des événements de l'été dernier - le dialogue et la
concertation avec les élus mais aussi, je le souligne en tant que secrétaire
d'Etat, avec le personnel, pour lui assurer que sa situation et ses aspirations
sont pleinement prises en compte par la direction de La Poste.
Je dirai, pour conclure, que nous avons accompli un chemin très important,
décisif même, pour la compétitivité de l'industrie française au cours des cinq
dernières années. Ce chemin doit être poursuivi, car la concurrence
internationale et la mondialisation rebattent constamment et sans pitié les
cartes de l'industrie dans le monde. Il nous faut donc toujours être à la
pointe, en avant, volontaires et modernes.
A périmètre comparable, depuis 1997, et en intégrant les effets du projet de
loi de finances pour 2002, les crédits destinés à l'industrie auront progressé
de 3,5 % ; ce chiffre mérite bien d'être mentionné. Entre 1994 et 1997,
toujours en se référant à des périmètres comparables, les crédits de
l'industrie avaient baissé de plus de 5 % !
(Eh oui ! sur les travées socialistes.)
Si l'on procède à des comparaisons, allons jusqu'au bout, de manière à faire
ressortir la réalité d'une stratégie industrielle offensive, celle qu'a menée
le gouvernement de Lionel Jospin !
(Très bien ! sur les mêmes travées.)
Mesdames, messieurs les sénateurs, les deux chiffres, très contrastés, que je
viens de citer montrent l'importance politique, culturelle, que le Gouvernement
attache à l'industrie, et par là même à l'innovation, ainsi qu'au service
public. Ce thème tiendra certainement une très grande place dans les débats
nationaux que nous aurons l'année prochaine, à l'occasion des deux grandes
échéances électorales à venir.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous devons être fiers de nos entreprises
industrielles : 70 000 emplois industriels supplémentaires ont été créés dans
l'industrie en 2000. Ce chiffre est sans précédent depuis 1974 !
Ne soyons pas timorés dans le soutien que nous apportons aux efforts de notre
industrie, qui représente 20 % du produit intérieur brut pour l'industrie
sticto sensu,
et 40 à 45 % si l'on inclut les services à l'industrie.
Nous devons être fiers d'être la quatrième puissance industrielle du monde !
Nous devons être fiers du fait qu'entre juin 1997 et juin 2001, pour la
première fois depuis vingt-cinq ans, l'industrie française a créé 234 00
emplois nets !
Au cours de la période précédente, c'étaient essentiellement les services qui
créaient des emplois. Ils continuent à en créer, bien sûr, mais l'industrie,
pour la première fois depuis un quart de siècle, entre à son tour dans la
logique de la création d'emplois, sans pourtant obérer sa compétitivité
vis-à-vis de ses concurrentes mondiales.
Nous nourrissons une grande ambition pour une grande industrie. C'est pourquoi
nous poursuivons notre effort déterminé pour son développement à venir.
Comme cela a été déjà souligné à cette tribune, ces dernières années ont été
marquées par un véritable changement de climat, avec une attention très marquée
aux besoins des entreprises, à l'innovation, à la création de nouvelles unités,
à la créativité globale de notre économie industrielle.
Nous sommes désormais, s'agissant de notre industrie, résolument tournés vers
l'avenir, comme certains d'entre vous l'ont reconnu, et comme M. Raffarin
aurait pu l'admettre lorsqu'il a évoqué la création d'entreprises puisque,
contrairement à ce qu'il a indiqué un peu rapidement, le nombre des créations
d'entreprise s'est élevé, en 2000, à 176 700, contre 169 600 en 1999, soit une
progression de 4,2 % en un an.
Mesdames, messieurs les sénateurs, oui, nous sommes offensifs, oui, nous
sommes confiants, oui, nous mobilisons la nation pour une industrie que nous
aimons, oui, nous sommes tournés vers l'avenir !
(Bravo ! et applaudissements sur les travées socialites et sur certaines
travées du RDSE.)
M. le président.
Je rappelle au Sénat que les crédits concernant l'industrie seront mis aux
voix aujourd'hui même à la fin de l'examen des crédits affectés au commerce
extérieur.
ÉTAT B
M. le président. « Titre III : 281 480 691 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV :
moins
16 419 950 EUR. »
Sur ces crédits, la parole est à M. Coquelle.
M. Yves Coquelle.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai déjà attiré votre attention tout à l'heure
sur les dangers que représente la libéralisation du marché de l'énergie.
Quelle n'a pas été ma surprise d'apprendre ce matin que le Gouvernement
s'apprête à déposer un amendement au collectif budgétaire pour 2001, tendant à
la transposition partielle de la « directive gaz », en l'occurence au transfert
des ouvrages de transport de gaz naturel aux opérateurs privés !
Passant outre l'exigence d'un débat sur une question aussi importante, vous
court-circuitez le processus démocratique. Vous savez, monsieur le secrétaire
d'Etat, que, face à l'hostilité des syndicats de la majorité plurielle, le
projet de loi de transposition de la directive n'avait pas pu être inscrit à
l'ordre du jour du Parlement !
Il s'agit donc de valider, sans l'accord de la représentation nationale,
l'ouverture à la concurrence du marché du gaz. Or, selon les informations dont
nous disposons, ce cavalier budgétaire donnerait à l'article relatif au
transfert de la propriété gazière au privé une signification que notre groupe
politique ne peut accepter.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous vous avons entendu tout à l'heure, mais
nos craintes ne sont pas apaisées pour autant. Pouvez-vous nous confirmer ce
cavalier budgétaire et nous donner des précisions sur le contenu de cet
amendement ?
M. Christian Pierret.
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le sénateur, je tiens à vous rassurer.
L'objectif qui est le nôtre est bien de renforcer l'entreprise Gaz de France,
comme nous l'avons fait, il y a quelques années, pour Electricité de France. Le
processus est excatement le même.
Le collectif budgétaire pour 2001 ne comprend pas, à ce stade, de dispositions
autres que celles qui concernent le transfert de la propriété des réseaux de
transport du gaz de l'Etat vers l'entreprise.
Nous restons tout à fait cohérents avec l'idée que je viens d'exprimer : la
défense des intérêts de l'entreprise publique Gaz de France, qui va ainsi
trouver un moyen nouveau de se renforcer, en possédant ses réseaux en propre, à
l'instar d'EDF, par exemple. Il n'y a rien là que de très normal, de très «
entrepreneurial » pour une grande entreprise publique qui n'est absolument pas
menacée mais, au contraire, renforcée par ce projet.
M. le président.
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.
ÉTAT C
M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 156 306 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 55 098 000 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 1 100 370 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 346 268 000 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
J'appelle en discussion l'article 67
quater,
qui est rattaché pour son
examen aux crédits affectés à l'industrie.
Article 67 quater
M. le président.
« Art. 67
quater
. - Le Gouvernement déposera devant le Parlement, dans
les six mois à compter de l'adoption de la présente loi, un rapport sur l'état
du patrimoine immobilier minier, les moyens disponibles pour son amélioration
et sa réhabilitation et les principales orientations retenues dans ce domaine.
»
Sur l'article, la parole est à M. Coquelle.
M. Yves Coquelle.
Nous souscrivons bien évidemment à la lettre et à l'esprit de l'article 67
quater
du présent projet de loi de finances.
Ainsi que je l'avais indiqué lors de la discussion de la première partie, nous
sommes particulièrement préoccupés par la situation du patrimoine des
Charbonnages de France appelé à devenir celui de l'Etablissement foncier de
Nord - Pas-de-Calais, l'EFINORPA, créé en vertu des dispositions des articles
191 et 192 de la loi sur la solidarité et le renouvellement urbains.
Les dispositions concernées avaient consacré le transfert de propriété, en
instituant une exemption d'application des droits de mutation et en précisant
les missions dévolues à l'EFINORPA.
L'enjeu est d'importance. Ce sont en effet 70 000 logements miniers, abritant
300 000 habitants dans plus de 170 communes du Nord - Pas-de-Calais qui sont au
centre de ce transfert de propriété.
Nous pouvons souligner également que l'établissement public est dirigé par un
conseil d'administration original, associant notamment les élus, les
organisations syndicales de la profession et les occupants du parc.
Mais, au-delà des conditions du transfert de propriété, une question
essentielle se pose. Il s'agit du prix auquel les Charbonnages de France
entendent vendre ce patrimoine. Ce prix enregistre en effet dans les faits une
plus-value non négligeable dans la mesure où les logements concernés sont
largement amortis : une part essentielle du parc date de la pleine période
d'exploitation du bassin, avant la Seconde Guerre mondiale.
On sait aussi que ce parc nécessitera d'importants travaux de réhabilitation,
de rénovation et d'entretien.
Il nous paraît donc nécessaire que le rapport prévu par l'article 67
quater
du présent projet de loi de finances prenne en compte l'ensemble
des réalités financières liées au transfert du patrimoine et que soit notamment
posée la question d'une dévolution gratuite, au demeurant justifiée par
l'ancienneté du patrimoine.
M. le président.
Je mets aux voix l'article 67
quater
.
(L'article 67
quater
est adopté.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant l'industrie (et La Poste).
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quinze heures,
sous la présidence de M. Bernard Angels.)
PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS
vice-président
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2002, adopté
par l'Assemblée nationale.
PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES,
COMMERCE ET ARTISANAT
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant les petites
et moyennes entreprises, le commerce et l'artisanat.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Auguste Cazalet,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, si le Gouvernement a souhaité souligner
ses priorités d'action dans ce projet de loi de finances par l'affichage de
budgets en hausse, force est de constater dès lors que les PME, le commerce et
l'artisanat ne figurent pas parmi ces priorités.
Je ne suis pas de ceux qui considèrent qu'il existe un lien mécanique entre
dépense et résultat. Je veux bien admettre qu'un budget sous tension soit
synonyme de gains de productivité et d'une meilleure efficacité de la dépense
publique. Je pense néanmoins que la baisse du budget du secrétariat d'Etat, à
structure constante, de 3,1 % pour des crédits de seulement 61 millions d'euros
est critiquable à double titre.
Cette baisse intervient alors que va venir en discussion devant le Parlement
le projet de loi d'orientation pour les petites entreprises et les entreprises
artisanales. La baisse des crédits du secrétariat d'Etat va ainsi à l'encontre
du signal fort que doit représenter ce texte à l'égard des petites
entreprises.
La baisse du budget du secrétariat d'Etat doit être rapprochée des mesures
proposées par l'article 13 du projet de loi de finances pour 2002, qui institue
un prélèvement exceptionnel de 105 millions d'euros sur les excédents de la
taxe d'aide au commerce et à l'artisanat. Je me bornerai à remarquer que le
montant de ce prélèvement est largement supérieur au total du budget du
secrétariat d'Etat, soit 61 millions d'euros.
Dans ce contexte, la baisse des crédits du secrétariat d'Etat est à tout le
moins inopportune, d'autant que, au sein de ce budget, les crédits d'action
économique baissent de 16,5 %.
Je crois que le secrétariat d'Etat sort aujourd'hui affaibli de la présente
législature. Stagnation de ses effectifs et de son budget, marginalisation de
ses actions au sein de Bercy, absence de synergies avec les autres directions
du ministère, tel est le bilan d'un secrétariat d'Etat qui, depuis 1997, n'a
pas su profiter de sa fusion avec le ministère de l'économie et des finances
pour devenir le « pôle PME » de référence du Gouvernement.
Témoin de cette incapacité, la faible place qu'occupe le secrétariat d'Etat,
seulement 1 % des 5,14 milliards d'euros du jaune budgétaire est consacré à
l'effort financier de l'Etat en faveur des petites et moyennes entreprises.
Le secrétariat d'Etat reste ainsi cantonné à l'action en direction du petit
commerce et de l'artisanat, sans avoir pu étendre son action auprès des autres
types de PME.
Je regrette cette césure, au sein même du ministère de l'économie et des
finances, entre les PME innovantes, qui bénéficient de toutes les attentions,
et les PME qui le seraient moins, celles du commerce et de l'artisanat.
Enfin, j'ajoute que le secrétariat d'Etat ne détient la compétence de principe
ni en matière d'apprentissage ni en matière de crédit aux PME. Il y a là une
très claire limite à son action, que les titulaires du portefeuille ministériel
depuis 1997 n'ont pas pu, ou pas su, lever.
Le secrétariat d'Etat aurait pu, à tout le moins, profiter de son inclusion
dans la sphère de Bercy pour faire preuve de davantage de vertu budgétaire. Il
n'en est rien. L'action de l'Etat en direction des PME du secteur du commerce
et de l'artisanat a pour principale caractéristique la mobilisation d'un
certain nombre d'instruments d'intervention extra-budgétaires dont les dépenses
sont aujourd'hui bien supérieures au budget du secrétariat d'Etat. Ces dépenses
n'étant pas discutées en loi de finances, elles ne bénéficient pas du contrôle
du Parlement.
J'invite le secrétariat d'Etat aux petites et moyennes entreprises à faire
preuve de davantage d'orthodoxie budgétaire et à se conformer aux règles
édictées par son propre ministère de tutelle. J'indique que le transfert d'un
certain nombre de fonds sur les crédits du secrétariat d'Etat n'empêche en rien
de les gérer en relation avec les élus, locaux ou consulaires, et les chefs
d'entreprise !
Je souligne que la souplesse des fonds extra-budgétaires est autant un
inconvénient pour les commerçants et les artisans qu'un avantage : c'est cette
souplesse qui permet au Gouvernement de prélever 105 millions d'euros sur les
excédents de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat !
Je recommande dès lors la suppression des fonds locaux d'adaptation du
commerce rural, dont les crédits sont trop modestes pour être dépensés, et
l'inscription du financement du Fonds national de promotion et de communication
de l'artisanat sur le budget du secrétariat d'Etat, son action étant
inséparable de la politique générale du Gouvernement.
Je recommande également la sanctuarisation du FISAC, le Fonds d'intervention
pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce, en l'érigeant en compte
d'affectation spéciale et en définissant mieux son objet autour d'une mission
d'aménagement du territoire et de solidarité.
Je recommande enfin l'évaluation des actions de l'EPARECA, l'établissement
public d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et
artisanaux.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Gérard Cornu,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les
petites et moyennes entreprises ne sont vraiment pas une priorité pour le
Gouvernement. Vous affichez, monsieur le secrétaire d'Etat, des crédits en
hausse de 2,4 %. Mais, à périmètre constant, comme l'a très justement rappelé
notre collègue M. Cazalet, c'est une baisse de 3,1 % qui nous est en fait
proposée.
Ce budget, fort modeste au demeurant puisqu'il dépasse à peine 60 millions
d'euros, s'articule autour de quatre orientations que vous privilégiez.
Tout d'abord, 40 % de cette modeste enveloppe sont destinés à faciliter
l'accès au crédit des PME. Vous avez choisi de redéployer votre intervention en
direction de la garantie d'emprunt, dont vous jugez l'effet de levier
supérieur. C'est votre choix. Je regrette néanmoins l'abandon des prêts
bonifiés, à mon avis plus accessibles et plus adaptés aux besoins des artisans.
J'espère que l'avenir vous donnera raison, car l'accès au financement est, à
mes yeux, une clef du développement et de la pérennité des petites
entreprises.
Vous présentez ensuite l'appui aux actions d'animation économique comme votre
deuxième priorité, mais les crédits correspondants baissent de 16,5 %. Ce
budget, en recul depuis trois ans, atteint en 2002 un niveau notoirement
insuffisant. Je le déplore, au regard du besoin tout particulier des petites
entreprises d'actions collectives menées par les organisations professionnelles
et les chambres des métiers.
Ces structures sont irremplaçables : vous le savez, elles accompagnent les
politiques publiques, notamment le passage à l'euro et la sécurité sanitaire. A
cet égard, le prélèvement de 105 millions d'euros sur l'excédent de la taxe
d'aide au commerce et à l'artisanat, la TACA, est particulièrement choquant. Le
Sénat en a voté l'annulation, et je m'en félicite.
J'estime que ces sommes devraient, au moins en partie, revenir à l'animation
économique du secteur ou à d'autres priorités. Nous le verrons peut-être
ultérieurement lors de l'examen des amendements qui ont été déposés sur
l'article 67
ter
.
Vous consacrez par ailleurs à la formation professionnelle - votre troisième
priorité - plus du quart du budget, ce qui prend toute son importance dans un
contexte de pénurie de main-d'oeuvre qualifiée. Il s'agit d'une initiative
heureuse.
Enfin, votre quatrième priorité budgétaire concerne les contrats de plan
Etat-région. A ce sujet, je relève qu'à peine plus de la moitié des 94,5
millions d'euros prévus sur la durée du XIIe plan - 2000-2006 - ont fait
l'objet d'une programmation budgétaire.
Je dirai également quelques mots du FISAC, ce fonds doté de ressources
extra-budgétaires d'un montant supérieur au budget propre du secrétariat
d'Etat. Cet instrument précieux de développement local, en milieu urbain comme
en milieu rural, est d'une efficacité largement reconnue, c'est pourquoi je
tiens à en assurer la pérennité.
Dans l'esprit de la nouvelle loi organique de 2001, il serait bon de permettre
le contrôle de ce fonds par le Parlement, tout en le « sanctuarisant ». Ainsi,
la commission des affaires économiques soutient la proposition de la commission
des finances de transformer le FISAC en compte d'affectation spéciale.
Mais, plutôt que des crédits budgétaires, la bonne santé des artisans et des
commerçants dépend de leur environnement économique, fiscal et administratif. A
cet égard, je m'inquiète du ralentissement conjoncturel, et je me dois aussi de
souligner trois motifs de mécontentement.
D'abord, le projet de loi d'orientation des petites entreprises et de
l'artisanat, que vous annoncez tant, n'est toujours pas déposé. Sa discussion
ne pourra donc aboutir avant les élections. Il est pourtant urgent de
moderniser la petite entreprise et de favoriser sa pérennité et son
développement.
Ensuite, l'application imminente des 35 heures aux petites et moyennes
entreprises me préoccupe également. Malgré l'assouplissement récent du plafond
d'heures supplémentaires, les 35 heures pèseront lourdement sur leur
compétitivité. Au nom de bien hypothétiques créations d'emplois, vous
sous-estimez gravement les grandes difficultés d'organisation et les surcoûts
qu'impliquent nécessairement l'indivisibilité de l'emploi, les difficultés de
recrutement et l'appartenance à des secteurs à faible potentiel de gains de
productivité.
Enfin, simultanément, les petites entreprises vont devoir passer à l'euro. Le
retrait du franc et l'introduction de l'euro sont des opérations lourdes, qui
méritent compensation. Je compte sur vous, monsieur le secrétaire d'Etat, pour
négocier rapidement avec les banques, fort du soutien des deux assemblées, un
allégement des commissions perçues sur les paiements par carte, qu'il faut
encourager, vous l'avez souvent dit.
Je vous demande aussi d'exonérer de droits d'enregistrement la conversion du
capital à l'euro, qui permet d'arrondir la nouvelle valeur des parts en euros,
et d'octroyer un délai supplémentaire pour les déclarations fiscales et
sociales durant ces premiers mois chargés de 2002.
Partageant toutes ces préoccupations, la commission des affaires économiques a
émis un avis défavorable sur les crédits consacrés aux PME, au commerce et à
l'artisanat dans le projet de loi de finances pour 2002.
(M. le rapporteur
spécial et M. Ostermann applaudissent.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 24 minutes ;
Groupe socialiste, 21 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 7 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 6 minutes.
Je vous rappelle qu'en application des décisions de la conférence des
présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix
minutes. Je serai intransigeant !
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
projet de budget du secrétariat d'Etat aux PME, au commerce et à l'artisanat
que nous examinons aujourd'hui subit, contrairement aux apparences et quoi
qu'on en dise, une baisse de 3,1 %. M. le rapporteur pour avis vient de le
rappeler.
Ces crédits et les actions correspondantes sont, en outre, disséminés sur
plusieurs lignes budgétaires, ce qui révèle un manque évident de cohérence de
cette politique.
En effet, force est malheureusement de constater qu'elle est loin d'avoir
l'envergure nécessaire.
Ainsi, comme le souligne notre collègue M. Auguste Cazalet dans son excellent
rapport, les crédits stagnent, alors que le ministère s'est vu attribuer de
nouvelles missions en novembre 2000. Cet élargissement, voire cet éparpillement
des attributions nuit à l'efficacité de la politique menée. Notre collègue M.
Cornu a abondé dans ce sens.
Ce manque de cohérence se retrouve à plusieurs niveaux.
En ce qui concerne, tout d'abord, la création-reprise d'entreprise, et plus
précisément la question de son financement, le Gouvernement analyse
correctement le problème, mais y apporte des réponses contradictoires ou
beaucoup trop timorées.
Ainsi, constatant que la véritable difficulté réside dans l'accès au crédit,
rendu difficile du fait de la frilosité des banques, le Gouvernement propose de
recentrer les crédits sur la dotation affectée au fonds de garantie
d'emprunts.
C'est une mesure positive, tout le monde en conviendra. Il est toutefois
dommage que vous vous soyez arrêté en si bon chemin, monsieur le secrétaire
d'Etat. Votre projet de loi d'orientation en faveur de l'artisanat se fait
toujours attendre, ainsi qu'un certain nombre de mesures simples et efficaces
telles que la réévaluation de la quotité insaisissable prévue par la loi de
1909 à un niveau permettant de protéger l'habitation principale et son
indexation sur l'indice du coût de la construction ou encore la limitation des
possibilités de recours au cautionnement du conjoint.
Pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous indiquer l'état
d'avancement de ce projet de loi ainsi qu'éventuellement le calendrier de son
examen par le Parlement ?
Pour compenser ce retard, vous auriez pu adresser un signe fort aux chefs de
petites entreprises en proposant, dans le cadre du présent texte, un certain
nombre de dispositions fiscales simples, afin notamment de faciliter les
transmissions. Ainsi, pourquoi ne pas, d'une part, harmoniser le régime des
sessions de droits sociaux et, d'autre part, permettre le fractionnement du
paiement des droits d'enregistrement ?
Je souhaite maintenant évoquer la politique de simplification des formalités
administratives, monstre du loch Ness !
Là encore, un certain nombre de signes encourageants ont été adressés aux
petites entreprises. On peut citer, par exemple, le relèvement du seuil
d'application du régime fiscal de la micro-entreprise.
En revanche, je ne vois que signes verbaux dans ce que vous présentez comme
une mesure phare, à savoir la dématérialisation des formalités administratives.
Je reste d'autant plus circonspect qu'il ne s'agit nullement de simplification
; les formalités sont en effet non pas supprimées, mais facilitées. En outre,
avant de mettre en oeuvre une telle mesure, ne conviendrait-il pas de favoriser
l'accès des petites entreprises, des commerçants et des artisans aux outils
informatiques et de les aider à se former ? Il me semble qu'il faut procéder
par ordre.
Qu'en est-il aussi de l'état d'avancement du chèque emploi-service dans les
PME, régulièrement évoqué ?
Enfin, pour en terminer avec le thème de l'allégement des contraintes pesant
sur les entreprises, je souhaite aborder les difficultés que pose aux petites
entreprises, et plus particulièrement aux commerçants, le passage à l'euro, que
Gérard Cornu vient d'évoquer : ces derniers se voient, de fait, confier une
mission de service public, mais sans aucune contrepartie financière.
Ne conviendrait-il pas de compenser cette charge supplémentaire en créant un
crédit d'impôt exceptionnel ? Cette mesure serait d'un grand secours pour les
commerçants et, en outre, elle serait peu coûteuse, puisqu'elle ne serait
applicable qu'entre le 1er janvier et le 19 février.
Il est important que les petits commerçants ne soient pas pénalisés. Or, selon
des études réalisées récemment, cela ne semble nullement être le cas. En effet,
des tests grandeur nature réalisés au sein de certaines enseignes ont mis en
avant des taux d'erreur très importants. A ma connaissance, chez McDonald's ce
taux est de 5 % du chiffre d'affaires journalier. Je n'ose imaginer ce qui va
se passer chez les petits commerçants individuels, sachant que le personnel de
ces grandes enseignes a bénéficié d'une formation ! Il conviendrait, par
conséquent, là encore, d'accompagner par un crédit d'impôt exceptionnel la
formation du personnel au passage à l'euro.
Permettez-moi d'évoquer maintenant un autre passage douloureux pour les
petites entreprises, à savoir les 35 heures.
Il s'agit d'une véritable aberration, d'un coup porté à l'économie française
en général et à l'artisanat en particulier. Monsieur le secrétaire d'Etat, je
pense que vous avez bien reçu le message des boulangers ! A entendre ce
message, il m'est revenu à l'esprit un vieil adage : « Le boulanger et
l'artisan travaillent huit heures pour devenir patron. » Vous, vous le faites
travailler seize heures pour qu'ils puissent le rester !
Là encore, monsieur le secrétaire d'Etat, le Gouvernement semble avoir
conscience de l'ampleur et de la gravité du problème, mais la façon dont il
veut le résoudre est tout à fait incohérente.
En relevant par décret à 180 le contingent d'heures supplémentaires - ce qui
est un pas positif - vous effectuez un grand écart. En effet, vous
reconnaissez, d'un côté, le caractère inapplicable de la loi - un tel
contingent revenant à rester aux 39 heures - et, de l'autre, vous vous entêtez
à maintenir une loi inadaptée et vous repoussez le problème à 2004, laissant
ainsi à vos successeurs le soin de le régler à votre place.
Je pense qu'il est temps pour le Gouvernement de faire face à ses
responsabilités avant de casser nos PME car, en s'obstinant ainsi et en
refusant d'admettre ses erreurs, il risque, je l'affirme, de porter gravement
atteinte au dynamisme de notre tissu de petites entreprises.
Rappelons, en effet, que l'artisanat à lui seul représente 10 % de la
population active, soit 2 500 000 personnes, et qu'il a créé, au cours des dix
dernières années, quelque 500 000 emplois stables et très souvent qualifiés.
Enfin, je souhaite le souligner, en dehors du coût, l'une des principales
raisons pour lesquelles les petites entreprises ne peuvent appliquer les 35
heures est qu'elles éprouvent des difficultés à recruter du personnel qualifié,
surtout à temps partiel.
Or, là encore, la politique gouvernementale se révèle incohérente. D'un côté,
on oblige les petites entreprises et les artisans à recruter pour compenser les
35 heures et, de l'autre, on ne porte nullement l'effort sur
l'apprentissage.
En effet, un certain nombre de mécanismes incitatifs ont été récemment remis
en cause. Il en va ainsi de la prime à l'embauche, qui, dans un premier temps,
a été recentrée sur les publics non titulaires du baccalauréat, puis, dans un
second temps, aux entreprises de moins de vingt salariés.
Ces dispositions ont pour conséquence de réduire l'attrait des contrats
d'apprentissage pour les entreprises qui doivent consacrer beaucoup de temps à
la formation de leurs apprentis, temps qui devrait tout naturellement être
compensé financièrement.
Il est vraiment regrettable que le Gouvernement enraye ainsi la dynamique
enclenchée depuis plusieurs années, puisque nous sommes passés de 120 000
apprentis en 1993 à 160 000 en 1999. Le niveau de qualification est lui aussi
en hausse : les niveaux IV et supérieurs sont ainsi passés de 5 % en 1991 à 15
% en 1999. Cependant, plus de 100 000 offres d'emplois qualifiés restent non
satisfaites.
En conclusion, cet ensemble d'incohérences difficilement acceptables montre,
une fois de plus, que les PME, le commerce et l'artisanat ne constituent
nullement la priorité du Gouvernement, alors que ce secteur forme le socle du
dynamisme de notre économie. Cette orientation est d'autant plus dommageable
que les chiffres de la croissance n'incitent nullement à l'optimisme et que,
par conséquent, ce secteur aurait plus que jamais besoin d'être soutenu.
C'est pourquoi le groupe du RPR et moi-même ne pourrons voter les crédits qui
nous sont proposés par le Gouvernement.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
budget que nous examinons aujourd'hui met en évidence le poids des entreprises,
du commerce et de l'artisanat sur le terrain de l'emploi.
Ce secteur concerne 1,6 million d'entreprises réparties sur l'ensemble du
pays, participant du tissu économique de nos régions et contribuant ainsi avec
vivacité à l'aménagement du territoire.
C'est également dans le cadre du développement local que s'inscrit le FISAC.
Le groupe communiste républicain et citoyen est particulièrement attaché à la
pérennisation du financement de ses actions.
Destiné à rétablir les activités commerciales et artisanales dans les zones
urbaines et à les revitaliser dans les zones rurales, en partenariat avec les
collectivités locales, les chambres de métier, les organisations
professionnelles et le secteur associatif, le FISAC a aussi permis de répondre
à des situations d'urgence, par exemple, lors de l'accident récent de l'usine
AZF de Toulouse, ou bien lors des inondations dans la Somme ou en Bretagne.
Nous notons la progression de 3,5 % de sa dotation pour 2002. Votre budget,
monsieur le secrétaire d'Etat, intègre mieux la question du développement de
nos territoires et esquisse un choix, qu'il convient de poursuivre et
d'amplifier, d'aide aux petites entreprises, jusqu'à présent trop souvent
négligées au profit des grosses entreprises.
Par ailleurs, nous soutenons l'action de votre secrétariat d'Etat concernant
la formation et la promotion des métiers auprès des jeunes, et nous vous
engageons, monsieur le secrétaire d'Etat, à poursuivre la simplification des
procédures administratives.
Partant de cela, le budget du commerce et de l'artisanat, comme d'ailleurs les
sommes engagées en direction des petites et moyennes entreprises, ne constitue
qu'une partie seulement de l'intervention publique dans ces domaines.
Les 61,03 millions d'euros de ce budget, par exemple, pèsent peu par rapport
aux dépenses fiscales mises en oeuvre pour les secteurs du commerce et de
l'artisanat, qu'il s'agisse des allégements d'impôt sur le revenu ou du
remboursement accéléré des crédits de TVA.
Dans les faits, on peut observer, dans un premier temps, que ces crédits
engagés par l'Etat en dépenses directes n'ont qu'une portée relativement
incitative, même si nous pouvons fort bien approuver les sommes affectées à
l'assistance et au conseil des commerçants et artisans ou à la bonification des
crédits bancaires.
De ce point de vue, je me permettrai de rappeler que nous avons défendu, lors
de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, un amendement
visant à relever le plafond des livrets CODEVI et à créer une ligne spécifique
de prêts bonifiés.
Nous estimons, en effet, que l'un des obstacles au développement du secteur
commercial et artisanal est l'inégalité d'accès au crédit, que la banalisation
des établissements financiers ces dernières années n'a pas vraiment permis de
réduire.
C'est d'ailleurs à la lumière de cette situation qu'il faut analyser l'une des
questions les plus directement liées à l'actualité : celle de la mise en oeuvre
de la réduction du temps de travail à compter du 1er janvier 2002 pour les
entreprises de moins de vingt salariés.
Si le rapport sur les petites entreprises et les entreprises artisanales,
présenté par deux de nos collègues députés et remis au Premier ministre le 18
octobre dernier, précise que cinquante-deux accords de branche ont d'ores et
déjà été signés dans les secteurs de l'artisanat et du commerce et concernent
2,5 millions de salariés, force est de constater, pourtant, que cette réforme
sociale ne répond pas toujours aux attentes des employés.
Ainsi, dans la grande distribution et les grands magasins, secteurs employant
600 000 salariés, souvent à temps partiel « non choisi », l'application des 35
heures rime trop souvent avec flexibilité et annualisation. J'en veux pour
preuve le nombre important de petits contrats horaires imposés.
La réduction du temps de travail ne peut donc laisser de côté l'aspiration
légitime à moins et à mieux travailler des salariés des petites et moyennes
entreprises des secteurs du commerce et de l'artisanat.
Plus généralement, cela pose deux questions : premièrement, l'aide la plus
adaptée consiste-t-elle à alléger les cotisations sociales ? Deuxièmement,
combien d'emplois seront créés dans ce cadre ?
Car, au-delà de la controverse sur la réduction du temps de travail,
l'efficacité de l'action publique en direction du commerce, de l'artisanat et
des PME se mesure aussi en entreprises maintenues en activité ou développées,
en emplois créés et en investissements réussis.
Un véritable bilan d'efficacité peut ainsi être dressé et recouvrir, dès lors,
une plus juste mesure de l'action publique.
Pour nous, l'ordre des priorités doit donc évoluer et quitter, en quelque
sorte, la primauté affirmée de nouveau ce jour à l'allégement des obligations
fiscales ou sociales.
Ces questions sont au centre du futur projet de loi relatif au commerce et à
l'artisanat que l'on nous annonce pour le début de l'an prochain, et qui a été
précédé par un large appel à contribution, appel entendu notamment par les
organisations consulaires.
Nous souhaitons, pour notre part, que ce texte soit l'occasion de sortir des
solutions habituelles sur ces questions, une bonne partie des difficultés de
nos activités commerciales et artisanales trouvant réellement leur origine dans
l'environnement financier dans lequel elles se déroulent.
Par ailleurs, le volet des conditions de travail et du niveau des salaires
devra figurer dans ce futur projet de loi, car ces questions participent d'une
revalorisation des métiers dans les PME, le commerce et l'artisanat.
Le dernier point sur lequel je souhaite intervenir est celui de l'introduction
de l'euro sous sa forme fiduciaire.
La période de double circulation du franc et de l'euro, du 1er janvier au 17
février 2002, est redoutée par les professionnels du commerce de proximité, car
ils seront en première ligne, si je puis dire, du passage à l'euro, d'autant
que, selon une enquête « Cap euro », menée en septembre 2001 par la chambre de
commerce et d'industrie de Paris, 30 % des PME et 53 % des commerçants
interrogés n'avaient pas envisagé de basculer leur comptabilité à l'euro avant
le 31 décembre 2001, et 20 % des PME pourraient n'être prêtes à passer à l'euro
qu'au deuxième trimestre 2002.
En outre, comme j'ai déjà eu l'occasion de le souligner dans mon rapport pour
avis sur les crédits de la consommation, pour que cet événement ne signifie pas
l'exclusion de certains consommateurs, il faut poursuivre l'effort de pédagogie
et surveiller les prix, afin d'éviter leur dérapage et une perte de pouvoir
d'achat, particulièrement préjudiciable pour les consommateurs les plus
vulnérables.
Monsieur le secrétaire d'Etat, sous le bénéfice de ces quelques observations,
le groupe communiste républicain et citoyen adoptera les crédits que vous nous
présentez.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen
et sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Dussaut.
M. Bernard Dussaut.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les
PME, le commerce et l'artisanat sont au coeur d'une actualité particulièrement
riche : la réduction du temps de travail, le passage à l'euro, l'annonce d'un
projet de loi d'orientation attendu depuis près de vingt ans.
Ces entreprises sont des moteurs économiques et sociaux désormais pris en
compte et qui ont leur mot à dire à l'heure des grandes mutations de notre
société. On ne peut plus se contenter de dialoguer seulement avec les grandes
entreprises.
J'aborderai d'abord la question des 35 heures.
On connaît les inquiétudes et la difficulté que suscite la mise en place des
35 heures dans les petites entreprises. Un accord avec le Gouvernement a été
trouvé. Il est le signe du haut degré de responsabilité de ces chefs
d'entreprise, qui ont compris qu'ils ne pouvaient aller à l'encontre d'une des
grandes évolutions de notre société et que, pour demeurer, voire redevenir
attractives, les entreprises devaient s'engager dans cette voie. Ils ont ainsi
montré que les petites et moyennes entreprises étaient incontournables dans les
négociations du dialogue social, qu'elles y avaient toute leur place et qu'il
faudrait désormais compter avec elles.
Le président de l'Union professionnelle artisanale, M. Robert Buguet, l'a
lui-même souligné lors du congrès de l'UPA, auquel vous assistiez, monsieur le
secrétaire d'Etat : « L'ouverture des 35 heures a donné lieu à un dialogue
social qui a permis de mettre sur la table tout un tas de problèmes qui ont pu
être solutionnés » ; il a même ajouté que l'instauration d'un vrai dialogue
avait été « une découverte très importante pour nos entreprises ».
Certes, la mise en place des 35 heures engendre des difficultés, mais elle
permet aussi et surtout une prise de conscience réelle du fonctionnement de
l'entreprise : ces entreprises, souvent familiales, se sentent désormais des
entreprises à part entière, avec tout l'engagement social que cela implique, et
c'est une dimension essentielle pour le développement de ce secteur
d'activité.
Elles sont aussi au centre de l'actualité avec le passage à l'euro. Les
commerçants, les artisans ont conscience que l'euro est une chance pour
relancer la croissance, une chance pour élargir leurs commandes et leurs
débouchés, mais ils s'inquiètent vivement du rôle central qu'ils vont avoir à
jouer, faisant office, en quelque sorte, de bureau de change : ce sont eux qui,
pendant la double circulation, vont introduire les pièces et les billets en
euros et retirer les francs.
Un amendement adopté à l'Assemblée nationale, dans le cadre de la discussion
des articles non rattachés au projet de loi de finances pour 2002, prévoit que
le montant des commissions payées aux banques par les commerçants sur les
paiements par carte bancaire n'augmentera pas d'une année sur l'autre. Mais ce
n'est pas satisfaisant. L'amendement présenté par M. Migaud, qui proposait la
suppression, pendant la période transitoire, de toute commission ou
rémunération sur les paiements par carte inférieurs à 30 euros aurait été
préférable.
C'est dans ce contexte très particulier que s'inscrit le budget pour 2002, un
budget en lui-même modeste, complété par des crédits extra-budgétaires dont les
montants cumulés sont supérieurs aux crédits budgétisés ; je vous fais grâce
des chiffres, qui ont déjà été plusieurs fois exposés.
C'est un budget qui a des orientations bien marquées et qui permettra
d'intervenir favorablement sur la vie quotidienne des petites et moyennes
entreprises.
Tout d'abord, avec la facilité d'accès au crédit, les crédits du fonds de
garantie d'emprunts accordés aux PME vont presque tripler pour 2002. Quant à
l'enveloppe en matière de bonification d'intérêt, elle est normalement en
baisse, les taux d'intérêt se maintenant à un niveau plutôt bas.
L'intervention est également forte en matière de création de petites et
moyennes entreprises : le transfert des crédits de l'Agence pour la création
d'entreprise dans ce budget en est l'illustration la plus frappante.
La mise en place de ce prêt l'année dernière a été une excellente initiative,
car offrir la possibilité d'obtenir un prêt sans garantie ni caution est d'une
réelle pertinence. En effet, l'obstacle majeur au financement réside moins dans
les taux d'intérêt, qui demeurent bas actuellement, que dans le cautionnement,
surtout pour un jeune créateur d'entreprise, ainsi que l'ont constaté avec
justesse Didier Chouat et Jean-Claude Daniel dans leur rapport remis au Premier
ministre le 18 octobre dernier.
Ainsi, au 30 septembre dernier, un peu plus de cinq mille prêts avaient été
octroyés pour un montant de 6 500 euros et, pour 2002, des crédits
supplémentaires seront dégagés.
Toutefois, le nombre de reprises d'entreprise continue de fléchir : elles
affichent un recul de 3 % en 2000, et de 30 % en treize ans. Parallèlement,
cent vingt mille chefs d'entreprise sont âgés de plus de soixante ans et sept
cent mille ont plus de cinquante ans. Nous risquons donc d'être confrontés sous
peu à un nombre important de cessations d'activités.
Monsieur le secrétaire d'Etat, peut-on espérer voir ce prêt étendu à la
transmission et à la reprise d'entreprise, qui sont généralement moins bien
aidées que la création et qui, pourtant, ont de réels atouts, que l'on se place
du point de vue du chef d'entreprise ou de celui de la clientèle ou des élus,
toujours soucieux de se situer dans une perspective de dynamique du territoire
?
L'autre point central dans la vie des petites et moyennes entreprises concerne
l'apprentissage et la formation. A cet égard, il me paraît utile de rappeler
quelques données.
Si la formation profite à un nombre croissant de salariés - 29 % y ont eu
accès en 1999, contre 19 % en 1992 -, des inégalités demeurent. Ainsi, un
ouvrier non qualifié sur huit a reçu une formation, contre un sur deux pour les
cadres ; et les salariés d'entreprises supérieures à cinq cents personnes ont
trois fois plus de chance de suivre une formation que ceux qui travaillent dans
une entreprise de moins de dix salariés.
Des dispositions ont déjà été prises, par exemple la signature, en janvier
2001, d'un accord pour le développement de la formation des salariés et des
chefs d'entreprise de l'artisanat du bâtiment. Le ministère de l'emploi y
consacrera 33 millions de francs sur quatre ans. Mme Guigou a rappelé devant
les artisans, au congrès de l'UPA, que cet accord permettrait de « soutenir la
formation et le développement des compétences dans plus de trois mille
entreprises artisanales et devrait concerner au moins cinq mille salariés,
chefs d'entreprise et conjoints d'artisans ».
Il serait nécessaire d'étendre ce type d'accord à l'ensemble de
l'artisanat.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, face à la difficulté de
recrutement d'une main-d'oeuvre qualifiée, peut-on envisager l'ouverture de
l'apprentissage aux plus de vingt-six ans, offrant ainsi une sorte de deuxième
chance aux jeunes qui auraient eu un parcours un peu difficile ? Pouvez-vous
nous dire où en est votre réflexion sur ce point ?
Je le répète chaque année, le rôle des petites entreprises, de nos
commerçants, de nos artisans, est essentiel pour la vie économique de nos
territoires ruraux. C'est pourquoi je comprends l'inquiétude des organisations
professionnelles qui, à la lecture des chiffres, ont pu constater que les
crédits d'animation économique étaient en baisse.
Fort heureusement, le FISAC, dont le succès n'est plus à démontrer, est en
forte progression cette année encore, ce qui porte l'augmentation sur ces
quatre dernières années à 46 %.
Dans le domaine fiscal, les politiques amorcées se poursuivent. Nous ne
pouvons pas laisser dire que rien n'a été fait quand a été supprimée la part
salariale de la taxe professionnelle, quand la TVA a baissé dans le bâtiment,
quand ont été réduits les droits de mutation sur les cessions de fonds de
commerce, quand l'impôt sur les sociétés a diminué de 15 % pour les PME dont le
chiffre d'affaires est inférieur à 7,63 millions d'euros, quand la vignette
automobile a été supprimée, quand les droits de création d'entreprise ont
disparu.
Les prélèvements obligatoires sur les entreprises ont ainsi considérablement
diminué depuis deux ans.
Par ailleurs, en ce qui concerne la protection sociale, le Gouvernement a pris
des dispositions essentielles, saluées par les organisations professionnelles,
que ce soit en matière de simplification et de clarification des démarches ou
en matière de couverture sociale, avec le souci constant d'assurer un accès à
une qualité de soins égale pour tous les Français.
Le régime des indemnités journalières des artisans a progressé et a été étendu
aux commerçants et aux industriels. La loi de financement de la sécurité
sociale de 2001 a aligné le niveau des prestations des artisans, commerçants et
industriels sur celui des salariés du secteur privé. Enfin, des dispositions
allant dans le sens de la simplification des formalités sociales des
entreprises figurent dans le projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 2002.
Depuis quatre ans, le Parlement a également travaillé avec le Gouvernement à
un meilleur accès au marché pour les petites et moyennes entreprises, notamment
avec la loi sur les nouvelles régulations économiques : elle permet un meilleur
équilibre des relations entre les différents acteurs et une protection des
intérêts des petites et moyennes entreprises face aux grands groupes.
Le nouveau code permet d'ouvrir plus largement l'accès des marchés publics aux
PME, de réduire les délais de paiement et de mieux protéger les
sous-traitants.
Enfin, les simplifications administratives se poursuivent. Ainsi, un nombre
important de déclarations annuelles ont été supprimées, et ce sont autant de
facteurs de temps perdu et de tracasseries paralysantes qui ont disparu.
Toutes ces dispositions fiscales, sociales, économiques et administratives
étaient des revendications fortes auxquelles le Gouvernement a répondu.
Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ces entreprises, petites
par leur taille mais grandes par leur secteur économique, contribuent à
l'emploi, à la croissance et à la confiance.
Le travail du Gouvernement, tout au long de cette législature, a permis leur
essor et leur développement, en n'omettant jamais de prendre en compte le
retard inquiétant qui avait été pris dans le domaine social. Les avancées sont
plus que significatives.
Monsieur le secrétaire d'Etat, alors qu'il était attendu depuis bientôt vingt
ans, vous avez été le premier à parler, dès votre arrivée au secrétariat
d'Etat, d'un projet de loi d'orientation pour les petites et moyennes
entreprises. Il sera soumis au Parlement très prochainement. Après un bon
bilan, vous ouvrez ainsi d'autres perspectives pour une amélioration de leurs
conditions de développement ; mon collègue et ami Pierre-Yvon Trémel
s'exprimera plus particulièrement sur ce sujet.
Sachez seulement que nous nous félicitons de cette initiative et des efforts
constants du Gouvernement pour aller de l'avant. Le groupe socialiste votera
donc ce budget.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Mathieu.
M. Serge Mathieu.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
après trois années de baisse et deux années de stagnation, les crédits pour
2002 du secrétariat d'Etat diminuent de 3,1 % à structure constante.
Aux financements du secrétariat d'Etat s'ajoutent ceux du Fonds d'intervention
pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce, le FISAC, qui devraient se
maintenir par rapport à l'an passé, avec 410 millions de francs.
La réalité des chiffres est cruelle, monsieur le secrétaire d'Etat. Elle nous
oblige à vous interroger sur le réel intérêt du Gouvernement pour le secteur
des PME, du commerce et de l'artisanat.
Ce secteur, je tiens à le rappeler, occupe une place fondamentale dans notre
économie et dans notre société.
Il se caractérise par son dynamisme et sa vitalité, dans le respect de la
variété des métiers. Ainsi, en près de vingt ans, les entreprises de plus de
deux cents salariés ont perdu plus de 800 000 emplois. Parallèlement, les
entreprises de moins de vingt salariés créaient plus de 1,2 million d'emplois,
et elles occupent aujourd'hui 37 % de l'effectif salarié, contre 11 % pour les
entreprises de plus de cinq cents salariés.
Plus que cette force économique, l'artisanat et les PME, c'est un savoir-faire
qui sait allier tradition et modernité ; c'est un ensemble de valeurs
auxquelles nous sommes attachés, fait d'indépendance, d'esprit d'entreprise, de
sens de l'effort et d'un souci d'adaptation constant.
Enfin, ce secteur joue un rôle indispensable dans notre société, car les PME
renforcent les liens sociaux et participent de l'aménagement du territoire.
Malgré cela, votre politique économique n'est pas adaptée aux spécificités du
secteur. Elle ne l'était pas les années passées, en période de croissance, et
elle l'est encore moins dans ce budget qui ne veut pas tenir compte du
retournement de conjoncture.
Nos artisans et nos entrepreneurs paient cher des choix aussi dogmatiques que
les 35 heures. Ils sont, en effet, confrontés à un véritable dilemme :
appliquer la loi coûte très cher et pose d'importants problèmes d'organisation
; mais la refuser rendra les recrutements encore plus difficiles, sachant que
les PME ont déjà beaucoup de mal à recruter, en raison de salaires plus faibles
que dans les grandes entreprises.
Face à la pression des entreprises, vous avez assoupli, mais insuffisamment,
le dispositif des 35 heures.
Nos commerçants devront assumer seuls les conséquences du passage à l'euro,
notamment la gestion d'un double fonds de caisse. Et c'est grâce à une
initiative sénatoriale, prise lors de la discussion de la loi portant mesures
urgentes de réforme à caractère économique et financier, la loi MURCEF, qu'a
été mis en place un amortissement exceptionnel des matériels servant à
l'encaissement en euros.
Quant aux dispositions de la première partie de ce projet de loi de finances,
je retiendrai seulement l'article 13, qui instaure, au profit du budget
général, un prélèvement de 105 millions d'euros sur l'ORGANIC, l'Organisation
autonome nationale d'assurance vieillesse de l'industrie et du commerce.
Certes, cet organisme dégage un excédent structurel, mais pourquoi ne pas
l'utiliser pour des programmes ciblés d'aide à l'artisanat ou au petit commerce
?
Plus grave, sur le moyen terme et sur le long terme, de nombreuses difficultés
restent en suspens sans que vous cherchiez à y apporter un début de
solution.
A quand, par exemple, la modernisation du statut de l'entreprise individuelle
? A quand la protection du patrimoine du commerçant ou de l'artisan et la
préservation des droits de son conjoint ? A quand la mobilisation de l'épargne
de proximité ? A quand des conditions de transmission adaptées ? A quand la fin
du saupoudrage des réductions d'impôt ? A quand une réforme structurelle de
notre fiscalité ? A quand une véritable baisse des charges sociales ? A quand
la refonte des aides économiques des collectivités locales ?
A quand une politique dynamique d'aide aux PME pour conquérir des marchés à
l'exportation, comme le préconise notre collègue André Ferrand dans son récent
rapport sur l'expatriation ?
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à
l'artisanat et à la consommation.
Tout un programme !
(Sourires.)
M. Serge Mathieu.
En résumé, une fois encore, ce budget est sans ambition et ne répond pas aux
préoccupations de nos artisans, commerçants et entrepreneurs.
En effet, alors que, pendant quatre ans, le Gouvernement ne s'est pas
particulièrement soucié des PME et du secteur artisanal, vous avez annoncé un
projet de loi d'orientation pour l'année prochaine. Nous attendons ce texte
avec impatience. Mais, pour l'heure, nous ne pouvons que nous étonner :
pourquoi, dans la perspective d'un projet de loi d'orientation, les crédits
budgétaires sont-ils en baisse ? Doit-on en conclure que certaines dispositions
du projet de loi ne seront pas financées en 2002 ?
Trop de questions restent en suspens, monsieur le secrétaire d'Etat. C'est
pourquoi le groupe des Républicains et Indépendants ne votera pas le budget des
PME, du commerce, de l'artisanat et de la consommation pour 2002.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Demuynck.
M. Christian Demuynck.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
aborder la question des petites et moyennes entreprises, du commerce et de
l'artisanat dans le cadre de ce projet de loi de finances, c'est nécessairement
pointer du doigt une contradiction structurelle dont nous ne devons pas
minimiser les enjeux.
En effet, comment ce secteur de l'économie française, dont personne ne saurait
remettre en question le rôle moteur dans notre croissance, peut-il ne
bénéficier que d'une demi-politique de soutien budgétaire ?
Les excellents rapports de nos collègues MM. Auguste Cazalet et Gérard Cornu
ont clairement mis en évidence que ce n'est qu'en recourant à une modification
comptable que le secrétariat d'Etat a pu se targuer d'une hausse de 2,4 % des
crédits consacrés aux PME, au commerce et à l'artisanat. En réalité, plusieurs
orateurs l'ont signalé, le budget de 2002 va connaître une baisse
significative, précisément de 3,1 %, puisqu'il passe de 59,6 millions d'euros à
57,75 millions d'euros, ce qui n'est pas le reflet de l'importance stratégique
de ce secteur d'activité.
Il ne s'agit pas pour autant de pratiquer un dénigrement systématique des
mesures proposées.
Un certain nombre de points sont satisfaisants et répondent en partie aux
doléances des artisans et des chefs d'entreprise. Je pense, notamment, à la
simplification des formalités administratives ou au renforcement du soutien à
l'innovation. On espère simplement que ces décisions se traduiront concrètement
dans les faits et sur le terrain.
Néanmoins, ces mesures ne sont pas à la hauteur des difficultés rencontrées
par les PME aujourd'hui et restent insuffisantes pour insuffler le dynamisme
nécessaire à ce secteur essentiel pour l'emploi. Inutile, en effet, de se
réjouir d'une tendance générale à l'augmentation de la création d'entreprises
remarquée depuis 1999, dès lors que cet accroissement de 1,2 % seulement reste
très en deçà de ce que l'on aurait pu attendre avec une croissance de 4 % du
produit intérieur brut.
Face à ces indicateurs, et compte tenu du nouveau contexte économique
international, dont nous subissons de plein fouet les effets, quelles mesures
budgétaires avez-vous adoptées ?
Les crédits pour la formation professionnelle stagnent, alors que tous les
acteurs socioprofessionnels s'accordent à dire que c'est là que réside l'une
des clefs du développement à venir de ces entreprises.
De même, les crédits d'actions économiques sont en forte baisse - de 22,6 % -,
passant de 15 millions d'euros à 12,2 millions d'euros.
Le budget pour l'animation économique, déjà en repli au cours des trois années
antérieures, se révèle désormais insuffisant pour accompagner les PME dans les
actions collectives menées par les organisations professionnelles et les
chambres de métiers.
Enfin, les actions destinées spécifiquement aux PME ont subi une diminution
sensible des aides budgétaires directes dans plusieurs domaines essentiels :
l'agriculture et la pêche, alors que l'on sait à quel point les petits
producteurs et les artisans ont été atteints par les crises sanitaires de ces
dernières années, mais aussi le commerce extérieur, alors que l'implantation
des entreprises françaises à l'étranger est soumise à de lourds handicaps.
Et c'est encore bien pire pour l'éducation nationale, la recherche et la
technologie, dont les crédits aux PME sont passés de 1,43 million d'euros à
0,82 million d'euros, alors que la France connaît d'importants retards sur ses
concurrents en matière d'innovation technologique et de formation
professionnelle.
Face à cette stagnation du budget du secrétariat d'Etat, je m'interroge : où
sont passées les promesses du Gouvernement de constituer un grand pôle
budgétaire et administratif des petites et moyennes entreprises et de
l'artisanat ?
Alors que la création d'une direction des entreprises commerciales,
artisanales et de services, issue de la fusion entre la direction de
l'artisanat, la direction du commerce extérieur et la mission pour les
services, devait permettre la mise en place d'une politique ambitieuse d'aide
aux PME, elle n'a abouti finalement qu'à des mesures parcellaires ou
expérimentales qui n'ont pas apporté de réponses définitives aux difficultés
rencontrées sur le terrain.
D'une part, la pression fiscale et la lourdeur des charges pénalisent les PME,
qu'une série de mesures extrêmement simples permettraient pourtant de soulager.
Je citerai l'application du taux de TVA réduit à 5,5 % pour les activités
d'hôtellerie et de restauration traditionnelle, la réduction de la marge
financière que représente la double immatriculation, à la fois au répertoire
des métiers et au registre du commerce et des sociétés, la réduction de la base
de la taxe professionnelle pour les professions libérales et la simplification
globale des formalités administratives.
D'autre part, les PME doivent être accompagnées plus efficacement dans leur
passage difficile aux 35 heures.
Tandis que les petites et moyennes entreprises revendiquaient plus de
simplicité et de flexibilité, la loi d'orientation et d'incitation relative à
la réduction du temps de travail du 13 juin 1998 les a amenées à davantage de
rigidité dans leur gestion et dans leur mode de recrutement, ce qui a nettement
freiné l'emploi.
Il est donc indispensable que le conseil aux entreprises soit développé et que
le Gouvernement accepte le principe d'une augmentation du contingent d'heures
supplémentaires au-delà de ce qui a été fixé par le décret du 15 octobre
2001.
Enfin, et je sais que cette question occupe au premier chef cette assemblée,
les fonds du FISAC doivent être augmentés et étendus au financement
d'initiatives locales privées, sans lesquelles de nombreux artisans de communes
rurales seraient totalement dépourvus de soutien.
Pour conclure, je voudrais attirer l'attention du Gouvernement sur les
conséquences que pourrait avoir sur le moral des entrepreneurs, des dirigeants
de PME, des commerçants et des artisans un projet de loi de finances qui leur
donnerait l'impression qu'ils sont les parents pauvres de l'économie française,
alors que, en réalité, ils représentent un facteur fondamental de notre
croissance et de notre emploi.
Au moment où les indications économiques montrent des signes forts du
ralentissement de l'activité, il est du devoir du Gouvernement de donner des
moyens suffisants à nos forces vives, afin que s'amorce le plus tôt possible le
mécanisme de la relance. Votre budget, monsieur le secrétaire d'Etat, ne le
permet pas ; je ne le voterai donc pas.
(Applaudissements sur les travées
des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, en
abordant l'examen du dernier budget des PME, du commerce, de l'artisanat et de
la consommation de la législature, comment ne pas souligner que ce budget
concerne un pan essentiel, à tous égards, de notre économie et de notre
organisation sociale ?
Il faut rappeler, en effet, que 99 % de nos entreprises comptent moins de
cinquante salariés : elles sont 2 378 000, hors secteur agricole, elles
réalisent 36 % de la valeur ajoutée et emploient la moitié des salariés de
l'économie marchande, participant largement à la puissance économique de notre
pays.
L'artisanat, lui, représente 2,5 millions d'emplois et se veut la « première
entreprise de France ».
Ainsi, l'artisanat et les petites entreprises constituent un tissu de
microstructures commerciales et de services qui sont au coeur de la vie et du
développement local et façonnent le visage de la France du quotidien.
Rappelons également qu'au regard de la conjoncture qui se profile pour l'année
à venir, avec le double passage à l'euro et aux 35 heures, il est avéré que la
croissance sera, en 2002, principalement tirée par deux moteurs : la
consommation intérieure et le dynamisme des PME.
Au vu de ces éléments, on peut dire, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'en
dépit de la modestie de vos moyens vous agissez au coeur de la réussite
économique et sociale de notre pays et que votre action se situe en pleine
cohérence avec les priorités accordées, depuis 1997, à la croissance et à
l'emploi par le gouvernement de Lionel Jospin.
C'est pourquoi il serait assez peu pertinent de nous cantonner à discuter des
crédits qui vous sont affectés pour 2002, soit 61 millions d'euros.
En effet, vous nous présentez un budget d'intervention qui possède un effet de
levier considérable allant bien au-delà de l'enveloppe qui lui est allouée, à
laquelle il faut adjoindre d'importants moyens extra-budgétaires.
Par ailleurs, à l'heure du bilan, il convient de mettre toute évaluation en
perspective sur les cinq années de la mandature, au regard, notamment, de la
politique économique d'ensemble du Gouvernement en faveur des entreprises.
Vos crédits pour 2002 sont appelés à financer essentiellement quatre types
d'actions : la formation dans l'artisanat et le commerce, l'amélioration de la
compétitivité des PME, le financement des bonifications d'intérêt, la
participation à un fonds de garantie.
Deux priorités - l'aide à la formation et les aides à la création - retiennent
notre attention.
L'aide à la formation menée par votre secrétariat d'Etat recouvre des actions
très diverses : analyse des besoins, sensibilisation aux métiers de
l'artisanat, formations de longue durée, formation à la création d'entreprise.
L'effort financier est maintenu à 15,5 millions d'euros, mais il faut savoir
que les crédits consacrés par l'Etat à l'apprentissage sont principalement
inscrits au budget du ministère de l'emploi.
A cet égard - je me plais à le rappeler -, l'un des titres d'excellence de
l'artisanat tient à sa contribution déterminante à la formation professionnelle
par le moyen de l'apprentissage. Faisant fi du cliché de « voie de rattrapage »
qu'on s'obstine à lui accoler, plus de 300 000 jeunes ont choisi cette voie
moderne et exigeante par laquelle, y compris pour les métiers traditionnels,
ils sont formés aussi aux technologies les plus performantes.
L'apprentissage représente le « coeur nucléaire » de ce secteur : un artisan
sur deux est un ancien apprenti, un apprenti sur deux créera sa propre
entreprise. Comment, dès lors, contester que l'apprentissage est une « grande
école », celle des entrepreneurs, et qu'il mérite tout notre soutien ?
Pourtant le problème du financement de l'apprentissage reste un sujet de
préoccupation, monsieur le secrétaire d'Etat ; j'aimerais recueillir votre
sentiment sur ce point et, tout particulièrement, connaître les suites qui
seront données aux mesures adoptées dans la loi de modernisation sociale.
Concernant les aides à la création d'entreprise, celles-ci offrent désormais
un panel assez complet de mesures : création de l'Agence des petites et
moyennes entreprises, l'ADPME ; accès au crédit, avec les bonifications
d'intérêt, les fonds de garantie d'emprunts de la SOFARIS, la Société française
pour l'assurance du capital-risque et les prêts à la création d'entreprise, les
PCE ; recours à l'APCE, l'agence pour la création d'entreprise ; allégement des
charges...
L'année 2000 a été une bonne année pour la création d'entreprises. Auriez-vous
des informations sur les tendances observées pour l'année 2001, monsieur le
secrétaire d'Etat ?
Comme l'a dit mon ami Bernard Dussaut, il nous faut aussi accorder beaucoup
d'importance à la transmission des entreprises. Trop d'entre elles meurent
faute de repreneurs, et des « savoir-faire » disparaissent dans nos villes et
dans nos communes. Or 40 % des chefs d'entreprise ont plus de cinquante ans.
Vous êtes très sensible à cette situation, monsieur le secrétaire d'Etat, nous
le savons. Ne pensez-vous pas qu'il conviendrait d'accentuer les efforts en
faveur de la transmission ? Je souscris sur ce point à la suggestion, qui a été
formulée ailleurs, de faire renaître, par exemple, des centres
interprofessionnels de formation des apprentis, des CIFA, dans une « nouvelle
version ».
Je m'arrêterai brièvement sur quelques points d'actualités qui ont déjà été
évoqués à cette tribune.
Le premier concerne l'aide au passage à l'euro. Le secteur du petit commerce
et de l'artisanat nous sollicite fortement afin qu'un certain nombre de mesures
de facilitation soient prises.
Je sais que certaines de ces demandes ne sont pas recevables, mais je connais
aussi, monsieur le secrétaire d'Etat, l'extrême attention que vous portez à ce
dossier et votre capacité d'influence pour que des solutions adaptées aux
petits commerçants et artisans puissent être mises en place par le réseau
bancaire et par l'Etat. Peut-être pourrez-vous nous en dire plus à cet égard
?
Autre domaine très sensible : le passage aux 35 heures pour les entreprises de
moins de vingt salariés. De très nombreux accords de branche sont d'ores et
déjà passés. Des mesures d'assouplissement ont été prévues par le décret du 15
octobre dernier. Elles étaient nécessaires au regard, notamment, des
difficultés de recrutement que des entreprises connaissent déjà dans certaines
activités et dans certains bassins d'emplois ; mais nous ne devons pas nous
tromper de siècle. Nous devons aussi être très conscients que le passage aux 35
heures peut être un facteur d'attractivité, de dynamisme pour les PME. C'est
ainsi que nombre d'entre elles l'interprètent.
Des difficultés subsistent dans certaines branches, et nous connaissons votre
volonté de travailler branche par branche, secteur par secteur. De nouveaux
assouplissements qui concerneraient certains métiers de bouche ont été
annoncés. Pourriez-vous nous apporter des informations à ce sujet ?
Le FISAC est régulièrement évoqué à l'occasion de la discussion de votre
budget. L'augmentation de ses crédits depuis quatre ans va de pair avec un
recentrage de leur utilisation sur la politique des territoires. C'est une
bonne chose, et cette politique est un succès ; mais cela se traduit parfois
par des délais d'attente trop longs dans l'attribution des crédits. Ne
pensez-vous pas, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'une gestion déconcentrée,
accompagnée d'un renforcement des moyens humains des délégations régionales au
commerce et à l'artisanat, les DRCA, atténuerait cet inconvénient ?
Enfin, la discussion budgétaire offre l'occasion de ranimer le débat autour
des ressources des chambres de métiers. L'Assemblée nationale a porté le droit
fixe à 99 euros ; nous allons discuter dans un instant un amendement qui vise à
le relever à 107 euros. Peut-être pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat,
prendre l'initiative d'un bon compromis ?
Mes amis et collègues députés, Didier Chouat et Jean-Claude Daniel, ont remis
le 18 octobre dernier au Premier ministre un très bon rapport en introduction à
la réflexion sur le futur projet de loi d'orientation. Ce rapport ambitionne de
remettre « l'homme au coeur de l'économie » et appelle à une volonté politique
forte à l'égard des entreprises artisanales et des petites entreprises. Il
formule plusieurs propositions : former, accompagner, financer, informer, mais
aussi simplifier, faciliter, mutualiser et territorialiser. Ce rapport a été
très bien reçu par la profession et a fait naître de grands espoirs.
Vous pourrez certainement nous éclairer, monsieur le secrétaire d'Etat, sur la
date de la présentation en conseil des ministres du projet de loi d'orientation
et sur celle de son dépôt au Parlement.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous êtes arrivé à votre poste voilà un peu
plus d'un an. Vous avez beaucoup visité, beaucoup observé, beaucoup écouté.
Vous vous êtes beaucoup engagé pour améliorer certains dispositifs, comme ceux
qui concernent l'animation économique, et pour apporter les assouplissements
nécessaires dans le passage aux 35 heures.
En raison même de ce volontarisme, dont nous vous savons gré, il faut que vous
puissiez présenter devant le Parlement le projet de loi d'orientation que vous
avez voulu.
Le dynamisme des PME est celui de la France. Pour elles, nous savons pouvoir
compter sur votre dynamisme, comme vous pouvez compter sur nous pour voter les
crédits que vous nous présentez.
(Applaudissements sur les travées
socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
A la demande du Gouvernement, nous allons interrompre nos travaux quelques
instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures
dix.)
M. le président.
La séance est reprise.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à
l'artisanat et à la consommation.
Monsieur le président, messieurs les
rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais, brièvement mais de
façon argumentée, revenir sur certains aspects de cette discussion
budgétaire.
Il est des points, mesdames, messieurs les sénateurs, sur lesquels nous
pouvons être d'accord. Il s'agit de l'importance de ce secteur du commerce et
de l'artisanat, il s'agit de son implication territoriale, des créations
d'emploi qu'il a su susciter, de son effet sur la croissance et, plus
globalement, sur l'ensemble de l'économie, mais aussi de son rôle dans
l'aménagement du territoire et dans la création des richesses nationales.
Sur tous ces points, les analyses de chacune et chacun des intervenants,
quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent, étaient pertinentes,
et le secrétaire d'Etat ne peut qu'y souscrire.
Je voudrais d'abord remercier les rapporteurs de leur travail. Même si nous
partageons un grand nombre de points de vue, nos analyses divergent cependant
sur les crédits. Mais mon expérience de plus de quinze ans au Parlement et de
quelques mois au secrétariat d'Etat m'a appris qu'un budget n'est jamais ni
tout noir ni tout blanc, ni complètement mauvais ni parfaitement bon. Il
comporte ses forces et ses faiblesses, permet des avancées, dont j'essaierai de
vous convaincre. Je vous démontrerai ensuite que les carences soulignées par
certains d'entre vous ne correspondent pas à la réalité.
Je souhaite également souligner l'importance du travail accompli cette année
encore par Mme Terrade, particulièrement sur les crédits de la consommation, et
je l'en remercie.
Je remercie aussi chacun des parlementaires qui, tout en défendant leurs
propres analyses, ont fait preuve de modération. J'ai apprécié à la fois le ton
et la façon dont ils ont exprimé leurs arguments.
Le projet de budget que j'ai l'honneur de vous présenter est, certes, modeste,
mais il faut convenir qu'il est, malgré tout, en augmentation, et ce sans
artifice. Les crédits consacrés à l'animation économique, au développement des
territoires comme à l'accompagnement des différentes actions du secrétariat
d'Etat passent en effet de 124,4 millions d'euros en 2001 à 128,1 millions
d'euros en 2002 puisque, aux moyens budgétaires, il faut ajouter les moyens du
FISAC.
Ce projet de budget ne sacrifie aucune des priorités du secrétariat d'Etat,
qu'il s'agisse du développement économique, des contrats de plan Etat-région ou
de la formation, dont plusieurs d'entre vous ont parlé avec beaucoup de
tonicité.
Les crédits de la direction générale de la concurrence, de la consommation et
de la répression des fraudes, la DGCCRF, passent de 187 millions d'euros à 191
millions d'euros ; les moyens de l'Agence française de sécurité sanitaire des
aliments sont augmentés : 2,7 millions d'euros en 2001, 3,12 millions d'euros
en 2002.
Je souhaitais que l'examen du projet de budget de mon secrétariat d'Etat soit
l'occasion pour nous de discuter ensemble de la politique du Gouvernement en
faveur des PME, de l'artisanat, du commerce et de la consommation. MM. Cazalet
et Cornu, comme les orateurs qui leur ont succédé, ont répondu à ce souhait.
Ce projet de budget vise donc trois objectifs : soutenir et amplifier la
politique du Gouvernement en faveur des PME, renforcer la création des
entreprises sur les territoires, améliorer la sécurité et l'information des
consommateurs.
A ce stade de mon propos, je rappelerai quelques chiffres relatifs à
l'environnement économique des entreprises, sujet sur lequel votre rapporteur
spécial est intervenu pour regretter que l'intégration du secrétariat d'Etat
dans le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie n'ait pas
produit la synergie financière que l'on pouvait en attendre. Je rappelle que,
depuis cinq ans, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a
pris des mesures fiscales dont l'effet sur l'environnement financier des
entreprises est sans précédent.
M. Gérard Delfau.
C'est vrai !
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
La baisse de la taxe professionnelle a ainsi
représenté, monsieur le rapporteur spécial, près de 13 milliards d'euros entre
1999 et 2002. La suppression de la surprime de l'impôt sur les sociétés a valu
aux entreprises un gain de 3 milliards d'euros alors que la réduction du taux
de l'impôt sur les sociétés a représenté pour les PME un gain de 1,5 milliard
d'euros. On peut ajouter à ces mesures la baisse du taux de la TVA pour les
entreprises du bâtiment.
Je me suis rendu ce matin dans un département où j'ai rencontré des artisans
et des commerçants : ils ont souligné l'importance de l'environnement financier
et se sont à ce propos félicités de la réforme des droits sur les donations et
de la suppression de la vignette automobile, qui, désormais, grâce au
Parlement, profitera aussi aux artisans jusqu'à trois véhicules de moins de 3,5
tonnes.
Ces chiffres démontrent que les artisans, les commerçants et les PME ont
bénéficié, au cours de ces cinq années, - surtout des trois dernières -,
d'allégements fiscaux et de crédits supplémentaires.
Je poursuis la liste : les crédits récemment dégagés en faveur des
biotechnologies par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie,
qui a annoncé qu'une importante somme de 100 millions d'euros y serait
consacrée ; les exonérations fiscales ; les prêts consentis par l'agence pour
la création d'entreprises, l'APCE, dont le budget de 3,28 millions d'euros
s'insère depuis deux ans dans les dotations du secrétariat d'Etat ; les
garanties de la SOFARIS, la société française pour l'assurance du
capital-risque ; le taux de la TVA.
Voilà autant de mesures financières par le biais desquelles le ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie a pleinement participé à l'expansion
et au développement des entreprises. Le rapport de M. Cornu, que j'ai lu avec
attention, montre qu'elles se portent mieux et génèrent plus d'emplois ; même
si des interrogations demeurent, force est de constater qu'elles ont créé et
développé des richesses au cours des trois dernières années.
Je vous rappelle par ailleurs que le budget du commerce et de l'artisanat
était, sous d'autres gouvernements, lorsqu'il avait à sa tête M. Madelin ou M.
Raffarini, en constante diminution. Je reconnais qu'il n'a pas augmenté
beaucoup depuis 1997, mais Mme Lebranchu avait réussi d'abord à stabiliser les
crédits, ensuite à inverser la tendance. Le FISAC a ainsi vu ses crédits passer
de 100 millions de francs à 440 millions de francs.
M. Pierre-Yvon Trémel.
Eh oui !
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
Vous voulez « sanctuariser » ces fonds. Je suis
d'accord pour les inscrire sur un compte aujourd'hui. Voilà qui devrait prouver
que nous avons avancé dans ce domaine !
MM. les rapporteurs et quelques intervenants, parmi lesquels MM. Ostermann et
Demuynck, ont également évoqué, pour nous le reprocher, le prélèvement sur les
fonds provenant de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, la TACA.
Je n'ai de leçon à donner à personne et je ne jette pas d'anathème, mais ceux
qui, eux, donnent des leçons devraient vérifier les chiffres ! Quels ont été
les montants prélevés ? En 1997, rien ! En 1998, rien ! En 1999, rien ! En
2000, rien ! En 2001, dans le projet de budget pour 2002 - vous l'avez compris,
les conditions sont plus difficiles -, 105 millions de francs. C'est ce
prélèvement que vous voulez annuler.
Je rappellerai simplement, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les
parlementaires, que le Gouvernement avait prélevé au profit du budget de l'Etat
103,7 millions de francs sur la TACA en 1995 et 45,7 millions de francs en
1996. En deux ans, vous avez donc prélevé deux tiers de plus que nous en cinq
ans !
M. Pierre-Yvon Trémel.
Voilà !
M. Bernard Dussaut.
C'est la vérité !
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
On peut donc dire que nous avons su être modérés,
d'autant que les sommes prélevées seront utilisées au bénéfice des artisans et
des commerçants.
M. Yves Fréville.
Le plus gros prélèvement a été fait en 1991, monsieur le secrétaire d'Etat
!
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
Je ne suis remonté que sur cinq années, je n'ai pas
voulu être manichéen...
M. Yves Fréville.
C'est vous qui avez commencé en 1991 !
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
... et aller jusqu'en 1993, car la différence entre
vous et nous aurait été trop flagrante. C'est pourquoi je me suis arrêté en
1995.
M. Yves Fréville.
En 1991, c'est vous qui avez donné le mauvais exemple !
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
Soutenir le développement des PME, et particulièrement
de l'artisanat, tel est l'objet de ce projet de budget.
Vous avez beaucoup parlé de l'animation économique du secteur de l'artisanat.
Nous avons redressé la situation de deux façons.
D'abord, nous avons distingué les financements de fonctionnement des
financements de projets. Après une période de rodage, plus de 300 conventions
ont été signées. On peut considérer que c'est un premier succès.
Ensuite, nous avons apporté des moyens financiers aux acteurs de l'artisanat.
Cela a été possible grâce à l'augmentation de la dotation du FISAC, dont j'ai
déjà parlé.
Au total, les aides au développement économique des entreprises n'ont pas
diminué. Elles ont même augmenté : 151 millions de francs en 1999, 154 millions
de fancs en 2000 et 2001, et elles atteindront 156 millions de francs en 2002,
soit près de 24 millions d'euros.
Nous avons donc là une base solide pour l'action économique sur les
territoires.
Quant aux ressources des chambres de métiers, en première lecture, l'Assemblée
nationale a voté une augmentation de 3,07 %, mais un amendement a été déposé
sur ce point et nous l'examinerons tout à l'heure.
Je garde avec vous la conviction que le développement économique et
l'augmentation du droit fixe vont dans le bon sens.
Vous l'avez compris, je recherche les points d'équilibre, mais je reste dans
le même temps ouvert au débat en vue de faire bouger les lignes et, notamment,
d'avancer dans la direction d'un financement pérenne des chambres de
métiers.
C'est la même démarche volontaire que nous avons entreprise pour la
revalorisation des contrats Etat-région, volet fondamental de l'action du
secrétariat d'Etat.
Pour le XIIe Plan, grâce aux élus, grâce aux choix faits en région et arbitrés
par le volet Etat, pour le Premier ministre, nous sommes passés à 602 millions
de francs programmés pour la période 2001-2006, contre 269 millions de francs
pour la période précédente.
Je m'étais engagé l'an dernier devant vous à obtenir une revalorisation des
crédits Etat-région pour cette année. Cette année marquera une première étape
du rattrapage : les crédits de paiement augmentent de 0,54 million d'euros et -
plus important en début de contrat de plan - les autorisations de programme
sont majorées de 1,8 million d'euros.
Ce projet de budget traduit un plan véritable pour faciliter la création et la
transmission des petites entreprises sur nos territoires. Je ne rappellerai
pas, comme je l'avais fait l'année dernière, tout ce qui a déjà été réalisé en
faveur de la création d'entreprise, me contentant d'indiquer que le prêt à la
création d'entreprise, le PCE, commence à trouver sa vitesse de croisière. Nous
avons en effet passé le cap des 6 000.
La politique macroéconomique en faveur de la croissance et de l'emploi reste
au coeur de l'action du Gouvernement, telle que le Premier ministre l'avait
énoncée dans sa déclaration de politique générale en 1997.
Il me revient plus modestement de travailler sur la microéconomie de la petite
entreprise : mesures fiscales, mesures sociales, simplifications
administratives, réforme du code des marchés publics.
Le secrétariat d'Etat a vocation à être au centre de l'action du Gouvernement
en matière de création d'entreprise. C'est dans cet esprit que le budget de
l'APCE, soit 3,28 millions d'euros, s'insère désormais, je l'ai dit, dans la
dotation de mon secrétariat d'Etat. Le fait que les moyens de ce dernier soient
maintenant regroupés a été salué comme une avancée.
J'ai conscience que notre effort financier en faveur de la création
d'entreprise doit s'amplifier. Dans la droite-ligne de ce que nous avons
entrepris ces deux dernières années, la dotation de la SOFARIS passe de 3,35
millions d'euros à 9,15 millions d'euros. Les entreprises ont en effet
davantage besoin aujourd'hui de garanties que de prêts bonifiés.
Je veux cependant redire ici que cette action ne se fera pas au détriment des
encours de prêts bonifiés, dont le volume atteindra 3,5 milliards de francs,
soit plus de 530 millions d'euros, en 2002.
Faciliter la création d'entreprise, cela signifie aussi accompagner le
développement des PCE, sensibiliser les jeunes aux métiers de l'artisanat - le
secrétariat d'Etat y consacrera 2,78 millions d'euros l'an prochain - et former
de futurs chefs d'entreprises commerciales, formation à laquelle seront alloués
0,76 million d'euros.
Avec deux millions d'entreprises et 44 % des salariés, ce secteur n'a ni la
reconnaissance ni le statut que devrait lui valoir son rôle dans le
développement économique des territoires. Nous devons donc poursuivre l'effort
en sa faveur.
Vous avez beaucoup parlé, les uns et les autres, du projet de loi de
développement des PME. Entré au Gouvernement le 18 octobre 2000, j'ai obtenu,
avec les responsables socio-économiques, de disposer d'une loi d'orientation
pour les très petites entreprises de l'artisanat et du commerce.
Nous avons commandé un rapport à deux parlementaires, qui nous l'ont remis le
11 septembre dernier. En collaboration avec ces deux élus et des représentants
des chambres consulaires, des chambres de métiers et des chambres de commerce,
nous avons abouti à la rédaction d'un projet de loi dont la dernière mouture
sera achevée à la fin de cette semaine. Il devrait être déposé devant le
Conseil d'Etat à la fin de la semaine prochaine et, vraisemblablement, il sera
présenté en conseil des ministres au cours de la première quinzaine du mois de
janvier. Il pourrait ainsi être inscrit à l'ordre du jour du Parlement à la
mi-février, avant la fin de la session.
Nombre d'entre vous m'ont interrogé sur ce projet de loi. Il proposera un
statut moderne des hommes et des entreprises, traitera des subsides des
familles, de la protection des artisans, du statut des conjoints, de la
formation et de la mutualisation sociale. Il visera aussi à faciliter le
développement des entreprises grâce à la simplification des statuts pour
l'impôt sur les sociétés, à l'étalement des cotisations, à l'accès au crédit, à
la prévention des difficultés, à des conditions de transmission permettant la
sauvegarde de l'entreprise et, enfin, à des mesures fiscales et financières.
Au passage, j'indique que je ne suis pas opposé à la proposition de plusieurs
d'entre vous - MM. Trémel et Dussaut, Mme Terrade... - de transformer le PCE en
prêt à la transmission d'entreprise.
Enfin, le troisième chapitre du projet de loi visera à améliorer
l'environnement des entreprises.
J'en viens à la politique en faveur de la consommation. Elle a deux objectifs
: la sécurité de l'information des consommateurs et la promotion d'une méthode,
à savoir la concertation.
J'aborderai en premier lieu la sécurité et l'information des consommateurs.
Notre société a traversé, vous l'avez dit, des crises graves, qui, je m'en
rends compte chaque jour dans les départements - j'en ai parcouru, au cours de
ces onze mois, près de cinquante - ont laissé des traces.
Je me suis déjà exprimé devant vous sur différents sujets : l'euro,
l'étiquetage, les OGM, la viande bovine, le vin de table, le commerce
électronique, la téléphonie, les prix, pour ne citer que les plus importants.
J'ai souligné chaque fois que la volonté du Gouvernement se situait clairement
en faveur d'un haut niveau d'information et de protection du consommateur. Pour
réussir, des moyens budgétaires exceptionnels ont été mis en place, notamment
pour équiper les laboratoires de la DGCCRF, en 2001. L'an prochain, l'effort
d'investissement sera poursuivi et, dans le même temps, le budget de
fonctionnement augmentera de 2,2 %.
J'ai aussi exposé notre action au sein de l'Union européenne en faveur d'une
agence européenne de sécurité des aliments - la localisation de son siège sera
décidée lors du prochain sommet européen - et sur les dossiers de l'étiquetage,
des OGM, de la protection des consommateurs ou de l'internet. Sur chacun de ces
dossiers, la France a montré qu'elle donnait la priorité aux droits des
consommateurs.
La méthode que j'emploie est la concertation. A ce sujet, je souhaite vous
dire quelle a été mon approche et comment je souhaite poursuivre mon action
dans les mois qui viennent.
Le mouvement consommateur est d'autant plus utile qu'il est fort et organisé,
que ses mandants s'engagent lorsqu'ils s'expriment publiquement et que la
diversité des sensibilités est respectée. C'est la raison pour laquelle j'ai
demandé, et obtenu, le maintien de l'intégralité des crédits en faveur des
associations de consommateurs. J'ai également obtenu que l'Institut national de
la consommation, l'INC, voit sa subvention augmentée de 2 millions de francs,
inscrits en loi de finances rectificative.
Sur les grands sujets d'actualité, le Gouvernement a souhaité améliorer la
qualité de la concertation avec les consommateurs. Ces derniers sont désormais
pleinement associés à la réflexion et au débat public qui s'est à nouveau
ouvert sur les OGM. Ils ont activement participé aux débats sur la filière
bovine.
Dans nos tables rondes, au travers des entretiens trimestriels, lors des
travaux du Conseil national de la consommation, ou du Conseil national de
l'alimentation, le mouvement consommateur est un acteur impliqué dans les choix
du Gouvernement.
Telle est, mesdames, messieurs les sénateurs, l'économie générale du projet de
budget que j'ai l'honneur de soumettre à votre approbation.
Je me suis efforcé de montrer la cohérence de nos choix. Au sein du
Gouvernement, je suis en charge, sous l'autorité de Laurent Fabius, de
l'environnement microéconomique des PME. La cohérence s'exprime dans les
engagements que j'ai pris devant vous l'an dernier pour le développement
économique sur les territoires, la création des PME, l'évolution du statut de
l'artisanat.
Elle apparaît enfin dans la méthode en matière de consommation, méthode qui
repose sur des avancées concertées en faveur d'une plus grande sécurité du
consommateur et d'une meilleure information.
Il est, bien sûr, de mon devoir de tenir mes engagements et d'atteindre les
objectifs que j'ai exposés devant vous.
Vous savez que j'agis aussi par passion, la passion pour nos territoires, que
vous avez également évoqués et défendus, ainsi que la conviction que les PME
font la réalité de la richesse économique de nos pays, qu'elles doivent être
mieux reconnues dans leur rôle et que les chefs d'entreprise doivent être
davantage soutenus dans leurs projets.
Je sais aussi, comme vous, que la confiance du consommateur se gagne et se
garde par une politique rigoureuse en matière de sécurité et d'information et
que cette confiance, on le voit bien aujourd'hui, reste le meilleur moyen de
soutenir la croissance. Réussir pour l'emploi, les entreprises, les
consommateurs et nos territoires constitue une ambition collective que nous
partageons tous.
Je répondrai maintenant à quelques-unes des questions que vous avez soulevées,
mesdames, messieurs les sénateurs.
S'agissant des 35 heures, thème que vous avez tous évoqué, la réduction du
temps de travail a été présentée par les uns comme un handicap pour les
entreprises, pour les autres comme une chance de restructuration et de
développement.
Cependant, je me trouvais ce matin encore en présence d'artisans, appartenant
notamment aux métiers de bouche, et leur discours n'était pas aussi manichéen.
(
M. Trémel approuve.
)
En outre, certains d'entre vous, en particulier M. Mathieu, ont relevé que les
métiers pour lesquels le passage aux 35 heures se révélait ardu rencontraient
parallèlement les plus grandes difficultés de recrutement.
Mme Odette Terrade.
Absolument !
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
Je n'y vois pas une relation de cause à effet
automatique, mais cela pose le problème de l'attractivité de ces métiers,
mesdames, messieurs les sénateurs !
Mme Odette Terrade et M. Pierre-Yvon Trémel.
Bien sûr !
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
Or les jeunes finiront par se détourner d'un secteur
qui resterait à l'écart du progrès social et économique !
Mme Odette Terrade.
Tout à fait !
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
Comment voulez-vous, mesdames, messieurs les
sénateurs, qu'un jeune choisisse demain d'exercer un métier de bouche ou de
rejoindre une petite entreprise du bâtiment où il travaillera 42 ou 43 heures
s'il peut prétendre au même salaire, dans un autre secteur, pour 35 heures de
travail ?
(M. Ostermann proteste.
)
M. Pierre-Yvon Trémel.
Bien sûr !
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
Ce progrès a été entériné, mais qu'en est-il des
assouplissements ? Je voudrais rappeler qu'ils sont déjà prévus par la loi et
que le passage aux 35 heures ne coïncidera pas avec la mise en circulation de
l'euro. Personne ne passera aux 35 heures le 1er janvier prochain, même si
telle sera la durée légale de travail à cette date : c'est un bien pour les
salariés, c'est aussi un accord « gagnant-gagnant » pour les entreprises.
(Exclamations sur les travées des Républicains et Indépendants et du
RPR.)
Ainsi, cet assouplissement fera que le décompte des heures
supplémentaires n'interviendra, l'année prochaine, qu'à compter de la
trente-huitième heure travaillée.
Par conséquent, pour nombre d'entreprises, les 35 heures ne seront
effectivement instaurées qu'en 2004, 2003 étant une année d'observation. De
plus, dans les entreprises de moins de onze salariés, un accord d'entreprise
peut être négocié entre les salariés et le chef d'entreprise, sans qu'il soit
nécessaire d'exercer un quelconque recours par ailleurs.
En outre, j'avais souhaité que le Gouvernement réfléchisse à d'autres
assouplissements. Dans son arbitrage, M. le Premier ministre a approuvé des
mesures permettant de satisfaire une demande formulée d'abord par la CGPME,
puis reprise par la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du
bâtiment, la CAPEB, et l'Union professionnelle artisanale, l'UPA. Je crois donc
que le dialogue que nous entretenons directement avec les organisations est
beaucoup plus fructueux et positif que cela n'a été dit !
En ce qui concerne la mise en circulation de l'euro, je puis répondre
aujourd'hui à ceux qui, au mois d'août encore, agitaient le chiffon rouge de la
récession et annonçaient des difficultés, voire une catastrophe, que les
engagements du Gouvernement en la matière sont parfaitement tenus et que les
problèmes qui peuvent subsister perdront de leur acuité au fil des semaines à
venir.
Pour les entreprises, qui ont été défendues ici avec talent, le passage à
l'euro est à 92 % déjà réalisé ou sur le point de l'être. Chaque entreprise a
consenti l'effort de formation nécessaire, a acheté les matériels, les
logiciels de comptabilité et les terminaux pour points de vente indispensables,
a préparé son approvisionnement en billets et en pièces : je crois que nous
devons d'ailleurs saluer l'effort accompli par les chefs d'entreprise.
Certes, le passage à l'euro a un coût pour les entreprises, mais cela est vrai
pour tout le monde et la règle européenne qui prévaut en la matière veut que
chacun acquitte les dépenses qui le concernent. Au niveau de l'Etat, il
n'existe donc pas de « cagnotte » liée au passage à l'euro. Si le projet de
budget fait apparaître que 3,5 milliards de francs de crédits sont inscrits
pour la fabrication des pièces, il faut savoir que celle-ci a coûté 3 milliards
de francs par an à l'Etat depuis 1998. Il en va de même pour les billets, et le
passage à l'euro ne rapportera donc rien à l'Etat, qui devra au surplus
accompagner la Banque de France dans cette période de mutation.
Par ailleurs, l'Etat a pris des mesures, au travers du texte portant mesures
urgentes de réformes à caractère économique et financier, du projet de loi
relatif à la modernisation sociale ou du projet de loi de finances, afin de
financer l'amortissement du matériel, d'accorder des prêts bonifiés et d'aider
les entreprises à passer à l'euro.
A ce propos, la question des commissions prélevées sur les règlements par
carte bancaire a été évoquée.
M. Auguste Cazalet,
rapporteur spécial.
Ah !
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement s'était opposé, par ma voix, à un
amendement déposé au Sénat visant à les supprimer. Une telle suppression
est-elle envisageable sur le plan économique ?
M. Gérard Cornu,
rapporteur pour avis.
Sur un délai très court, monsieur le secrétaire
d'Etat !
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
Qu'est-ce qu'un paiement par carte bancaire ? Il
permet d'abord la sécurité et la garantie du paiement. Or pensez-vous
qu'aujourd'hui un organisme puisse sécuriser et garantir le paiement pour un
coût nul ?
Pour ma part, je ne suis pas en faveur de la coercition, je suis pour la
concertation. S'agissant de l'euro, nous avons fait le choix du « ni-ni » : ni
obligation, ni interdiction. L'amendement qui a été voté à l'Assemblée
nationale me paraît satisfaisant, dans la mesure où il prévoit un écrêtement
qui portera sur tous les paiements, quel que soit leur montant. Les commerçants
n'acquitteront pas davantage de frais liés aux paiements par carte bancaire
qu'en 2001, et cette solution nous permettra d'éviter de demander aux banques
de changer leurs logiciels à trente-deux jours du passage à l'euro, ce qui
ferait courir des risques réels de
bug
ou de dérapage.
Cette méthode de l'écrêtement, qui a fait l'objet d'un accord entre le
Gouvernement et les députés, me paraît tout à fait judicieuse et elle profitera
à tous les commerçants.
En ce qui concerne les soultes des sociétés, je voudrais indiquer à M. Cornu
que le problème posé par le passage à l'euro a été réglé.
Enfin, MM. Trémel et Dussaut sont intervenus à propos de l'apprentissage dans
l'artisanat. Je pense que la loi d'orientation comportera un volet relatif à
l'apprentissage. Nous procéderons non seulement à une péréquation, mais
également à un relèvement notable des moyens accordés aux centres de formation
des apprentis.
En outre, j'estime moi aussi que l'apprentissage après vingt-six ans n'est pas
une voie à écarter, car certains jeunes, après avoir suivi telle ou telle
formation, souhaitent apprendre un métier concret. Nous travaillerons donc sur
ce dossier.
Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les quelques éléments de réponse
que je souhaitais vous livrer après vous avoir écoutés attentivement. J'espère
que mes propos auront pu apaiser vos craintes et que vous voudrez bien voter ce
projet de budget.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur
celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines
travées du RDSE.)
M. le président.
Je rappelle au Sénat que les crédits concernant les petites et moyennes
entreprises, le commerce et l'artisanat seront mis aux voix aujourd'hui même, à
la fin de l'examen des crédits affectés au commerce extérieur.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 281 480 691 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV :
moins
16 419 950 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 156 306 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 55 098 000 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 1 100 370 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 346 268 000 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
En accord avec la commission des finances, j'appelle en discussion
l'amendement n° II-35 rectifié
bis
, qui tend à insérer un article
additionnel avant l'article 67
bis
, et les articles 67
bis
et 67
ter
, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits affectés aux
petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat.
Article additionnel avant l'article 67 bis
M. le président.
L'amendement n° II-35 rectifié
bis
, présenté par M. Bécot et les
membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libéllé :
« Avant l'article 67
bis
, insérer un article additionnel ainsi rédigé
:
« I. - Le premier alinéa de l'article 1600 du code général des impôts est
ainsi rédigé :
« Il est pourvu aux dépenses ordinaires des chambres de commerce et
d'industrie au moyen d'une taxe additionnelle à la taxe professionnelle
répartie entre tous les redevables de cette taxe proportionnellement à leur
base d'imposition ; le montant national de cette taxe est déterminé chaque
année par le Parlement dans le cadre de la loi de finances. »
« II. - Le treizième alinéa du même article est ainsi rédigé :
« Un décret répartit chaque année entre les chambres de commerce et
d'industrie le montant national de la taxe destinée à subvenir à leurs
dépenses. »
« III. - Afin de permettre aux chambres de commerce et d'industrie de
poursuivre leurs missions et de faire face à leurs divers engagements,
l'évolution de la taxe additionnelle à la taxe professionnelle perçue au profit
des chambres de commerce et d'industrie est fixée à 3,5 % pour 2002. »
La parole est à M. Bécot.
M. Michel Bécot.
Les chambres de commerce et d'industrie, monsieur le secrétaire d'Etat,
souffrent aujourd'hui d'un véritable problème de financement. L'application de
la réforme des bases de la taxe professionnelle a d'ailleurs entraîné,
mécaniquement, une réduction d'environ 50 % du montant de l'impôt additionnel à
la taxe professionnelle, l'IATP, acquitté par les plus petites entreprises.
Afin de permettre aux chambres de commerce et d'industrie de poursuivre
l'accomplissement de leurs missions et de faire face à leurs divers
engagements, je propose que ce soient désormais les lois de finances qui fixent
le montant de l'IATP. La progression de celui-ci pourrait être de 3,5 % en
2002.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Auguste Cazalet,
rapporteur spécial.
La commission des finances s'en remet à la sagesse du
Sénat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le sénateur, je ne peux croire que vous
puissiez souhaiter une augmentation des prélèvements obligatoires ! En effet,
cela ne correspond ni à votre éthique politique ni à vos déclarations
constantes.
Quoi qu'il en soit, le Gouvernement ne peut être favorable à l'augmentation de
3,5 % du montant de l'IATP que vous proposez. Je rappelle d'ailleurs qu'il a
déjà accepté une hausse de 0,3 % de cet impôt, ce qui nous paraît plus
raisonnable.
En revanche, je souhaite comme vous que le montant de l'IATP soit déterminé
par la loi de finances. Toutefois, j'assortirai cette mesure de plusieurs
conditions : une programmation contractualisée des missions et des projets des
chambres de commerce et d'industrie, une transparence de gestion appuyée sur
une déconcentration de la tutelle, un mandat électif rénové, une solidarité
interconsulaire réelle, y compris sur le plan financier.
Le Gouvernement est prêt à travailler sur ce sujet avec vous, mesdames,
messieurs les sénateurs. Nous pourrons alors revoir le mode de fixation de
l'IATP sur une base pluriannuelle. D'ores et déjà, le projet de loi
d'orientation que nous examinerons dans deux mois comportera des avancées,
s'agissant en particulier du régime électoral.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-35 rectifié
bis
.
M. Gérard Cornu.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Cornu.
M. Gérard Cornu.
Je m'exprimerai à titre personnel sur cet amendement.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous venez de dire que vous ne compreniez pas
pourquoi nous présentions cet amendement,...
M. Joseph Ostermann.
C'est à cause des 35 heures !
M. Gérard Cornu.
... dont l'adoption pourrait entraîner un alourdissement des charges
supportées par les entreprises.
Mais, ces charges, vous les avez déjà fortement aggravées, par le biais de
l'instauration des 35 heures !
(Protestations sur les travées socialistes et
sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
Les coûts engendrés par le passage aux 35 heures sont partiellement compensés
pour les entreprises privées, mais, comme vous le savez, mes chers collègues,
rien de tel n'est prévu pour les collectivités territoriales ! Or nos budgets
locaux devront supporter à ce titre des dépenses supplémentaires liées, par
exemple, au fonctionnement des services départementaux d'incendie et de secours
ou des maisons de retraite.
Les chambres consulaires subiront elles aussi de plein fouet les effets du
passage aux 35 heures, et il n'est donc pas anormal que nous soyons attentifs
au niveau de leurs ressources. Sinon, comment voulez-vous, monsieur le
secrétaire d'Etat, que ces organismes, qui jouent un rôle grandissant vis-à-vis
du commerce, de l'artisanat et de l'ensemble des PME, s'en sortent ?
A titre personnel, je juge cet amendement excellent, et c'est pourquoi je le
voterai.
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lachenaud.
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Le groupe des Républicains et Indépendants votera cet amendement, ne serait-ce
que pour attirer l'attention du Gouvernement sur la situation réelle, les
difficultés et le rôle important des chambres de commerce et d'industrie.
Ce matin même, à l'occasion du débat sur le projet de budget de l'industrie,
notre collègue Jean-Pierre Raffarin a bien expliqué combien les chambres de
commerce et d'industrie se trouvaient aujourd'hui aux avant-postes, qu'il
s'agisse du passage à l'euro, du développement des technologies nouvelles, de
la formation professionnelle ou de l'apprentissage, tous domaines qui exigent
des moyens d'action supplémentaires.
Bien entendu, nous souhaitons également que la progression des prélèvements
reste maîtrisée. Pour cette raison, nous proposons, par cet amendement, que le
taux annuel de progression de l'IATP soit fixé par la loi de finances.
A cet égard, il est un peu surprenant d'entendre un gouvernement qui a créé de
nouveaux impôts et majoré, notamment cette année, les prélèvements obligatoires
nous reprocher d'alourdir les charges supportées par les entreprises !
(Protestations sur les travées socialistes.)
Nous qui connaissons bien la contradiction entre les moyens supplémentaires
d'action et la maîtrise des prélèvements, nous essayons de parvenir à un
équilibre. Il est normal que la représentation nationale fixe le taux de
croissance des dépenses des établissements publics que sont les chambres de
commerce et d'industrie, dans une vision très dynamique du développement
économique !
M. Yves Fréville.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Aux excellents arguments qui viennent d'être avancés par M. Lachenaud, je
tiens à en ajouter un. Désormais, un problème de péréquation entre les chambres
de commerce et d'industrie se pose. Puisque les bases « salaires » ont été
supprimées avec une simple indexation de la compensation de la part qui
existait auparavant, il est bien certain que les chambres de commerce et
d'industrie dont la base « outillage » augmentera seront favorisées ; en
revanche, celles qui avaient de fortes bases « salaires » ne connaîtront pas de
progression de leurs moyens, alors que ce sont elles qui, notamment pour la
formation des apprentis, auront des frais élevés.
L'amendement de mon collègue M. Bécot a donc l'avantage de faire apparaître la
nécessité d'une péréquation à l'échelon national. Cet objectif doit être
retenu.
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
Autant j'ai entendu les arguments de M. Cornu et ceux
qui viennent d'être développés sur ces travées, autant, monsieur Lachenaud, je
ne peux pas vous laisser dire de contrevérités.
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Ah bon ?
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
En effet, les prélèvements ont baissé de près d'un
point, 0,75 % selon les derniers chiffres connus. Par ailleurs, sont intervenus
des dégrèvements d'impôts, surtout pour les entreprises. Je pense, bien
entendu, à l'impôt sur les sociétés, à la taxe professionnelle et à la
vignette. Vous ne pouvez donc pas dire que ce gouvernement a augmenté les
impôts pour les entreprises.
Cela étant dit, le Gouvernement reste attaché à une modération s'agissant des
droits pour les chambres consulaires, et je m'en suis expliqué. C'est pourquoi
je maintiens ma position.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-35 rectifié
bis,
repoussé par le
Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, avant l'article 67
bis.
Article 67 bis
M. le président.
« Art. 67
bis
. - I. - Il est inséré, après le treizième alinéa de
l'article 1600 du code général des impôts, un alinéa ainsi rédigé :
« La taxe est réduite de moitié pour les artisans régulièrement inscrits au
répertoire des métiers et qui restent portés sur la liste électorale de la
chambre de commerce et d'industrie de leur circonscription. »
« II. - Les éventuelles pertes de recettes des chambres de commerce et
d'industrie sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe
additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575A du code général des
impôts. »
- (Adopté.)
Article 67 ter
M. le président.
« Art. 67
ter
. - A la fin du quatrième alinéa
(a)
de l'article
1601 du code général des impôts, le montant : "630 F" est remplacé par le
montant : "99 EUR". »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° II-24, présenté par M. Cazalet, au nom de la commission des
finances, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit l'article 67
ter
:
« Dans le quatrième alinéa de l'article 1601 du code général des impôts, le
montant : "630 F" est remplacé par les mots : "0,379 % du plafond annuel de
sécurité sociale en vigueur au 1er janvier de l'année d'imposition". »
L'amendement n° II-9 rectifié, présenté par MM. Mouly et Delfau, est ainsi
libellé :
« Dans l'article 67
ter,
remplacer la somme : "99 EUR" par la somme :
"107 EUR". »
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l'amendement n°
II-24.
M. Auguste Cazalet,
rapporteur spécial.
Chaque année est proposé, par le biais d'un article
additionnel aux crédits du ministère de l'économie et des finances, le
relèvement du droit fixe de la taxe additionnelle pour frais de chambre de
métiers. Cet article est bien souvent d'origine parlementaire.
Il est temps de fixer ce droit à un niveau qui permette d'éviter une
paupérisation des chambres de métiers. Il est également nécessaire de
déterminer un mode d'indexation de ce droit fixe pour éviter chaque année des
négociations qui ne satisfont ni les chambres de métiers ni leurs
ressortissants.
Le montant du droit fixe a crû de 1,61 % entre 1999 et 2001, passant de 94,52
euros à 96,94 euros. Cette augmentation n'a pas été à la hauteur de la hausse
des charges des chambres de métiers, la valeur du « point » des salaires du
personnel des chambres ayant progressé de 3 % pendant la même période.
Le montant de 99 euros adopté à l'Assemblée nationale sur proposition du
Gouvernement n'est clairement pas à la hauteur des enjeux. Les résultats nets
des chambres de métiers ont connu une forte diminution, de 41 %, entre 1998 et
1999. Enfin, six des huit classes de chambres de métiers étaient en déficit
d'exploitation en 1999.
Dès lors, je propose au Sénat de revenir au montant adopté par la commission
des finances de l'Assemblée nationale, à savoir 107 euros.
Je propose, enfin, d'indexer le droit fixe sur le plafond annuel de la
sécurité sociale, comme l'ont demandé le rapporteur spécial de la commission
des finances de l'Assemblée nationale et l'assemblée permanente des chambres de
métiers. Le plafond de la sécurité sociale sera, en 2002, de 28 224 euros. Le
montant du droit fixe serait ainsi fixé à 0,379 % du plafond annuel de la
sécurité sociale, soit 107 euros.
M. le président.
La parole est à M. Delfau, pour défendre l'amendement n° II-9 rectifié.
M. Gérard Delfau.
Je ne ferai pas un plaidoyer en faveur des chambres de métiers. Le Sénat
connaît bien l'apport irremplaçable de cette structure consulaire regroupant
les artisans et les chefs de très petites entreprises, les TPE. Pour ma part,
une très ancienne implication dans le développement économique local a fait que
j'ai créé des liens confiants avec la chambre de métiers de mon département.
Or je constate que cette chambre consulaire fait l'objet de sollicitations
croissantes à mesure que s'affirme la place de l'artisan et de la très petite
entreprise dans l'économie de notre pays. Le métier de chef d'entreprise subit
une mutation rapide, qui est d'autant plus difficile quand il s'agit de toutes
petites structures qui, aujourd'hui, ne sont plus à l'abri d'une concurrence
sévère. L'exigence en matière de sécurité, d'environnement et de formation
professionnelle, notamment, est sans cesse plus forte. L'artisan se tourne
naturellement vers « sa » chambre de métiers pour obtenir une formation, une
aide technique, voire un réconfort.
Voilà pourquoi la charge des chambres de métiers s'accroît, alors que les
moyens stagnent.
Simultanément, les collectivités locales, à travers les communes, les
communautés de communes, les communautés d'agglomération et, bientôt, les «
pays », se tournent vers les chambres consulaires et, tout particulièrement,
les chambres de métiers. Elles apprennent à travailler avec les agents
socio-économiques dans le cadre - et c'est ce qui est important - d'un
développement économique territorialisé.
Ce partenariat bénéfique impose de nouvelles missions à la chambre de métiers.
C'est pourquoi mon collègue M. Mouly, qui n'a pu être présent aujourd'hui, et
moi-même avons déposé un amendement visant à relever le droit fixe de la taxe
pour frais de chambre de métiers acquittée par les entreprises artisanales.
Nous proposons de faire passer le montant de ce droit de 99 euros à 107 euros.
Nous pouvons, si nécessaire, réévaluer notre demande, monsieur le ministre, si
vous deviez donner une réponse positive à cette requête légitime. Il est en
tout cas indispensable que les chambres de métiers disposent à nouveau des
moyens nécessaires pour mener à bien leur mission d'intérêt général.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° II-9 rectifié ?
M. Auguste Cazalet,
rapporteur spécial.
Cet amendement et celui que j'ai présenté sont très
proches. En effet, le montant de la taxe pour frais de chambre de métiers
qu'ils prévoient pour 2002 serait identique. Cependant, mon amendement paraît
meilleur - cela fait prétentieux
(Sourires)
- car il permet, pour les
années à venir, une indexation sur le plafond annuel de la sécurité sociale. Je
propose donc à M. Delfau de vous y rallier.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s II-24 et II-9 rectifié
?
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
S'agissant de la qualité, le Gouvernement n'a pas à
choisir entre ces deux amendements.
Il a entendu les propos de M. Delfau sur le rôle des chambres de métiers. En
plus de leur rôle professionnel, elles sont maintenant impliquées dans la
démocratie participative à travers les nouveaux territoires, les conseils de
développement, les pays. En effet, beaucoup de présidents de chambre de
métiers, avec leurs techniciens, avec leurs collaborateurs, s'impliquent au
côté d'autres chambres consulaires pour participer, au côté du monde associatif
et avec les élus, à l'aménagement et au développement du territoire sur des
périmètres pertinents. Nous avons, maintenant, des interlocuteurs capables de
participer à la réflexion et à la décision sur les territoires.
S'agissant de la fixation du droit à 107 euros, le Gouvernement ne peut être
favorable à une telle hausse.
Monsieur Cazalet, en fin de compte, votre amendement - même si je comprends
que vous le trouviez très bon
(Sourire)
- rigidifie les ressources des
chambres de métiers. Ainsi, on peut très bien concevoir une progression plus
rapide pour le droit fixe que pour le plafond de la sécurité sociale. Or,
parfois, on pourrait aller plus vite. Une progression exceptionnelle peut être
nécessaire ! Ainsi, en 1999, cinq francs supplémentaires ont été attribués pour
l'organisation des élections.
Il faut plutôt explorer les moyens de manoeuvre du droit additionnel, monsieur
le rapporteur spécial, qui reste inutilisé à 75 %.
J'en viens à l'amendement n° II-9 rectifié.
Monsieur Delfau, il ne faut pas demander moins au contribuable et plus à
l'impôt ! L'augmentation que vous prévoyez s'élève à 11,5 %. J'entends d'ici
les cris d'orfraie de ceux qui diraient que ce gouvernement accorde des hausses
de prélèvements obligatoires ! Si l'on ajoute le droit additionnel à votre
demande, on atteint presque 18 euros de hausse, soit 118 francs ; nous pensons
que c'est déraisonnable.
De plus, il me revient à l'esprit des discussions avec les organismes
professionnels, notamment avec l'UPA, l'Union professionnelle artisanale, qu'il
faut garder raison et mesure.
Nous avons entendu plusieurs propositions : 99 euros, c'est 3,7 % ; 101 euros,
c'est 5,2 %, ce qui pourrait être une position raisonnable à laquelle le
Gouvernement ne s'opposerait pas. Mais 107 euros, vous l'avez compris, le
Gouvernement ne peut l'accepter.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-24.
Mme Odette Terrade.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
Le droit fixe de la taxe pour frais de chambre de métiers constitue, nous le
savons tous, une forme de mutualisation des coûts de recherche, de
développement et de formation du secteur artisanal.
Le relèvement de ce droit, tel qu'il a été voté en première lecture par
l'Assemblée nationale, doit donc être interprété comme la prise en compte de la
réalité des missions accomplies par les chambres consulaires.
Avec l'amendement n° II-9 rectifié, il s'agit de savoir s'il convient d'aller
plus loin, en relevant plus sensiblement encore le montant de ce droit fixe,
aux motifs conjugués de l'ancienneté du précédent relèvement et de la montée en
charge des missions et des obligations des organismes consulaires concernés.
Permettez-nous simplement de nous interroger sur la situation plus globale des
chambes de métiers.
Elles sont aujoud'hui largement dépositaires de fonds publics, qu'il s'agisse
du montant des droits fixes, de la collecte de la taxe d'apprentissage ou de la
taxe à la formation professionnelle continue.
Nous estimons même qu'avant toute mesure spécifique, qui pourrait d'ailleurs
trouver son aboutissement dans le cadre de la discussion du prochain projet de
loi sur le commerce et l'artisanat, dont nous avons parlé, il conviendrait de
procéder à un état des lieux suffisamment précis des capacités financières
comme des missions accomplies par les chambres de métiers.
Une évaluation plus fine et plus précise de leur intervention dans le domaine
de la formation est ainsi nécessaire avant même toute autre initiative.
C'est pourquoi nous ne voterons pas cet amendement.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Je voterai l'amendement n° II-24 non pas seulement parce qu'il est présenté
par mon collègue Auguste Cazalet, mais aussi et surtout parce qu'il est défendu
au nom de la commission des finances, dont je connais le sérieux des travaux.
D'ailleurs, dans une certaine mesure, M. le secrétaire d'Etat, qui a bien sûr
plutôt mis l'accent sur l'amendement n° II-9 rectifié, présenté par notre
collègue Delfau, dont je reconnais aussi les qualités, a bien insisté sur le
travail réalisé par les chambres de métiers. Par conséquent, c'est de l'argent
qui est bien placé. M. le secrétaire d'Etat aurait d'ailleurs pu aussi
insister, s'agissant de l'amendement n° II-35 rectifié, sur les qualités des
chambres de commerce, qui, elles aussi, font du bon travail sur le terrain.
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
Tout à fait !
M. Jean Chérioux.
Mais peut-être y a-t-il une différence d'appréciation que je comprendrais très
bien, compte tenu des fonctions qui sont dévolues à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
Non !
M. Jean Chérioux.
Cela dit, il est trop facile, monsieur le secrétaire d'Etat, d'avancer
toujours le souci de l'opposition nationale de refuser des dépenses ! Mais il y
a dépenses et dépenses ! On peut quand même avoir une approche sélective ! Pour
ma part, je considère qu'il s'agit, avec l'amendement n° II-24, de dépenses
bien placées ; elles le sont certainement beaucoup mieux de d'autres, d'une
dimension différente, qui ont été évoquées tout à l'heure et dont le moins
qu'on puisse dire est que vous avez du mal à les financer ! J'avoue que
l'argument que vous et vos collègues nous avancez toujours - « Vous êtes contre
les dépenses, mais vous acceptez telle ou telle » - est facile ; il s'apparente
d'ailleurs quelque peu aux leçons que la majorité, vous-même,...
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
Pas moi !
M. Jean Chérioux.
... et les membres de ce gouvernement passent leur temps à nous donner !
(Protestations sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
Ça suffit des leçons, vous nous en donnez tout le temps ! Laissez-nous au
moins nous exprimer par un vote qui consiste à choisir, parmi les dépenses,
celles que nous considérons les plus utiles !
M. Gérard Delfau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous ai bien écouté ; je vous avouerai que
je m'attendais quelque peu à votre objection concernant la progression rapide
du droit fixe de la taxe pour frais de chambre de métiers, dans l'amendement
que je propose avec mon collègue Georges Mouly.
Mais j'avais fixé ce montant compte tenu des indications fournies lors du
débat à l'Assemblée nationale.
Toutefois, ce qui nous importe ici, au Sénat - disant cela, je m'adresse tout
particulièrement à notre éminent rapporteur spécial, M. Cazalet, et à la
commission des finances -, c'est d'aboutir et qu'un texte, accepté par le
Gouvernement soit adopté ; ce qui nous importe, c'est que les chambres de
métiers, quand elles prendront connaissance de notre discussion, voient que
nous avons fait chacun un pas pour répondre, fût-ce partiellement, à leur
demande.
Telle est la raison pour laquelle, monsieur le rapporteur spécial, le mieux
étant l'ennemi du bien, je ne voterai pas l'amendement n° II-24 de la
commission ; de surcroît, je vous demande de le retirer, afin que nous
aboutissions à un vote unanime qui serait deux fois symbolique de l'attachement
du Sénat aux chambres de métiers.
M. Yves Fréville.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Le groupe de l'Union centriste votera l'amendement n° II-24 de la commission
des finances, présenté excellemment par notre collègue Auguste Cazalet.
Je ferai trois remarques.
Tout d'abord, il est heureux que la commission des finances ait déposé un
amendement, car M. le secrétaire d'Etat, depuis la discussion devant
l'Assemblée nationale, où il s'en tenait aux 99 euros, a évolué. Par
conséquent, un pas a été fait et, si nous votions conforme le texte de
l'Assemblée nationale, le souhait du Gouvernement ne pourrait même pas être
respecté !
Par ailleurs, à quel niveau faut-il établir le droit fixe ? Je constate que la
commission des finances du Sénat et la commission des finances de l'Assemblée
nationale, qui ont travaillé sur les mêmes bases, sont arrivées l'une et
l'autre au même résultat : 107 euros. Pourquoi ne pas retenir cette base ?
Je ne vois pas du tout quel argument susceptible d'invalider le raisonnement
pourrait être avancé puisqu'il s'agit non seulement d'augmenter le droit par
rapport à l'année dernière, mais aussi d'opérer un rattrapage nécessaire, comme
tous les orateurs l'ont montré.
Il reste évidemment un dernier problème : celui de l'indexation. Monsieur le
secrétaire d'Etat, il n'y a pas un projet de budget où la question de la
revalorisation du droit fixe n'est pas discutée ! La proposition de la
commission des finances de définir une indexation définitive me paraît une
bonne solution. Mais si vous préfériez un autre type d'indexation - sur les
recettes de l'Etat par exemple -, je n'y verrais pas d'inconvénient.
Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe de l'Union centriste votera
l'amendement de la commission des finances.
M. Gérard Cornu,
rapporteur pour avis.
Je demande la parole.
M. le président.
Monsieur le rapporteur pour avis, avant de vous donner la parole, je vous
indique que je viens d'être saisi d'un amendement n° II-9 rectifié
bis
,
présenté par MM. Mouly et Delfau, et ainsi libellé :
« Dans l'article 67
ter,
remplacer la somme : "99 EUR" par la somme :
"101 EUR". »
Je tenais à l'indiquer dès à présent afin que vous puissiez vous déterminer en
toute connaissance de cause.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Gérard Cornu,
rapporteur pour avis.
J'avais moi-même proposé, l'année dernière,
l'augmentation du droit fixe ; cette question revient encore cette année.
L'année dernière, tous les sénateurs siégeant sur les travées de gauche de cet
hémicycle étaient défavorables à mon amendement, et M. Delfau l'avait même
brillamment combattu !
M. Gérard Delfau.
Il ne faut pas être excessif !
M. Gérard Cornu,
rapporteur pour avis.
Je me réjouis de constater que, cette année, il a
changé d'avis et a pris conscience de la nécessité de soutenir les chambres de
métiers.
Mais, par rapport à cette discussion récurrente, il ne faut à mon avis pas
jouer les marchands de tapis : 99 euros, 107 euros, et voilà que M. Delfau
propose maintenant un montant intermédiaire. Il faut vraiment en finir !
Si l'amendement n° II-24 n'est pas adopté cette année, cette discussion va
encore revenir tous les ans ! Par conséquent, votons la mesure proposée par la
commission des finances, et nous n'aurons ainsi plus à évoquer chaque année le
droit fixe, que, comme tout le monde le reconnaît aujourd'hui, il convient
d'augmenter. L'amendement n° II-24 est excellent.
M. Yves Fréville.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission des finances sur l'amendement n° II-9
rectifié
bis
?
M. Auguste Cazalet,
rapporteur spécial.
Défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat.
Il reste le même que tout à l'heure : défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-24, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 67
ter
est ainsi rédigé, et l'amendement n°
II-9 rectifié
bis
n'a plus d'objet.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant les petites entreprises, le commerce et l'artisanat.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques minutes, en
attendant l'arrivée de M. le secrétaire d'Etat au commerce extérieur.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures
quinze.)
M. le président. La séance est reprise.
COMMERCE EXTÉRIEUR
M. le président.
Le Sénat va examiner les dipositions du projet de loi de finances concernant
le commerce extérieur.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Marc Massion,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, pour la huitième année consécutive,
notre solde commercial a dégagé un excédent, qui a été, en 2000, inférieur à 1
milliard d'euros. Compte tenu de l'augmentation du coût du pétrole et du cours
du dollar, on peut dire que c'est un bon résultat.
Vous nous aviez rappelé, monsieur le secrétaire d'Etat, au moment où notre
commerce extérieur obtenait des résultats records, que vous n'étiez pas un «
fétichiste du solde ». Il valait sans doute mieux le dire à cette époque
qu'aujourd'hui ! Mais vous aviez raison, car le solde de notre commerce
extérieur ne reflète en rien la compétitivité de nos entreprises. C'est la part
de marché des entreprises françaises qui importe réellement et, de ce point de
vue, nous arrivons à préserver notre acquis sans connaître toutefois des
progrès significatifs.
Notre solde extérieur n'a plus la même importance que lorsqu'il déterminait la
valeur de notre monnaie : avec l'euro, c'est à l'échelle de toute la zone
européenne qu'il convient désormais d'apprécier le solde des échanges.
D'ailleurs, cela nous amène à nous demander s'il faut toujours considérer que
les échanges au sein du marché intérieur européen sont encore des importations
et des exportations.
La situation internationale actuelle fait peser des incertitudes sur le
commerce mondial. Dans ce contexte, le succès de la conférence de l'OMC,
l'Organisation mondiale du commerce, à Doha, constitue un symbole important à
plusieurs titres : d'abord, parce qu'il donne un signal important aux marchés,
montrant qu'une volonté politique existe pour faciliter les échanges ; ensuite,
parce que l'entrée de la Chine et de Taïwan constitue un événement important,
politiquement et économiquement ; enfin, parce que des mesures importantes ont
été décidées en faveur des pays en développement, en particulier pour faciliter
leur accès aux médicaments.
Ce dernier point est essentiel, car il montre que l'OMC n'est pas uniquement
une instance de promotion de la mondialisation, mais également une instance de
régulation.
Pour assurer la légitimité de cet organe, il faudra aussi que les pays moins
développés puissent mieux faire valoir leur point de vue car, si l'OMC est
parfois diabolisée, c'est parce qu'elle est perçue comme un comité de direction
du commerce mondial, au service des plus puissants.
Votre projet de budget, monsieur le secrétaire d'Etat, est marqué par la mise
en oeuvre d'un contrat d'objectifs et de moyens. Dans ce cadre, les crédits de
fonctionnement du commerce extérieur sont, après une période de déclin, d'une
remarquable stabilité. En revanche, les dépenses consacrées aux procédures de
soutien aux exportations, qui bénéficient généralement de crédits évaluatifs,
diminuent. Ces économies peuvent être, pour partie, attribuées à une plus
grande sélectivité des dossiers, et il faut prendre garde à ce que cette
sélectivité accrue ne devienne pas de la frilosité.
La stabilité de vos crédits de fonctionnement ne relève pas de l'immobilisme
puisque le contrat d'objectifs et de moyens est décliné en programmes conclus
entre l'administration centrale et les grands réseaux de postes d'expansion
économique à l'étranger fixant le montant des dotations annuelles de crédits,
précisant leur utilisation et détaillant les réformes de gestion nécessaires
pour réduire le coût du réseau et améliorer son efficacité. La DREE, la
direction des relations économiques extérieures, prépare également des
démarches contractuelles avec les organismes d'appui au commerce extérieur : le
Centre français du commerce extérieur et le CFME-ACTIM, dont le nom a changé il
y a peu et qui s'appelle désormais Ubifrance.
Enfin, il convient de se féliciter de la fusion des réseaux du ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie à l'étranger, qui permettra
d'améliorer la lisibilité du dispositif tout en réduisant les frais de
gestion.
Dans une même logique de modernisation, la DREE s'est engagée dans une
démarche « qualité » qui est tout à fait positive. Mais cette démarche ne doit
en aucun cas exonérer les services de l'Etat de l'indispensable écoute des
demandes de service exprimées par les entreprises.
Dans le domaine des aides au commerce extérieur, la recherche de la simplicité
et de la souplesse des procédures constitue une obligation pour atteindre les
entreprises les moins outillées pour se développer à l'international. Sinon,
les aides profitent surtout aux filiales des grands groupes, qui disposent de
l'expertise nécessaire et ont souvent moins besoin d'être aidées.
Malheureusement, les petites entreprises souffrent encore de la multiplicité
des guichets, qui les contraint à contacter plusieurs organismes pour engager
une démarche de développement à l'international. De ce point de vue, on peut
regretter la lenteur du regroupement du CFCE et d'Ubifrance.
Les actions entreprises depuis quelques années par les directions régionales
du commerce extérieur afin de mieux identifier les petites et moyennes
entreprises disposant d'un fort potentiel de développement à l'international
commencent, en revanche, à porter leurs fruits.
Dans le cadre des plans d'actions régionaux pour le développement
international, ces entreprises se verront proposer des aides prévues dans les
contrats de plan Etat-région, dont les crédits sont en forte progression. La
réforme de l'assurance-prospection semble également recueillir des résultats
satisfaisants.
Certains ajustements sont, en revanche, nécessaires pour développer
l'utilisation du FASEP-Garantie, fonds d'étude et d'aide au secteur privé dont
le coût paraît constituer actuellement un obstacle pour certaines entreprises.
D'autres réformes devront être étudiées à l'avenir ; je pense notamment à une
nouvelle augmentation des aides accordées aux entreprises françaises pour la
participation à des salons à l'étranger, aides qui demeurent largement
inférieures à celles qui sont octroyées dans les autres pays de l'Union
européenne. Je regrette d'ailleurs que la dotation d'Ubifrance régresse, alors
qu'il faudrait, au moins, atténuer le retard pris sur nos partenaires. En tout
cas, il faut qu'Ubifrance dépense mieux : les grandes opérations commerciales
exclusivement consacrées à la France ont des retombées immédiates faibles pour
les entreprises françaises au regard de leur coût.
Je rappelle que la principale ressource d'Ubifrance provenait de la gestion
des volontaires du service national en entreprise, qui ont disparu avec le
service national. Je souhaite, monsieur le secrétaire d'Etat, que les
ressources d'Ubifrance puissent être garanties pour l'année 2002, quel que soit
le succès de la nouvelle procédure des volontaires internationaux en
entreprise.
Enfin, la réforme du réseau des missions économiques et financières à
l'étranger ne doit pas être abandonnée : dans les pays de l'OCDE, en
particulier dans des pays de l'Union européenne, les sources d'information sont
nombreuses, fiables et directement accessibles grâce au réseau Internet. Il
pourrait donc être envisagé de concentrer l'action de ces missions sur les
démarches de prospection des PME et sur la recherche de partenariats, une
partie des effectifs pouvant être redéployés dans les pays en voie de
développement et en transition. Il s'agit de prendre pleinement en compte le
développement de l'Union européenne et des nouvelles technologies de
l'information et de la communication dans la réflexion sur l'évolution de votre
réseau, qui doit anticiper le développement du commerce international en
privilégiant les zones géographiques qui bénéficient de forts taux de
croissance.
Pour conclure, je voudrais saluer la modernisation des procédures engagées par
le secrétariat d'Etat, qui a le mérite d'être effectuée à coût constant pour
le contribuable. Cette réforme s'accompagne d'un effort d'information important
en direction du Parlement, ce qui mérite d'être souligné.
Enfin, je souhaite que votre gestion économe - c'est un compliment ! - vous
permette néanmoins d'aider d'avantage de PME dans leurs démarches de
prospection à l'étranger.
(Applaudissements sur les travées socialistes
ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Michel Bécot,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
présentant pour la première fois l'avis de la commission des affaires
économiques sur le budget du commerce extérieur, je tiens tout d'abord à rendre
hommage à mon prédécesseur, M. Michel Souplet, dont la compétence était
unanimement reconnue dans cet hémicycle.
Je souhaite, par cette courte intervention, monsieur le secrétaire d'Etat,
manifester le souci de la commission de conforter les performances de nos
entreprises à l'exportation, performances dont on connaît l'effet positif sur
l'emploi. Une étude à paraître estime ainsi que 5 millions d'emplois, soit 22 %
de la population active, sont liés à l'activité exportatrice de la France.
Vous comprendrez, monsieur le secrétaire d'Etat, notre inquiétude face à la
quasi-disparition de notre excédent commercial en 2000, dans un contexte
pourtant exceptionnellement dynamique : une croissance mondiale de 4,5 % et des
échanges mondiaux en hausse de 12 %. Le ralentissement conjoncturel auquel nous
assistons et les perspectives incertaines pour 2002, assombries par les
tragiques événéments de septembre, ne sont pas pour nous rassurer.
Certes, l'an passé, la France a pu stabiliser à 7,6 %, parmi les pays de
l'OCDE, sa part du marché mondial en volume. Mais pour combien de temps ? Nous
savons en effet désormais que rien n'est jamais acquis en matière de commerce
extérieur. Comment la compétitivité de « l'entreprise France » pourra-t-elle
résister longtemps aux contraintes que le Gouvernement lui impose, et notamment
au renchérissement du coût du travail provoqué par les 35 heures ?
Les pouvoirs publics peuvent pourtant servir de levier à l'ouverture des
millions d'entreprises françaises au marché mondial.
De ce point de vue, je veux saluer l'accord auxquels sont parvenus, à Doha,
les Etats membres de l'OMC pour accueillir la Chine et ouvrir un nouveau cycle
global de négociations commerciales multilatérales. La France peut, en effet,
s'estimer satisfaite de cet accord, obtenu dans le respect du mandat confié au
négociateur européen : ce dernier a pu sauvegarder la spécificité de
l'agriculture dans les échanges internationaux, faire reconnaître un droit
d'accès aux médicaments pour les pays en développement, inscrire les
préoccupations environnementales - sinon sociales - dans les négociations
commerciales, prévoir l'élaboration de règles multilatérales afin de protéger
la concurrence et l'investissement.
Mais tout reste à écrire, et notre assemblée, monsieur le secrétaire d'Etat,
exercera toute sa vigilance sur le déroulement des négociations proprement
dites, qui devront lever certaines ambiguïtés persistantes dans le texte de
compromis retenu à Doha.
Les efforts que vous avez engagés dans trois directions méritent également
d'être soulignés.
Il s'agit d'abord de l'adaptation et de la modernisation du réseau de
l'expansion économique aux besoins des entreprises.
Il s'agit ensuite de la modernisation des organismes d'appui au commerce
extérieur ; celui-ci ne trouvera son véritable aboutissement que dans le
regroupement géographique et opérationnel du CFCE et d'Ubifrance.
Il s'agit enfin des initiatives en direction des PME exportatrices :
développement du portage des moyennes entreprises par les grands groupes ;
simplification bienvenue de l'assurance-prospection ; démarche de coordination
régionale par la signature de programmes d'actions régionales pour le
développement international.
Ces efforts, dont je me félicite, m'apparaissent toutefois timides. Seules 5 %
des entreprises françaises participent aux exportations de biens. Ils nous faut
accroître l'efficacité du soutien public à l'export, et je voudrais, à cette
fin, formuler quelques suggestions.
Il faudrait tout d'abord simplifier encore le dispositif public de promotion
des exportations en se calant sur le réflexe premier du chef d'entreprise, qui
est de se tourner vers la chambre de commerce et d'industrie. Dirigées par des
hommes issus de l'entreprise, en charge d'un service public et fortes de leur
réseau à l'étranger, les chambres de commerce et d'industrie devraient
naturellement, à l'heure où l'on réfléchit à une meilleure définition de leur
mission, s'orienter vers un rôle de « guichet export ».
Il faudrait ensuite repenser les aides financières à l'export. Nombreuses,
confuses, mal connues, elles sont mal utilisées, comme l'attestent les reports
de crédits sur leur budget. Pourquoi ne pas inciter fiscalement les petites et
moyennes entreprises à exporter ?
Si je crois possible de redynamiser l'enveloppe budgétaire modeste allouée au
soutien du commerce extérieur, il ne me paraît pas concevable que l'on puisse
se satisfaire d'un budget en diminution de 1,9 %, s'élevant à 473 millions
d'euros, alors même que l'Etat prélève, cette année encore, 1,68 milliard
d'euros sur l'excédent de la Coface, presque autant qu'en 2000. Une somme qui
se compterait en millions d'euros permettrait de relancer notre soutien à
l'exportation, par exemple en organisant plus de salons spécialisés, au
bénéfice des PME.
Puisqu'une enveloppe budgétaire étriquée ne permet pas de déployer, pour nos
entreprises, une ambition à l'export qui soit à la dimension de nos
performances, la commission des affaires économiques a émis un avis défavorable
sur les crédits consacrés au commerce extérieur dans le projet de loi de
finances pour 2002.
(M. Fréville applaudit.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe socialiste, 7 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
budget du commerce extérieur n'est évidemment qu'un élément parmi d'autres pour
analyser la place particulière de notre pays dans les échanges
internationaux.
Il représente, au sein des crédits du ministère de l'économie et des finances,
un ensemble de dépenses d'un montant de plus de 251 millions d'euros au titre
des relations économiques extérieures et de plus de 575 millions d'euros au
titre de l'action internationale.
Les dépenses liées à l'activité de la direction des relations économiques
extérieures portent essentiellement sur les crédits de personnel, l'exercice
2002 étant marqué, de ce point de vue, par une absence de création d'emplois ;
la seule évolution concerne un léger mouvement de reclassement de
personnels.
Nous ne pouvons manquer de souligner l'importance de la place de notre pays
dans le concert commercial international. Nous y occupons en effet une position
non négligeable, et notre pays est l'un des principaux exportateurs de la
planète.
La compétitivité de la France affiche une bonne tenue tant du point de vue des
prix que de celui des coûts. Les performances de la France en qualité des
produits ont également contribué au maintien - en volume - de nos parts de
marché dans le monde.
Notre pays demeure le quatrième exportateur mondial de marchandises et le
troisième exportateur mondial de services marchands.
Quant aux investissements français à l'étranger, ils s'élèvent à 187 milliards
d'euros en 2001, en hausse de 65 %, et situent désormais la France en deuxième
position des pays de l'OCDE, derrière le Royaume-Uni.
Nous avons noté les efforts accomplis par la direction des relations
économiques extérieures pour renforcer nos positions et les possibilités pour
nos entreprises d'être plus présentes sur les marchés.
Cette présence se développe désormais grâce à la structure Ubifrance ainsi
qu'à un contrat d'objectifs et de moyens qui ne se traduira pas - il est
important de le souligner - par une croissance des effectifs des postes
consulaires. On observera cependant que la plus grande partie de ces postes
sont encore occupés par des contractuels.
Les dépenses afférentes au fonctionnement de ces postes sont évidemment liées,
pour partie, aux aléas de la parité de l'euro. Pour autant, le plus important
dans ce débat est, bien entendu, le positionnement de notre pays dans le cadre
de l'Organisation mondiale du commerce.
La conférence de Seattle, on s'en souvient, avait été marquée par l'émergence
d'un puissant courant antimondialiste, multiforme dans ses actions et dans son
expression. Ce courant marquait et marque encore le refus d'une construction
économique mondiale peu respectueuse de l'environnement, gaspilleuse d'énergie
et de potentiels matériels et humains, créatrice d'inégalités de développement
entre les territoires.
Nous sommes aux côtés de ceux qui se sont retrouvés dans ces mouvements
citoyens. Nous attendons d'ailleurs toujours que tous éclaircissements soient
apportés sur les événements qui se sont produits lors du sommet du G8 à
Gênes.
Au-delà des sommes que notre pays engage, en particulier, pour favoriser la
vente de nos produits industriels ou la connaissance de l'activité de nos PME
innovantes dans les pays étrangers, la France devrait, nous semble-t-il, agir
plus encore qu'elle ne le fait aujourd'hui pour permettre aux pays en voie de
développement de participer au commerce international dans des conditions qui
leur seraient plus favorables.
La conférence de Doha a permis, sur certains points, de réaliser quelques
avancées, notamment s'agissant de la commercialisation des produits de lutte
contre les pandémies actuellement les plus préoccupantes, telles que le sida,
la tuberculose, la malaria. Désormais, les pays pauvres pourront accéder à
faible prix, de manière très encadrée, aux médicaments nécessaires à la santé
publique, même sans l'accord des groupes pharma-ceutiques.
On peut cependant regretter que les Etats-Unis et les pays non signataires de
conventions et d'accords mondiaux relatifs aux problèmes d'environnement ne se
soient pas engagés à Doha.
Est également dommageable à une évolution saine des échanges internationaux
l'échec de l'inscription de la dimension sociale dans les négociations ; cela
n'aidera pas à mettre fin au niveau excessivement bas des salaires et à
l'exploitation de la main-d'oeuvre dans certains pays. Quelques chiffres,
particulièrement éloquents à cet égard, suscitent l'indignation : par exemple,
un citoyen moyen d'un pays à faible revenu est 55 fois plus pauvre que le
citoyen moyen d'un pays de l'OCDE, et 1,2 milliard de personnes ont moins de 7
francs par jour pour vivre. Autre exemple, qui me tient à coeur compte tenu de
mes engagements pour les droits des femmes : 70 % de ces personnes les plus
pauvres sont des femmes !
Ces situations dramatiques ont toutes la même origine : des orientations
libérales, auxquelles s'ajoute une pression toujours plus forte pour faire
disparaître certains des garde-fous dont nous disposons encore en matière de
culture ou de produits agricoles.
De la même manière, la péremption prochaine de l'accord multifibres risque de
susciter dans les années à venir de nouvelles tensions sur ces domaines
sensibles de la production et des échanges internationaux.
Tels sont les points que les membres du groupe communiste républicain et
citoyen souhaitaient me voir souligner à l'occasion de la discussion des
crédits du commerce extérieur pour 2002, qui feront l'objet, de leur part, d'un
vote positif.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen
ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Marc.
M. François Marc.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
comme chacun d'entre nous, je ne peux aborder l'examen de ce projet de budget
sans évoquer les incertitudes que font peser les événements internationaux sur
l'économie mondiale.
Ce changement des données, même s'il intervient dans un contexte déjà
fragilisé, ne doit cependant pas nous masquer quelques réalités, à commencer
par le fait que la France est et reste un bon élève de l'économie mondiale. En
témoignent notamment ses bons résultats en matièere de commerce extérieur au
cours des années passées.
Actuellement, notre pays est le quatrième exportateur mondial, et même le
troisième pour les services. En 2001, le solde devrait progresser légèrement.
Pourtant, l'impact de la crise de l'ESB et de la fièvre aphteuse sur les
échanges agroalimentaires ainsi que le niveau élevé des cours du pétrole et du
dollar ont pesé sur ces résultats.
Le domaine particulièrement sensible de l'agroalimentaire constituera l'objet
essentiel de mon intervention.
Mais je souhaite tout d'abord revenir sur le projet de budget lui-même. Ce
projet se situe dans une vraie continuité des actions, particulièrement en
direction des PME et des PMI, mais la continuité se trouve aussi dans la
volonté du Gouvernement de mettre en cohérence ses paroles et ses actes, afin
de réussir à rendre lisibles les outils et les politiques destinés aux
entreprises, l'objectif étant de consacrer le principe non du « plus d'Etat »
mais du « mieux d'Etat ».
Cette modernisation générale des structures, tant au secrétariat d'Etat que
dans les organismes rattachés, se poursuit à travers ce budget avec la priorité
donnée à la réforme du réseau international d'intelligence et d'appui
économique - mentionnons, notamment, une utilisation à bon escient des
nouvelles technologies -, à la stabilité des moyens et à la pérennité des
instruments financiers au service des entreprises. Nous ne pouvons que nous en
féliciter.
Je ne puis, dans le temps qui m'est imparti, détailler les mesures envisagées
dans le budget, mais je me plais à souligner que le climat d'incertitude
économique qui caractérise l'environnement immédiat a été bien intégré par le
Gouvernement dans sa perception de l'avenir.
Je regrette, à cet égard, que la majorité sénatoriale, en indiquant son refus
de voter ce budget, n'ait pas souhaité donner un signe positif en réponse aux
appels au patriotisme économique émis ces dernières semaines par les deux têtes
de l'exécutif.
Pour leur part, les membres du groupe socialiste donnent acte au Gouvernement
de son action tout à fait réussie en matière de commerce extérieur et lui
manifesteront son total soutien en votant ce budget.
Je souhaite, monsieur le secrétaire d'Etat, attirer plus particulièrement
votre attention sur les ajustements entraînés par la mondialisation accrue des
échanges et la prise en compte des accords commerciaux qui régissent ces
échanges.
A ce titre, les questions agricoles me semblent revêtir une importance
particulière.
En France, le secteur de l'agroalimentaire est celui qui connaît un des
meilleurs soldes commerciaux en 2001, et ce malgré un repli général. Au terme
des huit premiers mois de l'année 2001, l'excédent des échanges
agroalimentaires s'établit en effet à 4,6 milliards d'euros. Les exportations
agroalimentaires françaises ont globalement augmenté de 50 % depuis dix ans.
Cette performance ne doit cependant pas masquer la fragilisation des parts de
marché de la France face à ses principaux concurrents.
Dans ce contexte, le lancement d'un nouveau cycle de négociation dans le cadre
de l'OMC constitue un événement déterminant.
A cet égard, les objectifs de l'Union européenne et de la France sont clairs.
Ils n'ont d'ailleurs pas changé depuis la conférence de Seattle. Le lancement
du nouveau cycle de négociations, acquis lors de la conférence de l'OMC à Doha,
devrait être l'occasion de confirmer la spécificité de la négociation agricole
et de relancer la discussion, comme le prévoyait l'article 20 de l'accord
agricole de Marrakech, signé en 1994.
La mise en oeuvre de l'agenda de développement fixé à Doha ne sera pas une
tâche simple. Néanmoins, nous avons aujourd'hui l'assurance que les
négociations s'engagent sur des bases équilibrées.
Dans le domaine de l'agriculture, le résultat est conforme au mandat fixé au
négociateur communautaire. Les préoccupations traditionnelles sont équilibrées
par la prise en compte de préoccupations non commerciales, concernant notamment
la sécurité sanitaire, le développement rural, l'environnement et le bien-être
des animaux.
Le risque majeur pour la France et ses partenaires européens était de voir que
le lancement du cycle s'accompagner de nouvelles contraintes pour la politique
agricole commune et entériner le déséquilibre actuel des soutiens publics à
l'agriculture. Ce risque a été évité, et l'Union européenne détient aujourd'hui
les marges de manoeuvre nécessaires pour conduire cette négociation sans
bousculer l'Agenda 2000. Contrairement au texte de Seattle, l'accord de Doha
permettra de prévoir une modulation entre les secteurs.
Concernant les subventions à l'exportation, l'Europe a refusé que le
dispositif communautaire soit injustement singularisé. A cet égard, il est
important de souligner que nous n'avons pas, dans ce domaine, de raisons de
nous sentir en position d'accusé. Si l'on observe ce qui s'est passé depuis
l'
Uruguay round,
on ne peut manquer de noter que les Américains ont, ces
dernières années, renié en permanence leurs engagements, alors que l'Europe a
scrupuleusement respecté les siens, qu'il s'agisse de l'accès au marché, des
aides à l'export ou des soutiens aux prix.
A la suite des décisions communautaires relatives à l'Agenda 2000,
l'agriculture française est aujourd'hui confrontée à un processus d'adaptation
particulièrement exigeant : baisse des prix - avec une diminution de 20 % pour
la viande bovine et de 15 % pour les produits laitiers, d'après les chiffres de
1999 -, réduction du soutien global et diminution des restitutions à
l'exportation.
A ces évolutions institutionnelles sont venues s'adjoindre des crises sans
précédent, qui ont sensibilisé plusieurs secteurs de l'agriculture et de
l'industrie agroalimentaire. Certaines régions françaises ont subi de plein
fouet des pertes considérables de recettes. Je pense notamment à la Bretagne,
compte tenu de sa spécialisation dans la filière de poulet « grand export »,
qui percevait en 1999, à elle seule, 85 % des restitutions versées par l'Union
européenne aux exportateurs avicoles européens.
Qu'il s'agisse de la filière laitière, de l'élevage bovin ou de l'élevage
ovin, l'actualité des trois dernières années écoulées démontre, s'il en était
besoin, que, faute d'un soutien européen à l'exportation, la production
française va se trouver structurellement confrontée à une crise profonde de sa
filière agricole agroalimentaire.
Bien entendu, c'est un domaine où nous devons poursuivre l'effort de
réorientation qui a été engagé pour éviter de dommageables distorsions de
concurrence. Pour autant, l'Europe doit pouvoir garder la maîtrise des
évolutions à venir en matière de restitutions. Nous avions demandé à nos
partenaires de ne pas s'engager à Doha en faveur d'un principe d'élimination de
cette forme de soutien, car cela nous aurait clairement conduits à « verser un
acompte » pour la négociation à venir.
Les aides de la PAC sont transparentes et elle évoluent, progressivement, dans
une direction qui correspond aux attentes de notre société, qu'il s'agisse des
préoccupations liées à l'environnement et à l'aménagement du territoire ou de
l'exigence de qualité des produits.
Il importe que, à court terme, le modèle agricole européen soit aidé dans la
reconversion de ses pratiques grâce à la préservation d'un dispositif financier
susceptible de procurer aux agriculteurs des conditions raisonnables de
rémunération.
Parallèlement, on ne peut, bien sûr, ignorer la préoccupation généreuse de
rééquilibrage du commerce agricole mondial en faveur des producteurs des pays
en développement et des pays les moins avancés. C'est une ambition louable, à
laquelle on ne peut que souscrire.
La mise en oeuvre d'un tel rééquilibrage suppose toutefois, au préalable, que
l'OMC dispose de moyens réels pour préserver nos pays des appétits sans cesse
grandissants des ultralibéraux. C'est la tâche qu'il nous reste à accomplir, à
présent que l'agenda de la négociation est fixé.
Monsieur le secrétaire d'Etat, sachez que le groupe socialiste du Sénat, en
votant votre budget, vous fait entièrement confiance pour défendre au mieux les
intérêts de la France dans le contexte chahuté qu'il nous est donné de
connaître aujourd'hui.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart,
secrétaire d'Etat au commerce extérieur.
Monsieur le président, messieurs
les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, en cet instant d'évaluation
du travail accompli et de projection dans l'avenir, je commencerai en évoquant
les missions et priorités de mon ministère au cours des deux années
écoulées.
De Seattle à Doha, notre première mission a été de favoriser un environnement
propice aux échanges internationaux, de créer les conditions d'un commerce
stable, équitable et doté de règles claires. Telle est la première raison de
notre engagement fort dans les négociations multilatérales.
Notre deuxième mission a été de tout faire pour que l'internationalisation de
nos entreprises ne soit pas une aventure trop risquée. Voilà pourquoi, depuis
deux ans, la direction des relations économiques extérieures est aux
avant-postes de la « réforme-modernisation » menée par le ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie.
En vérité, c'est tout le réseau du commerce extérieur qui connaît aujourd'hui
une révolution silencieuse pour s'adapter au rythme de la mondialisation. Dans
ce cadre, vous avez aussi compris qu'une tâche particulière se dessine, celle
de repérer et d'accompagner nos PME-PMI qui ont un fort potentiel de
développement à l'interna-tional.
Malgré le contexte économique et les conséquences des attentats du 11
septembre, notre commerce extérieur, je veux le souligner, garde des
perspectives solides. C'est ainsi que, en dépit du recul des ventes d'Airbus en
septembre, nous avons enregistré un excédent de 228 millions d'euros pour ce
mois, excédent d'ailleurs minoré par le changement méthodologique introduit,
précisément en septembre, par les douanes.
Compte tenu de ces modifications de calcul, l'excédent cumulé sur les neuf
premiers mois de l'année reste de 1,876 milliard d'euros, contre un déficit de
222 millions d'euros pour la même période en 2000.
Je voudrais, pour répondre aux préoccupations de M. Bécot, replacer ces
chiffres dans le contexte des échanges internationaux, qui ont connu cette
année un très réel coup de frein. Alors qu'ils s'étaient développés en 2000 de
plus de 10 %, ils seront, cette année, plus proches d'une croissance de 2 %
seulement, ce qui était d'ailleurs prévu avant même les événements du 11
septembre.
Dans ce contexte, je crois que l'accord que nous avons finalement trouvé à
Doha pour lancer un cycle de négociations commerciales est un signal de
confiance.
Depuis la signature de cet accord, les commentateurs ont eu raison de
souligner que ce cycle est ambitieux. Ceux d'entre vous qui étaient à Doha
savent la ténacité européenne - et singulièrement française - à faire admettre
une régulation de la mondialisation sans pour autant nous laisser dicter de
l'extérieur notre politique agricole, comme vous l'avez souligné, monsieur
Bécot.
Sur l'agriculture, je partage tout à fait votre constat, monsieur Marc. Le
résultat est, en effet, conforme au mandat qui avait été fixé au négociateur
communautaire. Le risque de nouvelles contraintes pour la politique agricole
commune a été écarté ; l'Union européenne détient bien aujourd'hui les marges
de manoeuvre nécessaires pour conduire les négociations agricoles à l'OMC, sans
que ces négociations préemptent le rythme de l'agenda européen.
Vous avez noté, madame Terrade, monsieur Massion, monsieur Bécot, les avancées
réalisées en faveur des pays en voie de développement. Au-delà de l'accès aux
médicaments, le traitement spécial et différencié a été pris en compte dans
tous les éléments de la négociation. Des travaux ont été engagés sur des thèmes
prioritaires comme les liens entre le commerce et les dettes, le commerce et
les transferts de technologies, ainsi que la coopération technique.
En revanche, je partage votre déception, madame Terrade, sur la timidité de la
déclaration de Doha pour ce qui est du dialogue entre l'OMC et l'Organisation
internationale du travail. Mais je souligne que, parallèlement, l'OIT a décidé
d'approfondir ses travaux sur la dimension sociale de la mondialisation.
Nous devons maintenant continuer d'informer et d'accompagner les entreprises,
les aider ainsi à se projeter avec confiance dans l'avenir pour ne manquer
aucune des opportunités qui se dessinent déjà et que l'entrée officielle de la
Chine à l'OMC symbolise à elle seule.
Outre l'engagement multilatéral que je viens de rappeler, je veux mettre en
avant nos deux priorités pour y parvenir en 2002, c'est-à-dire la
réforme-modernisation de notre réseau international d'intelligence et d'appui
économique et la pérennité des instruments financiers au service de nos
entreprises, particulièrement de nos PME-PMI.
Le réseau du commerce extérieur est associé très étroitement, vous le savez,
au large mouvement de modernisation du ministère de l'économie et des finances.
J'enregistre comme un point très positif, madame, messieurs, votre soutien à
cet effort. C'est une réforme pragmatique et ambitieuse dont la grande
innovation sera, en 2002, la fusion des réseaux internationaux de la direction
des relations économiques extérieures et de la direction du Trésor.
Les pouvoirs publics et nos entreprises vont disposer d'un réseau très dense
d'intelligence économique, financière, industrielle et commerciale sur
l'ensemble de la planète. Cette concentration des moyens et des compétences
s'accompagne d'un redéploiement géographique en direction du monde émergent :
l'Asie, l'Amérique latine, l'Europe centrale et orientale.
Les organismes d'appui qui dépendent du secrétariat d'Etat au commerce
extérieur participent eux aussi pleinement à cet effort décisif de
modernisation et de redéploiement.
Effet le plus visible de cette démarche, le CFME-ACTIM, a disparu au profit
d'Ubifrance. Le choix de ce patronyme neuf est le signal d'un nouvel élan au
service de nos entreprises. Je reviens d'ailleurs de Pékin où, à l'occasion de
l'inauguration de l'exposition Chine-France 2001, près de soixante-dix PME-PMI
ont été accueillies par Ubifrance, souvent avec le parrainage actif de leur
région ou de grands groupes qui apportent leur expérience dans des opérations
de portage.
Dans la logique du réseau international unifié du ministère de l'économie et
des finances, le rapprochement d'Ubifrance et du Centre français du commerce
extérieur est déjà bien engagé, Vous en avez souligné l'importance, monsieur
Bécot, et je souhaite comme vous, monsieur Massion, que cette dynamique ne soit
pas ralentie mais, au contraire, accélérée.
Cette ambition se traduit également par la démarche de qualité dans laquelle
ces deux organismes se sont engagés en s'associant au programme de
certification ISO 9001. A terme, l'ensemble de la relation du réseau du
commerce extérieur aux entreprises sera soumis à cette norme de qualité.
Cet engagement à se réformer et à s'adapter à l'environnement international
est plus que jamais une nécessité pour notre réseau. Avec une enveloppe stable
de près de 40 millions d'euros, je suis convaincu que le service proposé par
Ubifrance et par le CFCE aux entreprises, tout particulièrement aux PME-PMI,
s'en trouvera encore amélioré, notamment pour ce qui est des participations aux
salons à l'étranger.
Concernant Ubifrance, comme le souhaite M. Massion, nous serons très attentifs
à l'éventuelle incertitude financière liée à la transformation de la procédure
des CSNE, les coopérants du service national en entreprise, en un volontariat
international qui pourrait peser sur les finances de cet organisme. Mais c'est
en même temps un projet exaltant qui mobilise fortement les jeunes, hommes ou
femmes, même s'il est encore trop tôt pour évaluer précisément le nouveau
dispositif.
J'en viens au dernier point concernant notre réseau d'appui au commerce
extérieur, l'utilisation plus massive des nouvelles technologies. L'efficacité
d'un réseau comme celui-ci est aussi désormais largement indexée sur sa
capacité à intégrer les technologies de l'information et de la communication.
Je serai heureux de pouvoir vous présenter, au début de 2002, la grande galerie
virtuelle des technologies et savoir-faire français dont Ubifrance sera le
webmaster
.
J'en viens maintenant aux instruments financiers de ce budget qui, eux aussi,
témoignent de nos priorités.
La volonté de consacrer plus de moyens aux PME-PMI s'est traduite dans les
contrats de plan Etat-région, les CPER. Leur montant est passé de 36,4 millions
d'euros pour le onzième CPER à 63 millions d'euros pour la période en cours.
Globalement, nous sommes parvenus à la parité Etat-région, ce dont je me
félicite.
De plus, les critères d'éligibilité aux aides ont été élargis et les
procédures de traitement de dossier simplifiées.
Les services offerts aux PME étaient à l'évidence trop dispersés. L'enjeu de
la politique régionale du commerce extérieur que j'ai lancée il y a deux ans
consiste à rationaliser les aides et à fédérer les énergies. Chaque région a
défini des secteurs, puis des PME-PMI ayant un potentiel de développement à
l'international.
Une telle politique a été menée sous l'impulsion de l'Etat, mais dans la
concertation. Vingt-six programmes d'action régionaux pour le développement
international, les PARDI, ont déjà été signés. Dix autres le seront dans les
toutes prochaines semaines. Par conséquent, nous sommes sur le bon chemin.
Pour ce qui est de l'assurance-prospection de la Coface, qui est réservée aux
PME-PMI, la procédure a été profondément remaniée pour devenir plus lisible et,
surtout, plus accessible aux entreprises.
Un bilan à mi-parcours le confirme puisque les demandes ont augmenté d'un
tiers. Pour ces crédits, très utiles aux PME, la dotation évaluative reste
fixée à 27,44 millions d'euros.
Vous avez indiqué, monsieur Bécot, que l'importance des reports était le signe
d'une mauvaise utilisation des procédures au profit des PME. Rassurez-vous, les
reports concernent non pas les aides spécifiques aux PME que je viens de
mentionner, mais plutôt les financements des grands contrats.
J'en viens à l'assurance-crédit. Le résultat technique de l'assurance-crédit
gérée par la Coface pour le compte de l'Etat est passé d'un déficit de 9
milliards de francs en 1991 à un excédent de 7,5 milliards de francs en 1998.
En 2000, il s'établit à 5,6 milliards de francs.
Pour 2001, les prévisions laissent escompter un résultat financier de l'ordre
de 6,9 milliards de francs, ce qui explique l'absence de dotation dans le
présent projet de loi de finances. Il en est de même pour la stabilisation des
taux et la garantie de change, ces procédures étant gérées de façon à maintenir
l'équilibre.
S'agissant de la garantie du risque économique, une baisse de la dotation de
20 % a été jugée possible par le gestionnaire de la procédure, compte tenu des
contraintes de gestion et des dépenses prévues.
Les crédits du FASEP-études, Fonds d'études et d'aide au secteur privé,
s'élèveront à 7,62 millions d'euros en autorisations de programme. Il n'y avait
pas eu de dotation en 2001 compte tenu des reports accumulés. Les crédits de
paiement, pour leur part, passent de 15,24 millions à 25,92 millions
d'euros.
Globalement, les crédits de paiement sont comparables à ceux de l'année
dernière, bien qu'ils connaissent une légère baisse de 1,9 %.
Les autorisations de programmes accusent, il est vrai, un effet d'affichage de
moins 32 %. Annoncée de façon abrupte, cette baisse peut paraître paradoxale,
mais il s'agit simplement, je le répète, d'un affichage technique. En réalité,
les crédits étant adaptés aux besoins réels, il s'agit d'une baisse comptable,
qui ne saurait évidemment être surinterprétée.
Au-delà des chiffres, le projet de budget que je vous présente traduit la
volonté du Gouvernement, que vous avez saluée, monsieur Marc, d'accompagner
efficacement nos entreprises dans un environnement économique international en
profonde mutation.
Je viens d'évoquer les grands défis et quelques-uns des grands chantiers
ouverts au commerce extérieur. C'est donc bien une révolution silencieuse qui
s'accomplit, révélatrice de notre volonté d'épouser le rythme de notre
époque.
Ce rythme est celui de la mondialisation, qui impose de s'adapter et d'évoluer
en temps réel, quelles que soient les circonstances, et de gérer les deniers
publics au plus juste.
(Applaudissements sur les travées socialistes, sur
celles du groupe communiste, républicain et citoyen et sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant aux états B et
C concernant l'économie, les finances et l'industrie.
Je rappelle au Sénat que les autres crédits concernant l'économie, les
finances et l'industrie ont été examinés aujourd'hui même.
ÉTAT B
M. le président. « Titre III : 281 480 691 EUR. »
Je vais mettre aux voix les crédits figurant au titre III.
M. Auguste Cazalet,
au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Cazalet.
M. Auguste Cazalet,
au nom de la commission des finances.
La commission des finances vous
invite, mes chers collègues, à rejeter les crédits du ministère de l'économie
et des finances. En effet, si le budget est plus sincère, il reste bien éloigné
de la nouvelle gestion politique qu'il entend promouvoir. Les agrégats sont peu
lisibles, les objectifs de gestion très hétérogènes et les indicateurs de
performance peu fiables.
Il convient, de plus, de déplorer ce « réformisme sans la réforme » que
manifeste le ministère. En effet, si une volonté de réforme est affichée, peu
de réalisations d'envergure peuvent être dénombrées. Il y a beaucoup
d'expérimentations, peu d'évaluations et pas de décisions. Le pragmatisme du
ministère n'est pas à la hauteur de l'enjeu qui est, je le rappelle, une
gestion de l'impôt plus efficace, pour un coût moindre.
Par ailleurs, la création d'un grand ministère de l'économie et des finances
s'est faite au détriment des actions en direction des PME et de l'industrie. La
fusion des secrétariats d'Etat aux PME et à l'industrie au sein de Bercy n'a
débouché sur aucune synergie entre directions. Elle a provoqué la
marginalisation et la stagnation des directions de ces secrétariats d'Etat au
profit des directions traditionnelles. Je ne vois pas de pôle PME digne de ce
nom et je déplore la baisse des capacités d'expertise industrielle du
ministère.
Enfin, pour les 35 heures, l'accord conclu à Bercy déroge sur bien des points
au décret fixant à 1 600 heures le temps de travail dans la fonction publique.
Je considère que cet accord a surtout été destiné à préserver la paix sociale.
Certes, il n'y a pas de mouvement massif de créations d'emplois, mais la
diminution des sureffectifs du ministère est arrêtée.
Mes chers collègues, il faut sanctionner, par conséquent, la gestion d'un
ministère qui devrait être exemplaire et qui, malgré les moyens exceptionnels
dont il dispose, ne montre pas assez le chemin aux autres administrations.
Enfin, monsieur le président, la commission des finances demande un scrutin
public sur les crédits figurant au titre III.
M. le président.
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des
finances.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
Nombre de votants | 313 |
Nombre de suffrages exprimés | 313 |
Majorité absolue des suffrages | 157 |
Pour l'adoption | 112 |
Contre | 201 |
« Titre IV : moins 16 419 950 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre IV.
(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisation de programme : 156 306 000 EUR ;
Crédit de paiement : 55 098 000 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V.
(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 1 100 370 000 EUR ;
Crédit de paiement : 346 268 000 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre VI.
(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant le commerce extérieur.
CHARGES COMMUNES
ET COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
les charges communes et les comptes spéciaux du Trésor.
La parole est à M. Fréville, rapporteur spécial.
M. Yves Fréville,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation, pour les charges communes.
Monsieur
le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget des
charges des communes est un budget « mammouth » : 117 milliards d'euros en
charges brutes, 20 % du budget général en charges nettes. C'est aussi un budget
en cure d'amaigrissement, non par réduction de crédits, hélas, mais par
diminution de son caractère fourre-tout, par transfert de multiples crédits
d'intervention dans d'autres fascicules budgétaires, et les améliorations sont
déjà très sensibles pour l'emploi et l'aide au développement.
Il faut poursuivre ce recentrage, madame le secrétaire d'Etat. Est-il logique
que les crédits pour les travaux de sécurité dans les lycées et les crédits
d'indemnisation des préjudices touristiques dus au naufrage de l'
Erika
ou de la dotation de l'Etat en faveur du Fonds national de péréquation,
malheureusement majorée de 150 millions d'euros, figurent dans le budget ?
En tout cas, le budget des charges communes, c'est d'abord celui de la
dette.
En charges nettes, les intérêts s'élèvent à 36,8 milliards d'euros, et y
ajoutent les 63 milliards d'euros d'amortissement de la dette, qui s'élève
cette année au chiffre rond symbolique de 100 milliards d'euros.
Pourtant, la charge d'intérêt n'augmente en 2002 que de 0,8 %. Cette
augmentation modérée peut surprendre, car le stock de la dette ne cesse
d'augmenter, de flamber, si je puis dire.
D'après le bulletin de l'Agence France-Trésor, cette charge a augmenté de 26 %
depuis la fin de l'année 1996.
Par ailleurs, la dette de l'Etat continue de croître en valeur relative, et ne
cesse de progresser en pourcentage du PIB puisque nous sommes passés de 44 % à
la fin de 1996 à 48,8 % à la fin de 2000.
Cependant, cette augmentation ne se répercute pas sur la charge, qui est en
effet freinée mécaniquement par la baisse des taux d'intérêt qui se
poursuit.
En 1992-1993, la France a souscrit des obligations assimilables du Trésor, des
OAT, à 8,50 %. Elles arrivent à échéance cette année et on va leur substituer
des OAT qui sont approximativement émises, pour les dernières d'entre elles, à
4,40 %. La baisse est progressivement engrangée.
Il faut dire que nous tirons profit de la création de la zone euro, qui
élimine les risques de change et permet une politique monétaire moins rigide.
Pour mesurer la portée de cette observation, il faut se souvenir de la
politique monétaire économiquement absurde - même si elle était politiquement
justifiée au point de vue international - des années 1991-1993 et qui visait à
maintenir la parité avec le mark. Aujourd'hui, en revanche, nous engrangeons
des bénéfices.
Le Gouvernement, madame le secrétaire d'Etat, a bénéficié à plein de cette
baisse des taux puisque l'accroissement de la charge nette de la dette, depuis
1997, est de 8,6 % seulement.
Mais cet effet « taux » va disparaître. Progressivement, l'effet
d'amortissement de la dette à taux élevé va être amorti et un simple calcul
montre que la charge de la dette va à nouveau être gouvernée par la croissance
de l'encours. Un déficit de 30 milliards d'euros financé au taux moyen nominal
de 5 % engendre en effet mécaniquement une charge supplémentaire chaque année
de 1,5 milliard de francs.
Une gestion plus active de la dette pourrait-elle atténuer ce coût ? C'est
manifestement l'un des souhaits du ministre des finances !
Je me dois à cet égard de saluer l'apparition dans ce budget des charges
communes du premier programme voulu par la loi organique du 1er août intitulé «
gestion de la dette et de la trésorerie ».
C'est un progrès, même si des améliorations sensibles pourront être
apportées.
Je retiendrai cependant l'un des objectifs, celui de la réduction de la durée
moyenne de la dette négociable. C'est un objectif fort, parce qu'il traduit un
changement de doctrine du Trésor.
Jusqu'alors, la doctrine classique était : le Trésor emprunte à long terme
pour couvrir ses besoins à long terme et il emprunte à court terme pour couvrir
ses besoins à court terme.
Evidemment, cela interdisait de jouer sur la courbe des taux. Or vous savez
que les taux d'intérêt à court terme sont généralement plus bas que les taux
d'intérêt à long terme. Emprunter à court terme permet de faire baisser les
coûts en jouant sur la différence des taux. Mais cela comporte un risque, parce
que rien n'empêche que les taux à court terme se « tendent », voire passent au
dessus des taux à long terme. Le Trésor américain en a fait l'expérience et il
a connu des années très difficiles vers 1992-1994.
Un arbitrage entre le risque et le taux doit donc être réalisé. Je sais bien
que la création d'un marché européen des dettes souveraines en euros modifie la
situation par rapport au début de la décennie, parce que nous ne sommes
vraiment plus seuls sur un marché en francs. Nous représentons désormais à peu
près 20 % de la dette souveraine, et des risques supérieurs peuvent donc être
pris.
Je pense cependant qu'il faudra se lancer dans cette politique avec une grande
prudence et sous le contrôle du Parlement. Une expertise de la portée des
contrats d'échanges de taux d'intérêt devra être menée. Je n'accepte donc votre
objectif n° 3, madame le secrétaire d'Etat, que sous bénéfice d'inventaire et
de contrôle.
Le budget des charges communes devrait être également le budget de la dette
viagère, des pensions.
Or, depuis 1977, les crédits initiaux des pensions sont, lors du vote du
budget, répartis dans les fascicules des différents ministères, prétendument
pour donner une idée exacte du coût net de chaque ministère.
Mais cette répartititon n'est réalisée que de façon très approximative.
Sachez, par exemple, que les retraites des professeurs d'université émargent à
la section scolaire de l'éducation nationale et qu'il n'est pas tenu compte,
évidemment, des retenues pour pension pour calculer un coût net.
Cette méthode n'est pas satisfaisante, elle doit être révisée. Nous savons en
effet que les dépenses pour pension ont explosé de 1997 à 2002. Toutes
corrections faites, elles sont passées de 26 milliards d'euros à presque 32
milliards d'euros, soit 17 % d'augmentation, ce qui est très supérieur à
l'augmentation des rémunérations d'activité.
Pour ce qui est des pensions civiles et militaires de l'Etat, à l'heure
actuelle, les retenues pour pensions effectuées sur le salaire des agents ne
couvrent qu'à peu près 15 % du coût net, qui explose. La subvention implicite
de l'Etat est donc de 85 % !
En ce domaine, je note l'inaction du Gouvernement : depuis la déclaration du
Premier ministre, aux termes de laquelle un allongement de la durée des
cotisations pouvait être envisagé en contrepartie d'une intégration des primes,
force est de reconnaître que rien n'a été fait.
Le budget des charges communes, c'est aussi celui des dégrèvements et des
remboursements d'impôts.
Dans ce domaine, les masses sont importantes : 62,9 milliards d'euros de
dépenses brutes. Or, dans la charte de budgétisation qui figure au début du
projet de loi de finances, vous indiquez, madame le secrétaire d'Etat, que les
dégrèvements d'impôts sont défalqués à la fois des recettes et des dépenses, ce
qui est parfaitement logique et tout à fait juste dans le principe.
Il faut calculer la TVA et l'impôt sur les sociétés en charges nettes, mais il
me semble qu'il y a une exception qui n'est pas respectée, celle qui concerne
les impôts locaux, et qui intéresse naturellement beaucoup le Sénat.
Est-il logique de défalquer les dégrèvements d'impôts locaux du montant des
impôts d'Etat ? Selon moi, il faudrait absolument que les dégrèvements d'impôts
locaux apparaissent comme de vraies dépenses, puisque les allégements de
fiscalité locale peuvent apparaître soit sous forme d'exonérations, soit sous
forme de dégrèvements.
Pendant longtemps, la réponse du ministère fut très simple : « On ne peut pas
le faire car la comptabilité publique ne distingue pas, au niveau des
contributions directes entre impôts d'Etat et taxes locales. »
Heureusement, cet argument technique ne tient plus aujourd'hui. Des progrès
considérables ont été réalisés en matière de comptabilité publique : ce qui
était impossible voilà encore trois ou quatre ans est désormais réalisable.
Madame le secrétaire d'Etat, pour la clarté du débat, pour évaluer
correctement l'impact de ces dégrèvements, il serait souhaitable qu'ils
apparaissent en dépenses et qu'ils ne soient plus défalqués des impôts
d'Etat.
Ces dégrèvements de fiscalité locale atteignent actuellement des sommes
considérables, mais progressent moins que les exonérations et compensations.
Sur les 140 milliards de francs d'allégements de la fiscalité directe, 60
milliards de francs prennent la forme de dégrèvements.
Vous savez que le Sénat a toujours été attaché à ce que les dégrèvements
soient favorisés, parce qu'ils permettent une indexation correcte et sont
rebasés chaque année pour compenser les pertes de recettes des collectivités
locales.
En conclusion, mes chers collègues, la commission pouvait porter deux regards
sur cet énorme budget.
Le premier est de nature technique : la plupart des crédits sont évaluatifs ou
provisionnels. La commission des finances a considéré qu'ils étaient
correctement évalués, même si l'on peut émettre quelques remarques au sujet des
crédits de dépenses éventuelles. La commission a également constaté que les
taux d'intérêt pour évaluer la charge de la dette étaient basés sur le
consensus, méthode proposée par M. Arthuis alors qu'il était ministre. Sous cet
angle, malgré tout, le budget est satisfaisant.
Mais la commission des finances a estimé que le volume des crédits demandés,
en particulier au titre de la charge de la dette, ne faisait que tirer les
conséquences d'une politique de réduction insuffisante du déficit budgétaire en
période de croissance, politique qui renvoie sur les générations futures une
partie du paiement de nos dépenses de fonctionnement. C'est pour cette raison
que la commission des finances vous demande de rejeter ce budget.
La parole est à M. Loridant, rapporteur spécial.
M. Paul Loridant,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation, pour les comptes spéciaux du Trésor.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les
comptes spéciaux du Trésor apporteront en 2002, comme les années précédentes,
une contribution très positive au solde du budget général, puisqu'ils
dégageront un excédent de 1,9 milliard d'euros, en hausse de 592 millions
d'euros par rapport à celui qui était prévu en loi de finances initiale pour
2001.
Je souhaite développer mes propos autour de quatre points : les incertitudes
du compte 902-24 de privatisation, la déception du compte 902-33 concernant les
licences UMTS, le bénéfice exceptionnel, lié à l'euro, du compte 906-04
d'émission des monnaies métalliques et le nouvel équilibre du compte d'avances
aux collectivités locales.
S'agissant du compte de privatisation, ce sont plus de 44,5 milliards d'euros
de recettes qui ont été encaissés entre 1993 et 2001. Ces recettes de
privatisation sont exceptionnelles et non reconductibles. Elles sont fragiles,
puisqu'elles dépendent, pour beaucoup, de la conjoncture économique et
boursière.
Je tiens à souligner que le compte 902-24 connaît, en 2000 et en 2001, un
effet de ciseau entre les recettes de privatisation et les besoins de
financement du secteur public. Pour ces deux années, les recettes réalisées ont
été en effet bien inférieures aux prévisions.
Cette diminution des recettes de privatisation s'explique, d'une part, par la
réduction du périmètre des entreprises publiques et, d'autre part, par la
conjoncture défavorable des marchés financiers qui peut conduire soit à une
cession à moindre coût des entreprises publiques, soit à un report de leur mise
sur le marché. La dernière hypothèse est sans doute préférable pour optimiser
la gestion patrimoniale de l'Etat. Elle ne résout toutefois pas le problème de
financement du secteur public.
Ainsi, la conjoncture défavorable que nous traversons conduit à un double
paradoxe. Les entreprises figurant sur la liste des privatisations ne
bénéficient pas des financements qu'elles pourraient trouver sur les marchés
d'actions, les autres ne peuvent bénéficier de dotations en capital à la
hauteur de leurs besoins, en raison notamment de la raréfaction des recettes de
privatisation.
Tel sera le cas en 2001. Au mieux, ce seront 2 milliards d'euros sur les 4
milliards d'euros prévus qui seront encaissés sur le compte d'affectation
spéciale 902-24. Les dotations en capital des entreprises publiques en
souffriront. Une forte proportion devra ainsi être repoussée en 2002, et je le
regrette.
Pour 2002, les perspectives sont incertaines. Les 3,9 milliards d'euros de
recettes de privatisation prévus au départ dans les documents budgétaires
correspondent à des cessions de capital de Renault, du Crédit lyonnais, de la
SNECMA et de Dassault Systèmes. S'y ajouteront les 1,5 milliard d'euros liés à
l'ouverture en capital, annoncée à l'Assemblée nationale, d'Autoroutes du Sud
de la France.
Compte tenu des informations dont je dispose, l'estimation initiale fournie
dans les documents budgétaires me semble constituer la fourchette basse des
recettes qui peuvent être attendues pour l'Etat, sauf report éventuel
d'opérations, évidemment lié, comme je le disais à l'instant, au contexte
économique et boursier.
J'aimerais d'ailleurs que le Gouvernement fasse preuve de plus de transparence
dans ses estimations : la difficulté de la prévision, qui est réelle, madame la
secrétaire d'Etat, n'excuse pas l'absence d'information du Parlement sur les
privatisations et les dotations en capital prévues pour 2002 et sur la
réalisation du programme de 2001.
S'agissant du compte 902-33, je ne puis qu'exprimer une déception. L'UMTS a
suscité - et suscite toujours, mais sans doute de manière plus raisonnable - de
grands espoirs industriels. Il a, par ailleurs, nourri de folles espérances
budgétaires. A l'issue de la procédure d'attribution des licences, l'UMTS n'a
cependant pas été la bonne affaire espérée.
La révision du prix intervenue à la demande des opérateurs de
télécommunications confirme cette déception budgétaire. Les gouvernements
britannique et allemand ont ainsi recueilli deux à trois fois plus que les
recettes prévues pour 2001, donc seize à vingt-quatre fois plus que ce que
percevra l'Etat en 2001 et 2002. Compte tenu de la modicité des sommes
désormais attendues - 1,24 milliard d'euros tirés de l'UMTS en 2001, soit moins
de 1 % des montants attendus pour le fonds de réserve pour les retraites d'ici
à 2020 -, je me demande si le compte 902-33 est à la hauteur des enjeux. Dès
lors, je pense que les produits issus de l'UMTS devraient abonder le budget
général.
J'en viens au compte 906-04 d'émission des monnaies métalliques. Je confirme
évidemment le bénéfice exceptionnel de 533 millions d'euros, soit 3,5 milliards
de francs, que connaîtra ce compte du fait du passage à l'euro en 2002. Il me
paraît inutile de nier cette réalité, comme certains tentent de le faire
aujourd'hui.
L'explication de ce « bénéfice » est simple : la Banque de France va émettre
massivement des euros ; elle estime par ailleurs qu'un grand nombre de francs
ne retourneront pas dans ses caisses et qu'une forte évaporation des pièces et
des billets en francs aura donc lieu. La Banque de France devrait reverser en
2002 à l'Etat, sur la ligne 805 « Recettes accidentelles à différents titres »,
240 millions d'euros, soit 1,5 milliard de francs, de recettes exceptionnelles,
liées au retrait des billets en francs.
Il y a quelque paradoxe à constater qu'au moment où l'Etat abandonne son droit
régalien le plus ancien, celui de battre monnaie, et sa souveraineté monétaire
il réalise un bénéfice exceptionnel de 5 milliards de francs !
On me répondra que j'oublie les coûts de fabrication ; tel n'est pas le cas !
Si l'Etat pratiquait une comptabilité en coûts complets, il faudrait sans doute
déduire de ce bénéfice de 2002 les coûts de fabrication des pièces payées sur
les exercices budgétaires 1998, 1999, 2000 et 2001. Il serait également
possible de rapprocher ce bénéfice des autres coûts supportés par l'Etat par
ailleurs. Ces coûts, hélas ! madame la secrétaire d'Etat, ne sont pas connus
dans leur globalité. Je souligne qu'il est très regrettable que l'Etat n'ait
pas fait l'effort de mesurer le coût complet du passage à l'euro et qu'il ne
l'ait pas, de ce fait, communiqué au Parlement ; ou bien, s'il l'a fait, il eut
été pédagogique de le faire parvenir au Parlement.
Quoi qu'il en soit, pour conclure sur cet excédent exceptionnel, nous
constatons que l'Etat sera le seul agent économique qui, à côté des inévitables
coûts d'adaptation au changement de monnaie, bénéficiera en 2002 de tels
profits sur l'euro.
Enfin, s'agissant du compte d'avances 903-54 aux collectivités locales, les
spécialistes des finances publiques locales - et ils sont nombreux dans cet
hémicycle - expliquaient encore récemment que le compte subissait un effet de
profil et un effet de solde. Il n'en est rien aujourd'hui.
L'effet de profil s'est estompé en raison des progrès dus à la mensualisation
du paiement de l'impôt. Surtout, le déficit de fin d'année a laissé place,
depuis 1996, à des excédents croissants. L'excédent du compte pour 2002
s'élèverait ainsi à 900 millions d'euros ; c'est énorme ! Alors que le compte
d'avances a pu fonctionner pendant de nombreuses années au détriment de l'Etat,
force est de constater qu'il opère aujourd'hui à son profit. Je remarque dès
lors que ce compte est porteur d'un nouvel équilibre des relations financières
entre l'Etat et les collectivités locales, et je ne peux que m'en réjouir.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
voudrais pour conclure vous remercier de votre attention et indiquer que la
commission des finances a proposé à la Haute Assemblée de voter le projet de
budget des comptes spéciaux du Trésor.
(Applaudissements sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées
socialistes.)
M. le président.
J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le
temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les
comptes spéciaux du Trésor recouvrent des opérations financières si diverses
qu'il nous est relativement difficile de les analyser.
A y regarder de plus près, on se contentera donc de souligner concrètement que
le solde des opérations menées sur les comptes spéciaux participe de
l'amélioration du solde budgétaire global.
Pour cette raison, mon bref propos portera essentiellement sur la situation du
compte d'avances aux collectivités locales, qui représente à lui seul plus de
54 milliards d'euros et qui devrait dégager, en 2002, un solde positif de 900
millions d'euros, contribuant ainsi à réduire de près de trois points le solde
budgétaire global.
Cette situation appelle évidemment plusieurs observations. En effet, deux
facteurs semblent motiver cette situation excédentaire du compte d'avances.
Le premier facteur est celui de la baisse des impôts locaux effectivement
acquittés par les contribuables, qui accroissent, certes, les charges de
dégrèvement et le niveau des prélèvements sur recettes, mais augmentent
sensiblement, paradoxalement, les recettes du compte d'avances.
Nous sommes en présence d'une sorte de jeu d'écriture qui consiste à
constater, ici, soit un amoindrissement des recettes, soit une augmentation des
charges, et là, au contraire, une hausse des produits du compte d'avances.
Le second facteur qui explique cependant la situation du compte d'avances est,
lui, plus directement lié à la question du recouvrement des impôts locaux.
Sous le double effet d'une meilleure lisibilité des encaissements et de la
mensualisation, les recettes fiscales tant de l'Etat que des collectivités
territoriales ont connu, dans la dernière période, une sensible amélioration de
leur recouvrement.
Le paradoxe de l'augmentation de la fiscalité locale a été d'inciter de plus
en plus de contribuables à opter pour un prélèvement mensuel de leur
cotisation.
On notera d'ailleurs que ce choix a été opéré plus souvent par les
contribuables de la taxe d'habitation ou de la taxe sur les propriétés
foncières bâties que par ceux de la taxe professionnelle.
Toujours est-il que cette situation conduit aujourd'hui à l'amélioration
constante du taux de recouvrement, donc à une réduction plus rapide du déficit
chronique du compte d'avances au long de l'année.
Demeure donc pleinement posée la question de l'excédent du compte et de son
origine. Est-ce un simple jeu d'optique ? Est-ce le produit de l'efficacité des
services de la comptabilité publique dépassant, en quelque sorte, les résultats
attendus dans la répartition du produit des impôts votés par les collectivités
locales ?
Toujours est-il que ce compte d'avances constitue aujourd'hui un moyen bien
commode de correction du déficit budgétaire et que la situation laisse un peu
l'impression de voir les collectivités territoriales contribuer, sans le
savoir, à l'amélioration de la situation des comptes publics.
Ce sont là quelques observations que je comptais formuler sur cette situation,
à l'occasion de l'examen des comptes spéciaux du Trésor.
(Applaudissements
sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Marc.
M. François Marc.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
budget des charges communes n'est jamais la source de débats animés au sein des
hémicycles parlementaires, même s'il touche à des sujets parfois
controversés.
Pourtant, ce budget est, du simple point de vue comptable - 117 milliards
d'euros - le premier des budgets de l'Etat. Son faible attrait s'explique
peut-être par son caractère très contraint, qui en fait plus un budget de
constatation qu'un budget de choix politique. En effet, les dépenses de la
dette, tout comme les dépenses de dégrèvement, sont des dépenses obligatoires
pour l'Etat. La preuve en est que les crédits qui y sont affectés sont bien
souvent évaluatifs et non limitatifs. Le titre II, « Pouvoirs publics »,
n'offre pas plus de marges de manoeuvre. Et je pourrais ainsi décliner un à un
tous les titres de ce budget en arrivant au même constat.
Toutefois, mes chers collègues, même lorsque les marges de manoeuvre sont
faibles, il y a toujours place pour la volonté politique et la réforme.
Cette année, la présentation du budget des charges communes a été assez
substantiellement remaniée. Les crédits du Fonds européen de développement ont
été transférés au ministère des affaires étrangères, où ils trouvent plus
logiquement leur place. Par ailleurs, un nouvel agrégat isolant les dépenses en
atténuation de recettes, à savoir essentiellement les dégrèvements et les
remboursements de trop perçus, a été mis en place. Dès lors, ces dépenses sont
clairement distinguées des dépenses de charge de la dette. De plus, on notera
la logique d'intégration des remboursements induits par la prime à l'emploi à
cette catégorie de dépenses.
Mais c'est surtout la présentation d'un programme relatif à la gestion de la
dette et de la trésorerie de l'Etat qui est le signe le plus marquant de
l'attachement du Gouvernement à la réforme des finances publiques. Certes,
cette année, le Parlement ne se prononcera pas sur ce programme, mais celui-ci
préfigure, à titre très instructif, l'aspect que pourrait revêtir demain le
débat budgétaire sous l'égide de la nouvelle loi organique relative aux lois de
finances.
Ce programme s'appuie sur trois objectifs : limiter le montant du compte du
Trésor à la Banque de France, dans une optique de trésorerie « zéro » ; placer
au mieux les excédents de trésorerie résultant du premier objectif ; enfin,
réduire la durée de la dette négociable. Pour atteindre ces objectifs, deux
instruments - l'Agence France Trésor et les portefeuilles
swaps
- ont
été créés.
Mes chers collègues, cette gestion active de la dette et de la trésorerie de
l'Etat apporte la preuve, s'il en était besoin, du souci de rigueur de ce
gouvernement dans la politique qu'il mène.
Ce budget nous permet aussi, cette année, de constater les résultats des
efforts engagés depuis 1997 pour diminuer les déficits et la dette. Ainsi, la
charge de la dette progressera modestement de - 0,8 % - en 2002, pour s'établir
à 36,9 milliards d'euros.
Certes, l'effet de la baisse des taux sur cette évolution est indéniable, mais
l'effet de la baisse des déficits depuis 1997 ne l'est pas moins. Il ne saurait
en être autrement, mes chers collègues, avec 100 milliards de francs de déficit
en moins par rapport à 1996 il n'y a pas de miracle ! Il s'agit simplement du
résultat des efforts entrepris à bon escient.
La dette continue de progresser, mais cette progression est relative si on la
compare à celle de la croissance de notre PIB et des recettes de l'Etat. Une
dette n'a en effet de signification qu'au regard de la capacité de son
titulaire à la rembourser ! Or la croissance économique de ces dernières
années, à laquelle les choix du Gouvernement ne sont pas étrangers, permet à
notre pays d'envisager plus sereinement la question de sa dette.
Je ne dis pas qu'aucun effort ne doit être accompli pour la réduire ou même
pour en limiter la croissance ; je dis simplement qu'il faut, dans un premier
temps, l'appréhender dans sa juste proportion et, ensuite, s'y attaquer pour
que nos enfants n'aient pas à payer demain nos dépenses d'aujourd'hui.
Mes chers collègues, le groupe socialiste votera ce budget, parce qu'il n'est
que le reflet de la politique déterminée et continue menée par le Gouvernement
depuis 1997 pour assainir nos finances publiques et les clarifier.
(M.
Delfau applaudit.)
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat au budget.
Monsieur le président, messieurs les
rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, en réponse à M. Fréville, je
souhaite revenir sur l'exemple concret de réforme de la gestion publique
induite et soutenue par l'adoption de la loi organique du 1er août 2001 et
relative à la modernisation de la gestion de notre dette publique.
Cette réforme se manifeste au ministère des finances de deux manières.
En premier lieu, Laurent Fabius a décidé, au début de cette année, la création
de l'Agence France Trésor. Celle-ci a pour mission de gérer au meilleur coût et
avec une sécurité optimale la trésorerie et la dette de l'Etat.
Le nom donné à cette structure ne doit pas vous induire en erreur. Comme le
souligne volontiers le directeur général de l'agence, c'est en quelque sorte un
« nom commercial », dont le but est de favoriser une forte visibilité auprès
des investisseurs européens, japonais ou américains et, finalement, de
faciliter le placement de notre dette sur des marchés qui sont hautement
concurrentiels. En réalité, l'agence reste un service de la direction du
Trésor, placé sous l'autorité du ministre de l'économie, des finances et de
l'industrie.
Une autre amélioration concrète liée à la nouvelle loi organique est
l'adoption dès cette année, donc par anticipation, d'un « programme de gestion
de la dette et de la trésorerie de l'Etat » dans le bleu « charges communes »
du projet de loi de finances pour 2002. C'est une innovation importante, et je
remercie M. Marc d'avoir bien voulu la souligner.
L'objet de ce programme est de clarifier les enjeux liés à la dette, comme
votre commission des finances - M. Fréville en particulier le souhaite depuis
de nombreuses années. Grâce aux réflexions et aux travaux internes au ministère
des finances qui avaient entouré la création de l'agence, nous étions prêts à
en débattre devant le Parlement. Aujourd'hui, grâce à ce programme, je puis
vous confirmer que la gestion de la charge de la dette n'est pas un simple
calcul arithmétique ou des hypothèses de taux d'intérêt ; elle est aussi le
résultat de choix opérés lors de la fixation du calendrier d'émission de la
dette primaire, puis lors des décisions prises en gestion active de la
dette.
Dans cet esprit, le programme « dette » que nous proposons retient trois
objectifs.
Le premier objectif fixé à l'agence vise la minimisation du montant du compte
de l'Etat à la Banque de France en fin de journée. Il s'agit de mettre en place
une gestion de la trésorerie de l'Etat aussi proche que possible de ce que l'on
appelle la trésorerie « zéro ». Cet objectif est mesuré concrètement par le
solde moyen du compte de l'Etat en fin de journée à la Banque de France, les
excédents éventuels étant placés en cours de journée sur le marché
interbancaire. L'objectif pour 2002 est de ramener à 200 millions d'euros,
contre 500 millions d'euros actuellement, le solde moyen en fin de journée et
d'aller encore au-delà par la suite.
Retenir cet objectif suppose que soit améliorée la précision des prévisions de
recettes et de dépenses de très nombreux services de l'Etat et de leurs
correspondants, à savoir les collectivités locales et les établissements
publics. C'est donc un engagement très significatif en termes de rigueur de
gestion, en particulier de l'administration des finances mais également de
l'ensemble des acteurs publics.
Le deuxième objectif a trait au placement des excédents ponctuels de
trésorerie au meilleur prix. Il convient, notamment par l'amélioration continue
des méthodes de prévision et d'intervention sur les marchés, d'accroître le
niveau moyen de rémunération des placements de liquidités de l'Etat sur le
marché interbancaire. L'objectif fixé à l'agence est d'obtenir la meilleure
rémunération possible sur le marché du court terme.
Ces politiques de gestion active de la trésorerie s'appuient sur les
prévisions à court, moyen et long termes de la trésorerie de l'Etat et sur les
émissions hebdomadaires de titres courts.
Le troisième de ces objectifs, M. le rapporteur spécial l'a souligné, est sans
doute le plus significatif en termes de gestion de la dette publique. Il s'agit
de la réduction de la durée moyenne de la dette négociable. Les travaux
réalisés au sein du ministère des finances et soumis aujourd'hui à votre examen
montrent que la réduction moyenne de la durée de la dette est de nature à
permettre, sur le long terme, une réduction de la charge d'intérêt de cette
dette. La contrepartie est évidemment, vous l'avez vous-même souligné, une
volatilité accrue de son coût. Il nous faut donc trouver un point d'équilibre
qui n'augmente pas trop cette variabilité. Tel est l'objet, aujourd'hui, du
programme « gestion de la dette et de la trésorerie de l'Etat. ».
Si le Parlement en est d'accord, l'objectif qui pourrait être fixé à l'Agence
France Trésor dans le cadre de ce programme serait de réduire la durée moyenne
de la dette à cinq ans et six mois, contre six ans et quatre mois à la mi-2001.
Selon nos simulations, l'augmentation de la volatilité des taux restera
marginale, alors que le gain budgétaire associé devrait être de l'ordre de 200
millions d'euros dès 2002.
L'agence engagera cette réduction grâce à une structure appropriée des
émissions primaires, amplifiée par la constitution d'un portefeuille de
contrats d'échanges, dits
swaps
, de taux.
Cela permettrait de poursuivre, en ce qui concerne les émissions de dette
proprement dites, une politique tenant compte de la demande des investisseurs,
dont certains préfèrent souscrire des maturités longues ou y sont
statutairement contraints.
Pour la première fois dans nos débats parlementaires, je vous propose donc de
débattre d'un objectif synthétique de gestion de la dette qui déterminera et
encadrera les décisions que nous serons amenés à prendre pour 2002 en ce qui
concerne tant la structure du calendrier d'émission de la dette primaire que la
gestion active de la dette.
En vous présentant ce programme, j'ai la conviction que nous clarifions les
choix publics à effectuer en matière de dette publique. Nous avons également la
volonté de montrer la mesure du changement de perspective qu'entraînera
progressivement la pleine application de la loi organique à l'ensemble des
chapitres budgétaires du budget de l'Etat.
Ce premier programme est un exemple concret de la modernisation du ministère
des finances, à laquelle nous sommes très attachés et dont je vous ai détaillé
quelques aspects ce matin.
En ce qui concerne les comptes spéciaux du Trésor, M. Loridant a d'abord
évoqué le compte 902-24 pour souligner les incertitudes concernant les recettes
de ce compte. Il est clair que les événements du 11 septembre dernier nous ont
conduits à décaler dans le temps certaines opérations, et je crois que personne
ne peut nous reprocher ce choix.
Nous demeurons confiants, cependant, dans notre capacité à financer les
opérations prévues sur ce compte - sans sortir de notre logique industrielle de
gestion du secteur public - à partir de la mobilisation de titres d'entreprises
qui évoluent dans le cadre d'accords industriels qui les renforcent ou dont
l'Etat se désengage parce qu'il y est minoritaire et que sa présence n'est pas
stratégique.
Nous avons d'ores et déjà annoncé le principe de certaines opérations, comme
notre désengagement de Dassault Systèmes ou l'ouverture du capital de la
Société nationale d'étude et de construction de moteurs d'aviation, la SNECMA,
qui, si elles ont été décalées du fait des turbulences des marchés, ont
vocation, parce qu'elles sont souhaitables et nécessaires, à se réaliser.
Enfin, M. Loridant à évoqué la question du coût complet de l'euro au travers
de celle du compte des monnaies métalliques. Je rappellerai simplement que, si
ce compte des monnaies métalliques affiche aujourd'hui un excédent de 3,5
milliards de francs, soit 0,53 milliard d'euros, il a supporté, dans le passé,
les coûts de fabrication des pièces d'euros, qui ont été comptabilisés au
moment de la frappe des pièces en 1998, 1999, 2000 et 2001 pour une somme
totale de 3 milliards de francs, auxquels s'ajoutent les frais de stockage ou
d'ensachage.
Comme M. Loridant l'a souligné, il faut, pour estimer le bilan global que
constitue l'introduction des pièces pour l'Etat, commencer par ne pas oublier
qu'il a dû frapper 8 milliards de pièces avant le 1er janvier 2002.
Il est un second excédent qui a été évoqué, notamment, par M. Loridant et par
M. Foucaud : je veux parler du compte d'avance aux collectivités locales.
L'existence d'un solde excédentaire de ce compte doit cependant être mise en
regard de plusieurs éléments.
D'abord, le déficit cumulé de ce compte qui, encore supérieur à 100 milliards
de francs à la fin de l'année 2000, est représentatif du manque à gagner global
pour l'Etat entre les avances qui ont été concédées aux collectivités locales
et les recettes qu'ils a recouvrées à ce titre.
Il faut, de plus, prendre en compte la masse des recettes « pour ordre » qui
créditent artificiellement ce compte et pèsent donc directement sur les
recettes fiscales nettes du budget général par augmentation des dépenses en
atténuation de recettes. Ces recettes d'ordre sont constituées des dégrèvements
dits « législatifs », connus dès l'émission, des dégrèvements prononcés suite à
une demande du contribuable après qu'il a reçu son avis d'imposition, ou encore
des admissions en non-valeur pour les créances irrécouvrables.
En 2000, on peut estimer que ces recettes pour ordre ont représenté plus de 85
% des 75 milliards de francs de dégrèvements et admissions en non-valeur sur
impôts locaux enregistrés en exécution, soit près de 17,5 % des recettes
totales du compte d'avance, élément, monsieur le sénateur, que vous négligez
dans votre présentation.
Enfin et surtout, le montant final des ressources qui sont allouées aux
collectivités locales n'est en rien affecté par le résultat annuel du compte
d'avance en exécution : quoi qu'il advienne, les recettes des collectivités
locales sont calées sur le volume effectivement réalisé des émissions des
impôts locaux. En revanche, c'est le budget de l'Etat qui absorbe, à travers
son déficit, les écarts successifs entre le volume des avances concédées aux
collectivités locales et les recouvrements effectivement réalisés sur les
impôts directs locaux.
Au terme de cette très brève intervention, je tiens à remercier M. Fréville,
rapporteur spécial, d'avoir bien voulu noter qu'en effet le budget des charges
communes est en « cure d'amaigrissement ».
(Sourires.)
Nous avons bien
l'intention de poursuivre dans cette voie l'année prochaine, si tout va bien !
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur certaines
travées du RDSE.)
charges communes
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant à l'état B et concernant les charges communes.
ÉTAT B
M. le président. « Titre Ier : 2 669 760 000 EUR. »
L'amendement n° II-36, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Majorer les crédits du titre Ier de 1 245 000 000 EUR. »
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Il s'agit, avec cet amendement, d'opérer une
coordination pour tenir compte des mesures qui ont été adoptées par votre
assemblée en première partie.
Je précise d'emblée qu'il en est de même pour l'amendement n° II-37.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Yves Fréville,
rapporteur spécial.
La commission est favorable à l'amendement n° II-36
ainsi qu'à l'amendement n° II-37, qui tend à majorer de 2,3 milliards d'euros -
soit 15 milliards de francs - les crédits du fonds national de péréquation.
Je précise également que la commission est favorable à l'adoption des crédits
du titre II, qui sont déterminés suivant des procédures spécifiques, mais
défavorable à l'adoption des crédits du titre Ier et des titres III et IV.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-36, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix, modifiés, les crédits figurant au titre Ier, repoussés par
la commission.
(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président.
« Titre II : 28 756 286 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre II, acceptés par la
commission.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
« Titre III :
moins
52 263 355 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III, repoussés par la
commission.
(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président.
« Titre IV :
moins
677 972 105 EUR. »
L'amendement n° II-37, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Majorer les crédits du titre IV de 2 365 000 EUR.
« En conséquence, porter le montant des mesures nouvelles à
moins
675
607 105 EUR. »
Mme le secrétaire d'Etat et M. Fréville, rapporteur spécial, se sont déjà
exprimés sur cet amendement.
Je mets aux voix l'amendement n° II-37, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix, modifiés, les crédits figurant au titre IV, repoussés par la
commission.
(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président.
J'appelle en discussion l'article 64
ter,
qui est rattaché pour son
examen aux crédits affectés aux charges communes.
Article 64 ter
M. le président.
« Art. 64
ter
. - I. - L'article L. 135-1-1 du code de la sécurité
sociale est abrogé.
« II. - Après le 7° de l'article L. 135-2 du même code, il est inséré un 8°
ainsi rédigé :
« 8° Les frais de gestion administrative du fonds correspondant à des
opérations de solidarité. »
L'amendement n° II-23, présenté par M. Fréville, au nom de la commission des
finances, est ainsi libellé :
« Supprimer l'article 64
ter
. »
La parole est à M. Fréville, rapporteur spécial.
M. Yves Fréville,
rapporteur spécial.
L'article 64
ter
, qui résulte d'un amendement
déposé par le Gouvernement à l'Assemblée nationale, vise à transférer au fonds
de solidarité vieillesse, le FSV, la prise en charge des frais liés à sa
gestion administrative. Il aurait pu participer de la cure d'amaigrissement
dont nous parlions tout à l'heure !
(Sourires.)
Cependant, la commission des finances considère que les crédits relatifs au
FSV et, par voie de conséquence, au FOREC, auraient dû faire partie intégrante
du budget. Elle ne saurait accepter que ces frais de gestion administrative
soient transférés en dehors de la loi de finances. De cette manière, elle
conserve un droit de regard sur le FSV.
Elle propose donc la suppression de l'article 64
ter
.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-23, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 64
ter
est supprimé.
COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR
M. le président. Nous allons maintenant examiner les articles 35 à 41, 41 bis et 42 du projet de loi de finances qui concernent les comptes spéciaux du Trésor.
C. -
Opérations à caractère définitif
des comptes d'affectation spéciale
Article 35
M. le président.
« Art. 35. - Le montant des crédits ouverts aux ministres, pour 2002, au titre
des services votés des opérations définitives des comptes d'affectation
spéciale, est fixé à la somme de 3 065 808 000 EUR. »
- (Adopté.)
Article 36
M. le président.
« Art. 36. - I. - Il est ouvert aux ministres, pour 2002, au titre des mesures
nouvelles des opérations définitives des dépenses en capital des comptes
d'affectation spéciale, des autorisations de programme s'élevant à la somme de
6 917 334 591 EUR.
« II. - Il est ouvert aux ministres, pour 2002, au titre des mesures nouvelles
des opérations définitives des comptes d'affectation spéciale, des crédits de
paiement s'élevant à la somme de 7 208 178 591 EUR, ainsi répartie :
« Dépenses ordinaires civiles : 290 844 000 EUR ;
« Dépenses civiles en capital : 6 917 334 591 EUR ;
« Total : 7 208 178 591 EUR. »
L'amendement n° II-39, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Dans l'article 36 :
« Minorer les autorisations de programme du I de 23 065 000 EUR.
« Minorer les dépenses ordinaires civiles du II de 22 110 000 EUR.
« Minorer les dépenses civiles en capital du II de 23 065 000 EUR. »
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Il s'agit d'un amendement de coordination, comme le
suivant, l'amendement n° II-38.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Paul Loridant,
rapporteur spécial.
La commission accepte cet amendement, ainsi que
l'amendement n° II-38 auquel vient de faire allusion Mme la secrétaire
d'Etat.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-39, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 36, modifié.
(L'article 36 est adopté.)
Articles 37 et 38
M. le président.
« Art. 37. - I. - Dans le II de l'article 60 de la loi de finances pour 1984
(n° 83-1179 du 29 décembre 1983) :
« - au premier alinéa, les mots : "Fonds national des haras et des activités
hippiques" sont remplacés par les mots : "Fonds national des courses et de
l'élevage" ;
« - le sixième alinéa est ainsi rédigé :
« - les subventions pour le développement de l'élevage et des courses ; » ;
« - le septième alinéa est supprimé.
« II. - Au deuxième alinéa de l'article 51 de la loi n° 47-520 du 21 mars 1947
relative à diverses dispositions d'ordre financier, les mots : "Fonds national
des haras et des activités hippiques" sont remplacés par les mots : "Fonds
national des courses et de l'élevage". »
- (Adopté.)
« Art. 38. - L'article 62 de la loi de finances pour 1998 (n° 97-1269 du 30
décembre 1997) est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa, l'intitulé du compte d'affectation spéciale est ainsi
rédigé : "Fonds d'aide à la modernisation de la presse quotidienne et assimilée
d'information politique et générale, et à la distribution de la presse
quotidienne nationale d'information politique et générale" ;
« 2° Au 2°, les
b, c
et
d
deviennent respectivement les
c, d
et
e,
et il est inséré un
b
ainsi rédigé :
«
b)
Les aides à la distribution des quotidiens nationaux d'information
politique et générale, de langue française, paraissant au moins cinq fois par
semaine, bénéficiant du certificat d'inscription délivré par la commission
paritaire des publications et agences de presse ; » ;
« 3° Le dernier alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les modalités d'attribution des subventions et avances remboursables
destinées au financement des projets de modernisation, notamment la composition
du comité d'orientation, la définition des types d'actions de modernisation
prises en compte et les critères d'éligibilité aux subventions ou avances, sont
définies par décret.
« Les modalités d'attribution des aides à la distribution sont définies par
décret. » -
(Adopté.)
II. - OPÉRATIONS À CARACTÈRE TEMPORAIRE
Articles 39 à 41
M. le président.
« Art. 39. - I. - Le montant des découverts applicables, en 2002, aux services
votés des comptes de commerce est fixé à 276 492 290 EUR.
« II. - Le montant des crédits ouverts au ministre de l'économie, des finances
et de l'industrie, pour 2002, au titre des services votés des comptes d'avances
du Trésor, est fixé à la somme de 54 796 890 000 EUR.
« III. - Le montant des crédits ouverts au ministre de l'économie, des
finances et de l'industrie, pour 2002, au titre des services votés des comptes
de prêts, est fixé à la somme de 395 147 404 EUR. »
- (Adopté.)
« Art. 40. - Il est ouvert aux ministres, pour 2002, au titre des mesures
nouvelles des opérations temporaires des comptes d'affectation spéciale, un
crédit de paiement de dépenses ordinaires de 4 600 000 EUR. »
- (Adopté.)
« Art. 41. - Il est ouvert au ministre de l'économie, des finances et de
l'industrie, pour 2002, au titre des mesures nouvelles des comptes de prêts,
des crédits de paiement s'élevant à 448 202 596 EUR. »
- (Adopté.)
Article 41 bis
M. le président.
« Art. 41
bis
. - Les mesures nouvelles des comptes d'avances du Trésor
sont fixées, pour 2002, à
moins
152 000 000 EUR. »
L'amendement n° II-38, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit l'article 41
bis
:
« Les mesures nouvelles des comptes d'avances du Trésor sont fixées, pour
2002, à
moins
382 000 000 EUR. »
Mme le secrétaire d'Etat et M. Loridant, rapporteur spécial, se sont déjà
exprimés sur cet amendement.
Je mets aux voix l'amendement n° II-38, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 41
bis
est ainsi rédigé.
Article 42
M. le président.
« Art. 42. - Il est ouvert aux ministres, pour 2002, au titre des mesures
nouvelles des comptes de commerce, une autorisation de découvert s'élevant à 1
700 762 510 EUR. »
- (Adopté.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant les charges communes et les comptes spéciaux du Trésor.
Services du Premier ministre
I. - SERVICES GÉNÉRAUX
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
les services du Premier ministre : I. - Services généraux (à l'exclusion des
crédits relatifs à la fonction publique, à la presse, à l'audiovisuel et au
Conseil supérieur de l'audiovisuel).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. François Marc,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, madame la
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget des services généraux du
Premier ministre n'est pas un petit budget : il atteint en effet, cette année,
plus d'un milliard d'euros, soit plus de 6,5 milliards de francs, et il
représente un effectif de près de 1 800 personnes. Il pèse donc plus lourd que
le budget de l'environnement ou celui de l'aménagement du territoire.
Succinctement, je rappellerai que le budget des services généraux du Premier
ministre regroupe les crédits de trois ministres - le Premier ministre, le
ministre chargé des relations avec le Parlement et le ministre chargé de la
fonction publique et de la réforme de l'Etat - de divers organismes et des
fameux « fonds secrets ».
Je rappelle, toutefois, qu'une partie de ces crédits doit être présentée
demain par notre collègue Claude Belot, au titre des crédits de la
communication audiovisuelle, et qu'une autre partie sera présentée mercredi
prochain par notre collègue Gérard Braun, au titre des crédits de la fonction
publique.
La croissance de ce budget - 3,8 % cette année - est due essentiellement à
l'augmentation des crédits de la dotation en faveur des victimes des
législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation et des crédits du
Médiateur de la République.
Je m'en tiendrai là pour la présentation des crédits - vous en retrouverez le
détail dans mon rapport écrit - pour concentrer mon propos sur les principales
observations que m'a inspirées l'examen de ce budget.
Compte tenu de l'actualité, je limiterai mes propos à la réforme des fonds
secrets.
Permettez-moi, mes chers collègues, de citer Gustave Flaubert. Dans son
Dictionnaire des idées reçues,
celui-ci définit les fonds secrets comme
des « sommes incalculables » contre lesquelles il est de bon ton de «
s'indigner ».
On a, en réalité, souvent tendance à exagérer l'importance des fonds secrets.
On peut rappeler qu'ils ne s'élèvent qu'à 60 millions d'euros, soit, environ,
400 millions de francs, ce qui correspond à 0,02 % du budget de l'Etat.
Par ailleurs, leur utilisation répond à des besoins essentiels de l'Etat. En
effet, la moitié des fonds secrets sert à financer la DGSE, c'est-à-dire les
services secrets. Seuls 20 % de ces fonds permettent d'attribuer des primes aux
membres des cabinets ministériels. Le reste se répartit entre le fonctionnement
de l'Hôtel Matignon, l'Elysée, le ministère des affaires étrangères et les
actions en faveur des droits de l'homme.
Les fonds secrets, sous leur forme actuelle, me semblent poser un triple
problème.
Tout d'abord, les fonds secrets, que l'on nous présente chaque année en
parfaite stabilité dans le projet de loi de finances, sont systématiquement
abondés en cours d'année par des décrets pour dépenses accidentelles, lesquels
décrets ne sont pas publiés au
Journal officiel
alors qu'ils portent sur
des montants représentant entre 15 % et 40 %, selon les années, des dotations
initiales inscrites au titre des fonds secrets.
Dans ces conditions, madame la secrétaire d'Etat, la commission s'est
interrogée sur le point de savoir si les crédits prévus pour les fonds spéciaux
dans le texte transmis au Sénat au titre du présent exercice budgétaire, à
savoir 37 millions d'euros, seront suffisants pour mener les actions définies
au titre de l'année 2002.
Les deux autres problèmes posés par les fonds spéciaux, sous leur forme
actuelle, sont ceux de leur périmètre et de leur contrôle, problèmes qui ont
justifié la démarche réformatrice du Gouvernement.
Tout d'abord, l'idée que le périmètre des fonds secrets est trop large fait
l'objet d'un consensus. En effet, si l'on comprend pourquoi les dépenses de la
DGSE sont financées par des fonds secrets, ce point de vue est discutable dans
le cas, par exemple, des primes de cabinet. Le Gouvernement a donc proposé
plusieurs amendements, adoptés par l'Assemblée nationale, qui ne laissent, au
sein du chapitre « fonds secrets », qu'un peu plus de la moitié de ces crédits,
le reste étant réparti entre d'autres budgets ou redéployé au sein du budget
des services généraux du Premier ministre. La commission des finances approuve,
bien entendu, cette orientation.
Ensuite, les fonds secrets devront être mieux contrôlés.
Les fonds secrets autres que ceux qui sont affectés à la DGSE ne sont
actuellement pas contrôlés du tout, les obligations prévues par la loi n'ayant
jamais été appliquées.
Il convient cependant de souligner que les fonds finançant la DGSE sont
contrôlés par une commission spéciale, présidée par un membre de la Cour des
comptes. Pourtant, ce contrôle est insuffisant. C'est pourquoi le Gouvernement
a proposé un amendement, adopté par l'Assemblée nationale, tendant à réformer
le dispositif en insérant dans le projet de loi de finances pour 2002 un nouvel
article, l'article 77, qui instaurerait une nouvelle commission comportant,
notamment, des parlementaires.
La commission des finances approuve ces orientations. Elle estime cependant
que le dispositif envisagé pourrait être amélioré et a déposé quelques
amendements en ce sens, que je vous présenterai tout à l'heure.
Je souhaiterais cependant demander à Mme la secrétaire d'Etat de préciser un
point. L'article 77, sous sa forme actuelle, ne fait aucune référence à un
recours éventuel par les membres de la commission de vérification à des
collaborateurs extérieurs. Faut-il comprendre, madame la secretaire d'Etat,
qu'un membre de la commission qui communiquerait à de proches collaborateurs
des informations couvertes par le secret de la défense nationale serait
passible de sept ans de prison et de 700 000 francs d'amende ?
C'est en fonction des observations que nous présentera demain prochain notre
collègue Claude Belot au sujet des crédits de la communication audiovisuelle et
de celles que formulera mercredi prochain notre collègue Gérard Braun sur les
crédits de la fonction publique qu'il sera proposé au Sénat de rejeter les
crédits des services généraux du Premier ministre pour 2002. Cette position ne
résulte donc pas d'une opposition au projet de réforme des fonds spéciaux
proposé par le Gouvernement, réforme dont la commission des finances, ainsi que
je l'ai indiqué, approuve les grandes orientations.
(Applaudissements sur
les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain
et citoyen.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République : 10 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen : 5 minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les
crédits dévolus aux services généraux connaissent cette année une évolution
caractérisée par deux phénomènes essentiels.
Le premier est fondé sur l'intégration des crédits destinés au financement de
la réparation des crimes antisémites commis pendant la Seconde Guerre mondiale.
Nous ne manquerons pas de souligner ici qu'il était plus que temps de tirer les
conclusions de la mission Mattéoli : la légitime réparation des actes perpétrés
à cette époque à l'encontre d'une partie importante de la population n'a que
trop tardé.
Nul doute que le travail qui attend ceux qui traiteront ces dossiers complexes
doit être salué, car il constitue un travail de mémoire significatif pour
l'ensemble de la communauté nationale.
C'est là l'origine de l'essentiel de la progression des crédits du département
ministériel.
Le second élément important, c'est évidemment l'article 77 relatif au
traitement des fonds spéciaux.
Nous approuvons sans réserve la volonté de clarification qui sous-tend cet
article, qui lève un voile sur une partie du mystère qui entoure parfois
l'action publique. Cette volonté de transparence n'est pas discutable au fond,
et nous la partagerons.
Cependant, au-delà de l'aspect quelque peu conjoncturel du débat, nous sommes
tentés d'apporter un élément supplémentaire à la réflexion.
Le terme même de « fonds spéciaux » et le débat que ces fonds ont suscité
illustrent bien le rapport que nos concitoyens entretiennent avec le monde
politique. C'est pourquoi il s'agit, de notre point de vue, d'une question
essentielle.
Tout ce qui peut contribuer à plus de transparence dans les rapports entre les
citoyens et les centres du pouvoir doit être encouragé. Nous souffrons en effet
suffisamment de l'éloignement du pouvoir et des limites de la démocratie
représentative pour que tout soit mis en oeuvre pour faire reculer ces limites,
à défaut de les faire totalement disparaître.
Si l'article 77 permet d'atteindre cet objectif, il faut l'adopter et espérer
qu'il « survivra » à une quelconque alternance... Il s'agit, finalement, de
l'une des formes que peut prendre aujourd'hui la réforme de l'Etat.
Je tenais à présenter ces quelques observations à l'occasion de l'examen des
crédits de ce département ministériel.
(Applaudissements sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard.
Permettez-moi, monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers
collègues, de commencer cette intervention sur les fonds spéciaux par une scène
des
Mémoires d'outre-tombe
.
Le 26 mai 1833, à Prague, Chateaubriand évoquait avec un Charles X en exil
l'heureux temps où ils étaient tous deux aux affaires. « Je suis si bête,
confiait au roi l'écrivain ancien ministre, qu'en entrant aux affaires
étrangères je ne voulus pas prendre les 25 000 francs de frais
d'établissements, et qu'en sortant je dédaignai d'escamoter les fonds secrets.
»
On le voit, le problème ne date pas d'hier ! Il est probable que bien des
ministres n'ont pas eu le désintéressement, ou l'étourderie, de Chateaubriand
!
A l'instar de Flaubert, cité par notre rapporteur spécial dans son rapport
écrit, bien des bonnes âmes se sont indignées de cette pratique plus ancienne
que la République : dans nos débats budgétaires, il était d'usage de dénoncer
l'opacité de la gestion des crédits demandés par le Gouvernement sur le
chapitre 37-91. Montants insincères, dépassements importants, circulation
d'enveloppes que le chef de cabinet du ministre allait chercher à Matignon et
dont le ministre faisait ce qu'il voulait, entre sa propre part et celles de
ses collaborateurs plus ou moins bien traités qui n'a connu cela avec un peu
d'expérience de l'exécutif ?
Mais les sociétés évoluent : ce qui, hier, était admis devient emploi fictif,
abus de bien social, évasion fiscale... C'est un processus dérangeant, mais
qui, après tout, comporte des aspects positifs.
C'est ainsi que, depuis plusieurs années, nos rapporteurs spéciaux successifs
dénonçaient l'opacité de la gestion des crédits demandés par le Gouvernement
sur le chapitre 37-91.
A vrai dire, ces critiques portaient plus sur l'article 10 du chapitre,
relatif aux fonds spéciaux du Gouvernement, que sur l'article 20, concernant
les fonds spéciaux à destination particulière, comprenant, entre autres, des
dépenses de la direction générale de la sécurité extérieure, la DGSE : ces
fonds spéciaux-là, tout le monde convient qu'ils sont indispensables pour la
défense intérieure de l'Etat, donc de notre démocratie.
Sans revenir sur la nature de l'ensemble de ces crédits, qui a été présentée
par M. le rapporteur spécial, on peut regretter la façon dont se sont déroulées
les différentes étapes qui ont amené la réforme annoncée par le Premier
ministre durant l'été. Force est de reconnaître que le Parlement n'y a pas été
particulièrement associé, en amont des amendements présentés par le
Gouvernement à l'Assemblée nationale.
Ce manque de coopération a d'ailleurs été analysé par M. François Logerot,
Premier président de la Cour des comptes, qui a remis au Premier ministre un
rapport relatif aux fonds spéciaux. Il était donc particulièrement difficile
aux commissions des finances des deux chambres de connaître la ventilation au
sein du chapitre 37-91 des autres crédits alloués aux dépenses de
fonctionnement courant et à la sécurité intérieure ou extérieure de l'Etat.
Chacun sait qu'une partie de ces crédits servait au financement des cabinets
ministériels, les lignes budgétaires « indemnités de cabinets » ne représentant
qu'une partie du financement réel de ceux-ci.
Une autre partie de ces crédits complète les crédits des pouvoirs publics. Les
informations communiquées au mois de juillet dernier par les services du
Premier ministre ont confirmé les dires du Président de la République selon
lesquels Matignon reçoit 95 % des fonds spéciaux et l'Elysée moins de 5 % ».
M. Jean Chérioux.
Exactement !
M. Yann Gaillard.
Il existe désormais un consensus sur les primes versées aux membres des
cabinets ministériels, qui, naguère versées en liquide, échappaient à la fois à
l'impôt et aux cotisations sociales.
Pourtant, aucune réforme d'ensemble de la nomenclature budgétaire n'est
initiée par le Gouvernement. Qu'est-ce qui empêchera le Premier ministre ou un
ministre d'utiliser les fonds spéciaux à d'autres fins que celles sur
lesquelles le Parlement se sera prononcé en loi de finances initiale ? La seule
réforme véritablement identifiable porte sur les modalités de rémunération.
Mais l'opacité demeure ailleurs.
A cette réforme souhaitable de la nomenclature, il conviendrait d'en ajouter
deux autres.
D'une part, une revalorisation des rémunérations des ministres, car leur
montant est inférieur à celui dont bénéficient, indemnités comprises, les plus
hauts fonctionnaires ou les dirigeants d'entreprises publiques.
D'autre part, les cabinets ministériels devraient subir une cure
d'amaigrissement. N'est-ce pas d'ailleurs un voeu pieux sous tous les
gouvernements ? Le nombre des collaborateurs de ces cabinets est difficile à
cerner. On peut légitimement s'étonner des différences entre le « jaune »
budgétaire annexé au projet de loi de finances et le
Bottin
administratif
! Pour ce dernier, la source d'information ne pouvant venir,
il est vrai, que des ministères eux-mêmes, cela en relativise considérablement
la qualité. Il y donc encore des efforts à faire pour atteindre la transparence
que nous appelons tous de nos voeux.
Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale apportent un certain
nombre de réponses intéressantes aux problèmes posés.
Tout d'abord, les crédits non liés à des opérations de sécurité sont supprimés
et réinscrits dans le budget de l'Etat pour chaque ministère : il s'agit de
crédits d'indemnité et de crédits de fonctionnement.
Les primes de cabinet seront donc versées, à compter du 1er janvier 2002, par
virement et donneront effectivement lieu à une fiche de paie. De ce fait, elles
seront soumises à l'impôt et assujetties aux cotisations sociales.
Pour ce qui est du régime des rémunérations des ministres, le Gouvernement a
annoncé que le dispositif choisi le sera avant la fin de l'année 2001. Il
convient que le Parlement soit totalement informé des modalités finalement
retenues.
J'en viens au second volet de cette réforme en devenir, les crédits
nécessaires aux activités des services secrets.
La commission de vérification instituée par l'article 77 du projet de loi de
finances pour 2002 pose plusieurs problèmes.
Au premier chef, il y a le problème du secret, et même du « très secret », car
le contrôle des fonds secrets doit lui-même être suffisamment secret.
(Sourires.)
La commission de contrôle des fonds des services secrets instituée en 1947
était composée de deux magistrats et d'un haut fonctionnaire, dont les noms
n'étaient jamais publiés. Dans l'instance de contrôle créée par l'Assemblée
nationale, les noms de tous les membres parlementaires et des magistrats seront
publiés, ce qui ne va pas sans créer un risque majeur de pression sur ces
personnes.
Confier la présidence de cette commission de vérification à l'un des membres
parlementaires soulève aussi des problèmes de stabilité liés au renouvellement
de leur mandat. La commission qui siège depuis 1947 a, pour sa part, connu un
nombre assez faible de présidents, ce qui a contribué à sa stabilité.
Le rapporteur de la commission des finances proposera une série d'amendements
tendant à renforcer la légitimité de la commission de vérification et à en
améliorer le fonctionnement. Cette démarche va dans le bon sens et nous y
apporterons notre soutien. La commission des finances y a travaillé hier
encore. Le souci de tous ses membres, quelle que soit leur appartenance
politique, est, dans un domaine dont dépend la sécurité nationale, de préserver
l'autonomie de l'exécutif... et d'éviter les fuites !
Un mot quand même -
in cauda venenum
- sur les effectifs des services
généraux du Premier ministre.
Depuis 1997, les services centraux ont vu le nombre de leurs personnels
augmenter de 37 %. Que peut bien justifier une telle progression alors que ces
effectifs étaient restés stables lors de la législature précédente ?
De plus, cette augmentation s'accompagne d'une progression des crédits
correspondant aux « rémunérations des personnels », « autres rémunérations » et
« indemnités et allocations diverses » de 18 millions d'euros durant la
législature, ce qui est considérable.
Il n'y a pas eu, à notre connaissance, de modifications substantielles des
compétences des services du Premier ministre depuis 1997 pouvant justifier des
recrutements aussi pléthoriques. Dans ces conditions, le Gouvernement pourra
peut-être éclairer le Sénat sur les raisons pouvant justifier de telles
progressions.
Le groupe du Rassemblement pour la République suivra les préconisations de la
commission des finances et votera contre les crédits des services généraux du
Premier ministre, avec l'appréciation suivante : « pourrait mieux faire » ou,
plutôt, « aurait pu mieux faire ».
Puisque j'ai commencé par Chateaubriand, pourquoi, une fois n'est pas coutume,
ne pas terminer sur un autre auteur, devenu classique de nos jours, le marquis
de Sade. Il s'écriait dans un libelle célèbre : « Français, encore un effort si
vous voulez être républicains ! »
(Sourires et applaudissements sur les
travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat au budget.
Monsieur le président, monsieur le
rapporteur spécial, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux d'abord
remercier M. François Marc de la qualité de son rapport. Comme celui-ci est
très complet, je ne rappellerai que brièvement les évolutions les plus
significatives pour apporter quelques éclaircissements sur les points soulevés
par votre commission.
La progression de 3,8 % du budget des services généraux du Premier ministre
s'explique, pour l'essentiel, par l'évolution des crédits qui relèvent des
agrégats « administration générale » et « autorités administratives
indépendantes ».
Les crédits consacrés à l'agrégat « administration générale » passent de 262,8
millions d'euros à 301,1 millions d'euros, ce qui représente une augmentation,
à structure constante, de 12 %.
Les crédits du titre III progressent, à structure constante, de 1,96 %.
Cette augmentation permet notamment de financer le renforcement en personnels
des services, avec neuf emplois, les autres emplois budgétaires étant destinés,
monsieur Gaillard, à remplacer les personnels militaires du contingent affectés
dans les services du Premier ministre, ce qui correspond à dix-huit emplois
budgétaires et explique, pour l'essentiel, l'évolution, dont vous avez contesté
la légitimité, au cours de la législature. En effet, la suppression du service
national a nécessairement des conséquences sur les emplois affectés aux
services du Premier ministre ; d'autres départements ministériels sont
d'ailleurs concernés, mais l'incidence de cette réforme est le plus marquée
pour les services du Premier ministre et la présidence de la République.
Par ailleurs, vingt-six emplois sont prévus pour contribuer à la résorption de
l'emploi précaire.
Le titre III du budget des services généraux du Premier ministre bénéficie
également de plusieurs mesures de transfert de crédits en provenance d'autres
départements ministériels, pour 6,6 millions d'euros.
Les crédits du titre III englobent des mesures intéressant la situation du
personnel. Je voudrais souligner à cet égard que, dans l'optique de la mise en
oeuvre de l'aménagement et de la réduction du temps de travail, un protocole
d'accord a été conclu avec les organisations syndicales le 26 octobre
dernier.
La croissance la plus importante concerne cependant le titre IV, dont les
crédits progressent de 34,7 millions d'euros, soit d'un peu plus de 108 %.
Comme l'a souligné de manière très opportune M. Foucaud, il s'agit avant tout
de crédits visant à assurer l'indemnisation des orphelins de la déportation et
celle des victimes des spoliations. Cet ajustement à hauteur de 33,5 millions
d'euros est rendu nécessaire par le nombre des dossiers instruits au cours de
l'année 2001, ainsi que par les projections que l'on peut établir, en termes de
dépenses, pour l'année 2002.
En ce qui concerne le titre V, les crédits de paiement alloués pour le gros
entretien immobilier des services du Premier ministre sont reconduits à leur
niveau de 2001.
S'agissant de l'entretien des cités administratives, je voudrais apaiser une
crainte qui est exprimée dans le rapport de la commission des finances : la
réduction de 7,2 millions d'euros des crédits de paiement et de 3,2 millions
d'euros des autorisations de programme ne traduit nullement un désengagement de
l'Etat à l'égard des charges et obligations qui lui sont imparties en sa
qualité de propriétaire, elle résulte simplement de l'existence d'un montant de
reports de l'ordre de 40 millions à 45 millions d'euros sur l'exercice 2002.
Par conséquent, à cette dotation du projet de loi de finances pour 2002 viendra
s'ajouter le montant des reports, ce qui implique que des moyens très
significatifs seront disponibles pour assurer la poursuite des travaux
d'entretien. Une étude visant à établir un diagnostic sur l'état des cités
administratives vient d'ailleurs d'être lancée ; les résultats obtenus
constitueront un instrument important pour la programmation des investissements
de l'Etat.
En ce qui concerne les crédits de l'agrégat « autorités administratives
indépendantes », ceux-ci augmentent de 8,01 %.
La croissance la plus significative concerne le Médiateur, avec près de 47 %
de hausse. Ces moyens supplémentaires, que le précédent rapporteur de ce projet
de budget avait appelés de ses voeux, permettront en particulier le financement
de la poursuite de l'exécution du plan de recrutement des délégués du Médiateur
et des frais de fonctionnement induits, selon les modalités prévues par le
comité interministériel des villes du 14 novembre 1999. Ils permettront aussi
d'assurer le financement d'une augmentation programmée des loyers.
J'en viens maintenant, monsieur le rapporteur spécial, à la question,
importante cette année, des fonds spéciaux.
Le Parlement a déjà réformé, voilà quelques mois, l'ordonnance de 1959
relative aux lois de finances. Bien entendu, la réforme des fonds spéciaux et
celle de l'ordonnance organique de 1959 n'ont pas la même portée. Néanmoins, je
leur vois deux points communs.
Tout d'abord, elles sont la manifestation d'un souci de transparence des
comptes publics ; ensuite, elles sont aussi le signe du renforcement du
contrôle parlementaire sur l'action de l'exécutif. Ces évolutions, dont je me
réjouis, sont, à mon sens, la preuve d'une plus grande maturité du débat
démocratique.
Je ne rappellerai pas les multiples évocations des pratiques liées aux fonds
spéciaux : nous les retrouvons dans la littérature, et M. Gaillard a abordé ce
thème dans son propos liminaire, en rappelant la vie des morts illustres.
(
Sourires.
) Mais nous connaissons aussi des témoignages plus récents à
cet égard.
Ces pratiques critiquables étaient, en quelque sorte, enracinées dans notre
histoire, et c'est une conjonction de circonstances et d'interventions qui a
amené le Gouvernement à conclure qu'il fallait mettre fin à un système
archaïque, peu compatible avec la légitime demande de transparence de nos
concitoyens.
La réforme adoptée par l'Assemblée nationale comporte deux volets.
Elle prévoit, en premier lieu, une ventilation des crédits qui ne sont en rien
liés au financement des opérations de sécurité. Il s'agit en effet de crédits
d'indemnités et de fonctionnement. Par conséquent, il sera mis fin, dès le 1er
janvier 2002, à l'archaïsme que constituait le versement de primes en liquide.
Les primes de cabinet, dont personne ne conteste qu'elles compensent de réelles
contraintes, seront désormais versées par virement et donneront lieu à
l'établissement d'une fiche de paie. Elles seront clairement soumises à l'impôt
et aux contributions sociales.
Le versement des primes, celles des membres de cabinet et celles des
personnels de services administratifs, d'intendance, de sécurité et de
logistique directement liés à l'activité ministérielle, sera encadré par un
décret qui en constituera le fondement juridique.
Quant aux dépenses de fonctionnement, elles seront inscrites aux chapitres
correspondants de chaque ministère, et leur exécution obéira aux règles de
droit commun.
Une nouvelle répartition de crédits a donc été opérée par amendement au projet
de loi de finances à l'Assemblée nationale. M. le rapporteur spécial en ayant
donné le détail dans son rapport, je n'y reviendrai pas.
En second lieu, les dépenses liées aux actions de sécurité, qui doivent
conserver un caractère secret, resteront imputées sur le chapitre des fonds
spéciaux. A ce propos, monsieur Gaillard, permettez-moi de vous contredire : la
nomenclature interne du chapitre a bien été modifiée en conséquence, pour
distinguer les crédits de la DGSE de ceux qui seront destinés à financer
d'autres actions de sécurité.
M. Jean Chérioux.
Tant mieux !
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
La loi précise que les services utilisateurs des fonds
en tiennent le compte d'emploi, ce qui signifie que la procédure de la dépense
n'est pas soumise à la règle de séparation de l'ordonnateur et du comptable.
Le dispositif de contrôle résultant de dispositions législatives de 1946 et de
1947 ainsi que d'un décret de 1947 est également rénové. Au lieu d'une
commission purement administrative, est mise en place une commission comportant
deux députés, deux sénateurs et deux membres de la Cour des comptes. Ce format
permettra de faire place à une représentation de l'opposition parlementaire.
J'indique, pour répondre à la question posée par M. le rapporteur spécial,
que, s'agissant de l'article 77, il n'est en effet pas prévu de recourir à des
collaborateurs extérieurs. Si une communication d'information était faite, les
peines encourues seraient applicables. C'est la raison pour laquelle le
dispositif, tel qu'il est soumis au Sénat, prévoit la présence, au sein de
cette commission, de deux membres de la Cour des comptes, qui seront astreints
au même secret et qui pourront, en quelque sorte, apporter un appui technique
et administratif aux quatre parlementaires.
J'en terminerai sur cette question en soulignant que l'ensemble des dépenses
qui seront désormais imputées sur le chapitre des fonds spéciaux relèveront
d'un contrôle parlementaire qui, je le crois, était souhaitable.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous pourrez dans quelques minutes, par
votre vote, contribuer à mettre un terme à une pratique dont on peut dire
qu'elle relevait de la coutume. S'ils sont adoptés, les amendements présentés
par le Gouvernement et adoptés par l'Assemblée nationale ne remettront pas en
cause l'Etat. Ils ne bouleverseront pas non plus la Ve République, ils ne
résoudront pas les difficultés que notre pays peut connaître, en certaines
circonstances, dans son rapport au politique, mais ils établiront, à mon sens,
des règles claires pour tous. J'espère donc que vous confirmerez un choix de
transparence et de maturité démocratique.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées
du RDSE.)
M. le président.
Je rappelle au Sénat que les crédits inscrits à la ligne « Services généraux
du Premier ministre » seront mis aux voix le mercredi 5 décembre, à la suite
des crédits relatifs à la fonction publique.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 10 540 760 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 99 775 316 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisation de programme : 44 972 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 22 105 000 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
J'appelle en discussion l'article 77, qui est rattaché pour son examen aux
crédits affectés aux services généraux.
Article 77
M. le président.
« Art. 77. - I. - Les dépenses faites sur les crédits inscrits au chapitre
37-91 du budget des services généraux du Premier ministre sont examinées chaque
année par une commission de vérification, chargée de s'assurer que les crédits
sont utilisés conformément à la destination qui leur a été assignée par la loi
de finances.
« Les services destinataires de ces crédits tiennent le compte d'emploi des
fonds ainsi versés.
« II. - La commission est composée ainsi qu'il suit :
« - deux députés, dont le président de la commission, désignés par le
président de l'Assemblée nationale ;
« - deux sénateurs désignés par le président du Sénat ;
« - deux membres nommés pour cinq ans, par décret, parmi les membres de la
Cour des comptes, sur proposition de son premier président.
« III. - La commission prend connaissance de tous les documents, pièces et
rapports susceptibles de justifier les dépenses considérées et l'emploi des
fonds correspondants.
« Elle se fait représenter les registres, états, journaux, décisions et toutes
pièces justificatives propres à l'éclairer au cours de ses travaux de
vérification.
« Elle reçoit communication de l'état des dépenses se rattachant à des
opérations en cours.
« Elle peut déléguer un de ses membres pour procéder à toutes enquêtes et
investigations en vue de contrôler les faits retracés dans les documents
comptables soumis à sa vérification.
« IV. - Les membres de la commission sont astreints au respect du secret de la
défense nationale protégé en application des articles 413-9 et suivants du code
pénal pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont pu avoir
connaissance à raison de leur mandat.
« Les travaux de la commission sont secrets, sous réserve du VI.
« Est puni des peines prévues à l'article 226-13 du code pénal le fait de
divulguer ou publier, dans un délai de trente ans, une information relative aux
travaux de la commission.
« V. - La commission doit avoir terminé ses travaux avant le 31 mars de
l'année qui suit celle de l'exercice soumis à son contrôle.
« VI. - Les vérifications terminées, la commission établit un rapport sur les
conditions d'emploi des crédits.
« Le rapport est remis par le président de la commission au Président de la
République, au Premier ministre et aux présidents et rapporteurs généraux des
commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances.
« VII. - La commission dresse un procès verbal dans lequel elle constate que
les dépenses réalisées sur les crédits visés au I sont couvertes par des pièces
justificatives pour un montant égal.
« Le procès-verbal est remis par le président de la commission au Premier
ministre et au ministre chargé du budget qui le transmet à la Cour des
comptes.
« VIII. - L'article 42 de la loi n° 46-854 du 27 avril 1946 portant ouverture
et annulation de crédits sur l'exercice 1946, l'article 6 de la loi n° 47-1496
du 13 août 1947 portant fixation des crédits applicables aux dépenses du budget
ordinaire de l'exercice l947 (services civils) et le décret n° 47-2234 du 19
novembre 1947 portant création d'une commission de vérification des dépenses
faites sur les crédits affectés au service de documentation extérieure et de
contre-espionnage sont abrogés. »
Je suis saisi de six amendements présentés par M. Marc, au nom de la
commission des finances.
L'amendement n° II-41 est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le II de l'article 77 :
«
II. -
La commission est composée ainsi qu'il suit :
« - deux députés, désignés par le président de l'Assemblée nationale pour la
durée de leur mandat ;
« - deux sénateurs, désignés par le président du Sénat après chaque
renouvellement triennal ;
« - le Premier président de la Cour des comptes.
« La commission est présidée par le Premier président de la Cour des
comptes.
« Sauf démission, il ne peut être mis fin aux fonctions de membre de la
commission qu'en cas d'empêchement constaté par celle-ci. Les membres de la
commission désignés en remplacement de ceux dont le mandat a pris fin avant son
terme normal sont nommés pour la durée restant à courir dudit mandat. »
L'amendement n° II-42 est ainsi libellé :
« Après le II de l'article 77, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
«
II
bis. - La désignation ou la nomination au sein de la commission ne
sont effectives qu'après l'habilitation des personnes concernées à accéder aux
informations classées très secret-défense, selon la procédure définie à
l'article 8 du décret n° 98-608 du 17 juillet 1998 relatif à la protection des
secrets de la défense nationale.
« Il en est de même pour les membres du secrétariat visé au II
ter
du
présent article.
« Lors de la première réunion de la commission, ses membres prêtent serment de
respecter les obligations de secret indiquées au IV du présent article. »
L'amendement n° II-43 est ainsi libellé :
« Après le II de l'article 77, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
«
II
ter. - La commission établit son règlement intérieur. Elle désigne
un secrétariat chargé de l'assister dans ses travaux. »
L'amendement n° II-44 est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le troisième alinéa du III de l'article 77 :
« Elle reçoit communication de l'état des dépenses réalisées au titre de
chaque exercice budgétaire. »
L'amendement n° II-45 est ainsi libellé :
« Supprimer le dernier alinéa du III de l'article 77. »
L'amendement n° II-46 est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le VI de l'article 77 :
« Les vérifications terminées, le président de la commission se tient à la
disposition du Président de la République, du Premier ministre et des
présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat pour présenter les observations
de la commission. »
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter ces six
amendements.
M. François Marc,
rapporteur spécial.
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, la commission
des finances s'est prononcée à l'unanimité en faveur de la réforme des fonds
spéciaux. Néanmoins, elle a souhaité compléter cette réforme. Je présenterai à
cette fin globalement ces six amendements, qui relèvent de la même logique -
puisqu'il s'agit de ne pas mettre en péril l'action de nos services secrets -
et qui ont été adoptés hier à l'unanimité par notre commission, laquelle
s'était réunie spécialement à cet effet.
Quatre de ces amendements ont pour objet de renforcer la protection du
secret.
L'amendement n° II-42 prévoit que les personnes nommées à la commission de
vérification des fonds spéciaux devront être habilitées à accéder aux
informations classées « très secret-défense » - je vous rappelle, mes chers
collègues, que cette habilitation, qui est la plus élevée, est accordée par le
Premier ministre - et prêter serment de respecter les obligations de secret
prévues par le texte actuel.
Par ailleurs, les amendements n°s II-44 et II-45 tendent à encadrer plus
strictement les possibilités de contrôle des dépenses de la commission, ainsi
que ses pouvoirs d'enquête ou d'investigation
Enfin, l'amendement n° II-46 prévoit la suppression du rapport écrit sur les
conditions d'emploi des crédits.
Le président de la commission se tiendra à la disposition du Président de la
République, du Premier ministre et des présidents de l'Assemblée nationale et
du Sénat pour leur présenter, le cas échéant et à leur demande, ses
observations.
Tels sont les objets des quatre amendements visant à mieux protéger le
secret.
L'amendement n° II-41 tend quant à lui à modifier la composition de la
commission. Celle-ci comporterait, s'il était adopté, cinq membres au lieu de
six, la Cour des comptes étant alors représentée non par deux membres nommés
par décret, mais par son Premier président, qui présiderait la commission.
Cette dernière étant chargée d'effectuer un contrôle purement comptable, cette
solution a semblé préférable à celle qui est prévue par le texte actuel, selon
lequel la commission serait présidée, de droit, par l'un des deux députés.
Cet amendement précise, en outre, que les députés seront membres de la
commission pour la durée de leur mandat, les sénateurs pour la période comprise
entre deux renouvellements triennaux. Il reprend, à cet égard, les dispositions
en vigueur s'agissant de la commission consultative du secret de la défense
nationale.
Un dernier amendement, l'amendement n° II-43, tend à apporter quelques
précisions techniques. Il prévoit que la commission établit son règlement
intérieur et est assistée d'un secrétariat. Ce dernier point nous a paru
particulièrement important, dans la mesure où le texte actuel ne reconnaît pas
la possibilité, pour les membres de la commission, de recourir à des
collaborateurs. Il convient de préciser que, aux termes de l'amendement n°
II-42, les membres de ce secrétariat devront bien évidemment avoir eux aussi
fait l'objet d'une habilitation leur permettant d'accéder à des informations
classées « très secret-défense ».
Telles sont, mes chers collègues, les propositions de la commission des
finances. Il s'agit de préserver la logique d'un dispositif présenté par le
Gouvernement, tout en apportant quelques précisions destinées essentiellement à
sauvegarder plus efficacement encore le secret indispensable qui doit entourer
les opérations financées par les fonds spéciaux.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble de ces amendements ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
L'amendement n° II-41 a pour objet à la fois de
préciser la durée du mandat et les conditions de remplacement des membres de la
commission prévue à l'article 77 et de désigner comme président de la
commission le Premier président de la Cour des comptes. Comme je l'ai dit, ce
n'est pas le texte qui a été adopté par l'Assemblée nationale, mais, sur ce
point, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
L'amendement n° II-42 prévoit les règles d'habilitation au secret-défense.
Comme je l'ai indiqué dans mon propos liminaire, la procédure qui est proposée
me paraît plus lourde que celle qui est aujourd'hui prévue. Je ne suis pas sûre
qu'il soit souhaitable d'étendre le champ des personnes habilitées. C'est
pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable.
S'agissant de l'amendement n° II-43, il émet également un avis défavorable,
par coordination avec l'amendement précédent.
En ce qui concerne l'amendement n° II-44, dont l'objet est de rattacher l'état
des dépenses à chaque exercice budgétaire, le critère de rattachement étant la
réalisation de la dépense plutôt que l'opération en cours, le Gouvernement s'en
remet à la sagesse du Sénat.
S'agissant de l'amendement n° II-45, qui vise à supprimer la procédure
d'enquête, et de l'amendement n° II-46, qui supprime l'obligation faite à la
commission de produire un rapport, il s'en remet également à la sagesse du
Sénat.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-41.
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lachenaud.
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Je suis obligé de m'en tenir à la procédure qui consiste à examiner les
amendements un par un. Cependant il faut bien le reconnaître, cette procédure
est absurde puisque la commission des finances, dont je suis membre - mais en
l'occurrence, j'exprimerai mon sentiment personnel et celui de mon groupe - a
examiné globalement les amendements qui ont été présentés sur l'article 77 afin
d'aboutir à un dispositif équilibré. Or, après avoir entendu la réponse du
Gouvernement, je crains que nous n'aboutissions à un texte déséquilibré.
Lorsque nous avons travaillé sur ce dispositif, nous savions que nos positions
risquaient de ne pas être approuvées par l'Assemblée nationale. Néanmoins, lors
de la dernière réunion de la commission des finances du Sénat, nous étions
parvenus à un accord, à l'unanimité, sur un texte équilibré et nous espérions
que le Gouvernement soutiendrait nos propositions.
Or, je le précise d'entrée de jeu, il y a tout de même un bémol important : on
ne sait pas ce que va faire l'Assemblée nationale et le Gouvernement vient
d'émettre un avis défavorable sur deux des amendements présentés.
J'en reviens à l'amendement n° II-41. Nous avons examiné cette affaire avec
beaucoup de réticence et d'hésitation, en raison de son histoire et parce
qu'elle a pris un caractère médiatique, qui était loin de nous satisfaire. Cela
étant, avec mon collègue François Trucy, nous l'avons examinée dans un double
souci. Il s'agissait, d'abord, d'établir un vrai contrôle, qui soit spécifique
et pas exclusivement parlementaire. C'est pourquoi nous avons conforté la place
de la Cour des comptes au sein de la commission. Il s'agissait, ensuite, de
préserver le sens de l'Etat, comme cela a été exprimé très vigoureusement par
nombre de membres de la commission des finances, pour assurer la sécurité et le
secret des opérations qui sont menées dans l'intérêt de la France. Telles sont
les raisons pour lesquelles nous avons encadré le dispositif.
Nous voterons donc cet amendement tout en sachant que, à la fin du processus
législatif, le dispositif sera peut-être dénaturé et complètement
déséquilibré.
M. Maurice Blin.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Blin.
M. Maurice Blin.
Je me félicite que, sur cette matière délicate, le Gouvernement ait adopté une
position de sagesse. Il rend ainsi hommage à la qualité des travaux que la
commission des finances et son rapporteur spécial ont conduits.
Je rejoins très volontiers la position que vient d'adopter notre collègue M.
Lachenaud concernant ce qui me paraît en vérité constituer l'essentiel et
devoir l'emporter sur tous les autres amendements que nous avons présentés et
qui ont fait l'objet d'un avis unanime de la commission des finances. Je veux
parler de l'amendement n° II-42. Madame le secrétaire d'Etat, je suis inquiet
que, sur ce point, le Gouvernement semble avoir adopté, pour le moment tout au
moins, une position extrêmement réservée.
Parlons clair : la formulation de cet amendement renvoie à quelque chose de
très simple. Il s'agit de savoir si le pouvoir exécutif, c'est-à-dire
éminemment le Premier ministre, aura, comme il me paraît indispensable, un
droit de regard sur la qualité des parlementaires qui participeront à ce
travail délicat, complexe et nouveau dans notre législation de contrôle des
fonds secrets.
Puisqu'il s'agit d'une prérogative de l'exécutif, il ne faut ni la contester,
ni l'entamer, ni la réduire. Il est indispensable que ceux qui, dans cet examen
délicat, auront à rencontrer des parlementaires sachent, pour parler simple,
qui ils ont en face d'eux. C'est le sens de l'habilitation.
Je reconnais que, en ce qui concerne le troisième alinéa de cet amendement n°
II-42, il en est de même pour les membres du secrétariat visés au II
ter
du présent article. On peut en débattre et je serais tenté de penser qu'il
convient que, eux aussi, soient soumis à cet examen préalable. Si cela ne
pouvait pas être le cas, qu'au moins on maintienne le principe que les
parlementaires qui auront à travailler dans une matière aussi neuve, aussi
délicate et aussi grave pour l'intérêt du pays fassent préalablement l'objet
d'un assentiment du pouvoir exécutif. J'aimerais, madame, que, sur ce point,
vous nous donniez raison.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Effectivement, s'est posée la question de la nature du
contrôle qui devait s'exercer sur ces crédits, qui restent des fonds spéciaux.
Deux possibilités étaient envisageables : soit l'extension d'un contrôle de
nature administrative, qui existe dans un certain nombre de domaines - une loi
de 1998 y a pourvu en matière de levée du secret-défense, par exemple -, soit
un contrôle de nature très clairement parlementaire, ce qui va dans le sens
d'une autre évolution que le Sénat a lui-même encouragée, notamment en
réformant l'ordonnance organique de 1959.
C'est la deuxième solution qui a été retenue.
La commission s'est interrogée sur la manière dont ces parlementaires pourront
effectivement travailler s'ils sont seuls à siéger au sein de cette commission.
C'est la raison pour laquelle l'article 77 prévoit d'ores et déjà que deux
membres de la Cour des comptes siégeront également au sein de cette commission,
puisqu'il s'agit aussi d'un contrôle de nature comptable.
Dès lors, comment répondre à l'objection de M. Blin ? Comment s'assurer de la
qualité des parlementaires qui siégeront au sein de cette commission ? Cette
question est délicate pour le représentant de l'exécutif que je suis, parce que
nous avons proposé, dans cet article 77, que les présidents des deux assemblées
procèdent à ce choix. En effet, à nos yeux, il n'existe pas de meilleur juge de
la qualité des parlementaires. Le contrôle de nature parlementaire ayant été
retenu, la logique veut que l'exécutif n'exerce pas en aval un contrôle sur le
choix du président de l'Assemblée nationale et du président du Sénat.
Je ne suis pas certaine d'avoir répondu à toutes vos interrogations, mais
j'espère que ces compléments d'information auront permis de vous éclairer.
M. François Marc,
rappporteur spécial.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. François Marc,
rapporteur spécial.
Je reconnais que, plus les secrétariats sont
développés et plus le risque de fuites existe. Il y a donc un doute sur ce
point précis. A titre personnel, je prends en considération les arguments de
Mme la secrétaire d'Etat.
Reste que je me dois en l'instant d'être le porte-parole de la commission,
qui, je le précise à nouveau, a adopté ces amendements.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-41, pour lequel le Gouvernement s'en remet
à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-42.
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lachenaud.
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Si la procédure qui consiste à examiner les amendements un par un a des
inconvénients, elle présente aussi un avantage : en effet, nous pouvons
reprendre la parole sur chaque amendement.
(Sourires.)
La commission des finances propose un dispositif très encadré, garantissant
au maximum le secret des délibérations. C'est une des raisons majeures qui nous
ont conduits à supprimer l'impression d'un rapport. Malheureusement, l'histoire
montre, tant en France qu'à l'étranger, que lorsqu'il existe un document écrit
il est bien rare qu'il n'y ait pas une fuite. En effet, on finit toujours par
retrouver ce document entre des mains ou dans des organes de presse où il ne
devrait pas se trouver.
Le fait que le dispositif soit équilibré nous conduit à soutenir cet
amendement.
Le groupe du RPR le votera, souhaitant qu'il ne soit ni dénaturé ni trahi, et
que l'avis unanime de la commission des finances soit suivi.
Madame la secrétaire d'Etat, nous avons considéré que le contrôle des crédits
prendrait un caractère quelque peu spécifique, et il nous a semblé que la Cour
des comptes apportait des garanties techniques.
Lorsque nous avons réformé l'ordonnance de 1959, nous avons développé le
contrôle de la Cour des comptes. Mais étant originaire de ce corps, il est un
peu délicat pour moi d'en dire plus.
La composition de la commission prévue dans l'amendement n° II-41 et les
dispositions de l'amendement n° II-42 permettraient de disposer du support
technique de la Cour des comptes, d'autant que, comme vous l'avez rappelé,
madame la secrétaire d'Etat, il s'agit de comptes d'emplois, que nous n'avons
pas tellement l'habitude de voir les uns et les autres : ce sont des comptes
très spécifiques dans la mesure où la séparation de l'ordonnateur et du
comptable n'est pas garantie.
Nous nous sommes dit - mais peut être avons-nous eu tort - que la procédure du
secret défense, avec les sanctions, y compris pénales, très lourdes qu'elle
induit en cas de non-respect, apporterait une certaine solennité au dispositif
et ferait prendre conscience aux participants de la commission du caractère
extrêmement délicat d'une matière dont l'efficacité de l'action doit être
sauvegardée et dans laquelle les intérêts de la France peuvent être
compromis.
Je comprends que le dispositif paraisse lourd ; il ne se veut pas désagréable
à l'égard des futurs membres de cette commission ; il vise simplement à bien
marquer les risques et les sanctions pour le cas, que je crois effectivement
tout à fait rare - toutes les précautions auront en effet été prises - où il y
aurait violation du secret.
Telle est la logique de l'amendement n° II-42, auquel nous tenons beaucoup.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-42, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-43, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-44, pour lequel le Gouvernement s'en remet
à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-45, pour lequel le Gouvernement s'en remet
à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-46, pour lequel le Gouvernement s'en remet
à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 77, modifié.
(L'article 77 est adopté.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant les services généraux.
II. - SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DE LA DÉFENSE NATIONALE
M. le président.
Le Sénat va examiner les dipositions du projet de loi de finances concernant
les services du Premier ministre : II. - Secrétariat général de la défense
nationale.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Michel Moreigne,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, madame la
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le secrétariat général de la défense
nationale, ou SGDN, instrument du Premier ministre en matière de direction
générale de la défense, en liaison étroite avec la Présidence de la République,
est maintenant relancé. Son rôle est conforté par les nouveaux moyens mis à sa
disposition et les appels renouvelés à sa compétence.
Les crédits demandés pour 2002 s'établissent à 39,4 millions d'euros, soit 258
millions de francs, en hausse brute de 33 % et, à structure constante, de 12,5
%. Les deux tiers de l'augmentation résultent des nouveaux moyens
interministériels pour la sécurité des systèmes d'information, opérations
engagées à hauteur de 10 millions d'euros dès la loi de finances rectificative
pour 2000, mais reportées sur l'exercice 2001.
Les autres missions du SGDN ne sont pas négligées, à l'instar de la mission de
contrôle des matériels de guerre et du programme civil de défense.
L'augmentation des effectifs du SGDN sera poursuivie en 2002, avec la création
de vingt-trois postes budgétaires, tout en maîtrisant les conséquences de la
fin de la conscription.
L'Institut des hautes études de la défense nationale, l'IHEDN, est un
fondement essentiel de la culture et de l'esprit de défense. Mais sa dotation
propre de 1,5 million d'euros pour 2002, soit cinq années après sa
transformation en établissement public administratif, ne semble pas lui assurer
une véritable autonomie financière. En effet, avec les moyens mis à sa
disposition par d'autres administrations, principalement le ministère de la
défense, le coût réel de l'institut s'élève à 7,2 millions d'euros en 2001.
Enfin, l'effort destiné à la défense civile de la nation comprend surtout, je
vous le rappelle, les crédits que les ministères civils lui consacrent. Leur
montant est récapitulé dans un « jaune budgétaire ». Enregistrant une hausse de
2,6 % pour 2002, il s'établira à près de 1,4 milliard d'euros, dont plus des
deux tiers relèveront du ministère de l'intérieur. Je constate d'ailleurs que
sa création date de plus de vingt ans et qu'il serait donc nécessaire de revoir
son contenu.
Les activités du SGDN sont désormais recentrées sur des tâches de conception
et d'impulsion, et son intervention est dynamisée dans les domaines où la
coordination interministérielle est nécessaire. Ses agents sont donc sollicités
en raison de leurs compétences, le temps d'une crise ou à la suite d'une
demande gouvernementale. Je citerai, à titre d'exemple, la gestion du danger
présenté par les munitions du site de Vimy.
Si l'importance du rôle du SGDN en matière de synthèse, d'évaluation et de
mise en valeur du renseignement dans le processus de décision politique a bel
et bien été confirmée, elle est également vérifiée en cette période de crise.
L'insécurité internationale plaide d'ailleurs pour des avancées significatives
vers une sécurité européenne et une Europe de la défense. Il est permis de
souhaiter que l'Union européenne en tire rapidement les conséquences.
Les fonctions du SGDN recouvrent également la coordination de la protection
des populations, lesquelles sont exposées à de « nouvelles menaces » :
inondations, tempêtes, attentats et catastrophes, telle celle de Toulouse.
Les risques liés à l'entrée de la France dans la société de l'information et à
la libération de la cryptologie sont bien appréhendés par le Gouvernement. Mais
le médecin que je suis est attentif aux risques nucléaire, radiologique,
biologique et chimique pour lesquels les moyens de protection et d'intervention
doivent être assurés. Les nouveaux crédits qui seront proposés dans le prochain
projet de loi de finances rectificative pour renforcer cette action méritent
une large approbation.
Dans l'attente des comptes rendus concernant l'explosion de Toulouse, il
convient d'ores et déjà de s'interroger sur nos procédures d'urgence dans le
cas de catastrophe étendue à une grande partie du territoire.
Ainsi, à la lecture du rapport Sanson sur les tempêtes, il apparaît que nos
infrastructures doivent être mieux protégées, et les responsabilités
redéfinies. Au-delà d'une réforme de nos plans d'urgence, une politique civile
de défense assurant encore mieux la protection des populations est tout aussi
attendue.
La gestion des crises s'avère de plus en plus complexe, en raison non
seulement de la mutation économique et sociale de notre pays, mais aussi - il
faut bien le dire - du manque d'implication de la population dans la défense
civilo-militaire. Je suggère donc la mise à l'étude d'un dispositif
interministériel de gestion des crises et réaffirme que le SGDN, repositionné
comme lieu de convergence de la sécurité intérieure et extérieure, s'impose
comme un instrument majeur de cette adaptation de notre défense non
militaire.
Compte tenu de l'effort en faveur des missions du SGDN, tant traditionnelles
que nouvelles, qui ressort à l'évidence de ce budget, la commission des
finances, suivant la proposition de son rapporteur spécial, propose au Sénat
d'adopter les crédits du secrétariat général de la défense nationale.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le
temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je ne
reviendrai pas sur l'analyse qu'a faite notre excellent rapporteur spécial, M.
Michel Moreigne, sur le budget du SGDN. Je partage les conclusions qu'il tire
de l'affectation des sommes à cet organisme dans le projet de loi de finances
pour 2002. Comme lui, je pense que le budget proposé traduit la volonté du
Gouvernement de renforcer encore la coordination interministérielle en matière
de sécurité intérieure et extérieure.
Je partage aussi son appréciation très positive sur le rôle qu'à tenu le
secrétariat général de la défense nationale dans une période marquée par des
événements internationaux dramatiques.
Oui, nous disposons avec le SGDN d'une instance assez unique dans l'appareil
d'Etat par rapport aux modes d'organisation dans tous les autres pays
occidentaux. Chargé spécifiquement de la coordination gouvernementale dans les
domaines qui conditionnent la sécurité du pays, il est, de surcroît, placé sous
la double autorité du Président de la République et du Premier ministre, aux
services duquel il appartient.
Transversalité, interdisciplinarité, ouverture au monde et aux surgissements
de nouveaux dangers, telles sont quelques-unes des caractéristiques du SGDN.
Sans se substituer aux départements ministériels, scrupuleusement attaché à son
rôle de « serviteur » du politique, il est atypique, parce qu'il est en avance
: au sein d'une société cloisonnée et trop souvent myope, il cherche à «
potentialiser » les moyens de la défense et à anticiper les nouvelles menaces.
C'est tout notre appareil d'Etat qui, peu à peu, devrait évoluer dans le même
sens pour être au rendez-vous de l'Histoire.
Depuis un peu plus de deux mois, cet organisme dont la discrétion est la
règle, avec la compétence et la disponibilité des agents qui le servent, est
placé, dans une certaine mesure, sous les feux de l'actualité. Jamais, en
effet, depuis le 11 septembre 2001, la nécessité absolue, vitale pour notre
pays, d'une prise en compte de l'ensemble des éléments qui concourent à sa
sécurité n'avait été aussi évidente. Jamais, depuis cette date, la prévision et
la prévention des risques qui affectent notre existence même n'avaient été
aussi indispensables. Jamais la programmation et la planification, jamais la
veille technologique et humaine n'avaient paru aussi déterminantes pour
préserver la paix.
C'est ce qui explique que le projet de loi de finances confirme l'augmentation
rapide des moyens mis à disposition du SGDN : entre 1999 et 2002, le budget
aura doublé si le Parlement valide la proposition du Gouvernement, et quelque
300 agents civils et militaires travaillent aujourd'hui pour la sécurité des
Français au sein de cet organisme. C'est à eux que revient, pour une part, les
résultats de collecte, de synthèse et de transmission aux autorités politiques
des informations et des renseignements qui nous ont aidés à nous situer dans
cette période difficile pour notre pays.
Je dois ajouter - je l'avais d'ailleurs déjà indiqué l'an dernier - que le
SGDN avait, très en amont, attiré l'attention des plus hautes autorités de
l'Etat sur la réalité des menaces terroristes et des réseaux qui la mettent en
oeuvre. Surtout - et cela me paraît beaucoup plus important - il avait souligné
les dimensions très différentes et, pour une part, nouvelles de ces menaces :
nucléaire, biologique, radiologique, chimique...
Dès l'annonce des attentats du 11 septembre, le secrétariat général de la
défense nationale a proposé au Premier ministre, en liaison étroite avec la
présidence de la République, un nouveau dimensionnement et une dynamisation de
nos capacités de réaction face à la menace terroriste.
Des scénarios de menaces ont été définis. Les ministères concernés ont été
mobilisés. La planification en matière de sécurité sur le territoire a été
adaptée, et ce d'autant plus rapidement que le travail avait été entrepris dès
1999.
Les résultats sont visibles : notre pays, pourtant placé au milieu de risques
de toutes sortes, a été épargné. La sécurité de nos concitoyens face au
terrorisme a été assurée. Devant toute menace d'une telle ampleur et d'une
telle nature, personne ne saurait évoquer une garantie complète. Mais, au
moins, ce qui devait être fait aura été fait, et le secrétariat général de la
défense nationale a pris dans cette action une place significative que je
tenais à souligner en cet instant.
Le travail conduit par le SGDN a réuni aussi bien des experts, des
responsables de l'administration, que les grands opérateurs qui concourent à la
continuité de la vie nationale. C'est à l'ensemble de ces acteurs, qu'ils
soient civils ou militaires, qu'ils appartiennent au secteur public ou à
l'entreprise privée, qu'ils soient universitaires ou chercheurs dans un
laboratoire, que la représentation nationale rend aujourd'hui hommage.
Mais, mes chers collègues, nous savons bien que la défense de notre pays ne
s'arrête pas à ses frontières. Nous savons bien que les intérêts de la France,
si l'on veut bien aller à l'essentiel, sont les mêmes que ceux de nos
partenaires, en Europe et au-delà de l'Atlantique. Notre pays défend, en fait,
non pas un nationalisme étroit, fondé sur des idées d'autrefois, mais un
patriotisme ouvert, fondé sur des valeurs universelles. Le secrétariat général
de la défense nationale est un instrument efficace et exemplaire de cette
vision politique.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat au budget.
Monsieur le président, mesdames, messieurs
les sénateurs, je souhaite d'abord remercier M. Michel Moreigne de la qualité
de son rapport.
Le projet de budget pour 2002 du SGDN s'élève, en crédits de paiement, à 39,36
millions d'euros. Il augmente, à structure constante, de 12 % par rapport à
2001, après une hausse de 16 % l'an dernier. Par ailleurs, le SGDN bénéficiera
en 2002 de la création de vingt-quatre postes budgétaires.
Comme M. le rapporteur spécial l'a relevé, la hausse des moyens dévolus au
SGDN accompagne un recentrage de ses missions de conception, d'impulsion et de
coordination interministérielle. Les efforts correspondent, pour l'essentiel, à
deux axes.
Le premier concerne la capacité de prévention et de réaction des pouvoirs
publics en matière de risques liés aux accidents ou actes malveillants dans les
domaines nucléaire, radiologique, bactériologique ou chimique, dont votre
rapporteur se préoccupait déjà l'an dernier à juste titre.
Le second a trait à l'entrée du pays dans la société de l'information dans des
conditons de sécurité satisfaisantes.
Permettez-moi d'insister, à cette occasion, sur le fait que les missions
confiées au SGDN et l'orientation donnée à ses actes traduisent de manière
particulièrement nette l'adaptation de notre politique de sécurité à des enjeux
qui ont été amplifiés depuis les attentats du 11 septembre dernier.
Cette adaptation se traduit par une prise en compte accrue des nouvelles
menaces, par une souplesse et une réactivité de l'organisation
interministérielle dans tous les domaines de la politique de défense et de
sécurité, y compris le renseignement, par une modernisation des instruments de
l'appareil d'Etat au moyen des nouveaux outils de communication et
d'information, ainsi que par un accroissement des capacités de prévention, de
détection et de réaction de l'Etat sur le territoire national et pour la
protection des populations.
S'agissant d'abord du programme civil de défense, le Gouvernement a souhaité
le renforcer : les crédits d'investissement sont portés à 7,62 millions d'euros
en autorisations de programme et à 5,4 millions d'euros en crédits de paiement.
Ils sont, en grande partie, consacrés à la mise en place de dispositifs et
d'équipements destinés à prévenir les risques liés aux domaines nucléaire,
radiologique, bactériologique ou chimique ou à réagir à la suite d'accidents ou
d'actes malveillants. Parmi les investissements nouveaux, on peut citer
également le renforcement du réseau Rimbaud et la mise en place des salles
opérationnelles des préfectures de zone de défense.
Le programme civil de défense n'a pas vocation à couvrir tous les besoins en
la matière. Il est un outil parmi d'autres à la disposition du Premier ministre
pour susciter des programmes interministériels dans le domaine de la défense
civile.
Je citerai, par exemple, le renforcement des moyens locaux d'intervention ou
la mise en place au niveau national de moyens d'expertise tels que le réseau de
laboratoires « Piratox », des stocks d'antidotes ou des équipements de
protection pour des unités d'intervention.
L'actualité - et je fais allusion non seulement aux suites du 11 septembre,
mais aussi à Toulouse et à Vimy, où des mesures de précaution ont été prises
avec succès - conduira le Gouvernement à poursuivre, dans le projet de loi de
finances rectificative pour 2001 que vous aurez très prochainement à examiner,
l'effort déja entrepris.
De même, en réponse aux préconisations de votre rapporteur sur le dispositif
de gestion des crises, je tiens à rappeler que le rapport de la mission
interministérielle d'évaluation des conséquences des tempêtes demandé par le
Premier ministre est suivi d'effet. Je citerai aussi le prochain dépôt, annoncé
par le Premier ministre, d'un projet de loi de modernisation de la sécurité
civile.
Moins spectaculaires que la menace terroriste, mais particulièrement
insidieuses, les vulnérabilités des systèmes d'information, au moment où la
France entre dans la société de l'information, ont été placées au premier rang
des préoccupations du Gouvernement.
Le SGDN a été chargé de mettre en place un plan de renforcement des moyens de
l'Etat permettant de garantir le volet « sécurité » du programme d'action
gouvernementale pour la société de l'information.
Un décret du 31 juillet dernier organise la direction centrale de la sécurité
des systèmes d'information, placée sous la responsabilité du secrétaire général
de la défense nationale. Ses effectifs seront portés, en 2002, à 91 emplois,
essentiellement des ingénieurs et des techniciens.
Cette direction développe son activité dans le domaine du conseil aux services
de l'Etat, de l'audit de ses systèmes d'information, de la certification de
produits de sécurité et enfin de la recherche en cryptologie.
Au titre du plan de développement des capacités techniques des services de
l'Etat, le Premier ministre avait annoncé des mesures de renforcement des
moyens à l'issue du comité interministériel pour la société de l'information du
19 janvier 1999. Le projet de budget pour 2002 traduit, en cohérence avec ces
décisions, une nouvelle étape dans cette modernisation, avec l'inscription de
22,2 millions d'euros en autorisations de programme et de 6,25 millions d'euros
en crédits de paiement, votre rapporteur en a relevé l'importance.
Au total, depuis 1997, le budget du secrétariat général de la défense
nationale aura progressé de 63 %, cet effort donnant la mesure de l'ambition du
Gouvernement en matière de défense nationale, à la fois dans sa dimension
civile et dans celle qui est relative à l'adaptation aux nouvelles technologies
de l'information.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que
sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, du RDSE et de l'Union
centriste.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le
secrétariat général de la défense nationale et figurant aux états B et
C.
ÉTAT B
M. le président. « Titre III : 2 378 458 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
Je constate que ces crédits ont été adoptés à l'unanimité.
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 32 930 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 11 585 000 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant le secrétariat général de la défense nationale.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à vingt-deux-heures quinze.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures dix, est reprise à vingt-deux heures
vingt.)
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2002, adopté
par l'Assemblée nationale.
III. - CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
les services du Premier ministre : III. - Conseil économique et social.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Claude Lise,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, madame la
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'an dernier, c'est un budget de
renouveau que le Parlement avait voté pour le Conseil économique et social. En
accordant une progression de 8,2 % des crédits, il s'agissait de donner au
président Jacques Dermagne, élu en septembre 1999, les moyens d'une politique
ambitieuse visant à moderniser le Conseil, à l'ouvrir sur l'extérieur, à lui
donner un rôle accru.
A ce budget de renouveau succède un budget de continuité. Les crédits du
Conseil économique et social s'élèvent à 31,8 millions d'euros. Seuls les
crédits liés aux ressources humaines - les membres du Conseil et des sections,
d'une part, et le personnel, d'autre part - augmentent, mais par le simple
effet de la revalorisation du point d'indice de la fonction publique.
Les moyens matériels, en fonctionnement ou en investissement, régressent
légèrement ou sont quasiment stables.
Au total, l'augmentation, limitée à 1,6 %, comme on était fondé à l'attendre,
est suffisante pour assurer la poursuite des réformes engagées.
Donner à la société civile le cadre et les moyens de se faire mieux entendre,
tant sur le plan national que sur la scène internationale, tel est l'objectif
du président Dermagne.
Ce projet est servi par une politique de communication résolument plus
offensive. Le développement des relations publiques, un site Internet plus
complet et plus attractif ainsi que l'intensification des relations avec la
presse concourent au renforcement de la notoriété du Conseil.
Sur le plan national, le Conseil souffre cependant - je le déplore chaque
année - de se voir si peu sollicité par le Gouvernement. Au-delà du nombre de
saisines, qui semble d'ailleurs progresser légèrement en 2001, il est très
regrettable que, sur des sujets aussi essentiels que la modernisation sociale,
la lutte contre les exclusions, la réduction du temps de travail, l'épargne
salariale, la couverture maladie universelle ou la loi d'orientation pour
l'outre-mer, l'avis du Conseil économique et social n'ait pas été demandé.
Afin de peser davantage dans le débat national, le Conseil réalise des travaux
qui se veulent plus percutants, quitte à être l'objet de controverses largement
reprises ces derniers temps par la presse. Moins consensuels et plus incisifs,
ces travaux permettent des échanges plus riches au sein de l'institution.
Par ailleurs, le Conseil tient à mieux intégrer les évolutions profondes de
notre société, telles que le cheminement vers l'égalité entre les femmes et les
hommes ou la construction européenne. Ainsi, après la création d'une délégation
aux droits des femmes en mars 2000, une délégation pour l'Union européenne a vu
le jour en février 2001.
Enfin, le Conseil a pris l'habitude de faire travailler les sections en commun
si l'objet d'une étude touche à divers domaines ou, s'il nécessite un éclairage
territorial, d'inviter les conseils économiques et sociaux régionaux à apporter
leur concours.
A l'échelle internationale et à l'heure de la mondialisation, le président du
Conseil milite pour une meilleure représentation de la société civile. Le
nombre de CES étrangers ou d'institutions similaires est passé de douze à
soixante en dix ans et le concept de Conseil économique et social à la
française s'exporte bien.
Par ailleurs, le CES français joue un rôle essentiel au sein de l'Association
internationale des conseils économiques et sociaux et institutions similaires,
qui vient de se voir accorder un statut spécial par l'Organisation des Nations
unies, lui permettant de siéger dans les rangs de celle-ci. J'y vois là une
juste consécration de l'action du président Dermagne et un véritable motif de
satisfaction, car c'est bien ainsi que la société civile pourra mieux faire
entendre ses légitimes inquiétudes et ses attentes, nées en particulier de la
mondialisation.
Je conclurai par une question, certes récurrente mais que nous n'avons pas de
raison d'éluder, je veux parler de la représentativité du Conseil économique et
social.
En réponse aux habituels commentaires que cette question suscite, son
président a lui-même reconnu que le Conseil ne représente plus tout à fait la
société d'aujourd'hui, que « la photo est jaunie ». N'est-il pas temps d'en
tirer les conséquences ?
En attendant la réforme législative que cela impliquerait, le Sénat pourrait
utilement apporter sa contribution à la réflexion qui semble devoir s'engager
au sein même du Conseil économique et social.
Pour l'heure, la commission des finances vous propose, mes chers collèlgues,
d'adopter les crédits de cette institution.
(Applaudissements sur les
travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le
temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je ne
peux qu'approuver les principales remarques faites par notre rapporteur
spécial. Je me contenterai d'insister sur le fait que le Gouvernement sollicite
toujours trop peu le Conseil économique et social.
Permettez-moi de rappeler le titre XI de la Constitution qui dispose que le
Conseil « donne son avis sur les projets de loi, d'ordonnance ou de décret
ainsi que sur les propositions de loi qui lui sont soumis ». Il peut être
également consulté par le Gouvernement sur tout problème de caractère
économique ou social.
A juste titre, M. le rapporteur spécial note que le nombre de saisines
gouvernementales est passé de quatre en 1999 et en 2000 à cinq au 1er juillet
2001. Entre octobre 2000 et juin 2001, le Conseil économique et social ne
semble avoir été consulté sur aucun projet de loi, alors que des dizaines de
lois ont été votées.
En 2000, dix-huit études et rapports ont été publiés au
Journal
officiel
, 334 réunions et 18 assemblées plénières se sont tenues. Trois
cents personnalités extérieures ont été auditionnées.
Le Conseil économique et social travaille. Ses travaux sont appréciés, si l'on
en juge par le nombre d'accès au site Internet : en moyenne près de 400 000 par
mois, soit une hausse de 76 % par rapport à 1979.
En outre, son audience progresse sur le plan international, grâce, il faut
bien le reconnaître, à une politique de coopération internationale.
Le Conseil économique et social est devenu, avec d'autres institutions - la
direction des
Journaux officiels,
la direction des monnaies et médailles
et le Commissariat général du Plan -, un pilier de la République sur lequel
s'appuient les gouvernements.
Une question se trouve posée : pourquoi les gouvernements qui se sont succédé
depuis 1946 ne lui accordent-ils jamais tout l'intérêt qu'il mérite ?
Son accouchement fut difficile, il est vrai. Les discussions et transactions
furent lentes, âpres, au sein de la commission de la Constitution, d'abord,
puis au sein de l'Assemblée constituante.
Elles devaient cependant aboutir et faire l'objet du titre III de la
Constitution du 13 octobre 1946. C'était alors une consécration
constitutionnelle du Comité économique.
On peut l'affirmer avec le recul de l'histoire, le Conseil économique et
social a joué le rôle qu'il pouvait jouer, celui d'assemblée consultative et de
lieu privilégié pour conduire les représentants de diverses activités
économiques et sociales de la nation à chercher ensemble et à collaborer.
Je voudrais également rappeler que le Conseil économique devait, avec la loi
organique du 29 décembre 1958, devenir le Conseil économique et social.
Il existe une petite différence : le Conseil économique était placé auprès du
Parlement ; le Conseil économique et social est placé auprès du
Gouvernement.
A un moment, il avait été envisagé une fusion entre le Conseil économique et
social et le Sénat. Le référendum de 1969 a condamné ce projet et, mieux, la
loi 1972 a créé des conseils économiques et sociaux régionaux, à l'image du
Conseil économique et social.
Le bilan est intéressant, mais il est encore insuffisant.
En votant ce projet de budget, nous émettons le souhait de voir le
Gouvernement accorder beaucoup plus d'importance aux avis du Conseil économique
et social. Certaines lois seraient peut-être plus équilibrées après un avis des
représentants de la société civile, économique, syndicale et sociale !
Je me permets, avant de conclure, de rappeler que l'article 69 de la
Constitution du 4 octobre 1958 est formel : « Le Conseil économique et social,
saisi par le Gouvernement, donne son avis sur les projets de loi, d'ordonnance
ou de décret ainsi que sur les propositions de loi qui lui sont soumis. »
Certes, c'est le Parlement, et lui seul, qui fait la loi ; ce ne doit pas être
une autre assemblée consultative qui lui conteste ce pouvoir. D'ailleurs, la
loi de finances n'est pas soumise à l'avis du Conseil économique et social.
Je vous rappelle que, aux termes de l'article 2 de l'ordonnance portant loi
organique relative au Conseil économique et social, celui-ci « est
obligatoirement saisi pour avis des projets de loi de programme ou de plan à
caractère économique ou social [...] Il peut être, au préalable, associé à leur
élaboration. »
Madame la secrétaire d'Etat, je n'entends personne faire référence à cet avis,
très certainement parce que le Gouvernement, je le crois, le néglige. Je
rappelle que la responsabilité de saisine appartient au Gouvernement, et non au
Parlement !
Le Parlement, s'il a modifié, par une loi organique de 1984, la composition
sociale du Conseil économique et social, n'a modifié ni le rôle ni la nature
même de l'assemblée, pas plus d'ailleurs que ne l'a fait le décret de 1989,
modifié par le décret de 1991, lequel a modifié le nombre des représentants des
collectivités d'outre-mer.
Personne n'a jamais contesté le rôle du Conseil économique et social. Tous les
parlements, depuis 1946, en améliorent la composition et les fonctions. Comment
se fait-il que les gouvernements, en revanche, ne le sollicitent pas plus ?
En votant ce projet de budget, je souhaite que le Gouvernement prenne
l'engagement d'utiliser davantage le Conseil économique et social.
M. François Marc.
Très bien !
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat au budget.
Monsieur le président, monsieur le
rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite remercier M. Claude
Lise, rapporteur spécial, de la qualité de son rapport. Le président M. Jacques
Dermagne et le bureau du Conseil économique et social ont engagé, depuis le
début de la mandature 1999-2004, une politique de modernisation et d'ouverture
sur l'extérieur de cette institution.
Au cours de l'année 2000, le Conseil économique et social a tenu dix-huit
assemblées plénières. Ses membres ont participé - Mme Beaudeau rappelait ces
chiffres à l'instant - à 334 réunions, au cours desquelles 292 personnalités
extérieures ont été auditionnées. A l'issue de ces travaux, une étude ainsi que
dix-huit avis et rapports ont été adoptés, dont quatre sur saisine
gouvernementale. Au cours du seul premier semestre 2001, treize avis ont été
adoptés, dont cinq sur saisine gouvernementale.
Depuis juin 1999, le site internet du Conseil met en ligne le texte intégral
des rapports des douze derniers mois, ainsi que les notices des travaux publiés
depuis 1947. En 2000, le nombre d'accès moyen mensuel a été de 233 888, en
progression de 76 % par rapport à 1999. Et je remercie Mme Beaudeau, qui a
fourni des chiffres encore plus récents !
Depuis dix ans, le Conseil économique et social s'est engagé dans des actions
de coopération internationale et il assure le secrétariat permanent de
l'Association internationale des conseils économiques et sociaux.
Les moyens de cette politique ont été dégagés grâce à une revalorisation
significative de 8,71 % sur l'exercice 2001 du budget de fonctionnement. Ces
nouveaux crédits ont permis la création d'un service international, d'un
service de la communication et la mise en place d'un réseau informatique.
Après la remise à niveau budgétaire intervenue en 2001, l'année 2002 sera,
comme vous l'avez dit, monsieur le rapporteur spécial, une période de mise en
oeuvre des réformes qui s'inscrira dans une perspective d'action
pluriannuelle.
Les mesures nouvelles concernent, tout d'abord, la poursuite de la
modernisation du système informatique, et les premières phases de développement
d'un intranet pour l'élaboration des rapports, la gestion des bases de données
documentaires et l'archivage électronique, soit 243 918 euros.
En termes de dépenses d'investissement, une dotation de 824 000 euros
d'autorisations de programme et de crédits de paiement a été prévue, comme l'an
passé, afin de poursuivre le programme d'entretien et de rénovation du palais
d'Iéna, et particulièrement la création de salles de réunions équipées d'outils
de communication moderne.
Au total, le projet de budget pour 2002 s'élève à 31,75 millions d'euros, dont
0,82 million d'euros relevant des crédits du titre V et 30,93 millions d'euros
du titre III, en progression de 1,59 % par rapport à l'année 2001.
Au-delà de ces chiffres, il importe de souligner qu'après une année de remise
à niveau un nouveau souffle a, en quelque sorte, été donné aux actions du
Conseil économique et social. Il reste donc à examiner de quelle manière cette
politique dynamique, mise en oeuvre par M. Jacques Dermagne, permettra de
donner au Conseil économique et social l'élan que Mme Beaudeau et vous-même
souhaitez lui donner.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur
celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le Conseil
économique et social, et figurant aux états B et C.
ÉTAT B
M. le président. « Titre III : 408 597 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.
(Ces crédits sont adoptés.)
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 824 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 824 000 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant le Conseil économique et social.
IV. - PLAN
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
les services du Premier ministre : IV. - Plan.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Claude Haut,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, madame la
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, aujourd'hui, pour le débat sur l'avenir
du Commissariat général du Plan, le CGP, est enfin clos.
A l'occasion de l'examen de la précédente loi de finances, j'avais conclu,
dans le cadre de la présentation de ce même budget, à un nouvau départ, à une
nouvelle ambition pour cette administration de mission. Je constate aujourd'hui
que la réforme engagée par le Premier ministre a permis de réhabiliter le rôle
et la fonction du Commissariat général du Plan.
Je voudrais, dans le temps qui m'est imparti, évoquer dans un premier temps
les crédits demandés pour 2002, puis, dans un second temps, faire le point sur
les activités du Commissariat général du Plan.
Les crédits demandés en 2002 pour le CGPet les organismes rattachés s'élèvent
à 25,8 millions d'euros en dépenses ordinaires et en crédits de paiement, soit
une très légère diminution par rapport à l'année dernière, où ils avaient
atteint 25,9 millions d'euros.
Les autorisations de programme prévues pour 2002 augmentent de 60 %, passant
de 0,5 million d'euros à 0,8 million d'euros.
La stabilité apparente du budget du CGP masque cependant des évolutions
importantes.
Tout d'abord, le déménagement d'une partie des services du Commissariat
général du Plan ainsi que du conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion
sociale, le CERC, sis au 113, rue de Grenelle, génère une économie nette de
0,30 million d'euros en année pleine.
Ensuite, le Plan fait partie de la première série d'administrations qui
utiliseront le nouveau système comptable ACCORD dès le premier trimestre 2002.
Cette décision entraîne une augmentation des crédits informatiques de 0,17
million d'euros.
Enfin, la montée en puissance du dispositif national d'évaluation des
politiques publiques a amené le CGP à modifier la structure des emplois
budgétaires. La création de trois emplois de rapporteurs d'instance nationale
d'évaluation est gagée par la suppression de quatre emplois d'adjoint
administratif.
Enfin, les crédits de recherche inscrits au budget du Plan pour 2002 sont
portés de 530 000 à 656 000 euros.
Concernant les principales activités du Commissariat général du Plan, ses
missions ont été réformées voilà deux ans, le Premier ministre ayant alors
proposé une nouvelle définition de cette administration particulière : le CGP
est conçu comme « animateur de l'analyse prospective et stratégique, lieu
privilégié de la concertation socio-professionnelle, programmateur et
évaluateur des politiques publiques ».
Les déclarations du Premier ministre ont été suivies par la définition d'un
programme de travail pluriannuel établi avec les acteurs économiques et
sociaux, dans le cadre d'une commission de concertation installée en 1999 et
présidée par le commissaire au Plan.
Le dernier programme de travail du CGP a été fixé voilà un an. Il comprend
trois axes : premièrement, le retour au plein emploi et l'encouragement à
l'activité ; deuxièmement, le renforcement de la cohésion sociale et la
sécurisation des parcours individuels, troisièmement les nouvelles régulations
publiques.
Sur les seize chantiers inclus dans ce programme de travail, neuf sont en
cours, parmi lesquels ont peut citer « l'économie entrepreneuriale », « le
financement de l'économie française, une approche comparative », « immigration,
intégration et perspectives démographiques ».
Autre pivot de l'action du CGP, l'évaluation des politiques publiques, domaine
dans lequel il a également été renforcé voilà deux ans. En effet, la circulaire
du 25 août 2000 relative à la mise en oeuvre de l'évaluation dans les
procédures contractuelles redéfinit le rôle du Commissariat général du Plan.
Depuis, il assure le secrétariat du Conseil national d'évaluation et gère les
crédits du Fonds national de développement de l'évaluation. Par ailleurs, il
est chargé de proposer au Premier ministre les suites à donner aux évaluations
réalisées.
L'année 2000-2001 a été particulièrement féconde en matière d'évaluation, les
difficultés évoquées l'année dernière ne semblant plus être d'actualité, ce
dont il faut bien sûr se réjouir. Au total, quinze évaluations ont été mises en
route en trois ans : c'est beaucoup plus que les évaluations décidées en huit
ans sous l'empire du décret de 1990.
En revanche, on relève plus de difficultés du côté de l'évaluation des
contrats de plan Etat-région. Je rappelle que la caractéristique essentielle du
nouveau dispositif d'évaluation des contrats de plan Etat-région est la place
prépondérante de l'échelon régional, préfet de région et président de conseil
régional en particulier. L'évaluation s'organise autour d'un comité de pilotage
et de plusieurs instances techniques
ad hoc
pour chaque évaluation. Au
niveau national, le commissaire au Plan préside l'instance nationale
d'évaluation.
Deux difficultés sont apparues : la première a concerné les comités de
pilotage et leurs instances techniques, dont la formation a été retardée à la
fois pour des raisons de fond mais aussi à cause des échéances électorales, ce
qui a contraint un certain nombre de régions à adopter des dispositifs
transitoires. Par ailleurs, il a été mis en évidence une mauvaise circulation
de l'information relative aux évaluations.
Ces difficultés dans la mise en place de l'évaluation des contrats de plan
Etat-région sont regrettables, mais le tableau n'est pas complètement noir : un
point très positif de la réforme concerne les modalités des délégations de
crédits, qui ont été assouplies, puisque les préfets de région peuvent obtenir,
en début d'année, 75 % des crédits qui leur sont destinés. En 2001, dix-huit
régions ont soumis un programme d'évaluation à l'instance nationale
d'évaluation des contrats de plan. Les thèmes récurrents concernent
l'environnement, la politique de la ville, l'emploi, etc.
Concernant les organismes rattachés ou subventionnés, je souhaite attirer
votre attention sur le tout récent Conseil de l'emploi, des revenus et de la
cohésion sociale. Composé de sept membres, le CERC a rendu public son premier
rapport intitulé : « Accès à l'emploi et protection sociale » et prépare un
second rapport qui portera sur les évolutions de l'emploi et des revenus sur
une période couvrant les quinze dernières années. Le nouvel organisme semble
donc avoir trouvé son rythme, et il y a tout lieu de s'en réjouir.
Certains ont marqué leurs inquiétudes sur le positionnement du Commissariat
général du Plan par rapport à d'autres organismes publics, tels que le Conseil
économique et social et le Conseil d'analyse économique.
Le Commissariat général du Plan a ses spécificités ; je pense surtout à
l'évaluation de nos politiques publiques, mais aussi au rôle essentiel qu'il
joue dans l'exercice difficile de la prospective. Si, par ailleurs, certains
domaines d'intervention sont partagés avec d'autres organismes - il serait
d'ailleurs peut-être souhaitable de mieux les préciser - peut-on se priver de
toutes ces expertises ?
De nos jours, et compte tenu de l'évolution très rapide de nos sociétés, il
paraît nécessaire de s'entourer du plus grand nombre d'avis et de s'appuyer sur
toutes les expertises.
En conclusion, la commission des finances a émis un avis favorable sur les
crédits du Plan pour 2002.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Paul Alduy,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
l'excellent rapport de notre collègue Claude Haut me permettra d'être plus
bref, d'autant que je ne n'aboutis pas à la même conclusion.
En effet, c'est à l'aune de l'ambition que notre commission nourrit pour le
Plan, entendu comme un outil dynamique de prospective et d'évaluation, que nous
avons examiné les crédits qui lui sont consacrés dans ce projet de loi de
finances.
Le Commissariat du Plan devrait nous permettre de voir plus loin pour voir
plus juste. Or il apparaît que le CGP est « confisqué » par l'exécutif. En
outre, quand on examine les mécanismes, on a même l'impression que le
Gouvernement se méfie de l'indépendance du Commissariat général du Plan.
N'a-t-il pas finalement créé toutes sortes d'instances « supplétives » pour
mener des travaux qui relèveraient, en théorie, de la compétence du CGP ? Tel
est le premier point que je me propose de développer devant vous. J'aborderai
ensuite les modalités de choix des questions soumises aux travaux du
Commissariat général du Plan et aux conditions dans lesquelles ses travaux sont
diffusés.
S'agissant d'abord de la confiscation du CGP par l'exécutif, je suis d'une
génération qui a connu le Plan à la fin des années soixante, avec l'ardente
obligation, le rapport sur la ville, qui a été à l'origine des politiques de la
ville. Or le programme de travail du CGP est exclusivement fixé par le Premier
ministre, qui a décidé - en effet, cela a été rappelé tout à l'heure - que ce
programme s'intéresserait, premièrement, au retour au plein emploi et à
l'encouragement de l'activité, deuxièmement au renforcement de la cohésion
sociale et à la sécurisation des parcours individuels et, troisièmement, aux
nouvelles régulations publiques.
Pourquoi le Parlement n'est-il pas consulté sur le programme de travail du
Commissariat général du Plan ? Comme vous le savez, le système du vote des «
lois de plan » est définitivement tombé en désuétude depuis la loi du 29
juillet 1982 portant réforme de la planification.
Dès lors, il est essentiel que le Parlement participe à l'élaboration de ce
programme de travail. A défaut, ses travaux sont totalement « déconnectés » de
ceux du CGP.
Je suis persuadé que, si l'Assemblée nationale et le Sénat étaient consultés
sur le programme de travail du Commissariat général du Plan, un certain nombre
de sujets essentiels ne seraient pas traités simplement de manière incidente.
Je citerai l'exemple des politiques territoriales : politique de la ville et
politique du développement rural. J'ai lu le rapport d'activité du CGP : le mot
« ville » n'est pratiquement pas utilisé. Certes, il y figure au travers des
analyses et de l'évaluation des contrats de plan, mais ce n'est pas un axe
majeur de l'intervention du commissariat.
De même, c'est dans le Plan que l'on a commencé à expliquer que en 2015, 40 %,
50 %, voire 60 % des fonctionnaires seraient à la retraite et qu'il fallait
donc, de manière urgente, engager le débat sur la réforme de l'Etat. Or, les
problématiques de la réforme de l'Etat ne font pas partie de la lettre de
commande du Premier ministre, et je pense que le Parlement aurait insisté sur
de tels sujets.
Dernier exemple : l'évolution des finances locales et les nouveaux modes de
gouvernance des territoires. Ne s'agit-il pas aujourd'hui, dans notre France en
mutation, d'un sujet essentiel qui mériterait d'être étudié par une instance de
prospective comme le Commissariat général du Plan ?
Force est de constater qu'actuellement les relations du Commissariat général
du Plan sont plus étroites avec le Conseil économique et social qu'avec
l'Assemblée nationale et le Sénat. D'ailleurs, j'ai noté dans un article de
presse paru récemment qu'un porte-parole du parti socialiste jugeait que l'on
pouvait même « raccrocher » demain le Commissariat général du Plan à
l'Assemblée nationale et au Sénat. Pour nous, le CGP doit servir l'Etat dans la
diversité des organes qui le représentent, à commencer par les assemblées
parlementaires.
Nous retrouvons aussi la multiplication des structures
bis
, des
structures
ter
, des structures
quater
, qui, à l'exemple du
Conseil d'analyse économique, réunissent des experts qui auraient vocation à se
retrouver dans le cadre du Commissariat général du Plan.
Nous constatons enfin que les moyens humains et les crédits affectés à la
communication du CGP sont, à l'évidence, inadaptés : il n'existe pas de plan de
communication, ni même de service de communication apte à définir, sur chacune
de ces études essentielles, des actions spécifiques de communication en
direction des relais de la nation, qui devraient précisément être alimentés par
les travaux du commissariat pour mieux repérer les grands axes sur lesquels
doit s'orienter le pays.
Le deuxième point que je souhaite aborder...
M. le président.
Il vous faut conclure, monsieur le rapporteur pour avis !
M. Jean-Paul Alduy,
rapporteur pour avis. ...
concerne l'évaluation des politiques publiques
dans notre pays et ses carences.
Un décret de 1998 a réformé la procédure pour l'abréger, ce dont le Sénat
s'est réjoui en son temps. Il était prévu qu'une évaluation dure au minimum un
an, voire dix-huit mois dans les cas exceptionnels. Des progrès sont
enregistrés, mais il apparaît que les évaluations ne peuvent être réalisées
dans un délai inférieur à deux ans.
Mais ce n'est pas le pire ! Actuellement, seuls peuvent proposer l'évaluation
d'une politique publique le Premier ministre, les ministres, le Conseil d'Etat,
la Cour des comptes, les collectivités territoriales et les associations d'élus
représentées au sein du Conseil national de l'évaluation. N'est-il pas
regrettable qu'aucun parlementaire ne figure parmi les membres du Conseil
national de l'évaluation, qui propose des sujets au Premier ministre, et que ni
l'Assemblée nationale ni le Sénat ne puissent actuellement demander la
réalisation d'une évaluation dans le cadre de la procédure fixée par le décret
de 1998 ?
En conclusion, je résumerai d'une phrase l'analyse du budget et, au travers de
ce budget, celle de l'activité du CGP : si l'efficacité technique du
Commissariat général du Plan et la qualité de ses travaux ne sont pas en cause
- j'y insiste - il convient aujourd'hui de s'interroger sur son efficacité
politique, c'est-à-dire sur son influence sur les décisions gouvernementales,
sur le rôle des assemblées parlementaires dans la définition de son programme
d'action, ou encore sur sa capacité à éclairer le débat de notre société sur
les chemins de l'avenir.
Pour ces motifs, et pour marquer la volonté de la commission d'interroger le
Gouvernement sur l'utilisation politique qui est faite des travaux du
Commissariat général du Plan, nous avons décidé d'émettre un avis défavorable à
l'adoption des crédits correspondants.
(Applaudissements sur les travées des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le
temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Didier.
Mme Evelyne Didier.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avec
un peu plus de 25 millions d'euros, le budget du Plan s'inscrit dans la
continuité des budgets précédents : il demeure le « parent pauvre » de
l'ensemble des crédits budgétaires de la loi de finances. Cette médiocrité des
crédits témoigne de l'affaiblissement du rôle traditionnellement dévolu au Plan
dans une économie ouverte et de plus en plus soumise à la régulation par le
marché.
A l'évidence, le contexte de globalisation des économies et de domination de
la finance remet en cause la fonction même du Plan en tant qu'instrument de
régulation. Ses promoteurs voyaient en lui, selon l'expression de Pierre Massé,
« un réducteur d'incertitudes » comblant la défaillance du marché, jugé
incapable d'engendrer une information susceptible d'orienter de manière
pertinente les choix de la politique économique et sociale comme de guider de
manière efficiente les décisions du monde des affaires et du monde politique.
La faiblesse de ce budget, que nous regrettons, est donc, dans une certaine
mesure, révélatrice d'un certain abandon de ces objectifs.
Comment ne pas reconnaître que, dans le même temps, le retour du marché s'est
accompagné d'une plus grande instabilité de l'environnement économique ?
Le mouvement d'ouverture et de libéralisation des économies, l'éclatement du
système de Bretton Woods qui assurait une grande stabilité des taux de change
et des taux d'intérêt, les bouleversements technologiques d'information et de
communication ont été, et sont encore, source d'incertitudes multiples.
Dans une telle période de brouillage du calcul économique, de rétrécissement
des horizons d'anticipation et de prévision, l'analyse et la prospective
économiques menées dans le cadre du Commissariat général du Plan sont
essentielles dans la mesure où elles tentent d'accroître la visibilité à moyen
et long terme et de dessiner les grandes tendances économiques et sociales. Du
moins permettent-elles qu'au travers de la concertation des différents
partenaires sociaux un débat puisse avoir lieu sur des questions aussi
essentielles que celles des retraites, des inégalités sociales ou encore de la
fiscalité, par exemple.
On ne peut, dès lors, que regretter la diminution des crédits destinés aux
différents organismes et instituts rattachés au Plan.
On le regrettera d'autant plus que les perturbations et changements actuels
exigent que soit maintenue, dans le domaine de la prospective, la pluralité
d'analyses fondées sur des jeux d'hypothèses variés, afin qu'un réel débat soit
possible. Si certains jugent inopportune la création du Conseil d'analyse
économique, reconnaissons qu'il contribue à la diversité des approches.
La diminution de plus de 16 % des crédits de fontionnement destinés au CERC,
la baisse importante des subventions allouées à l'Institut de recherche
économique et sociale, la chute de 22 % des subventions destinées à financer la
recherche de l'Observatoire français des conjonctures économiques sont
particulièrement préoccupantes tant elles risquent de remettre en cause le bon
fonctionnement de ces organismes, qui contribuent pourtant à assurer une
diversité des analyses. Il est nécessaire d'accroître les moyens de ces
instituts de conjoncture et de recherche économique et sociale, dont certains,
il est utile de le rappeler, ont été créés au début des années quatre-vingt.
A côté des études d'analyse et de prospective économiques, l'évaluation des
politiques publiques constitue l'une des attributions essentielles du
Commissariat général du Plan. On peut regretter la sous-consommation des
crédits qui y sont affectés. Notons cependant que la mise en place d'une
nouvelle procédure n'est sans doute pas indifférente à cette situation.
Un effort particulier doit, de même, être accompli en ce qui concerne
l'évaluation des contrats de plan Etat-région. Il reste que, en amont, se pose
la question de la relance des politiques publiques dans un contexte de
ralentissement inquiétant de la croissance.
Vous comprendrez, madame la secrétaire d'Etat, que, pour les principales
raisons que je viens d'exposer ici, le groupe communiste républicain et citoyen
s'abstienne sur ce budget.
(Applaudissements sur les travées du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat au budget.
Monsieur le président, messieurs les
rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, vous me permettrez tout d'abord
de remercier MM. Haut et Alduy de la qualité de leurs rapports respectifs,
quand bien même leurs conclusions ne seraient pas convergentes ; mais
j'essaierai de vous convaincre, monsieur le rapporteur pour avis, au cours de
mon intervention.
Vous connaissez l'intérêt et l'attachement du Gouvernement pour le rôle
essentiel que joue le Commissariat général du Plan dans les domaines de la
réflexion prospective, de la concertation et de l'évaluation. Comme l'a noté
votre rapporteur spécial, le Commissariat général du Plan a vu son rôle
renforcé depuis 1998.
Au cours de ces quatre dernières années, près d'une quarantaine de rapports
ont été publiés. Ils ont éclairé utilement le travail du Gouvernement et
contribué au débat public et à la réflexion collective dans tous les domaines :
économique, social, environnemental et européen.
Parmi les rapports les plus récents, on peut notamment citer - mais je ne veux
nullement ici faire de la publicité - le rapport d'Henri Rouilleault sur la
réduction du temps de travail, qui a fait clairement ressortir les effets de
cette réforme sur l'emploi et introduit utilement le débat sur les PME, ou
encore le rapport de Dominique Charvet, intitulé « Jeunesse, le devoir d'avenir
», dont la suite va être, dans les prochains jours, l'installation de la
commission sur l'autonomie des jeunes souhaitée par votre assemblée.
Par lettre du 27 novembre 2000, le Premier ministre a arrêté un nouveau
programme de travail du Commissariat général du Plan qui comprend trois grands
axes : le retour au plein emploi et l'encouragement à l'activité ; le
renforcement de la cohésion sociale et la sécurisation des parcours individuels
; enfin, les nouvelles régulations publiques.
Sur les seize chantiers inclus dans ce programme de travail, neuf sont déjà en
cours.
J'ai bien entendu les deux regrets exprimés à cet égard par M. le rapporteur
pour avis. Ils ne me paraissent fondés ni l'un ni l'autre.
Le premier regret tient, si j'ai bien compris, au fait que certains thèmes
seraient absents du programme de travail fixé par le Premier ministre au
Commissariat général au Plan, thèmes parmi lesquels vous avez cité la réforme
de l'Etat. Je crois au contraire que la problématique de la réforme de l'Etat
est très présente dans ce programme de travail.
En 2000, un rapport, élaboré par M. Cieutat, s'intitulait sur « La gestion de
l'emploi public ». L'année précédente, M. Lasserre avait rédigé un rapport sur
les technologies de l'information et de la communication dans la fonction
publique. Ces deux rapports ont été suivis d'effet.
En ce moment même, un groupe de travail élabore un rapport sur « la fonction
européenne et internationale dans l'administration d'Etat ».
La problématique de la réforme de l'Etat est très présente, de même que celle
de la ville. Ainsi, la commission sur les transports urbains est actuellement
présidée par M. Roland Ries, ancien maire de Strasbourg.
L'autre regret que j'ai cru déceler dans votre propos tiendrait au fait que le
Commissariat général du Plan ne serait pas suffisamment à la disposition du
Parlement.
Le Commissariat général du Plan dépend indiscutablement du Premier ministre,
mais cela ne l'empêche pas de travailler à la demande du Parlement. C'est
notamment arrivé sur la question de l'élargissement communautaire, à la demande
de la délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale, ainsi que
sur le secteur bancaire et sur celui des assurances, à la demande de la
commission des finances de la Haute Assemblée. Ces demandes ont, naturellement,
vocation à être adressées d'abord au Premier ministre, mais l'expérience prouve
qu'il y donne suite.
Comme M. le rapporteur spécial, je souhaite à mon tour insister sur le souci
du Gouvernement de poursuivre la relance du processus d'évaluation, sous
l'égide du Commissariat général du Plan et du Conseil national d'évaluation
créé par le décret du 18 novembre 1998.
L'évaluation est appelée à jouer un rôle croissant dans la période à venir, à
l'appui de la profonde transformation qu'entraînera dans la gestion publique la
loi organique du 1er août 2001.
Depuis trois ans, quinze évaluations interministérielles ont été décidées par
le Premier ministre : cinq en 1999, trois en 2000, sept cette année. Ces
chiffres sont à comparer aux treize évaluations réalisées au cours des dix
années précédentes.
Trois instances, installées à la fin de 1999, ont achevé leurs travaux en
moins de dix-huit mois. Les responsables des sept évaluations décidées en août
dernier ont tous été désignés : trois groupes ont commencé leurs travaux, trois
autres seront installées d'ici à la fin de l'année, et le septième en janvier
2002.
Comme le note votre rapporteur spécial, la nouvelle procédure d'évaluation des
contrats de plan Etat-région n'a pu véritablement se mettre en place qu'en
2001, une fois les sections spécialisées constituées à l'échelle des régions.
Le retard d'engagement des crédits que vous aviez constaté l'année dernière
commence à se résorber : au cours de l'année 2001, ont été délégués 113 % des
crédits correspondant à une tranche annuelle prévue contractuellement.
Le Commissariat général du Plan compte, au cours de l'année à venir, et en
liaison avec les diverses administrations concernées, renforcer le dispositif
de sensibilisation et d'appui méthodologique des régions, à la suite de
l'enquête qu'il a réalisée sur leurs besoins : création d'un site internet
dédié à l'évaluation, élaboration de guides méthodologiques, organisation de
journées d'information et de formation.
Sur la base de ces différents éléments, le projet de budget qui vous est
proposé apparaît pleinement justifié : il correspond globalement à une
reconduction en euros courants des crédits du commissariat et des organismes
qui lui sont rattachés. L'existence des reports permettra cependant de
développer l'activité du Plan.
Mme Didier s'est interrogée sur les diminutions de certains crédits. Je tiens
à lui dire que cela correspond à des faits identifiés.
Ainsi, la diminution des crédits du CERC s'explique par le fait que, étant
désormais installé dans un immeuble de l'Etat, il n'a plus de loyer à
acquitter, ce qui, évidemment, ne saurait mettre en péril sa fonction
prospective. Il s'agit même plutôt d'une donnée de bonne gestion.
Quant à l'OFCE et à l'IRES, pour lesquels vous avez également manifesté votre
intérêt, je tiens à préciser que l'Assemblée nationale a souhaité, la semaine
dernière, majorer leurs crédits, sans doute pour les mêmes raisons que celles
qui vous animent, madame Didier.
Dans la période actuelle, l'Etat est sollicité pour préciser les perspectives
à long terme et mettre en place les régulations publiques permettant
d'atteindre les objectifs collectifs. En France, c'est au Commissariat général
du Plan que revient la fonction d'animation de ce dispositif. Le Gouvernement,
par ce projet de budget, lui donne, je le crois, les moyens de cette ambition.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le Plan et
figurant aux états B et C.
ÉTAT B
M. le président. « Titre III : 90 589 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
« Titre IV : 812 057 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre IV.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(Ces crédits sont adoptés.)
ÉTAT C
M. le président.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 808 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 404 000 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre VI.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant le Plan.
Budget annexe des Monnaies et médailles
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
le budget annexe des monnaies et médailles.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Bertrand Auban,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, madame la
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, à J - 31 de la naissance de l'euro, le
projet de budget que nous examinons cette nuit est celui d'un service public
sorti aujourd'hui même d'un conflit social difficile relatif à l'application
des 35 heures sur deux sites, l'Hôtel de la Monnaie, à Paris, et
l'établissement monétaire de Pessac, en Gironde.
Outre sa mission régalienne de frappe de notre monnaie métallique, la
direction des monnaies et médailles produit et vend, notamment, des monnaies
étrangères, des monnaies de collection, des médailles et des décorations,
recettes qui financent le quart de son budget. C'est à juste titre que ses
savoir-faire sont largement reconnus sur les plans tant technique
qu'artistique.
Le projet de budget pour 2002, qui reste stable avec 183 millions d'euros,
s'inscrit pour la deuxième année consécutive dans un contexte de nette
décélération du programme de frappe de l'euro.
Si on les compare aux résultats de 2000, base la plus pertinente, les dépenses
d'exploitation prévues pour 2002 diminuent de 4,2 %, alors que l'activité
principale devrait chuter de 34 %.
Pourquoi cette rigidité à la baisse ?
Concernant les achats, qui représentent environ la moitié du budget, de fortes
augmentations des cours des métaux ainsi qu'une plus grande proportion de
coupures onéreuses annihilent en partie l'effet volume des pièces. Par
ailleurs, une part non négligeable des achats concerne les productions autres
que l'euro, qui, elles, devraient augmenter.
Les frais de personnel, qui représentent environ un quart du budget, diminuent
de 2 %. Les départs à la retraite ne sont pas compensés, mais leur effet ne se
fera vraiment sentir qu'entre 2005 et 2010. De plus, si le conditionnement et
le stockage des pièces d'euros ont été sous-traités, il n'a été fait appel à
aucun personnel sous contrat à durée déterminée pour la frappe.
Enfin, la Monnaie de Paris assure des activités patrimoniales et de contrôle
dont les coûts sont relativement incompressibles.
En revanche, après les investissements lourds de ces dernières années, les
autorisations de programme pour 2002 diminuent de 33 %.
J'en viens aux recettes.
Le produit de la cession des pièces françaises au Trésor, qui représente les
deux tiers des recettes, résulte d'un calcul automatique qui ne laisse pas
vraiment de marges de manoeuvre à la direction des monnaies et médailles. Les
prix unitaires en 2000, année riche en économies d'échelle et gains de
productivité, ont été conservés pour 2002 afin de donner à la Monnaie de Paris
le maximum de chances de remporter des appels d'offres internationaux. Cette
stratégie a été payante en 2001, notamment avec la Grèce.
Les recettes commerciales, quant à elles, progresseraient de 39 % par rapport
aux résultats de 2000. Pour la commission des finances - qui ne demande qu'à se
tromper
(Sourires)
- il s'agit là d'une surestimation flagrante.
J'en viens aux observations que m'inspire la situation de la direction des
monnaies et médailles.
Tout d'abord, et en dépit d'un climat social troublé ces derniers jours, il y
a lieu d'être pleinement satisfait de la manière dont elle s'acquitte, depuis
1998, de sa mission de frappe de l'euro. La quasi-totalité des 8,1 milliards de
pièces demandées est déjà disponible. La perturbation momentanée de la chaîne
de confection des sachets d'euros, sur laquelle la presse a beaucoup insisté,
n'a en aucun cas altéré la qualité des services rendus.
Cependant, le ciel de la Monnaie de Paris n'est pas sans nuages.
L'équilibre budgétaire pour 2002 est fragile, et il est même peu probable
qu'il soit respecté. Avec l'inéluctable diminution du programme de frappe de
l'euro, le bénéfice d'exploitation de l'établissement de Pessac ne comblera
plus guère le déficit structurel de l'établissement parisien.
C'est la raison pour laquelle des économies s'imposent, notamment sur les
achats. Un audit externe, réalisé à la fin de l'année 2000, a relevé des
dysfonctionnements et a indiqué des voies d'amélioration des performances. Des
mesures urgentes et concrètes en vue d'une politique intelligente des achats
sont attendues.
Par ailleurs, de moins en moins portée par l'activité dont elle a le monopole,
la Monnaie de Paris doit s'ouvrir sur l'extérieur pour rentabiliser ses
capacités de production devenues excédentaires et affronter une concurrence
vive, car le savoir-faire ne suffit pas : d'autres font au moins aussi bien et
à moindre coût.
L'établissement de Pessac, doté d'installations modernes, peut espérer
augmenter ses parts de marché dans le secteur des monnaies courantes
étrangères.
L'avenir est plus préoccupant pour l'établissement parisien ; les médailles,
les décorations, les fontes d'art et autres bijoux, autant de produits
concurrencés par les entreprises privées, se vendent difficilement. Le soutien
apporté à ces activités permet la conservation d'un précieux savoir-faire qui
participe au rayonnement de la France. Il doit cependant rester raisonnable, la
direction des monnaies et médailles ne pouvant trop s'éloigner de ses missions
d'intérêt public.
A ce propos, et ce sera ma conclusion, on ne peut manquer de s'interroger sur
le coeur même de l'activité de la Monnaie de Paris - la frappe de nos pièces de
monnaie - totalement conditionné par le devenir de l'euro fiduciaire. Seule une
anticipation sereine du possible avènement du porte-monnaie électronique, qui
ne relève plus aujourd'hui de la science-fiction, permettra à ce service
public, riche d'une longue histoire, de s'adapter sans trop de douleur.
Sous réserve de ces observations, il est proposé au Sénat d'adopter les
crédits du budget annexe des monnaies et médailles.
(Applaudissements sur
les travées socialistes.)
M. le président.
J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le
temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous
souhaitons tout à la fois manifester notre volonté d'accompagner les ambitions
que traduisent les crédits qui nous sont présentés et notre inquiétude de
constater que ce projet de budget refuse des moyens nouveaux aux installations
de l'établissement de Pessac et de l'hôtel du Quai Conti.
Les monnaies et médailles ont une histoire, une culture, un savoir-faire qui
font de ce service public et commercial un pilier solide de notre patrimoine,
et même de notre République.
Nous ne devons pas oublier ce paramètre en étudiant les crédits qui nous sont
soumis ce soir. L'administration des monnaies et médailles détient le monopole
de la monnaie métallique française. Elle déploie une importante activité dans
un secteur concurrentiel, comme l'a relevé M. le rapporteur spécial : cela lui
impose, mes chers collègues, d'être ambitieuse.
Vous reconnaissez, monsieur le rapporteur spécial, une recherche d'adéquation
des prévisions aux résultats, et vous avez noté que les résultats de l'activité
« décorations » s'annoncent meilleurs que les années précédentes. La frappe de
jetons permettra un développement intéressant et la vente de bijoux suscite
quelques espoirs.
Vous avez fait remarquer, à juste titre, que le changement de millénaire et de
monnaie encourage la Monnaie de Paris à multiplier les heureuses initiatives.
Cette confiance dans une réussite possible est un point fort du projet de
budget, d'autant que l'apparition des pièces de collection en euros donnera un
véritable coup de fouet aux ventes de monnaies de collection.
Le rapport indique également que la production de monnaies concurrentes
étrangères pourrait se révéler supérieure à la prévision, comme en 2001. Nous
notons, pour notre part, que la nouvelle TVA qui sera appliquée en Polynésie
entraînera un besoin accru en pièces de monnaie.
Enfin, le rapport met l'accent sur une demande nouvelle de poinçons, de
cachets de douane et de timbres secs, pour des raisons de sécurité.
Toutes ces analyses manifestent une ambition que nous partageons.
En outre, une brochure récemment publiée par la Monnaie de Paris montre la
diversité et la richesse des créations artistiques de cet établissement.
En revanche, nous exprimons des réserves importantes en ce qui concerne le
devenir de l'institution et la situation des personnels.
Par rapport à 2001, les dépenses de personnel diminuent de 1,9 %. Aucune
embauche n'est prévue, ni à court terme ni à long terme, alors que trois cents
salariés partiront en retraite d'ici à 2010.
Par ailleurs, une mise en oeuvre de la réduction du temps de travail
insuffisante, voire inconséquente, a motivé, la semaine dernière, le
déclenchement de toute une série de mouvements de grève, qui viennent de
cesser. Nous affirmons à cet égard notre complète solidarité avec les
personnels, qui, après avoir beaucoup travaillé, veulent également bénéficier
de la réduction du temps de travail.
A ce propos, le groupe communiste républicain et citoyen voudrait protester
contre une décision grave prise par Bercy à l'encontre des salariés en grève.
Lundi matin, en effet, les forces de l'ordre sont intervenues et ont récupéré
par la violence les poinçons mères de frappe de la nouvelle monnaie et les
matrices originales qui permettent de fabriquer les coins de frappe
monétaires.
Autrement dit, Bercy s'est saisi de l'outil de travail comme un simple chef
d'entreprise utilisant des méthodes d'un autre âge. Nous pensons qu'une autre
voie était possible, et je crois d'ailleurs savoir que le travail a repris,
sans qu'aucun accord sur la réduction du temps de travail soit intervenu. Nous
ne pouvons admettre, madame la secrétaire d'Etat, le recours à telle violence.
Que deviendrait notre pays si une telle méthode se généralisait ? Nous vous
demandons de nous indiquer ce soir qui a donné l'ordre d'intervention aux
forces de police.
En outre, la modernisation et l'extension du site de Pessac sont toujours
refusées. Vous avez confirmé, madame la secrétaire d'Etat, lors de l'examen de
ces crédits par l'Assemblée nationale, que le projet de création d'une
fonderie-laminoir était abandonné. Vous comprendrez l'inquiétude, que nous
partageons, des neuf cents salariés concernés quant à l'avenir du site où ils
travaillent.
De surcroît, la mise en concurrence des institutions monétaires européennes
soulève des interrogations s'agissant du maintien de la fabrication de notre
monnaie dans le cadre du service public.
Ce sont là des réserves, voire des critiques, que nous émettons.
L'investissement diminuera de 44 % en 2002 et il s'agit là, madame la
secrétaire d'Etat, d'un manque de confiance en notre service public de
production des monnaies et médailles, d'autant moins acceptable que l'équilibre
budgétaire sera assuré, pour 2002, sans recours à une nouvelle subvention de
l'Etat.
Toutefois, si l'équilibre est assuré pour l'établissement de Pessac, cela est
moins vrai pour celui de Paris. En effet, la création artistique n'équilibre
jamais ses budgets : on ne peut demander aux monnaies et médailles de faire
exception à cette règle.
Cela étant, nous ne voulons pas croire que la plus ancienne des institutions
françaises puisse être menacée, ainsi que sa fonction régalienne. Elle bat
monnaie depuis plus de 1100 ans. Je rappellerai, à cet égard, l'édit du 24 juin
864 de Charles le Chauve, qui faisait défense de fabriquer des monnaies nulle
part ailleurs, en France ou en Europe, qu'au Palais, à Quentoire, à Rouen, à
Reims, à Sens, à Paris, à Orléans, à Châlons ou à Narbonne.
Nous avions espéré que vous décideriez bientôt l'aménagement d'un nouveau
complexe à Pessac, d'une fonderie-laminoir qui garantirait davantage de
fiabilité et d'indépendance et qui nous permettrait de continuer à assurer la
fabrication de notre quota de pièces et de billets, gage de souveraineté
nationale.
S'il est vrai que, depuis le 24 juin 864, les régimes et les monnaies se sont
succédé l'institution, elle, a résisté. Ce sont les ouvriers et les créateurs
des monnaies et médailles qui, finalement, ont pris le relais, au-delà du
temps, du roi de France. N'est-ce pas là aussi l'expression de notre
attachement à notre souveraineté et à nos racines ?
En conclusion, monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers
collègues, nous estimons que ce budget est insuffisant, que la méthode de
gestion du personnel est contestable et que l'avenir est mal défini.
Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas les crédits qui nous sont
présentés.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat au budget.
Monsieur le président, mesdames, messieurs
les sénateurs, je remercierai tout d'abord M. Bertrand Auban, rapporteur
spécial, de sa contribution à l'étude approfondie du projet de budget annexe
des monnaies et médailles que vous examinez ce soir. Je souscris à ses
conclusions et je reviendrai dans un instant sur les points particuliers
soulevés par lui ou par Mme Beaudeau.
A cet instant, je souhaiterais informer le Sénat, d'une façon aussi actuelle
que possible, sur la situation à la direction des monnaies et médailles.
Vous savez, mesdames, messieurs les sénateurs, que, à la mi-novembre, les
agents des établissements monétaires de Paris et de Pessac se sont mis en grève
à l'occasion des discussions sur la mise en oeuvre de l'aménagement et de la
réduction du temps de travail au sein de la direction. Les discussions sont
restées longtemps dans l'impasse - mais je tiens à souligner que jamais le
dialogue social n'a été rompu - et la mission régalienne de la frappe de la
monnaie par l'Etat, à un moment particulièrement crucial pour le passage à
l'euro, ne pouvait plus être assurée normalement.
C'est pourquoi l'accès aux stocks de pièces déjà frappées a été dégagé, afin
que celles-ci puissent être chargées. C'est ce qui s'est passé les 26 et 27
novembre, et les forces de l'ordre se sont ensuite retirées.
A ce propos, j'indiquerai à Mme Beaudeau, qui m'a demandé qui a donné l'ordre
d'intervenir le 26 novembre à Pessac et à Paris, que le ministre de l'économie,
des finances et de l'industrie a fait prendre les mesures destinées à garantir
la continuité de l'accomplissement des missions de l'Etat à la direction des
monnaies et médailles. Je confirme toutefois que, contrairement à ce que vous
avez laissé entendre, il n'y a pas eu de violences. L'accès aux chambres fortes
était rendu impossible par les piquets de grève, mais l'intervention des forces
de l'ordre s'est déroulée sans encombre, et cette opération a fait l'objet d'un
communiqué dès le lundi 26 novembre au matin.
A Paris, les poinçons de reproduction des euros ont été remis aux autorités de
tutelle. Le dialogue, que le ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie a toujours souhaité, n'a pas été interrompu et des discussions se
sont tenues à Pessac et à Paris pour sortir du conflit. A l'heure où je vous
parle, le travail, et donc la frappe des euros, ont repris sur les deux
sites.
Je ne peux pas non plus laisser dire que l'aménagement et la réduction du
temps de travail ne seraient pas mis en oeuvre à la direction des monnaies et
médailles. En effet, la fin du conflit s'est traduite par la conclusion de
protocoles d'accord avec les représentants du personnel. L'aménagement et la
réduction du temps de travail seront donc appliqués, ce qui constitue à la fois
un réel progrès pour tous les salariés de Paris et l'occasion de pérenniser, en
quelque sorte, le régime dérogatoire qui existe à Pessac.
S'agissant maintenant du projet de budget pour 2002, l'année qui s'achève a
été particulière pour la direction des monnaies et médailles, puisqu'elle a dû
faire face à plusieurs modifications de son programme de frappe et, bien
entendu, au mouvement de grève de novembre que j'évoquais à l'instant.
Cependant, les objectifs seront globalement atteints.
Ainsi, comme vous le soulignez dans votre rapport, monsieur Auban, la
direction des monnaies et médailles s'est acquittée de manière pleinement
satisfaisante des missions nouvelles qui lui ont été confiées à l'occasion du
passage à l'euro, faisant preuve, s'il en était besoin, de sa technicité et de
son savoir-faire.
Le projet de budget pour 2002 a été construit en fonction d'une hypothèse de
frappe soutenue en euros. Il en sera de même encore en 2003, l'encaisse dite «
dormante » destinée à réguler la circulation de monnaie métallique n'étant pas
encore constituée. A l'évidence, la frappe continuera dans les années à venir.
Toutefois, il est un peu difficile d'en déterminer par avance le volume, en
raison de l'absence totale de références sur les flux qui s'établiront au cours
des prochains mois. L'acceptation de toutes les pièces de la zone euro ne sera
évidemment pas sans conséquences, mais il n'en demeure pas moins que la
pérennité de la direction des monnaies et médailles est assurée.
En revanche, il convient de poursuivre sa diversification dans toutes les
missions qu'elle assure, particulièrement la frappe de monnaies étrangères.
Vous avez fait remarquer, monsieur le rapporteur spécial, que les prévisions
d'activité dans certains secteurs autres que la frappe monétaire seraient trop
optimistes. Je dirai plutôt qu'elles l'étaient en effet voilà quelques années,
mais que notre approche est désormais beaucoup plus réaliste, et donc
accessible. La direction a d'ailleurs pleinement pris en compte cette
orientation.
En incidente, je souhaite préciser que si certaines activités de la Monnaie -
monnaies de collection, bijoux, fontes - paraissent éloignées de sa mission
première de frappe, les monnaies de collection font partie de l'activité
traditionnelle de l'administration des monnaies dans la plupart des Etats.
Quant aux autres fabrications, il est important de les développer, ce qui
implique d'améliorer les conditions de production de ces objets, notamment par
une adaptation continue à la demande, y compris la demande étrangère.
La mission de la direction des monnaies et médailles était très difficile.
Elle devra à l'avenir relever d'autres défis, mais je ne doute pas qu'elle
parvienne à le faire
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le budget
annexe des monnaies et médailles et figurant aux articles 33 et 34 du projet de
loi.
Services votés
M. le président.
« Crédits : 177 500 387 EUR. »
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 33 au titre des services
votés.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
(Ces crédits sont adoptés.)
Mesures nouvelles
M. le président.
« I. - Autorisations de programme : 3 544 000 EUR ;
« II. - Crédits : 5 320 886 EUR. »
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 34 au titre des mesures
nouvelles.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant le budget annexe des monnaies et médailles.
Budget annexe des Journaux officiels
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
le budget annexe des Journaux officiels.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Thierry Foucaud,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, mes chers
collègues, si je m'écoutais, je limiterais mon propos à une seule question à
l'intention de Mme la secrétaire d'Etat : quel avenir préparez-vous pour les
Journaux officiels ? En d'autres termes, comment devrait évoluer cette
direction et que deviendrait son personnel ?
A l'Assemblée nationale, madame la secrétaire d'Etat, vous avez indiqué qu'une
réflexion était en cours et qu'elle devait se poursuivre dans la concertation.
Soit ! Mais qu'en est-il vraiment ? Le Parlement est en droit d'être informé,
et je vous sais sensible à cet égard.
Le budget annexe pour 2002 est en baisse de 12 % et s'établit à 169 millions
d'euros. Globalement, les crédits destinés aux dépenses d'exploitation
augmentent de 4,4 %, tandis que les recettes diminuent de plus de 11 %.
Ce budget m'inspire trois observations.
La première porte sur des éléments qui étaient attendus. En 2002, les recettes
retirées des annonces légales régressent. Je rappelle que le Gouvernement a
décidé la gratuité des annonces relatives à la création d'entreprise. Par
ailleurs, les annonces publiées au
Bulletin officiel des marchés publics
marquent une baisse particulièrement sensible, pour deux raisons : d'une
part, les annonceurs qui saisissent directement leurs annonces via Internet
bénéficient d'une remise ; d'autre part, la réforme du code des marchés
publics, qui a abouti à un relèvement des seuils, entraînera, ce qui est
mathématique, une baisse du nombre des annonces.
La diminution des tarifs semble légitime : la loi oblige les annonceurs à
recourir aux services des Journaux officiels. L'Etat n'a pas de raisons
objectives d'en retirer un profit sans rapport avec le coût supporté !
Toutefois, afin de compenser la perte de recettes, la direction des Journaux
officiels, la DJO, devrait développer sa politique commerciale.
Ma seconde observation est une constatation. La direction des Journaux
officiels a mis en oeuvre avec succès le programme d'action gouvernemental pour
la société de l'information, annoncé par M. le Premier ministre le 2 octobre
2001.
En effet, en 2002, le citoyen pourra accéder gratuitement aux données
publiques via Internet. C'est ainsi que naît un véritable service public
gratuit d'accès au droit. La commission des finances, qui avait milité depuis
de nombreuses années en faveur de cette avancée démocratique, ne peut que s'en
féliciter.
Ma troisième observation est une question d'ordre plus général : dans quel
cadre, mes chers collègues, souhaitons-nous voir s'exercer les activités des
Journaux officiels ?
Comme cela avait été annnoncé l'an dernier, un audit a été effectué par la
Cour des comptes. Celle-ci critique, entre autres éléments, la gestion de la
direction des Journaux officiels et les retards dans la mise en place de la
saisie à la source. La Cour doit mener à nouveau un contrôle très
prochainement.
Une étude, confiée par le Gouvernement à Mme Bergeal, conseillère d'Etat,
conclut à la nécessité d'une réorganisation des relations entre la direction
des Journaux officiels et la Société anonyme de composition et d'impression des
Journaux officiels, entreprise chargée exclusivement des travaux du
Journal
officiel.
L'organisation juridique actuelle serait, selon elle, contraire
au droit européen. En complément de mon rapport écrit, je souhaite informer le
Sénat que de nouvelles études juridiques effectuées tout récemment par des
experts privés n'ont pas confirmé cette analyse. Nous savons que M. Dieudonné
Mandelkern, conseiller d'Etat honoraire, s'est vu confier une mission de «
facilitateur », pour reprendre la terminologie employée, entre l'Etat, la
direction des Journaux officiels et la SACIJO, afin de trouver une solution.
Quoi qu'il arrive, nous serons très vigilants quant au sort qui sera réservé au
personnel.
De plus, à moyen terme, la nouvelle loi organique relative aux lois de
finances devrait vous le savez, entraîner la disparition du budget annexe. A
mon sens, quelle que soit la nouvelle entité ou la nouvelle organisation
administrative qui sera mise en place, la responsabilité de la publication des
actes de l'autorité publique et des débats parlementaires ne doit en aucun cas
échapper à la puissance publique. Le Parlement est directement concerné,
puisque ses débats sont publiés au
Journal officiel
, conformément à
l'article 33 de la Constitution, qui dispose : « Les séances des deux
assemblées sont publiques. Le compte rendu intégral des débats est publié au
Journal officiel
. »
Madame la secrétaire d'Etat, je réitère ma question : à qui la confection et
la diffusion du
Journal officiel
seront-elles confiées ?
Sous réserve de ces observations, la commission des finances propose au Sénat
d'adopter le budget annexe des Journaux officiels.
(Applaudissements sur les
travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le
temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
voudrais d'abord remercier le rapporteur spécial, M. Thierry Foucaud, de la
qualité de son travail, qui nous permet de bien prendre conscience de la
situation des Journaux officiels et des incertitudes qui pèsent sur leur
avenir.
Pour les salariés des Journaux officiels, l'heure est en effet à l'inquiétude
s'agissant de la pérennité de cette entreprise qui est essentielle au bon
fonctionnement de la République.
Certes, la rumeur insistante de délocalisation de l'usine située dans le XVe
arrondissement de Paris s'est estompée. Mais les salariés, qui savent que la
délocalisation serait synonyme de menace pour l'existence même de l'entreprise,
attendent toujours un démenti formel et définitif de la part de la direction et
du Gouvernement.
Le projet de budget pour 2002 n'apaise pas toutes les inquiétudes.
Il prévoit, par exemple, une chute prévisionnelle des deux tiers du montant de
l'excédent brut d'exploitation. M. le rapporteur spécial en a rappelé les
raisons principales.
Cette évolution n'en est pas moins préoccupante. Ne risque-t-elle pas de faire
apparaître une moindre rentabilité de cette entreprise de service public ? Elle
pose en tout cas avec encore plus d'acuité la question de l'opportunité du
reversement intégral de cet excédent au budget de l'Etat, comme nous le disons
lors de chaque discussion budgétaire. Le développement des activités appelle,
en effet, d'importants investissements auxquels pourrait être consacrée cette
marge d'autofinancement.
Le niveau de l'investissement prévu pour 2002, en baisse de 70 %, paraît
justement en deçà des besoins de financement, qui ne manquent pas.
La diminution tendancielle des abonnements, si elle est logique étant donné le
développement d'Internet, devrait toutefois rester modérée et l'activité
d'impression n'est en rien condamnée à péricliter. L'excellence du savoir-faire
des ouvriers des Journaux officiels est, au contraire, un atout considérable
pour étendre les activités papier dans le cadre des missions de service public.
La richesse actuelle du catalogue des publications des Journaux officiels donne
déjà une idée des possibilités.
La modernisation et le maintien à son niveau d'excellence de l'outil de
travail d'impression doit bien être une priorité.
En ce qui concerne l'informatique et Internet, l'augmentation des crédits
correspondant au renouvellement de cent postes de travail, nécessaire, reste
loin des besoins.
Il est temps que l'accès à toutes les données juridiques devienne gratuit. Ce
sera chose faite en 2002. Tant mieux !
Mais pourquoi continuer d'avoir recours à un sous-traitant privé pour ces
activités, Or-Télématique, ou ORT ?
L'intérêt du service public est clairement que ce soit le site des Journaux
officiels, entièrement réalisé par le personnel de ces derniers, qui reprenne
et améliore les sites « Légifrance » et « Jurifrance » pour le moment
sous-traités à ORT. Pourquoi ne pas aller dans ce sens alors que les capacités
de financement existent ?
Par ailleurs, le projet de budget provisionne 33 millions de francs pour le
départ anticipé de 160 salariés qu'il n'est pas prévu de tous remplacés. Cette
perspective de réduction des effectifs est de mauvais augure. Elle va dans le
sens d'une dégradation des conditions de travail et d'une réduction
d'activité.
Ce projet de budget pour 2002 nous apparaît, vous le voyez bien, un peu trop
restrictif. Il ne mise pas assez sur le développement des activités des
Journaux officiels pour mieux accomplir leurs missions de service public. Il ne
réfute pas suffisamment les spéculations autour d'une perspective de
démantèlement, voire de privatisation, des activités des Journaux officiels.
C'est regrettable dans un contexte où est de plus en plus évoquée la
tranformation du statut de l'entreprise en établissement public à caractère
industriel ou commercial, impliquant la fin d'une structure coopérative qui a
pourtant fait ses preuves depuis 1945, et où l'adoption de la nouvelle loi
organique relative aux lois de finances risque d'entraîner la fin du budget
annexe.
C'est donc conscients des insuffisances et des ambiguïtés du projet de budget
qui nous est présenté face aux incertitudes qui pèsent sur l'avenir de ce
service public essentiel au bon fonctionnement de notre République et
indispensable à notre indépendance nationale que nous voterons les crédits qui
nous sont proposés.
(Mme Didier applaudit.)
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat au budget.
Monsieur le président, monsieur le
rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d'abord de
remercier M. Thierry Foucaud de la grande qualité de son rapport.
Ce projet de budget de la Direction des Journaux officiels pour 2002 se fonde
sur une diminution, comme cela a été dit, de 11,9 % des recettes et sur une
progression de 1,1 % des dépenses totales par rapport aux montants qui figurent
dans la loi de finances pour 2001.
L'excédent d'exploitation s'établirait, dans cette hypothèse, à 12,9 millions
d'euros, reversés au budget général, à comparer à un excédent de 279,2 millions
de francs, soit 42,5 millions d'euros, en 2001.
L'activité des annonces, qui est la principale source de recettes de la
Direction des Journaux officiels, reste toujours soutenue, mais la diminution
des recettes du
Bulletin officiel des annonces des marchés publics
est
estimée à près de 15 % pour 2002, compte tenu de la réforme, intervenue
récemment, du code des marchés publics.
Les Journaux officiels ont aussi pris en compte les conséquences de
l'instauration, au cours de cette année, de la gratuité des annonces portant
création des entreprises publiées au
Bulletin officiel des annonces civiles
et commerciales.
Par ailleurs, les Journaux officiels continuent à intégrer les nouvelles
technologies de la communication dans tous les secteurs de leur activité afin
de les mettre en oeuvre au profit de nos concitoyens.
Le site Internet de la Direction des Journaux officiels, qui a accueilli plus
de 1 920 000 visiteurs au cours des neuf premiers mois de 2001, offre un accès
gratuit au fichier d'annonces du
Bulletin officiel des annonces des marchés
publics
ainsi qu'au
Bulletin des annonces légales obligatoires
et
Associations
. De plus, les personnes publiques peuvent saisir
directement en ligne leurs annonces de marchés publics, ce que font dorénavant
6 % d'entre elles.
L'ensemble de ces dispositions, souhaitées par le Gouvernement pour encourager
les accès en ligne, a eu un effet sur les recettes de diffusion de la Direction
des Journaux officiels qui, de fait, sont en recul de 1 % sur les neuf premiers
mois de 2001.
Cette évolution vers la communication électronique conduit la Direction des
Journaux officiels à accomplir un effort permanent d'amélioration et de
diversification de ses produits sur papier.
Afin de mieux faire connaître ces différents outils d'accès à la norme
juridique, la Direction des Journaux officiels conduira d'importantes
opérations de communi-cation.
En regard, les dépenses d'exploitation augmentent modérément, de l'ordre de
4,4 %, témoignant de la volonté d'une maîtrise des coûts dans un contexte
d'augmentation de la masse salariale due aux accords sur la réduction du temps
de travail dans la presse parisienne.
Les dépenses d'investissement traduisent, quant à elles, la préoccupation de
moderniser l'outil de production afin de faire face au nouveau contexte dans
lequel doivent être associées la production papier et la production
électronique, l'amélioration de la qualité des produits constituant la
résultante des progrès technologiques et de l'élévation du niveau de
compétences des personnels.
Enfin, à travers le budget 2002 est transcrit l'engagement d'un projet
important dont la réalisation a été confiée à la Direction des Journaux
officiels : la reprise en régie du service public de diffusion des données
juridiques. Ce nouveau service sera ouvert au cours de l'été 2002.
J'ai bien noté l'interrogation réitérée à plusieurs reprises par M. le
rapporteur spécial sur l'avenir des Journaux officiels. Pour ma part, je n'ai
aucune inquiétude à cet égard. Ainsi que vous l'avez indiqué, monsieur Foucaud,
une réflexion est en cours sous l'égide de M. Dieudonné Mandelkern. Elle porte
sur une éventuelle évolution de la convention entre l'Etat et la Société de
composition et d'impression des Journaux officiels. Cette réflexion se fait en
concertation avec l'ensemble des représentants du personnel, dans un climat
jusqu'à présent tout à fait constructif et apaisé.
Avant de conclure, je tiens à vous affirmer, madame Beaudeau, que vous n'avez
pas d'inquiétude particulière à avoir ni sur le plan de l'évolution des
effectifs ni quant à d'éventuelles délocalisations. Je tenais à vous rassurer
sur ces deux points.
Ainsi, dans un contexte toujours très évolutif, la Direction des Journaux
officiels poursuit son action avec détermination, guidée par le souci d'adapter
ses méthodes et sa production aux impératifs d'une politique au service du
citoyen, tout en rationalisant sa gestion, ce qui, je crois, est une
préoccupation qui nous est commune. Ce qui est certain, c'est que c'est bien à
la Direction des Journaux officiels que la mission de diffusion des Journaux
officiels restera confiée.
(Applaudissements sur les travées
socialistes.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le budget
annexe des Journaux officiels et figurant aux articles 33 et 34 du projet de
loi.
Services votés
M. le président.
« Crédits : 145 108 290 EUR. »
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 33 au titre des services
votés.
(Ces crédits sont adoptés.
)
Mesures nouvelles
M. le président.
« I. - Autorisations de programme : 5 030 000 EUR ;
« II. - Crédits : 24 739 429 EUR. »
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 34 au titre des mesures
nouvelles.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant le budget annexe des Journaux officiels.
3
TRANSMISSION DE PROPOSITIONS DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de M. le président de l'Assemblée nationale une proposition de loi,
modifiée par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relative à la création
d'établissements publics de coopération culturelle.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 104, distribuée et renvoyée
à la commission des affaires culturelles.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, une proposition de loi,
modifiée par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, tendant à moderniser le
statut des sociétés d'économie mixte locales.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 105, distribuée et renvoyée
à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage
universel, du règlement et d'administration générale.
4
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée à aujourd'hui, samedi 1er décembre, à neuf heures trente, à quinze heures
et le soir :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2002, adopté par
l'Assemblée nationale (n°s 86 et 87, 2001-2002). (M. Philippe Marini,
rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des
comptes économiques de la nation).
Deuxième partie. - Moyens des services et dispositions spéciales :
Jeunesse et sports :
M. Michel Sergent, rapporteur spécial (rapport n° 87, annexe n° 30) ;
M. Bernard Murat, rapporteur pour avis de la commission des affaires
culturelles (avis n° 88, tome IX).
Communication :
(Crédits du Conseil supérieur de l'audiovisuel, d'aides à la presse et à
l'audiovisuel inscrits au budget des services généraux du Premier ministre ;
article 47 et lignes 38 et 39 de l'état E annexé à l'article 43) ;
M. Claude Belot, rapporteur spécial (rapport n° 87, annexes n°s 9 et 10) ;
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis de la commission des affaires
culturelles (communication audiovisuelle et presse écrite, avis n° 88, tomes X
et XI).
CultureProcédure de questions et de réponses avec droit de réplique des
sénateurs.
:
M. Yann Gaillard, rapporteur spécial (rapport n° 87, annexe n° 8) ;
M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis de la commission des affaires
culturelles (avis n° 88, tome I) ;
M. Marcel Vidal, rapporteur pour avis de la commission des affaires
culturelles (cinéma-théâtre dramatique, avis n° 88, tome II).
Anciens combattants (et articles 61 à 64 et 64
bis
) :
M. Jacques Baudot, rapporteur spécial (rapport n° 87, annexe n° 6) ;
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales
(avis n° 91, tome VII).
Délai limite pour les inscriptions de parole
dans les discussions précédant l'examen
des crédits de chaque ministère
Le délai limite pour les inscriptions de parole dans les discussions précédant
l'examen des crédits de chaque ministère est fixé à la veille du jour prévu
pour la discussion, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements
aux crédits budgétaires
pour le projet de loi de finances pour 2002
Le délai limite pour le dépôt des amendements aux divers crédits budgétaires
et articles rattachés du projet de loi de finances pour 2002 est fixé à la
veille du jour prévu pour la discussion, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements
aux articles de la deuxième partie,
non joints à l'examen des crédits
du projet de loi de finances pour 2002
Le délai limite pour le dépôt des amendements aux articles de la deuxième
partie, non joints à l'examen des crédits du projet de loi de finances pour
2002, est fixé au vendredi 7 décembre 2001, à seize heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt-trois heures cinquante.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD
QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Réorganisation de La Poste
1210.
- 28 novembre 2001. -
M. Jean-Pierre Demerliat
attire l'attention de
M. le secrétaire d'Etat à l'industrie
sur les problèmes posés par la mise en place du programme SOFT, qui a précédé
la nouvelle déconcentration opérationnelle (NDO), au sein de La Poste. Même si
la NDO concerne moins de 4 % des effectifs de La Poste, il reste à craindre
qu'elle ne débouche sur une organisation des services complexe, dans laquelle
la dilution des responsabilités retardera la prise de décision, pénalisant
ainsi les usagers. Par ailleurs, concernant la réorganisation générale de La
Poste sur l'ensemble du territoire, certains redéploiements ne doivent pas
s'effectuer au détriment des zones rurales. L'ensemble de la population et bien
évidemment des élus reste, en effet, très attaché à la présence postale de
proximité. Il souhaiterait donc savoir comment la concertation locale pourrait
s'organiser et surtout quelles dispositions pourraient être prises afin
d'assurer, sur le long terme, une présence postale de qualité, y compris en
milieu rural.
ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du vendredi 30 novembre 2001
SCRUTIN (n° 23)
sur le titre III de l'état B du projet de loi de finances pour 2002, adopté par
l'Assemblée nationale (budget de l'Economie, des finances et de
l'industrie).
Nombre de votants : | 312 |
Nombre de suffrages exprimés : | 312 |
Pour : | 111 |
Contre : | 201 |
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Pour :
23.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (19) :
Pour :
6. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard
Delfau, Rodolphe Désiré et François Fortassin
Contre :
13.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (95) :
Contre :
94.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Christian Poncelet, président du
Sénat.
GROUPE SOCIALISTE (83) :
Pour :
82.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Bernard Angels, qui présidait la
séance.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (53) :
Contre :
53.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (41) :
Contre :
41.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (6) :
N'ont pas pris part au vote :
6.
Ont voté pour
Michèle André
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marie-Christine Blandin
Nicole Borvo
Didier Boulaud
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique
Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Yvon Collin
Gérard Collomb
Yves Coquelle
Raymond Courrière
Roland Courteau
Yves Dauge
Annie David
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Evelyne Didier
Claude Domeizel
Michel
Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Guy Fischer
François Fortassin
Thierry Foucaud
Jean-Claude Frécon
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Josiane Mathon
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Tremel
André Vantomme
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Jean-Paul Alduy
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles
Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Christian Cointat
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Xavier Darcos
Robert Del Picchia
Jean-Paul Delevoye
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Yves Detraigne
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Alain Joyandet
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kerguéris
Christian
de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-François
Le Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean Louis Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
Lucette
Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri
de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bruno Sido
Daniel Soulage
Louis Souvet
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
François Zocchetto
N'ont pas pris part au vote
MM. Philippe Adnot, Philippe Darniche, Mme Sylvie Desmarescaux, MM. Hubert
Durand-Chastel, Bernard Seillier et Alex Türk.
MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Bernard Angels, qui présidait
la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants | 313 | |||
Majorité absolue des suffrages exprimés | 157 | |||
Contre |
201 Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.
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