SEANCE DU 22 NOVEMBRE 2001
M. le président.
La parole est à Mme Gautier.
Mme Gisèle Gautier.
Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Alors que se déroule actuellement le congrès de l'Association des maires de
France, de nombreux élus s'inquiètent légitimement des annonces qu'a faites le
Gouvernement en juin dernier sur l'avenir des emplois-jeunes. Force est de
constater aujourd'hui, c'est-à-dire presque six mois plus tard, que rien n'est
encore réglé.
M. Raymond Courrière.
Vous étiez contre !
Mme Gisèle Gautier.
Ce plan, qui a été conçu, il faut bien le dire, à la hâte, ne permet en effet
ni d'améliorer le fonctionnement actuel d'un dispositif que je qualifierai
d'imparfait, ni d'assurer l'avenir professionnel des emplois-jeunes, pas plus,
d'ailleurs, que la pérennisation des activités créées.
En effet, le plan gouvernemental dispose que les associations ayant recruté un
emploi-jeune en 1998 sont tenues de se positionner avant la fin de l'année 2001
- autrement dit, demain - pour bénéficier des aides maintenues, je dirai plutôt
des aides minorées.
A ce titre, plusieurs possibilités nous sont offertes. Une d'entre elles ne
manquera pas d'entraîner des effets pervers : je veux parler de l'épargne
consolidée. En effet, la possibilité est donnée aux associations de différer à
leur demande une partie du versement de l'aide de l'Etat au-delà de la période
initiale de cinq ans prévue dans la convention.
L'association constitue donc une épargne sur l'aide initiale qui peut être
d'une durée de deux, voire trois ans. Mais le reversement de ces aides dites «
épargnées » interviendra durant trois ans après la période conventionnelle
initiale et sera abondé d'une prime de 100 000 francs répartie sur trois années
supplémentaires. Cette mesure porte de cinq à huit ans la durée globale de
l'aide à la consolidation des activités créées.
Je serais tentée de dire : très bien ! madame la ministre. Mais, à l'issue des
cinq années suivant l'aide initiale, le salarié devra impérativement bénéficier
d'un contrat à durée déterminée et son poste devra être maintenu jusqu'à la fin
de la période de huit ans.
Evidemment, une difficulté apparaît : celle de l'application de ce volet «
épargne consolidée ». C'est bien là que le bât blesse ! Bien sûr, si la
condition relative à la solvabilisation des associations n'est pas pleinement
respectée, comme je le crains, il ne fait pas de doute que, au bout de la
huitième année, de graves difficultés surgiront pour financer les postes ainsi
pérennisés.
Les collectivités locales sont les partenaires privilégiés des associations ;
nous avons eu l'occasion de le vérifier lors du centenaire de la loi de 1901.
Elles seront inévitablement sollicitées et subiront à nouveau de plein fouet un
transfert de charge insupportable après l'impact très lourd, sur le plan
budgétaire, de la loi sur les 35 heures.
(Protestations sur les travées
socialistes.)
Il s'agit, une fois de plus, d'un désengagement de l'Etat qui n'est pas
tolérable tant du point de vue du principe que du point de vue financier.
Les Français en ont assez de payer l'addition et de subir l'augmentation
constante de la pression fiscale à laquelle les maires sont trop souvent
contraints de recourir du fait de votre politique.
(Nouvelles protestations
sur les mêmes travées.)
M. Paul Raoult.
Ça suffit !
Mme Gisèle Gautier.
Je rappelle qu'à l'origine, lors de la mise en place des emplois-jeunes, Mme
Guigou avait insisté, en dépit des réserves des collectivités
territoriales...
Plusieurs sénateurs socialistes.
La question !
Mme Gisèle Gautier.
Laissez-moi terminer !
M. Jean-Pierre Raffarin.
Et la parité ? Respectez les femmes !
M. Paul Blanc.
Soyez galants !
Mme Gisèle Gautier.
Je reprends mon propos : je rappelle qu'à l'origine de la mise en place de ces
emplois-jeunes Mme Guigou avait insisté, en dépit des réserves des
collectivités territoriales, sur la nécessité d'en créer le plus grand nombre
possible.
Plusieurs sénateurs socialistes.
La question !
M. René-Pierre Signé.
C'est du favoritisme !
Mme Gisèle Gautier.
Je termine mon propos. Pouvez-vous m'indiquer, madame le secrétaire d'Etat,
quelles mesures sont envisagées par le Gouvernement pour aider les
collectivités locales à sortir de cette impasse que je qualifierai de
pernicieuse ?
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR
et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
Mes chers collègues, j'ai autorisé Mme Gautier à dépasser le temps de parole
qui lui était imparti parce que c'était la première fois qu'elle intervenait -
c'est une jeune sénatrice - dans une séance de questions d'actualité au
Gouvernement.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste
et des Républicains et Indépendants.)
M. Paul Raoult.
Oui, mais la réponse ne passera pas à la télévision.
M. le président.
C'est vrai, de ce fait, la réponse à sa question ne pourra malheureusement pas
être retransmise par la télévision.
Mme Nelly Olin.
En tout cas, nous avons pu mesurer la solidarité des femmes socialistes !
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle.
Peut-être une autre séance de questions d'actualité permettra-t-elle aux
téléspectateurs d'entendre la réponse du Gouvernement, car c'est important.
M. Hilaire Flandre.
Ils « zaperont » !
M. Josselin de Rohan.
Ils liront le
Journal officiel.
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat.
Il reste, madame la sénatrice, que cette réponse, je
vous le dois de tout façon dès aujourd'hui.
Avec 350 000 jeunes embauchés, ce programme « nouveaux services -
emplois-jeunes » a contribué à la baisse massive du chômage des jeunes.
Ce programme se poursuit avec, par exemple, pour le mois dernier, l'embauche
de 5 000 jeunes.
Par ailleurs, les crédits prévus pour 2002 permettront de garantir le
renouvellement de tous les emplois-jeunes de la première génération et de
financer 9 000 postes supplémentaires.
Je rappelle sans insister davantage que, pour assurer un débouché aux jeunes,
nous avons prévu l'adaptation des conditions d'accès à la fonction publique
d'Etat ou territoriale, le renforcement des actions de formation et
professionnalisation ainsi que la validation de l'expérience professionnelle.
Chacun s'en souvient, la validation de l'expérience professionnelle est un
volet de la réforme de la formation qui a été totalement soutenue par la Haute
Assemblée.
Pour les employeurs, en particulier les associations, le dispositif
d'appui-conseil sera largement mobilisé puisque ces crédits d'ingénierie ont
été doublés.
Vous l'avez rappelé, les associations sont devenues le premier employeur du
programme. Je veux donc dire ce que le Gouvernement a prévu concrètement pour
les accompagner.
D'une part, une mesure d'épargne consolidée est destinée aux associations qui
ont déjà commencé à avoir une activité marchande mais de manière encore
insuffisante. Pour les aider à faire face à l'arrêt de l'aide de l'Etat au bout
de cinq ans, nous leur proposons de reporter une partie de ce qu'elles auraient
dû percevoir sur trois années ultérieures. En complément de cet effort
d'épargne, une prime de 100 000 francs par emploi durant les mêmes trois années
supplémentaires est accordée. Une association dispose ainsi de huit ans pour se
préparer progressivement à équilibrer ses comptes.
D'autre part, l'Etat vient également en aide aux associations qui n'ont pas
commencé à avoir une activité marchande et qui sont en difficulté. Nous allons
les accompagner avec une aide complémentaire de 70 000 francs par an sur trois
ans au moyen de conventions pluriannuelles.
En outre, l'Etat et la Caisse des dépôts et consignations ont signé hier une
convention dont l'objectif est de mobiliser les acteurs locaux pouvant
contribuer à la consolidation des services, y compris financièrement. La Caisse
des dépôts consacrera 43 millions d'euros sur trois ans à cet objectif.
(Applaudissements sur les travées socialistes. - Mme Luc applaudit
également.)
M. le président.
Mes chers collègues, nous en avons terminé avec les questions d'actualité au
Gouvernement.
Nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize
heures quinze.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous
la présidence de M. Adrien Gouteyron.)