SEANCE DU 14 NOVEMBRE 2001
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. ADRIEN GOUTEYRON
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Financement de la sécurité sociale pour 2002.
- Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
1
).
Article 1er bis (p. 2 )
Amendement n° 72 de M. Jean Chérioux. - MM. Jean Chérioux, Alain Vasselle,
rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres généraux
et l'assurance maladie ; Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 1er ter (p. 3 )
MM. Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre délégué.
Adoption de l'article.
Articles 1er
quater
et 2. - Adoption (p.
4
)
Article 2
bis
(p.
5
)
Amendement n° 59 de M. Alain Gournac. - MM. Alain Gournac, Alain Vasselle,
rapporteur ; le ministre délégué. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 3 (p. 6 )
Amendements n°s 44 rectifié de M. Philippe Arnaud, 63 de M. Bernard Murat et 42
de M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis. - MM. Philippe Arnaud, Bernard
Murat, Alain Joyandet, rapporteur pour avis de la commission des finances ;
Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre délégué, Jean Arthuis, Jean-Louis
Masson, Dominique Leclerc, Jean-Pierre Raffarin. - Retrait des amendements n°s
44 rectifié et 63 ; adoption de l'amendement n° 42.
Amendement n° 43 de M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 3 bis (p. 7 )
MM. Gérard César, Roland Courteau.
Amendement n° 53 du Gouvernement. - MM. le ministre délégué, Alain Vasselle,
rapporteur. - Rejet.
Adoption de l'article.
Article additionnel après l'article 3 bis (réservé) (p. 8 )
Amendement n° 2 de la commission. - MM. Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre délégué. - Réserve.
Article 3 ter (p. 9 )
M. Gilbert Chabroux.
Amendement n° 123 de M. Jean-Paul Emorine. - MM. Jean-Pierre Raffarin, Alain
Vasselle, rapporteur ; Mme Ségolène Royal, ministre déléguée à la famille, à
l'enfance et aux personnes handicapées ; M. Nicolas About, président de la
commission des affaires sociales. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
3.
Souhaits de bienvenue à une délégation de parlementaires hongrois
(p.
10
).
4.
Financement de la sécurité sociale pour 2002.
- Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
11
).
Article additionnel après l'article 3 ter (p. 12 )
Amendement n° 45 de M. Serge Franchis. - MM. Serge Franchis, Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres généraux et l'assurance maladie ; Mme Ségolène Royal, ministre déléguée à la famille, à l'enfance et aux personnes handicapées. - Retrait.
Article 4 (p. 13 )
Amendement n° 3 rectifié de la commission. - M. Alain Vasselle, rapporteur ; Mme le ministre déléguée, MM. Gilbert Chabroux, Jean-Pierre Fourcade. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article additionnel après l'article 3 bis (suite) (p. 14 )
Amendement n° 2 rectifié (précédemment réservé) de la commission. - Mme le ministre déléguée, Alain Joyandet, au nom de la commission des finances. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Articles additionnels après l'article 4 (p. 15 )
Amendement n° 80 de M. Guy Fischer. - MM. Guy Fischer, Alain Vasselle,
rapporteur ; Mme le ministre déléguée. - Rejet.
Amendement n° 95 de M. Guy Fischer. - MM. Guy Fischer, Alain Vasselle,
rapporteur ; Mme le ministre déléguée. - Rejet.
Amendement n° 94 de M. Guy Fischer. - MM. Roland Muzeau, Alain Vasselle,
rapporteur ; Mme le ministre déléguée, M. Michel Charasse. - Rejet.
Amendement n° 82 de M. Guy Fischer. - MM. Roland Muzeau, Alain Vasselle,
rapporteur ; Mme le ministre déléguée. - Rejet.
Article 4
bis.
- Adoption (p.
16
)
Article 5 (p.
17
)
MM. Gilbert Chabroux, Alain Gournac, Mme Marie-Claude Beaudeau.
Amendement n° 4 de la commission. - M. Alain Vasselle, rapporteur ; Mme le
ministre déléguée, M. Jean Chérioux. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 6 (p. 18 )
Amendements identiques n°s 5 de la commission et 46 de Mme Annick Bocandé. - MM. Alain Vasselle, rapporteur ; Jean-Louis Lorrain, Mme le ministre déléguée, MM. Jean Chérioux, Eric Doligé. - Adoption des deux amendements rédigeant l'article.
Article 6 bis (p. 19 )
M. Jean-Louis Masson.
Amendement n° 6 de la commission. - M. Alain Vasselle, rapporteur ; Mme le
ministre déléguée. - Adoption.
Amendement n° 68 de M. Michel Charasse. - MM. Michel Charasse, Alain Vasselle,
rapporteur ; Mme le ministre déléguée. - Rejet.
Suspension et reprise de la séance (p. 20 )
Amendement n° 41 rectifié de M. François Gerbaud. - MM. Jean-Louis Masson,
Alain Vasselle, rapporteur ; Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé. -
Rejet.
Adoption de l'article modifié.
Article 7. - Adoption (p.
21
)
Article additionnel avant l'article 10 A (p.
22
)
Amendement n° 86 de M. Guy Fischer. - MM. Guy Fischer, Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre délégué. - Rejet.
Article 10 A (p. 23 )
M. Bernard Cazeau.
Amendements identiques n°s 7 de la commission et 47 de Mme Annick Bocandé. - M.
Alain Vasselle, rapporteur ; Mme Annick Bocandé, MM. le ministre délégué, Paul
Blanc, Guy Fischer. - Adoption des deux amendements rédigeant l'article.
Article 10 (p. 24 )
Amendements identiques n°s 8 de la commission et 96 de M. François Autain. -
MM. Alain Vasselle, rapporteur ; Guy Fischer, le ministre délégué. - Adoption
des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 11 (p. 25 )
Amendement n° 9 de la commission. - MM. Alain Vasselle, rapporteur ; le
ministre délégué, Bernard Cazeau, Dominique Leclerc, Alain Joyandet. -
Adoption.
5.
Communication relative à une commission mixte paritaire
(p.
26
).
Suspension et reprise de la séance (p. 27 )
PRÉSIDENCE DE M. DANIEL HOEFFEL
6. Financement de la sécurité sociale pour 2002. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 28 ).
Article 11 (suite) (p. 29 )
Amendement n° 10 de la commission. - M. Alain Vasselle, rapporteur de la
commission des affaires sociales pour les équilibres généraux et l'assurance
maladie ; Mme Ségolène Royal, ministre déléguée à la famille, à l'enfance et
aux personnes handicapées. - Adoption.
Amendement n° 93 rectifié de M. André Lardeux. - MM. André Lardeux, Alain
Vasselle, rapporteur ; Mme le ministre déléguée. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 11 bis (p. 30 )
Amendements n°s 11 de la commission et 97 de M. Guy Fischer. - MM. Alain Vasselle, rapporteur ; Guy Fischer, Mme le ministre déléguée. - Adoption de l'amendement n° 11 supprimant l'article, l'amendement n° 97 devenant sans objet.
Article 11
ter.
- Adoption (p.
31
)
Article 12 (p.
32
)
Amendement n° 12 de la commission. - M. Alain Vasselle, rapporteur ; Mme le ministre déléguée. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 12
bis.
- Adoption (p.
33
)
Article 13 (p.
34
)
MM. Paul Blanc, Guy Fischer, Bernard Cazeau, Michel Mercier.
Amendement n° 92 rectifié du Gouvernement ; amendements identiques n°s 13 de la
commission et 48 de Mme Annick Bocandé ; amendement n° 14 de la commission. -
Mme le ministre déléguée, MM. Alain Vasselle, rapporteur ; Jean-Louis Lorrain,
Mme Nicole Borvo. - Retrait des amendements n°s 13, 14 et 48 ; adoption de
l'amendement n° 92 rectifié rédigeant l'article.
Article 14 (p. 35 )
Amendements n°s 15 et 16 de la commission. - M. Alain Vasselle, rapporteur ;
Mme le ministre déléguée, MM. Bernard Cazeau, Guy Fischer, Alain Joyandet,
Michel Mercier. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 14 (p. 36 )
Amendement n° 99 de M. Guy Fischer. - MM. Guy Fischer, Alain Vasselle, rapporteur ; Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé. - Rejet.
Article 15 (p. 37 )
Amendement n° 17 de la commission. - MM. Alain Vasselle, rapporteur ; le
ministre délégué. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 15
bis.
- Adoption (p.
38
)
Article 15
ter
(p.
39
)
Amendements n°s 18 et 19 de la commission. - MM. Alain Vasselle, rapporteur ;
le ministre délégué. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 16 (p. 40 )
Amendement n° 20 de la commission. - MM. Alain Vasselle, rapporteur ; le
ministre délégué. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 16 (p. 41 )
Amendement n° 40 de M. Michel Charasse. - MM. Michel Charasse, Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre délégué, André Lardeux, Alain Joyandet, Paul Blanc, Michel Mercier, Bernard Cazeau. - Rejet.
Article 17 (p. 42 )
Amendements n°s 100 de M. Guy Fischer et 119 de la commission. - MM. Guy
Fischer, Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre délégué. - Rejet de
l'amendement n° 100 ; adoption de l'amendement n° 119.
M. Serge Franchis.
Adoption de l'article modifié.
Article 18 (p. 43 )
Amendement n° 21 de la commission. - MM. Alain Vasselle, rapporteur ; le
ministre délégué. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 18 (p. 44 )
Amendements n°s 57 de M. Jean-Claude Carle, 71 de M. Bernard Murat, 102 de M.
Guy Fischer et 70 de M. Dominique Braye. - MM. Jean-Claude Carle, Paul Blanc,
Guy Fischer, Alain Vasselle, rapporteur ; le ministre délégué, Alain Joyandet,
au nom de la commission des finances. - Irrecevabilité des amendements n°s 57,
71 et 102 ; adoption de l'amendement n° 70 insérant un article additionnel.
Amendement n° 91 du Gouvernement. - MM. le ministre délégué, Alain Vasselle,
rapporteur ; Jean-Louis Lorrain. - Rejet.
Renvoi de la suite de la discussion.
7.
Dépôt d'une proposition de résolution
(p.
45
).
8.
Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
(p.
46
).
9.
Renvoi pour avis
(p.
47
).
10.
Dépôts de rapports
(p.
48
).
11.
Ordre du jour
(p.
49
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
Présidence de M. Adrien Gouteyron
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1
Procès-verbal
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
Financement de la sécurité sociale
pour 2002
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 2002, adopté par l'Assemblée nationale
(n° 53, 2001-2002). [Rapport n° 60 (2001-2002) et avis n° 61 (2001-2002).]
La discussion générale a été close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que l'article 1er a été réservé jusqu'à la fin de la discussion
des articles.
Nous abordons donc l'examen de l'article 1er
bis
.
TITRE Ier bis
CONTRÔLE DE L'APPLICATION DES LOIS
DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Article 1er bis
M. le président.
« Art. 1er
bis
. - Après l'article LO 111-7 du code de la sécurité
sociale, il est inséré un article L. 111-8 ainsi rédigé :
«
Art. L. 111-8
. - Les commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat
chargées des affaires sociales et les autres commissions concernées adressent
des questionnaires relatifs à l'application des lois de financement de la
sécurité sociale au Gouvernement, avant le 10 juillet de chaque année. Celui-ci
y répond par écrit au plus tard le 8 octobre. »
L'amendement n° 72, présenté par M. Chérioux, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit la première phrase du texte proposé par l'article 1er
bis
pour l'article L. 111-8 du code de la sécurité sociale :
« En vue de l'examen et du vote du projet de loi de financement de la sécurité
sociale, et sans préjudice de toute autre disposition relative à l'information
et au contrôle du Parlement, les commissions de l'Assemblée nationale et du
Sénat chargées des affaires sociales et les autres commissions concernées
adressent des questionnaires au Gouvernement, avant le 10 juillet de chaque
année. »
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Il s'agit d'un amendement de précision, mais il est important.
En effet, l'Assemblée nationale a pris l'initiative, qui est d'ailleurs la
bienvenue, de reprendre les termes de la loi organique du 1er août 2001
relative aux lois de finances dans l'un de ses articles, l'article 49, qui
d'ailleurs, relève davantage d'une loi ordinaire. Dans un cas comme dans
l'autre, il s'agit d'imposer au Gouvernement un délai limite de réponse aux
questionnaires envoyés par le Parlement. Cette précision est loin d'être
inutile.
Une bonne conception des textes de loi conduit à rechercher une harmonisation
des rédactions, quand cela est possible, pour éviter que les lecteurs ne soient
amenés à interpréter des différences qui n'ont pas lieu d'être. C'est le cas
qui nous intéresse.
Ainsi le présent amendement colle-t-il au plus près à la rédaction de
l'article 49 de la loi du 1er août 2001 en précisant que le questionnaire de
juillet n'épuise pas les autres prérogatives de questionnement des rapporteurs
des lois de financement de la sécurité sociale. Il procède en quelque sorte à
un renvoi à l'article 1er
ter
ci-après, également introduit par
l'Assemblée nationale. C'est l'objet de l'expression : « sans préjudice », qui
est très importante.
Toujours dans un souci de parallélisme, l'amendement précise que le
questionnaire est établi « en vue de l'examen et du vote du projet de loi de
financement de la sécurité sociale ». Tel est bien l'objet du questionnaire de
juillet, qui prépare la discussion du projet de loi, laquelle aura lieu à
l'automne, et c'est la raison pour laquelle l'article 1er
bis
prévoit un
délai de réponse impératif.
De cette façon, les services ne pourront pas se cacher derrière une prétendue
différence entre les deux textes pour ne pas répondre, alors qu'ils en ont
l'obligation, aux questionnaires envoyés par la commission des affaires
sociales de notre assemblée.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres généraux
et l'assurance maladie.
La commission des affaires sociales a analysé avec
grand intérêt l'amendement de M. Chérioux, et, je le dis sans plus attendre,
elle m'a chargé d'émettre un avis favorable.
L'amendement de M. Chérioux nous paraît effectivement apporter une précision
tout à fait utile à la rédaction initialement proposée pour l'article 1er
bis
. C'est donc sans aucune appréhension ni difficulté que nous
encourageons la Haute Assemblée à adopter cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué à la santé.
Cet amendement appelle de la part du
Gouvernement deux remarques.
Premièrement, il n'était pas nécessaire de préciser qu'un amendement déposé à
la Haute Assemblée, surtout lorsqu'il l'est par vous, monsieur Chérioux, était
important, car nous en étions évidemment persuadés.
(Sourires.)
Deuxièmement, comme le Gouvernement était favorable à l'amendement
parlementaire qui avait introduit cette nécessité, exposée avec force par M.
Chérioux, il va de soi que, pour l'amendement n° 72, il s'en remettra à la
sagesse du Sénat.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 72, accepté par la commission et pour lequel
le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. Jean Chérioux.
Je constate que cet amendement a été adopté à l'unanimité !
M. le président.
Je mets aux voix l'article 1er
bis,
modifié.
(L'article 1er
bis
est adopté.)
Article 1er ter
M. le président.
« Art. 1er
ter
. - I. - Après l'article LO 111-7 du code de la sécurité
sociale, il est inséré un article L. 111-9 ainsi rédigé :
«
Art. L. 111-9
. - Les membres du Parlement qui ont la charge de
présenter, au nom de la commission compétente, le rapport sur les projets de
loi de financement de la sécurité sociale suivent et contrôlent, sur pièces et
sur place, l'application de ces lois auprès des administrations de l'Etat, des
organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole, de tout autre
organisme privé gérant un régime de base de sécurité sociale légalement
obligatoire et des établissements publics compétents. Réserve faite des
informations couvertes par le secret de la défense nationale ou le secret
médical, tous les renseignements d'ordre financier et administratif de nature à
faciliter leur mission doivent leur être fournis. Ils sont habilités à se faire
communiquer tout document de quelque nature que ce soit. »
« II. - L'article 2 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997
(n° 96-1160 du 27 décembre 1996) est abrogé. »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers
collègues, vous me permettrez de me livrer à quelques considérations sur cet
article 1er
ter.
Il vise à renforcer les pouvoirs de contrôle sur pièces et sur place des
membres du Parlement chargés de présenter, au nom de la commission compétente,
le rapport sur les projets de loi de financement de la sécurité sociale.
Les dispositions de cet article ne nous sont pas étrangères, puisque j'ai eu
l'occasion, en ma qualité, à l'époque, de rapporteur pour la branche
vieillesse, de les utiliser pour aller juger sur pièces et sur place, au
ministère des finances et au ministère des affaires sociales, toutes les
questions liées au fonds de réserve des retraites ainsi qu'à l'ensemble du
dispositif législatif qui avait été inséré dans la loi de financement et dont
nous ne retrouvions pas les effets.
Bien nous en a pris, au demeurant, car cela nous a permis de sensibiliser
l'opinion publique aux positions que défendait auprès des ministres
l'administration des différents ministères, administration qui ne semblait pas
vouloir donner à notre demande la suite qui nous paraissait souhaitable. Nous
avons donc déjà une certaine expérience en la matière, ce qui nous rend
particulièrement sensibles à l'initiative que l'Assemblée nationale a prise en
adoptant l'article 1er
ter.
Cependant, le dispositif de l'article ne suffira probablement pas à modifier
substantiellement les conditions dans lesquelles se déroule le contrôle sur
pièces et sur place, qui, au-delà des textes, relève souvent d'un rapport de
forces politique. Notre ancien collègue M. Descours et moi-même avons pu le
constater, le 8 mars dernier, lors du contrôle que je viens d'évoquer : ainsi,
lorsque nous nous sommes rendus à la direction de la sécurité sociale pour
contrôler le financement du fonds de réserve des retraites, nous nous sommes vu
refuser la communication de certains documents, refus justifié, selon le
directeur de la sécurité sociale, par des instructions ministérielles reçues en
ce sens.
Je ne saurais donc trop engager le Gouvernement à prendre conscience que les
rapporteurs effectuant ces contrôles dans les administrations placées sous la
responsabilité des ministres sont investis de ces pouvoirs au nom du peuple
français, qui les mandate afin de connaître l'utilisation des sommes
importantes consacrées au financement de la protection sociale.
Je n'irai pas jusqu'à faire un procès d'intention à Mme Guigou, mais je dois
reconnaître que ses services nous ont réservé un accueil frileux et que nous
avons dû faire face à une certaine rétention de documents de la part du
directeur - qui avait peut-être reçu des instructions directes. Lorsque nous
nous sommes rendus au ministère des finances, dirigé par M. Fabius, tous les
hauts fonctionnaires, sans aucune hésitation, nous ont livré toute la
documentation qu'ils possédaient.
De fait, nous avons fait l'objet d'un traitement et d'un comportement tout à
fait différents de la part de ces deux ministères. Je souhaite que nous ne
soyons pas de nouveau confrontés à une telle situation.
Monsieur le ministre, je suis persuadé que vous saurez tirer les enseignements
utiles de cet épisode et faire en sorte que le bon usage de cette disposition
ne souffre aucune difficulté pour le Parlement lorsqu'il effectue les missions
de contrôle dont la loi l'investit.
M. le président.
Je mets aux voix l'article 1er
ter
.
(L'article 1er
ter
est adopté.)
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je n'ai pas voulu intervenir avant le vote de cet
article 1er
ter
, mais je comprends votre courroux, monsieur le
rapporteur.
Cependant, je veux me faire ici l'avocat sincère de la direction de la
sécurité sociale. Certes, elle doit vous communiquer tous les documents
nécessaires, comme l'a fait le ministère des finances, à l'exception toutefois
de ceux qui n'ont pas encore fait l'objet d'un arbitrage. C'est pour cette
raison que certains documents n'ont pu vous être fournis, ainsi le veut la
coutume. Il ne s'agit nullement d'une discrimination à votre égard ou à l'égard
de la Haute Assemblée : on attend l'arbitrage pour les communiquer. Je suis
désolé de cette contrainte qui vous a été imposée.
Article 1er quater
M. le président.
« Art. 1er
quater
. - I. - Après l'article LO 111-7 du code de la
sécurité sociale, il est inséré un article L. 111-10 ainsi rédigé :
«
Art. L. 111-10
. - Lorsqu'il prend le décret visé à l'article LO
111-5, le Gouvernement dépose devant le Parlement, dans un délai de quinze
jours, un rapport présentant les raisons du dépassement des limites prévues au
5° du I de l'article LO 111-3 et justifiant l'urgence qui exige ce recours à la
voie réglementaire. »
« II. - L'article 8 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997
(n° 96-1160 du 27 décembre 1996) est abrogé. »
- (Adopté.)
TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
Article 2
M. le président.
« Art. 2. - I. - Le V de l'article 41 de la loi de financement de la sécurité
sociale pour 1999 (n° 98-1194 du 23 décembre 1998) est complété par un alinéa
ainsi rédigé :
« L'indemnité de cessation anticipée d'activité versée en application d'une
convention collective de branche, d'un accord professionnel ou
interprofessionnel, d'un accord d'entreprise, du contrat de travail ou d'une
disposition unilatérale de l'employeur est exclue de l'assiette des cotisations
sociales dans les mêmes conditions que l'indemnité légale mentionnée à l'alinéa
précédent. »
« II. - Les dispositions du I sont applicables aux indemnités payées depuis la
date d'entrée en vigueur de l'article 41 de la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1999 précitée. »
- (Adopté.)
Article 2 bis
M. le président.
« Art. 2
bis
. - I. - Dans le premier alinéa du III de l'article L.
241-10 du code de la sécurité sociale, les mots : "aux
b, c, d
et
e
du" sont remplacés par le mot : "au".
« II. - La perte de recettes est compensée par la création d'une taxe
additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
L'amendement n° 59, présenté par MM. Gournac et Murat, est ainsi libellé :
« Compléter l'article 2
bis
par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Le
d
du I de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale
est ainsi rédigé :
«
d)
Des personnes se trouvant, dans des conditions définies par
décret, dans l'obligation de recourir à l'assistance d'une tierce personne pour
accomplir les actes ordinaires de la vie et ayant dépassé un âge fixé par
décret. »
La parole est à M. Gournac.
M. Alain Gournac.
Les personnes âgées d'au moins soixante ans et incapables d'accomplir seules
les actes ordinaires de la vie sont exonérées de cotisations patronales de
sécurité sociale afférentes à l'emploi d'une aide à domicile. Encore faut-il
qu'elles perçoivent soit un avantage de vieillesse, soit une pension
d'invalidité servie par un régime spécial ou en application du code des
pensions militaires.
Or, bien que le cas soit peu fréquent, il existe des personnes qui, âgées d'au
moins soixante ans et incapables d'accomplir seules les actes ordinaires de la
vie, ne perçoivent cependant aucune des allocations précitées.
Le présent amendement tend donc à supprimer la condition de perception de ces
allocations. L'exonération attachée à l'emploi d'une aide à domicile sera
accordée aux personnes âgées d'au moins soixante ans sans autre condition que
celle de leur incapacité à accomplir seules les actes ordinaires de la vie.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
MM. Alain Gournac et Murat ont fait preuve de perspicacité en
soulignant la faiblesse du dispositif législatif actuel. C'est donc à juste
raison qu'ils ont proposé cet amendement, qui répond à un souci de
simplification des exonérations liées à l'aide à domicile.
L'amendement ne peut donc que recueillir l'assentiment de la commission, et
j'espère que la Haute Assemblée l'adoptera à l'unanimité.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le fait est rare, mais certaines personnes de plus de
soixante ans dont la dépendance est établie ne peuvent en effet prétendre à
l'exonération des charges patronales de sécurité sociale au simple motif
qu'elles ne perçoivent pas un avantage de vieillesse ou une pension
d'invalidité.
Votre amendement, monsieur le sénateur, est donc légitime, d'autant qu'il
induira un allégement des formalités pour l'ensemble des personnes de plus de
soixante ans.
J'en profite pour souligner que
a contrario
je suis très réservé à
l'égard du I de l'article 2
bis.
Les organismes d'aide à domicile
bénéficieront pour leurs interventions auprès des personnes âgées d'au moins
soixante-dix ans, d'un avantage comparable à celui dont elles disposent
lorsqu'elles interviennent chez les personnes dépendantes. C'est là une
identité de traitement qui, de notre point de vue, ne se justifie pas.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 59, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 2
bis,
modifié.
(L'article 2
bis
est adopté.)
Article 3
M. le président.
« Art. 3. - I. - L'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale est
complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« 22° Les dirigeants des associations remplissant les conditions prévues au
deuxième alinéa du
d
du 1° du 7 de l'article 261 du code général des
impôts ;
« 23° Les présidents et dirigeants des sociétés par actions simplifiées, dans
les conditions applicables aux gérants de sociétés à responsabilité limitée et
aux gérants de sociétés d'exercice libérale à responsabilité limitée ; »
« II. - Après le 8° de l'article L. 722-20 du code rural, sont insérés deux
alinéas ainsi rédigés :
« 9° Lorsque les sociétés dont ils sont les dirigeants relèvent des
dispositions des 1° à 4° de l'article L. 722-1, présidents et dirigeants des
sociétés par actions simplifiées dans les conditions applicables aux gérants
des sociétés à responsabilité limitée visées au 8° ;
« 10° Dirigeants des associations ayant un objet agricole, remplissant les
conditions prévues au deuxième alinéa du
d
du 1° du 7 de l'article 261
du code général des impôts. »
Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 55, présenté par M. Raffarin, est ainsi libellé :
« I. - Supprimer le second alinéa (23°) du texte proposé par le I de l'article
3 pour compléter l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale.
« II. - En conséquence, à la fin du premier alinéa du I de l'article 3,
remplacer les mots : "deux alinéas ainsi rédigés" par les mots : "un alinéa
ainsi rédigé". »
L'amendement n° 65, présenté par M. Masson, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le second alinéa (23°) du texte proposé par le I de l'article
3 pour compléter l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale :
« 23° Les présidents et dirigeants des sociétés par actions simplifiées et des
sociétés d'exercice libéral par actions simplifiées. »
L'amendement n° 44 rectifié, présenté par M. Arnaud et les membres du groupe
de l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le second alinéa (23°) du texte proposé par le I de l'article
3 pour compléter l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale :
« 23° Sauf si le dirigeant est majoritaire dans le capital et a opté pour le
régime des travailleurs indépendants, les présidents et dirigeants des sociétés
par actions simplifiées. »
L'amendement n° 63, présenté par MM. Murat, Gournac et Paul Blanc, est ainsi
libellé :
« Rédiger ainsi le second alinéa (23°) du texte proposé par le I de l'article
3 pour compléter l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale :
« 23° Les présidents et dirigeants des sociétés par actions simplifiées, qui
n'auront pas opté pour le régime applicable aux gérants de sociétés à
responsabilité limitée et aux gérants de société d'exercice libérale à
responsabilité limitée, dans des conditions définies par décret. »
L'amendement n° 42, présenté par M. Joyandet, au nom de la commission des
finances, est ainsi libellé :
« Après les mots : "des sociétés par actions simplifiées", supprimer la fin du
second alinéa (23°) du texte proposé par le I de l'article 3 pour compléter
l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale. »
Les amendements n°s 55 et 65 ne sont pas soutenus.
La parole est à M. Arnaud, pour défendre l'amendement n° 44 rectifié.
M. Philippe Arnaud.
Le 23° de l'article 3 vise, purement et simplement, à supprimer la possibilité
pour les présidents et les dirigeants des sociétés par actions simplifiées, les
SAS, de relever du régime général.
Il faut rappeler que les SAS ont été instaurées pour favoriser la mise en
société d'un certain nombre d'entreprises en évitant la lourdeur des sociétés
anonymes.
L'amendement n° 44 rectifié tend donc à laisser aux présidents et dirigeants
des SAS la faculté d'opter soit pour le régime général, soit pour le régime des
travailleurs non salariés.
Si cette faculté était trop complexe à mettre en oeuvre - ce dont je doute -
nous demanderions, à l'instar de la commission des finances et des auteurs des
amendements n°s 55 et 65, le maintien de la situation antérieure, afin que les
présidents et dirigeants des SAS puissent continuer à bénéficier du régime
général, conformément aux directives du ministère de la solidarité de 1995 et à
l'analyse de l'URSSAF.
M. le président.
La parole est à M. Murat, pour présenter l'amendement n° 63.
M. Bernard Murat.
Cet amendement a pour objet de conserver le caractère novateur des sociétés
par actions simplifiées, dont les conditions d'exercice ont été modifiées par
la loi du 12 juillet 1999 sur l'innovation et la recherche.
Pour des raisons d'efficacité économique, il est proposé de ne pas faire
dépendre le statut social des présidents et dirigeants des SAS de la détention
d'un pourcentage du capital et de leur laisser la possibilité d'opter soit pour
l'affiliation au régime général, soit pour l'affiliation au régime des
travailleurs indépendants.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n°
42.
M. Alain Joyandet,
rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
L'article 3 vise à donner une base
légale à l'affiliation des présidents et dirigeants de sociétés par actions
simplifiées à un régime de sécurité sociale. Toutefois, la commission des
finances conteste le choix du Gouvernement, qui tend à les soumettre au même
régime social que les gérants de sociétés à responsabilité limitée.
Je sais bien, monsieur le ministre, que la commission des affaires sociales et
la commission des finances ont, sur ce sujet, une approche quelque peu
différente - M. le rapporteur de la commission des affaires sociales le dira
sans doute - ce qui ne simplifie pas forcément les choses ; le débat est
ouvert.
Quant à elle, la commission des finances préférerait que les présidents de SAS
et les présidents d'association aient automatiquement accès au régime des
salariés. La solution consistant à leur laisser une option est, certes, très
intéressante, mais elle ne correspond ni à l'usage ni au droit de la sécurité
sociale et serait sans doute source de difficultés.
En tout état de cause, j'attire votre attention, mes chers collègues, sur le
fait que voter conforme le texte de l'Assemblée nationale aurait deux
inconvénients majeurs.
D'abord, les dirigeants majoritaires de SAS, aujourd'hui affiliés au régime
des travailleurs salariés, seraient contraints de changer de régime.
Ensuite, en contradiction avec les directives visant à simplifier les
créations des sociétés, y compris des très petites sociétés, des PME ou des
PMI, nous alourdirions considérablement le système.
L'amendement n° 42 présente, me semble-t-il, l'avantage de conserver à
celui-ci sa simplicité, y compris pour les dirigeants majoritaires des SAS, et
de ne pas contraindre ceux qui sont affiliés au régime général à basculer dans
le régime des travailleurs indépendants.
On parle beaucoup de la rétroactivité des textes. On voudrait maintenant
changer les règles d'affiliation de dirigeants d'entreprises qui, lors de la
création de celles-ci, ont certainement pris en compte le fait qu'ils
pourraient être affiliés au régime général !
La moins bonne des solutions consisterait cependant à voter le texte conforme,
car, sans navette, toute possibilité de mise au point ultérieure nous serait
ôtée.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 44 rectifié, 63 et 42
?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
L'article 3 prévoit que les dirigeants majoritaires des
sociétés par actions simplifiées basculent automatiquement dans le régime des
travailleurs indépendants. En revanche, s'ils sont actionnaires minoritaires,
ils restent affiliés, ou le deviennent, au régime général.
Tels seraient les résultats de l'application stricte de cet article si le
Sénat l'adoptait conforme. Toute une série d'amendements nous est cependant
proposée.
L'amendement n° 44 rectifié ouvre un droit d'option en laissant aux dirigeants
la possibilité de choisir l'un ou l'autre des régimes. Or nous savons
pertinemment que le régime général est plus intéressant que ne l'est celui des
travailleurs indépendants. C'est tout au moins le sentiment de la plupart des
dirigeants de SAS concernés, et il devrait les conduire à s'orienter plutôt
vers le régime général.
Cependant, leur ouvrir cette option, c'est mettre en difficulté les régimes de
l'ORGANIC, l'organisation autonome nationale d'assurance vieillesse de
l'industrie et du commerce, de la CANCAVA, la caisse autonome nationale de
compensation de l'assurance vieillesse artisanale, et de la CANAM, la caisse
d'assurance maladie des non-salariés non agricoles, car la perte d'une partie
de leurs adhérents leur poserait des problèmes de gestion.
C'est la raison pour laquelle il n'a pas été facile de trancher au fond sur
l'ensemble des amendements qui nous ont été proposés.
Après le large débat qui s'est développé en son sein, la commission des
affaires sociales a finalement estimé que le plus sage était d'en rester à une
forme de
statu quo
qui respecte la rédaction de l'article 3 telle
qu'elle résulte des travaux de l'Assemblée nationale : les actionnaires
majoritaires basculeront dans le régime des travailleurs indépendants, alors
que les actionnaires minoritaires seront affiliés au régime général.
La commission des affaires sociales n'a donc pas émis de façon très nettement
majoritaire un avis favorable sur les amendements n°s 44 rectifié et 63, non
plus que sur l'amendement n° 43 qui suivra.
Ces mêmes explications donnent les raisons pour lesquelles elle n'a pas
davantage souhaité suivre la commission des finances ; elle n'a donc pas émis
un avis favorable sur l'amendement n° 42.
On comprend, certes, l'objectif et l'intention des auteurs des amendements. M.
Masson notamment, lorsqu'il a défendu l'amendement n° 65 au sein de la
commission, a fait valoir qu'il n'était pas compréhensible que, depuis
plusieurs années - pour ne pas parler de décennies - le problème de
l'instauration sur le plan national d'un régime unique pour l'ensemble des
actifs, qu'ils soient travailleurs indépendants, salariés ou non-salariés, soit
posé.
La plupart des membres de la commission des affaires sociales considèrent que
l'adoption d'un amendement du type de celui qui est défendu par notre collègue
Philippe Arnaud ne saurait autoriser le Gouvernement à éluder une réflexion de
fond globale sur l'intégration progressive de certains régimes spéciaux dans le
régime général, selon un échéancier qui resterait à définir. Aujourd'hui, le
Gouvernement propose un dispositif qui ne règle en rien ce problème patent et
récurrent.
M. Alain Gournac.
Absolument !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
J'ai donc été invité à attirer, en ma qualité de rapporteur,
l'attention du Gouvernement sur le fait que le texte qu'il propose n'apporte
pas de solution de fond. Il serait souhaitable qu'il nous fasse connaître
quelles sont ses perspectives en la matière. Les bénéficiaires des régimes
spéciaux peuvent-ils espérer un alignement entre leur régime et le régime
général ? Une telle solution donnerait beaucoup plus de lisibilité à l'ensemble
du dispositif et conduirait peut-être à une meilleure maîtrise de la gestion
comptable des comptes de la sécurité sociale.
Quant à offrir, comme le propose M. Arnaud, un droit d'option aux dirigeants
de SAS, c'est ouvrir une brèche dans laquelle pourraient se précipiter de
nombreux ressortissants d'autres régimes spéciaux se fondant sur ce précédent.
On met ainsi en cause un principe fondamental auquel le Parlement n'a jamais
souhaité déroger. Le faire avant qu'une réflexion générale et globale ne soit
conduite sur le sujet serait dangereux.
En conclusion, nous comprenons bien les intentions et l'objectif visé, mais il
apparaît que les conditions ne sont pas réunies aujourd'hui pour que nous
puissions faire oeuvre utile. L'avis de la commission sur les amendements
proposés est donc réservé, voire défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 44 rectifié, 63 et 42
?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Ayant bien écouté et même compris, je tiens à le
souligner
(Sourires)
, les arguments de MM. Vasselle et Joyandet, je
voudrais indiquer que l'affiliation au régime général vise des personnes qui,
si elles ne sont pas nécessairement salariées au sens du code du travail, se
trouvent ou peuvent être présumées se trouver dans une certaine situation de
dépendance vis-à-vis de la structure où elles exercent leurs fonctions.
Ce postulat peut difficilement s'appliquer aux sociétés par actions
simplifiées : elles disposent d'une liberté d'organisation des pouvoirs plus
large que celle des sociétés anonymes et elles peuvent même comporter un seul
associé, qui détient alors la totalité du pouvoir. C'est pourquoi un traitement
semblable à celui qui est prévu pour les SARL, les sociétés à responsabilité
limitée, à savoir l'affiliation au régime général des dirigeants détenant au
plus la moitié des parts, affiliation en tant que travailleurs non salariés
dans le cas contraire, paraissait le plus adapté.
Je rappelle, en outre, que les régimes de travailleurs non salariés offrent
aujourd'hui, dans bien des cas, notamment en termes de remboursement des soins,
des prestations identiques à celles du régime général, pour des charges qui ne
sont pas plus élevées. Les responsables de ces régimes craignent d'ailleurs les
effets négatifs, sur leurs effectifs, d'une affiliation au régime général.
J'observe toutefois que, jusqu'à ce jour, sur le fondement d'instructions du
ministère de l'emploi et de la solidarité, les dirigeants de sociétés par
actions simplifiées ont été affiliés au régime général, même si ces
instructions ont été édictées à une époque où ces sociétés ne pouvaient être
formées par des personnes physiques.
Par ailleurs, ce sont essentiellement des sociétés anonymes qui se
transforment en sociétés par actions simplifiées, et certaines des obligations
attachées à la société par actions simplifiée, telles que la nomination
systématique d'un commissaire aux comptes ou l'obligation de libérer dès la
création la moitié d'un capital social d'au minimum 250 000 francs, alors qu'il
est de 50 000 francs pour les SARL, devraient limiter l'installation en société
par actions simplifiée des personnes ressortissant habituellement aux régimes
de travailleurs non salariés.
Cela étant, j'ai entendu l'invitation à réfléchir que m'a lancée M. Vasselle,
et je ne puis qu'être favorable à ce qu'une réflexion soit engagée.
En conclusion, tout en reconnaissant, monsieur Joyandet, la nécessité de
poursuivre la discussion, le Gouvernement se déclare favorable à l'amendement
n° 42 de la commission des finances et, par là même, défavorable aux
amendements n°s 44 rectifié et 63.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 44 rectifié.
M. Jean Arthuis.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Arthuis.
M. Jean Arthuis.
J'ai bien entendu les observations formulées par M. le ministre et par M.
Vasselle, mais je voudrais appeler tout particulièrement l'attention du Sénat
sur la nécessité de mettre un terme à ce qui constitue une hypocrisie
insupportable.
Je me souviens avoir rapporté, en 1985, le projet de loi relatif à
l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, l'EURL, et à
l'exploitation agricole à responsabilité limitée. A cette occasion, j'avais cru
pouvoir présenter un amendement prévoyant que les gérants majoritaires de SARL
pourraient bénéficier du régime général de la sécurité sociale.
Malheureusement, l'Assemblée nationale ne nous avait pas suivis. En outre, les
représentants de l'ORGANIC et de la CANCAVA m'avaient immédiatement expliqué
que ce qui prime, dans ce pays, ce n'est pas la qualité des instruments
juridiques que l'on met à la disposition des dirigeants d'entreprise, c'est
l'équilibre d'institutions qu'il ne faut en aucune façon faire évoluer.
Autrement dit, les entreprises sont au service de l'ORGANIC, de la CANCAVA et
des caisses de retraite ! Voilà comment on tue l'esprit d'entreprise !
Dans ces conditions, on suscite l'hypocrisie : ainsi, pour être gérant
minoritaire tout en bénéficiant du régime des travailleurs salariés, on cède
des parts à des associés complaisants. Comment pouvons-nous être complices de
cette turpitude ? Juridiquement, l'opération est fondée et irréprochable. Elle
donne du travail aux conseillers juridiques et à un certain nombre de
consultants. Mais c'est une absurdité !
Je voudrais donc que le Sénat aide le monde de l'entreprise à sortir de cette
hypocrisie. En effet, à l'heure actuelle, pour échapper au régime des gérants
majoritaires de SARL, on crée des sociétés anonymes comprenant sept
actionnaires, dont l'un détient 99,93 % des parts, les six autres possédant
chacun une seule action : le premier peut alors, tout en étant majoritaire,
bénéficier du régime des travailleurs salariés. C'est une hypocrisie !
Les personnes concernées ont compris que la société par actions simplifiée
était une forme juridique plus favorable que la société anonyme de type
classique : c'est là un progrès considérable ! De bonne foi, elles ont alors
choisi de créer des SAS. Mais on leur dit maintenant qu'il faut passer à autre
chose encore ! Nous ne pouvons nous rendre complices de cette absurdité !
Par conséquent, je souhaite que le Sénat vote soit l'amendement n° 44
rectifié, présenté par M. Arnaud, soit l'amendement n° 42 de la commission des
finances. En tout cas, que l'on ne renvoie pas à l'Assemblée nationale un texte
comportant l'ineptie que je viens de dénoncer.
Certes, je comprends bien que le financement de l'ORGANIC et de la CANCAVA
pose problème, mais ne nous trompons pas d'objectif : nous devons mettre à la
disposition de ceux qui entreprennent des instruments juridiques qui leur
permettent de remplir leur mission, de créer des richesses et de l'emploi, et
ne pas tolérer cette espèce de recherche permanente d'assiettes de cotisations,
où l'on sollicite tantôt le régime général et tantôt celui des travailleurs
indépendants. A cet égard, je m'accommoderais mal d'une quelconque lâcheté de
la part du Parlement.
Je plaide donc, je le répète, pour que le Sénat vote l'amendement n° 44
rectifié de M. Arnaud ou l'amendement n° 42 de la commission des finances.
Mais, surtout, ne renvoyons pas à l'Assemblée nationale un texte identique à
celui qu'elle a voté !
M. Philippe Arnaud.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Arnaud.
M. Philippe Arnaud.
M. Arthuis a parfaitement développé les arguments qui fondent notre
proposition.
Cela étant, M. Vasselle a indiqué au Gouvernement qu'il convenait de
réfléchir, et il a ajouté que, dans l'immédiat, la commission des affaires
sociales demandait donc que l'on s'en tienne au
statu quo
.
Cependant, je souligne que la proposition du Gouvernement adoptée à
l'Assemblée nationale porte modification de la situation prévalant
antérieurement. Je souhaite donc que la commission des affaires sociales
précise qu'il s'agit bien ici du
statu quo
par rapport à cette situation
antérieure.
M. Alain Gournac.
Avant l'intervention de l'Assemblée nationale !
M. Philippe Arnaud.
M. le ministre ayant indiqué, sauf erreur de ma part, qu'il acceptait
l'amendement n° 42, ce qui permettra, dans un premier temps, de ne rien changer
à l'état actuel des choses et de laisser le temps au Gouvernement et aux
diverses instances d'approfondir la réflexion, je retirerai l'amendement n° 44
rectifié si M. Vasselle s'engage à soutenir la proposition de la commission des
finances.
M. Jean-Louis Masson.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Masson.
M. Jean-Louis Masson.
Comme je l'ai expliqué ce matin en commission, le vrai problème est, à mon
sens, de savoir s'il convient ou ou non de « geler » indéfiniment les
différents régimes spéciaux. Je pense que, à un moment donné, il faut évoluer.
Or, à chaque fois qu'il est annoncé qu'une réflexion va être engagée, on peut
être certain que cela ne débouchera sur rien, et, dix ans plus tard, on se
trouve toujours dans la même situation.
S'agissant du problème qui nous occupe, il me semble qu'un besoin de
changement se fait jour, et je ne suis absolument pas convaincu par
l'argumentation du Gouvernement.
En effet, M. le ministre nous a tout d'abord affirmé que, si les régimes
spéciaux perdaient certains de leurs affiliés, cela créerait des difficultés.
Cela prouve seulement que les régimes spéciaux ne sont pas satisfaisants et
qu'ils doivent donc évoluer !
Par ailleurs, M. le ministre nous a dit que, de toute manière, les régimes
spéciaux accordent à leurs ressortissants les mêmes prestations que le régime
général, pour un coût équivalent. S'il en est vraiment ainsi, il est bien
évident que personne ne changera de régime si l'on permet le choix.
En fait, les régimes spéciaux sont moins favorables - M. le ministre le sait
très bien - et c'est pourquoi l'on cherche à forcer la main aux affiliés qui
veulent les quitter. Cette situation ne me paraît pas saine du tout, et je
voterai donc tous les amendements ayant pour objet de la faire évoluer.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
J'ai bien entendu tous les arguments qui viennent d'être
soumis à la réflexion de la Haute Assemblée sur ce sujet très sensible, mais
qu'il me soit d'abord permis de m'étonner du soudain changement d'attitude du
Gouvernement.
Qui a rédigé l'article 3 du projet de loi de financement de la sécurité
sociale ? C'est bien le Gouvernement !
M. Alain Gournac.
Ce n'est pas nous !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Que l'on ne dise pas que c'est l'Assemblée nationale ou le
Sénat. C'est le Gouvernement lui-même qui a proposé que les dirigeants
majoritaires soient rattachés au régime des travailleurs indépendants et que
les dirigeants minoritaires soient affiliés au régime général.
Il s'agissait d'ailleurs de revenir sur une disposition antérieure qui n'était
pas de nature législative, puisque, jusqu'à présent, le régime d'affiliation
des dirigeants des SAS ne faisait l'objet d'aucune disposition législative :
seule une instruction ministérielle datant de 1995 prévoyait de les affilier
dans tous les cas au régime général.
Par conséquent, le Gouvernement, à l'article 3, a pris l'initiative
d'introduire dans le texte un dispositif...
M. Jean Arthuis.
Il a eu tort !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
... visant à modifier cette situation dans le sens que j'ai
indiqué.
Or j'apprends maintenant avec une certaine surprise que M. le ministre émet un
avis favorable sur un amendement de la commission des finances tendant à
rétablir la situation antérieure, à la seule nuance près que ce qui résultait
auparavant d'une instruction ministérielle sera désormais inscrit dans la loi !
Si c'était là l'objectif que visait le Gouvernement, il suffisait de le prévoir
d'emblée dans la rédaction initiale de l'article 3, lors de l'élaboration du
projet de loi.
L'attitude du Gouvernement à propos de ce dispositif nous semble donc quelque
peu incohérente.
Pour ma part, je n'ai pas à défendre une position plutôt qu'une autre, mon
rôle, en qualité de rapporteur du projet de loi de financement de la sécurité
sociale, étant de me faire l'écho des souhaits exprimés à la majorité, pour ne
pas dire à l'unanimité, des membres de la commission des affaires sociales. Or
celle-ci a souhaité conserver le
statu quo,
c'est-à-dire revenir à un
système qui permet de concilier les besoins des régimes gérés par l'ORGANIC, la
CANCAVA et la CANAM et les attentes des dirigeants de sociétés par actions
simplifiées, actuellement bénéficiaires du régime général.
Nous savons pertinemment aujourd'hui que certains dirigeants de SAS ont
autant, si ce n'est plus, intérêt à dépendre du régime des travailleurs
indépendants que du régime général, tandis que d'autres, en nombre à peu près
équivalent, ont plutôt intérêt à être affiliés au régime général.
Par conséquent, si nous tranchons aujourd'hui en décidant de rattacher tout le
monde au régime général, nous mécontenterons les dirigeants dont l'intérêt est
plutôt de rester affiliés à l'ORGANIC, à la CANCAVA ou à la CANAM.
C'est la raison pour laquelle il m'a été difficile, en ma qualité de
rapporteur, de faire à la commission des affaires sociales une proposition qui
soit très abrupte sur ce sujet. Rattacher l'ensemble des dirigeants soit aux
régimes spéciaux, soit au régime général ne peut qu'engendrer des
insatisfactions, sans parler des difficultés que cela entraînerait pour la
gestion de l'ORGANIC ou de la CANCAVA.
Il me semble que la question fondamentale a été posée par M. Masson :
voulons-nous véritablement apporter une réponse à ces dirigeants, mais aussi à
tous les Français qui relèvent des régimes spéciaux ? Si oui, il convient alors
de mener une réflexion approfondie.
A cet égard, M. le ministre n'a pas encore répondu à l'appel que je lui ai
lancé, mais je ne désespère pas qu'il le fasse dans les minutes à venir.
Je souhaite que le Gouvernement, reconnaissant que la solution qu'il propose
est de toute façon provisoire et transitoire, prenne l'engagement solennel
d'engager la réflexion qui nous permettra d'aboutir à un alignement sur le
régime général de la plupart des régimes spéciaux. Nous éviterons ainsi de nous
trouver confrontés à des situations du type de celle que nous connaissons
aujourd'hui et qui est particulièrement inconfortable.
Telles sont, mes chers collègues, les explications complémentaires que je
voulais vous apporter avant que n'intervienne le vote sur l'amendement n° 44
rectifié.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Accuser le Gouvernement n'est pas la chose la plus
difficile
(Sourires.)
... et je l'ai bien compris.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Le défendre est plus difficile !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
C'est en effet parfois plus difficile, mais je ne
répugne pas à mener ce combat.
Monsieur Vasselle, n'étiez-vous pas là quand j'ai dit que la réflexion devait
se poursuivre - et pas ici seulement et un peu trop rapidement - et que je m'y
engageais ? Il faut qu'une sorte d'harmonie s'établisse entre les caisses.
En première lecture à l'Assemblée nationale, Mme le ministre de l'emploi et de
la solidarité avait indiqué, et je pense qu'elle l'a rappelé hier, que le
Gouvernement allait poursuivre la réflexion.
Depuis, nous avons été saisis de ce problème par des avocats, des
experts-comptables, les centres de gestion, et voilà que nous en sommes saisis
par vous. Monsieur le rapporteur, ne vous plaignez pas que le Gouvernement vous
écoute et puisse aussi changer d'avis dans le bon sens !
Je répète que nous sommes favorables - j'aurais pu simplement m'en remettre à
la sagesse du Sénat - à l'amendement n° 42, ce qui nous conduit à émettre un
avis défavorable sur les amendements n°s 44 rectifié et 63. Mais, sur le fond,
nous allons - nous sommes bien d'accord - poursuivre cette nécessaire
harmonisation entre les caisses.
M. Alain Joyandet,
rapporteur pour avis.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Alain Joyandet,
rapporteur pour avis.
Le débat, et cela me navre un peu, a lieu en
quelque sorte en direct entre la commission des finances et la commission des
affaires sociales du Sénat. Cela tient, cher président About, à la façon dont
nos travaux sont organisés. En effet, dès lors que nous nous prononçons sur des
amendements en commission à dix heures et que nous sommes en séance publique à
quinze heures, il est assez difficile de travailler tous ensemble. D'où la
discussion que nous avons en cet instant.
Je souhaite apporter deux précisions pour compléter l'information de nos
collègues.
Cher Alain Vasselle, si nous avons déposé cet amendement, c'est précisément
parce que le texte tel qu'il résulte des travaux de l'Assemblée nationale ne
maintient pas le
statu quo
. S'il l'avait maintenu et si l'intention
avait été de mettre à plat l'ensemble du problème, nous n'aurions pas présenté
d'amendement. Or le texte adopté par l'Assemblée nationale modifie le
dispositif en vigueur.
Nous avons déposé cet amendement en pensant à tous ceux qui ont décidé de
créer telle ou telle structure juridique afin de s'affilier à un régime de
travailleurs salariés. En effet, même si les cotisations ne sont pas moins
élevées, un tel régime est tout de même beaucoup plus simple pour les personnes
concernées. Le texte adopté par l'Assemblée nationale rompt le
statu quo
et crée donc un changement.
Que l'on aille dans un sens ou dans l'autre, à partir du moment où il y a
uniformité du système, on va créer un changement pour les uns ou pour les
autres. C'est sans doute ce qui a rendu le débat difficile au sein de la
commission des affaires sociales.
Pour l'instant, l'essentiel est de ne pas voter conforme ce texte pour que, au
cours de la navette, on puisse trouver un texte en commun. Le vote d'un
amendement, j'allais dire quel qu'il soit, nous permettra de poursuivre cette
discussion. En effet, le texte adopté par l'Assemblée nationale crée un
problème, en rompant le
statu quo
dont chacun se satisfait en l'attente
du grand débat demandé, à juste titre, par M. le rapporteur.
Tel est l'esprit qui nous a animés. La commission des finances n'a aucun
désaccord de fond avec la commission des affaires sociales. Nous n'avons pas
vraiment eu le temps de travailler ensemble en raison du calendrier des travaux
du Sénat. Sur ce point, la responsabilité est partagée.
M. le président.
Monsieur Arnaud, l'amendement n° 44 rectifié est-il maintenu ?
M. Philippe Arnaud.
Après avoir entendu les nouveaux arguments de M. le rapporteur, la
confirmation de la position du Gouvernement par M. le ministre et les
précisions apportées par M. le rapporteur pour avis, je retire cet amendement,
qui introduisait plus de souplesse et prévoyait un droit d'option.
Pour nous, l'essentiel est de ne pas revenir sur la faculté donnée aux
dirigeants des sociétés par actions simplifiées de bénéficier du régime
général. L'amendement présenté par la commission des finances permet d'inscrire
dans la loi une pratique en vigueur, laquelle est d'ailleurs conforme à
l'esprit qui avait prévalu lors de la création des sociétés par actions
simplifiées. Je me rallie à l'amendement de la commission des finances.
M. le président.
L'amendement n° 44 rectifié est retiré.
Monsieur Murat, l'amendement n° 63 est-il maintenu ?
M. Bernard Murat.
Nous nous rangeons, nous aussi, à l'avis de la commission des finances. C'est
pourquoi nous retirons également notre amendement.
M. le président.
L'amendement n° 63 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 42.
M. Dominique Leclerc.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en tant que
rapporteur pour l'assurance vieillesse, j'ai, bien sûr, auditionné des
représentants des régimes des non-salariés.
Ils m'ont tous précisé que la rédaction de l'article 3 telle qu'elle résultait
des travaux de l'Assemblée nationale ne posait pas de problème. La répartition
entre le régime général et les régimes des non-salariés, pour les sociétés par
actions simplifiées, doit être effectuée selon les mêmes règles que pour les
SARL - c'est tout le débat que nous venons d'avoir - à partir du moment où la
loi du 12 juillet 1999 sur l'innovation et la recherche a profondément modifié
le régime juridique des sociétés par actions simplifiées en les ouvrant aux
personnes physiques et, surtout, à un associé unique.
Ne nous y trompons pas : décider d'affilier au régime général les dirigeants
majoritaires de SAS, c'est, compte tenu, comme cela a été bien souligné, du
succès de cette forme de sociétés, contribuer à terme à l'extinction des
régimes des non-salariés. Cela peut être un bel objectif de nature politique,
mais, dans ce cas, il serait plus logique de proposer l'intégration de la
CANAM, de l'ORGANIC et de la CANCAVA au régime général.
Selon moi, une telle décision ne peut être prise à la va-vite, elle doit faire
l'objet d'une concertation.
M. Alain Gournac.
Absolument !
M. Dominique Leclerc.
Et sommes-nous véritablement sûrs de la pertinence de cet objectif ?
Je ne suis pas persuadé, pour ma part, qu'un régime unique soit souhaitable et
que le régime général des salariés soit une fin en soi.
Un régime unique ne me semble pas souhaitable parce qu'il ferait disparaître,
par exemple, toute émulation entre les régimes d'assurance maladie et parce que
nous savons désormais qu'un gigantesque régime n'est pas obligatoirement
synonyme de gestion rigoureuse des deniers publics. C'est aujourd'hui tout le
problème du régime général : il reste beaucoup de progrès à faire pour les
usagers en termes de proximité. En la matière, la mutualité sociale agricole a
fait beaucoup, et avec succès.
Je le répète, un régime unique n'est pas une fin en soi. Les amendements n°s
42 et 43 entraînent un certain nombre de conséquences que la commission des
finances ne mesure peut-être pas totalement. Comme l'a indiqué le rapporteur,
M. Vasselle, une solution intermédiaire serait souhaitable, afin que la
concertation puisse avoir lieu en vue d'une harmonisation entre les régimes.
Ces deux amendements seraient donc source de déstabilisation et auraient des
conséquences immédiates que nous ne mesurons pas.
M. Jean Arthuis.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Arthuis.
M. Jean Arthuis.
Je voterai l'amendement n° 42, présenté par la commission des finances.
Cela étant dit, je voudrais apaiser les craintes de notre collègue M. Leclerc
et de notre excellent rapporteur de la commission des affaires sociales.
Ce qui nous anime, c'est d'abord la création d'entreprises. Or nous devons
être conscients du fait que ceux qui créent des entreprises sont bien souvent
des salariés, des cadres qui, à un moment de leur parcours professionnel,
décident d'agir ainsi. Ils le font en ayant recours à une structure sociale. La
création d'une SARL, c'est une rupture quant à leurs droits acquis en matière
de retraite et de protection sociale. Il s'agit d'une pénalisation extrêmement
forte.
Pour se prémunir contre ce risque, ils étaient condamnés à créer des sociétés
anonymes. Or ces sociétés créées pour la circonstance, qui respectaient à la
lettre le droit en vigueur, étaient en fait des paravents permettant de
préserver un statut au regard de la protection sociale. C'était une véritable
hypocrisie !
Le législateur en a pris conscience et a adopté le principe des SAS. Ceux qui
étaient président de société anonyme ont pu conserver leur statut de salarié,
c'est-à-dire continuer à relever du régime général, dans le cadre d'une SAS. Or
le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale bouleverse ce
régime.
Cher collègue Leclerc, que va-t-il se passer ? Ceux qui avaient transformé
leur société anonyme, qui relevait du régime de droit commun prévu par la loi
de 1966, en société par actions simplifiée vont renoncer à cette forme pour
revenir à la société de type classique relevant de la loi de 1966.
Adopter le texte proposé par le Gouvernement reviendrait à porter un mauvais
coup aux entreprises et à leurs dirigeants. Je comprends bien les réserves
exprimées par M. le rapporteur, mais il faut se réjouir de l'évolution de la
position du Gouvernement et de sa décision d'attendre pour remettre en cause ce
régime.
Un problème de financement pérenne de l'ORGANIC et de la CANCAVA se pose.
Toutefois, ne nous trompons pas de support ni d'objectif. Les décisions que
nous prenons risqueraient de devenir totalement incompréhensibles par celles et
ceux qui créent des entreprises. Préservons donc les SAS et le régime en
vigueur pour leurs dirigeants. Cette histoire de gérants majoritaires et de
gérants minoritaires, je le dis solennellement, prête à la pire hypocrisie, et
je ne crois pas que nous rendions service à notre pays en légiférant pour qu'il
en soit ainsi.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je souhaite apporter quelques précisions pour éviter toute
méprise ou quiproquo entre nous.
Mon rôle, en qualité de rapporteur, n'est pas de faire pression sur les
membres de la Haute Assemblée pour adopter une position plutôt qu'une autre. Je
ne fais que rapporter l'avis de la commission. Par ailleurs, mon rôle consiste
à vous livrer un maximum d'informations objectives pour vous permettre de
prendre, le moment venu, une décision en votre âme et conscience.
Aussi, je tiens à livrer à l'ensemble des membres de notre assemblée un
élément de réflexion supplémentaire concernant la décision que nous allons
prendre.
Comme je le constate pour d'autres dispositions que nous serons amenés à
examiner à l'occasion du présent projet de loi, le Gouvernement, par le biais
d'amendements, amène progressivement les assemblées à adopter des positions qui
peuvent changer fondamentalement de nombreuses dispositions auxquelles les
Français sont habitués et sur lesquelles aucune réflexion globale n'a été
engagée ni n'a fait l'objet de concertation à l'échelon national.
Ainsi, les différents principes sur lesquels nous nous sommes fondés depuis
plusieurs décennies vont progressivement être modifiés fondamentalement.
Je tiens simplement à faire observer que cette disposition, si nous l'adoptons
telle qu'elle nous est proposée par la commission des finances, aura pour
conséquence de faire basculer non d'un seul coup mais progressivement le régime
des non-salariés vers le régime des salariés. Ce choix important engage
l'avenir. Il crée un précédent sur lequel la représentation nationale pourrait
très bien décider de se prononcer.
Mais appartient-il au Sénat aujourd'hui, au détour d'un amendement dans le
cadre d'un texte aussi important, de considérer qu'il faut faire basculer tous
les assurés sociaux dans le régime des salariés ? C'est un choix dont nous
devons avoir conscience.
J'aurais préféré qu'une réflexion globale soit conduite, qu'une concertation
avec tous les partenaires sociaux ait lieu et qu'un rapport d'orientation soit
publié, comme cela a été demandé par certains, pour que nous puissions nous
engager dans cette voie en connaissance de cause. J'aurais préféré que cette
évolution ne se fasse pas par la voie d'un amendement qui pourrait, à la
limite, être considéré comme un cavalier.
M. Roland Muzeau.
Suspension de séance !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je me permets de livrer à votre réflexion cet élément
supplémentaire, de telle manière que vous ayez bien conscience de votre choix
au moment de voter, mes chers collègues !
M. Roland Muzeau.
Rencontrez-vous !
Mme Nicole Borvo.
Mettez-vous d'accord ! On compte les points !
M. Jean-Pierre Raffarin.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin.
En quoi le régime des indépendants se trouve-t-il menacé par cette décision ?
Je partage l'avis de la commission des finances et l'argumentation de M.
Arthuis.
Nous sortons d'une période de croissance très forte. Or, qu'avons-nous
constaté pendant cette période ? La création d'entreprise s'effondre, et les
derniers chiffres sont effrayants. Cette situation économique est extrêmement
préoccupante. Créer dans ce pays, aujourd'hui, devient impossible, parce que
déroutant. La complexité de la création est telle qu'elle écarte les personnes
intéressées.
L'amendement n° 42 vise à une démarche plus simple et cohérente. C'est
pourquoi je le soutiens.
Je rejoins, certes, M. Vasselle sur la nécessité d'une réflexion
stratégique.
M. Jean Chérioux.
Tout à fait !
M. Jean-Pierre Raffarin.
Mais, en l'occurrence, la création d'entreprise est stratégique ; nous
raisonnons en fonction des organismes et non de l'activité et des choix
économiques, alors que la création d'entreprise doit s'imposer à l'organisation
sociale.
M. Jean Arthuis.
Bien sûr !
M. Jean-Pierre Raffarin.
Elle constitue en effet, à mon avis, l'axe le plus important. C'est pourquoi,
entre ces deux logiques, je choisis celle de la commission des finances qui me
paraît donner la priorité aux entreprises.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je voudrais mettre à l'aise M. Raffarin et plusieurs de nos
collègues en indiquant la façon dont les choses se sont passées au sein de la
commission des affaires sociales : présentant cet amendement à cette dernière,
j'avais émis - mes collègues pourront d'ailleurs m'en donner acte - un avis de
sagesse réservé. C'est le débat au sein de la commission des affaires sociales
qui a amené cette dernière à émettre un avis défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 42, repoussé par la commission et accepté par
le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 43, présenté par M. Joyandet, au nom de la commission des
finances, est ainsi libellé :
« Après les mots : "présidents et dirigeants des sociétés par actions
simplifiées", supprimer la fin du premier alinéa (9°) du texte proposé par le
II de l'article 3 pour compléter l'article L. 722-20 du code rural. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Alain Joyandet,
rapporteur pour avis.
C'est un amendement de coordination.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Favorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 43, repoussé par la commission et accepté par
le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article 3 bis
M. le président.
« Art. 3
bis
. - I. - A. - Avant l'article L. 122-1 du code du travail,
il est inséré une sous-section 1 intitulée : "Règles générales".
« B. - Après l'article L. 122-3-17 du même code, il est inséré une
sous-section 2 intitulée : "Le contrat vendanges", comprenant trois articles L.
122-3-18 à L. 122-3-20 ainsi rédigés :
«
Art. L. 122-3-18
. - Le contrat vendanges a pour objet la réalisation
de travaux de vendanges. Ces travaux s'entendent des préparatifs de la
vendange, à la réalisation des vendanges, jusqu'aux travaux de rangement
inclus.
«
Art. L. 122-3-19
. - Ce contrat a une durée maximale d'un mois.
« Un salarié peut recourir à plusieurs contrats vendanges successifs, sans que
le cumul des contrats n'excède une durée de deux mois sur une période de douze
mois.
«
Art. L. 122-3-20
. - Le salarié en congés payés peut bénéficier de ce
contrat.
« Les personnes visées à l'article L. 324-1 peuvent bénéficier de ce
contrat.
« Les dispositions de l'article L. 122-3-15 ne s'appliquent pas aux contrats
régis par la présente sous-section.
« II. - L'article L. 741-16 du code rural est complété par un alinéa ainsi
rédigé :
« Lorsqu'ils embauchent des travailleurs occasionnels dans le cadre d'un
contrat de travail défini à l'article L. 122-3-18 du code du travail, la
rémunération ne donne pas lieu à cotisation d'assurances sociales à la charge
du salarié.
« III. - La perte de recettes pour les régimes sociaux est compensée, à due
concurrence, par la création d'une taxe sur le chiffre d'affaires de La
Française des jeux. »
La parole est à M. César.
M. Gérard César.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la
profession viticole est confrontée à une difficulté croissante pour le
recrutement de ses vendangeurs.
La vendange est un instant privilégié et surtout crucial pour les
exploitations, puisqu'elle se déroule sur une très courte période - quinze
jours en moyenne - et met en jeu l'avenir d'une année, d'un millésime.
Cruciales pour l'exploitant, les vendanges représentent dans l'esprit
collectif une activité de tradition qui renforce les derniers liens
institutionnels entre le monde rural et le monde urbain.
Face à ces difficultés de recrutement, certaines pratiques illégales se font
jour ; confrontées à cette pression, certaines régions, pourtant attachées à la
vendange manuelle, sont tentées de se convertir à la vendange mécanique.
Si, techniquement et qualitativement, la vendange mécanique peut être une
possibilité, elle aura sans doute diverses répercussions en termes
d'aménagement du territoire, d'emplois - les vendanges représentent environ 250
000 emplois par an - voire d'image de nos vins, attachés, comme chacun le sait,
au terroir et aux traditions.
Il est donc nécessaire de pallier les difficultés de recrutement existantes.
Or, il faut rappeler que la réglementation actuelle interdit à certaines
catégories de personnes d'effectuer les vendanges. Ainsi, les salariés en
congés payés, les fonctionnaires et agents publics ne peuvent légalement
contracter un contrat de travail pour effectuer les vendanges. Ces textes sont
motivés par des raisons de logique sociale : il ne faut pas qu'un actif
s'empare d'un emploi qui pourrait être occupé par une personne en recherche
d'emploi, ou qu'un agent public ne se consacre pas entièrement à sa
fonction.
La justification de ces textes est tout à fait compréhensible et légitime,
mais elle n'apparaît pas adaptée à l'activité des vendanges. En effet, les
personnes qui se portent volontaires pour cette activité ne recherchent pas
tant le gain financier que le plaisir d'une activité traditionnelle à caractère
souvent festif.
Par ailleurs - et c'est sans doute la raison essentielle - les vendanges sont
des activités de très courte durée - quinze jours en moyenne - et ne
constituent pas un emploi de réinsertion pour un chômeur. Dans le cadre du plan
d'aide au retour à l'emploi, les ANPE ne considèrent d'ailleurs pas comme un
motif de suspension de l'allocation d'aide au retour à l'emploi le fait pour un
demandeur d'emploi de refuser d'effectuer les vendanges. D'ailleurs, les ANPE
des régions viticoles ont beaucoup de difficultés pour procurer des vendangeurs
aux viticulteurs.
En revanche, ces interdictions de cumul d'emplois privent les viticulteurs
d'une main-d'oeuvre volontaire, incitent au développement de pratiques dérivées
et conduiront, à terme, à la disparition d'un procédé qui est le reflet de nos
traditions.
L'article 3
bis
prévoit donc la création du contrat vendanges, qui est
un contrat à durée déterminée d'un mois maximum - il sera le plus souvent de
quinze jours - et qui autorise les cumuls d'emploi que j'ai évoqués. En outre,
il dispense les titulaires d'un contrat vendanges du paiement des cotisations
d'assurances sociales à la charge du salarié, les cotisations d'assurances
sociales à la charge de l'employeur étant quant à elles maintenues. Ainsi, la
part de rémunération nette des salariés est augmentée sans que leurs droits
soient amputés. La réalisation des vendanges pour un salarié est donc plus
attractive, et la pénurie de main-d'oeuvre dans ce secteur devrait diminuer.
Le groupe du RPR votera donc l'article 3
bis,
en rappelant qu'il a été
adopté par l'Assemblée nationale à la quasi-unanimité, puisqu'une seule voix
contre a été enregistrée.
Il s'opposera, en conséquence, à l'amendement n° 53, déposé par le
Gouvernement, qui tend à revenir sur le vote des députés et à supprimer cet
article.
Je profite d'ailleurs de cette intervention pour remercier la commission des
affaires sociales et son excellent rapporteur, Alain Vasselle, d'avoir adopté
conforme le texte voté par l'Assemblée nationale.
M. le président.
La parole est à M. Courteau.
M. Roland Courteau.
Représentant une région viticole, je peux témoigner des réelles difficultés
que rencontrent les professionnels pour recruter de la main-d'oeuvre en vue des
vendanges. Cette situation, qui ne date certes pas d'hier, s'aggrave d'année en
année. Aujourd'hui, en France, 250 000 personnes effectuent ces travaux. Mais
combien seront-elles demain ?
Nous ne pouvons donc nous dispenser de traiter au mieux ce problème de pénurie
de main-d'oeuvre, ce qui permettrait d'ailleurs de mettre un terme à un certain
nombre de pratiques illégales.
Les vendanges manuelles sont les mieux appropriées non seulement à certains
cépages mais également à certains vignobles, tels ceux des coteaux. Certaines
régions imposent d'ailleurs dans leurs conditions de production la récolte de
la grappe entière, ce que, jusqu'à présent, seule la main de l'homme sait
faire. Bref, la vendange manuelle s'impose encore et toujours. Mais
pourra-t-elle se maintenir si la main-d'oeuvre devient introuvable ?
M. Gérard César.
C'est le cas !
M. Roland Courteau.
C'est là une vraie question !
Dès lors, les dispositions de l'article 3
bis,
avec, notamment,
l'ouverture du contrat à durée déterminée aux salariés en congés payés et aux
fonctionnaires et agents publics pour un mois au maximum, avec exonération de
la part salariale des cotisations sociales, paraît constituer une solution face
au problème que nous rencontrons. Si la réponse n'est peut-être pas parfaite,
elle représente cependant l'avantage d'exister.
Le risque est en effet grand que, faute de traiter cette question d'une façon
ou d'une autre, certaines pratiques illégales, comme la non-déclaration des
travailleurs ou le recours à des sociétés intermédiaires chargées de recruter
de la main-d'oeuvre non déclarée, ne se développent par absolue nécessité.
Dès lors, comment faire ?
Certes, nous sommes assez sensibles à l'argument selon lequel l'interdiction
faite aux salariés d'exécuter un travail rémunéré pendant leurs congés payés
relève du souci de ne pas priver les demandeurs d'emploi de la possibilité
d'occuper ce travail. Cela étant, la réalisation des vendanges ne constitue pas
un emploi stable et n'offre donc pas une voie réelle d'insertion pour un
demandeur d'emploi. De toute manière, la très courte durée des vendanges -
quinze jours environ - constitue bien une limite.
J'avoue, monsieur le ministre, ne pas connaître d'autre solution à ce qui
constitue un vrai problème. Telle est la raison pour laquelle je souhaite voir
maintenu l'article 3
bis
.
M. le président.
L'amendement n° 53, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Supprimer l'article 3
bis
. »
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Cet amendement a pour objet de supprimer le contrat
vendanges créé en première lecture par l'Assemblée nationale.
J'ai bien compris les arguments qui viennent d'être présentés, mais la
tentation à laquelle nous sommes en l'occurrence soumis me semble dangereuse.
Etant, pour ma part, comme vous tous, usager de la sécurité sociale,...
M. Jean-Pierre Raffarin.
Et non du produit des vendanges ?
(Sourires.)
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
... et, effectivement, adepte du produit des vendanges
(Ah ! sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR),
et
pesant l'un et l'autre, je veux souligner les dangers de cet article 3
bis
.
Tout d'abord, le contrat vendanges est inutile puisque rien n'interdit
aujourd'hui de conclure un contrat de travail à durée déterminée pour la saison
des vendanges, ce qui est, au passage, une formule beaucoup plus souple pour
l'employeur qu'un contrat renouvelable une fois.
La discussion d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale est-il
d'ailleurs vraiment le moment opportun pour discuter des difficultés liées,
aujourd'hui, aux vendanges - je reconnaîs volontiers qu'elles sont réelles -
ou, une autre fois, aux fruits et légumes ?
Ensuite, le contrat vendanges tel qu'il est défini à l'article 3
bis
introduit le droit pour les fonctionnaires et agents publics, définis de
manière large, d'exercer une activité rémunérée en plus du traitement qui leur
est versé pour leur service, pratique aujourd'hui strictement interdite. Le
Gouvernement est, bien sûr, opposé à la possibilité d'un tel cumul pour les
fonctionnaires, car cela ne pourrait que nuire à l'efficacité et à la
continuité du service public.
L'article 3
bis
introduit également la possibilité pour les salariés du
secteur privé de bénéficier de ce type de contrat pendant la durée de leur
congé, ce qui est interdit à la fois aux salariés et aux employeurs et leur
fait encourir des peines de contravention et des condamnations à des dommages
et intérêts envers le fonds de chômage, le travail pendant les congés payés
privant de travail les demandeurs d'emplois.
(M. César s'exclame.)
Par ailleurs, le développement de la réduction du temps de travail, à
l'instigation du Gouvernement, ne doit pas avoir pour conséquence d'inciter au
cumul d'activités. Tel n'est en tout cas pas le but.
Surtout, l'article 3
bis
exonère les salariés titulaires de ce contrat
vendanges du paiement de la part salariale des cotisations de sécurité sociale
afin d'accroître la rémunération nette versée et donc l'attractivité du travail
saisonnier.
M. Gérard César.
Et malgré cela, on n'en trouve pas !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Or les régimes sociaux n'ont pas vocation à se
substituer aux employeurs pour le financement des salaires. Il est en effet
inacceptable que les employeurs puissent fonder leur politique salariale sur la
disparition du précompte salarial qui n'appartient qu'au salarié.
Par ailleurs, l'embauche de travailleurs occasionnels dans la viticulture
donne déjà lieu à une exonération de 75 % des cotisations patronales
d'assurance sociale et d'accidents du travail. Ajouter cette exonération à la
perte de recettes liée au non-paiement de la part salariale des cotisations
revient à faire supporter une charge particulièrement injustifiée à tous les
régimes sociaux. Le seul contrat vendanges ferait ainsi perdre pas moins de 270
millions de francs en termes de cotisations salariales en 2002, ce qui ne me
paraît pas vraiment raisonnable compte tenu des demandes qui sont adressées
tous les jours, et ce matin, à mon ministère.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Monsieur le ministre, je pourrais presque être d'accord avec
vous sur un point : faire supporter à la sécurité sociale l'absence de
perception de cotisations peut en effet susciter quelques interrogations.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Ah ! tout de même !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Mais je ne suis pas surpris que les députés se soient fondés
sur le comportement du Gouvernement, qui ne donne pas le bon exemple, pour
proposer une disposition de cette nature. En effet, le Gouvernement, qui avait
pris l'engagement de compenser lui-même tous les allégements de cotisations,
notamment dans le cadre de l'application des 35 heures, s'est empressé de faire
supporter la quasi-totalité de la charge à la sécurité sociale, et à la branche
maladie, en particulier.
(Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Raison de plus !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Par conséquent, de ce point de vue, les 70 millions de francs
représentent véritablement une goutte d'eau.
M. Claude Doneirel.
Une goutte de vin !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Bref, monsieur le ministre, nous aurions pu être d'accord sur
un point si le Gouvernement avait respecté les engagements qu'il avait pris
devant l'Assemblée nationale.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Soyez vertueux pour deux !
(Sourires.)
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Nous pourrons en reparler au cours de la navette, et
peut-être pourrons-nous vous entendre si, de votre côté, vous entendez le Sénat
dans les propositions qu'il fera sur ces allégements et leur compensation.
La commission a trouvé cet article très intéressant ; les problèmes rencontrés
par les viticulteurs sont réels. Des mesures incitatives doivent être prises en
leur faveur, comme l'a très justement exposé M. César.
Je proposerai moi-même que l'on aille plus loin en défendant un amendement qui
prévoit que la mesure puisse s'appliquer à toutes les activités agricoles
saisonnières.
Vous savez, mes chers collègues que, aujourd'hui plus qu'hier, les éleveurs
sont confrontés à des difficultés de recrutement. L'agriculture est en
situation de plein emploi et éprouve des difficultés majeures pour trouver de
la main-d'oeuvre qualifiée, voire non qualifiée, pour assurer travaux
agricoles. Ces difficultés sont encore accentuées lorsqu'il s'agit de travaux
saisonniers.
M. Gérard César.
Tout à fait !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Aussi, la commission a émis un avis défavorable sur
l'amendement n° 53.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 53, repoussé par la commission.
M. Guy Fischer.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 3
bis
.
(L'article 3
bis
est adopté.)
Article additionnel après l'article 3 bis (réservé)
M. le président.
L'amendement n° 2, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, est ainsi libellé :
« Après l'article 3
bis
, insérer un article additionnel ainsi rédigé
:
« I. - Après l'article L. 122-3-17 du code du travail, il est inséré une
sous-section 3 intitulée : "Le contrat d'activité agricole saisonnière",
comprenant trois articles L. 122-3-21 à L. 122-3-23 ainsi rédigés :
«
Art. L. 122-3-21
. - Le contrat d'activité agricole saisonnière a pour
objet les travaux agricoles de toute nature, autres que les vendanges, ayant un
caractère saisonnier et nécessitant, de ce fait, le recours à une main-d'oeuvre
occasionnelle.
«
Art. L. 122-3-22
. - Ce contrat a une durée maximale d'un mois. Un
salarié peut recourir à plusieurs contrats d'activité agricole saisonnière
successifs, sans que le cumul des contrats n'excède une durée de deux mois sur
une période de douze mois.
«
Art. L. 122-3-23
. - Le salarié en congés payés peut bénéficier de ce
contrat. »
« Les dispositions de l'article L. 122-3-15 ne s'appliquent pas aux contrats
régis par la présente section. »
« II. - L'article L. 741-16 du code rural est complété par un alinéa ainsi
rédigé :
« Lorsqu'ils embauchent des travailleurs occasionnels dans le cadre des
contrats de travail définis aux articles L. 122-3-18 et L. 122-3-21 du code du
travail, la rémunération ne donne pas lieu à cotisation d'assurances sociales à
la charge du salarié. »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
J'ai déjà présenté cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je ne peux que m'opposer à cet amendement, qui ne
ferait qu'altérer de nouveau les recettes de la sécurité sociale.
Il ne me paraît pas conforme à l'article 40 de la Constitution de ne pas
savoir comment l'on pourra récupérer tout ce qui n'aura pas été porté à l'actif
de la sécurité sociale.
M. Gérard César.
Et les 35 heures ?
M. Michel Doublet.
Cela coûte cher aussi !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Ce n'est pas le débat.
(Exclamations sur les travées
du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
Le Gouvernement ayant invoqué l'article 40 de la Constitution, je dois
demander l'avis de la commission des finances sur son applicabilité.
Au demeurant, la commission des finances n'étant pas en mesure de donner en
l'instant cet avis, il y a lieu de réserver l'amendement n° 2.
Article 3 ter
M. le président.
« Art. 3
ter
. - I. - L'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale
est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 24° Les administrateurs des groupements mutualistes qui perçoivent une
indemnité de fonction et qui ne relèvent pas, à titre obligatoire, d'un régime
de sécurité sociale.
« II. - A la fin de la première phrase du deuxième alinéa de l'article L.
114-26 du code de la mutualité, les mots : "et qui, pour l'exercice de leurs
fonctions, doivent cesser tout ou partie de leur activité professionnelle" sont
supprimés.
« III. - Dans l'article L. 114-27 du même code, les mots : "ayant cessé tout
ou partie de leur activité professionnelle" sont supprimés. »
La parole est à M. Chabroux.
M. Gilbert Chabroux.
En votant l'article 3
ter
, l'Assemblée nationale a pu clarifier les
conditions dans lesquelles les élus mutualistes pouvaient bénéficier d'une
indemnité de fonction, ainsi que les modalités de leur affiliation au régime
général.
Je voudrais, pour ma part, à l'occasion de la discussion de cet article, poser
la question du délai imparti aux organismes mutualistes pour se conformer aux
règles du nouveau code de la mutualité.
Cette question a été posée, hier, lors de la discussion générale et, ce matin
encore, en commission, par M. Franchis.
L'article 4 de l'ordonnance du 19 avril dernier a en effet fixé un délai d'une
année au cours duquel les organismes mutualistes devaient se mettre en
conformité avec les règles de ce code.
La complexité des opérations à réaliser, tout en permettant le respect
scrupuleux des droits des adhérents, entraîne la mise en oeuvre de procédures
longues qui nécessitent, nous semble-t-il, de prolonger d'un an le délai
accordé aux mutuelles pour se conformer aux dispositions du nouveau code.
De surcroît, en l'absence de parution de certains décrets d'application de
cette ordonnance, les organismes mutualistes se trouvent dans une situation
d'autant plus délicate qu'au 22 avril 2002 ceux qui ne se seront pas mis en
conformité avec le nouveau code de la mutualité risquent de se voir privés
d'existence juridique.
Parmi la quarantaine de décrets à paraître, certains sont très attendus, tels
que celui qui est relatif à la nouvelle procédure d'agrément des mutuelles ou
celui qui autorise la mise en place du registre national des mutuelles. A six
mois de la date butoir, et même en considérant que les principaux décrets
paraîtront prochainement, cela laisse peu de temps aux mutuelles.
Aussi, madame le ministre, serait-il possible que le délai soit prolongé d'un
an afin que les mutuelles aient le temps suffisant de s'adapter à leur nouvel
environnement juridique ?
M. le président.
L'amendement n° 123, présenté par M. Emorine et les membres du groupe des
Républicains et Indépendants, est ainsi libellé :
« Insérer, après le I de l'article 3
ter
, un paragraphe additionnel
ainsi rédigé :
« L'article L. 722-20 du code rural est complété par un alinéa ainsi rédigé
:
« 11° Lorsque les groupements mutualistes dont ils sont administrateurs
relèvent des dispositions du 6° du présent article, administrateurs des
groupements mutualistes qui perçoivent une indemnité de fonction et qui ne
relèvent pas, à titre obligatoire, d'un régime de sécurité sociale. »
La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin.
En l'état actuel du droit, les administrateurs des mutuelles pour l'exercice
de leurs fonctions d'administrateur sont connus des organismes de sécurité
sociale au titre des accidents du travail, avec une cotisation assise sur une
assiette forfaitaire, et au titre de la CSG et de la CRDS, car les indemnités y
sont soumises.
L'intégration des indemnités des administrateurs des groupements mutualistes
dans l'assiette des cotisations sociales prévues à l'article L. 114-27 du code
de la mutualité nécessite une règle préalable d'affiliation pour déterminer
auprès de quel régime de sécurité sociale les cotisations sont dues. L'article
3
bis
adopté par l'Assemblée nationale répond à cette préoccupation et
prévoit une affiliation des administrateurs de groupements mutualistes auprès
du régime général.
Toutefois, il est indispensable de prévoir une règle identique dans les règles
d'affiliation au régime des salariés agricoles ou assimilés. C'est l'objet du
présent amendement.
A défaut de l'introduction d'une telle règle, les indemnités des
administrateurs des mutuelles qualifiées d'organismes professionnels agricoles
donneraient lieu à cotisations d'assurances sociales auprès du régime général
et à CSG, à CRDS et à cotisations accidents du travail auprès du régime des
salariés agricoles. Il convient d'ajouter que les salariés de ces groupements
mutualistes sont affiliés au régime agricole.
L'assimilation des administrateurs à des salariés en matière de cotisations
sociales doit conduire à retenir les mêmes règles d'affiliation que les
salariés de ces mutuelles.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Nicolas About,
président de la commission des affaires sociales.
La commission n'a pas
pu examiner cet amendement, mais, à titre personnel, M. le rapporteur et moi
émettons un avis favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée à la famille, à l'enfance et aux personnes handicapées.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement. J'en suis ravie pour M.
Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin.
Voilà dix ans que j'attendais cela !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Tout arrive !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 123, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 3
ter
, modifié.
(L'article 3
ter
est adopté.)
3
SOUHAITS DE BIENVENUE
À UNE DÉLÉGATION
DE PARLEMENTAIRES HONGROIS
M. le président.
Mes chers collègues, je tiens à saluer la présence dans notre tribune
officielle d'une délégation de députés hongrois, présidée par M. Janos
Latorcai, président de la commission des affaires économiques du Parlement
hongrois.
Nos collègues hongrois viennent d'être reçus par M. Gérard Larcher, président
du groupe sénatorial d'amitié France-Hongrie, afin d'évoquer en particulier les
dossiers concernant la prochaine adhésion de la Hongrie à l'Union
européenne.
Au nom du Sénat, je leur souhaite la bienvenue et je forme des voeux pour que
leur séjour en France contribue à renforcer les liens d'amitiés entre nos deux
pays.
(Mme le ministre, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et
applaudissent.)
4
FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
POUR 2002
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président.
Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 2002, adopté par l'Assemblée nationale.
Article additionnel après l'article 3 ter
M. le président.
L'amendement n° 45, présenté par MM. Franchis, Nogrix et Deneux, est ainsi
libellé :
« Après l'article 3
ter
, insérer un article additionnel ainsi rédigé
:
« Dans l'article 4 de l'ordonnance n° 2001-350 du 19 avril 2001 relative au
code de la mutualité et transposant les directives 92/49/CE et 92/96/CE du
Conseil des 18 juin et 10 novembre 1992, les mots : "d'un an" sont remplacés
par les mots : "de deux ans". »
La parole est à M. Franchis.
M. Serge Franchis.
L'ordonnance du 19 avril 2001 portant réforme du code de la mutualité a fixé
un délai d'une année au cours duquel les organismes mutualistes doivent se
mettre en conformité avec les règles de ce code.
Comme M. Chabroux l'a indiqué, la complexité des opérations à réaliser
entraîne la mise en oeuvre de procédures longues, qui nécessitent le
prolongement d'un an du délai accordé aux mutuelles pour se conformer aux
dispositions du code.
Si cet amendement n'était pas adopté, je demanderais au Gouvernement de bien
vouloir examiner ce problème rapidement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres généraux
et l'assurance maladie.
La commission des affaires sociales avait fait
valoir en son temps au Gouvernement qu'elle ne comprenait pas qu'il puisse
réformer ainsi le code de la mutualité par ordonnance. Le Gouvernement avait
invoqué l'urgence ; dont acte.
Aujourd'hui, en émettant un avis favorable sur l'amendement visant à accroître
le délai, j'aurais le sentiment d'inciter le Sénat à agir de façon incohérente
par rapport à l'attitude qu'il avait adoptée en son temps sans aucune
ambiguïté.
J'ajoute que cet amendement a un caractère de « cavalier social », et c'est la
raison pour laquelle la commission des affaires sociales m'a chargé de demander
à ses auteurs de bien vouloir le retirer.
Je le rappelle, lorsque, l'année dernière, le Conseil constitutionnel a été
saisi de la loi de financement de la sécurité sociale, il a annulé toutes les
dispositions ayant un caractère de cavalier social. Le Gouvernement a
d'ailleurs fait lui-même l'expérience de la sanction du Conseil constitutionnel
et a dû reporter certaines dispositions sur d'autres textes de loi.
Tout en comprenant les intentions de nos collègues et en étant consciente des
difficultés rencontrées par la mutualité, la commission les invite donc à
renoncer à cet amendement, quitte à le reprendre à l'occasion de la discussion
d'un autre texte.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée à la famille, à l'enfance et aux personnes handicapées.
Tout en comprenant, lui aussi, les objectifs visés à travers cet amendement, le
Gouvernement partage l'avis de la commission quant à son caractère prématuré.
Pour la cohérence, mieux vaut qu'une telle disposition soit réexaminée dans le
cadre des ordonnances.
M. le président.
Monsieur Franchis, entendez-vous l'appel de la commission et du Gouvernement
?
M. Serge Franchis.
J'accepte de retirer cet amendement, mais j'insiste sur le fait que cette
question doit être tranchée, et tranchée dans un délai convenable. En effet, le
temps passe et la procédure qui est imposée aux mutuelles les indiquiète.
M. le président.
L'amendement n° 45 est retiré.
Article 4
M. le président.
« Art. 4. - L'article 20 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la
réduction négociée du temps de travail est ainsi rédigé :
«
Art. 20
. - Les entreprises, visées au II de l'article L. 241-13-1 du
code de la sécurité sociale, qui procèdent à l'embauche d'un premier salarié
postérieurement au 1er janvier 2002 ouvrent droit, au titre de cette embauche
et des embauches supplémentaires, à l'allégement prévu au même article appliqué
conformément aux dispositions de cet article et des textes pris pour son
application et selon les modalités et conditions particulières définies
ci-dessous.
« La condition de première embauche est remplie lorsque les entreprises ont
exercé leur activité sans le concours de personnel salarié, sinon avec au plus
un salarié en contrat d'apprentissage, de qualification, d'adaptation ou
d'orientation durant les douze mois précédant l'embauche. La condition relative
au personnel salarié s'apprécie dans le cadre de l'ensemble de ses activités
exercées pendant la période de référence par l'employeur, de quelque nature et
sous quelque forme que ce soit.
« I. - Le bénéfice de l'allégement est ouvert au titre de la première embauche
lorsque la durée du travail du salarié concerné, au plus égale à trente-cinq
heures hebdomadaires ou à 1 600 heures sur l'année, est mentionnée dans son
contrat de travail. Ce contrat de travail doit être à durée indéterminée ou
conclu pour une durée d'au moins douze mois.
« Cet allégement est majoré d'un montant fixé par décret et calculé en
fonction du niveau du salaire minimum de croissance ou, le cas échéant, celui
de la garantie mensuelle de rémunération définie à l'article 32. Ce décret fixe
également la durée de la majoration.
« II. - A compter de la deuxième embauche, le bénéfice de l'allégement est
ouvert lorsque la durée collective du travail, au plus égale à trente-cinq
heures hebdomadaires ou à 1 600 heures sur l'année, est fixée soit par un
accord collectif conclu dans les conditions définies au II de l'article 19,
soit en vertu des dispositions du VIII du même article ou, à défaut, est
mentionnée dans le contrat de travail du ou des salariés concernés. Dans ce
dernier cas, le maintien de l'allégement est subordonné au respect, au plus
tard à l'expiration d'une période d'un an à compter de la deuxième embauche,
des conditions définies aux II à VIII de l'article 19.
« III. - Dans les cas visés au I et au II, la déclaration prévue au XI de
l'article 19 est envoyée dans les trente jours suivant la date d'effet du
contrat de travail afférent à l'embauche du premier salarié. L'allégement prend
effet le premier jour du mois qui suit la réception par les organismes de
recouvrement des cotisations sociales de la déclaration de l'employeur.
« IV. - La majoration visée au I est applicable aux premières embauches
réalisées entre le 1er janvier 2002 et le 31 décembre 2003. »
L'amendement n° 3 rectifié, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission
des affaires sociales, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit l'article 4 :
« I. - L'embauche, dans les conditions ci-après, d'un premier salarié ouvre
droit à l'exonération des cotisations qui sont à la charge de l'employeur au
titre des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations
familiales pour l'emploi de ce salarié, afférentes à une fraction de la
rémunération égale au salaire minimum de croissance, par heure rémunérée dans
la limite de la durée légale ou conventionnelle du travail.
« Bénéficient de cette exonération les personnes non salariées inscrites
auprès des organismes chargés du recouvrement des cotisations d'allocations
familiales ou assujetties au régime de protection sociale des professions
agricoles et qui ont exercé leur activité sans le concours de personnel
salarié, sinon avec au plus un salarié en contrat d'apprentissage ou de
qualification ou en contrat d'adaptation ou d'orientation durant les douze mois
précédant l'embauche ainsi que, dans les mêmes conditions, les gérants de
société à responsabilité limitée qui ne possèdent pas plus de la moitié du
capital social et ne bénéficient pas de cette exonération à un autre titre.
Bénéficient également de cette exonération les mutuelles régies par le code de
la mutualité, les coopératives d'utilisation de matériel agricole régies par le
titre II du livre V du code rural, les groupements d'employeurs visés à
l'article L. 127-1 du code du travail dont les adhérents sont exclusivement
agriculteurs ou artisans et les associations régies par la loi du 1er juillet
1901 relative au contrat d'association ou les dispositions de la loi du 19
avril 1908 applicables dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la
Moselle agréées à cette fin par l'autorité administrative compétente.
« Cet agrément est donné aux associations :
« 1° Qui exercent une activité sociale, éducative, culturelle, sportive ou
philanthropique, non concurrente d'une entreprise commerciale ;
« 2° Qui sont administrées à titre bénévole par les personnes n'ayant
elles-mêmes ou par personnes interposées aucun intérêt direct dans les
résultats de l'association ;
« 3° Qui utilisent l'intégralité d'éventuels excédents de recettes aux actions
entrant dans l'objet de l'association ;
« 4° Qui sont administrées par des personnes dont aucune n'a administré une
autre association ayant employé un ou plusieurs salariés, au sens du deuxième
alinéa de l'article 6-1 de la loi n° 89-18 du 13 janvier 1989 portant diverses
mesures d'ordre social dans les douze mois précédant la date de l'embauche.
« Bénéficient également de cette exonération les associations agréées pour les
services aux personnes dans les conditions prévues à l'article L. 129-1 du code
du travail.
« Les associations et les mutuelles doivent avoir exercé leur activité sans le
concours de personnel salarié, sinon des salariés en contrat emploi-solidarité
ou au plus un salarié en contrat d'apprentissage ou de qualification ou en
contrat d'adaptation ou d'orientation durant les douze mois précédant
l'embauche. Les coopératives d'utilisation de matériel agricole et les
groupements d'employeurs doivent avoir exercé leur activité sans le concours de
personnel salarié, sinon au plus un salarié en contrat d'apprentissage ou de
qualification ou en contrat d'adaptation ou d'orientation durant les douze mois
précédant l'embauche.
« II. - Les dispositions du présent article sont applicables aux embauches
réalisées à compter du 1er janvier 2001.
« III. - La perte de recettes est compensée, à due concurrence, par la
majoration des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
L'article 4 intègre dans sa rédaction actuelle le dispositif
spécifique d'exonération des cotisations en faveur de l'embauche du premier
salarié, créé en 1989, dans le cadre des allégements liés aux 35 heures.
La commission propose que ce dispositif soit rendu pérenne et ne soit pas lié
aux 35 heures, avec toutes les conséquences financières qui en résultent.
Nous considérons que cette mesure incitative, à caractère social, liée à
l'emploi et à l'activité économique a porté ses fruits et doit donc être
pérennisée, sans toutefois être financée par la sécurité sociale. C'est, bien
entendu, le budget de l'Etat qui doit assumer cette charge.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement,
qui supprime l'accès simplifié à l'allégement « 35 heures » pour les
entreprises qui procèdent à l'embauche d'un premier salarié après le 1er
janvier 2002, ainsi que la majoration qui s'y attache.
En effet, cet amendement tend à remplacer ce dispositif par une exonération
qui est la réplique exacte de l'exonération pour l'embauche du premier salarié
mise en place en 1989, qui arrive à son terme le 31 décembre 2001 et que le
Gouvernement n'a pas souhaité proroger en raison du très fort effet d'aubaine
qu'elle représente.
Selon une enquête récente menée par le ministère auprès des entreprises
utilisatrices, l'embauche aurait lieu de toute façon dans 83 % des cas, soit au
même moment, soit plus tard.
Cet effet d'aubaine avait d'ailleurs déjà été mis en lumière par une étude
identique menée auprès des entreprises utilisatrices en 1998. C'est d'ailleurs
la raison pour laquelle la majoration afférente à la première embauche, créée
par l'Assemblée nationale, est temporaire : elle a pour effet de conserver le
maintien de l'avantage financier qui résultait de cette exonération pour les
entreprises qui réduisent leur temps de travail entre 2002 et 2003.
En outre, le dispositif de l'article 4 s'inscrit dans le cadre des actions de
simplification en faveur des entreprises, en facilitant le passage aux 35
heures pour celles qui procéderont à leur première embauche à compter de
2002.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 3 rectifié.
M. Guy Fischer.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Cet amendement réécrit totalement l'article 4, qui a trait aux allégements de
cotisations sociales patronales en faveur de l'embauche d'un premier salarié,
dispositif que le Gouvernement a entendu modifier afin de le recentrer, en
quelque sorte.
Cela est évidemment très mal perçu par nos collègues de droite, qui vivent
cette disposition comme un recul, une remise en cause de l'actuel dispositif
spécifique des exonérations pour une première embauche, le lien établi avec les
allégements consentis au titre de la RTT étant, pour eux, tout simplement
inconcevable.
Les modifications proposées par la commission sont substantielles. Elles
visent principalement à supprimer les nouvelles conditions à remplir pour
bénéficier de ce dispositif - à savoir l'incitation à réduire la durée
collective du travail - et à assurer la pérennité de ces allégements.
Une fois de plus, vous faites preuve, messieurs de la majorité...
M. Jean Chérioux.
Et les dames ?
M. Michel Charasse.
Mesdames, messieurs...
M. Guy Fischer.
Vous avez raison ! Je prie les sénatrices de la majorité de m'excuser !
Les hommes et les femmes de la majorité sénatoriale, donc, font une fois
encore la preuve de leur volonté toujours plus grande d'accentuer les
dispositifs d'exonérations de charges pour les employeurs, sans se soucier le
moins du monde de leurs incidences sur le développement de l'emploi stable.
Les sénateurs communistes voteront, par conséquent, contre cet amendement.
M. Gilbert Chabroux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chabroux.
M. Gilbert Chabroux.
L'amendement présenté par M. Alain Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, vise à revenir, en l'élargissant encore, au dispositif
d'exonération pour l'embauche du premier salarié institué par la loi du 13
janvier 1989 portant diverses mesures d'ordre social.
L'application de ce dispositif avait fait apparaître un puissant effet
d'aubaine pour un certain nombre d'entreprises utilisatrices. M. Vasselle, sans
doute sensible à cet effet d'aubaine, souhaite l'exonération toujours plus
large des cotisations patronales, mais sans contrepartie.
Il nous semble, au contraire, nécessaire de lier ce dispositif d'exonération à
l'application de la RTT. Nous voterons donc contre cet amendement.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Pour ma part, je soutiendrai l'amendement de la commission.
Je suis en effet un peu étonné de voir que l'on discute de l'application de la
RTT pour des entreprises qui n'ont pas d'employé, puisqu'il s'agit de
l'embauche du premier salarié. Pour qu'on pousse la logique de la RTT jusqu'au
problème de l'embauche du premier salarié, il faut vraiment que le mythe ait
une consistance extraordinaire !
L'effet d'aubaine, en vérité, a été le fait d'entreprises ayant de nombreux
salariés, notamment des entreprises étrangères installées sur notre territoire.
J'en connais un certain nombre d'exemples dans la commune que j'administre.
Refuser la pérennisation du système qui a été mis en place en 1989 pour
l'embauche du premier salarié - alors que le recul conjoncturel qui se profile
va nécessairement affecter l'emploi dans les mois qui viennent et cela au nom
de l'aménagement de la durée du travail, c'est vraiment pousser le dogmatisme
un peu loin. C'est pourquoi je me rallie à l'amendement de la commission.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains
et Indépendants.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 4 est ainsi rédigé.
Article additionnel après l'article 3 bis (suite)
M. le président.
Nous en revenons à l'article additionnel après l'article 3
bis.
Je suis saisi d'un amendement n° 2 rectifié, présenté par M. Vasselle, et qui
est ainsi libellé :
« Après l'article 3
bis,
insérer un article additionnel ainsi rédigé
:
« I. - Après l'article L. 122-3-17 du code du travail, il est inséré une
sous-section 3 intitulée : "Le contrat d'activité agricole saisonnière",
comprenant trois articles L. 122-3-21 à L. 122-3-23 ainsi rédigés :
«
Art. L. 122-3-21. -
Le contrat d'activité agricole saisonnière a pour
objet les travaux agricoles de toute nature, autres que les vendanges, ayant un
caractère saisonnier et nécessitant, de ce fait, le recours à une main-d'oeuvre
occasionnelle.
«
Art. L. 122-3-22. -
Ce contrat a une durée maximale d'un mois. Un
salarié peut recourir à plusieurs contrats d'activité agricole saisonnière
successifs, sans que le cumul des contrats excède une durée de deux mois sur
une période de douze mois.
«
Art. L. 122-3-23. -
Le salarié en congés payés peut bénéficier de ce
contrat.
« Les dispositions de l'article L. 122-3-15 ne s'appliquent pas aux contrats
régis par la présente section. »
« II. - L'article L. 741-16 du code rural est complété par un alinéa ainsi
rédigé :
« Lorsqu'ils embauchent des travailleurs occasionnels dans le cadre des
contrats de travail définis aux articles L. 122-3-18 et L. 122-3-21 du code du
travail, la rémunération ne donne pas lieu à cotisation d'assurances sociales à
la charge du salarié. »
« III. - La perte de recettes correspondante est compensée, à due concurrence,
par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et
575 A du code général des impôts. »
Cet amendement a déjà été défendu.
Madame le ministre, continuez-vous à invoquer l'article 40 de la Constitution,
malgré le gage ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
Monsieur le rapporteur pour avis, l'article 40 de la Constitution est-il
applicable ?
M. Alain Joyandet,
au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Non, monsieur le président.
M. le président.
Je mets donc aux voix l'amendement n° 2 rectifié, repoussé par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de la loi, après l'article 3
bis.
Articles additionnels après l'article 4
M. le président.
L'amendement n° 80, présenté par M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le mot : "égale", la fin du deuxième alinéa du I de l'article 235
ter
ZC du code général des impôts est ainsi rédigée : "à 5 % pour les
exercices clos à compter du 1er janvier 2002". »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
La question du financement de la réduction du temps de travail agite quelque
peu les débats parlementaires depuis l'adoption des deux lois relatives à la
RTT.
Ce serait évidemment faire offense à la majorité sénatoriale que d'oublier son
opposition viscérale à toute réduction de la durée du travail,...
M. Jean Chérioux.
Non !
M. Alain Gournac.
C'est faux !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
En tout cas, vous êtes contre les exonérations au titre de la RTT !
M. Guy Fischer.
... comme son soutien indéfectible à toute politique d'allégement du coût du
travail sans contrepartie, à l'image de ce qui a pu se faire avant le printemps
1997.
Cela dit, en l'état actuel du débat, force est de constater que le financement
de la réduction du temps de travail n'est pas sans soulever aujourd'hui
quelques questions.
L'objet de l'amendement n° 80 est de majorer l'une des ressources dédiées, à
savoir la contribution sociale sur les bénéfices, la CSB, dont le rendement,
relativement éloigné de celui qui était attendu, quelque 3 milliards de francs,
nécessite d'être amélioré, voire stimulé.
On peut évidemment s'interroger sur ce que d'aucuns ne manqueront pas
d'appeler une « forme rampante d'augmentation de l'impôt sur les sociétés » ou
une « forme rampante d'augmentation des prélèvements ».
M. Hilaire Flandre.
Une forme trébuchante !
M. Guy Fischer.
Mais nous assumons totalement cette proposition.
La contribution sociale sur les bénéfices participe aujourd'hui de manière
relativement marginale au financement du FOREC, et donc de l'ensemble des
dispositifs d'allégement de cotisations sociales qu'il centralise : 3 milliards
sur 30 milliards de francs.
Elle constitue pourtant, à nos yeux, un outil intéressant d'incitation au
changement de comportement des agents économiques que sont les entreprises. En
effet, le montant de la contribution est d'autant plus élevé que la part de la
valeur ajoutée non consacrée à la rémunération des salariés ou à
l'investissement productif est limitée.
Les entreprises qui ont choisi, au cours de ces dernières années, de
compresser la masse salariale sont donc mises en situation de contribuer de
manière plus importante au titre de la CSB, ce qui justifie d'en accroître le
montant par le biais du relèvement de taux que nous proposons.
Nous nous permettons d'ailleurs de faire observer que la mise en place d'un
dispositif de réduction du temps de travail n'a pas, à proprement parler, remis
tout à fait en question la rentabilité des entreprises de notre pays. Bien au
contraire, les plus récents éléments disponibles montrent que la profitabilité
des entreprises ne s'est pas affaissée, ce qu'atteste, notamment, le rendement
de l'impôt sur les sociétés.
Outre qu'il dégage quelques moyens financiers nouveaux, cet amendement
favoriserait une meilleure allocation de la ressource dégagée par le
travail.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Si l'on comprend bien l'objectif des auteurs de cet
amendement, il s'agit de trouver enfin - mais en vain - des ressources
nouvelles pour alimenter le financement des 35 heures, donc du FOREC, alors que
le Gouvernement n'a pas réussi à les trouver et a fait appel à la sécurité
sociale.
M. Fischer souhaite alourdir le poids de l'impôt à travers la contribution
sociale sur le bénéfice des entreprises, et la commission a considéré que, dans
la conjoncture actuelle, cette initiative n'était pas vraiment opportune ;
d'une certaine manière, M. Fischer veut reprendre d'une main ce qui a été donné
de l'autre à travers les allégements sociaux. Je ne pense pas que c'est ainsi
que l'on parviendra à atteindre les objectifs que s'était assignés le
Gouvernement afin de redonner de la compétitivité aux entreprises pour qu'elles
soient créatrices d'emplois,... encore que l'on puisse s'interroger sur la
compétitivité avec le coût des 35 heures !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Défavorable.
(Murmures sur les travées du
RPR.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 80, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 95, présenté par M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, il est inséré un
article L. 136-8-1 ainsi rédigé :
«
Art. L. 136-8-1. -
Une contribution assise sur le montant net versé
par les sociétés, les entreprises et autres personnes morales, assujetties en
France, à la déclaration de l'impôt sur les sociétés, au titre de l'article 206
du code général des impôts, des revenus de capitaux mobiliers, des plus-values,
gains en capital et profits réalisés sur les opérations menées sur titres, les
opérations menées sur les marchés réglementés et sur les marchés à terme
d'instruments financiers et de marchandises, ainsi que sur les marchés
d'options négociables.
« Pour les sociétés placées sous le régime de l'article 223 A du code général
des impôts, la contribution est due par la société mère.
« Le taux de cette contribution sociale sur les revenus financiers des
entreprises est fixé à 10 %. La contribution sociale est contrôlée et recouvrée
selon les mêmes règles que les cotisations sociales. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Nous ne baissons pas les bras, monsieur le président, même si nous regrettons
que la solution que nous préconisions pour rééquilibrer la contribution des
recettes du budget de la sécurité sociale sans prélèvement sur le fruit du
travail des salariés n'ait pas été adoptée.
L'amendement n° 95 présente plusieurs caractéristiques, dont la première est,
bien évidemment, d'être défendu chaque fois que nous examinons une loi de
financement de la sécurité sociale. Nous creusons notre sillon !
On pourrait, certes, nous reprocher une relative constance dans notre
position, mais je crois que ce serait oublier le fondement des dispositions de
cet amendement.
Tout d'abord, rappelons que le financement de la protection sociale est, pour
l'essentiel, assis sur une base de calcul de cotisations fondée sur les
salaires - quand bien même elle n'est pas un prélèvement sur les salaires mais
plutôt une utilisation de la valeur ajoutée créée - et qu'il représente de plus
en plus, aujourd'hui, l'affectation de recettes fiscales ou assimilées, telle
la CSG.
Si l'on considère le postulat d'une protection sociale financée, pour
l'essentiel, à partir des revenus du travail, on peut alors considérer qu'il
est relativement injuste que les autres revenus ne soient plus mis à
contribution pour le bien de la collectivité.
A ce stade, on nous rétorquera, bien entendu, que les revenus du capital et du
patrimoine sont aujourd'hui mis à contribution au travers de la CSG et de la
CRDS, mais nous nous devons de souligner ici, une fois de plus, que ce ne sont
que les revenus dégagés de leurs placements par les particuliers - et bien
souvent par les plus modestes d'entre eux - qui sont seuls concernés.
Dans les faits, les revenus financiers des entreprises, produit de leurs
placements ou de leurs participations, échappent largement à toute
participation au financement de la protection sociale.
Cette situation est préjudiciable à plus d'un titre. Elle prive, en effet, la
protection sociale de ressources non négligeables. Par ailleurs, elle incite
les entreprises à pratiquer plus largement encore restructurations juridiques
et comptables et substitution du capital au travail.
Mettre aujourd'hui à contribution les revenus financiers des entreprises,
au-delà des recettes que la protection sociale pourrait en tirer, signifie donc
aussi permettre de modifier le comportement des agents économiques et favoriser
la durabilité des ressources de la protection sociale.
L'oeuvre permanente de solidarité collective et intergénérationnelle que
constitue la sécurité sociale implique que les revenus financiers des
entreprises soient clairement mis à contribution, au même niveau que les
revenus financiers des particuliers.
C'est sous le bénéfice de ces observations que j'invite le Sénat à adopter cet
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Nous saluons le souci de M. Fischer, qui souhaite trouver des
ressources nouvelles au profit de la sécurité sociale. Nous lui conseillons
cependant, pour ce faire, de suivre plutôt les propositions de la commission,
qui ont pour objet de rétablir, en faveur de la sécurité sociale, les
ressources dont elle a été privée pour financer le FOREC.
M. Alain Gournac.
Voilà ! Bravo !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
C'est la raison pour laquelle nous ne pouvons qu'émettre un
avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 95, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 94, présenté par M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« La sous-section 2 de la section première du chapitre 1er du titre IV du
livre II du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 241-4-1
ainsi rédigé :
«
Art. L. 241-4-1.
- Le taux de la cotisation est modulé pour chaque
entreprise selon la variation de sa masse salariale dans la valeur ajoutée
globale. Le comité d'entreprise, ou, à défaut, les délégués du personnel, sont
associés au contrôle de ce ratio. »
La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau.
La question du financement de la réduction du temps de travail, comme
d'ailleurs l'existence de maintes dispositions d'allégements de cotisations
sociales, est l'une des questions récurrentes du débat parlementaire.
Evidemment, nous ne pouvons manquer de rappeler ici que la même majorité
sénatoriale a soutenu sans hésitation dans le passé des politiques de large
exonération qui ont conduit à la situation de déséquilibre des comptes sociaux
que nous avons connue, et ce sans aucune contrepartie pour l'emploi et pour les
salariés.
Ces politiques ont montré leurs limites et ont notamment permis de favoriser
les formes les plus diverses de précarité du travail qui sont à la source de
nombre des difficultés que la protection sociale, comme l'économie du pays en
général, a pu connaître et connaît pour partie encore.
Nous partons d'un constat, celui de la persistance dans notre pays d'un volant
important d'emplois sous-rémunérés parce que issus de qualifications non
reconnues en termes salariaux.
Ce volant d'emplois connaît une série de fortes incitations fiscales et
sociales, illustrée par ce que doit financer le FOREC aujourd'hui, ou encore
par la prime pour l'emploi compensant pour partie le poids de l'impôt sur le
revenu et la faiblesse des salaires.
Mais cette situation est loin d'être satisfaisante. Elle atteste, notamment,
de la médiocre qualité des offres d'emploi, conduisant dans certains secteurs à
de nombreuses désaffections - considérez par exemple, mes chers collègues, ce
qui vient de se passer dans le secteur de l'hospitalisation privée ou encore ce
qui perdure dans le bâtiment ou dans le secteur de l'hôtellerie - mais elle
atteste aussi de l'insuffisance de la prise en compte effective des
qualifications et de l'expérience acquise par les salariés au niveau de la
rémunération.
Notre amendement tend donc à moduler le montant de l'aide accordée par l'Etat
aux entreprises en fonction de l'utilisation effective de la richesse créée par
le travail en termes de créations d'emplois ou de formation des salariés.
Plus la part de la valeur ajoutée destinée à cet usage sera élevée, plus
l'aide sera importante. Plus elle sera faible, plus l'aide sera affaiblie
d'autant.
C'est sous le bénéfice de ces observations que je vous invite, mes chers
collègues à adopter cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 94.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Permettez-moi de présenter juste une observation à propos de cet amendement -
que je n'approuve pas, mais la question n'est pas là.
Alors que nous sommes dans le domaine de la parafiscalité sociale, nos
collègues du groupe communiste républicain et citoyen souhaitent que le comité
d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel soient associés au
contrôle d'un ratio qu'ils définissent par ailleurs.
Or, en France, compte tenu du régime politique qui est le nôtre, nul ne peut
participer à la fixation de l'assiette de l'impôt, qui relève du seul pouvoir
exécutif et des administrations placées sous son autorité.
Accepter de placer le recouvrement d'une cotisation sociale ou d'un impôt sous
le contrôle d'un comité - si honorable soit-il - ce serait, mes chers
collègues, s'engager dans un domaine dans lequel même la Chine populaire n'a
pas engagé autrefois ses comités d'ouvriers, ses comités de paysans et ses
comités de soldats.
(M. Fischer proteste. - Rires sur les travées du
RPR.)
Je le dis gentiment, mon cher collègue ! Je pense ; en tout cas ; qu'il
vaudrait mieux éviter ce genre de tentations, parce que ce serait mettre le
doigt dans un engrenage dont personne ne sait vraiment où il pourrait nous
conduire !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
M. Charasse parle d'or !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 94, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 82, présenté par M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le 1° de l'article L. 241-6 du code de la sécurité sociale, les mots :
"proportionnelles à l'ensemble des rémunérations ou gains perçus par les
salariés des professions non agricoles", sont remplacés par les mots :
"modulées pour chaque entreprise selon la variation de sa masse salariale dans
la valeur ajoutée globale, ratio pour le contrôle duquel sont associés le
comité d'entreprise, ou, à défaut, les délégués du personnel". »
La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau.
Depuis plusieurs années, la question de la réforme des cotisations sociales
est au coeur du débat sur le devenir même de notre système de protection
sociale.
Reconnaissons tout d'abord que l'assiette actuelle des cotisations a largement
permis de constituer avec le temps une assise solide de financement de ce
système de protection, alors même que la fiscalisation croissante de celui-ci
est une réalité de plus en plus prégnante.
Nous avons eu, dans le passé, l'occasion de souligner que cette fiscalisation
était, sous certains aspects, porteuse de dangers pour le financement global de
ce système, en éloignant chaque jour un peu plus le lieu de création des
richesses - à savoir l'entreprise - du lieu de prélèvement des ressources
destinées à financer la protection sociale.
Pour autant, bien comprises et bien conçues, certaines dispositions fiscales
relatives à la protection sociale sont susceptibles de provoquer une
modification de comportement des agents économiques et de renforcer, par
conséquent, le recours aux formes essentielles du financement de la protection
sociale.
On soulignera ici, en particulier, le sens donné, selon nous, à la
contribution sociale sur les bénéfices ou encore le sens que l'on peut donner à
toute disposition de financement de la protection sociale fondée sur la
sollicitation des revenus financiers des entreprises comme des particuliers.
Dans le présent amendement, c'est cette logique qui est encore pleinement à
l'oeuvre.
Il s'agit, en effet, de créer un mode de variation de la contribution sociale
de chaque entreprise de notre pays fondé sur l'analyse de l'affectation de la
valeur ajoutée créée par le travail de ses salariés.
Dans les faits, on partirait donc de l'analyse des soldes de gestion tels que
mesurés dans le dernier exercice précédant la réforme et l'on affecterait un
coefficient de correction de la contribution en fonction de la part prise par
les salaires dans l'utilisation du complément de valeur ajoutée créée par
chaque année d'activité.
Toute politique ou toute stratégie tendant à favoriser la substitution du
capital au travail, à compresser les dépenses de formation et d'emploi en
faveur du seul profit financier serait donc pénalisée, tandis que toute
politique tendant à valoriser l'emploi, la formation et la promotion des
salariés serait susceptible d'alléger le montant de la contribution de
l'entreprise concernée.
Ce dispositif, au demeurant, nous semble plus pertinent que tous ceux qui, au
motif d'alléger le « coût du travail », selon une terminologie que nous ne
partageons pas, n'ont finalement favorisé que le développement du travail
sous-rémunéré, générateur de précarité et de frustration pour des salariés dont
la qualification n'est, souvent, pas véritablement reconnue.
C'est sous le bénéfice de ces observations que nous versons cet amendement au
débat et que nous invitons, le Sénat à l'adopter.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
La commission émet le même avis défavorable que sur
l'amendement n° 94, pour des motifs similaires à ceux que M. Charasse a très
bien développés, expliquant ainsi l'opposition de la commission des affaires
sociales.
M. Michel Charasse.
Sur la forme !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je n'avais pas moi-même pris le temps de développer ces
arguments,...
M. Michel Charasse.
A tort !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
... mais nous les faisons nôtres, car nous les partageons.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 82, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 4 bis
M. le président.
« Art. 4
bis
. - I. - Le premier alinéa du III de l'article L. 136-6 du
code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le produit de cette contribution est versé à l'Agence centrale des
organismes de sécurité sociale sans déduction d'une retenue pour frais
d'assiette et de perception.
« II. - Le 2 du I de l'article 1641 du code général des impôts est complété
par les mots : ", à l'exception des organismes de sécurité sociale et de leurs
fonds de financement".
« III. - Les articles L. 133-1 et L. 135-5 du code de la sécurité sociale, le
III de l'article 1647 du code général des impôts et l'article 8 de l'ordonnance
n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale sont
abrogés.
« IV. - La taxe sur la valeur ajoutée est majorée à due concurrence. »
- (Adopté.)
Article 5
M. le président.
« Art. 5. - I. - Sont acquises par le fonds créé à l'article L. 131-8 du code
de la sécurité sociale à titre de produits toutes les recettes mentionnées à
l'article L. 131-10 du même code encaissées à compter du 1er janvier 2001.
« II. - Le total des produits enregistrés comptablement au 31 décembre 2000
par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, en application des
dispositions du deuxième alinéa du III de l'article 5 de la loi de financement
de la sécurité sociale pour 2000 (n° 99-1140 du 29 décembre 1999) est notifié
par ladite agence à chacune des branches du régime général de sécurité sociale
et à la mutualité sociale agricole, au prorata des exonérations mentionnées au
1° de l'article L. 131-9 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue
de la même loi et enregistrées comptablement par chacun de ces organismes au
titre de la même année.
« Sont annulées les créances sur le fonds créé à l'article L. 131-8 du code de
la sécurité sociale, enregistrées au 31 décembre 2000 par l'Agence centrale des
organismes de sécurité sociale et par les régimes concernés, afférentes aux
exonérations visées au 1° de l'article L. 131-9 du même code dans sa rédaction
issue de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 précitée. En
conséquence, les comptes de l'exercice 2000 des organismes de sécurité sociale
concernés sont modifiés pour tenir compte de cette annulation.
« III. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa de l'article L. 131-9, le mot : "dépenses" est remplacé
par le mot : "charges" ;
« 2° Au premier alinéa de l'article L. 131-10, les mots : "recettes du fonds
sont constituées" sont remplacés par les mots : "produits du fonds sont
constitués" ;
« 2°
bis
Au début des troisième (2°), quatrième (3°) et sixième (5°)
alinéas de l'article L. 131-10, sont insérés les mots : "Le produit de" ;
« 2°
ter
Le début du septième alinéa (5°
bis
) de l'article L.
131-10 est ainsi rédigé : "Une fraction du produit de la taxe...
(Le reste
sans changement.)
" ;
« 3° Au dernier alinéa de l'article L. 131-10, le mot : "recettes" est
remplacé par le mot : "produits", le mot : "dépenses" par le mot : "charges" et
le mot : "équilibrées" par le mot : "équilibrés".
« IV. - Le troisième alinéa de l'article L. 135-1 du même code est complété
par les mots : ", ainsi que le Fonds de financement de la réforme des
cotisations patronales de sécurité sociale institué par l'article L. 131-8".
« V. - Les dispositions des III et IV entrent en vigueur au 1er janvier 2001.
»
La parole est à M. Chabroux.
M. Gilbert Chabroux.
A ce moment du débat, et alors que nous allons parler et reparler du FOREC,
que M. le rapporteur va parler et reparler du FOREC, faut-il vous rappeler,
monsieur Vasselle, mes chers collègues de la majorité sénatoriale, qu'ici tout
nous divise ?
M. Bernard Murat.
Oh !
M. Gilbert Chabroux.
Nous n'avons pas les mêmes idéaux, nous n'avons pas les mêmes préoccupations,
nous n'avons pas les mêmes analyses.
Nous pensions, peut-être naïvement, avant ce débat qu'il nous restait en
commun une certaine rigueur intellectuelle.
(Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Vasselle nous a fait, hier soir, la démonstration du contraire.
(Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
Il n'est nul besoin, je crois, de faire excessivement appel au patriotisme
économique pour constater que les comptes de la sécurité sociale sont
redressés. Si j'en crois le premier paragraphe du rapport de la Cour des
comptes : « Le régime général de la sécurité sociale a dégagé un excédent de
5,2 milliards de francs en 2000. Pour l'année 2001, les hypothèses retenues par
l'administration conduisent à un excédent de 7,9 milliards de francs. »
Les chiffres sont là ! Les résultats sont là ! Il y a une réalité que vous
avez du mal à accepter, tout simplement parce qu'elle n'est pas de votre
fait.
M. Jean Chérioux.
C'est vous qui êtes comme ça, pas nous !
M. Gilbert Chabroux.
Pour mesurer le chemin parcouru, il convient de se référer à l'année 1996,
lorsque, le 24 janvier, les ordonnances Juppé créaient la Caisse
d'amortissement de la dette sociale, la CADES, et la contribution pour son
remboursement. A l'époque, la mission confiée à la CADES était tout simplement
de prendre à son compte le déficit cumulé des années 1994 et 1995, c'est-à-dire
137 milliards de francs.
La bonne santé retrouvée, c'est avant tout plus d'emplois, et, plus d'emplois,
ce sont les emplois-jeunes, les dispositifs spécifiques d'insertion et la
réduction du temps de travail.
M. Bernard Murat.
Il faut les financer !
M. Gilbert Chabroux.
Sans cette politique innovante, sans cette lutte contre le chômage, nous n'en
serions pas là. Ces résultats, ce sont ceux de notre politique sociale et pas
ceux de la vôtre.
Vous osez parler d'une « fragilisation extrême des comptes sociaux », d'un «
contexte économiquement dégradé », « d'un immobilisme réitéré face aux réformes
nécessaires pour garantir l'avenir de notre système de protection sociale » et
de « bilan désastreux ». Vous dites que nous voudrions « nettoyer la sécurité
sociale jusqu'à l'os ». Ce n'est pas sérieux !
Monsieur Vasselle, vos propos outranciers témoignent de votre déstabilisation.
Tout ce qui est excessif est insignifiant, disait Talleyrand.
M. Jean Chérioux.
C'est bien vrai !
(Sourires.)
M. Alain Gournac.
Tout à fait !
M. Gilbert Chabroux.
Nous sommes pour les 35 heures et nous soutiendrons le Gouvernement sur toutes
les dispositions qu'il prendra pour continuer à créer de l'emploi et à
améliorer la qualité de vie de tous nos concitoyens.
Ne vous en déplaise, les fruits de la croissance n'ont pas été gâchés.
Nous le dirons aux Français et, quand vous tenterez de leur faire croire le
contraire, ils seront en droit de vous demander ce que vous envisagez et que,
pendant cinq ans, vous avez été incapables de leur proposer.
Faut-il rappeler que, entre 1997 et 2001, 1 500 000 emplois ont été
créés...
M. Alain Gournac.
Merci la relance !
M. Gilbert Chabroux.
... et qu'au 23 octobre 2001 94 000 entreprises sont passées aux 35 heures et
8 millions de salariés ont vu leur qualité de vie améliorée ?
M. Alain Gournac.
Ce n'est pas sérieux !
M. Gilbert Chabroux.
Faut-il rappeler que l'on compte 380 000 engagements de création ou de
préservation d'emplois dans le cadre de la RTT ?
Faut-il rappeler que les 35 heures, ce sont plus d'emplois, des rentrées de
cotisations sociales supplémentaires, des recettes fiscales nouvelles pour le
budget de l'Etat, des heures de loisirs retrouvées pour 8 millions de salariés
?
M. Josselin de Rohan.
C'est le paradis !
M. Jean Chérioux.
C'est le rêve !
M. Gilbert Chabroux.
Faut-il rappeler que, si le FOREC finance les 35 heures à hauteur de 36
milliards de francs, il finance les allégements de charges sociales dans le
cadre de la ristourne Juppé à hauteur de 66 milliards de francs ?
Faut-il vous rappeler de ne pas oublier systématiquement de parler de la
réforme qui a consisté à supprimer la part sociale de l'assiette de la taxe
professionnelle, ce qui revient à un allégement de charges de 8 % ?
M. Josselin de Rohan.
Tant pis pour les régions !
M. Gilbert Chabroux.
Pourquoi la passer par pertes et profits ? Croyez-vous que, au motif que vous
n'en parlez pas, les entreprises n'en bénéficient pas ? Quelles sont les
raisons de cet oubli ?
Peut-être ne voulez-vous pas vous souvenir que cet impôt sur l'emploi a été
créé en 1975 par un gouvernement dirigé à l'époque par M. Jacques Chirac !
Mes chers collègues, nous voterons contre tous les amendements que vous
présenterez sur le FOREC.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Jean Chérioux.
C'est un événement !
M. le président.
La parole est à M. Gournac.
M. Alain Gournac.
Je ne voudrais pas entamer une polémique, mais je ne peux que réagir quand
notre collègue parle de rigueur, alors qu'il s'agit de « tuyauteries », de
dispositifs que nous ne pourrons pas expliquer aux Français.
Quand dans une salle, on nous demande à nous élus, sénateurs ou députés,
d'expliquer de quoi il s'agit, nous avons des difficultés.
(Sourires.)
Il ne faut donc pas nous attaquer sur la rigueur, surtout pas en ce
moment.
En ce qui concerne les 35 heures, je dirai sseulement à notre collègue qu'il
doit avoir très peu de petites et moyennes entreprises dans son département.
Sinon, il saurait que tous les chefs d'entreprise ont le plus grand mal à
mettre en place les 35 heures.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants.)
On peut toujours donner des leçons !
M. Jean Chérioux.
Ce sont des spécialistes !
M. Alain Gournac.
C'est facile, mais il faut de temps en temps s'abstenir, surtout quand on a
des difficultés à expliquer une proposition.
L'annulation rétroactive pure et simple de la dette du FOREC à l'égard des
régimes de sécurité sociale pour l'année 2000 n'est qu'un épisode parmi
d'autres de la mise à contribution du régime de base de notre protection
sociale au profit des 35 heures.
Sous l'apparente vertu de se conformer à l'avis de la Cour des comptes, vous
privez d'un coup la sécurité sociale, dont la santé financière n'est pas si
bonne,...
M. Claude Estier.
Elle est meilleure que de votre temps !
M. Alain Gournac.
... d'une recette qui lui est due.
Le premier président de la Cour a tenu à faire savoir au président de notre
commission des affaires sociales que l'article 5 ne reflétait pas leur
position, cette dette devant s'imputer sur l'année 2001. Mais une telle
imputation aurait, bien sûr, mis en évidence une dégradation des comptes de
2001, et l'affichage en aurait été politiquement déplorable.
Par ailleurs, comme vous transférez au FOREC des recettes fiscales dont les
plus dynamiques étaient précédemment affectées à la sécurité sociale. Cette
dernière est doublement pénalisée.
L'improvisation de votre coûteuse politique de l'emploi, dont les fruits
demeurent difficilement évaluables,...
M. Gilbert Chabroux.
C'est le plan Juppé !
M. Alain Gournac.
... coûte 30 milliards de francs au régime général et 22 milliards au fonds de
solidarité vieillesse. Autant qui ne pourra être consacré au fonds de réserve
des retraites.
Chaque loi de financement est l'occasion, pour vous, de mettre en oeuvre de
subtiles combinaisons de transferts de fonds pour tenter d'équilibrer
financièrement le FOREC.
Chaque année est l'occasion de constater que la croissance des dépenses est de
moins en moins maîtrisée.
En conséquence, chaque année est l'occasion de la mise en place de circuits de
financement toujours plus opaques qui n'échappent cependant pas à la sagacité
des rapporteurs du Sénat, que je tenais à saluer pour l'excellencede leurs
travaux.
(M. Chérioux applaudit. - M. Estier s'esclaffe.)
Les rapporteurs nous permettent de dénouer les « tuyauteries » mises en place
par le Gouvernement.
En tout état de cause, le groupe du RPR du Sénat ne peut que s'opposer aux
méthodes employées par le Gouvernement et adopter l'amendement de suppression
de cette disposition proposé par la commission des affaires sociales.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
En 2002, les exonérations de cotisations sociales patronales vont atteindre
142 milliards de francs. Elles auront ainsi été multipliées par trois en
quelques années.
Rien qu'au titre de la ristourne dite « Juppé » sur les bas salaires, étendue
par Mme Martine Aubry jusqu'à 1,8 fois le SMIC, et des 35 heures, le montant de
ces exonérations en faveur du patronat dépassera les 100 milliards de francs
l'an prochain.
L'examen des articles relatifs aux conditions d'organisation et de financement
du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité
sociale montre que ces 100 milliards de francs vont presque entièrement peser
sur les comptes de la sécurité sociale.
Le FOREC est, certes, censé compenser les pertes de recettes dues à la
réduction des cotisations patronales. Mais il s'avère, d'une part, qu'il ne le
fera pas entièrement et, d'autre part, qu'il le fera avec des ressources qui
étaient déjà principalement affectées au budget de la sécurité sociale.
Cette réalité transparaît malgré la complexité des transferts organisés vers
le FOREC.
D'abord, dans cet article 5, on nous demande de voter l'abandon de la créance
de l'assurance maladie sur ce fonds au titre de 2000.
Ce sont ainsi 16 milliards de francs d'exonérations de cotisations patronales
pour 2000 qui ne seront, en définitive, pas compensés, plongeant
a
posteriori
les comptes de 2000 dans un déficit de 1 milliards de francs,
comme le souligne - je suis obligée de le dire - le rapport de la Cour des
comptes de septembre dernier.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Le rapport de la commission aussi !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je sais qu'il est toujours difficile de jongler avec les milliards et de se
rendre compte exactement de ce que ces sommes représentent. Cela dit, avec ces
16 milliards de francs abandonnés par la sécurité sociale et déjà perçus par le
patronat, on pourrait financer 60 000 emplois supplémentaires par an dans les
hôpitaux publics.
Concernant les ressources pérennes attribuées depuis deux ans au FOREC et
complétées par l'article 6 du présent projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 2002, on s'aperçoit, sans entrer dans les détails,
qu'elles proviennent largement de taxes et d'impôts qui étaient déjà affectées
précédemment à la sécurité sociale et que je rappelle ici : 54 milliards de
francs de droits sur les tabacs qui allaient à l'assurance maladie, 12
milliards de francs de droits sur les alcools qui allaient au fonds de
solidarité vieillesse et aux régimes d'assurance maladie, 5,9 milliards de
francs de taxe sur les véhicules à moteur également répartis auparavant entre
les différents régimes.
Plus de 80 % des 102 milliards de francs de recettes transférées au FOREC sont
dans ce cas. En d'autres termes, pour financer les cadeaux consentis au
patronat, on prend sur l'argent de la sécurité sociale.
Cela veut dire qu'il va bel et bien manquer chaque année près de 100 milliards
de francs à la sécurité sociale correspondant aux déductions de cotisations
patronales, 100 milliards de francs qu'il faut comparer avec les 3,9 milliards
de francs de « rallonge », obtenus si difficilement, malgré l'ampleur des
luttes, en première lecture à l'Assemblée nationale, et dont 2,9 milliards de
francs ne correspondent pas à des recettes nouvelles.
Ces dernières années, les effets négatifs de la montée en puissance de ces
dispositifs d'exonération sur les comptes de la sécurité sociale ont été
masqués par l'amélioration très nette de la conjoncture et par la croissance.
Ces deux facteurs auraient dû conduire, sans les exonérations, à des excédents
de plusieurs dizaines de milliards de francs, qui auraient pu et dû servir à
l'hôpital public, à l'amélioration des remboursements ou à la revalorisation
des retraites.
Avec la dégradation de la conjoncture économique, l'ensemble des exonérations
de cotisations patronales vont engendrer un nouveau déficit de la « sécu », au
nom duquel - la méthode est connue - on tentera encore d'imposer de nouveaux
sacrifices aux assurés sociaux.
J'ai bien constaté que la majorité sénatoriale dénonce avec acharnement le
FOREC, son mode de financement et son coût pour la sécurité sociale. Mais,
soyez tranquilles, messieurs les rapporteurs, nous n'entrons pas dans ce
jeu.
Votre démonstration contre le FOREC est de mauvaise foi.
M. Guy Fischer.
Oui !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Ce sont bien les gouvernements de votre majorité, en particulier le
gouvernement Juppé, qui ont amorcé les systèmes d'exonération des cotisations
patronales !
M. Alain Gournac.
Vous avez continué !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Aujourd'hui, vous prétendez qu'ils ne doivent pas peser sur la sécurité
sociale et vous ne cessez de vous en prendre aux 35 heures.
Mais si vous deviez revenir aux affaires, reviendriez-vous sur les 35 heures
et leur financement en faveur du patronat, sur les exonérations que vous avez
vous-mêmes approuvées ? Sinon comment les financeriez-vous ? Peut-être en
prélevant sur les dépenses publiques et sociales du budget de l'Etat, sur
l'éducation, la justice, ou en creusant le déficit budgétaire !
En ce qui nous concerne, nous demandons la suppression de toutes les
exonérations en faveur du patronat. En donnant satisfaction au MEDEF, qui
réclame toujours plus en matière de réduction du coût du travail, vous mettez
en cause la sécurité sociale.
D'ailleurs, tous les gouvernements se sont bien gardés de satisfaire notre
demande de constitution d'une commission d'évaluation des résultats de ces
mesures.
M. le président.
Veuillez conclure, madame Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Si elles ont eu des répercussions sur le monde du travail, c'est assurément
comme machine de guerre contre les salaires. Elles sont un véritable
encouragement, une subvention à la pratique des bas salaires.
A cet égard, 9 millions de salariés en France touchent moins de 1,4 fois le
SMIC et 90 % des emplois créés depuis 1997 sont de ce type.
Il faut inverser dès maintenant cette logique.
Les propositions de mon groupe pour mettre à contribution les revenus
financiers des entreprises pour augmenter la contribution sociale sur les
bénéfices, la CSB, ou pour moduler les cotisations patronales selon la taille
de l'entreprise et sa politique de l'emploi vont dans ce sens.
Je remarque pourtant, mes chers collègues, que les quatre amendements que nous
venons de présenter se sont heurtés à un refus.
Je regrette, par ailleurs, madame la ministre, de ne pas avoir eu de réponse
plus argumentée.
M. le président.
L'amendement n° 4, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, est ainsi libellé :
« Supprimer le second alinéa du II de l'article 5. »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Cet amendement va me donner l'occasion de relever certaines
inexactitudes ; ou tout au moins les quelques éléments avec lesquels, dans sa
réponse à la fin de la discussion générale, Mme Guigou a tenté de semer le
trouble, le doute, dans l'esprit d'un certain nombre de parlementaires, voire
de l'opinion publique par l'intermédiaire des médias qui nous écoutaient.
(Protestations sur les travées socialistes.)
Les propos tenus par M. Chabroux me confortent dans cette idée. Ils n'ont été
relayés que partiellement par Mme Beaudeau, qui a d'ailleurs utilisé des termes
tout à fait différents. Son analyse est en effet beaucoup plus proche de celle
de la commission des affaires sociales que de celle de M. Chabroux et de ses
amis !
(Vives protestations sur les travées du groupe communiste
républicains et citoyen.)
M. Jean Chérioux.
C'est vrai !
M. Guy Fischer.
Cela n'a rien à voir ! Vous ne comprenez rien !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Elle dénonce elle-même le risque de déséquilibre des comptes
de la sécurité sociale par l'ensemble des mesures prises par le
Gouvernement.
Certes, nous ne partageons pas les solutions alternatives qu'elle propose,
mais ces dernières présentent au moins l'avantage de ne pas mettre à mal les
comptes de la sécurité sociale, en particulier de la branche maladie, même si,
sur le plan philosophique, le fait de charger toujours un peu plus la barque
des entreprises pour assurer le financement de la sécurité sociale n'est pas
forcément la meilleure des solutions.
En effet, l'expérience du fonctionnement de notre économie nous a appris que
tout alourdissement des charges sur les entreprises pénalisait en définitive
les salariés, qui en sont eux-mêmes les premières victimes, les entreprises
perdant alors de leur compétitivité.
M. Josselin de Rohan.
Bien sûr !
M. Claude Estier.
On croirait entendre le MEDEF !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Elles finissent même, parfois, par déposer leur bilan, et
c'est l'emploi qui est supprimé. C'est un cercle infernal : on fait appel à la
solidarité nationale et l'on accroît, de ce fait, le poids des prélèvements
obligatoires !
(Protestations sur les travées socialistes et sur celles du
groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Claude Estier.
Ce n'est pas vrai !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Ce n'est certainement pas ce que vous souhaitez, mais c'est
bien pourtant le cercle vicieux dans lequel vous voulez nous entraîner, sans y
parvenir, car nous y sommes, bien sûr, opposés.
Hier, Mme Guigou a voulu nous faire croire que les chiffres relatifs à la
situation des comptes de la sécurité sociale pour la fin de l'exercice 2001
étaient positifs. Elle a appuyé sa démonstration sur les comptes tendanciels
établis par la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre
dernier, qui n'intégraient pas, et pour cause, les effets du projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 2002.
Là où le bât blesse, c'est que la mesure proposée pour l'article 5, qui vise à
annuler la dette du FOREC à l'égard de la sécurité sociale, si elle était
adoptée par le Sénat, comme elle l'a été par l'Assemblée nationale, aurait pour
effet de compromettre l'équilibre financier du régime général, qui, au lieu
d'afficher l'excédent tendanciel annoncé par Mme Guigou hier, je l'ai dit,
afficherait un déficit de 10,7 milliards de francs pour 2000. Voilà la réalité
!
En revanche, le fait de restituer à chacune des branches de la sécurité
sociale - la branche maladie, la branche vieillesse et la branche famille - les
recettes qui leur reviennent permettrait de dégager, pour le régime général, au
terme de l'exercice 2002, un excédent global de 35 milliards de francs. Ce
débranchage de la tuyauterie, si vous me permettez cette expression, aurait
pour conséquence, dans le même temps, un déficit de 30 milliards de francs pour
le FOREC.
Pardonnez-moi, madame Ségolène Royal, de m'adresser à vous pour faire ce
rappel alors que c'est à Mme Guigou qu'il s'adresse, puisque c'est elle qui a
tenu devant le Sénat les propos que je viens de rappeler.
M. Claude Estier.
Pourquoi ne lui avez-vous rien dit hier soir ?
M. Gilbert Chabroux.
Il fallait le dire à elle !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Mme Guigou nous avait fait comprendre qu'elle serait présente
aujourd'hui. Je ne l'accuse pas ; son agenda ne lui a peut-être pas permis de
se libérer. Quoi qu'il en soit, Mme Ségolène Royal, qui est là pour représenter
le Gouvernement, lui transmettra mes observations.
M. Claude Estier.
Vous n'aviez rien à dire !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Messieurs Chabroux et Estier, je sais bien que la vérité des
chiffres vous gêne, ...
M. Claude Estier.
Ce n'est pas la vérité !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
... d'autant plus que vous aurez des comptes à rendre aux
Français à l'occasion des prochaines échéances électorales,...
M. Jean Chérioux.
Cela se voit !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
... et que vous n'aurez aucun argument à nous opposer ! Mais
mon rôle est justement de dire la vérité aux Français sur la réalité des
comptes !
M. Claude Estier.
Ce n'est pas la vérité !
M. Guy Fischer.
C'est une contre-vérité !
M. Marcel Debarge.
Vous n'avez pas le monopole de la vérité !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Monsieur le président, pouvez-vous demander à nos collègues
de faire silence afin que je puisse terminer ?
M. le président.
Mes chers collègues, laissez M. le rapporteur s'exprimer !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je vous remercie, monsieur le président.
Je sais que ce n'est pas facile pour nos collègues socialistes d'entendre la
vérité des chiffres,...
M. Jean Chérioux.
Cela leur est pénible !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
... mais je tenais à leur rappeler combien la réalité est
différente de ce que le Gouvernement avait annoncé solennellement devant
l'Assemblée nationale ! Celui-ci avait en effet pris l'engagement que le FOREC
ne coûterait pas un seul centime aux régimes de sécurité sociale et qu'il y
aurait une compensation intégrale par des mannes fiscales ou des dotations
budgétaires de l'Etat.
M. Christian Demuynck.
Elle l'avait dit !
M. Alain Gournac.
Voilà la vérité !
M. Claude Domeizel.
Et la ristourne Juppé ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
La réalité est bien celle que je viens de vous décrire. La
création du FOREC représente, pour la sécurité sociale, une charge qui équivaut
à 30 milliards de francs par an !
M. Jean Chérioux.
Voilà !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Il fallait quand même que cela fût rappelé, même si ce rappel
est désagréable à entendre.
J'ajoute que le Gouvernement, gêné pour boucler son budget en loi de finances,
a usé d'un artifice qui a été, à juste raison, dénoncé par M. Fourcade lors de
la discussion générale. Il utilise la CADES - cette fameuse caisse créée pour
amortir la dette globale du régime de la sécurité sociale - ...
M. Gilbert Chabroux.
C'est vous qui l'avez créée !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
... pour alimenter le budget de l'Etat et disposer, dans un
délai relativement court, de ressources nouvelles ! Ce stratagème place la
CADES dans une situation d'autant plus difficile qu'elle va devoir rembourser à
l'Etat la dette de la sécurité sociale prise en charge par ce dernier au titre
des exercices antérieurs à 1994, soit 110 milliards de francs.
M. Jean Chérioux.
Exactement !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
De plus, le Gouvernement a ramené la période sur laquelle
serait étalé ce remboursement de sept ans à trois ou quatre ans. Ce laps de
temps très court accroît les difficultés de la CADES. En effet, pendant quatre
années, elle ne sera pas en mesure de rembourser le capital de la dette
antérieure. Elle pourra seulement faire face aux frais financiers résultant du
remboursement de la dette.
Ce stratagème, qu'il m'apparaissait utile de rappeler, permet certainement à
M. Fabius de respecter certains ratios budgétaires qui lui sont imposés par
l'Europe !
M. Alain Gournac.
Très bien !
M. Claude Estier.
Sous M. Juppé, le déficit n'avait cessé d'augmenter !
M. Gilbert Chabroux.
Et qui a créé la dette ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
S'agissant des allégements de cotisations, sur lesquels je me
suis déjà exprimé, je précise à l'attention de Mme Guigou que nous n'avons
jamais contesté l'initiative, prise par le Gouvernement, de prolonger les
mesures prises à l'époque par MM. Balladur et Juppé. Je pense en particulier à
la réduction dégressive sur les bas salaires. En revanche, nous contestons leur
financement.
Que l'on ne nous fasse pas dire ce que nous n'avons jamais dit ! Ces mesures -
que l'actuelle majorité d'ailleurs a confortées sur certains points - ne sont
pas négatives, puisqu'elles contribuaient à favoriser le maintien d'emplois non
qualifiés dans un certain nombre d'entreprises ou, tout au moins, d'emplois
qualifiés à bas salaires. Mais M. Juppé avait fait en sorte de les compenser
intégralement par des dotations de l'Etat !
M. Claude Estier.
Elles n'ont pas créé d'emplois !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Jamais ni M. Balladur ni M. Juppé n'ont fait supporter à la
sécurité sociale les dépenses que représente l'allégement des cotisations,
alors que, vous, vous avez fait tout le contraire !
J'en reviens aux chiffres cités par Mme Guigou à propos du FOREC, M. Chabroux
m'ayant invité à le faire. Elle m'a donné acte, hier ; du décompte aboutissant
à la somme de 102 milliards de francs pour le budget du FOREC.
L'allégement des cotisations institué par les lois dites Aubry I, Aubry II et
par le Gouvernement concernant les 35 heures a été estimé par Mme Guigou à 36
milliards de francs.
M. Claude Estier.
C'est-à-dire un tiers !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je lui ai fait remarquer qu'il fallait y ajouter les
dispositions de la loi dite Aubry II qui prolongeaient les mesures d'allégement
des cotisations décidées par M. Juppé, ce qui portait le total à 54 milliards
de francs. J'ai même voulu donner acte à Mme Guigou du montant qu'elle nous
avait annoncé.
Ce faisant, je l'ai prise à son propre piège en lui disant que si,
effectivement, le montant correspondant aux mesures qu'elle avait prises pour
les 35 heures ne représentait que 36 milliards de francs, elle aggravait la
contribution du régime général au financement des 35 heures. En effet, dans ce
cas de figure, cette contribution représente 88 % des dépenses du FOREC !
Elle aurait dû se caler plutôt sur le chiffre qui résulte de la situation
actuelle :
grosso modo
les mesures anciennes - mesures dites Juppé et
autres - représentent environ 48 % du budget du FOREC et les 35 heures
correspondent à 52 %, à la charge de la sécurité sociale de manière indue !
M. Claude Domeizel.
C'est vous qui le dites !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je terminerai ces considérations générales par un point que
nous dénonçons.
Dans ce pays, c'est en effet la première fois, au cours d'une législature,
qu'à l'occasion de l'examen d'un projet de loi de finances ou d'un projet de
loi de financement de la sécurité sociale un gouvernement contraint des
caisses, comme la CNAMTS ou la CNAVTS, à revenir sur des comptes arrêtés - ceux
de l'exercice 2000 - pour prendre en compte l'annulation d'une créance
concernant le financement de dépenses qui n'ont rien à voir avec la sécurité
sociale.
Cet exercice, vous l'admettrez, mes chers collègues, a de quoi surprendre, et
il nous amène à nous interroger. Il est de notre devoir d'attirer l'attention
des Français sur la manière dont le Gouvernement gère le budget de la France et
celui de la sécurité sociale.
M. Claude Estier.
Il le gère mieux que vous, en tout cas !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
C'est la raison pour laquelle la commission des affaires
sociales a décidé de procéder à une opération vérité, qui consiste à débrancher
toute la tuyauterie et à faire disparaître l'usine à gaz du FOREC.
Nous supprimons donc, avec cet amendement n° 4, le second alinéa du II de
l'article 5, qui prévoyait l'annulation de la dette du FOREC à l'égard du
régime général. Cette annulation va compromettre gravement l'équilibre
financier du régime général. En effet, si la mesure proposée n'était pas
adoptée, le déficit pour le seul exercice 2000 atteindrait 10,7 milliards de
francs.
Mes chers collègues, je vous propose d'adopter cet amendement, qui permettra
aux comptes de la sécurité sociale d'être dans l'état où ils auraient dû être
si le Gouvernement avait respecté les dispositions législatives et ses
engagements pris devant la représentation nationale.
(Applaudissements sur
les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
M. le rapporteur, que j'ai écouté très attentivement,
a été particulièrement brillant !
(Exclamations sur les travées du RPR et
des Républicains et Indépendants.)
M. Michel Charasse.
C'est un compliment qui ne coûte pas cher !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Je rappellerai, avec plus de modestie, que Mme Guigou
a annoncé, lors de la réunion de la commission des comptes de la sécurité
sociale le 16 juin, que, contrairement à ce que vous avez déclaré, l'écart
entre les dépenses et les recettes ne serait pas compensé, puisque les
entreprises ont bénéficié, en 2000, d'un montant d'allégement des charges
supérieur à celui qui était prévu, ce qui a été favorable à l'emploi.
Par ailleurs, la sécurité sociale a réalisé un excédent significatif de 5,2
milliards de francs en encaissements-décaissements et la mesure d'annulation de
créance des organismes de sécurité sociale sur le FOREC, qu'il vous est proposé
d'adopter, permet, plutôt que de céder à la solution de facilité, de conserver
cette créance alors même que nous savons qu'elle ne sera jamais honorée, et de
tirer les conséquences de cette décision dans les comptes. En droits constatés,
une annulation est nécessaire pour que le solde du FOREC non financé soit
retranscrit dans le compte de résultat des organismes.
C'est la réalité économique qui nous conduit à proposer de rattacher cette
annulation à l'année 2000, année au cours de laquelle la créance aurait pu être
recouvrée. C'est donc dans une logique de sincérité économique et de
transparence que le Gouvernement propose la modification des comptes des
organismes de sécurité sociale pour 2000.
En vous écoutant attentivement, monsieur le rapporteur, je ne voyais pas
beaucoup de différences entre vos arguments et ceux du MEDEF.
(Exclamations
sur les travées socialistes. - Protestations sur les travées du RPR.)
Je me faisais la réflexion, en tant que responsable politique, que,
finalement, votre argumentation très brillante cachait peut-être autre chose :
votre hostilité fondamentale au 35 heures.
(Applaudissements sur les travées
socialistes.)
Pourquoi ne pas le dire plus clairement ? Pourquoi ne pas
faire preuve de sincérité politique, comme nous le faisons en matière
économique, notamment en ce qui concerne la transparence des comptes ?
Nous défendons des projets politiques différents. Vous êtes contre les 35
heures, comme d'autres, en leur temps, étaient hostiles aux congés payés, avec
le même type d'arguments
(Applaudissements sur les travées socialistes. -
Protestations sur les travées du RPR)
: l'économie s'écroulerait, les
comptes seraient déficitaires ! Nous pensons différemment !
Il est vrai que les entreprises...
M. Josselin de Rohan.
Les entreprises, vous vous en fichez !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
... connaîtront peut-être quelques difficultés, ainsi
que la société tout entière, pour s'adapter à des projets sociaux
d'envergure.
Lorsque j'observe, en tant que ministre déléguée à la famille, que plus de 70
% des salariés qui ont bénéficié de la réduction du temps de travail utilisent
ce temps pour mieux s'occuper de leur conjoint, de leurs enfants, de leur
famille, de leurs loisirs ;...
(Exclamations sur les travées du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. Alain Gournac.
Tout est beau !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
... je déplore, monsieur le rapporteur, que, sur un
sujet comme celui-là, vous n'ayez que des arguments techniques et économiques à
nous proposer.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes. - Exclamations
sur les travées du RPR.)
M. Nicolas About,
président de la commission des affaires sociales.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About,
président de la commission.
Madame le ministre, vous n'aviez pas le
droit, me semble-t-il, de tenir de tels propos.
(Très bien ! sur les travées
du RPR. - Protestations sur les travées socialistes.)
Vous nous entraînez
dans un débat qui n'est pas celui d'aujourd'hui, c'est-à-dire le financement de
la sécurité sociale.
Les 35 heures, c'est la loi de la République, et personne dans cet hémicycle
n'est contre le respect de la loi de la République !
(Très bien ! sur les
travées du RPR.)
Un sénateur socialiste.
Vous êtes contre les 35 heures !
M. Nicolas About,
président de la commission.
Il n'est pas un seul sénateur qui,
aujourd'hui, s'opposera à la loi en vigueur. Elle existe et elle sera respectée
!
M. Claude Estier.
Encore heureux !
M. Nicolas About,
président de la commission.
En revanche, les salariés qui tentent d'avoir
un peu plus de temps libre, les mères et les pères de famille qui souhaitent se
consacrer davantage à leurs enfants, ont certainement envie de s'adresser à
vous aujourd'hui par ma voix ; madame le ministre.
(Exclamations sur les
travées socialistes.)
En effet, ils ne comprennent pas qu'un Etat, qu'un
gouvernement digne de ce nom, ne respecte pas ses engagements, à savoir la
compensation des exonérations de cotisations à la sécurité sociale.
Tous les Français vous disent aujourd'hui par ma voix qu'ils ne sont pas très
fiers d'un gouvernement qui ne tient pas sa parole. Quant aux sénateurs, ils
n'ont pas à être d'accord ou non avec les 35 heures.
(Protestations sur les
travées socialistes.)
Ce n'est pas le débat !
Par conséquent, au travers des propositions que nous faisons ce soir, nous
demandons simplement au Gouvernement d'être à la hauteur de ses engagements.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 4.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Je voterai, bien entendu, l'amendement présenté par la commission.
Je tiens à souligner la clarté des explications qui ont été données par le
rapporteur.
(Exclamations amusées sur les travées socialistes.)
Je sais bien que certains de nos collègues, plus spécialement M. Chabroux, qui
est intervenu tout à l'heure, ont toujours tendance à contester les chiffres et
à mettre en avant la fameuse gestion de 1993 à 1997.
Je rappellerai simplement que la dette de la CADES, qui s'élève à plus de 110
milliards de francs en raison, précisément, des opérations de « tuyautage »
dont nous avons parlé, est due à la gestion des socialistes avant 1993 !
(Applaudissements sur les travées du RPR. - Exclamations sur les travées
socialistes.)
M. Alain Gournac.
Eh oui !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Article 6
M. le président.
« Art. 6. - I. - A. - Le B du VII de l'article 16 de la loi de financement de
la sécurité sociale pour 2001 (n° 2000-1257 du 23 décembre 2000) est abrogé.
« B. - A compter du 1er janvier 2001, la fraction visée au 5°
bis
de
l'article L. 131-10 du code de la sécurité sociale est égale à 24,7 %.
« C. - Un arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre
chargé du budget fixe la date et le montant du reversement par l'Etat, au fonds
institué à l'article L. 131-8 du même code, des sommes perçues au cours de
l'exercice 2001 au titre du B.
« D. - A compter du 1er janvier 2002, la fraction visée au 5°
bis
de
l'article L. 131-10 du même code est égale à 30,56 %.
« II. - A. - Le chapitre VII du titre III du livre Ier du code de la sécurité
sociale est ainsi modifié :
« 1° Il est créé une section 1, intitulée : "Taxe sur les contributions au
bénéfice des salariés pour le financement des prestations complémentaires de
prévoyance", qui comprend les articles L. 137-1 à L. 137-4 ;
« 2° Il est créé une section 2, intitulée : "Contribution sur les abondements
des employeurs aux plans partenariaux d'épargne salariale volontaire", qui
comprend l'article L. 137-5 ;
« 3° Il est créé une section 3, intitulée : "Contribution assise sur les
contrats d'assurance en matière de circulation de véhicules terrestres à
moteur", qui comprend les articles L. 137-6 à L. 137-9 ainsi rédigés :
«
Art. L. 137-6
. - Une contribution est due par toute personne
physique ou morale qui est soumise à l'obligation d'assurance en matière de
circulation de véhicules terrestres à moteur instituée par l'article L. 211-1
du code des assurances.
« Cette contribution est perçue au profit du fonds mentionné à l'article L.
131-8.
« Le taux de la contribution est fixé à 15 % du montant des primes,
cotisations ou fractions de prime ou de cotisation afférentes à l'assurance
obligatoire susmentionnée.
«
Art. L. 137-7
. - La contribution est perçue par les entreprises
d'assurance, dans les mêmes conditions et en même temps que ces primes.
« Les entreprises d'assurance sont tenues de verser, au plus tard le 15 du
deuxième mois suivant le dernier jour de chaque bimestre, à l'Agence centrale
des organismes de sécurité sociale, le produit de la contribution correspondant
au montant des primes, cotisations ou fractions de prime ou de cotisation
d'assurance émises au cours de chaque bimestre, déduction faite des annulations
et remboursements constatés durant la même période et après déduction du
prélèvement destiné à compenser les frais de gestion dont le taux est fixé par
arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé des
assurances.
« A l'appui de chaque versement, elles sont tenues de produire à l'Agence
centrale des organismes de sécurité sociale une déclaration conforme à un
modèle fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre
chargé des assurances.
« La contribution est recouvrée et contrôlée par l'Agence centrale des
organismes de sécurité sociale dans les conditions prévues au 3° de l'article
L. 225-1-1.
«
Art. L. 137-8
. - Les organismes d'assurance et assimilés non établis
en France et admis à y opérer en libre prestation de services en application de
l'article L. 310-2 du code des assurances désignent un représentant résidant en
France, personnellement responsable des opérations déclaratives et du versement
des sommes dues.
«
Art. L. 137-9
. - Un décret en Conseil d'Etat fixe, en tant que de
besoin, les modalités d'application de la présente section.
« B. - 1. Le chapitre III du titre Ier du livre II du code des assurances est
abrogé.
« 2. Dans l'article L. 214-3 du même code, la référence : "L. 213-1" est
supprimée.
« 3. Après le mot : "assurés", la fin de l'article L. 241-1 du code de la
sécurité sociale est ainsi rédigée : "et par une fraction du produit des
contributions sociales mentionnées aux articles L. 136-1, L. 136-6, L. 136-7 et
L. 136-7-1".
« C. - Les dispositions des A et B s'appliquent aux primes ou cotisations ou
fractions de prime ou de cotisation d'assurance émises à compter du 1er janvier
2002.
« D. - Après le 5°
bis
de l'article L. 131-10 du code de la sécurité
sociale, il est inséré un 5°
ter
ainsi rédigé :
« 5°
ter
Le produit de la contribution visée à l'article L. 137-6.
« III. - A. - Au 4° de l'article L. 131-10 du code de la sécurité sociale, les
mots : "ainsi qu'une fraction égale à 55 % du produit" sont remplacés par les
mots : "ainsi que le produit".
« B. - Le huitième alinéa de l'article L. 241-2 du même code est supprimé.
« C. - Les dispositions des A et B s'appliquent aux sommes à recevoir à
compter du 1er janvier 2001.
« D. - Un arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget
fixe la date et le montant du reversement par la Caisse nationale de
l'assurance maladie des travailleurs salariés, au fonds institué à l'article L.
131-8 du code de la sécurité sociale, des sommes perçues au cours de l'exercice
2001 au titre du 4° de l'article L. 131-10 du même code.
« IV. - A. - Au 1° de l'article L. 131-10 du code de la sécurité sociale, le
pourcentage : "97 %" est remplacé par le pourcentage : "90,77 %".
« B. - Au septième alinéa de l'article L. 241-2 du même code, le pourcentage :
"2,61 %" est remplacé par le pourcentage : "8,84 %".
« C. - Les dispositions du présent IV s'appliquent aux sommes à recevoir à
compter du 1er janvier 2002.
« V. - A. - Après le 5°
ter
de l'article L. 131-10 du code de la
sécurité sociale, il est inséré un 5°
quater
ainsi rédigé :
« 5°
quater
Le produit de la taxe sur les contributions au bénéfice des
salariés pour le financement des prestations complémentaires de prévoyance
visée à l'article L. 137-1 ; ».
« B. - Le 3° de l'article L. 135-3 du même code est abrogé.
« C. - A l'article L. 137-1 du même code, les mots : "Fonds de solidarité
vieillesse" sont remplacés par les mots : "fonds institué à l'article L.
131-8".
« D. - Les dispositions du présent V sont applicables aux sommes à recevoir à
compter du 1er janvier 2002. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 5 est présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales.
L'amendement n° 46 est déposé par Mme Bocandé, M. Franchis et les membres du
groupe de l'Union centriste.
Ces amendements sont ainsi libellés :
« Rédiger comme suit l'article 6 :
« I. - Sont abrogés :
« A. - Le III de l'article 16 de la loi de financement de la sécurité sociale
pour 2000 (n° 99-1140 du 29 décembre 1999).
« B. - L'article 31 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001
(n° 2000-1257 du 23 décembre 2000).
« C. - Les I, III, IV, V, VIII et IX de l'article 16 de la loi précitée n°
2000-1257 du 23 décembre 2000.
« D. - Le IV de l'article 29 de la loi de finances pour 2001 (n° 2000-1352 du
30 décembre 2000).
« E. - Les dix-septième et vingt-troisième alinéas de l'article 5 de la loi
précitée n° 99-1140 du 29 décembre 1999.
« F. - La seconde phrase du III de l'article 5 de la loi précitée n° 99-1140
du 29 décembre 1999.
« G. - L'article 17 de la loi précitée n° 2000-1257 du 23 décembre 2000.
« H. - L'article 21 de la loi précitée n° 2000-1257 du 23 décembre 2000.
« II. - Les dispositions du présent article s'appliquent à compter du 1er
janvier 2001.
« III. - Un arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget
fixe la date et le montant des reversements devant être effectués, en
application du présent article, entre les différents organismes concernés. »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 5.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je déplore les affirmations de Mme le ministre - même si
elles ont été accompagnées d'un sourire angélique
(Sourires)
- selon
lesquelles nous serions opposés aux 35 heures,...
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Eh oui !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
... nous serions contre les congés payés, contre les acquis
du Front populaire. C'est tout juste si elle ne nous a pas dit que nous serions
pour le rétablissement de l'esclavage !
(Exclamations sur les travées
socialistes.)
Ce qui vous gêne, c'est que nous ne voulons pas engager un débat sur le fond à
propos des 35 heures lors de l'examen du projet de loi de financement de la
sécurité sociale. Ce n'est pas le moment ! Ce que nous contestons, c'est
uniquement le financement de cette disposition !
Evidemment, vous vous esquivez, madame le ministre, parce que vous savez que
c'est un terrain sur lequel vous n'êtes pas du tout à l'aise.
(Exclamations
sur les travées socialistes.)
Vous essayez donc de nous entraîner sur un
autre terrain !
M. Jean Chérioux.
Pour noyer le poisson !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Ce n'est pas la bonne solution !
Mes chers collègues, l'article 6 ne fait que confirmer les dispositions que
vous avez adoptées tout à l'heure à l'article 5. Nous débranchons toute la «
tuyauterie » du FOREC pour permettre à chacune des branches de retrouver ses
ressources, à l'ensemble du régime de retrouver un excédent et pour mettre le
Gouvernement devant ses responsabilités : il doit respecter ses engagements et
compenser les charges créées par la mise en oeuvre des 35 heures et les
allégements qui l'accompagnent.
Tel est l'objet de cet amendement, qui est en complète cohérence avec ce que
j'ai exposé précédemment.
M. le président.
La parole est à M. Lorrain, pour présenter l'amendement n° 46.
M. Jean-Louis Lorrain.
Je n'ai pas grand-chose à ajouter, car notre amendement est dans la droite
ligne de celui de la commission. Je pense qu'il suffit de débrancher un seul
tuyau pour que la machine s'arrête. La réanimation sera alors stoppée.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 5 et 46 ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
Mais je souhaite revenir sur le fond du débat.
La politique forme un tout. On ne peut pas distinguer, d'un côté, le débat sur
les comptes et, de l'autre, le débat sur l'affectation des comptes, monsieur le
rapporteur.
Vous dites aujourd'hui que vous êtes favorable aux 35 heures. Dont acte !
M. Josselin de Rohan.
C'est la loi !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Sauf erreur de ma part, vous n'avez pas voté cette
loi. Aujourd'hui, vous vous y ralliez ; et le Gouvernement s'en réjouit !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Non, je respecte la loi !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Vous venez de le dire, monsieur le rapporteur !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je n'ai pas dit cela !
M. Josselin de Rohan.
Ne dites pas n'importe quoi !
M. Jean Chérioux.
C'est scandaleux !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Ce n'est pas moi qui dis n'importe quoi ! C'est M. le
rapporteur qui vient de nous dire qu'il était favorable aux 35 heures. Le
Gouvernement se réjouit, je le répète, de ce ralliement, car nous avons besoin
de toutes les forces politiques de ce pays pour mettre en oeuvre cette
importante réforme sociale.
M. Nicolas About,
président de la commission.
Et le financement ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
S'agissant du financement, vous critiquez la solution
que propose le Gouvernement. Ce qui vous gêne, c'est que le Gouvernement ait
trouvé une idée, somme toute astucieuse, pour bien utiliser les fonds publics,
qu'ils soient fiscaux ou issus des cotisations sociales.
M. Jean Chérioux.
C'est une astuce !
M. Josselin de Rohan.
Une combine !
M. Nicolas About,
président de la commission.
Il y a un tel trou !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Après tout, la responsabilité d'un Gouvernement est
d'utiliser au mieux les prélèvements qui pèsent sur l'ensemble de la nation.
Vous n'avez pas suggéré d'autre solution, monsieur le rapporteur ! Cela
signifie-t-il que vous ne proposez aucun allégement de charges s'agissant des
35 heures ?
M. Nicolas About,
président de la commission.
Ce doit être à la charge de l'Etat, pas de
l'assurance maladie !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Lorsque le FOREC a été créé, il a été décidé qu'il
compenserait les allégements de charges au moyen de recettes fiscales provenant
non seulement de l'Etat mais également de la sécurité sociale. En effet, le
Gouvernement avait considéré que la sécurité sociale bénéficierait des
créations d'emplois induites par les 35 heures, donc de recettes sociales, et
qu'elle pourrait apporter une contribution à la compensation des allégements de
charges à la hauteur de ces retours financiers. C'est donc un dispositif
parfaitement cohérent qui est mis en place dans l'intérêt général.
Si vous proposez de lever des impôts supplémentaires pour financer les 35
heures, dites-le ! Si vous suggérez de supprimer les allégements de charges
s'agissant des 35 heures ; dites-le ! Si vous êtes hostile aux 35 heures,
dites-le !
Mais, ce que j'ai compris, c'est que vous êtes favorables aux 35 heures,
...
MM. Jean Chérioux et Josselin de Rohan.
Non !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
... et que vous n'avez pas d'autre proposition à
formuler par rapport aux solutions de financement qui sont avancées.
J'ajouterai que si, aujourd'hui, nous avons un débat sur ces comptes, c'est
bien parce que nous avons dégagé des excédents, ce qui n'était pas possible
lorsque vous étiez aux responsabilités, puisque la sécurité sociale était en
déficit.
(Protestations sur les travées du RPR.)
M. Jean Chérioux.
C'est pour cela qu'on a fondé la CADES !
M. Josselin de Rohan.
La CADES, vous ne connaissez pas !
M. Nicolas About,
président de la commission.
C'est
Le Sapeur Camembert :
vous
faites des trous pour boucher les trous !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 5.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Je voterai l'amendement présenté par la commission. Toutefois, je suis surpris
par ce que vient de dire Mme la ministre. En effet, travestir la réalité à ce
point n'est pas supportable. Il est vrai qu'elle a reconnu elle-même qu'elle
avait eu recours à des astuces, et c'est ce que nous dénonçons.
M. Josselin de Rohan.
Des combines !
M. Jean Chérioux.
Je ne parle pas de « combines », car je suis courtois. Mais, effectivement,
des astuces ont été utilisées. Vous le reconnaissez, madame la ministre, et
nous vous en donnons acte !
Cependant, ce n'est pas parce que nous sommes opposés à ces astuces en matière
comptable et financière, que vous pouvez nous faire dire que nous sommes contre
le système et contre les 35 heures ! Nous sommes défavorables non pas à la
réduction du temps de travail - nous l'avions dit à l'époque et nous avions
d'ailleurs présenté des propositions - mais à la façon dont vous avez conçu
cette réduction du temps de travail.
(Protestations sur les travées
socialistes.)
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Ah !
M. Jean Chérioux.
Nous sommes des démocrates ! La loi a été votée et nous l'appliquons ! Nous ne
remettons pas en cause les lois parce que c'est vous qui les avez votées !
C'est toute la différence entre nous !
Mme Nicole Borvo.
On vous ressortira les discours sur les 35 heures !
M. Jean Chérioux.
Dès lors que la loi sur les 35 heures a été votée, il faut en subir les
conséquences sur le plan financier !
M. Christian Demuynck.
C'est vrai !
M. Jean Chérioux.
Or, aujourd'hui, vous vous dérobez et vous essayez, par des circonvolutions
qui, en définitive, se traduisent par un alourdissement des charges de la
sécurité sociale, d'échapper aux conséquences de ce que vous avez voté !
M. Guy Fischer.
C'est parce que vous ne voulez pas faire payer les entreprises !
M. Eric Doligé.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Doligé.
M. Eric Doligé.
Il me paraît difficile d'intervenir après M. Chérioux, car il a tout dit.
Simplement, je tiens à indiquer que j'ai été quelque peu surpris par la
traduction, j'allais dire presque simultanée, que Mme la ministre a effectuée
de l'intervention de M. le rapporteur. En effet, elle a affirmé que nous étions
tout à fait favorables aux dispositions qui avaient été prises par le
Gouvernement en ce qui concerne les 35 heures, alors que ce n'était pas du tout
la question qui était posée.
En tant que nouveau parlementaire dans cet hémicycle, je suis particulièrement
étonné, madame la ministre, que vous puissiez donner une interprétation
totalement fausse des propos de M. le rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Eh oui !
M. Eric Doligé.
Il me semble important d'apporter cette rectification ; notamment pour les
personnes extérieures à cet hémicycle qui prendraient connaissance de nos
débats.
M. Claude Domeizel.
C'est ce qu'a dit le président de la commission !
M. Eric Doligé.
Ce que nous pensons est tout à fait à l'opposé de votre traduction, madame la
ministre !
(Exclamations sur les travées socialistes.)
C'est la raison
pour laquelle je voterai ces deux amendements identiques.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je serai bref, car je ne veux pas abuser de l'attention de
nos collègues. Malgré tout, chacun reconnaîtra que l'enjeu est d'importance et
qu'il mérite que nous nous y arrêtions quelques instants.
Peut-être pourrons-nous aller plus vite par la suite, puisque les amendements
que je vous proposerai seront des amendements de conséquence à cet amendement
fondamental sur lequel nous délibérons en cet instant.
Madame le ministre, il faudrait que vous passiez du rêve à la réalité ! Nous
vous invitons à vous plier à cet exercice. A l'évidence, il vous est difficile
d'y parvenir. C'est la raison pour laquelle vous essayez toujours, en
rebondissant sur nos interventions, de nous culpabiliser.
Vous dites que, au fond, nous étions contre les 35 heures, mais qu'il ressort
de nos déclarations que nous sommes pour les 35 heures. Nous ne l'avons dit ni
l'un ni l'autre !
M. Claude Estier.
Qu'a dit M. About ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
M. Chérioux l'a rappelé, nous contestons les modalités de
financement des 35 heures. Nous sommes d'autant moins défavorables à
l'allégement des cotisations sociales que MM. Juppé et Balladur, eux les
premiers, en avaient pris l'initiative. Mme Aubry s'est contentée de prolonger
ce qu'a fait M. Juppé. Ce n'est que par la suite que vous avez décidé le
passage aux 35 heures.
Mme Nicole Borvo.
Etes-vous pour ou contre les 35 heures ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Lorsque vous avez annoncé aux Français, en 1997, que vous
mettriez en place les 35 heures, vous saviez pertinemment que la France n'avait
pas les moyens de les financer.
Oserai-je vous rappeler l'article 5 de la loi de financement de la sécurité
sociale pour 2000, qui définissait les conditions dans lesquelles devaient être
financées les 35 heures ? Initialement, il était effectivement prévu, madame
Royal, que ce financement serait assuré à la fois par des taxes fiscales et par
une contribution de la sécurité sociale. Mais il a fallu que vous comptiez avec
une partie de votre majorité et les partenaires sociaux : ils ont fait reculer
Mme Aubry, laquelle a admis, au dernier moment, que le financement des 35
heures ne serait assuré que par des recettes fiscales et non plus également par
des contributions de la sécurité sociale.
M. Alain Gournac.
C'est la vérité !
M. Jean Chérioux.
Eh oui !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je vous renvoie donc à l'article 5 de la loi de financement
de la sécurité sociale pour 2000. Madame le ministre, revoyez votre copie !
M. Jean Chérioux.
Bravo !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Et ne nous faites pas croire, aujourd'hui, que vous avez pris
des mesures qui prenaient en compte les deux sources initiales de financement.
Vous avez la mémoire un peu courte !
Mme Nicole Borvo.
Vous aussi !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
En tout cas, nous sommes là pour vous la rafraîchir, si
besoin est !
Evidemment, les faits sont têtus, les chiffres également et, s'ils sont durs à
admettre, c'est qu'ils correspondent à la vérité.
Telle est donc la réalité des faits. D'ailleurs, vous en rendrez compte devant
les Français et, croyez-moi, nous vous y aiderons !
(Applaudissements sur
les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste. -
Exclamations sur les travées socialistes.)
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Monsieur le rapporteur, ne vous fâchez pas !
(Exclamations amusées sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
Je perçois comme une confusion dans votre propos et dans les arguments que
vous nous opposez. Je constate que, de notre côté, les objectifs et les moyens
sont d'une grande clarté.
S'agissant des objectifs, nous allons réaliser les 35 heures, qui sont, pour
nous, l'une des réformes sociales les plus importantes de ces dix dernières
années, une réforme à laquelle les Français sont massivement attachés.
Quant aux moyens et à la façon de procéder, nous finançons le dispositif à la
fois par des recettes fiscales et par les recettes supplémentaires que les 35
heures permettent grâce aux créations d'emplois, donc grâce aux nouvelles
cotisations sociales induites.
(Applaudissements sur les travées socialistes. - Exclamations sur les travées
du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Jean Chérioux.
C'est un hold-up !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Le Gouvernement agit avec le souci de la transparence,
de la cohérence et de l'intérêt général. De toute façon, il s'agit de
prélèvements obligatoires, donc, pour les Français, de l'impôt ou d'un
prélèvement social, ce qui est de même nature.
M. Claude Estier.
Bien sûr !
M. Jean Chérioux.
C'est faux !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Si donc le Gouvernement, grâce à cette méthode, fait
payer moins d'impôts aux Français, parce qu'il gère correctement la sécurité
sociale en rendant au financement des 35 heures ce que la sécurité sociale
reçoit par la dynamique économique que les 35 heures induisent, cela s'appelle
de la bonne gestion.
M. Alain Gournac.
Non !
M. Josselin de Rohan.
Mais non !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
En réponse, vous niez à ce débat tout caractère
politique pour en faire un simple débat technique, vous appuyant sur des
arguments sans doute très brillants sur les comptes, sur les lignes, sur les
tuyaux, sur ceci, sur cela.
M. Jean Chérioux.
Des arguments qui vous gênent !
M. Josselin de Rohan.
Vous embrouillez les Français !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Mesdames, messieurs les sénateurs, de notre côté,
l'objectif politique est clair et les financements qui l'accompagnent sont
cohérents. De votre côté, vous nous engagez dans un débat fort confus sans nous
dire grand-chose d'objectifs politiques que vous feriez mieux de clarifier.
Etes-vous favorables à cette réforme des 35 heures ?
M. Jean Chérioux.
Ce n'est pas le problème !
M. Roland Muzeau.
Non, ils sont contre !
Mme Nicole Borvo.
Ils ont voté contre !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
La gêne que vous avez à adopter une position globale
claire et cohérente - vous êtes d'accord ici, pas d'accord là - montre à quel
point vous avez du mal à accepter un dispositif novateur qui s'inscrit dans le
droit-fil des réformes sociales qui ont été engagées depuis le milieu du xxe
siècle pour que les salariés recueillent les fruits de la croissance, disposent
de temps et jouissent d'une meilleure qualité de vie en étant mieux à même de
concilier temps de travail et temps familial.
M. Marcel Debarge.
Très bien !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Il y a là un projet de société fondamental auquel vous
n'opposez que des arguties et des financements compliqués.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Ce n'est pas nous qui les avons créés !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Nos réponses sont pourtant extrêmement claires.
M. Jean Chérioux.
Trop claires !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Non, vraiment, monsieur le rapporteur, tout cela ne
tient pas la route ! Au bout du compte, dites-nous donc si vous êtes favorable
aux 35 heures, parce que les Français, eux, y sont massivement favorables.
M. Josselin de Rohan.
Bientôt les 22 heures !
M. Jean Chérioux.
Les 35 heures, ce n'est pas le problème aujourd'hui !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Ce serait, finalement, la bonne nouvelle de ce débat
au Sénat.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Jean Chérioux.
C'est hors sujet !
M. Marcel Debarge.
C'est vous qui le dites !
M. Josselin de Rohan.
Soyez un peu moins militante et un peu plus ministre !
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 5 et 46, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'article 6 est ainsi rédigé.
Article 6 bis
M. le président.
« Art. 6
bis
. - I. - A. - L'article 575 A du code général des impôts
est ainsi modifié :
« 1° Dans le deuxième alinéa, les sommes : "540 F" et "510 F" sont remplacées
par les sommes : "90 EUR" et "87 EUR" ;
« 2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« Il est fixé à 45 EUR pour les tabacs de fine coupe destinés à rouler les
cigarettes et les autres tabacs à fumer et à 55 EUR pour les cigares. »
« B. - Le troisième alinéa de l'article 572 du même code est supprimé.
« II. - Les dispositions du présent article s'appliquent à compter du 7
janvier 2002. »
L'article, la parole est à M. Masson.
M. Jean-Louis Masson.
La fiscalité sur le tabac à rouler qui nous est proposée par l'Assemblée
nationale me paraît parfaitement saine et équilibrée.
Il ne faudrait peut-être pas créer de distorsions entre les différentes formes
de tabac. En effet, à augmenter par trop la fiscalité qui pèse sur certains
types de tabac, en l'occurrence, le tabac à rouler, on risque de nuire à
l'emploi dans un certain nombre de manufactures, ce qui serait d'autant plus
grave que la seule manufacture de tabac à rouler se trouve dans le département
de la Moselle.
Le tabac à rouler n'intéresse que très peu les jeunes puisque, parmi les moins
de vingt-cinq ans, il n'y a que 18 % de fumeurs de tabac à rouler, alors que,
pour les cigarettes ordinaires, la proportion est de 22,5 %.
La fiscalité ici prévue s'inscrit dans la même logique que celle qui
s'applique aux autres tabacs. Avec une taxation à 45 euros, on permet également
le maintien des emplois dans l'usine de tabac concernée, précisément située
dans la ville de Metz.
C'est la raison pour laquelle, à titre personnel, je suis très favorable au
texte voté par l'Assemblée nationale.
M. le président.
L'amendement n° 6, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, est ainsi libellé :
« Dans le second alinéa du 2° du A du I de l'article 6
bis
, substituer
à la somme : "45 EUR" la somme : "60 EUR. »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
La commission des affaires sociales, tout au moins sa
majorité, a estimé qu'il fallait aller vers une harmonisation de la taxation du
tabac, ici le tabac à rouler.
J'entends bien les arguments de M. Jean-Louis Masson, s'agissant notamment de
l'entreprise concernée, qui est située dans son département.
M. Masson nous dit que les jeunes sont peu consommateurs de ce type de tabac ;
mais les statistiques et les données épidémiologiques prouvent que les jeunes
sont souvent victimes de cette consommation de tabac.
Il apparaît donc utile de rapprocher le minimum de perception applicable au
tabac à rouler de celui qui est applicable aux cigarettes blondes, que
l'article 6
bis
prévoit de fixer à 90 euros. Cela aura pour conséquence
de renchérir
in fine
significativement le prix du tabac à rouler qui,
sans atteindre 90 euros, passera de 45 euros à 60 euros. Ce seront autant de
nouvelles recettes pour la sécurité sociale !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
L'augmentation du minimum de perception applicable aux cigarettes est toujours
accompagnée d'une augmentation du minimum applicable au tabac destiné à rouler
les cigarettes afin d'éviter un glissement de la consommation des fumeurs de
cigarettes vers cette catégorie de tabac.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 68, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
« I. - Dans le texte proposé par le 2° du A du I de l'article 6
bis
pour le troisième alinéa de l'article 575 A du code général des impôts,
remplacer les mots : "à 55 EUR" par les mots : "à 51 EUR".
« II. - Compléter le A du I de l'article 6
bis
par deux alinéas ainsi
rédigés :
« ... Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le taux normal pour les cigares est fixé à 20 %. »
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, cet amendement
vise effectivement à maintenir le régime fiscal applicable aux cigares tel
qu'il a été adopté l'année dernière par le Parlement.
Croyez-moi, mes chers collègues, il s'agit non pas de la défense d'intérêts
particuliers, dans cette affaire, mais d'un souci qui touche à un domaine que
je connais bien, qui est l'industrie du tabac en France. J'ai une entreprise
dans mon département, il y en a d'autres ailleurs, M. Masson en a dit un mot il
y a un instant. Par conséquent, ce n'est pas indifférent.
Quant à la question de savoir si le coût de la consommation du cigare augmente
ou pas, à titre personnel, cela m'est assez indifférent.
M. Michel Mercier.
Il est vrai que vous êtes questeur, maintenant ! Mais pensez à nous !
(Rires.)
M. Michel Charasse.
Mes chers collègues, le dispositif fiscal applicable aux cigares relève d'une
logique très différente de celui des cigarettes. Les difficultés rencontrées
viennent de l'apparition, il y a quelques années, de produits hybrides appelés
« cigarlettes », qui sont un mélange de cigare et de cigarette, mais dont le
régime de taxation est beaucoup plus favorable.
Le dispositif que nous avions adopté l'année dernière avait été volontairement
fixé à un niveau très élevé, puisque près de 60 % des cigares sont frappés, ce
qui n'est le cas d'aucune cigarette pour le minimum de perception qui leur est
applicable.
En même temps, il a été procédé à une première étape de rapprochement du taux
de l'accise applicable aux cigares en le ramenant à un taux de 25 %, donc
beaucoup plus proche du taux moyen européen, qui est de 15 %.
Le dispositif de l'an passé, qui consistait en une baisse du taux de l'accise
et en la mise en place d'un minimum de perception, a eu pour effet d'inciter
les fabricants, en particulier ceux des « cigarlettes » et des cigares bon
marché, à relever leurs prix de manière importante - de près de 11 % - soit
très au-delà des espérances du Gouvernement, qui, à l'époque, avait demandé une
hausse de 5 % seulement.
On peut donc considérer, compte tenu de l'expérience de l'année écoulée, que
ce minimum de perception a très largement permis d'atteindre l'objectif fixé et
que ses effets devraient continuer sur l'année 2000.
En d'autres termes, je crois préférable de jouer sur le prix des cigares
plutôt que de jouer, à l'intérieur du prix, sur la fiscalité. En effet,
lorsqu'on touche à la fiscalité dans le domaine des cigarettes et des cigares,
l'on lance - ou l'on relance - une guerre des prix entre fabricants, ce qui
n'est pas du tout la meilleure solution, en termes de santé publique, pour les
consommateurs de tabac, qui sont évidemment concernés par cette mesure.
Je voudrais appeler l'attention de mes collègues sur le fait que cette
disposition, qui nous vient de l'Assemblée nationale, me paraît très dangereuse
pour notre industrie. Je pense, en particulier, à une fabrique qui est menacée
depuis très longtemps et qui pourrait l'être encore un peu plus. Ce n'est pas
du chantage, je le signale simplement. Vous savez, j'ai été autrefois patron de
la Seita avant qu'elle ne soit privatisée.
Il s'agit de la manufacture de Strasbourg, qui ne fabrique que du cigare, qui
est spécialisée dans ce domaine et qui emploie 235 personnes. Je crois qu'il ne
faut pas faire de fausse manoeuvre.
Il est préférable, selon moi, de faire ce qui a été fait l'année dernière,
c'est-à-dire de maintenir les taux qui ont été adoptés et d'inciter les
fabricants à augmenter leurs prix - c'est une négociation avec le Gouvernement
- mais d'une façon ordonnée et non pas anarchique. On aboutira au même
résultat, mais sans les inconvénients que je viens de signaler.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Ma réponse sera brève, sans être caricaturale.
Je comprends les préoccupations économiques de M. Charasse et son souci de
l'incidence d'une taxation trop lourde des cigares. Cependant, il m'incombe ce
soir de donner l'avis de la commission des affaires sociales, et la commission
a estimé nécessaire de ne pas créer de différences dans la taxation des
différentes formes de tabac pour réserver un sort particulier aux cigares.
Je rappelle que cet article 6
bis
a été introduit sur l'initiative du
Gouvernement pour financer justement les 35 heures, c'est-à-dire le FOREC.
M. Marcel Debarge.
Ah ! Il y avait longtemps !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Autrement dit, nous ne saurions nous priver de toute recette
nouvelle sur les tabacs sans en priver du même coup le financement des 35
heures.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement
et en suggère le retrait à son auteur.
Le dispositif prévu pour le financement des 35 heures est judicieux et a été
négocié avec les industriels pour éviter les distorsions entre les différentes
catégories de tabac.
Au surplus, le tabac n'est tout de même pas très bon pour la santé et il n'est
pas illogique qu'il puisse contribuer au financement des 35 heures.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 68.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Je comprends bien et je connais bien, comme nous tous ici, le discours sur la
santé publique, le tabac... A partir du moment où nous n'arrivons pas à
interdire la drogue et où il n'est pas question d'interdire le tabac, nous
essayons de procéder autrement.
La santé publique n'est pas le seul aspect de la question : il faut aussi
tenir compte des entreprises qui sont en concurrence, qui luttent sur le plan
européen et sur le plan mondial, qui maintiennent des emplois. Cela ne peut pas
être complètement indifférent.
C'est d'autant plus vrai - je le redis en particulier à l'attention de M. le
rapporteur - que l'objectif recherché a été atteint l'année dernière par un
aménagement de la fiscalité, certes, mais surtout par les prix.
Ce que l'on appelle les « barreaux de chaise », c'est-à-dire les « gros
modules » - car il ne s'agit pas pour moi de proposer une mesure pour protéger
les riches ! - représentent 20 millions d'unités, contre 1,7 milliard d'unités
pour le marché global. Cela correspond donc à peu de chose !
En outre, on ne peut pas fermer les yeux sur une réalité, celle des «
quasi-cigarettes » - ce mélange dont je parlais tout à l'heure ; je pense aux
marques Coburn ou Westpoint, par exemple - qui bénéficient de la fiscalité des
cigares. Ces produits blonds viennent d'Allemagne ; ils ont un prix inférieur
de 10 % à celui des cigarettes et attirent fortement les jeunes, et même de
plus en plus. Mon souci est de trouver une solution pour faire monter leur prix
au niveau de celui des cigarettes.
L'an passé, le dispositif qui a été retenu, et qui est analogue à celui que je
présente, a permis une hausse double de celle des cigarettes ; celles-ci ont
connu une hausse finale et globale de leur prix de 4,5 %, les cigares, de 11
%.
Madame le ministre, si vous me dites que vous allez, comme l'an dernier,
rechercher une solution avec les fabricants intéressés pour résoudre cette
difficulté d'ici à la fin de la procédure parlementaire, je veux bien retirer
mon amendement.
Dans le cas contraire, je me permets de tirer la sonnette d'alarme, parce
qu'il y a en France des entreprises dont les salariés méritent aussi notre
attention. Si l'on ne fabrique plus les cigares en France, cela n'empêchera pas
que l'on continue d'en importer, alors que l'effet social sur l'emploi d'une
telle mesure n'est pas forcément souhaitable.
Je résume, madame le ministre, car c'est très simple : je retirerai cet
amendement si vous êtes d'accord pour continuer, pendant la procédure
parlementaire, d'essayer de trouver un accord avec les fabricants, de façon que
l'on obtienne en agissant sur les prix ce qu'il me paraît nuisible d'obtenir
par la fiscalité.
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Monsieur le sénateur, le contact avec les industriels
a été pris avant le dépôt de votre amendement. Aussi, je pense très sincèrement
ne pas pouvoir m'engager sur une nouvelle négociation qui n'aboutirait pas à
autre chose qu'au dispositif qui est actuellement prévu. D'ailleurs, c'est bien
pour remédier à la concurrence avec les « cigarlettes », que vous évoquiez tout
à l'heure, que le dispositif est homogène pour l'ensemble des produits.
M. le président.
Monsieur Charasse, l'amendement n° 68 est-il maintenu ?
M. Michel Charasse.
Oui, monsieur le président. Pour la protection de l'emploi, car nous sommes
concurrencés !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 68, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. Alain Joyandet.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Joyandet.
M. Alain Joyandet.
Monsieur le président, au nom des groupes de la majorité sénatoriale, je
demande une suspension de séance d'environ une heure.
M. le président.
Le Sénat voudra sans doute accéder à cette demande.
(Assentiment.)
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures cinq, est reprise à dix-neuf heures
dix.)
M. le président.
La séance est reprise.
Au sein de l'article 6
bis,
nous en sommes parvenus à l'amendement n°
41 rectifié.
L'amendement n° 41 rectifié, présenté par MM. Gerbaud et Masson, est ainsi
libellé :
« Rédiger ainsi le B du I de l'article 6
bis :
« B. - Le troisième alinéa de l'article 572 du même code est ainsi rédigé :
« Le prix de l'unité de conditionnement est arrondi aux cinq centimes d'euro
les plus proches. »
La parole est à M. Masson.
M. Jean-Louis Masson.
L'argumentaire développé en faveur de son amendement par M. Gerbaud, qui
souhaitait très vivement qu'il soit défendu, m'a convaincu d'y associer ma
signature tout en avançant un argument complémentaire, susceptible peut-être de
mieux éclairer sa démarche.
Il est exact qu'une réglementation générale a prévu la façon dont les prix en
francs seraient transposés en euro selon une règle précise d'arrondi au centime
d'euros inférieur ou supérieur, mais l'amendement que notre collègue François
Gerbaud et moi-même vous proposons traite d'un problème différent puisqu'il
porte sur le calcul du prix des paquets de vingt-cinq ou trente cigarettes à
partir du prix enregistré, qui s'applique à mille cigarettes.
Cet amendement un peu technique vise ainsi à éviter que les débitants de tabac
n'aient à rendre la monnaie sur des prix exprimés en centimes. L'article 572 du
code général des impôts prévoit en effet que les prix des paquets sont arrondis
aux dix centimes supérieurs. Or, si cette règle paraissait raisonnable pour des
paquets valant 20 ou 25 francs, compte tenu du fait que le centime d'euro a une
valeur plus élevée que le centime de franc, ce n'est plus tout à fait le
cas.
Pour éviter aux débitants de tabac de rendre la monnaie sur des centimes
d'euro, il vous est donc proposé d'adopter une mesure technique intermédiaire
consistant à étager les prix de cinq centimes en cinq centimes d'euro.
Notre objectif est donc de faciliter la vie des débitants de tabac en leur
assurant une alimentation régulière en monnaie.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
M. Masson le sait puisque nous nous en sommes ouverts ce
matin en commission des affaires sociales, le B du I de l'article 6
bis
satisfait déjà son amendement dans lsa mesure où, dans sa rédaction actuelle,
il abroge la règle qu'il dénonce selon laquelle le prix de l'unité de
conditionnement est arrondi à la dizaine de centimes supérieure.
C'est pourquoi, tout en comprenant la démarche qui l'a animé, je propose à M.
Masson de retirer son amendement.
M. le président.
Monsieur Masson, l'amendement n° 41 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Louis Masson.
Monsieur le président, je ne peux pas prendre seul la responsabilité de son
retrait.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué à la santé.
Monsieur le sénateur, je comprends que vous
vouliez faciliter la vie des débitants de tabac, mais tel n'est pas mon désir
puisque je veux que les Français cessent de fumer ! Vous comprendrez donc que
je ne sois pas favorable à votre amendement.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 41 rectifié, repoussé par la commission et
par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 6
bis,
modifié.
(L'article 6
bis,
est adopté.)
Article 7
M. le président.
« Art. 7. - I. - Au III de l'article L. 241-13-1 du code de la sécurité
sociale, après le quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les entreprises de transport routier où la durée des temps de service
des personnels de conduite marchandises "grands routiers" ou "longue distance"
ainsi que des personnels "courte distance" est fixée conformément aux
dispositions de l'article 19 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 précitée
au plus soit à trente-cinq heures hebdomadaires, soit à 1 600 heures sur
l'année, le montant de l'allégement auquel ouvrent droit les salariés dont la
durée du travail est fixée dans ces limites est majoré d'un montant fixé par
décret. »
« II. - Au troisième alinéa du III de l'article L. 241-13-1 du même code,
après les mots : "dans les zones de revitalisation rurale", sont insérés les
mots : "et de redynamisation urbaine". »
« III. - A. - Le troisième alinéa de l'article L. 241-6-2 du même code est
ainsi rédigé :
« Les dispositions du présent article sont applicables aux gains et
rémunérations versés aux salariés visés au 1° de l'article L. 722-20 du code
rural.
« B. - Les dispositions du présent III sont applicables aux gains et
rémunérations versés à compter du 1er janvier 2001 par les entreprises et
unités économiques et sociales de plus de vingt salariés mentionnées à la
première phrase du II de l'article 1er de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000
précitée et à compter du 1er janvier 2002 pour les autres entreprises. »
- (Adopté.)
Je rappelle que les articles 8 et 9 ont été réservés jusqu'après l'examen de
l'article 29.
TITRE III
DISPOSITIONS RELATIVES
AUX DÉPENSES ET À LA TRÉSORERIE
Section 1
Branche maladie
Article additionnel avant l'article 10 A
M. le président.
L'amendement n° 86, présenté par M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Avant l'article 10 A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les élections à la sécurité sociale sont rétablies.
« II. - En conséquence, les dispositions contraires des articles L. 221-2, L.
212-2, L. 213-2, L. 215-2 et L. 215-3 du code de la sécurité sociale sont
abrogées.
« III. - Les pertes de recettes résultant du I ci-dessus sont compensées à due
concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Après avoir fait, en 1999, de la traduction législative du plan stratégique de
la CNAM - lequel, je le rappelle tout de même au passage, prévoyait notamment
de réduire de 32 milliards de francs le montant des crédits des hôpitaux
publics - une condition de la poursuite de sa participation à la gestion
paritaire de cette caisse, le Mouvement des entreprises de France, le MEDEF, a
fini par se retirer cette année des conseils d'administration des caisses de
sécurité sociale.
Le motif officiel qui a été avancé cette fois est la contribution de la
sécurité sociale au financement des allégements de cotisations sociales liés
aux 35 heures. Ce motif a été avoué en partie par Denis Kessler, qui a déclaré
que le MEDEF ne reviendra pas siéger « s'il n'y a pas un changement profond de
la nature et du fonctionnement du système ».
Quoi qu'il en soit, cette politique de la chaise vide - j'ai parlé hier de
politique de la terre brûlée - nous amène à nous interroger, comme j'ai eu
l'occasion de le souligner lors de la discussion générale, sur la nécessaire
démocratisation de la gestion des caisses et sur la plus grande participation
des assurés sociaux, qui passent nécessairement, à notre sens, non pas par la
désignation des différents administrateurs, mais bel et bien par leur élection
par l'ensemble de nos concitoyens, comme cela se pratique pour la Mutualité
sociale agricole.
C'est pourquoi, par cet amendement, nous demandons de nouveau le
rétablissement des élections à la sécurité sociale.
Monsieur le ministre, lors de l'examen du projet de loi de modernisation
sociale, grâce à un amendement communiste que la majorité sénatoriale s'était
empressée de rejeter, la question de l'élection par les salariés de leurs
représentants au sein des conseils d'administration des organismes du régime
général de la sécurité sociale avait été soulevée.
Nous persistons donc dans notre démarche, même si nous ne nous faisons
malheureusement aucune illusion sur le sort de cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
M. Fischer comprendra que la commission des affaires sociales
souhaite que le Sénat fasse preuve d'un minimum de cohérence.
Lors de l'examen du projet de loi de modernisation sociale, nous avions en
effet été saisis d'une proposition identique à celle qui vient d'être
présentée. Le Sénat l'avait rejetée, et la commission des affaires sociales n'a
donc pas souhaité adopter aujourd'hui une attitude différente. Par simple souci
de cohérence, elle émet un avis défavorable sur l'amendement n° 86.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Comme vous le savez, monsieur Fischer, la sécurité
sociale a pour objet de garantir un haut niveau de protection sociale pour
tous, et j'estime que l'intervention des salariés et des employeurs dans sa
gestion par le biais de leurs organisations représentatives est absolument
légitime.
Cela étant, la définition des modalités actuelles d'association des
partenaires sociaux est récente, puisqu'elle ne remonte en fait qu'à 1996. Cela
n'est pas très ancien ; toutefois, le Gouvernement ne considère nullement ces
modalités comme intangibles.
A l'occasion du renouvellement des conseils d'administration du régime général
qui vient de s'achever, de nombreuses interrogations s'étaient d'ailleurs
élevées à propos de la composition de ces conseils et du mode de désignation
des administrateurs. La question de l'élection de ces derniers a été soulevée
sans qu'un consensus puisse se dessiner sur ce point entre les différentes
organisations syndicales.
Dans ces conditions, le Gouvernement estime que rétablir l'élection des
administrateurs serait quelque peu prématuré.
En outre, un article additionnel 10
septies
a été inséré dans le projet
de loi de modernisation sociale par le biais de l'adoption d'un amendement. Cet
article prévoit que le Gouvernement organisera, au cours de l'année suivant la
publication de la loi, une concertation avec les organisations syndicales
s'agissant de l'élection de leurs représentants au sein des conseils
d'administration des organismes du régime général de la sécurité sociale et
avec les organisations patronales en ce qui concerne l'élection des
représentants des employeurs. Cette concertation s'inscrit dans la démarche que
nous avons entreprise depuis juillet avec les partenaires sociaux en vue
d'approfondir le dialogue social, comme le souhaite le Premier ministre.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement n'envisage pas de rétablir dès à
présent l'élection des administrateurs des organismes du régime général.
Je serais heureux, monsieur Fischer, que, au bénéfice de ces arguments, vous
acceptiez de retirer votre amendement.
M. le président.
Acceptez-vous cette suggestion, monsieur Fischer ?
M. Guy Fischer.
Non, monsieur le président, je le maintiens.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 86, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 10 A
M. le président.
« Art. 10 A. - I. - Il est inséré, avant la sous-section I de la section 3-1
du chapitre II du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale, un
article L. 162-14-1 ainsi rédigé :
«
Art. L. 162-14-1
. - La ou les conventions prévues aux articles L.
162-5, L. 162-9, L. 162-12-2, L. 162-12-9 et L. 162-14 définissent les
engagements, collectifs et individuels, des signataires, le cas échéant
pluriannuels, portant notamment sur l'organisation des soins, sur l'évolution
des pratiques et de l'activité des professions concernées ; la ou les
conventions définissent à cet effet les mesures de toute nature propres à
assurer le respect de ces engagements et en particulier les modalités du suivi
pluriannuel de l'évolution des dépenses de la profession concernée ; elles
précisent également les actions d'information, de promotion des références
professionnelles opposables et des recommandations de bonne pratique ou
d'évaluation des pratiques ainsi que les dispositions applicables en cas de
non-respect des engagements.
« II. - L'article L. 162-15-2 du même code est ainsi modifié :
« 1° Dans le dernier alinéa du I, les mots : "ou à défaut d'annexe pour l'une
des conventions," sont supprimés ;
« 2° Le premier alinéa du II est ainsi rédigé :
« En l'absence de convention pour l'une des professions mentionnées aux
articles L. 162-5, L. 162-9, L. 162-12-2, L. 162-12-9, L. 162-14 et L. 322-5-2,
la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés et au
moins une autre caisse nationale assurent le suivi des dépenses lors de la
fixation de l'objectif des dépenses mentionné au I et au moins deux fois dans
l'année ; une première fois au vu des résultats des quatre premiers mois de
l'année et une seconde fois au vu de ceux des huit premiers mois de l'année.
»
La parole est à M. Cazeau.
M. Bernard Cazeau.
L'insertion dans le projet de loi de l'article 10 A résulte de l'adoption d'un
amendement par l'Assemblée nationale. Sa rédaction a été inspirée par la
concertation engagée sur l'initiative de Mme Guigou et de vous-même, monsieur
le ministre, avec les professionnels de la santé au cours de l'année 2001,
concertation que l'on a pris l'habitude de désigner par l'expression « Grenelle
de la santé ».
Cet article tend à ouvrir à ces mêmes professionnels la possibilité de passer
contrat, collectivement ou individuellement, avec les caisses. Il définit, en
outre, les mesures propres à assurer le respect de ces engagements.
En effet, deux grands axes sous-tendent les treize propositions relatives à la
réforme des soins de ville qui viennent d'être présentées aux professionnels de
la santé.
Le premier axe a trait à la place des professionnels dans l'organisation des
soins : nous retrouvons certaines des propositions que j'ai évoquées dans le
présent texte ou dans le projet de loi relatif aux droits des malades et à la
qualité du système de santé, que vous avez déjà présenté, monsieur le ministre,
à l'Assemblée nationale et qui viendra en discussion au Sénat dans quelques
semaines.
Le second axe touche à la restauration du cadre conventionnel, dont l'article
10 A constitue la « première pierre ».
A cet égard, un dispositif à trois étages est prévu : d'abord, une convention
interprofessionnelle édictant les règles communes à l'ensemble des professions
de santé ; ensuite, des conventions nationales par profession telles qu'elles
existent aujourd'hui ; enfin, des conventions particulières, qui préciseraient,
au travers de contrats types différents, des modalités innovantes et de bonnes
pratiques.
Il est indéniable, et chacun le ressent aujourd'hui, monsieur le ministre, que
le dialogue avec les professionnels de la santé doit être sinon rénové, du
moins renforcé, par le biais d'un système conventionnel qui soit accepté par la
grande majorité des intéressés, ce qui n'est pas encore tout à fait le cas
aujourd'hui. C'est à ce prix qu'un certain nombre de bonnes pratiques, par
exemple en matière de prescription médicamenteuse, pourront porter leurs fruits
sur le plan financier.
Devant la majorité sénatoriale, que j'ai sentie quelque peu nerveuse cet
après-midi, je ne saurais mieux illustrer cette nécessité de négocier qu'en
citant M. Alain Juppé, qui est intervenu récemment à Bordeaux lors du congrès
des unions régionales des caisses d'assurance maladie.
La Tribune
en a
d'ailleurs rendu compte, M. Juppé ayant dressé, selon ce journal, « un bilan
nuancé de son plan "sécu 96" ».
A l'époque, rappelle M. Juppé, « il y avait le feu dans la maison sécurité
sociale, et notamment dans la pièce assurance maladie, avec un déficit
prévisionnel de 100 milliards de francs et une dette du régime général de 247
milliards. »
« Je reconnais, ajoute-t-il, que les mesures d'urgence - RDS, accords
restrictifs avec les laboratoires pharmaceutiques, sanctions des médecins en
cas de dépassement - n'ont pas toujours été mises en cohérence avec la
philosophie du plan lui-même et qu'elles ont mis le feu aux poudres, car les
pénalités de départ ont été ressenties comme une sanction collective, injuste
et brutale, et c'est cela qui a bloqué le système. Sans doute ai-je eu tort
d'insister. » On peut toujours se repentir !
« Avec le recul, poursuit M. Juppé, j'ai conscience qu'il est illusoire de
développer un système de régulation sans l'accord et la concertaion du corps
médical. »
Je ne saurais mieux dire, monsieur le ministre, pour inciter le Gouvernement à
approndir cette concertation. Dans cette optique, les propositions qui vous ont
été présentées et auxquelles je me suis référé constituent une avancée
importante : les professionnels devront les examiner avec attention et
réfléchir à deux fois avant de les repousser. J'espère que l'on pourra ainsi
élaborer un conventionnement qui soit le plus large possible.
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 7 est présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales.
L'amendement n° 47 est présenté par Mme Bocandé, M. Franchis et les membres du
groupe de l'Union centriste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Rédiger comme suit l'article 10 A :
« L'article 24 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 (n°
99-1140 du 29 décembre 1999) est abrogé. »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 7.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
La commission des affaires sociales propose au Sénat de ne
pas retenir la rédaction présentée par le Gouvernement pour l'article 10 A et
adoptée par l'Assemblée nationale et de supprimer l'article 24 de la loi de
financement de la sécurité sociale pour 2000, qui prévoyait la mise en oeuvre
du dispositif des lettres clés flottantes, c'est-à-dire de la sanction
collective à laquelle vient de faire allusion M. Cazeau.
Les mesures qui avaient été prises par M. Juppé mettaient en jeu non pas les
lettres-clefs flottantes, mais un système de sanctions collectives
s'apparentant aux dispositions que Mme Martine Aubry a ensuite présentées en
son temps : il ne s'agissait donc que de prolonger, selon des modalités un peu
différentes, un dispositif qui avait été mis en place par le précédent
gouvernement.
Cela étant, l'article 10 A marque une grande ambition, puisqu'il vise ni plus
ni moins que la rénovation du cadre conventionnel et du dispositif de
régulation des soins de ville.
Sur le fond, il paraît bien difficile de se prononcer sur une rédaction qui
reste encore très floue et dont on sait d'ores et déjà qu'elle ne constitue
qu'une esquisse ayant vocation à être profondément remaniée d'ici à la nouvelle
lecture du projet de loi à l'Assemblée nationale, du moins si je m'en tiens aux
déclarations faites par le Gouvernement sur ce sujet. M. Kouchner pourra
peut-être infirmer ou confirmer ce point.
L'écart est d'ailleurs important entre le dispositif normatif voté par
l'Assemblée nationale, dont le contenu est pour le moins succinct, et les
intentions réformatrices affichées par le Gouvernement.
De l'aveu même de celui-ci, le dispositif proposé reste encore à l'état
d'ébauche. Le Gouvernement semble retenir l'idée, avancée notamment par le G
14, lequel rassemble un certain nombre de syndicats de professionnels de la
santé, d'une architecture conventionnelle à trois niveaux, qui comprendrait un
socle conventionnel commun à toutes les professions et des conventions
collectives par profession, auxquels s'ajouteraient par la suite des contrats
individuels que pourraient négocier les médecins désireux de s'engager dans une
démarche d'amélioration de la qualité des soins en échange de rémunérations
forfaitaires complémentaires.
Toutefois, cet article ne tranche ni la question du mode de régulation des
dépenses ni celle des responsabilités respectives de l'Etat et de l'assurance
maladie dans cette régulation. Du moins, les précisions nécessaires ne sont pas
encore apportées en l'état actuel de la rédaction de l'article.
Le mécanisme pernicieux des lettres clés flottantes, que j'ai déjà évoqué lors
de la discussion générale, est maintenu, même si, à en croire les déclarations
de Mme Guigou, il ne s'appliquerait plus aux professionnels ayant accepté le
système conventionnel.
Sur la forme, la méthode s'avère peu respectueuse des droits du Parlement et
ne témoigne finalement que d'un faible souci de concertation avec les
professionnels de la santé, à qui l'on demande un avis sur une disposition qui
a déjà été votée par l'Assemblée nationale.
Après une année de concertation, le Gouvernement esquisse donc, dans
l'improvisation la plus totale, un dispositif inachevé et incomplet, mais
auquel s'opposent déjà, nous le savons, une bonne partie des professionnels de
la santé.
Pour sa part, la commission propose au Sénat d'adopter un amendement
substituant à la rédaction proposée l'abrogation de l'article 24 de la loi de
financement de la sécurité sociale pour 2000. L'adoption de cet amendement
entraînerait donc la suppression du dispositif des lettres clés flottantes, qui
constitue à nos yeux un préalable indispensable à la reprise du dialogue avec
les professionnels de la santé et à l'ouverture d'une véritable négociation sur
une nouvelle architecture conventionnelle et sur un nouveau dispositif de
régulation des dépenses.
En effet, monsieur le ministre, ce n'est pas en maintenant la menace de la
sanction collective que vous parviendrez à rassembler autour de vous l'ensemble
des professionnels de la santé et à créer des conditions favorables à une
véritable entente.
Cela étant dit, nous comprenons les objectifs. D'ailleurs, comme l'ont montré
les auditions auxquelles la commission a procédé, les professionnels de la
santé sont pour une approche fondée sur la reconnaissance de la bonne pratique
des soins. Quand vous aurez défini, avec les professionnels de la santé, par le
système conventionnel, dans quelle mesure cette bonne pratique des soins
deviendra une référence, tous ceux qui ne respecteront pas cette bonne pratique
des soins pourront faire l'objet d'une sanction individuelle. Nous pourrons
alors considérer que les dispositions que vous prendrez vont peut-être dans le
sens souhaité par les professionnels de la santé.
M. Cazeau s'est fait l'écho des propos de M. Juppé, qui a eu l'expérience
douloureuse du résultat de ce dispositif. S'il s'en est fait l'écho, c'est sans
doute parce que le Gouvernement partage le sentiment selon lequel cette
démarche ne pourra aboutir que si elle est menée dans le cadre de la
concertation, en essayant de dégager le consensus le plus large possible sur
les mesures qui doivent être prises pour réguler l'ensemble des dépenses de
santé, en particulier les soins de ville.
(Marques d'approbation sur les travées du RPR.)
M. Nicolas About,
président de la commission.
Tout à fait !
M. Paul Blanc.
Très bien !
M. le président.
La parole est à Mme Bocandé, pour défendre l'amendement n° 47.
Mme Annick Bocandé.
Je partage, bien sûr, les arguments qui viennent d'être développés par le
rapporteur, M. Alain Vasselle.
Ces sanctions collectives, en particulier les lettres clés flottantes, ont
montré leurs limites et elles ne permettent pas de mener avec la sérénité qui
conviendrait une négociation avec les professionnels de santé. Elles favorisent
l'incompréhension, le découragement, voire la colère, de ces professionnels.
Aussi, il est grand temps de changer de méthode, et c'est l'objet de
l'amendement que présente le groupe de l'Union centriste.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 7 et 47
?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je ne vous surprendrai pas en maintenant la position du
Gouvernement. En effet, cet article résultant d'un amendement présenté par le
Gouvernement à l'Assemblée nationale, je ne vois pas comment je pourrais me
prononcer contre. Dans ces conditions, je demande aux auteurs de ces deux
amendements de bien vouloir les retirer.
Cela étant dit, les choses sont un peu plus compliquées que la présentation
qui en a été faite ici. Les différences entre la sanction posée par le
Gouvernement de M. Juppé et la lettre clé flottante sont grandes. Je ne
m'attarderai pas sur ce point. Le mécanisme était un peu différent.
Je ferai simplement observer que nous n'avons, ni les uns ni les autres,
trouvé la solution permettant à la fois de satisfaire les professionnels,
essentiellement les médecins, et de faire entrer de force, si je puis dire,
dans les pratiques les économies qu'il est nécessaire de réaliser.
Or, même si ce n'est pas parfait, monsieur le rapporteur, nous avons proposé
cette nouvelle convention, qui compte trois niveaux. Vous l'avez d'ailleurs
fort bien résumée, et je rends grâce à votre objectivité.
D'ailleurs, je ne doute pas que cette concertation soit un jour acceptée, sous
cette modalité ou sous une autre, en tout cas à ces trois niveaux.
Citons, en particulier, le dernier niveau, que vous avez bien illustré, à
propos des prises en charge au forfait et des activités en matière de santé
publique et de réseaux, qui seraient menées en dehors de l'activité de soins
rétribuée à l'acte, qu'il n'est, bien sûr, pas question de remettre en
cause.
Récemment, nous est parvenue une brochure faite par un institut privé et qui
concernait des mesures de santé publique et de prévention prises par les
médecins généralistes. Tout cela devrait être, au contraire, amplifié et
pourait être pris en charge, s'ils l'acceptent - en tout cas, je le propose -
au forfait. Les prestations représentant 15 %, parfois 20 %, de l'activité des
médecins généralistes, il est très important qu'elles soient rémunérées, même
lorsqu'elles prennent la forme de conseils et quand elles concernent la vie
quotidienne.
Telle est notre proposition. Elle ne me semble pas mirifique. En tout cas,
elle constitue une avancée.
Vous avez évoqué le G 14. Qu'il s'agisse du G 7, du G 14 ou du comité des
sages, la concertation s'est engagée et elle doit se poursuivre. Monsieur le
sénateur, je suis évidemment d'accord avec vous : il faut absolument que nous
en sortions ! Entre nous, ce n'est pas simple. Si cela l'avait été, nous
aurions, les uns et les autres, trouvé la solution.
Quant au glissement des dépenses de santé concernant les soins en ville, je
n'accuse personne, pas plus les médecins que les malades. Cependant, notre
système, qui est imparfait et insuffisant, est luxueux puisqu'on peut en
particulier puiser dans le tiroir-caisse en permanence. On s'aperçoit, à la
fin, que ce n'était pas tellement utile. Cette convention est née de cette
concertation, de ces deux « Grenelle de la santé ».
Dans cette direction, avec un assentiment individuel, une possibilité de
formation et un fonctionnement supplémentaire - j'insiste sur ce point - au
forfait, nous nous dirigerons un jour vers une médecine à la française qui
sortira un peu de ce tunnel.
Je me souviens d'une journée passée avec les représentants de la CSMF, la
Confédération des syndicats médicaux français. Ils veulent que l'on supprime
les lettres clés flottantes avant de parler ; mais nous parlons déjà tous les
jours !
M. Nicolas About,
président de la commission.
C'est symbolique !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Certes ! C'est en effet très difficile. Il n'y a pas
mauvaise volonté à vouloir épargner les deniers des Français et en même temps
avoir une médecine de qualité. Personne n'a trouvé la recette. Je vous le dis,
d'ailleurs vous le savez, nous n'avons pas trouvé la recette exacte. Cependant,
après cette nouvelle année passée au ministère de la santé, sans oublier les
années précédentes - j'arrive des Etats-Unis après avoir notamment été aux
Pays-Bas -, je peux vous dire que nulle part on a inventé mieux. J'en suis
persuadé, en dépit de l'existence de difficultés considérables.
Un Sénateur socialiste.
Bien sûr !
M. le président.
Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 7 et 47.
M. Paul Blanc.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Paul Blanc.
M. Paul Blanc.
Monsieur le ministre, je vous ai écouté avec beaucoup d'attention. Si j'ai
bien compris, ce que je crois, vous souhaitez avant tout, à travers cet article
qui résulte d'un amendement que vous avez présenté, renouveler le dialogue avec
les médecins.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Et reconventionner !
M. Paul Blanc.
Pour cela, vous n'avez pas besoin d'un texte législatif.
Aujourd'hui, les médecins ne peuvent être dans de bonnes dispositions pour
renouer ce dialogue car ils ont au-dessus de leur tête cette épée de Damoclès
que sont les sanctions collectives fondées sur les lettres clés flottantes. Si
vous voulez vraiment renouer le dialogue, il y a d'autres moyens. Surtout, il
faut supprimer ce système de sanctions collectives. La question des sanctions
collectives s'était déjà posée sous le précédent gouvernement. Personnellement,
j'ai toujours été hostile à ces sanctions. Je ne change pas de position. Je
dirai simplement :
errare humanum est perseverare diabolicum.
D'autres
ont fait l'erreur, vous persévérez dans cette voie. Monsieur le ministre, cela
ne peut pas fonctionner.
Aussi, je voterai ces amendements.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Moi aussi, j'ai toujours été contre.
(Sourires.)
Je voudrais simplement ajouter une précision, qui est importante. La
proposition à trois niveaux que nous avons formulée permettait de supprimer les
lettres clés flottantes. C'est dans ce domaine que nous pensions avancer et
que, à mon avis, nous avancerons encore. Il est évident que ce nouveau
conventionnement supprimait totalement les lettres clés flottantes.
M. Guy Fischer.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Je veux expliquer les raisons qui motivent notre abstention.
L'article 10 A, introduit à la suite d'un amendement du Gouvernement, pose les
premières pierres d'un nouveau dispositif conventionnel liant les
professionnels à l'assurance maladie.
Cette ébauche d'architecture, qui, fait l'objet de nombreuses négociations,
est, en l'état actuel, loin de satisfaire les différentes parties, notamment
les organisations syndicales, même si tout le monde reconnaît la nécessité de
réformer le système conventionnel actuel pour supprimer les lettres clés
flottantes.
Un important travail a été accompli. Je pense, notamment, pour avoir travaillé
avec eux, aux propositions faites par les syndicats de salariés et de médecins
remettant en cause la maîtrise comptable des dépenses de santé et la politique
conventionnelle de la CNAM. Je pense au G7.
Tous s'accordent à demander le rétablissement d'une convention unique sur la
base d'un accord majoritaire. Mme Guigou et vous-même, monsieur le ministre,
avez avancé, après les « Grenelle de la santé », un certain nombre de pistes.
Concernant la régulation des soins de ville, la rénovation du cadre d'exercice
des professionnels de la santé, vous aviez suggéré un temps d'expertise et de
négociation. Nous y sommes.
C'est pourquoi la présentation, dès la première lecture de ce projet de loi,
d'un amendement nous semble, peut-être à tort, prématurée. Sur la forme, nous
pensons que les négociations ne sont pas achevées. Sur le fond, faute de
disposer d'éléments plus précis, il nous est bien difficile aujourd'hui de
prendre position sur cet article 10 A.
Par conséquent, nous nous abstiendrons.
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 7 et 47, repoussés par le
Gouvernement.
M. Guy Fischer.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'article 10 A est ainsi rédigé.
Article 10
M. le président.
« Art. 10. - I. - L'article L. 5125-23 du code de la santé publique est ainsi
modifié :
« 1° Le premier alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le pharmacien ne peut délivrer un médicament ou produit autre que celui qui
a été prescrit, ou ayant une dénomination commune différente de la dénomination
commune prescrite, qu'avec l'accord exprès et préalable du prescripteur, sauf
en cas d'urgence et dans l'intérêt du patient.
« Si la prescription libellée en dénomination commune peut être respectée par
la délivrance d'une spécialité figurant dans un groupe générique mentionné au
5° de l'article L. 5121-1, le pharmacien délivre une spécialité appartenant à
ce groupe dans le respect des dispositions de l'article L. 162-16 du code de la
sécurité sociale.
« 2° Au deuxième alinéa, le mot : "Toutefois" est remplacé par les mots : "Par
dérogation aux dispositions du premier alinéa" ;
« 3° Le dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il en est de même lorsque le pharmacien délivre une spécialité au vu d'une
prescription libellée en dénomination commune. »
« II. - L'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié
:
« 1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le pharmacien d'officine délivre une spécialité sur présentation
d'une prescription libellée en dénomination commune, en application du deuxième
alinéa de l'article L. 5125-23 du code de la santé publique, l'écart de prix
entre la spécialité délivrée et la spécialité la moins chère conforme à la
prescription ne peut être supérieur à un montant déterminé par la convention
prévue à l'article L. 162-16-1 du présent code ou, à défaut, par un arrêté des
ministres chargés de la sécurité sociale, de la santé et du budget.
« 2° Au deuxième alinéa, les mots : "en application du deuxième alinéa de
l'article L. 5125-23 du code de la santé publique" sont remplacés par les mots
: "en application du troisième alinéa de l'article L. 5125-23 du code de la
santé publique" ;
« 3° Au troisième alinéa, les mots : "de cette condition" sont remplacés par
les mots : "des dispositions des deuxième et troisième alinéas du présent
article" et les mots : "mentionnée à l'alinéa précédent" sont remplacés par les
mots : "mentionnée au troisième alinéa du présent article ou à l'écart de prix
mentionné au deuxième alinéa du présent article". »
« III. - Dans l'article L. 5521-2 du code de la santé publique, après la
référence : "L. 5125-23", les mots : "premier alinéa" sont remplacés par les
mots : "premier et deuxième alinéas". »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 8 est présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales.
L'amendement n° 96 est présenté par MM. Autain et Fischer, Mme Demessine, M.
Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Dans le texte proposé par le 1° du II de l'article 10 pour être inséré après
le premier alinéa de l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale,
remplacer les mots : "conforme à la prescription" par les mots : "du même
groupe générique". »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 8.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Cet amendement concerne la fameuse prescription en DCI,
dénomination commune internationale.
La commission ne peut, bien sûr, qu'être favorable à une mesure de cette
nature, qui tend à une meilleure maîtrise des dépenses de médicaments.
Elle observe cependant que la loi encadre aujourd'hui strictement les
conditions dans lesquelles la substitution d'une spécialité peut être réalisée
par le pharmacien d'officine, et ne l'autorise qu'au sein de groupes génériques
inscrits au répertoire définis par l'Agence française de sécurité sanitaire des
produits de santé, l'AFSSAPS.
Ces groupes génériques sont constitués de deux ou trois médicaments de
référence et de génériques associés. Chaque médicament du groupe a le même
principe actif, le même dosage et la même forme pharmaceutique. L'agence tient
le répertoire public des groupes génériques, qui paraît au
Journal
officiel
.
Le législateur a ainsi souhaité favoriser des économies pour la sécurité
sociale tout en instaurant un dispositif garantissant, au préalable, la qualité
et la sécurité sanitaire.
A contrario
le présent article oblige, dans la rédaction actuelle de
son paragraphe II, le pharmacien à délivrer, au-delà du champ des produits
substituables définis par l'agence, une spécialité parmi les moins chères pour
un principe actif donné, dès lors que la prescription est faite en DCI.
Afin de respecter le principe de précaution et de favoriser le caractère
opérationnel du répertoire des génériques de l'agence, la commission propose,
par conséquent, d'adopter un amendement alignant la prescription en DCI sur ce
qui existe aujourd'hui pour le générique : le pharmacien ne serait obligé de
délivrer une spécialité parmi les moins chères pour un principe actif donné que
lorsque la molécule prescrite en DCI s'inscrit dans un groupe générique.
C'est donc véritablement dans un souci de sécurité sanitaire que nous
demandons que la prescription ne puisse trouver ses effets que par référence
aux groupes génériques tels qu'ils ont été définis officiellement par l'agence.
C'est une manière de rassurer les Français sur la mise en oeuvre d'un
dispositif que nous approuvons par ailleurs.
M. le président.
La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 96.
M. Guy Fischer.
Monsieur le président, je n'ai rien à ajouter aux propos de M. le
rapporteur.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 8 et 96
?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 8 et 96, pour lesquels le
Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Article 11
M. le président.
« Art. 11. - I. - Le troisième alinéa de l'article L. 245-2 du code de la
sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Pour chaque part de l'assiette correspondant à l'une des quatre tranches
définies ci-après, le taux applicable est fixé comme suit :
Part de l'assiette correspondant aux rapports « R » - entre les charges de prospection et d'information et le chiffre d'affaires hors taxes - suivants |
Taux de la contribution
(en pourcentage) |
---|---|
R <à 10 % | 9,5 |
R égal ou > à 10 % et <à 12 % | 17 |
R égal ou > à 12 % et <à 14 % | 25 |
R égal ou > à 14 % | 31 |
« I
bis.
- Dans la deuxième phrase du premier alinéa de l'article L.
245-2 du même code, le taux : "30 %" est remplacé par le taux : "40 %". »
« I
ter.
- A. - Le premier alinéa de l'article L. 245-2 du même code
est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il est également procédé sur cette assiette à un abattement de 3 % du
montant des rémunérations versées au titre de l'emploi des salariés mentionnés
à l'article L. 5122-11 du code de la santé publique.
« B. - La perte de recettes est compensée par l'augmentation, à due
concurrence, du taux de la contribution à la charge des entreprises assurant
l'exploitation d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques visée à l'article
L. 245-6-1 du code de la sécurité sociale. »
« II. - Les dispositions du présent article entreront en vigueur pour la
détermination de la contribution due le 1er décembre 2002. »
L'amendement n° 9, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, est ainsi libellé :
« Supprimer le I de l'article 11. »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Cet amendement vise à s'opposer à l'augmentation de la taxe
sur la publicité pharmaceutique, qui constitue simplement un prélèvement
supplémentaire sur l'industrie du médicament et n'apporte aucune solution aux
problèmes de la régulation des dépenses de médicaments.
La régulation financière, par les prélèvements et les reversements, n'a aucune
efficacité. Il paraît préférable à la commission de mettre en place des actions
plus structurelles, visant à promouvoir efficacement le développement du
générique et le bon usage du médicament ; tel était l'objet de l'amendement que
nous avons adopté précédemment.
Je tiens, en outre, à préciser que l'augmentation de la taxe sur la publicité
pharmaceutique serait susceptible de fragiliser la presse médicale et
scientifique, dont le financement repose pour partie sur la publicité.
Telles sont les raisons pour lesquelles, mes chers collègues, la commission
souhaite supprimer le paragraphe I de l'article 11.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Vous êtes opposé, monsieur le rapporteur, à
l'augmentation du taux de la taxe sur la publicité pharmaceutique. Il me paraît
au contraire légitime que l'industrie pharmaceutique, dans un contexte de forte
croissance de ses résultats, soit mise à contribution dans le cadre de la
politique globale de maîtrise de la progression des dépenses de médicaments que
nous avons décidée.
J'ajoute que l'on aurait tort de croire que le Gouvernement a pour seul
objectif l'augmentation par une taxation supplémentaire des ressources de
l'assurance maladie. Je suis donc défavorable à cet amendement.
Je voudrais maintenant dire un mot à propos de la presse médicale, dont je ne
peux me faire le défenseur pour des raisons qui me sont personnelles.
Je comprends bien le propos tenu par M. le rapporteur. Il me paraît d'ailleurs
très négatif que la visite médicale soit la formation la plus écoutée de la
profession médicale.
C'est une erreur - c'est du moins mon point de vue personnel - de ne pas faire
la différence entre la visite médicale et la presse médicale : la presse
médicale, c'est quand même autre chose pour l'acquisition des connaissances
!
Pour avoir été médecin et visiteur médical, je connais la manière
extraordinairement ciblée et scientifique avec laquelle le visiteur médical
capte l'attention du médecin qui n'a guère de temps pour le recevoir ; et
l'augmentation de la consommation médicamenteuse sur un territoire donné est
liée non à des raisons de santé publique, mais à l'efficacité des visiteurs
médicaux. Cela me paraît extrêmement condamnable.
M. Paul Blanc.
Vous étiez un bon visiteur !
(Sourires.)
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Oui ! Et je l'étais d'autant plus qu'un visiteur
médical est payé au rendement !
(Nouveaux sourires.)
La progression des
ventes de certains médicaments dans les pharmacies signifie que le visiteur
médical a bien fait son travail et permet à ce dernier de gagner mieux sa vie !
Je n'ai rien contre le talent d'un certain nombre de visiteurs médicaux. Le
mien était très faible...
(Protestations amusées sur les travées du
RPR.)
En tout cas, je parle en connaissance de cause, l'augmentation de la
consommation médicamenteuse n'a rien à voir avec la santé publique !
J'ai d'ailleurs été très étonné, au moment de la triste affaire de la
Cérivastatine, qui a été retirée du marché comme vous le savez, dans des
conditions un peu abruptes, d'entendre les médecins protester en prétextant
qu'on ne leur avait rien dit. Que n'avaient-ils protesté quand on leur en avait
trop dit, pour faire prescrire trop, et qu'ils ne s'étaient pas même reportés à
l'autorisation de mise sur le marché !
Je signale, pour terminer, que le taux de visites médicales en France est l'un
des plus élevés au monde !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 9.
M. Bernard Cazeau.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Cazeau.
M. Bernard Cazeau.
Si, contrairement à M. le ministre, je n'ai pas été visiteur médical, j'ai
quand même été médecin. Cela m'a valu d'être longtemps fréquenté par les
visiteurs médicaux.
Monsieur le rapporteur, certes, la publicité fait vivre un certain nombre de
publications ; pourquoi pas d'ailleurs, puisque cela se fait dans bien d'autres
domaines ! Mais lorsque l'on voit le luxe des publications médicales - je ne
parle pas de la presse - qui sont imprimées sur du papier de très grande
qualité
(M. Leclerc proteste)
, sans parler des photos qui y figurent,
alors que, très souvent, le tout va directement à la poubelle, quand on voit le
gaspillage fait en ce domaine, on est en droit de se poser des questions. Je
pense donc que les laboratoires de l'industrie pharmaceutique, qui se plaignent
parfois d'être taxés sur leurs recherches, feraient mieux d'investir une bonne
partie de l'argent de ces publications dans la recherche !
Monsieur le rapporteur, il faut, dans cette affaire, savoir raison garder. La
progressivité prévue par le paragraphe I de l'article 11, qui n'est pas
extraordinaire et qui, je crois, a même été légèrement diminuée à l'Assemblée
nationale, nous permet de penser que la mesure proposée est bonne et qu'elle ne
mettra en danger ni les laboratoires ni d'ailleurs les médicaments dont ils
font la promotion.
M. Dominique Leclerc.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc.
Monsieur le ministre, vous avez évoqué trois éléments différents dans votre
propos.
S'agissant tout d'abord de la visite médicale, la relation directe entre le
démarchage d'un prescripteur et la vente d'un produit est bien connue.
M. Paul Blanc.
C'est fait pour ça !
M. Dominique Leclerc.
En revanche, il me paraît discutable de considérer le démarchage comme la
source première d'informations et de connaissances.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Sur les médicaments !
M. Dominique Leclerc.
Par ailleurs, monsieur le ministre, vous avez dit que les résultats de
l'industrie pharmaceutique sont tels qu'une taxation supplémentaire est
envisageable. Permettez-moi de ne pas partager tout à fait votre avis.
J'en viens enfin à la presse médicale, à propos de laquelle un amalgame est
opéré. La France a besoin d'une presse médicale performante. En effet,
aujourd'hui, le système universitaire contraint les professeurs à une quadruple
mission : enseigner, soigner et rechercher, mais aussi publier. Or, les revues
françaises d'un niveau international sont rares
(M. le ministre délégué
acquiesce)
et sont toutes dans des situations financières délicates. Je ne
voudrais donc pas qu'elles soient encore plus déstabilisées.
Le rôle de la presse médicale française à l'étranger est considérable pour la
promotion de la francophonie et le rayonnement de la médecine française.
J'indiquais en commission que, dans l'ancienne Indochine, la presse médicale
française est très importante comme vecteur du français, comme vecteur de la
connaissance, mais aussi comme vecteur de relations commerciales avec la
production industrielle française.
Alors, de grâce, soyons vigilants, et veillons à ne pas taxer toujours plus,
sous des prétextes sans lien direct avec l'objet, l'industrie ou la presse
médicales françaises, dont je voudrais me faire l'avocat en soulignant leurs
aspects nobles.
M. Alain Joyandet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. Alain Joyandet.
Mon collègue Dominique Leclerc a largement exprimé mon point de vue.
S'agissant de la communication, j'avoue avoir été un peu choqué par le propos
de M. Cazeau.
A une époque où tout le monde s'interroge sur la manière de faire passer des
messages, on ne va tout de même pas critiquer des revues ou les taxer sous
prétexte qu'elles sont en quadrichromie ! Que M. le ministre et le Gouvernement
aient besoin de trouver des recettes supplémentaires me paraît tout à fait
légitime, et on pourrait donc discuter de la façon d'y parvenir. Mais le fait
que des documents soient imprimés en quadrichromie et qu'ils aillent, pour la
plupart d'entre eux, directement à la poubelle ne justifie pas qu'on les taxe
davantage !
(M. Cazeau brandit une publication médicale.)
Un parti politique vient de diffuser un bilan dans les foyers français,
utilisant très largement à cette occasion, je crois, la quadrichromie. Doit-on
prévoir une taxe sur les bilans des partis politiques édités en quadrichromie
sous prétexte que, au moins à 90 %, ils vont directement à la poubelle ?
M. Bernard Cazeau.
C'est un débat sur la sécurité sociale !
M. Claude Estier.
Le budget de la sécurité sociale n'a pas été mis à contribution !
M. Alain Joyandet.
Quand, dans cette maison moderne qu'est le Sénat, qui est pionnière en matière
de technologies de l'information et de la communication, j'entends dire qu'il
faut taxer les revues en quadrichromie, j'ai envie de vous inviter à regarder
ce qui se passe dans votre parti politique et à en revenir à des revues éditées
en noir et blanc, comme c'était le cas au début du siècle !
(Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je voudrais réagir au propos de M. le ministre, qui regrette
que les médecins aient les visiteurs médicaux comme source principale
d'information et considère qu'une action un peu différente pourrait être
engagée.
Nous pourrions être prêts à vous suivre, monsieur le ministre. D'ailleurs,
dans le projet de loi de financement pour 2001, le Gouvernement avait proposé
la création d'un fonds de promotion de l'information médicale et
médico-économique en vue de permettre aux médecins d'avoir une connaissance des
médicaments peut-être plus objective que celle qu'ils obtiennent, selon vous,
par l'intermédiaire des visiteurs médicaux. En effet, ces derniers ont, bien
entendu, intérêt à promouvoir certains produits, dans un but économique et pour
réaliser du chiffre d'affaires et des résultats. Mais n'allons pas jusqu'à dire
qu'ils ne délivrent pas aux médecins les données scientifiques permettant à ces
derniers d'avoir une connaissance objective du dispositif, même si
l'information peut être un peu biaisée.
Nous serions donc prêts à vous suivre et à faire ce pari avec vous, monsieur
le ministre. Mais, depuis un an, le décret qui devait conduire à la création de
ce fonds n'a toujours pas été publié ! C'est d'ailleurs vrai pour celui-ci
comme pour de nombreux autres. On parlera sans doute tout à l'heure des
hôpitaux : le FMES qui devait être créé par voie de décret n'a toujours pas vu
le jour.
Je note donc, en toute objectivité, une certaine inertie dans l'activité du
Gouvernement : ce dernier annonce des mesures que nous pourrions éventuellement
approuver, mais les moyens ne suivent pas.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Monsieur le rapporteur, j'ai signé ce décret, qui va
donc être publié prochainement.
Ce fonds de promotion de l'information médicale et médico-économique
recueillera 10 % seulement de la taxe qui fait l'objet de l'article 11.
Evidemment, ce n'est pas assez ; mais ce dispositif prétend non pas remplacer
l'information médicale, mais mettre cette dernière à sa juste place et,
éventuellement, la corriger.
Je ne voudrais pas que l'on se méprenne : comme je vous l'ai dit, j'ai été
visiteur médical, et je ne voudrais pas jeter l'opprobre sur cette profession.
Je ne suis pas de ceux qui rejettent les nouvelles molécules, la recherche et
l'innovation en matière de médicaments, au contraire. Mais les visites
médicales ne me paraissent pas la bonne méthode en raison d'un dumping
permanent et d'un acharnement prescriptif qui ne sont pas de nature à améliorer
la santé publique, au contraire.
Et je vous fais remarquer, avec beaucoup de respect à l'égard de cette
profession, que le taux des visites médicales est beaucoup plus élevé en France
que dans d'autres pays.
Pour le reste, je partage votre sentiment sur la presse médicale, à laquelle,
tout comme vous, je souhaite conférer un plus grand prestige à travers le
monde. C'est pourquoi j'ai opéré une distinction entre la visite médicale et
cet acharnement prescriptif qui porte également ses fruits dans certains cas.
Il ne faut pas exagérer ! Si le médecin est très occupé, ce qui est souvent le
cas, et qu'il n'a pas les moyens de se former différemment, ce contact lui
permet de s'informer ; mais je déplore que ce soit le seul.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 9, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
5
COMMUNICATION RELATIVE
À UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président.
J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un
texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux
chambres régionales des comptes et à la Cour des comptes est parvenue à
l'adoption d'un texte commun.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-deux heures cinq,
sous la présidence de M. Daniel Hoeffel.)
PRÉSIDENCE DE M. DANIEL HOEFFEL
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
6
FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
POUR 2002
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président.
Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 2002, adopté par l'Assemblée nationale.
Dans la discussion des articles, nous avons entamé l'examen de l'article
11.
Article 11 (suite)
M. le président.
« Art. 11. - I. - Le troisième alinéa de l'article L. 245-2 du code de la
sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Pour chaque part de l'assiette correspondant à l'une des quatre tranches
définies ci-après, le taux applicable est fixé comme suit :
Part de l'assiette correspondant aux rapports « R » - entre les charges de prospection et d'information et le chiffre d'affaires hors taxes - suivants |
Taux de la contribution
(en pourcentage) |
---|---|
R <à 10 % | 9,5 |
R égal ou > à 10 % et <à 12 % | 17 |
R égal ou > à 12 % et <à 14 % | 25 |
R égal ou > à 14 % | 31 |
« I
bis.
- Dans la deuxième phrase du premier alinéa de l'article L.
245-2 du même code, le taux : "30 %" est remplacé par le taux : "40 %".
« I
ter.
- A. - Le premier alinéa de l'article L. 245-2 du même code
est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il est également procédé sur cette assiette à un abattement de 3 % du
montant des rémunérations versées au titre de l'emploi des salariés mentionnés
à l'article L. 5122-11 du code de la santé publique.
« B. - La perte de recettes est compensée par l'augmentation, à due
concurrence, du taux de la contribution à la charge des entreprises assurant
l'exploitation d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques visée à l'article
L. 245-6-1 du code de la sécurité sociale.
« II. - Les dispositions du présent article entreront en vigueur pour la
détermination de la contribution due le 1er décembre 2002. »
L'amendement n° 10, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, est ainsi libellé :
« Supprimer le B du I
ter
de l'article 11. »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres généraux
et l'assurance maladie.
Il s'agit de la suppression d'un gage, conséquence
d'une disposition votée par l'Assemblée nationale. Il nous a paru utile de
procéder à ce « nettoyage » du texte de l'Assemblée nationale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée à la famille, à l'enfance et aux personnes handicapées.
Défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 10, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 93 rectifié, présenté par MM. Lardeux et Murat, est ainsi
libellé :
« Après le I
ter
de l'article 11, insérer deux paragraphes additionnels
ainsi rédigés :
« A. - Le premier alinéa de l'article L. 245-2 du même code est complété par
une phrase ainsi rédigée : "En outre, sont exclues de l'assiette de la
contribution les dépenses de promotion liées aux médicaments à service médical
rendu majeur ou important et répondant à une priorité de santé publique telle
que définie dans le cadre de l'article L. 1411-1 du code de la santé
publique."
« B. - La perte de recettes est compensée à due concurrence à la Caisse
nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés par la création d'une
taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général
des impôts. »
La parole est à M. Lardeux.
M. André Lardeux.
Pour freiner l'augmentation des dépenses publiques, le Gouvernement a souhaité
accroître le rendement et la progressivité de la taxe sur la promotion et
l'information des laboratoires pharmaceutiques à l'égard des prescripteurs. Il
convient cependant de ne pas pénaliser les entreprises produisant des
médicaments dont l'action thérapeutique est considérée comme prioritaire au
regard de la santé publique.
Cet amendement tend donc à exclure de l'assiette les dépenses de promotion des
produits considérés par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits
de santé, l'AFSSAPS, comme présentant un service médical rendu « majeur ou
important » aux termes de l'article R. 163-3 du code de la sécurité sociale et
qui répondent aux priorités de santé publique telles que prévues à l'article L.
1411-1 du code de la santé publique.
Cet amendement s'inscrit dans notre démarche commune axée sur l'efficacité des
soins.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Le mécanisme de la taxe sur les dépenses de promotion incite les laboratoires
à modérer leurs dépenses de publicité. Par conséquent, si votre souci, que le
Gouvernement partage, est de voir les laboratoires consacrer une part plus
importante de leurs revenus à la recherche et à l'innovation, vous admettrez
qu'il leur appartient de maîtriser le niveau de la taxe qu'ils paieront en
modérant leurs dépenses de promotion.
Il nous paraît en effet plus judicieux que l'industrie pharmaceutique
concentre ses capacités d'investissement sur la recherche et l'innovation
plutôt que sur un excès de publicité et de promotion auprès des médecins.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 93 rectifié, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 11, modifié.
(L'article 11 est adopté.)
Article 11 bis
M. le président.
« Art. 11
bis
. - Dans le deuxième alinéa de l'article L. 245-6-1 du
code de la sécurité sociale, le taux : "2,5 %" est remplacé par les mots : "3,5
% pour les spécialités pharmaceutiques qui ne peuvent être délivrées que sur
prescription et de 1 % pour les autres spécialités pharmaceutiques". »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 11, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, est ainsi libellé :
« Supprimer l'article 11
bis
. »
L'amendement n° 97, présenté par M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit l'article 11
bis :
« Le second alinéa de l'article L. 245-6-1 du code de la sécurité sociale est
ainsi rédigé :
« Le taux de cette contribution est fixé à 1 %. »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 11.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
La taxation sur les médicaments, avec ou sans prescription,
est aujourd'hui de 2,5 %.
M. Cahuzac a éprouvé le besoin de faire passer le taux de 2,5 % à 3,5 % pour
les médicaments qui sont vendus sur prescription - ils représentent, je le
rappelle, 85 % du marché - et de l'abaisser à 1 % pour les médicaments vendus
sans prescription.
Or le législateur, lorsqu'il a institué le taux de 2,5 %, a précisément
souhaité mettre sur un pied d'égalité l'ensemble des médicaments au regard de
la taxation.
La commission des affaires sociales n'a pas bien compris la motivation de
cette modification. C'est pourquoi elle propose la suppression de cet
article.
M. le président.
La parole est à M. Fischer, pour présenter l'amendement n° 97.
M. Guy Fischer.
La commission des affaires sociales propose de supprimer une disposition
introduite par les députés, sur proposition de M. Cahuzac, après que le
Gouvernement s'en fut remis à la sagesse de l'Assemblée nationale.
Cette disposition instaure un régime de taxation des ventes directes différent
selon que le médicament est soumis ou non à prescription obligatoire. Ainsi, le
taux de la taxe concernant les médicaments remboursables soumis à prescription
est augmenté, ce qui ne peut que favoriser le développement de
l'automédication, dont les dangers sont bien connus.
Par ailleurs, pour les dépositaires de produits pharmaceutiques, dont la
mission est d'assurer la distribution des médicaments auprès des grossistes,
des hôpitaux et des pharmaciens, mission incluant la vente directe aux
officines, cette disposition pourrait avoir des répercussions graves, tant en
termes économiques que sur le plan social.
En 1998, lorsque cette taxe avait été instituée, le groupe communiste
républicain et citoyen avait défendu un amendement visant à faire passer le
taux de cette dernière de 2,5 % à 1 %. Logiques avec nous-mêmes, nous réitérons
aujourd'hui notre proposition d'alors.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 97 ?
M. Alain Vasselle.
rapporteur.
La commission aimerait connaître l'avis du Gouvernement sur
cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 11 et 97 ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n°
97 et, en cohérence avec la position qu'il a adoptée sur cette question à
l'Assemblée nationale, il s'en remet à la sagesse du Sénat s'agissant de
l'amendement n° 11.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 11, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 11
bis
est supprimé et l'amendement n° 97 n'a
plus d'objet.
Article 11 ter
M. le président.
« Art. 11
ter
. - L'article L. 162-17-3 du code de la sécurité sociale
est complété par un III ainsi rédigé :
« III. - Le rapport d'activité établi par le Comité économique des produits de
santé est remis chaque année au Parlement. » -
(Adopté.)
Article 12
M. le président.
« Art. 12. - Pour le calcul de la contribution due au titre de l'année 2002 en
application de l'article L. 138-10 du code de la sécurité sociale, le taux de 3
% est substitué au taux K mentionné dans le tableau figurant au deuxième alinéa
du même article. »
L'amendement n° 12, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, est ainsi libellé :
« Supprimer l'article 12. »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
A l'article 32, la commission des affaires sociales proposera
la suppression de l'ONDAM. Par cohérence, nous proposons de supprimer l'article
12, qui instaure un taux spécifique de 3 % applicable à la progression du
chiffre d'affaires du médicament pour le déclenchement de la clause de
sauvegarde.
Dans mon intervention d'hier, j'ai souligné que la seule régulation financière
par le biais des versements acquittés par les laboratoires pharmaceutiques
avait une efficacité tout à fait limitée. J'ai également regretté que le
Gouvernement préfère, une nouvelle fois, l'augmentation des prélèvements pesant
sur l'industrie pharmaceutique à des actions plus structurelles visant à
promouvoir le bon usage du médicament.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, je vous invite à supprimer cet
article.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cet
amendement.
En effet, en matière de politique du médicament, notre objectif est de
garantir l'accès au médicament pour les assurés. L'industrie pharmaceutique
bénéficie d'ailleurs, au titre des médicaments remboursables, d'une des plus
fortes croissances de toute l'industrie en termes de chiffre d'affaires.
La clause de sauvegarde introduite par la loi de financement de la sécurité
sociale pour 1998, et simplifiée l'année dernière, permet de fournir le cadre à
la régulation conventionnelle de cette croissance. Dans la plupart des cas, la
clause de sauvegarde ne trouve pas à s'appliquer puisque les laboratoires qui
s'inscrivent dans une logique conventionnelle en sont exonérés. En 2000, la
clause de sauvegarde n'a ainsi touché que douze entreprises.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 12, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 12 est supprimé.
Article 12 bis
M. le président.
Art. 12
bis
. - Après l'article L. 165-3 du code de la sécurité sociale,
sont insérés deux articles L. 165-3-1 et L. 165-3-2 ainsi rédigés :
«
Art. L. 165-3-1
. - Lorsqu'un organisme d'assurance maladie constate
à l'encontre d'un fournisseur de l'un des produits ou prestations inscrits sur
la liste prévue à l'article L. 165-1 le non-respect du prix fixé dans les
conditions mentionnées à l'arti cle L. 165-3, le directeur de cet organisme
adresse au fournisseur une notification par laquelle il lui indique les faits
reprochés. Une copie de ce courrier est adressée à l'assuré. Le fournisseur a
la possibilité de faire parvenir ses observations à l'organisme, notamment
lorsque l'arrêté mentionné à l'article L. 165-3 a prévu des possibilités de
dépassement. L'assuré peut également faire part de ses propres observations à
l'organisme d'assurance maladie.
« En cas de confirmation de la matérialité des faits, l'organisme d'assurance
maladie adresse au fournisseur une mise en demeure de rembourser à l'assuré la
différence entre le prix facturé et le prix fixé par arrêté. Une copie de ce
courrier est adressée à l'assuré.
« En cas de non-exécution de la mise en demeure, l'organisme peut prononcer à
l'encontre du fournisseur, en fonction de la gravité des faits reprochés, une
pénalité financière dans la limite de deux fois le plafond mensuel de la
sécurité sociale. L'organisme verse à l'assuré la différence entre le prix
facturé et le prix fixé par arrêté.
« Lorsque la gravité ou la répétition des faits est constatée, une suspension
du conventionnement, pour une durée maximale de deux ans, peut également être
prononcée. La mesure prononcée par l'organisme d'assurance maladie est
exécutoire à compter de sa notification au fournisseur. La mesure prononcée par
l'organisme d'assurance maladie est motivée et peut faire l'objet d'un recours
de pleine juridiction devant le tribunal administratif.
« Les modalités d'application du présent article, notamment les règles et
délais de procédures, ainsi que les modes de calcul de la pénalité financière,
sont déterminées par décret en Conseil d'Etat.
«
Art. L. 165-3-2
. - Pour le recouvrement des sommes exigées des
fournisseurs au titre des dispositions de l'article L. 165-3-1, l'organisme
d'assurance maladie peut faire usage des prérogatives et des règles applicables
par les organismes de recouvrement des cotisations de sécurité sociale.
L'organisme d'assurance maladie, lorsqu'il est débiteur vis-à-vis du
fournisseur, peut également déduire la somme des montants dus. » -
(Adopté.)
Article 13
M. le président.
« Art. 13. - Le montant du fonds mentionné au VIII de l'article 33 de la loi
de financement de la sécurité sociale pour 2000 (n° 99-1140 du 29 décembre
1999) est fixé à 22,87 millions d'euros pour l'année 2002. »
La parole est à M. Paul Blanc.
M. Paul Blanc.
Madame la ministre, vous nous proposez de modifier la rédaction de l'article
42 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, et donc le
financement des crédits affectés aux cliniques privées.
Il me paraît inutile de rappeler que, si la situation des cliniques privées
est variée, elle n'en est pas moins difficile : un grand nombre d'entre elles
connaissent des difficultés liées aux efforts de restructuration déjà
effectués, aux contraintes de la limitation des dépenses de soins et à une
pénurie de main-d'oeuvre, notamment en personnel infirmier.
A la suite des récents mouvements de grève, le Gouvernement leur a accordé une
aide supplémentaire de 1,7 milliard de francs. Ce ballon d'oxygène était
absolument indispensable, mais encore faut-il que les fonds soient distribués
rapidement - et dans la plus grande transparence - au profit des cliniques le
plus en difficulté, afin de revaloriser les salaires des personnels et donc
d'enrayer la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée, et de permettre l'amélioration
de la qualité des soins.
Madame la ministre, il faut absolument sauvegarder la complémentarité des
hôpitaux et des cliniques, car elle fait la richesse de notre système de soins,
que beaucoup de pays nous envient. Toutefois, il faut aussi corriger les
inégalités qui existent entre les différentes cliniques sur l'ensemble du
territoire.
Soyez assurée, madame la ministre, que le groupe du RPR sera extrêmement
vigilant en ce qui concerne les modalités et les délais de répartition de ces
fonds. C'est, en effet, une question de survie, aujourd'hui, pour un certain
nombre d'établissements, et plus particulièrement, peut-être, pour ceux qui
sont situés dans des villes qui n'ont pas la chance de posséder un CHU.
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le sujet que
nous examinons au travers de cet article 13 est d'une extrême importance.
Afin de traduire l'accord signé le 7 novembre dernier entre l'Etat, la
fédération de l'hospitalisation privée et la fédération des établissements
d'hospitalisation et d'assistance privés à but non lucratif pour mettre fin à
la grève des patrons, le Gouvernement propose d'augmenter pour 2001 et 2002 les
crédits du fonds pour la modernisation des cliniques privées.
Par ailleurs, les missions de ce fonds seront élargies, puisqu'il aura
vocation à accompagner les restructurations, mais également la politique
salariale.
Outre les remarques que nous avons déjà présentées concernant le montant de
l'aide consentie en quarante-huit heures seulement, soit 3,1 milliards de
francs au total - alors même que les hospitaliers qui, depuis deux ans, n'ont
eu de cesse de se mobiliser, ont péniblement réussi à arracher 3,9 milliards de
francs - et compte tenu du danger qu'il y a à vouloir considérer que le secteur
privé et l'hôpital public doivent être traités à égalité sans pour autant - et
là, je m'adresse à la majorité sénatoriale - exiger des cliniques privées les
mêmes devoirs et obligations, nous nous interrogeons.
En l'état, l'amendement du Gouvernement n'apporte, selon nous, aucune garantie
en matière de ventilation des fonds pour qu'effectivement la situation sociale
des infirmières et de l'ensemble des personnels se trouve améliorée.
Cela fait maintenant plus d'un an et demi que les syndicats tentent de
négocier une convention collective unique. Le moins que l'on puisse dire, c'est
que les chambres patronales rechignent à avancer, qu'il s'agisse des carrières,
des salaires ou de la prévoyance, et qu'elles n'entendent absolument pas rogner
sur leurs profits. Bien au contraire, elles attendent la manne de l'Etat.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Monsieur Fischer, vous exagérez !
M. Guy Fischer.
Mme Yolande Briand, responsable CFDT pour le secteur de la santé, résume très
bien la situation dans une interview publiée dans le journal
Le Monde
du
9 novembre 2001.
Elle affirme ainsi que les syndicats sont prêts « à travailler à
l'amélioration de la situation des personnels, car il existe un vrai problème
de salaires dans quelques établissements, mais on ne peut pas faire confiance
aux patrons parce que, jusqu'à présent, l'argent n'a pas été affecté à sa
destination ».
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
C'est un procès d'intention !
M. Guy Fischer.
Permettez-nous donc, madame la ministre, d'être prudents et réservés tant que
le ciblage de ces rallonges et le contrôle des fonds ne seront pas assurés. Ce
sera, certes, difficile, car le secteur lucratif souffre cruellement d'un
manque de transparence.
De plus, s'agissant de mesures sociales et salariales et non
d'investissements, comment expliquer que les sommes soient distribuées par les
ARH, les agences régionales de l'hospitalisation, sans négociation nationale ou
locale préalable ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
C'est vrai !
M. Guy Fischer.
Concernant les demandes de M. le rapporteur de la commission des affaires
sociales - qui sont largement partagées sur ces travées par la majorité
sénatoriale - afin de doter le fonds de modernisation des cliniques privées de
moyens supplémentaires, à savoir 1 milliard de francs, soit le même montant que
celui qui a été dégagé pour le fonds de modernisation des établissements de
santé, nous nous y opposerons fermement.
Par ailleurs, je considère que l'on ne peut pas traiter de la même manière les
établissements privés lucratifs et l'hospitalisation publique.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Ce n'est pas le cas !
M. Guy Fischer.
Peut-être, mais j'insiste sur ce point ! En effet, des écarts existent, et
nous ne devons pas accréditer l'idée selon laquelle, finalement, il faudrait
parvenir au même traitement.
Comme M. Paul Blanc vient de le rappeler - mais on l'oublie trop souvent -,
les hôpitaux publics assurent la quasi-exclusivité des missions d'intérêt
général.
M. Paul Blanc.
Eh oui !
M. Guy Fischer.
Il en est ainsi de l'enseignement, de la recherche, de la formation, des
urgences et des permanences de soins, de la prise en charge de la précarité ou
de l'innovation.
Les activités développées dans les deux secteurs d'hospitalisation ne sont pas
comparables. A l'analyse des données du PMSI, le programme de médicalisation
des systèmes d'information hospitaliers, il est clair que le secteur public
assure, en termes de poids moyen du cas traité, des prises en charge plus
lourdes et plus coûteuses, de l'ordre de 30 % en chirurgie et de 18 % en
médecine.
Nous sommes donc vraiment plus que dubitatifs vis-à-vis de l'amendement du
Gouvernement et de ceux de la majorité sénatoriale, et nous mesurons la colère
qu'a pu susciter une telle proposition.
Cela étant, une certaine situation a sans doute été prise en compte, mais nous
considérons qu'aujourd'hui il y a peut-être, dans la décision du Gouvernement,
deux poids et deux mesures.
C'est la raison pour laquelle j'annonce clairement que nous n'interviendrons
plus sur cet article et que nous voterons contre l'amendement du Gouvernement.
(Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Oh ! Où est la majorité plurielle ?
M. Paul Blanc.
Quelle surprise !
M. le président.
La parole est à M. Cazeau.
M. Bernard Cazeau.
Monsieur le président, madame la ministre, nous ne sommes pas de ceux qui ne
prennent pas en compte l'hospitalisation privée et nous ne sommes pas là pour
relancer la guerre entre l'hospitalisation publique et l'hospitalisation
privée, comme cela a été le cas sur certaines travées de cet hémicycle.
Comme M. Fischer, nous mesurons l'importance de l'hospitalisation et de
l'hôpital publics : c'est en effet à l'hôpital que sont réalisés à peu près 80
% des actes de médecine, une proportion certainement un peu plus importante des
actes de psychiatrie et environ 50 % des actes de chirurgie et
d'obstétrique.
Nous mesurons cependant aussi l'importance de l'hospitalisation privée, mais
il nous paraît important de veiller - c'est d'ailleurs l'objectif du
Gouvernement - à l'affectation du crédit de 1,7 milliard de francs qui vient
d'être débloqué. Ainsi, le statut des infirmières doit être prioritairement
pris en compte.
Nous savons aussi que certains établissements travaillent parfois en
complémentarité entre le privé et le public, et nous devons donc faire la part
des choses.
Nous nous félicitons, pour ce qui nous concerne, de l'accord qui est intervenu
récemment et nous souhaitons, effectivement, une véritable transparence dans
l'utilisation de ces sommes. Au demeurant, les conventions collectives, mais
aussi l'observatoire qui sera mis en place, permettront d'atteindre la
transparence et la clarté en la matière.
Quoi qu'il en soit, nous nous félicitons que la guerre ne soit pas relancée
entre les deux types d'hospitalisation, car elles sont aujourd'hui
complémentaires. Nous l'avons bien constaté lors de la récente grève, il est
parfois difficile à l'hospitalisation publique d'assurer l'ensemble des
soins.
M. Paul Blanc.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. Mercier.
M. Michel Mercier.
Je n'avais pas l'intention d'intervenir sur cet article 13, tant il me
semblait que les choses devaient aller de soi et qu'il n'était pas utile de
raviver des querelles oubliées. Mais le discours archaïque de M. Fischer me
force à intervenir sur ce point.
Dans notre pays, nous avons heureusement dépassé un certain nombre de
querelles de nature plutôt idéologique pour nous en tenir à un état de fait :
aujourd'hui, l'offre de soins est réalisée à la fois par l'hôpital public et
par les cliniques privées. Les agences régionales de l'hospitalisation assurent
la régulation entre les deux systèmes et il est tout à fait normal - et même
nécessaire - que le législateur et le Gouvernement oeuvrent afin que soit le
plus possible respectée l'égalité de traitement entre ceux qui travaillent dans
un système et ceux qui travaillent dans l'autre, pour que, dans notre pays,
l'offre de soins puisse être une offre de qualité répondant à la demande des
malades.
S'agissant des mesures que propose le Gouvernement, nous partageons le point
de vue que vient d'exprimer M. Cazeau. Nous avons bien vu, ces derniers jours
que, sans les cliniques privées, le système public ne pouvait pas répondre à
toutes les demandes, et vice versa.
Chacun doit pouvoir parfaitement remplir ses missions, et le groupe de l'Union
centriste est tout à fait favorable à la remise à niveau des moyens des
cliniques privées qui nous est proposée.
M. le président.
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 92 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé
:
« Rédiger ainsi l'article 13 :
« I. - L'article 42 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001
(n° 2000-1257 du 23 décembre 2000) est ainsi modifié :
« 1° Les mots : "150 millions de francs" sont remplacés par les mots : "750
millions de francs" ;
« 2° Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :
« II. - Le VIII de l'article 33 de la loi de financement de la sécurité
sociale pour 2000 (n° 99-1140 du 29 décembre 1999) est ainsi modifié :
« A. - Le premier alinéa du A est remplacé par les dispositions suivantes :
« Il est créé, pour une durée de cinq ans à compter du 1er janvier 2000, un
fonds destiné à financer, dans le respect du schéma régional d'organisation
sanitaire :
« - des opérations concourant à l'adaptation de l'offre de soins hospitaliers
au niveau régional ;
« - à compter du 1er janvier 2001, des actions en matière sociale et salariale
;
« réalisées par les établissements de santé privés mentionnés à l'article L.
6114-3 du code de la santé publique.
« B. - Après le premier alinéa du A, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les subventions au titre des actions réalisées en matière sociale et
salariale sont attribuées selon des modalités définies par décret en fonction
des données utilisées pour fixer les règles générales et les critères de
modulation des tarifs. Ces règles et critères sont tels que définis à l'article
L. 162-22-4 du code de la sécurité sociale : la place de l'établissement dans
le schéma régional d'organisation sanitaire, l'ensemble des ressources dont ils
disposent pour ces actions, en particulier le niveau des tarifs des prestations
des établissements de la région apprécié en fonction des données disponibles
sur l'activité des établissements et notamment des informations mentionnées aux
articles L. 6113-7 et L. 6113-8 du code de la santé publique.
« C. - Le second alinéa du E est ainsi rédigé :
« Les modalités d'application du présent VIII, notamment les opérations et les
actions éligibles à un financement par le fonds, ainsi que les informations
mises à la disposition de l'agence régionale de l'hospitalisation par
l'établissement à l'appui de sa demande, sont déterminées par décret.
« 3° Le début de l'article est précédé de la mention : "I".
« II. - Le montant du fonds mentionné au VIII de l'article 33 de la loi de
financement de la sécurité sociale pour 2000 (n° 99-1140 du 29 décembre 1999)
est fixé à 91,5 millions d'euros pour l'année 2002. »
L'amendement n° 13, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, et l'amendement n° 48, présenté par Mme Bocandé, M.
Franchis, Mme Gautier et les membres du groupe de l'Union centriste, sont
identiques et sont ainsi libellés :
« A la fin de l'article 13, remplacer le montant : "22,87" par le montant :
"152,45".
L'amendement n° 14, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, est ainsi libellé :
« I. - Compléter l'article 13 par un paragraphe ainsi rédigé :
« II. - Dans le A du VIII du même article, après les mots : "organisation
sanitaire", sont insérés les mots : "et des actions de modernisation sociale".
»
« II. - En conséquence, faire précéder l'article 13 d'un : "I". »
La parole est à Mme le ministre, pour défendre l'amendement n° 92 rectifié.
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Permettez-moi tout d'abord de préciser, pour répondre
aux différentes questions relatives aux traitements comparés de l'hôpital
public et de l'hospitalisation privée, que, ce matin, le conseil des ministres
a adopté le projet de loi de finances rectificative. Y sont inscrits deux
milliards de francs de crédits, en application du protocole hospitalier du 14
mars 2000.
L'amendement n° 92 rectifié vise à élargir le champ d'application du fonds
pour la modernisation des cliniques privées, créé en 2000 et destiné à
accompagner des opérations d'adaptation de l'offre hospitalière. Il fera bien
l'objet d'un ciblage, monsieur le sénateur, et d'un contrôle de ses fonds. En
effet, d'une part, il y aura un ciblage sur les établissements qui rencontrent
des difficultés, un ciblage sur le rattrapage des salaires et, d'autre part,
une transparence, puisqu'il y aura un contrôle par les ARH et un suivi par le
comité tripartite syndicats, patronat et Etat.
Un observatoire tripartite de la situation sociale sera chargé de préciser le
bilan de la mise en oeuvre de ces mesures dans le cadre de la discussion d'une
nouvelle convention collective visant, notamment, à améliorer le dialogue
social et les conditions de travail au sein des établissements, à faciliter
l'accès à la formation professionnelle continue et à élever le niveau des
rémunérations des personnels salariés afin d'en améliorer la cohérence avec
celles du secteur public.
Les actions réalisées en matière sociale et salariale seront financées, selon
des modalités définies par décret, en fonction de trois critères : d'abord,
l'ensemble des ressources dont dispose l'établissement et, notamment, le niveau
relatif des tarifs des prestations ou, s'agissant des disciplines de médecine,
de chirurgie et d'obstétrique, les données issues du programme de
médicalisation des systèmes d'information ; ensuite, les orientations de la
conférence régionale de santé et du schéma régional d'organisation sanitaire -
les cliniques ne pourront donc pas financer n'importe quoi sur ce fonds et
s'inscriront bien dans le schéma régional ; enfin, les actions menées en vue
d'améliorer la qualité des soins.
Les subventions seront attribuées par les agences régionales de
l'hospitalisation, en vue de réduire les inégalités tarifaires ; leur montant
tiendra compte des différents facteurs susceptibles d'influer sur l'équilibre
économique et la structure de financement des établissements privés.
Elles feront l'objet d'un avenant au contrat d'objectifs de moyens entre les
ARH et les établissements concernés précisant, notamment, le montant, les
modalités et les conditions de versement ainsi que l'engagement de
l'établissement portant sur l'amélioration de la transparence des informations
économiques et sociales mises à la disposition de l'agence régionale de
l'hospitalisation.
Je pense, au nom du Gouvernement, avoir répondu ainsi aux différentes
interrogations portant sur le contrôle des fonds et leur judicieuse utilisation
en fonction des besoins du pays en matière de santé.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle, rapporteur, pour défendre les amendements n°s 13
et 14.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Les cliniques privées ont retenu, nous l'avons constaté à
l'instant même, l'attention de nombreux collègues.
La commission des affaires sociales avait pratiquement devancé l'initiative du
Gouvernement de doter d'un montant supérieur à ce qu'il est dans le projet de
loi de financement le fonds pour la modernisation des cliniques privées. En
effet, dans le texte du Gouvernement tel qu'il a été déposé sur le bureau du
Sénat, après son passage devant l'Assemblée nationale, ce fonds n'était doté
que de 150 millions de francs. A la suite des auditions de la commission, et
compte tenu des difficultés rencontrées par les cliniques privées, des demandes
que ces dernières réitéraient auprès du Gouvernement et de l'absence de
réaction de celui-ci pendant un certain temps, nous avions proposé de doter ce
fonds de un milliard de francs au moins. Nous avons été entendus par le
Gouvernement, ce dont je me réjouis. C'est la raison pour laquelle je retirerai
cet amendement au profit de l'amendement n° 92 rectifié du Gouvernement et, par
voie de conséquence, monsieur le président, l'amendement n° 14 deviendra sans
objet.
Auparavant, nous souhaitons obtenir de votre part, madame le ministre, une
précision. Les dotations proposées par le Gouvernement sont ventilées de la
façon suivante : 600 millions de francs pour le fonds de modernisation des
cliniques privées au titre de l'exercice 2001, et 450 millions de francs au
titre de l'exercice 2002. A cette somme de 1,5 milliard de francs, il ajoute
500 millions de francs pour les cliniques privées, mais rien n'est dit
aujourd'hui sur la façon dont ces 500 millions de francs seront financés. Le
Gouvernement envisage-t-il de modifier l'ONDAM pour intéger cette enveloppe
supplémentaire ?
En toute logique, cette somme devrait majorer l'objectif des dépenses de
cliniques privées ainsi que l'ONDAM de 2002. Or, à ma connaissance, le
Gouvernement n'a pas déposé d'amendement à l'article 32 du projet de loi. Par
conséquent, madame le ministre, pouvez-vous nous expliquer comment le
Gouvernement entend assurer le financement de ces 500 millions de francs ?
A l'intention de nos collègues qui ont fait valoir l'activité importante des
hôpitaux publics, notamment dans les domaines de la médecine et de la
psychiatrie - qui, selon M. Cazeau, je crois, représentait environ 80 % de
l'activité des hôpitaux et des cliniques - je tiens à rappeler également que,
dans les domaines de la chirurgie et de l'obstétrique, les activités se
partagent environ pour moitié entre hôpitaux publics et cliniques privées.
N'oublions pas que ces dernières apportent des soins à plus de six millions de
nos concitoyens, ce qui n'est pas négligeable ! Par conséquent, vous avez
raison, monsieur Cazeau, de dire - et M. Mercier est venu conforter vos
remarques - qu'il faut dépasser l'opposition qui est faite entre cliniques
privés et hôpitaux, et c'est la raison pour laquelle l'intervention de M.
Fischer n'était pas bienvenue sur le sujet.
Je me félicite que l'on puisse trouver enfin, au moins dans ce domaine, un
consensus qui permette de répondre aux attentes, et je me réjouis d'autant plus
des évolutions du Gouvernement que nous avions entendues de la bouche de Mme
Guigou, les membres de la commission des affaires sociales le confirmeront, des
propos dont la tonalité était tout à fait différente de celle de l'intervention
que Mme Ségolène Royal vient de faire ! Elle avait en effet manifesté pour les
cliniques privées une sorte de mépris qui allait jusqu'à opposer les médecins
aux infirmières...
(Protestations sur les travées socialistes.)
M. Jean Chérioux.
C'est vrai !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
... et que j'avais trouvé malvenu.
Le Gouvernement s'est ressaisi, ce dont je me réjouis, et, au moins, nous
repartons dans une bonne direction !
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Je ne peux pas laisser mettre en cause Mme Guigou
comme cela vient d'être fait, puisque c'est elle qui a rédigé l'amendement que
je viens de vous présenter !
M. Jean Chérioux.
Elle a changé d'avis !
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Je vous prie donc, monsieur le rapporteur, de retirer
les propos désobligeants que vous venez d'avoir à son égard.
(Protestations sur les travées du RPR.)
M. Jean Chérioux.
Elle s'est ressaisie, c'est tout !
M. le président.
La parole est à M. Lorrain, pour défendre l'amendement n° 48.
M. Jean-Louis Lorrain,
rapporteur.
Etant donné le contexte, nous retirons cet amendement.
M. le président.
L'amendement n° 48 est retiré.
Madame le ministre, M. le rapporteur a souhaité obtenir des précisions, avant
de prendre la décision de retirer ou non ses amendements.
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Les 500 millions de francs sont bien compris dans
l'ONDAM, car le rebasage de 2001 procure un montant financier de 1,1 milliard
de francs qui sert de base au calcul de 2002. Nous avons donc bien une
enveloppe totale qui englobe les 500 millions de francs et qui s'inscrit dans
l'objectif de 3,5 % sur les dépenses de 2001 qui font l'objet d'un rebasage qui
se répercute sur 2002.
C'est bien cela, monsieur Mercier ? Je ne me suis pas trompée dans les calculs
?
M. Michel Mercier.
Vous avez bien compris, madame la ministre : il suffit de monter la base sans
changer le taux, et on peut supprimer l'ONDAM, qui ne sert à rien !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
En conséquence, je retire les amendements n°s 13 et 14,
monsieur le président.
M. le président.
Les amendements n°s 13 et 14, sont retirés.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 92 rectifié.
Mme Nicole Borvo.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Je ne peux pas laisser dire que nous sommes des archaïques...
M. Jean Chérioux.
Hélas ! C'est pourtant vrai !
Mme Nicole Borvo.
... et que nous rallumons la guerre - si tant est qu'il y ait une guerre -
entre l'hôpital public et les cliniques privées.
Nous sommes parfaitement solidaires des salariés des établissements privés, en
particulier des infirmières, qui sont, chacun le sait, moins payés, de 20 %
environ, que ceux du secteur public.
Mais il faut savoir que les établissements publics et les établissements
privés ne sont pas sur le même pied ! En effet, comme cela a été dit, les
hôpitaux publics sont soumis à des sujétions particulières. Je suis bien placée
pour connaître le problème des hôpitaux publics parisiens, particulièrement
sensible compte tenu des charges énormes auxquelles ils ont à faire face. On
pourrait dire beaucoup sur le fait que certains, à l'heure actuelle, sont
menacés de fermeture.
De plus, les cliniques privées ne sont pas non plus toutes logées à la même
enseigne. Certaines sont même cotées en bourse. Je vous rappelle que M. Fischer
avait dénoncé le fait que l'argent de la sécurité sociale servait à financer
les actionnaires, ce contre quoi nous nous étions insurgés, car il faut quand
même être sérieux !
Nous savons également qu'il existe de grandes différences de salaire entre les
praticiens des hôpitaux publics et ceux des cliniques privées.
M. Guy Fischer.
Oh oui !
Mme Nicole Borvo.
Ce sont autant d'éléments à prendre en considération. Certes, si certaines
cliniques privées sont en grande difficulté - nous en convenons -, d'autres, en
revanche, ne le sont absolument pas. Il n'empêche que les infirmières du privé
sont payées 20 % de moins que dans le public.
La réalité est que notre pays souffre d'une grave pénurie d'infirmières, - les
raisons en sont connues - et que les infirmières des cliniques privées vont
servir à compenser le manque d'infirmières dans le public. Tout cela est
évidemment tout à fait regrettable et pose d'énormes problèmes.
Comme les salariés du privé, nous demandons la réouverture de négociations
avec leurs patrons afin d'obtenir l'égalité des salaires. Ce dont nous voulons
nous assurer, c'est qu'une suite sera donnée à cette demande et que l'argent
public ne sera pas dilapidé pour alimenter des actionnaires !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 92 rectifié, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 13 est ainsi rédigé.
M. Roland Muzeau.
On va voir combien les infirmières vont toucher !
M. Robert Bret.
Merci pour la Générale de santé !
M. Michel Charasse.
Vous savez bien que toutes les infirmières roulent en Mercedes !
(Sourires.)
Article 14
M. le président.
« Art. 14. - I. - L'article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale
pour 2001 (n° 2000-1257 du 23 décembre 2000) est ainsi modifié :
« 1° Dans le I et le IV, après le mot : "modernisation", le mot : "sociale"
est supprimé ;
« 2° Après le II, il est inséré un III ainsi rédigé :
« III. - Ce fonds finance également des dépenses d'investissement et de
fonctionnement des établissements de santé. » ;
« 3° Dans le IV, le montant : "300 millions de francs" est remplacé par le
montant : "600 millions de francs" ;
« 4° Les III, IV, V et VI deviennent respectivement les IV, V, VI et VII.
« II. - Le montant de la participation des régimes obligatoires d'assurance
maladie au financement du Fonds pour la modernisation des établissements de
santé est fixé, pour l'année 2002, à 152,45 millions d'euros. »
Je suis saisi de deux amendements présentés par M. Vasselle, au nom de la
commission des affaires sociales.
L'amendement n° 15 est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le I de l'article 14 :
« I. - Dans la première phrase du IV de l'article 40 de la loi de financement
de la sécurité sociale pour 2001 (n° 2000-1257 du 23 décembre 2000), le montant
: "300 millions de francs" est remplacé par le montant : "600 millions de
francs". »
L'amendement n° 16 est ainsi libellé :
« Dans le II de l'article 14, après le mot : "modernisation,", insérer le mot
: "sociale". »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur, pour défendre ces deux
amendements.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Le Gouvernement a décidé d'élargir, de manière excessive, les
missions du fonds pour la modernisation des établissements de santé.
Ce fonds, qui se cantonnait initialement à financer des mesures en faveur des
personnels des hôpitaux, pourra désormais financer « également des dépenses
d'investissement et de fonctionnement des établissements de santé ». Alors que
le champ d'action de ce fonds était limité et ciblé, le Gouvernement a décidé,
pour satisfaire une partie de sa majorité plurielle, non seulement d'accroître
les crédits de ce fonds, mais aussi d'élargir ses compétences.
C'est un moyen astucieux - j'en reviens à la notion d'astuce à laquelle
faisait référence Mme Ségolène Royal avant le dîner - de permettre aux hôpitaux
publics de puiser dans le fonds pour des dépenses de fonctionnement générales,
ce qui évite au Gouvernement d'afficher une augmentation de l'ONDAM et ainsi un
dérapage des dépenses générales des hôpitaux !
C'est un peu surprenant comme méthode ! Nous pouvons donc nous interroger sur
l'intérêt qu'il y a encore à voter un ONDAM, alors que, dans le même temps, on
donnera la possibilité à des hôpitaux publics de prélever des ressources pour
des dépenses générales de l'hôpital.
La commission ne peut accepter une telle parcellisation du financement des
hôpitaux. La création d'un fonds n'a de justification que si celui-ci répond à
des objectifs précis.
Tout en acceptant, bien entendu, l'augmentation de la dotation prévue pour ce
fonds, je vous propose, mes chers collègues, de rejeter l'élargissement
illimité de ses missions, qui ne me paraît pas du tout conforme au souhait du
législateur.
Quant à l'amendement n° 16, il est la conséquence de l'amendement n° 15 et il
se justifie pas son texte même.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Sauf erreur de ma part, cette disposition a déjà été
adoptée à l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement. En effet, le
3° du paragraphe III de l'article 14 est ainsi rédigé : « Dans le IV, le
montant : "300 millions de francs" est remplacé par le montant : "600 millions
de francs". »
Je m'étonne quelque peu qu'un amendement de la commission tende à modifier un
texte adopté par l'Assemblée nationale et qui intègre déjà cette évolution.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Madame le ministre, nous supprimons non pas les crédits, mais
la disposition qui permet d'étendre les missions du fonds au-delà des missions
originelles qui lui avaient été confiées et qui se cantonnaient aux dépenses
liées à la modernisation sociale pour le personnel et aux dépenses
d'investissement.
Le Gouvernement a décidé d'étendre le champ d'intervention de ce fonds aux
dépenses de fonctionnement courantes de l'hôpital, ce qui ne nous paraît pas
justifié.
C'est pourquoi cet amendement a pour seul objet de revenir aux compétences
originelles du fonds. Il ne modifie nullement le montant des crédits.
M. Jean Chérioux.
C'est de l'orthodoxie financière !
M. le président.
Cette précision étant donnée, quel est maintenant l'avis du Gouvernement sur
les amendements n°s 15 et 16 ?
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
S'agissant de l'amendement n° 15, je maintiens ce que
j'ai dit tout à l'heure, à savoir qu'il est satisfait par le texte adopté par
l'Assemblée nationale puisqu'il porte sur le montant des crédits.
En ce qui concerne l'amendement n° 16, le Gouvernement émet également un avis
défavorable puisqu'il souhaite l'élargissement des missions du fonds à la
modernisation.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Sans doute ne suis-je pas un bon pédagogue, car je ne
parviens pas à me faire comprendre de Mme le ministre.
(Exclamations sur les
travées socialistes.)
M. Gilbert Chabroux.
Personne n'a compris !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
N'avez-vous vraiment pas compris ou feignez-vous de ne pas
comprendre, monsieur Chabroux ?
M. Gilbert Chabroux.
Je n'ai absolument pas compris votre démonstration fumeuse !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
J'ai l'impression que vous comprenez ce que vous voulez bien
comprendre !
Madame le ministre, le I de l'article 14 comprend, en l'état, six alinéas.
L'amendement n° 15 vise à maintenir un seul alinéa, celui qui concerne les
crédits adoptés par l'Assemblée nationale, en faisant disparaître la
disposition qui étend le champ d'intervention du fonds.
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal,
ministre déléguée.
Je voulais être agréable au rapporteur en disant que
son amendement était satisfait par le texte de l'Assemblée nationale. Puisqu'il
insiste
(Sourires)
, le Gouvernement ne peut que demander le rejet des
deux amendements.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 15.
M. Bernard Cazeau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Cazeau.
M. Bernard Cazeau.
En ce qui nous concerne, nous avons très bien compris.
(Exclamations sur
les travées du RPR.)
C'est pourquoi nous soutiendrons le Gouvernement et ne
voterons pas l'amendement de la commission. En effet, nous souhaitons que
l'hôpital public puisse fonctionner dans des conditions matérielles et sociales
adaptées à l'importance de sa fonction.
Je me réjouis des mesures prévues dans ce projet de loi en faveur de l'hôpital
public, aux missions duquel j'ai oublié d'ajouter tout à l'heure
l'enseignement, qui constitue aussi une charge importante.
M. Jean Chérioux.
Et la recherche !
M. Bernard Cazeau.
Je me félicite, d'abord, de l'augmentation de la dotation pour 2002 : 3,6 %
hors réduction du temps de travail et 4,8 % avec la réduction du temps de
travail, ce qui prouve que celle-ci est financée. Je rappellerai pour mémoire
que cette augmentation s'élevait à 1,7 % en 1997.
Je me félicite aussi des 45 000 créations d'emplois et des 11,7 milliards de
francs supplémentaires. Dans ces 11,7 milliards de francs supplémentaires
figurent, bien sûr, les trois protocoles, la réduction du temps de travail, le
Fonds pour la modernisation des établissements de santé, selon la demande faite
par le Gouvernement, c'est-à-dire à la fois les crédits d'investissement et les
crédits de fonctionnement, et, enfin, le fonds d'investissement pour la
modernisation des hôpitaux, le FIMHO, qui semble enfin atteindre un régime de
croisière.
Pout toutes ces raisons, nous ne voterons pas, je le répète, l'amendement.
M. Guy Fischer.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Pour répondre aux attentes fortes des personnels hospitaliers, exaspérés par
la dégradation de leurs conditions de travail et inquiets quant au devenir du
service hospitalier si la réduction du temps de travail devait s'appliquer sans
moyens financiers importants, le Gouvernement a décidé d'augmenter la dotation
du fonds pour la modernisation des établissements de santé pour 2001 et 2002.
Nous avons salué ce geste, tout en précisant qu'il permettait seulement de
desserrer quelque peu l'étau financier enserrant depuis de nombreuses années
l'hôpital public.
S'agissant des personnels, le fonds devrait contribuer à l'accession de ces
derniers à une formation de qualité. Il est également utile que le fonds
permette de financer les investissements lourds. Beaucoup de bâtiments ont, en
effet, besoin d'être rénovés et mis aux normes de sécurité afin d'optimiser la
qualité de l'accueil des patients.
Par conséquent, nous ne pouvons qu'être en désaccord avec la commission des
affaires sociales qui propose de restreindre les missions du fonds.
M. Alain Joyandet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Joyandet.
M. Alain Joyandet.
Après la discussion qui vient d'avoir lieu, je crois comprendre qu'un certain
nombre de nos collègues, sur l'ensemble des travées, souhaitent que le « coup
de pouce » qui est donné par le Gouvernement, aussi bien aux cliniques privées
qu'aux hôpitaux publics, soit affecté en priorité à l'amélioration de la
rémunération du personnel.
Il me semble que l'amendement proposé par M. le rapporteur va tout à fait dans
ce sens.
En outre, cet amendement est particulièrement judicieux puisque, en
restreignant le champ d'application de ce fonds et en évitant qu'il ne serve à
autre chose qu'à son actuelle destination principale, à savoir, précisément,
les rémunérations du personnel - et je m'adresse là à M. Fischer, compte tenu
de l'intervention qu'il vient de faire il répond au souhait exprimé de réserver
prioritairement ce fonds à l'embauche du personnel et à sa rémunération. Ainsi,
ce fonds ne serait pas utilisé pour financer un certain nombre de frais de
fonctionnement qui seraient tout à fait incontrôlables en raison de la masse
des besoins des établissements.
Enfin, M. le rapporteur avait raison, tout à l'heure, de saluer le changement
de position du Gouvernement. Pour avoir assisté à la réunion de la commission
des affaires sociales, je puis l'attester : la ministre en charge de ce secteur
nous avait bien donné une fin de non-recevoir sur ce dossier. Il n'y a donc
rien de désobligeant à rappeler la précédente position du Gouvernement.
Les points de désaccord sur ce projet de loi de financement de la sécurité
sociale sont suffisamment nombreux pour saluer comme il se doit le revirement
de position du Gouvernement quand il va dans notre sens.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Très bien !
M. Michel Mercier.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Mercier
M. Michel Mercier.
Les amendements présentés par la commission sont les seuls à pouvoir donner
tout leur sens aux amendements du Gouvernement.
Que nous propose-t-on ? Tout simplement de conserver les deux objets du fonds
: l'aide aux travaux d'investissement et l'aide à la modernisation sociale.
Si vous augmentez les crédits et que, dans le même temps, vous élargissez
l'objet du fonds, l'investissement et la modernisation sociale ne bénéficient
d'aucune somme supplémentaire.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Tout à fait !
M. Michel Mercier.
Il faut donc enlever les dépenses de fonctionnement.
Les deux amendements présentés par le rapporteur sont complémentaires : ils
ont simplement pour objet de dire que l'effort supplémentaire de 600 millions
de francs servira à la modernisation des hôpitaux, notamment à leur
modernisation sociale.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Vous avez tout compris !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 16, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 14, modifié.
(L'article 14 est adopté.)
Article additionnel après l'article 14
M. le président.
L'amendement n° 99, présenté par M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Il est créé un fonds de formation de personnels paramédicaux. Ce fonds
finance : d'une part, une allocation d'étude pour les élèves infirmiers dont
les modalités et le montant sont fixés par décret ; d'autre part,
l'augmentation du nombre de places en institut de formation de soins infirmiers
et sections de formation des aides-soignantes à concurrence des besoins
existants et ceux créés par la mise en place de la réduction du temps de
travail et les départs en retraite prévisibles.
« II. - Les dépenses liées à la création de ce fonds sont compensées à due
concurrence par une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et
575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Toutes catégories professionnelles confondues, les personnels hospitaliers
dénoncent la pénurie d'emplois qui pèse lourdement sur leurs conditions de
travail et sur la façon dont les patients sont accueillis et soignés.
Les 45 000 emplois annoncés pour accompagner la mise en oeuvre de la réduction
du temps de travail n'ont pas permis de faire retomber la tension, tant les
retards accumulés en matière de recrutement sont énormes.
Pour les médecins, le problème démographique est aussi fort. De très
nombreuses spécialités sont en déficit et l'augmentation du
numerus
clausus
se pose de manière aiguë.
Alors, j'entends bien les reproches adressés au Gouvernement, qui n'aurait pas
anticipé pour former les personnels. Toutefois, ils me surprennent un peu, car
les détracteurs d'aujourd'hui sont responsables de cette situation.
N'est-ce pas vous, messieurs de la majorité sénatoriale, qui avez soutenu la
fermeture des instituts de formation et la diminution des quotas infirmiers ?
Cela pèse aujourd'hui de manière cruelle sur la démographie médicale et
paramédicale. Pour surmonter la crise des professions de santé, un plan
d'urgence s'impose.
Certes, il convient de rouvrir les écoles, mais également et surtout
d'améliorer les conditions d'études, notamment en préfinançant par des
allocations d'études importantes le cursus des futurs professionnels.
Pour toutes ces raisons, je vous invite, mes chers collègues, à voter notre
amendement tendant à créer un fonds de formation de personnels paramédicaux.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
M. Fischer met ici le doigt sur un point sensible, je veux
dire la crise des effectifs infirmiers que l'on constate dans l'ensemble des
établissements hospitaliers.
Il est vrai que la responsabilité est partagée et que le précédent
gouvernement n'est peut-être pas intervenu autant qu'on aurait pu le souhaiter.
Cela nous a d'ailleurs été dit par Mme Guigou hier, qui nous a reproché de ne
pas avoir augmenté les promotions d'infirmiers, ce qui aurait permis de faire
face aux besoins d'aujourd'hui. Cela étant, Mme Guigou a omis d'évoquer
certains aspects du problème.
Je profite, d'ailleurs, de l'occasion de cet amendement, pour tenir
l'engagement que j'ai pris hier devant vous, mes chers collègues. Je vous avait
promis de répondre point par point sur tous les sujets que Mme Guigou avait
développés de nouveau à la fin de la discussion générale, à une heure si
avancée que j'avais préféré ne pas vous infliger une réponse immédiate qui nous
aurait entraînés plus loin encore dans la nuit.
Mme Guigou a donc oublié de rappeler, monsieur le ministre, que vous avez
fermé les écoles et que vous n'avez pas anticipé les conséquences de la mise en
place des 35 heures - dispositions que vous avez soutenues, monsieur Fischer -
qui, inévitablement, a eu un effet sur le nombre de postes à pourvoir
aujourd'hui dans les hôpitaux publics comme dans les cliniques privées.
M. Michel Mercier.
Voilà !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
M. Fischer et ses collègues nous proposent la création d'un
fonds spécial pour assurer le financement des études des élèves infirmiers et
une augmentation du nombre de places en institut de formation.
Nous connaissons le sort de tous ces fonds que l'on ne cesse de créer, mais
qui ne voient pas le jour, faute des décrets nécessaires.
M. Paul Blanc.
C'est sans fond !
(Sourires.)
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Cela étant, M. Kouchner nous a annoncé tout à l'heure qu'un
décret concernant la création d'un fonds venait de faire l'objet de sa
signature.
Mais nous sommes dans un domaine qui relève du budget de l'Etat, raison pour
laquelle vous avez raison, monsieur Fischer, d'interpeller le Gouvernement pour
lui demander une augmentation des moyens nécessaires pour faire face aux
besoins de formation des infirmières.
Quant à créer un fonds
ad hoc
supplémentaire pour assurer le
financement de la formation de l'ensemble des postes d'infirmiers, la
commission n'y est pas favorable, je le regrette, monsieur Fischer.
Mme Nicole Borvo.
Tiens !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Mais je suis persuadé que vous allez être tout de suite
rassuré par M. Kouchner.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué à la santé.
Hélas ! non, monsieur Fischer, je ne peux
pas vous rassurer. Mais, enfin, je reconnais que ces assauts de démagogie...
M. Guy Fischer.
Oh !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué...
sont très intéressants !
(Sourires.)
Franchement, c'est un tir croisé !
(Nouveaux sourires.)
D'abord, monsieur Fischer, nous devons les uns et les autres être satisfaits
de la création d'un certain nombre d'emplois à la suite de la mise en oeuvre de
la réduction du temps de travail. Nous parlons de 45 000 emplois !
M. Guy Fischer.
Nous l'avons dit !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Pourtant, vous demandez encore la création d'un fonds
de formation des personnels paramédicaux afin de financer, d'une part, une
allocation d'étude,...
M. Michel Mercier.
Cela existe déjà !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
... - en effet - et, d'autre part, l'augmentation du
nombre de places dans les instituts de formation.
Je vous ai bien écouté et je précise que les instituts de formation
d'infirmiers ont tous été rouverts, car ils avaient été fermés, pardonnez-moi
ce détail. Ainsi, 26 436 places sont disponibles et les instituts fonctionnent
à 100 %. Il serait difficile d'aller au-delà, ne serait-ce qu'en termes de
locaux et d'enseignants, problème que nous avions déjà rencontré au moment où
nous nous interrogions sur la première année commune aux infirmières et aux
médecins. Pour l'instant, tout est plein, et il ne nous reste aucune
disponibilité.
L'année dernière, il y avait 18 000 places dans les instituts de formation ;
depuis le mois de septembre, nous en sommes à plus de 26 400. J'ajoute qu'aux
termes d'un accord du 3 avril 2001, négocié, d'ailleurs, très vite et très
bien, avec les représentants des étudiants infirmiers, tout est pris en charge,
y compris le transport.
Je ne vois pas comment nous pourrions faire mieux, ce qui m'a fait employer,
tout à l'heure, le mot « démagogie » que vous me pardonnerez, car ce n'est pas
en réalité, votre état d'esprit.
M. Michel Charasse.
Pourquoi ne pas leur donner l'examen aussi ?
M. Alain Joyandet.
Le mot « démagogie » n'est pas trop fort !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Moi, je veux bien qu'on double le nombre de places, à
condition, bien sûr, que cela soit possible, ce qui n'est pas le cas, et que
l'on sache exactement ce que l'on veut.
Notre pays compte 4 000 établissements hospitaliers, publics ou privés ; pour
la même population, l'Italie, qui n'est pas un pays complètement différent du
nôtre, en totalise 1 000. Doit-on continuer sur cette voie ? Il y a là tout de
même un problème.
Certes, vous avez raison de le dénoncer, dans certains établissements la
pénurie se fait sentir. Mais, si les 45 000 places ont été créées afin de
compenser les effets de la réduction du temps de travail, pour ce qui est des
places qui manquent encore et des postes qui ne sont pas toujours pourvus, nous
les prendrons en compte en sus des 45 000 places.
Si, l'année prochaine, nous pouvons faire mieux, nous le ferons, mais,
franchement, l'effort est déjà considérable. Autrement dit, votre amendement
est déjà satisfait dans les faits, monsieur Fischer.
Permettez-moi d'ajouter une explication complémentaire au sujet des
aides-soignantes : il y avait là une injustice qui a été dénoncée lors du débat
sur le budget de la santé.
Nous avions décidé, dans le protocole et dans le fonds de modernisation, de
réserver 15 % des places dans les instituts infirmiers aux aides-soignantes qui
avaient passé le concours. Or il se trouve que, si 13 % des places sont
aujourd'hui prises par les aides-soignantes, dans quelques établissements -
nous ne savons pas combien, mais entre cent et deux cents ; nous ne disposons
pas du calcul exact - les aides-soignantes n'ont pas reçu la bourse nécessaire,
alors qu'elles ont réussi le concours d'entrée à l'institut de formation aux
soins infirmiers. Eh bien, Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité et
moi-même avons décidé hier de prendre cette bourse en charge, sur le fonds !
M. Guy Fischer.
Vous voyez, monsieur le ministre !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Oui, monsieur Fischer, et vous ne l'aviez même pas
demandé !
(Sourires.)
Nous avons donc décidé, et ce pour toutes les aides-soignantes qui n'auraient
pas reçu de bourse, en raison, par exemple, de difficultés propres à l'hôpital,
de prendre en charge cette bourse afin qu'à la rentrée de février 2002 toutes
les aides-soignantes qui ont réussi le concours puissent suivre l'enseignement
des instituts infirmiers.
(Très bien ! sur les travées socialistes.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 99, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 15
M. le président.
« Art. 15. - I. - Pour 2002, le montant maximal des dépenses du fonds
mentionné à l'article 25 de la loi de financement de la sécurité sociale pour
1999 (n° 98-1194 du 23 décembre 1998) est fixé à 106,72 millions d'euros.
« Ce fonds est doté de 76,23 millions d'euros au titre de l'exercice 2002.
« II. - L'article 25 de la même loi est ainsi modifié :
« 1° A. - Dans la deuxième phrase du I, après les mots : "Les professionnels
de santé exerçant en ville", sont insérés les mots : "et les centres de
santé"
« 1° B. - Le II est complété par une phrase ainsi rédigée :
« En outre, par l'octroi d'aides aux organismes concernés, il finance des
actions concourant à l'amélioration de la qualité et de la coordination des
soins dispensés en ville dans le cadre de centres de santé ;
« 1° C. - Dans le IV, après les mots : "exerçant en ville", sont insérés les
mots : "et des centres de santé" ;
« 1° Le II est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les frais de gestion sont à la charge du fonds dans des conditions fixées
par décret.
« 2° Au I, les mots : "cinq ans" sont remplacés par les mots : "huit ans" ;
« 3° Il est complété par un V ainsi rédigé :
« V. - L'impact des financements attribués par le fonds au titre du II fait
l'objet d'une évaluation au regard notamment de l'organisation, de la
continuité et de la sécurité des soins ainsi qu'en ce qui concerne les dépenses
des régimes obligatoires d'assurance maladie. Cette évaluation est transmise au
Gouvernement et au Parlement au plus tard le 30 juin 2005. »
L'amendement n° 17, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, est ainsi libellé :
« A la fin de la seconde phrase du texte proposé par le 3° du II de l'article
15 pour le V de l'article 25 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998,
remplacer la date : "2005" par la date : "2003". »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Il s'agit d'un autre fonds, le fonds d'aide à la qualité des
soins de ville.
Le texte prévoit d'attendre 2005 pour l'évaluation de l'impact de l'action du
fonds. Il est apparu à la commission des affaires sociales que la date du 30
juin 2003 semblait bien préférable à celle de 2005.
Je rappelle, d'ailleurs, qu'à l'occasion de la mission de contrôle sur
l'application des lois de financement, consacrée aux fonds médicaux
hospitaliers, M. Charles Descours, mon prédécesseur, avait pu constater et
déplorer le bilan médiocre de ces fonds, qui ont connu, pour reprendre
l'expression de M. Descours, « un sérieux retard à l'allumage ».
Monsieur le ministre, il nous apparaît souhaitable de disposer bien avant
cette date reculée de l'impact de l'action de ce fonds pour pouvoir prendre, le
moment venu, toutes les dispositions nécessaires à la maîtrise de ces soins.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
M. le rapporteur sera d'accord avec moi, il faut tout
de même quelques années, peut-être trois, quatre ou cinq ans, pour prendre la
mesure d'un tel impact. Toutefois, je ne vais pas me quereller avec lui sur ce
point et m'en remets à la sagesse du Sénat pour trancher.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 17, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 15, modifié.
(L'article 15 est adopté.)
Article 15 bis
M. le président.
« Art. 15
bis
. - L'article L. 162-32-1 du code de la sécurité sociale
est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« 6° Les conditions dans lesquelles les organismes d'assurance maladie
participent à des actions d'accompagnement de l'informatisation des centres de
santé, notamment pour ce qui concerne la transmission par voie électronique des
documents nécessaires au remboursement ou à la prise en charge. Les centres
s'engagent dans ce cadre à réaliser un taux significatif de télétransmission de
documents nécessaires au remboursement des actes ou des prestations qu'ils
dispensent ;
« 7° Les objectifs et les modalités d'organisation de la formation
professionnelle conventionnelle des différentes catégories de personnels
médicaux et paramédicaux exerçant dans les centres de santé. La convention fixe
le montant de la dotation annuelle des caisses nationales d'assurance maladie
signataires assurant le financement de ces formations. »
- (Adopté.)
Article 15 ter
M. le président.
« Art. 15
ter
. - I. - Après le premier alinéa de l'article L. 315-2 du
code de la sécurité sociale, sont insérés six alinéas ainsi rédigés :
« Le bénéfice de certaines prestations mentionnées au I de l'article L. 315-1
peut être subordonné à l'accord préalable du service du contrôle médical. Cet
accord préalable peut être exigé pour les prestations dont :
« - la nécessité doit être appréciée au regard d'indications déterminées ou de
conditions particulières d'ordre médical ;
« - la justification, du fait de leur caractère innovant ou des risques
encourus par le bénéficiaire, doit être préalablement vérifiée eu égard
notamment à l'état du bénéficiaire et aux alternatives thérapeutiques possibles
;
« - le caractère particulièrement coûteux doit faire l'objet d'un suivi
particulier afin d'en évaluer l'impact sur les dépenses de l'assurance
maladie.
« Il est précisé lors de l'admission au remboursement des prestations
mentionnées au I de l'article L. 315-1 que leur bénéfice est, le cas échéant,
surbordonné à l'accord préalable mentionné ci-dessus.
« Les conditions d'application des alinéas précédents sont fixées par
décret.
« II. - Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 315-2 du
même code, les mots : "des dispositions particulières qui subordonnent le
bénéfice de certaines prestations à l'accord préalable de l'organisme de prise
en charge" sont remplacés par les mots : "des dispositions des deuxième à
cinquième alinéas".
« III. - Les dispositions du présent article entrent en vigueur à la date de
publication du décret prévu à l'article L. 315-2 du même code. »
Je suis saisi de deux amendements présentés par M. Vasselle, au nom de la
commission des affaires sociales.
L'amendement n° 18 est ainsi libellé :
« Supprimer le cinquième alinéa du I de l'article 15
ter
. »
L'amendement n° 19 est ainsi libellé :
« A la fin du II de l'article 15
ter
, remplacer le mot : "cinquième"
par le mot : "quatrième". »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
L'article 15
ter
vise à simplifier les mécanismes de
l'entente préalable du service du contrôle médical - initiative bienvenue !
Toutefois, figurent dans l'article, tel qu'il est rédigé, au nombre des
prestations susceptibles de donner lieu à un accord préalable, celles dont le
caractère particulièrement coûteux doit faire l'objet d'un suivi spécial afin
d'en évaluer l'impact sur les dépenses d'assurance maladie.
Pour la commission, il convient de ne pas mélanger les genres. Les critères du
contrôle médical doivent rester exclusivement médicaux, et non financiers.
Cet amendement a donc pour objet de supprimer cette référence afin de
s'opposer à toute évolution du contrôle médical vers une forme de rationnement
des soins. Il a été longuement débattu au sein de la commission des affaires
sociales, mais nous avons réussi, ensemble, à trouver ce terrain d'entente.
Quant à l'amendement n° 19, il est la conséquence de l'amendement n° 18.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 18 et 19 ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
C'est à la suite d'un amendement de M. Claude Evin
réformant cette entente préalable que nous avons laissé subsister un mécanisme
qui pouvait nous permettre de contrôler les prestations innovantes, coûteuses
ou dont la prise en charge est limitée à des indications déterminées ou à des
conditions particulières d'ordre médical.
Je pense qu'il ne faut pas supprimer ces dispositions, raison pour laquelle je
m'oppose à cet amendement.
Monsieur le rapporteur, le mécanisme a été complètement rénové et il nous faut
garder un filet de sécurité, car ce dispositif pourrait se révéler extrêmement
lourd pour le budget.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 18, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 19, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 15
ter
, modifié.
(L'article 15
ter
est adopté.)
Article 16
M. le président.
« Art. 16. - I. - La section 2 du chapitre IV du titre VII du livre Ier du
code de la sécurité sociale est ainsi rédigée :
« Section 2
« Dépenses afférentes aux soins dispensés
dans les unités ou centres de long séjour
«
Art. L. 174-5
. - Dans les unités ou centres de soins de
longue durée mentionnés au 2° de l'article L. 6111-2 du code de la santé
publique, le montant des dépenses afférentes aux soins est fixé par le
directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation après avis du président du
conseil général.
« Les dépenses afférentes aux soins dispensés aux assurés sociaux et aux
bénéficiaires de l'aide sociale dans les unités ou centres de long séjour,
mentionnés au 2° de l'article L. 6111-2 du code de la santé publique, sont
prises en charge suivant des modalités fixées par voie réglementaire soit par
les régimes d'assurance maladie, soit par l'aide médicale de l'Etat. Le montant
annuel de ces dépenses prises en charge par l'assurance maladie est inclus dans
le montant total annuel défini à l'article L. 174-1-1 du présent code.
«
Art. L. 174-6
. - Les sommes dues au titre des dépenses prises en
charge par les organismes d'assurance maladie dans les unités ou centres de
soins de longue durée mentionnés au 2° de l'article L. 6111-2 du code de la
santé publique sont versées à l'établissement ou au service, pour le compte de
l'ensemble des régimes d'assurance maladie, par la caisse primaire d'assurance
maladie dans la circonscription de laquelle est implanté l'unité ou le centre
de soins de longue durée. Toutefois, par convention entre les régimes, ce rôle
peut être rempli par une caisse relevant d'un autre régime, lorsque dans une
unité ou un centre le nombre de ses ressortissants est le plus élevé.
« Les sommes versées aux unités et centres de soins de longue durée pour le
compte des différents régimes sont réparties après accord entre tous les
régimes ayant une organisation propre. A défaut d'accord entre les régimes, un
arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale fixe cette répartition.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application du présent
article.
« II. - L'article 5 de la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001 relative à la
prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation
personnalisée d'autonomie est ainsi modifié :
« 1° Le 1° est ainsi rédigé :
« 1° Un forfait global de soins fixé par l'autorité compétente de l'Etat, égal
à la somme des forfaits de soins attribués en 2001, revalorisé chaque année
dans la limite d'un taux d'évolution arrêté par les ministres chargés de la
sécurité sociale, des personnes âgées et du budget en fonction de l'objectif
national de dépenses d'assurance maladie voté par le Parlement, et destiné à
financer l'augmentation des dépenses résultant exclusivement de la mise en
place de mesures générales portant sur les salaires, les statuts ou le temps de
travail des personnels pris en charge par l'assurance maladie ; ces taux
peuvent être modulés, le cas échéant, selon les catégories d'établissements ;
»
« 2° Au 3° , après les mots : "des tarifs journaliers afférents à
l'hébergement", sont insérés les mots : "fixés par le président du conseil
général, dans les établissements habilités à l'aide sociale, ".
« III. - L'article L. 232-8 du code de l'action sociale et des familles est
ainsi modifié :
« 1° Dans le deuxième alinéa du I, après la référence : "L. 132-2", les mots :
"ainsi qu'au deuxième alinéa de l'article L. 232-4" sont supprimés ;
« 2° Après le troisième alinéa du I, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« De même, ne sont pas pris en compte, pour le calcul des ressources de
l'intéressé, les concours financiers apportés par les enfants pour les prises
en charge nécessitées par la perte d'autonomie de leurs parents, ainsi que
certaines prestations sociales à objet spécialisé dont la liste est fixée par
voie réglementaire. »
L'amendement n° 64, présenté par MM. Murat et Gouteyron, est ainsi libellé
:
« Compléter le II de l'article 16 par deux alinéas ainsi rédigés :
« 3° Il est inséré
in fine
un alinéa ainsi rédigé :
« Les tarifs hébergement, dépendance et soins visés par le présent article
sont fixés par les autorités de tarification après mise en oeuvre d'une
procédure contradictoire. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 20, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, est ainsi libellé :
« Supprimer le III de l'article 16. »
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Mes chers collègues, je vous le rappelle, la loi sur
l'allocation personnalisée d'autonomie a été publiée le 20 juillet 2001. Trois
mois après son adoption, il s'agit, par le présent article, de remédier à trois
erreurs qui entachent ce texte. C'est en dire la qualité !
J'en profite, d'ailleurs, pour demander au Gouvernement dans quel état
d'application, ou, plus exactement, d'inapplication, se trouve cette réforme.
On nous annonce en effet, aujourd'hui, la parution imminente de décrets que
l'on attend pour le 15 ou le 20 novembre. Pour une réforme législative votée en
urgence, vous avouerez, mes chers collègues, que cela fait quelque peu désordre
! La précédente majorité, pour la loi tant décriée instituant la PSD, avait
fait paraître les décrets d'application dans les deux mois suivant l'adoption
de la loi.
J'ai encore en mémoire les déclarations de Mme Guinchard-Kunstler, en charge
du projet de loi relatif à l'APA, qui avait tenu à assurer le Sénat que les
décrets d'application seraient très rapidement publiés.
Or il s'est écoulé plus d'un an depuis la parution de cette loi, et nombre de
décrets d'application ne sont toujours pas sortis.
Si les deux premiers paragraphes du présent article 16 paraissent faire partie
du « champ » des lois de financement de la sécurité sociale, car ils ont une
réelle incidence sur les comptes de l'assurance maladie, tel n'est pas le cas
du troisième paragraphe, placé ainsi sous la menace d'une censure du Conseil
constitutionnel - je tiens à le rappeler, au passage, à l'intention du
Gouvernement.
Ce paragraphe est relatif aux prestations sociales à objet socialisé ainsi
qu'aux concours financiers qui, apportés par les enfants pour les prises en
charge nécessitées par la perte d'autonomie de leurs parents, ne seraient pas
pris en compte dans le calcul des ressources de l'intéressé.
Nous ne pouvons pas passer sous silence cette inconstitutionnalité. Le
ferions-nous que le Conseil constitutionnel pourrait se saisir lui-même de cet
article.
S'il faut revoir la loi relative à l'APA sur ce point, ce que nous ne
contestons pas, le Gouvernement doit prendre ses responsabilités et déposer un
projet de loi rectificatif, constitué d'un unique article qui serait très
certainement adopté par les deux assemblées dans des délais très brefs,
puisqu'il est tout à fait justifié.
C'est la raison pour laquelle la commission présente un amendement tendant à
supprimer le III de l'article 16, et ce que je viens de dire à propos de cette
disposition vaut d'ailleurs également pour un certain nombre d'autres «
cavaliers sociaux » qui n'ont pas leur place dans le présent texte.
Il est sans doute inutile que je rafraîchisse la mémoire du Gouvernement, car
chacun sait ce qu'il est advenu de la loi de financement de la sécurité sociale
de 2001 après le recours devant le Conseil constitutionnel. Celui-ci n'a pas
hésité un seul instant à faire « sauter » tous les cavaliers, y compris ceux
qui avaient été adoptés sur l'initiative du Gouvernement. Il y a donc fort à
parier que, dans le cadre d'une saisine du Conseil constitutionnel ou d'une
autosaisine de celui-ci, le dispositif qui nous est aujourd'hui présenté
disparaîtrait également.
Il serait donc plus sage, monsieur le ministre, que vous suiviez nos conseils
si vous voulez éviter que le Gouvernement ne se trouve dans la même situation
que l'année dernière.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Avant d'expliquer pourquoi le Gouvernement est
défavorable à l'amendement n° 20, je veux dire à M. Vasselle que, la loi ayant
été publiée de 20 juillet, c'est au terme d'un délai de quatre mois - et non
pas d'un an - que les décrets d'application seront sortis, puisqu'ils
paraîtront le 20 novembre, c'est-à-dire mardi prochain. J'estime d'ailleurs que
ce n'est pas un mauvais délai.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Dont acte, monsieur le ministre ! Je me croyais déjà à la fin
2002 et je me suis trompé d'une année !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
L'amendement n° 20 contredit l'amendement présenté à
l'Assemblée nationale par M. Claude Evin en tant que rapporteur de la
commission des affaires culturelles pour l'assurance maladie et les accidents
du travail, amendement sur lequel le Gouvernement avait émis un avis favorable,
car il clarifiait la rédaction initiale pour établir la complète symétrie qui
doit prévaloir, à domicile et en établissement, dans l'appréciation des
ressources prises en compte pour le calcul de l'allocation personnalisée
d'autonomie, ainsi que Mme Paulette Guinchard-Kunstler l'avait précisé.
L'amendement n° 20 ne peut être accepté, car il aboutirait, à l'inverse, à
instaurer une différence de traitement entre usagers selon le lieu de résidence
pour l'appréciation des ressources, ce qui serait contraire au principe
d'égalité et d'autant moins justifié que c'est précisément en établissement que
la question de la participation financière des enfants aux frais d'hébergement
de leurs parents revêt tout son intérêt.
Il faut donc, à notre avis, encourager les solidarités familiales et non pas
les pénaliser.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Que l'on ne se méprenne pas sur la position de la commission
des affaires sociales : elle ne remet pas en cause le principe de la
modification en faveur de laquelle le Gouvernement vient de plaider, mais
appelle votre attention, mes chers collègues, sur le fait que, même si les
objectifs de celui-ci sont tout à fait légitimes, dès lors que ses propositions
ont le caractère de « cavalier » dans la loi de financement de la sécurité
sociale, elles risquent d'être invalidées par le Conseil constitutionnel.
Même avec la meilleure volonté et tout en reconnaissant qu'il s'agit d'une
disposition pertinente au fond, force est de constater qu'elle n'a pas sa place
dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
On peut prendre le risque de l'adopter si c'est ce que vous souhaitez,
monsieur le ministre, mais il ne faudra pas s'étonner du sort qui lui sera
réservé si le Conseil constitutionnel décide de s'autosaisir.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je prends ce risque, mais je comprends votre
position.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 20, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 16, modifié.
(L'article 16 est adopté.)
Article additionnel après l'article 16
M. le président.
L'amendement n° 40, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
« Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 232-19 du code de l'action sociale et des familles est ainsi
rédigé :
«
Art. L. 232-19
. - Les sommes servies au titre de l'allocation
personnalisée d'autonomie font l'objet d'un recouvrement sur la succession du
bénéficiaire, sur le légataire et, le cas échéant, sur le donataire, lorsque la
donation est intervenue postérieurement à la demande d'allocation personnalisée
d'autonomie ou dans les dix ans qui ont précédé cette demande. Toutefois, le
recouvrement ne s'exerce que sur la partie de l'actif net successoral global
qui excède un seuil de 500 000 francs, et, lorsque le légataire ou le donataire
est le conjoint, un enfant, ou une personne qui a assumé de façon effective la
charge de la personne dépendante, du montant du legs ou de la donation qui
excède le même seuil.
« En cas de pluralité de legs ou donations, ce seuil s'applique à la somme des
montants des legs ou donations.
« En cas d'intervention successive d'un ou plusieurs legs ou donations et
d'une succession, ce seuil s'applique à la somme du montant global du ou des
legs ou donations et de l'actif net successoral global. »
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
J'ai entendu avec intérêt M. le ministre dire à la fin de sa dernière
intervention qu'il fallait « encourager les solidarités familiales ». C'est
bien, en quelque sorte, l'objet de l'amendement n° 40, mais je veux d'abord
rappeler les circonstances qui ont entouré l'adoption dans la loi portant
création de l'APA de la disposition relative à la récupération sur
succession.
Le Gouvernement avait, très sagement à mon avis, proposé dans son projet
initial d'appliquer pour l'APA le système de récupération sur succession, comme
pour toutes les autres formes d'aide sociale - je passe sur le point de savoir
si l'APA est ou n'est pas une forme d'aide sociale. Ce système de récupération
tout à fait classique, même si son seuil d'application était un peu plus élevé
que dans le droit commun, a cependant été supprimé par l'Assemblée nationale,
qui, malgré mes propres efforts, a été suivie par le Sénat.
Or, depuis le vote de la loi portant création de l'APA, les départements ont
pu commencer à faire leurs comptes, et ils arrivent à des sommes extrêmement
élevées du fait de l'afflux, prévisible ou déjà enregistré, d'un très grand
nombre de dossiers et, de ce point de vue, le fait que, contrairement au
souhait du Gouvernement, la récupération sur succession ne joue pas a
certainement un rôle important.
Mes chers collègues, je ne veux pas reprendre la discussion que nous avions
eue au moment de la création de l'APA, mais j'appelle tout de même votre
attention sur un point.
Les départements ne bénéficiant plus de la récupération sur succession - notre
collègue Michel Mercier, rapporteur spécial de la commission des finances pour
les collectivités locales, a évalué la perte de recettes ainsi engendrée pour
les départements à un milliard de francs -, que croyez-vous qu'il va arriver ?
Eh bien, c'est l'Etat qui récupérera les droits de succession ! Voilà comment
on aboutit à priver les collectivités locales d'une ressource importante qui
avait tout de même un caractère assez dissuasif pour transférer la recette à
l'Etat !
C'est pourquoi je propose, monsieur le ministre, que nous maintenions le
système de récupération sur succession à partir de 500 000 francs d'actif net
successoral, seuil à propos duquel je ne suis d'ailleurs pas prêt à me battre
puisque, dans le droit commun de la récupération sur succession, il est
actuellement fixé à 300 000 francs.
Quelle que soit la position qu'adoptera le Gouvernement, reconnaissez, mes
chers collègues, qu'on aboutit à un système plutôt « tordu » : on fait croire
aux personnes âgées et à leurs enfants qu'on leur fait un cadeau royal, alors
qu'en réalité c'est l'Etat qui le récupère par-derrière puisque les droits de
succession demeurent, et on prive, ce qui est tout de même anormal, la
collectivité qui assure l'essentiel de la dépense de la recette qui devrait lui
revenir !
Monsieur le ministre, je souhaiterais donc, bien entendu, que cet amendement
soit adopté, ne serait-ce que pour nous permettre de réfléchir pendant la
navette à un autre système auquel je pense et qui pourrait faire l'objet d'un
amendement au projet de loi de finances, système qui consisterait, si l'on ne
veut pas rétablir la récupération sur succession, à au moins prescrire à l'Etat
de reverser aux départements les droits qu'il perçoit sur ces successions.
Ainsi, on retomberait au moins un peu sur nos pattes !
Si cet amendement n° 40 pouvait avoir la vertu d'ouvrir une discussion dans le
cadre de la navette qui permette d'aboutir à un système un peu moins anormal,
je n'aurais pas perdu complètement mon temps et je pense que le Sénat,
défenseur des collectivités locales et de leurs intérêts, sans méconnaître
l'intérêt de l'Etat, n'aurait pas complètement perdu le sien non plus.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Sur ce sujet, qui a fait, en son temps, couler beaucoup de
salive aussi bien en commission qu'en séance publique, les avis étaient très
partagés et transcendaient d'ailleurs les différentes sensibilités politiques
de notre assemblée.
Il n'a pas été facile de faire un choix - je n'irai pas jusqu'à dire qu'il
s'est fait dans la douleur, sauf, peut-être, pour les présidents de conseils
généraux...
M. Michel Charasse.
Or les contribuables !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
... qui, aujourd'hui, subissent ses conséquences
financières.
Je rappellerai tout de même au passage que, lorsque j'avais exposé le point de
vue de la commission des affaires sociales en ma qualité de rapporteur sur un
amendement, qui, déjà, avait été proposé par M. Charasse, nous avions prévu une
compensation intégrale des pertes de recettes au profit des conseils
généraux.
Mais le Gouvernement, en la personne de Mme Guinchard-Kunstler, n'avait pas
voulu retenir une telle initiative. Peut-être attendait-elle un arbitrage du
Premier ministre ! Je me rappelle de sa déclaration tendant à nous mettre en
garde au motif qu'il faudrait peut-être revoir ce dispositif dans le cadre
d'une réforme globale de la loi de 1975 et, plus particulièrement, de tout ce
qui touche au recours sur succession, bien au-delà donc du seul cas des
handicapés et des personnes âgées.
En tout cas, monsieur Charasse, je comprends votre souci. Vous avez raison de
dire que, si une mesure de compensation devait être adoptée, elle aurait sa
place non pas dans une loi de financement de la sécurité sociale, mais dans une
loi de finances.
Vous souhaiteriez donc, si j'ai bien compris, que votre amendement soit adopté
pour qu'au moins, dans le cadre de la navette, une discussion puisse
s'instaurer entre l'Assemblée nationale et le Sénat.
M. Michel Charasse.
Voilà !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je suis mandaté pour rapporter la position de la commission
des affaires sociales, et vous me permettrez donc de ne pas exprimer un avis
personnel en la circonstance.
M. Michel Charasse.
C'est normal !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Je laisse à chacun de nos collègues la liberté d'exprimer son
point de vue sur votre amendement.
Je tiens toutefois à souligner - comme je l'ai fait à l'intention du
Gouvernement tout à l'heure au sujet de l'article 16 - que, votre amendement
ayant un caractère de « cavalier social », il y a fort à parier qu'il serait
purement et simplement supprimé en cas de saisine du Conseil
constitutionnel.
C'est l'une des raisons qui ont conduit la commission à ne pas émettre un
avis favorable.
Par ailleurs, le Sénat ayant tranché, en son temps, sur ce sujet, est-il utile
de rouvrir le débat de fond à l'occasion de l'examen du projet de loi de
financement de la sécurité sociale ? Nous ne l'avons pas jugé souhaitable. La
représentation sociale s'est prononcée, même si, au Sénat, elle l'a fait à une
courte majorité.
M. Michel Charasse.
A une voix près !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
On peut toujours tenter de rouvrir le débat pour inverser la
situation ! Toujours est-il que la commission des affaires sociales ne l'a pas
souhaité.
Je suis donc au regret de vous dire, monsieur Charasse, que, mandaté pour ce
faire par la commission, j'émets un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Ma position est aussi nuancée que celle de M. le
rapporteur, et tout aussi défavorable.
C'est un débat complexe, un débat délicat, j'en suis conscient. Les lignes de
partage de nos opinions ne recoupent pas les lignes politiques classiques.
Le Gouvernement s'en est remis, lors de la discussion du projet de loi portant
création de l'allocation personnalisée d'autonomie, à la sagesse du Parlement,
lequel a supprimé les recours en récupération.
Moi qui ne suis pas un spécialiste de ces choses, je les vois, en fait, assez
simplement : s'agit-il d'aide sociale ou de solidarité nationale ?
M. Michel Charasse.
En tout ca, c'est l'Etat qui touche !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Et alors ? Ce n'est tout de même pas à moi qu'il faut
le reprocher !
L'Assemblée nationale a voté, en première lecture, l'amendement de son
rapporteur supprimant le recours en récupération, et le Sénat l'a suivie, en
repoussant un amendement visant à le rétablir - nous venons de l'entendre de la
bouche de son rapporteur - moyennant un relèvement du seuil.
L'allocation personnalisée d'autonomie n'étant pas une prestation d'aide
sociale réservée aux personnes à faibles revenus, restaurer les recours en
récupération remettrait en cause l'universalité d'une prestation destinée à
toutes les personnes âgées en perte d'autonomie, qui doivent pouvoir compter
sur l'aide de la collectivité.
M. Michel Charasse.
C'est le texte du Gouvernement que je reprends !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le choix d'une prestation universelle résulte, il faut
le souligner, des défis que posent à notre société le vieillissement de la
population et l'augmentation inéluctable de la part des plus âgés. Cette
évolution, qui sera un des phénomènes majeurs des décennies à venir, doit
conduire et a conduit le Gouvernement à reconnaître la perte d'autonomie, qui
n'est pas l'apanage de populations prédestinées et qui porte en germe une
limitation de la citoyenneté, comme un nouveau risque social appelant une
réponse, je le répète, relevant de la solidarité nationale.
J'ajoute, et c'est une mesure d'équité, que la suppression du recours sur
succession a pour corollaire l'évaluation du patrimoine et la valorisation des
biens non placés ou exploités, qui sont pris en compte dans le calcul des
ressources déterminant la participation du bénéficiaire et, par voie de
conséquence, le montant de l'allocation personnalisée d'autonomie.
Enfin - faut-il le rappeler ? - l'APA donne lieu à une participation du
bénéficiaire, qui contribue ainsi de son vivant, et non plus
post
mortem,
à la mesure de ses moyens financiers, aux prises en charge qui lui
sont nécessaires pour vivre le grand âge dans la dignité.
Telles sont, monsieur le sénateur, les dispositions, équilibrées et
équitables, que le Gouvernement, éclairé par les débats parlementaires, je le
répète, a retenues pour accompagner la suppression des recours en
récupération.
En outre, l'argument vient d'être employé, l'amendement que vous proposez ne
relève pas du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il constitue
un « cavalier social », ce qui me conduit à vous demander de le retirer, même
si vous objecterez que j'en ai moi-même introduit un !
(Sourires.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 40.
M. André Lardeux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lardeux.
M. André Lardeux.
M. Chabroux a affirmé, tout à l'heure, que tout nous opposait, mais je ne
crois pas que cela soit vrai, puisque je voterai l'amendement de M. Charasse,
bien que son caractère de cavalier social, souligné par M. le rapporteur et par
M. le ministre, constitue un obstacle.
M. Michel Charasse a dit que son amendement représentait le moyen de
progresser au cours de la navette, et cet argument me semble devoir être pris
en compte.
Il est évident qu'un transfert de charges est opéré, en matière de solidarité,
de l'échelon national vers l'échelon local. Or les départements sont loin
d'être à égalité dans ce domaine.
Par ailleurs, je souligne, sans vouloir revenir sur les arguments développés
par M. Charasse, que les départements se trouvent privés de ressources.
En outre, on nous dit qu'il faut absolument développer, dans notre société,
les solidarités locale et familiale. Or, cet amendement me semble justement
permettre d'aller dans le sens de la solidarité familiale, ce qui n'est pas le
cas de la suppression de la récupération sur la succession.
Enfin, je reviendrai sur les propos de M. le ministre, qui a employé des
termes révélateurs puisqu'il a parlé de prestations sociales et de droit
social. Cela prouve que le dispositif de l'APA est peut-être, à terme,
condamné. La perte d'autonomie est, me semble-t-il, un risque comme les autres,
qui devra être pris en compte par le biais de l'assurance.
Si l'amendement n° 40 de M. Charasse permet de faire évoluer la situation à
cet égard, je le voterai.
M. Alain Joyandet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Joyandet.
M. Alain Joyandet.
La démarche de M. Charasse est très intéressante. Le débat qu'elle permet de
reprendre n'est peut-être pas opportun ce soir et aurait sans doute davantage
sa place en commission des finances, mais il soulève en tout cas au moins trois
problèmes : le premier a trait à la fiscalité des successions, le deuxième
concerne les transferts de charges entre les collectivités locales et l'Etat,
le troisième est de nature formelle puisqu'il s'agit en fait, ici, d'un
cavalier social. Certes, un cavalier est fait pour sauter, me dira-t-on, mais
dans la mesure où le Conseil constitutionnel ne s'est pas autosaisi, il peut
toujours passer !
S'agissant de la fiscalité des successions, la question, à mon sens, n'est pas
de savoir comment l'on procédera pour opérer le recouvrement sur les
successions, si c'est l'Etat ou le département qui s'en chargera. Il s'agit
d'ailleurs souvent de successions modestes.
Pour notre part, nous nous interrogeons non pas sur les modalités de
recouvrement sur des successions très modestes, mais sur la possibilité
d'exonérer de droits de telles successions.
C'est en effet un débat de fond : prenons, mes chers collègues, l'exemple d'un
ouvrier qui a travaillé toute sa vie et dont l'épouse est elle aussi ouvrière
ou salariée, qui a économisé sa vie durant pour acheter une maison dans un
département - tout le monde n'habite pas dans le XVIe arrondissement de Paris !
- où le montant moyen des successions se situe
grosso modo
entre 500 000
francs et 1 million de francs. Pour les enfants, le taux des droits à acquitter
atteindra 40 %, alors que les revenus du travail ayant servi à acquérir ce qui
constitue souvent le seul bien transmis ont déjà été amplement fiscalisés !
Nous nous demandons donc, monsieur Charasse, comment faire pour que les
parents puissent léguer à leurs enfants un bien très modeste sans que l'Etat
prélève 40 % de taxes au passage ! Voilà, à mon avis, le véritable débat ! Quoi
de plus beau et de plus normal, en effet, quand on a travaillé tout au long de
sa vie, que de souhaiter léguer à ses enfants le petit bien que l'on a pu
acquérir ? Tel est le débat de fond, monsieur Charasse, que vous avez aussi
engagé par le biais de votre amendement.
Le souci des membres de mon groupe n'est donc pas de recouvrer de l'argent sur
ces successions modestes ; c'est, au contraire, de définir les modalités d'une
future exonération pour des biens dont la valeur atteindrait, par exemple, 1
million de francs. Nous serions tout à fait d'accord, pour notre part, pour que
les héritiers en ligne directe, à concurrence d'un tel montant, ne soient plus
taxés à hauteur de 40 %.
Par ailleurs, en ce qui concerne les transferts de charges et de ressources
entre les collectivités locales et l'Etat, que s'est-il passé, mes chers
collègues, lorsque l'Etat a exonéré les entreprises de la part salariale de la
taxe professionnelle ? Certes, les pertes de recettes correspondantes ont été
compensées pour nos collectivités locales, mais le montant de cette
compensation évolue en fonction des lois de finances et non pas de la masse
salariale.
Par conséquent, alors que les collectivités locales auraient dû bénéficier
chaque année de trois ou quatre points supplémentaires de taxe professionnelle,
l'augmentation n'atteint que 0,8 %, 1 % ou 1,2 %. Le plus souvent,
parallèlement, les bénéfices des entreprises augmentent, et c'est l'Etat qui en
profite au travers de l'impôt sur les sociétés !
A cet égard, il suffit de regarder les tableaux dont dispose la commission des
finances pour constater la croissance des recettes de l'Etat au titre de
l'impôt sur les sociétés. L'Etat récupère par le biais de cet impôt l'argent
que les collectivités locales ont perdu du fait de l'exonération de la part de
la taxe professionnelle assise sur les salaires. C'est donc exactement le même
mécanisme.
M. Michel Charasse.
Partiellement !
M. Alain Joyandet.
En tout cas, cela y ressemble beaucoup : nous perdons une grande partie de nos
recettes, et c'est l'Etat qui les récupère, ensuite, en cascade.
Les deux problèmes que vous avez posés sont donc importants, monsieur
Charasse, même si nous n'y apportons pas forcément les mêmes réponses.
Enfin, sur la forme, la position adoptée par M. Vasselle me semble être la
bonne. Le problème est bien posé, mais l'on peut difficilement prendre le
risque, aujourd'hui, à l'occasion de la discussion du projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 2002, de recourir à un cavalier sur un
sujet aussi important, aussi vaste et qui mériterait sans doute de faire
l'objet d'une sérieuse discussion lors de l'examen du projet de loi de
finances.
En tout état de cause, la majorité des membres de mon groupe se ralliera à la
position de la commission des affaires sociales et de son rapporteur, M.
Vasselle, en souhaitant qu'un autre débat s'instaure lors de la discussion
budgétaire.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Merci !
M. Paul Blanc.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Paul Blanc.
M. Paul Blanc.
J'ai écouté M. Charasse avec beaucoup d'intérêt, et je partage l'opinion de
notre collègue Alain Joyandet sur ses propositions.
Cela étant, j'indique d'emblée que je suivrai l'avis de la commission des
affaires sociales, même si j'ai le sentiment que l'on n'a pas fini de parler de
ce sujet dans notre hémicycle !
M. Michel Mercier.
Eh oui !
M. Paul Blanc.
En définitive, il me semble que l'on ne veut pas traiter le problème au
fond.
A titre de comparaison, on impose à celui qui possède un véhicule et circule
sur les routes, courant le risque d'avoir un accident, de prendre une
assurance. Parallèlement, compte tenu de l'allongement de la durée de la vie et
des progrès indéniables de la médecine, je crois que, à partir de soixante ans,
chacun d'entre nous est appelé à devenir un jour dépendant. C'est là un risque
nouveau, qu'il faudra pouvoir assurer.
Le véritable problème réside donc, à mon sens, dans ce cinquième risque que
l'on a voulu écarter et qu'il faudra bien, un jour ou l'autre, prendre en
compte par le biais d'une assurance. Ce serait un honneur pour notre pays, car,
finalement, une telle assurance constituerait une forme de mutualisation. Or
notre pays a toujours donné l'exemple en cette matière.
Certains m'objecteront sans doute que les personnes disposant de moyens
modestes ne pourront pas s'assurer contre ce cinquième risque. Je leur
répondrai qu'il existait, avant la création de la couverture maladie
universelle, un dispositif qui donnait toute satisfaction s'agissant de l'aide
médicale et sociale : les départements se substituaient aux familles modestes
qui ne pouvaient acquitter les cotisations liées à l'assurance volontaire.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Tout à fait !
M. Paul Blanc.
Il me semble que nous devrons envisager la même solution pour le cinquième
risque.
M. Roland Muzeau.
Voilà !
M. Paul Blanc.
L'aide sociale réglera les cotisations des familles aux ressources trop
faibles.
Comme l'a dit notre collègue Alain Joyandet, quand une personne devient
dépendante, sa famille n'y peut rien. C'est là une grande injustice, et
pourquoi, par conséquent, le fruit du travail de toute une vie serait-il perdu
pour cette raison ?
Nous devrons donc nous résoudre à engager un jour un débat de fond. Nous avons
longtemps repoussé l'échéance, mais il arrivera un moment où l'on ne pourra
plus reculer.
Je suis conseiller général et je me suis longtemps occupé des affaires
sociales dans mon département, détenant une vice-présidence de 1976 à 1992. Je
peux vous dire, mes chers collègues, que les dépenses liées à l'APA finiront
par faire exploser les finances départementales, car la compensation apportée
par l'Etat ne durera pas, à mon avis, aussi longtemps que dureront les impôts !
Il s'agit là d'un véritable problème, qu'il faudra, un jour ou l'autre, poser
de nouveau. (
Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants. - M. Vasselle, rapporteur, applaudit également.)
M. Michel Mercier.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Mercier.
M. Michel Mercier.
Je crois que notre débat de ce soir est à la fois irréel et très concret.
Il est irréel parce que, dans vingt minutes exactement, nous serons le 15
novembre, et c'est le 15 novembre, bien que les décrets ne soient pas parus,
monsieur le ministre, que seront déposés les premiers dossiers de demande de
l'APA. Nous n'aurons pas réglé cette affaire dans vingt minutes !
Le combat vient probablement un peu tard, mais, si le Gouvernement avait
accepté de discuter, notamment avec le Sénat, du financement de l'APA, nous
n'en serions pas là aujourd'hui, monsieur le ministre.
Je suis, pour ma part, très hostile à la notion de cinquième risque, car cette
formule, on l'aura constaté ce soir, recouvre des réalités très diverses. Il
s'agit non pas de donner de l'argent à des personnes âgées en perte
d'autonomie, mais de les aider à mener la vie la plus normale possible. Il faut
donc financer les services de personnes qui les aideront et non pas distribuer
de l'argent, ce qui serait un cinquième risque.
Cela étant, la situation actuelle engendre de curieux cas de figure.
Ainsi, il a été décidé de renoncer au recours sur succession pour les sommes
servies au titre de l'APA. Cela signifie que, cette prestation étant
universelle, tout le monde pourra prétendre, le cas échéant, à en bénéficier,
mais que, pour les plus pauvres de nos concitoyens placés en établissement, les
coûts liés à l'hôtellerie et à l'hébergement feront l'objet d'un recours sur
succession.
M. Michel Charasse.
Absolument !
M. Michel Mercier.
Par conséquent, au nom de la solidarité et de la générosité, on supprime le
recours sur succession pour les mieux lotis et on le maintient pour les plus
démunis !
Ce raisonnement me paraît pour le moins discutable, et il ne sera pas très
facile d'expliquer aux personnes hébergées en établissement qu'il ne pourra y
avoir de recours sur succession pour récupérer les quatre-vingt-dix francs par
jour qu'elles recevront au titre de l'APA, mais que, s'agissant des deux cent
dix francs par jour de dépenses liées à l'hébergement, le recours sur
succession jouera si elles bénéficient de l'aide sociale.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
C'est vrai !
M. Michel Mercier.
Il faut donc que le Gouvernement cesse de soutenir qu'il a trouvé la panacée
pour financer l'APA, qu'il reconnaisse humblement que des mesures ont déjà été
élaborées, mais que la situation est loin d'être idéale et qu'il accepte d'en
discuter le plus tôt possible.
Sinon, nous risquons une explosion des impôts locaux, et financer l'APA au
moyen du produit de la taxe d'habitation n'est certainement pas non plus la
solution la plus juste. En outre, la succession des plus démunis fera toujours
l'objet d'un recours au titre des aides qu'ils auront reçues pour pouvoir vivre
en établissement.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Je ne m'attendais pas à autant d'honneur pour cet amendement !
La question que je pose ce soir n'est pas la grande question du cinquième
risque, ni celle des successions, même si M. Joyandet a dit des choses très
intéressantes à cet égard, ni celle de l'autonomie et de la façon de la traiter
ou pas. C'est un problème très simple.
Lorsque le Gouvernement avait présenté son texte sur l'APA, il avait prévu le
recours sur succession pour l'ensemble, pour reprendre les propos de M.
Mercier, c'est-à-dire non seulement pour les personnes qui sont hébergées en
établissement mais également pour celles qui sont chez elles.
Ce texte-là
(L'orateur montre l'amendement),
c'est celui du
Gouvernement, monsieur le ministre, la seule différence étant le seuil de 500
000 francs.
Donc, le Gouvernement avait prévu lui-même le recours sur succession. Selon le
calcul qu'il nous avait présenté, les chiffres étaient à peu près les suivants
: 16 milliards de francs à la charge des départements et 6 milliards de francs
à la charge de l'Etat. Mais, à la sortie, compte tenu du vote de l'Assemblée
nationale contre le recours sur succession, il s'agit non plus de 16 milliards
de francs mais de 17 milliards de francs, puisqu'il manque 1 milliard de
francs.
Or, quand je regarde ce que devient cet argent, je constate que, à partir du
moment où l'on ne récupère pas la succession, elle est taxable normalement aux
droits de succession. Donc, pour l'Etat, ce n'est pas 6 milliards de francs,
c'est un peu moins et, pour les départements, ce n'est pas 16 milliards de
francs, c'est 17 milliards de francs. Voilà, monsieur le ministre, le problème
que je voulais poser.
S'il n'y avait pas les droits de succession derrière, je ne vous querellerais
pas ce soir. Mais il se trouve que l'on a fait, sans le vouloir sans doute et
sans le savoir, un transfert qui a complètement mis en l'air le calcul du
Gouvernement et la répartition des charges qu'il avait arrêtée ou proposée
entre l'Etat et les collectivités locales.
Mon amendement vise simplement à mettre un terme à cette anomalie. S'agit-il
de la meilleure solution ? Je n'en sais rien ; on peut toujours en discuter. En
tout cas, plusieurs d'entre nous l'ont dit, l'APA entre en vigueur ce soir à
minuit et, si l'on attend trop, si on laisse se développer une habitude, dans
ce domaine on ne pourra plus rien faire.
Se dire que l'on peut déposer un dossier car, par rapport à la PSD, il n'y
aura plus la récupération sur succession, c'est une illusion. En réalité, le
service des impôts, si ce n'est pas le service des domaines du département,
attendra au coin du bois, avec des modalités de calcul, je le reconnais, un peu
différentes.
Je pensais que la navette permettrait de discuter de cette question. C'est
pourquoi j'ai la naïveté de penser que l'on pourrait adopter ce texte à titre
provisoire. Après tout, il y aura une nouvelle lecture à l'Assemblée nationale
et elle en fera ce qu'elle voudra !
Reste le dernier point : s'agit-il ou non d'un cavalier ? Cette allocation
étant financée conjointement par l'Etat, la sécurité sociale et les
départements, je considère qu'elle a tout de même sa place dans la loi de
financement de la sécurité sociale.
Je ne vous querellerai pas plus avant sur cette question. A mes yeux, il ne
s'agit pas d'un cavalier, car il existe ce cofinancement que je viens
d'évoquer.
Nous allons maintenant attendre le vote du Sénat. De toute façon, je compte
reprendre ce dossier au moment de la loi de finances, mais en le traitant par
le biais des droits de succession, et non plus directement par le biais de la
récupération sur succession. Il n'en demeure pas moins que, si nous suscitions
un intérêt du côté de l'Assemblée nationale, cela ne serait sans doute pas
inutile pour la suite des événements.
M. Bernard Cazeau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Cazeau.
M. Bernard Cazeau.
Si je prends la parole en cet instant, c'est en raison non seulement de la
présentation de l'amendement de mon ami M. Charasse, mais aussi de la prise de
position d'un certain nombre d'orateurs, notamment ceux qui sont président de
conseil général.
M. le ministre a très bien exposé le principe du droit universel, qui a
transformé en quelque sorte l'APA, laquelle est non plus une prestation sociale
mais une allocation sociale. Il faut faire la différence.
M. Michel Mercier.
Absolument !
M. Bernard Cazeau.
A un âge de la vie, il y a les allocations familiales et, à un autre, il y
aura l'allocation personnalisée d'autonomie. De ce point de vue, c'est assez
clair, d'autant que le dispositif a été voté à la quasi-unanimité par
l'Assemblée nationale, le Sénat l'ayant adopté dans les mêmes termes. Nous
n'allons pas revenir sur la décision prise par les deux assemblées.
Je voudrais brièvement évoquer le financement, car, même si ce n'est pas tout
à fait le sujet, ce point a été abordé.
Il me paraît quelque peu imprudent d'affirmer aujourd'hui qu'il s'agit d'un
transfert de charges « hénaurme » vers les conseils généraux.
(M. Fischer
s'exclame.)
D'abord, les conseils généraux ont voulu gérer ce dispositif
car il relève de leur compétence. Il est donc normal qu'ils en prennent une
partie en charge. En l'occurrence, le surcoût, qui s'élève à 11,5 milliards de
francs, est pris en charge à 50 % par l'Etat,...
M. Michel Mercier.
Non !
M. Bernard Cazeau.
... par le biais de la CSG, et pour le reste essentiellement par les
départements car la participation des caisses de sécurité sociale représentant
très peu,...
M. Michel Mercier.
Zéro franc !
M. Bernard Cazeau.
... à savoir 500 millions de francs. Cette décision a donc été prise.
Je veux répondre à M. Charasse, puisqu'il aime faire des calculs. Si l'on fait
une projection de ce que coûtait l'allocation compensatrice pour tierce
personne, l'ACTP, à domicile ou en établissement, allocation qui a précédé la
PSD
(M. Mercier est dubitatif)
- je sais, monsieur Mercier, que vous ne
le croyez pas, mais je vous communiquerai les calculs qui concernent votre
département et nous en reparlerons - si l'on fait cette projection, dis-je, on
constate que, pour l'année 2002, on obtient un surcoût pour les départements de
l'ordre de ce que représentera l'APA.
M. Bruno Sido.
C'est faux !
M. Bernard Cazeau.
Enfin, monsieur Mercier, dans votre argumentation paupériste, vous avez à la
fois tort et raison. A un moment donné, pour une personne qui ne pourra pas
payer l'hébergement, il se peut en effet que, puisqu'il s'agit d'une prestation
sociale, un recours sur succession soit nécessaire. Mais vous avez oublié de
préciser qu'avec la tarification ternaire dans les établissements, le tarif de
l'hébergement sera divisé par deux et réparti sur le tarif afférent à la
dépendance et sur celui qui concerne l'hébergement.
(Exclamations sur les
travées du RPR.)
M. Bruno Sido.
C'est faux !
M. Bernard Cazeau.
En effet, mes chers collègues, le prix de l'hébergement n'est pas le même pour
une personne selon qu'elle est en bonne santé et non dépendante ou qu'elle a
besoin d'une tierce personne, par exemple pour l'aider à marcher ou pour
changer son lit trois fois par jour.
Par conséquent, dans la tarification ternaire - tarifs hébergement, soins et
dépendance - la partie consacrée à l'hébergement diminuera d'autant. Pour une
personne âgée dépendante, classée en GIR 1, la baisse sera de l'ordre de 1 500
francs à 2 000 francs par mois sur le prix de journée d'hospitalisation. Ainsi,
le nombre de personnes qui devront recourir à l'aide sociale pour payer leur
hébergement sera de moins en moins important. La démonstration de M. Mercier ne
concerne donc que quelques cas limites. C'est pourquoi je lui dis qu'il a
certainement raison dans ces cas-là, mais qu'il a tort dans la plupart des
cas.
M. Michel Mercier.
Mais vu le nombre de cas limites !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 40, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Mes chers collègues, je rappelle qu'il reste encore quatre-vingt-deux
amendements à examiner. Il serait souhaitable qu'à l'issue de la présente
séance le nombre des amendements « légués » à mon successeur demain matin ne
soit pas trop important si l'on veut que le Sénat puisse achever l'examen de ce
texte dans des délais raisonnables.
Article 17
M. le président.
« Art. 17. - L'ordonnance n° 82-272 du 26 mars 1982 relative à la durée
hebdomadaire du travail dans les établissements sanitaires et sociaux
mentionnés à l'article 2 du titre IV du statut général des fonctionnaires est
ainsi modifiée :
« 1° L'article 1er est ainsi rédigé :
«
Art. 1er
. - Le temps de travail des agents des établissements
mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant
dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière est
réduit dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Ce décret fixe
également les règles relatives à l'organisation du travail des mêmes agents en
tenant compte de la spécificité des missions exercées par ces établissements et
selon des modalités analogues à celles applicables aux agents des autres
fonctions publiques. » ;
« 2° Les articles 2 à 7 sont abrogés à compter de l'entrée en vigueur des
décrets d'application de l'article 1er. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 100, présenté par M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer l'article 17. »
L'amendement n° 119, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, est ainsi libellé :
« Au début de la seconde phrase du texte proposé par le 1° de l'article 17
pour l'article premier de l'ordonnance n° 82-272 du 26 mars 1982, après les
mots : "Ce décret", insérer les mots : ", élaboré après concertation avec les
organisations syndicales représentatives,". »
La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 100.
M. Guy Fischer.
Afin de donner une base légale au cadrage national devant servir à mettre en
oeuvre la réduction du temps de travail dans la fonction publique hospitalière,
l'article 17 du projet de loi met à mal l'ordonnance de 1982 qui réglemente
actuellement l'organisation du travail en tenant compte des caractéristiques
liées à la spécificité du service public hospitalier.
Selon les organisations syndicales majoritaires représentant tout de même 65 %
des personnels, un certain nombre d'acquis, de garanties statutaires seraient
remis en cause, monsieur le ministre. La référence à un repos hebdomadaire de
trente-six heures consécutives minimum ne risque-t-elle pas effectivement de
faire « sauter » - excusez-moi l'expression - le repos du samedi et du dimanche
?
Quelles seront exactement les conséquences de la disposition prévoyant que «
tout agent soumis à un décompte horaire qui ne peut effectuer son temps de
travail en raison d'une absence autorisée est considéré avoir accompli le
cinquième de ses obligations de services » ? L'agent en question devra-t-il des
heures à l'établissement par journée d'absence ?
C'est bien, notamment, parce que l'accord proposé n'apportait pas de garanties
certaines que ces mêmes organisations ne l'ont pas paraphé.
Nous considérons que la signature de cet accord par des syndicats représentant
seulement 35 % du personnel pose un véritable problème de démocratie.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, à titre conservatoire, nous proposons la
suppression de l'article 17, permettant ainsi la réouverture de
négociations.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 119 et
pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 100.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Nous avons les mêmes objectifs que M. Fischer, mais nous
n'avons pas la même méthode. Nous avons également le souci de développer la
concertation. Nous voulons inviter le Gouvernement à engager celle-ci avant la
publication du décret qui régira les conditions dans lesquelles la RTT se
mettra en place dans les établissements hospitaliers.
C'est la raison pour laquelle nous souhaitons qu'il soit précisé qu'il s'agit
d'un décret « élaboré après concertation avec les organisations syndicales
représentatives ». C'est une demande forte de la part de ces organisations, qui
souhaitent être associées étroitement à l'ensemble de deux dispositions qui
seront prises. En effet, l'article 17 qui nous est proposé tend à supprimer les
articles 2 à 7 des ordonnances de 1982, qui définisssent les conditions de
travail dans la fonction publique hospitalière pour l'ensemble de ses
agents.
Tels sont les motifs pour lesquels la commission présente cet amendement. Dans
ces conditions, elle émet un avis défavorable sur l'amendement n° 100.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 100 et 119 ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Monsieur le président, sur vos conseils et à mon grand
regret, je dirai succinctement que j'émets un avis défavorable sur ces deux
amendements.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 100, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 119, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'article 17.
M. Serge Franchis.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Franchis.
M. Serge Franchis.
Actuellement, la position des personnels hospitaliers est très complexe, car,
s'ils souhaitent tout naturellement bénéficier de la réduction du temps de
travail, ils sont bien conscients qu'il est impossible de la mettre en
oeuvre.
A cet égard, je lirai simplement des extraits de la lettre d'un représentant
de syndicat.
« Les créations d'emploi représentent 6 % des emplois existants, alors que la
diminution du temps de travail représente 11 %.
« Vouloir engager 5 % de gain de productivité dans un secteur d'activité
fonctionnant vingt-quatre heures sur vingt-quatre et trois cent soixante-cinq
jours par an et qui connaît déjà des insuffisances de fonctionnement dans de
nombreux services de soins constitue une décision lourde de conséquences.
« Une telle stratégie conduit, à terme, à une remise en cause de la qualité de
l'offre de soins offerte à nos concitoyens. » J'avais moi-même appelé
l'attention de M. le ministre, lors de la discussion générale, sur ce sujet. «
La mise en place des 35 heures dans la fonction publique devient alors un outil
de gestion pour l'application des SROSS de deuxième génération, avec, à la clé,
la fermeture de services de soins d'ici à la fin de 2004.
« Il convient donc d'être cohérent : notre pays ne peut à la fois se féliciter
de la première place au plan mondial de notre système de santé décernée par
l'OMS, l'Organisation mondiale de la santé, brocarder le système de santé de
Grande-Bretagne, avec ses files d'attentes, et mettre en place dans notre pays
une politique de santé qui nous conduira, à terme,... vers ce qui se passe chez
nos voisins britanniques ».
M. le président.
Je mets aux voix l'article 17, modifié.
(L'article 17 est adopté.)
Article 18
M. le président.
« Art. 18. - Au cinquième alinéa du 2° de l'article 14 de la loi n° 94-628 du
25 juillet 1994 relative à l'organisation du temps de travail, aux recrutements
et aux mutations dans la fonction publique, le taux : "0,8 %" est remplacé par
le taux : "1,8 %". »
L'amendement n° 21, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des
affaires sociales, est ainsi libellé :
« A la fin de l'article 18, remplacer le taux : "1,8 %" par le taux : "1,2 %".
»
La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Le fonds pour l'emploi hospitalier, le FEH, a été créé en
1994 pour prendre en charge les deux tiers des surcoûts des rémunérations des
agents à temps partiel à 80 % et à 90 % et les deux tiers de l'indemnité
exceptionnelle de 30 % des agents en cessation progressive d'activité.
Depuis 1999, le FEH participe au financement du remboursement aux
établissements de santé du revenu de remplacement des agents en congé de fin
d'activité.
Ce fonds est actuellement financé par une contribution des établissements
hospitaliers, fixée par décret à 0,8 % des rémunérations. Depuis son origine,
les charges du FEH sont supérieures à ses ressources, et sa contribution au
financement du congé de fin d'activité à partir de 1999 n'a fait qu'aggraver sa
situation, en élargissant le champ de compétences.
Compte tenu de la reconduction du congé de fin d'activité en 2001 et en 2002,
le déficit du FEH devrait atteindre 443,8 millions de francs en 2001 et 627,3
millions de francs en 2002, si le taux de contribution est maintenu à 0,8 %.
L'article 18 prévoit de porter le taux plafond à 1,8 %, ce qui n'apparaît pas
nécessaire à court terme.
La commission des affaires sociales observe que le Gouvernement a pris
effectivement une marge de manoeuvre importante en décidant d'augmenter de 250
% le taux plafond de la contribution au FEH. Elle remarque que le Gouvernement
a, pour sa part, l'intention de porter ce taux à seulement 1 % dans un premier
temps.
La commission des affaires sociales considère que le Parlement ne saurait
ainsi donner un blanc-seing au pouvoir réglementaire en lui permettant
d'augmenter de manière unilatérale et très importante le taux de cette
contribution qui pèse lourdement sur les budgets hospitaliers.
Elle vous propose, en conséquence, d'adopter un amendement limitant
l'augmentation du taux de cette contribution à ce qui est strictement
nécessaire pour équilibrer le fonds et pour effacer la dette passée.
Le taux plafond de 1,2 % permettrait ainsi de rendre le fonds excédentaire de
200 millions de francs en 2002 et d'apurer la dette passée sur deux exercices.
S'il s'avère nécessaire de relever une nouvelle fois ce taux plafond, le
Gouvernement sera ainsi tenu de revenir devant le Parlement, ce qui permettra
un véritable débat sur les objectifs assignés et les moyens affectés à ce
fonds.
J'espère, mes chers collègues, qu'après cette explication, la raison
l'emportera et que vous suivrez la commission.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Il est possible, monsieur le rapporteur, que le Sénat
suive la commission, mais je ne sais pas si la sagesse l'emportera dans ce cas
!
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement. Les tâches
attribuées au fonds pour l'emploi hospitalier sont importantes, et l'adoption
de l'amendement n° 21 risquerait d'entraîner un manque de financement pour les
deux tiers des surcoûts des rémunérations des agents à temps partiel à 80 % -
rémunérés à 86 % - et à 90 % - rémunérés à 91 % - les deux tiers de l'indemnité
exceptionnelle de 30 % des agents en cessation progressive d'activité, le
remboursement des engagements de servir des agents contraints d'effectuer une
mobilité professionnelle, ainsi que le complément de traitement - 0,15 % - des
agents de catégorie C en congé de formation professionnelle dans le cadre du
protocole du 14 mars 2000.
Enfin, depuis 1999 - c'est la loi du 23 décembre 1998 de financement de la
sécurité sociale - le fonds pour l'emploi hospitalier participe au
remboursement aux établissements de santé du revenu de remplacement versé aux
agents en congé de fin d'activité.
Le taux de 1,8 % correspond donc à ce qui est nécessaire au FEH pour assurer
ses missions.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Non !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 21, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 18, modifié.
(L'article 18 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 18
M. le président.
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° 57, présenté par MM. Carle, Mathieu et les membres du groupe
des Républicains et Indépendants, est ainsi libellé :
« Après l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Les techniciens des laboratoires hospitaliers sont classés en catégorie "B"
active de la fonction publique hospitalière, par rattachement à leur emploi
d'origine (infirmier spécialisé, emploi de référence classé en catégorie
"B").
« Les années effectuées en catégorie "A", alors qu'ils effectuaient les mêmes
fonctions, sont validées en catégorie "B" active, à égalité, pour tous les
agents en activité, à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi. »
L'amendement n° 71, présenté par MM. Murat, Paul Blanc, Martin, Lassourd,
Doublet, Eckenspieller, Gournac, Fournier, de Richemont, Lardeux, Vial, Ginésy,
Le Grand, Braye, Mouly et Pelletier, est ainsi libellé :
« Après l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les techniciens des laboratoires hospitaliers sont classés en catégorie
"B" active de la fonction publique hospitalière, par rattachement à leur emploi
d'origine (infirmiers spécialisés, emploi de référence classé en catégorie
"B").
« Les années effectuées en catégorie "A", alors qu'ils effectuaient les mêmes
fonctions, sont validées en catégorie "B", à égalité, pour tous les agents en
activité, à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi. »
« II. - Les charges supplémentaires résultant pour l'Etat de l'application du
I ci-dessus sont compensées, à due concurrence par la création de taxes
additionnelles aux droits perçues aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
L'amendement n° 102, présenté par M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les
membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Après l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Les techniciens de laboratoires hospitaliers sont classés en catégorie "B"
active de la fonction publique hospitalière, les années effectuées en catégorie
"A" sont validées en catégorie "B", à égalité, pour tous les agents en
activité, à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi. »
L'amendement n° 70, présenté par MM. Braye, Murat, Paul Blanc, Martin,
Lassourd, Doublet, Eckenspieller, Gournac, Fournier, de Richemont, Lardeux,
Vial, Ginésy, Le Grand, Mouly et Pelletier, est ainsi libellé :
« Après l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans un délai de 3 mois après la publication de la présente loi, le
Gouvernement présente au Parlement un rapport exposant les conditions dans
lesquelles les techniciens des laboratoires hospitaliers pourraient être
classés en catégorie "B" active de la fonction publique hospitalière. »
La parole est à M. Carle, pour défendre l'amendement n° 57.
M. Jean-Claude Carle.
Monsieur le ministre, vous connaissez aussi bien et même sûrement mieux que
moi le rôle des techniciennes et techniciens de laboratoire de la fonction
hospitalière. Ils sont un maillon indispensable au bon fonctionnement de notre
chaîne de soins. Nombre des prescriptions d'actes médicaux sont en effet
tributaires de leurs analyses dont les résultats - chacun le sait - sont
indispensables tant aux médecins généralistes ou spécialistes qu'aux
chirurgiens.
Dans la plupart des cas, ces analyses revêtent d'ailleurs un caractère
d'urgence, puisque 80 % de ces prestations exigent une réponse dans un délai
n'excédant pas vingt minutes, ce qui implique, bien sûr, des contraintes de
disponibilité, y compris le week-end.
Par ailleurs, nombre des actes des techniciens de laboratoire présentent des
risques évidents, dans la mesure où ils sont effectués auprès de patients
atteints de maladies potentiellement transmissibles. Là encore, les
statistiques l'attestent : deux tiers des laborantins ont développé une
hépatite B avant, bien sûr, que la vaccination ne soit instaurée.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Et les médecins ? Et les infirmières ?
M. Jean-Claude Carle.
Les techniciens de laboratoire sont aussi en contact avec des malades
contagieux et des substances dangereuses.
Telles sont les raisons les plus évidentes pour lesquelles, pour répondre à un
souci tant de reconnaissance que d'équité, ces personnels doivent être classés
en catégorie « B ». Cela ne serait que justice, d'autant plus que cela ne
pèserait pas lourdement sur le budget, comme l'a affirmé M. Sapin.
M. le président.
La parole est à M. Paul Blanc, pour défendre l'amendement n° 71.
M. Paul Blanc.
Cet amendement est quasiment identique à l'amendement n° 57 : simplement, à la
différence de ce dernier, il prévoit un gage.
M. le président.
La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 102.
M. Guy Fischer.
Lors de l'examen du projet de loi de modernisation sociale, le groupe
communiste républicain et citoyen avait déjà avancé une demande de classement
en catégorie « B » active de la fonction publique hospitalière en faveur des
techniciens de laboratoire. Aujourd'hui, nous revenons sur cette question et
sur l'aspiration légitime des techniciens de laboratoire, qui estiment être
victimes d'une profonde injustice. Leurs conditions de travail, la pénibilité
des tâches, l'exposition aux risques justifient pleinement, selon nous, un tel
classement ou le rattachement à un emploi de référence.
Nous avons pris connaissance de l'adoption, à l'occasion de la discussion du
projet de loi relatif aux droits des malades et à la qualité du système de
santé, d'un amendement largement cosigné visant à apporter un début de réponse
à cette question : le Gouvernement devait présenter un rapport sur la
faisabilité d'une telle réintégration statutaire.
Toutefois, monsieur le ministre, vous placez cette question sur le plan des
retraites. Vous avancez qu'il convient, en effet, de ne pas aggraver les
disparités entre régimes de retraite privés et publics.
Nous pensons qu'il est possible d'agir immédiatement. Telle est la raison du
dépôt de cet amendement.
M. le président.
La parole est à M. Paul Blanc, pour défendre l'amendement n° 70.
M. Paul Blanc.
M. Fischer vient de faire allusion à la disposition adoptée lors de la
discussion du projet de loi relatif aux droits des malades et à la qualité du
système de santé. Le Gouvernement devrait présenter, après la promulgation de
la loi, un rapport sur la faisabilité d'une réintégration statutaire des
techniciens de laboratoire.
L'amendement n° 70 vise à une demande semblable, afin que le Gouvernement
expose dans un rapport les conditions dans lesquelles il peut être remédié à
cette erreur de non-classement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 57, 71, 102 et 70
?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Nous connaissons toute l'histoire de la revendication des
techniciens de laboratoire, et le Sénat a eu l'occasion d'en délibérer à
plusieurs reprises.
La commission des affaires sociales confirme la position qu'elle avait adoptée
lors de la discussion du projet de loi de modernisation sociale, à l'occasion
de laquelle un amendement de même nature avait été défendu : elle s'en remet
donc à la sagesse du Sénat sur les amendements n°s 57, 71 et 102.
L'amendement n° 70 est un texte de repli tendant à la présentation d'un
rapport ; la commission des affaires sociales y est favorable.
Certes, un amendement identique a été adopté lors de l'examen du projet de loi
relatif aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Mais
l'adoption de l'amendement n° 70 permettrait de raccourcir d'au moins deux mois
le délai de production de ce rapport,...
M. Paul Blanc.
Tout à fait !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
... et donc d'accélérer le processus.
M. le président.
Quel l'avis du Gouvernement sur les quatre amendements ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Le Gouvernement invoque l'article 40 de la Constitution
sur les amendements n°s 57, 71 et 102.
En ce qui concerne le fond, le Gouvernement doit déjà présenter un rapport
pour voir s'il est possible d'accéder à la revendication des techniciens de
laboratoire.
L'adoption de l'amendement n° 70 aboutirait, comme l'a indiqué M. le
rapporteur, à une présentation plus rapide de ce rapport.
Je voudrais néanmoins appeler l'attention du Sénat - je le fais en
connaissance de cause, pour avoir séjourné la nuit, comme nombre d'entre vous,
dans les hôpitaux - sur le caractère différent du travail au sein d'un
laboratoire et du travail en salle ou auprès d'un malade. En effet, le travail
effectué dans les laboratoires est automatisé, et les tâches des techniciens
n'ont donc aucun rapport avec celles d'un médecin ou d'une infirmière auprès
d'un malade. La responsabilité morale et physique, la tension qui naît du
travail auprès du malade n'ont strictement rien à voir avec un travail de
laboratoire, même si je reconnais tout à fait les sujétions auxquelles sont
soumis les techniciens de laboratoire dans leur activité et toute l'attention
qu'ils doivent porter à leur travail.
Cela dit, un rapport vous sera présenté au plus vite, et nous verrons.
M. le président.
Monsieur le rapporteur pour avis, l'article 40 de la Constitution est-il
applicable à l'encontre des amendements n°s 57, 71 et 102 ?
M. Alain Joyandet,
au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Oui, monsieur le président.
M. le président.
L'article 40 étant applicable, les amendements n°s 57, 71 et 102 ne sont pas
recevables.
Je mets aux voix l'amendement n° 70, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 18.
L'amendement n° 91, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Après l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le fonds national d'assurance maladie de la Caisse nationale d'assurance
maladie des travailleurs salariés participe de façon exceptionnelle en 2001, à
hauteur de 1,3 milliard de francs, au financement du fonds de concours créé en
vue de l'achat, du stockage et de la livraison de traitements pour les
pathologies résultant d'actes bioterroristes. »
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Mesdames, messieurs les sénateurs, cet amendement
s'intègre dans un plan d'ensemble qui mobilise à la fois les crédits d'Etat et
ceux de l'assurance maladie.
S'agissant du plan Biotox, nous devons faire face à trois types de
dépenses.
Il y a, premièrement, des dépenses d'urgence, qui correspondent notamment à
des équipements hospitaliers.
Il y a, deuxièmement, des dépenses correspondant au renforcement des moyens du
ministère. Il s'agit de la création de 130 postes qui a été annoncée devant
l'Assemblée nationale lundi dernier. Ces postes concernent des ingénieurs de
génie sanitaire, des médecins de santé publique, aussi bien dans les services
déconcentrés qu'au niveau central.
Ces deux premières dépenses seront assumées par le budget de l'Etat, au
travers soit d'un décret de dépense accidentelle soit un décret de virement -
ces deux textes sont d'ores et déjà pris - soit, enfin, de la loi de finances,
que la Haute Assemblée aura à examiner prochainement.
Il y a, troisièmement, des dépenses destinées à mettre à notre disposition des
moyens pour faire face aux menaces terroristes biologiques, chimiques ou
nucléaires.
C'est cette dernière catégorie de dépenses qu'il vous est proposé de financer
à partir des crédits de l'assurance maladie, ces crédits devant abonder un
fonds de concours ouvert au budget de l'Etat.
En tant que responsable de la santé publique de notre pays, je souhaite
solennellement vous dire, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous ne devons
pas avoir, sur ce sujet, un débat politicien. Il est en effet indispensable que
notre pays puisse constituer le plus rapidement possible un stock de défense et
il serait regrettable que, dans le processus de passation des marchés - les
négociations sont déjà engagées - nous puissions donner à nos interlocuteurs,
en même temps qu'à l'opinion publique, le sentiment que nous nous livrons à un
affrontement. Il est impératif que, dans les circonstances actuelles, nous
sachions donner à nos concitoyens une image d'unité.
Je rappelle que, dans notre pays, ce sont près de 4 000 alertes qui ont
affecté la distribution du courrier, qui ont mobilisé les services d'urgence,
les pompiers, nos établissements hospitaliers, nos laboratoires. Ce sont donc
près de 4 000 échantillons de poudre blanche qu'il a fallu analyser. Notre pays
détient, à cet égard, un record ! Nos services pratiquent ces analyses avec
diligence et avec une finesse telle qu'elles permettent de déceler la présence
de produits en quantité infime, en tout cas infraclinique, sans aucun rapport
avec ce à quoi, aux Etats-Unis, ont été exposées près de trente personnes, dont
quatre, hélas ! sont mortes.
Voilà donc comment nous comptons financer à la fois les antibiotiques,
c'est-à-dire les fluoroquinolones, que nous avons commandées à deux
laboratoires différents, les dépenses hospitalières et les postes qui vont être
affectés à la poursuite du plan Biotox.
Car il n'est pas question de nous arrêter sous prétexte que notre pays n'a pas
connu d'alerte réelle ni de contamination et que, pour le moment, aucune
personne n'est affectée par la maladie du charbon. Nous estimons en effet que
ces dispositions NBC - nucléaire, bactériologique, chimique - doivent se
poursuivre et que nous ne serons pas à l'abri tant que le terrorisme
international ne sera pas éradiqué.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Face à ce problème, nous partageons, bien sûr, les objectifs
du Gouvernement, et il est effectivement hors de question que, sur le fond, un
débat politicien oppose la gauche et la droite ou la majorité et l'opposition.
A l'évidence, dans les circonstances actuelles, ce serait malvenu.
Pour autant, faut-il acccepter n'importe quel mode de financement pour une
action qui relève du domaine régalien de l'Etat ?
Personne ne contestera la nécessité de constituer des stocks stratégiques de
médicaments pour parer une éventuelle attaque bioterroriste. Nous avons le
devoir, dans le cadre de notre mission de représentation nationale, de veiller
à garantir la sécurité sanitaire dans notre pays et de faire en sorte que des
mesures de santé publique adaptées soient prises. En même temps, nous devons
nous efforcer d'endiguer le phénomène de psychose qui est né des événements que
l'on sait.
Je remarque toutefois que ces mesures seront financées par un concours
conjugué de l'Etat et de la caisse nationale d'assurance maladie.
Vous vous êtes bien gardé, monsieur le ministre, de préciser que, en ce qui
concerne la contribution de l'Etat, le projet loi de finances ne prévoit en
tout et pour tout, à ce titre, que 90 millions de francs sur les 1,3 milliard
de francs qu'il met à la charge de la branche maladie. Or celle-ci va accuser
cette année un déficit de 13 milliards de francs.
Est-il vraiment raisonnable, monsieur le ministre, au moment où vous-même
plaidez pour un équilibre et une consolidation des comptes de la sécurité
sociale, de mettre à la charge de la branche maladie une dépense qui relève du
domaine régalien de l'Etat et qui devrait, par conséquent, être financée sur le
budget de l'Etat ?
Ne croyez-vous pas que le Gouvernement devrait montrer à l'opinion publique
que l'Etat va prendre ses responsabilités dans ce domaine et que la solidarité
nationale va s'exprimer à travers une prise en charge exclusive de ces dépenses
par le budget de l'Etat, et non grâce au produit des cotisations des
partenaires sociaux ?
C'est donc le refus des modalités de financement qui nous sont proposées, et
non pas du tout des objections quant au fond, qui motive l'opposition de la
commission des affaires sociales à cet amendement.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je veux d'abord préciser que les 90 millions de francs
qui sont inscrits dans le projet de loi de finances devraient être reconduits
les quatre années suivantes. La contribution de l'Etat sur cinq ans sera donc
de 450 millions de francs.
Il est bien évident que les 130 postes que j'ai évoqués ne seront pas
supprimés l'année prochaine !
De même, la modernisation des équipements, qui permet de déceler de simples
traces - jusqu'à une spore par gramme de sable, c'est-à-dire un niveau où il ne
peut y avoir contamination - ne s'amortit pas en une seule année.
En outre, la charge qu'il est proposé de faire supporter par la sécurité
sociale concerne des médicaments. Si je n'étais pas intervenu avec force pour
dire aux Français d'arrêter de consommer par précaution des fluoroquinolones,
qu'ils obtenaient dans les pharmacies avec une ordonnance, c'est bien la
sécurité sociale qui aurait finalement payé ! Il faut savoir que, voilà un an,
on vendait 8 000 boîtes de Ciprofloxacine par jour et que, il y a quelques
semaines, on en était à 100 000 !
Nous avons donc mis le holà, et nous avons été plutôt bien écoutés par les
prescripteurs : les médecins ont très bien compris qu'il fallait mettre un
frein à cette surconsommation.
Des commandes ont été passées, d'abord pour la Ciprofloxacine, ensuite pour
deux autres antibiotiques intéressants les laboratoires Bayer et
Aventis-Pasteur. Ces stocks vont être, je l'espère, mutualisés à l'échelon de
l'Europe, peut-être même à l'échelon mondial. Je dois précisément me rendre
demain à Bruxelles - c'est pourquoi j'aurai le malheur de ne pas être avec vous
- pour une réunion du Conseil santé, qui traitera en particulier de Biotox.
Nous avons en effet le sentiment que nous devons faire face en commun aux
menaces et, éventuellement, nous servir en commun des stocks
d'antibiotiques.
De toute façon, ils seront utilisés, ne serait-ce que pour les affections qui
appellent habituellement une prescription de fluoroquinolones.
Il ne s'agit donc pas d'une supercherie. L'Etat prend ses responsabilités,
mais, pour ce qui concerne les antibiotiques qui seront utilisés à bon escient,
il est normal que ce soit le financement habituel qui joue.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 91.
M. Jean-Louis Lorrain.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain.
Il faut rendre hommage au ministre pour sa position volontariste dans la lutte
contre le bioterrorisme.
Cela dit, nous nous trouvons dans une situation tout à fait exceptionnelle.
Devant ces nouveaux risques, ces nouvelles menaces, nous comprenons
difficilement que la sécurité sociale soit sollicitée.
Je n'ignore rien du problème des fluoroquinolones. Mais où faut-il s'arrêter ?
La menace peut provenir de bien d'autres agents : la peste, la tularémie, le
botulisme, entre autres.
On a aussi évoqué le rôle des médecins généralistes. Une fois de plus, on leur
demande de jouer un rôle civique, et j'y suis tout à fait favorable. Ils
répondront, comme toujours, à l'appel.
Toutefois, je comprends difficilement qu'on mette en place ces plans
d'urgence. Cela relève des grandes catas-trophes qui peuvent nous frapper, et
je ne vois pas pourquoi la sécurité sociale devrait prendre en charge ce
financement. L'Etat doit prendre ses responsabilités, toutes ses
responsabilités.
Le Gouvernement a pris des mesures tout à fait intelligentes, et nous les
avons soutenues, mais nous ne pouvons vous suivre sur cette modalité de
financement, monsieur le ministre.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 91, repoussé par la commission.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
7
dépôt d'une proposition
de résolution
M. le président.
J'ai reçu de M. Serge Vinçon une proposition de résolution, présentée au nom
de la délégation pour l'Union européenne en application de l'article 73
bis
du règlement, sur la proposition de directive du Parlement européen et du
Conseil sur la performance énergétique des bâtiments (n° E 1751).
La proposition de résolution sera imprimée sous le numéro 74, distribuée et
renvoyée à la commission des affaires économiques et du Plan, sous réserve de
la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions
prévues par le règlement.
8
textes soumis au sénat
en application de l'article 88-4
de la constitution
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à
l'harmonisation de certaines dispositions en matière sociale dans le domaine
des transports par route.
Ce texte sera imprimé sous le numéro E 1856 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de décision du Conseil sur les lignes directrices pour les
politiques de l'emploi des Etats membres en 2002.
Ce texte sera imprimé sous le numéro E 1857 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Le Livre vert : indemnisation des victimes de la criminalité.
Ce texte sera imprimé sous le numéro E 1858 et distribué.
9
RENVOI POUR AVIS
M. le président. J'informe le Sénat que le projet de loi de ratification de l'ordonnance n° 2001-741 du 23 août 2001 portant transposition de directives communautaires en matière de droit de la consommation et de l'ordonnance n° 2001-766 du 29 août 2001 portant transposition de directives communautaires en matière économique et financière (n° 45, 2000-2001), dont la commission des affaires économiques et du Plan est saisie au fond est renvoyé pour avis, à sa demande, à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
10
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président.
J'ai reçu de M. Charles Revet un rapport fait au nom de la commission des
affaires économiques et du Plan sur la proposition de loi de MM. Patrice
Gélard, Charles Revet, Mme Annick Bocandé, MM. Joël Bourdin, Jean-Luc Miraux,
et Ladislas Poniatowski tendant à prévenir l'effondrement des cavités
souterraines et des marnières et à préciser le régime juridique des biens
immobiliers affectés (n° 311, 2000-2001).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 70 et distribué.
J'ai reçu de M. Laurent Béteille un rapport fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée
nationale, relative à l'autorité parentale (n° 387, 2000-2001).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 71 et distribué.
J'ai reçu de M. Henri de Richemont un rapport fait au nom de la comission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée
nationale, relatif à l'accès aux orgines des personnes adoptées et pupilles de
l'Etat (n° 352, 2000-2001).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 72 et distribué.
J'ai reçu de M. Lucien Lanier un rapport fait au nom de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur la proposition de loi organique portant
validation de l'impôt foncier sur les propriétés bâties en Polynésie française
(n° 443, 2000-2001).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 73 et distribué.
J'ai reçu de M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au
nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les
dispositions restant en discussion du projet de loi relatif aux chambres
régionales des comptes et à la Cour des comptes.
Le rapport sera imprimé sous le numéro 75 et distribué.
11
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au jeudi 14 novembre 2001, à neuf heures trente et à quinze heures :
Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale
pour 2002, adopté par l'Assemblée nationale (n° 53, 2001-2002).
Rapport (n° 60, 2001-2002) de MM. Alain Vasselle, Jean-Louis Lorrain et
Dominique Leclerc, fait au nom de la commission des affaires sociales.
Avis (n° 61, 2001-2002) de M. Alain Joyandet, fait au nom de la commission des
finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Délais limites pour le dépôt
d'amendements
Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale,
relative à la création d'établissements publics de coopération culturelle (n°
20, 2001-2002).
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 19 novembre 2001, à
dix-sept heures.
Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi organique de
M. Gaston Flosse portant validation de l'impôt foncier sur les propriétés
bâties en Polynésie française (n° 443, 2000-2001).
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 19 novembre 2001, à
dix-sept heures.
Conclusions de la commission des affaires économiques sur la proposition de
loi de M. Patrice Gélard et de plusieurs de ses collègues tendant à prévenir
l'effondrement des cavités souterraines et des marnières et à préciser le
régime juridique des biens immobiliers affectés (n° 311, 2000-2001).
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 19 novembre 2001, à
dix-sept heures.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à l'autorité
parentale (n° 387, 2000-2001).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 20 novembre 2001, à seize
heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'accès aux
origines des personnes adoptées et pupilles de l'Etat (n° 352, 2000-2001).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 20 novembre 2001, à
dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 15 novembre 2001, à zéro heure
vingt-cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD
ORGANISMES EXTRAPARLEMENTAIRES
COMMISSION MIXTE CHARGÉE DE DONNER UN AVIS SUR L'AFFECTATION ET L'ATTRIBUTION
DES CRÉDITS DU FONDS D'AIDE À L'EXPANSION DE LA PRESSE FRANÇAISE À
L'ÉTRANGER
En application de l'arrêté du 25 février 1991, M. le président du Sénat a
désigné, le 6 novembre 2001, M. Robert Del Picchia pour siéger au sein de la
commission mixte chargée de donner un avis sur l'affectation et l'attribution
des crédits du Fonds d'aide à l'expansion de la presse française à l'étranger,
en remplacement de M. Paul d'Ornano.
CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA RÉSERVE MILITAIRE
En application du décret n° 2000-890 du 13 septembre 2000, M. le président du Sénat a désigné, le 7 novembre 2001, M. Jean-Pierre Masseret pour siéger en qualité de membre titulaire au sein du Conseil supérieur de la réserve militaire, en remplacement de M. Bertrand Auban, démissionnaire.
COMMISSION DES COMPTES DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
En application de l'article D. 114-1 du code de la sécurité sociale, M. le président du Sénat a désigné, le 8 novembre 2001, M. Alain Joyandet pour siéger au sein de la commission des comptes de la sécurité sociale, en remplacement de M. Jacques Oudin, démissionnaire.
CONSEIL NATIONAL
DU SYNDROME IMMUNODÉFICITAIRE ACQUIS (SIDA)
En application du décret n° 89-83 du 8 février 1989, M. le président du Sénat a désigné, le 14 novembre 2001, M. Serge Franchis pour siéger au sein du Conseil national du syndrome immunodéficitaire acquis, en remplacement de M. Philippe Nogrix, démissionnaire.
NOMINATIONS DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES
M. Xavier Darcos a été nommé rapporteur pour avis du projet de loi n° 415 (2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la démocratie de proximité.
COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
DE LA DÉFENSE ET DES FORCES ARMÉES
Mme Paulette Brisepierre a été nommée rapporteur du projet de loi n° 51
(2001-2002) autorisant la ratification de l'accord de partenariat entre les
membres du groupe des Etats d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d'une
part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part.
Mme Paulette Brisepierre a été nommée rapporteur du projet de loi n° 52
(2001-2002) autorisant la ratification de l'accord interne entre les
représentants des gouvernements des Etats membres, réunis au sein du Conseil,
relatif au financement et la gestion des aides de la Communauté dans le cadre
du protocole financier de l'accord de partenariat entre les Etats d'Afrique,
des Caraïbes et du Pacifique et la Communauté européenne et ses Etats membres,
signé à Cotonou (Bénin) le 23 juin 2000, et à l'affectation des aides
financières destinées aux pays et territoires d'outre-mer auxquels s'appliquent
les dispositions de la quatrième partie du traité CE.
COMMISSION MIXTE PARITAIRE
CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI RELATIF AUX CHAMBRES RÉGIONALES DES COMPTES ET À LA COUR DES COMPTES
Nomination du bureau
Dans sa séance du mercredi 14 novembre 2001, la commission mixte paritaire a
nommé :
Président :
René Garrec.
Vice-président :
Bernard Roman.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale :
Bernard Derosier ;
- au Sénat :
Daniel Hoeffel.
Liste des présents
Députés
Titulaires. -
Bernard Roman, Bernard Derosier, Jacky Darne, Olivier de
Chazeaux, Emile Blessig, Michel Vaxès, Jean-Pierre Michel.
Suppléants. -
René Dosière, Jean-Yves Caullet, Jean-Pierre Blazy, Bruno
Le Roux, Jean-Luc Warsmann, François Goulard.
Sénateurs
Titulaires. -
René Garrec, Daniel Hoeffel, Patrice Gélard, Jean-Patrick
Courtois, Paul Girod, Jacques Mahéas, Robert Bret.
Suppléants. -
Christian Cointat, Jean-Pierre Schosteck.
DÉLAI LIMITE POUR LE DÉPÔT DES AMENDEMENTS
À UNE PROPOSITION
DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE
En application de l'article 73
bis,
alinéa 6 du règlement, la
commission des lois examinera le mercredi 21 novembre 2001, le rapport de M.
Pierre Fauchon sur la proposition de résolution n° 64 (2001-2002), présentée
par M. Pierre Fauchon, au nom de la délégation pour l'Union européenne, sur les
deux propositions de décisions-cadres relatives au mandat d'arrêt européen et
aux procédures de remise entre Etats membres (n° E 1829) et à la lutte contre
le terrorisme (n° E 1828) ainsi que les éventuels amendements qui seront
présentés sur cette proposition de résolution.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est fixé au mardi 20 novembre
2001 à 17 heures. Les amendements devront être déposés directement au
secrétariat de la commission.
Il est rappelé que conformément à l'article 73
bis,
alinéa 6, du
règlement, les amendements dont aucun des auteurs n'appartient à la commission
saisie au fond seront présentés devant celle-ci par leur premier signataire. La
présente publication vaudra, à leur égard, convocation à la réunion de la
commission.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Organisation du service public
de distribution d'énergie électrique
1200.
- 14 novembre 2001. -
M. Michel Sergent
appelle l'attention de
M. le secrétaire d'Etat à l'industrie
sur les décisions prises dans le Pas-de-Calais par les services d'EDF. Il lui
rappelle que la loi du 8 avril 1946, toujours en vigueur et portant sur la
nationalisation de l'électricité et du gaz, a désigné sur l'ensemble du
territoire national un opérateur unique et « obligé » pour assurer cette
mission de service public, mission qui ne peut se faire que sous forme de
concession. Il précise que, dans le Pas-de-Calais, un des dix-sept départements
français dits « en régime urbain », la fédération départementale d'énergie
exerce au nom de toutes les communes son rôle d'autorité concédante en délégant
sous forme de contrat de concession le service public de distribution d'énergie
électrique au concessionnaire EDF. Il estime qu'aujourd'hui, ce concessionnaire
EDF ne respecte pas les obligations en n'assumant pas la maîtrise d'ouvrage de
tous les travaux, notamment dans le cadre des effacements de réseaux voulus et
financés totalement par les collectivités. Il lui demande donc si EDF est en
droit de refuser cette maîtrise d'ouvrage sachant notamment que la collectivité
ne peut pas assurer une maîtrise d'ouvrage indépendante puisque EDF garde le
droit de regard sur les études, le choix des entreprises, le tracé des ouvrages
et les schémas d'exploitation des réseaux.
Application de la loi SRU dans les petites communes
1201.
- 14 novembre 2001. -
M. Jean-Pierre Demerliat
attire l'attention de
M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement
sur certaines conséquences de l'application de la loi n° 2000-1208 du 13
décembre 2000 sur la solidarité et le renouvellement urbains, notamment dans
les petites communes, en matière d'urbanisme. Si, sur le fond, il ne fait aucun
doute que les dispositions nouvelles simplifient des procédures parfois très
lourdes, dans la pratique, leur mise en oeuvre soulève parfois des difficultés.
En particulier, l'instauration d'une participation pour voies nouvelles et
réseaux inquiète bon nombre de maires de petites communes. D'autre part, il
n'est pas possible de dissocier le financement des réseaux de celui de la
voirie. Dans beaucoup de communes, seule une extension des réseaux serait
nécessaire pour permettre des constructions nouvelles. D'autre part, les
communes devront assurer le préfinancement de ces voies et réseaux, qui sont
nécessaires pour obtenir les autorisations de construire. Cela risque fort de
pénaliser lourdement les budgets, déjà modestes, des petites communes et cela
pourrait, à moyen terme, bloquer leur développement. Il souhaiterait donc
savoir quels aménagements pourraient être apportés pour que les nouvelles
dispositions de cette loi permettent un développement harmonieux des zones
rurales.