SEANCE DU 18 OCTOBRE 2001
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. SERGE VINÇON
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Candidature à une délégation parlementaire
(p.
1
).
3.
Couverture des non-salariés agricoles.
- Rejet d'une proposition de loi en nouvelle lecture (p.
2
).
Discussion générale : MM. Nicolas About, président de la commission des
affaires sociales, en remplacement de M. Bernard Seillier, rapporteur ; Gérard
Le Cam, Jacques Pelletier.
Clôture de la discussion générale.
Question préalable (p. 3 )
Motion n° 1 de la commission. - M. le rapporteur, Mme Gisèle Printz, MM. Jean
Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche ; Serge Franchis, Michel
Moreigne, Alain Vasselle. - Adoption, par scrutin public, de la motion
entraînant le rejet de la proposition de loi.
4.
Nomination d'un membre d'une délégation parlementaire
(p.
4
).
Suspension et reprise de la séance (p. 5 )
5. Questions d'actualité au Gouvernement (p. 6 ).
troubles à thonon-les-bains (p. 7 )
MM. Pierre Hérisson, Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur.
situation en afghanistan (p. 8 )
Mme Danielle Bidard-Reydet, M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.
plan biotox (p. 9 )
MM. Paul Girod, Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé.
difficultés de la filière bovine (p. 10 )
MM. Jean-Paul Emorine, Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.
application de la loi
sur l'interruption volontaire de grossesse (p.
11
)
Mmes Claire-Lise Campion, Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle.
critiques à l'encontre du sénat
dans l'ouvrage de m. glavany (p.
12
)
MM. Jean Bizet, Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche ; le président.
avenir de moulinex (p. 13 )
MM. Jean-Léonce Dupont, Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.
directive européenne sur l'ouverture
à la concurrence des services postaux (p.
14
)
MM. Jacques Bellanger, Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.
M. Claude Estier.
représentation de la région
au sein du syndicat des transports d'ile-de-france (p.
15
)
MM. Roger Karoutchi, Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement ; le président.
psychose liée à la maladie du charbon (p. 16 )
MM. Alain Gournac, Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé.
Suspension et reprise de la séance (p. 17 )
6.
Candidatures à des organismes extraparlementaires
(p.
18
).
7.
Lutte contre les discriminations.
- Adoption d'une proposition de loi en nouvelle lecture (p.
19
).
Discussion générale : MM. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat à l'économie solidaire
; Louis Souvet, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Mme Gisèle
Printz, M. Roland Muzeau.
M. le secrétaire d'Etat.
Clôture de la discussion générale.
Article 1er (p. 20 )
Amendement n° 1 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Amendement n° 2 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 2 (p. 21 )
Amendement n° 3 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Amendement n° 4 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat,
Mme Gisèle Printz. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 4 (p. 22 )
Amendements n°s 5 à 7 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire
d'Etat. - Adoption des trois amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 7
(pour coordination)
. - Adoption (p.
23
)
Intitulé de la proposition de loi (p.
24
)
Amendement n° 8 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement modifiant l'intitulé.
Vote sur l'ensemble (p. 25 )
MM. Alain Gournac, Serge Franchis.
Adoption de la proposition de loi.
8.
Rappel au règlement
(p.
26
).
MM. Emmanuel Hamel, le président.
9.
Nomination de membres d'organismes extraparlementaires
(p.
27
).
10.
Dépôt d'une proposition de loi
(p.
28
).
11.
Ordre du jour
(p.
29
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. SERGE VINÇON
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à onze heures dix.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
CANDIDATURE À UNE DÉLÉGATION
PARLEMENTAIRE
M. le président.
L'ordre du jour appelle la désignation d'un membre au sein d'une délégation
parlementaire.
Le groupe du Rassemblement démocratique et social européen m'a fait connaître
qu'il présentait la candidature de M. Yvon Collin pour siéger au sein de la
délégation du Sénat aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les
hommes et les femmes, en remplacement de M. André Boyer, démissionnaire.
Cette candidature a été affichée. Elle sera ratifiée si la présidence ne
reçoit pas d'opposition dans le délai d'une heure.
3
COUVERTURE DES NON-SALARIÉS
AGRICOLES
Rejet d'une proposition de loi en nouvelle lecture
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion, en nouvelle lecture, de la proposition
de loi (n° 19, 2001-2002), adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale
en nouvelle lecture, portant amélioration de la couverture des non-salariés
agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles.
[Rapport n° 23 (2001-2002).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le président de la commission,
le rapporteur, M. Bernard Seillier, étant retenu dans son département.
M. Nicolas About,
président de la commission des affaires sociales, en remplacement de M.
Bernard Seillier, rapporteur.
Mes chers collègues, permettez-moi d'abord
de saluer M. le président et de lui dire que c'est un honneur pour moi d'être
le premier orateur à m'exprimer lors de sa première présidence de séance.
(Applaudissements.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Sénat a
constamment apporté sa pierre à l'amélioration de la protection des exploitants
et des salariés agricoles. Dans un passé récent, il est à l'origine d'une
grande partie du volet « protection sociale agricole » de deux textes
législatifs : la loi d'orientation agricole et le projet de loi de
modernisation sociale.
C'est dire s'il attendait avec impatience une réforme de l'assurance accidents
du travail des exploitants agricoles. C'est dire s'il était prêt à un véritable
dialogue républicain, dépassant les traditionnels clivages. C'est dire, enfin,
combien il s'est efforcé de proposer en première lecture un texte original et
équilibré, reposant sur un « scénario partenarial » entre les différents
acteurs de la protection sociale agricole.
Malheureusement, la réunion de la commission mixte paritaire, le 10 octobre
dernier, à l'Assemblée nationale, s'est achevée sur un constat d'échec.
Pourtant, nos deux assemblées s'accordent non seulement sur le constat de
départ - le système actuel de l'assurance obligatoire des exploitants agricoles
contre les accidents du travail et les maladies professionnelles est déficient
- mais également sur les trois grands principes devant guider la réforme de
cette assurance : l'universalité de l'assurance - aucun exploitant agricole ne
doit plus échapper à cette obligation - l'amélioration des garanties proposées
- les rentes d'inaptitude à la profession agricole doivent être relevées - et,
enfin, la définition d'une politique de prévention, une telle politique étant
seule en mesure de diminuer le nombre d'accidents du travail en agriculture.
Cette politique de prévention nécessite une connaissance statistique
approfondie du risque accidents du travail. En conséquence, le Sénat a, non
sans débat, confirmé, en première lecture, la séparation entre les accidents de
la vie privée et les accidents du travail.
Pour autant, la disparition du régime concurrentiel, souhaitée par l'Assemblée
nationale en première et en nouvelle lecture, n'était pas la seule voie pour
améliorer la couverture sociale des exploitants agricoles contre les accidents
du travail et les maladies professionnelles.
En effet, deux techniques s'opposent.
Il s'agit, d'une part, de la création d'une branche classique de la sécurité
sociale, où les cotisations seraient fixées par arrêté ministériel et les
prestations définies par la loi ; c'est la voie que l'Assemblée nationale a
choisie. Son choix aurait d'ailleurs été plus logique si elle avait laissé à la
seule Mutualité sociale agricole, la MSA, le soin de couvrir l'assurance
obligatoire ; or la pluralité d'assureurs a été conservée.
Il s'agit, d'autre part, du maintien d'un régime concurrentiel, où les
prestations minimales seraient strictement définies par la loi, mais où la
liberté de cotisation serait préservée.
La création d'une branche accidents du travail et maladies professionnelles
pour les exploitants agricoles, dans les mêmes conditions que les branches
existantes, est incontestablement cohérente avec l'organisation de notre
protection sociale.
Le Sénat s'est simplement posé la question suivante : est-ce le meilleur moyen
d'assurer l'intérêt général et l'intérêt des exploitants agricoles ?
Les longs débats parlementaires qui ont permis le vote de la loi de 1966
avaient été marqués par deux soucis qui expliquent le choix finalement retenu
d'un mécanisme d'assurance : le souci de ne pas grever les charges publiques,
d'une part, le souci de ne pas augmenter les charges des exploitants agricoles,
d'autre part.
Le Sénat a estimé, en première lecture, que les termes du débat étaient
aujourd'hui strictement identiques.
Nous avons constaté que le financement du nouveau régime reposait sur des
estimations fragiles, variables et contestables. Le montant des futures
cotisations AAEXA, assurance des non-salariés agricoles contre les accidents du
travail et les maladies professionnelles, à la charge des exploitants
agricoles, a été ainsi réévalué à trois reprises depuis le mois de mai.
Nous souffrons ici du défaut de la procédure utilisée par le Gouvernement :
une proposition de loi, ce qui empêche l'examen du texte par le Conseil d'Etat
mais également la réalisation d'une étude d'impact.
La transformation de cotisations librement définies en cotisations fixées par
arrêté du ministre de l'agriculture aura mécaniquement pour effet d'augmenter
le volume des prélèvements obligatoires.
La création, dans ces conditions, d'une quatrième branche a également pour
effet d'augmenter les dépenses publiques et les charges des agriculteurs.
Il apparaît certain que des dépenses mises aujourd'hui à la charge de l'AMEXA,
l'assurance maladie, invalidité et maternité des exploitants agricoles, sont en
fait du ressort de l'AAEXA. Il est toutefois difficile d'en apprécier le
montant exact.
Les compagnies d'assurances ne contestent pas l'existence d'un tel transfert.
Elles estiment, cependant, qu'il est limité aux dépenses hospitalières et de
nature transitoire, un certain temps s'écoulant entre le moment où les frais
d'hospitalisation sont effectivement engagés et le moment où la MSA présente sa
demande de remboursement à l'assureur AAEXA.
S'il est mis fin, demain, à un tel transfert, il sera nécessaire de prévoir
des recettes, donc des cotisations des exploitants agricoles, à hauteur,
naturellement, des dépenses de l'AAEXA. En effet, le nouveau régime est «
auto-équilibré » : il n'y a pas de participation du budget de l'Etat.
Dans le même temps, il sera impossible de réduire le taux de cotisation de
l'AMEXA, qui a été défini en référence à celui qui existe dans le régime
général. L'augmentation des dépenses de l'AAEXA ne sera pas compensée par la
baisse des dépenses d'assurance maladie.
De toute façon, nous assisterons à un mouvement en sens inverse ; les
accidents de la vie privée, aujourd'hui pris en charge par l'AAEXA, seront
désormais du ressort de l'AMEXA : le Gouvernement estime ce transfert de
charges de 220 à 320 millions de francs, à partir d'une transposition du coût
des accidents de la vie courante dans le total des prestations maladie du
régime général.
Un autre effet sur les dépenses publiques semble avoir été insuffisamment pris
en compte : les prestations d'assurance accidents vont être fortement
revalorisées, alors qu'elles resteront très faibles en assurance maladie. En
conséquence, il sera difficile, à terme, de maintenir en assurance maladie des
pensions d'invalidité aussi faibles : moins de 25 000 francs par an. Le coût
d'un alignement des pensions invalidité sur le niveau des prestations accidents
du travail s'élèverait à 500 millions de francs en coût brut et à 400 millions
de francs en coût net, compte tenu des économies réalisées par le fonds spécial
invalidité, le FSI.
Cette tendance à la hausse des prestations de l'AMEXA aura pour conséquence
inéluctable, bien que non chiffrée par le Gouvernement, une augmentation des
charges publiques, le régime de protection sociale des exploitants agricoles
étant, compte tenu de sa situation démographique particulière, pris en charge
par la solidarité nationale à hauteur de 80 %.
Le financement des rentes, dans un contexte de diminution des actifs
cotisants, posera inévitablement un problème à long terme, même si le texte
prévoit un fonds de réserve bénéficiant de provisions. De ce point de vue, la
technique assurantielle apparaît incontestablement mieux armée que la « logique
sécurité sociale » pour répondre à ce défi.
En conséquence, le Sénat a souhaité le maintien d'un régime concurrentiel ; il
a estimé que les primes ou cotisations versées par les assurés devaient être
librement fixées par les organismes assureurs, ce qui permet une véritable
concurrence entre les différents acteurs.
Notre assemblée a toutefois souhaité que deux garde-fous soient posés à cette
liberté de tarification : d'abord, les cotisations correspondant aux garanties
minimales obligatoires ne pourraient pas excéder un plafond fixé par arrêté du
ministre de l'agriculture ; ensuite, les cotisations seraient modulées par le
classement des exploitations dans des catégories de risques. Ce mécanisme,
présent dans le texte adopté par l'Assemblée nationale, est apparu tout à fait
pertinent.
Le Sénat a proposé de maintenir un régime concurrentiel non pas par idéologie,
mais par pragmatisme, monsieur le ministre. Il importe que les charges des
agriculteurs restent à un niveau modéré. Or le système proposé par l'Assemblée
nationale présente pour les agriculteurs l'inconvénient d'être un carcan, en
prévoyant l'intégralité des garanties prévues dans le régime général.
Si le relèvement des pensions d'invalidité et l'inclusion d'indemnités
journalières dans le régime obligatoire sont souhaitables, il n'en va pas de
même des rentes servies aux ayants droit. Naturellement, un tel dispositif est
généreux, mais il risque de peser progressivement d'un grand poids sur le
régime. Il nous a semblé qu'il convenait de ne pas se précipiter et d'observer
comment le nouveau régime monterait en charge, quitte à ajouter, dans quelques
années, cette garantie dans le champ de l'assurance obligatoire.
Le maintien d'un régime concurrentiel n'était pas incompatible avec la plupart
des nouvelles missions confiées à la Mutualité sociale agricole. Le Sénat a
confirmé son rôle clef dans trois domaines : le contrôle de l'obligation
d'assurance, l'animation de la prévention et le contrôle médical.
En bref, le Sénat a tenté, en première lecture, de chercher une troisième
voie. Bien évidemment, le texte que nous avions adopté était techniquement
perfectible. Je tiens toutefois à souligner que son organisation générale a été
approuvée par la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles, la
FNSEA, et le Centre national des jeunes agriculteurs, le CNJA. Notre texte a
même été qualifié par Groupama de « texte de compromis »...
(M. le ministre
rit.)
Ne riez pas, monsieur le ministre !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Un compromis Groupama !
M. Nicolas About,
rapporteur.
... « de nature à satisfaire l'ensemble des acteurs
concernés, agriculteurs, MSA, assureurs », et pas seulement Groupama !
L'enjeu était, avant tout, de faire bénéficier les exploitants agricoles d'une
meilleure protection sociale, au meilleur coût, et de diminuer le nombre
d'accidents du travail.
Notre texte attendait une réponse de l'Assemblée nationale ; je suis sûr que,
sur la partie relative aux prestations, nous aurions pu rapprocher nos points
de vue. Je pense, notamment, à la distinction entre l'incapacité, retenue par
les députés, et l'inaptitude à la profession agricole, qui avait notre
préférence en première lecture.
Mais l'urgence déclarée par le Gouvernement sur ce texte, qui est pourtant une
propositoin de loi, ainsi que ses certitudes concernant l'échec de la
commission mixte paritaire, en ont décidé autrement.
Il est tout de même curieux que le Gouvernement ait réuni, le 18 septembre
dernier, le Conseil supérieur des prestations sociales agricoles pour lui
demander de se prononcer sur des projets de décret élaborés sur la base du
texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture ! C'est dire si le
Gouvernement anticipait l'échec de la commission mixte paritaire. Je n'oserai
dire qu'il l'avait décidé.
(M. le ministre proteste.)
Le 10 octobre dernier, le désaccord entre l'Assemblée nationale et le Sénat a
porté principalement sur la liberté de cotisations. Je crois que le choix
retenu de cotisations fixées par le ministère de l'agriculture est une grave
erreur. Non seulement il ne correspond pas au souhait majoritaire des
exploitants agricoles, mais il ne laisse aucune possibilité de vivre au système
concurrentiel. C'est peut-être ce que vous souhaitez ! La pluralité
d'assureurs, il faut bien le dire, n'est qu'une pluralité d'affichage.
Le texte adopté, même dans sa logique, est loin d'être parfait.
Tout d'abord, il passe sous silence d'importantes questions. En effet, il
repose sur une convention signée entre la caisse centrale de la Mutualité
sociale agricole et le groupement d'assureurs. Le texte de cette convention
fait encore débat. Par ailleurs, la MSA et les organismes assureurs sont en
désaccord sur la procédure selon laquelle les assurés choisiront leur organisme
d'assurance.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture passe également
sous silence la question de l'indemnisation des organismes assureurs.
L'Assemblée nationale a refusé un amendement prévoyant un simple rapport du
Gouvernement sur cette question. Vous-même, monsieur le ministre, vous êtes
contenté d'affirmer qu'une réduction des marges bénéficiaires des assureurs ne
pouvait valoir préjudice, tandis que M. Jacques Rebillard, rapporteur de la
commission des affaires culturelles, familiales et sociales, renvoyait au
Conseil d'Etat le soin de décider s'il y avait lieu d'indemniser ou pas. Il
suffisait de transformer le texte en projet de loi pour avoir l'avis préalable
du Conseil d'Etat !
Le Gouvernement prend ainsi un véritable risque juridique, qui peut s'avérer
coûteux à l'avenir.
Ce texte est, ensuite, empreint d'effets pervers ; j'en citerai au moins
deux.
Nous avons approuvé la séparation entre accidents du travail et accidents de
la vie privée ; mais une telle séparation nécessite un alignement des
prestations servies en assurance maladie sur les prestations servies en
assurance accident. Il y aura bientôt un écart de un à trois entre les pensions
d'invalidité de l'AMEXA et les pensions de l'AAEXA ! Or, selon le ministère de
l'agriculture, cet alignement n'est pas envisageable « à court terme ».
Je ne suis pas non plus persuadé que l'exclusion du champ de l'AAEXA des
retraités participant occasionnellement aux travaux de l'exploitation soit
justifiée. Comment pourra-t-on expliquer à un retraité victime d'un accident
qu'il dépendra de l'AMEXA, qu'il bénéficiera à ce titre de prestations moins
élevées et qu'il devra s'acquitter, en plus, d'un ticket modérateur ?
Enfin, il appartenait au législateur de trouver la voie d'un consensus entre
les différents acteurs. Je ne pense pas que les agriculteurs aient à gagner
quoi que ce soit dans cette « guéguerre » entre les organismes de MSA et
Groupama.
Au-delà de l'assurance obligatoire, correspondant à la protection de base,
nous savons que cette assurance est un produit d'appel pour l'assurance
complémentaire. Les acteurs de la protection complémentaire, déjà échaudés par
la couverture maladie universelle, voient avec inquiétude entrer sur leur
territoire l'organisme chargé du régime de base.
Notre tentative de parvenir à un texte de consensus s'est soldée, il faut le
reconnaître, par un échec. Dans ces conditions, à partir du moment où seul le
Sénat a souhaité le dialogue et où l'Assemblée nationale a entendu dire son
dernier mot dès la nouvelle lecture, la commission des affaires sociales ne
peut que vous proposer, mes chers collègues, l'adoption d'une motion tendant à
opposer la question préalable.
(Applaudissements sur les travées du RPR et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines tracées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Le Cam.
M. Gérard Le Cam.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord
d'adresser à mon tour mes plus vives félicitations à M. Serge Vinçon, qui, ce
matin, assure sa première présidence de séance dans cet hémicycle.
(Applaudissements.)
Nous ne pouvons aujourd'hui que regretter que la commission mixte paritaire
n'ait pu s'entendre sur un texte de loi qui, a n'en pas douter, constituait un
réel progrès pour le monde agricole.
A l'évidence, la réécriture pratiquement intégrale de la proposition de loi
lors de son premier passage au Sénat et le gommage d'appréciables avancées
sociales ne nous engagaient guère sur la voie d'un quelconque compromis.
Pourtant, le triple constat de la déficience d'un système après plus de trente
ans de fonctionnement avait emporté l'unanimité.
La faiblesse des prestations et l'insuffisance des garanties de couverture en
cas d'accident, l'absence de politique de prévention des risques professionnels
et, enfin, le caractère non universel de l'assurance amenaient logiquement à
repenser globalement le système de protection sociale des non-salariés
agricoles face aux risques d'accidents et de maladies professionnels et à
promouvoir une totale refonte de l'actuel système concurrentiel, qui n'a pas
réussi à faire ses preuves, dans un milieu, il est vrai, soumis à de dures
épreuves.
Ce ne sont donc ni les faits ni le diagnostic, incontestables et d'ailleurs
incontestés, qui ont constitué la pierre d'achoppement de la commission mixte
paritaire et qui ont conduit l'Assemblée nationale, en nouvelle lecture, à se
rapprocher, par voie d'amendements, de la teneur initiale du texte de la
proposition de loi.
La majorité des députés et le Gouvernement ont persisté dans leur choix de
créer une quatrième branche de la sécurité sociale fondée sur un dispositif de
cotisations et de prestations sociales égales pour tous, dispositif assis sur
une mutualisation des ressources gérées par la MSA, qui assure désormais le
rôle essentiel de caisse pivot.
Ce choix est incontestablement celui qui contribue à une meilleure justice
sociale. Il pouvait satisfaire la majorité sénatoriale, puisque la pluralité
des assureurs était maintenue et que leur rôle traditionnel de prestataires de
services n'était aucunement contesté.
Mais la majorité sénatoriale semble vouloir persister dans ses convictions et
ramener à de simples dysfonctionnements la défaillance de l'actuel système
d'assurance, qui, moyennant quelques garde-fous, devrait être préservé.
Poser des garde-fous ? L'expression est parlante, mais, paradoxalement, elle
convient merveilleusement bien en matière de concurrence et de laisser-faire
!
Des garde-fous, dites-vous ? Qu'on en juge : on fixe un plafond que les
cotisations correspondant aux garanties minimales obligatoires ne pourraient
dépasser ; on prévoit une modulation des cotisations en fonction des
différentes sortes de risque afférant aux divers types d'exploitation, et,
surtout, on évite une démarche qui fixerait, suivant un principe de justice
sociale, les cotisations en fonction des revenus des exploitants !
Votre souci, mes chers collègues, est avant tout de maintenir un système privé
- donc, des intérêts privés - système dont l'efficacité supposée reposerait sur
son caractère concurrentiel.
Or l'efficacité est douteuse puisque, plusieurs orateurs l'ont fait remarquer,
l'écart entre le montant moyen des primes perçues et celui des prestations
reversées permet à quelques compagnies d'assurances d'engranger, certaines
années, de substantiels bénéfices.
Oui, l'efficacité d'un système dit « concurrentiel » est douteuse, alors
qu'une compagnie d'assurances détiendrait à elle seule plus des deux tiers du
marché de l'assurance contre les accidents du travail et les maladies
professionnelles des exploitants agricoles, l'actuelle AAEXA.
Vous en conviendrez, mes chers collègues, en l'occurrence, il s'agit d'une
situation de quasi-monopole, génératrice de rentes, comme l'est toute situation
d'abus de position dominante.
Dans le cas d'un monopole public, on a de bonnes raisons de penser qu'un effet
redistributif aura lieu sous une forme ou sous une autre, ce qui n'est pas le
cas, on vient de le signaler, dans le cas d'un monopole privé.
D'un point de vue économique, l'absence de réelle concurrence et
l'insuffisance de l'actuel système justifieraient à elles seules la réforme de
fond envisagée par les auteurs de la proposition de loi dans sa première
version.
Bref, l'inefficacité d'un système qui laisse sans couverture 20 % des
exploitations agricoles est criante !
Mes chers collègues, depuis vingt ans, les inégalités sociales n'ont cessé de
croître, à tel point que l'INSEE vient de créer une nouvelle catégorie
statistique, celle des « travailleurs pauvres ». Les exploitants agricoles sont
fortement concernés par ces nouvelles formes de pauvreté et d'exclusion
sociale. Dans une récente enquête, l'INSEE estime que 22 % des agriculteurs
font partie de cette nouvelle catégorie et que 40 % des exploitations agricoles
dégagent un revenu inférieur au SMIC, tandis que, selon la dernière étude de
l'Institut national de la recherche agronomique, plus de 40 000 paysans tirent
mensuellement de leur exploitation des revenus inférieurs à la moitié du SMIC
!
Ainsi, malgré d'énormes gains de productivité, la croissance relativement
ferme d'hier n'aura pas empêché un renforcement de la disparité des revenus.
Dans de telles conditions, on peut aisément comprendre que certains se
livrent, quand ils ont réellement le choix, à ce douloureux exercice
d'arbitrage entre assurer leur propre personne face aux risques de leur
profession ou préserver leur exploitation, avec, dans le second cas, et lorsque
l'accident ou la maladie grave surviennent, tous les drames sociaux qui font
basculer des familles entières dans l'insécurité sociale.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous étions favorables à la
création d'une quatrième branche « accidents du travail » de la sécurité
sociale et nous aurions souhaité un système plus égalitaire qui intègre dans
les cotisations sociales cette disparité des revenus en faisant jouer le
principe de solidarité et une réelle mutualisation des risques. La proposition
de loi, bien qu'en deçà de nos exigences, nous apportait certaines
satisfactions.
La majorité sénatoriale refuse tout compromis, sous prétexte de la disparition
de l'actuel système privé d'assurance et d'un accroissement des charges et des
dépenses publiques. Sachez, mes chers collègues, qu'un accroissement des
charges publiques dans un souci d'une meilleure égalité sociale n'est pas
forcément, sur le plan macroéconomique, contre-productif.
Les dépenses publiques à destination des populations les plus pauvres ont un
effet immédiat sur la dynamique de la croissance, car elles sont directement
absorbées par la consommation, ce que beaucoup d'entre vous se refusent
toujours à admettre.
Votre texte a été qualifié par Groupama de « texte de compromis de nature à
satisfaire l'ensemble des acteurs concernés : agriculteurs, MSA, assureurs ».
Je n'ai pas eu, pour ma part, de tels échos du monde agricole.
Ne se satisfaisant pas de ce compromis de circonstance, le groupe communiste
républicain et citoyen votera donc contre la motion tendant à opposer la
question préalable.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen,
ainsi que sur celles du groupe socialiste.)
M. le président.
La parole est à M. Pelletier.
M. Jacques Pelletier.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette
proposition de loi, qui transforme la couverture des agriculteurs contre les
accidents du travail en une nouvelle branche de la sécurité sociale, aura,
selon moi, des conséquences néfastes non seulement pour le monde agricole et
pour ses assureurs, mais également pour le système qui sera ainsi créé.
Le Sénat avait, sur ce texte, adopté, au printemps, une position qui me
semblait assez consensuelle. Mon groupe est, vous le savez, particulièrement
sensible au consensus.
Le texte pouvait, certes, être encore amélioré juridiquement. Nous comptions
sur le travail de la commission mixte paritaire pour le parfaire. Cette
commission fut un échec, ce que je déplore.
Cet échec fut la conséquence d'une dissension profonde entre deux conceptions
antagonistes : d'un côté, la volonté d'une socialisation du régime, de l'autre,
la volonté de laisser s'exercer le jeu régulateur de la concurrence.
Je m'oppose, comme je l'ai fait au printemps dernier, au texte tel qu'il nous
est présenté, parce qu'il dénote une mauvaise connaissance du monde agricole,
de la diversité de ses activités, de l'esprit qui le caractérise.
Je m'en étonne, monsieur le ministre, car vous avez montré en maintes
circonstances par le passé que vous aviez une connaissance excellente et très
fine du milieu agricole.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
N'en faites pas trop, monsieur
le sénateur !
M. Jacques Pelletier.
Le transfert d'un régime concurrentiel dans une nouvelle branche de la
sécurité sociale ne reçoit absolument pas les faveurs des agriculteurs, du
moins, de leur grande majorité, qui restent fermement attachés à leur liberté
de choix en matière d'assurance.
Certes, le régime nécessitait une réforme urgente. Les assureurs ainsi que la
Fédération française des sociétés d'assurance se sont accordés pour faire
évoluer le système.
Le texte nous revient sans changement de l'Assemblée nationale.
Je ne suis pas favorable à la création d'une nouvelle branche de la sécurité
sociale « accidents de travail », qui n'inclura pas les accidents privés et qui
sera gérée par la MSA.
Les exploitants agricoles craignent, légitimement, que les assureurs se voient
retirer la possibilité de fixer les cotisations.
Le régime concurrentiel permet de faire baisser les prix et donne la
possibilité aux exploitants agricoles de s'assurer en fonction de leurs besoins
réels et non pas au titre d'une catégorie de risques arrêtés arbitrairement.
La profession me semble déjà suffisamment sinistrée, surtout si l'on songe à
son avenir proche - je pense à la réforme de la PAC - pour ne pas l'accabler
davantage.
Le système ainsi créé risque de devenir rapidement déficitaire parce que le
nombre d'agriculteurs ne fait que diminuer, avec, pour conséquence,
l'augmentation des cotisations qui leurs seront réclamées.
Cette nouvelle législation séparera les accidents privés des accidents
professionnels. Or la réalité quotidienne de la profession est aux antipodes
d'un tel système. Les agriculteurs travaillent seuls une grande partie de
l'année, mais, seuls, ils ne peuvent plus le rester quand arrivent les saisons
de la moisson, de l'arrachage des betteraves, des vendanges ou de la
cueillette.
Le recours à une main-d'oeuvre ponctuelle est une nécessité ; elle préserve
les agriculteurs du stress, de la course, et donc des accidents. Qui mieux
qu'un fils d'agriculteur ou une retraitée de la profession peut donner le coup
de main nécessaire dans ces occasions ?
Le monde agricole est, dans sa grande majorité, opposé à cette socialisation
de la gestion des risques.
La profession souhaite réformer le régime des accidents du travail des
exploitants agricoles issu de la loi du 22 décembre 1966, mais elle souhaite
avant tout conserver le régime assurantiel et concurrentiel existant.
Les propositions de notre assemblée en première lecture allaient dans le bon
sens et évitaient les surcoûts, tant pour l'assuré que pour l'Etat.
Le Sénat s'était, en effet, prononcé en faveur d'une amélioration des
garanties pour les non-salariés agricoles - sans augmentation pour les assurés
comme pour l'Etat -, d'une amélioration de la couverture des assurés, avec le
maintien des accidents privés au sein du régime AAEXA et le maintien des
personnes couvertes, et pour une revalorisation des prestations actuelles avec
doublement des rentes, introduction d'un capital-décès et revalorisation des
indemnités journalières.
Hélas ! le Gouvernement y est resté insensible et le blocage actuel en est la
conséquence évidente.
Je ne pense pas qu'il soit judicieux de basculer dans un régime de sécurité
sociale uniquement parce que le système se doit d'être réformé. Certes, il nous
appartient de le réformer, afin qu'il couvre de la meilleure manière possible
l'ensemble de la profession. Néanmoins, l'AAEXA doit rester, à mon avis, une
couverture obligatoire de base, les exploitants agricoles restant libres de
souscrire à une assurance complémentaire, encadrée par le code rural, en
faisant appel aux assureurs de leur choix.
Je ne peux, aujourd'hui, souscrire à la proposition de loi qui nous est
proposée. En outre, je regrette que l'on ait déclaré l'urgence sur un texte
dont l'adoption définitive n'était tout de même pas à un ou deux mois près.
Toutefois, par principe viscéralement hostile aux questions préalables, je
m'abstiendrai sur la motion qu'a déposée la commission.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le président, je
m'exprimerai tout à l'heure lors de l'examen de la motion.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Question préalable
M. le président.
Je suis saisi par M. Seillier, au nom de la commission d'une motion n° 1
tendant à opposer la question préalable.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat,
« Considérant que la proposition de loi portant amélioration de la couverture
des non-salariés agricoles contre les accidents du travail, de la vie privée et
les maladies professionnelles répond à un véritable besoin ; que le consensus
sur les objectifs de la réforme laissait espérer un accord entre les deux
assemblées ;
« Considérant que le Gouvernement a reconnu lui-même que ladite proposition de
loi, substantiellement enrichie par ses soins, était devenue "son texte",
faisant apparaître le caractère purement formel de l'initiative des députés au
titre de l'article 48, alinéa 3, de la Constitution ;
« Considérant que, ce faisant, le Gouvernement s'est dispensé de produire
l'étude d'impact dont doit être assorti tout projet de loi ; qu'il s'est
pareillement épargné la peine de recueillir l'avis du Conseil d'Etat ;
« Considérant, en revanche, qu'il a immédiatement assorti cette proposition de
loi d'une déclaration d'urgence, privant ainsi les deux assemblées d'un
dialogue particulièrement nécessaire ;
« Considérant que, malgré ce contexte particulier, le Sénat, en première
lecture, dans sa séance du 20 juin 2001, s'était efforcé, dans un esprit
constructif salué par tous, de bâtir un texte de compromis, susceptible de
satisfaire l'ensemble des acteurs ; qu'il avait réussi dans cette voie, comme
l'a montré le soutien de la profession agricole ;
« Considérant que le ministre de l'agriculture avait pourtant, dès cette date,
anticipé l'échec de la commission mixte paritaire, qualifiant un accord
éventuel de "miracle" auquel il ne croyait pas ;
« Considérant que, dans des conditions juridiques floues, le Conseil supérieur
des prestations sociales agricoles a délibéré le 18 septembre 2001 sur les
projets de décret ; que, en prenant pour base, à cette occasion, le texte
adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, le Gouvernement n'a
laissé aucune chance à la commission mixte paritaire de parvenir à un accord
;
« Considérant qu'entre la commission mixte paritaire et l'examen du texte en
nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, il s'est écoulé à peine plus de
vingt-quatre heures ;
« Considérant que l'Assemblée nationale, en nouvelle lecture, s'est ainsi
contentée de modifier son propre texte de première lecture, reprenant toutefois
quelques amendements rédactionnels adoptés par le Sénat ;
« Considérant que le texte adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle
lecture, s'il maintient en apparence un régime concurrentiel, met fin à toute
liberté dans la fixation des cotisations ; que ce texte augmente de manière
mécanique les prélèvements obligatoires ;
« Considérant que les chiffres fournis sur les futures cotisations des
exploitants agricoles reposent sur des estimations fragiles, variables et
contestables ; que l'absence d'étude d'impact a empêché d'analyser avec
précision les conséquences juridiques et financières de ce texte législatif
;
« Considérant que la proposition de loi prévoit de passer sans transition d'un
régime où les garanties obligatoires étaient très faibles à un système où les
exploitants agricoles bénéficieront de l'intégralité des prestations ; que
cette réforme, aussi généreuse soit-elle, risque d'augmenter les charges des
exploitants agricoles ;
« Considérant que ses conséquences sur les dépenses publiques ont été
insuffisamment analysées ; que l'existence avérée de transferts entre la
branche maladie et la branche accidents du travail, à supposer qu'il y soit mis
fin, nécessitera de faire bénéficier le nouveau régime, compte tenu de son
mécanisme « auto-équilibré », de recettes conséquentes ;
« Considérant que le maintien de faibles prestations, dans la branche maladie,
nécessitera un alignement sur celles de la nouvelle branche accidents du
travail et imposera ainsi de nouvelles dépenses ; qu'en l'absence d'un tel
alignement, la réforme comporte un effet pervers d'importance ;
« Considérant que le rôle confié à la caisse centrale de mutualité sociale
agricole de gérer un fonds de réserves ne fait pas partie des missions
traditionnelles de cet organisme ;
« Considérant que l'articulation entre le rôle de la Mutualité sociale
agricole et celui des assureurs reste mal définie ; que les organismes de
protection sociale complémentaire pourraient être soumis à une forme de
concurrence déloyale ;
« Considérant que, dès lors, la question de l'indemnisation des organismes
assureurs se pose légitimement et que la simple étude de cette question, à
travers un rapport déposé par le Gouvernement, a été écartée par l'Assemblée
nationale ;
« Considérant en définitive que l'Assemblée nationale a entendu dire son
dernier mot dès la nouvelle lecture ;
« Décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur la proposition
de loi portant amélioration de la couverture des non-salariés agricoles contre
les accidents du travail, de la vie privée et les maladies professionnelles,
adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture (n°
19, 2001-2002). »
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement
du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative
ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour
quinze minutes, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond
et le Gouvernement.
La parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée
n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About,
rapporteur.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers
collègues, je n'ai rien à ajouter à mon propos liminaire. Je considère que
cette motion est défendue.
M. le président.
La parole est à Mme Printz, contre la motion.
Mme Gisèle Printz.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, chacun
s'accorde à reconnaître que le régime des accidents du travail et maladies
professionnelles des exploitants agricoles souffre d'un besoin urgent de
réformes. Le constat est, sur ce point, unanime.
Il était donc de la responsabilité du Gouvernement de prendre de nouvelles
dispositions, ce qu'il a entrepris en s'appuyant sur la proposition de loi de
notre collègue député Jacques Rebillard. Il convient de rendre hommage au
ministre de l'agriculture non seulement d'avoir entrepris cette tâche difficile
mais de la mener actuellement à bien.
Le constat, dis-je, est unanime. Notre rapporteur le résume d'ailleurs
excellemment : une législation ancienne - elle date de 1966 - et confuse,
puisque les accidents du travail et de la vie privée ne sont pas distingués, ce
qui ne correspond plus du tout aux modalités actuelles de travail sur une
exploitation agricole.
En outre, si l'assurance privée obligatoire garantit le remboursement des
soins sans ticket modérateur, la pension d'invalidité n'est effective que si
l'assuré est reconnu totalement inapte à l'exercice de sa profession, ce qui
n'est pas le cas le plus fréquent.
Par ailleurs, de nombreuses prestations ne sont pas prévues dans l'assurance
de base obligatoire, comme la rente en cas d'incapacité de travail inférieure
aux deux tiers ou en cas de décès, ou les indemnités journalières et les frais
funéraires. De surcroît, le montant des pensions servies est dérisoire au
regard du dommage subi et ne permet même pas la survie de la famille.
On relève, enfin, malgré une transmission des données aléatoire par les
organismes d'assurance, que 20 % environ des exploitants ne sont pas couverts,
en violation de l'obligation. Il ne s'agit là que d'une moyenne. Les chiffres
sont parfois beaucoup plus alarmants ce qui conduit à une prise en charge, en
dernier recours, des accidents du travail par l'assurance maladie des
agriculteurs, là encore en violation des règles. On ne peut donc pas parler
d'une véritable couverture sociale efficace et organisée.
S'agissant de l'assurance complémentaire facultative, mise en place par la loi
de 1972, elle ne couvre plus que 7,8 % des exploitants et ne survit que grâce
aux subventions de l'Etat.
Je rappelle que la MSA n'a pas, à l'époque, été autorisée - c'est regrettable
- à proposer ces contrats, dont les indemnités planchers s'élevaient pourtant à
50 000 francs annuels en fonction du gain déclaré par l'assuré.
En revanche, les assurances privées proposent aux exploitants et à leur
famille des contrats globaux - assurance obligatoire et assurance
complémentaire - en omettant de prendre en compte la spécificité du risque
professionnel. Les indemnités servies à ce titre sont faibles : en moyenne, 24
300 francs pour une inaptitude totale et 18 000 francs pour une inaptitude
partielle.
Cette activité, comme l'a souligné à bon escient M. le rapporteur, semble
lucrative, avec un taux de marge de 30 % après provisionnement des risques. Dès
lors, les bénéfices ainsi dégagés pourraient être largement consacrés à des
actions de prévention sachant qu'il y a 40 000 accidents du travail dans le
monde agricole par an. Mais tel n'est pas le cas puisque 4,5 % seulement du
montant des primes est consacré à la prévention.
Il est véritablement regrettable que les organismes privés d'assurances
n'aient formulé leurs propositions d'amélioration partielle des prestations
actuellement servies que lorsque le système actuel est apparu menacé.
La situation que je viens brièvement d'exposer n'est pas satisfaisante. Il
convient d'établir un système financièrement clair et socialement juste.
J'observe d'ailleurs, devant les défenseurs du monde rural et de la propriété
privée qui siègent en nombre dans cet hémicycle, que la survivance de ce
système archaïque a pour conséquence de défavoriser grandement les exploitants
agricoles par rapport à leurs salariés. Ceux-ci bénéficient en effet depuis
longtemps d'une véritable sécurité sociale.
Logiquement, le choix qui a été fait en concertation avec les organisations
professionnelles est celui de la création d'une nouvelle branche du régime de
sécurité sociale.
Plusieurs objectifs sont visés : l'institution d'indemnités journalières d'un
montant de 115 à 150 francs ; l'augmentation du niveau des rentes, qui pourront
atteindre 70 000 francs en cas d'incapacité totale ; l'introduction de la
notion d'incapacité au lieu de l'inaptitude, ce qui placera les exploitants
agricoles dans la même situation que les salariés au regard des barèmes
d'indemnisation ; le versement d'une rente aux ayants droit ; enfin, la prise
en charge des frais d'obsèques.
La question des retraités et de leurs conjoints intervenant sur l'exploitation
de leurs héritiers est réglée de façon satisfaisante.
Comme dans les autres professions, il est normal que les personnes qui
exercent non plus en leur nom ou en tant que salariés mais en tant que
bénévoles soient couvertes par une assurance volontaire. En revanche, les
conjoints collaborateurs d'exploitant seront assurés moyennant une cotisation
réduite.
Les financements seront enfin clarifiés. Le nouveau régime de l'AAEXA sera
financé non plus par des primes de nature privée mais par des cotisations de
nature publique. Il devient donc une branche de la sécurité sociale et relèvera
du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Les cotisations seront
différentes pour l'exploitant et son conjoint ou pour l'aide familial, ce qui
est très important pour les femmes d'exploitants, qui sont ainsi enfin
reconnues socialement.
Le Gouvernement s'engage à veiller à ce que les dépenses soient intégralement
couvertes par les cotisations, les organismes assureurs et les organisations
professionnelles étant associés à la détermination des tarifs. L'examen des
comptes du régime par le Parlement nous semble apporter à cet égard des
garanties de transparence satisfaisantes.
Pour les agriculteurs, le surcoût final de la cotisation obligatoire au titre
des accidents du travail ne devrait être que de 13 %, la prime annuelle moyenne
passant de 1 525 francs à 1 730 francs, soit une augmentation très modique au
regard des améliorations et de la clarification de la garantie.
C'est aussi la fin de la globalisation, avec une organisation transparente du
régime. Tout en maintenant le libre choix de l'assuré, ce qui est fondamental
en l'espèce, il incombera aux organismes assureurs de se regrouper au sein
d'une personne morale indépendante et de signer une convention avec la caisse
centrale de la MSA.
Les caisses de MSA seront le pivot de cette organisation dont elles assureront
l'indispensable coordination. Surtout, des actions généralisées de prévention
pourront enfin être développées au bénéfice des assurés.
Un point demeure délicat : l'AMEXA, l'assurance maladie des agriculteurs,
servira pour les accidents de la vie privée des prestations plus faibles que le
régime actuel de l'AAEXA, puisque le ticket modérateur s'appliquera.
Compte tenu de l'infériorité de 2,7 % du taux de cotisation des exploitants
par rapport au taux du régime général, les indemnités journalières ne seront
pas ouvertes en cas de maladie. Il est vrai cependant que le maintien de ce
différentiel de 2,7 % correspond à une demande des organisations agricoles.
Il conviendra également de relever le montant des pensions d'invalidité
servies par l'AMEXA, qui reste insuffisant par rapport au futur niveau des
pensions de l'assurance accidents.
On ne peut cependant reprocher au Gouvernement de donner aux exploitants
agricoles des garanties décentes en matière d'accidents du travail et de
maladies professionnelles.
Au total, au-delà du présent texte et des abondants commentaires qu'il a
suscités, il est nécessaire de « revisiter » et de réformer la protection
sociale des agriculteurs.
Nous nous préoccupons aujourd'hui de leur protection contre les accidents du
travail et les maladies professionnelles. Le problème est en passe d'être
résolu avec le consensus des organisations professionnelles.
Cette modification portant sur un secteur de la protection entraîne cependant
une réflexion sur le fonctionnement global de l'assurance maladie. Nous savons
bien, en effet, que le niveau des pensions de retraite des agriculteurs est
scandaleusement faible au regard des efforts qu'ils ont fournis durant leur vie
entière et de leur contribution à la prospérité du pays. Si la France est une
grande nation agricole, ce ne sont ni la majorité des agriculteurs ni les
retraités de l'agriculture qui en bénéficient !
Une proposition de loi relative à la retraite complémentaire des agriculteurs
a été déposée à l'Assemblée nationale par nos collègues députés du groupe
socialiste. Elle permettrait de mettre les agriculteurs à parité avec les
autres professions.
Nous souhaitons que la protection sociale des exploitants agricoles et de
leurs conjoints soit bientôt équivalente à celle de leurs concitoyens.
C'est pourquoi le groupe socialiste du Sénat soutient votre action, monsieur
le ministre, et approuve pleinement la proposition de loi qui nous est soumise.
La motion tendant à opposer la question préalable déposée par M. le rapporteur
n'en est à nos yeux que plus inopportune. Nous voterons donc contre cette
motion.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du
groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le président,
permettez-moi, avant de répondre à l'argumentation qui fonde cette motion, de
vous féliciter à l'occasion de cette première présidence.
M. le président.
Je vous remercie, monsieur le ministre.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Tout d'abord, qu'est-ce
qu'opposer la question préalable ? Selon les règlements de nos assemblées,
c'est décider qu'il n'y a pas lieu de débattre d'un texte.
Or je considère, pour ma part, qu'il y a lieu de débattre de la présente
proposition de loi parce que la réforme qu'elle contient est indispensable.
S'il fallait s'en convaincre, il suffirait d'ailleurs de lire l'excellent
rapport élaboré par M. Seillier pour la première lecture, en tout cas la partie
de ce rapport où il se livre à un constat.
M. Seillier soulignait ainsi de manière très explicite, et je ne peux que
l'approuver, premièrement, que le système en vigueur servait des prestations
très insuffisantes, deuxièmement, qu'il n'offrait pas une couverture
universelle et, troisièmement, qu'il ne mettait pas en place des politiques de
prévention rigoureuses.
Il s'agit donc bien d'un constat de déficience du système de couverture du
risque accidents du travail des agriculteurs, et c'est un constat qui, je
crois, a fait l'unanimité.
Or, si le système est déficient, il faut le réformer, et c'est pourquoi il y a
lieu de débattre d'un texte qui vise à remédier à ses inconvénients.
Trois arguments ont été avancés à l'encontre de ce texte.
En premier lieu, selon mon ami le sénateur Jacques Pelletier, une majorité
d'agriculteurs serait contre la réforme. J'ignore où il situe cette majorité,
car, que je sache, les administrateurs de la MSA sont des agriculteurs et ils
sont démocratiquement élus ! Les agriculteurs considèrent d'ailleurs la MSA
comme « leur » système de sécurité sociale, parce qu'ils élisent directement
ses gestionnaires.
Les agriculteurs ne sont donc pas du tout en désaccord avec la présente
proposition de loi puisqu'elle recueille un accord profond dans tous les rangs
de la MSA, de la base au sommet.
Il ne faut pas opposer ainsi « une majorité d'agriculteurs » à une MSA qui ne
serait qu'un simple instrument technocratique ou bureaucratique, alors que ce
sont les agriculteurs eux-mêmes qui la gèrent !
En deuxième lieu, il me paraît incongru, monsieur le rapporteur, de nous
reprocher le fait que le conseil supérieur des prestations sociales agricoles
ait été amené à se prononcer sur les projets de textes d'application de la
future loi.
On reproche souvent au Gouvernement - il m'est arrivé de le faire en tant que
parlementaire de la majorité ou de l'opposition, car, dans les deux cas, c'est
toujours le même procès - de tarder à prendre des décrets d'application et de
ne pas informer préalablement le Parlement sur le contenu de ces textes. En
l'espèce, monsieur le rapporteur, tout était sur la table avant le vote
définitif de la loi précisément afin que vous puissiez juger du contenu des
projets de textes d'application !
Vous dites que, dans ces projets de textes d'application, nous avons considéré
a priori
que l'Assemblée nationale aurait le dernier mot. J'aurais ainsi
« préempté » le débat.
Mais, monsieur le rapporteur, c'est bien en vertu de la Constitution que
l'Assemblée nationale a le dernier mot. J'ai donc pensé que si une version du
texte avait davantage de chance d'être adoptée que l'autre, c'était plus
probablement celle de l'Assemblée nationale que celle du Sénat. Ce n'était pas
faire preuve d'esprit partisan, c'était faire un simple constat objectif.
Reste, en troisième lieu, la question importante, soulevée par M. About, de
l'indemnisation des assureurs.
Je m'en suis entretenu avec les responsables de Groupama, et je ne crois pas
que ceux-ci entreprendront une quelconque démarche en vue d'obtenir une « juste
indemnisation ». En effet, ils ne sont en rien spoliés : le compte
d'exploitation de Groupama à la fin de 2000 - ce sont les derniers chiffres
dont nous disposions, on verra ce qu'il en sera en 2001 - fait apparaître que,
pour la couverture du risque « accidents du travail », le montant des primes
encaissées s'élève à 590 millions de francs, alors que les prestations versées
atteignent 237 millions de francs.
L'excédent brut est donc d'environ 360 millions de francs. Il faut certes en
déduire des frais de gestion et les nécessaires provisions. Même en les
estimant au maximum - ils font l'objet d'un consensus, sur lequel nous nous
sommes fondés, entre les assureurs, Groupama et la MSA - et en se reportant aux
frais passés, on obtient, avec quelque 305 millions de francs de prestations
versées, de frais de gestion et de provisionnement, un excédent de 290 millions
de francs au bas mot.
Par conséquent, on ne pourra pas parler de spoliation si le nouveau système
aboutit à une légère réduction de cet énorme excédent, qui représente plus de
la moitié du chiffre d'affaires.
M. Guy Fischer.
C'est exceptionnel !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Non, ce n'est pas exceptionnel,
car c'était davantage encore l'année précédente.
M. Guy Fischer.
Le montant est exceptionnel !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Nous sommes d'accord, monsieur
le sénateur !
D'une certaine manière, les spoliés étaient les agriculteurs, qui étaient mal
couverts par le risque accident du travail. Nous faisons ici, en quelque sorte,
oeuvre de justice.
Par conséquent, j'estime qu'il y a vraiment lieu de débattre de ce texte, et
je souhaite que nous puissions le faire.
M. Nicolas About,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About,
rapporteur.
Sans vouloir m'étendre sur le sujet, je souhaite tout de même
apporter quelques précisions en réponse à M. le ministre.
Premièrement, au sujet de la question préalable, monsieur le ministre, si nous
avons fait le constat qu'il n'y avait pas lieu de débattre, c'est à cause du
Gouvernement. Vous nous avez en effet signifié que l'Assemblée nationale aurait
le dernier mot, comme je l'ai dit tout à l'heure. Quand vous avez présenté les
projets de décret du 8 septembre, votre idée était que, de toute façon, le
dernier mot reviendrait aux députés et que peu vous importait, dès lors, la
discussion au Sénat. C'est donc bien le Gouvernement qui nous a fait comprendre
qu'il n'y avait pas lieu de débattre au Sénat.
Deuxièmement, vous nous dites qu'il y a là un dossier important et urgent à
régler. Dans ces conditions, je m'étonne que le Gouvernement n'ait pas cru bon
de déposer un projet de loi. J'en déduis qu'il ne souhaitait pas débattre sur
ce sujet.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Vous êtes donc contre
l'initiative parlementaire !
M. Guy Fischer.
Très bonne remarque !
M. Nicolas About,
rapporteur.
Pas du tout, je ne suis pas contre l'initiative
parlementaire, qui est là pour compenser, la plupart du temps, les carences du
Gouvernement.
M. Alain Vasselle.
Très bien !
M. Nicolas About,
rapporteur.
Mais, très curieusement dans cette affaire, le Gouvernement
profite de l'action parlementaire pour nous priver du débat que nous avons
nous-mêmes décidé d'instaurer.
Et comment le Gouvernement s'y prend-il, alors qu'il ne pensait pas du tout
débattre de cette question ? Il demande l'urgence. Et l'urgence, nous le savons
bien, revient à couper la parole purement et simplement au Sénat.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Bien sûr que non !
M. Nicolas About,
rapporteur.
Mais si ! Donc ce Gouvernement, qui n'avait absolument pas
prévu de parler de ce sujet - pas de projet de loi, pas d'avis du Conseil
d'Etat, rien ! -, tout d'un coup, découvre l'urgence du débat et sort les
décrets encore plus vite - ou presque - que la proposition de loi. C'est tout
de même assez fantastique !
Vous ne nous ferez pas croire que c'est le Sénat qui décide qu'il n'y a pas
lieu de débattre. Au contraire, nous avons cherché un consensus. Nous étions
prêts à toutes les discussions et nous ne voulions pas que les agriculteurs
soient les spoliés dans cette affaire.
Nous avons donné notre accord pour que vous puissiez encadrer les tarifs par
arrêté. La solution que nous proposons ne va donc pas du tout mettre les
agriculteurs en difficulté, ni permettre aux assurances de s'en mettre plein
les poches.
Notre solution vise à éviter aux agriculteurs d'être purement et simplement
livrés à la MSA au tarif que vous aurez décidé.
Enfin, la MSA, c'est, certes, des exploitants agricoles, mais ce n'est pas un
syndicat. Or les syndicats sont manifestement favorables à la proposition du
Sénat. Je regrette d'autant plus que nous n'ayons pas pu continuer cette
réflexion tranquillement, comme le jeu de la navette le permet.
Ainsi, par la volonté du Gouvernement, qui, non seulement n'a pas voulu ce
débat, mais a mis fin à celui qui était initié par les parlementaires
eux-mêmes, nous arrivons à la solution qu'il préconisait depuis longtemps.
(Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix la motion n° 1.
M. Serge Franchis.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Franchis.
M. Serge Franchis.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en juin
dernier, lors de l'examen par le Sénat de la proposition de loi sur la
couverture des non-salariés agricoles contre les accidents du travail, le
groupe de l'Union centriste, bien que tout à fait conscient des déficiences du
régime actuel, avait exprimé ses plus vives réticences à l'égard de ce texte
vraisemblablement inspiré par le Gouvernement.
Permettez-moi de revenir très rapidement sur les défauts majeurs, selon nous,
de cette proposition de loi.
Faute, sans doute, de ne pas avoir entendu l'avis des premiers concernés,
c'est-à-dire les exploitants agricoles, représentés par leurs syndicats, cette
proposition de loi ne tient pas compte de certaines spécificités de la
profession. C'est l'objet de la première grande critique.
La préférence de la profession pour une autonomie dans la gestion des
accidents du travail dans un cadre concurrentiel est ignorée, le texte
prévoyant la création d'un nouveau risque de sécurité sociale
La deuxième grande critique faite par les principales organisations syndicales
agricoles porte sur le risque d'une augmentation très sensible des
cotisations.
En première lecture, nous avons évidemment soutenu les propositions de la
commission des affaires sociales en faveur du maintien d'un régime
concurrentiel. Telle est la volonté de la plupart des exploitants agricoles
attachés à leur espace de liberté dans ce domaine. La création d'un nouveau
risque est facteur de plus de contraintes pour les agriculteurs et d'une
augmentation de leurs charges.
La Mutualité sociale agricole recevant par ailleurs la gestion du contrôle de
l'obligation d'assurance, l'animation de la prévention et le contrôle médical,
le dispositif proposé par la commission des affaires sociales du Sénat était
équilibré.
L'Assemblée nationale et le Gouvernement n'ont pas cru bon de le retenir. Nous
le déplorons, et c'est pourquoi le groupe de l'Union centriste votera la
question préalable.
M. Michel Moreigne.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Moreigne.
M. Michel Moreigne.
Monsieur le président, je veux tout d'abord saluer votre première présidence
et m'associer aux compliments qui vous ont été adressés.
M. le président.
Je vous remercie, mon cher collègue.
M. Michel Moreigne.
En fait, mon intervention tient plus du rappel au règlement que de
l'explication de vote.
En effet, je constate que M. le rapporteur est intervenu deux fois.
M. Nicolas About,
rapporteur.
Je suis aussi président de la commission !
M. Michel Moreigne.
Vous avez donc deux chapeaux, monsieur le rapporteur, l'un de président de la
commission des affaires sociales et l'autre de rapporteur.
Cette double intervention n'est conforme ni aux traditions de notre assemblée
ni au règlement qui s'applique habituellement dans cette enceinte. Depuis
vingt-neuf ans que je siège ici, c'est bien la première fois que j'assiste à
une telle anomalie.
M. Alain Vasselle.
C'est dur d'entendre des vérités !
M. Nicolas About,
rapporteur.
Pardonnez une erreur de jeunesse !
(Sourires.)
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole et à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Si l'insuffisance du régime actuel de couverture du risque d'accidents du
travail des non-salariés agricoles fait l'unanimité, la solution proposée par
ce texte au monde agricole pour y remédier est bien loin, à mon sens, de
recevoir de sa part un accueil aussi favorable.
Ainsi que M. le ministre l'a fait remarquer lors de nos précédents débats, la
question relève d'un choix politique. Nous pouvons constater aujourd'hui que la
réponse est idéologique.
Il existe deux solutions pour organiser un nouveau régime plus performant.
La première consiste à créer une nouvelle branche de sécurité sociale dont la
gestion serait confiée à la MSA. C'est la voie facile, uniforme, étatique dont
les conséquences ne sont pourtant pas anodines ; c'est celle que vous avez
choisie ; monsieur le ministre.
En effet, les agriculteurs peuvent très légitimement craindre que leurs
cotisations, qui seraient désormais fixées par l'Etat, n'augmentent, puisque le
régime a vocation à s'auto-équilibrer. Or, dans le contexte actuel de la crise
qui entoure la profession, il est essentiel de ne pas alourdir leurs
charges.
De plus, cette solution évince les assureurs d'un marché qui représente pour
eux une activité non négligeable ; ils devraient être indemnisés.
C'est donc une solution coûteuse dont l'efficacité reste à prouver, en raison
de l'absence d'étude d'impact préalable.
L'autre voie, celle qu'a choisie le Sénat, et dont M. About vient de se faire
l'écho, consiste à mettre en place un système ouvert, où chaque acteur aurait
sa place et où les agriculteurs, les viticulteurs, les éleveurs et autres
conserveraient leur libre arbitre. Cette solution présente l'avantage d'une
nette amélioration des prestations sans faire craindre un alourdissement
excessif des cotisations.
Le Gouvernement a donc choisi la première solution en dépit de l'opposition
affichée d'une large partie de la profession agricole, comme l'a souligné M.
Jacques Pelletier. Il a retenu cette option en dépit de l'absence d'études
d'impact, qui a empêché d'analyser avec précision les conséquences juridiques
et financières de ce texte législatif - on comprend pourquoi l'urgence a été
déclarée ! - en dépit de l'insécurité juridique et de la distorsion de
concurrence créée entre les différents organismes concernés.
Permettez-moi, monsieur le ministre, de revenir sur trois points de votre
propos.
Premièrement, en réponse, en particulier, à notre collègue Jacques Pelletier,
vous avez dit que, selon vous, il y avait bien un très large accord de
l'ensemble de la profession agricole puisque le conseil d'administration de la
MSA n'est composé que d'agriculteurs.
Cela signifie-t'il qu'il faut réduire la représentation du monde agricole à
ceux qui siègent dans le conseil d'administration de la MSA ? Ainsi, les
représentants de la FNSEA, les représentants des chambres d'agriculture, du
CNJA et autres compteraient pour quantité négligeable et leur avis n'aurait pas
à être pris en considération ?
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Ce sont souvent les mêmes !
M. Guy Fischer.
Il y a consensus !
M. Alain Vasselle.
C'est une vision un peu surprenante. Etrange conception de la démocratie et du
rôle représentatif des syndicats que celle du Gouvernement !
M. le ministre, si vous aviez effectivement tenu compte de l'avis de la
profession, vous n'auriez certainement pas fait adopter ce texte. Tout au moins
le Gouvernement n'aurait pas donné un avis favorable à l'inscription de cette
proposition de loi à l'ordre du jour du Parlement.
Deuxièmement, dois-je conclure, monsieur le ministre, du fait que la
Constitution donne la possibilité à l'Assemblée nationale d'avoir le dernier
mot sur tous les textes de loi ordinaires, que le Sénat doit dorénavant
s'attendre à devoir systématiquement opposer la question préalable au motif que
le dialogue de sourds va continuer, que le texte définitif sera toujours la
version qu'aura retenue l'Assemblée nationale et que le pouvoir d'amendement du
Sénat sera considéré comme quantité négligeable ? Une telle situation
signifierait que vous refusez le dialogue avec la Haute Assemblée pour éviter
d'introduire des avancées significatives dans les textes législatifs.
Vous avez une curieuse conception, assez réductrice, du fonctionnement du
Parlement ! Les Françaises et les Français ont de quoi s'inquiéter. J'espère
qu'ils sauront en tirer les conséquences.
J'en viens aux incidences financières. Vous avez fait valoir que Groupama
n'avait pas trop à se plaindre de cette situation parce que cette compagnie
présenterait après tout prélèvement un résultat positif, près de 300 millions
de francs.
Vous affirmez que la profession agricole, qui sera mieux indemnisée, va, en
définitive, faire une excellente opération. Faut-il en déduire que les
cotisations ne pèseront pas plus lourdement sur le budget des agriculteurs ?
Je terminerai en donnant quelques chiffres. Les simulations faites par
l'ensemble des organisations professionnelles agricoles montrent qu'avec notre
système, en y intégrant l'ensemble des mesures que vous souhaitez mettre en
oeuvre dans le cadre de votre dispositif, la cotisation aurait été de 2 630
francs ou 2 740 francs.
Avec le vôtre, elle serait d'environ 3 200 francs. Cela signifie que le
transfert de cette charge du système de l'assurance à la MSA se traduira
inévitablement par une augmentation des cotisations, sans qu'il y ait, en
contrepartie, une valorisation suffisante des indemnités au profit de la
profession. Voilà quel sera le résultat !
Il faut que l'ensemble de la profession agricole mais également l'opinion
publique le sachent : le Gouvernement fait fi des véritables soucis de gestion
publique qui devraient être les siens. L'exemple en a d'ailleurs été donné avec
la gestion de la sécurité sociale. Nous poursuivons toutefois les mêmes
errements. Telle est la politique du Gouvernement.
C'est la raison pour laquelle la commission des affaires sociales et le Sénat
n'ont d'autre solution que d'adopter la question préalable.
(Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Sans trop prolonger ce débat,
je tiens à répondre à M. Vasselle, car il cite des chiffres que je veux
démentir, en particulier sur les cotisations.
Les chiffres auxquels nous aboutissons - après les évolutions que M. le
rapporteur conteste, mais qui sont le fruit d'un travail avec toutes les
parties - sont des chiffres consensuels. Ils font l'objet d'un accord de la
Mutualité sociale agricole, des assureurs - donc de Groupama, monsieur Vasselle
- et du ministère : les cotisations seront de l'ordre de 1 900 ou 1 950 francs
par exploitation.
Ce chiffre est à comparer non pas aux 1 500 francs de cotisation antérieure
par exploitation, mais aux 5 000 francs qui correspondent aux cotisations de
base ajoutées aux cotisations des régimes complémentaires, soit respectivement
1 500 francs et 3 500 francs.
Dire aujourd'hui que ce texte aboutira à un alourdissement des charges pour
les agriculteurs, en tout cas à prestations égales, c'est une contrevérité que
je veux absolument souligner.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix la motion n° 1, tendant à opposer la question préalable,
repoussée par le Gouvernement, et dont l'adoption aurait pour effet d'entraîner
le rejet de la proposition de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des
affaires sociales.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Nombre de votants | 317 |
Nombre de suffrages exprimés | 315 |
Majorité absolue des suffrages | 158 |
Pour l'adoption | 205 |
Contre | 110 |
En conséquence, la proposition de loi est rejetée.
MM. Alain Vasselle et Alain Gournac. Très bien !
4
NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE
M. le président.
J'informe le Sénat que la candidature présentée par le groupe du Rassemblement
démocratique et social européen à la délégation du Sénat aux droits des femmes
et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes a été affichée et n'a
fait l'objet d'aucune opposition.
En conséquence, cette candidature est ratifiée, et je proclame M. Yvon Collin
membre de la délégation du Sénat aux droits des femmes et à l'égalité des
chances entre les hommes et les femmes.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons
interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures vingt, est reprise à quinze
heures.)
M. le président. La séance est reprise.
5
QUESTIONS D'ACTUALITÉ
AU GOUVERNEMENT
M. le président.
L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
M. le président du Sénat, contrairement à la coutume, ne préside pas
aujourd'hui la séance des questions d'actualité. Il assiste en effet en ce
moment même aux obsèques de notre collègue Martial Taugourdeau, en la
cathédrale de Chartres.
Conformément à la règle posée par la conférence des présidents, je rappelle
que l'auteur et le ministre disposent chacun de deux minutes trente.
Chaque intervenant aura à coeur de respecter le temps imparti, afin que toutes
les questions et toutes les réponses puissent bénéficier de la retransmission
télévisée.
TROUBLES À THONON-LES-BAINS
M. le président.
La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question
s'adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, en ma qualité de sénateur-maire et de
vice-président tant de l'association des maires de mon département que de
l'association des maires de France, j'appelle votre attention sur les
situations fort préoccupantes que m'ont signalées mes collègues élus de
Thonon-les-Bains, Gaillard et Cluses.
Ces derniers jours, des actes d'une particulière violence se sont déroulées
dans ces trois villes de Haute-Savoie : des voitures incendiées, des cocktails
Molotov lancés, un commissariat attaqué, le procureur de la République et le
directeur des polices urbaines agressés physiquement.
Par ailleurs, une pétition est venue relayer les nombreux courriers adressés
par les maires aux représentants de l'Etat ou à vous-même, monsieur le ministre
de l'intérieur, courrier, qui n'ont souvent pour seule réponse qu'un accusé de
réception.
Tous ces actes de violence se sont déroulés en l'espace d'une semaine dans ce
département, qui est le premier département touristique de France, situé en
zone frontalière avec la Suisse, et qui devrait de ce fait disposer de moyens
en personnel et matériel adaptés à une population de 1 500 000 habitants et non
pas aux 600 000 habitants recensés.
Les élus locaux sont excédés, et ceux qui sont issus des dernières élections
municipales découvrent avec stupeur l'importance de la tâche et leur
impuissance à juguler cette insécurité. Ils se sentent beaucoup trop seuls face
à ce problème.
Soucieux d'un retour rapide à une situation normalisée en Haute-Savoie, comme
sur le territoire national, êtes-vous prêt, monsieur le Premier ministre, à
engager une véritable réforme et à faire de la sécurité de nos concitoyens une
réelle priorité non seulement sur le papier, mais aussi sur le terrain ?
Etes-vous prêt à dégager les forces de police et de gendarmerie des tâches
administratives, excessivement consommatrices de temps ? Etes-vous prêt à
accepter la réalité actuelle qui impose des moyens supplémentaires, surtout la
nuit, avec des personnels ayant une solide formation et des moyens matériels
suffisants non seulement en cas de troubles, mais aussi de façon préventive et
constante ?
Le groupe de l'Union centriste auquel j'appartiens prendra prochainement une
initiative en ce domaine.
Je souhaite ici rendre hommage à l'ensemble des personnels chargés d'assurer
la sécurité publique qui accomplissent un travail remarquable en dépit,
parfois, d'un manque de moyens.
Qu'allez-vous faire pour gérer en même temps l'insuffisance des effectifs et
la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail ? Nous attendons sur ce
sujet une réponse réaliste.
Monsieur le Premier ministre, comme vous le savez aussi bien que moi, un Etat
manque à sa mission quand il ne peut plus assurer la sécurité de ses
concitoyens.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
Au moment où s'ouvre cette séance de questions
d'actualité au Gouvernement et où M. le président du Sénat et nombre de ses
collègues assistent aux obsèques de Martial Taugourdeau, je tiens, avant même
qu'un hommage soit rendu, à ce dernier dans cet hémicycle, à exprimer la
solidarité et la compassion du Gouvernement à l'égard de sa famille et de la
Haute Assemblée.
Monsieur le sénateur, le 13 octobre dernier, à Evian-les-Bains, vers une heure
quarante-cinq, deux policiers affectés au commissariat de police de
Thonon-les-Bains ont tenté de procéder au contrôle d'un automobiliste. Il
s'agit là, tout particulièrement, dans les circonstances actuelles, d'une
mission de police classique et nécessaire, « banale » dirais-je même si ce mot
n'était pas souvent inapproprié aux missions de police. Le conducteur s'est
soustrait au contrôle et a pris immédiatement la fuite à très vive allure dans
les rues de la ville. Il a perdu la maîtrise de son véhicule et a percuté
violemment un mur. Les quatre personnes à bord sont décédées sur le coup.
Aucune poursuite automobile n'a été engagée par les policiers au moment des
faits. Les occupants qui tous, à des titres divers, avaient déjà été impliqués
dans des procédures judiciaires ont été victimes de leur choix de vivre en
marge de la loi.
La mort accidentelle de quatre jeunes suscite toujours de la tristesse et de
la compassion à l'égard des familles, et je les exprime ici. Mais un tel
accident ne peut justifier les actes de violence et de délinquance qui ont été
commis sur les personnes et sur les biens quelques heures après les événements
de Thonon-les-Bains. Ces actes auraient pu tuer ! Ces faits sont inacceptables
et devront avoir des suites sur le plan judiciaire.
Vous avez terminé votre question, monsieur le sénateur, en évoquant le
problème de la police et de la gendarmerie, et en rendant d'ailleurs hommage -
je n'attendais pas autre chose de vous - aux policiers et aux gendarmes qui
font leur travail dans des conditions quelquefois difficiles, notamment la
nuit.
Dégager des policiers des tâches administratives, nous le faisons déjà - cela
s'appelle le « redéploiement » - notamment au service de la police de
proximité, qui n'avait pas été mise en oeuvre avant ce gouvernement et que je
généralise dans un temps limité.
Et des résultats sont là : ce matin même, la police de proximité du XIIe
arrondissement de Paris a interpellé l'un des évadés de la prison de Luynes.
(Très bien ! sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du
RPR.)
Je tiens d'ailleurs à rendre hommage à la police de proximité, notamment après
le drame survenu à Chennevières-sur-Marne, drame au cours duquel deux policiers
ont trouvé la mort. J'assisterai demain à leurs obsèques.
Il n'y a jamais suffisamment d'effectifs de police ; mais mieux vaut augmenter
les effectifs de la police nationale, quitte à grever quelque peu les dépenses
publiques, plutôt que d'en supprimer, monsieur le sénateur. Or, je regrette
vivement que, durant des années, des effectifs de police aient été supprimés et
que des départs à la retraite n'aient pas été remplacés. Pour notre part, nous
accroissons les effectifs de la police nationale puisque 6 200 postes de
policiers supplémentaires ont été créés depuis deux ans. Nous allons poursuivre
cette action ; il nous faut du temps ; mais, comme vous le voyez bien, nous
sommes sur la bonne voie.
M. Alain Lambert.
Ce sont les effectifs sur le terrain qui comptent !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
J'espère d'ailleurs que, lors de la discussion
du projet de budget pour 2002, et plus particulièrement lors de l'examen des
crédits - en forte augmentation - attribués à la police nationale et à la
création d'effectifs,...
M. Alain Lambert.
S'ils sont dans les bureaux !
M. Daniel Vaillant,
ministre de l'intérieur.
... je pourrai disposer de votre soutien !
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
SITUATION EN AFGHANISTAN
M. le président.
La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la situation
en Afghanistan et dans les pays limitrophes, les bombardements continus et
leurs conséquences sur les populations civiles et les opinions publiques des
pays musulmans suscitent beaucoup d'inquiétude. Hier, l'assassinat d'un
ministre israélien, répondant aux assassinats ciblés de responsables
palestiniens, a renforcé ce sentiment.
Dans cette crise dont chacun mesure la gravité et le risque constant
d'engrenage et de dérapage meurtriers, l'attitude des autorités françaises,
dans le cadre du respect de leurs engagements, a été d'investir le terrain
politique et diplomatique. Nos analyses et nos propositions continuent à
susciter attention et intérêt.
Au-delà des articles de presse qui, dans leur pluralisme, couvrent la
complexité des événements, il existe un immense besoin d'information.
M. le Premier ministre s'est déjà exprimé devant l'Assemblée nationale et le
Sénat ; il a réuni à Matignon les présidents de groupe et de commission. Mais
les parlementaires souhaitent, pour eux-mêmes et pour leurs concitoyens, être
régulièrement tenus au courant de l'évolution des événements et des risques de
toute nature, y compris sanitaires ; ils souhaitent être associés aux prises de
décision.
Pouvez-vous répondre concrètement à ces demandes ?
La coalition des différents pays voulant éradiquer les méthodes terroristes
est diverse. Bon nombre de pays européens, africains et musulmans ne font pas
partie du Conseil de sécurité de l'ONU. Pour autant, il est nécessaire
d'entendre leurs analyses et leurs propositions d'action. Une réunion
exceptionnelle de l'Assemblée des Nations unies nous semble particulièrement
opportune pour aboutir à une solution efficace et juste.
M. Alain Gournac.
C'est une déclaration, et non une question !
Mme Danielle Bidard-Reydet.
On peut d'ailleurs s'interroger sur les conséquences de la volonté de mettre
en place un gouvernement de talibans dit modéré.
La France est-elle prête, monsieur le ministre, avec ses partenaires
européens, à oeuvrer dans ce sens ?
(Applaudissements sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées
socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Hubert Védrine,
ministre des affaires étrangères.
Madame la sénatrice, je vous répondrai
sur les deux points principaux de votre intervention, à savoir la question du
Parlement et celle de l'ONU par rapport à cette crise.
S'agissant tout d'abord des Nations unies, je rappellerai que le Conseil de
sécurité, dès le lendemain de la tragédie, a reconnu que les Etats-Unis étaient
en état de légitime défense - de « légitime riposte », pourrait-on dire - aux
termes de l'article 51 de la Charte. Cette décision n'a été contestée par aucun
Etat membre des Nations unies.
Mais il faut surtout regarder la suite. Aux Nations unies, la question afghane
était suivie depuis un certain nombre d'années, sans succès d'ailleurs, par un
groupe dénommé « 6 + 2 », qui regroupait quelques Etats directement concernés,
sur des bases essentiellement géographiques.
Ce groupe n'est plus satisfaisant aujourd'hui. Il faut maintenant, à notre
avis, un groupe moteur réunissant les membres permanents du Conseil de sécurité
et un certain nombre d'Etats voisins.
Vous avez eu raison de souligner que tous les Etats membres sont concernés. La
prochaine assemblée générale des Nations unies, qui se déroulera dans moins de
trois semaines - c'est l'assemblée de fin septembre qui a été reportée en
raison des événements - devrait nous permettre de procéder à des consultatons
beaucoup plus larges et d'associer l'ensemble des Etats membres à la suite.
Mais que faut-il envisager pour la suite ? Ce pourrait être un rôle important
joué par l'ONU sous l'égide de laquelle devrait se produire ce processus
politique auquel nous travaillons par des contacts très nombreux que vous avez
pu observer ces derniers jours. Il faut empêcher qu'un vide du pouvoir
précipité à Kaboul n'entraîne la reprise des affrontements fratricides qui,
malheureusement, ont autant nui à ce pays que les actions ou les guerres
étrangères.
Nous travaillons donc sur ce plan pour qu'un processus politique, dans lequel
l'ancien roi, de l'avis général, devrait pouvoir jouer un rôle utile, permette
de n'exclure aucune composante, aucune faction, aucune région, aucune ethnie,
et de tenir compte de la réalité de l'Afghanistan d'aujourd'hui. Par rapport à
cela, l'ONU peut fournir un cadre, des garanties, une légitimité, peut-être
même jouer un rôle plus actif ; mais nous le verrons quand le schéma aura été
un peu plus précisément déterminé.
En tout cas, l'intention que je vous ai exprimée est claire : il faut aider le
peuple afghan à reprendre la maîtrise de son destin qui lui a échappé voilà
maintenant plus de trente ans.
J'en viens au Parlement qui, depuis le 11 septembre, a été informé très
régulièrement et le plus complètement possible par les ministres directement
concernés, et qui le sera aussi longtemps que la situation internationale
l'exigera. Un débat s'est déjà déroulé dans les deux assemblées. Chaque groupe
politique a pu exprimer officiellement ses positions, ses craintes, ses
questions.
En raison de la nature constamment évolutive de ce conflit, la France a fait
le choix d'une consultation et d'une information du Parlement en temps réel,
sous toutes les formes que cette démarche peut prendre en fonction de la
situation. Le Premier ministre s'y est engagé ici même, comme il l'avait fait
devant l'Assemblée nationale ; il en ira ainsi autant que ce sera nécessaire
pour que les parlementaires soient parfaitement au fait de l'évolution des
choses.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur
certaines travées du groupe communiste républicain et citoyen).
PLAN BIOTOX
M. le président.
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod.
Ma question s'adressait à M. le Premier ministre parce qu'elle couvre
plusieurs ministères, mais, comme mes collègues, je suis sensible à la présence
de M. le Premier ministre à Chartres aujourd'hui. Aussi, je serai heureux
d'entendre M. Kouchner, qui me répondra sans doute puisque je le cite nommément
dans ma question.
Le Gouvernement, par la voix de M. le ministre de la santé, a annoncé à la
presse que, dans le cadre du plan Biotox, des moyens budgétaires, à concurrence
de 400 millions de francs, augmentés de un milliard de francs pour l'achat
d'antibiotiques à large spectre et de vaccins contre la variole, avaient été
dégagés.
Ma question est la suivante : cet accroissement de moyens est-il financé, et
sur quelle ligne budgétaire ? Celle du ministère de la santé ou celle du
secrétariat général de la défense nationale dans le cadre du programme civil de
défense ? Je rappelle que le programme civil de défense n'est doté que de 35
millions de francs et qu'il couvre le plan Piratox, dont Biotox semble avoir
été l'un des composants. Il y a peut-être à ce propos une question à se
poser.
Par ailleurs, en dehors de celles qui concernent les médicaments, quelles sont
les autres mesures prévues et qui n'ont pas été détaillées jusqu'ici ? Je suis
de ceux qui pensent que, dans cette période difficile, nous avons besoin de
cohésion nationale, par conséquent de clarté. Les chiffres sont une chose. Ce
qu'ils recouvrent en est une autre, et nos concitoyens, me semble-t-il, ont
besoin d'informations.
Parmi ces autres mesures est-ce que figure, par exemple, la réponse à la
demande de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris, qui a déposé en juillet
dernier son plan de modernisation induisant une dotation pour faire face aux
risques radiologiques, bactériologiques et chimiques ? Cette dotation, qui
aurait dû s'élever à quelques millions de francs, a été refusée pour des motifs
budgétaires par le ministère de l'économie et des finances.
La brigade des sapeurs-pompiers comme la police, tout aussi démunie en moyens
de protection, pourraient difficilement faire face à une attaque massive. Je
fais allusion à la fois aux biocollecteurs et aux tickets réactifs, à la
gestion de communication en milieu urbain, en particulier au logiciel avec
cartographie associée qui permettrait de former l'ensemble de ces personnels à
ces risques. Tout cela est vrai pour Paris ; c'est probablement vrai aussi pour
d'autres villes françaises.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, du
RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué à la santé.
Monsieur le sénateur, les chiffres que j'ai
cités, hélas ! se modifient chaque jour en fonction des demandes.
Le milliard de francs pris sur le budget de l'Etat - sera-ce un peu plus, un
peu moins ? Je ne sais - sera consacré à l'achat d'antibiotiques spécifiques
pour le traitement, que j'espère complètement inutile, de la maladie du
charbon, qui, pour le moment, n'a pas atteint notre territoire.
Je n'ai pas mentionné certaines dépenses. Je pourrai vous en donner la liste.
Nous avons ainsi calculé qu'il nous fallait trois cents respirateurs
individuels par zone de défense. Il nous faut également des masques à gaz en
plus grande quantité, etc.
La dépense majeure est celle des antibiotiques et de la mise en fabrication de
trois millions de doses de vaccin antivariolique.
Au demeurant, monsieur le sénateur, un groupe interministériel dirigé par le
Premier ministre travaille en permanence avec les cellules de crise qui
existent dans les différents ministères. La collaboration entre le ministère de
l'intérieur, le ministère de la défense et le ministère de la santé est
permanente et tout à fait opérationnelle.
Les pompiers comme les gendarmes, la police comme les hôpitaux disposent pour
le moment de leurs moyens propres. La prise en charge des alertes, c'est-à-dire
de la première vague causée par l'envoi stupide de ces enveloppes par de
stupides citoyens dans des endroits stupides pour se venger personnellement,
s'est effectuée dans les hôpitaux de la meilleure façon possible en temps et en
heure. Nous avons ainsi répété « à blanc », si vous me permettez l'expression,
heureusement !
D'autres dangers potentiels nous menacent. Nous sommes très attentifs aux
dangers chimiques en particulier, mais il y en a d'autres.
Nous avons exposé le plan Biotox avec la plus grande transparence possible,
mais vous comprendrez qu'un certain nombre de choses ne puissent pas être
communiquées au public, par exemple l'endroit où sont stockées les matières
dont je parle.
Toutefois, pour le reste, nous essayons de garantir la plus grande
transparence possible.
D'abord, pour rassurer nos concitoyens, parce que rien n'est pire devant un
danger potentiel, en particulier devant le terrorisme, que de céder à la peur.
Déclencher la peur, c'est la première victoire des terroristes ; vous
m'accorderez que nous ne souhaitons pas leur offrir cette victoire.
Ensuite, parce que l'information est importante. Le système de secours de
notre pays est bien rodé. D'ailleurs, nous n'avons pas attendu cette année pour
nous intéresser au plan Biotox et pour faire en sorte que la prise en charge
d'éventuels dangers comme ceux auxquels nous devons faire face soit assurée de
la meilleure façon.
Comme cela a été décidé, je tiendrai le Parlement au courant tous les deux ou
trois jours de l'évolution de la question. En tout cas, il n'y a pas de
problème de budget, monsieur le sénateur.
(Applaudissements sur les travées
socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen et sur certaines travées du RDSE.)
DIFFICULTÉS DE LA FILIÈRE BOVINE
M. le président.
La parole est à M. Emorine.
M. Jean-Paul Emorine.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
Depuis bientôt un an, les éleveurs de bovins allaitants se trouvent confrontés
à une crise sans précédent. Aujourd'hui, les cours des différentes catégories
d'animaux s'effondrent ; pour certaines il n'y a plus de demande. Les éleveurs
ont perdu leurs revenus ; ils sont pour la plupart dans une grande détresse
morale et financière.
Les jeunes ne peuvent plus s'installer dans de telles conditions. Ceux qui se
trouvent dans leurs premières années d'installation quittent leur exploitation
; situation sans précédent !
A la veille de l'hivernage de leurs animaux, les éleveurs ne pourront payer
leurs fermages ni leurs annuités d'emprunt. Quel désespoir pour des femmes et
des hommes qui travaillent avec passion et sans compter leur temps !
Devant cette situation catastrophique et très préoccupante pour nos éleveurs,
monsieur le ministre, quelles décisions comptez-vous prendre dans l'immédiat,
mais aussi quelles décisions envisagez-vous à plus long terme pour assurer le
maintien de cette activité économique indispensable à la survie de notre
espace, de notre environnement et de nos communes rurales.
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de
l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le sénateur, vous avez
raison de dire que la situation de la filière bovine est très préoccupante.
Mais je tiens à vous rappeler que le Gouvernement gère cette crise à tous les
niveaux et que, depuis un an, il n'a cessé de multiplier les initiatives.
Si je voulais vous faire part d'un sentiment personnel, je vous dirais que ce
qui m'a frappé dans mes déplacements quotidiens en province, ces derniers
temps, à la rencontre des éleveurs, c'est que le désespoir auquel a laissé
place la colère et qui est presque plus inquiétant.
Après les différents plans que nous avons mis en oeuvre au mois de décembre
2000 pour faire face au démarrage de la crise, après le plan de soutien de 1
milliard de francs que nous avons mis en oeuvre en mars, après la négociation
d'un plan avec les organisations professionnelles début septembre pour engager
les dégagements de marchés sur un haut niveau parce que le système fonctionnait
mal, il a fallu coordonner les actions, et notamment les réponses des
entreprises françaises aux appels d'offres européens.
Tout cela a porté ses fruits puisque, cette semaine, enfin ! nous avons
dépassé les objectifs que nous nous étions fixés : 4 200 tonnes de viande
sortent ainsi chaque semaine.
En outre, le Premier ministre m'a autorisé, hier, à annoncer l'élaboration
d'un plan de vingt-trois mesures qui a fait l'objet de discussions avec les
organisations professionnelles, la filière bovine en particulier. Pourquoi
vingt-trois mesures ? Parce que les professionnels nous avaient posé
vingt-trois questions auxquelles nous avons apporté vingt-trois réponses.
Je rappelle les trois principales.
Première mesure : pour poursuivre le soutien financier mis en oeuvre en mars,
un nouveau volet de soutien aux revenus des éleveurs sera mis en oeuvre au mois
de décembre sur la base des statistiques des revenus agricoles de l'année 2001
; d'ores et déjà, j'ai lancé une enquête auprès des directions départementales
de l'agriculture pour déterminer, aussi précisément que possible, quelle était
l'évolution des revenus de ces éleveurs, revenus qui, vous le savez bien, sont
très différents d'un département à l'autre.
La deuxième mesure a trait à la valorisation du marché des petits veaux, en
particulier des veaux laitiers, démarche dans laquelle nous nous sommes engagés
de concert avec les professionnels. En effet, dans notre pays, ce marché n'a
pas du tout été exploité comme il l'est, par exemple, en Nouvelle-Zélande.
Avant de lancer cette démarche de valorisation économique, le Gouvernement est
prêt, à titre provisoire, à procéder à des dégagements de marchés des petits
veaux pour provoquer, si j'ose dire, la rareté de cette marchandise.
Enfin, la troisième mesure concerne le bassin allaitant. Vous avez bien raison
de le signaler, monsieur le sénateur, notre bassin allaitant constitue à la
fois notre richesse et notre faiblesse en cas de crise. En effet, ce bassin
allaitant produit des broutards que nous exportons pour l'engraissement,
notamment en Italie. Or, en cas de crise, les frontières se ferment et notre
bassin allaitant devient notre faiblesse dans la mesure où s'accumulent des
surplus de stocks, qui pèsent sur les cours.
A court terme, je souhaite que nous puissions envisager, en accord avec la
profession, une différenciation dans l'étiquetage de façon que l'on puisse
distinguer les races à viande des races de réforme de vaches laitières et que
les consommateurs sachent ce qu'ils achètent.
M. Didier Boulaud.
Très bien !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Sur un plus long terme, j'ai
chargé un haut fonctionnaire, M. Mordant, de mener un travail de fond sur le
bassin allaitant afin de déterminer les mesures que nous devons prendre pour
laisser à ce bassin sa place dans notre agriculture.
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées socialistes.)
APPLICATION DE LA LOI
SUR L'INTERRUPTION VOLONTAIRE DE GROSSESSE
M. le président.
La parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion.
Ma question s'adressait à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité,
mais je remercie Mme la secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la
formation professionnelle d'accepter d'y répondre.
Plus de trois mois après sa promulgation, la loi sur l'interruption volontaire
de grossesse, l'IVG, et sur la contraception, applicable depuis le 5 juillet
dernier, connaît des difficultés certaines dans sa mise en oeuvre, tout comme
elle en a connu avant son adoption, si l'on se réfère à l'analyse de la
délégation du Sénat aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les
hommes et les femmes.
Ainsi, la disposition phare de ce texte réformant la loi Veil de 1975, soit
l'allongement du délai légal d'IVG de dix à douze semaines, reste sans effet
dans certains établissements.
Le Planning familial et l'Association nationale des centres IVG et de
contraception dénoncent la mauvaise volonté, le refus de certains
professionnels de pratiquer des avortements entre la dixième et la douzième
semaine et, surtout, le manque d'information des médecins et du personnel
médical.
En outre, d'autres dispositions de cette même loi, telles que la suppression
de l'entretien préalable obligatoire pour les femmes majeures ou la dispense de
l'obligation de l'autorisation parentale pour les mineures sont tout autant
mises à mal dans la pratique. Des établissements ont continué, en dépit de la
loi, d'exiger l'attestation d'entretien social, la présence des parents
s'agissant des mineures, voire leur autorisation pour effectuer une anesthésie
générale.
Par ailleurs, je souhaiterais savoir, madame la secrétaire d'Etat, où en est
la parution du décret d'application de l'article de la loi qui institue des
réseaux ville-hôpital pour les IVG médicamenteuses ?
Les hôpitaux, les médecins invoquent le manque de moyens, de personnels, de
formation technique, quand ils ne se retranchent pas derrière la clause de
conscience.
La situation est urgente : nous ne pouvons pas continuer d'accepter que des
femmes soient ainsi « promenées » de service en service, d'établissement en
établissement ou, compte tenu de ces circonstances, soient obligées de se
rendre à l'étranger après avoir perdu un temps précieux.
C'est pourquoi, madame la secrétaire d'Etat, je souhaiterais connaître les
dispositions que vous entendez prendre afin que la loi soit appliquée dans
toutes ses dispositions.
Enfin, la loi relative à la contraception d'urgence votée en décembre 2000
prévoyait la délivrance gratuite aux mineures du NorLevo dans les pharmacies.
Or, dix mois plus tard, le décret n'a pas encore paru. Pouvez-vous, madame la
secrétaire d'Etat, nous en expliquer les raisons et nous rassurer quant à cette
parution, que nous espérons imminente ?
(Applaudissements sur les travées du
groupe socialiste et sur celles du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry,
secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle.
Madame la sénatrice, c'est avec beaucoup de conviction que je répondrai
partiellement à vos questions, étant certaine de la solidarité de mon collègue
et ami Bernard Kouchner, qui pourra peut-être vous faire parvenir par écrit des
précisions sur l'aspect plus médical des sujets que vous avez abordés.
Je voudrais réaffirmer d'entrée de jeu que les principales dispositions de la
loi de juillet 2001 sont directement applicables. Je crois que c'est une
information que nous devons à toutes et à tous.
Une circulaire de mise en oeuvre a été adressée le 28 septembre aux agences
régionales de l'hospitalisation, aux DRASS, les directions régionales des
affaires sanitaires et sociales, et aux établissements de santé. La diffusion
de cette circulaire auprès des médecins concernés s'achève actuellement.
Rien ne s'oppose donc - encore faut-il en avoir la volonté ! - à la prise en
compte des dispositions légales concernant l'extension du délai de dix à douze
semaines ou des dispositions relatives aux mineures ou à la stérilisation à
visée contraceptive pour les femmes et les hommes adultes qui le souhaitent.
En revanche, d'autres dispositions de la loi nécessitent la publication de six
décrets, dont la rédaction est en voie d'achèvement. Depuis le mois de juin,
tous nos services y travaillent.
S'agissant plus particulièrement des dispositions introduites dans la loi par
voie d'amendements, d'origine parlementaire tout à fait justifiés, réaliser des
études de faisabilité et de coût était nécessaire. Les enjeux sont importants
en matière de santé publique. Je suis certaine que Bernard Kouchner vous
répondra de façon plus détaillée sur ce point.
Je pense, par exemple, à l'IVG médicamenteuse, dont la faculté de prescription
est étendue aux médecins de ville ; la mise au point du décret soulève un
certain nombre de difficultés que nous devons surmonter.
Cela étant, l'ensemble des décrets, je m'y engage, paraîtront d'ici à la fin
de l'année.
Deux dossiers guides sont en cours d'élaboration. L'un porte sur les
conditions de l'IVG. Le service « droits des femmes » a été chargé de sa
rédaction, mais croyez bien que j'ai veillé personnellement à l'élaboration de
ce guide. Je m'engage à ce qu'il soit prêt dans le courant du mois de novembre.
Il en va de même concernant celui qui porte sur les aides dont peuvent
bénéficier les femmes désireuses de mener leur grossesse à terme.
Nous avons également veillé à ce que les professionnels et les associations
soient constamment impliqués dans ce travail.
J'ai, comme vous, la ferme volonté de voir l'ensemble des dispositions de
cette loi s'appliquer et de faire en sorte que les femmes qui en font la
demande aient accès à tous leurs droits.
(Applaudissements sur les travées
du groupe socialiste, ainsi que sur les travées du groupe communiste
républicain et citoyen.)
CRITIQUES À L'ENCONTRE DU SÉNAT
DANS L'OUVRAGE DE M. GLAVANY
M. le président.
La parole est à M. Bizet.
M. Jean Bizet.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture.
Monsieur le ministre, la lecture de votre ouvrage intitulé
Politique folle,
paru ces derniers jours, m'a profondément surpris et particulièrement
déçu.
Je n'émettrai aucun avis sur le commentaire que vous portez sur les travaux de
la commission d'enquête sénatoriale, illustration, je vous cite, de «
l'anomalie démocratique » d'où elle est issue ; je laisserai à chacun le soin
de juger du sectarisme et du mépris contenus dans ces propos.
(Exclamations
sur les travées socialistes.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
C'est la vérité !
M. Jean Bizet.
J'insisterai, en revanche, sur deux points.
Contrairement à ce que vous avez toujours affirmé, monsieur le ministre, le
Gouvernement n'était pas prêt à interdire les farines animales pour l'ensemble
des animaux d'élevage. Nous l'avons dit, nous l'avons écrit, et cela en nous
appuyant sur votre audition en commission des affaires économiques dans le
cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2001, le 25 octobre 2000,
où vous répondiez à mon interrogation : « L'interdiction des farines animales
est une mesure actuellement impossible à mettre en oeuvre de façon immédiate.
»
Nous nous appuyions également sur l'entretien que vous aviez accordé le 28
octobre 2000 au journal
Le Progrès
. Je vous citre encore : « La
suppression des farines animales entraînerait la fermeture de nombreux
établissements avec la mise au chômage de plusieurs milliers de salariés. »
Vous me permettrez de considérer, par parenthèse, que, si l'emploi est
important, la santé de nos concitoyens ne l'est pas moins !
Monsieur le ministre, ou bien ces deux comptes rendus ne transcrivent pas
correctement votre pensée, ou bien vous mentez !
(Protestations sur les travées socialistes.)
Par conséquent, et contrairement à ce que vous écrivez dans votre ouvrage à
la page 117, le Président de la République était précisément dans son rôle en
pressant le Gouvernement de prendre une telle décision.
Par ailleurs, à la page 151, vous soulignez : « Les auteurs du rapport en sont
arrivés, en triturant soigneusement des relevés de conclusions
ministérielles,... à faire dire à mon ministère l'inverse des positions qu'il
avait prises. »
Tout cela est faux, monsieur le ministre, ces « relevés ministériels »
demandés le 15 février, obtenus seulement le 3 mai, c'est-à-dire six jours
avant la clôture des travaux de la commission d'enquête, sont très instructifs.
Ils démontrent clairement que, si le Gouvernement a pris les bonnes décisions,
il les a prises tardivement et à partir d'acquis scientifiques qui, à l'examen,
ne pouvaient aboutir qu'à l'interdiction totale des farines animales,
interdiction qui, je le rappelle, fut prise au Royaume-Uni plusieurs années
auparavant.
(Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Marcel Debarge.
On a vu ce que cela a donné !
M. André Rouvière.
Vous « thatcherisez » !
M. Jean Bizet.
Si vous persistez à considérer que ces documents ont été falsifiés, monsieur
le ministre, pourquoi ne les publiez-vous pas ? Il s'agit du « bleu » du 15
mars 1999 et de celui du 11 juin. Je suis persuadé que la presse s'en fera
largement l'écho.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean-François Picheral.
N'importe quoi !
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le sénateur, je suis à
la fois surpris et heureux de l'honneur qui m'est fait d'entendre citer ici,
lors d'une séance de questions d'actualité, des pages de mon livre.
Ma réponse tiendra en deux points.
Tout d'abord, dans ma vie de parlementaire, il m'est arrivé de présider une
commission d'enquête. Dans cette fonction, je m'étais fixé une ligne de
conduite : parvenir à tout prix à faire voter le rapport à l'unanimité. C'était
en effet, à mes yeux, la marque indiscutable de l'honnêteté intellectuelle dans
la démarche politique.
(Très bien ! sur les travées socialistes.)
Or je constate non seulement que votre rapport n'a pas été adopté à
l'unanimité mais que les sénateurs membres de la commission d'enquête qui ne
l'ont pas voté ont organisé une conférence de presse pour dénoncer les
conditions dans lesquelles ce rapport avait été publié. Le président du groupe
socialiste, mon ami Claude Estier, a même fait un rappel au règlement à ce
sujet.
J'ai également noté que le président du Sénat lui-même avait cru devoir en
tirer des leçons puisqu'il avait dit que le règlement serait modifié pour tenir
compte de ces incidents.
Vous avez donc fait le choix d'une gestion politique de ce rapport. Si cela a
des avantages sur le plan politique, cela présente des inconvénients en termes
de crédibilité. En fait, vous voudriez avoir les avantages sans avoir les
inconvénients.
Cela m'amène à mon second point. Vous m'attaquez et vous voudriez que je
m'abstienne de me défendre. Mais, moi, je suis un homme d'honneur : quand on
m'attaque, je me défends !
(Très bien ! sur les travées socialistes.)
Cela ne vous plaît pas, mais
vous êtes-vous demandé si ce que vous aviez écrit m'avait heurté ou non ?
(Très bien ! et applaudissements sur les mêmes travées.)
M. le président.
En l'absence du président du Sénat qui, en ce moment même, comme je l'ai déjà
indiqué, assiste aux obsèques de notre collègue Martial Taugourdeau, je tiens à
préciser que le président Poncelet a réagi dès qu'il a eu connaissance des
passages de l'ouvrage de M. Glavany relatifs à la commission d'enquête du Sénat
sur les farines animales. C'est ainsi qu'il a adressé une lettre au Premier
ministre à ce sujet dès le 15 octobre.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Qu'il pose une question d'actualité !
M. le président.
Dans ce courrier, le président du Sénat a indiqué au Premier ministre que,
s'agissant du fonctionnement d'une commission d'enquête de notre assemblée, il
ne pouvait laisser passer certaines affirmations qui n'étaient pas exactes.
(Protestations sur les travées socialistes. - Très bien ! sur les travées du
RPR.)
Le président a également regretté que, sur un sujet aussi grave au regard des
éventuelles répercussions sur la santé des consommateurs, un ministre du
Gouvernement réitère des considérations polémiques auxquelles lui-même et le
président de la commission d'enquête ont déjà répondu en séance publique le 22
mai dernier.
M. Claude Estier.
Cela n'a rien à voir avec les questions d'actualité !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
C'est scandaleux !
M. le président.
A l'époque, le président avait estimé que cette mise au point mettait un terme
à une polémique que nous avions jugée stérile. Tel n'est pas le cas et nous ne
pouvons que le regretter.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de
l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines
travées du RDSE. - Vives protestations sur les travées socialistes et sur
celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. André Rouvière.
Tout cela n'est pas très conforme au règlement !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Il faut suspendre la séance !
M. Roland Courteau.
Nous demandons un droit de réponse !
Mme Hélène Luc.
Je n'ai jamais vu ça !
M. le président.
Nous allons passer à la question suivante.
(Vives protestations sur les
travées socialistes.)
M. Marcel Debarge.
C'est scandaleux !
M. André Rouvière.
C'est un abus de pouvoir !
AVENIR DE MOULINEX
M. le président.
La parole est à M. Jean-Léonce Dupont.
M. Jean-Léonce Dupont.
Ma question s'adresse à M. Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.
Le dépôt de bilan du groupe Moulinex-Brandt, le 7 septembre dernier, constitue
un séisme industriel pour la Basse-Normandie, et plus particulièrement pour les
2 300 personnes travaillant dans les quatre usines du Calvados.
A l'heure où je vous parle, le tribunal de commerce de Nanterre vient de
reporter à lundi prochain la décision de reprise. Or tout laisse penser qu'il
s'agira de la reprise très partielle de Moulinex par le groupe SEB, ce qui
entraîne la fermeture des quatre usines du Calvados et la plus grande
incertitude quant à l'avenir, à moyen terme, des autres sites bas-normands.
Votre responsabilité dans cette décision, monsieur le secrétaire d'Etat, comme
celle du Gouvernement, est totale : tous les salariés savent que, dès le
départ, vous avez privilégié la solution SEB, considérant, selon vos propres
mots du 29 septembre, que cette solution était « française, industrielle et
durable ».
Dès l'annonce du dépôt de bilan, chacun pressentait que les dés étaient pipés,
la rapidité de la procédure mise en oeuvre ne permettant pas l'examen sérieux
des propositions d'autres repreneurs.
En fait de solution industrielle française, je constate que la reprise par SEB
a pour conséquence de casser des usines performantes et profitables ; je pense
notamment à l'usine Moulinex de Bayeux, qui fabrique 1 500 000 friteuses par
an, ce qui représente 30 % du marché européen.
On connaissait des usines qui ferment parce qu'elles perdent de l'argent. On
va en connaître qui ferment parce qu'elles en gagnent !
M. Roland Muzeau.
Il fallait voter la loi de modernisation sociale !
M. Jean-Léonce Dupont.
En fait de solution durable, on en reparlera ! J'espère que les vingt-huit
plans sociaux successifs de l'entreprise SEB ne seront pas suivis d'un
vingt-neuvième.
Dès le 29 septembre, vous déclariez : « J'ai la mission de regarder toutes les
possibilités de réindustrialisation des sites touchés par les fermetures et les
suppressions d'emplois. Le Gouvernement mobilise tous les moyens financiers et
humains nécessaires pour compenser tous les emplois perdus. »
J'aimerais vous croire, mais je ne peux que douter, me souvenant de la
fermeture de la Société métallurgique de Normandie, qui s'est soldée par la
suppression de plus de 5 000 emplois, une issue dans laquelle vos amis qui
étaient à l'époque au Gouvernement ont une grande part de responsabilité. Dix
ans plus tard, le site n'est pas un espace réindustrialisé ; c'est simplement
une belle pelouse très bien entretenue !
Nombre de salariés de l'usine de Bayeux venant d'usines Moulinex qui ont déjà
fermé - Granville ou Argentan - avaient déjà dû, une ou plusieurs fois,
reconstruire leur vie professionnelle et personnelle.
Pour atténuer ce drame humain et collectif, et tenter de donner une lueur
d'espoir à ces ouvrières qui ont vu en quelques semaines leur avenir
s'écrouler, leur vie passer de la lumière de l'usine à l'obscurité des files
d'attente de chercheuses d'emploi, nous vous demandons, monsieur le secrétaire
d'Etat, un effort tout à fait exceptionnel. Et nous souhaitons que, très
rapidement, des mesures concrètes soient proposées pour laisser le moins
longtemps possible dans l'angoisse les personnes touchées par ce drame.
Sachez que nous ne vous jugerons ni aux paroles ni aux intentions mais aux
actes. Je vous demande donc de nous informer des décisions que vous comptez
prendre.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants,
du RPR, de l'Union centriste et ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat à l'industrie.
Monsieur le sénateur, le tribunal de
commerce vient en effet de reporter sa décision à lundi prochain, quinze
heures.
Mais je voudrais, tout en vous remerciant de votre question, vous inviter à ne
pas inverser les rôles.
(Marques d'approbation sur les travées socialistes,
ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
Le
Gouvernement tente de limiter les conséquences humaines, sociales et
économiques d'une défaillance d'une entreprise privée. Il déploie le maximum
d'efforts, dans le bon sens, me semble-t-il, et il ne faut pas le rendre
responsable
a priori
de cet incident industriel dramatique : ce n'est
tout de même pas le Gouvernement qui dirige l'entreprise Moulinex !
(Applaudissements sur les mêmes travées.)
Notre volonté est totale d'éviter la liquidation, qui serait un gâchis humain,
un gâchis social et un gâchis économique.
Mes services et moi-même, au cours des dernières semaines, n'avons pas ménagé
nos efforts auprès de repreneurs potentiels. Une dizaine d'offres de reprise
ont été déposées ; la plupart sont d'ailleurs limitées à la reprise de l'une
des filiales du groupe : Krups.
Les banques soulèvent aujourd'hui deux problèmes : d'une part, celui de la
cession des titres de l'entreprise, Krups et, d'autre part, celui de la cession
des stocks de l'entreprise Moulinex.
Le Gouvernement veut ici, par ma voix, réaffirmer son souhait profond - et
actif - de voir les enjeux sociaux et industriels liés à la reprise du groupe
Moulinex être véritablement pris en compte par l'ensemble des intervenants dans
ce dossier.
Dès que la décision du tribunal de commerce sera connue, le Gouvernement
prendra toutes les initiatives nécessaires pour que soient garantis aux
salariés de Moulinex les moyens d'un reclassement effectif.
Deux mesures concernant plus particulièrement le secrétariat d'Etat à
l'industrie peuvent être annoncées dès aujourd'hui.
Il s'agit d'abord de notre volonté de mobiliser sans limite les outils de mon
département ministériel au service de la création d'activités nouvelles et de
la reconversion des sites et des territoires frappés par ce sinistre industriel
et social.
Nous avons, en outre, lancé une expertise tout à fait sérieuse et approfondie
des potentiels de développement des bassins d'emploi. Nous sélectionnons
actuellement des organismes compétents en matière de développement économique
local pour que, avant la fin de l'année, je m'y engage, les organismes retenus
soient au travail dans les bassins d'emploi concernés.
En tout état de cause, comme je l'ai affirmé à plusieurs reprises, nous ne
laisserons tomber ni les sites, ni les territoires, ni les salariés de
Moulinex. Nous nous battrons à leurs côtés pour trouver les meilleures
solutions économiques, sociales et humaines, soyez-en assurés.
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Qu'en pense le président du Sénat ?
(Sourires sur les mêmes
travées.)
DIRECTIVE EUROPÉENNE SUR L'OUVERTURE
À LA CONCURRENCE DES SERVICES POSTAUX
M. le président.
La parole est à M. Bellanger.
M. Jacques Bellanger.
Lundi dernier, le conseil des ministres européen en charge de la poste est
parvenu à un accord important pour l'avenir du secteur postal européen et
français. A l'ordre du jour figurait un projet de directive de la Commission
fortement contesté par les sénateurs et les députés de la majorité
gouvernementale, mais aussi par le Parlement européen.
A l'occasion d'un débat organisé sur ce projet, en décembre dernier, les
membres du groupe socialiste du Sénat ont tenu à rappeler les termes de
l'enjeu, mais aussi leurs attentes : améliorer les services rendus aux usagers
; offrir un service public de qualité qui, grâce aux progrès technologiques,
évolue au bénéfice de tous ; assurer une politique de gestion dynamique des
personnels de La Poste et développer des métiers et des services compétitifs,
le tout dans un univers de plus en plus concurrentiel ; conforter le rôle
irremplaçable de La Poste dans l'aménagement du territoire, que l'on habite un
petit village isolé de montagne ou une banlieue en difficulté d'Ile-de-France
;...
M. Roland Courteau.
Très bien !
M. Jacques Bellanger.
... enfin, faire que le secteur postal soit créateur de richesses et d'emplois
de qualité.
La réponse à cette attente suppose que l'on maintienne un périmètre de
services réservés suffisamment large pour assurer la bonne qualité du service
public.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je sais votre souci - et le souci du
Gouvernement - de garantir dans la durée le maintien d'un service public postal
de qualité. Je crois que les batailles que nous avons menées avec vous-même,
monsieur le secrétaire d'Etat, et avec les parlementaires européens ont porté
leurs fruits.
Ma question est simple : pouvez-vous nous présenter les principaux éléments de
l'accord et, surtout, nous indiquer dans quelle mesure il apporte une réponse
positive aux enjeux que je viens de développer ?
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat à l'industrie.
Monsieur le sénateur, ma réponse sera
très convergente avec les orientations qui sous-tendaient votre question.
(Sourires sur les travées du RPR.)
M. Yann Gaillard.
C'est étonnant !
M. Alain Gournac.
Quel hasard !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Quels sont nos objectifs ? Tout d'abord, préserver le
service public dans un contexte où tous les Etats membres souhaitaient qu'une
nouvelle directive prolonge celle de 1997 ; préserver la spécificité française,
avec une densité de présence postale de 17 000 points de contact en France, ce
qui est un cas unique dans l'Union européenne ; mettre en avant les valeurs du
service public, à savoir l'égalité par la péréquation tarifaire, la solidarité
avec les territoires, avec les hommes et les femmes qui vivent sur ces
territoires ; assurer le progrès social, avec l'aménagement et la réduction du
temps de travail ; développer la technicité, avec les nouvelles technologies de
l'information et de la communication.
Quels sont nos moyens ? Ils sont simples, évidents : il faut assurer le
financement de ces acquis républicains par un service réservé suffisamment
vaste pour pouvoir les financer et permettre à La Poste, par ses résultats, de
devenir toujours davantage un service public cultivant l'esprit d'entreprise,
un service public innovateur et largement ouvert sur l'Union européenne et sur
l'international.
A cet égard, l'accord de lundi dernier sur le projet de directive est
satisfaisant. L'ouverture du marché postal européen sera progressive et
mesurée, comme nous l'avons toujours exigé, c'est-à-dire qu'elle ne sera ni
brutale ni totale, qu'elle comportera plusieurs étapes : 2003, 2006, 2009. Nous
avons ainsi la garantie que, dans les années qui viennent, moins de 10 % - j'y
insiste - du chiffre d'affaires actuel de La Poste sera mis en concurrence.
Cela ne signifie d'ailleurs pas que La Poste y perdra : au contraire, elle
pourra conserver la très grande majorité de ces 10 % dans sa zone d'influence
et sur ses marchés.
Les services spéciaux demeurent dans le périmètre du monopole. C'était un
combat très difficile, que nous avons remporté face à de nombreux Etats membres
qui ne souhaitaient pas qu'il en soit ainsi. Dans le droit-fil des efforts que
j'avais menés lors de la présidence française en décembre 2000, nous avons
ainsi évité l'inscription dans la directive de la libéralisation totale que les
Etats « libéraux » voulaient imposer dès 2009. La libéralisation totale n'est
pas programmée, et il s'agit là d'une victoire politique de la France, qui
défend le service public.
Nous avons enfin maintenu - ce qui était très important pour nous - le
contrôle du Parlement européen sur l'évolution de La Poste au niveau européen
et sur le marché intérieur de l'entreprise, puisque le principe de la
codécision a été retenu et que le Parlement aura, en tout état de cause, à se
prononcer sur la base d'une étude qui sera fournie par la Commission européenne
en 2008.
Ma conclusion sera simple : nous restons fidèles à nos valeurs, qui sont
celles du service public ; nous restons fidèles à nos orientations et nous
restons fidèles à l'esprit du vote qui est intervenu au Parlement européen en
décembre 2000. En un mot, nous restons fidèles à une grande poste de service
public, à une poste au service de la République
(Applaudissements sur les
travées socialistes.)
Mme Hélène Luc.
Mais elle doit disposer des personnels nécessaires !
M. Claude Estier.
Monsieur le président, pour protester contre la lecture d'une lettre du
président du Sénat dans le cours de cette séance de questions d'actualité, le
groupe socialiste quitte l'hémicycle.
(Les membres du groupe socialiste se
lèvent et quittent l'hémicycle. - Très bien ! et applaudissements sur certaines
travées du RPR.)
M. Robert Calmejane.
Cela devient une habitude ! Le respect de la démocratie, cela vous étouffe
!
REPRÉSENTATION DE LA RÉGION AU SEIN DU SYNDICAT
DES TRANSPORTS D'ÎLE-DE-FRANCE
M. le président.
La parole est à M. Karoutchi.
M. Roger Karoutchi.
Monsieur le président, ma question s'adressait à M. Gayssot, mais je remercie
M. Queyranne de bien vouloir y répondre.
Il y a deux jours, une grève secouait de nouveau la SNCF. Le PDG de
l'entreprise a lui-même qualifié ce mouvement d'inopportun en cette période :
trains rares, surbondés, gares envahies d'usagers. Tout cela est parfaitement
contraire aux mesures ou aux décisions de sécurité qui s'imposent par ailleurs
avec le plan Vigipirate.
Cette nuit, la Haute Assemblée a bien voulu adopter l'amendement que j'ai
présenté dans la discussion du projet de loi sur la sécurité quotidienne, afin
de créer à terme, en Ile-de-France, un service unifié de police régionale des
transports. Pour moi, ce texte doit être le prélude à une vaste réflexion sur
la police des transports dans tout le pays.
Il est vrai que les transports en Ile-de-France deviennent de plus en plus
difficiles et incertains : les derniers chiffres traduisent une explosion de la
délinquance sur les réseaux SNCF et RATP de banlieue, qui ne peut plus être
contenue par les moyens actuels.
Les élus d'Ile-de-France avaient cru percevoir dans la loi de décembre 2000 la
volonté affichée du Gouvernement de desserrer l'étau étatique sur
l'organisation des transports, avec la transformation du Syndicat des
transports parisiens en Syndicat des transports d'Ile-de-France, ou STIF.
L'assemblée régionale avait délibéré sur la base d'un décret et élu au mois de
mai 2000 ses représentants à ce nouveau syndicat. Hélas ! trois fois hélas pour
le Gouvernement ! c'est la droite qui a gagné ce scrutin.
Fin juin, le Gouvernement a présenté pour avis devant le comité des finances
locales, que préside notre excellent collègue Jean-Pierre Fourcade, le même
texte initial de décret aux termes duquel la droite devait prendre la
vice-présidence du STIF ainsi que la présidence de la toute-puissante
commission des investissements.
Je constate donc que la réflexion, la rigueur dont parlait tout à l'heure M.
Glavany, ne doit pas être constante, en tout cas durant les mois d'été, car, la
chaleur aidant - et peut-être la pression de certains amis de la gauche
régionale - le décret a été modifié pendant le mois d'août sans la moindre
concertation : désormais, les conseillers régionaux et les conseillers généraux
n'élisant plus leurs représentants au conseil d'administration du STIF, les
vice-présidents et les présidents de commission ne seront plus élus par des
conseillers généraux et des conseillers régionaux, mais par le conseil
d'administration, lui-même composé pour moitié par des représentants de l'Etat,
donc par des fonctionnaires.
Ainsi, le conseil régional vote, la droite gagne ; en octobre, la gauche rafle
les sièges en s'appuyant sur les représentants de l'Etat. Le décret a été
modifié, c'est un déni de démocratie !
Alors, cessez de nous parler de la rigueur, de la morale, et, de grâce,
monsieur le ministre, dites-nous si, dans l'intérêt général, vous envisagez de
retirer ce décret et d'ouvrir de nouveau la négociation avec les élus
d'Ile-de-France, afin que puisse être constitué un syndicat des transports en
Ile-de-France qui assure la sécurité des usagers, la responsabilité des élus et
un vrai respect de la démocratie de proximité.
(Applaudissements sur les
travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi
que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jack Queyranne,
ministre des relations avec le Parlement.
Monsieur le sénateur, je vous
confirme tout d'abord que c'est effectivement la loi relative à la solidarité
et au renouvellement urbains qui a permis la mise en place de ce nouveau
système d'organisation des transports en commun.
Cette réforme avait été maintes fois annoncée depuis vingt ans ; le
Gouvernement l'a mise en oeuvre sur la base d'un texte qui n'a pas été voté par
le Sénat - faut-il le rappeler ? - puisque seule l'Assemblée nationale l'a
adopté.
L'organisation des transports dans la région d'Ile-de-France permet,
notamment, la contractualisation avec les entreprises de transport, avec des
objectifs de qualité de service, d'offres et de financement, avec le
renforcement du syndicat en ce qui concerne la réalisation des opérations
d'investissement, avec une meilleure association des collectivités
territoriales à la prise de décision et avec l'entrée de la région
d'Ile-de-France au sein du syndicat des transports en commun.
Le décret du 10 octobre 2001, auquel vous venez de faire référence, monsieur
le sénateur, permet tout d'abord d'élargir les missions du syndicat des
transports d'Ile-de-France, mais aussi d'assurer une meilleure représentativité
de la région. En effet, la représentation y devient pluraliste puisqu'elle
passe de trois à cinq représentants, ce qui devrait vous intéresser.
En ce qui concerne la présence de l'Etat, il me paraît logique que le conseil
d'administration de ce syndicat, qui est financé à 51 % par l'Etat et à 49 %
par les collectivités, reflète l'organisation des transports en commun
d'Ile-de-France.
J'ajoute que les autres décrets vont paraître prochainement, qu'ils ont reçu
un avis favorable du comité des finances locales et un avis favorable sans
réserve du Conseil d'Etat, et que le nouveau conseil d'administration pourra
s'installer le 24 octobre prochain. Je ne sais pas, monsieur Karoutchi, si vous
en êtes membre, mais vous pouvez constater qu'ainsi se mettent en place les
institutions qui sont prévues par la loi.
Permettez-moi pour terminer, monsieur le président, d'exprimer le souhait, au
nom du Gouvernement, que les questions d'actualité se déroulent de façon
impartiale : la parole des sénateurs est libre ; la réponse des membres du
Gouvernement l'est également, et la présidence doit, de ce point de vue, se
contenter de distribuer les temps de parole de la façon la plus équitable
possible, et surtout ne pas donner lecture d'un texte déjà publié quelques
jours auparavant.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste
républicain et citoyen. - Protestations sur les travées du RPR, des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
Monsieur le ministre, la présidence du Sénat a simplement souhaité informer le
Sénat de ses démarches !
M. Alain Gournac.
Ce qui est normal !
PSYCHOSE LIÉE À LA MALADIE DU CHARBON
M. le président.
La parole est à M. Gournac.
M. Alain Gournac.
Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à la santé.
Depuis l'apparition, le 10 octobre dernier, aux Etats-Unis, de cas d'anthrax
qui se multiplient, un début de psychose d'attaque bactériologique menace notre
pays. En effet, de nombreux Français s'inquiètent de plus en plus, à la suite
des récents événements survenus à Paris ou en province. Je veux parler de la
réception de courriers contenant de la poudre blanche ou noire qui ont alarmé
leurs destinataires et ravivé un sentiment d'insécurité.
Le dernier de ces événements est survenu ce matin à l'Assemblée nationale :
nous l'avons appris, comme vous, il y a quelques heures à peine.
Un quotidien français a fait récemment mention dans ses colonnes de la réponse
que le service de presse de votre ministère avait faite au journaliste qui
l'interrogeait sur les précautions à prendre en cas de réception de ce genre de
courrier : « Je ne sais pas quoi vous répondre ... Tous les conseillers sont en
négociation avec les médecins au sujet des 35 heures », lui a-t-on répondu.
Je comprends, monsieur le ministre, que les 35 heures vous posent quelques
problèmes, mais il me semble nécessaire que le Gouvernement apporte une réponse
claire à la question qui lui est posée. C'est pourquoi je vous demande, à mon
tour, de bien vouloir nous présenter très précisément les consignes de sécurité
et les mesures de précaution à prendre.
J'aimerais également savoir si vous avez demandé aux préfets de relayer ces
consignes auprès des administrations et des entreprises, afin que la sécurité
des Français soit immédiatement et correctement assurée.
Par ailleurs, j'ai entendu certains syndicats de policiers déclarer qu'ils
estimaient être insuffisamment équipés pour ces interventions délicates.
Pouvez-vous nous dire ce qu'il en est ?
L'Etat se doit de protéger efficacement les citoyens, et ce en toutes
circonstances. Aussi les Français attendent-ils votre réponse avec impatience.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué à la santé.
Oui, les Français, monsieur le sénateur,
attendent des réponses ; mais, en même temps, vous ne voulez pas voir se
développer une psychose. La situation est quelque peu délicate !
M. Alain Gournac.
Et alors ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je répondrai donc avec délicatesse à votre délicate
question.
(Sourires.)
Si l'on veut se renseigner sur la conduite à tenir, il faut téléphoner non pas
aux services de presse, mais aux services compétents. Vous saurez ainsi que,
grâce à l'électricité, il existe un certain nombre de services tels que le
réseau, le Net et le site du ministère de la santé. Tout y est ! A partir de ce
dernier, il est possible de se connecter directement sur l'Agence française de
sécurité sanitaire des produits de santé, l'AFSSAPS.
M. Alain Gournac.
Les services informent ! C'est bien !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Vous ne voulez pas voir se développer une psychose ; le
mot, d'ailleurs, comme je l'ai déjà souligné, est impropre, car il implique une
rupture avec la réalité. Or, la réalité existe et il faut la prendre en
compte.
Ce matin, il y a eu 317 alertes dans 49 départements. Ne confondons pas ! Il
s'agit d'alertes, et Mme la garde des sceaux s'est déjà prononcée sur ce point.
Heureusement, nous avons déjà arrêté deux suspects dont l'un, un élu
d'ailleurs, aurait envoyé 47 enveloppes contenant des poudres, que vous avez
qualifiées de blanche ou de noire. J'espère qu'il sera sévèrement condamné
puisque les actes ont été qualifiés par Mme la garde des sceaux.
Sur le reste, oui, avec le ministère de l'intérieur et le ministère des
armées, nous avons mis en place un dispositif qui répond très bien et qui, en
effet, commence à être un peu lourdement chargé. Je les comprends, je les
soutiens, mais que faire ?
Ce n'est pas à la police de manipuler ces enveloppes contenant des poudres
qui, heureusement, jusqu'à maintenant - les cultures le prouvent - ne
comportent aucune trace de bacille du charbon. C'est très rassurant ; encore
faut-il s'y prendre de la bonne façon.
Monsieur le sénateur, ce sont les pompiers qui sont chargés de cela et,
évidemment, les préfets ont reçu des consignes très strictes pour appliquer la
loi. Il n'empêche que c'est difficile.
Mais cessons de plaisanter avec des choses sérieuses. Dans la période de
tension actuelle, envoyer à quelques petits adversaires de la vie quotidienne
des enveloppes qui contiennent une poudre est un geste criminel. Je le dis très
clairement.
Mme Paulette Brisepierre.
Absolument !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Plus nous poursuivons ces plaisantins ou ces
mal-inspirés, qui sont potentiellement, je le dis avec sévérité, des complices
indirects du terrorisme, et mieux ce sera.
(Applaudissements.)
M. le président.
Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques
instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures
dix.)
M. le président. La séance est reprise.
6
CANDIDATURES À DES ORGANISMES
EXTRAPARLEMENTAIRES
M. le président.
Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien
vouloir procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein de
plusieurs organismes extraparlementaires.
La commission des affaires culturelles a fait connaître qu'elle propose les
candidatures de :
- M. Robert Laufoaulu pour siéger au sein du Comité national de l'initiative
française pour les récifs coralliens, l'IFRECOR ;
- MM. Daniel Eckenspieller et Jean-François Picheral pour siéger, en qualité
de membres titulaires, et Mme Annie David et M. Jean-Léonce Dupont, pour
siéger, en qualité de membres suppléants, au sein de la commission de
surveillance et de contrôle des publications destinées à l'enfance et à
l'adolescence ;
- M. Louis de Broissia pour siéger au sein du conseil d'administration de la
société France Télévision ;
- M. Philippe Richert pour siéger au sein du conseil d'administration de la
société nationale de programme France 3 ;
- M. Jean-François Picheral pour siéger au sein du conseil d'administration de
la société nationale de programme Radio France ;
- M. Louis Duvernois pour siéger au sein du conseil d'administration de la
société nationale de programme Radio France internationale, RFI ;
- Mme Françoise Férat pour siéger en qualité de membre suppléant au sein de
l'Observatoire national de la sécurité des établissements scolaires et
d'enseignement supérieur ; et
- M. Fernand Demilly pour siéger au sein du Conseil national des
fondations.
Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à
l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai
d'une heure.
7
LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS
Adoption d'une proposition
de loi en nouvelle lecture
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture de la proposition de
loi (n° 18, 2001-2002), adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en
nouvelle lecture, relative à la lutte contre les discriminations. (Rapport n°
22 [2001-2002].)
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, la proposition de loi relative à la lutte
contre les discriminations revient aujourd'hui en troisième lecture au Sénat.
Vos collègues députés l'ont examinée, quant à eux, le 11 octobre.
Un accord existe indéniablement entre les deux assemblées sur l'importance du
dispositif que prévoit cette proposition de loi pour conforter les droits des
personnes confrontées à des discriminations.
En revanche, des divergences assez substantielles sont apparues dès la
première lecture entre la proposition de loi présentée par le groupe socialiste
à l'Assemblée nationale, qui s'inscrit dans la continuité du programme
d'actions gouvernemental, et les orientations défendues par le Sénat.
Une commission mixte paritaire s'est réunie le 10 octobre, la veille de la
troisième lecture à l'Assemblée nationale, pour tenter de surmonter ces
divergences, sans parvenir à trouver de points d'accord.
Vos collègues députés ont donc rétabli la proposition de loi dans les
dispositions antérieures aux modifications que vous lui aviez apportées en
deuxième lecture. C'est le texte qui vous est aujourd'hui soumis.
Les points de divergence persistant sont de deux ordres.
Le premier a trait à la charge de la preuve. Le texte des articles 1er et 4 de
la proposition de loi rétabli par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture
prévoit que la charge de la preuve revient à l'employeur lorsque le salarié
présente des éléments de fait laissant supposer une discrimination directe ou
indirecte.
Votre rapporteur vous propose de revenir à la formulation beaucoup plus
restrictive que vous aviez adoptée en première et deuxième lecture, puisqu'elle
prévoit que le salarié doit établir des faits qui permettent de présumer
l'existence d'une discrimination.
La position du Gouvernement est défavorable sur ce point. En effet, la
rédaction proposée par l'Assemblée nationale se fonde sur la jurisprudence de
la Cour de cassation, qui prévoit, dans son arrêt Fluchère du 28 mars 2000, que
« le syndicaliste qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire doit
soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une
atteinte au principe d'égalité de traitement ». Cette disposition est, en
outre, compatible avec la jurisprudence communautaire et les directives
européennes.
Le second point de divergence concerne le renforcement des moyens d'action en
justice notamment par le droit des syndicats et des associations - il s'agit de
l'article 2 de la proposition de loi - dont la raison sociale est la lutte
contre les discriminations de saisir la justice pour le salarié, sauf, bien
évidemment, si celui-ci s'y oppose.
Là encore, vos collègues députés ont rétabli leur texte en nouvelle lecture.
Votre rapporteur vous propose d'être plus restrictifs, comme vous l'aviez déjà
été en deuxième lecture, en prévoyant que ce droit à agir est conditionné par
un accord écrit du salarié.
L'avis du Gouvernement est encore une fois défavorable à cette orientation. Il
est réellement préférable de retenir la formulation votée par l'Assemblée
nationale. Dans ces affaires souvent délicates, la préservation de l'anonymat
du salarié est un point central. Le Conseil constitutionnel a été précis sur ce
point : l'action du syndicat repose alors sur un mandat implicite et ce sont
donc les règles de droit du mandat qui s'appliquent.
Enfin, la commission vous propose de revenir à un titre qui restreint le champ
de cette loi, en l'intitulant « loi relative à la lutte contre les
discriminations à l'embauche et dans l'emploi ». Je crois, au contraire, qu'il
est nécessaire de retenir un titre aussi large que possible pour cette
proposition de loi. Cette loi porte sur le champ de l'emploi, mais pas
exclusivement. Elle aborde notamment le point du numéro vert
anti-discriminations : le 114. Elle doit donc porter un titre large, celui de «
loi relative à la lutte contre les discriminations ».
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, ce que je tenais à vous dire avant
que vous n'entamiez cette nouvelle lecture.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur de la commission des affaires sociales.
Monsieur le secrétaire
d'Etat, je vous prie d'excuser l'absence du président de la commission des
affaires sociales, M. Nicolas About, qui assiste aux obsèques de l'un de nos
commissaires, Martial Taugourdeau, décédé dans un accident de la
circulation.
La discussion de la présente proposition de loi relative à la lutte contre les
discriminations a été unanimement considérée comme un exemple de réussite du
travail parlementaire.
Parmi les dix articles en discussion, sept ont en effet été adoptés dans les
mêmes termes par nos deux assemblées après des enrichisssements substantiels
qui peuvent être portés au crédit de l'une ou l'autre des deux chambres.
Les différences qui demeurent ne concernent que trois articles. Elles ne
doivent pas être sous-estimées pour autant, mais, comme cela a été plusieurs
fois observé, elles relèvent d'une divergence d'opinion profonde et donc
fondamentalement légitime, me semble-t-il, dans le cadre d'un débat
démocratique.
Cette divergence porte sur les moyens de parvenir à des objectifs qui, par
ailleurs, font l'objet d'une pleine et entière concordance de vues ; je veux
parler de la lutte contre les discriminations.
Dans ces conditions, la poursuite du processus législatif a pu trouver tout
son sens, puisqu'elle a rendu possible une confrontation des opinions qui, loin
d'opposer des certitudes, a permis à plusieurs reprises des aménagements et des
compromis qui font honneur à notre démocratie.
A cet égard, je remarque que de telles avancées n'auraient pas été possibles
si le Gouvernement avait demandé l'urgence sur ce texte, comme il le fait assez
souvent. Cela doit constituer une leçon pour le gouvernement d'aujourd'hui
comme pour ceux de demain sur l'utilité de laisser le travail parlementaire
aller jusqu'à son terme.
Il arrive néanmoins un moment où la discussion ne permet plus d'avancer, et
force est de constater que ce moment est sans doute arrivé. En effet, la
réunion de la commission mixte paritaire du 10 octobre dernier à l'Assemblée
nationale n'a pas permis à nos deux assemblées de rapprocher leurs points de
vue sur les dispositions qui demeuraient en débat à l'issue de deux lectures
successives.
Outre l'intitulé de la proposition de loi, que le Sénat avait souhaité
compléter pour préciser que la lutte contre les discriminations visée par ce
texte ne concernait que l'embauche et l'emploi, je rappelle qu'il demeure deux
séries de dispositions ayant donné lieu à une opposition - vous l'avez rappelé,
monsieur le secrétaire d'Etat - en apparence irréductible : le régime de la
charge de la preuve et le rôle reconnu aux syndicats pour se substituer aux
salariés dans une procédure contentieuse.
Concernant le régime de la charge de la preuve, qu'il me soit permis en cet
instant de rappeler la nature du différend.
En cas de litige, l'Assemblée nationale propose que le salarié présente des
éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination, alors que,
par deux fois, le Sénat a souhaité que le salarié établisse des faits qui
permettent de présumer l'existence d'une discrimination.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a prévu que la partie défenderesse se
devait, en réponse, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments
objectifs étrangers à toute discrimination, alors que le Sénat a préconisé
qu'elle prouve que sa décision n'est pas contraire au principe de
non-discrimination.
Sans rouvrir le débat, au demeurant fort intéressant et de grande qualité, que
nos deux assemblées ont pu avoir au cours de la discussion de cette proposition
de loi, la commission souhaite néamoins formuler quelques remarques à ce stade
de la discussion.
Premièrement, l'engagement du Sénat dans la lutte contre les discriminations
ne fait pas de doute. Certes, celui-ci n'a jamais été discuté, mais il n'est
pas inutile de rappeler que la Haute Assemblée a souhaité prendre toute sa part
dans l'amélioration de ce dispositif législatif essentiel.
Deuxièmement, le texte que la commission propose au Sénat de rétablir
constitue un arsenal qui est suffisant et qui devrait permettre, s'il était
finalement retenu, de faire progresser considérablement l'état du droit. A cet
égard, il convient d'observer que ce texte, adopté par deux fois déjà par le
Sénat, reprend littéralement le texte des directives européennes, qui
correspondent au droit déjà appliqué par la plupart de nos partenaires
européens. Ceux-ci n'ont pas jugé nécessaire d'aller au-delà pour l'instant. La
France est donc le pays qui irait le plus loin dans ce domaine.
Troisièmement, le texte proposé par l'Assemblée nationale ne présente pas
toutes les garanties de rigueur juridique. Ainsi le souligne l'exemple édifiant
cité par M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires
culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale, lors du débat en
nouvelle lecture, exemple selon lequel « l'élément de fait réside, par exemple,
dans la réponse différente adressée à deux
curriculum vitae
identiques,
mais envoyés, l'un sous un nom d'origine maghrébine, l'autre sous un nom
français ». Cela signifie que, si le texte est adopté dans la version de
l'Assemblée nationale, tous les employeurs doivent s'attendre à recevoir deux
séries de
curriculum vitae
et à faire l'objet d'un procès !
Au demeurant, on ne voit pas pourquoi cette manoeuvre devrait se limiter aux
présomptions de discriminations fondées sur un motif racial ou sur les
origines. Rien n'empêche d'imaginer que certains candidats pourraient envoyer
plusieurs
curriculum vitae
qui se distingueraient par l'âge, le sexe ou
l'origine géographique - la région, le département ou l'adresse - du candidat.
Quelle signification donnera-t-on au fait que des entreprises recevant, pour
certaines, plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines, de
curriculum
vitae
par jour pourraient réserver des réponses différentes à ces courriers
?
On le voit, le texte adopté par l'Assemblée nationale va trop loin et
introduit une source d'insécurité juridique supplémentaire dans la gestion des
entreprises. Le texte déjà adopté par le Sénat lors des deux premières lectures
a précisément pour objet d'éviter ce genre de dérives.
Au passage, je souligne que cette contrainte supplémentaire fait suite à
plusieurs autres contraintes. Je me contenterai de mentionner le durcissement
de la législation sur les licenciements pour motif économique et les 35 heures.
A ce propos, chacun s'entend pour considérer que le décret relatif aux heures
supplémentaires récemment publié par le Gouvernement est tout à fait
insuffisant, comme l'ont confirmé les représentants des syndicats que j'ai
commencé à auditionner dans le cadre du projet de loi de finances pour 2002.
Ces dispositions donnent le sentiment d'une « charge contre les entreprises ».
Elles traduisent en tout cas une attitude permanente de défiance envers les
employeurs. A cet égard, permettez-moi de vous faire part de mon inquiétude :
je crains que cette politique ne soit pas étrangère, au moins pour partie, aux
piètres performances que nous connaissons sur le front de l'emploi depuis
quelques mois.
Bien entendu, nous reviendrons plus largement sur ce sujet lors de l'examen du
projet de loi de finances pour 2002, mais il me semblait important d'en faire
état en cet instant.
Quatrièmement, le rôle des syndicats et des associations dans la défense du
salarié présumé victime d'une discrimination n'est toujours pas parfaitement
clarifié. Certes, l'Assemblée nationale a finalement adopté les modifications
proposées par le Sénat concernant l'encadrement de l'action des associations.
Celles-ci devront pouvoir justifier de l'accord écrit du salarié, et ce dernier
pourra mettre un terme à tout moment à l'action de l'association. Il s'agit de
précautions heureuses, qui n'enlèvent rien à la capacité d'action de
l'association, mais les mêmes dispositions ne valent pas pour les syndicats.
A contrario
- et l'on ne peut que s'en étonner - la liberté du salarié
n'a pas été reconnue de la même manière s'agissant de l'action du syndicat,
alors même qu'un consensus avait paru s'esquisser à la suite du débat important
qui a eu lieu en commission mixte paritaire à propos des déclarations de notre
collègue député Jean-Pierre Michel, qui n'est tout de même pas un néophyte en
cette matière. La solution maintenue par l'Assemblée nationale est profondément
choquante si l'on veut bien convenir que, dans tout autre domaine, aucun
d'entre nous n'accepterait qu'un tiers se porte en justice à sa place et sans
son accord dans une affaire civile.
Sur ce point précis, la commission souhaite que l'Assemblée nationale, en
dernière lecture, modifie sa position une nouvelle fois pour tenir compte de
l'excellent débat qui a eu lieu lors de la réunion de la commission mixte
paritaire. Il est en effet difficilement concevable qu'un texte ayant pour
objet de lutter contre les discriminations ait pour conséquence que soit foulée
aux pieds une liberté individuelle relativement importante.
Enfin, le rapporteur de la commission mentionnera, pour mémoire, la position
exprimée, lors de la discussion en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale,
par notre collègue député Anicet Turinay et selon laquelle « le meilleur moyen
de combattre la discrimination à l'embauche et dans l'emploi, c'est
l'éducation, qui doit faire évoluer les mentalités ». Ces propos ne peuvent que
rappeler que ce texte ne suffira pas, à lui seul, à supprimer les
discriminations et qu'il doit seulement être considéré comme une étape sur la
voie d'une plus grande justice dans l'accès à l'emploi. Cela constitue une
motivation supplémentaire pour essayer d'aboutir à un texte véritablement
applicable.
C'est pourquoi la commission propose le rétablissement du texte voté par le
Sénat en deuxième lecture en ce qui concerne les dispositions restant en
discussion et qui n'ont toujours pas fait l'objet d'un accord.
(Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à Mme Printz.
Mme Gisèle Printz.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
pour la troisième fois revient devant notre assemblée la proposition de loi
relative à la lutte contre les discriminations.
A l'occasion des première et deuxième lectures, mes collègues Claude Domeizel
et Gilbert Chabroux ont abondamment expliqué la position du groupe socialiste
du Sénat sur ce texte. Je m'en tiendrai donc aux deux points qui restent en
discussion, les principes et leur application dans le monde du travail étant
déjà connus.
Nous constatons avec satisfaction que les deux lectures ont permis de dégager
des points de convergence importants, puisqu'il ne reste plus que trois
articles en débat. C'est un bon exemple du travail parlementaire abouti et
sérieux que nous aimerions avoir plus souvent le temps et l'opportunité de
réaliser dans le cadre du bicamérisme !
Je commencerai par la capacité des syndicats d'ester en justice sans avoir à
justifier d'une autorisation écrite du salarié concerné. Il s'agit d'un
principe auquel nous sommes très attachés. Dans d'autres domaines que la
non-discrimination, il est déjà d'application courante et fonctionne
correctement.
Pour qui connaît le monde de l'entreprise du côté des salariés - tel est mon
cas - il est évident que c'est le seul moyen d'éviter que le salarié victime
d'un comportement délictueux ne soit, de surcroît, victime de pressions. Le
respect des droits du salarié passe ici par la prise en charge par les
syndicats de l'action qu'il veut, et même qu'il doit entreprendre.
S'agissant de la charge de la preuve, le texte qui nous arrive après avoir été
peaufiné permet, selon nous, un bon équilibre entre les dires des deux parties
et le rôle du juge. Il est, de plus, conforme à la jurisprudence de la Cour de
cassation et aux directives communautaires.
Il est évident que l'établissement des faits par le salarié ou le candidat à
l'emploi est pratiquement impossible. Il ne pourra présenter au juge que des
éléments de nature à permettre éventuellement l'établissement des faits. La
discrimination avance en général masquée, comme un vice honteux, et néanmoins
si bien partagé.
En adoptant des positions fermes, c'est à l'ensemble du monde du travail que
nous voulons nous adresser : chefs d'entreprise, mais aussi salariés de toute
origine, agents de l'ANPE et permanents des agences d'intérim qui sont
fréquemment confrontés à des demandes discriminantes. Les statistiques du
chômage sont claires.
En l'an 2000, à niveau d'études égal - sortie du secondaire - on constate une
différence de 18 % entre un étranger européen et un non-européen. La différence
monte à 25 % entre un étranger européen et un maghrébin.
Pour deux personnes de niveau V, donc sorties d'un cycle court professionnel
ou sans le bac, ou son équivalent, un étranger européen a 11 % de risques
d'être au chômage, contre 30 % pour un maghrébin. Que l'on cesse donc de
prétexter le niveau d'études qui serait inférieur ou l'absence de qualification
professionnelle ! Les statistiques sont impitoyables pour mettre en évidence
les comportements racistes.
Le chômage des femmes relève pour partie des mêmes comportements. La maternité
chez les jeunes femmes et la difficulté du retour à l'emploi chez les femmes
qui ont élevé leurs enfants n'expliquent pas tout.
Le législateur a donc ici un rôle particulièrement important à jouer. Il doit
non seulement dire le droit, mais aussi protéger une partie de la société
contre elle-même et faire un peu de pédagogie. Plus notre parole sera claire,
et plus nous donnerons à notre pays la possibilité d'avancer, au quotidien,
dans le respect de la devise de notre République, étant rappelé - n'ayons garde
de l'oublier en ces temps difficiles - qu'elle comporte aussi les mots
d'égalité et de fraternité.
Au total, le bilan de ce texte est donc mitigé. Des avancées importantes font
l'objet d'un consensus, mais deux points de principe nous divisent encore.
C'est pourquoi le groupe socialiste devra voter contre ce texte tel qu'il va
être amendé par la majorité sénatoriale.
M. le président.
La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
serai bref, parce qu'une description exhaustive des dispositions envisagées
pour renforcer l'arsenal juridique existant ne s'impose plus lorsqu'un texte
revient pour la troisième fois en discussion.
Nous avons tous conscience de l'importance et de la fréquence du problème des
discriminations, qui sont autant de freins à l'embauche, au déroulement de
carrière et, par conséquent, facteur de surchômage, d'exclusion de chacun et
chacune.
A juste titre, vous avez pris l'exemple, monsieur le secrétaire d'Etat, dans
votre intervention de deuxième lecture, des étrangers originaires des pays
extérieurs à l'Union européenne, qui sont trois fois plus au chômage que les
Français, l'écart s'accentuant encore plus lorsque ces derniers ont un niveau
d'études supérieures.
Je pourrais égrener d'autres exemples : le tri des
curriculum vitae
en
fonction de la consonance du nom ; l'écart de salaire à qualification égale
entre les hommes et les femmes ; la mise à l'écart prématurée des « quinquas »,
etc.
Les réalités sont là : de vrais dysfonctionnements perdurent sur le marché du
travail et sont susceptibles de s'accentuer lorsque la situation générale de
l'emploi s'assombrit.
L'opportunité d'une intervention législative, l'utilité des mesures envisagées
n'ont, à aucun moment, été remises en cause.
Globalement, on peut même aller jusqu'à dire que la majorité sénatoriale,
contrairement à certaines de ses habitudes, a eu une attitude plutôt
constructive.
A la suite de l'adoption de divers amendements émanant tant de cette majorité
que du Gouvernement ou des groupes communiste et socialiste, le texte a été
fort justement enrichi au fil des navettes.
Je pense tout particulièrement à l'introduction de nouveaux motifs de
discrimination - l'appartenance ou la non-appartenance à une ethnie, une
nation, une race, l'orientation sexuelle, l'âge - permettant ainsi d'élargir de
manière non négligeable le champ des personnes protégées.
Mais je pense également à l'élargissement des champs d'action concernés -
ensemble du parcours professionnel : embauche, rémunération, affectation,
promotion - ainsi qu'à la protection des fonctionnaires.
Pour autant, en ce qui concerne deux points majeurs du texte, la majorité
sénatoriale a refusé de tenir compte des difficultés rencontrées par les
victimes de discriminations. En effet, actuellement, elles sont dissuadées
d'entamer une action pénale ou civile en raison des conditions à remplir pour
apporter la preuve des faits.
Qu'il s'agisse de l'aménagement de la charge de la preuve, et non du
renversement, conformément d'ailleurs à la jurisprudence tant communautaire que
française, pionnière en matière de discrimination sexuelle ou syndicale, qu'il
s'agisse du déclenchement de l'action par les organisations syndicales à la
place du salarié discriminé, sauf désaccord de sa part, vous avez, messieurs,
réduit considérablement la portée et, par conséquent, l'efficacité des
dispositions adoptées par nos collègues députés.
La commission mixte paritaire a échoué, les divergences de fond n'ayant pu
être surmontées.
Aujourd'hui, les mêmes amendements aussi peu progressistes, notamment en
matière d'aménagement de la charge de la preuve, sont une nouvelle fois
proposés.
La commission des affaires sociales craint que cette proposition de loi «
n'augmente considérablement le nombre d'actions contentieuses et qu'elle ne
soit l'occasion pour le salarié de dissimuler ses propres insuffisances ».
Qui devons-nous veiller à protéger davantage ? Les victimes de discriminations
ou les auteurs de ces comportements discriminatoires ? Vous souhaitez que la
charge de la preuve pèse sur le salarié ou sur le candidat ? Nous pensons, pour
notre part, qu'il est primordial d'adapter le régime de la preuve au profit de
la personne discriminée. C'est l'une des raisons principales pour laquelle nous
voterons contre le texte remanié qui nous est soumis, qui ne permettra pas
d'améliorer la situation des personnes les plus fragiles.
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat.
Pour gagner du temps, je ferai une brève intervention,
le bien-fondé de ce texte ou les divergences constatées ayant été explicités
par les uns et les autres par trois fois.
Je souhaite toutefois rappeler quelques points du débat avant de donner l'avis
du Gouvernement sur chacun des amendements qui seront soumis à son
approbation.
A l'issue de ce débat, je crois pouvoir dire que les divergences portent non
pas sur l'objectif qui a été fixé, mais sur la méthode et les ingrédients qui
permettront d'atteindre cet objectif.
Je ne peux pas laisser dire que nous aurions envie de malmener l'entreprise.
Une entreprise moderne qui, en matière de handicap, de parité, d'écarts de
rémunérations entre les hommes et les femmes, est conduite de façon
constructive et positive, ne connaîtra jamais aucun problème au regard de ce
texte. En effet, toute entreprise moderne se doit de répondre à ces exigences
et de traiter de ces questions en son sein, en ayant recours à sa propre
dynamique.
Mais il faut bien constater que des entreprises restent à la traîne :
certaines éprouvent des difficultés à employer un salarié handicapé ; d'autres
n'ont pas résolu le problème de l'écart des salaires entre les hommes et les
femmes, et ce près d'un quart de siècle après l'adoption de dispositions
législatives à cet égard.
Aujourd'hui, au moment où la place de la jeunesse au sein de la société doit
plus que jamais être à l'ordre du jour, il faut bien constater que l'exemple
cité par Jean Le Garrec n'avait pas pour vocation d'inciter chacun à créer des
ennuis à l'employeur. Il s'agissait simplement de faire en sorte qu'une
personne envoyant un
curriculum vitae
avec un nom à consonance
maghrébine ne voit pas sa candidature écartée au motif que l'emploi était déjà
pourvu, alors qu'une personne envoyant le même
curriculum vitae
une
semaine plus tard, mais avec un nom à consonance française, était invitée à un
entretien pour examiner sa candidature.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Une hirondelle ne fait pas le printemps !
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat.
Certes, mais la statistique est là, et elle est
impitoyable : à diplôme égal, ces jeunes sont trois fois plus nombreux à être
chômeurs que les autres ! C'est une situation qui n'est pas acceptable dans la
République française si nous voulons défendre ses trois grands principes :
liberté, égalité et fraternité.
Certes, le texte qui est proposé à la fois par l'Assemblée nationale et par le
Gouvernement comporte trois points de désaccord s'agissant de la méthode, mais,
pour ce qui est de l'esprit du texte, l'objectif est partagé. Il conviendra
donc d'évaluer la méthode à l'expérience. Dans un, deux ou trois ans, les
parlementaires pourront dresser un bilan de l'incidence concrète de ces
mesures, notamment sur la vie quotidienne des entreprises et sur le rapport de
nos concitoyens à l'emploi.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que, aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir
de la deuxième lecture au Sénat des propositions de loi, la discussion des
articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du Parlement n'ont
pas encore adopté un texte identique.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. - I. - L'article L. 122-45 du code du travail est ainsi rédigé
:
«
Art. L. 122-45
. - Aucune personne ne peut être écartée d'une
procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation
en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet
d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de
rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification,
de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de
renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs,
de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille, de son
appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une
nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou
mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son
patronyme ou, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail dans le cadre
du titre IV du livre II du présent code, en raison de son état de santé ou de
son handicap.
« Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une
mesure discriminatoire visée à l'alinéa précédent en raison de l'exercice
normal du droit de grève.
« Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une
mesure discriminatoire pour avoir témoigné des agissements définis aux alinéas
précédents ou pour les avoir relatés.
« En cas de litige relatif à l'application des alinéas précédents, le salarié
concerné ou le candidat à un recrutement, à un stage ou à une période de
formation en entreprise présente des éléments de fait laissant supposer
l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments,
il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée
par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa
conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures
d'instruction qu'il estime utiles.
« Toute disposition ou tout acte contraire à l'égard d'un salarié est nul de
plein droit. »
« II à VII. -
Non modifiés.
»
L'amendement n° 1, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Dans la première phrase du quatrième alinéa du texte proposé par le I de cet
article pour l'article L. 122-45 du code du travail, remplacer les mots :
"présente des éléments de fait laissant supposer", par les mots : "établit des
faits qui permettent de présumer". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Nous nous sommes déjà largement exprimés, les uns et les
autres, à ce sujet. Par conséquent, je n'y insiste pas davantage.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 2, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Dans la deuxième phrase du quatrième alinéa du texte proposé par le I de
l'article 1er pour l'article L. 122-45 du code du travail, remplacer les mots :
"est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination" par
les mots : "n'est pas contraire aux dispositions énoncées aux alinéas
précédents". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Cet amendement tend à reprendre les dispositions que nous
avions adoptées lors des deux premières lectures. Il nous paraît en effet
préférable de nous rapprocher davantage de la rédaction de la directive
européenne du 29 juin 2000, laquelle prévoit qu'il incombe à la partie
défenderesse de prouver qu'il n'y a pas eu violation du principe de l'égalité
de traitement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 2, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
M. le président.
« Art. 2. - I. - Après l'article L. 122-45 du code du travail, il est inséré
un article L.122-45-1 ainsi rédigé :
«
Art. L. 122-45-1
. - Les organisations syndicales représentatives au
plan national, départemental, pour ce qui concerne les départements
d'outre-mer, ou dans l'entreprise, peuvent exercer en justice toutes actions
qui naissent de l'article L. 122-45, dans les conditions prévues par celui-ci,
en faveur d'un candidat à un emploi, à un stage ou une période de formation en
entreprise ou d'un salarié de l'entreprise, sans avoir à justifier d'un mandat
de l'intéressé, pourvu que celui-ci ait été averti par écrit et ne s'y soit pas
opposé dans un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle
l'organisation syndicale lui a notifié son intention. L'intéressé peut toujours
intervenir à l'instance engagée par le syndicat.
« Les associations régulièrement constituées depuis cinq ans au moins pour la
lutte contre les discriminations peuvent exercer en justice toutes actions qui
naissent de l'article L. 122-45, dans les conditions prévues par celui-ci, en
faveur d'un candidat à un emploi, à un stage ou une période de formation en
entreprise ou d'un salarié de l'entreprise sous réserve qu'elles justifient
d'un accord écrit de l'intéressé. Celui-ci peut toujours intervenir à
l'instance engagée par l'association et y mettre un terme à tout moment. »
« I
bis
et II. -
Non modifiés
. »
L'amendement n° 3, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« A la fin de la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I
de cet article pour l'article L. 122-45-1 du code du travail, remplacer les
mots : "sans avoir à justifier d'un mandat de l'intéressé, pourvu que celui-ci
ait été averti par écrit et ne s'y soit pas opposé dans un délai de quinze
jours à compter de la date à laquelle l'organisation syndicale lui a notifié
son intention" par les mots : "sous réserve qu'elles justifient d'un accord
écrit de l'intéressé". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet
rapporteur.
Il s'agit du mandat qui est donné à une organisation
syndicale pour plaider à la place de l'intéressé. Cet amendement vise à
rétablir la rédaction adoptée par le Sénat en première et en deuxième
lecture.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 3, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 4, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Compléter la dernière phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de
l'article 2 pour l'article L. 122-45-I du code du travail par les mots : "et y
mettre un terme à tout moment". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Cet amendement est à nos yeux très important puisque c'est
celui sur lequel nous avions fondé un espoir compte tenu de l'attitude de nos
collègues députés lors de la commission mixte paritaire.
Je ne comprends pas que les recommandations qui ont été adoptées par nos
collègues députés en ce qui concerne les associations ne vaillent pas pour les
organisations syndicales. Il nous paraît utile de rétablir le texte tel que
nous l'avions adopté en première et en deuxième lecture, et nous espérons que
nos collègues députés y réfléchiront de nouveau. Je le répète, M. Jean-Pierre
Michel, député de la Haute-Saône, partageait notre manière de voir les choses,
et je crois que le président, M. Jean Le Garrec, avait été ébranlé par cette
attitude.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.
Défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 4.
Mme Gisèle Printz.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à Mme Printz.
Mme Gisèle Printz.
Bien évidemment, nous voterons contre cet amendement. En effet, nous entendons
dire clairement que les syndicats doivent pouvoir intervenir, dans ce cas comme
dans d'autres, sans avoir à justifier d'un accord écrit de l'intéressé, et ce
pour deux raisons.
D'abord, le salarié, s'il doit absolument autoriser le recours par écrit, sera
immanquablement victime de pressions. Le fait que son autorisation n'ait pas à
être formellement obtenue le libère de ce risque et permet de mieux assurer la
défense de ses droits et de ses intérêts.
Ensuite, le syndicat n'a pas pour vocation de défendre un seul salarié : son
action doit avoir une portée générale et, surtout, porter sur un point de
droit. Il convient donc de ne pas restreindre ses possibilités d'action.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 4
M. le président.
« Art. 4. - I. - Après le quatrième alinéa de l'article L. 123-1 du code du
travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de litige relatif à l'application du présent article, le salarié
concerné ou le candidat à un recrutement présente des éléments de fait laissant
supposer l'existence d'une discrimination, directe ou indirecte, fondée sur le
sexe ou la situation de famille. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie
défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments
objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après
avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime
utiles. »
« II. - L'article L. 123-6 du même code est ainsi modifié :
« 1° Après les mots : "organisations syndicales représentatives", sont insérés
les mots : "au plan national ou" ;
« 2° Après les mots : "en faveur", sont insérés les mots : "d'un candidat à un
emploi ou" ;
3° à 5°
Supprimés.
»
L'amendement n° 5, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Dans la première phrase du texte proposé par le I de l'article 4 pour
insérer un alinéa après le quatrième alinéa de l'article L. 123-1 du code du
travail, remplacer les mots : "présente des éléments de fait laissant supposer"
par les mots : "établit des faits qui permettent de présumer". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Comme pour les deux amendements qui suivent, n°s 6 et 7, il
s'agit d'un amendement de coordination avec ceux que nous venons d'adopter.
Je ne pense pas utile de les présenter plus longuement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat.
L'avis du Gouvernement est défavorable sur les trois
amendements n°s 5, 6 et 7.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 6, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« A la fin de la deuxième phrase du texte proposé par le I de l'article 4 pour
insérer un alinéa après le quatrième alinéa de l'article L. 123-1 du code du
travail, remplacer les mots : "est justifiée par des éléments objectifs
étrangers à toute discrimination" par les mots : "n'est pas contraire aux
dispositions énoncées aux alinéas précédents". »
La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
L'amendement n° 7, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Rétablir les 3° à 5° du II de l'article 4 dans la rédaction suivante :
« 3° Les mots : "sans avoir à justifier d'un mandat de l'intéressé, pourvu que
celui-ci ait été averti par écrit et ne s'y soit pas opposé dans un délai de
quinze jours à compter de la date à laquelle l'organisation syndicale lui a
notifié son intention" sont remplacés par les mots : "sous réserve qu'elles
justifient d'un accord écrit de l'intéressé" ;
« 4° Le deuxième alinéa est complété par les mots : "et y mettre un terme à
tout moment" ;
« 5° Le dernier alinéa est supprimé. »
La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Je mets aux voix l'amendement n° 7, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Article 7
(Pour coordination)
M. le président.
« Art. 7. - I. - Il est inséré, dans le code de l'action sociale et des
familles, un article L. 315-14-1 ainsi rédigé :
«
Art. L. 315-14-1.
- Dans les établissements et services mentionnés à
l'article L. 312-1, le fait qu'un salarié ou un agent a témoigné de mauvais
traitements ou privations infligés à une personne accueillie ou relaté de tels
agissements ne peut être pris en considération pour décider de mesures
défavorables le concernant en matière d'embauche, de rémunération, de
formation, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion
professionnelle, de mutation ou de renouvellement du contrat de travail, ou
pour décider la résiliation du contrat de travail ou une sanction
disciplinaire.
« En cas de licenciement, le juge peut prononcer la réintégration du salarié
concerné si celui-ci le demande. »
« II. - Il est inséré, dans le même code, un article L. 443-11 ainsi rédigé
:
«
Art. L. 443-11.
- Les dispositions de l'article L. 315-14-1 sont
applicables aux salariés d'une personne ou d'un couple accueillant. » -
(Adopté.)
Intitulé de la proposition de loi
M. le président.
L'amendement n° 8, présenté par M. Souvet, au nom de la commission, est ainsi
libellé :
« Compléter l'intitulé de la proposition de loi par les mots : "à l'embauche
et dans l'emploi". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Il existe de nombreuses formes de discrimination, pour le
logement, pour l'entrée dans les salles de spectacle ou dans les boîtes de
nuit. Aussi avons-nous souhaité préciser qu'il s'agit ici de discriminations à
l'embauche et dans l'emploi. Nos collègues députés ne partagent pas cet avis.
En ce qui nous concerne, nous maintenons cette disposition.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 8, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'intitulé de la proposition de loi est ainsi modifié.
Les autres dispositions de la proposition de loi ne font pas l'objet de la
nouvelle lecture.
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la
parole à M. Gournac pour explication de vote.
M. Alain Gournac.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
groupe du RPR du Sénat qui s'est toujours engagé dans la lutte contre toutes
les formes de discrimination, qui ne peut être qu'en accord avec la volonté du
Gouvernement de se doter d'un arsenal législatif à cet effet.
Comme l'a excellemment expliqué notre rapporteur, il demeure, après les deux
premières lectures, deux séries de dispositions ayant donné lieu à un désaccord
avec l'Assemblée nationale : le régime de la charge de la preuve et le rôle
reconnu aux syndicats et aux associations pour se substituer aux salariés dans
une procédure contentieuse.
Concernant le premier point d'achoppement, il nous semble que le texte proposé
par notre rapporteur, que le Sénat vient d'adopter, constitue un arsenal
équilibré qui devrait permettre de faire progresser considérablement l'état du
droit. Reprenant littéralement le texte des directives européennes, qui
correspondent au droit déjà appliqué par la plupart de nos partenaires
européens, il évite l'écueil de la multiplication de contentieux au sein des
entreprises, qui ne sont pas outillées pour y faire face. Il évite également
l'instauration d'un climat de psychose, à l'occasion duquel certains employeurs
pourraient être amenés à privilégier systématiquement les candidatures de
personnes susceptibles d'être discriminées afin de se prémunir contre toute
contestation ou, plus grave, pourraient renoncer à embaucher.
Quant au rôle des syndicats et des associations dans la défense du salarié
présumé victime d'une discrimination, l'Assemblée nationale a finalement adopté
les modifications proposées par le Sénat concernant l'encadrement de l'action
des associations. Celles-ci devront pouvoir justifier de l'accord écrit du
salarié et ce dernier pourra mettre un terme à tout moment à l'action de
l'association. La liberté du salarié est ainsi reconnue. On peut, dans ces
conditions, regretter que la même démarche n'ait pas prévalue concernant
l'action du syndicat. Cela justifie le rétablissement du texte du Sénat sur ce
sujet.
Pour toutes ces raisons, le groupe du RPR du Sénat votera cette proposition de
loi telle qu'elle a été amendée par la Haute Assemblée.
(Applaudissements
sur les travées du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Franchis.
M. Serge Franchis.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
nous arrivons au terme d'une discussion qui a permis d'enrichir le texte sur un
certain nombre de points grâce aux apports du Sénat.
En effet, la Haute Assemblée a pu intégrer, par exemple, parmi les motifs de
discrimination, le motif de l'âge, qui s'est ajouté ainsi aux discriminations
liées au sexe, à l'origine ou aux orientations personnelles.
Il est vrai qu'aujourd'hui une personne de cinquante ans a beaucoup plus de
mal à retrouver un emploi qu'une personne de trente ans, même si elle peut
présenter les compétences requises et une expérience confirmée.
Durant les deux lectures, le Sénat a eu à coeur d'imposer certains principes
qui sont en conformité avec la directive européenne du 29 juin 2000 relative à
la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes,
sans distinction de race ou d'origine ethnique.
Il est surprenant que l'Assemblée nationale n'ait pas cru devoir suivre la
même ligne. C'est la raison principale de l'échec de la commission mixte
paritaire. En effet, nos deux assemblées ne se sont pas entendues sur la
principale disposition du texte, je veux parler de l'aménagement de la charge
de la preuve.
Par deux fois, le Sénat a souhaité que le salarié « établisse des faits » qui
permettent de présumer l'existence d'une discrimination. Cette rédaction est en
conformité avec la directive européenne.
L'Assemblée nationale s'est pourtant opposée à cette exigence de bon sens et
de sagesse. Sa position va indéniablement engendrer des abus au préjudice de
l'employeur qui, perpétuellement, devra se justifier.
Par ailleurs, un second différend demeure entre les deux assemblées pour
savoir si un syndicat peut se dispenser de l'accord du salarié pour intenter
une action en justice.
Cette position est une atteinte au respect de la volonté de la personne. Le
Sénat, respectueux des droits de la personne et du droit en général, n'a pu
l'admettre.
Avec les membres du groupe de l'Union centriste, nous avons donc adopté les
amendements proposés par le rapporteur de la commission des affaires sociales,
notre excellent collègue et ami Louis Souvet, auquel je veux rendre hommage
pour ses compétences en la matière.
Il a toujours su, avec modération et impartialité, orienter notre assemblée
dans la voie de la sagesse et du respect du droit.
Avec mes collègues du groupe de l'Union centriste, je voterai donc le texte
amendé une troisième fois par la majorité sénatoriale. Celle-ci est consciente
de la nécessité impérieuse de respecter le principe de l'égalité de traitement
entre les personnes, en conformité avec les directives européennes, mais
également de permettre une lutte plus efficace contre les discriminations en
préservant non seulement les droits des victimes mais également ceux des
responsables d'entreprise. En effet, dans cette affaire, il n'y a pas les bons,
d'un côté, et les méchants, de l'autre, comme semblent le penser certains.
Si des progrès sont encore à faire dans la lutte contre les discriminations -
il y en a, il y en aura toujours ! - il ne faut pas pour autant compromettre la
nécessaire marge de manoeuvre des entreprises dans la gestion de leur
personnel.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
(La proposition de loi est adoptée.)
8
RAPPEL AU RÈGLEMENT
M. Emmanuel Hamel.
Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président.
La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel.
Monsieur le président, le renouvellement partiel du Sénat a eu lieu le 23
septembre dernier, voilà donc vingt-cinq jours.
Combien de temps les panneaux sur lesquels sont affichés les résultats d'un
scrutin bientôt ancien vont-ils encore occuper le salon des Messagers d'Etat ?
Non que l'on puisse dire qu'ils encombrent, ce serait irrespectueux pour ceux
de nos collègues qui peuvent éprouver une joie sans cesse renouvelée à lire,
depuis vingt-cinq jours, la confirmation de leur entrée dans cette noble maison
! Mais pensez à la peine de ceux qui n'ont pas été réélus. Vont-ils devoir,
pendant des semaines, voire des mois ou des années, supporter l'affichage de
résultats d'élections qui leur furent funestes ?
M. le président.
Mon cher collègue, d'après les informations dont je dispose, ces panneaux
seront retirés dans les tout prochains jours. Cela étant dit, je vous remercie
de l'attention que vous portez à nos anciens collègues.
9
NOMINATION DE MEMBRES
D'ORGANISMES EXTRAPARLEMENTAIRES
M. le président.
Je rappelle que la commission des affaires culturelles a proposé des
candidatures pour plusieurs organismes extraparlementaires.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par
l'article 9 du règlement.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées, et je proclame :
- M. Robert Laufoaulu membre du Comité national de l'initiative française pour
les récifs coralliens, l'IFRECOR ;
- MM. Daniel Eckenspieller et Jean-François Picheral membres titulaires et Mme
Annie David et M. Jean-Léonce Dupont membres suppléants de la commission de
surveillance et de contrôle des publications destinées à l'enfance et à
l'adolescence ;
- M. Louis de Broissia membre du conseil d'administration de la société France
Télévision ;
- M. Philippe Richert membre du conseil d'administration de la société
nationale de programme France 3 ;
- M. Jean-François Picheral membre du conseil d'administration de la société
nationale de programme Radio France ;
- M. Louis Duvernois membre du conseil d'administration de la société
nationale de programme Radio France internationale, RFI ;
- Mme Françoise Férat membre suppléant de l'Observatoire national de la
sécurité des établissements scolaires et d'enseignement supérieur ;
- et M. Fernand Demilly membre du Conseil national des fondations.
10
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de M. Nicolas About une proposition de loi relative au partage de la
réversion des pensions militaires d'invalidité.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 33, distribuée et renvoyée à la
commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle
d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
11
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au mardi 23 octobre 2001 :
A 9 h 30 :
1. Questions orales suivantes :
I. - M. Pierre Hérisson rappelle à M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement que le syndicat intercommunal du lac d'Annecy (SILA),
syndicat mixte, est bénéficiaire de la part de l'Etat d'une concession
d'outillage public en date du 20 janvier 1989 pour une durée de quarante ans,
relative aux équipements du
slip-away
de Sevrier et de ses annexes, et
justifiée par la nécessité de préserver les eaux du lac d'Annecy de toute
pollution.
A ce titre, le SILA exploite dans la concession un équipement permettant de
sortir et de remettre à l'eau des bateaux à passagers, en vue de leur
entretien, à l'abri, par leur propriétaire.
Les contraintes diverses liées au fonctionnement de cet équipement (état de
vétusté, besoins de souplesse dans son utilisation), au regard de la
réglementation applicable aux contrôles périodiques des bateaux à passagers,
sont de plus en plus limitantes, surtout en considération des récentes
évolutions technologiques permettant désormais de procéder aux contrôles
d'étanchéité, de l'arbre d'hélice, etc., sans la mise à sec systématique des
bateaux qui représente une opération lourde nécessitant des équipements et des
immobilisations importants. D'autre part, le risque de corrosion est bien
moindre en eau douce qu'en milieu marin.
Aussi, il lui demande s'il n'envisage pas de faire évoluer les dispositions
réglementaires, qui prendraient mieux en compte ces caractéristiques et qui
assoupliraient les règles actuellement applicables aux contrôles des bateaux à
passagers, facilitant ainsi le recours aux contrôles sous-lacustres par
plongeurs sans mise à sec obligatoire des bateaux. (N° 1097.)
II. - M. Jean-Pierre Vial attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur
sur les incidences de la loi n° 96-369 du 3 mai 1996 relative aux services
d'incendie et de secours. La départementalisation de ces services a entraîné
une dommageable et forte progression des dépenses à la charge des collectivités
locales : pour la Savoie, le budget du SDIS est passé de 130 à 170 millions de
francs entre 1999 et 2000, soit une augmentation, en moyenne de plus de 50 %
pour les communes. Certes, la loi n° 99-1126 du 28 décembre 1999 prévoit une
majoration exceptionnelle de la dotation globale d'équipement des départements
en cause, mais elle n'est consentie que sur trois ans, ce qui signifie qu'à
court terme le financement stable des services d'incendie et de secours n'est
pas assuré. Chacun s'accorde à dire que des solutions raisonnables sont à
envisager dans les plus brefs délais. Ayant pris note des dispositions du
projet de loi relatif à la démocratie de proximité, il voudrait insister sur un
certain nombre de points.
Premièrement, il est nécessaire que le Gouvernement s'engage à faciliter une
meilleure et logique contribution des assurances aux interventions de secours
en montagne. Les miraculés spéléologues de la grotte de Gournois dans le Doubs,
le mois dernier, rappellent l'intervention spéléologique sur le Margerias en
Savoie durant l'hiver 2000, laquelle a coûté 550 000 francs à la charge de la
collectivité locale, en d'autres termes à la charge du contribuable local. Les
risques montagne sont grands et les pratiques de loisirs de plus en plus
nombreuses. Pour la seule année 2000, 1 697 accidents nécessitant des secours
ont eu lieu, toutes catégories de sports et de loisirs confondues, pour le seul
territoire savoyard.
Concernant les interventions dans le domaine des secours routiers, qui
représentent 10 % du total des interventions en Savoie, il semble anormal que
ces accidents, qui entrent dans le cadre de la garantie obligatoire automobile,
ne puissent pas bénéficier de la prise en charge des frais de secours. Il
s'agit d'une mesure d'équité à l'égard des départements à forte circulation
routière transit ou tourisme, qui doivent à l'heure actuelle assurer des
actions de secours et de sécurité disproportionnées par rapport au parc
automobile de leur population. Il convient de rappeler que plusieurs pays
européens ont déjà mis en oeuvre le principe d'une contribution des
assurances.
Enfin, il est nécessaire de prendre en compte une juste péréquation entre
départements en fonction des risques encourus. La Savoie est un département qui
connaît un grand nombre de risques, soit trente-six recensés sur une échelle de
quarante-trois risques. Les charges qui en résultent sont trop lourdes et
démesurées pour les collectivités qui doivent les supporter. Là encore, il
apparaît nécessaire qu'une péréquation soit assurée par l'Etat au profit des
départements marqués par la réunion d'un grand nombre de risques, qu'il ne
serait pas équitable de laisser à leur seule charge.
Il lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles sont ses intentions
précises sur ces trois points particuliers. (N° 1112.)
III. - M. Jean-Paul Amoudry appelle tout spécialement l'attention de M. le
secrétaire d'Etat à l'industrie sur les préoccupations de M. le maire de
Meillerie (Haute-Savoie), partagées par de nombreux élus de ce département dans
lequel La Poste, après avoir décidé de fermer un certain nombre de ses bureaux
durant la période estivale, envisage désormais leur fermeture définitive.
C'est ainsi le cas de la commune de Meillerie, dont la fermeture définitive du
bureau de poste a été annoncée à la fin du mois de juillet 2001, en dépit des
protestations des élus locaux et de très nombreux habitants de la commune, et
sans qu'une véritable concertation ait été engagée avec la municipalité et la
population.
A l'heure où le Gouvernement a souhaité traduire, dans différents textes
législatifs, sa volonté de parvenir à un développement durable et équilibré du
territoire, de telles décisions portent un très grave préjudice à la qualité du
service public auquel ont droit les habitants des communes rurales.
Au surplus, de telles mesures témoignent de la part des pouvoirs publics
d'actes en totale opposition avec les objectifs législatifs.
C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir intervenir auprès de la
direction de La Poste afin qu'une véritable concertation avec les élus locaux
puisse s'instaurer et qu'aucune fermeture de bureau de poste n'intervienne sans
que toutes alternatives envisageables n'aient été recherchées et proposées aux
élus concernés, et que les actes des pouvoirs publics soient conformes aux
orientations affichées dans les plus récentes lois relatives au territoire de
la République. (N° 1124.)
IV. - Eu égard aux résultats décevants enregistrés lors des derniers
championnats du monde d'athlétisme, il y a lieu de s'interroger sur les raisons
d'un tel retard par rapport à nos partenaires de la Communauté européenne.
Certains paramètres dépendent directement des pouvoirs publics, nous pouvons
donc les modifier favorablement, c'est notamment le cas du sport à l'école. Par
conséquent, M. Louis Souvet demande à M. le ministre de l'éducation nationale
si la réduction des moyens consacrés à l'UNSS (Union nationale du sport
scolaire) via la réduction des horaires de disponibilité va se poursuivre. (N°
1128.)
V. - M. Michel Doublet demande à M. le ministre de l'intérieur quelles mesures
le Gouvernement compte prendre pour simplifier le régime de subventions
d'investissement versées par l'Etat aux collectivités locales, notamment en
matière d'autorisation de commencer les travaux dès réception par
l'administration du dossier dûment complété. En effet, l'article 5 du décret n°
72-196 du 10 mars 1972 précise qu'aucun commencement d'exécution de projet ne
peut être opéré avant la date à laquelle le dossier est complet, bloquant ainsi
l'initiative des communes et le développement des entreprises locales. (N°
1129.)
VI. - M. Hubert Haenel attire l'attention de M. le ministre de l'équipement,
des transports et du logement sur la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000
relative à la solidarité et au renouvellement urbains qui généralise la
régionalisation du transport ferroviaire de voyageurs et fait des régions des
autorités organisatrices de transport à partir du 1er janvier 2002. A cette
fin, l'article 129 de la loi SRU prévoit que les régions passent avec la SNCF
des conventions qui fixent les conditions d'exploitation et de financement des
services ferroviaires relevant de la compétence régionale. En cas de retard
dans l'adoption de ces conventions ou d'absence d'accord, il lui demande
quelles dispositions il envisage de prendre pour mettre en oeuvre, le cas
échéant, les dispositions de l'article 130 aux termes desquelles il est inséré,
après l'article L. 1612-15 du code général des collectivités territoriales, un
article L. 1612-15-1 ainsi rédigé : « En cas d'absence de convention visée à
l'article 21-4 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 précitée, le préfet de
région peut mettre en oeuvre, dans les conditions de l'article L. 1612-15, une
procédure d'inscription d'office au budget de la région, au bénéfice de la
Société nationale des chemins de fer français dans la limite de la part de la
compensation visée au quatrième alinéa de l'article L. 1614-8-1 » et quelle
serait la situation des relations entre la SNCF et le conseil régional entre le
1er janvier 2002 et l'aboutissement de la procédure d'inscription d'office. (N°
1133.)
VII. - M. Jean-Patrick Courtois appelle l'attention de M. le ministre de
l'intérieur sur l'application du dispositif de réduction du temps de travail
des personnels de police. En effet, ceux-ci sont soumis à deux régimes de
travail distincts. Le premier est le régime cyclique, qui concerne la plupart
des personnels en tenue. Le second est le régime hebdomadaire, qui concerne les
personnels civils, administratifs et un certain nombre de personnels en tenue.
Dans ce second régime, la durée hebdomadaire de travail est encore de 40 heures
30 par semaine, ce qui représente 1 822,5 heures par an, et non de 39 heures
par semaine. La compensation de 1 heure 30 est de dix jours durant l'hiver. Le
passage aux 35 heures entraînerait une compensation supplémentaire de 26 jours
et demi, ce qui représente cinq semaines plus un jour et demi. Ainsi, le total
des congés dus serait de cinq semaines de congés annuels, deux semaines de
compensation pour les 39 heures, ainsi que cinq semaines et un jour et demi de
compensation pour les 35 heures. Le total des congés dus représenterait douze
semaines et un jour et demi, soit au total trois mois. A ces congés, il
convient d'ajouter les repos récupérateurs dus au titre des permanences et des
astreintes.
Ainsi, l'application du dispositif de la réduction du temps de travail
entraînerait une diminution importante du nombre d'heures de travail effectuées
par les personnels de police. Seul un paiement des heures supplémentaires à
défaut d'un recrutement conséquent semble être la solution pour combler le
manque d'heures résultant de l'application de la réduction du temps de travail.
Le paiement des heures supplémentaires permettrait de maintenir le potentiel
opérationnel actuel des personnels de police et contribuerait ainsi à préserver
la qualité et l'efficacité du travail qu'ils effectuent.
En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui indiquer s'il entend
prendre promptement des mesures afin de procéder, dans le cadre de
l'application du dispositif de réduction du temps de travail, au paiement des
heures supplémentaires effectuées par les personnels de police. (N° 1134.)
VIII. - M. Robert Bret appelle l'attention de M. le ministre de l'économie,
des finances et de l'industrie concernant les conséquences induites par la
réforme du code des marchés publics sur le fonctionnement des mairies
d'arrondissement.
Il rappelle que l'actuel article 2511-22 du code général des collectivités
territoriales (CGCT) relatif à Paris, Marseille et Lyon donne la possibilité au
conseil municipal de déléguer aux conseils d'arrondissement le pouvoir de
traiter des mémoires ou des factures et de passer des contrats, à l'exception
des marchés. Or l'article 1er du nouveau code des marchés publics tel que
modifié par le décret n° 2001-210 du 7 mars 2001, en disposant que « les
marchés publics sont des contrats conclus à titre onéreux [...] par des
personnes de droit public pour répondre à leurs besoins en matière de travaux,
de fournitures ou de services », ouvre la voie à interprétation juridique quant
aux compétences des mairies d'arrondissement. Deux lectures s'opposent
désormais en la matière : soit l'on considère que, sur le fondement du CGCT,
les conseils d'arrondissement n'ont pas le pouvoir de traiter les marchés, et
il convient d'en tirer les conséquences, à savoir interdire aux mairies
d'arrondissement la possibilité de signer les marchés, et donc tous les
contrats ; soit l'on prend en considération la volonté du législateur de 1982
qui a voulu déléguer aux mairies d'arrondissement le pouvoir de contracter les
marchés sans formalité préalable. Dans ce dernier cas, une modification du code
général des collectivités locales s'impose. A cet égard, il souligne que, dans
le projet de loi de démocratie de proximité, en instance au Sénat, l'article 15
nonies
nouveau, introduit à l'Assemblée nationale, a réaffirmé le sens
de la loi de 1982 en matière de décentralisation en donnant aux conseils
d'arrondissement le droit - et non plus la seule faculté - de traiter sur
mémoires ou sur factures et de passer des contrats, à l'exception des marchés
publics.
Aussi, et dans l'attente de l'entrée en vigueur de cette loi, il lui demande
de bien vouloir lui confirmer que l'esprit de la loi de 1982 est garanti malgré
la réforme réglementaire du code des marchés publics et que les mairies
d'arrondissement peuvent ainsi continuer de contracter les marchés sans
formalité préalable. (N° 1137.)
IX. - M. Claude Domeizel souhaite appeler l'attention de Mme le ministre de
l'emploi et de la solidarité sur la situation financière de la Caisse nationale
de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), l'un des principaux
régimes de retraite français.
En effet, malgré une très bonne situation démographique et des entrées de
cotisations supérieures au montant des prestations à servir (70,1 milliards de
francs pour 53,7 milliards de francs en 2002), la CNRACL a vu disparaître ses
réserves en 2000 et s'enfonce désormais dans le déficit en raison du montant
exorbitant des charges qui lui sont imputées pour équilibrer les régimes en
déficit, dans le cadre des compensations (212 millions de francs fin 2000, 465
millions de francs fin 2001 et 1 265 millions de francs attendus pour fin
2002).
Le résultat paradoxal de cette situation est que l'on transforme un régime
normalement excédentaire en un régime déficitaire, laissant ainsi accréditer
l'idée que ce régime serait mal géré : un comble pour un régime qui a des coûts
de gestion exemplaires et doit s'endetter pour équilibrer les autres
régimes.
Si aucune mesure de sauvegarde n'est prise rapidement afin de limiter de
manière significative les ponctions exercées au titre de ces compensations, le
régime de retraite par répartition des agents de nos collectivités
territoriales et de nos hôpitaux va se trouver confronté à une détérioration
profonde et irréversible de ses comptes.
Force est de constater que les mesures positives du Gouvernement prises en
1999 pour rétablir l'équilibre financier de la CNRACL (augmentation de 0,5 % de
la contribution patronale en 2000 et 2001 et abaissement du taux de
recouvrement de la surcompensation de 4 % en 2000 et 2001) sont encore
insuffisantes.
Face à cette situation, il lui demande si le moment n'est pas venu pour les
pouvoirs publics :
- premièrement, de réformer les mécanismes de compensation, notamment par la
programmation d'un abaissement progressif du taux de recouvrement de la
surcompensation, en commençant par 4 % à compter du 1er janvier 2001 ;
- deuxièmement, d'opérer un rééquilibrage au moyen d'un mécanisme à deux
volets : d'une part, l'alignement du taux de la cotisation d'assurance maladie
appliqué aux collectivités locales (11,50 %) sur celui pratiqué par l'Etat
(9,70 %) ; d'autre part, le relèvement concomitant de 1,80 % de la cotisation
vieillesse patronale auprès de la CNRACL. Cette opération, totalement neutre
pour les budgets des collectivités locales, éloignerait les menaces à court
terme qui pèsent sur la caisse de retraites ;
- troisièmement, de compenser l'exonération de la cotisation patronale pour la
retraite sur les rémunérations des personnels employés en qualité de titulaire
par les CCAS. (N° 1140.)
X. - M. Patrick Lassourd souhaite appeler l'attention de M. le ministre de
l'intérieur sur le problème suivant.
Lorsqu'un établissement public de coopération intercommunale (communauté de
communes, ou communauté d'agglomération ou communauté urbaine), exerce la
totalité de la compétence « collecte et traitement des déchets » et adhère pour
l'ensemble de cette compétence, à un syndicat mixte, il peut recevoir la taxe
ou la redevance en lieu et place de ce syndicat mixte.
Le syndicat mixte doit alors, avant le 15 octobre de l'année, instituer sur
son territoire la TEOM (taxe d'enlèvement des ordures ménagères), et autoriser
les EPCI compétents qui le souhaitent à percevoir cette recette en son lieu et
place.
Ainsi, l'EPCI décidant de percevoir la TEOM en lieu et place du syndicat
mixte, détermine la répartition de la dépense permettant l'instauration de taux
différents par commune, selon plusieurs critères dont la fréquence de
ramassage.
L'EPCI étant l'organe délibérant pour répartir la dépense, il semble
souhaitable qu'il soit également compétent pour dresser la liste des locaux
exonérés de la TEOM sur son territoire, ce qui n'est pas le cas actuellement,
cette compétence étant dévolue au syndicat.
Il désirerait connaître la position du ministre sur ce point. (N° 1141.)
XI. - Mme Hélène Luc attire l'attention de M. le ministre de l'éducation
nationale sur les problèmes auxquels doivent faire face les instituts
universitaires de formation des maîtres en cette rentrée 2001, et notamment
l'IUFM de Créteil. En effet, le manque de moyens matériels et humains se fait
particulièrement sentir en cette rentrée scolaire, à un moment où le nombre
d'enseignants stagiaires est en augmentation et où celui des candidats aux
concours d'enseignement devrait également être en hausse, étant donné les
besoins importants de renouvellement des personnels, avec l'évolution du nombre
de départs à la retraite dans les prochaines années. C'est d'ailleurs dans
cette perspective et avec juste raison qu'une campagne médiatique de
recrutement de nouveaux enseignants et une réforme de la formation dans les
IUFM ont été lancées. Or il se trouve que le nombre de candidats au métier
d'enseignant est actuellement en baisse de 30 % par rapport à l'année dernière,
que les besoins en postes d'enseignants titulaires sont partout très importants
et que l'exigence d'une formation, d'un suivi et d'un encadrement de qualité
n'a jamais été aussi forte, aussi bien pour les formés que pour les formateurs.
Aussi, elle l'interpelle sur les moyens financiers et humains supplémentaires
qu'il compte engager pour remédier à cette situation. Elle pense qu'il est
indispensable, dans les plus brefs délais, d'instaurer une bourse d'études -
IPES - pour aider les étudiants les plus motivés et qui n'en ont pas pour
autant les moyens financiers. (N° 1142.)
XII. - M. Simon Sutour attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des
finances et de l'industrie sur le devenir de l'usine MELOX, filiale de la
COGEMA, implantée près de Bagnols-sur-Cèze, dans le Gardrhodanien.
Un projet de décret concernant l'autorisation d'extension de production de
l'usine MELOX du site nucléaire de Marcoule est actuellement en attente de
signature.
L'autorité de sécurité nucléaire a relevé que l'usine de fabrication de
combustible au plutonium MOX de Cadarache ne répond plus aux normes de sécurité
en matière sismique.
La COGEMA a donc, dans un souci évident de sécurité, demandé la fermeture de
l'usine de production de combustible MOX, en s'engageant à un transfert rapide
de la production sur l'usine MELOX de Marcoule.
Ce regroupement des capacités de production est conditionné à la révision du
décret de production de MOX limité actuellement à 115 tonnes de combustibles
afin de le porter à 195 tonnes et de prendre le relais des usines de Cadarache
mais aussi de celles de Dessel, en Belgique, plus anciennes et dont la mise aux
normes actuelles pourrait s'avérer anti-économique.
La signature de ce décret est aujourd'hui nécessaire pour que l'usine MOX
puisse à la fois honorer ses engagements commerciaux en matière de livraison de
combustible, mais également pour résoudre au plus vite et dans les meilleures
conditions la situation des personnels concernés du site de Cadarache.
Par ailleurs, il apparaît qu'au-delà des aspects commerciaux et sociaux
l'utilisation optimale de la capacité de production constitue, selon le
secrétaire d'Etat à l'industrie, « un moyen de réacheminer vers les pays
clients le plutonium issu du retraitement du combustible usé dans les
meilleures conditions ».
Aussi, face à l'urgence économique et sociale, il lui demande de lui préciser
ses intentions concernant la demande de signature du décret évoqué
précédemment. (N° 1144.)
XIII. - M. Jean-François Picheral appelle l'attention de M. le ministre
délégué à la santé sur les conséquences du cancer colorectal et la situation en
France de sa prise en charge.
Les cliniciens, comme les chercheurs, portent un intérêt croissant au cancer
colorectal. Cela tient non seulement à la fréquence et à la gravité de ce
cancer, mais aussi aux progrès obtenus récemment dans les domaines de la
recherche fondamentale et épidémiologique, permettant ainsi d'envisager une
évolution à court terme favorable du traitement d'une telle pathologie.
A l'heure actuelle, deuxième cause de mortalité par cancer tous sexes
confondus, le cancer colorectal, par sa fréquence élevée, doit faire l'objet
d'un dépistage efficace. Son pronostic s'est certes amélioré au cours des vingt
dernières années, les deux facteurs déterminants étant la baisse de la
mortalité opératoire et, pour une part plus faible, un diagnostic plus précoce.
Il semble donc que ce soit sur ce dernier point que les efforts doivent
désormais se porter. A la différence d'autres cancers, celui touchant le côlon
et le rectum est habituellement précédé, pendant de nombreuses années, d'une
tumeur bénigne, l'adénome. Ces lésions bénignes précancéreuses aisément
identifiables permettent donc d'envisager une stratégie de prévention primaire
et secondaire rapide. Par ailleurs, ces traitements efficaces au stade initial
offrent des conditions parfaites à son dépistage sur la population à risque.
Recommandé par l'Organisation mondiale de la santé, l'hémoccult, seul test à
avoir été pour l'heure largement évalué sur des échantillons de population, est
un test de dépistage s'adressant aux personnes de cinquante à soixante-quatorze
ans. Test caractérisé non seulement par la facilité de sa réalisation, son coût
peu élevé mais aussi l'absence de risque pour les personnes dépistées, son
efficacité semble ne plus faire de doute dans les milieux médicaux. De nombreux
tests de recherche d'un saignement occulte dans les selles sont par ailleurs à
l'étude.
Bien évidemment, les cancers colorectaux, comme les autres cancers,
nécessitent en outre une prise en charge pluridisciplinaire, seul moyen de
garantir ainsi un traitement adapté. Aussi la mise en place progressive de
réseaux de soins, qui seule pourra permettre d'atteindre cet objectif, se
devra-t-elle d'inclure des unités de concertation pluridisciplinaire.
L'implication active, et donc une formation adaptée, des médecins traitants
mais aussi des médecins du travail, apparaît donc désormais comme une
nécessité. Devant ce constat encourageant, seule une politique de dépistage de
masse paraît pouvoir faire évoluer ce grave problème que représente le cancer
colorectal.
Devant la pertinence des données médicales actuelles, il lui demande donc de
lui indiquer quelles dispositions seront envisagées dans un bref délai, afin de
donner une pleine efficacité à un programme de dépistage dont la validité
scientifique a été, depuis longtemps, largement observée. (N° 1146.)
XIV. - M. René-Pierre Signé souhaiterait attirer l'attention de M. le ministre
de l'intérieur sur la possibilité de la reconnaissance des communes de montagne
du Morvan comme massif, aux termes de l'article 5 de la loi n° 85-30 du 9
janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne.
La politique nationale de la montagne est loin d'avoir épuisé ses vertus
malgré les efforts continus du Gouvernement. La nécessaire prise en compte de
la spécificité et des difficultés de la montagne demeure tout à fait
d'actualité.
Dans cette perspective, la politique du massif constitue de plus en plus le
bon cadre de définition et de mise en oeuvre de la politique de la montagne,
dans lequel les dispositifs contractuels doivent s'inscrire. La question se
pose alors de savoir pourquoi le Morvan ne pourrait pas bénéficier du
classement « massif ».
Il ne s'agit pas de bénéficier uniquement d'une étiquette mais bel et bien des
avantages en termes de politique que constituerait cette reconnaissance. La
politique de massif s'appuie, en effet, sur les schémas interrégionaux de
développement et d'aménagement prévus par la loi n° 99-533 du 25 juin 1999
d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire.
Cette reconnaissance permettrait d'assurer le renforcement d'une logique de
développement durable. Il s'agit ici de ne pas considérer l'avenir de ces
communes comme celui de zones à handicap mais comme celui de zones encore en
manque de développement. La difficulté n'est pas de mettre à disposition des
outils adaptés, même innovants, mais de faire émerger des projets dans ces
zones.
Il lui demande donc tout simplement s'il ne serait pas possible de saisir
l'occasion du passage au Sénat en janvier prochain du projet de loi sur la
démocratie de proximité et de son article 12
bis
pour assurer la
reconnaissance des communes de montagne du Morvan comme massif. (N° 1147.)
XV. - M. Nicolas About attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la
défense chargé des anciens combattants sur le sort réservé à la maison de
retraite pour anciens combattants Ville-Lebrun, sise à Sainte-Mesme, dans les
Yvelines.
Il lui rappelle qu'il est intervenu, à deux reprises, auprès de son
prédécesseur pour qu'une solution humaine soit retenue dans ce dossier et qu'on
n'abandonne pas les quatre-vingt-trois pensionnaires de cet établissement, au
moment de sa fermeture.
Cette maison de retraite a été fermée en janvier 2000 pour des raisons de
sécurité et les résidents ont été transférés provisoirement dans d'autres
centres d'accueil, en attendant la reconstruction de cet établissement. Devant
l'émotion suscitée par cette fermeture, aussi bien parmi les pensionnaires,
dont l'âge est compris entre quatre-vingts et quatre-vingt-quinze ans, et leurs
familles que parmi le personnel soignant, le ministre lui-même s'était déplacé
à Sainte-Mesme pour rassurer les uns et les autres sur l'avenir de
Ville-Lebrun. Les demandes de permis de démolition et de reconstruction du
nouveau projet ont donc été déposées, recevant l'aval des services
concernés.
Or, malgré le soutien écrit du ministre et l'accord de principe délivré par M.
le préfet des Yvelines, par la voix de son secrétaire général, les anciens
combattants des Yvelines se heurtent actuellement à l'avis défavorable de la
direction départementale des affaires sanitaires et sociales, la DDASS, pour la
création de cet établissement. L'argument avancé consiste à dire que ce nouveau
projet provoquerait un « suréquipement » de lits dans la zone de
Saint-Arnoult-en-Yvelines, faisant passer le taux d'équipement départemental de
145 % à 268 %. Cet avis de la DDASS omet toutefois de dire que la centaine de
places en question ne représente pas une création mais bien une reconstruction.
On ne peut donc pas dire que cet établissement risque d'augmenter le quota de
places, dans la mesure où ces places existaient déjà.
Il ne comprend pas que l'on ait décidé d'évacuer temporairement ces
quatre-vingt-trois pensionnaires pour raisons de sécurité, pour ensuite leur
interdire leur réintégration définitive, pour une sombre histoire de quota.
C'est pourquoi il lui demande d'intervenir auprès des services concernés pour
qu'une solution digne soit trouvée pour ces anciens combattants qui ont
combattu pour défendre notre liberté et l'honneur de notre nation. (N°
1150.)
XVI. - M. Jean-Paul Alduy appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur
sur l'article 2 de la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement
et à la simplification de la coopération intercommunale qui a créé l'article L.
5216-10 du code général des collectivités locales qui définit les conditions
dans lesquelles le périmètre d'une communauté d'agglomération peut être étendu
à l'initiative du représentant de l'Etat dans le département.
Il lui rappelle que cette procédure d'extension peut être engagée « dans un
délai de trois ans à compter de la publication de la loi », soit le 13 juillet
2002. Il lui indique que cette date est difficilement compatible avec le
principe de l'annualité budgétaire et, compte tenu des nombreuses situations
financières et fiscales qui doivent être préalablement résolues avant l'arrêté
approuvant l'extension de périmètre, il lui demande s'il ne lui paraît pas
opportun et souhaitable que le délai maximal fixé par l'article 2 de la loi
précitée soit reporté au 31 décembre 2002, afin de pouvoir disposer d'un délai
supplémentaire pour étudier de façon complète et sûre toutes les opérations
préalables, qu'elles soient juridiques, financières, budgétaires ou fiscales.
Il lui précise que ce report permettrait, en outre, de faire coïncider
l'effectivité de l'extension avec le début de l'exercice budgétaire 2003 pour
éviter ainsi les complications et aléas de changement de périmètre en cours
d'année. (N° 1153.)
XVII. - M. Gérard Delfau attire l'attention de M. le ministre de l'équipement,
des transports et du logement sur la situation intenable que crée à court
terme, pour le Languedoc-Roussillon, le lancement du TGV Perpignan-Barcelone
par les gouvernements français et espagnol.
En effet, cette heureuse initiative souligne cruellement le retard pris par le
tronçon Nîmes-Montpellier, dont le début des travaux ne pourrait intervenir au
mieux qu'en 2005. Quant à la réalisation du chaînon manquant,
Montpellier-Perpignan, elle serait repoussée au-delà de 2015. Autant dire aux
calendes grecques ! Si l'on ajoute à cela que l'écoulement du fret ferroviaire,
à travers la région, est au bord de l'asphyxie, alors que le tonnage des
camions en provenance de l'Espagne sature déjà l'autoroute A 9, on est en droit
de s'interroger, dans ces conditions, sur la pertinence de cette décision, sans
qu'il y ait simultanément un engagement des pouvoirs publics pour l'achèvement
rapide de la ligne TGV de Nîmes à la frontière espagnole.
Il s'étonne du silence gêné de l'Etat, qui ne semble pas mesurer le risque
prochain de thrombose des moyens de communications ferroviaire et routier entre
l'Espagne et la France. Les conséquences, en termes de développement
économique, de sécurité routière et de pollution, en sont pourtant déjà
redoutables.
Il lui demande donc quand, comment et avec qui ce dossier majeur sera abordé.
(N° 1154.)
XVIII. - Mme Marie-Claude Beaudeau demande à M. le ministre de l'équipement,
des transports et du logement de lui faire connaître les mesures envisagées
d'annulation du projet de réorganisation du dispositif de circulation aérienne,
suite au rejet des propositions de nouveaux couloirs aériens par les élus, les
associations et les riverains des aéroports d'Orly et de Roissy. Ce nouveau
plan de gestion, s'il était maintenu, se traduirait par une intensification du
trafic, une insécurité croissante, un véritable quadrillage de tout le ciel
francilien. Elle lui demande de lui faire connaître les dispositions qu'il
compte prendre pour engager une véritable concertation en faveur d'un nouveau
projet prenant en compte les avis et propositions des riverains, de leurs élus
et de leurs associations. (N° 1156.)
A 16 heures et le soir :
2. Scrutins pour l'élection de six membres titulaires et de six membres
suppléants représentant la France à l'assemblée parlementaire du Conseil de
l'Europe et à l'assemblée de l'Union de l'Europe occidentale.
3. Discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après
déclaration d'urgence, relatif aux musées de France (n° 323, 2000-2001).
Rapport (n° 5, 2001-2002) de M. Philippe Richert, fait au nom de la commission
des affaires culturelles.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
lundi 22 octobre 2001, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 22 octobre 2001, à dix-sept
heures.
4. Discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après
déclaration d'urgence, portant ratification de l'ordonnance n° 2001-273 du 28
mars 2001 transposant certaines dispositions de la directive 1999/62/CE du
Parlement et du Conseil du 17 juin 1999 relative à la taxation des poids lourds
pour l'utilisation de certaines infrastructures et réformant le régime
d'exploitation de certaines sociétés concessionnaires d'autoroutes (n° 16,
2001-2002).
Rapport (n° 26, 2001-2002) de M. Ladislas Poniatowski, fait au nom de la
commission des affaires économiques et du Plan.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 22 octobre 2001, à dix-sept
heures.
5. Discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après
déclaration d'urgence, relatif à la sécurité des infrastructures et systèmes de
transport et aux enquêtes techniques après événement de mer, accident ou
incident de transport terrestre (n° 15, 2001-2002).
Rapport (n° 29, 2001-2002) de M. Jean-François Le Grand, fait au nom de la
commission des affaires économiques et du Plan.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
lundi 22 octobre 2001, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 22 octobre 2001, à dix-sept
heures.
Délai limite pour les inscriptions de parole
Question orale avec débat n° 37 de M. Yves Coquelle à M. le secrétaire d'Etat
à l'industrie sur le renforcement des mesures de sécurité autour des sites
Seveso.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
mercredi 24 octobre 2001, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-sept heures.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD
ERRATA
au compte rendu intégral de la séance du 27 juin 2001
MODERNISATION SOCIALE
Page 3658, 2e colonne, 5e alinéa, 2e ligne :
Au lieu de :
« L. 322-4-21 »,
Lire :
« L. 322-4-20-1 ».
Page 3658, 2e colonne, 6e alinéa, 1re ligne :
Au lieu de :
« L. 322-4-21 »,
Lire :
« L. 322-4-20-1 ».
Page 3692, 2e colonne, dans le texte de l'amendement n° 94 (antépénulième
alinéa, 3e ligne :
Au lieu de :
« deuxième alinéa »,
Lire :
« troisième alinéa ».
Page 3696, 1re colonne, 2e alinéa, 3e ligne :
Au lieu de :
« L. 217-7-1 »,
Lire :
« L. 212-7-1 ».
ORGANISMES EXTRAPARLEMENTAIRES
COMITÉ NATIONAL DE L'INITIATIVE FRANÇAISE
POUR LES RÉCIFS CORALLIENS (IFRECOR)
Lors de sa séance du 18 octobre 2001, le Sénat a désigné M. Robert Laufoaulu
pour siéger au sein du Comité national de l'initiative française pour les
récifs coralliens (IFRECOR), en remplacement de M. Jean Bernadaux.
COMMISSION DE SURVEILLANCE ET DE CONTRÔLE DES PUBLICATIONS DESTINÉES À
L'ENFANCE ET À L'ADOLESCENCE
Lors de sa séance du 18 octobre 2001, le Sénat a désigné M. Jean-François
Picheral pour siéger, en qualité de membre titulaire, et Mme Annie David et M.
Jean-Léonce Dupont pour siéger, en qualité de membres suppléants, au sein de la
commission de surveillance et de contrôle des publications destinées à
l'enfance et à l'adolescence, en remplacement de MM. Roger Hesling, Guy
Poirieux et Ivan Renar. Il a en outre reconduit M. Daniel Eckenspieller dans
ses fonctions de membre titulaire de cette commission.
CONSEIL D'ADMINISTRATION
DE LA SOCIÉTÉ FRANCE TÉLÉVISION
Lors de sa séance du 18 octobre 2001, le Sénat a désigné M. Louis de Broissia pour siéger au sein du conseil d'administration de la société France Télévision, en remplacement de M. Jean-Paul Hugot.
CONSEIL D'ADMINISTRATION DE LA SOCIÉTÉ
NATIONALE DE PROGRAMME FRANCE 3
Lors de sa séance du 18 octobre 2001, le Sénat a désigné M. Philippe Richert pour siéger au sein du conseil d'administration de la Société nationale de programme France 3, en remplacement de M. André Diligent.
CONSEIL D'ADMINISTRATION DE LA SOCIÉTÉ
NATIONALE DE PROGRAMME RADIO FRANCE
Lors de sa séance du 18 octobre 2001, le Sénat a désigné M. Jean-François
Picheral pour siéger au sein du conseil d'administration de la Société
nationale de programme Radio France, en remplacement de M. Michel
Dreyfus-Schmidt.
CONSEIL D'ADMINISTRATION DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE DE PROGRAMME RADIO FRANCE
INTERNATIONALE (RFI)
Lors de sa séance du 18 octobre 2001, le Sénat a désigné M. Louis Duvernois
pour siéger au sein du conseil d'administration de la Société nationale de
programme Radio France internationale (RFI), en remplacement de M. Jean-Paul
Hugot.
OBSERVATOIRE NATIONAL DE LA SÉCURITÉ DES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES ET
D'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
Lors de sa séance du 18 octobre 2001, le Sénat a désigné Mme Françoise Férat
pour siéger en qualité de membre suppléant au sein de l'Observatoire national
de la sécurité des établissements scolaires et d'enseignement supérieur, en
remplacement de M. Jean Bernadaux.
CONSEIL NATIONAL DES FONDATIONS
Lors de sa séance du 18 octobre 2001, le Sénat a reconduit M. Fernand Demilly dans ses fonctions de membre du Conseil national des fondations.
NOMINATION DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
M. Bernard Cazeau a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 409
(2000-2001) de M. Roland Courteau visant à autoriser les opérations de
parrainage en faveur du vin.
M. Roland Muzeau a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 428
(2000-2001) de M. Ivan Renar visant la préservation et le développement des
industries textiles et de l'habillement.
M. Marcel Lesbros a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 430
(2000-2001) de M. Claude Huriet visant à étendre à tous les orphelins de
personnes déportées le bénéfice du décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000.
Mme Michelle Demessine a été nommée rapporteur de la proposition de loi n° 435
(2000-2001) de Mme Nicole Borvo tendant à restaurer un diplôme spécifique de
gynécologie médicale et à garantir le libre accès des femmes aux
gynécologues.
M. Guy Fischer a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 441
(2000-2001) de M. Pierre Lefebvre tendant à instaurer réparation pour les
époux, les orphelins de déportés, résistants, fusillés, massacrés par les nazis
ou leurs complices français.
DÉLÉGATIONS PARLEMENTAIRES
DÉLÉGATION DU SÉNAT AUX DROITS DES FEMMES ET À L'ÉGALITÉ DES CHANCES ENTRE LES
HOMMES ET LES FEMMES
(En application de l'article 6
septies
de l'ordonnance n° 58-1100 du 17
novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires)
Lors de sa séance du 18 octobre 2001, le Sénat a nommé M. Yvon Collin membre
de la délégation du Sénat aux droits des femmes et à l'égalité des chances
entre les hommes et les femmes, en remplacement de M. André Boyer,
démissionnaire.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Mesures compensatoires destinées aux commerçants
et artisans pour les risques liés au passage à l'euro
1158.
- 17 octobre 2001. -
M. Dominique Leclerc
souhaite attirer l'attention de
M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à
l'artisanat et à la consommation
sur les difficultés pratiques que les conditions d'introduction des pièces et
billets en euros vont poser aux 290 000 entreprises du commerce et de
l'artisanat de l'alimentation en détail. Il lui serait reconnaissant de bien
vouloir lui faire savoir si le Gouvernement envisage de répondre favorablement
à ces professionnels qui demandent que des compensations leur soient accordées
face aux risques liés au changement de monnaie et à la mission de service
public qui leur est confiée.
Projet de nouveau couloir aérien desservant Orly
1159.
- 17 octobre 2001. -
M. Michel Pelchat
attire l'attention de
M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement
sur les interrogations et critiques suscitées par le projet de nouveau couloir
aérien desservant l'aéroport d'Orly, officiellement présenté par Eurocontrol,
le 24 septembre dernier. Une alternative à ce tracé a été élaborée par le
comité de coordination contre le couloir aérien (C4A), avec le plein soutien du
président de l'association Sud Essonne démocratie en ligne. Cette proposition
de trajectoire tient compte des contraintes techniques et de sécurité d'un tel
dossier tout en cherchant à préserver au mieux les populations et
l'environnement concernés. Elle présente en outre le mérite d'aborder la
question des couloirs de départ alors que jusqu'à présent le débat ne s'est
polarisé que sur le seul couloir d'arrivée. La trajectoire de décollage ainsi
envisagée créerait beaucoup moins de nuisances sonores que celle actuellement
préparée par la direction générale de l'aviation civile (DGAC) sans
concertation, sans la moindre information et en adoptant la politique du fait
accompli. C'est pourquoi de nombreux élus du sud de l'Essonne et moi-même ne
comprenons pas le refus catégorique opposé au projet C4A. Quatre arguments
critiques ont été soulevés par Eurocontrol à l'égard de ce projet : des zones
militaires « écornées », le croisement de couloirs de départ et d'arrivée,
l'impossibilité de gérer deux flux d'arrivées parallèles en étape de base et la
modification des procédures de décollage d'Orly face à l'est. Mais, tous ces
inconvénients peuvent être palliés. Il lui demande par conséquent quelles
directives il entend donner pour que la réflexion sur ce projet de nouveau
couloir aérien se poursuivre dans un véritable climat de dialogue avec la
population et les élus, et s'il entend respecter son engagement de retirer le
projet de couloir au-dessus de l'Essonne élaboré par la DGAC.
ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du jeudi 18 octobre 2001
SCRUTIN (n° 8)
sur la motion n° 1 présentée par M. Bernard Seillier au nom de la commission
des affaires sociales tendant à opposer la question préalable à la proposition
de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle
lecture, portant amélioration de la couverture des non-salariés agricoles
contre les accidents du travail et les maladies
professionnelles.
Nombre de votants : | 317 |
Nombre de suffrages exprimés : | 315 |
Pour : | 204 |
Contre : | 111 |
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Contre :
22.
N'a pas pris part au vote :
1. _ Mme Michelle Demessine (membre du
Gouvernement).
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (19) :
Pour :
11.
Contre :
6. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard
Delfau, Rodolphe Désiré, et François Fortassin.
Abstentions :
2. _ MM. Paul Girod et Jacques Pelletier.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (95) :
Pour :
93.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ M. Christian Poncelet, président du
Sénat, et M. Serge Vinçon, qui présidait la séance.
GROUPE SOCIALISTE (83) :
Contre :
83.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (53) :
Pour :
53.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (40) :
Pour :
40.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :
Pour :
7.
Ont voté pour
Nicolas About
Philippe Adnot
Jean-Paul Alduy
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Christian Cointat
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Robert Del Picchia
Jean-Paul Delevoye
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Sylvie Desmarescaux
Yves Detraigne
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Alain Joyandet
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kerguéris
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-François Le Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean Louis Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Bruno Sido
Daniel Soulage
Louis Souvet
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Jean-Paul Virapoullé
François Zocchetto
Ont voté contre
Michèle André
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marie-Christine Blandin
Nicole Borvo
Didier Boulaud
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Yvon Collin
Gérard Collomb
Yves Coquelle
Raymond Courrière
Roland Courteau
Yves Dauge
Annie David
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Evelyne Didier
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Guy Fischer
François Fortassin
Thierry Foucaud
Jean-Claude Frécon
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Josiane Mathon
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Tremel
André Vantomme
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Abstentions
MM. Paul Girod, Jacques Pelletier, Christian Poncelet, président du Sénat, et
Serge Vinçon, qui présidait la séance.
Ne peut prendre part au vote (en application de l'article premier de
l'ordonnance n° 58-1099 du 17 novembre 1958 portant loi organique, pour
l'application de l'article 23 de la Constitution) : Mme Michelle Demessine.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 317 |
Nombre des suffrages exprimés : | 315 |
Majorité absolue des suffrages exprimés : | 158 |
Pour : | 205 |
Contre : | 110 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés, conformément à la liste ci-dessus.