SEANCE DU 25 JUIN 2001
M. le président.
Par amendement n° 46, Mme Pourtaud et les membres du groupe socialiste et
apparentés proposent d'insérer, après l'article 15, un article ainsi rédigé
:
« I. - L'exposition du public aux champs électromagnétiques doit rester
inférieure à des valeurs limites fixées par arrêté conjoint des ministres
chargés de la santé et des télécommunications.
« II. - L'article L. 34-9 du code des postes et télécommunications est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les émetteurs radioélectriques, notamment ceux utilisés dans les réseaux
mentionnés aux articles L. 33-1 et L. 33-2 et les installations mentionnées à
l'article L. 33-3, ainsi que les équipements terminaux connectés aux réseaux
précités ne peuvent être mis en service ou utilisés que s'ils respectent les
valeurs limites fixées en application de l'article additionnel après l'article
15 de la loi n° du portant diverses dispositions d'ordre social,
éducatif et culturel. »
« III. - Dans le
e
) du I de l'article L. 33-1 du même code, après le
mot : "environnement" sont insérés les mots : "et de la santé".
« IV. - La première phrase du quatrième alinéa du I de l'article L. 97-1 du
même code est ainsi rédigée :
« Elle coordonne l'implantation sur le territoire national des stations
radioélectriques de toute nature afin d'assurer la meilleure utilisation des
sites disponibles et de limiter l'exposition du public aux champs
électromagnétiques. »
La parole est à M. Chabroux.
M. Gilbert Chabroux.
La communauté scientifique n'a pas encore clairement identifié les risques sur
la santé humaine d'une exposition aux champs électromagnétiques. On a évoqué la
responsabilité des mobiles dans la survenue de maux de tête, voire de cancers
du cerveau. A ce jour, aucune preuve n'a été apportée à ces hypothèses. Les
députés ont d'ailleurs adopté, en nouvelle lecture, un amendement à l'article
15 prévoyant la remise, en septembre 2002, par l'Agence française de sécurité
sanitaire environnementale, d'un rapport sur l'existence ou l'inexistence de
risques sanitaires d'une exposition aux rayonnements électromagnétiques.
Par notre amendement, nous proposons d'aller plus loin. L'inquiétude des
consommateurs est réelle : les riverains sont de plus en plus réticents à voir
se dresser sur les toits des immeubles des antennes de téléphones mobiles. A
Marseille, des parents inquiets ont obtenu le retrait d'une antenne qui était
posée sur le toit de l'école où étaient scolarisés leurs enfants. A
Montpellier, le tribunal a récemment annulé une convention pour la pose d'une
antenne-relais de téléphones portables entre un opérateur et un syndicat de
copropriétaires, au motif que la société de téléphonie mobile n'avait pas
prévenu le syndic des risques éventuels.
Les opérateurs informent peu à peu les consommateurs et participent à des
programmes d'étude. Ils disent respecter les recommandations édictées par
l'Union européenne en juillet 1999 sur la limitation de l'exposition du public
aux champs électromagnétiques. Ces recommandations n'ont pas encore été
transposées dans notre droit. Il est, je crois, temps de le faire, et
l'adoption de cet amendement le permettra.
Il est aussi de notre responsabilité de mettre en oeuvre le principe de
précaution. Un rapport, qui a été remis en début d'année à la direction
générale de la santé, ne tranche pas la question des conséquences sur la santé
de l'usage des mobiles ou des antennes-relais. Il fait cependant quelques
recommandations, que l'adoption de notre amendement, là encore, permettrait de
mettre en oeuvre.
Cet amendement est composé de quatre paragraphes.
Le premier a pour objet d'indiquer que les valeurs limites d'exposition seront
fixées par arrêté conjoint des ministres chargés de la santé et des
télécommunications. Bien entendu, nous souhaitons que les normes de la
recommandation du Conseil du 12 juillet 1999 soient retenues et, si nécessaire,
que nous allions au-delà.
Le deuxième paragraphe vise à préciser que les émetteurs radioélectriques de
toute nature et les équipements terminaux qui ne respectent pas ces valeurs
limites ne pourront être ni mis en service ni utilisés.
Le troisième paragraphe prévoit d'imposer aux opérateurs de télécommunications
le respect de certaines prescriptions pour l'implantation de leurs équipements,
de manière à garantir que celle-ci ne présente aucun danger en termes de santé
pour les populations vivant aux alentours. Il permettra notamment d'inscrire
dans les cahiers des charges des opérateurs mobiles des dispositions relatives
à l'implantation des stations de base, comme par exemple, l'obligation de
respecter certains périmètres de sécurité ; je pense aux abords des écoles, des
hôpitaux et des crèches, comme le recommande le rapport que j'ai précédemment
cité.
Enfin, le quatrième paragraphe tend à permettre à l'Agence nationale des
fréquences de prendre en compte les valeurs limites des champs
électromagnétiques fixées par les pouvoirs publics dans la procédure de
délivrance des autorisations d'implantation des stations radioélectriques
prévue à l'article L. 97-1 du code des postes et télécommunications. Cela
permettra notamment de s'assurer que le champ total occasionné par plusieurs
émetteurs reste effectivement inférieur aux valeurs limites.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Louis Lorrain,
rapporteur.
Cet amendement vise à répondre aux interrogations
grandissantes de l'opinion publique en ce qui concerne les effets sanitaires
des antennes de radiotéléphonie mobile.
Toutefois, il paraît nécessaire, en ce domaine, de ne pas faire preuve de
précipitation. Même si nous nous sentons parfaitement concernés pas ce problème
- les préoccupations de M. Chabroux rejoignent d'ailleurs les nôtres - il
convient de ne légiférer qu'après avoir pris connaissance de tous les éléments
du dossier. Il s'agit là non pas de tergiverser, mais de faire preuve de
prudence et de bien aborder le problème au fond. La commission des affaires
sociales a d'ailleurs été saisie d'une proposition de loi dans ce sens dont
notre collègue Nelly Olin est rapporteur. En outre, la commission a décidé
d'attendre la remise des conclusions de l'étude menée à ce sujet par l'Office
parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques sous la
direction de notre collègue Claude Huriet.
Ce sujet est trop important pour pouvoir être réglé par une disposition
législative introduite sous forme d'article additionnel en nouvelle lecture et
après échec de la commission mixte paritaire, ce qui est plus grave,
c'est-à-dire sans que l'Assemblée nationale puisse ensuite l'amender. Je vous
propose donc, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement, tout
en comprenant parfaitement l'importance du sujet.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat.
J'émets un avis favorable. D'abord, ce texte permet la
transcription réglementaire au niveau français des normes encadrant les
activités de téléphonie mobile au vu des valeurs limites qui font partie de la
recommandation de juillet 1999 du Conseil des ministres européens chargés de la
santé. Cette réglementation vise l'ensemble des sources émettrices de champs
électromagnétiques. Elle résulte de travaux menés par un groupe d'experts, qui
ont été repris par l'Organisation mondiale de la santé.
Le texte proposé répond au souhait du Gouvernement de se doter d'outils
réglementaires nécessaires pour imposer aux opérateurs de services de
radiocommunication le respect de valeurs limites d'exposition du public
lorsqu'ils implantent des stations radioélectriques. L'Agence nationale des
fréquences sera chargée d'y veiller. Cet amendement s'inscrit pleinement dans
le cadre des recommandations formulées en février dernier par le groupe
d'experts présidé par le professeur Smirou et mandaté par les autorités
sanitaires sur les téléphonies mobiles, leurs stations de base et la santé,
ainsi que des axes d'action retenus par les pouvoirs publics et annoncés le 7
février dernier.
C'est pourquoi le Gouvernement émet un avis favorable sur ces dispositions de
renforcement de la sécurité sanitaire des activités de radiocommunication.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Souvet, rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, d'avoir émis
un avis favorable. Nous n'en attendions pas moins de votre part, compte tenu de
l'appartenance politique des auteurs de cet amendement.
Cela étant dit, s'agissant de la technique parlementaire, je souhaiterais
savoir ce que feront les députés face à cette disposition, puisqu'il s'agit
d'un cavalier qui vient au Sénat en nouvelle lecture.
M. Jean-Louis Lorrain,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur.
M. Jean-Louis Lorrain,
rapporteur.
La méthode me paraît quelque peu cavalière. Je voudrais
savoir pour quelle raison ce texte n'a pas été inséré par le Gouvernement dans
le projet de loi initial. J'aimerais bien avoir l'avis du Conseil
constitutionnel sur la méthode et sur ce texte, qui risquerait d'apporter
quelques surprises.
M. le président.
Cet avis viendra en son heure !
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 46, repoussé par la commission et accepté par
le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 15 bis