SEANCE DU 19 JUIN 2001
M. le président.
Je suis saisi par M. Vasselle, au nom de la commission, d'une motion n° 1
tendant à opposer la question préalable.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat :
« Considérant que la prestation spécifique dépendance instituée par la loi du
24 janvier 1997 constituait une première mais décisive étape dans l'attente
d'une loi instituant une prestation d'autonomie pour les personnes âgées
dépendantes ;
« Considérant que, lors de l'examen en première lecture du présent projet de
loi, le Sénat avait regretté le choix fait à dessein par le Gouvernement d'une
présentation complexe et ambiguë destinée à faire apparaître artificiellement
une rupture entre l'allocation personnalisée d'autonomie et la prestation
spécifique dépendance ;
« Considérant que l'allocation personnalisée d'autonomie retient pourtant
l'essentiel des apports de la prestation spécifique dépendance en tant qu'elle
est une prestation en nature servie et gérée par les départements et reposant
sur un plan d'aide individualisée ;
« Considérant que son dispositif est toutefois moins précis et moins
protecteur et renvoie pour l'essentiel à des décrets d'application dont les
projets, en dépit des engagements pris par le Gouvernement dès le 28 mars 2001,
n'ont pas été transmis aux parlementaires ;
« Considérant que, en première lecture, le Sénat a souhaité apporter un
certain nombre de précisions et de garanties figurant dans la loi du 24 janvier
1997 et qui sont parfaitement compatibles avec le texte du Gouvernement qu'il
en est ainsi, par exemple, de l'information des maires, de la possibilité de la
personne âgée de se faire assister de son médecin ou encore du contrôle
régulier de l'effectivité de l'aide apportée ;
« Considérant que l'Assemblée nationale a entendu revenir pour l'essentiel à
son texte initial, supprimant ainsi les précisions et garanties apportées par
le Sénat, que lorsque sa commission des affaires culturelles, familiales et
sociales entendait se rallier au texte du Sénat, le Gouvernement a pris,
lui-même, l'initiative de demander à l'Assemblée nationale de n'en rien faire
;
« Considérant que, lors de l'examen du présent projet de loi en première
lecture, le Sénat a pris acte que le dispositif du Gouvernement allait plus
loin que l'actuelle prestation spécifique dépendance qui s'était adressée en
priorité aux plus démunis et aux plus dépendants mais qu'il a fait grief au
Gouvernement de ne pas avoir assorti cette mesure généreuse des financements
nécessaires ;
« Considérant, de fait, que le Gouvernement reporte sur les départements et la
sécurité sociale le soin de financer les générosités de sa politique sociale
dont il s'exonère lui-même totalement ;
« Considérant que le financement de l'allocation personnalisée d'autonomie en
2002 fait appel à un effort supplémentaire des départements, à un prélèvement
opéré sur la contribution sociale généralisée affectée au fonds de solidarité
vieillesse et à une contribution des régimes de retraites ;
« Considérant que, dès 2003, le dispositif n'est plus financé et renvoie à un
rapport d'étape le soin de trouver les expédients nécessaires constituant
autant de menaces pour l'équilibre des finances départementales et des finances
sociales ;
« Considérant que le Sénat a estimé, en première lecture, que le prélèvement
opéré sur la contribution sociale généralisée constituait un double
détournement, d'abord pour financer une allocation qui n'est pas une prestation
de sécurité sociale, ensuite pour contribuer spécifiquement à un fonds de
formation professionnelle constitué au sein du fonds de financement de
l'allocation personnalisée d'autonomie ;
« Considérant qu'il a de même dénoncé la contribution des caisses de retraite,
imposition de toute nature dont ni le taux, ni l'assiette, ni les modalités de
recouvrement sont clairement identifiés ;
« Considérant que ces deux prélèvements amputent les excédents tant du Fonds
de solidarité vieillesse que de la Caisse nationale d'assurance vieillesse qui
doivent abonder le fonds de réserve des retraites ; que, dans ces conditions,
les moyens accrus consacrés à pallier les effets de la dépendance feront défaut
au service des pensions à compter de 2020 ;
« Considérant que cette politique de "Gribouille" ne saurait tenir lieu de
projet pour les personnes âgées ;
« Considérant qu'en conséquence le Sénat avait proposé un dispositif de
financement raisonnable faisant intervenir l'Etat au titre de la solidarité
nationale sous la forme d'un concours particulier au sein de la dotation
globale de fonctionnement des départements ;
« Considérant que, en nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a écarté cette
solution non sans apporter, à ce stade de la navette et à l'initiative du
Gouvernement, de profondes modifications aux modalités de répartition entre les
départements des concours du fonds de financement de l'allocation personnalisée
d'autonomie pour les deux exercices 2002 et 2003 ;
« Considérant que le projet de loi met à la charge des départements une
dépense supplémentaire en ne prévoyant qu'une compensation tardive et partielle
; que cette compensation s'opère selon des critères dont le texte ne précise
nulle part la pondération ;
« Considérant en outre que, selon l'article 72 de la Constitution, "les
collectivités territoriales s'administrent librement par des conseils élus et
dans des conditions prévues par la loi", que l'intervention, supprimée par
l'Assemblée nationale en première lecture mais rétablie par elle en nouvelle
lecture, d'une commission d'attribution, dont la composition est insuffisamment
définie et qui est chargée de "proposer" au président du conseil général
l'attribution de l'allocation, supprime de fait toute marge de manoeuvre aux
conseils élus pour s'administrer librement, que si l'objet de la dépense
apparaît clair, son ampleur reste incertaine ;
« Considérant qu'à l'occasion de la nouvelle lecture à l'Assemblée nationale,
le Gouvernement a tenu à apporter également des "précisions importantes" qui se
traduisent par la création d'un "groupe de suivi" de la tarification, d'un
"groupe de réflexions" sur le devenir des petites structures d'hébergement et
d'une réflexion sur la "mise à plat" des aides aux logements pour les personnes
hébergées en institutions, que, par ailleurs, le Gouvernement demande que lui
soient laissées "encore quelques semaines pour formaliser l'esquisse" du
dispositif qu'il propose pour l'examen des demandes d'attribution de
l'allocation personnalisée d'autonomie ;
« Considérant que se trouve ainsi illustrée la démarche du Gouvernement
tendant à proposer dans l'urgence au Parlement un texte non abouti et non
financé ;
« Considérant que le Gouvernement déplore que "le petit jeu de la navette
parlementaire (le contraigne) à une gymnastique complexe dont (il) espère (que)
le projet de loi sortira indemne" ;
« Considérant que cette conception du dialogue entre les Assemblées,
passablement éloignée des termes et de l'esprit de l'article 45 de la
Constitution, confirme le souci du Gouvernement de n'autoriser à l'Assemblée
nationale que des remords sur son propre texte, au demeurant fort insuffisants
pour en corriger les ambiguïtés et les imperfections et, en tout état de cause,
incapables de lui donner une base financière viable ;
« Décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de
loi n° 367 (2000-2001), adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en
nouvelle lecture, relatif à la prise en charge de la perte d'autonomie des
personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie. »
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement
du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative
ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour
quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie
au fond et le Gouvernement.
La parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée
n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. le rapporteur, auteur de la motion.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers
collègues, en ce qui concerne la motion tendant à opposer la question
préalable, je pense avoir été suffisamment clair et explicite dans la
discussion générale pour ne pas reprendre mon argumentation point par point.
Permettez-moi cependant d'apporter un éclairage supplémentaire à la Haute
Assemblée, à la suite de l'intervention de notre collègue Jean-Pierre Fourcade,
qui a justifié l'abstention de son groupe lors du vote de cette motion.
Je voudrais indiquer aux membres du RDSE qu'il n'existe pas, au fond, de
divergences fondamentales entre la démarche qu'ils auraient souhaité voir
adopter et celle de la majorité sénatoriale. Nous nous séparons simplement sur
la méthode et sur la procédure adoptée.
La commission a défini sa position en tirant les conséquences de l'attitude de
l'Assemblée nationale à l'égard du travail effectué par le Sénat en première
lecture.
Monsieur Fourcade, vous avez appelé l'attention de la Haute Assemblée sur cinq
propositions. Vous auriez souhaité que nous les réaffirmions une nouvelle fois
pour montrer à l'opinion quels étaient le sentiment et la volonté du Sénat en
matière de prestation d'autonomie.
Lors de la première lecture, la commission avait déposé quasiment toutes les
propositions auxquelles vous avez fait allusion, mis à part la proposition
concrète relative au système d'assurance, à laquelle je souscrivais à titre
personnel et qui avait été défendue devant l'opinion publique par l'opposition
nationale.
A mon sens, il faudra certainement qu'un jour nous revenions sur ce point pour
prendre une initiative en la matière. Pour l'instant, nous avons voulu faire
preuve de réalisme devant l'attitude adoptée par le Gouvernement, qui s'est
opposé à toutes les ouvertures que nous avons tenté de faire, même si elles
étaient susceptibles de recueillir l'assentiment desdeux assemblées.
Nous ne nous faisions donc aucune illusion quant à l'attitude qu'aurait le
Gouvernement à l'égard d'amendements reprenant des propositions que nous avions
faites en première lecture ni à celle de l'Assemblée nationale devant un texte
contenant des propositions, pourtant bien argumentées, telles que celles que
nous avions adoptées en première lecture et qui auraient dû recueillir
l'adhésion ou de l'Assemblée nationale ou du Gouvernement.
D'ailleurs, les amendements présentés aujourd'hui par le Gouvernement ne sont
pas de nature à nous laisser penser que celui-ci serait prêt à accepter en
nouvelle lecture des amendements qu'il aurait repoussés en première lecture.
Il nous a donc semblé que la moins mauvaise des solutions consistait à faire
adopter par la Haute Assemblée une motion opposant la question préalable
puisque le Gouvernement comme l'Assemblée nationale avaient fermé la
discussion.
Cela étant, sur l'essentiel, nous sommes d'accord. Comme l'a laissé entendre
notre collègue Huguet, il faudra sans doute revenir un jour sur ce texte ; on
s'apercevra alors que si on avait pris le temps de l'examiner, on aurait
certainement pu faire un meilleur travail. En tout cas, si l'opposition
actuelle devient majorité, il faudra absolument qu'elle prenne des initiatives
afin de mieux répondre non seulement à l'attente des personnes âgées mais
également à celle des différents acteurs du terrain.
(Applaudissements sur
les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. le président.
La parole est à Mme Campion contre la motion.
Mme Claire-Lise Campion.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la
motion opposant la question préalable qui nous est soumise semble se justifier
par l'amertume de la majorité de la commission des affaires sociales, qui a
constaté que ses amendements avaient été massivement rejetés par le
Gouvernement et supprimés par les députés à l'Assemblée nationale.
Je regrette que la majorité sénatoriale ait pris le parti, en première
lecture, de vouloir rétablir les caractéristiques de la PSD.
Vous vous opposez fréquemment aux projets du Gouvernement et aux textes votés
à l'Assemblée nationale, mes chers collègues, ce qui est parfaitement légitime,
car c'est par la confrontation démocratique qu'avance le débat d'idées au
bénéfice de l'efficacité des mesures concrètes qu'attendent nos concitoyens.
Mais, s'agissant de l'APA, vos amendements tendaient tout simplement à revenir
en arrière, c'est-à-dire à rétablir le dispositif antérieur de la PSD, que tout
le monde est unanime à dénoncer. La lucidité commandait de reconnaître cet
échec et de se concentrer sur l'avenir. Vous n'en avez pas été capables. Vous
avez préféré vous accrocher au passé plutôt que de reconnaître que nous avions
eu raison en 1996 et 1997...
M. Jean Chérioux.
Vous avez toujours raison, de toute façon !
Mme Claire-Lise Campion.
... de dénoncer les graves imperfections de la PSD.
Deviez-vous pour autant la revendiquer ? C'est votre problème. D'une certaine
façon, votre question préalable est utile pour éclairer l'opinion puisqu'elle
vous fait exprimer ce que nous souhaitons voir reconnu : l'APA constitue une
vraie rupture par rapport à la PSD et elle ouvre des perspectives.
Vous revendiquez la conservation de l'ancien système. Je vais donc faire un
bref comparatif.
L'APA représente un droit nouveau, universel, égal et objectif, ce qui est
considérable. Il permet à toute personne de plus de soixante ans se trouvant
dans une situation de dépendance physique ou mentale objective de bénéficier
d'un plan d'aide.
M. Charles Descours.
Pourquoi pas le cinquième risque ? Il faut aller jusqu'au bout !
Mme Claire-Lise Campion.
Ce plan est défini en concertation avec des professionnels pour tenir compte
des aspirations individuelles de la personne âgée et des capacités
d'accompagnement de son environnement. C'est un objectif très ambitieux que
personne ne devrait remettre en cause.
Des financements sont proposés pour réaliser ce plan en fonction du degré de
dépendance et du niveau de ressources.
C'est un objectif très ambitieux, que personne ne peut remettre en cause.
Chacun, en envisageant les difficultés qui pourraient survenir à la fin de sa
vie ou en considérant les contraintes que représente une personne âgée
dépendante pour sa famille, prend conscience que ce texte place l'ambition au
service du bons sens.
La PSD ne prenait pas en compte l'attente forte de nos concitoyens, qui est de
bénéficier de dispositifs susceptibles de donner corps à une attention sur
mesure.
Au moment de nous prononcer sur cette question préalable, nous devons,
d'abord, nous demander ce que, de l'APA ou de la PSD, nous préférerions pour
nous-mêmes ou pour un membre de notre famille. Je ne crois pas que, en tant
qu'usager, quiconque puisse hésiter longtemps avant de choisir l'APA !
M. Roland Huguet.
Très bien !
Mme Claire-Lise Campion.
Nous devons nous poser une seconde question en tant que responsables qui
légifèrent : les financements prévus pour l'APA seront-ils à la hauteur des
ambitions ?
La PSD affichait des principes, mais multipliait des conditions d'accès
dissuasives, pour masquer le manque de moyens. En fin de compte, elle ne
bénéficiait, de façon très inégale, qu'à 135 000 personnes sur les 800 000 en
situation de dépendance.
J'insiste sur le caractère ambitieux de l'APA. Celle-ci répond à deux
impératifs.
Il s'agit d'abord d'un impératif de progrès social. Il est d'autant plus
nécessaire de réaliser une avancée concrète que la PSD a engendré une énorme
désillusion. Il nous faut maintenant redonner de la crédibilité au dispositif
relatif à la dépendance et convaincre nos concitoyens de son accessibilité.
Le second impératif est lié au coût de la mesure. L'APA a, certes, un coût
élevé, à la mesure de l'ambition qu'elle traduit. Mais il n'y avait pas
d'argent pour financer la PSD. Or l'amélioration de la situation de notre
économie depuis quatre ans permet de dégager les ressources nécessaires.
M. Charles Descours.
Dans les départements, oui ! Pas au niveau de l'Etat !
Mme Claire-Lise Campion.
Si plus de moyens sont disponibles, au-delà du choix qui est fait de les
affecter à des avancées sociales, il nous revient, en tant que responsables,
d'avoir le souci de les employer de telle manière que, en retour, ils
nourrissent la croissance.
Nous voulons que les personnes âgées puissent bénéficier de la croissance,
mais également qu'elles en soient les actrices. C'est pourquoi nous augmentons
leur pouvoir d'achat de services d'aide à l'autonomie. Vingt mille emplois
seront créés.
M. Roland du Luart.
Financés par qui ?
Mme Claire-Lise Campion.
Par ailleurs, nous faisons en sorte que ces emplois correspondent à des
compétences variées et puissent enrichir l'expérience des personnes qui les
exercent. Le plan d'aide qui sera proposé permettra d'aller au-delà des
activités traditionnelles de portage de repas ou d'aide à la toilette et
d'accompagner la personne âgée dans la constitution ou le maintien de liens
sociaux à travers ces diverses activités. Un fonds de modernisation sera
institué pour promouvoir et renforcer cette évolution plus humaine.
L'APA ne vise pas seulement à permettre à nos concitoyens de cueillir les
fruits de la croissance. Elle est conçue pour la nourrir, à l'échelle du pays
comme à celle du département. Elle sera utile aux personnes âgées dépendantes
ainsi qu'à toutes celles et ceux qui les entourent.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Encore faut-il que la croissance soit au rendez-vous !
Mme Claire-Lise Campion.
Autre avantage de l'APA par rapport à la PSD : elle constitue une meilleure
base pour aller plus loin. Non seulement elle doit favoriser le maintien à
domicile, mais elle permet d'ouvrir la réflexion sur le droit à compensation
pour toute personne, quel que soit son âge, en situation de handicap physique,
psychique ou social, droit qui pourrait être envoyé dans le futur.
Avant d'aller plus loin, il faudra établir un premier bilan sur la manière
dont notre société utilise le dispositif de l'APA tel qu'il est d'ores et déjà
prévu. C'est pourquoi un rendez-vous est fixé en 2003 pour évaluer les premiers
résultats et mesurer l'évolution des besoins de financement. Il conviendra
alors de préciser comment peut être mobilisée la solidarité nationale,...
M. Hilaire Flandre.
Nous y voilà !
Mme Claire-Lise Campion.
... que ce soit dans le cadre d'un cinquième risque ou d'un dispositif
comparable à la CMU.
Il y a là une démarche de rupture qui fait écho aux mesures prises par le
Gouvernement depuis quatre ans dans plusieurs domaines et qui sont empreintes
de la même philosophie. J'en citerai deux : la loi contre les exclusions, avec
le programme TRACE, qui permet un suivi individualisé, et la loi sur les 35
heures. Celle-ci rend plus disponibles les actifs, leur permettant de consacrer
plus de temps et d'attention à leurs parents, renforçant ainsi les solidarités
familiales.
La réduction du temps de travail vise aussi à donner à chacun plus de temps
pour soi, ce que permet également l'APA en faisant bénéficier les familles d'un
soutien dans les soins qu'elles consacrent aux personnes âgées dépendantes. De
ce point de vue, l'APA constitue aussi un moyen de se libérer de certaines
servitudes.
Socialement ambitieux, ce texte est indiscutablement un outil pour mieux
appréhender le problème de la dépendance qui est lié au vieillissement de la
population, et cela vous ne pouvez le nier, mesdames, messieurs de la majorité
sénatoriale. Ce qui vous gêne peut-être - mais c'est un clivage que nous
revendiquons - c'est qu'il fait de l'efficacité économique un effet du progrès
social et non l'inverse.
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi
que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Paulette Guinchard-Kunstler,
secrétaire d'Etat.
Il fallait ouvrir les perspectives, en particulier
les perspectives financières : ce texte le fait.
Il fallait créer un droit pour les personnes âgées en perte d'autonomie : ce
texte le crée.
Il fallait affirmer la proximité et la décentralisation : ce texte
l'affirme.
M. Louis de Broissia.
Ah ?
M. Charles Descours.
C'est la décentralisation aux frais des départements !
Mme Paulette Guinchard-Kunstler,
secrétaire d'Etat.
Dès lors, le Gouvernement ne peut qu'être défavorable
à cette motion dont l'adoption aurait pour effet de clore le débat.
J'ajouterai simplement qu'il est à mes yeux dommage que l'APA fasse l'objet
d'une opposition uniquement politicienne.
M. Louis de Broissia.
Pas du tout !
M. Alain Joyandet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Joyandet.
M. Alain Joyandet.
Madame le secrétaire d'Etat, tout le monde, ici, est d'accord pour considérer
que le dispositif de la PSD, qui avait été créée sur l'initiative du Sénat,
doit être amélioré. Il n'y a aucune démarche politicienne. Nous nous efforçons
tous d'appréhender honnêtement les textes qui nous sont proposés par le
Gouvernement.
Notre excellent rapporteur, Alain Vasselle, a d'ailleurs clairement formulé
des propositions pour améliorer le texte que vous nous avez présenté. Au
demeurant, ces propositions n'étaient pas nécessairement incompatibles avec ce
qui avait été suggéré à l'Assemblée nationale.
Alain Vasselle a aussi dénoncé certaines des techniques employées par le
Gouvernement pour faire financer cette nouvelle politique sociale par d'autres
que lui. Quelques-uns des présidents de conseil général qui siègent dans cet
hémicycle s'en étaient d'ailleurs émus. Les nouvelles « tuyauteries » imaginées
ont été mises au jour et nous avons démontré que le mécanisme d'équilibrage
prévu allait peser sur les finances départementales.
Hélas ! sur ce point comme sur d'autres, aucun dialogue n'a été possible en
commission mixte paritaire.
Alain Vasselle a également dénoncé le procédé consistant, pour le
Gouvernement, à déposer des amendements au dernier moment. Au passage, cela
montre bien que ce texte est loin d'être définitivement au point.
A la lumière de l'analyse faite par la commission et compte tenu de
l'impossibilité d'entente avec l'Assemblée nationale, le groupe du RPR
soutiendra la motion présentée par le rapporteur tendant à opposer la question
préalable.
Nous regrettons vivement que le dialogue soit actuellement impossible avec
l'Assemblée nationale et croyez bien, Madame le secrétaire d'Etat, que notre
attitude, en cet instant, loin d'être politicienne, est au contraire
profondément responsable. Il serait en effet beaucoup plus facile, aujourd'hui,
en termes politiques, voire démagogiques, de soutenir les propositions que vous
nous soumettez, et M. Fourcade a eu tout à fait raison, à cet égard, de
souligner la coïncidence avec le débat d'orientation budgétaire.
Oui, contrairement à ce qu'a dit tout à l'heure notre collègue du groupe
socialiste, la position de la majorité sénatoriale est courageuse et
responsable, car nous voulons réellement améliorer le dispositif, mais en
sachant précisément qui paie quoi, et cela n'a rien à voir avec une opposition
purement politicienne.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du
RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix la motion n° 1, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l'adoption de cette motion aurait pour effet d'entraîner le
rejet du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
M. Raymond Courrière.
Comme cela, on verra qui soutient les personnes âgées et qui ne les soutient
pas !
M. le président.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Nombre de votants | 299 |
Nombre de suffrages exprimés | 299 |
Majorité absolue des suffrages | 150 |
Pour l'adoption | 200 |
Contre | 99 |
En conséquence, le projet de loi est rejeté.
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