SEANCE DU 30 MAI 2001
(précédemment réservé)
M. le président.
« Art. 7
quater
. - Après l'article L. 121-82 du code de la
consommation, il est inséré un article L. 121-84 ainsi rédigé :
«
Art. L. 121-84
. - La responsabilité du titulaire d'une carte
mentionnée à l'article L. 132-1 du code monétaire et financier n'est pas
engagée si la carte a été utilisée frauduleusement sans présentation physique
ou sans identification électronique. La seule utilisation d'un code
confidentiel ou de tout élément d'identification similaire n'est pas suffisante
pour engager la responsabilité du titulaire, sauf s'il a agi avec une
négligence constituant une faute lourde. En conséquence, dans ces deux cas, si
le titulaire de la carte conteste par écrit avoir effectué un paiement ou un
retrait, les sommes contestées lui sont recréditées sur son compte par
l'émetteur de la carte ou restituées, sans frais, au plus tard dans le délai
d'un mois à compter de la réception de la contestation. »
Je suis saisi de sept amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 49 est présenté par M. Schosteck, au nom de la commission des
lois.
L'amendement n° 101 est déposé par M. Vallet, au nom de la commission des
finances.
Tous deux tendent à rédiger comme suit cet article :
« Après l'article L. 132-2 du code monétaire et financier, il est inséré un
article L. 132-4 ainsi rédigé :
«
Art. L. 132-4. -
La responsabilité du titulaire d'une carte
mentionnée à l'article L. 132-1 n'est pas engagée si le paiement contesté a été
effectué frauduleusement sans présentation physique de la carte ou sans
identification électronique.
« De même, sa responsabilité n'est pas engagée en cas d'utilisation
frauduleuse du code confidentiel ou de tout élément d'identification, sauf s'il
a agi avec une négligence fautive.
« Dans les cas prévus aux deux alinéas précédents, si le titulaire de la carte
conteste par écrit avoir effectué un paiement ou un retrait, les sommes
contestées lui sont recréditées sur son compte par l'émetteur de la carte ou
restituées, sans frais, au plus tard dans le délai d'un mois à compter de la
réception de la contestation. »
Par amendement n° 119, M. Delfau propose, au début de la dernière phrase du
texte présenté par l'article 7
quater
pour l'article L. 121-84 du code
de la consommation, de remplacer les mots : « En conséquence » par le mot : «
Toutefois, ».
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 111 est présenté par M. Bret, Mme Borvo et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 120 est présenté par M. Delfau.
Tous deux tendent, dans la dernière phrase du texte proposé par l'article 7
quater
pour l'article L. 121-84 du code de la consommation, à supprimer
les mots : « par écrit ».
Les deux amendements suivants sont également identiques.
L'amendement n° 110 est présenté par M. Bret, Mme Borvo et les membres du
groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 121 est présenté par M. Delfau.
Tous deux tendent à compléter le texte proposé par l'article 7
quater
pour l'article L. 121-84 du code de la consommation par un alinéa ainsi
rédigé :
« Le titulaire d'une carte victime d'une utilisation frauduleuse de celle-ci
doit immédiatement confirmer à la banque ou institution financière émettrice
son opposition par écrit, quel que soit le support de cet écrit. Tout banquier
ou institution financière émettrice doit informer par écrit les titulaires des
cartes des sanctions encourues en cas d'opposition fondée sur une autre cause
que celles prévues à l'article L. 132-2 du code monétaire et financier. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 49.
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur.
Il s'agit de la responsabilité du titulaire d'une carte en
cas de fraude.
Sur la forme, cet amendement opère une codification dans le code monétaire et
financier plutôt que dans le code de la consommation, et chacun, je crois, a
bien compris l'utilité de ce classement.
Sur le fond, cet amendement tend à proposer une nouvelle rédaction de
l'article, faisant ressortir les deux cas dans lesquels le titulaire peut
demander à sa banque d'être recrédité : d'abord, le paiement effectué sans
présentation de la carte ou sans identification électronique par le code ou
tout autre moyen d'identification à venir, comme la signature électronique ;
ensuite, l'utilisation frauduleuse du code confidentiel.
La possibilité de contestation est explicitement liée à ces deux cas. Le
caractère frauduleux de l'utilisation du code est indiqué pour éviter de
revenir sur le principe français d'irrévocabilité des paiements par carte. En
outre, une simple négligence fautive et non une négligence constituant une
faute lourde est suffisante pour restituer toute responsabilité au titulaire
même en cas d'utilisation frauduleuse de son code.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n°
101.
M. Philippe Adnot,
rapporteur pour avis.
Nous partageons le souci de dégager la
responsabilité du titulaire de bonne foi en cas d'utilisation frauduleuse par
un tiers des éléments d'identification de sa carte de paiement. Il nous paraît
en effet légitime qu'il n'ait pas à supporter les conséquences financières de
la fraude et que son compte puisse être recrédité des sommes contestées.
Nous nous inquiétons toutefois des conséquences qui pourraient résulter de la
rédaction retenue par l'Assemblée nationale, car la deuxième phrase de
l'article 7
quater
prévoit de dégager le titulaire de sa responsabilité
en cas d'utilisation de son code confidentiel sans préciser qu'il faut limiter
le champ d'application de cette disposition à l'utilisation frauduleuse de
celui-ci. Or l'absence de cette précision tend à remettre en cause le principe
d'irrévocabilité de l'ordre de paiement qui figure au premier alinéa de
l'article L. 132-2 du code monétaire et financier.
M. le président.
La parole est à M. Delfau, pour défendre l'amendement n° 119.
M. Gérard Delfau.
Il s'agit en quelque sorte d'un amendement stylistique. Il m'a semblé en effet
que le texte serait amélioré si les mots « en conséquence » étaient remplacés
par le mot « toutefois ».
M. le président.
La parole est à Mme Borvo, pour présenter l'amendement n° 111.
Mme Nicole Borvo.
Par souci de cohérence, je défendrai conjointement les amendements n°s 110 et
111.
Il s'agit de faire valoir la possibilité, pour les personnes victimes d'une
fraude à la carte de paiement, de recourir à l'ensemble des moyens techniques
existants pour exercer leur droit d'opposition. L'évolution des techniques de
l'information est en effet telle que tout support écrit, y compris l'écrit
électronique, peut aujourd'hui être reconnu comme moyen de faire valoir ses
droits.
Tel est l'objet de ces deux amendements, qui tendent en fait à ouvrir cette
faculté aux titulaires de carte de paiement, alors même que nous devrions
constater, dans les années à venir, une utilisation de plus en plus large des
modes récents de transmission des données.
M. le président.
La parole est à M. Delfau, pour défendre les amendements n°s 120 et 121.
M. Gérard Delfau.
L'amendement n° 120 tend à préciser la formulation d'un texte qui sera
évidemment lu et commenté et qui donnera lieu à une abondante jurisprudence. Je
propose donc la suppression des mots « par écrit », car la modalité de la
contestation doit être scindée et renvoyée à la fin de l'article 7
quater
pour une plus grande clarté.
L'amendement n° 121 est quant à lui un amendement de cohérence et de
coordination.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 119, 111, 120, 110 et
121 ?
M. Jean-Pierre Schosteck,
rapporteur.
La commission est défavorable à l'amendement n° 119, qui
recèle, me semble-t-il, un contresens. En effet, c'est bien parce que la
responsabilité du titulaire n'est pas engagée en vertu des alinéas précédents
que celui-ci peut demander à sa banque de le recréditer des sommes débitées à
la suite d'une fraude. Les mots « En conséquence » doivent donc être maintenus
dans le texte de l'article 7
quater.
En ce qui concerne les amendements identiques n°s 111 et 120, la commission y
est également défavorable. Ils tendent en effet à susciter une confusion entre
l'opposition préalable à un paiement et la réclamation consécutive à un
paiement déjà effectué, or il s'agit de deux choses différentes et c'est bien
la seconde qui est visée par le présent article.
S'agissant des amendements identiques n°s 110 et 121, ils induisent eux aussi
une confusion entre opposition et réclamation, et la commission y est donc
défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble de ces amendements ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement a une lecture tout à fait positive de
cette « brassée » d'amendements.
Les amendements identiques n°s 49 et 101 soulèvent une question
essentielle.
L'article 7
quater
vise à traiter les cas de fraude survenue en
l'absence de perte ou de vol de la carte, ce qui représente donc un cas de
figure tout à fait important dans l'optique du débat qui nous occupe cet
après-midi. Concrètement, il s'agit de dégager la responsabilité du porteur
lorsqu'il a été victime d'une utilisation frauduleuse de certaines données de
la carte, et les amendements déposés par les commissions tendent à répondre à
cette préoccupation en apportant des clarifications qui me paraissent tout à
fait utiles.
En ce qui concerne le dégagement de responsabilité en cas d'utilisation du
code confidentiel, la rédaction présentée par ces amendements est en effet
meilleure que celle du texte actuel. Néanmoins, j'appelle votre attention,
messieurs les rapporteurs, sur la nécessité de s'assurer que la loi ne va pas
inciter les banques à réduire leur effort d'investissement en matière de
sécurité, alors que l'on sait bien que celui-ci est, dans notre pays, tout à
fait essentiel, s'agissant d'un système qui a fait ses preuves mais qui mérite
d'être encore consolidé.
Nous avons par ailleurs l'opportunité, par cet article, de transposer
l'article 8 de la directive 97/7/CE, qui porte sur ce sujet. Il est important
que la rédaction de l'article permette d'opérer cette transposition dans de
meilleures conditions, et le Gouvernement est donc tout à fait disposé à s'en
remettre à la sagesse du Sénat sur les amendements identiques n°s 49 et 101.
En ce qui concerne l'amendement n° 119, la logique de l'article est
d'identifier les cas où la responsabilité du porteur doit être entièrement
dégagée, celui-ci ayant alors droit à une recréditation intégrale. Il convient
donc, à mon sens, de maintenir les mots « En conséquence », ce qui implique que
le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 119.
En revanche, les amendement identiques n°s 110 et 121 visent à introduire dans
le texte un élément intéressant, cohérent avec les évolutions récentes du droit
de la preuve, et le rapporteur de la loi sur la signature électronique que je
fus à l'Assemblée nationale dans une vie antérieure y est tout à fait sensible.
Par conséquent, le Gouvernement s'en remettra à la sagesse du Sénat sur ces
amendements.
Nous sommes, en conclusion, tout à fait d'accord pour enrichir le texte sur la
base des propositions de la Haute Assemblée.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 49 et 101, pour lesquels le
Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'article 7
quater
est ainsi rédigé et les amendements
n°s 119, 111, 120, 110 et 121 n'ont plus d'objet.
Article 7 quinquies