SEANCE DU 2 MAI 2001
M. le président.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 176, M. Gournac, au nom de la commission des affaires
sociales, propose d'insérer, après l'article 50
quater,
un article
additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 122-34 du code du travail est complété par un alinéa ainsi
rédigé :
« Il rappelle également les dispositions relatives au harcèlement moral,
telles qu'elles résultent notamment des articles L. 122-49 et L. 122-50 du
présent code. »
Par amendement n° 249, Mme Dieulangard, MM. Cazeau et Chabroux, Mme Printz et
les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après
l'article 50
quater,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Le dernier alinéa de l'article L. 122-34 du code du travail est complété par
les mots suivants : "ainsi que les dispositions relatives à l'abus d'autorité
et aux agissements de harcèlement moral telles qu'elles résultent des articles
L. 122-49 et suivants du présent code". »
Par amendement n° 390, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 50
quater
,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Le cinquième alinéa de l'article L. 122-34 du code du travail est complété
par les mots suivants : "et les dispositions relatives à l'interdiction et la
condamnation de toute pratique de harcèlement moral". »
La parole est à M. Gournac, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 176.
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Cet amendement vise à introduire dans le règlement intérieur
de l'entreprise les dispositions du code du travail relatives au harcèlement
moral. Il s'agit ici d'étendre pour le harcèlement moral ce qui existe déjà
pour le harcèlement sexuel. Une telle mesure n'est pas seulement formelle. Elle
s'intègre en effet dans le souci de développer la prévention.
Cette disposition conduira à améliorer l'information des salariés, car le
règlement intérieur doit être affiché sur les lieux de travail. Surtout, elle
se traduira par l'émergence d'un dialogue dans l'entreprise autour du
harcèlement moral, car le règlement intérieur doit être soumis pour avis au
comité d'entreprise et au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de
travail, le CHSCT.
Cet amendement reprend une proposition du Conseil économique et social, ainsi
que de l'association des directeurs des ressources humaines.
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard, pour présenter l'amendement n° 249.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Cet amendement vise à intégrer dans le règlement intérieur des entreprises les
dispositions relatives au harcèlement moral, afin d'assurer l'information de
l'ensemble des personnels, notamment ceux qui sont investis d'une autorité
hiérarchique.
Le sujet, on le sait, n'est pas habituellement traité en termes d'information
dans les entreprises. Un certain nombre d'orateurs ont même parlé, depuis le
début de cette soirée, de « chape de plomb ». Il est important qu'aucun salarié
n'ignore les droits et les interdits en la matière. Le règlement intérieur nous
semble un excellent moyen pour informer l'ensemble des salariés de
l'entreprise.
M. le président.
La parole est à M. Fischer, pour présenter l'amendement n° 390.
M. Guy Fischer.
Comme le pointe très justement l'avis du Conseil économique et social, le
règlement intérieur de l'entreprise, qui doit être affiché sur les lieux de
travail, mais qui fait également l'objet de l'avis du comité d'entreprise et du
CHSCT, apparaît comme un outil indispensable d'information pour l'ensemble des
salariés, et par conséquent de prévention.
Notre amendement, qui a quasiment le même objet que les amendements de la
commission et du groupe socialiste, vise à introduire dans le règlement
intérieur, comme en matière de harcèlement sexuel, les dispositions relatives à
l'interdiction et à la condamnation de toute pratique de harcèlement moral.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 249 et 390 ?
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Ces deux amendements sont satisfaits par l'amendement n° 176.
Il s'agit bien de préciser que les dispositions relatives au harcèlement moral
doivent figurer dans le règlement intérieur.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 176, 249 et 390 ?
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je suis bien sûr favorable à
l'idée d'introduire les dispositions relatives au harcèlement moral dans le
règlement intérieur.
Cependant, la rédaction présentée par l'amendement n° 176, défendu par M. le
rapporteur, ne me semble pas tout à fait adaptée. En effet, elle se borne à
viser deux articles du code du travail, alors que d'autres articles traiteront
du harcèlement moral.
Par ailleurs, la rédaction prévue par l'amendement n° 249, qui fait référence
à la notion d'abus d'autorité, n'est plus adaptée à la nouvelle définition que
nous proposons, qui, me semble-t-il, recueille l'approbation du Sénat et qui
supprime la restriction à un lien d'autorité.
C'est la raison pour laquelle j'émets un avis favorable sur l'amendement n°
390, sous réserve de la suppression de la référence à la condamnation. En
effet, la mention dans un texte de loi de la notion de condamnation, qui, en
l'occurrence, ne vise pas le dispositif d'un jugement, me paraît impropre.
M. le président.
Monsieur Fischer, que pensez-vous de la suggestion de Mme le ministre ?
M. Guy Fischer.
Monsieur le président, j'accepte la suggestion de Mme la ministre, et je
rectifie donc ainsi l'amendement.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 390 rectifié, présenté par MM. Fischer,
Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et tendant à
insérer, après l'article 50
quater,
un article additionnel ainsi rédigé
:
« Le cinquième alinéa de l'article L. 122-34 du code du travail est complété
par les mots suivants : "et les dispositions relatives à l'interdiction de
toute pratique de harcèlement moral". »
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 176, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 50
quater,
et les amendements n°s 249 et 390
rectifié n'ont plus d'objet.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° 389, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 50
quater,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans la première phrase du premier alinéa du paragraphe I de l'article L.
230-2 du code du travail, après les mots : "protéger la santé" sont ajoutés les
mots : "physique et mentale". »
Par amendement n° 429, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 50
quater
, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans la première phrase du premier alinéa du I de l'article L. 230-2 du
code du travail, après les mots : "protéger la santé" sont insérés les mots :
"physique et mentale".
« II. - Le
g
du II de l'article L. 230-2 du code du travail est
complété par les mots : " , notamment en ce qui concerne les risques liés au
harcèlement moral, tel qu'il est défini à l'article L. 122-49". »
La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 389.
M. Guy Fischer.
A juste titre, la commission des affaires sociales accorde une attention
particulière au phénomène de harcèlement moral au travail. Considérant que la
prévention devait demeurer la priorité, M. le rapporteur propose une série
d'amendements que nous ne pouvons qu'appouver.
Pour autant, un aspect important de la question est éludé. A aucun moment,
l'obligation générale de prévention pesant sur l'employeur n'est rappelée. A
aucun moment, les violences ne sont traitées comme un risque professionnel,
alors même que le harcèlement moral a lieu à l'occasion de l'exécution du
contrat de travail.
C'est oublier bien vite qu'il est de la responsabilité de l'employeur doté du
pouvoir de direction et d'organisation de s'assurer du respect des principes
généraux de prévention tels qu'ils sont définis à l'article L. 230-2 du code du
travail.
Afin d'ouvrir le champ de la prévention, nous proposons de préciser que la
notion de santé des travailleurs ne s'entend pas strictement, c'est-à-dire
qu'elle recouvre non seulement l'aspect physique mais également l'aspect
mental, conformément d'ailleurs aux normes européennes et à la réglementation
de l'Organisation internationale du travail et de l'Organisation mondiale de la
santé. Par conséquent, le chef d'entreprise doit prendre un certain nombre de
mesures afin de prévenir les risques liés au harcèlement moral.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre, pour présenter l'amendement n° 429.
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le Gouvernement, selon cette
même préoccupation, souhaite favoriser la prise en compte du harcèlement moral
dans la mise en oeuvre des principes généraux de prévention. D'une part, il
convient de préciser que la notion de santé des travailleurs recouvre tant un
aspect physique qu'un aspect mental. D'autre part, il s'agit d'indiquer que,
dans le cadre des mesures prises par l'employeur, la planification de la
prévention doit intégrer les risques liés au harcèlement moral, à travers les
questions d'organisation, de relations sociales et d'ambiances de travail.
Si vous le permettez, monsieur le président, je donnerai dès à présent l'avis
du Gouvernement sur l'amendement n° 389, présenté par M. Fischer. Cet
amendement relève de la même inspiration. Néanmoins, l'amendement proposé par
le Gouvernement me semble aller plus loin puisqu'il indique que, « dans le
cadre des mesures prises par l'employeur, la planification de la prévention
doit intégrer les risques liés au harcèlement moral, à travers les questions
d'organisation, de relations sociales et d'ambiances de travail ». Voilà
pourquoi le Gouvernement, tout en étant favorable à l'amendement n° 389,
recommande l'adoption de l'amendement n° 429.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 389 et 429 ?
M. Alain Gournac,
rapporteur.
L'amendement n° 389 comme l'amendement n° 429 visent à
préciser que la notion de santé recouvre à la fois la santé physique et la
santé mentale. Cela semble aller de soi. La jurisprudence l'a déjà reconnu.
Toutefois, il n'est pas absurde de le préciser. La commission s'en remet donc à
la sagesse de notre assemblée, étant observé que l'amendement n° 429 est un peu
plus précis.
M. Jean Delaneau,
président de la commission des affaires sociales.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau,
président de la commission des affaires sociales.
Madame la ministre, je
ne conteste pas l'amendement n° 429. Cependant, lorsque nous avons examiné le
texte relatif à l'interruption volontaire de grossesse, nous avons voulu y
faire figurer le fait qu'il s'agissait de la santé physique et mentale. Vous
nous aviez répondu que cette précision n'était pas utile, puisque la santé
comprenait ces deux aspects. Or, aujourd'hui, vous nous présentez un amendement
pour préciser que la santé comporte un aspect physique et un aspect mental.
Madame la ministre, je tenais simplement à attirer votre attention sur ce qui,
à mes yeux, est une contradiction.
M. le président.
Monsieur Fischer, l'amendement n° 389 est-il maintenu ?
M. Guy Fischer.
Non, monsieur le président, nous le retirons, car l'amendement n° 429 est
effectivement plus précis.
M. le président.
L'amendement n° 389 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 429, pour lequel la commission s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 50
quater.
Je suis maintenant saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 177 est présenté par M. Gournac, au nom de la commission des
affaires sociales.
L'amendement n° 252 est déposé par Mme Dieulangard, MM. Cazeau, Chabroux, Mme
Printz et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Tous deux tendent à insérer, après l'article 50
quater,
un article
additionnel ainsi rédigé :
« Le sixième alinéa de l'article L. 236-2 du code du travail est complété par
les mots :" et de harcèlement moral ". »
Par amendement n° 391, MM. Fischer, Muzeau, les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 50
quater,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans la première phrase du premier alinéa de l'article L. 236-2 du code du
travail, après les mots : " protection de la santé " sont ajoutés les mots : "
physique et mentale ". »
La parole est à M. Gournac, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 177.
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Cet amendement tend à élargir les missions du comité
d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, le CHSCT, à la prévention
du harcèlement moral.
La loi de 1992 a déjà donné au CHSCT compétence pour proposer des actions de
prévention en matière de harcèlement sexuel.
Il serait utile d'étendre ses attributions à la question du harcèlement moral,
car le CHSCT constitue une instance appropriée de dialogue et de prévention des
risques touchant à la santé ou aux conditions de travail. Il rassemble en outre
les représentants des salariés et de l'employeur, l'inspecteur du travail et le
médecin du travail, bref toutes les parties prenantes à la question du
harcèlement moral.
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard, pour défendre l'amendement n° 252.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Cet amendement étant identique à celui de la commission, nous le retirons à
son profit.
M. le président.
L'amendement n° 252 est retiré.
La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 391.
M. Guy Fischer.
Monsieur le président, avec votre accord, je défendrai simultanément les
amendements n°s 391, 392 et 394.
Comme nous l'avons déjà indiqué, il est primordial d'axer les efforts sur les
actions préventives pour enrayer les agissements de harcèlement moral. Pour ce
faire, il convient de s'appuyer sur les organismes existants compétents en
matière de sécurité et d'hygiène qui servent déjà en interne de relais entre
les salariés et le chef d'entreprise.
C'est pourquoi nos amendements « adaptent » les compétences, d'une part, des
comités d'hygiène et de sécurité, dont le rôle est central en matière de
risques professionnels et de conditions de travail et, d'autre part, des
délégués du personnel, qui peuvent saisir directement le chef d'entreprise en
cas d'atteinte aux droits des personnes et être à l'initiative d'une procédure
devant les prud'hommes, en précisant qu'ils contribuent à la protection de la
santé physique et mentale des salariés.
Enfin, par souci de cohérence, mais également parce que les médecins du
travail sont amenés à connaître des cas de harcèlement moral, nous étendons
leur habilitation à proposer au chef d'entreprise des mesures individuelles de
mutation ou de transformation de poste.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Cet amendement est satisfait par l'amendement n° 177 de la
commission, dont la rédaction est plus précise.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 177 et 391 ?
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Ces amendements procèdent de la
même inspiration et j'y suis favorable, avec une petite préférence tout de même
pour la rédaction de l'amendement n° 391, qui fait référence précisément à la
santé physique et mentale dont nous venons de discuter à l'instant.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 177, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 50
quater
et l'amendement n° 391 n'a plus
d'objet.
Toujours après l'article 50
quater,
je suis saisi de deux amendements
qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 392, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 50
quater,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le premier alinéa de l'article L. 241-10-1 du code du travail, après
les mots : "l'état de santé" sont ajoutés les mots : "physique et mentale".
»
Par amendement n° 178, M. Gournac, au nom de la commission des affaires
sociales, propose d'insérer, après l'article 50
quater,
un article
additionnel ainsi rédigé :
« Le premier alinéa de l'article L. 241-10-1 du code du travail est complété
par une phrase ainsi rédigée : "Il est également habilité à proposer de telles
mesures individuelles lorsqu'il constate l'existence d'agissements mentionnés à
l'article L. 122-49 du présent code". »
L'amendement n° 392 a déjà été défendu.
La parole est à M. Gournac, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 178 et
pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 392.
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Cet amendement tend à favoriser l'implication du médecin du
travail dans les cas de harcèlement moral. Certes, il faut éviter, dans un
souci de prévention, toute médicalisation excessive du phénomène qui concerne
avant tout l'organisation du travail. Cela dit, l'intervention du médecin du
travail peut être utile - je dirai même très utile - car il peut attirer
l'attention du chef d'entreprise sur les cas de harcèlement dont celui-ci
n'aurait pas connaissance.
Aussi, cet amendement a pour objet d'étendre explicitement son habilitation à
proposer des mesures individuelles telles que mutation ou transformation de
poste au chef d'entreprise lorsqu'il constate une situation de harcèlement. Cet
amendement reprend des propositions déjà formulées par le groupe communiste
républicain et citoyen et dans l'avis du Conseil économique et social.
S'agissant de l'amendement n° 392, il est satisfait par l'amendement n° 178 de
la commission.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je ne suis pas favorable à
l'amendement n° 178, parce que j'observe que l'article L. 241-10-1 du code du
travail donne déjà au médecin du travail la possibilité de proposer des mesures
individuelles.
Je lui préfère la formulation de l'amendement n° 392, qui apporte des
garanties supplémentaires à ce qui existe déjà dans le code du travail, qui
donne au médecin du travail toute latitude pour formuler des propositions de
reclassement, et qui vise explicitement l'état de santé physique et moral du
salarié.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 392, repoussé par la commission et accepté
par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 178, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel aussi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 50
quater
.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 251, Mme Dieulangard, MM. Cazeau, Chabroux, Mme Printz et
les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après
l'article 50
quater,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 122-51 du code du travail, insérer un article ainsi
rédigé :
«
Art. L. ...
- Nul ne peut prendre en considération le fait que la
personne intéressée a subi ou refusé de subir les agissements définis au
premier alinéa de l'article L. 122-49, ou bien a témoigné de tels agissements
ou les a relatés, pour décider notamment en matière d'embauche, de
rémunération, de formation, d'affectation, de qualification, de classification,
de promotion professionnelle, de mutation, de résiliation, de renouvellement de
contrat de travail ou de sanctions disciplinaires.
« Pour les actions exercées en faveur d'un salarié, qui naissent du premier
alinéa, les organisations syndicales doivent justifier d'un accord écrit de
l'intéressé. »
Par amendement n° 179, M. Gournac, au nom de la commission des affaires
sociales, propose d'insérer, après l'article 50
quater,
un article
additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 411-11 du code du travail, il est inséré un article L.
411-11-1 ainsi rédigé :
«
Art. L. 411-11-1.
- Les organisations syndicales représentatives dans
l'entreprise peuvent exercer en justice toutes actions qui naissent de
l'article L. 122-49 en faveur d'un salarié de l'entreprise sous réserve
qu'elles justifient d'un accord écrit de l'intéressé. L'intéressé peut toujours
intervenir à l'instance engagée par le syndicat et y mettre un terme à tout
moment. »
Par amendement n° 393, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 50
quater,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 411-11 du code du travail, il est inséré un article
additionnel ainsi rédigé :
«
Art. L. ...
- Les organisations syndicales représentatives dans
l'entreprise peuvent exercer en justice toutes actions qui naissent de
l'article L. 122-49 en faveur d'un salarié de l'entreprise, sans avoir à
justifier d'un mandat de l'intéressé, pourvu que celui-ci ait été averti par
écrit et ne s'y soit pas opposé dans un délai de quinze jours à compter de la
date à laquelle l'organisation syndicale lui a notifié son intention.
L'intéressé peut toujours intervenir à l'instance engagée par le syndicat.
« Les associations régulièrement constituées depuis cinq ans au moins peuvent
saisir les organisations syndicales pour leur demander d'exercer en justice les
actions visées au premier alinéa. »
La parole est à Mme Dieulaugard, pour défendre l'amendement n° 251.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Cet amendement tend à préciser que des personnes qui ont été victimes ou qui
ont résisté à des agissements constituant un harcèlement moral, comme celles
qui en ont témoigné, ne peuvent être victimes ensuite d'aucune forme de
discrimination. Aucune action en justice ne doit pouvoir être engagée sans leur
accord écrit afin de protéger, le cas échéant, leur souhait de discrétion.
M. le président.
La parole est à M. Gournac, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 179.
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Cet amendement vise à autoriser les organisations syndicales
représentatives dans l'entreprise à se substituer à un salarié victime de
harcèlement pour ester en justice. Elles doivent toutefois justifier de
l'accord écrit de l'intéressé.
Les organisations syndicales ont naturellement vocation à intervenir en faveur
des victimes de harcèlement. C'est pourquoi il n'est pas inutile de leur
reconnaître cette possibilité d'action de substitution. On remarque d'ailleurs
qu'elle existe déjà en matière de harcèlement sexuel.
Pour autant, cette action de substitution ne doit pas déboucher sur une
judiciarisation excessive. Elle doit rester dissuasive et, surtout, servir de
fondement à un réel dialogue social dans l'entreprise sur les questions du
harcèlement moral, lorsque besoin est.
M. le président.
La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 393.
M. Guy Fischer.
Lorsqu'un salarié est victime de harcèlement moral sur son lieu de travail, il
se retrouve particulièrement seul et fragilisé. Nous pensons donc qu'il
convient de l'accompagner et de tout mettre en oeuvre pour faire cesser les
agissements pervers dont il est victime.
Nous avions défendu, lors de l'examen de la proposition de loi relative à la
lutte contre les discriminations, une position très claire concernant
l'importance du rôle des organisations syndicales et des associations dans la
défense des salariés victimes de discrimination.
Il nous semble très opportun d'appliquer les dispositions prévues dans le
cadre de la lutte contre les discriminations à la lutte contre le harcèlement
moral. A cet effet, la possibilité pour les organisations syndicales d'exercer
des actions en justice ou, pour les associations, d'alerter les syndicats, nous
paraît primordiale. C'est à notre avis l'un des éléments essentiels pour lutter
efficacement contre les dégâts sur la santé provoqués par le harcèlement
moral.
Afin de mettre toutes les chances du côté des victimes et, ainsi, de permettre
leur réinsertion à leur poste de travail, il est impératif de renforcer le rôle
d'accompagnement des syndicats et des associations.
M. le président.
Que est l'avis de la commission sur les amendements n°s 251 et 393 ?
M. Alain Gournac,
rapporteur.
L'amendement n° 251 paraît inutile, l'article 50
quater
étant suffisamment explicite. En outre, il est pour partie
satisfait par l'amendement n° 179 de la commission.
L'amendement n° 393 est également satisfait par l'amendement n° 179 de la
commission.
Je considère par ailleurs que l'amendement de la commission est plus
protecteur, car il exige un accord écrit.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 251, 179 et 393 ?
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Je suis favorable à
l'amendement n° 251 présenté par Mme Dieulangard parce que je suis favorable à
l'alignement de la protection des victimes ou témoins de harcèlement moral sur
celle qui est prévue à l'article L. 123-1 du code du travail. Je suis également
favorable à l'alignement du mécanisme du droit de substitution des
organisations syndicales sur le mécanisme existant en matière de harcèlement
sexuel.
En revanche, je ne suis pas favorable à l'amendement n° 179 présenté par M.
Gournac parce que le droit de substitution dont l'objet est la défense des
intérêts individuels des salariés ne saurait être confondu avec l'action
syndicale dans l'intérêt collectif de la profession définie à l'article L.
411-11 du code du travail.
Quant à l'amendement n° 393, présenté par M. Fischer, je veux dire d'abord que
je suis favorable au droit de substitution des organisations syndicales en
matière de harcèlement moral. Mais, comme je viens de le rappeler, le droit de
substitution dont l'objet est la défense des intérêts individuels des salariés
ne peut être confondu avec l'action syndicale dans l'intérêt collectif de la
profession.
C'est pourquoi, tout en retenant le principe de votre amendement, je vous
propose, monsieur Fischer, de créer plutôt un nouvel article après l'article L.
122-51 du code du travail.
Par ailleurs, sur les modalités d'exercice de l'action substitutive, je
préfère me référer au texte de l'amendement n° 251, qui pose le principe de
l'exigence du mandat écrit donné par le salarié à l'organisation syndicale, de
même qu'en matière de harcèlement sexuel.
Ainsi, je vous propose la rédaction suivante pour le premier alinéa de
l'article additionnel : « Les organisations syndicales représentatives dans
l'entreprise peuvent exercer en justice toutes actions qui naissent de
l'article L. 122-49 en faveur d'un salarié de l'entreprise. L'intéressé peut
toujours intervenir à l'instance engagée par le syndicat. »
Quant à la disposition relative au droit de saisine par les associations, j'y
suis également favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 251, repoussé par la commission et accepté
par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 179, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 50
quater,
et l'amendement n° 393 n'a plus
d'objet.
Par amendement n° 394, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 50
quater,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le premier alinéa de l'article L. 422-1-1 du code du travail, après le
mot : "personnes" sont ajoutés les mots : "à leur santé physique et mentale".
»
Cet amendement a déjà été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac,
rapporteur.
La commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 394, accepté par le Gouvernement et pour
lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 50
quater
.
Par amendement n° 255, Mme Dieulangard, MM. Cazeau, Chabroux, Mme Printz et
les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après
l'article 50
quater,
un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans l'article L. 742-8 du code du travail, les mots : "de l'article L.
122-46" sont remplacés par les mots : "des articles L. 122-46 et L. 122-49".
« II. - Dans le dernier alinéa de l'article L. 771-2 du code du travail, les
mots : "L'article L. 122-46" sont remplacés par les mots : "Les articles L.
122-46 et L. 122-49".
« III. - Dans l'article L. 772-2 du code du travail, les mots : "de l'article
L. 122-46" sont remplacés par les mots : "des articles L. 122-46 et L.
122-49".
« IV. - Dans le premier alinéa de l'article L. 773-2 du code du travail, les
mots : "et L. 122-46" sont remplacés par les mots : ", L. 122-46 et L. 122-49".
»
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Il s'agit d'un amendement de coordination qui tend à rendre applicables aux
marins, concierges et gardiens d'immeubles, employés de maison et assistantes
maternelles, les dispositions relatives au harcèlement moral à l'égal de celles
qui sont relatives au harcèlement sexuel.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac,
rapporteur.
C'est une précision utile pour certaines professions
particulières. Par conséquent, la commission émet un avis favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 255, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 50
quater.
Je suis maintenant saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° 180, M. Gournac, au nom de la commission des affaires
sociales, propose d'insérer, après l'article 50
quater,
un article
additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré, après l'article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983
portant droits et obligations des fonctionnaires un article 6
quinquies
ainsi rédigé :
«
Art. 6
quinquies. - Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements
répétés de harcèlement moral d'un supérieur hiérarchique ou de toute personne
abusant ou non de l'autorité que lui confèrent ses fonctions, qui ont pour
objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de
porter atteinte à sa dignité, d'altérer gravement son intégrité physique ou
morale ou de compromettre son avenir professionnel.
« Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la
formation, la notation, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être
prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération :
« 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement
moral visés au premier alinéa ;
« 2° Ou bien le fait qu'il a témoigné de tels agissements ou qu'il les a
relatés.
« Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé aux
agissements définis ci-dessus ».
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 455 rectifié, présenté par
MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen,
et tendant à rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par
l'amendement n° 180 :
« Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés du harcèlement
moral d'un représentant de l'autorité administrative ou de toute personne
visant à dégrader les conditions humaines, relationnelles, matérielles de son
travail, de nature à porter atteinte à ses droits et à sa dignité, pouvant
altérer gravement son état de santé et pouvant compromettre son avenir
professionnel. »
Par amendement n° 253, Mme Dieulangard, MM. Cazeau, Chabroux, Mme Printz et
les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après
l'article 50
quater
, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et
obligations des fonctionnaires est complété par quatre alinéas ainsi rédigés
:
« Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la
formation, la notation, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être
prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération :
« 1° Le fait qu'il a subi ou refusé de subir les agissements répétés de
harcèlement moral d'un supérieur hiéarchique ou de toute personne abusant de
l'autorité que lui confèrent ses fonctions, qui ont pour objet ou pour effet de
porter atteinte à sa dignité et de créer des conditions de travail humiliantes
ou dégradantes ;
« 2° Ou bien le fait qu'il a témoigné de tels agissements ou les a relatés.
« Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé aux
agissements définis ci-dessus. »
Par amendement n° 441 rectifié, le Gouvernement propose d'insérer, après
l'article 50
quater,
un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 29 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et
obligations des fonctionnaires est complété par six alinéas ainsi rédigés :
« Est passible d'une sanction disciplinaire le fonctionnaire ayant procédé à
des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet
de porter atteinte à la dignité d'un agent ou d'altérer sa santé physique ou
mentale en créant à son encontre des conditions de travail humiliantes ou
dégradantes.
« Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la
formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la
mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en
considération :
« 1° Le fait qu'il a subi des agissements répétés de harcèlement moral ;
« 2° Le fait qu'il a exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou
engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ;
« 3° Ou bien le fait qu'il a témoigné de tels agissements ou qu'il les a
relatés.
« Les dispositions du présent article sont applicables aux agents non
titulaires de droit public. »
La parole est à M. Gournac, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 180.
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Cet amendement vise à étendre la nouvelle législation sur le
harcèlement moral aux trois fonctions publiques. On voit mal, en effet,
pourquoi la nouvelle législation sur le harcèlement moral s'appliquerait au
secteur privé et ne concernerait pas la fonction publique. De nombreux experts
considèrent même que le mal est sans doute encore plus profond dans
l'administration. Il est donc nécessaire que les fonctionnaires et les agents
des trois fonctions publiques bénéficient de la même protection.
A cette fin, l'amendement s'appuie sur les diverses propositions en ce sens du
Conseil économique et social, de la Commission nationale consultative des
droits de l'hommet et de l'Association des DRH.
M. le président.
La parole est à M. Fischer, pour défendre le sous-amendement n° 455
rectifié.
M. Guy Fischer.
Autant le dire tout de suite - une fois n'est pas coutume ! - nous approuvons
le principe énoncé par M. le rapporteur de la commission des affaires sociales
d'étendre la législation sur le harcèlement moral aux trois fonctions publiques
; il nous apparaît en effet légitime de lutter contre le harcèlement moral
partout où il se produit.
La fonction publique n'est malheureusement pas exempte de reproches en la
matière. Certaines études révèlent que plus d'un tiers des cas de harcèlement
moral la concerneraient. Il convient donc de protéger les fonctionnaires contre
ces pratiques, au même titre que les salariés du secteur privé.
Notre sous-amendement, en cohérence avec l'amendement n° 387 que nous avons
déposé sur l'article 50
quater
, vise à définir le harcèlement moral
selon les critères retenus par le récent avis du Conseil économique et
social.
Il nous paraît notamment important de faire référence à la notion d'atteinte à
la dignité des victimes.
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard, pour présenter l'amendement n° 253.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Cet amendement est de même inspiration que les précédents. Il tend à assurer
aux fonctionnaires une protection analogue à celle des salariés du secteur
privé en matière de harcèlement moral.
Il s'agit manifestement d'une préoccupation partagée par l'ensemble du Sénat
et par le Gouvernement. Les termes des amendements sont analogues. L'intérêt
primordial de l'amendement du Gouvernement est qu'il s'applique aussi aux
contractuels.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre, pour présenter l'amendement n° 441 rectifié
et pour donner l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 180 et 253, ainsi
que sur le sous-amendement n° 455 rectifié.
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
L'amendement n° 441 rectifié
permet d'introduire le harcèlement moral dans la loi du 13 juillet 1983 portant
droits et obligations des fonctionnaires. Inséré à l'article 29 de cette loi,
relatif à la responsabilité disciplinaire des fonctionnaires, il précise que le
harcèlement moral constitue une faute disciplinaire en identifiant les
comportements prohibés et il protège les fonctionnaires ainsi - que Mme
Dieulangard vient de le souligner - les agents non titulaires de droit public
qui sont victimes de harcèlement moral ou qui sont appelés à en témoigner
contre tout risque de sanction.
Les deux autres amendements et le sous-amendement sont de même inspiration.
Il me semble toutefois que la définition que propose le Gouvernement est plus
large.
En premier lieu, la définition du Gouvernement rend passible de sanctions
disciplinaires tout auteur de harcèlement moral, et pas seulement le détenteur
d'autorité, ce qui permet d'assurer la transposition de la directive
européenne.
En second lieu, notre proposition vise aussi les mesures disciplinaires qui
seraient prises à l'encontre d'un fonctionnaire soit constitutives des
agissements de harcèlement moral, soit en représailles contre un refus de subir
ces agissements.
Enfin, au-delà des fonctionnaires, elle s'applique aussi aux agents non
titulaires de droit public.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 455 rectifié et sur
les amendements n°s 253 et 441 rectifié ?
M. Alain Gournac,
rapporteur.
L'amendement n° 253 est satisfait par l'amendement n° 180 de
la commission. Les rédactions diffèrent sur la définition du harcèlement.
L'amendement n° 441 rectifié est incompatible avec l'amendement de la
commission. En outre, les définitions proposées du harcèlement moral divergent
également.
Enfin, la définition donnée par notre amendement nous semble meilleure que
celle que propose le sous-amendement n° 455 rectifié.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 455 rectifié, repoussé par la
commission et par le Gouvernement.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 180.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel, ainsi rédigé, est inséré dans le
projet de loi après l'article 50
quater,
les amendements n°s 253 et 441
rectifié n'ont plus d'objet.
Par amendement n° 254, Mme Dieulangard, MM. Cazeau, Chabroux, Mme Printz et
les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après
l'article 50
quater,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le deuxième alinéa de l'article 2-6 du code de procédure pénale, les
mots : "quatre alinéas" sont remplacés par les mots : "huit alinéas" ».
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Cet amendement, conséquence du précédent, tend à permettre à toute association
déclarée depuis cinq ans à la date des faits et se proposant, par ses statuts,
de combattre les discriminations, d'exercer les droits reconnus à la partie
civile de la même manière qu'en matière de discrimination sexuelle en ce qui
concerne les fonctionnaires, c'est-à-dire en justifiant avoir reçu l'accord
écrit de la personne intéressée ou, si celle-ci est mineure, et après son avis,
celui du titulaire de l'autorité parentale ou de son représentant légal.
Cette disposition est parallèle à celle qui figure dans le code du travail
pour les affaires concernant les agissements de harcèlement sexuel.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Gournac,
rapporteur.
Cet amendement vise à autoriser des associations à exercer
les droits reconnus à la partie civile, avec l'accord écrit de l'intéressé, en
cas de harcèlement moral. Une telle possibilité peut sembler intéressante.
La rédaction proposée soulève cependant deux difficultés. D'abord, elle ne
vise, curieusement, que les fonctionnaires. On voit mal pourquoi les salariés
du secteur privé ne pourraient bénéficier de ce droit. Surtout, les
associations ici visées sont seulement celles qui sont censées combattre les
discriminations fondées sur le sexe ou sur les moeurs. Or le harcèlement moral
ne relève pas de la même logique que le harcèlement sexuel. Il n'y a pas lieu,
dès lors, de réserver cette possibilité à ces seules associations.
L'avis de la commission est donc défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Cette disposition relative au
droit d'agir en justice des associations de lutte contre les discriminations a
davantage sa place dans la proposition de loi relative à la lutte contre les
discriminations, où elle a été prévue.
Dans sa rédaction actuelle, elle ne concerne d'ailleurs pas les associations
dont l'objet est limité à la lutte contre le harcèlement moral.
Enfin, il me semble que, dans la loi de 1983, c'est l'article 29 qu'il
faudrait viser plutôt que l'article 6.
Voilà pourquoi je ne suis pas favorable à cet amendement.
M. le président.
L'amendement est-il maintenu, madame Dieulangard ?
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 254 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 250, Mme Dieulangard, MM. Cazeau, Chabroux, Mme Printz et
les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après
l'article 50
quater
, un article additionnel ainsi rédigé :
« La section 3 du chapitre II du titre II du livre II du code pénal est
complétée par une sous-section intitulée : "Du harcèlement moral", comportant
un article ainsi rédigé :
«
Art. ...
Le fait de harceler autrui par des agissements ayant pour
objet ou pour effet de porter atteinte à sa diginité ou de créer des conditions
de travail humiliantes ou dégradantes, par une personne abusant de l'autorité
que lui confèrent ses fonctions, est puni d'un an d'emprisonnement et de 100
000 francs d'amende. »
Par amendement n° 395, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 50
quater
,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Le chapître V du titre II du livre II du code pénal est complété par un
article additionnel ainsi rédigé :
«
Art. L. ... -
Le fait de harceler un salarié dans le but de porter
atteinte à sa dignité ou à son intégrité psychique est puni de deux ans
d'emprisonnement et de 500 000 francs d'amende. »
La parole est à Mme Dieulangard, pour défendre l'amendement n° 250.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Cet amendement tend à intoduire dans le code pénal, pour le harcèlement moral,
une peine équivalente à celle qui est prévue en cas de harcèlement sexuel. Il
nous semble en effet qu'il y aurait une double incohérence à ne pas le
faire.
Premièrement, pourquoi prévoir une disposition pénale réprimant le harcèlement
sexuel et aucune contre le harcèlement moral ? Le harcèlement moral n'a-t-il
pas le même degré de gravité ? Ce serait précisément le contraire de ce que
nous affirmons tous depuis plusieurs heures, en évoquant la gravité des faits
et des troubles qui affectent les victimes.
Si l'on ne veut pas multiplier au fil des années les dispositions réprimant
des agissement de cette nature, peut-être faudra-t-il même prévoir une
disposition générale s'appliquant au droit du travail. Nous pourrons revoir
cette question en deuxième lecture.
En toute hypothèse, il serait tout à fait logique et cohérent, au regard de la
gravité des faits, dès lors que ceux-ci sont établis, et des troubles
provoqués, dès lors que ceux-ci sont reconnus, de prévoir une sanction pénale
contre les auteurs du harcèlement. C'est l'aboutissement logique qui conduit à
réprimer les faits les plus graves.
Ce serait un signe fort donné à la fois aux victimes et aux coupables, la
plupart étant d'ailleurs parfaitement conscients de la nature perverse et
volontairement nuisible à autrui de leurs actes.
Il importe aussi de marquer qu'en toute situation, même au travail - faut-il
le dire ? - toute personne a droit au respect de sa dignité.
Cela ne traduit pas une volonté de judiciariser la vie de l'entreprise. Au
demeurant, celle-ci l'est déjà de bien des façons, et il ne faudrait pas que
cette méfiance à l'égard du droit ne se manifeste qu'en matière de droit du
travail.
Les dispositifs de prévention, sur lesquels chacun s'accorde, sont
indispensables. Ils marquent la prise de conscience des chefs d'entreprise et
leur souhait de venir à bout d'un problème qui n'améliore certes pas la
productivité et peut leur créer des difficultés.
Mais le dispositif n'est pas complet si une sanction pénale ne vient pas le
compléter. En effet, l'entreprise n'est pas un espace juridique autonome où les
sanctions disciplinaires seraient à la fois nécessaires et suffisantes. Le
salarié reste en toute situation et en tout lieu une personne et un citoyen.
L'employeur n'a sur lui qu'une autorité hiérarchique, qui doit s'exprimer dans
le respect de la personne et se limiter à l'objet du travail.
Conformément à ces principes, il est donc primordial que la reconnaissance des
droits du travaileur ne soit pas limitée et que la sanction de ceux qui y
portent atteinte puisse être complète. Cette décision appartient à l'autorité
judiciaire, à laquelle il convient, en l'espèce, d'accorder toute latitude.
M. le président.
La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 395.
M. Guy Fischer.
Avec cet amendement, nous abordons un autre volet important du dispositif
relatif au harcèlement moral au travail, celui de la sanction.
Dans la proposition de loi que nous avions déposée en décembre 2000, le
principe d'une sanction à la fois civile et pénale avait été retenu pour donner
un signe fort aux victimes d'agissements mais aussi à leurs auteurs.
Le présent amendement reprend la disposition de cette proposition de loi
prévoyant une incrimination et une sanction spécifique du harcèlement moral au
travail dans le code pénal, intégrée à la section « conditions de travail et
d'hébergement contraire à la dignité de la personne », calquée, quant à
l'échelle des peines sur celles qui sont prévues à l'article L. 225-14 du code
pénal autorisant la répression de tout acte par lequel une personne en soumet
une autre à des conditions de travail incompatibles avec la dignité humaine.
Pour justifier la nécessité et l'utilité de sanctionner pénalement le
harcèlement moral, je reprendrai les arguments avancés par Sandy Lacari,
docteur en droit, dans un article intitulé « De la nécessité d'une légalisation
spécifique au harcèlement moral au travail », publié en mai 2000 dans
La
Revue de droit social.
« La sanction pénale conserve encore
incontestablement un effet dissuasif et le fait d'ériger un certain
comportement en infraction pénale démontre définitivement qu'il s'agit là
d'agissements intolérables aux yeux de la société. »
Je renvoie ceux qui doutent de l'opportunité d'une telle démarche, la
qualifiant de néfaste - notamment le groupe des entreprises privées, au sein du
Conseil économique et social - car source de juridiciarisation de la vie de
l'entreprise, au précédent plutôt positif de la répression pénale du
harcèlement sexuel.
Enfin, je souhaite que celles et ceux qui renvoient à l'application des
sanctions pénales introduite en 1994 contre l'atteinte à la dignité puissent me
donner la garantie que l'utilisation de l'article L. 225-14 du code pénal
permet d'incriminer toutes les situations de harcèlement moral et non pas
uniquement celles dont sont victimes les salariés vulnérables ou en situation
de dépendance.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 250 et 395 ?
M. Alain Gournac,
rapporteur.
S'agissant de l'amendement n° 250, il est inutile de prévoir
une nouvelle sanction pénale, le code pénal prévoyant déjà des incriminations
pouvant être retenues en cas de harcèlement moral. La remarque vaut également
pour l'amendement n° 395.
Il est, en outre, peu souhaitable de judiciariser à l'excès cette question,
qui doit principalement être abordée en amont.
Je rappelle, au surplus, que le Gouvernement, par la voix de Mme la ministre,
s'est opposé à l'introduction d'une nouvelle sanction pénale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Madame Dieulangard, les
incriminations pénales sont très nombreuses dans notre droit, puisque nous en
comptons plusieurs milliers. Certes, matière de harcèlement moral, quelques
condamnations ont pu déjà être prononcées sur le fondement des textes
existants, mais elles sont rares. Cependant, il convient de ne pas pénaliser à
l'extrême les relations de travail, « pénaliser » et non pas « judiciariser »
car, comme je l'ai dit dans mon propos liminaire tout à l'heure, des actions en
dommages et intérêts peuvent être portées devant le juge civil, actions en
réparation qui sont évidemment « judiciaires ».
Je considère aussi qu'il convient de tenir compte de l'attachement des
victimes à la voie pénale - le procès pénal a évidemment une force symbolique à
nulle autre pareille - et à la condamnation des auteurs de harcèlement
moral.
Je suis également sensible à l'argument qui consiste à aligner les sanctions
en matière de harcèlement moral sur celles qui existent en matière de
harcèlement sexuel. Il est vrai que, dès lors que l'on a un précédent, il est
très difficile de ne pas s'y référer.
Pour ces différentes raisons, je m'en remettrai à la sagesse de votre
assemblée sur cet amendement. Cependant, si le principe d'une sanction nouvelle
était retenu, il conviendrait de supprimer la référence à l'abus d'autorité
afin de faire apparaître plus clairement l'intention, qui est un élément
caractéristique du délit. Donc, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du
Sénat sur cet amendement n° 250.
L'amendement n° 395 présenté par M. Fischer ne suscite aucun problème sur le
principe. Cependant, sur la peine encourue, il vaudrait mieux s'aligner sur les
dispositions concernant le harcèlement sexuel. Voilà pourquoi je ne suis pas
favorable à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 250, repoussé par la commission et pour
lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 395, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
La suite de la discussion est renvoyée à une prochaine séance.
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