SEANCE DU 2 MAI 2001
M. le président.
« Art. 50
ter.
- Après l'article L. 120-3 du code du travail, il est
inséré un article L. 120-4 ainsi rédigé :
«
Art. L. 120-4.
- Le contrat de travail est exécuté de bonne foi. »
Par amendement n° 172, M. Gournac, au nom de la commission des affaires
sociales, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. Gournac, rapporteur.
M. Alain Gournac,
rapporteur.
L'article 50
ter
est l'un des deux articles introduits
à l'Assemblée nationale sur l'initiative non pas du Gouvernement, mais de M.
Hage et des membres du groupe communiste et traitant du harcèlement moral. Il
précise que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.
L'introduction d'une telle disposition dans le code du travail apparaît
superfétatoire, même si l'on peut en comprendre la motivation. Sa portée
juridique et pratique est nulle.
L'article L. 121-1 du code du travail prévoit en effet déjà que le contrat de
travail est soumis aux règles du droit commun. L'article 1134 du code civil
indique en outre que les conventions doivent être exécutées de bonne foi. En
conséquence, il est applicable aux contrats de travail, ce qui a été reconnu en
permanence par la jurisprudence.
Dès lors, il importe de ne pas surcharger inutilement le code du travail, et
je propose donc la suppression de l'article 50
ter
.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Ce que vient de dire M. Gournac
est vrai. Cependant, je pense que le harcèlement moral est un sujet
suffisamment grave pour que soit réaffirmée solennellement, au sein du code du
travail, l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail.
Je ne suis donc pas favorable à cet amendement et je préconise le maintien de
la disposition introduite par M. Hage, qui a été l'un des députés à l'origine
de ces réflexions.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 172.
M. Jean-Louis Lorrain.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain.
Ma réaction est liée non pas à l'amendement par lui-même, mais à l'attitude de
Mme la ministre, à laquelle je voudrais apporter mon complet soutien.
Je pense que cette question dépasse largement tous les clivages possibles, et
ce que j'ai entendu correspond à ce que nous souhaitions de longue date.
Après cette chape de plomb, ce silence, cette espèce de pudeur qui nous
empêchaient souvent de nous exprimer, je suis particulièrement heureux que ce
sujet puisse être évoqué.
Vous avez cité des auteurs qui, à l'exemple de Mme Hirigoyen, ont réitéré
leurs explications et nous ont parfaitement éclairés. J'aimerais souligner que
si le harcèlement moral est différent du harcèlement sexuel, ils sont souvent
liés. Je crois donc qu'il serait peut-être un peu brutal d'établir une
séparation nette entre harcèlement moral et harcèlement sexuel. En fait, notre
débat porte ici sur une préoccupation sociale qui a pris à juste titre de
l'ampleur ces dernières années.
Les violences en milieu universitaire avaient déjà été abordées et j'avais
soutenu un amendement visant à faire du bizutage un délit.
Je crois que, aujourd'hui aussi, la Haute Assemblée va dans le bon sens. Mais
il faudra prévoir les moyens de cette politique.
La médecine du travail devra être à même de traiter ce type de problème. Il
faudra en particulier recourir aux services de consultants en psychiatrie.
Traiter les troubles de la personnalité, arriver à les débusquer, ne pas tomber
dans l'excès demandent des compétences particulières. Il ne faut pas confondre
les difficultés quotidiennes liées au travail et la confrontation avec des
personnalités perverses et paranoïaques, qui sont très difficiles à débusquer
dans le milieu du travail et à traiter.
En ce qui me concerne, j'aimerais que nous dépassions le stade de risque, pour
en arriver à la notion de maladie professionnelle.
Ces victimes sont culpabilisées et leurs comportements d'évitement peuvent les
conduire à la mort. Je me devais d'insister sur ce point.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 172, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 50
ter
est supprimé.
Article additionnel avant l'article 50 quater