SEANCE DU 18 AVRIL 2001


M. le président. L'article 31 bis A a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Mais, par amendement n° 1, M. Deneux et les membres du groupe de l'Union centriste proposent de le rétablir dans la rédaction suivante :
« L'étiquetage d'un produit bénéficiant d'une appellation d'origine contrôlée laitière doit obligatoirement comporter le nom du fabricant et/ou de l'affineur du produit bénéficiant de l'appellation d'origine contrôlée, ainsi que l'adresse, à l'intérieur de l'aire géographique de l'appellation concernée, du site de fabrication et/ou d'affinage. »
La parole est à M. Franchis.
M. Serge Franchis. L'obligation de faire figurer le nom et l'adresse du fabricant dans l'étiquetage des fromages d'appellation d'origine a été introduite dans le code de la consommation par la loi d'orientation agricole n° 99-574 du 9 juillet 1999.
La présente modification a pour objet : premièrement, d'étendre cette disposition à l'ensemble des produits laitiers d'appellation, l'exclusion actuelle des beurres et crèmes n'ayant aucune justification ; deuxièmement, de viser clairement les affineurs, qui participent à l'élaboration de l'appellation, le seul terme de fabricant pouvant être interprété de façon restrictive ; troisièmement, de préciser que l'adresse indiquée doit bien être celle du site de fabrication ou d'affinage.
Il s'agit, par cet amendement, de rétablir un article additionnel introduit par le Sénat et supprimé en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Yann Gaillard, rapporteur. La commission souhaiterait entendre l'avis du Gouvernement, d'autant que M. Patriat a déjà fait des déclarations sur ce sujet.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. J'ai le sentiment de me retrouver deux années en arrière, lorsque nous débattions des signes de qualité à l'occasion du projet de loi d'orientation agricole. Nous avons alors été nombreux à intervenir.
Je vais m'attarder un instant sur ce thème, parce qu'il met en cause l'aménagement du territoire, des hommes, des emplois. C'est donc un sujet qui nous passionne tous.
L'intérêt que les familles interprofessionnelles concernées, soutenues par le Comité national des produits laitiers de l'Institut national des appellations d'origine, l'INAO, portent à cet amendement, s'articule autour de trois objectifs : lever l'ambiguïté du mot « fabricant » en précisant le champ d'application du terme au regard de l'organisation de la filière de production d'un fromage d'appellation d'origine contrôlée.
La notion de fabricant d'une AOC fromagère recouvre les trois stades de l'élaboration de l'AOC : le producteur agricole qui produit le lait, le transformateur de lait qui produit le fromage, et l'affineur qui produit le produit fini.
Ces trois stades peuvent faire intervenir un, deux ou trois opérateurs distincts. Les décrets de reconnaissance des AOC fromagères définissent l'aire géographique dans laquelle doit se dérouler chacune de ces trois étapes - le dernier décret que j'ai signé à ce sujet concerne d'ailleurs le morbier que vous connaissez bien, monsieur Franchis.
Or, la rédaction actuelle entraîne des difficultés d'application pour certains fromages d'appellation d'origine contrôlée lorsque les trois stades d'élaboration sont, en pratique, effectués par des opérateurs distincts. C'est le cas lorsque l'affineur achète le fromage non affiné à l'entreprise de transformation à laquelle livre le producteur laitier. J'ai été confronté à ce problème lors d'une visite dans le département du Puy-de-Dôme, chez M. Charasse, à propos d'un lait de chèvre remarquable, aujourd'hui très prisé par les Parisiens.
Cette pratique est constatée généralement pour le comté, le munster, le reblochon, l'ossau-iraty, le saint-nectaire et quelques fromages de chèvre, le crottin de Chavignol et le sainte-maure de Touraine, par exemple. Je n'imiterai pas le regretté Bernard Barbier qui avait, un jour, cité toutes les grandes AOC de France...
Or, les entreprises d'affinage relevant de la zone d'appellation n'en sont pas moins, tout comme les producteurs laitiers et les entreprises de production de fromage d'appellation, soumises à l'obligation de respect du cahier des charges de l'AOC. L'affineur, lorsqu'il en est distinct, participe tout autant que le transformateur à l'élaboration du fromage AOC et contribue à lui donner sa notoriété.
L'obligation que l'adresse indiquée soit bien celle du lieu de fabrication ou d'affinage évitera qu'un affineur, revendeur hors zone, puisse faire indûment figurer son nom et son adresse sur l'étiquetage d'un produit valorisé en AOC. Il sera également impossible que figure l'adresse du siège social du fabricant lorsque celui-ci est situé hors de la zone d'appellation, ce qui est généralement le cas des grandes entreprises que tout le monde connaît bien.
Cette disposition sera étendue à l'ensemble des produits laitiers d'appellation. Alors que les enjeux des producteurs et des distributeurs se rejoignent, l'exclusion des beurres et des crèmes d'appellation d'origine contrôlée n'est ni pertinente ni justifiée.
L'amendement proposé préserve donc les opérateurs situés dans l'aire géographique d'appellation. C'est une précision rédactionnelle que je soutiens. Aussi, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur l'ensemble de ces fromages. (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 31 bis A est rétabli dans cette rédaction.

Article 31 ter