SEANCE DU 3 AVRIL 2001
M. le président.
La parole est à M. Donnay, auteur de la question n° 1022, adressée à M. le
ministre de l'intérieur.
M. Jacques Donnay.
Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la
situation de la délinquance dans le département du Nord et sa possible
évolution, après la dépénalisation du cannabis en Belgique.
En effet, la récente publication des chiffres de la délinquance en France,
pour l'année 2000, soulèvent de nombreuses inquiétudes.
Le Nord - Pas-de-Calais n'échappe pas à la tendance nationale et affiche des
pourcentages parfois étonnamment élevés. Lille accuse une recrudescence de la
délinquance de 3,31 %, Roubaix de 6,62 %, Tourcoing de 7 %, Douai de 4 %,
Dunkerque de 2,32 %, Valenciennes de plus de 2 % et Cambrai de 5 %.
Dans ce contexte, il est à craindre, au lendemain de l'annonce de la
dépénalisation de l'usage du cannabis en Belgique, que l'exemple belge ne tarde
pas à avoir une influence certaine sur les deux maux nordistes très présents :
la délinquance croissante des mineurs et le trafic des stupéfiants.
Le Nord était déjà l'une des régions les plus touchées par ce dernier
phénomène en raison de sa proximité avec le marché libre des Pays-Bas, qui
n'est situé qu'à 100 kilomètres du département. Que va-t-il désormais en être
puisque l'offre va incontestablement croître avec le cannabis qui circulera
librement de l'autre côté d'une frontière avec la Belgique de 200 kilomètres,
qui, pratiquement, n'existe pas ?
Inéluctablement, cette nouvelle situation va entraîner une augmentation des
trafics générateurs d'économie souterraine, une augmentation des trafics de
stupéfiants, une augmentation des phénomènes de violence et, plus généralement,
une montée de la délinquance dans les villes, les milieux périurbains et les
zones rurales.
En conséquence, je vous demande, monsieur le secrétaire d'Etat, face au risque
d'une telle spirale et d'une montée en puissance de la délinquance dans le
département du Nord, quel plan d'action vous entendez mettre en oeuvre.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer.
Monsieur le sénateur, tout d'abord je
tiens à souligner que l'évolution de la délinquance dont vous faites état pour
le département du Nord au cours de l'année 2000 doit être appréciée
objectivement. Nous verrons ensuite bien sûr comment le Gouvernement entend y
répondre.
Si les faits constatés dans les grandes villes du département ont légèrement
augmenté, les infractions de voie publique ont nettement régressé au sein de
ces agglomérations durant la même période. On enregistre une diminution de 5 %
à Roubaix, de 13 % à Douai, de 6 % à Valenciennes et de 6 % à Cambrai.
Il en va de même en matière de stupéfiants : certes, le département du Nord a
enregistré en 2000 une hausse de l'ordre de 5 % des faits constatés, mais les
services de police ont mis en oeuvre de nouveaux modes d'action pour lutter
plus efficacement contre ces fléaux.
Ainsi, les opérations d'envergure contre le trafic organisé sont allées de
pair avec le développement de l'occupation de la voie publique par les
policiers en tenue, afin de ne laisser aucun répit aux dealers et aux
trafiquants.
L'activité déployée par les services de sécurité publique du Nord a permis, au
cours de l'année 2000, de procéder à de nombreuses saisies de produits
stupéfiants et de récupérer plus d'un million de francs provenant de ces
commerces illicites.
De même, pour lutter contre les trafics itinérants dans le cadre de la
coopération Schengen, des opérations ponctuelles sont mises en place aux
frontières, sur des axes déterminés, par les services de la police française -
police judiciaire et sécurité publique -, les services de la gendarmerie
nationale et leurs homologues belges et hollandais, auxquels sont associés les
services des douanes. Régulièrement, les contrôles opérés aboutissent à des
saisies.
Parallèlement, l'action de prévention des services de police du Nord s'est
développée et la campagne de prévention au sein des établissement scolaires a
été particulièrement intensifiée.
Quant à la politique menée en Belgique en matière de stupéfiants, il convient
de préciser que la légalisation de la vente ou de la production n'a pas eu,
pour l'heure, de traduction législative. De plus, cette proposition ne fait pas
l'unanimité chez nos voisins : le projet pourrait, en effet, se révéler en
contradiction avec les conventions internationales ratifiées par la Belgique en
matière de stupéfiants.
S'agissant de la lutte contre la délinquance des mineurs, les Conseils de
sécurité intérieure des 8 juin 1998 et 30 janvier 2001 ont défini les grandes
lignes des mesures destinées à assurer une présence effective dans les
quartiers et les lieux sensibles, de nature à lutter contre l'impunité, à
améliorer la prise en charge des mineurs délinquants et à instituer le
partenariat avec les différents acteurs de la sécurité au travers des contrats
locaux de sécurité qui réunissent en effet les services de l'Etat, mais aussi -
c'est indispensable - les collectivités locales.
Sur le plan opérationnel, les circonscriptions de sécurité publique du
département du Nord disposent de sept brigades des mineurs opérant au sein des
services d'investigation.
Dans chacune des circonscriptions, un correspondant local « police-jeunes » a
été désigné. Son action est coordonnée, au niveau départemental, par un «
référent-jeunes ». Ces policiers ont pour mission d'être les interlocuteurs
privilégiés des jeunes au sein de chaque service et d'assurer, par le recueil
d'informations, mais aussi par le dialogue avec les différents partenaires, la
mise en oeuvre d'actions ciblées ou personnalisées dans la lutte contre la
délinquance des mineurs. Ce dispositif permet une meilleure individualisation
et une plus grande rigueur du suivi judiciaire, éducatif et social des mineurs
délinquants, notamment des récidivistes, grâce à la transmission d'une
information plus complète aux magistrats.
Enfin, j'ajoute que, pour assurer une action éducative continue auprès des
jeunes du département, quatre centres de loisirs ont été mis en place par la
sécurité publique dans les communes de Dunkerque, Grande-Synthe, Petite-Synthe
et Valenciennes ; ils ont accueilli, en 2000, cinq cent quatre-vingt treize
jeunes issus des quartiers sensibles.
Au travers de ces informations, monsieur le sénateur, je souhaitais, si besoin
était, vous rassurer sur l'ampleur du dispositif mobilisé par le ministre de
l'intérieur et par les représentants de l'Etat dans le département du Nord pour
lutter, avec beaucoup de ténacité, contre toutes les formes de délinquance que
vous avez rappelées.
M. Jacques Donnay.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Donnay.
M. Jacques Donnay.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'Etat.
Nous sommes néanmoins très inquiets. Une étude de l'observatoire régional de
la santé publiée récemment, en octobre 2000, précisait qu'un jeune de moins de
vingt-cinq ans sur deux s'était déjà vu proposer du cannabis et qu'un sur cinq
en avait consommé.
De plus, on peut, malheureusement, craindre une augmentation de ces
proportions, car - vous le savez - la Belgique est en train de copier quelque
peu les Pays-Bas, ce qui est naturellement très dommageable.
J'admets volontiers que l'action menée par le préfet du Nord, qui prend
conscience de cette dérive, est bénéfique. Il m'apparaît cependant qu'il
faudrait augmenter les actions de prévention et, surtout, développer
l'information de façon substantielle.
RECOURS EXCESSIF À LA PROCÉDURE
DE MISE À DISPOSITION DES AGENTS PUBLICS