SEANCE DU 10 JANVIER 2001
M. le président.
Nous reprenons la discussion de la proposition de loi modifiant la loi n°
83-583 du 5 juillet 1983 réprimant la pollution par les navires.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Heinis.
Mme Anne Heinis.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais
d'abord associer à mes propos M. Jean-François Le Grand, président du conseil
général de la Manche, qui m'a demandé de me faire l'écho de ses préoccupations,
ainsi que M. Jacques Oudin, président du groupe d'étude de la mer, qui aurait
dû être des nôtres cet après-midi.
Monsieur le ministre, il n'est pas de jour sans qu'une portion des 5 500
kilomètres de côtes françaises soit agressée par la pollution des navires.
Membre du groupe d'étude de la mer du Sénat, je mesure cette réalité avec
amertume, mais sans abattement.
Voilà un peu plus d'un an, le 12 décembre 1999, le pétrolier
Erika
faisait naufrage. Tout a été dit sur cette catastrophe. Je veux rappeler le
travail sérieux et apprécié des membres de la mission commune d'information du
Sénat, dont le rapporteur était notre collègue Henri de Richemont, que j'ai
plaisir à saluer. Le rapport a été rendu public le 27 juin.
Le même jour, précisément, se tenait un comité interministériel de la mer, qui
avait pour objet de compléter les décisions prises par un précédent comité
interministériel tenu, lui, le 28 février 2000, à Nantes.
Les intentions du Gouvernement étaient excellentes, si l'on se réfère aux
relevés de décision de ces comités, dont la réunion avait d'ailleurs répondu à
un souhait exprimé auprès de M. le Premier ministre par notre groupe d'étude de
la mer.
Sur le plan de la réflexion théorique, tout, ou à peu près, a été envisagé,
mais, cela n'a pas marché et, malheureusement, cela ne marche toujours pas.
Pourtant, toute la communauté maritime, qui avait souffert et qui panse ses
plaies, était en droit d'attendre, en matière de pollution par les navires, une
action gouvernementale extrêmement ferme.
Peut-être aurait-il fallu témoigner davantage de cette fermeté tant à
l'échelon européen que sur le plan du droit interne. Précisément, trois
propositions de directive du Parlement européen et du Conseil ont fait l'objet,
au même moment, d'un débat.
Force est de reconnaître que le travail des institutions européennes sur ces
sujets était trop timide. Je relève d'ailleurs que l'Assemblée nationale
elle-même, dans une résolution n° 558 en date du 20 octobre 2000, affirmait : «
Les propositions formulées par la Commission européenne ne sont que très
partiellement à la hauteur des enjeux. » Je constate donc que la majorité
sénatoriale n'était pas seule à considérer que l'on n'allait pas assez loin.
C'est dans ce même contexte que l'Assemblée nationale a adopté, le 14 juin
2000, la proposition de loi qui nous est aujourd'hui soumise. Pour ma part, je
salue le fait que ce texte résulte d'une initiative parlementaire. Il n'y a
aucune raison d'abandonner le thème maritime à la seule initiative du
Gouvernement, quel qu'il soit, d'autant que les parlementaires, qu'ils soient
ou non issus de départements côtiers, ont souvent une très bonne vision de ces
problèmes.
Hélas ! ce travail et ces initiatives se sont trouvés ponctués par le
naufrage, le 31 octobre 2000, au large des côtes normandes, d'un navire
chimiquier italien chargé de 4 000 tonnes de styrène, de 1 000 tonnes de
méthyltrichlorosilane et de 1 000 tonnes d'alcool isopropylique : le
Ievoli
Sun
.
Je ne reviens pas non plus sur les circonstances de ce nouveau désastre. Vous
les avez tous présentes à l'esprit.
La première conclusion que je tire, c'est que le Gouvernement a montré une
réelle bonne volonté, tant au niveau que des comités interministériels de la
mer que des instances européennes pendant sa présidence de l'Union,...
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Absolument !
Mme Anne Heinis.
... pour élaborer des solutions réglementaires ou négociées face au risque que
constitue la pollution par les navires. De ce point de vue, je crois que ses
intentions étaient bonnes.
Mais force m'est de constater qu'entre le 12 décembre 1999 et le 31 octobre
2000, en dix mois, presque rien n'a été fait - ou si peu ! -, au regard des
objectifs fixés, sur le plan de l'action concrète.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Pourquoi vous
arrêtez-vous au 31 octobre ? Allez jusqu'au mois de décembre 2000 !
Mme Anne Heinis.
On n'a pas fait assez pour remédier au problème, monsieur le ministre, je vous
l'ai déjà dit pendant l'examen du budget de la mer, à cette tribune et aussi en
privé. Je ne crois pas avoir beaucoup changé de discours : je reconnais ce qui
a été fait tout en continuant à insister sur ce qu'il reste à faire. C'est
comme cela que l'on avance et c'est notre devoir de parlementaire que d'avoir
cette double vision des choses ; vous le comprenez, j'en suis sûre.
S'agissant de la pollution, on a envoyé des soldats et des jeunes nettoyer les
rochers avec les moyens du bord ! On a parlé beaucoup, au niveau national comme
au niveau européen. On a noirci du papier à la hâte. C'est à peu près tout !
Je ne veux ici évoquer que de manière allusive la problématique compliquée de
la réparation des dommages, qu'il s'agisse du domaine public ou des
particuliers. Où en sont les indemnisations du FIPOL, 40 millions de francs sur
un budget de 1,2 milliard de francs ? Le FIPOL a-t-il un niveau de crédits
suffisant ? Nous disposons de peu d'informations.
Il faut qu'un droit de l'environnement maritime, sinon mondial, du moins
européen, voie le jour. La France a tenté, pendant sa présidence, d'y
contribuer.
L'accord ministériel du 21 décembre 2000 sur le contrôle systématique des
bateaux se présentant pour la première fois dans un port européen, sur la
généralisation recommandée des « boîtes noires » et sur le renforcement de la
responsabilité financière des sociétés de classification est un bon accord.
L'accord, intervenu le 6 décembre 2000, entre les deux assemblées sur le texte
proposé par le Sénat pour l'article 11
bis
du projet de loi portant
diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des
transports a marqué un pas supplémentaire. Lorsque ce projet de loi sera
promulgué, le contrôle des déchets dans les ports français sera renforcé.
Mais cela ne suffit pas. Mes chers collègues, nous ne pouvons laisser les
côtes à la merci d'individus ou de sociétés qui, au nom du profit, ne
respectent rien et compromettent l'avenir. Je ne suis pas opposée au profit,
mais il doit être contrôlé et ne pas être le seul objectif. Nous devons
protéger notre environnement, en l'occurrence la mer et le littoral.
Il n'est pas admissible que l'Europe laisse naviguer dans ses eaux des bateaux
ne respectant pas les normes ou les règles de sécurité. Il n'est pas acceptable
que des sociétés de complaisance délivrent des certificats de navigabilité à
des navires qui constituent un danger pour la faune et la flore marines, pour
les paysages et les populations du littoral.
Il n'est pas non plus admissible que soient tolérés les déballastages sauvages
ou les pollutions de routine, les plus importants, qui souillent nos côtes et
auxquels les navires procèdent par calcul de rentabilité à courte vue.
Notre excellent rapporteur le soulignait à juste titre tout à l'heure, à
propos de l'
Erika
, le terme de « déballastage » n'est d'ailleurs guère
approprié, car il signifie deux choses : vider l'eau des ballasts servant à
équilibrer le navire laquelle n'est pas polluée, et vider l'eau des cales ou
des soutes qui est de nature très différente, car elle contient des restes de
mazout, de pétrole ou de produits polluants.
Il suffit de voir ce qu'ont entrepris les Etats-Unis pour se rendre compte
qu'une action efficace est possible. La tâche est peut-être plus aisée pour
eux, mais nous devons, nous aussi, agir.
Pourquoi les Etats-Unis interdisent-ils l'accès de leurs eaux aux bateaux
n'offrant pas de garanties et pourquoi l'Europe continuerait-elle d'être
permissive ? Certes, les Etats-Unis ne forment qu'un seul pays. Tel n'est pas
le cas de l'Europe, ce qui complique la situation et nécessite notamment un
effort énorme à l'échelon européen. En effet, car si nous ne parvenons pas à un
accord à cet échelon, d'une part, nous ne réussirons pas à mener une action
cohérente et, d'autre part, nous n'aurons pas un poids suffisant au niveau
international ce qui est incontestablement la deuxième étape.
De ce point de vue, la proposition de loi qui nous est soumise est la
bienvenue. Elle s'intègre logiquement dans la ligne de la convention MARPOL de
1973.
Notre rapporteur, M. Lucien Lanier - et je salue l'excellent travail qu'il a
accompli au nom de la commission des lois, en a parfaitement montré
l'économie.
Le choix a été fait de renforcer le dispositif répressif institué par la loi
du 5 juillet 1983.
Les sceptiques diront que l'on ne peut pas se prémunir contre la pollution en
élevant simplement des barrières juridiques nationales. C'est vrai, mais à
ceux-là je répondrai que, si la sanction contrebalance par son coût l'intérêt
économique tiré du mauvais entretien ou du déballastage sauvage, elle devient
réellement dissuasive. Je soutiens donc l'approche de la commission des
lois.
Je me bornerai à proposer, par ailleurs, quelques amendements, parfois
inspirés de l'exemple américain, dont je préciserai l'objet le moment venu.
Je veux toutefois souligner deux points.
D'abord, je voudrais attirer l'attention du Gouvernement sur les moyens, car
les meilleures intentions ne peuvent donner de résultats que si les moyens de
les mettre en oeuvre existent. J'ai déjà dit et écrit, lors de la discussion du
projet de loi de finances pour 2001, qu'en matière de sécurité maritime le
niveau des crédits accordés par l'Etat restait bien en deçà des besoins,
notamment en ce qui concerne les dépenses en capital, pour lesquelles il
faudrait un doublement de l'effort. Mais il est jamais trop tard pour bien
faire, par exemple, dans le prochain projet de budget...
J'insisterai ensuite sur le point particulier des moyens portuaires en matière
de confinement des résidus pétroliers. Qu'observons-nous ? Onze ports français
ne disposent pas d'installations permettant de recevoir des résidus ; vous
l'avez indiqué, monsieur le rapporteur. Les autres ports ont des capacités de
stockage variables, dont la conformité aux besoins est loin d'être établie. Il
me paraît donc souhaitable que le Gouvernement, à la faveur du présent débat,
prenne des engagements sur l'équipement des ports actuellement privés de moyens
de confinement, qu'il s'agisse d'une aide budgétaire ou de facilités d'emprunt
accordées aux autorités portuaires à cette fin, sans oublier, monsieur le
ministre, l'étude de l'utilisation des moyens privés existants.
S'agissant de ces moyens privés, ne pourrait-on pas passer des conventions
après étude de leur qualité ? Cela permettrait d'accélérer les choses en
attendant que des crédits supplémentaires soient alloués.
Pourquoi ne pas imaginer, en outre, de mettre à flot, dans les ports maritimes
où cela paraît nécessaire et possible, des barges qui seraient destinées à
recevoir la collecte des déchets marins et qui, une fois pleines, pourraient
être tractées jusqu'à un port équipé d'une véritable zone de stockage à un
moment où un tel transfert ne présenterait pas de risque de naufrage ?
Ensuite, je souligne l'importance d'un traitement égal pour les navires et
équipages français et pour les autres navires. Ne pas traiter de façon égale
les uns et les autres, c'est porter atteinte à la concurrence, c'est rompre
l'égalité. Par conséquent, il convient que l'appareil répressif s'applique de
la même façon quelle que soit la nationalité des navires, des capitaines, des
armateurs. Aucune de ces trois catégories ne doit être oubliée.
Cela signifie que nos efforts de réglementation nationale doivent être
systématiquement complétés par des règles internationales négociées. Mais, pour
ce faire, encore faudrait-il que nous ayons du poids - nous en manquons en
raison de la faiblesse de notre marine -, surtout dans les organismes
internationaux constitués essentiellement de pays dont les pavillons pèsent
beaucoup plus lourd que les nôtres.
Par ailleurs, je voudrais émettre des suggestions pratiques, dont la
réalisation me semble indispensable.
Première suggestion : le renforcement des effectifs des inspecteurs de la
sécurité maritime. Ils sont 54 en France, contre 250 en Grande-Bretagne et 200
en Espagne. Nous en avons parlé et je sais que des efforts sont faits dans ce
sens. Mais il n'empêche que, pour avoir des inspecteurs compétents,
c'est-à-dire expérimentés et perspicaces, il faut les recruter, les former et
les rémunérer convenablement ; j'y reviens car cela me paraît tout à fait
important.
Il faut aussi disposer de ce fameux « vivier » de ressources humaines qui nous
fait aujourd'hui défaut en raison de la réduction du format de notre marine
marchande. Je ne cesserai jamais de souhaiter que celle-ci reprenne son essor,
lequel est hélas ! interrompu depuis le début des années soixante.
Deuxième suggestion : l'inspection obligatoire en cale sèche des navires âgés
de plus de quinze ans tous les deux ans et demi et tous les ans pour les
pétroliers de plus de quinze ans transportant des hydrocarbures chauffés.
Troisième suggestion : l'assurance obligatoire au niveau mondial, pour un
montant significatif, des sociétés de classification dont, en pratique, la
responsabilité n'est jamais mise en cause. Ce problème est grave, et il est
d'ordre international ; il mérite en tout cas d'être posé.
Quatrième suggestion : la consolidation, pour l'information des affréteurs, du
système Equasis, qui pourrait être complété par les résultats du
vetting
et par les recommandations des sociétés de classification, recommandations
assorties d'une interdiction d'accès à l'ensemble des ports européens pour les
navires qui n'auraient pas communiqué ces éléments. Je sais que cette
interdiction ne saurait être imposée d'emblée et qu'elle nécessite au préalable
des négociations.
Il me paraît également important d'accélérer la négociation en cours, au sein
de l'OMI en vue d'une modification des limites d'indemnisation du FIPOL. Il
s'agit là d'un élément essentiel si l'on veut indemniser les gens correctement.
En effet, la différence constatée entre les indemnisations accordées à l'heure
actuelle pour ce genre d'accidents aux Etats-Unis et celles qui le sont chez
nous est éloquente.
J'avancerai une cinquième et dernière suggestion que j'avais déjà évoquée et
sur laquelle je reviens à la demande d'un ancien capitaine de navires.
En attendant les boîtes noires qui ne donneront de toute façon que des
indications sur le moteur et non sur le navire lui-même, il faudrait instituer
un dispositif simple qui consisterait à imposer à chaque navire, à l'échelon
français, puis européen et mondial, l'obligation de tenir un carnet de bord
d'entretien où chaque inspection serait systématiquement inscrite dans une
langue internationale compréhensible. Dans la pratique, vous le savez, monsieur
le ministre, les inspecteurs se téléphonent de temps en temps pour échanger des
informations.
En effet, pour n'importe quel matériel industriel, pour n'importe quelle
machine, n'importe quelle voiture, n'importe quel avion, il existe un carnet
d'entretien sur lequel est notée la succession des interventions et des
observations qui ont été faites. Si cette mesure était appliquée rapidement
pour les navires dans notre pays, avant d'être adoptée à l'échelle européenne,
nos inspecteurs et ceux des pays voisins pourraient déjà se faire une idée ou
être alertés sur ce que les autres ont fait, ont vu ou « flairé ». Car si le
vetting
comporte nécessairement un aspect administratif, il suppose
aussi du « flair » de la part des inspecteurs, qui peuvent avoir l'intuition
d'une anomalie dans un bateau, et cela implique une certaine expérience.
L'adoption d'un tel carnet d'entretien serait une mesure simple, mais, je le
répète, de l'avis même des spécialistes, elle permettrait un suivi du contrôle
et des relevés des inspecteurs lors de leurs différentes visites de
vetting
.
Je conclurai en insistant sur le fait que la France comme l'Union européenne
doivent militer en faveur d'une meilleure coordination entre Etats sur des
sujets où, hélas, les égoïsmes nationaux restent puissants. Je pense à
l'habilitation des sociétés de classification, au contrôle des navires par
l'Etat du port et au calendrier d'abandon mondial, dans le cadre de l'OMI,
d'ici à 2015, des pétroliers à simple coque, même si, à en croire de nombreux
marins, la double coque, du moins telle qu'on nous la propose, n'est sans doute
pas la panacée.
Ce point fait l'objet d'un débat, et ce n'est pas parce que l'Amérique a
accepté cette mesure que celle-ci est nécessairement la meilleure et la mieux
adaptée. Il y a notamment un débat sur la nature de ces doubles coques. A cet
égard, si le système préconisé par la France est relativement coûteux, je n'y
suis pas pour autant
a priori
hostile.
Au terme de cet inventaire un peu foisonnant, je le reconnais, je dirai que la
lutte est certes engagée, mais qu'elle doit être constante : nous devons faire
preuve d'une extrême opiniâtreté dans ce domaine si nous voulons épargner à nos
côtes la multiplication des pollutions par les navires.
Ce combat est nécessaire et attendu par notre population. C'est un combat
difficile, dans lequel nous devons être exemplaires. C'est probablement la
meilleure occasion de peser de tout notre poids pour défendre, à l'échelle tant
européenne qu'internationale, la mise en oeuvre et le respect des mesures
adoptées par l'Europe afin de protéger nos côtes et celles des autres. Mais
force est de reconnaître que nous sommes géographiquement les plus menacés :
c'est la raison pour laquelle nous devons redoubler de vigilance et de
détermination.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, de l'Union
centriste et du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Le Cam.
M. Gérard Le Cam.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis la
fin des années soixante, les catastrophes maritimes aux conséquences
écologiques désastreuses se sont multipliées :
Torrey Canyon, Amoco Cadiz,
Braer, Exxon Valdes, Erika, Ievoli Sun.
Au rang des pays particulièrement exposés à ce type de risque figure la
France, avec ses multiples façades maritimes et ses 5 000 kilomètres de
côtes.
Rien qu'en se limitant au large des côtes du Pas-de-Calais, une étude récente
menée par les CROSS estime le trafic à 219 000 navires qui, chaque année,
empruntent le détroit transmanche. Les mouvements annuels des navires
transportant des matières dangereuses s'élèvent à 17 500, qu'ils soient le fait
de pétroliers, de méthaniers, de chimiquiers ou d'autres.
Certaines dates méritent d'être rappelées : en 1967, le
Torrey Canyon
déverse le long des côtes françaises et britanniques quelque 100 000 tonnes
de pétrole ; en 1978, l'
Amoco Cadiz
crache sur le rivage breton ses 20
000 tonnes de brut ; en 1980, le
Tanio
éclabousse de quelque 7 000
tonnes de fioul le littoral français ; en 1999, l'
Erika
souille le
littoral Manche-Atlantique d'une marée noire d'une quarantaine de milliers de
tonnes de fioul ; en 2000, le
Ievoli Sun,
aux cuves pleines de produits
chimiques toxiques, dont 4 000 tonnes de styrène, menace les bordures maritimes
du Cotentin.
Pour tous ceux qui tirent leurs ressources de la mer, les dommages que causent
de telles pollutions sont économiquement considérables et socialement
dramatiques. Qu'ils soient pêcheurs, ostréiculteurs, conchyliculteurs,
paludiers, mareyeurs ou encore salariés du tourisme, tous les professionnels de
la mer ont été touchés par l'une ou l'autre de ces catastrophes, voire, pour
certains, par plusieurs d'entre elles. La Bretagne en sait quelque chose !
Combien d'années seront nécessaires pour effacer les traces de ces catastrophes
à répétition ?
Le coût global laissé à la charge de la collectivité est donc énorme. D'un
point de vue strictement écologique, il est inestimable. Quand bien même, et au
prix de maints efforts de la population, les préjudices les plus flagrants
finiraient-ils, à long terme, par s'atténuer, voire disparaître, des traces
demeureront imprimées dans la mémoire collective.
Pour autant, ces pollutions accidentelles aux marques indélébiles sur
l'environnement marin, le biotope et l'ensemble de l'écosystème sont encore
l'occasion pour des compagnies de navires rompues aux logiques purement
lucratives de dégazer
incognito
dans le sillage de ces marées noires
exceptionnelles.
Pour scandaleuses qu'elles soient, ces pratiques de dégazage ou de
déballastage sauvage ne sont pas l'exception qui confirmerait la règle d'une
bonne conduite, hors des circonstances particulières occasionnées par le
naufrage d'un pétrolier ou d'un chimiquier. De tels comportements sont
malheureusement pratique courante.
Depuis plus de trente ans, l'espace maritime est victime d'une pollution
insidieuse, car moins visible, mais tout aussi, voire plus dangereuse pour le
patrimoine écologique marin.
En temps normal donc, le plus souvent au large des côtes, on dégaze, on
vidange, on nettoie ses machineries, on cure ses cuves, on rince ses ballasts,
autant de « toilettes » quotidiennes qui contribuent au rejet à la mer de
tonnes de fioul, huiles et autres déchets nocifs.
De source officielle, ce sont 600 000 tonnes de déchets qui sont ainsi
déversées frauduleusement chaque année en Méditerranée, soit l'équivalent de
six naufrages annuels d'un
Torrey Canyon.
La mer du Nord absorberait
chaque année trois millions de tonnes de déchets : soit une addition indigeste
et toxique d'environ six
Torrey Canyon,
dix
Amoco Cadiz
et cinq
Erika
!
Autant de dégâts socio-économiques globaux imputables en majeure partie, si ce
n'est totalement, à l'organisation du transport maritime laissée à la
domination des seules règles du marché.
Au-delà des vingt milles, l'espace maritime est, par définition, un espace
international, un espace entre les nations, un espace qui n'est la propriété
d'aucun Etat particulier. C'est aussi aujourd'hui un espace fréquenté par des
navires « poubelles », des navires battant pavillon de complaisance - un sur
cinq en 1970, plus d'un sur deux aujourd'hui -, des navires aux équipages sans
droits, autrement dit, un espace soumis aux seules lois du marché, où règnent
en fait des pratiques hors la loi ! Non-respect des réglementations,
contournement délibéré des règles, navires en dessous des normes de sécurité
minimales... Selon l'OCDE, les marges de sécurité seraient tombées à un niveau
critique.
Car, pour autant que le droit de la mer soit fondé sur un principe de base
selon lequel la mer est libre, un ensemble de réglementations multilatérales et
internationales - OMI, convention SOLAS, convention MARPOL, mémorandum de
Paris, réglementation européenne -, élaborées pour la plupart après la Seconde
Guerre mondiale, existe, qui vise à protéger les mers et les océans. Comment,
d'ailleurs, ceux-ci pourraient-ils être protégés, si ce n'est par un ensemble
de réglementations internationales ?
Comme le fait remarquer à juste titre le rapport du Conseil économique et
social consacré aux causes et conséquences du naufrage de pétrolier
Erika,
jusqu'à la fin des années soixante, le principe de liberté au fondement du
droit maritime « n'a pas posé de problème insurmontable... Même l'apparition au
xxe siècle des grandes compagnies pétrolières, dont la puissance dépassait
celle de nombreux Etats, n'avait pas déréglé le système dans la mesure où elles
avaient, en général, une base nationale ». Et le rapport poursuit en soulignant
que le développement industriel mondial et la croissance des échanges ont fait
apparaître des problèmes désormais globaux.
Comment ne pas ajouter que, sur fond de crise de rentabilité financière,
d'exacerbation de la concurrence internationale, les grandes compagnies
pétrolières ont cherché à restaurer leurs profits en tentant de s'émanciper de
leur base nationale ?
L'abandon de l'organisation du transport à l'autorégulation d'un marché
mondialisé où se nouent des relations contractuelles entre transporteurs,
affréteurs, donneurs d'ordre divers, pris dans un jeu concurrentiel sans
limite, conduit à une pression à la baisse des coûts, dont on ne saurait nier
qu'elle a sans doute quelque chose à voir avec les comportements frauduleux et
les pratiques hors la loi.
Nous ne pouvons donc que nous féliciter de discuter aujourd'hui une
proposition de loi qui vise à réprimer les dégazages et déballastages illégaux.
Tout le monde reconnaît que les sanctions prévues à l'encontre de telles
pratiques par la loi du 5 juillet 1983 sont largement insuffisantes.
Ce texte vise à renforcer le caractère dissuasif des sanctions financières et
des peines de prison encourues. Les amendes prévues seront ainsi supérieures au
coût d'un déballastage effectué dans un port, coût qui, jusqu'à maintenant,
représentait le double de l'amende encourue !
Adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale, une telle proposition de loi
renforçant un dispositif juridique trop peu contraignant était une
nécessité.
Cependant, pour importante qu'elle soit, elle ne sera pleinement efficace que
si elle s'accompagne d'un renforcement des moyens et des contrôles.
Parce qu'elles demeurent sporadiques, les opérations « coup de poing »
entreprises par les douanes sont peu dissuasives. Entre le 18 et le 23 février
2000, de telles opérations ont permis de dénombrer trente-neuf dégazages
sauvages à la pointe de la Bretagne. De par leur caractère préventif, ces
opérations doivent être effectuées régulièrement sur l'ensemble du littoral
français.
Ce texte soulève aussi la délicate question du repérage et de la traçabilité
des navires qui, clandestinement, se livrent à de telles pratiques
frauduleuses.
Nous savons que, depuis trois ans - l'analyse du budget l'a montré - le
Gouvernement s'est attaché à renforcer les moyens en hommes et les dispositifs
techniques de surveillance, par la mise en place, par exemple, de la base de
données Equasis ou, tout récemment, en accélérant la mise en oeuvre du plan «
douanes-POLMAR ».
Cependant, force est encore de constater que la pleine efficacité de cette
action suppose un développement important des infrastructures portuaires
permettant d'effectuer les déballastages et dégazages. Pour l'instant, seuls
les ports de Marseille et du Havre disposent de l'équipement fixe adapté à la
réalisation de telles opérations : il m'apparaît urgent d'établir une
programmation visant à la construction de ce type d'infrastructures dans
l'ensemble des ports français et européens qui accueillent des navires
potentiellement polluants. Sinon, comment pourrons-nous être exigeants ?
Force est enfin de constater que, entre le propriétaire du navire, le
capitaine de celui-ci, l'armateur et la compagnie d'affrètement, la répartition
des responsabilités demeure une question des plus litigieuses. En effet,
réserver les sanctions au seul capitaine du navire n'est pas sans poser
problème. Cela me fait penser à la situation de ces chauffeurs routiers qui
sont tenus pour responsables des procès-verbaux qu'ils encourent à tout moment
pour répondre aux exigences de leur employeur.
Plus fondamentalement, sans doute, la dissuasion et la prévention des
comportements mettant quotidiennement en danger l'environnement maritime et
marin exigent surtout une coopération européenne et internationale plus
étroite. Elles nécessitent - qui pourrait encore le contester ? - une plus
grande fermeté dans l'application des réglementations internationales
actuelles, sinon le renforcement et le prolongement de ces dernières.
Il apparaît également urgent d'intensifier la formation de personnels
qualifiés, marins et officiers, et d'augmenter le nombre et la puissance des
remorqueurs.
En d'autres termes, cette nouvelle proposition de loi ne doit être considérée
que comme une étape dans un processus de plus grande ampleur visant à la «
re-réglementation » des transports maritimes à l'échelle européenne, voire
internationale, en vue de mettre enfin un terme au laxisme qui règne depuis
plus de trente ans dans ce domaine.
Précisément, les temps changent, mes chers collègues : une période de «
re-réglementation » semble s'ouvrir, amenant à contester, là où elle était le
plus éclatante, la toute-puissance du libéralisme.
Ainsi, en 1990, les Etats-Unis, chantres du libéralisme s'il en est, ont
renforcé le
Tanker safety act
de 1935 en adoptant une nouvelle loi :
l'
Oil pollution act
. Chaque nouveau pétrolier doit désormais être équipé
d'une double coque et, à l'horizon 2015, les anciens pétroliers seront bannis
des eaux américaines. En cas de pollution, le propriétaire du navire sera tenu
pour responsable et devra assumer financièrement la réparation de la totalité
des dommages.
De même, à la fin du mois de décembre dernier, s'inspirant de vos
propositions, monsieur le ministre, l'Union européenne adoptait trois projets
de directive sur la sécurité maritime constituant le « paquet Erika 1 ».
Le premier projet vise à responsabiliser les sociétés de classification qui
effectuent les contrôles techniques. Désormais financièrement responsables en
cas d'accident, elles seront sans aucun doute plus exigeantes quant au respect
des normes de sécurité qu'elles ne le furent par le passé.
Le deuxième projet a pour objet de renforcer le contrôle des navires « à haut
risque ». Si, pour des raisons de sécurité, ces derniers ont été immobilisés à
deux reprises au cours d'une période de trois ans dans des ports de l'Union,
les eaux européennes leur seront interdites. L'idée d'équiper les navires d'un
« mouchard », à l'instar de la « boîte noire » des avions, a également été
retenue.
Le troisième projet tend à l'élimination, entre 2003 et 2015, des pétroliers à
simple coque.
Signe des temps, en avril prochain, c'est un « paquet », « Erika 2 » qui sera
examiné par le Conseil des ministres européens.
Plus de trente ans après le naufrage du
Torrey Canyon
, plus de vingt
après la marée noire due à l'
Amoco Cadiz
, une réglementation plus
protectrice de l'environnement maritime émerge. La réintroduction de règles qui
sont autant d'obstacles à une concurrence acharnée tirant vers le bas les
normes de sécurité constitue, d'une certaine manière, une reconnaisssance des
interactions qui existent entre la dimension économique et la sécurité
maritime. Les côtes françaises devraient bénéficier de cette plus grande
attention portée à la préservation du patrimoine écologique.
La France a aussi tout à gagner au changement de cap opéré par l'Union
européenne. Si la notion de compétitivité intègre désormais une dimension
écologique, le développement des infrastructures permettant aux navires
d'effectuer leurs dégazages et déballastages représentera pour nos ports un
atout économique stratégique à long terme.
Dans la même optique, les Chantiers navals de l'Atlantique pourraient profiter
de la priorité accordée au programme de remplacement des pétroliers à simple
coque. La conception, à Saint-Nazaire, d'un nouveau pétrolier à double coque,
le « 3-E » - plus économique, plus écologique et plus européen -, projet
d'étude lancé par la France, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne, répond aux
objectifs fixés par le troisième projet de directive.
Il reste que l'étape ultime de ce processus de « re-réglementation » est loin
d'être engagée. Elle consisterait à réintroduire des normes sociales qui
seraient autant de freins à une pression concurrentielle sans limites et à la
baisse des coûts, préjudiciables à l'environnement et, plus globalement, à
l'écosystème.
Au regard de ces remarques, et en insistant sur la nécessité d'être vigilant
quant à l'effective mise en oeuvre des décisions, nous voterons ce texte, qui
va dans le sens d'une amélioration de la sécurité des transports maritimes.
C'est l'avenir écologique et économique de la mer qui est en jeu.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen et sur les travées socialistes. - M. le rapporteur applaudit
également.)
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Mesdames,
messieurs les sénateurs, je voudrais tout d'abord rappeler, puisque plusieurs
d'entre vous ont abordé cette question, que le premier « paquet maritime », le
« paquet Erika 1 », qui a été adopté lors du conseil des ministres européens
des 20 et 21 décembre dernier, prévoit maintenant, en particulier, de renforcer
la responsabilité des sociétés de classification de navires et le contrôle par
l'Etat du port.
Il est ainsi proposé de contrôler l'état de 4 400 navires par an et de
faciliter la prise de mesures de bannissement des navires après deux retenues.
Je crois qu'il faut bien mesurer ce que cela signifie !
Par ailleurs, l'idée d'installer des « boîtes noires » sur les navires a été
retenue. Le Parlement européen est d'ailleurs tout à fait déterminé, nous le
savons, à aboutir sur ce point.
J'ouvrirai une parenthèse s'agissant du remplacement progressif des navires à
simple coque, mesure qui fait également partie du premier « paquet maritime ».
Si certains évoquent exclusivement leur substitution par des navires à double
coque, je souligne toujours, pour ma part, qu'il existe une autre possibilité :
le recours à des navires à pont intermédiaire,...
Mme Nicole Borvo.
Très bien !
M. Henri de Richemont.
Les Américains n'en veulent pas !
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
... la
Commission européenne faisant référence, nous y avons veillé, à des navires à
double coque ou « procédés similaires ».
M. Henri de Richemont.
Cela ne sert à rien !
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Par ailleurs,
madame Heinis, je ne vois pas pourquoi vous vous êtes arrêtée, dans votre
argumentation, au mois d'octobre. En effet, vous auriez pu aller, en ce qui
concerne le budget, jusqu'au 30 novembre, puisque c'est le 1er décembre que
celui-ci a été discuté au Sénat et que l'on a décidé d'augmenter de 60 % le
montant des crédits des transports et affaires maritimes. De plus, pour ce qui
concerne l'Europe, vous auriez pu aller jusqu'au mois de décembre pour tenir
compte des mesures qui ont été adoptées à l'échelon européen. Il n'est donc pas
très juste que vous vous soyez arrêtée au mois d'octobre, car des évolutions
sont intervenues ensuite, tant à l'échelle de la France qu'à celle de l'Europe.
Certes, on peut estimer que ce n'est pas suffisant, mais cela constitue, et
tout le monde l'a reconnu, une progression exceptionnellement forte et
rapide.
M. Lanier, quant à lui, a montré l'ampleur des dégâts causés par les pratiques
illicites de vidange et de déballastage en mer, notamment en Méditerranée, qui
est une mer fermée. Il a souligné, à juste titre, ainsi que d'autres
intervenants, les failles de la législation actuelle et les difficultés
rencontrées pour exercer les contrôles, et je tiens à le féliciter de ses
analyses, de ses réflexions et de ses propositions. Vous avez eu raison,
monsieur le rapporteur, d'insister sur l'importance de la question de
l'équipement des ports pour le dégazage et le déballastage des navires.
A cet égard, M. Le Cam a indiqué que deux de nos ports étaient équipés
d'installations à cet effet. Certes, je sais bien que la situation n'est pas
idéale, mais les ports équipés sont plus nombreux que vous ne l'avez dit,
monsieur le sénateur, et les responsables de ceux que vous avez oubliés
risquent d'en être vexés !
(Sourires.)
Pour ma part, j'ai cité Le Havre,
Marseille, Dunkerque et Nantes - Saint-Nazaire, mais il y en a d'autres.
Cela étant, il faut absolument favoriser la réalisation de nouveaux
équipements. Le rapport que j'ai demandé à ce propos doit m'être remis dans les
tout prochains jours - le mois de janvier commence le 1er, monsieur Lanier, et
se termine le 31 : je suis donc toujours « dans les clous » !
(Nouveaux
sourires)
- et je peux vous indiquer que, comme vous-même, le Parlement en
sera destinataire.
S'agissant du décret permettant de spécialiser les tribunaux, je demanderai à
mes services de travailler avec ceux du ministère de la justice pour qu'il soit
pris rapidement après que la loi aura été publiée.
Madame Heinis, le point sur les installations disponibles et à réaliser dans
les ports sera fait, tout comme sera réalisée l'étude des modes de financement
qu'il sera nécessaire de mettre en place. Tout doit être fait pour permettre la
construction de ces équipements indispensables.
En ce qui concerne le marquage des produits et l'installation d'une « boîte
noire » sur les navires, je ne peux qu'approuver les interventions de MM. Marc
et Le Cam : il s'agit de deux pistes que nous explorons. Une étude est en
cours, et l'on sait aujourd'hui que de telles solutions sont envisageables
techniquement. Le débat sur ce point a d'ailleurs abouti à l'échelon
communautaire puisque les Etats membres de l'Union européenne se sont engagés à
mettre en place les « boîtes noires » d'ici à 2005.
Vous avez souligné, monsieur Marc, que la convention internationale MARPOL
autorisait des rejets de produits contenant des hydrocarbures. Il faut
toutefois que la teneur ne dépasse pas quelques parties par million, ce qui est
infime. Or les dégazages ne respectent jamais ces normes et les navires
concernés, il faut le souligner, sont toujours en infraction.
Cela étant, on ne peut pas dire que rien n'a été fait à cet égard depuis 1997,
madame Heinis. Certes, le plafond financier d'intervention du FIPOL est
insuffisant, et nous voyons bien qu'il est nécessaire de le porter au-delà des
40 millions de francs actuels, pour atteindre et dépasser, comme cela est
possible, le milliard de francs. Nous nous attaquons donc à ce problème, et
nous proposons de multiplier le montant maximal d'indemnisation par cinq. Nous
avons déjà abouti à un relèvement à hauteur de 50 %, mais nous considérons
qu'il faut aller plus loin, et tel sera l'un des objets du « paquet Erika 2
».
M. Henri de Richemont.
Ce n'est pas possible : cela relève de l'OMI !
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Mme Heinis et M.
le rapporteur ont évoqué en outre le renforcement des effectifs des inspecteurs
: ceux-ci seront doublés dès cette année. Certes, M. Lanier a jugé qu'il serait
préférable de procéder à une augmentation plus progressive du nombre des
inspecteurs, mais, lorsque l'on se heurte à une difficulté, il convient de
fournir un effort suffisant pour la surmonter. La tâche n'est pas si simple à
accomplir, car ces métiers ne paraissent pas toujours très attractifs, et nous
avons dû prévoir, dans le budget, des primes mensuelles de l'ordre de 2 000 à 4
000 francs pour faciliter l'embauche dans ce secteur.
Quoi qu'il en soit, nous avons obtenu, dans le cadre de l'OMI, qu'une
inspection en cale sèche tous les deux ans et demi soit rendue obligatoire pour
les navires âgés de quinze ans et plus, ce qui répond au souhait de plusieurs
orateurs.
Vous demandez plus de transparence, monsieur Le Cam, et je vous rejoins sur ce
point.
En matière d'investissements dans le domaine de la sécurité maritime, nous
jouons un rôle moteur, et la progression a été cette année de 60 % par rapport
à l'an dernier. Cela a permis de dépasser le niveau qui avait été atteint en
1993 et qui, vous l'avez dit, avait hélas ! reculé depuis lors ; vous en savez
quelque chose.
A cet égard je rappelle que, le 21 décembre dernier, M. Queyranne m'avait
suppléé dans cet hémicycle pour répondre à vos questions. J'assistais alors au
Conseil des ministres des transports à Bruxelles. Au cours de ce Conseil, nous
avons été très actifs. Nous avons sans doute fait les trente-cinq heures en
deux jours et deux nuits !
M. Pierre Fauchon,
vice-président de la commission des lois constitutionnelles, de législation,
du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Bien
fait pour vous !
(Sourires.)
M. Lucien Lanier,
rapporteur.
Ce sont les cordonniers les plus mal chaussés !
(Nouveaux sourires.)
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
En tout cas,
nous avons réussi à avancer. D'ailleurs, je tiens à le dire, M. Queyranne m'a
fait part de tout le bien que vous pensez, quel que soit le groupe auquel vous
appartenez, du bilan de la présidence française en matière d'amélioration de la
sécurité maritime, et je vous en remercie.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
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