SEANCE DU 9 JANVIER 2001
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Décès d'anciens sénateurs
(p.
1
).
3.
Décisions du Conseil constitutionnel
(p.
2
).
4.
Commission mixte paritaire
(p.
3
).
5.
Dépôt d'un rapport du Gouvernement
(p.
4
).
6.
Dépôt de questions orales avec débat
(p.
5
).
7.
Lutte contre les discriminations.
- Adoption d'une proposition de loi (p.
6
).
Discussion générale : MM. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville ; Louis
Souvet, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Roland Muzeau,
Claude Domeizel, Dominique Leclerc.
Clôture de la discussion générale.
Article 1{er (p. 7 )
Amendement n° 19 de M. Dominique Leclerc. - MM. Dominique Leclerc, le
rapporteur, le ministre délégué. - Adoption.
Amendement n° 15 de Mme Nicole Borvo. - MM. Guy Fischer, le rapporteur, le
ministre délégué. - Adoption.
Amendement n° 2 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué,
Roland Muzeau, Michel Caldaguès. - Adoption.
Amendement n° 3 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué,
Michel Caldaguès. - Adoption.
Amendements n°s 20 et 21 rectifié de M. Dominique Leclerc. - MM. Dominique
Leclerc, le rapporteur, le ministre délégué, Michel Caldaguès. - Adoption des
deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 2 (p. 8 )
Amendement n° 4 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué.
- Adoption.
Amendement n° 5 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué,
Roland Muzeau. - Adoption.
Amendement n° 6 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué.
- Adoption.
Amendement n° 7 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué,
Michel Caldaguès. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 3. - Adoption (p. 9 )
Article 4 (p. 10 )
Amendements n°s 8 à 10 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre
délégué. - Adoption des trois amendements.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 4 (p. 11 )
Amendement n° 16 de M. Roland Muzeau. - MM. Roland Muzeau, le rapporteur, le
ministre délégué. - Rejet.
Amendement n° 17 de M. Roland Muzeau. - MM. Roland Muzeau, le rapporteur, le
ministre délégué. - Rejet.
Amendement n° 18 de M. Roland Muzeau. - MM. Roland Muzeau, le rapporteur, le
ministre délégué. - Rejet.
Article 5. - Adoption (p.
12
)
Article 6 (p.
13
)
Amendement n° 13 du Gouvernement. - MM. le ministre délégué, le rapporteur.
- Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 7 (p. 14 )
MM. le rapporteur, le ministre délégué.
Adoption de l'article.
Article 8 (p. 15 )
Amendement n° 11 de la commission et sous-amendement n° 23 du
Gouvernement. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption du
sous-amendement et de l'amendement modifié.
Amendement n° 12 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué.
- Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 8 (p. 16 )
Amendement n° 14 du Gouvernement. - MM. le rapporteur, le ministre délégué.
- Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 22 de M. Claude Domeizel et sous-amendement n° 24 de la
commission. - MM. Claude Domeizel, le rapporteur, le ministre délégué. -
Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié insérant un article
additionnel.
Intitulé de la proposition de loi (p. 17 )
Amendement n° 1 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption de l'amendement modifiant l'intitulé.
Vote sur l'ensemble (p. 18 )
MM. Roland Muzeau, Claude Domeizel, le ministre délégué.
Adoption de la proposition de loi.
8.
Communication de l'adoption définitive de textes soumis au Sénat en application
de l'article 88-4 de la Constitution
(p.
19
).
9.
Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
(p.
20
).
10.
Dépôts rattachés pour ordre au procès-verbal de la séance du 21 décembre
2000
(p.
21
).
11.
Ordre du jour
(p.
22
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à seize heures cinq.)
M. le président.
Puisqu'il s'agit de la première séance du nouveau millénaire, j'en profite
pour vous présenter à tous, mes chers collègues, ainsi qu'à vous, messieurs les
ministres, mes voeux les meilleurs.
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le procès-verbal de la séance du jeudi 21 décembre 2000 a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté.
2
DÉCÈS D'ANCIENS SÉNATEURS
M. le président.
J'ai le regret de vous faire part du décès de nos anciens collègues Roger
Poudonson et Marcel Lucotte.
Sénateur du Pas-de-Calais de 1965 à 1992, M. Poudonson avait appartenu, en
1974, au Gouvernement, en qualité de secrétaire d'Etat à la fonction publique.
Il est ensuite revenu parmi nous.
Marcel Lucotte, sénateur et maire d'Autun des années 1970 à 1995, conseiller
général de Saône-et-Loire, président du conseil régional de Bourgogne, présida
chez nous, pendant onze ans, de 1984 à la fin de son mandat, le groupe des
Républicains et Indépendants.
Que le groupe des Républicains et Indépendants trouve ici l'expression de
notre profonde sympathie.
J'ai également le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue
Raymond Cayrel, qui fut sénateur de l'Aveyron de 1993 à 1995.
Le Sénat tout entier s'associe à la tristesse des proches de nos trois anciens
collègues.
3
DÉCISIONS DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel,
par lettre en date du 29 décembre 2000, le texte des décisions rendues par le
Conseil constitutionnel sur la loi de finances pour 2001 et sur la loi de
finances rectificative pour 2000.
Acte est donné de cette communication.
Ces décisions du Conseil constitutionnel ont été publiées au
Journal
officiel,
édition des Lois et décrets.
4
COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président.
M. le président a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :
« « Monsieur le président,
« « Conformément à l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, j'ai l'honneur
de vous faire connaître que j'ai décidé de provoquer la réunion d'une
commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions
restant en discussion de la proposition de loi relative à l'égalité
professionnelle entre les femmes et les hommes.
« « Je vous serais obligé de bien vouloir, en conséquence, inviter le Sénat à
désigner ses représentants au sein de cette commission.
« « J'adresse ce jour, à M. le président de l'Assemblée nationale, une demande
tendant aux mêmes fins.
« « Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute
considération. »
« Signé : Lionel Jospin ».
Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l'article 12 du règlement.
5
DÉPÔT D'UN RAPPORT
DU GOUVERNEMENT
M. le président.
M. le président a reçu de M. le Premier ministre le rapport annuel sur la
réforme de la taxe professionnelle, établi en application de l'article 44 de la
loi de finances pour 1999.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
6
DÉPÔT DE QUESTIONS ORALES
AVEC DÉBAT
M. le président.
J'informe le Sénat que j'ai été saisi des questions orales avec débat
suivantes :
I. - M. Jacques Pelletier attire l'attention de M. le ministre des affaires
étrangères sur la situation particulièrement difficile dans un grand nombre
d'Etats du monde où des centaines de milliers de personnes sont persécutées en
raison de leurs opinions politiques, de leurs croyances ou de leur appartenance
à un groupe ethnique.
Alors que le cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des
droits de l'homme a été célébré avec éclat, nous dénombrons toujours des
violations graves et systématiques de ces droits, de façon ouverte ou de façon
camouflée.
Il lui demande comment le gouvernement français peut, en liaison avec nos
partenaires européens, user de son influence pour faire cesser ces pratiques et
promouvoir un respect effectif des engagements internationaux pris par les
Etats en matière de droits de l'homme (n° 31).
II. - M. Jacques Pelletier attire l'attention de Mme le secrétaire d'Etat à la
santé et aux handicapés sur les conditions d'application des mesures en faveur
des personnes handicapées annoncées par M. le Premier ministre il y a
maintenant un an. Il souhaiterait connaître les intentions du Gouvernement
suite aux avis récents de la Commission consultative des droits de l'homme
relatifs aux handicapés et du Conseil économique et social traitant du handicap
et du cadre de vie.
Le handicap touche plus de 3,5 millions de nos concitoyens : améliorer leur
quotidien doit être une priorité du Gouvernement. M. Jacques Pelletier
souhaiterait savoir quelles nouvelles mesures la ministre compte prendre dans
ce domaine (n° 32).
Conformément aux articles 79 et 80 du règlement, ces questions orales avec
débat ont été communiquées au Gouvernement et la fixation de la date de la
discussion aura lieu ultérieurement.
7
LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS
Adoption d'une proposition de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi (n° 26,
2000-2001), adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la lutte contre les
discriminations. [Rapport n° 155 (2000-2001)].
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Claude Bartolone,
ministre délégué à la ville.
Monsieur le président, monsieur le
rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les discriminations sont une
réalité quotidienne dans notre pays, personne ne peut plus le nier. Ne pas être
« blanc », avoir un nom à consonance étrangère, habiter un quartier populaire
ou en difficulté sont autant d'obstacles à l'accès aux droits : droit au
travail, droit au logement, droit aux loisirs...
Ces discriminations, quels que soient leurs formes et leur fondement,
constituent des violences inadmissibles, parce qu'elles nient la personne, son
identité, sa spécificité, parce que, en niant la personne, elles la privent de
l'égalité des chances et de l'accès aux droits, parce que, en privant de
l'accès aux droits, elles engendrent l'exclusion. Elles constituent une
atteinte insupportable au modèle républicain auquel nous sommes tous attachés
et qu'elles bafouent, je l'ai dit, quotidiennement.
La proposition de loi relative à la lutte contre les discriminations, votée le
12 octobre 2000 en première lecture à l'Assemblée nationale, sur l'initiative
du groupe socialiste, et qui vous est présentée aujourd'hui, s'inscrit
parfaitement dans le plan d'actions gouvernementales de lutte contre les
discriminations. Je rappelle d'ailleurs qu'elle reprend les dispositions qui
étaient initialement celles qu'avait avancées le Gouvernement, dans le cadre du
projet de loi de modernisation sociale. Elle constitue une étape complémentaire
et indispensable de ce plan en ce qu'elle vise, par une modification de la loi,
à renforcer le droit des victimes.
Le Gouvernement s'est engagé, dès 1997, dans la mise en place de politiques de
droit commun garantissant l'accès aux droits fondamentaux et d'actions
spécifiques contre les discriminations.
S'agissant de garantir l'accès aux droits fondamentaux, je voudrais en premier
lieu évoquer les mesures qui visent à favoriser l'accès à l'emploi.
Tout d'abord, les emplois-jeunes profitent à 15 % de jeunes issus des
quartiers dits sensibles ; un effort important reste encore à faire pour
atteindre une moyenne nationale de 20 %.
Ensuite, le programme TRACE - trajet d'accès à l'emploi - institué par la loi
du 28 juillet 1998 permet à des jeunes de seize à vingt-cinq ans de bénéficier
d'un accompagnement global et personnalisé vers l'emploi pendant une période
pouvant aller jusqu'à dix-huit mois. Depuis son lancement, ce programme a
concerné 82 000 jeunes, dont 30 % sont issus de zones urbaines sensibles :
quinze mois après leur entrée dans le dispositif, 80 % des jeunes encore
présents travaillaient ou étaient en formation et, sur les 20 300 jeunes sortis
du programme, 44 % étaient en situation d'emploi.
Par ailleurs, les actions de parrainage permettent d'organiser des rencontres
entre les jeunes en difficulté et les employeurs et de faire tomber les
a
priori
: une circulaire du 7 juin 2000 de la ministre de l'emploi et de la
solidarité a porté sur la mobilisation du tissu économique et social pour
assurer le développement des réseaux de parrainage des jeunes vers l'emploi
avec la signature de chartes régionales ; un quart des régions ont réussi à
mobiliser les acteurs locaux.
En outre, la mobilisation des dispositifs d'insertion professionnelle pour les
jeunes des quartiers sensibles avec les plans locaux d'insertion et les équipes
emploi-insertion a pour objet de mettre en place, je vous le rappelle, cent
cinquante équipes dans les quartiers prioritaires au titre de la politique de
la ville ; cent un dossiers ont été déposés, et trente-sept équipes sont
installées ou sont en cours d'installation.
D'autres mesures concernent l'accès à la fonction publique, comme la mise en
oeuvre, à titre expérimental, de préparations rémunérées aux concours d'accès à
la fonction publique pour les demandeurs d'emploi des quartiers prioritaires au
titre de la politique de la ville.
Enfin, je peux également citer les mesures qui visent à favoriser les parcours
de réussite pour l'accès à l'emploi, comme la convention signée en 1999 avec
l'Association pour faciliter l'insertion professionnelle des jeunes diplômés
des quartiers en difficulté ou jeunes diplômés issus de l'immigration, ou
encore le programme « Nouvelles Chances » de l'éducation nationale, qui retient
la lutte contre les discriminations parmi ses priorités.
En second lieu, après les mesures relatives à l'accès à l'emploi, il faut
évoquer celles qui concernent le logement, notamment la mise en place d'un
numéro d'enregistrement unique de la demande de logement social - décret et
arrêté du 7 novembre 2000, pris dans l'optique de la loi d'orientation relative
à la lutte contre les exclusions - qui doit permettre en particulier d'assurer
l'égalité de traitement entre tous les candidats à un logement.
Je tiens d'ailleurs à vous signaler, puisque je parle du logement, que le
fonds d'action sociale pour les travailleurs immigrés et leurs familles, le
FAS, a lancé en avril dernier un appel d'offres pour la réalisation d'une étude
sur l'accès au logement des jeunes immigrés ou issus de l'immigration :
identification des discriminations et des différents problèmes que peuvent
rencontrer ces jeunes. Ce document sera disponible en octobre 2001.
Il faut également citer la couverture maladie universelle, en ce qu'elle
garantit à tous l'accès aux soins.
Toutes ces mesures sont autant de politiques qui visent à restaurer pour tous
l'égalité des droits. Elles doivent être accompagnées d'actions spécifiques
permettant de lutter avec détermination contre le racisme ordinaire, banalisé
dans les rapports sociaux quotidiens.
S'agissant de lutter spécifiquement contre les discriminations, le
Gouvernement a ouvert toutes les pistes.
D'abord, pour mieux connaître les différentes formes de discrimination, nous
avons créé le groupe d'étude et de lutte contre les discriminations, qui rendra
d'ici à la fin du mois son premier rapport annuel et qui contribuera à
l'établissement du rapport de la Commission nationale consultative des droits
de l'homme sur le racisme et la xénophobie.
Ensuite, des actions de sensibilisation et de formation des acteurs et
professionnels locaux ont été engagées. Je citerai les modules relatifs à la
lutte contre les discriminations intégrés dans la formation des agents de
l'ANPE, (l'Agence nationale pour l'emploi), et de l'AFPA (l'Association
nationale pour la formation professionnelle des adultes). Je citerai également
la réalisation du guide pratique « Lutter contre les discriminations raciales
sur le marché du travail ».
Il convient d'évoquer la mobilisation des organisations syndicales et
patronales, dont il faut saluer les initiatives. La plupart des grandes
confédérations ont engagé des actions de formation et de sensibilisation
spécifiques de leurs militants et délégués.
Enfin, à la suite des assises de la citoyenneté du 18 mars dernier, a été créé
un numéro d'appel téléphonique gratuit, le 114, qui offre un recours simple et
accessible à toutes les personnes victimes de discriminations, et leur permet
ainsi de se faire entendre et de faire valoir leurs droits. Les appels
concernant des discriminations font l'objet d'un signalement à la commission
départementale d'accès à la citoyenneté compétente, qui mobilise, autour du
préfet et du procureur de la République, les acteurs locaux et doit veiller à
donner une suite à chaque signalement.
Depuis la mise en service, en mai dernier, de ce dispositif, des dizaines de
milliers d'appels témoignent de la triste réalité des discriminations dans
notre pays.
Comme je le disais au début de mon propos, la présente proposition de loi
s'inscrit pleinement dans la continuité de l'action du Gouvernement. Elle la
complète en instaurant principalement une protection renforcée contre les
discriminations au travail.
J'en viens aux modifications apportées par la proposition de loi.
Le texte comprend huit articles, dont quatre additionnels, ajoutés lors de la
discussion à l'Assemblée nationale.
La proposition de loi permet de sanctionner de nouveaux motifs de
discriminations.
Le code du travail interdit déjà les mesures discriminatoires prises à
l'encontre d'un salarié ou d'un candidat à l'embauche fondées sur son origine,
son sexe, ses moeurs, sa situation familiale, son appartenance à une ethnie,
une nation ou une race, ses opinions politiques, ses activités syndicales ou
mutualistes, ses convictions religieuses et, sauf inaptitude constatée par le
médecin, son état de santé ou son handicap.
La proposition de loi ajoute trois nouveaux motifs à cette énumération :
l'orientation sexuelle, l'apparence physique et le patronyme.
Ces dispositions prennent ainsi en compte les situations dénoncées, notamment,
par les associations d'homosexuels et de lutte contre le racisme ; nous ne
pouvons que nous en féliciter.
La proposition de loi permet la protection de nouvelles situations
professionnelles.
Le refus d'embauche, la sanction disciplinaire et le licenciement fondés sur
des motifs discriminatoires sont déjà sanctionnés par le code du travail. La
proposition de loi étend la protection du salarié à toute une série de mesures
discriminatoires directes ou indirectes affectant sa situation professionnelle,
telles que les décisions concernant sa rémunération, sa formation, son
affectation, sa promotion, cette liste n'étant pas limitative.
La proposition de loi sanctionne également - et je sais quelle a été, sur ce
point, la mobilisation de mon collègue Jean-Luc Mélenchon, présent aujourd'hui
à mes côtés - le refus d'accès à un stage ou à une période de formation en
entreprise. Cela comble un vide juridique et répond aux difficultés rencontrées
par certains jeunes pour trouver des stages pourtant obligatoires, notamment
dans le cadre de leur scolarité.
La proposition de loi vise à faciliter l'établissement de la preuve de la
discrimination en prévoyant que lorsque le salarié ou le candidat écarté d'un
recrutement ou d'un stage présente des éléments de fait laissant supposer une
discrimination directe ou indirecte il incombe au défendeur, c'est-à-dire à
l'employeur, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments
objectifs étrangers à toute discrimination.
Concrètement, l'aménagement de la charge de la preuve établira un nouvel
équilibre entre l'employeur et le salarié dans la démonstration de l'existence
de la discrimination.
Cette proposition de loi contribue à transposer dans notre droit la directive
européenne du 29 juin 2000. Je sais que votre commission souhaite amender la
rédaction retenue par l'Assemblée nationale, estimant qu'elle ne présente pas
toutes les garanties d'équilibre et de clarté nécessaires. Nous aurons
l'occasion d'en débattre.
Ce que je retiens de la rédaction actuelle, c'est que, face aux éléments de
fait, laissant supposer l'existence d'une discrimination, présentés par le
salarié, l'employeur devra prouver que sa décision a été prise pour d'autres
motifs que ceux qui sont évoqués par le salarié. Il appartiendra ensuite au
juge de former sa conviction au vu de l'ensemble de ces éléments et des
éventuelles mesures d'instruction qu'il pourra ordonner.
La proposition de loi prévoit des moyens d'action renforcés.
Elle prévoit une protection des témoins d'agissements discriminatoires et des
salariés ayant engagé une action en justice.
Elle renforce les moyens d'action collectifs, qu'il s'agisse du droit d'alerte
reconnu aux délégués du personnel et de la faculté des organisations syndicales
d'agir en lieu et place du candidat ou du salarié. Là également, votre
commission propose de modifier la rédaction issue de l'Assemblée nationale,
notamment en ce qui concerne l'action substitutive des organisations
syndicales. Comme l'a précisé le Conseil constitutionnel, cette action repose
sur un mandat implicite, et ce sont donc les règles de droit du mandat qui
s'appliquent.
Enfin, la proposition de loi donne clairement compétence à l'inspection du
travail pour constater les infractions à ces dispositions.
Par ailleurs, la proposition de loi instaure d'autres mesures de lutte contre
les discriminations.
Elle prévoit l'irrecevabilité des listes de candidatures qui seraient
présentées aux élections prud'homales par un parti politique ou par une
organisation prônant des discriminations et poursuivant ainsi un objectif
étranger à l'institution prud'homale. Par amendement, le Gouvernement vous
proposera une rédaction nouvelle de l'article en question, de façon à lever
toute ambiguïté et afin qu'il soit bien compris que la prohibition de la
présentation des listes par un parti politique s'applique à tout parti, y
compris s'il ne prône pas de thèses discriminatoires.
M. Louis Souvet,
rapporteur de la commission des affaires sociales.
Bien sûr !
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Elle protège les salariés des institutions sociales et
médico-sociales ayant témoigné de mauvais traitements infligés à une personne
accueillie dans ces institutions. A cet égard, l'actualité prouve que cet
amendement est le bienvenu.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Hélas !
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
En effet, hélas !
La proposition de loi donne une base législative à la création du service
d'accueil téléphonique gratuit.
Dans ce cadre, le Gouvernement vous propose de créer un article nouveau après
l'article 8 aux fins de revoir la définition des missions du fonds d'action
sociale telles qu'elles sont actuellement prévues par l'article L. 767-2 du
code de la sécurité sociale.
A l'origine, le fonds d'action sociale pour les travailleurs immigrés et leurs
familles engageait des actions limitées au logement et à l'aide sociale à
destination des immigrés. Depuis, les missions se sont étendues à des champs
plus vastes, touchant à la culture, à l'emploi et à la formation, en soutien à
l'intégration et à la lutte contre les discriminations des personnes, non
seulement étrangères mais également issues de l'immigration.
Le fonds d'action sociale pour les travailleurs immigrés et leur familles
deviendrait le fonds d'action sociale pour l'intégration et la lutte contre les
discriminations.
Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les propos liminaires que je
souhaitais formuler avant que vous entamiez la discussion de la proposition de
loi qui vous est soumise.
Je tiens, en cet instant, à rendre hommage à la qualité des travaux de votre
commission des affaires sociales, à M. Jean Delaneau, son président, et à M.
Louis Souvet son rapporteur.
J'espère que le débat qui va s'ouvrir permettra à la fois de renforcer les
moyens de lutter contre les discriminations et d'enrichir le texte qui vous est
aujourd'hui soumis.
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet
rapporteur de la commission des affaires sociales.
Monsieur le président,
messieurs les ministres, mes chers collègues, la lutte contre les
discriminations constitue un élément essentiel de notre pacte républicain et
trouve donc naturellement un écho dans nos textes fondateurs.
L'article 1er de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août
1789 dispose en effet : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en
droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité
commune. »
Le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 proclame, quant à lui : «
Chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi. Nul ne peut
être lésé, dans son travail ou son emploi, en raison de ses origines, de ses
opinions ou de ses croyances. »
Enfin, l'article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 dispose que la
France « assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction
d'origine, de race ou de religion. »
Ces principes, qui constituent nos références premières et le fondement de
notre organisation politique, ont naturellement inspiré la construction
européenne conduite aujourd'hui par quinze peuples démocratiques.
L'article 6 du traité sur l'Union européenne a rappelé, à cet égard, que
l'Union était fondée sur « les principes de la liberté, de la démocratie, du
respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que de l'Etat
de droit ».
La construction européenne ne se résume pas à l'établissement d'un grand
marché. Elle vise également à bâtir une communauté de droit. Dans cette
perspective, les lignes directrices pour l'emploi en 2000, approuvées par le
Conseil européen qui s'est tenu à Helsinki les 10 et 11 décembre 1999, ont
souligné la nécessité de promouvoir un marché du travail favorable à
l'insertion sociale en formulant un ensemble cohérent de politiques destinées à
lutter contre les discriminations.
Nul ne conteste aujourd'hui la nécessité de lutter contre les discriminations.
Cette action est même indispensable si l'on veut arrimer à la République des
quartiers et des citoyens qui ont tendance à s'en éloigner. Vous avez
d'ailleurs visité récemment l'un de ces quartiers dans la ville que
j'administre, monsieur le ministre.
Cette action constitue le complément indispensable des politiques économiques
et sociales comme des politiques de l'éducation et de sécurité.
En outre, le souci de faciliter l'accès de tous au marché du travail devrait
être d'autant mieux partagé que l'on assiste aujourd'hui au développement de
pénuries de main-d'oeuvre dans certains secteurs d'activité. Notre collègue
Alain Gournac nous l'a rappelé dernièrement à travers la proposition de loi
relative aux pénuries de main-d'oeuvre, que le Sénat a discutée le mois
dernier.
La période de croissance actuelle constitue, à cet égard, une occasion
irremplaçable de faire évoluer les mentalités pour permettre à chacun l'accès
au marché du travail et à l'égalité de traitement.
Cette préoccupation a abouti, au niveau européen, à l'adoption, le 29 juin
2000, d'une directive relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de
traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique,
dont l'un des moyens consiste à aménager les règles concernant la charge de la
preuve dès lors qu'il existe une présomption de discrimination.
L'article 8 de la directive du 29 juin 2000 prévoit, en particulier, que « dès
lors qu'une personne s'estime lésée par le non-respect à son égard du principe
de l'égalité de traitement et établit, devant une juridiction ou une autre
instance compétente, des faits qui permettent de présumer l'existence d'une
discrimination directe ou indirecte, il incombe à la partie défenderesse de
prouver qu'il n'y a pas eu violation du principe de l'égalité de traitement.
»
Ce principe était déjà énoncé par l'article 4 de la directive européenne du 15
décembre 1997, relative à la charge de la preuve dans les cas de discrimination
fondée sur le sexe.
Ces deux directives doivent être transcrites en droit interne, c'est-à-dire
que le droit national doit être modifié lorsque cela est nécessaire afin de ne
pas contredire le texte de la directive. Ces transcriptions doivent être
effectuées avant le 1er janvier 2001 pour la directive du 15 décembre 1997
relative à la charge de la preuve dans les cas de discrimination fondée sur le
sexe, et avant le 19 juillet 2003 pour la directive du 29 juin 2000 relative à
la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes
sans distinction de race ou d'origine ethnique.
Or, l'examen du droit en vigueur révèle la nécessité de modifications
législatives.
L'article L. 122-45 du code du travail prévoit en effet qu'« aucune personne
ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou être sanctionnée ou
licenciée en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de sa situation
de famille, de son appartenance à une ethnie, une nation ou une race ou de ses
opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses
convictions religieuses ou, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail
(...), en raison de son état de santé ou de son handicap ».
Pour être conforme à la directive du 29 juin 2000, cette rédaction doit être
complétée afin de prendre en compte l'ensemble des conditions d'emploi et de
travail, c'est-à-dire la formation, la promotion, la reconversion et la
rémunération. Elle doit surtout être modifiée pour tenir compte du nouveau
régime de la charge de la preuve prévu par la directive. Tel est précisément
l'objet principal de la présente proposition de loi.
Contrairement à ce que certains prétendent, ce nouveau régime ne constitue pas
une inversion de la charge de la preuve. Autant, dans notre droit, il incombait
au plaignant d'établir la preuve de ses dires, autant la nouvelle procédure
cherche à établir un certain équilibre afin d'obliger les parties à présenter
chacune leurs arguments pour permettre à une tierce partie de se faire son
opinion et de trancher.
Il s'agit là, cependant, d'un changement déjà considérable et qui n'est pas
sans risque. Ce changement trouve certes sa justification dans les difficultés
que connaissent les plaignants à prouver leurs dires, comme en témoignent le
faible nombre des recours devant les tribunaux et le nombre encore plus faible
des décisions de justice favorables aux plaignants, encore que je vous aie
entendu dire, monsieur le ministre, que des dizaines de milliers d'appels
parviennent au 114, et ce nombre va certainement beaucoup augmenter.
Mais cette démarche ne va pas sans risques. L'aménagement de la charge de la
preuve, en obligeant l'employeur à justifier sa décision, ouvre la porte à des
recours qui pourraient être mus non par le désir de réparer une injustice mais,
au contraire, par la volonté d'obtenir raison d'une décision défavorable rendue
sur des critères légitimes tenant, par exemple, à une différence de formation,
d'aptitude, d'expérience, voire à une indifférence plus subjective tenant au
profil, au tempérament ou à la sympathie.
En cela, l'aménagement du régime de la preuve accroît le contrôle sur les
décisions de l'entrepreneur et fait même peser sur lui comme une présomption de
culpabilité.
(M. Caldaguès marque son approbation.)
Chacun sait en effet que, dans notre société, le fait d'avoir à rendre des
comptes à la justice équivaut trop souvent à une condamnation aux yeux d'une
partie de l'opinion. Qui pourra affirmer qu'un chef d'entreprise obligé de se
justifier de n'avoir pas agi selon des visées racistes, puis innocenté, n'aura
pas à subir la même opprobre ?
A cet égard, on ne peut que s'étonner, voire regretter, que le Gouvernement ne
propose pas des modifications comparables concernant la lutte contre les
discriminations dans les administrations. Beaucoup reste à faire, et l'Etat
n'est pas le dernier à devoir agir dans ce domaine.
M. Dominique Leclerc.
Très bien !
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Pour limiter les risques de dérive, le législateur européen a
fort heureusement prévu que le plaignant devra « établir ... des faits qui
permettent de présumer l'existence d'une discrimination ».
Un fait, comme un indice, est plus aisé à établir ou à rassembler qu'une
preuve. Néanmoins, il se distingue du soupçon, de l'impression, voire de la
rumeur. On peut donc estimer que le législateur européen a trouvé un bon
équilibre et qu'il convient de ne pas trop s'en écarter.
Or l'Assemblée nationale et le Gouvernement ont souhaité s'inspirer plus de
l'évolution de la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation
que du texte des directives européennes. Il en résulte des dispositions qui
sont soit floues, soit excessives, mais qui ont en commun de placer le juge en
position d'arbitre, ayant à se faire son opinion en dehors d'éléments
matériels, ce qui est toujours risqué.
La rédaction retenue par la propostion de loi s'éloigne en effet du texte de
la directive. Selon le texte adopté par l'Assemblée nationale, le salarié doit
présenter des « éléments de fait laissant supposer l'existence d'une
discrimination directe ou indirecte » à l'appui de sa plainte, alors que la
directive prévoit que le plaignant « établit (...) des faits qui permettent de
présumer l'existence d'une discrimination ».
De deux choses l'une : ou les deux membres de phrases ont le même sens, et
l'on ne voit pas l'intérêt de s'éloigner de la directive, ou ce n'est pas le
cas, et il serait intéressant que les auteurs précisent leurs intentions.
(M. le ministre délégué à l'enseignement professionnel opine.)
Monsieur le ministre, je vous vois opiner, et je sens que vous m'approuvez !
C'est sans doute la solidarité franc-comtoise !
(Sourires.)
En outre, les directives ont prévu qu'il incombait « à la partie défenderesse
de prouver qu'il n'y a pas eu violation du principe de l'égalité de traitement
» alors que l'Assemblée nationale prévoit, quant à elle, reprenant mot pour mot
la jurisprudence de la Cour de cassation, qu'il lui incombe de prouver que sa
décision « est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute
discrimination ».
Dans ce cas, la différence est plus sensible, notamment du fait de la
référence à des « éléments objectifs ». Il s'agit là de termes ambigus.
Pourquoi une décision de recrutement ne pourrait-elle pas être déterminée, au
moins partiellement, par des éléments subjectifs comme l'intuition, la
sympathie ou le dynamisme ? Les entreprises ne recrutent pas par concours
anonyme. A trop vouloir en faire, on risque d'obtenir un résultat inverse à
l'effet recherché. Comment le juge pourrait-il former sa conviction si le
plaignant ne lui présente pas des faits et si l'on oblige l'employeur à
n'évoquer que des éléments « objectifs » ? L'intérêt des parties comme
l'efficacité des mesures de lutte contre les discriminations résident dans
notre capacité à modifier en profondeur les comportements individuels et non en
l'affaiblissement de l'employeur, qui deviendrait alors le bouc émissaire de
l'échec partiel de nos politiques d'intégration.
M. Emmanuel Hamel.
Très bien !
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Ce dont nous avons besoin aujourd'hui, c'est plus de
pédagogie que de répression. A cet égard, force est de constater que les
auteurs de la proposition de loi comme le Gouvernement ont préféré privilégier
des dispositions à caractère répressif plutôt qu'une politique préventive.
Je remarque qu'il existait pourtant une alternative : les directives
européennes de lutte contre les discriminations n'ayant pas choisi entre un
mécanisme juridictionnel et une voie de recours devant une instance
ad
hoc,
il aurait pu être intéressant de connaître les raisons qui ont fait
privilégier le recours à la voie juridictionnelle. Ce choix est d'autant moins
évident que les juridictions sont, comme chacun sait, déjà surchargées de
plaintes et peinent à rendre leurs décisions dans un délai raisonnable.
L'affaire « Fluchère », qui a inspiré le texte de l'Assemblée nationale, le
montre bien : elle a été renvoyée en appel trois ans après un premier arrêt !
Par ailleurs, rien n'interdit de se poser la question de savoir si le juge de
droit commun est le mieux à même de former sa conviction sur des éléments somme
toute « subjectifs » dans un domaine aussi délicat que la lutte contre les
discriminations.
En fait, loin de remettre en cause le renforcement des procédures
juridictionnelles, qui doivent demeurer, ne serait-ce que pour constituer un
instrument puissant de dissuasion, il importe de s'interroger sur la
possibilité de mener des politiques préventives sur le modèle des politiques
menées par les autres pays européens.
Si cette proposition de loi ne semble pas répondre tout à fait aux enjeux,
c'est sans doute aussi parce qu'elle a été présentée dans une certaine
précipitation.
On peut rappeler - mais vous l'avez déjà indiqué, monsieur le ministre - que
les quatre premiers articles de la proposition de loi devaient être
initialement discutés dans le projet de loi de modernisation sociale. Ce texte,
dont l'examen avait un temps été envisagé au printemps 2000, n'a été déposé au
Parlement que fin mai ; son examen débute aujourd'hui à l'Assemblée
nationale.
Entre-temps, le Gouvernement a annoncé le « retrait » de vingt-trois articles
sur un total de soixante-dix, car ce projet de loi a été morcelé afin de
nourrir plusieurs propositions de loi, notamment celle qui est relative à
l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes ainsi que celle que
nous examinons aujourd'hui.
De fait, l'examen de la proposition de loi relative à l'égalité
professionnelle et de la proposition de loi relative à la lutte contre les
discriminations se poursuit en parallèle avec la discussion du projet de loi de
modernisation sociale.
Cette gestion très particulière - il faut en convenir - de l'examen des textes
sociaux n'est pas sans soulever quelques problèmes, comme l'a souligné notre
collègue Claude Huriet dans son rapport en deuxième lecture sur la proposition
de loi tendant à la création d'une agence française de sécurité sanitaire
environnementale.
Ainsi, par exemple, l'article 6 de la présente proposition de loi, qui modifie
certaines dispositions relatives aux élections prud'homales, reprend
partiellement l'article 51 du projet de loi de modernisation sociale qui n'a
pas été retiré par le Gouvernement.
Le reliquat de l'article 51 sera donc examiné en parallèle à l'article 6 de la
proposition de loi. On ne peut que s'étonner du choix ainsi fait par le
Gouvernement, qui crée un risque élevé de confusion et d'incohérences. Nous
l'avons vu encore ce matin même avec l'examen en commission des affaires
sociales de l'amendement déposé par le groupe socialiste.
Le risque pourrait d'ailleurs se réaliser à propos de l'article 7 de la
présente proposition de loi, qui prévoit la nullité d'un licenciement d'un
salarié d'une institution sociale ou médico-sociale ayant témoigné de mauvais
traitements infligés à des patients. Le lien est des plus ténus entre l'objet
de cet article et celui de la proposition de loi, alors même que la réforme
très attendue de la loi du 30 juin 1975 sera examinée fin janvier par
l'Assemblée nationale.
Par ailleurs, la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale
a adopté un amendement au projet de loi de modernisation sociale qui traite de
la question des poursuites disciplinaires contre un médecin ayant dénoncé des
sévices contre des enfants.
A l'évidence, il s'agit là de deux aspects d'une même question, concernant,
dans un cas, des salariés et, dans l'autre, des médecins. Ils méritaient d'être
traités conjointement, et je doute que la présente proposition de loi ait pu
constituer le meilleur support.
Tout cela m'amène à inviter le Gouvernement à faire preuve à l'avenir de plus
de rigueur dans la gestion du contenu des textes qu'il inscrit à l'ordre du
jour des assemblées. Ce qui est en jeu n'est en effet rien de moins que la
qualité du travail parlementaire et la clarté de la loi, auxquelles je suis sûr
qu'il est, comme nous tous, très attaché. C'est tout au moins le cas de M. le
ministre, dont nous connaissons les positions qu'il a soutenues en tant que
député.
Le rapporteur que je suis proposera au Sénat d'adopter une dizaine
d'amendements sur l'ensemble des articles de cette proposition de loi. Ces
amendements participent tous de la même logique : permettre une lutte plus
efficace contre les discriminations en préservant les droits des victimes,
comme ceux des responsables d'entreprise.
Les directives européennes ont établi les bases d'un équilibre entre ces
différents objectifs complémentaires. La commission des affaires sociales vous
proposera donc, mes chers collègues, de revenir, chaque fois que nécessaire, à
la lettre et à l'esprit des textes européens.
Les principales modifications qu'elle vous propose concernent donc
l'aménagement de la charge de la preuve pour lequel elle considère que le texte
de l'Assemblée nationale s'éloigne trop de la directive - vous l'avez dit tout
à l'heure, monsieur le ministre - et l'action des syndicats qui, selon elle, ne
doit pas pouvoir s'exercer sans l'accord écrit de la victime dans un domaine
aussi sensible que les discriminations.
Quant à l'amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article
8 et concernant le fonds d'action sociale pour les travailleurs immigrés et
leurs familles, le FASTIF, il a été approuvé ce matin par la commission des
affaires sociales.
Le texte ainsi modifié que la commission proposera au Sénat d'adopter devrait
permettre des progrès sensibles dans la lute contre les discriminations, sans
pour autant compromettre la nécessaire marge de manoeuvre des entreprises dans
la gestion de leur personnel.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 31 minutes ;
Groupe socialiste, 25 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 10 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la
proposition de loi relative à la lutte contre les discriminations, adoptée le
12 octobre dernier par l'Assemblée nationale, est un texte important qui permet
de compléter efficacement les dispositifs existant déjà dans ce domaine, que ce
soit à l'occasion de l'embauche d'un salarié ou dans le déroulement du contrat
de travail de ce dernier.
Si, au fil des ans, le législateur a jugé utile de se doter de mesures
nouvelles permettant de mieux qualifier, et donc de mieux prendre en compte,
les pratiques discriminatoires subies par les salariés ou par les candidats à
une embauche, c'est principalement en raison d'une augmentation intolérable du
nombre de ces actes, liée au chômage massif de ces trente dernières années,
chômage qui a complètement déséquilibré la relation salarié-employeur, au
détriment exclusif des salariés.
Même si la situation de l'emploi s'améliore régulièrement depuis trois ans, la
lutte contre le chômage n'est pas encore gagnée, et il convient donc de mieux
protéger les candidats à l'emploi ou les salariés contre les pratiques
discriminatoires intolérables de certains employeurs qui s'étaient trop
habitués, ces dernières années, à avoir des exigences, parfois démentielles, en
matière de recrutement, et ce en raison de la persistance d'un chômage très
important.
Le texte qui nous est proposé est donc tout à fait d'actualité et parfaitement
pertinent puisque - faut-il le rappeler ? - 40 % des cas de discrimination
concernent l'emploi et que l'arsenal législatif actuel est souvent insuffisant
pour lutter efficacement contre des pratiques discriminatoires parfois très
insidieuses et dont la réalité est toujours difficile à établir pour le salarié
ou le candidat qui en est victime.
Nous savons tous, pourtant, que les discriminations frappent encore durement
de nombreux salariés, notamment lorsqu'ils sont titulaires de mandats
syndicaux. C'est là une réalité malheureusement incontournable, et il faut se
féliciter de l'action des organisations syndicales, qui ont dénoncé ces
injustices.
Vous avez tous en mémoire la reconnaissance par la direction de Peugeot, en
avril 2000, de la discrimination pour fait syndical dont ont été victimes
pendant des années 169 militants de la CGT, discrimination qui a donné lieu à
réparation et à une indemnisation globale de 10 millions de francs.
De telles situations sont, hélas ! également vécues chez Thomson, Renault, à
la SNECMA, qui figurent parmi les plus prestigieuses entreprises françaises.
Les exemples de salariés et de militants syndicaux victimes de discriminations
pour le seul motif de fait syndical sont, vous le savez bien, très nombreux.
Mais pour un cas de discrimination sanctionné, combien sont ignorés ?
Le texte que nous examinons aujourd'hui répond, selon nous, de façon
intéressante à ces problèmes.
D'une part, il élargit la notion de discrimination en l'étendant à
l'orientation sexuelle, à l'apparence physique et au patronyme, et il complète
les textes existants en prenant en compte les discriminations subies par un
salarié sur l'ensemble de sa carrière.
Par conséquent, le texte protège mieux les salariés contre les discriminations
en matière d'affectation, de mutation, de rémunération et de formation
professionnelle.
En cela, il complète les textes législatifs actuels, qui s'attachent surtout à
la protection des salariés à l'embauche et en cas de licenciement.
La proposition de loi traite aussi de l'interdiction des discriminations dans
l'accès aux stages. De nombreux élèves, tenus d'effectuer un stage en
entreprise dans le cadre de leur scolarité, ont en effet souvent d'énormes
difficultés à trouver un employeur qui accepte de les accueillir, et ce en
raison de leur origine ou de la consonance de leur nom, voire de leur adresse.
Le fait qu'ils possèdent la nationalité française ne change rien à
l'affaire.
Cette situation n'est pas tolérable, car elle constitue immanquablement un
obstacle majeur à l'intégration de ces jeunes, en les privant d'une formation
nécessaire à l'obtention de leur diplôme.
D'autre part, le texte s'attaque à un aspect fondamental de la discrimination,
en aménageant la charge de la preuve.
Jusqu'à présent, en effet, il incombait au salarié d'apporter les preuves que
son employeur avait eu à son encontre des pratiques discriminatoires. Or, le
salarié a très peu de possibilités d'accès à des documents prouvant la véracité
de ses accusations.
D'ailleurs, la rareté des procédures engagées et le nombre infime d'employeurs
condamnés pour pratiques discriminatoires témoignent à eux seuls de la
difficulté pour les salariés d'obtenir réparation pour les préjudices subis.
Le texte prévoit donc que le salarié a à présenter des éléments de fait
laissant supposer qu'il est victime d'une discrimination. Il incombe ensuite à
l'employeur de prouver que la différence de traitement appliquée à ce salarié
est fondée sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Il
appartient enfin au juge de se faire une opinion et de prendre sa décision.
En cela, le texte n'inverse pas, comme ont trop tendance à le dire certains,
la charge de la preuve ; il ne fait que l'aménager. Ce point essentiel de la
lutte contre les discriminations constitue, selon nous, un réel progrès, que
nous attendions depuis longtemps.
Enfin, le texte permet aux syndicats d'intenter une action en faveur d'un
salarié ou d'un candidat à l'emploi sans être mandaté par l'intéressé, à
condition que celui-ci ne s'y oppose pas. Cela vaut aussi pour les syndicats
représentatifs sur le plan national, lorsque aucune organisation syndicale
n'est présente dans l'entreprise.
De plus, les associations peuvent saisir les syndicats pour leur demander
d'intenter une action.
Comme nous l'avons dit, ce texte améliore les dispositifs existants en matière
de discrimination.
Nous souhaitons cependant lui apporter quelques améliorations, notamment en ce
qui concerne la transmission des documents à l'inspection du travail et aux
organisations syndicales. Nous avons déposé des amendements en ce sens.
Il faudra bien, un jour, traiter - mais je sais, monsieur le ministre, que
vous êtes parfaitement conscient de ce problème - le cas des personnels
intérimaires qui travaillent depuis des années à temps plein sur des postes
permanents, et ce sans réelle perspective d'embauche. Il s'agit, certes, d'une
autre forme de discrimination, mais elle n'en est pas moins douloureuse.
Les réponses à nos demandes, ainsi que les infléchissements et les
modifications que ne manqueront pas d'apporter nos collègues de la majorité
sénatoriale détermineront notre vote.
C'est donc avec la plus grande attention que nous suivrons les débat et que
nous y participerons, avec la ferme volonté de voir aboutir un texte juste et
équilibré, prenant pleinement en compte les aspirations des salariés.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen,
ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en cette
première séance de l'année 2001, nous voici de nouveau réunis pour débattre
d'une proposition de loi tendant à améliorer le dispositif législatif en
matière de lutte contre les discriminations.
Discriminer, c'est porter atteinte à l'égalité, principe fondamental de la
République, auquel nous attachons tant d'importance ; comme l'a si bien écrit
notre collègue Louis Souvet dans son rapport : « La lutte contre les
discriminations constitue un élément essentiel de notre pacte républicain. »
Or, à ce jour, je suis particulièrement surpris par le décalage qu'il y a,
dans le temps et dans les faits, entre ce principe qui s'affiche publiquement
et le caractère sournois, larvé, des discriminations.
En effet, cette notion orne le fronton de tous les édifices publics ; elle
nous est rappelée, journellement, dans les opérations de la vie quotidienne,
lorsque nous manipulons notre monnaie ou des formulaires administratifs ; elle
figure en tête de tous les textes fondateurs de la République ; elle est gravée
depuis plus de deux siècles dès le premier article de la Déclaration des droits
de l'homme et du citoyen, qui dispose : « Les hommes naissent et demeurent
libres et égaux en droit. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que
sur l'utilité commune. » En quelques mots tout est dit, et dès la première
phrase !
Mais cette notion est aussi reprise dès la première phrase du préambule de la
Constitution de 1946, qui a valeur constitutionnelle : « Le peuple français
proclame à nouveau que tout être humain, sans distinction de race, de religion
ni de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés. » Il est ajouté : «
La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de
l'homme. » Et, plus loin : « Nul ne peut être lésé, dans son travail ou son
emploi, en raison de ses origines, de ses opinions, de ses croyances. »
Quant à la Constitution de 1958, elle affirme, dès son article 1er : « La
France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle
assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine,
de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. »
Enfin, l'article 6 du titre Ier du statut général des fonctionnaires dispose
qu'« aucune discrimination ne peut être faite entre les fonctionnaires en
raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses,
de leur sexe, de leur état de santé, de leur handicap ou de leur appartenance
ethnique. »
M. Louis Souvet,
rapporteur.
C'est tout à fait exact !
M. Claude Domeizel.
Nous ne pouvons qu'être fiers d'appartenir à un pays qui place la notion
d'égalité à ce niveau d'exigence, qui fait de la France la patrie des droits de
l'homme et qui a naturellement inspiré la construction européenne, conduite
aujourd'hui par quinze peuples démocratiques pour bâtir une communauté de droit
fondée sur les principes de la liberté, de la démocratie, du respect des droits
de l'homme et des libertés fondamentales.
C'est ainsi que, sur le plan européen, une batterie de directives ont été
adoptées, relatives à l'égalité de traitement et donc à la lutte contre les
discriminations entre les hommes et les femmes, que ce soit en 1975, 1976,
1978, 1986 ou, plus récemment, le 15 décembre 1997.
Le traité d'Amsterdam énonce que « le conseil des ministres, statuant à
l'unanimité sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement
européen, peut prendre les mesures nécessaires en vue de combattre toute
discrimination fondée sur le sexe, la race ou l'origine ethnique, la religion
ou les convictions, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle. »
A l'appui de cet article 13 du traité de l'Union, lors du Conseil de Tampere,
le 15 octobre 1999, un ensemble de mesures dites « paquet antidiscrimination »
ont été adoptées. Il en est résulté une directive qui a reçu l'aval du
Parlement européen le 18 mai 2000 et qui doit être transposée dans les
législations nationales au plus tard dans trois ans. Visant particulièrement
les conditions de travail et d'emploi, elle est accompagnée d'un plan d'action
de 100 millions d'euros pour la période 2001-2006 destiné à aider les Etats
membres à lutter contre les discriminations.
Le 6 juin 2000, les ministres des affaires sociales ont adopté à l'unanimité
une deuxième directive interdisant sur l'ensemble du territoire de l'Union
toutes les discriminations liées à la race ou à l'origine ethnique. Elle
concerne l'accès à l'emploi et les conditions d'emploi, l'accès à l'éducation,
à la formation et à la protection sociale, l'accès aux biens et aux services
tels que le logement.
Il est important de noter que, pour apporter plus d'efficacité, cette
directive prévoit d'inverser partiellement la charge de la preuve, celle-ci
incombant non plus en priorité aux plaignants dans les procédures civiles, mais
aux personnes et aux institutions mises en cause si des indices réels existent.
L'article 4 de la présente proposition de loi va reprendre cette disposition,
qui est au coeur de la lutte contre les discriminations.
Si le principe d'égalité s'affiche, comme je viens de le montrer, les
pratiques discriminatoires sont, en revanche, sournoises et souvent difficiles
à identifier et à démontrer.
Je ne reviens pas sur les exemples connus de tous pour avoir été abondamment
dénoncés par les médias et les associations. Je peux, à titre personnel,
apporter des témoignages pour avoir été confronté à de telles situations, que
ce soit dans ma carrière d'enseignant, au contact de jeunes maghrébins de ma
région, qui se voyaient refuser des avantages accordés à leurs petits copains
pur provençaux, ou dans mes responsabilités de président du centre de gestion
des Alpes-de-Haute-Provence : à ce titre, j'ai été amené un jour à recevoir un
couple dont le mari, originaire d'Afrique du Nord, avait postulé dans la
fonction publique territoriale pour un poste de technicien, après avoir été
admis au concours, il avait vu sa candidature rejetée, alors qu'une candidature
formulée par son épouse, et présentée quelques jours après dans les mêmes
formes, mais sous son nom de jeune fille, avait été jugée recevable.
Dans notre droit français du travail et dans notre code pénal, la législation
anti-discriminatoire est pourtant abondante, que ce soit notamment en matière
d'offre d'emploi et d'embauche, d'exécution de contrat de travail, de cessation
du contrat de travail ou s'agissant des conventions collectives de branche.
J'insisterai, enfin, sur les actions menées par le Gouvernement depuis 1997 :
la table ronde des partenaires sociaux et la déclaration de Grenelle ; la
création du groupes d'études sur les discriminations ; la mise en place du «
114 », numéro d'appel gratuit contre les discriminations ; la constitution des
115 commissions d'accès à la citoyenneté avec pour mission de se saisir des
discriminations observées, d'assurer un égal accès à l'emploi aux jeunes issus
de l'immigration et de veiller au respect des obligations liées à la
citoyenneté en matière d'obligation scolaire et droit de vote notamment.
En outre, le 11 mai 1999, une table ronde a été organisée avec les partenaires
sociaux sur le thème de la lutte contre les discriminations raciales.
Ainsi, on peut constater, au cours des trois dernières années, une prise de
conscience de la gravité de ce phénomène.
Mais un volet de mesures manquait encore à cet ensemble pour compléter les
instruments juridiques existants et pour débusquer les discriminations.
Ces pratiques, en effet, peuvent être mises en parallèle avec le cas des
enfants ou des femmes maltraités, qui peuvent difficilement se sortir de leur
situation de dépendance sans assistance extérieure pour faire éclater le
scandale au grand jour.
Le mérite de cette proposition de loi est de permettre cet affichage, en
quelque sorte. Ainsi, l'inspecteur du travail pourra saisir le parquet en cas
d'actes de discrimination, y compris en faveur des étudiants ou des élèves
accomplissant des stages dans le cadre de leur scolarité, en faveur des
stagiaires accomplissant un stage de réadaptation professionnelle ou de
rééducation professionnelle, alors que, jusque-là, ils n'étaient autorisés à
intervenir qu'en cas d'atteinte portée à la règle de l'égalité
professionnelle.
J'ai noté que l'article 2 étend judicieusement aux organisations syndicales
représentatives, sur le plan national ou dans l'entreprise, la faculté d'ester
en justice en faveur du candidat ou du salarié concerné, sauf opposition de ce
dernier. Elles peuvent être confortées dans cette tâche par un droit d'alerte
donné aux associations régulièrement constituées depuis cinq ans, ainsi qu'aux
délégués du personnel.
Alors que les salariés ont rarement accès aux informations qui leur permettent
de démontrer qu'ils ont été victimes de discriminations, un intérêt majeur de
ce texte est d'avoir renversé la charge de la preuve. Ainsi, le salarié devra
apporter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une
discrimination. Il reviendra alors à son employeur de prouver que sa décision
se fonde non pas sur un motif discriminatoire, mais sur des éléments objectifs,
et il appartiendra au juge de se forger une conviction.
Au-delà de l'aspect répressif, le texte qui nous est soumis comporte également
des mesures préventives en intégrant l'objectif de lutte contre les
discriminations dans la négociation collective, avec le souci de favoriser le
dialogue social dans ce domaine.
A titre préventif encore, le présent texte vise à écarter les listes de
candidatures extrémistes aux élections prud'homales.
Enfin, on ne peut que se féliciter de l'élargissement à toutes les formes de
discriminations et de l'élargissement de la portée du principe général de
non-discrimination posé dans le code du travail, qui ne s'appliquera plus
seulement au refus d'embauche, aux sanctions disciplinaires et aux
licenciements, mais également à toutes les étapes de la carrière, à savoir la
rémunération, la formation, la promotion professionnelle ou la mutation.
Ce texte a donc pour objet de participer au renforcement des droits des
salariés en complétant l'arsenal juridique de lutte contre les discriminations
au travail, c'est-à-dire dans un cadre où les individus passent une grande
partie de leur vie et où la souffrance et l'impuissance des personnes
discriminées sont accrues par le poids des rapports hiérarchiques.
C'est déjà un grand pas de fait.
Mais, pour ma part, j'aurais souhaité qu'on aille plus loin dans cette
démarche et qu'on étende le dispositif de lutte contre les discriminations à
d'autres domaine que l'emploi, car les victimes des discriminations se
rencontrent aussi en dehors du monde du travail. Je pense notamment à l'accès à
la santé, à la solidarité, au logement, aux loisirs.
Pour en revenir au domaine de l'emploi, il me paraît indispensable, et ce dans
un souci de non-discrimination entre salariés de tout secteur, que la fonction
publique ne soit pas exclue de ces mesures.
C'est la raison pour laquelle, avec mes collègues du groupe socialiste, j'ai
déposé un amendement visant à les transposer aux trois fonctions publiques.
Nous avons tous en mémoire les charrettes de la ville de Vitrolles, dans les
Bouches-du-Rhône, au lendemain des municipales de juin 1995. C'est bien la
preuve qu'il existe, même dans nos collectivités territoriales, des démarches
discriminatoires.
Dans le champ de l'égalité des droits, cette proposition de loi s'inscrit dans
la même logique que celle qui a inspiré la proposition de loi relative à
l'égalité professionnelle et vient compléter celle qui a été adoptée, voilà
quelques mois déjà, sur le vote des étrangers. Mais la bataille à mener pour la
lutte contre la discrimination est encore longue pour parvenir à l'objectif
fixé par le Premier ministre lors de son intervention devant les assises
nationales de la citoyenneté : assurer à chacun sa juste place dans la
République.
J'espère que cette proposition de loi, avec l'ambition d'engager une réforme
en profondeur des rapports sociaux et humains dans notre pays, y contribuera.
J'en suis convaincu, de par ma conception socialiste.
Permettez-moi de terminer mon propos par une citation de Léon Blum tout à fait
adaptée à l'esprit qui a animé cette proposition de loi : « On est socialiste à
partir du moment où l'on a cessé de dire : "Bah ! c'est l'ordre des choses, il
en a toujours été ainsi et nous n'y changerons rien". »
M. le président.
La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, chacun le
sait, la République française intègre les minorités, à condition qu'elles le
souhaitent ; elle ne connaît aucune distinction de race, de religion, de
couleur, ni d'âge, d'apparence physique ou de handicap.
C'est la théorie. Un discours facile à retenir, mais difficile à tenir !
En effet, de nombreux cas de discrimination son signalés, majoritairement dans
les domaines de l'emploi, des relations avec les forces de l'ordre, mais
également du logement et des loisirs.
Cela est loin d'être un phénomène nouveau et notre code pénal prévoit des
sanctions exemplaires : deux ans d'emprisonnement et 200 000 francs
d'amende.
Reste que les décisions de justice demeurent rares.
Ainsi, le ministère de l'intérieur a publié le bilan de la première année
d'existence des CODAC, les commissions départementales d'accès à la
citoyenneté, créées pour identifier et lutter contre les discriminations. Sur
350 cas signalés, 47 dossiers ont été transmis au procureur de la République, 5
ont été classés sans suite, 33 sont en cours d'investigation et 9 ont donné
lieu à des poursuites judiciaires, aboutissant à 7 condamnations. Maigre bilan
!
Toutefois, on constate heureusement que les victimes et témoins de ces
infractions se font davantage connaître qu'auparavant, ne voulant plus subir
l'inacceptable.
On peut donc s'interroger sur la raison d'une telle différence entre les faits
existants et la faiblesse de leur prévention et de leur répression.
C'est la question à laquelle il nous faut répondre aujourd'hui et à laquelle
la majorité de l'Assemblée nationale, pilotée par le Gouvernement, propose une
solution, malheureusement limitée au monde du travail, ce que, cher collègue
Domeizel, comme vous, je regrette.
En tout état de cause, nous ne pouvons qu'approuver cette démarche, bien qu'il
soit regrettable que l'Assemblée nationale n'ait pas souhaité envisager la
question sous un angle plus général : la nécessité de faire évoluer l'ensemble
de la société et des mentalités vers plus de tolérance et de compréhension.
En effet, ainsi que le fait remarquer notre rapporteur Louis Souvet, que vous
me permettrez de remercier pour le travail qu'il a effectué, notre politique
d'intégration est menacée par ces comportements condamnables, qui remettent en
cause l'adhésion des salariés français d'origine étrangère et, surtout, des
jeunes, aux principes républicains.
Toutefois, il est un peu trop facile de faire porter la suspicion uniquement
sur les entrepreneurs, qui, décidément, accaparent toute l'attention du
Gouvernement en termes d'impôts, de contraintes et de répressions, sauf, bien
entendu, lorsqu'il s'agit de l'Etat employeur !
Quelle solution nous propose-t-on face au fléau de la discrimination dans le
monde du travail ? Il nous est proposé un aménagement de la charge de la preuve
en faveur des plaignants, qui fait peser sur l'employeur une sorte de
présomption de culpabilité. A l'heure de l'entrée en vigueur de la loi
renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des
victimes, le choix ainsi opéré ne manque pas de nous surprendre.
S'il est vrai que les victimes connaissent des difficultés importantes pour
prouver les discriminations dont elles ont fait l'objet, comme en témoignent le
faible nombre de recours devant les tribunaux et le nombre encore plus faible
de décisions de justice en leur faveur, faut-il aller si loin ?
En effet, d'une part, les risques de dévoiement de la procédure ne peuvent
être exclus. D'autre part, la solution ne s'inscrit pas dans le même esprit que
celui des directives européennes existant en la matière.
Tout d'abord, cette proposition de loi va faire peser une présomption de
culpabilité sur l'employeur, ou sur le futur employeur - M. le rapporteur vient
de nous le démontrer.
La modification de la charge de la preuve, en imposant uniquement au plaignant
de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence de
discriminations, autorise des actions en justice. Celles-ci seraient justifiées
non pas toujours par la volonté d'obtenir réparation d'une injustice, mais par
celle d'obtenir une embauche, une promotion, une augmentation, refusée sur des
critères qui ne sont pas toujours objectifs mais qui peuvent être légitimes.
En second lieu, il apparaît logique que notre droit national s'inscrive dans
la logique des deux directives intervenues dans ce domaine, c'est-à-dire la
directive du 15 décembre 1997 relative à la charge de la preuve dans les cas de
discrimination fondée sur le sexe et la directive du 29 juin 2000 relative à la
mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes, sans
distinction de race ou d'origine ethnique.
Ainsi, le législateur européen a prévu que la personne prétendant être victime
de discrimination devra « établir des faits permettant de présumer l'existence
d'une discrimination ». Un fait est quelque chose d'avéré, incontestable,
pouvant effectivement fonder une présomption.
La formulation retenue dans la proposition de loi est beaucoup plus floue : «
des faits laissant supposer » ; elle semble n'exiger que la présentation de
soupçons, ou de « on-dit » pour fonder une plainte.
En revanche, la propositon de loi fait peser sur l'employeur une obligation
bien plus lourde en l'obligeant « à prouver que sa décision est justifiée par
des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ». On exige de lui en
réalité de prouver qu'il n'a pas fait quelque chose. Cela rend tout simplement
sa défense impossible.
Malgré les dénégations du Gouvernement, cela ressemble fort à un renversement
de la charge de la preuve, contraire à l'esprit des directives européennes.
Enfin, la proposition de loi fait intervenir une tierce personne, le juge, qui
« forme sa conviction » au vu des déclarations et des parties.
Je ne veux pas remettre en cause la capacité du juge à se forger une opinion,
mais je ne vois pas comment il peut former sa conviction en disposant, d'un
côté, de soupçons et de rumeurs subjectives à charge et en obligeant, de
l'autre côté, l'employeur à apporter des éléments objectifs à décharge. Cela
est d'autant plus impossible que l'on sait pertinemment, par exemple en matière
de recrutements, que ceux-ci s'effectuent de nos jours au moins autant sur les
capacités et les compétences de la personne que sur sa personnalité :
adaptation à l'équipe, possibilité d'évolution, empathie avec le recruteur. Il
en est de même en termes de carrière et de rémunération. Dans certaines
entreprises, une telle présomption mise à la charge de l'employeur peut aboutir
à lui interdire tout choix de rémunération et de promotion au mérite.
La gestion prévisionnelle des carrières perd tout son sens. L'employeur n'a
aucun intérêt à prendre des risques en mettant en avant une personne dont les
capacités sont prometteuses et a tout intérêt à prévoir des systèmes de
promotion et de rémunération à l'ancienneté, à la rentabilité, en tout état de
cause fondés sur des éléments objectifs et démontrables. Il me semble qu'il est
ainsi porté atteinte à la liberté de gestion de l'entreprise.
Cette immixtion dans le monde de l'entreprise paraît contre-productive et il
aurait mieux valu que la majorité plurielle se contente de transposer la
directive sans vouloir aller plus loin.
En réalité, cette proposition de loi s'inspire directement d'une récente
décision de la Cour de cassation plaçant effectivement le juge en position
d'arbitre.
Ainsi que l'a rappelé fort justement notre rapporteur, force est de constater
qu'une fois de plus la majorité et le Gouvernement ont choisi de transcrire
dans la loi les arrêts de la Cour de cassation plutôt que des directives
européennes. Pareille situation s'était déjà produite lors de la discussion du
projet de loi relatif à la réduction négociée du temps de travail à propos de
la définition du temps de travail effectif.
Pour toutes ces raisons, notre groupe approuve les propositions de notre
rapporteur de revenir chaque fois que nécessaire à la lettre et à l'esprit des
textes européens.
En conclusion, je dirai que ce texte est imparfait mais non mauvais.
Il constitue avant tout une occasion manquée de marquer une véritable volonté
de lutter contre les discriminations qui gangrènent notre société. Il s'agit de
lutter contre cette haine de la différence, de prévenir les pulsions de repli
sur soi, de mettre en avant nos valeurs républicaines de tolérance et
d'ouverture auxquelles le RPR est profondément attaché.
Le groupe du RPR votera donc cette proposition de loi dans la rédaction
proposée par la commission des affaires sociales.
(Applaudissements sur le
banc des commissions.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er - I. - L'article L. 122-45 du code du travail est ainsi rédigé :
«
Art. L. 122-45
. - Aucune personne ne peut être écartée d'une
procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation
en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet
d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de
rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification,
de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de
renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs,
de son orientation sexuelle, de sa situation de famille, de son appartenance à
une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses
activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son
apparence physique, de son patronyme ou, sauf inaptitude constatée par le
médecin du travail dans le cadre du titre IV du livre II du présent code, en
raison de son état de santé ou de son handicap.
« Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une
mesure discriminatoire visée à l'alinéa précédent en raison de l'exercice
normal du droit de grève.
« Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une
mesure discriminatoire pour avoir témoigné des agissements définis aux alinéas
précédents ou pour les avoir relatés.
« En cas de litige relatif à l'application des alinéas précédents, le salarié
concerné ou le candidat à un recrutement, à un stage ou à une période de
formation en entreprise présente des éléments de fait laissant supposer
l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments,
il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée
par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa
conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures
d'instruction qu'il estime utiles.
« Toute disposition ou tout acte contraire à l'égard d'un salarié est nul de
plein droit. »
« II. - L'article L. 122-35 du code du travail est ainsi modifié :
« 1° Au deuxième alinéa, après le mot : "moeurs,", sont insérés les mots : "de
leur orientation sexuelle," ;
« 2° Au deuxième alinéa, après le mot : "confessions,", sont insérés les mots
: "de leur apparence physique, de leur patronyme,".
« III. - L'article 225-1 du code pénal est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa :
«
a)
Après le mot : "famille,", sont insérés les mots : "de leur
apparence physique, de leur patronyme," ;
«
b)
Après le mot : "moeurs,", sont insérés les mots : "de leur
orientation sexuelle," ;
« 2° Au deuxième alinéa :
«
a)
Après le mot : "famille,", sont insérés les mots : "de l'apparence
physique, du patronyme," ;
«
b)
Après le mot : "moeurs,", sont insérés les mots : "de
l'orientation sexuelle,".
« IV. - L'article 225-2 du code pénal est ainsi modifié :
« 1° Au 5° , après les mots : "offre d'emploi", sont insérés les mots : ", une
demande de stage ou une période de formation en entreprise" ;
« 2° L'article est complété par un 6° ainsi rédigé :
«
6°
A refuser d'accepter une personne à l'un des stages visés par le
2° de l'article L. 412-8 du code de la sécurité sociale. »
« V. - L'article L. 611-1 du code du travail est ainsi modifié :
« 1° Au deuxième alinéa, les mots : "à la règle de l'égalité professionnelle"
sont supprimés ;
« 2° Au deuxième alinéa, après les mots : "au 3° ", sont insérés les mots :
"et au 6° ". »
« VI. - Dans le quatrième alinéa de l'article L. 611-6 du code du travail, les
mots : "à la règle de l'égalité professionnelle" sont supprimés et, après les
mots : "au 3° ", sont insérés les mots : "et au 6°". »
Par amendement n° 19, M. Leclerc propose, dans le premier alinéa du texte
présenté par le I de cet article pour l'article L. 122-45 du code du travail,
après les mots : « orientation sexuelle, », d'insérer les mots : « de son âge,
».
La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc.
Dans son propos liminaire, M. le ministre a cité les motifs de discrimination
prévus. Pour ma part, je voudrais y ajouter celui de l'âge, en référence à
l'article 13 du traité d'Amsterdam.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission a émis un avis favorable sur cet amendement qui
vise à combler un vide, dans la mesure où les discriminations fondées sur l'âge
constituent une réalité, notamment en matière d'embauche, de déroulement de
carrière ou de licenciement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Le Gouvernement serait favorable au principe selon
lequel, en conformité avec l'article 13 du traité d'Amsterdam, l'âge serait
retenu comme motif de discrimination illicite. Mais la négociation de la
directive portant cadre général sur l'égalité de traitement dans le travail et
dans l'emploi, qui a fait l'objet d'un accord politique le 17 octobre 2000 à
Luxembourg, a permis de mettre en valeur les difficultés techniques qui
pourraient en résulter.
Dans notre législation interne, dans notre seul code du travail, l'âge
intervient pour protéger à la fois les travailleurs âgés, les jeunes qui ne
doivent pas travailler et les jeunes au travail. Ainsi, l'âge est pris en
compte pour l'attribution de certaines mesures de politique de l'emploi et de
formation professionnelle.
Par ailleurs, il existe déjà dans le code du travail - je pense à l'article L.
311-4 - des dispositions qui sont destinées à éviter que certaines limites
d'âge n'interviennent comme motif discriminatoire à l'encontre d'un candidat à
l'emploi.
La difficulté technique liée à ce problème, qui suscite je le répète, une
préoccupation légitime, mais dont la solution doit être compatible avec la
directive communautaire, conduit le Gouvernement à demander aux auteurs de cet
amendement de bien vouloir le retirer afin de disposer, à la faveur des
navettes parlementaires, du temps nécessaire pour procéder aux expertises qu'il
juge utiles. Bien entendu, il s'engage à ce que la mention de l'âge figure dans
les motifs de discrimination qui seront visés dans le texte définitif.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Je voudrais dire à M. le ministre à quel point je suis étonné
de sa réponse.
En effet, la lutte contre les discriminations fondées sur l'âge est
explicitement mentionnée dans l'article 13 du traité d'Amsterdam.
Certes, la lutte contre ces discriminations n'est pas aisée, qu'elles
concernent les jeunes ou les salariés plus âgés. Mais on ne saurait opérer de
discrimination entre les différentes discriminations et les amendements de
notre collègue M. Leclerc me paraissent, à cet égard, particulièrement
pertinents.
Je ne vois d'ailleurs aucune urgence à ce que l'amendement n° 19 soit retiré.
Il pourra toujours l'être par la suite, y compris en commission mixte
paritaire. En tout cas, ce problème mérite une réflexion de la part du
Gouvernement.
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Monsieur le rapporteur, vous avez évoqué tout à l'heure
les difficultés qui peuvent survenir quand on légifère dans l'urgence, et vous
avez rappelé l'attention que je portais à cet aspect des choses lorsque j'étais
député. Or, s'agissant de cet amendement, c'est ce qui pourrait se produire.
Je répète que, sur le fond, le Gouvernement est d'accord. Mais je ne voudrais
pas, dès maintenant, donner l'aval sur un texte qui pourrait apporter de
mauvaises réponses à une situation qui aurait été mal appréhendée.
C'est pourquoi je maintiens ma demande de retrait.
M. le président.
Monsieur Leclerc, maintenez-vous l'amendement n° 19 ?
M. Emmanuel Hamel.
Bien sûr !
M. Dominique Leclerc.
Dans la vie de tous les jours, l'âge revient toujours comme élément
discriminant, que ce soit pour les plus jeunes en quête d'un premier emploi ou
pour les gens qui arrivent à un certain âge. Aussi, il me paraît justifié de le
mentionner, tout autant que les autres motifs de discrimination qui figurent
dans la proposition de loi.
M. Michel Caldaguès.
Très juste !
M. Dominique Leclerc.
En conséquence, je maintiens mon amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, accepté par la commission et repoussé par
le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 15, Mme Borvo, MM. Muzeau, Fischer et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen proposent, dans le premier alinéa du texte
présenté par le I de l'article 1er pour l'article L. 122-45 du code du travail,
après les mots : « de son appartenance », d'insérer les mots : « ou de sa
non-appartenance, vraie ou supposée, ».
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Cet amendement reprend la formulation de l'article 225-1, du code pénal pour
préciser le texte qui nous est proposé. Il permet avant tout de ne pas
consacrer le terme de « race », et je vais m'arrêter un instant sur ce point,
qu'a d'ailleurs soulevé ce matin notre collègue Francis Giraud, lors de la
réunion de la commission.
Dans le règne animal, une race est obtenue lorsque des individus, sélectionnés
sur des critères prédéfinis - la taille, la couleur du pelage... -, fécondés
entre eux pendant de nombreuses générations, aboutissent à des individus
reproduisant invariablement dans leur descendance les critères présélectionnés.
On voit qu'une telle sélection n'a jamais eu lieu - même si certains, aux pires
moments de notre histoire, furent tentés d'y recourir - dans l'espèce humaine :
aucune population n'en a fait l'objet à chaque génération pendant des dizaines
de générations.
Il n'est donc de races qu'animales, et celles-ci sont des créations
humaines.
C'est pourquoi le législateur français n'a pas voulu consacrer dans le code
pénal un terme qui, au vu des données scientifiques, notamment génétiques,
actuelles et selon les plus grands anthropologues de notre temps - je citerai
parmi eux Gould aux Etats-Unis, Vavalli-Sforza, ou Langaney en France - n'a pas
de fondement.
C'est d'ailleurs ce que confirmait le ministère de l'éducation nationale, qui,
en réponse à l'une des questions écrites déposée par Nicole Borvo en 1999, lui
faisait savoir que ses services avaient fait procéder au retrait du terme «
race humaine » initialement prévu dans le programme de la maîtrise de sciences
biologiques et médicales.
La notion de race ne correspond qu'à une distinction subjective qu'opèrent
certaines personnes à l'égard d'autres ou à l'image, renvoyée par la société,
qu'ont les individus d'eux-mêmes : il s'agit donc dans tous les cas d'une
construction sociale et non pas d'une réalité biologique objective. Je pense
ici, notamment, au concept de « race auto-rapportée » en vigueur aux
Etats-Unis, sans m'attarder sur les conséquences pernicieuses et dévastatrices
de son utilisation.
Je constate par ailleurs que le terme « race » est utilisé dans l'article 21
de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. C'est regrettable
et ma collègue Nicole Borvo s'en était étonnée auprès de M. le ministre délégué
aux affaires européennes.
Pour toutes ces raisons, je vous demande, mes chers collègues, d'adopter le
présent amendement qui vise à apporter une précision et permet de ne pas
consacrer le terme « race », encore tellement utilisé, mais jamais défini.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Je ne vais pas reprendre les propos qu'a tenus notre
excellent collègue Guy Fischer. Je dirai simplement qu'il s'agit d'un
amendement de précision qui s'inspire de la rédaction du code pénal. Il met en
évidence le fait que des divergences subsistent dans les formulations retenues
dans les différents articles faisant l'inventaire des motifs de
discrimination.
Comme je l'ai souligné dans le rapport, on peut remarquer en particulier que
l'article L. 122-35 du code du travail ne mentionne même pas les
discriminations fondées sur l'appartenance à une ethnie, à une nation ou à une
race.
La précision prévue par cet amendement constitue une coordination partielle.
C'est pourquoi la commission a émis un avis favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement, dont
l'adoption permettra d'aligner la rédaction de l'article L. 122-45 du code du
travail sur celle de l'article 225-1 du code pénal.
En outre, la formulation proposée est cohérente avec la position défendue par
la France au Conseil de l'Union européenne lors de la négociation des
directives communautaires fondées sur l'article 13 du traité d'Amsterdam. Cette
position a d'ailleurs été prise en compte dans l'un des considérants de la
directive du 29 juin 2000 relative à l'égalité de traitement sans distinction
de race ou d'origine ethnique. Le considérant n° 6 affirme en effet que l'Union
européenne rejette toute théorie tendant à déterminer l'existence de races
humaines distinctes. L'emploi du mot « race » dans la présente directive
n'implique nullement l'acceptation de telles théories.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 2, M. Souvet, au nom de la commission, propose, dans la
première phrase du quatrième alinéa du texte présenté par le I de l'article 1er
pour l'article L. 122-45 du code du travail de remplacer les mots : « présente
des éléments de fait laissant supposer » par les mots : « établit des faits qui
permettent de présumer ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Cet amendement a pour objet de modifier les dispositions de
l'article 1er concernant l'aménagement de la charge de la preuve dans le cas
d'un litige portant sur une discrimination.
La commission propose de prévoir que l'action judiciaire nécessite, pour être
engagée, l'établissement par le plaignant de faits permettant de présumer
l'existence d'une discrimination comme le prévoit l'article 8 de la directive
européenne du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de
l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou
d'origine ethnique.
Le recours à l'expression « laissant supposer » ne semble pas en effet
présenter toutes les garanties de rigueur juridique.
La nouvelle rédaction que la commission vous propose d'adopter est plus
précise et devrait permettre une amélioration des conditions du respect des
droits des plaignants puisque les plaintes les plus solides sont celles qui
reposent sur des faits, même s'ils sont peu nombreux.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Monsieur le rapporteur, la rédaction proposée par
l'Assemblée nationale se fonde sur la jurisprudence de la Cour de cassation. Sa
chambre sociale a retenu les éléments de fait dans l'arrêt Fluchère du 28 mars
2000 pour accueillir la demande d'une victime de discrimination syndicale. Elle
énonce que le syndicaliste qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire
doit « soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une
atteinte au principe d'égalité de traitement ».
En outre, cette rédaction est compatible avec la jurisprudence communautaire
et les directives communautaires adoptées sur la base de l'article 13 du traité
d'Amsterdam. Elle n'a ni pour objet ni pour effet de créer une présomption de
culpabilité, comme le soulignait M. Leclerc dans son intervention : la
culpabilité est, je le rappelle, une notion pénale. C'est pourquoi le
Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 2.
M. Roland Muzeau.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes
fermement opposés à cet amendement présenté par la commission des affaires
sociales.
La rédaction proposée limite en effet la portée du texte de la proposition de
loi et risque de compromettre les chances d'une personne s'estimant victime
d'une discrimination de faire valoir ses droits.
Ainsi que nous l'avons déjà clairement exprimé lors de la discussion générale,
le texte issu des débats qui se sont déroulés à l'Assemblée nationale nous
paraît équilibré sur ce point.
En effet, compte tenu de la difficulté qu'aura un salarié ou un candidat à un
emploi à obtenir les preuves matérielles du fait qu'il a bel et bien été
victime des pratiques discriminatoires, nous estimons nécessaire qu'il n'ait à
présenter que des éléments de fait laissant supposer une discrimination, comme
le dit fort bien le texte de la proposition de loi.
Si la différence de traitement constatée est justifiée par des éléments
objectifs et uniquement professionnels, l'employeur pourra, sans aucun
problème, prouver que ses décisions n'ont pas été dictées par une volonté de
discrimination.
En cela, la charge de la preuve n'est pas inversée, elle est simplement
aménagée, ce qui constitue un rééquilibrage de la relation
salarié-employeur.
Par conséquent, estimant que l'adoption de cet amendement rendrait le texte
trop défavorable au salarié, nous nous y opposerons, ainsi qu'à tous ceux qui
sont inspirés par la même philosophie.
M. Michel Caldaguès.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès.
Mes chers collègues, j'estime que l'amendement présenté par la commission
procède d'une précaution parfaitement bien inspirée. Il est tout à fait
évident, en effet, que les termes « laissant supposer » peuvent donner lieu à
des dérives très préjudiciables, et même à des formes de chasse aux sorcières
que McCarthy lui-même n'aurait pas désavouées ; l'expression lui aurait sans
doute beaucoup plu !
J'estime que l'on ne doit pas, dans la loi, ouvrir des possibilités de chasse
aux sorcières qui peuvent notamment donner lieu à des tentatives de chantage,
comme cela s'est déjà produit.
Il est en effet déjà arrivé que, sur la base des textes existants, à
l'occasion d'une instance, un compromis financier soit proposé, lequel fut
d'ailleurs finalement récusé par une partie des dirigeants de l'association qui
s'y était prêtée.
Je crois donc qu'il faut être extrêmement prudent, sous peine de faciliter des
pratiques qui ne seraient pas honorables.
Je terminerai sur une question de principe.
L'argument de conformité à la jurisprudence de la Cour de cassation avancé par
le Gouvernement ne m'a pas du tout convaincu. Ce n'est tout de même pas une
règle pour le Parlement que de se conformer à la jurisprudence. Où serait, dans
ces conditions, le pouvoir législatif ?
Telles sont les raisons pour lesquelles je voterai cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, repousé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 3, M. Souvet, au nom de la commission, propose, dans la
deuxième phrase du quatrième alinéa du texte présenté par le I de l'article 1er
pour l'article L. 122-45 du code du travail, de remplacer les mots : « est
justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. », par
les mots : « n'est pas contraire aux dispositions énoncées aux alinéas
précédents. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Cet amendement a pour objet d'améliorer la rédaction proposée
par l'Assemblée nationale concernant les obligations faites au défendeur dans
l'établissement de la preuve au regard d'un litige relatif à une
discrimination.
La nouvelle rédaction de l'article L. 122-45 du code du travail prévoit qu'«
il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée
par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. »
Sans remettre en cause cet objectif, il est apparu nécessaire à la commission
des affaires sociales de se rapprocher davantage de la rédaction de la
directive européenne du 29 juin 2000 qui prévoit qu'« il incombe à la partie
défenderesse de prouver qu'il n'y a pas eu violation du principe de l'inégalité
de traitement. »
C'est pourquoi la commission vous propose d'établir qu'« il incombe à la
partie défenderesse de prouver que sa décision n'est pas contraire aux
dispositions énoncées aux alinéas précédents. »
Cette nouvelle rédaction est plus claire. Elle permet d'éviter des contentieux
compliqués qui auraient pu tourner autour des différentes façons d'interpréter
la notion d'« élément objectif ». Chacun d'entre nous sait bien, en effet, que
la politique des ressources humaines d'une entreprise comprend une part de
subjectivité qui ne peut être assimilée à des mesures discriminatoires.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
La commission considère qu'il est restrictif de ne permettre à l'employeur
d'écarter la présomption de discrimination qu'en justifiant d'éléments
objectifs.
Concrètement, le mécanisme probatoire se déroule en trois temps.
Dans un premier temps, l'effort est fourni par le salarié par l'apport
d'éléments de fait. Ceux-ci doivent impérativement servir à fonder une
présomption de discrimination.
Si cette présomption est établie, il appartient, dans un second temps, à
l'employeur, de prouver que sa décision a été prise en fonction d'éléments
objectifs...
M. Louis Souvet,
rapporteur.
... et parfois subjectifs !
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
... étrangers à toute discrimination.
La commission fait observer, à juste titre, que l'employeur peut aussi se
déterminer en fonction d'éléments purement subjectifs. Certes, comme le
confirme la décision du Conseil constitutionnel n° 88-244 du 20 juillet 1988,
l'employeur a le libre choix de ses collaborateurs, cette liberté devant
évidemment se concilier avec le principe de non-discrimination.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
C'est évident !
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
L'employeur peut donc toujours apporter des éléments
d'appréciation pour sa défense. En effet, rien n'empêche, dans un troisième
temps, le juge de prendre en considération ces éléments d'appréciation et de
considérer, selon les circonstances, qu'ils peuvent constituer des éléments
objectifs.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Evitons le juge !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 3.
M. Michel Caldaguès.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès.
Au contraire du Gouvernement, je considère que l'amendement proposé par la
commission constitue une précaution minimale pour éviter que le renversement de
la charge de la preuve n'en vienne à réduire totalement à néant la présomption
d'innocence.
La présomption d'innocence est un des grands principes de notre droit, et,
alors qu'on en entend parler cent fois par jour, le Parlement légiférerait sans
en tenir aucun compte ? Ce serait pour le moins excessif. C'est pourquoi je
voterai l'amendement de la commission.
M. Emmanuel Hamel.
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements présentés par M. Leclerc.
L'amendement n° 20 tend à compléter
in fine
le deuxième alinéa (1°) du
II de l'article 1er par les mots : « de leur âge, ».
L'amendement n° 21 rectifié est ainsi conçu :
« I. - Compléter
in fine
le troisième alinéa
(b)
du 1° du III de
l'article 1er par les mots : "de leur âge,".
« II. - Compléter
in fine
le dernier alinéa
(b)
du 2° du III de
cet article par les mots : "de l'âge,". »
La parole est à M. Leclerc, par défendre ces deux amendements.
M. Dominique Leclerc.
Comme par l'amendement n° 19, je propose, avec les amendements n°s 20 et 21
rectifié d'introduire l'âge comme élément de discrimination dans la législation
française.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission est favorable aux amendements n°s 20 et 21
rectifié, comme elle a été favorable à l'amendement n° 19.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Comme sur l'amendement n° 19, le Gouvernement émet un
avis défavorable sur les amendements n°s 20 et 21 rectifié.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 20.
M. Michel Caldaguès.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès.
Encore une fois, je voterai cet amendement de mon ami Dominique Leclerc, car
je considère qu'il n'existe pas de notion plus objective que l'âge. Je ne vois
pas pourquoi certains auraient des états d'âme à ce propos.
M. le ministre a dit tout à l'heure que l'âge pouvait poser des problèmes
d'ordre technique. Je me demande bien lesquels.
Je n'en dirai pas autant de tous les critères qui sont retenus dans le texte,
l'orientation sexuelle par exemple. Or je n'ai trouvé ni dans la proposition de
loi, ni dans le rapport, aucune définition de ce qu'est l'« orientation
sexuelle ».
On nous parle de plus en plus souvent, hélas ! de pédophilie ! Faut-il classer
une telle pratique dans les orientations sexuelles ? Il faudrait tout de même
faire preuve d'un peu plus de précision, quand nous légiférons.
En tout cas, Dominique Leclerc est un adepte de la précision, et je l'en
félicite.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, accepté par la commission et repoussé par
le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21 rectifié, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
M. le président.
« Art. 2. - I. - Il est inséré, après l'article L. 122-45 du code du travail,
un article L. 122-45-1 ainsi rédigé :
«
Art. L. 122-45-1
. - Les organisations syndicales représentatives au
plan national, départemental, pour ce qui concerne les départements
d'outre-mer, ou dans l'entreprise peuvent exercer en justice toutes actions qui
naissent de l'article L. 122-5 dans les conditions prévues par celui-ci en
faveur d'un candidat à un emploi, à un stage ou une période de formation en
entreprise ou d'un salarié de l'entreprise sans avoir à justifier d'un mandat
de l'intéressé, pourvu que celui ci ait été averti par écrit et ne s'y soit pas
opposé dans un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle
l'organisation syndicale lui a notifié son intention. L'intéressé peut toujours
intervenir à l'instance engagée par le syndicat.
« Les associations régulièrement constituées depuis cinq ans au moins peuvent
saisir les organisations syndicales pour leur demander d'exercer en justice les
actions visées au premier alinéa. »
« I
bis.
- Il est inséré, après l'article L. 122-45 du code du travail,
un article L. 122-45-2 ainsi rédigé :
«
Art. L. 122-45-2
. - Est nul et de nul effet le licenciement d'un
salarié faisant suite à une action en justice engagée par ce salarié ou en sa
faveur sur la base des dispositions du présent code relatives aux
discriminations, lorsqu'il est établi que le licenciement n'a pas de cause
réelle et sérieuse et constitue en réalité une mesure prise par l'employeur à
raison de l'action en justice. En ce cas, la réintégration est de droit et le
salarié est regardé comme n'ayant jamais cessé d'occuper son emploi.
« Si le salarié refuse de poursuivre l'exécution du contrat de travail, le
conseil de prud'hommes lui alloue une indemnité qui ne peut être inférieure aux
salaires des six derniers mois. De plus, le salarié bénéficie également d'une
indemnité correspondant à l'indemnité de licenciement prévue par l'article L.
122-9 ou par la convention ou l'accord collectif applicable ou le contrat de
travail. Le deuxième alinéa de l'article L. 122-14-4 du présent code est
également applicable. »
« II. - Le premier alinéa de l'article L. 422-1-1 du code du travail est
complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cette atteinte aux droits des personnes ou aux libertés individuelles peut
notamment résulter de toute mesure discriminatoire en matière d'embauche, de
rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de classification,
de qualification, de promotion professionnelle, de mutation, de renouvellement
de contrat, de sanction ou de licenciement. »
Par amendement n° 4, M. Souvet, au nom de la commission, propose, dans la
première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour
l'article L. 122-45-1 du code du travail, de supprimer les mots : « dans les
conditions prévues par celui-ci ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Nous proposons, par cet amendement rédactionnel, de supprimer
les mots : « dans les conditions prévues par celui-ci », car nous estimons
qu'ils n'apportent rien.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Le Gouvernement émet un avis défavorable, monsieur le
président.
Les mots : « dans les conditions prévues par celui-ci » permettent en effet
d'expliciter l'application du mécanisme de l'aménagement des règles de la
charge de la preuve - prévu à l'article L. 122-45 pour les salariés ou les
candidats au recrutement - aux organisations syndicales qui exercent en justice
leur droit de substitution.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 5, M. Souvet, au nom de la commission, propose, après les
mots : « salarié de l'entreprise », de rédiger comme suit la fin de la première
phrase du premier alinéa du texte présenté par le I de l'article 2 pour
l'article L. 122-45-1 du code du travail : « sous réserve qu'elles justifient
d'un accord écrit de l'intéressé. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
L'article L. 122-45-1 prévoit la possibilité, pour une
organisation syndicale, de se substituer à un salarié victime d'une
discrimination pour ester en justice.
Le texte voté par l'Assemblée nationale prévoit que cette organisation
syndicale n'aura pas à justifier d'un mandat de l'intéressé pourvu que celui-ci
ait été averti par écrit. Contrairement à l'article L. 122-3-16 du code du
travail, qui prévoit un avertissement « par lettre recommandée avec accusé de
réception », il est par ailleurs fait référence ici à un simple avertissement «
par écrit ».
Cette disposition ne semble pas opportune, ou en tout cas elle ne ressemble
pas à l'autre, l'intérêt étant différent. Je remarque que l'article 7 de la
directive européenne du 29 juin 2000, qui semble l'avoir inspirée, prévoit
l'approbation du salarié. C'est une précaution heureuse. Le plaignant est, en
effet, le mieux à même de juger de l'opportunité des poursuites, surtout dans
des cas aussi sensibles.
En fait, le contentieux, s'il a une utilité, relève plus de la dissuasion.
C'est pourquoi il est fondamental de laisser au salarié la maîtrise des
négociations à conduire avec l'employeur, au besoin grâce au soutien d'un
syndicat, afin d'assurer le respect de ses droits. Autrement, le risque est
grand pour le salarié de se voir instrumentalisé par un syndicat conduisant une
action propre à l'encontre de l'employeur dans le cadre d'une stratégie plus
large.
Je remarque par ailleurs que l'accord écrit de l'intéressé est exigé des
organisations syndicales par l'article L. 123-6 dans le cas des actions menées
en justice sur le fondement d'un harcèlement sexuel. Il ne semble pas
illégitime, dans ces conditions, d'exiger un tel accord écrit dans les cas de
discriminations, notamment celles qui sont fondées sur des motifs racistes.
Tel est le sens de ce deuxième amendement à l'article 2.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Je suis défavorable à cet amendement.
La rédaction proposée par l'Assemblée nationale devrait être maintenue, car
elle permet un mécanisme d'action substitutif par les syndicats, avec l'accord
tacite des salariés.
Ce mécanisme existe déjà dans le code du travail en matière de licenciement
économique. Le Conseil constitutionnel l'a validé dans sa décision du 25
juillet 1989 relative à la prévention du licenciement économique et au droit à
la conversion dès lors que le salarié a été bien informé de l'action engagée
par le syndicat et que « l'intéressé a été mis à même de donner son assentiment
en pleine connaissance de cause et qu'il peut conserver la liberté de conduire
personnellement la défense de ses intérêts et de mettre un terme à l'action
».
Le syndicat, le cas échéant devant le juge, devra prouver qu'il a bien informé
le salarié par tous les modes de preuve, dont l'accusé de réception.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 5.
M. Roland Muzeau.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau.
Nous souhaitons marquer notre opposition la plus nette à cet amendement
présenté par la commission des affaires sociales.
La proposition de loi donne la possibilité à une organisation syndicale
représentative d'intenter une action en faveur d'une personne victime de
discrimination.
Quand on connaît le désarroi dans lequel la victime peut se trouver, il
convient de ne pas semer d'embûches sur le chemin qu'elle devra parcourir pour
recouvrer ses droits.
Le texte issu des débats à l'Assemblée nationale est clair et équilibré,
puisqu'il mentionne que les syndicats peuvent intenter une action sans avoir de
mandat de l'intéressé, à condition que celui-ci ait été averti par écrit et ne
s'y soit pas opposé dans un délai de quinze jours. Cette rédaction nous
convient parfaitement et nous ne voyons donc pas l'utilité de la modifier.
L'amendement de la commission des affaires sociales entrave l'action de la
victime et des syndicats. Nous voterons donc contre cet amendement, ainsi que
contre tous ceux qui procèdent de la même démarche.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 6, M. Souvet, au nom de la commission, propose de compléter
la dernière phrase du premier alinéa du texte présenté par le I de l'article 2
pour l'article L. 122-45-1 du code du travail par les mots : « et y mettre un
terme à tout moment. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Vous avez cité la décision du Conseil constitutionnel qui
prévoit que l'intéressé peut mettre un terme à tout moment à cette action. Vous
ne pouvez donc qu'accepter cet amendement, qui ne fait que reprendre ces termes
!
(Sourires.)
Il tend en effet à compléter la dernière phrase du texte
proposé pour le premier alinéa de l'article L. 122-45-1 du code du travail qui
prévoit que l'intéressé peut toujours intervenir à l'instance engagée par le
syndicat.
Il semble utile à votre commission de préciser que ce dernier peut également
mettre un terme à tout moment à cette action, comme le prévoit d'ailleurs
l'article L. 122-3-16 dudit code, dans le cas des ruptures du contrat de
travail. Cette précaution permet de garantir à la victime la maîtrise de
l'évolution du contentieux afin qu'il ne débouche pas sur une situation qui
serait contraire à ses intérêts et qu'il ne maîtriserait pas.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Je ne puis vous donner hélas ! satisfaction, monsieur
le rapporteur, en raison des propos que je viens de tenir au sujet de
l'amendement précédent.
En effet, l'amendement n° 6 vise à préciser qu'il peut être mis fin au mandat
donné par le salarié à l'organisation syndicale à tout moment. Mais cette
précision est superflue, car le mandat est, de par sa nature, un contrat
révocable à tout moment.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 7, M. Souvet, au nom de la commission, propose de supprimer
le dernier alinéa du texte présenté par le I de l'article 2 pour l'article L.
122-45-1 du code du travail.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La commission vous propose de supprimer le dernier alinéa du
texte présenté par le I de l'article 2 pour l'article L. 122-45-1 du code du
travail, qui prévoit un « droit d'alerte » permettant aux associations de
saisir les organisations syndicales pour leur demander d'ester en jugement à
l'encontre d'auteurs de discrimination.
Cette disposition s'inspire de l'article L. 341-6-3 du code du travail, qui
prévoit un dispositif identique au regard des infractions relatives à l'emploi
de la main-d'oeuvre étrangère.
Là encore, il s'agit d'une disposition inopportune qui conforte le pouvoir de
substitution d'un syndicat à la victime, ce pouvoir pouvant d'ailleurs, selon
l'Assemblée nationale, s'exercer sans l'accord de la victime.
Cette rédaction fait référence aux associations constituées depuis plus de
cinq ans sans que l'on comprenne, là encore, le sens de cette ancienneté. En
effet, pourquoi cinq ans ? Pourquoi pas quatre ou six ? J'aimerais bien savoir
!
On remarque ensuite que le texte voté par l'Assemblée nationale fait référence
aux « associations », alors que l'article L. 341-6-3 mentionne les «
associations pour la lutte contre les discriminations », ce qui est plus
précis.
Plus généralement, on peut rappeler que rien n'empêche une association de
saisir un syndicat d'une discrimination qu'elle aurait constatée. Cette
disposition n'a donc pas de véritable portée législative et constitue surtout
une « mesure d'affichage ».
Votre commission observe que la véritable novation aurait consisté à
reconnaître aux associations le droit de saisir directement la justice, sans
passer par les syndicats. Cette possibilité était d'ailleurs reconnue par
l'article 7 de la directive du 29 juin 2000. La solution retenue constitue donc
un compromis ambigu qui ne garantit pas les droits et la liberté d'action des
salariés.
Dans ces conditions, votre commission vous propose de supprimer cette
disposition, qui ne lui semble pas souhaitable dans le cadre d'une procédure
juridictionnelle.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Avis défavorable.
Monsieur le rapporteur, j'étais presque d'accord avec vous lorsque vous
évoquiez la notion de compromis...
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Faisons chacun un petit pas !
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
... mais pas un compromis ambigu ! Il est tout à fait
symbolique !
Ces dernières années notamment, un travail extrêmement important a été
accompli par des associations pour essayer de lutter contre les actes de
discrimination à l'embauche, dans le logement, dans les loisirs. Cette
disposition a le mérite de mettre en relief les rôles respectifs des
associations et des syndicats dans la lutte contre les discriminations.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 7.
M. Michel Caldaguès.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès.
Je suis entièrement d'accord avec la proposition de suppression de la
commission car, dans ce domaine aussi, des risques de dérive existent. Il ne
fait pas de doute que ces associations, non précisées, pourraient en quelque
sorte jouer un rôle d'aiguillon politique. Cela n'est pas une politique
législative très saine !
M. le rapporteur a parfaitement montré que des associations qui ont vocation à
lutter contre les discriminations ont déjà les moyens de se manifester. De
plus, permettre à n'importe quelle association de s'insérer dans le dispositif,
c'est méconnaître un des grands principes du droit français, à savoir : pas
d'intérêt, pas d'action.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 3
M. le président.
« Art. 3. - I. - Le quinzième alinéa (10°) de l'article L. 133 5 du code du
travail est ainsi rédigé :
« 10° L'égalité de traitement entre salariés, quelle que soit leur
appartenance à une ethnie, une nation ou une race, notamment en matière d'accès
à l'emploi, de formation, de promotion professionnelle et de conditions de
travail ; »
« II. - Le neuvième alinéa (8°) de l'article L. 136-2 du code du travail est
ainsi rédigé :
« 8° De suivre annuellement l'application dans les conventions collectives du
principe à travail égal salaire égal, du principe de l'égalité professionnelle
entre les hommes et les femmes et du principe d'égalité de traitement entre les
salariés sans considération d'appartenance à une ethnie, une nation ou une
race, de constater les inégalités éventuellement persistantes et d'en analyser
les causes ; la commission nationale a qualité pour faire au ministre chargé du
travail toute proposition pour promouvoir dans les faits et dans les textes ces
principes d'égalité. » -
(Adopté.)
Article 4
M. le président.
« Art. 4. - I. - Après le quatrième alinéa de l'article L. 123-1 du code du
travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de litige relatif à l'application du présent article, le salarié
concerné ou le candidat à un recrutement présente des éléments de fait laissant
supposer l'existence d'une discrimination, directe ou indirecte, fondée sur le
sexe ou la situation de famille. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie
défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments
objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après
avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime
utiles. »
« II. - L'article L. 123-6 du code du travail est ainsi modifié :
« 1° Après les mots : "organisations syndicales représentatives", sont insérés
les mots : "au plan national ou" ;
« 2° Après les mots : "en faveur", sont insérés les mots : "d'un candidat à un
emploi ou". »
Par amendement n° 8, M. Souvet, au nom de la commission, propose, dans la
première phrase du texte présenté par le I de cet article pour insérer un
alinéa après le quatrième alinéa de l'article L. 123-1 du code du travail, de
remplacer les mots : « présente des éléments de fait laissant supposer » par
les mots : « établit des faits qui permettent de présumer ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
J'ose dire que, compte tenu du travail effectué non seulement
en commission, mais aussi dans cet hémicycle, cet amendement est quasiment un
amendement de coordination. En tout cas, il a exactement le même objet que
l'amendement n° 1.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Même position, monsieur le président, c'est-à-dire
défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 9, M. Souvet, au nom de la commission, propose, dans la
deuxième phrase du texte présenté par le I de l'article 4 pour insérer un
alinéa supplémentaire après le quatrième alinéa de l'article L. 123-1 du code
du travail, de remplacer les mots : « est justifiée par des éléments objectifs
étrangers à toute discrimination. » par les mots : « n'est pas contraire aux
dispositions énoncées aux alinéas précédents. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La même argumentation vaut pour cet amendement, monsieur le
président.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Comme précédemment : défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 10, M. Souvet, au nom de la commission, propose de compléter
le paragraphe II de l'article 4 par trois alinéas ainsi rédigés :
« 3° Les mots : "sans avoir à justifier d'un mandat de l'intéressé, pourvu que
celui-ci ait été averti par écrit et ne s'y soit pas opposé dans un délai de
quinze jours à compter de la date à laquelle l'organisation syndicale lui a
notifié son intention" sont remplacés par les mots "sous réserve qu'elles
justifient d'un accord écrit de l'intéressé".
« 4° Le deuxième alinéa est complété par les mots : "et y mettre un terme à
tout moment".
« 5° Le dernier alinéa est supprimé. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 4
M. le président.
Par amendement, n° 16, MM. Muzeau, Fischer et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 4, un article
additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 611-8 du code du travail est complété par un alinéa ainsi
rédigé :
« Les constatations des inspecteurs du travail sont tenues à la disposition
des délégués du personnel et des organisations syndicales représentatives. »
La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau.
Nous souhaitons, à travers cet amendement, améliorer l'efficacité conjointe de
l'inspecteur du travail et des représentants des salariés, qu'il s'agisse des
délégués du personnel ou des organisations syndicales représentatives.
En effet, les constatations effectuées par les inspecteurs du travail ne sont
pas transmises aux délégués du personnel ou aux syndicats.
Il s'agit, tout simplement, d'une exigence de transparence dans la
transmission de l'information.
Cette mesure serait, selon nous, de nature à faciliter l'action d'un salarié
qui s'estime victime de discrimination.
Nous trouvons d'ailleurs tout à fait légitime et logique, lorsqu'une
intervention de la direction départementale du travail et de l'emploi est
demandée, que les syndicats et les délégués du personnel aient accès aux
constatations de l'inspecteur du travail.
Je vous rappelle à cet effet, mes chers collègues, que notre demande s'inscrit
dans le droit fil d'une proposition formulée par le Conseil économique et
social dans son avis de janvier 1996 sur l'inspection du travail.
Par conséquent, je vous demande d'adopter notre amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
L'article L. 611-10 du code du travail prévoit que les
inspecteurs du travail constatent les infractions par des procès-verbaux
dressés en double exemplaire, dont l'un est envoyé au préfet et l'autre est
déposé au parquet.
Dans ces conditions, on peut s'interroger sur la rédaction comme sur l'objet
de l'amendement. Les auteurs n'auraient-ils pas dû faire référence aux
procès-verbaux plutôt qu'aux constatations ?
Par ailleurs, il semble peu opportun de faire interférer l'action des
représentants du personnel avec celle des inspecteurs du travail. Ceux-ci
doivent rester indépendants de toute pression et conserver la maîtrise de leurs
décisions.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Les constatations des procès-verbaux des inspecteurs du travail sont des
pièces de procédure qui n'ont intrinsèquement aucune portée tant que le
procureur de la République n'a pris aucune décision de renvoi devant une
juridiction.
Ce genre de pièces n'est d'ailleurs pas visé par la loi n° 78-753 du 17
juillet 1978 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les
administrations modifiée par la loi du 13 avril 2000.
Elles ne sont par conséquent pas communicables, et la proposition ne peut être
retenue.
Dans le cadre d'une procédure pénale, les victimes, les organisations
syndicales, si elles ont un intérêt à agir, peuvent se constituer partie civile
en vue de demander réparation. Elles ont alors accès au dossier complet de
l'affaire.
En toute hypothèse, les procès-verbaux de l'inspecteur du travail sont des
documents qui ne sont communicables ni aux tiers, ni même aux victimes, ni,
sauf exception prévue par la loi, aux prévenus. Il ne peut donc être envisagé
qu'ils soient tenus à la disposition des délégués du personnel ou des
organisations syndicales. Ces derniers peuvent, le cas échéant, se faire
communiquer les références d'un procès-verbal par l'inspecteur du travail en
vue de la constitution de partie civile.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 17, MM. Muzeau, Fischer et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 4, un article
additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 611-9 du code du travail est complété par un alinéa ainsi
rédigé :
« Les inspecteurs du travail peuvent se faire communiquer tout document ou
tout élément d'information, quel qu'en soit le support, utile à la constatation
de faits susceptibles de permettre d'établir l'existence ou l'absence d'une
méconnaissance des articles L. 122-45 et L. 123-1 du présent code et de
l'article 225-2 du code pénal. »
La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau.
Notre amendement a pour objet d'élargir l'accès des inspecteurs du travail à
tous les documents qu'ils estimeront nécessaires à l'accomplissement de leur
enquête.
Il convient en effet de permettre à l'inspection du travail d'être plus
efficace en matière d'enquête sur les discriminations.
Actuellement, les inspecteurs du travail ne peuvent pas, par exemple, avoir
accès aux dossiers personnels des salariés, l'employeurs pouvant refuser de
présenter les fiches d'appréciation des salariés ayant saisi l'inspection du
travail en raison d'une discrimination.
Or on sait très bien que la réalité d'une pratique discriminatoire est très
difficile à établir pour la personne qui en est la victime.
Par conséquent, il convient de doter l'inspection du travail des moyens
nécessaires pour effectuer cette mission.
Nous vous demandons donc, mes chers collègues, d'accueillir favorablement
notre amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Cet amendement vise à donner une nouvelle compétence aux
inspecteurs du travail, qui pourraient ainsi exiger communication de tout
élément utile à la constatation de l'existence de discrimination. Ce faisant,
il modifie la mission des inspecteurs du travail, à qui il reviendra non plus
seulement de constater, à travers des procès-verbaux, des infractions à la
législation interdisant les discriminations, mais aussi, si l'on comprend bien
le sens de cet amendement, de rechercher ces infractions.
La commission est défavorable à cet amendement, car elle considère que cette
évolution ne répond à aucune nécessité. Elle vous propose par conséquent d'en
rester à l'architecture de la proposition de loi, qui privilégie l'action des
victimes appuyées par leurs représentants.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement. En
effet, dès lors que les prérogatives de l'inspection du travail sont étendues
en ce qui concerne la constatation des situations discriminatoires, il convient
de prévoir que les inspecteurs du travail sont habilités à se faire communiquer
tout document et, plus généralement, tout élément d'information, quel qu'en
soit le support, en vue d'établir ou d'écarter des faits susceptibles d'être
qualifiés de discriminatoires.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, repoussé par la commission et accepté par
le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 18, MM. Muzeau, Fischer et les membres du groupe communiste
républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 4, un article
additionnel ainsi rédigé :
« Dans l'avant-dernier alinéa de l'article L. 620-3 du code du travail, les
mots : "est tenu" sont remplacés par les mots : "et un registre d'embauche sont
tenus". »
La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau.
Nous souhaitons, par le biais de cet amendement, donner à une personne victime
de discrimination toutes les chances de faire valoir ses droits.
En effet, pour une personne isolée à la recherche d'un emploi, apporter la
preuve d'une discrimination à l'embauche représente une difficulté quasiment
insurmontable. Pour prouver qu'elle a été victime de pratiques discriminatoires
lors de la procédure d'embauche, ses seules déclarations se révèlent
insuffisantes devant le juge.
Par conséquent, nous proposons que l'employeur ait l'obligation de tenir un
registre des embauches comportant un certain nombre de renseignements. Ce
registre serait tenu à la disposition de l'inspection du travail et des
délégués du personnel, comme le registre unique du personnel. La transparence
des procédures d'embauche serait donc accrue, ce qui, vous en conviendrez, mes
chers collègues, ne serait pas du luxe dans certains cas.
L'intérêt de ce registre d'embauche est de constituer un élément de dissuasion
et, le cas échéant, un élément de preuve permettant un suivi et une évaluation
de la politique d'embauche d'une entreprise, sans porter atteinte à la liberté
de recrutement de l'employeur.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Outre le fait que l'objet de cet amendement est sans rapport
avec celui de la proposition de loi - c'est un cavalier ! - on peut observer
que son utilité est discutable, puisque le premier alinéa de l'article L. 620-3
du code du travail prévoit que les noms et prénoms de tous les salariés occupés
doivent figurer sur le registre unique du personnel dans l'ordre d'embauchage.
On ne voit pas pourquoi on mettrait en place un deuxième registre.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Le Gouvernement est lui aussi défavorable à cet
amendement.
En effet, les discriminations à l'embauche doivent être appréhendées en tenant
compte du contexte actuel de simplification du droit du travail, qui est l'une
des priorités du Gouvernement. Dans ces conditions, il ne saurait être envisagé
de créer un nouveau registre.
En outre, cet amendement ne définit pas ce que serait le registre des
embauches. A supposer qu'il soit mis en place, sa valeur probante serait très
faible, car un employeur pourrait ne pas y mentionner certaines candidatures
alors que les victimes d'une discrimination à l'embauche disposeraient de
preuves de nature à établir la réalité de la procédure de sélection.
Les auteurs de la proposition de loi, soucieux de concilier les priorités du
Gouvernement que sont la lutte contre les discriminations et la simplification
administrative, ont déjà prévu un ensemble de dispositions suffisamment fortes,
telles que l'aménagement des règles de la charge de la preuve, l'action de
substitution des organisations syndicales, l'extension des pouvoirs des
délégués du personnel ou des inspecteurs du travail : j'ai le sentiment que
l'ajout d'une nouvelle formalité n'est pas nécessaire.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 5
M. le président.
« Art. 5. - L'article L. 140-8 du code du travail est ainsi rédigé :
«
Art. L. 140-8
. - En cas de litige relatif à l'application du présent
chapitre, les dispositions du cinquième alinéa de l'article L. 123-1
s'appliquent. » -
(Adopté.)
Article 6
M. président.
« Art. 6. - I. - L'intitulé de la section 1 du chapitre III du titre Ier du
livre V du code du travail est ainsi rédigé : "Electorat, éligibilité et
établissement des listes électorales et des listes de candidatures".
« II. - Après le paragraphe 3 de la même section 1, il est inséré un
paragraphe 4 ainsi rédigé :
«
4. - Etablissement des listes de candidatures.
«
Art. L. 513-3-1
. - La déclaration de candidature résulte du dépôt à
la préfecture d'une liste dans les conditions fixées par décret.
« Ne sont pas recevables les listes présentées par un parti politique ou par
une organisation prônant des discriminations fondées notamment sur le sexe, les
moeurs, l'orientation sexuelle, l'origine, la nationalité, la race,
l'appartenance à une ethnie ou les convictions religieuses, et poursuivant
ainsi un objectif étranger à l'institution prud'homale. »
« III. - L'article L. 513-10 du code du travail est ainsi rédigé :
«
Art. L. 513-10
. - Les contestations relatives à l'électorat sont de
1a compétence du tribunal d'instance qui statue en dernier ressort. »
« IV. - Il est inséré, dans le code du travail, un article L. 513-11 ainsi
rédigé :
«
Art. L. 513-11
. - Les contestations relatives à l'éligibilité, à la
régularité et à la recevabilité des listes de candidats à l'élection des
conseillers prud'hommes, ainsi qu'à la régularité des opérations électorales,
sont de la compétence du tribunal d'instance qui statue en dernier ressort.
Elles peuvent être portées devant ledit tribunal, avant ou après le scrutin,
par tout électeur ou mandataire d'une liste relevant du conseil de prud'hommes
pour lequel la contestation est formée, le préfet ou le procureur de la
République, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 13, le Gouvernement propose, dans le second alinéa du texte
présenté par le paragraphe II de cet article pour l'article L. 513-3-1 du code
du travail, de remplacer les mots : « présentées par un parti politique ou par
une organisation », par les mots : « présentées soit par un parti politique,
soit par une organisation ».
La parole est à M. le ministre.
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Cet amendement tend simplement à clarifier la rédaction
de l'article L. 513-3-1 nouveau, qui introduit dans le code du travail des
conditions de recevabilité de listes de candidats aux élections prud'homales.
Aucun parti politique, d'une part, et aucune organisation prônant des
discriminations, d'autre part, ne peut présenter de listes aux élections
prud'homales.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Monsieur le ministre, je vais rompre la monotonie du « contre
» puisque nous approuvons votre amendement. Il apporte en effet une
clarification que nous avions demandée, et l'avis de la commission ne peut donc
être que favorable.
M. Guy Fischer.
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, ainsi modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Article 7
M. le président.
« Art. 7. - I. - Il est inséré, au début du chapitre VIII de la loi n° 75-535
du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médicosociales, un
article 29-3 ainsi rédigé :
«
Art. 29-3
. - Dans les établissements et services mentionnés à
l'article 3 de la présente loi, le fait qu'un salarié ou un agent a témoigné de
mauvais traitements ou privations infligés à une personne accueillie ou relaté
de tels agissements ne peut être pris en considération pour décider de mesures
défavorables le concernant en matière d'embauche, de rémunération, de
formation, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion
professionnelle, de mutation ou de renouvellement du contrat de travail, ou
pour décider la résiliation du contrat de travail ou une sanction
disciplinaire.
« En cas de licenciement, le juge peut prononcer la réintégration du salarié
concerné si celui-ci le demande. »
« II. - Il est inséré, à la fin du titre III de la loi n° 89-475 du 10 juillet
1989 relative à l'accueil par des particuliers, à leur domicile, à titre
onéreux, des personnes âgées ou handicapées adultes, un article 17-1 ainsi
rédigé :
«
Art. 17-1
. - Les dispositions de l'article 29-3 de la loi n° 75-535
du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médicosociales sont
applicables aux salariés d'une personne ou d'un couple accueillant. »
Sur l'article, la parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Monsieur le ministre, je souhaiterais vous interroger à
propos de cet article 7, que j'ai déjà évoqué dans mon propos introductif et
qui prévoit la nullité du licenciement d'un salarié ayant témoigné de mauvais
traitements infligés à des patients ou relaté de tels agissements.
Compte tenu des dispositions concernant les médecins prévues par le projet de
loi de modernisation sociale actuellement en discussion, j'ai souligné la
nécessité de coordonner les deux dispositifs. Nombreux sont les parlementaires
qui ont été sensibilisés à ce problème grave, et je crois que nous souhaitons
tous apporter des solutions qui permettent de mettre un terme à cette situation
bizarre où des salariés ou des médecins sont sanctionnés pour avoir signalé des
mauvais traitements.
A cet égard, je voudrais attirer l'attention du Gouvernement sur le fait que
les rédactions proposées à cet article 7, comme à l'article additionnel après
l'article 28 du projet de loi de modernisation sociale, ne semblent pas
répondre suffisamment au problème. Nous estimons en particulier qu'une
référence explicite à l'article 226-14 du code pénal est nécessaire.
En outre, on peut s'interroger sur le choix des mots et juger que le terme : «
signalé » serait préférable à : « relaté ».
J'espère que le Gouvernement pourra nous apporter des précisions sur ce point,
dès maintenant ou au cours de la navette. La question est importante, puisqu'il
s'agit d'assurer la protection des plus faibles, et donc de remplir l'une des
missions essentielles de la loi.
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Monsieur le rapporteur, je ne puis vous apporter dès à
présent, au nom du Gouvernement, les précisions que vous souhaitez obtenir,
mais le travail parlementaire et la navette doivent nous permettre de bien
préciser cette volonté qui nous anime les uns et les autres.
Nous voulons - je le disais dans mon propos liminaire - à la lumière d'un
certain nombre d'événements tragiques qui se déroulent actuellement, que cesse
cette espèce de conspiration du silence, quelquefois engendrée par la crainte
de parler que peuvent éprouver un certain nombre de médecins ou de
professionnels.
Il nous faut à la fois choisir les articles de rattachement et préciser quelle
est l'intention du législateur, afin que ces pratiques tout à fait condamnables
ne puissent perdurer.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Je comprends bien, monsieur le ministre, le sens de votre
réponse. Je ne souhaitais d'ailleurs pas que nous fassions preuve de
précipitation, et je n'attendais donc pas une réponse définitive de votre part
ce soir. Je désire cependant que le Gouvernement s'empare du dossier et apporte
une solution au problème.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7.
(L'article 7 est adopté.)
Article 8
M. le président.
« Art. 8. - Un service d'accueil téléphonique gratuit est créé par l'Etat. Il
concourt à la mission de prévention et de lutte contre les discriminations
raciales. Ce service a pour objet de recueillir les appels des personnes
estimant avoir été victimes ou témoins de discriminations raciales. Il répond
aux demandes d'information et de conseil, recueille les cas de discriminations
signalés ainsi que les coordonnées des personnes morales désignées comme ayant
pu commettre un acte discriminatoire.
« Dans chaque département est mis en place, en liaison avec l'autorité
judiciaire et les organismes et services ayant pour mission ou pour objet de
concourir à la lutte contre les discriminations, un dispositif permettant
d'assurer le traitement et le suivi des cas signalés et d'apporter un soutien
aux victimes, selon des modalités garantissant la confidentialité des
informations.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités de transmission des
informations entre les échelons national et départemental ainsi que les
conditions d'organisation et de fonctionnement du dispositif départemental.
»
Par amendement n° 11, M. Souvet, au nom de la commission, propose d'insérer,
après le premier alinéa de cet article, un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« Le secret professionnel est applicable aux agents du service d'accueil
téléphonique dans les conditions prévues aux articles 226-13 et 226-14 du code
pénal. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 23, présenté par le
Gouvernement et tendant, dans le texte proposé par l'amendement n° 11 pour
insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article 8, après les mots : «
agents du service d'accueil téléphonique », à insérer les mots : « et à toutes
les personnes qui, au niveau local, sont chargées de traiter les signalements
transmis par ce service ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 11.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Cet amendement a pour objet de garantir le secret
professionnel des agents amenés à faire fonctionner le service d'accueil
téléphonique. Compte tenu, notamment, du fait que le service peut être conduit
à recueillir les coordonnées de personnes morales désignées comme ayant pu
commettre un acte discriminatoire, cette précaution nous semble
indispensable.
M. le président.
La parole est à M. le ministre, pour défendre le sous-amendement n° 23 et pour
donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 11.
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Favorable à l'amendement n° 11 présenté par la
commission, le Gouvernement a déposé un sous-amendement visant à étendre le
secret professionnel à tous ceux qui, à l'échelon local, seront chargés de
traiter les signalements transmis par les écoutants du numéro d'appel gratuit.
C'est en effet à l'échelon départemental que des fuites d'informations seraient
le plus susceptibles d'être préjudiciables à l'appelant.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 23 ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Il s'agit là d'un enrichissement de notre amendement, et la
commission ne peut donc qu'être favorable à ce sous-amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 23, accepté par la commission.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 11, accepté par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 12, M. Souvet, au nom de la commission, propose de compléter
l'article 8 par un alinéa ainsi rédigé :
« L'affichage des coordonnées du service d'accueil téléphonique est
obligatoire dans tous les établissements mentionnés à l'article L. 200-1 ainsi
que dans les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales, les
établissements publics à caractère administratif, les organismes de sécurité
sociale et les autres organismes chargés de la gestion d'un service public
administratif. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La création d'un service d'accueil téléphonique n'a de sens
que si celui-ci est aisément accessible ; son existence doit donc être
connue.
Dans ces conditions, il est apparu nécessaire à la commission de prévoir
l'affichage de ses coordonnées dans les entreprises, ainsi que dans les
services publics, qui sont des lieux de passage mais aussi, de plus en plus,
des lieux de travail pour des salariés sous statut privé tels que contractuels
et titulaires d'un emploi-jeune ou d'un contrat emploi-solidarité.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Cet amendement soulève à mes yeux une légère
difficulté.
Certes, l'idée d'insister sur l'information du public s'agissant de
l'existence du numéro d'appel gratuit, le 114, est tout à fait intéressante. Le
Gouvernement s'est d'ailleurs efforcé de multiplier les supports pour faire
connaître ce numéro : 300 000 affiches et dépliants ont ainsi été diffusés
depuis l'ouverture du service, en mai 1999, et la circulaire commune du
ministre de l'emploi et de la solidarité et du ministre de l'intérieur en date
du 10 mai 1999 a donné pour instruction aux préfets de faire en sorte que ces
matériels d'information soient visibles dans tous les services publics, ainsi
que dans les mairies et les lieux où est reçu le public. De plus, tous les
médias doivent être utilisés pour faire connaître le 114, et bon nombre d'entre
eux le sont déjà, qu'il s'agisse des journaux municipaux, des panneaux
d'affichage, des radios locales, des télévisions régionales ou des sites
intranet ou I nternet.
Cependant, monsieur le rapporteur, une fois affirmée la nécessité d'afficher
le numéro d'appel gratuit dans tous les lieux publics ou recevant du public,
comment faire respecter cette disposition ? Quelle sanction prévoir en cas de
défaut d'affichage ? Il s'agit là d'un point un peu délicat, qui me conduit à
m'en remettre à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 8
M. le président.
Par amendement n° 14, le Gouvernement propose d'insérer, après l'article 8, un
article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le premier alinéa de l'article L. 767-2 du code de la sécurité sociale
est ainsi rédigé :
« Le fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les
discriminations met en oeuvre des actions visant à l'intégration des
populations immigrées ou issues de l'immigration résidant en France ainsi qu'à
la lutte contre les discriminations dont elles pourraient être victimes. »
« II. - En conséquence, dans le deuxième alinéa du même article, les mots :
"le fonds d'action sociale" sont remplacés par les mots : "le fonds d'action et
de soutien". »
La parole est à M. le ministre.
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Créé en 1959, le Fonds d'action sociale pour les
travailleurs immigrés et leurs familles, le FASTIF, dont le champ
d'intervention était initialement limité au logement et à l'aide sociale en
direction des immigrés, a vu celui-ci s'étendre aux domaines de la culture, de
l'emploi et de la formation.
Le présent article vise à tirer les conséquences de l'extension du champ
d'intervention du FASTIF au soutien à l'intégration et à la lutte contre les
discriminations, à étendre ses actions aux populations issues de l'immigration,
notamment lorsqu'elles sont victimes de discriminations, et à modifier en
conséquence la dénomination du FASTIF, qui deviendrait le FASID, le fonds
d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les
discriminations.
L'extension du champ d'intervention du FASTIF à la lutte contre les
discriminations trouve sa place dans la présente proposition de loi, dans la
mesure où il a été décidé à l'Assemblée nationale d'introduire un article
fixant les conditions de fonctionnement du service d'accueil téléphonique et de
son articulation avec les commissions départementales d'accès à la
citoyenneté.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
J'avais indiqué dans mon propos liminaire que la commission
avait émis un avis favorable sur cet amendement. Elle n'a pas changé d'avis
depuis !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la
proposition de loi, après l'article 8.
Par amendement n° 22, M. Domeizel et les membres du groupe socialiste et
apparentés proposent d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi
rédigé :
« I. - Le deuxième alinéa de l'article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet
1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est ainsi rédigé :
« Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les
fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, syndicales,
philosophiques ou religieuses, de leur sexe, de leur origine, de leur
orientation sexuelle, de leur patronyme, de leur état de santé, de leur
apparence physique, de leur handicap ou de leur appartenance à une ethnie ou
une race. »
« II. - Après le sixième alinéa (1°) du même article, insérer un alinéa ainsi
rédigé :
« ... Le fait qu'il a formulé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou
engagé une action en justice visant à faire respecter les principes énoncés au
deuxième alinéa du présent article ; ».
La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel.
S'agissant de cet amendement, je souhaiterais tout d'abord apporter une
précision technique : il est adossé à la rédaction actuelle de l'article 6 de
la loi de 1983 portant statut des fonctionnaires. Cette rédaction n'est
toutefois que provisoire, puisque les dispositions de cet article 6 font
actuellement l'objet d'une refonte dans la proposition de loi relative à
l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, qui est encore en
navette entre les deux assemblées. Il aurait été possible d'adosser cet
amendement au nouveau texte prévu par la proposition de loi, mais celle-ci
n'est évidemment pas encore promulguée. Aucune solution n'apparaissant
meilleure que l'autre, nous avons décidé de nous en tenir là pour le moment
afin de préserver l'essentiel, qui est à nos yeux le fond du texte. Nous aurons
l'occasion, si besoin est, de revenir sur la forme lors de la navette.
Il s'agit donc à la fois d'une question de mise en conformité avec le droit
européen, qui a récemment évolué, et, surtout, de principe.
Le droit communautaire a été marqué en 2000 par l'adoption de deux directives
essentielles en matière d'égalité de traitement entre les personnes : la
directive 2000/43 du Conseil en date du 29 juin, relative à la mise en oeuvre
du principe d'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de
race ou d'origine ethnique, et la directive 2000/78 du Conseil du 27 novembre,
portant création d'un cadre général pour favoriser l'égalité de traitement en
matière d'emploi et de travail. Ces deux directives incluent expressément
l'administration dans leur champ d'application.
Il en résulte qu'il est maintenant nécessaire de modifier les dispositions du
statut des fonctionnaires inscrites actuellement à l'article 6, qui posent le
principe de l'égalité de traitement et énoncent les motifs interdisant toute
distinction entre les fonctionnaires. Les mentions de l'origine, de
l'orientation sexuelle, du patronyme et de l'apparence physique doivent donc y
être visées.
Il est aussi nécessaire de protéger l'agent qui viendrait à exercer un
recours, d'où les dispositions du paragraphe II de l'amendement.
Par ailleurs, sur le plan strictement français, il est bien évident que nous
ne pouvons envisager d'oublier les fonctionnaires dans la mise en oeuvre de
dispositions de lutte contre les discriminations. Même protégés par leur
statut, ceux-ci sont exposés, comme les autres salariés - j'en ai parlé lors de
mon intervention dans la discussion générale - à d'éventuelles discriminations,
dès le recrutement, mais surtout dans le déroulement de leur carrière.
Il est donc fondamental, sur le plan de l'équité et de l'égalité des citoyens,
d'inclure les fonctionnaires dans le champ d'application de cette proposition
de loi. C'est une question de principe, sur laquelle il nous paraît nécessaire
que le Sénat se prononce de manière claire dès la première lecture.
Tel est l'objet de cet amendement, que nous maintenons. Je dis « que nous
maintenons » car, ce matin, en commission, nous avons eu une longue
discussion.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet,
rapporteur.
La situation est complexe.
Le présent amendement vise à compléter l'article 6 de la loi du 13 juillet
1983 afin de prévoir que les fonctionnaires ne peuvent faire l'objet de
discriminations fondées sur leur origine, leur orientation sexuelle, leur
patronyme, leur apparence physique ou leur race. Par ailleurs, il prévoit que
le fonctionnaire ne peut faire l'objet de discriminations dans son emploi au
motif qu'il aurait formulé un recours fondé sur des discriminations dont il
aurait été victime.
On peut remarquer que si cet amendement complète les dispositions relatives
aux discriminations dans le droit de la fonction publique, il ne va pas jusqu'à
aménager le régime de la charge de la preuve. Les entreprises et les
administrations ne seront donc pas soumises au même régime.
Par ailleurs, l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 a déjà été modifié par
la proposition de loi relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et
les hommes, qui est en cours de discussion. Cet amendement apparaît
incompatible avec la nouvelle rédaction adoptée. En effet, l'article 14
ter
de ladite proposition de loi a supprimé la référence au sexe dans le
deuxième alinéa de l'article 6 afin d'évoquer les discriminations fondées sur
le sexe dans un article 6
bis
. Il semble donc nécessaire, et par
coordination, de supprimer cette mention dans le texte proposé par le
paragraphe I de cet amendement.
Le même article 14
ter
a également supprimé les quatre derniers alinéas
de l'article 6. La disposition prévue par le paragraphe II n'a donc plus de
support.
Enfin, on doit observer qu'elle ne s'inscrit pas correctement, puisque les
dispositions supprimées, que l'on trouve à l'article 6
ter,
sont
relatives à la lutte contre le harcèlement sexuel.
Dans ces conditions, la commission n'a pu, et ne peut envisager d'émettre un
avis favorable que pour les dispositions prévues par le paragraphe I, sous
réserve que la mention relative au sexe soit supprimée et qu'une référence à
l'âge soit ajoutée, au besoin, par la voie d'un sous-amendement que la
commission est prête à déposer.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
L'article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983
portant droits et obligations des fonctionnaires pose le principe d'égalité de
traitement des fonctionnaires et énonce les motifs qui interdisent toute
distinction entre eux.
L'application des directives des 29 juin 2000 et 27 septembre 2000 conduit à
des modifications qui visent à compléter la liste des motifs qui interdisent
toute distinction par l'orientation sexuelle ou la race, en précisant, par
ailleurs, qu'aucune distinction ne saurait être opérée de façon directe ou
indirecte.
L'article 6 doit également être complété par des dispositions visant à la
protection de tout agent qui viendrait à formuler une plainte auprès de sa
hiérarchie ou à engager une action en justice à la suite d'agissements
contraires aux garanties énoncées à ce même article, à en témoigner ou à les
relater.
Le Gouvernement n'émet pas d'objection sur ces modifications.
Pour autant, je tiens à signaler à M. Domeizel que les partenaires sociaux
doivent absolument être consultés sur une telle disposition.
Par ailleurs, je fais observer que la directive du 27 novembre 2000 doit être
transposée d'ici au 2 décembre 2003.
Cela étant dit, le Gouvernement s'en remet, là encore, à la sagesse du Sénat
compte tenu de votre proposition, monsieur le rapporteur, tendant à substituer
le mot « âge » au mot « sexe ». Je veux qu'il n'y ait aucune ambiguïté sur la
position du Gouvernement. L'introduction de cette notion de l'âge, nous paraît
importante. Toutefois, à partir du moment où l'on évoque l'âge, il faut bien
préciser l'intention du législateur. Sinon, pourquoi, demain, ne
connaîtrions-nous pas un certain nombre de recours en raison de l'interdiction
du travail avant seize ans, ou des recours à l'encontre d'une entreprise
prévoyant un plan de préretraite à partir de cinquante-cinq ans ? Certes, je le
reconnais, il s'agit d'une caricature, mais elle me permet de vous faire part
de l'orientation dans laquelle s'inscrit la réflexion du Gouvernement. Nous
voulons prendre le temps, afin de ne pas aboutir à un « monstre » législatif,
ce que personne ne souhaite dans cet hémicycle.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, je le répète, le Gouvernement s'en
remet à la sagesse du Sénat.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Dans ces conditions, je dépose le sous-amendement que j'ai
évoqué voilà quelques instants, monsieur le président.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 24, présenté par M. Sauvet, au nom
de la commission, et tendant :
I. - Dans le texte proposé par l'amendement n° 22 pour le deuxième alinéa de
l'article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juilllet 1983 portant droits et
obligations des fonctionnaires, à supprimer les mots : « de leur sexe ».
II. - Après les mots : « orientation sexuelle », à insérer les mots : « de
leur âge ».
III. - A supprimer le II de cet amendement.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Sagesse !
M. le président.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 24.
M. Claude Domeizel.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel.
Ce matin, en commission, j'ai expliqué la nécessité de retenir au moins le
paragraphe I - le paragraphe II sera sans doute repris dans la proposition de
loi relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
Ce matin, j'ai également fait part de mes réticences concernant la notion d'«
âge », et c'est la raison pour laquelle je me suis abstenu.
Cela étant dit, nous voterons les propositions qui nous sont faites.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 24, pour lequel le Gouvernement s'en
remet à la sagesse du Sénat.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la
proposition de loi, après l'article 8.
Intitulé de la proposition de loi
M. le président.
Par amendement n° 1, M. Souvet, au nom de la commission, propose de compléter
l'intitulé de la proposition de loi par les mots : « dans l'emploi ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet,
rapporteur.
Les discriminations ne se limitent pas seulement au lieu de
travail. Elles concernent aussi, par exemple, le logement, les loisirs, le
problème des boîtes de nuit que nous avons évoqué, monsieur le ministre, et
l'accès aux services publics.
La présente proposition de loi traite essentiellement les aspects relatifs aux
discriminations dans l'emploi, à l'exception d'un article relatif aux élections
prud'homales qui constitue une sorte de « cavalier », et ce n'est pas faire
injure que de le dire. Il n'y a, en particulier, aucune disposition relative au
logement.
Dans un souci de clarté, la commission propose de compléter l'intitulé de la
proposition de loi par les mots : « dans l'emploi ». L'intitulé ainsi modifié
correspond à l'intitulé de la section 1 du chapitre III du projet de loi de
modernisation sociale qui comprenait les quatre articles qui constituent le
texte initial de la proposition de loi.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le rapporteur a donné les raisons de la position du Gouvernement. Compte
tenu de l'existence de l'article 8 dont l'objet est la création d'un service
d'accueil téléphonique gratuit pour aider les victimes ou les témoins de
discriminations, le contenu de l'amendement proposé restreint le champ
d'application de la proposition de loi. En effet, ce service chargé, notamment,
de recueillir les appels des personnes estimant avoir été victimes ou témoins
de discriminations raciales n'est pas limité au seul champ de l'emploi. Les cas
de discrimination signalés peuvent concerner aussi bien l'accès aux biens et
aux services que le domaine de l'éducation par exemple. Par conséquent, nous
essayons d'avoir une position logique eu égard à cet article 8.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'intitulé de la proposition de loi est ainsi modifié.
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la
parole à M. Muzeau pour explication de vote.
M. Roland Muzeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous prenons
acte du fait que ce texte apporte de réels progrès dans la lutte contre les
discriminations.
Certaines avancées ont été obtenues lors de notre débat. Il en est ainsi de
l'élargissement de l'action des inspecteurs du travail pour l'accès à tous les
documents nécessaires à l'établissement de leur avis. Il en est de même de la
précision apportée à la notion de « race » et des conditions de la recevabilité
des listes de candidats aux élections prud'homales.
Malheureusement, trop d'amendements de la commission des affaires sociales
limitent la portée du texte. Pour nous, il ne peut être question de ne pas en
tenir compte. Cela nous conduit à constater, une nouvelle fois, que les efforts
législatifs visant à faire appliquer les droits des salariés et des
organisations syndicales sont estompés, voire supprimés.
Nous nous sommes opposés à l'essentiel de l'article 1er, à la totalité de
l'article 2 modifié par la majorité sénatoriale, ainsi que de l'article 4.
Nous souhaitons que l'Assemblée nationale rétablisse nombre de dispositions
initialement retenues.
Ainsi, nous, sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, sommes
contraints, en l'instant, de voter contre le texte ainsi modifié et nous en
appelons à nos collègues de l'Assemblée nationale pour rétablir l'avis que les
salariés ont émis depuis bien des années auprès du pouvoir législatif.
M. le président.
La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe
socialiste émettra un vote favorable sur ce texte, bien que ce dernier ait subi
ici quelques modifications avec lesquelles nous sommes en désaccord.
J'insisterai simplement sur les amendements relatifs à la modification de la
charge de la preuve. Personne n'a l'intention d'imposer de nouvelles charges,
aux petites entreprises notamment, mais ce qui pèse actuellement sur les
candidats à l'emploi et sur les salariés est, selon nous, d'une nature beaucoup
plus grave.
La discrimination, en matière d'emploi comme de logement, par exemple, est une
atteinte aux fondements de notre nation. C'est une atteinte à la dignité de la
personne qui en est victime et un obstacle à l'exercice de ses droits
fondamentaux. Cela mérite, à nos yeux, que chaque citoyen non seulement en soit
conscient, mais réalise, à la place qui est la sienne, la gravité de cette
situation.
Par ailleurs, nous savons tous, de manière empirique tout autant que par les
documents dont nous avons pris connaissance à l'occasion de ce débat, que la
discrimination est le plus souvent rampante et ne peut être prouvée qu'avec les
plus grandes difficultés en l'état actuel du droit. Il nous faut rétablir
l'équité.
Nous devons pour le moins donner aux parties la possibilité de faire jeu égal
devant le juge, et permettre à celui-ci de se forger une conviction sur
l'existence ou non d'une discrimination.
Nous avons observé par ailleurs avec satisfaction que M. le rapporteur a émis
un avis favorable sur notre amendement, certes sous-amendé, permettant
d'intégrer les fonctionnaires aux nouvelles garanties que nous mettons en
place.
Le texte qui nous vient de l'Assemblée nationale est très important sur le
plan du droit et des droits. Les modifications qui lui ont été apportées par la
majorité sénatoriale n'en dénaturent pas la force, même si elles visent à en
atténuer la portée pratique. C'est pourquoi, malgré nos divergences, nous
estimons qu'il importe de donner un signal fort en ne nous opposant pas à son
adoption.
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, je tiens à remercier le Sénat du travail qu'il a effectué.
Si nous sommes certes encore en désaccord sur un certain nombre de points,
nous voyons bien cependant quelle ligne sous-tend nos travaux tendant à mettre
un terme à ces actes de discrimination, notamment à l'embauche.
Néanmoins, mon souhait est bien que cette loi soit utilisée le moins possible.
Je souhaite en effet que l'intelligence l'emporte : à l'heure où certains chefs
d'entreprise se plaignent de ne pas trouver les salariés nécessaires pour faire
tourner leur entreprise, il leur appartient de contribuer au recul des
comportements de racisme à l'embauche. A l'heure où l'on prend conscience de
l'entrée de la France dans un cycle de vieillissement et de la nécessité de
porter une grande attention à la formation de nos jeunes, chacun doit se rendre
compte que vivent dans les quartiers populaires des jeunes qui ne sont pas tous
en situation d'échec scolaire, comme on essaie parfois de le faire accroire,
des jeunes qui ont un niveau de formation, qui ont poursuivi des études, qui
ont des diplômes et qui ne demandent qu'à travailler.
J'espère donc réellement que nous allons assister à la jonction de l'intérêt
des entreprises et de l'intelligence, et que ce texte sera perçu comme une
ligne jaune à ne pas franchir : moins on l'utilisera, plus cela prouvera que la
République aura su renforcer le respect de ses principes.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président.
Je note qu'il s'agit là du premier texte adopté par le Sénat à l'aube de cette
nouvelle année, de ce siècle et de ce nouveau millénaire.
M. Claude Bartolone,
ministre délégué.
Quel symbole !
8
COMMUNICATION DE L'ADOPTION DÉFINITIVE
DE TEXTES SOUMIS AU SÉNAT
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4
DE LA CONSTITUTION
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre une communication,
en date du 8 janvier 2001, l'informant de l'adoption définitive des trente-six
textes soumis en application de l'article 88-4 de la Constitution suivants :
N° E 838. - Proposition de directive instituant un cadre pour l'action
communautaire dans le domaine de l'eau (adopté le 23 octobre 2000).
N° E 1112. - Rapport de la Commission sur le code des douanes communautaires
suivi d'une proposition de règlement (CE) du Parlement européen et du Conseil
modifiant le règlement (CEE) n° 2913/92 établissant le code des douanes
communautaires (transit) (adopté le 16 novembre 2000).
N° E 1135. - Proposition de décision du Conseil modifiant la décision du 4
avril 1978 sur l'application de certaines lignes directrices dans le domaine
des crédits à l'exportation bénéficiant d'un soutien public (adopté le 22
décembre 2000).
N° E 1185 . - Proposition de décision du Conseil relative à l'application des
principes d'un accord-cadre en matière de financement de projets dans le
domaine des crédits à l'exportation bénéficiant d'un soutien public (adopté le
22 décembre 2000).
N° E 1205. - Proposition de décision du Conseil établissant un cadre
communautaire de coopération dans le domaine de la pollution marine
accidentelle (adopté le 20 décembre 2000).
N° E 1286. - Proposition de règlement (CE) du Conseil concernant la création
du système « Eurodac » pour la comparaison des empreintes digitales des
demandeurs d'asile et de certains autres étrangers (adopté par procédure écrite
achevée le 11 décembre 2000).
N° E 1314. - Proposition de règlement (CE) du Conseil concernant la compétence
judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et
commerciale (adopté le 22 décembre 2000).
N° E 1454. - Proposition de décision du Conseil relative à un programme
pluriannuel pour les entreprises et l'esprit d'entreprise 2001-2005. La
politique d'entreprise dans l'économie de la connaissance : communication de la
Commission (adopté le 20 décembre 2000).
N° E 1481. - Proposition de règlement du Conseil relatif à l'aide à l'Albanie,
à la Bosnie-Herzégovine, à la Croatie, à la République fédérale de Yougoslavie
et à l'ancienne République yougoslave de Macédoine et modifiant le règlement
(CEE) n° 3906/89. Proposition de règlement du Conseil relatif à l'Agence
européenne pour la reconstruction (adopté le 5 décembre 2000).
N° E 1489. - Proposition de décision du Conseil concernant la conclusion
d'accords sur le commerce des produits textiles avec certains pays tiers
(République du Belarus [Biélorussie], Royaume du Népal, ancienne République
yougoslave de Macédoine, Arménie, Azerbaïdjan, Géorgie, Kazakhstan, Moldova
[Moldavie], Tadjikistan, Turkménistan, Ouzbékistan, République populaire de
Chine, Ukraine, République arabe d'Egypte) (adopté le 4 décembre 2000).
N° E 1503. - Proposition de décision du Conseil relative au programme
concernant la stratégie communautaire en matière d'égalité entre les femmes et
les hommes (2001-2005). Vers une stratégie-cadre communautaire en matière
d'égalité entre les femmes et les hommes (2001-2005) : communication de la
Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social et
au Comité des régions (adopté le 20 décembre 2000).
N° E 1518. - Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE)
n° 2200/96 portant organisation commune des marchés dans le secteur des fruits
et légumes, le règlement (CE) n° 2201/96 portant organisation commune des
marchés dans le secteur des produits transformés à base de fruits et légumes et
le règlement (CE) n° 2202/96 instituant un régime d'aide aux producteurs de
certains agrumes (adopté le 4 décembre 2000).
N° E 1527. - Proposition de décision du Conseil portant adoption d'un
programme communautaire pluriannuel visant à encourager le développement et
l'utilisation de contenu numérique européen sur les réseaux mondiaux ainsi qu'à
promouvoir la diversité linguistique dans la société de l'information
[programme eContent] (adopté le 22 décembre 2000).
N° E 1532. - Proposition de décision du Conseil modifiant la décision
2000/24/CE afin de mettre en place un programme d'action spécial de la BEI pour
la consolidation et le resserrement de l'union douanière CE-Turquie (adopté le
4 décembre 2000).
N° E 1553. - Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil
relative au dégroupage de l'accès à la boucle locale (adopté le 18 décembre
2000).
N° E 1555. - Proposition de règlement du Conseil portant ouverture et mode de
gestion de contingents tarifaires communautaires autonomes pour certains
produits de la pêche [2001-2003] (adopté le 14 décembre 2000).
N° E 1557. - Proposition de règlement du Conseil relatif à la définition de la
notion de « produits originaires » et aux méthodes de coopération
administrative dans le commerce entre le territoire douanier de la Communauté
et Ceuta et Melilla (adopté le 5 décembre 2000).
N° E 1564. - Proposition de règlement (CECA, CEE, EURATOM) du Conseil
modifiant le statut des fonctionnaires et le régime applicable aux autres
agents des Communautés européennes en ce qui concerne les modalités
d'adaptation des rémunérations et la contribution temporaire : communication de
la Commission sur les rémunérations et pensions (adopté le 18 décembre
2000).
N° E 1566. - Proposition de décision du Conseil modifiant la décision
95/408/CE concernant les modalités d'établissement, pour une période
transitoire, de listes provisoires des établissements de pays tiers dont les
Etats membres sont autorisés à importer certains produits d'origine animale,
produits de la pêche et mollusques bivalves vivants (adopté le 19 décembre
2000).
N° E 1567. - Proposition de règlement du Conseil relatif à des actions
d'information et de promotion en faveur des produits agricoles sur le marché
intérieur (adopté le 19 décembre 2000).
N° E 1571. - Proposition de décision du Conseil concernant l'approbation d'un
accord sous forme d'échange de lettres entre la Communauté européenne et chacun
des pays de l'AELE donneurs de préférences tarifaires dans le cadre du SPG
(Norvège et Suisse), prévoyant que les marchandises originaires de Norvège ou
de Suisse seront traitées à leur arrivée sur le territoire douanier de la
Communauté européenne comme des marchandises incorporant un élément d'origine
communautaire (accord réciproque) (adopté le 5 décembre 2000).
N° E 1577. - Proposition de règlement du Conseil établissant certaines
concessions sous forme de contingents tarifaires communautaires pour certains
produits agricoles et prévoyant l'adaptation autonome et transitoire de
certaines concessions agricoles prévues dans l'accord européen avec la Lituanie
(adopté le 14 décembre 2000).
N° E 1578. - Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE)
n° 1255/96 portant suspension temporaire des droits autonomes du tarif douanier
commun sur certains produits industriels, agricoles et de la pêche (adopté le
14 décembre 2000).
N° E 1580. - Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE)
n° 1349/2000 établissant certaines concessions sous forme de contingents
tarifaires communautaires pour certains produits agricoles et prévoyant
l'adaptation autonome et transitoire de certaines concessions agricoles prévues
dans l'accord européen avec l'Estonie [introduction de règles de gestion des
contingents tarifaires destinés à être utilisés selon l'ordre chronologique des
dates de déclaration en douane] (adopté le 4 décembre 2000).
N° E 1586. - Proposition de décision du Conseil concernant la conclusion de
l'accord sous forme d'échange de lettres relatif à l'application provisoire du
protocole fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière
prévues dans l'accord entre la Communauté économique européenne et la
République de Côte d'Ivoire concernant la pêche au large de la Côte d'Ivoire,
pour la période du 1er juillet 2000 au 30 juin 2003 (adopté le 14 décembre
2000).
N° E 1588. - Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE)
n° 2007/2000 du Conseil en étendant à l'ancienne République yougoslave de
Macédoine et à la République fédérale de Yougoslavie les mesures commerciales
exceptionnelles en faveur des pays et des territoires participants et liés au
processus de stabilisation et d'association mis en oeuvre par l'Union
européenne et modifiant le règlement (CE) n° 2820/98. Proposition de décision
du Conseil concernant la suspension des dispositions commerciales et des
mesures d'accompagnement figurant dans l'accord de coopération signé le 29
avril 1997 entre la Communauté européenne et l'ancienne République yougoslave
de Macédoine (adopté le 20 novembre 2000).
N° E 1595. - Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE)
n° 2505/96 portant ouverture et mode de gestion de contingents tarifaires
communautaires autonomes pour certains produits agricoles et industriels
[ferrochrome, oscillateur, papier et carton kraft, masque plat] (adopté le 14
décembre 2000).
N° E 1601. - Proposition de décision du Conseil concernant la conclusion de
l'accord sous forme d'échanges de lettres relatif à l'application provisoire du
protocole fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière
prévues dans l'accord entre la Communauté européenne et le Gouvernement de la
République d'Angola sur la pêche au large de l'Angola pour la période du 3 mai
2000 au 2 mai 2002 (adopté le 14 décembre 2000).
N° E 1602. - Proposition de décision du Conseil concernant la conclusion de
l'accord sous forme d'échange de lettres relatif à l'application provisoire du
protocole fixant les possibilités de pêche et la compensation financière
prévues dans l'accord entre la Communauté économique européenne et le
Gouvernement de la République de Guinée équatoriale concernant la pêche au
large de la côte de la Guinée équatoriale pour la période du 1er juillet 2000
au 30 juin 2001 (adopté le 14 décembre 2000).
N° E 1605. - Proposition de décision du Conseil relative à la signature et à
l'application provisoire de l'accord sur le commerce de produits textiles entre
la Communauté européenne et la République de Croatie, paraphé à Bruxelles le 8
novembre 2000 (adopté le 22 décembre 2000).
N° E 1609. - Proposition de règlement du Conseil établissant certaines
concessions sous forme de contingents tarifaires communautaires pour certains
produits agricoles transformés et prévoyant l'adaptation autonome et
transitoire de certaines concessions agricoles prévues dans l'accord européen
avec la République de Pologne et abrogeant le règlement (CE) n° 3066/95 (adopté
le 22 décembre 2000).
N° E 1610. - Proposition de décision du Conseil concernant la signature, au
nom de la Communauté européenne, de l'accord sous forme d'échange de lettres
prorogeant et modifiant l'accord sur le commerce de produits textiles conclu
entre la Communauté européenne et l'Ukraine, et autorisant son application
provisoire (adopté le 19 décembre 2000).
N° E 1614. - Proposition de décision du Conseil concernant la conclusion d'un
accord sous forme d'échange de lettres relatif à l'application provisoire du
quatrième protocole fixant les conditions de pêche prévues dans l'accord en
matière de pêche entre la Communauté économique européenne, d'une part, et le
Gouvernement du Danemark et le gouvernement local du Groenland, d'autre part
(adopté le 14 décembre 2000).
N° E 1620. - Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE)
n° 1334/2000 en ce qui concerne l'exportation et les transferts
intracommunautaires des biens et technologies à double usage (adopté le 22
décembre 2000).
N° E 1621. - Projet de décision de la Commission modifiant la décision n°
2136/97/CECA de la Commission du 12 septembre 1997 relative à l'administration
de certaines restrictions à l'importation de certains produits sidérurgiques en
provenance de la Fédération russe : communication de la Commission - demande
d'avis conforme du Conseil et consultation du Comité CECA, au titre de
l'article 95 du traité CECA (adopté le 22 décembre 2000).
N° E 1622. - Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion de
l'accord sous forme d'échange de lettres entre la Communauté européenne et la
République tunisienne concernant les mesures de libéralisation réciproques et
la modification des protocoles agricoles de l'accord d'association
CE/République tunisienne (adopté le 22 décembre 2000).
9
TEXTES SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de décision du Conseil relative à la signature, au nom de la
Communauté européenne, d'un accord sous forme de protocole d'accord entre la
Communauté européenne et la République sociale démocratique de Sri Lanka
concernant des arrangements dans le domaine de l'accès au marché des produits
textiles et d'habillement, et autorisant son application provisoire.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1634 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des
règles communes dans le domaine de l'aviation et instituant une Agence
européenne de la sécurité aérienne (AESA).
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1635 et distribué.
10
DÉPÔTS RATTACHÉS POUR ORDRE
AU PROCÈS-VERBAL
DE LA SÉANCE DU 21 DÉCEMBRE 2000
DÉPÔT DE PROJETS DE LOI
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu le 3 janvier 2001 de M. le Premier ministre un
projet de loi autorisant l'approbation de la Convention d'entraide judiciaire
en matière pénale entre le gouvernement de la République française et le
gouvernement de la République dominicaine.
Ce projet de loi sera imprimé sous le n° 173, distribué et renvoyé à la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous
réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les
conditions prévues par le règlement.
M. le président du Sénat a reçu le 3 janvier 2001 de M. le Premier ministre un
projet de loi autorisant l'approbation de la Convention d'entraide judiciaire
en matière pénale entre le gouvernement de la République française et le
gouvernement de la République argentine.
Ce projet de loi sera imprimé sous le n° 174, distribué et renvoyé à la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous
réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les
conditions prévues par le règlement.
M. le président du Sénat a reçu le 3 janvier 2001 de M. le Premier ministre un
projet de loi autorisant l'approbation de la Convention d'entraide judiciaire
en matière pénale entre le gouvernement de la République française et le
gouvernement de la République de Cuba.
Ce projet de loi sera imprimé sous le n° 175, distribué et renvoyé à la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous
réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les
conditions prévues par le règlement.
DÉPÔT DE TEXTES SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
M. le président du Sénat a reçu le 22 décembre 2000 de M. le Premier ministre
le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de
l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de règlement concernant la conclusion du protocole fixant les
possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues dans l'accord entre
la Communauté européenne et le gouvernement de la République d'Angola sur la
pêche au large de l'Angola, pour la période du 3 mai 2000 au 2 mai 2002.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1625 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu le 22 décembre 2000 de M. le Premier ministre
le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de
l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le
règlement (CEE) n° 881/92 du Conseil concernant l'accès au marché des
transports de marchandises par route dans la Communauté exécutés au départ ou à
destination du territoire d'un Etat membre, ou traversant le territoire d'un ou
de plusieurs Etats membres, dans le but d'instaurer une attestation de
conducteur uniforme.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1626 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu le 26 décembre 2000 de M. le Premier ministre
le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de
l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant les
principes généraux et les prescriptions générales de la législation
alimentaire, instituant l'Autorité alimentaire européenne et fixant des
procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1627 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu le 26 décembre 2000 de M. le Premier ministre
le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de
l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de décision du Conseil relative à la signature, au nom de la
Communauté, d'un protocole additionnel à l'accord européen établissant une
association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une
part, et la République de Hongrie, d'autre part, sur l'évaluation de la
conformité et l'acceptation des produits industriels. Proposition de décision
du Conseil relative à la conclusion d'un protocole additionnel à l'accord
européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs
Etats membres, d'une part, et la République de Hongrie, d'autre part, sur
l'évaluation de la conformité et l'acceptation des produits industriels.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1628 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu le 26 décembre 2000 de M. le Premier ministre
le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de
l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de décision du Conseil relative à la signature, au nom de la
Communauté, d'un protocole additionnel à l'accord européen établissant une
association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une
part, et la République tchèque, d'autre part, sur l'évaluation de la conformité
et l'acceptation des produits industriels. Proposition de décision du Conseil
relative à la conclusion d'un protocole additionnel à l'accord européen
établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats
membres, d'une part, et la République tchèque, d'autre part, sur l'évaluation
de la conformité et l'acceptation des produits industriels.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1629 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu le 28 décembre 2000 de M. le Premier ministre
le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de
l'article 88-4 de la Constitution :
Directive 2000/XX/CE de la Commission relative à la concurrence dans les
marchés des services de communication électroniques.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1630 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu le 28 décembre 2000 de M. le Premier ministre
le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de
l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1260/1999
portant dispositions générales sur les fonds structurels. Proposition de
règlement du Conseil modifiant, en ce qui concerne les mesures en matière
structurelle, le règlement (CEE) n° 3763/91 portant mesures spécifiques
concernant certains produits agricoles en faveur des départements d'outre-mer.
Proposition de règlement du Conseil modifiant, en ce qui concerne les mesures
en matière structurelle, le règlement (CEE) n° 1600/92 relatif à des mesures
spécifiques concernant certains produits agricoles en faveur des Açores et de
Madère. Proposition de règlement du Conseil modifiant, en ce qui concerne les
mesures en matière structurelle, le règlement (CEE) n° 1601/92 relatif à des
mesures spécifiques concernant certains produits agricoles en faveur des îles
Canaries. Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n°
2792/1999 définissant les modalités et conditions des actions structurelles
dans le secteur de la pêche.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1631 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu le 28 décembre 2000 de M. le Premier ministre
le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de
l'article 88-4 de la Constitution :
La prévention de la criminalité dans l'Union européenne : réflexion sur des
orientations communes et propositions en faveur d'un soutien financier
communautaire : communication de la Commission au Conseil et au Parlement
européen. Proposition de décision du Conseil établissant un programme
d'encouragement, d'échanges, de formation et de coopération dans le domaine de
la prévention de la criminalité (Hippokrates).
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1632 et distribué.
M. le président du Sénat a reçu le 28 décembre 2000 de M. le Premier ministre
le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de
l'article 88-4 de la Constitution :
Initiative des gouvernements de la République française, du Royaume de Suède
et du Royaume de Belgique visant à faire adopter par le Conseil une
décision-cadre relative à l'exécution dans l'Union européenne des décisions de
gel des avoirs ou des preuves - Communication des gouvernements : note de
transmission de la RP de la France, de la Suède et de la Belgique.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1633 et distribué.
11
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au mercredi 10 janvier 2001, à quinze heures et, éventuellement, le soir
:
1. Discussion de la proposition de loi (n° 415, 1999-2000), adoptée par
l'Assemblée nationale, modifiant la loi n° 83-583 du 5 juillet 1983 réprimant
la pollution par les navires.
Rapport (n° 163, 2000-2001) de M. Lucien Lanier, fait au nom de la commission
des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du
règlement et d'administration générale.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
2. Discussion de la proposition de loi (n° 287, 1999-2000), adoptée par
l'Assemblée nationale, relative à l'adoption internationale.
Rapport (n° 164, 2000-2001) de M. Nicolas About, fait au nom de la commission
des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du
règlement et d'administration générale.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
Proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en
deuxième lecture, tendant à la création d'une Agence française de sécurité
sanitaire environnementale (n° 140, 2000-2001) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 10 janvier 2001, à
dix-sept heures.
Projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième
lecture, portant règlement définitif du budget de 1998 (n° 23, 2000-2001) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 16 janvier 2001, à dix-sept
heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant règlement définitif
du budget de 1999 (n° 22, 2000-2001) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 16 janvier 2001, à dix-sept
heures.
Conclusions de la commission des lois sur :
1° La proposition de loi de M. Alain Vasselle et de plusieurs de ses collègues
relative au statut de l'élu local (n° 59 rectifié, 2000-2001) ;
2° La proposition de loi de M. Jacques Legendre et de plusieurs de ses
collègues tendant à assurer le maintien de la proportionnalité des indemnités
de tous les élus municipaux (n° 398, 1999-2000) ;
3° La proposition de loi de M. Jean-Claude Carle et de plusieurs de ses
collègues tendant à revaloriser les indemnités des adjoints au maire, des
conseillers municipaux, des présidents et vice-présidents d'un établissement
public de coopération intercommunale (n° 454, 1999-2000) ;
4° La proposition de loi de M. Serge Mathieu tendant à la prise en compte pour
l'honorariat des maires, maires délégués et maires adjoints, des mandats
accomplis dans différentes communes (n° 443, 1999-2000) ;
5° La proposition de loi de M. Jean Arthuis et des membres du groupe de
l'Union centriste visant à créer une indemnité de retour à l'emploi pour les
élus locaux (n° 98, 2000-2001) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
mercredi 17 janvier 2001, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 16 janvier 2001, à dix-sept
heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-huit heures trente-cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Droit du travail et activités des maîtrises de chant et de musique
982.
- 22 décembre 2000. -
M. Bernard Fournier
appelle l'attention de
Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité
sur les difficultés rencontrées par les maîtrises de musique et de chant et
engendrées par l'interprétation des textes relatifs au travail des enfants. Les
maîtrises tombent en effet sous le coup de la législation lorsqu'elles assurent
des spectacles dans lesquels les enfants se produisent, lorsque ces prestations
font l'objet de droit d'entrée pour les auditeurs. La présomption légale
découlant de l'application de l'article L. 762-1 du code du travail confère
ainsi aux maîtrises le statut d'employeur lorsqu'elles donnent des concerts.
Des mises en examen d'artistes ont eu lieu sur le fondement de la prohibition
du travail des enfants. Une insécurité juridique majeure est donc née de
l'application stricte des textes du droit du travail. S'il n'est pas question
de revenir sur la prohibition du travail des enfants, il lui demande de bien
vouloir lui préciser le cadre légal dans lequel les maîtrises peuvent continuer
à assurer des concerts où les enfants se produisent, lesquels constituent
nécessairement un volet capital de la formation de ces jeunes chanteurs et
musiciens.
Haut Conseil du secteur financier public et semi-public
983.
- 22 décembre 2000. -
Mme Marie-Claude Beaudeau
attire l'attention de
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie
sur la composition, la vocation, les missions du Haut Conseil du secteur
financier public et semi-public installé le 4 octobre 2000. Elle lui demande
s'il s'agit de la reconnaissance du pôle financier public créé en application
de la loi du 25 juin 1999, et structuré autour de la Caisse des dépôts et
consignations, et comprenant la Caisse nationale de prévoyance, La Poste, la
Banque de développement des petites et moyennes entreprises, les caisses
d'épargne et le Crédit foncier. Elle lui demande de lui préciser si ce « pôle »
aura bien pour vocation d'animer une forme importante du service public, de
l'épargne, du crédit au service du financement de l'emploi et de la formation,
ainsi que les premières actions instruites par le Haut Conseil. Elle lui
demande, après la première réunion de ce Haut Conseil, si les mesures définies
n'ont pas pour objectif de valoriser un système essentiellement fondé sur des
résultats et non sur la notion première d'intérêt public. Elle lui demande
également de lui faire connaître les raisons pour lesquelles ne figurent plus
dans la composition de ce « pôle » public la Banque de France, l'Agence
française de développement, et certains organismes de soutien au commerce
extérieur, à la recherche et celles justifiant l'absence dans le Haut Conseil
de représentants de la Caisse des dépôts et consignations, aux côtés de ceux de
la Caisse d'épargne.
Statut des personnels de Maison de la France
984.
- 22 décembre 2000. -
Mme Marie-Claude Beaudeau
demande à
M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation
de lui faire connaître les mesures qu'il envisage pour permettre aux personnels
de Maison de la France, travaillant en France ou dans différents pays
étrangers, de bénéficier des mêmes traitements, primes, du même avancement et
conditions de titularisation, que les personnels de la fonction publique.
Devenir de l'ingénierie publique
985.
- 22 décembre 2000. -
M. Bernard Fournier
appelle l'attention de
M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement
sur le devenir de l'ingénierie publique. Les ingénieurs intervenant dans ce
cadre remplissent des missions fondamentales de conseil auprès des
collectivités locales, assurant ainsi une assistance particulière au nom de
l'Etat, lequel est alors un partenaire aidant les communes et les
établissements de coopération intercommunale à respecter les contraintes de la
réglementation. L'ingénierie publique exerce donc des missions de solidarité de
l'Etat et d'impulseur des politiques publiques. Depuis le début 2000, des
interrogations se font jour, notamment dans la perspective de l'entrée de
l'ingénierie publique dans le champ concurrentiel au regard de l'applicabilité
de la directive européenne « Services » et de la réforme du code des marchés
publics. Les missions de l'ingénierie publique sont remises en cause de sorte
que les personnels et les élus locaux s'interrogent sur la pérennité de la
conception de l'action de l'Etat auprès des collectivités, d'une part, mais
aussi, d'autre part, quant à l'implantation de la présence de l'Etat sur le
territoire, notamment par le biais des subdivisions de l'équipement. Aussi il
le remercie de lui indiquer si l'Etat entend se désengager de ces missions
d'ingénierie publique, si la voie législative sera préférée à la réforme
réglementaire afin de permettre à la représentation nationale, et plus
particulièrement au Sénat, de se prononcer et de lui préciser enfin l'état de
la réflexion et des orientations du Gouvernement dans ce domaine.
Prise en charge des dialysés
986.
- 27 décembre 2000. -
M. René Marques
appelle l'attention de
Mme le secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés
sur le problème de la dialyse en France. Il lui indique qu'aujourd'hui les
traitements de dialyse dits « hors centre », c'est-à-dire à domicile et dans
les centres d'autodialyse, ont été largement développés et ont permis un
moindre coût de cette pathologie lourde. Il lui rappelle que la nécessité
d'augmenter le nombre de postes de dialyse en centre, soumis à la régulation
par la carte sanitaire, vient d'être reconnue, puisqu'un indice des besoins
plus large a été décidé par le secrétariat d'Etat à la santé et aux handicapés
en août 1999. Or, il lui indique que la Caisse nationale d'assurance maladie
(CNAM), dans les dernières propositions adoptées par le conseil
d'administration au cours de sa séance du7 novembre 2000, propose à l'agrément
du ministre des mesures de diminution de la valeur de l'acte de surveillance en
hémodialyse. En allant jusqu'au bout d'une logique de régulation strictement
comptable, il lui fait observer que la CNAM ne prend pas en compte les besoins
de santé publique de la population, puisque le traitement par hémodialyse est
indispensable à la vie de ces populations fragiles. Il lui précise que la
mesure de baisse de l'honoraire de surveillance d'hémodialyse représente 5,5 %
de décote, après une décote de 7,5 % intervenue il y a à peine plus de trois
ans pour le même acte médical. Il lui rappelle que l'acte de surveillance
d'hémodialyse constitue 90 % environ du chiffre d'affaires des néphrologues,
qui verraient ainsi leur spécialité touchée par une décote de 13 % en trois
ans. Il lui fait observer que cette évolution ne fait que correspondre à un
besoin de santé publique et touche une spécialité médicale très astreignante.
C'est la raison pour laquelle il lui demande quelles mesures elle compte
prendre pour remédier à cette situation inacceptable, s'agissant d'un problème
visant à la défense de la qualité des soins apportés au patient et d'une
réponse à un besoin en termes de santé publique, dont ni les professionnels
concernés ni les patients ne sauraient être les victimes.
Campagne de dépistage gratuit du cancer du sein
987.
- 29 décembre 2000. -
M. Philippe Nogrix
appelle l'attention de
Mme le secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés
sur l'annonce faite par le Gouvernement d'étendre à tous les départements
français le dépistage gratuit du cancer du sein. Il lui rappelle que la
campagne de dépistage du cancer du sein existe uniquement dans 32 départements
français et que la généralisation annoncée par le Gouvernement tarde à se
mettre en place. Il lui indique que ce retard est non seulement dommageable
pour les femmes des 65 départements qui ne peuvent en bénéficier, mais qu'il
risque également de perturber gravement les campagnes en cours dans les 32
départements pionniers. Il lui précise, en effet, que la direction générale de
la santé, pour se conformer aux recommandations scientifiques, a préconisé aux
radiologues participant à ce dépistage de réaliser pour chaque femme non plus
une mais deux incidences par sein, ce qui revient à doubler l'examen en
clichés, en temps, en consommables et en usure de matériel. Il lui indique que
pour cette modification technique la Caisse nationale d'assurance maladie des
travailleurs salariés (CNAMTS) a décidé de fixer la rémunération à 280 francs
alors qu'elle était précédemment à 250 francs (tarif en vigueur depuis 1992).
Il lui indique que l'évolution tarifaire est extrêmement faible alors que les
exigences ont pratiquement doublé depuis 1992, et que cet état de fait est
ressenti par les professionnels comme une véritable provocation, d'autant que
ce tarif a été fixé sans la moindre concertation avec les intéressés. Il lui
fait observer que dans les 32 départements pionniers les radiologues se sont
réellement investis dans cette opération de santé publique qui, financièrement,
n'était pas très intéressante pour eux puisque, dans le même temps, une
mammographie complète est tarifée à environ 434 francs. En conséquence, il lui
indique que dans ces départements, en situation de crise et de blocage risquant
de ruiner les campagnes en cours, la solution serait bien entendu la
généralisation du dépistage à la France entière avec fixation d'un tarif
raisonnable. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer si cette
généralisation du dépistage du cancer du sein va bientôt prendre effet.
Avenir des aides éducateurs de l'éducation nationale
988.
- 2 janvier 2001. -
M. Dominique Leclerc
souhaite attirer l'attention de
M. le ministre de l'éducation nationale
sur la situation des aides éducateurs. Il lui serait reconnaissant de bien
vouloir lui faire savoir comment il entend assurer l'avenir de ces salariés
recrutés au sein de son ministère à l'aide des emplois-jeunes et dont les
actions sont devenues indispensables au fonctionnement quotidien des écoles.
Couverture du département de l'Orne
par les réseaux de téléphonie mobile
989.
- 3 janvier 2001. -
M. Daniel Goulet
considérant l'engouement pour les téléphones portables et les négociations en
cours pour les attributions des autorisations pour les téléphones dits « de la
prochaine génération » souhaite attirer l'attention de
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie
sur la situation de certaines parties de la région de Basse-Normandie, et en
particulier sur le département de l'Orne, en butte à de graves et persistants
dysfonctionnements. En effet, notamment les zones de Tourouvre, de Vimoutiers,
de Sées, de Carrouges ne sont pas couvertes par les réseaux de téléphonie
mobile, quel que soit d'ailleurs l'opérateur. Il lui demande quelles mesures il
compte prendre pour remédier à cette situation intolérable.
Fermeture du centre de recherche d'Atofina à Levallois
990.
- 4 janvier 2001. -
M. Roland Muzeau
attire l'attention de
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie
sur les conséquences économiques et sociales qu'entraînerait la suppression du
centre de recherche d'Atofina à Levallois. Depuis la fusion l'an dernier des
groupes TotalFina et Elf donnant naissance à un des cinq plus grands groupes
mondiaux dans le domaine du pétrole et de la chimie, restructurations et plans
sociaux se sont succédé. Sur les 1 500 postes de recherche, 1 sur 3 est menacé
de suppression ou de transfert. L'émotion des cadres, techniciens, employés et
ouvriers est d'autant plus vive que les suppressions et délocalisations
interviennent dans un contexte de plusieurs années d'excellents résultats
financiers et de perspectives de commandes excellentes. Et, pourtant, Atofina
prévoit de fermer à Levallois son centre de recherche appliquée qui occupe 240
personnes recherchant, à partir des produits chimiques existants, des
applications socialement utiles, notamment dans le domaine de la protection de
notre environnement, tels que les substituts aux composants attaquant la couche
d'ozone, les moyens de traiter les eaux polluées, la neutralisation des rejets
produits par l'industrie papetière. Outre son utilité reconnue, ce centre n'est
en aucune façon en doublon avec les autres centres issus de la fusion _ Feluy
en Belgique et La Porte aux USA _ et personne ne conteste son intérêt
stratégique lié à sa position en région parisienne (c'est le seul centre de
recherche de la région dans ce domaine), à sa proximité avec le siège social, à
sa bonne desserte et aux synergies existantes avec la communauté scientifique
d'Ile-de-France (la troisième mondiale). Le maintien sur le site ou dans un
secteur proche de La Défense comporte beaucoup plus d'atouts que la
délocalisation et la dispersion, comme le démontre le résultat de l'audit
réalisé à la demande de l'intersyndicale. S'agissant, dans le cadre de la
production d'énergie, de recherche ayant des implications sur l'environnement,
le Gouvernement ne peut se désintéresser des effets négatifs d'une OPA (offre
publique d'achat) dont il a accepté le principe. Aussi lui demande-t-il ce
qu'il pense de la fermeture du centre de Levallois et quelles sont les
interventions qu'il compte entreprendre pour maintenir les emplois et les
activités de recherche dans la région.
Information des maires des petites communes
pour le passage à l'euro
991.
- 8 janvier 2001. -
M. Daniel Goulet
interroge le
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie
au sujet du passage à l'euro. En effet, la date d'entrée en vigueur de la
nouvelle monnaie européenne approche et les élus de petites communes
s'interrogent et interrogent leur sénateur. C'est ainsi qu'il souhaite répondre
à leurs questions et tenter de prévenir autant que faire ce peut les
difficultés d'application qui ne manqueront pas de surgir pour chaque Européen
concerné. C'est pourquoi il l'interroge. En effet, les maires des communes
rurales sont généralement moins dotés en documentations, en outils pédagogiques
et en informations que leurs homologues des autres villes. Par ailleurs, la
rédaction des documents d'information émanant de l'administration fiscale
laisse souvent le lecteur, même averti, perplexe et interrogatif quant à leur
signification exacte. Les maires des petites communes et les secrétaires de
mairie étant le relais naturel des administrés, il est indispensable de leur
fournir une information exploitable. C'est pourquoi il souhaite savoir quelles
dispositions spécifiques ont été prises pour l'information, l'apprentissage et
la formation de ces élus et de leurs administrés à l'usage de la monnaie
unique.
Redevance audiovisuelle
due par les centres de formation pour apprentis
992.
- 8 janvier 2001. -
M. Michel Doublet
attire l'attention de
Mme le secrétaire d'Etat au budget
sur la situation des centres de formation pour apprentis assujettis au paiement
de la redevance audiovisuelle pour les appareils utilisés à des fins pédagique.
Il lui demande dans quelles conditions les CFA peuvent bénéficier de la mise
hors champ de la redevance et s'ils sont considérés comme des établissements
publics de l'Etat.
Réparations en faveur des enfants de déportés non juifs
993.
- 9 janvier 2001. -
M. Philippe Richert
attire l'attention de
M. le Premier ministre
sur le décret n° 2000-654 du 13 juillet 2000 qui institue une mesure de
réparation au profit des orphelins dont les parents ont été victimes des
persécutions antisémites. C'est un geste important, et incontestablement une
avancée sur le chemin de la reconnaissance des souffrances endurées par les
enfants de déportés juifs. Mais il est important aussi de manifester un geste
envers les milliers d'autres déportés, notamment les résistants, qui ont été
victimes de graves atrocités. Aussi, il souhaiterait savoir ce que le Premier
ministre envisage en faveur des enfants de déportés non juifs.
Formation des professeurs
aux nouvelles technologies de l'information et de la communication
994.
- 9 janvier 2001. -
M. Fernand Demilly
attire l'attention de
M. le ministre de l'éducation nationale
à la fois sur la formation des professeurs aux NTIC (nouvelles technologies de
l'information et de la communication) et sur le statut des « aides éducateurs »
en charge des problèmes techniques liés aux NTIC dans les collèges. Les
départements, et en particulier le département de la Somme, fournissent un
effort financier considérable en faveur de l'équipement des collèges en NTIC.
L'effort consenti par les départements en faveur de l'équipement des collèges
en NTIC ne permettrait pas d'aboutir à des résultats satisfaisants si le
partenariat de l'éducation nationale faisait défaut. En effet, un tel projet
nécessite un effort de formation des professeurs avec pour corollaire des
décharges de service. Des « aides éducateurs » remplissent actuellement cette
mission dans nos collèges, à la satisfaction de tous. Ils ont cependant le
statut « d'emploi jeunes », statut trop aléatoire au regard des équipements mis
en place et de leurs missions. Les NTIC constituant un élément de la politique
gouvernementale en faveur de l'éducation, il lui demande s'il ne conviendrait
pas de créer dans la grille de la fonction publique de l'Etat - éducation
nationale - un grade permettant le recrutement de personnel qualifié qui serait
aux NTIC ce que sont les aides de laboratoires aux disciplines telles que les
sciences par exemple. Ces personnels seraient ainsi mieux formés, plus stables
dans leur poste, assurant ainsi une certaine pérennité au dispositif mis en
place. En conséquence, il souhaiterait connaître les mesures qu'il entend
prendre à ce sujet.