SEANCE DU 11 DECEMBRE 2000
M. le président.
Par amendement n° II-53, M. Delfau propose d'insérer, après l'article 48
duovicies,
un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le dernier alinéa (2°) de l'article 417 du code général des impôts est
rétabli dans la rédaction suivante :
« 2° Les autres vins doux naturels obtenus dans les communes ne bénéficiant
pas d'une telle appellation sur les exploitations ou par les caves coopératives
qui se livraient à leur préparation avant la publication de la loi du 28 août
1942 et ce, dans la limite des quantités produites annuellement avant cette
publication.
« II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées à due
concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Nous passons de France Télécom et des bases locatives aux vins doux naturels !
(Sourires.)
Je tiens à préciser d'emblée que cet amendement ne vise en rien à désavouer
l'effort de ceux des producteurs de vins doux naturels qui se sont organisés en
appellation d'origine. Au contraire, je redis que toute la viticulture du
Languedoc-Roussillon a besoin de renforcer son organisation économique pour
faire face à la concurrence. J'ai d'ailleurs plaidé en ce sens, pas plus tard
que la semaine dernière, lors de l'examen du budget de l'agriculture.
La mesure que je propose est de type conservatoire. Elle concerne, madame le
secrétaire d'Etat, un très petit nombre de viticulteurs - quelques dizaines -
et une production très faible - entre 8 000 et 10 000 hectolitres - de surcroît
limitée depuis une loi du 28 août 1942, que je ne propose pas d'abroger ; son
champ d'application ne peut donc être étendu.
De quoi s'agit-il ?
Cet amendement a pour objet de réintroduire les vins doux naturels sans
appellation parmi les produits intermédiaires bénéficiant du taux réduit prévu
à l'article 402
bis
du code général des impôts.
Actuellement, deux taux sont en vigueur pour le droit de consommation
applicable aux produits intermédiaires : 350 francs par hectolitre pour les
vins doux naturels et les vins de liqueur visés aux articles 417 et 417
bis
du code général des impôts ; 1 400 francs par hectolitre pour les autres
produits.
Dans sa rédaction initiale, c'est-à-dire avant 1996, l'article 417 du code
général des impôts visait non seulement les vins doux naturels à appellation
d'origine contrôlée, mais également les autres vins doux naturels obtenus, dans
les communes ne bénéficiant pas d'une telle appellation, sur les exploitations
ou par les caves coopératives qui se livraient à leur préparation avant la
publication de la loi du 28 août 1942, et ce dans la limite des quantités
produites annuellement avant cette publication.
L'article 29 de la loi de finances rectificative pour 1996 a supprimé la
deuxième catégorie à compter du 1er janvier 2000. Désormais, seuls les vins
doux naturels avec appellation bénéficient du taux réduit de 350 francs, les
autres étant soumis au droit normal, mais important, de 1 400 francs.
Il est permis de s'interroger sur le fondement et l'équité de cette double
fiscalité pour un même produit. En effet, les vins doux naturels sans
appellation ont une antériorité reconnue par la loi et un contingentement par
production. Par ailleurs, ils sont élaborés dans le strict respect des
conditions fixées par l'article 416 du code général des impôts pour la
dénomination « vins doux naturels ». Dès lors, comment expliquer la fiscalité
quatre fois plus élevée qui leur est appliquée ?
Déjà handicapés sur le plan commercial par l'absence d'appellation qu'ils
n'ont pu obtenir en raison de leur dispersion, les viticulteurs qui, depuis
quatre-vingts ans, de génération en génération, produisent ces vins doux
naturels suivant les usages et les traditions, vont subir une augmentation de
leur droit d'accise de plus de 300 %. A titre d'exemple, une exploitation de
100 hectolitres par an devra acquitter, cette année, un droit de 134 000 francs
au lieu de 35 000 francs.
Quelle exploitation pourrait absorber une telle hausse ? D'autant qu'elle ne
peut la répercuter sur le prix de vente au risque, sinon, de ne pas rester
concurrentielle par rapport aux producteurs de vins doux naturels avec
appellation.
Laisser la législation en l'état, c'est acculer à coup sûr des familles à la
faillite, c'est faire disparaître de nos régions un produit, à l'heure où l'on
défend la culture locale, l'identité régionale et le savoir-faire.
Cet amendement ne devrait révolutionner ni le budget ni le monde des vins,
puisqu'il ne concerne, encore une fois, qu'une faible quantité de production :
entre 8 000 et 10 000 hectolitres par an de vins doux naturels sans
appellation, à comparer avec les quelque 700 000 hectolitres de vins doux
naturels d'appellation d'origine contrôlée.
Au fond, en préservant l'idée générale qui est celle de l'organisation
économique, cet amendement tend à éviter qu'une application de la loi, tel un
couperet, n'accule à la ruine et à la faillite une dizaine ou une vingtaine de
familles dispersées dans tout le Languedoc-Roussillon.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Mes chers collègues, le sujet est complexe.
M. Jacques Machet.
Ils sont tous complexes !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission reconnaît tout d'abord que le coût
budgétaire de la mesure est minime, puisqu'il est compris entre 8,5 millions de
francs et 10,5 millions de francs, ce qui, à ses yeux, militerait pour un avis
favorable.
M. Gérard Delfau.
Merci, monsieur le rapporteur général !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cela étant, peut-être y a-t-il quelques obstacles
d'ordre communautaire.
A ce stade, seuls les vins doux naturels classés AOC peuvent prétendre au taux
réduit selon le règlement vitivinicole. Le collectif budgétaire pour 1996 avait
mis en conformité, sur ce point, le droit français avec le droit communutaire.
Madame la secrétaire d'Etat, pour le Gouvernement, est-il concevable d'obtenir
une modification de cette règle ?
Par ailleurs, la commission s'est interrogée sur l'existence de fabrications
analogues qui pourraient connaître les mêmes problèmes. Certes, il est mille
fois compréhensible que notre collègue M. Delfau pense en priorité aux vins
doux non classés AOC du Languedoc-Roussillon, mais il y a probablement, en
Charente, des vins doux qui sont soumis de la même manière au taux de 1 400
francs par hectolitre.
Parce que la commission s'est interrogée, elle souhaiterait connaître l'avis
du Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Comme l'a indiqué M. le rapporteur général, le
problème est très délicat.
Malheureusement, depuis 1996, le droit communautaire ne permet pas de traiter
les vins doux naturels non classés AOC comme les vins doux naturels AOC.
A l'époque, le Gouvernement, conscient des difficultés que pouvait provoquer
cette modification de la fiscalité pour les producteurs concernés, avait
maintenu un délai d'adaptation de trois ans pour l'entrée en vigueur de cette
disposition, qui est en effet applicable à compter du 1er janvier 2000.
Il me semble que la réponse au problème très réel qui est soulevé ici n'est
pas nécessairement, ou prioritairement, d'ordre fiscal, car nous sommes
contraints par une disposition de droit communautaire qui s'impose à nous.
Par conséquent, monsieur le sénateur, je me tiens à votre disposition pour
examiner les solutions éventuelles qui pourraient être apportées à cette
situation très particulière, dont, encore une fois, je doute qu'elles soient
principalement d'ordre fiscal. Je suis bien entendu prête à appeler l'attention
de mes collègues du Gouvernement si elles se trouvaient dans leur champ de
compétence et non pas dans le mien.
A ce stade, et consciente du fait que cette réponse ne vous satisfait
certainement pas, je vous demande de retirer votre amendement.
Encore une fois, le Gouvernement comprend bien le problème posé, mais la
solution n'est pas simple à mettre en oeuvre.
M. le président.
Monsieur Delfau, maintenez-vous l'amendement n° II-53 ?
M. Gérard Delfau.
Madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie d'abord de l'effort dont
témoigne votre réponse et de la reconnaissance que vous manifestez de la
réalité du problème non seulement sur le plan économique mais aussi sur le plan
humain.
J'ai, par ailleurs, bien conscience de l'obstacle que constitue le droit
communautaire. Mais le parlementaire que je suis pourrait vous citer maints
exemples d'évolutions,
in extremis
parfois, que notre pays a su imprimer
au droit communautaire devant une situation dont les conséquences lui
paraissaient inextricables.
Je crois comprendre, quand vous dites que la solution n'est peut-être pas
d'ordre fiscal, qu'il pourrait s'agir d'une reconversion du vignoble, pour
parler clair. Mais j'attire votre attention sur le coût de l'opération et sur
les investissements considérables qui sont à envisager, sans parler du manque à
gagner et du temps passé.
Madame la secrétaire d'Etat, je vous rappelle que nous parlons de cultures
pérennes, donc longues. Et pour quel gain, cette reconversion, madame la
secrétaire d'Etat ? Pour augmenter le marché déjà saturé des vins de table et
des vins de pays ? Votre gouvernement, à notre demande et à la demande des
producteurs de ma région, ne vient-il pas de demander à Bruxelles une
distillation obligatoire à un prix significatif ?
Donc, par quelque bout que l'on prenne ce problème, il demeure inextricable.
Mais, ce qui est sûr, c'est qu'une vingtaine de familles sur deux départements
vont se trouver ruinées.
Vous comprendrez bien qu'en tant que parlementaire je sois ému du sort de ces
familles, qui vivent sur leurs exploitations depuis, je le rappelle, une époque
antérieure à 1942, qui vendent leur production et qui ne coûtent rien au
contribuable. Quand on sera passé d'une fiscalité de 350 francs à une fiscalité
de 1 400 francs, ces producteurs, qui ne dégagent qu'une faible marge, seront
tout simplement ruinés.
Il est donc de mon rôle de parlementaire de vous alerter afin que nous
trouvions une solution. Le contraire serait impensable.
Peut-être faut-il négocier une prorogation ? Peut-être faut-il tout simplement
prévoir que cette fiscalité allégée s'éteindra avec le départ à la retraite des
viticulteurs actuellement en activité ? Bref, il y a sans doute une solution à
inventer.
Mais je vous le dis tout net, madame la secrétaire d'Etat, tout net mais avec
beaucoup de tranquillité, si votre représentant des services fiscaux de
l'Hérault ou de l'Aude, que je respecte, s'applique, ce qui sera son devoir, à
recouvrer cette taxe et crée ainsi une situation économique et humaine
insupportable, il sera de mon devoir, si je n'ai pas pu vous convaincre ce soir
de régler le problème, grâce à votre compréhension ou à celle de M. Glavany, de
manifester mon désaccord, ce que je ne souhaite pas faire puisque, vous l'avez
remarqué, je suis un fidèle soutien du Gouvernement !
Quoi qu'il en soit, pour l'heure, je retire l'amendement.
M. le président.
L'amendement n° II-53 est retiré.
Par amendement n° II-102, M. Miquel et les membres du groupe socialiste et
apparentés proposent d'insérer, après l'article 48
duovicies
, un article
additionnel ainsi rédigé :
« L'article 1522 du code général des impôts est ainsi rédigé :
«
Art. 1522
. - La taxe est établie d'après le nombre de mètres carrés
pondérés. »
La parole est à M. Miquel.
M. Gérard Miquel.
Cet amendement vise à modifier le système de calcul de la taxe d'enlèvement
des ordures ménagères, qui est aujourd'hui une taxe additionnelle à la taxe
foncière sur les propriétés bâties, ce qui présente deux inconvénients.
D'une part, l'obsolescence des bases de la taxe foncière est telle que les
cotisations peuvent varier fortement d'un logement à l'autre, pour des locaux
pratiquement identiques. L'archaïsme des bases est particulièrement
inacceptable s'agissant d'un impôt censé être la contrepartie d'un service.
D'autre part, l'assiette de la taxe foncière sur les propriétés bâties ne
correspond pas à l'objet de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères. Sont,
en effet, soumis à la taxe des locaux qui ne sont pas producteurs de déchets
ménagers.
Je vous rappelle, mes chers collègues, que les collectivités ont la charge des
déchets ménagers. Or les locaux commerciaux qui produisent des déchets
industriels banals sont parfois soumis à la taxe, mais peuvent aussi être
exonérés ou soumis à la redevance spéciale.
C'est pourquoi il serait préférable, selon nous, d'asseoir la taxe
d'enlèvement des ordures ménagères sur le nombre de mètres carrés pondérés des
habitations, ce qui permettrait de soumettre à la même cotisation tous les
logements présentant les mêmes caractéristiques.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement met l'accent sur un véritable problème
: l'assiette de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, qui est la même que
celle de la taxe foncière sur les propriétés bâties, n'est pas adaptée à cet
impôt, car sont soumis à la taxe, comme l'a souligné M. Miquel, des locaux qui
ne produisent pas de déchets ménagers.
Lors de l'examen des articles de la première partie de la loi de finances,
nous avons adopté un amendement permettant aux conseils municipaux d'exonérer
de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères les locaux qui ne sont pas des
habitations. Il s'agit d'un premier pas, à mon avis déjà significatif, dans le
sens de l'argumentation de M. Miquel.
Vous avez, il est vrai, mon cher collègue, relevé ce problème depuis bien
longtemps, puisque votre amendement reprend une proposition de loi que vous
aviez déposée en 1993 avec les membres du groupe socialiste. Il convient de
saluer cette constance !
La commission s'interroge toutefois sur la notion de « mètre carré pondéré ».
Nous n'avons pas trouvé de référence suffisamment incontestable pour que cette
notion puisse devenir le principe de base à partir duquel définir
l'applicabilité de la taxe, même si nous comprenons bien votre approche : il
s'agit de tenir compte de l'utilité réelle des locaux et des conditions
véritables d'utilisation de ceux-ci pour déterminer la quantité d'ordures
ménagères produites et devant être traitée par le service municipal ou
intercommunal d'enlèvement.
Ce doute quant à la clarté de la notion de mètre carré pondéré nous conduit à
demander l'avis du Gouvernement, qui pourra peut être nous faire profiter de
ses lumières en la matière. Si nous ne disposions pas de point de repère
précis, nous vous demanderions, monsieur Miquel, de bien vouloir réexaminer la
question et, après avoir retiré votre amendement, de chercher de tels points de
repère.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Monsieur Miquel, le Gouvernement comprend bien la
préoccupation que vous exprimez à travers cet amendement, mais je souhaite vous
faire observer que la législation actuelle intègre d'ores et déjà la notion de
surface imposable en ce qui concerne la taxe d'enlèvement des ordures
ménagères. A l'inverse, elle autorise la mise à contribution des redevables
proportionnellement au service rendu. C'est l'objet même de la redevance !
En ce qui concerne la taxe, elle est assise, comme la taxe foncière, sur les
propriétés bâties. La valeur locative qui sert de base à la taxe foncière, et
donc à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, est établie en tenant compte
de la superficie pondérée des locaux, puisque la valeur locative de référence
par catégorie de local exprime une valeur au mètre carré pondéré.
L'assiette actuelle de la taxe tient donc assez largement compte de ce
critère. Elle aboutit à faire payer davantage ceux qui disposent de propriétés
mieux situées ou plus luxueuses, classées dans les premières catégories, ce qui
semble aller, je crois, dans le sens d'une meilleure solidarité.
Cela étant, les collectivités qui entendent répartir les charges liées au
service de l'élimination des ordures ménagères en proportion des services qui
sont offerts aux usagers ont toujours la possibilité de substituer à la taxe
d'enlèvement des ordures ménagères la redevance du même nom, qui, elle, a pour
objet de prendre en compte la réalité du service rendu.
Il me semble donc que la différence de conception entre ces deux options qui
sont offertes aux collectivités locales répond assez bien aux objectifs de
votre amendement et, pour ces raisons, je souhaiterais que vous puissiez le
retirer, monsieur le sénateur.
M. le président.
Monsieur Miquel, l'amendement est-il maintenu ?
M. Gérard Miquel.
Madame la secrétaire d'Etat, j'ai bien entendu vos explications, mais, à mon
sens, l'inconvénient principal de la taxe apparaît lorsqu'elle s'applique sur
une structure intercommunale. En effet, s'il s'agit d'une communauté de
communes avec une commune-centre et des communes à la périphérie, les bases
varient de un à trois ; c'est donc un facteur d'injustice, le propriétaire
d'une maison située d'un côté de la route payant 500 francs alors que le
propriétaire d'une maison similaire située de l'autre côté de la route paie 1
500 francs. Ce n'est pas supportable, et c'est une entrave à
l'intercommunalité.
A l'heure où nous préconisons la mise en place de structures intercommunales
et où de telles structures deviennent de plus en plus nécessaires pour la
collecte et le traitement des déchets, notre système est complètement
inadapté.
Oui, la redevance existe et nous pouvons la mettre en place, mais nous
trouvons un avantage énorme à la taxe : grâce à sa perception, l'Etat assure
aux collectivités un certain produit, alors qu'avec la redevance nous nous
trouvons parfois confrontés à des impayés que nous n'arriverons pas à
recouvrer.
C'est la raison pour laquelle je souhaiterais que nous puissions travailler
avec vos services pour trouver une solution à ce problème, que j'évoque dans
cet hémicycle depuis maintenant sept ou huit ans, car toutes les collectivités
de notre pays sont confrontées à cette question.
Dans l'attente de cette solution, je vais retirer mon amendement, mais je vous
demande, madame la secrétaire d'Etat, de nous aider à trouver une solution
adaptée et je me propose de me mettre en rapport avec vos services pour essayer
de travailler sur ce dossier pour que, l'an prochain, nous puissions proposer
une solution particulièrement adaptée à ce problème, qui est devenu très urgent
pour l'ensemble des collectivités de notre pays.
M. le président.
L'amendement n° II-102 est retiré.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Je remercie M. Miquel d'avoir bien voulu retirer cet
amendement, et je lui confirme à haute et intelligible voix que mes services
sont tout à fait prêts à travailler avec lui en vue de l'élaboration d'une
solution à ce problème, dont je comprends bien l'acuité.
M. Michel Charasse.
Très bien !
M. le président.
Par amendement n° II-87 rectifié, MM. Belot, Joyandet et de Broissia
proposent, après l'article 48
duovicies
, d'insérer un article
additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le I de l'article 1647 E du code général des impôts, il est
inséré un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Le taux mentionné au I ci-dessus est fixé à 0,35 % à compter de
l'impôt dû au 1er janvier 2001 pour les entreprises de production d'oeuvres
cinématographiques et audiovisuelles. »
« II. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensée, à due
concurrence, par la création, au profit de l'Etat, d'une taxe additionnelle aux
droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Belot.
M. Claude Belot.
Cet amendement a pour objet de mettre fin à une anomalie.
Nous essayons d'encourager par tous les moyens possibles le maintien d'une
production audiovisuelle cinématographique française, nous parlons en
permanence d'exception culturelle, et je crois que nous sommes très nombreux
ici à soutenir ces productions.
Or nous observons qu'au lieu d'atteindre l'objectif fixé - la baisse de la
taxe professionnelle pour ces entreprises audiovisuelles - ces dernières ont vu
leur taxe professionnelle multipliée par cinq depuis trois ans, aux termes d'un
calcul quelque peu bizarre. En effet, on taxe deux fois la même chose, le stock
et ce qui est vendu, et on procède à l'application d'un pourcentage croissant
sur la valeur ajoutée.
Il est complètement incohérent de dire qu'il faut apporter de l'argent au
Centre national de la cinématographie, d'appeler les collectivités locales à
exonérer les cinémas de taxe professionnelle, pendant que, dans le même temps,
l'Etat, lui - qui n'obéit en l'espèce à aucune directive communautaire, madame
la secrétaire d'Etat ! -, augmente sans arrêt la taxe professionnelle à
laquelle est assujettie une profession extrêmement fragile, les fonctions que
j'occupe à la commission des finances me donnent l'occasion de le vérifier à
chaque instant.
Il faut mettre fin à cette situation. J'ai essayé d'en convaincre votre
administration, madame la secrétaire d'Etat, j'ai rencontré les personnes qui
suivent ces dossiers, mais je me suis heurté à une totale fin de
non-recevoir.
Au nom de la profession et au nom de la culture audiovisuelle française, qui
est dans une situation difficile, je souhaite réellement que soit trouvée une
solution. J'en ai proposé une. Je ne prétends pas qu'elle soit la seule, mais
je sais qu'il est nécessaire de sortir de cette incohérence qui consiste à
donner d'une main et à reprendre deux fois de l'autre.
M. Jacques Machet.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
L'amendement présenté par notre collègue Claude Belot
tend à maintenir à 0,5 % le taux de la cotisation minimale de taxe
professionnelle, que la réforme de 1999 porte progressivement à 1,5 % de la
valeur ajoutée.
Les auteurs de l'amendement ont raison de rappeler que les activités de
production cinématographique et audiovisuelle sont des activités à forte valeur
ajoutée.
Par ailleurs, nous croyons savoir que le ministère des finances a entrepris
une réflexion sur ces sujets, en particulier sur une question connexe, nous
a-t-on dit, pour comprendre les raisons pour lesquelles la taxe sur la valeur
ajoutée d'un certain nombre d'entreprises de production aurait considérablement
augmenté, voire explosé, au cours des dernières années.
L'amendement de notre collègue Claude Belot pose donc un problème
particulièrement digne de considération, pour toutes les raisons qu'il a
exposées. Il s'agit à ce stade, je pense, d'un amendement d'appel qui suppose,
madame le secrétaire d'Etat, que vous nous disiez comment vous abordez ce
problème, sachant que nous sommes là dans le cadre de cette exception
culturelle que nous voulons tous défendre et qui nécessite des acteurs
professionnels forts.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le sénateur, vous savez l'intérêt tout
particulier que porte le Gouvernement aux activités cinématographiques et
audiovisuelles sur les plans tant national qu'international.
Cependant, je ne peux pas être favorable à la proposition que vous formulez
dans l'amendement n° II-87 rectifié, dans la mesure où celui-ci vise à remettre
en cause le mécanisme de suppression progressive de la part « salaires » des
bases de la taxe professionnelle, qui avait été mis en place par la loi de
finances pour 1999, car la mesure proposée ne serait pas conforme aux principes
d'égalité devant les charges publiques s'agissant de dispositions très
spécifiques à un secteur donné.
M. le rapporteur général y a fait allusion à l'instant, une consultation a
lieu en ce moment même entre les professionnels et mes services pour expertiser
les modalités de calcul comptable de la valeur ajoutée dans ce secteur,
certaines anomalies étant en effet apparues.
L'analyse de ce problème constitue sans doute une meilleure voie que celle qui
est préconisée par M. Belot. J'ai bien compris qu'il s'agissait d'un amendement
d'appel, mais je souhaite que nous laissions cette concertation se dérouler
jusqu'à son terme. Nous verrons alors quels types de solutions pourront être
envisagés à la suite de cette concertation !
Dans l'hypothèse où nous ne parviendrions pas à mettre en oeuvre une solution
satisfaisante pour tous, je vous proposerais d'en reparler lors d'un prochain
débat à caractère budgétaire.
M. le président.
Monsieur Belot, l'amendement n° II-87 rectifié est-il maintenu ?
M. Claude Belot.
La seule chose que ne dit pas Mme la secrétaire d'Etat, c'est quand tout sela
aboutira.
Je suis d'accord avec elle, la solution technique concernant les valeurs
d'amortissement est sans doute intéressante et elle peut être mise en oeuvre
assez rapidement. Ce que je lui demande, au nom de cette profession qui est en
danger, c'est de ne pas traîner, sinon des entreprises disparaîtront parce que
l'impôt est excessif.
Sous ces réserves, j'accepte de retirer l'amendement.
M. le président.
L'amendement n° II-87 rectifié est retiré.
Par amendement n° II-6 rectifié
ter
, MM. Masson, Oudin et les membres
du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après
l'article 48
duovicies
, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les groupements de communes peuvent, par ailleurs, contribuer aux frais de
grosse réparation des systèmes d'assainissement non collectif lorsqu'un
programme général de réhabilitation est prévu dans leur périmètre de
compétence. »
La parole est à M. Masson.
M. Paul Masson.
Cet amendement vise à modifier le code général des collectivités territoriales
sur un point très précis concernant l'assainissement.
Le chapitre IV du code général des collectivités territoriales, dans sa
section II, précise dans un seul article les dispositions qui régissent les
communes pour les opérations d'assainissement collectif et d'assainissement
individuel.
S'agissant de l'assainissement individuel, les communes peuvent prendre en
charge les dépenses d'entretien des systèmes d'assainissement non collectif,
mais elles ne peuvent pas faire transiter par leur budget les dispositions que
prévoient un certain nombre d'agences de l'eau et, n'en doutons pas, toutes les
agences de l'eau dans le prochain programme, puisqu'il s'agit pour les communes
rurales, comme pour les collectivités plus importantes, de passer à un plan
d'ensemble qui doit, en tout état de cause - c'est l'article suivant du code
général des collectivités territoriales - être « assuré sur la totalité du
territoire au plus tard le 31 décembre 2005 ».
Chacun sait que, pour le territoire rural - c'est de lui qu'il s'agit ici - la
solution de l'assainissement collectif n'est pas nécessairement la meilleure et
que, pour les écarts, l'assainissement individuel est certainement bien plus
approprié, beaucoup moins coûteux, et beaucoup plus souple. Encore faut-il que
cet assainissement individuel puisse être organisé selon des programmes définis
à l'avance et non pas, comme actuellement, aidés au coup par coup par les
agences, qui traitent directement avec les particuliers.
C'est pourquoi cet amendement a pour objet de clarifier les dispositions
concernant cette aide à apporter aux usagers de l'assainissement autonome.
Actuellement, seule la procédure lourde et contraignante prévue à l'article 31
de la loi du 3 janvier 1992 permet aux collectivités d'intervenir au nom de
l'intérêt général. Elle peut s'appliquer à un point noir polluant, pas à une
politique qui concerne une communauté de communes ou un syndicat de pays, pour
prendre des exemples concrets.
L'amendement a donc pour objet de permettre aux groupements de communes - on
remarquera que ce n'est pas étendu à toutes les communes - d'organiser de façon
rationnelle un programme de développement de l'assainissement non collectif.
Il facilite, me semble-t-il, la mise en place, d'ici au 31 décembre 2005, du
service public d'assainissement collectif puisqu'il le complète par
l'équipement des écarts et il permet aux communes rurales d'intervenir de façon
cohérente avec, bien sûr, l'aide des agences de l'eau, dont c'est un des
objectifs lourds qui figure déjà dans certains programmes et qui figurera, vous
le savez, madame le secrétaire d'Etat, dans tous les programmes après 2002.
Mme le ministre de l'environnement, que j'ai interrogée sur ce point, a bien
voulu me confirmer, à l'occasion de la discussion de son fascicule budgétaire,
l'intérêt qu'elle porte à ce dispositif. Elle m'a assuré qu'il figurerait dans
le futur projet de loi sur l'eau qui sera déposé très prochainement. Cela
étant, ce projet de loi sur l'eau sera sans doute déposé, mais il ne sera pas
forcément voté.
Nous butons sur une réalité concrète que nous vivons tous les jours sur le
terrain. Le contrôle s'avère hésitant. Cette clarification s'avère donc
utile.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Madame le secrétaire d'Etat, la question posée par M.
Masson est particulièrement opportune. Il est en effet nécessaire d'éclairer
les services préfectoraux, qui n'ont peut-être pas tous la même interprétation
des textes d'un département à l'autre.
Le présent amendement, qui a pour objet de permettre aux groupements de
communes de contribuer aux frais de grosses réparations des systèmes
d'assainissement non collectif, se fonde sur des expériences concrètes. M.
Masson a expliqué de manière très convaincante et précise qu'il souhaitait
améliorer l'environnement d'un certain nombre de communes rurales.
La commission est donc tout à fait favorable à cette initiative.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement vise à autoriser le financement de
l'assainissement individuel par les groupements de communes.
Actuellement, les communes sont compétentes pour le contrôle et l'entretien de
l'assainissement individuel.
Cet amendement, qui autoriserait donc les groupements de communes à financer
les grosses réparations, me paraît problématique dans la mesure où il accorde
directement une compétence aux groupements, alors que, en vertu du droit commun
de la décentralisation, il faut que les compétences soient d'abord données aux
communes et qu'ensuite celles-ci les transfèrent aux groupements, ce que le
projet de loi sur l'eau, qu'on a évoqué tout à l'heure, prévoit. Dès lors,
toute compétence nouvelle dans ce domaine devrait être également attribuée aux
communes.
Cette question sera examinée lors de l'examen de ce projet de loi et, d'ici
là, monsieur le sénateur, il me paraîtrait raisonnable de retirer cet
amendement, qui, par ailleurs, nous paraît avoir toutes les caractéristiques
d'un cavalier budgétaire.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-6 rectifié
ter.
M. Paul Masson.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Masson.
M. Paul Masson.
Madame le secrétaire d'Etat, j'ai été très sensible à votre observation.
Je n'ai pas le sentiment que cet amendement soit un cavalier budgétaire. Quant
à la commission des finances, qui peut en juger, elle est favorable à cette
disposition, qu'elle considère donc comme opportune.
Il convient de clarifier un point qui est interprété de façon différente selon
les préfectures. Il en résulte une distorsion de traitement qui, en droit, me
semble-t-il, n'est pas parfaitement équitable.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-6 rectifié
ter
, accepté par la
commission et repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 48
duovicies.
Par amendement n° II-7 rectifié
ter
, MM. Masson, Oudin et les membres
du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après
l'article 48
duovicies
, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 5721-5 du code général des collectivités territoriales est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le syndicat mixte peut également attribuer des fonds de concours aux
communes membres afin de contribuer à la réalisation ou au fonctionnement
d'équipements d'intérêt commun dans le cadre de programmes préalablement
définis. »
La parole est à M. Masson.
M. Paul Masson.
C'est un amendement de cohérence, qui porte sur un point technique.
Lors de l'examen du projet de loi sur les groupements de communes, présenté
l'année dernière par M. Chevènement, un amendement d'origine sénatoriale a
finalement été adopté par le Parlement et est devenu l'article L. 5721-5 du
code général des collectivités territoriales, qui se lit comme suit : « La
communauté de communes peut attribuer des fonds de concours aux communes
membres afin de contribuer à la réalisation ou au fonctionnement d'équipements
d'intérêt commun. »
On a longuement discuté sur le point de savoir s'il fallait parler d'«
intérêts communaux », d'« intérêts communautaires » ou d'« intérêt commun ».
Finalement, au terme des navettes, la commission mixte paritaire a retenu
l'expression « intérêt commun ».
Quoi qu'il en soit, on s'aperçoit aujourd'hui que ce dispositif ne vaut pas
pour le syndicat mixte. Là encore, le préfet fait observer que, si l'on n'a pas
mentionné dans la loi le syndicat mixte, au même titre que la communauté de
communes, c'est que le législateur n'a pas voulu adopter pour le syndicat mixte
ce qu'il a prévu pour la communauté de communes.
L'amendement que je propose a simplement pour objet de rétablir la corrélation
avec l'article 17 de la loi du 12 juillet 1999 que j'ai évoqué.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement précise utilement un point concernant
l'attribution des fonds de concours.
Il ne semble pas y avoir de raison particulière, dans l'esprit même de la loi
de juillet 1999, de ne pas permettre aux syndicats mixtes ce qui est permis aux
communautés de communes, d'autant qu'il est bien précisé dans l'amendement que
cette possibilité devrait s'exercer dans le cadre de programmes préalablement
définis.
S'agissant d'une question qui concerne les finances locales et les relations
financières des différents niveaux d'administration, la commission estime
qu'une telle disposition peut avoir sa place dans une loi de finances.
En tout cas, sur le fond, elle émet un avis favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement vise à permettre aux syndicats mixtes
dits ouverts d'attribuer à leurs membres des fonds de concours pour contribuer
à la réalisation et au fonctionnement d'équipements d'intérêt commun, de façon
similaire à ce qui est prévu par la loi du 12 juillet 1999 pour les communautés
de communes, les communautés d'agglomération et les communautés urbaines.
Dans la proposition qui est faite, la possibilité d'attribution d'un fonds de
concours est subordonnée à l'existence d'un intérêt commun. Toutefois, puisque
chaque compétence doit relever soit du syndicat mixte, soit de ses membres, la
notion d'intérêt commun paraît d'une application particulièrement complexe. En
tout état de cause, le fait qu'un équipement présente un intérêt pour plusieurs
membres du syndicat ne peut pas justifier l'intervention de ce dernier, y
compris par subvention, si la compétence correspondante ne lui a pas été
transférée.
Il ne paraît donc pas souhaitable d'avoir à étendre un tel dispositif, qui
poserait de réelles difficultés d'application dans le cas de syndicats mixtes
ouverts.
Enfin, il m'apparaît que cet amendement présente, lui aussi, les
caractéristiques d'un cavalier budgétaire, et c'est pourquoi je me permets de
demander à son auteur de bien vouloir le retirer.
M. le président.
L'amendement est-il maintenu, monsieur Masson ?
M. Paul Masson.
Je suis prêt à donner satisfaction à Mme le secrétaire d'Etat, car j'ai cru
comprendre que la commission était elle-même quelque peu hésitante, sur cette
qualification de « cavalier ».
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est une question d'interprétation et de pratique :
nous avons souvent adopté, lors de l'examen de projets de loi de finances, des
dispositions concernant les finances locales. Nous avons d'ailleurs consacré
tout à l'heure un long débat à la taxe professionnelle de France Télécom. Cela
concernait les finances de l'Etat, c'est vrai mais cela concernait aussi le
droit fiscal des collectivités territoriales.
On peut invoquer toutes sortes d'exemples - la mémoire de M. Charasse lui
permettra sûrement de le faire - de dispositions votées en loi de finances qui
ne concernaient pas directement les finances de l'Etat, qui avaient trait à
l'évolution de la fiscalité locale.
Nous examinons là un dispositif relatif aux fonds de concours entre une
structure intercommunale et les communes de base. Sous réserve des critiques de
personnes plus compétentes que moi, je ne suis pas particulièrement choqué
d'examiner de cette disposition en seconde partie de la loi de finances.
Ce sujet, sur le fond, semble intéressant ; il n'y a pas de raisons de ne pas
concrétiser cet intérêt par un vote du Sénat qui constituera certainement un
jalon sur le chemin d'une conviction qui n'est peut-être pas encore totalement
faite de la part des services de l'Etat mais qui va sans doute progresser...
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-7 rectifié
ter.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
La discussion qui s'engage à propos de cet amendement, comme d'ailleurs avec
le précédent, devrait nous donner l'occasion de réfléchir au problème des
cavaliers budgétaires lorsque nous allons procéder à la refonte de la loi
organique.
Pour l'instant, le Conseil constitutionnel a une doctrine très sévère : les
lois de finances peuvent comporter toutes dispositions fiscales, qu'elles
concernent la fiscalité de l'Etat, des collectivités locales ou des
établissements publics. Je dis bien « fiscales » ; c'est pourquoi M. le
rapporteur général a eu raison tout à l'heure de souligner à propos de France
Télécom que la taxe professionnelle est une disposition fiscale qui peut
figurer dans la loi de finances. Pour le reste, celle-ci ne doit comporter que
des dispositions qui touchent aux recettes ou aux dépenses de l'Etat.
Quel que soit l'intérêt des amendements présentés par M. Masson, je crains que
le Conseil constitutionnel, s'ils sont définitivement adoptés, ne leur réserve
un mauvais sort.
C'est ennuyeux, parce que M. Masson pose de bonnes questions et, si ces
dispositions sont censurées par le Conseil constitutionnel, il faudra les
reprendre dans un autre texte.
J'invite donc M. Masson à la vigilance : s'il a l'occasion de présenter ces
dispositions à l'occasion de la discussion d'un autre texte d'ici à la fin de
la session, qu'il ne se gêne pas, car là, selon moi, elles risquent de ne pas
aller très loin ! Sauf, monsieur le rapporteur général, si l'on considère - et
il faudra bien que l'on se pose la question un jour dans le cadre de la réforme
de la loi organique - que ne seraient pas forcément des cavaliers les
dispositions qui peuvent avoir, même de très loin, un rapport avec les recettes
de l'Etat.
Or, il se trouve qu'en matière d'eau et d'assainissement les collectivités
locales et leurs groupements perçoivent une taxe pour le fonds national de
développement des adductions d'eau qui est un compte spécial du Trésor !
M. Gérard Delfau.
Trop !
M. Michel Charasse.
Trop ou pas trop, je n'en sais rien !
On est un peu
border line ! (Sourires.)
Je considère les amendements de
M. Masson comme très intéressants, mais je préférerais qu'ils soient repris le
plus vite possible dans un autre texte pour ne pas risquer la censure que je
vois venir d'une façon presque automatique, compte tenu d'une jurisprudence
déjà ancienne et répétitive du Conseil constitutionnel, qui, comme je le disais
tout à l'heure à propos d'un autre amendement, invoque de lui-même les
cavaliers sans qu'il en soit saisi dans les lettres de saisine.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-7 rectifié
ter,
accepté par la
commission et repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 48
duovicies.
Par amendement n° II-8 rectifié
ter,
MM. Masson, Oudin et les membres
du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après
l'article 48
duovicies,
un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 35-1 du code de la santé publique est complété par trois
alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu'un réseau d'assainissement collectif est en cours de réalisation dans
les communes de moins de 3 500 habitants, regroupés en communautés de communes,
en syndicats de communes, ou en syndicats mixtes et jusqu'à réception
définitive de cet ouvrage, le service de l'assainissement du groupement est
autorisé à réaliser chez le propriétaire, avec l'accord de celui-ci et pour son
compte, les travaux de raccordement des eaux usées au collecteur principal.
« Une convention définit la nature de l'autorisation donnée aux agents du
service d'assainissement et à l'entreprise travaillant sous leur contrôle, les
modalités de remboursement au syndicat ou à la communauté du coût des travaux
ainsi effectués ainsi que les conditions de transfert des travaux au
propriétaire qui en reste seul responsable.
« Des aides financières aux particuliers, éventuellement accordées par des
organismes publics de développement ou de réhabilitation peuvent atténuer ces
dépenses. »
La parole est à M. Masson.
M. Paul Masson.
Je crains que Mme la secrétaire d'Etat ne voie encore dans ma proposition
quelque chose qui s'apparenterait à un cavalier. J'ai personnellement servi
dans l'infanterie de marine, et des cavaliers on n'en voyait pas souvent ! Mais
il est tard, et j'ai tort de plaisanter.
Cet amendement a pour objet de combler, lui aussi, une lacune législative, en
l'occurrence à l'article L. 35-1 du code de la santé publique.
Le code de la santé publique date de 1958 ; il a été modifié à plusieurs
reprises, notamment, en 1992. Or, les problèmes d'assainissement, en 1992, ne
se posaient pas de la même manière qu'ils se posent aujourd'hui.
Aujourd'hui, les aides accordées aux particuliers pour se raccorder aux
réseaux collectifs sont interdites par le code de la santé publique, «
rigoureusement interdites » même, aux termes de la loi.
Or, parallèlement, le septième programme des agences de l'eau, approuvé en
1997, comportait une disposition, qui a d'ailleurs été reprise dans le huitième
programme, prévoyant que les agences peuvent apporter une aide aux
particuliers.
Mais cette aide aux particuliers est interdite aux collectivités locales, sans
doute en vertu du même principe que celui que vous avez évoqué tout à l'heure,
madame le secrétaire d'Etat.
Mon amendement a pour objet de compléter le dispositif de l'article L. 35-1 du
code de la santé publique par trois alinéas pour étendre cette faculté aux
seules communes rurales de moins de 3 500 habitants, à condition qu'elles
soient regroupées en communautés de communes, en syndicats de communes ou en
syndicats mixtes. Cela participe du concept de l'intercommunalité appliqué à
l'assainissement collectif.
Que constate-t-on sur le terrain ?
Un programme d'assainissement collectif est décidé par une commune, ou par un
groupement de communes ; mais, pour des raisons aussi bien financières que de
tradition, les particuliers hésitent à s'y raccorder parce qu'ils doivent payer
et qu'ils ne savent pas trop si c'est obligatoire ou pas. Or la loi précise
bien que, dans les deux ans, le particulier doit être raccordé. En fait, les
procédures traînent en longueur, mais au détriment de l'équilibre financier des
communes ou des communautés de communes et de l'assainissement collectif.
La proposition que j'ai l'honneur de présenter a précisément pour objet de
donner un support législatif à une procédure qui est déjà parfois utilisée. Je
connais certains départements dans lesquels ce système fonctionne encore dans
une zone « grise » qui, pour n'être pas tout à fait conforme à la loi, n'est
cependant pas, d'après les préfets tout au moins, hors la loi...
Le dispositif contenu dans l'amendement n° II-8 rectifié
ter
présente
l'avantage de pallier ces inconvénients et de lever toute hésitation sur la
légalité. Ce système efficace facilite grandement, croyez-moi, madame la
secrétaire d'Etat, la mise en place des réseaux d'assainissement collectif dans
les communes rurales de 3 500 habitants et moins.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Notre collègue propose de résoudre un problème
concret pour la mise en place d'une véritable politique d'assainissement en
milieu rural. Il semble en effet raisonnable de permettre aux communes de moins
de 3 500 habitants organisées en groupement de réaliser, chez les propriétaires
privés, des travaux de raccordement des eaux usées au collecteur principal.
Chacun sait que les dépenses qui en résultent pour des propriétaires riverains
en milieu rural peuvent être dissuasives et susciter une véritable réticence
dans certaines communes, ce qui, je crois, serait résolu de façon élégante par
une disposition de cette nature, disposition à laquelle la commission est tout
à fait favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le sénateur, nous comprenons bien l'objet de
votre amendement, qui vise à aider les particuliers à se raccorder au réseau
d'assainissement collectif dans les petites communes regroupées en communautés
de communes.
Ce dispositif m'inspire deux remarques.
La première, c'est que les questions que vous soulevez s'inscrivent dans la
réflexion plus globale, que j'évoquais tout à l'heure, qui s'engagera lors de
l'examen du projet de loi sur l'eau que prépare Mme Voynet.
L'amendement n° II-8 rectifié
ter,
comme les deux amendements
précédents, ne me paraît pas avoir forcément toute sa place dans la discussion
budgétaire, puisque la jurisprudence du Conseil constitutionnel invoque pour
cette dernière la nécessité d'un impact direct et immédiat sur les ressources
ou sur les charges de l'Etat.
Surtout - c'est ma seconde remarque - il me paraît que cet amendement
introduirait une distorsion entre les communes selon qu'elles sont ou non
regroupées en communauté et selon qu'elles comptent plus ou moins de 3 500
habitants, alors que les questions que vous soulevez me paraissent se poser
au-delà de ces critères.
Il me paraîtrait donc plus opportun d'examiner cette question, comme les
problèmes plus généraux que « pointe » cet amendement, lors du débat portant
sur le projet de loi sur l'eau.
Je souhaiterais donc que vous puissiez retirer cet amendement.
M. le président.
Monsieur Masson, l'amendement est-il maintenu ?
M. Paul Masson.
Si vous le permettez, madame le secrétaire d'Etat, je ferai trois
observations.
D'abord, je suis très sensible à ce qu'a dit tout à l'heure M. Charasse :
c'est vrai, il ne faut pas gâcher de bonnes munitions dans de mauvais
combats.
Cela étant, dès lors que la commission des finances semble tout à fait
favorable à l'évocation de ces problèmes, qui, je le répète, sont des problèmes
concrets que nous rencontrons quotidiennement dans les départements, il faut
les aborder au grand jour.
Deuxième observation, madame le secrétaire d'Etat, il faut bien comprendre que
ce n'est pas forcément l'argent des collectivités qui est mis sur la table :
c'est l'argent qui vient des agences de l'eau. Il provient des redevances et
touche indirectement - je rejoins là l'argumentation de M. Charasse - les
ressources du budget de l'Etat.
Troisième observation, madame le secrétaire d'Etat, sur le point de la
distorsion, de la différence de traitement entre communes ; selon qu'elles sont
ou pas en intercommunalité, je fais observer que les lois ne manquent pas qui
favorisent l'intercommunalité par le jeu de subventions de l'Etat aussi bien
que par l'intervention des régions et, parfois, des agences de l'eau.
Par conséquent, accordez-moi au moins, madame le secrétaire d'Etat, de
reconnaître que votre observation sur ce dernier point n'était pas tout à fait
pertinente.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-8 rectifié
ter,
accepté par la
commission et repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 48
duovicies.
B. - Autres mesures
Articles additionnels avant l'article 49 A