SEANCE DU 16 NOVEMBRE 2000
M. le président.
La parole est à Mme Heinis.
Mme Anne Heinis.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'équipement, des transports et du
logement.
De par sa situation géographique, notre pays assume les risques maritimes pour
toute l'Europe. Il est le passage obligé qui dessert 350 millions de personnes,
c'est dire l'importance économique de l'enjeu.
A l'entrée de la Manche, sur le rail d'Ouessant, un navire chargé de
marchandises dangereuses passe toutes les 20 minutes. Au total, 500 à 600
navires empruntent journellement la Manche d'Est en Ouest, alors qu'une
centaine de navires, transportant parfois plus de 1 000 passagers, traversent
leurs routes dans le sens nord-sud, de nuit comme de jour.
C'est dire l'importance du risque au regard des vies humaines. Et notre
société, très terrienne, n'accepte pas les risques maritimes, d'autant qu'elle
ne les découvre qu'au travers de grandes catastrophes épisodiques, telles
celles de l'
Amoco-Cadiz,
de l'
Erika
ou du
Ievoli Sun.
Ce
dernier, je le rappelle, n'a d'ailleurs pas eu jusqu'à aujourd'hui d'impact
écologique ou sanitaire.
Monsieur le ministre, chacun sait qu'un pavillon fort, c'est-à-dire une flotte
marchande suffisante, fait partie intégrante d'une vraie politique de sécurité
maritime. Or, la flotte française ne réprésente, hélas ! que 1 % de la flotte
mondiale.
A cela s'ajoute que seulement 54 inspecteurs de sécurité contrôlent 13 % des
navires - mais je n'ignore pas que vous faites un gros effort sur ce plan -
contre, tout de même, 250 inspecteurs de sécurité en Grande-Bretagne et 200 en
Espagne.
Seule la qualité incontestable de nos services de veille et de sauvetage -
marine de guerre, affaires maritimes, sauveteurs -, qui ne demandent d'ailleurs
qu'à progresser si on leur en donne les moyens, nous autorise à parler.
L'opportunité de la présidence française de l'Union européenne est très
certainement une occasion à saisir pour que la France fasse entendre sa voix
dans le domaine de la sécurité maritime européenne.
Monsieur le ministre, quelles initiatives prenez-vous pour que l'on définisse
à Bruxelles une politique commune de la mer, s'appuyant sur un droit européen
de la mer, permettant d'assurer efficacement à la fois le contrôle du trafic et
celui des navires, tout en responsabilisant les Etats dans la mise en oeuvre de
ces contrôles ?
Qu'en est-il à cet égard des fonctions d'une agence de sécurité maritime
européenne que nous souhaiterions voir implantée à Cherbourg, comme vous le
savez ?
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants,
du RPR et de l'Union centriste, ainsi que certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Madame la
sénatrice, vous avez raison de souligner l'importance de la gestion du trafic,
en particulier dans cette zone.
Le Gouvernement met en place au CROSS de Jobourg, avec l'appui de la
Commission européenne, un centre de trafic européen dit « Trafic 2000 » dont
l'objectif est d'améliorer le suivi des navires en temps réel. Avec nos
partenaires belges, anglais et espagnols notamment, nous allons renforcer ce
suivi.
Nous mettons également en place un signalement obligatoire aux Casquets, avec
l'accord de l'OMI, l'Organisation maritime internationale.
Nous avons par ailleurs prévu des investissements importants pour moderniser
les radars des CROSS de la Manche et pour favoriser la professionnalisation de
ces centres.
S'agissant des navires marchands, le problème que vous soulevez, madame la
sénatrice, à savoir la place de notre flotte en quelque sorte, le Gouvernement
a mis en place des groupements d'intérêt économique fiscaux. La construction de
plus de trente navires a pu bénéficier de ce dispositif, pour un montant de 8,4
milliards de francs, ce qui n'est pas rien.
Je ne développerai pas les mesures en faveur de la réduction des charges. Ce
que je veux dire, c'est que nous sommes déterminés à ne plus accepter le déclin
de la flotte nationale et, au contraire, à inverser la tendance.
S'agissant de l'OMI, la stratégie de la France a été la suivante : s'appuyer
sur ses partenaires européens pour parler d'une seule voix, ce qui permet
d'envisager, pour le premier trimestre 2001, un accord sur l'élimination des
navires à simple coque portant sur un tiers des navires d'ici à 2005 et deux
tiers d'ici à 2010. je parle là de la flotte mondiale concernée.
En ce qui concerne les moyens budgétaires et humains, dès l'an prochain, 75
000 emplois sont prévus pour la sécurité maritime, des crédits permettront de
doubler la capacité de contrôle dans les ports en doublant le nombre
d'inspections de la sécurité et les crédits d'investissements augmenteront de
60 %, notamment au profit de la flotte de surveillance des affaires maritimes
et des navires de balisage.
En matière de renforcement de la réglementation européenne, par ailleurs, la
France a joué un rôle pour faire accepter à de nombreux pays une réglementation
plus contraignante que celle qui existe aujourd'hui avec la mise en place de la
procédure de banissement et le contrôle systématique des 3 000 navires qui
circulent dans nos ports, et ce alors qu'il n'y en a presque aucun
aujourd'hui.
Je souhaite qu'avec l'aide du Parlement européen nous allions plus loin. Je
souhaite aussi une application immédiate de ces mesures, sans attendre les
délais de transposition à la fois dans les Etats et à l'échelle européenne.
J'ai demandé à mes partenaires européens que ces dispositions entrent en
vigueur dès le début de l'année prochaine.
S'agissant de l'Agence de sécurité maritime, j'y suis favorable, vous le
savez, madame la sénatrice, la Commission devrait nous faire une proposition en
ce sens dans les jours qui viennent.
Le droit européen, comme vous l'avez dit, doit être absolument renforcé si
l'on veut défendre la sécurité maritime.
(Applaudissements sur les travées
du groupe communiste républicain et citoyen, sur les travées socialistes, ainsi
que sur certaines travées du RDSE.)
SITUATION DE LA FILIÈRE BOVINE