SEANCE DU 7 NOVEMBRE 2000
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Organismes extraparlementaires
(p.
1
).
3.
Questions orales
(p.
2
).
situation de la gendarmerie rurale (p. 3 )
Question de M. René-Pierre Signé. - MM. Alain Richard, ministre de la défense ; René-Pierre Signé.
situation de l'institut français
de fribourg-en-brisgau (p.
4
)
Question de M. Daniel Hoeffel. - MM. Alain Richard, ministre de la défense ; Daniel Hoeffel.
redéploiement des forces de police
et de gendarmerie dans les yvelines (p.
5
)
Question de M. Dominique Braye. - MM. Alain Richard, ministre de la défense ; Dominique Braye.
devenir de l'assistance publique -
hôpitaux de paris (p.
6
)
Question de Mme Marie-Claude Beaudeau. - Mmes Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés ; Marie-Claude Beaudeau.
reconnaissance de la médecine
anthroposophique (p.
7
)
Question de M. Hubert Haenel. - Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés ; M. Hubert Haenel.
cessation anticipée d'activité
des salariés exposés à l'amiante (p.
8
)
Question de Mme Marie-Madeleine Dieulanguard. - Mmes Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés ; Marie-Madeleine Dieulanguard.
maintien à domicile des personnes âgées (p. 9 )
Question de M. Georges Mouly. - Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés ; M. Georges Mouly.
réseau ferroviaire du sud-est de la france
et liaisons avec l'italie (p.
10
)
Question de M. José Balarello. - MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; José Balarello.
avenir de l'aéroport de nîmes-garons (p. 11 )
Question de M. Simon Sutour. - MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Simon Sutour.
aide à la construction pour les insulaires (p. 12 )
Question de M. Christian Bonnet. - MM. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement ; Christian Bonnet.
régime indemnitaire des agents
du cadre d'emploi de police municipale (p.
13
)
Question de M. René Marquès. - MM. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement ; René Marquès.
suppression des fiches d'état civil
et justificatifs de domicile (p.
14
)
Question de M. Christian Demuynck. - MM. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement ; Christian Demuynck.
suppression
de l'émission télévisée « montagne » (p.
15
)
Question de M. Jean Faure. - MM. Michel Duffour, secrétaire d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle ; Jean Faure.
nouvelles dispositions relatives
à l'indemnité compensatoire
de handicap naturel (ichn) (p.
16
)
Question de M. Auguste Cazalet. - MM. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche ; Auguste Cazalet.
réhabilitation des cabanes pastorales (p. 17 )
Question de M. Claude Domeizel. - MM. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche ; Claude Domeizel.
refus d'acceptation de certains billets
par les commerçants (p.
18
)
Question de M. André Vallet. - MM. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation ; André Vallet.
accès à la profession
dans les métiers du bâtiment (p.
19
)
Question de M. Pierre Hérisson. - MM. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation ; Pierre Hérisson.
composition du nouveau supercarburant (p. 20 )
Question de M. Dominique Leclerc. - MM. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation ; Dominique Leclerc.
Suspension et reprise de la séance (p. 21 )
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
4.
Conférence des présidents
(p.
22
).
5.
Reconnaissance du génocide arménien.
- Demande de discussion immédiate d'une proposition de loi (p.
23
).
6.
Loi d'orientation pour l'outre-mer.
- Adoption d'un projet de loi en nouvelle lecture (p.
24
).
Discussion générale : MM. Christian Paul, secrétaire d'Etat à l'outre-mer ;
José Balarello, rapporteur de la commission des lois ; Edmond Lauret,
Jean-Jacques Hyest, Lylian Payet, Paul Vergès, Claude Lise, Mme Lucette
Michaux-Chevry.
MM. le secrétaire d'Etat, Pierre Fauchon, vice-président de la commission des
lois.
Clôture de la discussion générale.
Article 1er (p. 25 )
M. Claude Lise.
Amendement n° 1 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat,
Robert Bret, Patrice Gélard. - Adoption.
Amendements n°s 2 et 3 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire
d'Etat. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 2 (p. 26 )
Amendement n° 4 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire
d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 5 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Amendement n° 6 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 3 (p. 27 )
Amendements n°s 39 et 40 du Gouvernement. - MM. le secrétaire d'Etat, le
rapporteur. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 4
(pour coordination)
. - Adoption (p.
28
)
Article 5 (p.
29
)
Amendement n° 7 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Amendement n° 8 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Amendement n° 9 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Amendement n° 10 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Amendement n° 41 du Gouvernement. - MM. le secrétaire d'Etat, le rapporteur. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 6 (p. 30 )
Amendement n° 62 rectifié du Gouvernement. - MM. le secrétaire d'Etat, le
rapporteur. - Adoption.
Amendement n° 11 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Amendements n°s 12 à 14 de la commission. - Adoption des trois amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 7 (p. 31 )
Amendement n° 15 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 7
bis
(pour coordination)
(supprimé)
Articles 7
quater
et 7
quinquies.
- Adoption (p.
32
)
Article 9 (p.
33
)
Amendement n° 42 du Gouvernement. - MM. le secrétaire d'Etat, le rapporteur. -
Adoption.
Amendement n° 50 du Gouvernement. - MM. le secrétaire d'Etat, le rapporteur. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 9 bis A (p. 34 )
Amendement n°s 16 et 17 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur, le
secrétaire d'Etat. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 9 bis B (supprimé) (p. 35 )
Amendement n° 18 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement rétablissant l'article.
Article 9
ter
(pour coordination). - Adoption (p.
36
)
Article 9
quater
(p.
37
)
Amendement n° 43 du Gouvernement. - MM. le secrétaire d'Etat, le rapporteur. -
Adoption.
Amendement n° 19 de la commission et sous-amendement n° 63 rectifié de M.
Claude Lise ; amendement n° 58 de M. Claude Lise. - MM. le rapporteur, Claude
Lise, le secrétaire d'Etat. - Adoption du sous-amendement n° 63 rectifié et de
l'amendement n° 19 modifié, l'amendement n° 58 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Article 9 quinquies A (supprimé) (p. 38 )
Amendement n° 20 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Georges Othily. - Adoption de l'amendement rétablissant l'article.
Suspension et reprise de la séance (p. 39 )
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
Article 9
quinquies
(supprimé)
Articles 9
septies
A, 9
septies
et 9
octies.
- Adoption
(p.
40
)
Article 10 (p.
41
)
Amendement n° 21 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 11 (p. 42 )
Amendement n° 59 de M. Claude Lise. - MM. Claude Lise, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 11 bis (supprimé) (p. 43 )
Amendement n° 22 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement rétablissant l'article.
Article 13 bis (supprimé) (p. 44 )
Amendement n° 23 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement rétablissant l'article.
Article 16 (p. 45 )
Amendement n° 24 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 17
(pour coordination)
. - Adoption (p.
46
)
Article 18
bis
(p.
47
)
Amendements n°s 25 de la commission et 44 du Gouvernement. - MM. le rapporteur,
le secrétaire d'Etat. - Retrait
de l'amendement n° 25 ; adoption de l'amendement n° 44.
Adoption de l'article modifié.
Articles 18
ter
, 19
bis
et 20. - Adoption (p.
48
)
Article 21
bis
(p.
49
)
Amendement n° 47 rectifié de M. Paul Vergès. - MM. Paul Vergès, le rapporteur,
le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 22 (p. 50 )
Amendement n° 26 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Amendements identiques n°s 27 de la commission et 60 de M. Claude Lise. - MM.
le rapporteur, Claude Lise, le secrétaire d'Etat, Mme Lucette Michaux-Chevry. -
Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Articles 23 et 24. - Adoption (p.
51
)
Article 24
bis
(supprimé)
Article 24
ter
(p.
52
)
Amendement n° 28 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 31 (p. 53 )
Amendement n° 29 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Amendement n° 30 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 31 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire
d'Etat, Claude Lise. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 32. - Adoption (p.
54
)
Article 33 (p.
55
)
Amendement n° 32 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 33
bis
(supprimé)
Article 36 (p.
56
)
Amendement n° 61 du Gouvernement. - MM. le secrétaire d'Etat, le rapporteur. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 36 (p. 57 )
Amendement n° 51 de Mme Lucette Michaux-Chevry. - Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 36 bis (p. 58 )
Amendement n° 52 de Mme Lucette Michaux-Chevry. - Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 37. - Adoption (p.
59
)
Article 37
ter
(p.
60
)
Amendement n° 53 de Mme Lucette Michaux-Chevry. - Mme Lucette Michaux-Chevry,
MM. le rapporteur, le
secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Intitulé du chapitre IV du titre VI (réservé) (p. 61 )
Amendement n° 33 de la commission. - Réserve.
Article 38 (p. 62 )
Amendements identiques n°s 34 de la commission et 54 de M. Edmond Lauret ; amendement n° 48 de M. Paul Vergès. - MM. le rapporteur, Edmond Lauret, Paul Vergès, le secrétaire d'Etat, Paul Girod. - Adoption des amendements n°s 34 et 54 supprimant l'article, l'amendement n° 48 devenant sans objet.
Article 38 bis (p. 63 )
Amendements identiques n°s 35 de la commission et 55 de M. Edmond Lauret. - MM. le rapporteur, Edmond Lauret, le secrétaire d'Etat. - Adoption des deux amendements supprimant l'article.
Article additionnel après l'article 38 bis (p. 64 )
Amendement n° 56 de M. Edmond Lauret. - MM. Edmond Lauret, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Georges Othily, Patrice Gélard. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Intitulé du chapitre IV du titre VI (suite) (p. 65 )
Amendement n° 33 (précédemment réservé) de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Paul Girod. - Adoption de l'amendement supprimant la division et son intitulé.
Intitulé du titre VII (réservé) (p. 66 )
Amendement n° 36 de la commission. - Réserve.
Article 39 (p. 67 )
Amendement n° 37 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Claude Lise, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Patrice Gélard, Pierre Fauchon, Josselin de Rohan. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Intitulé du titre VII (suite) (p. 68 )
Amendement n° 36 (précédemment réservé) de la commission. - Adoption de l'amendement supprimant la division et son intitulé.
Article 40 (p. 69 )
Amendement n° 57 rectifié de M. Victor Reux. - MM. Victor Reux, le rapporteur,
le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 45 du Gouvernement. - MM. le secrétaire d'Etat, le rapporteur. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 40
ter
A. - Adoption (p.
70
)
Article 40
ter
(pour coordination) (p.
71
)
Amendement n° 38 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles 40
quater
et 40
sexies.
- Adoption (p.
72
)
Article additionnel après l'article 41
quater
(p.
73
)
Amendement n° 49 de M. Victor Reux. - MM. Victor Reux, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Alain Lambert, président de la commission des finances. - Irrecevabilité.
Article 41
(pour coordination)
. - Adoption (p.
74
)
Vote sur l'ensemble (p.
75
)
MM. Paul Vergès, Claude Lise, Georges Othily, Lucien Lanier, Edmond Lauret,
Lylian Payet, Mme Lucette Michaux-Chevry, M. le secrétaire d'Etat.
Adoption du projet de loi.
M. Josselin de Rohan.
Suspension et reprise de la séance (p. 76 )
7. Transposition par ordonnances de directives communautaires. - Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence (p. 77 ).
Article 4 (p. 78 )
MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du
logement ; Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis de la commission des
affaires économiques.
Amendements identiques n°s 19 de M. Denis Badré, rapporteur pour avis, et 47 de
M. Pierre Lefebvre ; amendement n° 4 de la commission et sous-amendement n° 49
de M. Paul Masson ; amendement n° 14 rectifié
(priorité)
de M. Ladislas
Poniatowski, rapporteur pour avis. - MM. Denis Badré, rapporteur pour avis de
la commission des finances ; Pierre Lefebvre, Daniel Hoeffel, rapporteur de la
commission des lois ; Paul Masson, Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis ;
le ministre, Jacques Bellanger, Alain Lambert, président de la commission des
finances. - Retrait de l'amendement n° 47 et du sous-amendement n° 49 ;
adoption, après une demande de priorité, de l'amendement n° 14 rectifié et de
l'amendement n° 4, l'amendement n° 19 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Article 5 (p. 79 )
Amendement n° 5 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 17 de M. André Jourdain, rapporteur pour avis. - MM. André
Jourdain, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales ; le
rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 6 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. -
Adoption.
Amendement n° 7 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 8 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. -
Adoption.
Amendement n° 9 de la commission. - Adoption.
Amendements n°s 10 de la commission et 48 de Mme Nicole Borvo. - MM. le
rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 48 ; adoption de
l'amendement n° 10.
Adoption de l'article modifié.
Vote sur l'ensemble (p. 80 )
M. Simon Sutour, Mme Nicole Borvo.
Adoption du projet de loi.
8.
Reconnaissance du génocide arménien.
- Demande de discussion immédiate d'une proposition de loi
(suite)
(p.
81
).
MM. Jacques Pelletier, Jacques-Richard Delong, Xavier de Villepin, président de
la commission des affaires étrangères ; Jean-Jack Queyranne, ministre des
relations avec le Parlement.
Adoption de la demande de discussion immédiate
Discussion immédiate
et adoption de la proposition de loi (p.
82
)
Discussion générale : MM. Xavier de Villepin, président de la commission des
affaires étrangères ; Jacques Peyrat, Louis de Broissia, Michel Pelchat, Robert
Bret, le président, Paul Girod, Claude Huriet, Bernard Piras, Gérard Collomb,
Bernard Seillier, Hubert Durand-Chastel, Guy Fischer.
Clôture de la discussion générale.
Exception d'irrecevabilité (p. 83 )
Motion n° 3 de M. Jacques-Richard Delong. - MM. Jacques-Richard Delong, Jean-Claude Gaudin, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Gilbert Chabroux. - Rejet par scrutin public.
Article unique (p. 84 )
Amendement n° 1 rectifié
ter
de M. Claude Huriet et sous-amendement n° 4
de M. Dominique Braye. - MM. Claude Huriet, Dominique Braye, le président de la
commission des affaires étrangères ; le ministre, Gérard Collomb, Yann
Gaillard, Louis de Broissia, Philippe Adnot. - Rejet du sous-amendement et de
l'amendement.
Amendement n° 2 rectifié
bis
de M. Claude Huriet et sous-amendement n° 5
de M. Dominique Braye. - Devenus sans objet.
Vote sur l'ensemble (p. 85 )
Mme Hélène Luc, M. Claude Huriet.
Adoption, par scrutin public, de l'article unique de la proposition de loi.
9.
Communication de l'adoption définitive de textes soumis en application de
l'article 88-4 de la Constitution
(p.
86
).
10.
Dépôt d'une proposition de loi
(p.
87
).
11.
Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
(p.
88
).
12.
Renvoi pour avis
(p.
89
).
13.
Dépôt d'un rapport d'information
(p.
90
).
14.
Dépôts rattachés pour ordre au procès-verbal de la séance du 31 octobre 2000
(p.
91
).
15.
Ordre du jour
(p.
92
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
présidence de m. paul girod
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
1
procès-verbal
M. le président.
Le procès-verbal de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté.
2
organismes extraparlementaires
M. le président.
J'informe le Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de procéder à
la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein de deux organismes
extraparlementaires.
En conséquence, j'invite la commission des affaires culturelles et la
commission des finances à présenter chacune un candidat appelé à siéger au sein
du conseil d'administration du Centre national d'art et de culture
Georges-Pompidou. J'invite également la commission des affaires culturelles à
présenter un candidat pour siéger au sein du Haut Conseil de l'évaluation de
l'école.
Les nominations des sénateurs appelés à siéger au sein de ces organismes
extraparlementaires auront lieu ultérieurement dans les conditions prévues par
l'article 9 du règlement.
3
questions orales
M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
SITUATION DE LA GENDARMERIE RURALE
M. le président.
La parole est M. Signé, auteur de la question n° 868, adressée à M. le
ministre de la défense.
M. René-Pierre Signé.
Je souhaite, monsieur le ministre, attirer votre attention sur la situation de
la gendarmerie, en particulier la gendarmerie rurale. Cette formation très
homogène jusqu'alors tend à devenir très hétérogène.
La programmation concernant les années 1997-2002 inquiète les élus locaux
puisque les effectifs ont perdu plus de cinq mille sous-officiers reconvertis,
certes, pour partie en officiers, mais sur des postes de soutien non
opérationnels, et douze mille gendarmes auxiliaires, issus du contingent
volontaire, qui avaient une grande motivation et souhaitaient faire carrière
dans la gendarmerie.
Il est vrai que la gendarmerie a vu ses effectifs grossir en particulier de
seize mille gendarmes adjoints - il s'agit, en fait, d'emplois-jeunes - qui
n'ont pas toujours vocation bien arrêtée de faire carrière.
Ces jeunes futurs gendarmes, formés très rapidement, sont principalement
affectés aux zones rurales, d'où sont retirés les gendarmes chevronnés et
compétents. Il en résulte des difficultés de fonctionnement, une présence et
une surveillance insuffisantes, des délais d'intervention trop longs.
Or si les problèmes de délinquance dans les zones rurales n'atteignent pas
l'acuité de ceux dans les banlieues, ils n'en sont pas moins inquiétants et ils
ont une fâcheuse tendance à s'amplifier.
Monsieur le ministre, la sécurité des personnes et des biens me paraît être
une exigence de base pour tout aménagement cohérent du territoire et il serait
regrettable que le monde rural fasse les frais de l'amélioration de la sécurité
des villes.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard,
ministre de la défense.
Monsieur le sénateur, je souhaite compléter votre
information sur l'évolution des effectifs de la gendarmerie à l'échelon
national et sur ses répercussions au sein des brigades rurales.
Vous avez évoqué la suppression de cinq mille emplois de sous-officiers de
gendarmerie pendant la programmation. Il s'agit non pas d'une suppression mais
d'un transfert.
Jusqu'à présent, des militaires ayant une formation et des capacités
militaires de la gendarmerie étaient affectés à des fonctions de gestion. La
réforme mise en place dans la loi de programmation a consisté - c'est de bonne
administration - à transférer cinq mille postes qui correspondent au soutien
administratif et technique de la gendarmerie vers des postes, certes de
militaires, mais qui ne répondent pas aux mêmes spécificités, plutôt que de
faire occuper ces postes par des titulaires d'aptitude militaire. Vous
comprenez, monsieur le sénateur, que, pour assurer le secrétariat d'un
groupement ou le fonctionnement d'une unité d'entretien de véhicules de la
gendarmerie, il n'est pas nécessaire d'avoir recours à un brigadier aguerri et
expérimenté.
Par conséquent, aucun emploi de sous-officiers de la gendarmerie n'est
supprimé. En revanche, nous assistons à une mutation.
Naturellement, nous pouvons tous regretter que les douze mille appelés de la
gendarmerie disparaissent. Mais cela est dû au fait que le service militaire
est en voie de suppression. Il n'y a plus de raison de maintenir des appelés
dans la gendarmerie alors qu'il n'y en aurait plus nulle part ailleurs.
Le Gouvernement, qui a été conduit à définir une projection, a donc considéré
qu'il fallait remplacer les appelés par de jeunes volontaires. Vous avez fait
allusion aux emplois-jeunes, monsieur Signé. Je suis sûr que, dans votre
esprit, cela n'a rien de péjoratif. Il s'agit de jeunes qui entrent dans la
profession et qui sont en train d'acquérir une expérience. Deux différences
importantes existent par rapport aux appelés : d'une part, ils pourront être
employés pour une durée allant jusqu'à cinq ans, alors que les appelés
l'étaient pour dix mois ; d'autre part, ils bénéficieront de formations plus
longues, que j'ai encore décidé d'allonger, et, dès la fin de la première année
de service, ils auront des compétences d'adjoints de police judiciaire, ce qui
n'était évidemment pas proposé aux appelés.
Nous disposons donc d'une ressource humaine supérieure en nombre - seize mille
volontaires au lieu de douze mille appelés - et de jeunes dont la formation
initiale est sans doute inférieure en moyenne à celle des appelés de la
gendarmerie, mais qui pourront acquérir une expérience.
Nous n'en sommes qu'au début de l'expérience : les premiers jeunes ont été
recrutés à la fin de l'année 1998. La grande majorité d'entre eux ont donc une
année d'expérience, parfois moins, au maximum un an et demi. Lorsque ces jeunes
auront une plus longue expérience, la mesure que j'ai prise, à savoir le
remplacement, dans les brigades à faible activité, d'un gendarme sous-officier
sur six par un gendarme adjoint, sera une bonne réforme.
En effet, monsieur le sénateur, nous avons des besoins que personne ne
conteste - vous l'avez sans doute noté dans votre département - de renforcement
des unités de gendarmerie dans la périphérie des villes. La solution la plus
simple pour ce ministère aurait consisté à agir comme pratiquement tous les
ministères l'ont fait au cours des vingt dernières années, c'est-à-dire
d'envoyer dans les postes les plus difficiles les jeunes qui débutent. Je n'ai
pas voulu procéder ainsi. Il me paraît plus digne, en effet, pour le service
public et plus favorable aux jeunes qui font leur expérience de les faire
encadrer par un groupe de gendarmes expérimentés dans une brigade de campagne
où ils apprendront tous les aspects du métier de gendarme.
Cette évolution permet de maintenir entièrement le maillage des brigades
cantonales, y compris dans les zones où l'on observe une faible activité des
brigades. En principe, ces brigades ne doivent comporter qu'un jeune gendarme
adjoint en substitution. C'est tout de même la meilleure façon d'intégrer les
jeunes, face à des besoins de sécurité qui sont avérés en milieu rural comme en
zone périurbaine.
M. René-Pierre Signé.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Signé.
M. René-Pierre Signé.
Monsieur le ministre, j'ai bien entendu votre réponse, qui me semble un
plaidoyer convaincant. Il n'empêche que les mille civils venant
d'établissements militaires restructurés qui sont employés dans les bureaux, en
tant que mécaniciens, dans les postes de soutien à la gendarmerie, ou autres,
ne sont plus des gendarmes. Malgré tout, la formation de base est un peu
différente. Et puis, il y a des officiers et des sous-officiers des armées qui
ne sont pas des gendarmes, qui n'ont ni formation ni pouvoir juridique et qui
font surtout du soutien.
Quant aux gendarmes adjoints dont vous avez parlé, monsieur le ministre, bien
entendu, mon allusion aux emplois-jeunes n'avait rien de péjoratif. Il
n'empêche que ces jeunes ont été recrutés après avoir passé des tests moins
difficiles, puisqu'ils ont cinq ans pour intégrer la gendarmerie et réussir des
tests plus sélectifs, et ils sont tout de même de valeur assez inégale. Or,
précédemment, les gendarmes auxiliaires étaient des volontaires et ils étaient
donc peut-être plus motivés.
Vous avez dit, monsieur le ministre, que les jeunes étaient d'abord affectés
dans les zones où la délinquance est moindre pour être formés. Cela me paraît
tout à fait judicieux. Il n'en reste pas moins que l'encadrement me semble
quelquefois insuffisant. Par exemple, dans mon canton, il arrive que, certains
dimanches ou certaines fins de semaine, un seul gendarme chevronné accompagne
deux ou trois gendarmes adjoints, ce qui me paraît quelque peu préjudiciable à
la sécurité.
Cela dit, je comprends la suppression, dans les effectifs, de douze mille
gendarmes auxiliaires en raison de la loi sur le service national. Mais il
faudrait assurer un encadrement suffisant aux seize mille gendarmes adjoints,
afin qu'ils soient mieux formés, et c'est ce qui me semble faire défaut dans
les zones rurales.
M. Alain Richard,
ministre de la défense.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard,
ministre de la défense.
Monsieur le président, la question est importante
et peut intéresser d'autres sénateurs.
Monsieur Signé, comme vous, je pense que les jeunes gendarmes adjoints doivent
être présents en nombre réduit au sein des brigades et doivent bénéficier d'un
encadrement par des gendarmes expérimentés nombreux. C'est ce qui se produit le
plus généralement.
S'agissant de Château-Chinon, nous avons créé une centaine de pelotons de
surveillance et d'intervention pour améliorer la synergie entre brigades en
zone rurale. Si, pendant la montée en charge, ces pelotons de surveillance et
d'intervention de la gendarmerie, les PSIG, comportent un peu plus de gendarmes
adjoints ou d'auxiliaires, pendant la période de croisière, ils seront
composés, pour l'essentiel, de sous-officiers.
SITUATION DE L'INSTITUT FRANÇAIS
DE FRIBOURG-EN-BRISGAU
M. le président.
La parole est M. Hoeffel, auteur de la question n° 875, adressée à M. le
ministre des affaires étrangères.
M. Daniel Hoeffel.
Monsieur le ministre, ma question concerne l'avenir et la situation de
l'Institut français de Fribourg-en-Brisgau, dossier que vous connaissez et que
votre collègue ministre des affaires étrangères suit avec une particulière
attention.
Trois arguments me paraissent militer en faveur du maintien de cette présence
culturelle française à Fribourg-en-Brisgau.
Premier argument, la coopération sur les plans culturel et éducatif est
appelée dans l'avenir à être l'un des fondements de la coopération
franco-allemande. Or, c'est cette coopération-là qui vient étayer la
coopération politique.
Deuxième argument, la coopération transfrontalière entre régions voisines me
paraît être aujourd'hui, et sans doute le sera-t-elle davantage encore demain,
la base d'une coopération forte entre nos deux pays. Tout ce qui peut donc être
fait pour créer et étoffer les liens tant culturels que linguistiques va dans
la bonne direction.
Troisième argument, les autorités allemandes étant très impliquées dans la
plupart des instituts français tel celui de Fribourg-en-Brisgau, elles méritent
un certain nombre d'égards, et je souhaite que ce soit en étroite concertation
avec ces partenaires que les actions puissent être entreprises.
M. le ministre des affaires étrangères a répondu à ce sujet que la réforme,
une fois finalisée en concertation avec nos partenaires allemands, sera mise en
oeuvre de façon pragmatique et progressive en collaboration avec les autorités
locales.
Conscient de la nécessité pour les instituts français - en Allemagne et
ailleurs - de s'adapter et de se moderniser pour tenir compte de l'évolution du
cadre dans lequel ils se situent, je souligne toutefois que la valeur
symbolique d'un institut français tel que celui de Fribourg-en-Brisgau reste en
tout état de cause très forte. Voilà pourquoi, monsieur le ministre, je
souhaite que, en concertation avec nos partenaires allemands, le maintien de
l'Institut français de Fribourg-en-Brisgau puisse être envisagé.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard,
ministre de la défense.
Monsieur le sénateur, je vous prie de recevoir
les excuses de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, qui défend
en ce moment même le budget de son ministère à l'Assemblée nationale.
La France, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, entretient en
Allemagne le plus important de nos réseaux culturels à l'étranger. Pour fixer
les idées, dans ce pays très proche et ami, sont localisés 13 % du total des
établissements culturels autonomes du ministère des affaires étrangères, soit
vingt-quatre implantations, ce qui fait beaucoup.
Aujourd'hui, dans un contexte évidemment très profondément modifié, et en
bien, du fait des multiples liens qui se sont créés entre nos deux sociétés et,
plus largement, de l'intégration européenne, il incombe au ministère des
affaires étrangères de moderniser le réseau culturel non seulement en Allemagne
mais dans toute l'Europe.
Ce réseau doit s'adapter aux nouvelles formes d'échanges qui structurent et
traversent l'Europe dans les domaines culturel et éducatif, en tenant tout
particulièrement compte du développement des industries culturelles, dont
certaines sont heureusement conjointes, et des nouvelles technologies de
l'information et de la communication.
Il faut aussi tenir compte - cela s'applique au cas de Fribourg-en-Brisgau -
de la coopération transfrontalière, qui est aujourd'hui l'un des principes
moteurs de nos relations européennes, ainsi que de l'implication des
partenaires de la société civile dans la gestion de ces relations, conformément
aux recommandations formulées lors du sommet franco-allemand de Potsdam.
Cette exigence d'adaptation s'impose également aux autorités allemandes, qui
travaillent actuellement à modifier leur propre dispositif diplomatique,
consulaire et culturel à l'étranger, toujours dans un souci de modernisation et
d'efficacité.
La réforme que le ministère des affaires étrangères envisage pour le réseau
culturel français en Allemagne n'a pas nécessairement à se traduire par des
fermetures pures et simples mais, au contraire, dans nombre de cas, peut se
manifester par le maintien d'une présence française assurée par des attachés de
coopération culturelle chargés de la mise en oeuvre des projets bilatéraux et,
parfois, multilatéraux, ce qui serait un progrès, et chargés également de
mettre en relation directe les professionnels de la culture de nos deux pays,
notamment dans le domaine artistique.
La dimension universitaire de notre action devrait également être renforcée
puisque, heureusement, les jeunes de la génération qui suit les nôtres sont
très familiarisés avec les études à l'étranger, raison pour laquelle le public
à accueillir et à soutenir s'est accru.
Si, donc, un plan de restructuration a fait l'objet de premières études,
aucune décision concernant le réseau culturel en Allemagne n'a encore été
arrêtée et, lorsque la réflexion en cours sera achevée et que ce plan de
restructuration sera, sans doute après des modifications, validé, nos
partenaires allemands seront approchés suffisamment à l'avance pour que l'on
puisse procéder à une réforme en concertation avec les autorités locales
allemandes et en confortant des liens solides avec elles.
Je vous remercie, monsieur le sénateur, de l'intérêt que vous manifestez pour
cette coopération culturelle qui demeure, aujourd'hui autant qu'hier,
absolument nécessaire pour la construction européenne telle que nous la
voyons.
Les propositions que le Président de la République a faites à Berlin, les 26
et 27 juin derniers, lors de sa visite d'Etat, avec, par exemple, la création
de l'académie franco-allemande du cinéma, témoignent de l'importance que notre
pays attache au resserrement de ses relations culturelles avec l'Allemagne.
M. Daniel Hoeffel.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel.
En vous remerciant, monsieur le ministre, de votre réponse, je me permets
d'insister sur deux points particuliers. D'une part, il ne saurait y avoir de
coopération politique confiante entre nos deux pays sans que cette coopération
se renforce sur les plans culturel et éducatif. C'est une exigence de notre
temps.
D'autre part, vous l'avez vous-même précisé, il est absolument nécessaire que
l'avenir de notre réseau culturel français en Allemagne puisse être assuré au
moyen d'une concertation étroite et forte avec nos partenaires. C'est, je
crois, la condition d'une adaptation et d'une modernisation réussies de la
présence culturelle française en Allemagne.
REDÉPLOIEMENT DES FORCES DE POLICE
ET DE GENDARMERIE DANS LES YVELINES
M. le président.
La parole est à M. Braye, auteur de la question n° 897, adressée à M. le
ministre de l'intérieur.
M. Dominique Braye.
Monsieur le ministre, ma question concerne la mise en place du plan de
redéploiement des effectifs de la police nationale et de la gendarmerie dans le
département des Yvelines.
Je rappelle que les Yvelines sont l'un des vingt-six départements prioritaires
du plan national de ce redéploiement.
La pertinence et l'urgence de cette réforme pour quatre communes des Yvelines,
dont trois du Mantois, ont fait l'objet, après un long et difficile travail des
élus locaux, d'un large consensus entre la population, les élus et les
responsables départementaux et locaux de la police et de la gendarmerie.
C'est pourquoi, dès la fin de l'année 1999, ces trois communes de
l'agglomération mantaise faisaient parvenir à la préfecture des Yvelines une
délibération de leurs conseils municipaux favorable à ce transfert de
compétence et demandant leur rattachement à la circonscription de police de
Mantes-la-Jolie. Or, cet engagement communal demandé avec insistance par les
services respectifs des ministères de l'intérieur et de la défense, ne s'est
pas traduit par un même engagement du Gouvernement, puisqu'il aura fallu plus
de dix mois d'attente pour obtenir une réponse concrète et positive des
services de la préfecture, celle-ci ne nous étant parvenue qu'il y a moins
d'une semaine.
En effet, les élus des communes de Buchelay, Magnanville et Toussus-le-Noble
viennent seulement d'être informés, par lettre du préfet des Yvelines en date
du 31 octobre 2000, de ce que le transfert de compétence serait effectif au 1er
janvier 2001. Si vous me confirmez cette information, monsieur le ministre,
j'en serais heureux, car bien que très tardive, elle respecte le choix des élus
locaux et répond aux nécessités du terrain.
Néanmoins, ma satisfaction sera loin d'être complète, car une commune,
Rosny-sur-Seine, demeure située en zone de gendarmerie.
Cette décision provoque l'étonnement, l'inquiétude et le mécontentement de
tous les élus du Mantois, car Rosny-sur-Seine fait partie de la communauté
d'agglomération de Mantes en Yvelines et présente, de surcroît, la
particularité d'être la commune la plus proche du quartier du Val-Fourré, à
Mantes-la-Jolie, ce qui implique qu'elle est confrontée, en termes d'insécurité
et de violences urbaines, pour le moins aux mêmes problèmes et aux mêmes
risques que les autres communes de l'agglomération mantaise, telles que
Magnanville et Buchelay.
Il semble donc évident pour tous les élus locaux, mais aussi pour tous les
services de police et de gendarmerie du Mantois, que la police nationale
devrait avoir compétence à Rosny-sur-Seine comme sur le territoire des autres
communes urbaines de la communauté d'agglomération de Mantes en Yvelines.
En effet, vous n'ignorez pas, monsieur le ministre, que cette commune présente
clairement, par rapport à Mantes-la-Jolie, une continuité territoriale se
traduisant, notamment, par l'existence de nombreux équipements collectifs et
sportifs communs, dont un collège qui, bien que situé à Rosny-sur-Seine,
accueille de nombreux élèves venant du quartier du Val-Fourré de
Mantes-la-Jolie.
Par ailleurs, les projets de développement de la zone franche du Val-Fourré et
la future urbanisation du quartier des Garennes, à la limite de la commune de
Rosny-sur-Seine, confortent largement cette analyse et contredisent le seul
argument avancé par les services de votre ministère, selon lequel il existerait
une brève discontinuité du bâti entre le Val-Fourré et Rosny-sur-Seine.
Il est évident pour tous les habitants de notre agglomération, et même pour
ceux qui n'y ont effectué qu'un bref séjour, que Rosny-sur-Seine a une
communauté territoriale et une communauté de destin avec les autres communes de
l'agglomération. Il apparaîtrait donc totalement incohérent et hautement
préjudiciable d'en faire une exception locale - injustifiée - en la laissant
sous compétence de la gendarmerie nationale, alors même que les trois autres
communes de son canton seraient placées, elles, sous l'autorité de la police
nationale.
Je vous demande donc, monsieur le ministre, de me préciser, d'une part, si
Rosny-sur-Seine sera rattachée elle aussi au 1er janvier 2001, voire un peu
plus tard, à la circonscription de police de Mantes-la-Jolie et, d'autre part,
quels effectifs de police supplémentaires sont prévus pour faire face à ces
nouvelles tâches, sachant que, malgré toutes les déclarations rassurantes des
différents représentants du Gouvernement et de l'Etat, les effectifs sont jugés
très insuffisants pour assurer la sécurité et la tranquillité de nos
concitoyens par tous les élus locaux, la population, et même par les
différentes forces de gendarmerie et de police elles-mêmes.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard,
ministre de la défense.
Monsieur le sénateur, je vous prie d'excuser mon
collègue et ami M. Daniel Vaillant, qui ouvre aujourd'hui la session annuelle
du Collège européen de police dans le cadre de la présidence française de
l'Union européenne.
Parmi les mesures de réorganisation territoriale entre la police et la
gendarmerie nationales arrêtées par les ministres de l'intérieur et de la
défense, figurent, pour le département des Yvelines, le transfert, sous la
responsabilité de la gendarmerie nationale, de la commune de Toussus-le-Noble,
qui est aujourd'hui en zone de police et, en sens inverse, le transfert des
communes de Buchelay et de Magnanville, dans l'agglomération de Mantes, qui,
elles, passent sous la responsabilité de la police nationale.
Ces deux communes, en raison de leur continuité avec l'assise territoriale de
la circonscription de sécurité publique de Mantes-la-Jolie, constituent
indiscutablement avec cette dernière un ensemble urbain homogène justifiant
leur intégration en zone de compétence de police.
Par ailleurs, nous avons tenu compte des souhaits et des avis qui ont été
exprimés par les conseils municipaux.
Donc, en conformité avec les dispositions législatives et réglementaires et en
s'appuyant sur les avis favorables des conseils municipaux, les arrêtés
interministériels qui transfèrent, d'une part, Toussus-le-Noble en zone de
gendarmerie, d'autre part, Buchelay et Magnanville en zone de police, sont à la
signature des ministres concernés. Je peux vous dire que j'en ai signé un
vendredi dernier et qu'il portait déjà la signature de M. Daniel Vaillant ; il
ne manque plus que celle de notre collègue de l'économie, des finances et de
l'industrie.
En ce qui concerne Rosny-sur-Seine, vous ne m'avez pas indiqué, monsieur le
sénateur, quel était l'avis du conseil municipal de la commune.
M. Dominique Braye.
Il est favorable, comme celui de la communauté d'agglomération.
M. Alain Richard,
ministre de la défense.
Je souhaite donc que nous réexaminions cette
question, et je vais en saisir M. Daniel Vaillant. S'il y a effectivement
continuité territoriale et vraiment matière à regroupements d'intérêts - en
tant qu'élu d'un département voisin, je perçois bien cette réalité - le dossier
peut certainement évoluer.
Mais, comme vous le suggérez, il reste bien entendu la question des effectifs
nécessaires pour que la police nationale puisse assurer la charge que
représentent ces milliers d'habitants supplémentaires, étant rappelé que
Buchelay et Magnanville sont déjà, à elles seules, une charge importante en
termes de populations et de sécurité publique. Sur ce point, je me permettrai
de vous adresser une réponse écrite : une augmentation d'effectifs est bien
prévue, mais je ne dispose pas des chiffres précis.
Concernant Rosny-sur-Seine, qui fait donc l'objet localement d'un souhait
unanime, le Gouvernement a pour doctrine d'opérer par cohérence un rattachement
quand il y a accord des partenaires. Cependant, il vous faut prendre en compte
les nécessités d'effectifs. Je me ferai donc votre interprète auprès de M.
Daniel Vaillant pour que nous travaillions ensemble à réexaminer le dossier de
Rosny-sur-Seine.
M. Dominique Braye.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse et de la franchise
dont vous avez fait preuve.
Je me permettrai une nouvelle fois d'insister : Rosny-sur-Seine est l'une des
six communes urbaines de la communauté d'agglomération de Mantes en Yvelines et
connait des problèmes de délinquance qui sont sûrement supérieurs à ceux de
Magnanville et de Buchelay, compte tenu à la fois de sa proximité avec le
Val-Fourré et du fait que le collège et les établissements scolaires
accueillent des enfants du Val-Fourré.
La communauté d'agglomération, qui a délibéré sur ce point ne relevant pas de
sa compétence, soutient la demande de Rosny-sur-Seine, tout comme le conseil
municipal, qui, à l'unanimité, a également émis un avis favorable, alors même
que, comme vous le savez, le passage de zone de gendarmerie en zone de police
n'est pas toujours évident.
Je vous demande donc, monsieur le ministre, de réexaminer cette question et de
me préciser, dans la mesure du possible, quelle sera l'augmentation des
effectifs de police ; c'est en effet un souci des élus locaux mais aussi des
services de police de savoir comment ils vont pouvoir faire face à ces
nouvelles tâches.
DEVENIR DE L'ASSISTANCE PUBLIQUE - HÔPITAUX DE PARIS
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau, auteur de la question n° 860, adressée à Mme le
secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Madame la secrétaire d'Etat, vous savez comme moi quel atout national
représente l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, l'AP-HP. Cet ensemble
hospitalier est le plus important établissement de soins d'Europe, avec ses 45
hôpitaux, ses 27 000 lits et ses 86 000 salariés ; c'est aussi le premier
centre de formation et la première université de mé decine du continent.
Reconnue comme un pôle d'excellence, l'AP-HP dispose d'une réputation nationale
et internationale. Ses missions de service public dépassent largement les
limites de l'Ile-de-France. Ses établissements reçoivent des patients de tout
le pays et même de l'étranger. Ils prennent notamment en charge des pathologies
lourdes ou rares. A titre d'exemple, ils ont effectué 1 581 greffes en 1998.
Aujourd'hui, nous considérons que cet atout national est menacé. C'est en tout
cas la crainte qu'expriment de plus en plus nettement les personnels
hospitaliers. La campagne médiatique de dénigrement n'est pas faite pour les
rassurer.
Une autre campagne, souvent entretenue d'ailleurs par les gouvernements, vise
à opposer l'AP-HP aux autres hôpitaux en présentant Paris et la région
parisienne comme des secteurs « surdotés », sans tenir compte de la spécificité
de l'AP-HP que j'évoquais à l'instant.
En fait, ce qui menace réellement le devenir de l'AP-HP, c'est cette logique
d'austérité imposée depuis des années au nom de la prétendue « maîtrise
comptable des dépenses de santé » qui frappe aussi bien les établissements de
Paris, de banlieue ou de province.
Depuis l'abandon de la dotation globale aux hôpitaux de France en 1991, le
taux annuel de progression de la dotation à l'AP-HP, à peine supérieur à 1 %
avec un minimum de 1,08 % l'an dernier, s'est révélé incompatible avec la seule
reconduction des activités et du personnel. Pour 2000, la fédération
hospitalière de l'Ile-de-France estimait qu'une augmentation de 2,4 % était
nécessaire pour cela. Et je ne parle pas de la croissance des besoins en
matière de soins et d'investissements en matériels de nouvelle technologie.
Sur plusieurs années, cette logique d'austérité remet en cause toutes les
missions de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris.
Le très fort mouvement revendicatif dans les hôpitaux publics qui s'est
traduit, l'année dernière, par des grèves étalées sur quatre mois a révélé
l'ampleur de la détérioration des conditions de travail, qui sont à la limite
du supportable pour les personnels et dangereuses pour la sécurité des
patients.
A l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, les personnels hospitaliers
dénoncent les orientations du schéma régional d'organisation sanitaire et
sociale 2001-2004 et la dégradation de l'offre et de la qualité des soins qu'il
prévoit.
En Ile-de-France, 11 000 lits de court séjour risquent d'être ainsi fermés
d'ici à 2004 - après la fermeture de 17 000 de 1994 à 1999 -, dont 1 000 par an
à l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, et 2 000 emplois supprimés alors
que les syndicats estiment à 10 000 les personnels manquants.
Les critères comptables qui président aux choix stratégiques mis en oeuvre par
la direction de l'Assistance publique vont à l'encontre de l'évolution des
besoins de santé à Paris et en Ile-de-France.
Permettez-moi, madame la secrétaire d'Etat, de vous citer deux exemples à cet
égard.
Alors que la direction de l'Assistance publique reconnaît une augmentation
constante des urgences - elles ont progressé de 16 % de 1994 à 1997 - le plan
de restructuration prévoit de fermer les deux tiers des sites.
De même, 1 600 lits de gériatrie doivent être fermés alors que la demande dans
ce secteur ne cesse de croître.
Il résulte de cette évolution que le secteur privé se « taille des croupières
» au détriment de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris et s'empare des
activités les plus rentables. Aujourd'hui, par exemple, 60 % des actes de
chirurgie ambulatoire sont effectués par le secteur privé et 50 % par les
maternités.
L'ensemble de la structure AP-HP continue à s'affaiblir. La logique de
restriction financière imposée par les politiques gouvernementales successives
conduit à faire des arbitrages entre ses missions de service public et même à
déstructurer certaines de ses filières d'excellence. L'hôpital européen
Georges-Pompidou, qui vient d'ouvrir ses portes avec sept ans de retard et des
centaines de millions de francs de surcoût, en est la parfaite illustration.
L'Etat s'est complètement désengagé du financement de la construction de cet
hôpital « vitrine », à vocation européenne, doté d'un grand plateau technique.
Cela conduit l'AP-HP à sacrifier une partie de son patrimoine et à fermer les
hôpitaux Boucicaut, Laennec et Saint-Lazare ainsi qu'une grande partie de
l'hôpital Broussais, dont les activités ne se retrouvent que très partiellement
dans le nouvel hôpital.
Dans le but - je n'en doute pas - de rechercher des recettes diverses et
complémentaires à son budget, l'AP-HP, qui semble inscrire à son activité un
nouveau volet, celui de la spéculation foncière, ne vient-elle pas de décider
de vendre les quatre hectares du site de Laennec à la COGEDIM pour réaliser des
logements haut de gamme ? D'autres projets existeraient. En avez-vous
connaissance ? Quelle est votre position ?
Entre le Bon Marché, les jardins de Matignon et ceux de Saint-Vincent-de-Paul,
en pleine rive gauche, allez-vous laisser la spéculation s'organiser pour
prendre la place d'un hôpital ? Ce serait, à mon avis, une perversion de
fonctions. Un coup d'arrêt doit être donné, ne serait-ce que pour éviter
d'autres initiatives de ce type n'ayant plus rien à voir avec une
réorganisation des services de soins à Paris et en Ile-de-France.
Je vous rappelle d'ailleurs...
M. le président.
Madame Beaudeau, veuillez conclure ! Vous avez largement dépassé votre temps
de parole !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
... que les Parisiens s'inquiètent de voir s'éloigner des services de soins et
de proximité. L'an passé, le conseil d'administration...
M. le président.
Cette fois-ci, je vous prie de conclure, madame !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je conclurai donc en vous posant deux questions, madame la secrétaire d'Etat :
pouvez-vous réaffirmer aujourd'hui les missions de l'Assistance publique -
hôpitaux de Paris ? Quels moyens budgétaires allez-vous attribuer pour que,
contrairement à l'an passé, le budget puisse être adopté par le conseil
d'administration et non pas imposé par arrêté ministériel ?
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.
Madame la sénatrice, les
propos que vous venez de tenir trouveront toute leur place dans le débat sur le
projet de loi de financement de la sécurité sociale qui aura lieu prochainement
; nous aurons alors l'occasion de reparler de la politique hospitalière, de la
restructuration et des objectifs nationaux de dépenses d'assurance maladie.
En ce qui concerne spécifiquement les deux dernières questions que vous m'avez
posées, je veux confirmer devant vous que l'AP-HP est un ensemble hospitalier
au rôle éminent, reconnu de tous, y compris, bien évidemment, du Gouvernement.
Il emploie 68 000 agents et plus de 8 000 médecins. Il assure - je le souligne
comme vous - non seulement des activités de pointe et de recherche médicale qui
honorent notre pays, mais aussi des activités de prise en charge de proximité
qui sont indispensables aux usagers parisiens.
Si nous demandons effectivement des efforts à l'AP-HP, nous tenons également
compte - je tiens à le rappeler - de ses contraintes. Alors qu'en 1997, le
budget avait régressé de 0,34 %, il a augmenté de 0,91 % en 1998 et de 1,48 %
en 1999. Le gouvernement actuel a donc pris en compte les besoins de l'AP-HP.
Pour l'an 2000, c'est une progression significative du budget qui sera
enregistrée, une fois que les comptes seront arrêtés, compte tenu des crédits
nationaux auxquels l'AP-HP a pu prétendre par le biais de différentes
enveloppes qui lui ont été accordées pour faire face à ses obligations.
En effet, l'AP-HP a bénéficié d'un soutien financier conséquent dans la mise
en oeuvre des protocoles de mars 2000, notamment avec des crédits pour les
remplacements des personnels hospitaliers sur des postes existants mais non
pourvus, et des mesures relatives aux personnels médicaux.
Par ailleurs, une attention particulière a été portée au volet « recherche et
soins coûteux » et, dans le cadre du récent appel d'offres lancé sur le plan
national, l'AP-HP s'est vu attribuer une enveloppe supplémentaire tenant compte
de ses spécificités médicales et des projets déposés qui méritent un
financement particulier.
S'agissant enfin de la question de l'emploi précaire, un accord a été conclu
entre la direction générale de l'AP-HP et l'ensemble des organisations
syndicales.
Cependant, les efforts que nous demandons à l'AP-HP sont justifiés par la
volonté de réduire les inégalités entre régions. Quels que soient les critères
retenus - budget hospitalier par habitant, dépenses par pathologie traitée,
indice de mortalité -, Paris et donc l'AP-HP apparaissent mieux dotés que les
autres régions, et ce même si l'on tient compte des spécificités de cet
établissement en termes de recherche ou de rayonnement international. Je pense
que nous serons tous d'accord pour considérer que les inégalités en matière de
santé sont les plus insupportables et que le mouvement de réductions des
inégalités doit être poursuivi, ce mouvement n'ayant rien à voir avec une
politique d'austérité, mais résultant d'une politique de transparence et
d'affectation des justes moyens aux besoins ressentis.
Je n'ignore pas pour autant les difficultés de l'exercice. Ce dernier n'est
possible que sur la base d'un dialogue social intense au sein même de
l'institution. Il suppose une vraie réflexion sur l'organisation interne de
l'AP-HP. Le plan stratégique en cours d'élaboration pour la période 2001-2004
doit en être l'occasion.
Je sais que son élaboration a donné et donne encore lieu à des concertations
internes auxquelles les établissements ont participé et qui ont associé
l'agence régionale d'hospitalisation d'Ile-de-France. Mais nous sommes
régulièrement sollicités par des groupes d'usagers ou des élus qui considèrent
que la concertation n'est pas encore arrivée à son terme.
Je tiens à vous dire, madame la sénatrice, que tout est mis en oeuvre pour
préserver le dynamisme de l'AP-HP dans son rôle d'hôpital de proximité, de
centre de référence nationale, voire internationale, en tenant compte de la
nécessité de moderniser ses différents établissements.
Le transfert de trois établissements dans l'hôpital Georges-Pompidou en est la
concrétisation. Mais tout cela doit se faire dans le respect de la politique
sanitaire définie pour l'ensemble du pays et dans le souci de laisser toute sa
place au dialogue social.
J'en viens à votre crainte d'une éventuelle spéculation foncière à l'occasion
de la mise en vente des terrains de l'hôpital Laennec. S'agissant d'une
propriété privée, le Gouvernement aurait pu laisser les choses aller leur cours
; tel n'est cependant pas le cas, le Gouvernement n'entendant pas rester inerte
dans cette affaire. Il a donc décidé d'étudier ce dossier complexe et difficile
et d'intervenir au regard non seulement des règles de l'urbanisme, mais aussi
des montages juridiques et financiers des promoteurs. En effet, l'avenir des
terrains de l'hôpital Laennec concerne non pas seulement l'AP-HP qui en est
propriétaire, mais aussi l'ensemble des Parisiens et de leurs représentants :
il faut en effet veiller à ce que la commercialisation de ces terrains permette
de répondre à certains besoins non satisfaits des Parisiens.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau, à qui je demande d'intervenir brièvement dans la
mesure où elle a déjà utilisé le double de son temps de parole.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d'Etat.
Je reconnais que, jusqu'à ces dernières années, l'Assistance publique -
hôpitaux de Paris a bénéficié de meilleures dotations budgétaires que les
hôpitaux ruraux, de province, de banlieue et notamment de grande couronne.
Qu'il me soit toutefois permis de rappeler que, l'an dernier et au début de
cette année, les personnels hospitaliers de l'Assistance publique ont exprimé
avec force et détermination le refus de la poursuite de cette politique en
manifestant à de nombreuses reprises. Mme Aubry avait même dû reconnaître la
légitimité de leurs revendications en accordant des crédits d'urgence aux
hôpitaux, crédits intégrés, comme vous l'avez dit, au dernier collectif
budgétaire. Mais ces crédits se sont élevés pour l'Assistance publique -
hôpitaux de Paris à 174 millions de francs, soit à peine plus que les 156
millions de francs d'économie que le Gouvernement lui avait imposés, et n'ont
principalement servi qu'à rebudgétiser des postes déjà existants.
Je voudrais également évoquer un chiffre qui est pris dans notre département
commun, madame la secrétaire d'Etat : trois habitants du Val-d'Oise sur quatre
atteints d'un cancer sont soignés dans des hôpitaux parisiens. Pourquoi ? Je
sais d'ailleurs votre souci de prévoir des dotations supplémentaires en faveur
de nos hôpitaux de grande couronne. Et à ce propos, j'attends avec impatience
vos décisions quant à l'affectation de nouveaux appareils d'imagerie à
résonance magnétique, dont trois au moins sont nécessaires pour mon
département.
En conclusion, monsieur le président, je précise que je tenais simplement à
souligner, en posant cette question, que, si l'Assistance publique bénéficiait
jusqu'à présent d'un traitement privilégié, ce n'est plus le cas aujourd'hui,
tant il est vrai que cette dernière partage désormais le sort de l'ensemble du
système de soins hospitaliers.
Dans le cadre d'une nouvelle politique...
M. le président.
Madame Beaudeau, il vous faut conclure !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je conclus, monsieur le président !
Dans le cadre d'une nouvelle politique de soins hospitaliers, ne faudra-t-il
pas, madame la secrétaire d'Etat, quitter rapidement le terrain des
comparaisons et des affrontements entre hôpitaux de Paris et de banlieue, entre
hôpitaux franciliens et de province, entre hôpitaux ruraux et urbains ?
Quoi qu'il en soit, je vous suivrai sur un point au moins, madame la
secrétaire d'Etat : nous reprendrons ce débat lors de l'examen du projet de loi
de financement de la sécurité sociale.
M. le président.
Madame Beaudeau, je vous rappelle que les temps de parole sont de trois
minutes pour poser une question et de deux minutes pour répondre au
Gouvernement, et non pas de six minutes et demie d'un côté et de deux minutes
vingt de l'autre !
RECONNAISSANCE
DE LA MÉDECINE ANTHROPOSOPHIQUE
M. le président.
La parole est à M. Haenel, auteur de la question n° 908, adressée à Mme le
secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.
M. Hubert Haenel.
Madame la secrétaire d'Etat, pouvez-vous préciser vos intentions au sujet de
la reconnaissance officielle des médecines non conventionnelles, tout
particulièrement de la médecine anthroposophique ? Les éléments que vous m'avez
adressés en réponse à une question écrite que je vous avais posée à cet égard
étaient, en effet, quasi « ésotériques », ce qui explique que je revienne à la
charge.
Dans sa résolution du 27 mai 1997, le Parlement européen constate que le
recours d'une partie de la population des Etats membres de l'Union à certaines
médecines non conventionnelles ne peut être ignoré. Partant de ce constat, il
considère qu'il est important d'assurer aux patients une liberté de choix
thérapeutique aussi large que possible en leur garantissant, bien sûr, le plus
haut niveau de sécurité, l'information la plus correcte sur l'innocuité, la
qualité, l'efficacité et les éventuels risques des médecines dites « non
conventionnelles », ainsi qu'une protection contre les personnes non
qualifiées.
Dans cette même résolution, le Parlement européen demande à la Commission de
s'engager dans un processus de reconnaissance des médecines non
conventionnelles et, notamment, d'élaborer en priorité une étude approfondie
sur l'innocuité, l'opportunité, le champ d'application et le caractère
complémentaire et/ou alternatif de chaque discipline non conventionnelle.
Or, lorsque je vous ai interrogée, madame la secrétaire d'Etat, par le biais
d'une question écrite, sur la reconnaissance officielle de la médecine
anthroposophique, vous m'avez répondu, le 7 septembre dernier, qu'il s'agissait
d'« une tradition mystique et ésotérique d'origine occidentale » qui ne faisait
pas partie des médecines conventionnelles pour lesquelles la France avait
entrepris certaines actions dans la perspective de s'engager dans un processus
de reconnaissance officielle, dans l'esprit de la résolution du 27 mai 1997 du
Parlement européen.
Vous ajoutiez que, parallèlement à ces actions, vous veilliez à protéger les
malades des déviances - charlatanisme, sectes... - qui sont nombreuses en ce
domaine. Vous étiez là parfaitement dans votre rôle.
Or, madame la secrétaire d'Etat, la médecine anthroposophique fait bien partie
des médecines non conventionnelles pour lesquelles le Parlement européen invite
la Commission à entamer des études approfondies.
Si vous travaillez effectivement dans l'esprit de cette résolution, vous ne
pouvez donc ignorer cette médecine. En effet, le Parlement indique, dans son «
sixième considérant », que certaines médecines non conventionnelles bénéficient
d'une forme de reconnaissance légale dans certains Etats membres, en
particulier la médecine anthroposophique. Il ajoute, dans son « huitième
considérant », qu'une évolution des législations s'est déjà manifestée,
notamment par l'introduction des médicaments dans la pharmacopée, et cite en
exemple la médecine anthroposophique en Allemagne.
Nous sommes là bien loin, convenez-en, de la description que vous avez faite,
madame la secrétaire d'Etat, d'une application d'une idée mystique
traditionnelle de l'Occident suspecte de sectarisme et de charlatanisme !
Il va de soi que le double principe de la liberté pour les patients de choisir
la thérapeutique qu'ils souhaitent et de la liberté pour les praticiens
d'exercer leur profession implique qu'il faut garantir l'innocuité et la
qualité des traitements dispensés, assurer une formation appropriée des
praticiens, codifier leur statut professionnel et introduire les remèdes de ces
médecines dans la pharmacopée européenne.
En conclusion, nos concitoyens sont en droit de connaître votre position,
madame la secrétaire d'Etat. Celle-ci doit être claire et déterminée à l'égard
tant de la médecine anthroposophique que de la mise en oeuvre des études
nécessaires à l'engagement, le cas échéant, d'une procédure de reconnaissance
officielle de celle-ci par la France afin d'en finir une bonne fois pour toutes
avec les ambiguïtés actuelles et, parfois, avec les procès en sorcellerie
engagés ici ou là.
Nos concitoyens sont en droit d'attendre des pouvoirs publics qu'ils prennent
une position officielle dans le cadre national et européen.
M. le président.
La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.
Monsieur le sénateur,
vous appelez mon attention sur les mesures qui ont été prises en France pour
assurer la reconnaissance de la médecine anthroposophique.
Je récuse le qualificatif de « charlatanisme », mais je maintiens que la
médecine anthroposophique s'inspire d'un mouvement mystique et ésotérique
d'origine occidentale. Ce n'est pas une technique médicale reconnue, et elle
n'a fait l'objet d'aucune évaluation validée scientifiquement.
Si la résolution du 27 mai 1997 du Parlement européen, à laquelle se réfère
votre question, constitue une première étape dans la voie de la reconnaissance
des médecines non conventionnelles, elle présente le caractère d'une
recommandation et ne saurait avoir actuellement une valeur contraignante.
Par ailleurs, la directive 92/73/CEE du 22 septembre 1992 élargissant le champ
d'application des directives précédentes concernant le rapprochement des
dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives aux
médicaments et fixant des dispositions complémentaires pour les médicaments
homéopathiques, sur laquelle vous vous fondez pour solliciter la reconnaissance
de la médecine anthroposophique, ne réglemente pas à proprement parler deux
types de médicaments, respectivement homéopathiques et anthroposophiques.
Ce texte se borne à préciser, dans ses considérants d'introduction - et non
dans son dispositif -, que les médicaments anthroposophiques ne sont
assimilables aux médicaments homéopathiques que dans la mesure où ils sont
décrits dans une pharmacopée officielle et préparés selon une méthode
homéopathique. Loin de placer les deux types de médicaments sur un même pied,
cette assertion illustre parfaitement les limites que rencontre actuellement le
concept de médecine anthroposophique.
Sur l'ensemble de ces sujets, le Gouvernement français observe une attitude
pragmatique. Il s'est, en conséquence, déjà engagé dans un travail sur
l'ouverture à des non-médecins de la pratique de certaines techniques jusque-là
réservées aux médecins, telles que l'ostéopathie ou la chiropraxie. La
reconnaissance de la médecine anthroposophique ne fait pas, pour le moment,
partie de ses préoccupations.
(M. Leclerc applaudit.)
M. Hubert Haenel.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Haenel.
M. Hubert Haenel.
Je crois, madame le secrétaire d'Etat, que nous restons dans l'ambiguïté
complète.
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
Ah non !
M. Hubert Haenel.
Je ne demande pas une reconnaissance de la médecine anthroposophique, je
souhaite simplement que l'on soit clair,...
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
Nous sommes clairs !
M. Hubert Haenel.
... car les personnes qui suivent ce type de traitement sont en droit de
savoir quelle est la position officielle à cet égard, et si vous comptez ou non
vous engager non pas dans la voie de la reconnaissance de cette médecine, mais
dans des études suffisamment approfondies sur la question.
La réponse que vous venez de me faire s'inscrit donc dans le droit-fil de
celle que vous avez apportée à ma question écrite. Je m'en tiendrai là pour le
moment, mais je pense, soit dit entre nous, que ce n'est pas sérieux, car nos
concitoyens sont en droit d'attendre des indications de la part des pouvoirs
publics.
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
Je suis contraint de vous demander d'être brève, madame le secrétaire d'Etat,
car nous dépassons très largement les temps de parole prévus.
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat.
J'indiquerai simplement d'un mot que ce n'est pas
parce que certaines personnes font confiance à ce type de médecine que je vais
vous dire que c'est une pratique reconnue et validée scientifiquement !
Rien ne me permet aujourd'hui d'affirmer cela, et rien ne me permet de
rassurer les adeptes de cette médecine au sujet d'une validation scientifique
qui n'existe pas.
M. Dominique Leclerc.
Elle a raison !
CESSATION ANTICIPÉE D'ACTIVITÉ
DES SALARIÉS EXPOSÉS À L'AMIANTE
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard, auteur de la question n° 893, adressée à Mme
le ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Ma question, qui s'adresse à Mme le secrétaire d'Etat à la santé, concerne les
modalités de mise en oeuvre de la préretraite « amiante » et le calcul des
dates de fin d'exposition à ce matériau dangereux. Elle concerne également la
liste des établissements retenus, car certaines entreprises sous-traitantes de
la construction et de la réparation navale ont été oubliées.
En 1998, le Gouvernement a souhaité instituer une allocation de cessation
anticipée d'activité pour les salariés ayant été exposés à ce matériau,
susceptible de provoquer des pathologies graves telles que les plaques
pleurales, les asbestoses ou les mésothéliomes.
Un arrêté du 7 juillet 2000 précise la liste des entreprises, des métiers et
des périodes d'exposition pour la construction et la réparation navale.
Plusieurs organisations syndicales, mais aussi l'association de défense des
victimes de l'amiante, se mobilisent car, pour le chantier de Saint-Nazaire, le
choix de l'année 1975 comme date de fin d'exposition à l'amiante pose un
problème.
En effet, l'écoulement des stocks d'amiante pour le flocage s'est poursuivi
au-delà de 1975. Puis un autre procédé a été utilisé jusqu'aux années
quatre-vingt-dix : il s'agit de panneaux en marinite, composé d'amosite qui
est, selon l'Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention
des accidents du travail et des maladies professionnelles, une des variétés
d'amiante les plus dangereuses. A l'occasion de leur manipulation, des fibres
ont été inhalées par les salariés jusqu'aux années 1990, et des joints
contenants de l'amiante ont été employés jusqu'en 1997.
Vous comprendrez donc, madame la secrétaire d'Etat, que les salariés aient été
émus lors de la parution de l'arrêté de juillet dernier alors que, pour les
sites de la Normed, où étaient exercés les mêmes métiers dans des conditions
techniques comparables, la date retenue correspond, en fait, à la fermeture de
cette entreprise en 1989.
Par ailleurs, certaines personnes qui seraient concernées par la préretraite «
amiante » échappent, de fait, à ce dispositif. Elles sont aujourd'hui au
chômage. Je pense en particulier aux 450 salariés de l'entreprise Dubigeon, qui
avaient été remerciés. Pour eux, la situation est encore plus injuste, car ils
sont privés de ce dispositif.
En outre, sont absentes de la liste de certaines entreprises de sous-traitance
navale, ainsi que des entreprises de services, notamment de nettoyage.
Il paraît donc essentiel que le temps réel d'exposition à l'amiante soit pris
en compte - et ce pour tous les salariés -, tout comme il paraît équitable de
faire bénéficier de ce dispositif les salariés atteints d'affections pleurales,
considérées comme bénignes et classées en catégorie B du tableau n° 30 des
maladies professionnelles, car ils ne sont pas répertoriés parmi les
bénéficiaires de ce dispositif.
Madame la secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous indiquer les critères qui ont
été retenus pour arrêter l'année 1975 comme date limite d'exposition pour ces
entreprises ? Le Gouvernement envisage-t-il de réexaminer cette décision,
notamment au vu des informations fournies par les représentants des personnels
? Peut-il, de même, envisager d'intégrer parmi les bénéficiaires de ce
dispositif les salariés atteints par des lésions pleurales dites bénignes ?
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.
Madame la sénatrice, nous
savons tous les souffrances qu'endurent ceux qui ont été exposés à l'amiante et
la détresse de ceux qui leur sont proches.
Comme souvent, l'injustice s'est acharnée sur les plus fragiles. Ce sont le
plus souvent les salariés astreints à des emplois pénibles qui, aujourd'hui,
sont fauchés par la maladie.
C'est pourquoi, depuis que ce gouvernement est en place, il a oeuvré pour que
ces drames humains ne se doublent pas de drames sociaux. D'importantes mesures
ont été prises pour faciliter l'accès à la reconnaissance et à la réparation
des maladies professionnelles pour l'ensemble des personnes qui en sont
victimes. Des mesures plus spécifiques pour les maladies liées à l'amiante ont
également été mises en oeuvre.
Le dispositif de cessation anticipée d'activité pour les travailleurs de
l'amiante est, bien évidemment, un élément fondamental de cette politique. Créé
en 1999, il a été élargi par la loi de financement de la sécurité sociale pour
2000 au secteur de la construction et de la réparation navale.
La mise en oeuvre de ce dispositif nécessitait de recenser les entreprises
concernées et, pour chacune, les périodes pendant lesquelles l'amiante avait
été utilisée. C'est l'objet de l'arrêté du 7 juillet 2000.
Je crois utile de préciser que ce travail de recensement est particulièrement
lourd et minutieux, vous le savez. Il s'agit de repérer des centaines
d'entreprises, or certaines ont disparu depuis longtemps, tandis que d'autres,
touchées par les restructurations, ont changé plusieurs fois de dénomination,
de raison sociale ou de propriétaire.
Ce travail est réalisé en étroite concertation avec les services déconcentrés
du ministère, avec les caisses de sécurité sociale ou encore avec les mutuelles
des secteurs concernés.
Comme nous l'avons fait pour les entreprises de fabrication d'amiante, nous
prendrons autant de textes qu'il sera nécessaire dans le domaine de la
construction et de la réparation navale pour couvrir tant les entreprises que
les périodes ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité.
Pour ce faire, nous nous appuyons notamment sur les informations transmises
par les organisations syndicales et par les associations d'aide aux victimes.
Je tiens d'ailleurs à souligner la qualité et le sérieux de leurs
interventions. En ce domaine, leur collaboration nous est indispensable !
Des modifications de l'arrêté du 7 juillet 2000 sont d'ores et déjà prévues
et, dans le cas particulier des Chantiers de l'Atlantique, grâce aux
informations transmises par les syndicats, après vérification auprès des
caisses régionales d'assurance maladie et des directions régionales du travail,
de l'emploi et de la formation professionnelle, nous allons prolonger la
période ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité dans
cette entreprise dans le sens que vous souhaitez. Les modifications nécessaires
seront prochainement soumises pour avis, comme le prévoit la procédure, à la
commission des accidents du travail et feront l'objet d'un arrêté
modificatif.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'Etat, de cette réponse très ouverte,
de nature à donner satisfaction aux salariés intervenant dans la construction
et la réparation navale.
Restent ceux qui sont atteints de maladies professionnelles classées dans la
catégorie B du tableau n° 30.
Je vous demande de ne pas fermer ce dossier. En effet, nous nous trouvons dans
une situation paradoxale où des salariés ayant été exposés mais ne manifestant
aucun signe pathologique peuvent envisager de partir en préretraite anticipée
alors que d'autres, qui ont une pathologie déclarée, certes considérée comme
bénigne, se voient refuser le bénéfice de ce dispositif.
MAINTIEN À DOMICILE DES PERSONNES ÂGÉES
M. le président.
La parole est à M. Mouly, auteur de la question n° 909, adressée à Mme le
ministre de l'emploi et de la solidarité.
M. Georges Mouly.
Madame le secrétaire d'Etat, le maintien à domicile est l'un des axes
prioritaires de la politique en direction des personnes âgées, à quelque niveau
que ce soit. La volonté politique est, de ce point de vue, constamment
affirmée, même si, concrètement, en termes de moyens, il reste toujours à
faire.
La clôture des travaux de l'année internationale des personnes âgées a été «
l'occasion de souligner la nécessité de repenser les moyens du maintien à
domicile et de concourir à leur mise en cohérence au travers de la création
d'un réseau de coordination gérontologique organisant le maillage du territoire
à partir des échelons de proximité ». Je cite - vous l'aurez reconnue, madame
le secrétaire d'Etat - l'introduction de la circulaire DAS du 6 juin 2000
relative aux centres locaux d'information et de coordination, CLIC, pour
l'expérimentation 2000 et la programmation 2001-2005.
En ma qualité d'élu d'un département où la moyenne d'âge est élevée, président
d'une instance cantonale de coordination gérontologique et, surtout, d'une
association intercantonale, regroupant des cantons urbains et ruraux, d'aide à
domicile pour personnes âgées, initiant une expérimentation, déjà bien avancée,
de coordination locale autour de la personne âgée, c'est avec une attention
toute particulière que j'ai suivi la mise en oeuvre de cette nouvelle démarche,
puisque les sites pilotes choisis pour expérimenter les CLIC doivent servir de
laboratoire.
La circulaire établissait le calendrier prévisionnel suivant : réunions
interrégionales en septembre-octobre 2000, bilan d'activité des sites
expérimentaux, validation du cahier des charges détaillé et de la procédure de
labellisation des CLIC en novembre 2000, enfin publication du cahier des
charges et appel à projets pour la campagne 2001 en décembre 2000.
Nous sommes en novembre ; je suppose que le calendrier, à quelques détails
près, a été respecté. Si oui, l'heure est donc au bilan et à l'élaboration du
cahier des charges.
C'est pourquoi je souhaite vous demander, madame le secrétaire d'Etat, si les
spécificités du milieu rural seront prises en compte pour la population
concernée par la mise en oeuvre d'un CLIC.
En effet, dans les départements ruraux, où le nombre de personnes âgées est
souvent important, la densité est très fréquemment faible, voire très faible,
en dehors des principaux pôles. Si la notion de seuil prise en compte pour les
expérimentations devait être maintenue, à savoir, si mes informations sont
exactes, de 7 000 à 10 000 personnes de plus de soixante ans sur le territoire
couvert par un CLIC, elle pourrait avoir de fâcheuses conséquences sur la
pertinence d'une coordination locale en contraignant les porteurs de projet à
élargir, géographiquement parlant, la compétence du CLIC. Or la notion de
proximité reste essentielle en matière de coordination et de maintien à
domicile - bonne connaissance des partenaires, fonctionnement rationalisé,
etc.
Ces considérations me conduisent à poser deux autres questions.
Le financement est annoncé pérenne jusqu'en 2005. Pourrait-on avoir
connaissance de son montant et surtout de ses modalités d'attribution ? De ce
point de vue, ne serait-il pas possible, et je reviens un peu sur ma réflexion
précédente, d'éviter les effets de seuil en proratisant ce financement à la
population de plus de soixante ans effectivement concernée ?
Ma dernière question est plus concrète : quelle aide peut être envisagée pour
le CLIC de l'association intercantonale du pays de Tulle, dont je vous parlais
tout à l'heure ? C'est le deuxième en Corrèze ; il a reçu un avis très
favorable au départ, et il est d'ores et déjà opérationnel après un très long
travail de rencontres, de consultations, d'échanges. Hier même, nous avons
d'ailleurs procédé au recrutement d'une coordinatrice, qui est une personne
hautement qualifiée et d'expérience. C'est une chance. Que pouvons-nous espérer
de l'Etat en la matière ?
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot,
secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.
Monsieur le sénateur,
vous appelez mon attention sur la mise en place des centres locaux
d'information et de coordination.
Pour bâtir une politique de maintien à domicile à la mesure des enjeux et pour
assurer aux personnes âgées le libre choix de leur mode de vie, le Gouvernement
a engagé une réforme de grande envergure. Il y a, bien sûr, l'instauration
d'une nouvelle prestation d'aide à l'autonomie, mais aussi la création des
CLIC, que vous évoquez, appelés à mailler le territoire au niveau des bassins
de vie pour assurer la coordination gérontologique des services qui sont utiles
à nos concitoyens âgés.
Vous avez également noté le développement des services de soins infirmiers à
domicile et la constitution d'une filière de formation des aides à domicile
avec la professionnalisation et la reconnaissance de cette activité.
La circulaire du 6 juin dernier que vous avez citée précise les modalités de
mise en place des CLIC.
Le calendrier prévisionnel des actions conduites en 2001 fixé par cette
circulaire du 6 juin ne sera pas bouleversé. La rédaction du cahier des charges
détaillé est en cours. Ce document, destiné à accompagner l'appel à candidature
pour 2001, devra être effectivement disponible à la fin de l'année. L'extension
du réseau en 2001 sera assurée par l'inscription d'une enveloppe de 70 millions
de francs sur les crédits du titre IV du ministère de l'emploi et de la
solidarité dont nous allons débattre prochainement.
Enfin, les spécificités du milieu rural que sont la faible densité de
population, son vieillissement supérieur à la moyenne nationale et l'habitat
dispersé devront nécessairement être prises en compte. Le critère démographique
sera relativisé pour que le territoire couvert par les CLIC soit en adéquation
avec la réalité du bassin de vie. Il faudra aussi, vraisemblablement,
travailler au développement, dans les zones rurales, d'équipes médico-sociales
mobiles, du fait, précisément, de la dispersion de l'habitat.
Sur ce point, le fonctionnement des sites pilotes de la Creuse, de la Nièvre,
des Hautes-Pyrénées et de la Haute-Vienne, notamment, devrait nous apporter
quelques orientations pertinentes qui inspireront les propositions du
Gouvernement.
En conclusion, monsieur le sénateur, je voudrais insister, puisque, au fond,
c'est notre préoccupation commune, sur la nécessaire réflexion des acteurs
locaux, notamment ceux du canton de Tulle que vous avez évoqués, sur ce que
devrait être, d'ici à cinq ans, l'organisation territoriale et le maillage des
CLIC dans chaque département. C'est dire si, dans cette affaire, les services
déconcentrés de l'Etat ont partie liée avec les conseils généraux que
j'aimerais bien trouver aussi déterminés sur l'ensemble du territoire que dans
certains départements où l'on a un très bon partenariat, partenariat qui sera
déterminant pour la mise en oeuvre d'une coordination gérontologique de
proximité au service des personnes âgées et de leur entourage.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Très bien !
M. Georges Mouly.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Mouly.
M. Georges Mouly.
Madame le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse, même si
j'aurais aimé que sur ma dernière question, vous avanciez un chiffre...
Toutefois, j'ai noté, vous l'avez rappelé, tous les efforts faits par le
Gouvernement s'agissant des différents aspects d'une politique de maintien à
domicile des personnes âgées.
Vous avez confirmé la vocation des CLIC, maillage du territoire, et j'ai
apprécié les renseignements que vous m'avez apportés concernant la prise en
considération des caractéristiques du milieu rural en la matière.
J'espère que tout cela se concrétisera rapidement et que, sur place, le
département étant déterminé pour le volet qui relève de son ressort, les
initiatives comme celles que je me suis permis de mentionner recevront bientôt
les réponses souhaitées.
RÉSEAU FERROVIAIRE DU SUD-EST
DE LA FRANCE ET LIAISONS AVEC L'ITALIE
M. le président.
La parole est à M. Balarello, auteur de la question n° 866, adressée à M. le
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. José Balarello.
Monsieur le ministre, le rapport de M. Blanchet, ingénieur en chef des
ponts-et-chaussées, commandé par la direction des routes et la direction des
transports terrestres de votre ministère, vous a été remis en mars 2000. Cette
étude sur les transports dans les Alpes-Maritimes aborde, à de très nombreuses
reprises, le problème de la ligne ferroviaire Nice-Breil-Tende-Cuneo.
Cette ligne est qualifiée d'obsolète par ce rapport. L'état de la voie limite
la vitesse maximale à 70 kilomètres par heure et la vitesse moyenne à 45
kilomètres par heure pour les meilleurs trains.
Les liaisons entre Turin et la Côte d'Azur sont très lentes et de mauvaise
qualité : quatre heures pour 200 kilomètres. Le rapport relève également la
faible fréquence des services quotidiens, au nombre de cinq. La clientèle
empruntant cette voie, au nombre de 300 000 voyageurs par an, est
principalement liée aux trajets périurbains alors que cette ligne est une
ouverture sur le Piémont, Cuneo et Turin.
L'ingénieur Blanchet conclut en considérant que la modernisation de la voie
ferrée Nice-Breil est consensuelle et nécessaire, la création de services
express entre Turin et la Côte d'Azur étant un objectif stratégique.
Pour atteindre cet objectif, un matériel performant doit être mis en place. En
effet, de Nice à Breil, la voie ferrée, une fois modernisée, peut rendre de
grands services pour la desserte périurbaine de Nice jusqu'à Drap et Cantaron.
Au-delà, la voie permet le désenclavement de territoires peu denses.
La modernisation de cette ligne jusqu'à Vintimille contribuera à
l'amélioration des liaisons entre le Piémont et la Riviera italienne et la Côte
d'Azur.
Le rapport Blanchet note cependant un apparent désintérêt de la SNCF et des FS
- les chemins de fer italiens - pour cette ligne dû à des contentieux
passés.
Pourtant, pour attirer une importante clientèle piémontaise et lombarde sur la
côte, des services rapides entre Turin et Nice,
via
Vintimille, Menton
et Monaco, par automoteurs puissants s'avèrent indispensables. L'ingénieur
Blanchet préconise également la suppression du rebroussement à Vintimille.
En outre, il apparaît que les pentes, le gabarit et l'absence
d'électrification des lignes excluent une utilisation pour un trafic de
marchandises massif et le ferroutage.
Aussi, monsieur le ministre, alors que tous les rapports attestent de
l'importance de la modernisation de cette ligne, que vous connaissez pour
l'avoir empruntée récemment,...
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Oui !
M. José Balarello.
... tant pour le désenclavement de l'arrière-pays que pour l'accès rapide au
Piémont et à la Lombardie, que la DTA Côte d'Azur inscrit dans son programme le
développement de la ligne Nice-Breil, je vous demande les raisons pour
lesquelles, sur les 24 millions de francs inscrits au XIe Plan pour la
modernisation de cette ligne, seulement 200 000 francs de travaux ont été
jusqu'à présent engagés et pourquoi, alors que le XIIe Plan Etat-région a
inscrit 30 millions de francs supplémentaires sur cette ligne, aucune ouverture
de crédits n'a été prévue lors du comité de suivi des engagements du contrat de
plan du 13 juin 2000.
A l'heure actuelle, lorsque vous prenez le train à Turin ou à Cuneo pour vous
rendre à Nice, vous avez deux solutions : soit changer de train à
Breil-sur-Roya pour emprunter une portion française passant par Sospel et
L'Escarène, portion où la vitesse est en moyenne de 30 kilomètres par heure,
soit rester dans les chemins de fer italiens, descendre la vallée de la Roya
jusqu'à Vintimille. En gare de Vintimille, le voyageur doit emprunter un second
train français ou italien en provenance de Gênes et se rendant directement sur
Menton, Monaco et Nice. Cela suppose une rupture de charge, voire un passage
préalable par un sous-terrain piétonnier.
Ce trajet, qui était nécessaire avant les accords de Schengen puisque les
postes de douanes français et italien se trouvaient en gare de
Vintimille-centre, ne l'est plus aujourd'hui.
Une solution existe qui permettrait au voyageur en provenance de Turin ou de
Cuneo de rejoindre Menton, Monaco ou Nice sans changement à Breil-sur-Roya ou à
Vintimille.
Voilà de nombreuses années que j'attire l'attention de vos prédécesseurs sur
une possibilité : il existe à Vintimille une seconde gare de triage vaste et
récente dont les capacités ne sont pas pleinement exploitées. De cette gare
partent deux tunnels ferroviaires qui permettent de rejoindre directement la
voie ferrée franco-italienne Gênes-Nice-Marseille, qui, en territoire français,
est à double voie et électrifiée.
M. le président.
Il vous faut conclure, mon cher collègue !
M. José Balarello.
J'ai terminé, monsieur le président.
Cet épi ferroviaire exercerait un attrait considérable sur une clientèle
italienne venant de Turin, désireuse de se rendre à Menton, Monte-Carlo ou Nice
sans emprunter la route, qui est enneigée en hiver.
La gare existant déjà, pour mettre en place cet épi ferroviaire, il suffirait
de faire un rajout de 300 mètres de rail en rattrapant un dénivelé de cinq
mètres.
Quand auront lieu une réunion franco-italienne et une étude consacrée à ce
problème, étude qui pourrait être financée par des crédits européens ? Je les
réclame depuis près de huit ans.
Nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour prendre rapidement une
initiative en ce sens.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Monsieur le
sénateur, je sais que, comme vous l'avez dit à l'instant, vous avez attiré
l'attention de mes prédécesseurs sur cette question depuis de longues
années.
Je vous confirme que le XIe Plan a effectivement permis de lancer une première
tranche d'investissement de 24 millions de francs afin de permettre une
amélioration sensible des temps de parcours et des services sur la ligne
ferroviaire Nice-Breil. RFF et la SNCF se sont employés à la réalisation de ce
programme dans de bonnes conditions. Les travaux sont désormais engagés et je
vous confirme qu'ils devraient se dérouler jusqu'en 2001 pour assurer la
réalisation de ce qui était prévu. A la fin de l'année prochaine, les montants
nécessaires à la réalisation de cette tranche auront été engagés et cette
opération attendue depuis près de dix ans devrait être enfin terminée.
Afin de poursuivre la modernisation de cette ligne, vous l'avez rappelé, 30
millions de francs ont bien été inscrits au nouveau contrat de plan Etat-région
Provences - Alpes - Côte d'Azur pour la période 2000-2006. Il appartient donc
maintenant aux différents partenaires concernés au niveau régional de se
concerter pour arrêter conjointement la consistance précise des aménagements à
retenir.
De plus, s'agissant de la question plus globale des franchissements des Alpes
du sud, une commission intergouvernementale pour l'amélioration des relations
franco-italiennes dans cette partie du massif sera très prochainement mise en
place. Je vous informe d'ailleurs, monsieur le sénateur, que les membres
français en sont d'ores et déjà connus et que nous attendons la désignation des
membres italiens.
La spécificité des flux de transport à travers les Alpes et les solutions
ferroviaires feront bien entendu l'objet d'un examen spécifique, en cohérence
avec les réflexions déjà engagées. Dans la perspective d'un développement des
trafics ferroviaires, cette commission pourra notamment examiner les questions
de la poursuite de l'électrification de la ligne empruntant la vallée de la
Roya et de l'amélioration des circulations sur la ligne du littoral entre Nice
et Vintimille.
La question de l'électrification de la ligne Limone-Fanghetto pourra bien
évidemment être évoquée. Mais, monsieur le sénateur, il vous faut toujours
garder à l'esprit qu'il s'agit d'une ligne intérieure du réseau italien. Je
n'en suis pas à pouvoir décider à la place de nos amis italiens de ce qu'ils
peuvent et doivent faire ! Mais c'est dans cet esprit que le gouvernement
français poussera les propositions.
M. José Balarello.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Balarello.
M. José Balarello.
Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions. Surtout, je me
félicite de la création d'un groupe d'étude franco-italien. Mais j'attire votre
attention sur le fait que l'électrification n'est pas en totalité en territoire
italien : à peu près cinquante kilomètres sont en territoire français,
c'est-à-dire entre Fanghetto et le col de Tende. Le gouvernement français aura
donc son mot à dire.
J'insiste encore auprès de vous pour que vous demandiez à ce groupe de travail
franco-italien d'inscrire à son ordre du jour le problème de l'épi ferroviaire,
c'est-à-dire la suppression de la rupture de charge en gare de Vintimille, ce
qui permettrait surtout en période hivernale, de multiplier par deux ou par
trois la clientèle, qui viendrait de Turin sur la Côte d'Azur avec beaucoup
plus de facilité.
AVENIR DE L'AÉROPORT DE NÎMES-GARONS
M. le président.
La parole est à M. Sutour, auteur de la question n° 895, adressée à M. le
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Simon Sutour.
Monsieur le ministre, la plate-forme aéroportuaire de Nîmes-Garons est un
vecteur important du développement économique et touristique du département du
Gard. Les organismes consulaires, les milieux économiques et les collectivités
locales n'ont eu de cesse, depuis sa création, d'oeuvrer à sa pérennité et à
son développement. C'est pourquoi la mise en place de la liaison Nîmes-Roissy,
décidée par Air France, qui consacre l'ouverture de l'aéroport à
l'international, constitue une évolution positive dont chacun se félicite.
Son expansion future semble néanmoins compromise par la décision unilatérale
d'Air France, qui a supprimé, depuis le 30 octobre, l'ensemble des liaisons
quotidiennes sur Orly.
Cette suppression menace à terme le devenir de la plate-forme aéroportuaire en
la privant du créneau porteur que constitue le marché d'affaires. Une étude de
la chambre de commerce et d'industrie démontre que le potentiel existant est de
430 000 passagers par an sur Paris, dont 340 000 sur Orly.
Il paraît donc opportun de rétablir deux liaisons, matin et soir, sur Orly,
qui compléteraient efficacement et rationnellement l'offre actuelle et
éviteraient les risques éventuels d'évasion de la cientèle potentielle vers
Marseille et Montpellier. Le conseil municipal de Nîmes a d'ailleurs émis un
voeu dans ce sens.
Je vous demande donc de bien vouloir préciser quelles meures vous entendez
prendre pour contribuer au développement de cet aéroport, qui a su, grâce à une
gestion dynamique, s'engager dans une diversification de son offre et qui
conforte par ailleurs une gestion multimodale aérienne, ferroviaire avec le TGV
et routière des transports et des déplacements dans le département du Gard.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Monsieur le
sénateur, je connais bien cette question pour avoir été plusieurs fois
sollicité, notamment sur les liaisons Nîmes-Roissy.
Je rappelle qu'une réglementation européenne datant de 1992 a prévu la
libéralisation progressive du transport aérien dans les pays de l'Union, et
celle-ci a été achevée en avril 1997 par la libéralisation du marché intérieur
national. Depuis lors et comme toutes les autres compagnies, Air France évolue
dans cet environnement très concurrentiel et, dans le cadre de l'autonomie de
gestion qui lui est légalement reconnue, elle effectue elle-même et directement
ses choix commerciaux. Voilà pour l'historique.
Je souhaite donc vous préciser, monsieur le sénateur, tout d'abord, que le
rétablissement par Air France de deux liaisons quotidiennes entre Orly et Nîmes
est non pas du ressort du Gouvernement, mais bien de la direction de la
société, qui doit se donner les moyens de son développement.
La liaison aérienne Orly-Nîmes connaît, vous le savez, une évolution
irrégulière du trafic depuis quelques années. Une baisse notable de sa
fréquentation est attendue avec la prochaine mise en service de la grande
vitesse sur le tronçon Valence-Marseille en juin 2001.
Nîmes sera alors à moins de trois heures de Paris par TGV - à deux heures
cinquante et une minutes exactement, si ma mémoire est bonne - et les travaux
se déroulent normalement.
C'était d'ailleurs l'un des arguments qu'avaient avancé les responsables de la
chambre de commerce et d'industrie de Nîmes lorsque je les avais rencontrés,
l'année dernière. Ceux-ci m'avaient dit qu'une liaison entre Roissy et Nîmes
était vraiment nécessaire, plus qu'une desserte à partir d'Orly, en raison de
la dimension internationale et de la vocation, notamment touristique, de leur
ville et de sa région.
En prévision de la mise en place, l'année prochaine, de la liaison ferroviaire
à grande vitesse, Air France, à l'occasion de la saison d'hiver 2000-2001 qui a
débuté le 29 octobre, a profité de l'existence de créneaux horaires disponibles
sur l'aéroport Charles-de-Gaulle pour programmer quatre fréquences quotidiennes
vers Nîmes, ce qui est d'ailleurs le minimum indispensable si l'on veut assurer
la couverture des principales plages de correspondance à Roissy.
Des Airbus A 319 et des Boeing 737 seront utilisés pour assurer ces vols, qui
permettront à la clientèle nîmoise d'avoir accès, avec des temps de
correspondance courts, à soixante-neuf destinations « long-courrier » et à cent
douze destinations « moyen-courrier » du réseau d'Air France. Telle est
l'évolution qui, vous l'avez souligné, monsieur le sénateur, est positive de ce
point de vue.
La mise en place de cette desserte conduit cependant la compagnie à supprimer
dans le même temps la desserte de Nîmes au départ de l'aéroport d'Orly. En
effet, la faisabilité du maintien de deux liaisons par jour entre Orly et
Nîmes, en complément des quatre fréquences programmées sur Roissy, a été
étudiée par Air France. Il résulte de cet examen que le maintien de l'actuelle
grille de desserte entraînerait pour la compagnie une surcapacité importante
par rapport à la demande et conduirait à une perte financière élevée qu'elle
affirme ne pouvoir supporter.
Puisque vous avez évoqué les capacités et les potentialités de trafic. Je veux
vous dire, que cette situation n'a rien de définitif : une croissance
significative du trafic sur l'aéroport de Nîmes-Garons amènerait naturellement,
je le pense, Air France à revoir à la hausse son schéma de desserte actuelle à
partir et à destination de cette plate-forme.
J'ajoute, monsieur le sénateur, mais, vous le savez mieux que moi en votre
qualité d'élu, que l'aéroport de Nîmes-Garons recèle des capacités de
développement vers d'autres destinations et qu'il convient sans doute de les
promouvoir.
Les principes que le Gouvernement a définis pour les schémas de services
encouragent bien sûr l'intermodalité entre la grande vitesse ferroviaire et le
transport aérien, avec l'objectif de promouvoir une meilleure complémentarité
entre les différentes plate-formes. Dans ce cadre, Nîmes et sa région
bénéficieront à la fois d'un équipement aéroportuaire de qualité et d'un accès
à la grande vitesse ferroviaire et au réseau autoroutier. J'ai donc la
conviction que notre région sera bien placée pour jouer un rôle important, ce
qui sera décisif pour le tissu économique local et l'emploi.
M. Simon Sutour.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Sutour.
M. Simon Sutour.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse particulièrement
complète et détaillée.
Je n'ignore pas, bien entendu, le contexte européen dans lequel agit désormais
Air France et je prends note de l'ouverture pour l'avenir dont vous avez fait
preuve à la fin de votre réponse.
Je vous demande néanmoins, au nom de la population gardoise et de ses élus, de
continuer à faire pression sur Air France pour que notre aéroport puisse encore
se développer et, si le trafic le permet, pour que cette liaison sur Orly
puisse à nouveau être ouverte.
AIDE À LA CONSTRUCTION POUR LES INSULAIRES
M. le président.
La parole est à M. Bonnet, auteur de la question n° 887, adressée à M. le
secrétaire d'Etat au logement.
M. Christian Bonnet.
Je remercie M. Louis Breton d'être venu répondre personnellement à cette
question que je pose en tant qu'élu de longue date de Belle-Ile et président
pendant vingt-cinq ans de l'Association des îles du Ponant.
Les îles du Ponant, qui vont de Chausey à l'île d'Aix, comptent 15 700
habitants et, au terme du dernier recensement, il apparaît que la population
est en diminution et qu'elle est marquée par un certain vieillissement. Y
maintenir de jeunes actifs - les deux mots sont essentiels - est une nécessité
vitale.
Or, la construction de logements sociaux dans des îles au budget étriqué,
parfois squelettique, revient plus cher que sur le continent, et ce pour deux
raisons. La première est la pression foncière extérieure sur les terrains. La
seconde est le coût de la construction, qui est supérieur de 120 000 à 150 000
francs pour un logement HLM à prestations équivalentes. Les besoins sont
évalués à quelque trois cents logements pour les années 2000 à 2006.
Les départements consentent un effort important, les régions tout autant.
Ainsi, pour l'année 2000, la région Bretagne a décidé d'engager des crédits à
concurrence de 2 millions de francs. C'est ainsi qu'elle assume 40 % du budget
d'acquisition et de viabilisation des terrains et que, pour la construction,
elle accorde 45 000 francs.
Dans le cadre du programme « neuf » du contrat de plan, quelle somme l'Etat,
qui se montre généreux vis-à-vis d'une grande île - ce n'est pas une critique,
c'est un constat -, a-t-il dégagé dans le budget en cours d'exécution et quelle
autre a-t-il inscrite au projet de budget pour 2001 ?
M. le président.
la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat au logement.
M. le sénateur, comme vous venez de
l'indiquer, parmi la multitude d'îles et d'îlots qui jalonne les côtes de la
Manche et de l'Atlantique, quinze sont habités de façon permanente et n'ont pas
de lien fixe avec le continent. Ce sont les îles du Ponant que vous connaissez
fort bien et qui comptent, comme vous l'avez rappelé, une population permanente
de l'ordre de 16 000 habitants, cette population étant multipliée par cinq ou
par six en haute saison. L'activité touristique y est devenue en effet
prépondérante par rapport aux activités économiques traditionnelles.
Dans la mesure où, comme vous l'avez souligné, la population permanente est en
baisse, le maintien des jeunes actifs devient un enjeu fort pour les îles,
l'élement déterminant étant le logement.
La réponse à ce besoin passe notamment par la construction de logements
locatifs sociaux. Or la construction de ces logements locatifs sociaux s'avère
difficile, car le marché foncier est tendu du fait de la pression touristique,
et les coûts de construction sont plus élevés que sur le continent, en raison,
notamment des problèmes de transport de matériaux. Je m'en suis entretenu avec
l'Association pour la protection et la promotion des îles du Ponant et les élus
îliens, à l'occasion d'un déplacement que j'ai effectué en septembre 1999 à
Ouessant, voilà donc quatorze mois. Les propos qu'ont tenus ces élus étaient
rigoureusement les mêmes que ceux que vous venez de tenir devant la Haute
Assemblée, monsieur le sénateur.
Au cours de ces quatorze mois, le contrat de plan Etat-région a été signé.
L'Etat avait fait connaître sa disponibilité - à toutes les régions, d'ailleurs
- pour des actions partenariales dans le domaine du logement. Le contrat de
plan signé entre l'Etat et la région Bretagne conjugue les efforts de l'Etat et
de la région pour soutenir la construction non pas de 300 logements, comme vous
le souhaitiez, mais de 100 logements sur la durée du plan. Ce nombre pourra
peut-être faire l'objet d'une révision si ces cent logements sont construits
rapidement. Des contrats de plan peuvent en effet parfois comporter, vous le
savez - certes rarement - des avenants.
A cet effet, l'Etat a bien réservé une enveloppe de crédits de 10 millions de
francs sur son budget du logement, la région, pour sa part, apportant également
10 millions de francs. Pour le moment, nous avons plutôt quelque peine à faire
consommer les crédits, les projets n'étant pas aussi nombreux que nous le
voudrions. Mais, bien évidemment, si le rythme s'accélérait, l'Etat serait au
rendez-vous, car les crédits n'ont pas d'affectation précise dans la loi de
finances. Je peux donc prendre l'engagement d'écouter vos propositions, si
telle ou telle opération ne devait pas pouvoir être programmée en raison de
l'insuffisance de l'enveloppe déléguée au préfet de la région concernée.
Les travaux à l'échelon local se poursuivent pour affiner les conditions
opérationnelles d'intervention de l'Etat et du conseil régional dans une
logique de complémentarité de leurs efforts, ce qui est une manière de dire que
les partenaires ne nous ont pas encore fait connaître les conditions
d'utilisation des crédits en cause. La discussion doit sans doute se
poursuivre.
Selon les services centraux, l'aide de l'Etat permettra d'apporter une
subvention majorée selon les dérogations autorisées localement par le préfet.
Ces crédits pourront être utilisés pour faciliter le montage d'opérations de
primes communales à l'amélioration des logements à usage locatif et à
occupation sociale permettant aux communes de disposer de logements à vocation
sociale dans le parc existant. Les crédits pourront surtout être mobilisés pour
prendre en charge une partie du surcoût foncier qui pourrait résulter de
certaines opérations, sachant que, depuis une année, l'Etat a aussi décidé de
porter à cinquante ans la durée des prêts consentis pour les acquisitions
immobilières et foncières destinées au logement social. C'est aussi une façon
de répondre aux questions de surcoût du foncier.
De plus, la future loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains
fait apparaître la possibilité de prendre en compte quelques dispositions
nouvelles liées à l'exercice du droit de préemption urbain. Par exemple, si les
îles se dotent d'un programme local de l'habitat, ce peut être suffisant pour
pouvoir préserver tel ou tel habitat et l'affecter à la résidence principale
locative plutôt qu'à la résidence secondaire. Des moyens juridiques et
financiers ont donc été mis en place au cours de cette dernière année. Il nous
reste à les mobiliser efficacement. Je ne doute pas que votre intervention y
aidera.
M. Christian Bonnet.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Bonnet.
M. Christian Bonnet.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je sais que vous en êtes convaincu comme moi,
une véritable politique sociale consiste à donner non pas plus que le
nécessaire à ceux qui l'ont déjà, mais l'indispensable à ceux qui ne l'ont pas.
Or tel est le cas pour les îles.
Il est des communes touristiques - je pense en particulier à une commune que
vous connaissez - dans lesquelles la pression foncière est telle qu'il est très
difficile pour des ménages modestes d'y construire un logement. Et il est
impossible d'aller dans les communes qu'Edgard Pisani aurait qualifiées de «
circum voisines », car c'est l'océan !
Il existe donc un problème très spécifique, sur lequel je me devais
d'insister, tout en vous remerciant, monsieur le secrétaire d'Etat, de votre
réponse.
RÉGIME INDEMNITAIRE DES AGENTS DU CADRE
D'EMPLOI DE POLICE MUNICIPALE
M. le président.
La parole est à M. Marquès, auteur de la question n° 881, adressée à M. le
ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
M. René Marquès.
J'attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique et de la
réforme de l'Etat sur le régime indemnitaire des agents du cadre d'emploi des
gardiens de police municipale.
En effet, dans une réponse à une question orale posée à l'Assemblée nationale,
parue au
Journal officiel
du 10 avril 2000, le ministre de la fonction
publique a précisé que l'indemnité spéciale mensuelle de fonctions instaurée
par le décret du 31 mai 1997 était cumulable avec les indemnités horaires pour
travaux supplémentaires versées dans les conditions du décret du 6 octobre
1950.
Or le décret du 3 janvier 1974 instituant l'indemnité spéciale mensuelle
police municipale précisait que ladite indemnité était cumulable avec les
indemnités dont l'agent pourrait bénéficier à un autre titre.
Il serait utile de connaître la position du ministère sur la possibilité de
cumuler cette indemnité spéciale avec, d'une part, l'indemnité horaire pour
travail de nuit instaurée par le décret du 10 mai 1961 et, d'autre part,
l'indemnité pour travail intensif de nuit.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat au logement.
Monsieur le sénateur, je vous prie tout
d'abord de bien vouloir excuser l'absence de mon collègue Michel Sapin,
ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
Vous l'avez interrogé sur le devenir du régime indemnitaire des gardiens de
police municipale fondé antérieurement sur l'arrêté du 3 janvier 1974 modifié,
qui prévoyait l'attribution d'une indemnité spéciale de fonctions fixée au taux
individuel maximal de 16 % du traitement indiciaire de l'agent.
Cette indemnité pouvait être complétée, conformément à l'article 3 de cet
arrêté, avec les indemnités « dont l'agent pourrait bénéficier à un autre titre
».
Il en résultait que l'agent pouvait se voir attribuer, dans le cadre d'un
travail de nuit, selon les cas, des indemnités horaires pour travaux
supplémentaires, en application de la réglementation sur les heures
supplémentaires, ou des indemnités horaires pour travail de nuit et une
majoration spéciale pour travail intensif définies par le décret du 10 mai
1961, commun à divers corps ou catégories de fonctionnaires.
Désormais, ces dipositions ne s'appliquent plus. Pour autant, les nouvelles
règles applicables aux agents de police municipale permettent à ces derniers de
bénéficier d'un régime favorable.
En effet, le régime indemnitaire des agents de police municipale, faute de
corps équivalent dans la fonction publique de l'Etat, est désormais établi, en
application de l'article 68 de la loi du 16 décembre 1996 relative à l'emploi
dans la fonction publique et à diverses mesures d'ordre statutaire, en
dérogation aux dispositions de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984
modifiée précitée, par le décret du 31 mai 1997.
Ce décret prévoit que les agents de police municipale peuvent percevoir
cumulativement : une indemnité spéciale mensuelle de fonctions ; des indemnités
horaires pour travaux supplémentaires dans les conditions fixées par le décret
du 6 octobre 1950, celles-ci pouvant être majorées pour les heures
supplémentaires de minuit à sept heures.
De fait, les avantages prévus par le décret du 10 mai 1961 précité ne peuvent
plus être transposés aux agents du cadre d'emplois des agents de police
municipale, faute d'équivalence de ce cadre d'emplois avec un corps de l'Etat
qui en bénéficierait.
M. Michel Sapin, ministre de la fonction publique, tient à souligner,
cependant, que le taux maximal de l'indemnité spéciale mensuelle de fonctions
fixé par le décret du 31 mai 1997 précité est passé de 16 % à 18 % du
traitement indiciaire individuel et que ce traitement a lui-même bénéficié de
la revalorisation des grilles indiciaires résultant de la création du cadre
d'emplois des agents de police municipale qui a remplacé, en 1994, l'ancien
statut communal. Au total, les communes peuvent ainsi assurer un niveau global
de primes individuel équivalent ou supérieur.
Enfin, dans le cadre de l'organisation du temps de travail, les collectivités
peuvent tenir compte des contraintes du travail de nuit. La nouvelle
réglementation qui sera applicable aux fonctionnaires territoriaux en matière
de temps de travail, sur la base des projets de textes examinés par le Conseil
supérieur de la fonction publique territoriale les 15 juin et 6 juillet
derniers, permettra de mieux répondre à ce type de besoins, par exemple avec le
recours à la notion de cycles de travail.
Tels sont les éléments qu'au nom de M. Sapin je pouvais vous apporter,
monsieur le sénateur.
M. René Marquès.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Marquès.
M. René Marquès.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de répondre à une question
qui est complexe et qui dépend de beaucoup de lois et de décrets.
Il ne faut pas l'oublier, le rôle difficile des agents de police municipale,
surtout en milieu rural, exige de leur part une polyvalence et une présence
supérieures à celles que peuvent exercer les policiers de la police nationale,
par exemple. Or ils jouissent de peu de considération, ce qu'ils ressentent de
façon très importante.
Tout cela mérite bien de les faire bénéficier d'un régime indemnitaire !
Vous avez évoqué l'augmentation du taux de l'indemnité spéciale mensuelle de
fonctions de 16 % à 18 % ainsi que la revalorisation du cadre d'emploi. Je vous
remercie pour ces précisions et je serais heureux que les nouvelles
modifications apportées aillent dans le sens que je souhaite.
SUPPRESSION DES FICHES D'ÉTAT CIVIL
ET JUSTIFICATIFS DE DOMICILE
M. le président.
La parole est à M. Demuynck, auteur de la question n° 930, adressée à M. le
ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
M. Christian Demuynck.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le Gouvernement a décidément l'esprit des
grandes réformes ! En atteste la suppression, à compter du 1er décembre
prochain, de la fiche d'état civil et de tout justificatif de domicile dans le
cadre de démarches administratives. Voilà qui, prétendez-vous, devrait faire
gagner un temps infini aux personnels des mairies. Outre que cette grandissime
réforme ne peut améliorer de façon décisive le fonctionnement de
l'administration, force est de dénoncer ses graves inconvénients.
D'une part, la simple présentation d'une copie d'un document d'identité,
certifiée conforme par les propres soins de tout un chacun, en lieu et place
des mairies, apparaît pour le moins dangereuse. Comment, de plus, accorder foi
à des pièces illisibles ou à des livrets de famille étrangers, le plus souvent
peu explicites sur la situation familiale réelle ?
D'autre part, je ne peux que condamner avec la plus extrême virulence votre
intention de mettre fin aux justificatifs de domicile pour l'obtention
d'avantages sociaux offerts par certaines communes. En effet, celles-ci devront
ainsi assumer de lourdes charges indues qui viendront grever des finances
gérées sainement mais, il faut bien le reconnaître, non sans mal.
De nombreuses personnes feront peu de cas de leur honneur en déclarant leur
domicile dans des villes à leurs yeux plus intéressantes socialement et
financièrement - pourquoi pas ? - en se domiciliant dans plusieurs communes.
Quels moyens de contrôle aurons-nous ?
Les répercussions sur les établissements scolaires seront, elles aussi,
considérables. Certains parents, soucieux de l'avenir de leurs enfants,
n'hésiteront pas à falsifier les déclarations sur l'honneur à seule fin de voir
leur progéniture dans de meilleurs établissements.
En outre, votre décision va compliquer le travail des inspections académiques
; celles-ci se retrouveront, tôt ou tard, confrontées tantôt à des collèges et
écoles désertées, tantôt à des classes surpeuplées.
Ma question est, par conséquent, double, monsieur le secrétaire d'Etat.
Abandonnerez-vous cette décision ? Dans le cas contraire, quels garde-fous
prévoyez-vous pour endiguer une fraude prévisible ?
M. le président.
La parole est M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat au logement.
Monsieur le sénateur, vous avez interrogé
mon collègue ministre de la fonction publique sur la décision du Gouvernement
visant à supprimer, à compter du 1er décembre prochain, la délivrance des
fiches d'état civil et à alléger les justificatifs de domicile.
Vous contestez l'opportunité de ces mesures dont vous dénoncez les
inconvénients, voire les risques de fraude qu'elles pourraient engendrer.
Sachez que le fait de faciliter la vie quotidienne constitue une exigence
permanente de l'action du Gouvernement. C'est ainsi que M. Sapin a proposé des
mesures de simplification destinées à supprimer la délivrance de soixante
millions de formulaires administratifs, alors que sont dénoncés, souvent avec
raison, l'excès des procédures, la compléxité des formulaires, voire une
certaine frénésie normative.
Ces mesures de simplification administrative postulent, bien évidemment, une
relation de confiance entre l'administration et les usagers, rompant ainsi avec
la perception trop fréquente d'une administration complexe et suspicieuse.
En effet, la philosophie des simplifications administratives décidées consiste
à ne pas considérer l'usager comme un fraudeur potentiel et donc, par suite, à
ne pas soumettre l'ensemble des usagers aux contrôles mis en oeuvre pour une
minorité de fraudeurs.
Créées il y a près de cinquante ans, les fiches d'état civil sont délivrées
aujourd'hui sur la présentation de pièces justificatives, sans possibilité
réelle en pratique pour les administrations et les services municipaux, en
particulier, de vérifier leur authenticité. Autrement dit, la délivrance des
fiches d'état civil n'a jamais empêché la fraude, d'autant moins que la fiche
d'état civil pouvait permettre l'authentification d'un faux par la délivrance
d'une pièce officielle !
Pour autant, rassurez-vous, un certain nombre de dispositions garantissent la
sécurité du nouveau dispositif, qui, je le précise, ne modifie pas le droit
relatif à l'état des personnes et à la nationalité.
Le décret portant simplifications administratives précisera que, en cas de
doute sur la validité des documents produits destinés à justifier de son
identité, de sa nationalité ou de sa situation familiale, les administrations
pourront demander par écrit, de manière motivée, la présentation de
l'original.
Par ailleurs, il faut rappeler que les déclarations relatives à l'état civil,
à la nationalité, ou au domicile relèvent de la responsabilité individuelle et
que toute fausse déclaration ou falsification de document est passible de
sanctions pénales. Ces sanctions peuvent aller de six mois à un an
d'emprisonnement et de 50 000 francs à 100 000 francs d'amende. Elles peuvent
être complétées par la privation des droits civiques, civils et familiaux. En
cas d'escroquerie, la peine encourue est de cinq ans d'emprisonnement et de 2
500 000 francs d'amende.
Enfin, les décisions obtenues par fraude ne sont évidemment pas créatrices de
droits, toute fausse déclaration entraînera de surcroît la suspension pendant
un an des procédures engagées par l'usager.
Je vous précise que le projet de simplification du Gouvernement ne concerne
pas les procédures relatives à l'inscription sur les listes électorales, à la
délivrance de pièces d'identité et de séjour telles que la carte d'identité, le
passeport, le titre de séjour, le livret de famille, les actes d'état civil ni
à l'immatriculation consulaire des Français à l'étranger. S'agissant plus
particulièrement de la déclaration de domicile, le projet du Gouvernement ne
porte nullement atteinte aux éléments de preuve du domicile, qui, selon les
dispositions du code civil, « est au lieu du principal établissement » déclaré
par l'individu.
En cas de doute ou de litige, il appartiendra au juge, sur demande de
l'administration, de déterminer la réalité du domicile à partir d'un faisceau
d'indices : la déclaration de l'intéressé, certes, mais aussi le lieu de
paiement des impôts ou encore l'inscription sur les listes électorales.
Voilà, me semble-t-il, monsieur le sénateur, des mesures qui ne peuvent pas
susciter les craintes que vous avez exprimées. Pour le Gouvernement, elles
s'inscrivent dans le cadre d'une politique visant à placer l'usager au coeur de
l'action de l'Etat.
M. Christian Demuynck.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Demuynck.
M. Christian Demuynck.
En fait, monsieur le secrétaire d'Etat, votre confiance en nos concitoyens est
à plusieurs niveaux : pour s'inscrire sur les listes électorales, il faudra
présenter certains éléments de preuve, mais, pour bénéficier des avantages
sociaux consentis par les collectivités, ce ne sera pas nécessaire !
Aussi, vous ne m'avez pas du tout rassuré ! Pour ne prendre qu'un exemple -
mais on pourrait ouvrir un vaste débat sur le sujet - je suis très inquiet pour
la prochaine rentrée scolaire.
Comment allez-vous gérer le problème des inscriptions dans les lycées et les
collèges ? Pour un lycée de 1 000 places, vous aurez 1 200 ou 1 300 inscrits !
Selon quels critères allez-vous sélectionner les jeunes ?
Vous allez créer une énorme inégalité dans la mesure où des jeunes qui
auraient dû entrer dans tel lycée ne le pourront pas parce que des gens auront
fraudé. Nous, maires, nous vivons ce phénomène à toutes les rentrées scolaires
: les parents essaient, et c'est tout à fait compréhensible, de faire en sorte
que leurs enfants aillent dans les meilleures écoles pour qu'ils puissent
ensuite suivre des études leur permettant d'avoir une carrière professionnelle
intéressante. Je ne vois donc pas comment vous allez régler ce problème ; les
inspections d'académie sont d'ailleurs, comme moi, très inquiètes à ce
sujet.
SUPPRESSION DE L'ÉMISSION TÉLÉVISÉE « MONTAGNE »
M. le président.
La parole est à M. Faure, auteur de la question n° 903, adressée à Mme le
ministre de la culture et de la communication.
M. Jean Faure.
Ma question s'adressait à Mme Tasca, mais je pense que M. Duffour, ici
présent, pourra y répondre.
J'associerai à mes propos un membre du Gouvernement, qui, j'en suis sûr,
m'approuvera, je veux parler de mon excellent ami Louis Besson, qui, pendant
plus de trente ans, a été mon compagnon de lutte sur les problèmes de la
montagne.
J'ai donc appelé l'attention de Mme le ministre sur la disparition du magazine
Montagne
, qui était diffusé le dimanche matin.
En effet, la dernière émission a eu lieu le 4 septembre 1999.
On nous dit que ce magazine avait peu d'audience ! Effectivement, en le
diffusant le dimanche matin, on pouvait être certain qu'il n'aurait qu'une
faible audience. Si
Thalassa
était diffusée le dimanche matin, je suis
sûr qu'elle n'atteindrait pas les records d'audience qu'elle enregistre
aujourd'hui. Inversement, si le magazine
Montagne
avait été diffusé le
dimanche soir à une heure d'écoute intéressante, il aurait bien évidemment eu
beaucoup de succès.
Je ne peux donc que regretter l'interruption de cette émission et vous faire
part, monsieur le secrétaire d'Etat, de la consternation des populations de
montagne. Ce magazine s'intéressait en effet aux montagnes du monde entier sous
tous les aspects, et l'on ne peut qu'espérer que le service public fera
renaître un programme sur ce sujet.
L'émission, dont la durée était de trente minutes, avait été créee voilà
quinze ans, avec un rythme hebdomadaire, devenu mensuel il y a deux ans.
Je rappelle qu'elle a d'abord été diffusée le dimanche après-midi, puis le
dimanche matin, ce qui explique aussi la diminution de son audience.
L'existence d'un magazine de la montagne est nécessaire, tout autant que celle
d'un magazine de la mer. En effet, la disparition du thème de la montagne des
grilles de programmes est regrettable, dans la mesure où le grand public, qui
fait montre d'
a priori
erronés, ne disposera plus d'un média facile
d'accès pour appréhender les spécificités socio-économiques de ce milieu.
Je ne voudrais pas, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous me répondiez,
comme l'a déjà fait le président de la chaîne, qu'il existe un magazine
intitulé
Chronique d'en haut.
En effet, ce dernier magazine, s'il est
certes conçu à Lyon, n'est repris que de façon volontaire par certaines chaînes
régionales, qui le diffusent à des heures ne lui permettant pas forcément de
recueillir une large audience, puisqu'il s'agit soit du samedi après-midi, soit
du dimanche matin, dans le cadre de ce que l'on appelle les basculements
régionaux. Je souhaite donc, monsieur le secrétaire d'Etat, que soit élaboré un
véritable magazine de la montagne, comparable à ce qui existe pour la mer avec
Thalassa
et diffusé à des heures de grande écoute. Je serai heureux
d'entendre votre réponse sur ce point.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Michel Duffour,
secrétaire d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle.
Monsieur le sénateur, vous attirez, avec raison, l'attention de Mme la ministre
de la culture et de la communication sur la suppression de l'émission
Montagne
de France 3. Je dois vous dire que Mme Tasca s'en était
elle-même inquiétée, dans la mesure où il s'agit d'un programme dont elle
connaît, et dont je mesure moi-même l'intérêt et l'importance, non seulement
pour les populations vivant en zone montagneuse, mais plus généralement pour
tous ceux qui fréquentent ces régions.
Je suis aujourd'hui en mesure de vous rassurer, monsieur le sénateur, à la
suite des informations que Mme la ministre a reçues de la direction de France
3. Il ne s'agit pas en effet d'abandonner le thème de la montagne ; il s'agit
en fait de modifier la formule proposée aux téléspectateurs depuis maintenant
quinze ans. Consciente des attentes du public, France 3 a décidé de proposer,
et ce dès janvier prochain, un nouveau magazine consacré à la montagne. Il sera
davantage axé sur la vie en milieu montagnard, en ajoutant aux approches
sportives et techniques les questions de société propres à ce milieu.
C'est la même équipe grenobloise qui travaille à ce nouveau projet, en liaison
avec la rédaction nationale.
Je rappelle par ailleurs - vous y avez fait allusion, monsieur le sénateur -
qu'un autre magazine portant sur un thème proche,
Chronique d'en haut,
diffusé par la majeure partie des stations régionales de France 3, reste dans
la grille de programmes de cette chaîne publique. Cette diffusion s'ajoute donc
à ce que je viens d'évoquer.
M. Jean Faure.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole et à M. Faure.
M. Jean Faure.
Monsieur le secrétaire d'Etat, votre réponse sera satisfaisante dans la mesure
où la nouvelle émission bénéficiera d'heures et de jours de diffusion pendant
lesquels les téléspectateurs seront devant l'écran.
Je souhaiterais donc que vous soyez particulièrement attentif aux heures et
aux jours de sa programmation de façon qu'elle puisse être vue par tout le
monde.
NOUVELLES DISPOSITIONS
RELATIVES À L'INDEMNITÉ COMPENSATOIRE
DE HANDICAP NATUREL (ICHN)
M. le président.
La parole est à M. Cazalet, auteur de la question n° 899, adressée à M. le
ministre de l'agriculteur et de la pêche.
M. Auguste Cazalet.
Monsieur le ministre, permettez-moi d'attirer votre attention sur la très vive
inquiétude éprouvée par les agriculteurs du département des
Pyrénées-Atlantiques concernés par la réforme des ICHN, indemnités
compensatoires de handicap naturel, inscrite dans le projet de plan national de
développement rural accepté par l'Union européenne lors du comité STAR du 26
juillet.
Il semblerait que la mouture présentée à Bruxelles soit sans rapport avec les
modalités d'un nouveau règlement arrêtées par le groupe de suivi de la
politique relative à la montagne.
Mais ce qui suscite l'étonnement est la remise en cause radicale des
fondements de la politique jusqu'à présent menée dans ce département et au
crédit de laquelle il faut mettre le maintien de l'activité économique et le
développement de productions de qualité dans les zones défavorisées.
En effet, le fait de conditionner désormais l'attribution des ICHN au respect
des bonnes pratiques agricoles définies notamment par des critères
d'extensivité est perçu comme l'abandon du principe du handicap, les indemnités
se transformant en mesures de type agri-environnemental.
Ainsi, des dispositions telles que le non-versement de l'ICHN en deçà du seuil
minimal et au-delà du seuil supérieur du taux de chargement, l'application d'un
tarif unique de prime par type de zone défavorisée, la disparition de la
différenciation par espèce - ovins, bovins -, le mode de calcul de l'indemnité
versée à l'agriculteur après fixation par le préfet d'une plage optimale dans
laquelle l'ICHN serait versée à taux plein, ainsi que la restriction des
critères d'éligibilité pour les pluriactifs suscitent plus que des
interrogations auprès des éleveurs du département puisque, selon certaines
estimations, ce sont au total 1 500 agriculteurs qui, au Pays basque et dans le
Béarn, sont non seulement concernés mais aussi menacés : 400 exploitations
seraient exclues du dispositif, celles qui sont situées en zone de piémont
perdraient jusqu'à 14 % de leurs indemnités et les non-transhumants, environ
500, perdraient jusqu'à 30 % de celles-ci.
Etant donné l'écho peu favorable que semble susciter ce projet, notamment
auprès des jeunes agriculteurs, je souhaiterais que vous m'apportiez, monsieur
de ministre, des précisions quant à son contenu et que vous m'indiquiez les
points sur lesquels vous seriez disposé à discuter de nouveau avec la
profession.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le sénateur, la
réforme des indemnités compensatoires de handicaps naturels, les ICHN, a fait
l'objet de nombreux débats publics et de polémiques peut-être un peu
excessives, voire inutiles. Je vais essayer de vous relater la genèse de cette
histoire.
J'ai souhaité la mise en place de cette réforme et je me suis fixé un certain
nombre d'objectifs, dont le premier - je tiens à le rappeler ici - est le
renforcement de la politique de la montagne. En effet, l'agriculture en
montagne a besoin d'être davantage aidée, parce qu'elle correspond à une
certaine conception de l'agriculture multi-fonctionnelle : parfaitement
respectueuse de l'environnement et participant à l'aménagement du territoire,
elle est indispensable à la société, en particulier à la société de
montagne.
Je suis donc dans une logique non pas, comme je l'ai lu, de destruction de
vingt-cinq ans d'une politique de la montagne, mais, au contraire, de
renforcement de cette politique, et ce d'entrée de jeu, en y consacrant, pour
les années à venir, 500 millions de francs supplémentaires par an, ce qui est
loin d'être négligeable. Ainsi se trouve apporté un démenti cinglant à l'idée
que je puisse mettre en cause cette politique de la montagne. Ensuite, je
souhaitais la pérenniser. Je voulais, en particulier, la faire avaliser, d'une
manière durable, par la Commission européenne, et j'ai donc tenu à l'inscrire
dans le plan de développement rural. J'ai également voulu la simplifier. A cet
égard, je suis toujours l'objet de demandes pressantes, vous le savez, de la
part des organisations professionnelles agricoles, qui souvent ont raison, même
si elles apportent leur pierre à la complexité. Je voulais que la majorité des
éleveurs y voient leurs aides accrues dans l'avenir et je tiens toujours à ce
principe.
A partir de là, une négociation a été engagée avec la Commission européenne
lors de l'élaboration du plan national de développement rural, et celle-ci nous
a demandé, à l'issue des discussions au mois de juillet dernier, de bien
vouloir prévoir, en contrepartie des ICHN, ce qu'elle appelait des bonnes
pratiques agricoles. Ce qui n'était pas contestable en soi le devenait à partir
du moment où il nous a été demandé d'évaluer ces bonnes pratiques agricoles en
fonction d'un taux de chargement à l'hectare. Lorsque je suis revenu de
Bruxelles avec ce plan national de développement rural, j'ai procédé à un
certain nombre de simulations pour savoir comment il se traduirait dans les
faits. Or il s'avère que les deux départements qui souffriraient le plus de ce
plan sont le vôtre, monsieur Cazalet, et le mien, car il exclurait les
agriculteurs de montagne des deux départements. Les deux autres départements
les plus touchés seraient le Lot et le Cantal, le vôtre, monsieur Domeizel,
l'étant un peu moins.
Compte tenu de son caractère inacceptable, je ne me suis pas rallié à cette
réforme qui émane non pas du ministre de l'agriculture français, mais de la
Commission européenne. Il faut donc remettre l'ouvrage sur le métier. Je puis
vous donner l'assurance que je maintiens ces objectifs que je viens brièvement
de vous rappeler. Ils seront mis en oeuvre avec des moyens supplémentaires,
afin de renforcer le volet agricole de la politique de la montagne.
Il faut rassurer les agriculteurs qui auraient pu être inquiets face à cette
proposition qui émane, je le répète, non pas du ministre de l'agriculture mais
de la Commission européenne et que je combats à leurs côtés, afin de la
remettre en cause dans les plus brefs délais.
M. Auguste Cazalet.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Cazalet.
M. Auguste Cazalet.
Je remercie M. le ministre de sa réponse. Je sais qu'il est très sensible aux
problèmes de montagne car, comme il vient de le rappeler, il est issu d'un
département qui est très montagneux, peut-être plus que les
Pyrénées-Atlantiques. Mais qu'il me permette de lui dire, en toute amitié,
presque entre voisins, de ne pas toucher au fondement même de la politique de
la montagne, car elle a fait ses preuves depuis presque trente ans
maintenant.
Monsieur le ministre, je vous lance cet appel : défendez et aidez les
agriculteurs, véritables jardiniers de la montagne, à vivre demain sur leur
exploitation et à y installer leurs enfants.
RÉHABILITATION DES CABANES PASTORALES
M. le président.
La parole est à M. Domeizel, auteur de la question n° 902, adressée à M. le
ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Claude Domeizel.
J'ai écouté avec intérêt la question de M. Cazalet et j'ai pris connaissance
avec autant d'intérêt de votre réponse, monsieur le ministre, car je vous ai
moi-même interrogé sur cette réforme des indemnités compensatoires de handicaps
naturels. Il s'agit d'un sujet d'inquiétude pour bon nombre d'agriculteurs des
Alpes-de-Haute-Provence, département que j'ai l'honneur de représenter ici et
où l'agriculture de montagne occupe une très grande place.
J'en viens à ma question, qui porte également sur un secteur important de
l'agriculture de montagne : l'élevage.
Monsieur le ministre, je me permets d'attirer votre attention sur le problème
de l'hébergement des bergers lors de la transhumance dans les alpages.
A l'aube du xxie siècle, il est anormal que des hommes vivent dans des
conditions souvent très sommaires et dignes d'un autre siècle. Outre le
bénéfice d'un confort minimum, une amélioration des cabanes pastorales
permettrait aux bergers qui le souhaitent de séjourner avec leur famille. En
plus du maintien de l'équilibre familial seraient aussi partagées les tâches
professionnelles et de la vie quotidienne qu'aujourd'hui le berger assume seul,
ce qui l'oblige à s'éloigner du troupeau pendant de longues heures.
En outre, si un argument supplémentaire devait être apporté, il me paraît
important de souligner que la présence continue du berger ou d'un membre de la
famille auprès de son troupeau deviendrait alors un élément complémentaire de
défense contre les chiens errants ou tout autre prédateur - je veux parler du
loup - et contre les intempéries.
Les départements et régions participent déjà, avec le concours du ministère de
l'environnement et le vôtre, monsieur le ministre, par le biais du fonds
national d'aménagement du territoire et du fonds de gestion de l'espace rural,
au financement des améliorations pastorales. Mais, à l'évidence, ces efforts
sont insuffisants pour la rénovation de ces habitats. Envisagez-vous, monsieur
le ministre, de prendre des mesures financières plus importantes pour la
réhabilitation ou la construction de cabanes pastorales, qu'elles soient gérées
par l'Office national des forêts ou par les municipalités ?
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le sénateur, les élus
des départements de montagne que nous sommes savons que le pastoralisme est une
activité essentielle de l'économie agricole en zone de montagne, où il tient un
rôle écologique et social reconnu. C'est, en outre, un excellent exemple de la
multifonctionnalité de l'agriculture, que nous plaidons à l'échelon à la fois
européen et international.
A ce titre, compte tenu des contraintes géographiques, économiques,
environnementales et humaines que vous soulignez, cette activité fait l'objet
de soutiens particuliers de la part des collectivités publiques. Ainsi, la
rénovation et la réhabilitation des cabanes pastorales peuvent bénéficier de
diverses aides publiques de l'Etat, des collectivités et de l'Union européenne,
afin d'améliorer l'hébergement des bergers lors de la transhumance dans les
alpages et d'assurer la sécurité des troupeaux.
La nature et le montant de ces aides dépendent, bien sûr, du projet et de son
bénéficiaire. Elles sont de trois types : tout d'abord, le fonds de financement
des contrats territoriaux d'exploitation, les CTE, qui permet d'obtenir des
subventions au titre du volet socio-économique des CTE ; ensuite, les dotations
inscrites dans les contrats de plan Etat-région et les conventions
interrégionales de massif ; enfin, les financements communautaires lorsque les
travaux entrent dans le cadre d'une mesure éligible au plan national de
développement ou à un document unique de programmation, le DOCUP, objectif
2.
Le ministère de l'agriculture et de la pêche mobilisera annuellement, au titre
des investissements pastoraux pris dans leur ensemble, sur la période 2000-2006
des contrats de plan Etat-région de l'ordre de 20 millions de francs par an.
Les conseils régionaux se sont engagés à apporter une somme équivalente.
En ce qui concerne le cofinancement communautaire, ces participations
annuelles nationales devraient appeler 6 à 7 millions de francs sur le
FEOGA-garantie, au profit de projets individuels ou collectifs.
Il convient également de souligner la participation de mon ministère au
programme triennal du « plan loup » mis en place dans l'arc alpin, à hauteur de
9,8 millions de francs pour l'ensemble des trois années 2000-2002.
En outre, un complément du ministère de l'aménagement du territoire et de
l'environnement vient compléter l'ensemble de ce dispositif financier.
Nous faisons donc la preuve, chiffres à l'appui, que la réhabilitation des
cabanes pastorales fait l'objet d'un soutien des collectivités publiques, en
général, et de l'Etat, en particulier.
M. Claude Domeizel.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse à laquelle les
ouvriers agricoles, dont on parle peu dans notre assemblée, seront sensibles
car elle est de nature à satisfaire, je l'espère, leurs inquiétudes.
REFUS D'ACCEPTATION DE CERTAINS BILLETS
PAR LES COMMERÇANTS
M. le président.
La parole est à M. Vallet, auteur de la question n° 820, adressée à M. le
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. André Vallet.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous n'ignorez pas que l'obligation qui est
faite aux commerçants d'accepter les billets émis par la Banque de France, dès
lors qu'ils ont un cours légal, constitue l'un des fondements de notre droit
commercial. Un refus serait d'ailleurs sanctionné par l'article R. 642-3 du
nouveau code pénal.
Or, en dépit de ce texte, la recrudescence de faux billets de 500 francs
incite de nombreux commerçants à refuser purement et simplement les coupures de
ce montant. Cette attitude est d'autant plus difficile à admettre qu'il est
possible de déceler les contrefaçons et que du matériel simple et accessible
permet de contrôler ces billet. D'ailleurs, de nombreux commerçants se sont
dotés de ce matériel.
La Banque de France édite une brochure dans laquelle sont détaillés tous les
défauts de l'imitation. Elle organise également des stages gratuits à l'adresse
des commerçants pour les mettre en mesure de faire face à cet afflux de fausse
monnaie. Dans ces conditions, monsieur le secrétaire d'Etat, il paraît anormal
que des consommateurs se voient refuser le paiement avec ces billets.
J'aimerais également soulever la question des responsabilités dans la
persistance de la présence de fausse monnaie.
Le billet de 500 francs est aujourd'hui la coupure la plus élevée de notre
système monétaire. Par voie de conséquence, sa valeur en limite automatiquement
la circulation. En effet, si les commerçants sont tenus d'accepter les billets
de 500 francs en paiement, ils n'ont qu'exceptionnellement l'occasion de les
remettre directement en circulation auprès des usagers.
Dès lors, l'immense majorité des billets de 500 francs est remise aux
organismes financiers, qui en assurent la redistribution au public. On peut
donc s'interroger sur le degré de responsabilité de ces établissements qui
remettent en circulation des billets dont ils savent qu'une partie au moins
constitue une contrefaçon.
Monsieur le secrétaire d'Etat, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il
prendre pour sanctionner le refus de certains commerçants d'accepter des
billets de 500 francs dont rien ne permet de mettre en doute l'authenticité ?
Comment va-t-il contrôler l'afflux de cette fausse monnaie dans les divers
organismes financiers ?
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à
l'artisanat et à la consommation.
Monsieur le sénateur, vous évoquez un
problème qui, il est vrai, inquiète souvent les commerçants. Il renvoie
également à la question de savoir comment, demain, les consommateurs seront
protégés eu égard à la future monnaie européenne.
Cette attitude des commerçants peut être compréhensible, car elle est motivée
par l'insuffisance des moyens dont ils disposent pour effectuer
l'identification des faux billets. Ils prennent ainsi le risque, en les
acceptant, que leur établissement bancaire les confisque, sans évidemment leur
fournir la contrepartie en valeur équivalente. Je suis néanmoins obligé de vous
rappeler que cette attitude est illégale, comme vous l'avez souligné, monsieur
Vallet, en faisant référence au code pénal. Si un commerçant a bien la
possibilité de demander à sa clientèle de faire l'appoint, le fait de refuser
des pièces de monnaie ou des billets de banque ayant cours légal en France
constitue une infraction passible de l'amende prévue pour les contraventions de
deuxième classe.
Le Gouvernement veut, en la matière, montrer l'exemple et aider les
commerçants. Tout d'abord, l'Etat montre l'exemple pour ce qui concerne le
réseau du Trésor public. A cette fin, j'ai fait rappeler à l'ensemble des
comptables publics la réglementation en vigueur, afin d'éviter que ne se
reproduisent des initiatives isolées de refus de certains billets.
Ensuite, pour mettre fin au comportement de défiance, la nouvelle gamme de
billets de 500 francs à l'effigie de Pierre et Marie Curie, dont la conception
et la fabrication ont reposé sur l'utilisation de technologies avancées, se
caractérise par un niveau de sécurisation qui est parmi les plus élevés dans le
monde.
Le nombre de faux billets a ainsi été divisé par dix entre 1995 et 1999. Il
faut encore mieux informer le public et les commerçants des signes de sécurité
de la nouvelle gamme de billets. Nous avons donc demandé à la Banque de France
d'amplifier les actions de sensibilisation menées en ce sens. M. le ministre de
l'économie, des finances et de l'industrie vient également de saisir le
ministre de l'intérieur pour que les efforts s'intensifient à l'encontre des
filières de faux-monnayage.
Les pouvoirs publics suivent donc avec beaucoup d'attention, monsieur le
sénateur, le phénomène que vous évoquez.
M. André Vallet.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Vallet.
M. André Vallet.
Si je ne doute pas, monsieur le secrétaire d'Etat, que le ministre de
l'intérieur et la police surveillent de très près cette fausse monnaie,
notamment les faux billets de 500 francs, je comprends toutefois parfaitement
l'embarras des commerçants auxquels on présente ce mode de paiement.
Je vous demande simplement de rappeler très fortement que, si un commerçant
peut contrôler un billet, il n'est pas en droit de le refuser. Tel est le fond
de ma question. En effet, si nous sortions du Sénat pour nous promener dans le
quartier, nous ne manquerions pas de voir au-dessus des caisses des pancartes
annonçant que les billets de 500 francs ne sont pas acceptés. C'est cela qui
n'est pas tolérable.
ACCÈS À LA PROFESSION
DANS LES MÉTIERS DU BÂTIMENT
M. le président.
La parole est à M. Hérisson, auteur de la question n° 888, adressée à M. le
secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à
l'artisanat et à la consommation.
M. Pierre Hérisson.
La loi du 5 juillet 1996 relative au développement, à la promotion du commerce
et de l'artisanat, que j'avais eu l'honneur de rapporter au Sénat, pose en son
article 16 l'exigence, pour les personnes exerçant en entreprise individuelle
ou en société, d'une qualification minimale préalable dans certaines activités
du bâtiment comme la construction, l'entretien et la réparation des bâtiments,
la mise en place, l'entretien et la réparation des réseaux et des équipements
utilisant les fluides, ou pour tout ce qui touche l'alimentation en gaz, le
chauffage des immeubles et les installations électriques, ou encore le
ramonage.
Le décret du 2 avril 1998, pris tardivement, indique que l'exercice de toutes
ces activités est limité aux personnes titulaires d'un certificat d'aptitude
professionnelle, un CAP, d'un brevet d'études professionnelles, un BEP, ou d'un
diplôme ou titre homologué, d'un niveau égal ou supérieur, dans l'un des
métiers du bâtiment. A défaut d'un diplôme ou d'un titre homologué, une
expérience de trois années effectives d'activité professionnelle dans le
secteur du bâtiment est requise. Cette expérience fait l'objet d'une validation
par le préfet.
Or une circulaire ministérielle du 12 juin 1998 a vidé la loi de sa substance.
La circulaire précise en effet que le défaut de qualification d'un candidat à
la création d'entreprise interdit l'exercice des activités artisanales, mais
laisse la porte ouverte à l'immatriculation à la chambre de métiers. Cette
circulaire indique aussi que la condition peut être remplie soit par la
personne qui exerce l'activité, soit par toute autre personne qui assurera un
contrôle de façon permanente.
Aussi, afin de respecter la volonté du législateur, dans un souci d'efficacité
des missions de contrôle et dans l'intérêt même des candidats à l'installation,
je vous demanderai, monsieur le secrétaire d'Etat, si vous n'envisagez pas de
compléter les dispositions en la matière afin que les chambres consulaires qui
effectuent l'immatriculation des artisans procèdent elles-mêmes au contrôle de
la qualification professionnelle, toujours dans le but de protéger le
consommateur et d'améliorer le niveau de qualification des créateurs
d'entreprises du bâtiment. Vous contribuerez à éviter, dans certains cas, les
dépôts de bilan, mais aussi les très nombreux contentieux liés à la garantie
d'achèvement des travaux et aux garanties décennales, dans un secteur
particulièrement sensible.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à
l'artisanat et à la consommation.
Monsieur le sénateur, la loi du 15
juillet 1996, dont vous avez été effectivement le rapporteur, distingue bien,
en son article 16, la création de l'exercice effectif de la profession.
Pour ce qui est de la création, la certification professionnelle n'est pas
exigée par la loi ; en revanche, l'exercice effectif d'une telle activité par
une entreprise, quels que soient sa taille et son statut, et à n'importe quel
moment, ne peut s'effectuer que sous le contrôle effectif et permanent d'une
personne qualifiée, qu'elle soit chef d'entreprise ou salariée.
Donc, actuellement, personne ne peut empêcher la création d'une entreprise et
son immatriculation. En revanche, l'exercice de la profession - et, je veux
vous rassurer, il n'y a eu de détournement ni de l'esprit ni de la lettre de la
loi en la matière - ne peut se faire que par une personne réellement
qualifiée.
Quant au contrôle de ces dispositions, Monsieur le sénateur, il relève de deux
catégories d'agents : soit les agents de police judiciaire, soit les agents de
la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression
des fraudes, la DGCCRF, que vous connaissez bien, par ailleurs.
Comment obtenir cette qualification ?
Les conditions de la qualification obligatoire ont été fixées dans le décret
n° 98-246 du 2 avril 1998, qui a été pris après avis du Conseil de la
concurrence, de la commission de la sécurité des consommateurs, des assemblées
consulaires et des organisations professionnelles.
Il est ainsi exigé, comme vous l'avez rappelé, soit un diplôme ou titre
homologué de niveau égal ou supérieur au certificat d'aptitude professionnelle,
soit une expérience professionnelle de trois ans attestée pour assurer le
contrôle de l'exercice de l'activité.
Les chambres de métiers, en tant qu'elles tiennent le répertoire des métiers
et assurent l'immatriculation des entreprises en vue de leur création, n'ont ni
le pouvoir ni le devoir - sauf, le cas échéant, d'information et de conseil -
en matière de contrôle de la qualification professionnelle des entreprises
artisanales nécessaire à leur exercice, ce qui leur a été rappelé récemment
afin, notamment, d'éviter à leurs responsables toute suspiscion d'usurpation de
fonction.
Aujourd'hui, il faut une qualification, et le décret prévoit à quelles
conditions. Mais le rôle des chambres de métiers et des chambres consulaires
est non pas de contrôler, mais d'informer et d'enregistrer. Le pouvoir de
police en la matière revient bien aux services de contrôle définis par la loi,
et à eux seuls, qui sont chargés de veiller à l'application des dispositions
légales. Les services de la DGCCRF, qui relèvent de mon secrétariat d'Etat, ont
été notamment invités à faire preuve d'une plus grande vigilance dans les
domaines que vous avez évoqués.
M. Pierre Hérisson.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie, mais tout irait bien si, dans
la réalité, le système fonctionnait comme vous l'avez décrit. Malheureusement,
il en va différemment.
J'ai bien compris votre souci d'améliorer la situation, notamment en appelant
la DGCCRF à une vigilance accrue. Cependant, tant que les chambres de métiers
pourront enregistrer et immatriculer et que le dispositif de contrôle, qui
certes, a des effets intéressants, interviendra
a posteriori
,
c'est-à-dire après l'immatriculation, un certain nombre d'entreprises seront
encore immatriculées et des activités pratiquées jusqu'au jour où un
contentieux s'élèvera sur la qualification de la personne chargée de
représenter l'entreprise dont le diplôme n'aura, par exemple, rien à voir avec
les activités du bâtiment.
La solution radicale serait que les chambres consulaires ne puissent pas
procéder à l'enregistrement sans un contrôle préalable de la qualification.
Mais nous pourrons en reparler en d'autres circonstances, à l'occasion d'une
évolution des textes qu'il me paraît souhaitable d'envisager, et non plus pour
les seules activités du bâtiment.
COMPOSITION DU NOUVEAU SUPERCARBURANT
M. le président.
La parole est à M. Leclerc, auteur de la question n° 896, adressée à M. le
secrétaire d'Etat à l'industrie.
M. Dominique Leclerc.
Monsieur le secrétaire d'Etat, depuis le 1er janvier 2000, un supercarburant
est distribué en lieu et place de l'essence plombée. Il contient donc, pour
faire fonction d'antidétonant, non plus le fameux plomb tétraéthyle, mais du
potassium.
On n'a pas manqué, à l'époque, de me faire part des inquiétudes suscitées par
cette nouvelle composition, plus particulièrement par les incidences de
l'addition du potassium dans le supercarburant en termes d'environnement et de
santé publique.
J'avoue partager ces préoccupations.
En effet, le potassium contient un isotope radioactif naturel, qui émet un
rayonnement bêta et gamma lors de sa désintégration et dont on ne connaît pas
l'impact réel à long terme sur la santé de nos concitoyens.
C'est pourquoi j'avais interrogé la direction générale de l'énergie et des
matières premières à ce sujet.
Il m'a été récemment répondu que ce produit a fait l'objet de nombreux tests
et études en Autriche et en Suède et que son utilisation ne pose pas de
problème dans ces pays.
Cette réponse ne m'a pas satisfait, et c'est pourquoi je vous interroge
aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'Etat.
D'une part, pour reprendre l'exemple suédois, on sait la préoccupation des
Suédois pour les centrales, mais je dois avouer, pour l'avoir constaté sur
place, que la radioactivité au quotidien n'est pas leur principale
préoccupation !
D'autre part, la réponse reçue ne dit rien d'études menées par des
scientifiques français qui démenteraient formellement la radioactivité
potentielle du potassium, ce que je ne m'explique pas.
En effet, la France dispose d'experts en radiation hautement qualifiés dont la
qualité des travaux est reconnue dans le monde entier, et je crois qu'il serait
facile de leur demander d'effectuer des calculs, non seulement pour déterminer
d'éventuels dommages sur l'appareil respiratoire, mais aussi pour savoir si les
résidus restent peu de temps dans l'organisme a, au contraitre, s'ils sont
susceptibles de s'y accumuler.
Ces calculs n'ont pas été effectués et vous comprendrez que je m'étonne, à
l'heure où l'on fait de la protection de la santé une priorité, que vous n'ayez
pas fait réaliser cette étude d'impact de l'utilisation du potassium, afin
d'obtenir l'absolue assurance de son innocuité.
C'est pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous serais reconnaissant de
bien vouloir me rassurer, ainsi que l'ensemble de nos concitoyens, en
fournissant de véritables résultats sur les effets de ce produit, ou bien en
nous confirmant que vous envisagiez de faire procéder à des expertises en ce
sens.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à
l'artisanat et à la consommation.
Monsieur le sénateur, vous avez rappelé
le problème posé par la toxicité des carburants et de leurs additifs destinés
aussi bien à augmenter l'indice d'octane qu'à assurer la protection des sièges
des soupapes des moteurs anciens.
Chacun s'accorde à reconnaître que le plomb est toxique, et l'on pense en
général aux effets du saturnisme sur les enfants, notamment.
Le plomb a, en effet, des propriétés neurotoxiques connues pour affecter le
développement du système nerveux des jeunes enfants. Il est par ailleurs un
poison non réversible des catalyseurs installés dans les pots catalytiques des
véhicules modernes.
La France a décidé de s'appuyer sur d'autres connaissances pour trouver un
nouvel additif qui ne présente plus la dangerosité de l'oxyde de plomb. C'est
ce dérivé du potassium, ayant les mêmes effets sur l'anti-récession des
soupapes, mais n'ayant pas d'incidences sur l'environnement, que nous pouvons
inclure dans les nouveaux carburants.
Je vous rappelle l'expérience internationale en la matière, non sans avoir
souligné que, si la recherche française n'a pas été au-delà, c'est que notre
gouvernement a suivi les recommandations faites dans le cadre européen par des
organismes dont on peut difficilement contester aujourd'hui à la fois le niveau
de recherche et la fiabilité.
Aujourd'hui, cette expérience internationale - vous avez rappelé celle de
l'Autriche, mais il y a aussi celles de la Thaïlande et de l'Allemagne -
reconnaît un avantage certain à l'utilisation d'additifs contenant du
potassium, sans effet secondaire parasite néfaste sur la santé, l'environnement
ou les équipements des moteurs. Ce type d'additif est actuellement en usage,
depuis 1990, en Autriche, depuis 1992, en Suède et en Norvège et, depuis plus
de cinq ans, dans d'autres pays.
Ces additifs ont fait l'objet de programmes de tests en Autriche et en Suède,
pays connus pour leur sensibilité et leur rigueur environnementales. En
particulier, des tests ont été conduits en Suède par le
motortescenter
selon la procédure standard reconnue par le
National Swedish Environmental
Protection Board
sur le niveau des émissions et des particules, sur la
consommation, sur la composition chimique des particules et des émissions, sur
l'activité biologique des particules et des émissions concernant la mutagénéité
ainsi que sur l'impact au regard de la production de dioxines.
C'est ce qui a conduit la France, monsieur le sénateur, à retenir cette
solution.
Le nouveau supercarburant destiné aux véhicules anciens est ainsi constitué de
carburant sans plomb d'indice d'octane minimal 97 et d'un additif à base de
potassium.
A la fin de votre question, vous me demandez si le Gouvernement est prêt à
utiliser les connaissances actuelles en matière de radioactivité pour obtenir
des réponses qui nous manquaient jusqu'à présent. Je peux répondre par
l'affirmative. Aujourd'hui, le Gouvernement est en effet prêt à poursuivre les
études sur des effets non indiqués dans la première partie de ma réponse, mais
qui feraient courir un risque réel pour la population.
M. Dominique Leclerc.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de ces derniers propos, mais
permettez-moi d'insister. Aujourd'hui, toute recherche de gisement de minerai
d'uranium est caractérisée par une attention particulière portée au rayonnement
naturel d'éléments radioactifs que sont évidemment l'uranium mais aussi le
strontium et le potassium.
Or, compte tenu de la densité de la circulation dans nos grandes villes, que
l'on ne peut comparer à celle de la Suède ou de l'Autriche, mais aussi compte
tenu de l'état des véhicules, il serait intéressant que nos scientifiques nous
indiquent sous quelle forme le potassium, notamment, est inhalé et ensuite
rejeté par les urines, afin de pouvoir dire à nos concitoyens, dans un souci de
transparence, que le potassium additif, avec tous les avantages qu'il offre par
rapport au plomb, ne présente aucun risque, dans l'avenir, pour leur santé.
M. le président.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons
suspendre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures, est reprise à seize heures, sous la
présidence de M. Jean Faure.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
4
CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS
M. le président.
La conférence des présidents a établi comme suit l'ordre du jour des
prochaines séances du Sénat :
Mercredi 8 novembre 2000 :
A quinze heures et le soir :
Ordre du jour prioritaire
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence,
relatif à l'épargne salariale (n° 11, 2000-2001) ;
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
La conférence des présidents a fixé à trois heures la durée globale du temps
dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes
ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ; le délai limite pour les
inscriptions de parole dans la discussion générale est expiré.
Jeudi 9 novembre 2000 :
A neuf heures trente :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration
d'urgence, relatif à l'épargne salariale (n° 11, 2000-2001) ;
A quinze heures et, éventuellement, le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la
séance avant onze heures.
Ordre du jour prioritaire
3° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration
d'urgence, relatif à l'épargne salariale (n° 11, 2000-2001).
Mardi 14 novembre 2000 :
A neuf heures trente :
1° Dix-huit questions orales :
L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.
N° 892 de Mme Janine Bardou à M. le ministre de l'économie, des finances et de
l'industrie (régime fiscal des micro-entreprises) ;
N° 898 de M. Daniel Eckenspieller à M. le ministre de l'économie, des finances
et de l'industrie (TVA applicable au bois-énergie) ;
N° 900 de M. Jean Besson à M. le secrétaire d'Etat au logement (réforme de
l'aide personnalisée au logement) ;
N° 904 de M. Robert Laufoaulu à M. le ministre de l'éducation nationale
(enseignement des langues wallisienne et futunienne et place de
Wallis-et-Futuna dans la nouvelle organisation de l'enseignement supérieur dans
le Pacifique) ;
N° 905 de M. Jean-Claude Carle à Mme le ministre de l'emploi et de la
solidarité (réforme des aides à l'embauche de jeunes en contrat de
qualification) ;
N° 906 de M. Bernard Cazeau transmise à Mme le ministre de l'emploi et de la
solidarité (reconstitution de carrière des médecins sous contrat dans les
centres hospitaliers publics) ;
N° 910 de M. Bernard Piras transmise à M. le ministre de l'intérieur
(financement des réseaux de distribution d'eau potable) ;
N° 911 de M. Philippe de Gaulle à M. le secrétaire d'Etat à la défense chargé
des anciens combattants (fiscalité applicable aux retraites mutualistes des
anciens combattants) ;
N° 913 de M. Joseph Ostermann à M. le ministre de l'intérieur (financement des
services d'incendie et de secours) ;
N° 914 de Mme Nicole Borvo à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité
(ventes de terrains par l'Assistance publique de Paris) ;
N° 915 de M. Guy Vissac à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche
(reconstitution des forêts dévastées par la tempête de 1999) ;
N° 917 de Mme Hélène Luc à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité
(seuils de revenus donnant accès à la CMU) ;
N° 918 de M. Jean-Marie Poirier à M. le ministre de l'intérieur (contenu des
conventions de coordination policière) ;
N° 921 de M. Jean Huchon à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité
(fonctionnement des centres anticancéreux) ;
N° 925 de M. Paul Girod à M. le ministre de l'équipement, des transports et du
logement (création d'un troisième aéroport) ;
N° 931 de M. Lucien Lanier à M. le ministre de l'intérieur (petite délinquance
à Vincennes et Saint-Mandé) ;
N° 932 de M. Jean-Pierre Demerliat à M. le ministre de l'agriculture et de la
pêche (transport du bois abattu par les tempêtes de fin 1999) ;
N° 941 de M. Gérard César à Mme le secrétaire d'Etat à la santé et aux
handicapés (situation du centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande).
A seize heures et le soir :
Ordre du jour prioritaire :
2° Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, adopté par
l'Assemblée nationale (n° 64, 2000-2001) ;
La conférence des présidents a fixé :
- à l'ouverture de la discussion générale, le délai limite pour le dépôt des
amendements à ce texte ;
- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la
discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la
liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les
inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant
dix-sept heures, le lundi 13 novembre 2000.
Mercredi 15 novembre 2000 :
Ordre du jour prioritaire
A quinze heures et le soir :
Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, adopté
par l'Assemblée nationale (n° 64, 2000-2001) ;
Jeudi 16 novembre 2000 :
A neuf heures trente :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001,
adopté par l'Assemblée nationale (n° 64, 2000-2001) ;
A quinze heures et, éventuellement, le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement ;
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la
séance avant onze heures ;
Ordre du jour prioritaire
3° Suite de l'ordre du jour du matin.
Mardi 21 novembre 2000 :
Ordre du jour réservé
A dix heures trente :
1° Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi de M. Jean
Bizet et plusieurs de ses collègues tendant à moderniser le statut des sociétés
d'économie mixte locales (n° 455, 1999-2000) ;
La conférence des présidents a fixé au lundi 20 novembre 2000, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
A seize heures :
2° Question orale avec débat n° 27 de M. Jean-Jacques Hyest à Mme le garde des
sceaux, ministre de la justice, sur la suite des conclusions de la commission
d'enquête du Sénat sur les conditions de détention dans les établissements
pénitentiaires ;
En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement,
la conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps
dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant sur la
liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les
inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant
dix-sept heures, le lundi 20 novembre 2000 ;
3° Question orale européenne avec débat n° QE-11 de M. Hubert Haenel à M. le
ministre de la défense sur l'état de la mise en place des instruments
politiques et militaires nécessaires à la gestion des crises ;
La discussion de cette question orale européenne s'effectuera selon les
modalités prévues à l'article 83
ter
du règlement ;
Le soir :
4° Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi de M.
Michel Dreyfus-Schmidt et plusieurs de ses collègues tendant à harmoniser
l'article 626 du code de procédure pénale avec les nouveaux articles 149 et
suivants du même code (n° 474, 1999-2000) ;
La conférence des présidents a fixé au lundi 20 novembre 2000, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
5° Conclusions de la commission des affaires culturelles (n° 387, 1999-2000)
sur la proposition de loi de M. Louis de Broissia modifiant la loi n° 57-32 du
10 janvier 1957 portant statut de l'Agence France-Presse (n° 368, 1999-2000)
;
La conférence des présidents a fixé au lundi 20 novembre 2000, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.
Mercredi 22 novembre 2000 :
A quinze heures et, éventuellement, le soir :
Ordre du jour prioritaire
1° Proposition de loi organique, adoptée par l'Assemblée nationale après
déclaration d'urgence, destinée à améliorer l'équité des élections à
l'assemblée de la Polynésie française (n° 439, 1999-2000) ;
La conférence des présidents a fixé au mardi 21 novembre 2000, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
2° Projet de loi organique modifiant les règles applicables à la carrière des
magistrats (n° 483, 1999-2000) ;
La conférence des présidents a fixé au mardi 21 novembre 2000, à dix-sept
heures, le délai limite pour les dépôt des amendements à ce texte ;
3° Projet de loi relatif à la résorption de l'emploi précaire et à la
modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu'au temps de
travail dans la fonction publique territoriale (urgence déclarée) (n° 20,
2000-2001) ;
La conférence des présidents a décidé :
- de fixer au mardi 21 novembre 2000, à dix-sept heures, le délai limite pour
le dépôt des amendements à ce texte ;
- de limiter à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la
discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la
liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les
inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant
dix-sept heures, le mardi 21 novembre 2000.
Jeudi 23 novembre 2000 :
Ordre du jour prioritaire
A neuf heures trente :
1° Eventuellement, suite de l'ordre du jour de la veille ;
A onze heures, à quinze heures et, éventuellement, le soir :
2° Sous réserve de sa transmission, projet de loi de finances pour 2001 (AN,
n° 2585)Voir en annexe les règles et le calendrier de la discussion de la loi
de finances pour 2001, du jeudi 23 novembre au mardi 12 décembre 2000.
.
La conférence des présidents a adopté les propositions de la commission des
finances sur l'organisation et le calendrier du projet de loi de finances pour
2001, jusqu'au 12 décembre inclus. Ce calendrier sera adressé à tous les
sénateurs.
En outre,
I. -
Jeudi 30 novembre 2000 :
Ordre du jour prioritaire
A seize heures :
Conclusions de la commission mixte paritaire ou nouvelle lecture du projet de
loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 ;
La conférence des présidents a fixé au mercredi 29 novembre 2000, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.
II. -
Jeudi 7 décembre 2000,
à quinze heures :
Questions d'actualité au Gouvernement.
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la
séance avant onze heures.
Par ailleurs, la conférence des présidents a adopté le calendrier des séances
mensuelles réservées et des séances de questions jusqu'à la fin de la
session.
Y a-t-il des observations sur les propositions de la conférence des présidents
relatives à la tenue des séances et à l'ordre du jour réservé ?...
Ces propositions sont adoptées.
5
RECONNAISSANCE
DU GÉNOCIDE ARMÉNIEN
Demande de discussion immédiate
d'une proposition de loi
M. le président.
En application de l'article 30 du règlement, M. Jacques Pelletier demande la
discussion immédiate de la proposition de loi de MM. Jacques Pelletier, Robert
Bret, Jean-Claude Gaudin, Bernard Piras, Michel Mercier et Jacques Oudin,
relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915 (n° 60,
2000-2001).
Cette demande est signée par au moins trente sénateurs.
Conformément au quatrième alinéa de l'article 30 du règlement, il va être
procédé à l'appel nominal des signataires.
Huissier, veuillez procéder à l'appel nominal.
(L'appel nominal a lieu.)
Ont signé cette demande et répondu à l'appel de
leur nom : MM. Guy Allouche, Bernard Angels, François Autain, Denis Badré, Mme
Marie-Claude Beaudeau, MM. Jean-Pierre Bel, Jean Besson, Mme Danielle
Bidard-Reydet, M. Christian Bonnet, Mmes Nicole Borvo et Yolande Boyer, M.
Robert Bret, Mme Claire-Lise Campion, MM. Bernard Cazeau, Gilbert Chabroux,
Marcel Charmant, Gérard Collomb, Roland Courteau, Jean-Patrick Courtois, Louis
Ferdinand de Rocca Serra, Marcel Debarge, Charles Descours, Claude Domeizel,
Bernard Dussaut, Hubert Falco, Léon Fatous, Guy Fischer, Thierry Foucaud,
Jean-Claude Gaudin, Adrien Gouteyron, Jean-Noël Guérini, Claude Haut, Roger
Hesling, Roger Karoutchi, Serge Lagauche, Gérard Le Cam, Pierre Lefebvre,
Roland du Luart, Mme Hélène Luc, MM. François Marc, Serge Mathieu, Michel
Mercier, Roland Muzeau, Mme Nelly Olin, MM. Jean-Marc Pastor, Jacques
Pelletier, Jacques Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Jean-François Picheral,
Bernard Piras, Mme Gisèle Printz, MM. Ivan Renar, Roger Rinchet, René-Pierre
Signé, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, André Vallet,
Paul Vergès et André Vezinhet.
M. le président.
Mes chers collègues, la présence d'au moins trente signataires ayant été
constatée, il va être procédé à l'affichage de la demande de discussion
immédiate sur laquelle le Sénat sera appelé à statuer, conformément à l'article
30 du règlement, au cours de la présente séance, après l'expiration du délai
minimum d'une heure et après la fin de l'examen du dernier texte inscrit par
priorité à l'ordre du jour.
La demande va être communiquée sur-le-champ au Gouvernement.
6
LOI D'ORIENTATION POUR L'OUTRE-MER
Adoption d'un projet de loi en nouvelle lecture
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi
d'orientation (n° 28, 2000-2001) relatif à l'outre-mer, adopté par l'Assemblée
nationale avec modifications en nouvelle lecture. [Rapport n° 48 (2000-2001).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer.
Monsieur le président, mesdames,
messieurs les sénateurs, en m'adressant à votre assemblée, et pour la première
fois à cette tribune, pour vous présenter, en nouvelle lecture, le projet de
loi d'orientation relatif à l'outre-mer, adopté le 12 octobre dernier par
l'Assemblée nationale, j'entends bien ne pas procéder à un examen purement
formel de ce texte. Mon état d'esprit est en effet tout autre.
Je souhaite, en y mettant toute la force de ma conviction, essayer de
convaincre la majorité sénatoriale, qui a accepté en première lecture
l'essentiel de ce texte et qui l'a enrichi, que rien ne justifie, au fond, que
subsistent de véritables désaccords entre elle et le Gouvernement. Si quelques
points de divergence - deux seulement, en fait - ont abouti à ce qu'échoue la
commission mixte paritaire qui s'est tenue le 3 octobre dernier à l'issue de la
première lecture, je veux croire, mesdames, messieurs les sénateurs, que cette
discussion peut les réduire.
Je souhaite surtout que notre discussion permette à chacun, dans cet hémicycle
comme dans les départements d'outre-mer, de prendre l'exacte mesure des
orientations affirmées par ce projet de loi.
Mesdames, messieurs les sénateurs, ce texte n'est pas une simple loi d'étape.
Il dessine un cap, sans fixer un point d'arrivée. C'est en cela qu'il est une
véritable loi d'orientation.
Permettez-moi d'en donner au moins trois preuves.
Tout d'abord, ce projet de loi fonde un processus d'évolution statutaire
porteur de sens et d'une exigence forte.
Plus d'un demi-siècle après la loi de 1946, près de vingt ans après les lois
de décentralisation, une nouvelle page doit s'écrire pour les départements
d'outre-mer. Dans le même temps qu'il affirme le droit à une évolution
différenciée et choisie, ce texte reconnaît que le mouvement doit provenir de
la confrontation des idées et des projets dans l'espace public local. C'est la
fin d'une vision unique, dictant à l'outre-mer, depuis Paris, le chemin à
emprunter.
Ce texte - et c'est, je crois, la deuxième preuve de sa qualité de loi
d'orientation - vise à s'attaquer à bras-le-corps à l'enjeu majeur, au drame
partagé des départements d'outre-mer que sont le chômage et la souffrance
sociale que celui-ci produit, en disant haut et fort que les départements
d'outre-mer ne sauraient demeurer durablement à l'écart de la croissance
retrouvée par notre pays et que, bien sûr, il faut agir pour cela.
Enfin - et c'est la troisième preuve que je voulais apporter - ce projet de
loi tend à dépasser l'opposition stérile entre le développement économique,
d'un côté, et l'évolution institutionnelle, d'un autre côté. Ce texte donne à
la République une grille de lecture indispensable pour appréhender les réalités
complexes de l'outre-mer et bâtir l'action de l'Etat. Mieux organiser la
solidarité n'est pas un objectif incompatible avec le respect des identités et
des différences.
S'agissant du volet économique et social de ce projet de loi, que je voudrais
évoquer tout d'abord, je faisais observer à vos collègues députés, lors de mon
intervention à l'Assemblée nationale, que le Sénat, en première lecture, avait
adopté l'essentiel des articles de ce projet de loi. Je donnais d'ailleurs acte
au Sénat, et je le refais volontiers aujourd'hui, de ce que, dans bien des cas,
ces travaux, ces débats et les interventions de son rapporteur avaient permis
d'améliorer certaines dispositions proposées. Plus globalement, ce projet de
loi d'orientation - je tiens aussi à le rappeler aujourd'hui - est le fruit
d'un travail qui vient après une phase de consultation, de concertation et un
rapport qui a fait date, celui de Claude Lise et de Michel Tamaya.
Au regard des amendements que la commission des lois du Sénat a adoptés, et
évidemment sous bénéfice d'inventaire, il me semble que les points de désaccord
se sont encore considérablement réduits par rapport à ceux qui avaient été
constatés à l'issue de la première lecture. Sur le fond, dans le domaine
économique et social, seuls deux d'entre eux paraissent suffisamment
substantiels pour être évoqués d'emblée.
Le premier est relatif au dispositif, très attendu outre-mer depuis de
nombreuses années, de congé-solidarité, prévu à l'article 9
quater
du
projet de loi, dispositif couramment qualifié de « préretraite contre embauche
de jeunes ». Le Gouvernement a entendu en réserver le bénéfice aux seules
entreprises qui seront effectivement passées aux 35 heures.
L'Assemblée nationale a rétabli cette disposition qui est, en effet, pour le
Gouvernement, une condition nécessaire. Le Gouvernement a fait de la réduction
hebdomadaire du temps de travail un axe majeur de sa politique en faveur de
l'emploi. Les résultats en ce domaine, qui viennent d'ailleurs d'être confortés
par la baisse importante du chômage que notre pays a connue en septembre - 2,5
% de baisse, soit près de 59 000 chômeurs en moins - montrent qu'il a eu
raison.
Concernant le dispositif de congé-solidarité, cette condition effective
jouera, de surcroît, comme un multiplicateur qui permettra d'embaucher un
nombre de jeunes en contrat à durée indéterminée supérieur à celui des salariés
âgés bénéficiant de ce congé.
Mesdames, messieurs les sénateurs, dans les départements d'outre-mer, où près
de 36 % de la population a moins de vingt ans, contre 25 % en métropole, les
mesures prises en faveur de l'emploi des jeunes, qui sont au coeur de ce projet
de loi d'orientation, doivent être à la hauteur des enjeux qui s'y posent. La
condition des 35 heures, tout autant d'ailleurs que celle qui est relative à la
nature des contrats de travail qui devront être proposés à ces jeunes, est donc
essentielle - je voudrais vous en convaincre - pour la réussite de ce mécanisme
de congé-solidarité.
Le second point de divergence, à l'issue des travaux de la commission des lois
du Sénat, concerne le champ des exonérations de charges patronales de sécurité
sociale, tel que prévu à l'article 2 du projet de loi d'orientation. La
commission des lois, comme c'est bien sûr son droit, a réitéré son souhait que
bénéficient de ces exonérations non pas les entreprises de moins de onze
salariés, mais les dix premiers salariés des entreprises de moins de vingt et
un salariés.
Le Gouvernement - j'ai eu l'occasion de m'exprimer à plusieurs reprises sur ce
point - a toujours eu conscience de la nécessité d'atténuer l'effet de seuil
que provoque ce dispositif. A ce titre, j'ai accepté à l'Assemblée nationale,
au nom du Gouvernement, un amendement parlementaire qui poursuivait cet
objectif et qui m'apparaît comme un bon compromis.
M. Lucien Lanier.
Très bien !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
L'amendement de la commission des lois, dont je
comprends bien sûr l'objectif, ne représenterait pas moins de 400 millions de
francs de charge budgétaire pour un effet sans doute marginal sur l'emploi et,
en tout cas, sans commune mesure avec son coût. Au demeurant, la disposition
proposée ne supprimerait pas l'effet de seuil mais se contenterait de le
repousser.
Mesdames, messieurs les sénateurs, sur ce point, j'observe également que
personne, ici pas plus qu'ailleurs et, en tout cas, pas dans les départements
d'outre-mer, ne conteste que le plan d'exonérations de charges proposé par le
Gouvernement est, selon la formule du Premier ministre, sans précédent.
Le dispositif antérieur, celui de la loi du 25 juillet 1994, ne concernait en
effet que les entreprises des secteurs exposés. En dehors de ces secteurs
exposés, les exonérations de charges ne bénéficiaient à aucune des petites
entreprises. Celles-ci ne profitaient donc pas d'un système dans lequel
l'exonération était plafonnée au SMIC et qui était, au demeurant, restreint par
la condition d'être à jour de ses dettes sociales ou de s'être vu accorder par
l'administration un plan d'apurement de celles-ci. Les dispositions de cette
loi étaient limitées à cinq ans et son financement, je le souligne, reposait
intégralement sur une majoration de la TVA outre-mer, c'est-à-dire sur un impôt
dont chacun sait qu'il frappe indistinctement les plus riches comme les plus
pauvres. Précaire, très restreint, intégralement à la charge des départements
d'outre-mer - en fait de trois d'entre eux -, ce dispositif n'aura concerné que
moins de 45 000 salariés.
Le projet de loi d'orientation relève d'une tout autre ambition. Aux
entreprises des secteurs exposés, même lorsque celles-ci ont plus de dix
salariés, s'ajouteront désormais toutes les petites entreprises de moins de
onze salariés, et ce quel que soit leur secteur d'activité. Ce choix en faveur
des petites entreprises découle du constat qu'elles seront, outre-mer peut être
plus encore qu'en métropole, le principal gisement de créations d'emplois dans
les années à venir. Quant au seuil proposé - chacun reconnaît qu'il en fallait
un -, celui qui est retenu dans le projet de loi aura été choisi de façon
large, car la très grande majorité des entreprises d'outre-mer - 95 % à peu
près - ont en réalité un effectif moyen inférieur ou égal à deux salariés. De
plus - j'insiste sur ce point -, le seuil ne concerne pas les entreprises des
secteurs exposés. Vous en connaissez la liste. Cela correspond, vous le savez,
à l'essentiel de l'économie des départements d'outre-mer.
Enfin, si le Gouvernement n'a pas jugé possible de suivre la position du
Sénat, s'agissant de la liste des secteurs exposés, il a néanmoins accepté
d'aller dans son sens, puisque, à l'issue de la première lecture à l'Assemblée
nationale, y figurent désormais les nouvelles technologie de l'information et
de la communication, comme l'avait demandé ici M. Claude Lise, et les énergies
renouvelables, comme l'avait souhaité M. Paul Vergès.
Je rappelle que le Gouvernement avait déjà inclus dans la liste des secteurs
pouvant bénéficier de ces exonérations quelle que soit la taille des
entreprises le secteur du bâtiment et des travaux publics, avec une exonération
qui a été ramenée à la moitié.
Dans l'avenir, mesdames, messieurs les sénateurs, ce sont donc 95 % des
entreprises des départements d'outre-mer qui bénéficieront d'une exonération
totale des cotisations patronales de sécurité sociale, dans la limite d'un
plafond désormais relevé à 1,3 fois le SMIC. Autrement dit, ce dispositif
concernera près de 115 000 salariés, auxquels s'ajouteront tous les
entrepreneurs et travailleurs indépendants, c'est-à-dire 55 000 personnes de
plus. Enfin, les nouvelles dispositions seront pérennes et, cette fois-ci,
relèveront intégralement de la solidarité nationale.
Lors de la première lecture, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, s'était
également exprimée une inquiétude concernant le respect par le Gouvernement de
l'engagement qu'avait pris le Premier ministre de proposer dès 2001 un nouveau
système, plus efficace et plus juste, de soutien fiscal aux investissements
outre-mer, en remplacement de la loi de 1986.
Issu des travaux d'un groupe de travail qui associait les représentants de
l'administration aux chefs d'entreprise des départements d'outre-mer, ce
nouveau dispositif figure à l'article 12 du projet de loi de finances pour
2001, projet de loi adopté par l'Assemblée nationale le 20 octobre dernier et
dont la Haute Assemblée sera bientôt appelée à débattre.
Ce projet de loi a été accueilli outre-mer presque unanimement de façon très
positive à la fois par les élus et par l'ensemble des milieux
socioprofessionnels. Je veux néanmoins en rappeler les grandes lignes, parce
qu'il participe de cet effort visant à s'attaquer radicalement aux difficultés
des départements d'outre-mer.
Ce nouveau dispositif de soutien fiscal à l'investissement sera en effet
marqué par une plus grande justice fiscale. Il est plus équitable. En effet, la
déduction actuelle du revenu global, qui porte atteinte à la progressivité de
l'impôt, sera remplacée par une réduction d'impôt plus équitable, égale à 50 %
du montant de l'investissement. Tous les intervenants seront donc traités de
façon équivalente quelle que soit leur tranche d'imposition ; moins
critiquable, ce dispositif sera, n'en doutons pas, plus durable.
Ensuite - c'est sa seconde qualité - ce dispositif sera plus efficace
économiquement. L'aide sera étendue à de nouveaux secteurs économiques qui sont
réellement créateurs d'emplois : la maintenance, la rénovation hôtelière et
l'acquisition de logiciels.
Vous l'avez compris, cette réforme entend avant tout être au service de
l'emploi dans des secteurs qui sont aujourd'hui réellement créateurs d'emplois
outre-mer.
Enfin, j'ai personnellement tenu à ce que les nouvelles technologies de
l'information et de la communication figurent désormais dans la liste des
secteurs éligibles à ce soutien fiscal et, à ce titre, un amendement
gouvernemental a été adopté par l'Assemblée nationale lors de l'examen du
projet de loi de finances pour 2001.
Je veux souligner également que les entreprises de l'outre-mer seront les
principales bénéficiaires de ce soutien fiscal, ce qui n'était pas forcément le
cas dans le passé. En effet, au minimum 60 % de l'avantage fiscal accordé par
l'Etat leur sera rétrocédé par le biais d'une réduction du loyer.
Comme pour le dispositif d'exonération de charges sociales - et vous pourrez
constater la constance du point de vue du Gouvernement en ce domaine -, des
dispositions favoriseront les petites entreprises, lesquelles n'ont pas accès,
aujourd'hui, à l'aide fiscale à l'investissement, beaucoup d'entre elles ne
disposant pas de revenus suffisants pour investir. Désormais, pour elles, le
crédit de 50 % du montant de l'investissement sera reportable et remboursable.
Il pourra être imputé sur l'intégralité de leur impôt, sans plafonnement, le
cas échéant sur cinq ans, avec remboursement du solde à la fin de la cinquième
année.
Pour conclure sur ce dispositif, je voudrais rappeler qu'un effort particulier
sera réalisé pour les départements ou territoires d'outre-mer n'ayant pas la
plus forte dynamique d'investissement, c'est-à-dire pour Mayotte,
Wallis-et-Futuna, mais aussi pour Saint-Pierre-et-Miquelon et la Guyane. La
réduction d'impôts sera en effet portée à 60 % pour les investissements qui
seront réalisés dans ces quatre collectivités.
Mesdames, messieurs les sénateurs, les mesures économiques et fiscales du
projet de loi d'orientation, tout comme la nouvelle loi de soutien fiscal à
l'investissement, viennent compléter, pour les départements d'outre-mer, les
crédits contractualisés, nationaux et européens, dont ils bénéficieront sur la
période 2000-2006. Ces crédits, je le rappelle, représentent près de 30
milliards de francs, sans préjudice des contreparties locales, soit plus de 50
% d'augmentation par rapport à la période précédente.
Pour les départements d'outre-mer, le pacte de croissance et de solidarité,
que le Premier ministre avait proposé au pays tout entier en juin 1997,
s'appuiera désormais sur ces trois outils, conçus en étroite synergie et qui
leur permettront, j'en suis sûr, de s'inscrire enfin dans une logique de
développement durable et solidaire. Je souhaite que la Haute Assemblée ne
demeure pas à l'écart de ce nouveau soutien aux économies de l'outre-mer.
J'en viens maintenant, mesdames, messieurs les sénateurs, au volet
institutionnel du projet de loi d'orientation. Là encore, je comprendrais plus
aisément que la Haute Assemblée, comme vous le propose une nouvelle fois la
commission des lois, affiche sur ce point son désaccord avec le projet du
Gouvernement s'il était démontré que ce désaccord découle d'oppositions
fondamentales comme celles qui ont parfois opposé, sur l'outre-mer, les grandes
familles politiques de notre pays, à d'autres moments de notre histoire.
Or, à l'occasion de la première lecture de ce texte au Sénat, dont j'ai relu
avec attention les débats, le président de la commission des lois, M. Jacques
Larché, dont je veux saluer ici l'ouverture d'esprit et le souci de la
recherche d'un compromis, n'avait pas caché son approbation personnelle à
l'égard de l'essentiel des orientations institutionnelles proposées. Il avait
simplement regretté que le Gouvernement n'ait pas choisi d'aller plus vite sur
ce chemin, en proposant d'emblée la transformation des départements d'outre-mer
en collectivités de l'article 72 de la Constitution, collectivités qui se
substitueraient à celles qui coexistent aujourd'hui : l'institution
départementale et l'institution régionale. Il n'y voyait guère d'obstacle en
droit interne - peut-être avons-nous sur ce point une divergence - mais il
relevait la nécessité d'examiner les conséquences de ces évolutions en droit
communautaire.
Malgré ce propos, chacun conviendra en relisant l'ensemble des débats du
Sénat, que ceux-ci n'étaient ni fermés ni sectaires, mais que tout a été dit
des ambiguïtés qui subsistent s'agissant des perspectives d'évolution
institutionnelle des départements d'outre-mer.
Je vais tenter aujourd'hui, au nom du Gouvernement, de lever quelques-unes de
ces ambiguïtés. En effet, je vois dans cette première lecture la confirmation
du fait que les groupes politiques qui constituent la majorité sénatoriale ne
s'opposent plus à cette évolution institutionnelle.
Pour être nouvelle et récente, cette approche s'inscrit ainsi en parfaite
cohérence avec l'expression, désormais semblable sur ce point, des deux plus
hauts responsables de notre pays. Permettez-moi de les citer : le 11 mars 2000,
en Martinique, le Président de la République déclarait que l'évolution des
règles statutaires de l'outre-mer était « dans la nature des choses ». Et cette
orientation ne s'opposait en rien, au contraire, à la ligne directrice tracée
par le Premier ministre, lorsque, écrivant aux huit présidents d'assemblées, de
conseils généraux et régionaux, Lionel Jospin soulignait la volonté du
Gouvernement de proposer aux départements d'outre-mer la possibilité d'une
évolution.
Il n'y a donc plus d'opposition, en métropole, entre gauche et droite sur ce
point.
Il n'en demeure pas moins que semblent subsister des différences
d'appréciation tant sur les contraintes juridiques d'un tel exercice que sur la
méthode sur laquelle il doit se fonder.
S'agissant, tout d'abord, des contraintes juridiques, j'indique que le
Gouvernement ne croit ni possible ni souhaitable que le législateur, s'appuyant
sur l'article 72 de la Constitution, puisse créer une collectivité unique qui
viendrait se substituer non seulement à la région - ce qui est évidemment
possible - mais aussi au département, collectivité de la République dont
l'existence est prévue par la Constitution pour l'ensemble du pays, à
l'exception des territoires d'outre-mer et de la Nouvelle-Calédonie.
Autrement dit, pour autant qu'il ait souhaité le faire, le Gouvernement
n'aurait pu proposer la création d'une telle collectivité faisant table rase
des institutions actuelles par une loi simple. Pour ce faire, il faudrait tout
simplement, le moment venu, une révision constitutionnelle.
Au-delà des contraintes juridiques, une telle approche aurait surtout posé un
double problème de méthode. Devait-elle concerner, en effet, l'un des quatre
départements d'outre-mer - ce qui, à l'avenir, est évidemment envisageable - ou
s'appliquer de façon uniforme à ces quatre départements, auquel cas nous
serions en désaccord ?
S'il doit y avoir une évolution institutionnelle pour les départements
d'outre-mer, alors le choix du Gouvernement est sans ambiguïté.
L'évolution statutaire devra se faire en fonction de réalités et d'aspirations
qui sont propres à chacun de ces départements, et non de façon uniforme.
Le choix d'une approche spécifique, « sur mesure », pour chaque département
d'outre-mer est aujourd'hui commun au Président de la République et au
Gouvernement. L'outre-mer est une école de la diversité !
Enfin - cela doit être également clarifié -, qui doit être à l'initiative de
cette évolution institutionnelle ?
Le Gouvernement en a évidemment toujours la possibilité juridique. Mais, sur
le plan politique, notre choix est tout autre. Nous entendons, en effet, que
l'évolution institutionnelle procède d'abord de l'initiative locale et ne soit
ni octroyée ni imposée d'en haut, depuis Paris.
Tel est donc l'objet de l'article 39 du projet de loi : donner aux élus locaux
des deux assemblées un droit à l'initiative en matière d'évolution statutaire
et, à ce titre, organiser ce droit.
Sommes-nous vraiment en désaccord sur ce point ? Et, si nous le sommes, quelle
est la portée véritable de cette opposition ?
Le Gouvernement considère légitime de poser trois conditions politiques à
l'évolution institutionnelle d'un département d'outre-mer qui y aspirerait...
dans le cadre de notre République, est-il utile de le souligner ?
La première condition est que l'évolution statutaire soit d'abord l'affaire
des élus du suffrage universel et ne soit en aucun cas imposée par des
avant-gardes ou des minorités agissantes, sans légitimité démocratique, qui
prétendraient imposer leur volonté et leur projet à la population et à ceux
qu'elle a investis pour la représenter.
Ensuite - deuxième condition -, chacun voit bien que ces élus devront
rechercher dans un débat démocratique et républicain les conditions d'un
rapprochement des points de vue. Inévitablement, ceux-ci seront, au moins au
départ, différents, parfois antagonistes, avant, je l'espère, de se retrouver
le plus largement possible sur une position commune qui sera le fruit d'un
compromis.
Enfin, mesdames, messieurs les sénateurs, s'agissant de l'outre-mer, je ne
crois pas envisageable que l'évolution statutaire, dès lors qu'elle serait
substantielle et qu'elle s'éloignerait du droit commun, puisse être mise en
oeuvre sans que chacun, Gouvernement et Parlement, mais aussi élus locaux, se
soit assuré qu'elle rencontre l'assentiment de la population.
Le Gouvernement a procédé ainsi pour la Nouvelle-Calédonie et pour Mayotte.
Dans les deux cas, certes, les bases juridiques de la consultation de la
population étaient différentes. En Nouvelle-Calédonie, la révision
constitutionnelle de juillet 1998 avait prévu cette consultation. A Mayotte,
celle-ci n'avait aucun caractère décisionnel et trouvait son fondement
juridique dans les préambules des Constitutions de 1946 et de 1958, dont le
rapprochement montre que, s'agissant des territoires, au sens physique et non
juridique du terme, de telles consultations sont possibles.
Là encore, le Président de la République et le Gouvernement partagent la même
appréciation, comme l'a confirmé l'intervention publique du chef de l'Etat, le
11 mars dernier, en Martinique, dans laquelle il a souhaité que « toute
modification statutaire substantielle soit explicitement approuvée par les
populations concernées ».
L'éloignement comme l'histoire des relations entre la métropole et l'outre-mer
sont autant de facteurs qui conduisent à être convaincu que, si de telles
consultations sont juridiquement possibles pour les collectivités d'outre-mer,
en l'espèce, pour les départements, elles sont surtout politiquement et
moralement nécessaires. Vouloir agir autrement serait prendre le risque de
troubler profondément les opinions publiques en suscitant craintes et hantises,
en contraignant ainsi les aspirations par la peur.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, ce que signifie profondément
l'article 39 du projet de loi d'orientation. Mais il m'est apparu nécessaire
que les intentions du Gouvernement, s'agissant de l'évolution institutionnelle
des trois départements français d'Amérique, où une telle aspiration semble
s'être fait jour, figurent explicitement dès l'article 1er de ce projet de
loi.
Sommes-nous en désaccord sur le constat, pourtant indéniable, que, parmi ces
quatre départements d'outre-mer, l'un d'entre eux, le plus important par la
population, a d'ores et déjà choisi la voie qu'il entendait suivre dans les
années à venir ? En effet, les Réunionnais souhaitent que leur île continue
d'être régie par le droit commun, sous bénéfice des adaptations prévues par
l'article 73 de la Constitution.
Je l'ai dit et je le répète, le Gouvernement respectera ce choix et il entend
même, suivant en cela la demande d'une majorité d'élus - qu'il s'agisse des
assemblées locales, des maires ou des parlementaires - approfondir cet
alignement sur le droit commun en proposant que la Réunion devienne, comme
toutes les régions de métropole, une région pluridépartementale, et ce par des
mesures dont certaines relèvent de la loi d'orientation et d'autres de
décisions du Gouvernement.
Toutes tendances confondues, les cinq députés de la Réunion ont déposé et fait
adopter par l'Assemblée nationale un amendement prévoyant qu'un second
département serait créé à la Réunion dès le 1er janvier 2001.
Le Gouvernement n'a pu qu'en tirer les conséquences en amendant son propre
texte par l'introduction d'un article 38
bis
. Il appartient désormais au
Sénat de prendre ses responsabilités et de répondre, favorablement je l'espère,
à cette demande.
Je reviendrai, si votre assemblée estime ne pas posséder sur ce point toutes
les informations nécessaires, sur les termes du débat qui a eu lieu,
localement, entre adversaires et partisans de la bidépartementalisation.
J'observe cependant que, ni sur le plan local, ni sur le plan national,
personne ne peut, là non plus, réduire le choix à une position partisane qui
recouvrirait les clivages politiques traditionnels.
Seul parlementaire de la Réunion sur huit à y être défavorable, le sénateur
Lauret sait bien que, dans son propre parti, des élus importants - je pense par
exemple à Alain Bénard, maire de Saint-Paul, seconde ville du département - se
sont prononcés pour la bidépartementalisation.
Dois-je rappeler par ailleurs que, là encore, le Président de la République
s'est à deux reprises publiquement prononcé pour la création d'un second
département ?
Si cette idée est largement partagée, c'est bien que la création d'un second
département ne se limite pas à une bidépartementalisation administrative. Il y
a aussi, dans ce choix, d'une part, la volonté d'une bidépartementalisation
sociale, garante de plus de proximité et de solidarité - et donc d'une
meilleure cohésion sociale - et, d'autre part, la recherche d'un meilleur
équilibre économique, que permettront des infrastructures mieux réparties et
une animation du développement local au plus près de ceux qui en sont les
acteurs.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai ouvert mon propos en affirmant ne pas
vouloir me résigner à ce que subsistent des désaccords alors qu'aujourd'hui
nous pouvons ensemble mieux éclairer les termes du projet de loi d'orientation
relatif à l'outre-mer. J'espère y avoir contribué et je veux rappeler ici que
ce texte a été voté, en nouvelle lecture, à l'Assemblée nationale, par des élus
de l'outre-mer qui siègent sur les bancs de l'opposition. Léon Bertrand, Gérard
Grignon, ou encore André Thien Ah Koon ont-ils abdiqué leurs convictions ? Non
! Ils ont perçu dans ce projet, qui a été préparé par Jean-Jack Queyranne et
que j'ai l'honneur de vous présenter cet après-midi, l'opportunité d'une grande
loi pour l'outre-mer français. En joignant leur vote à celui de leurs collègues
de la majorité, ils ont montré que pouvaient être dépassés les clivages
traditionnels.
Je crois en effet que l'outre-mer, c'est-à-dire les femmes et les hommes qui y
vivent, mais aussi ceux qui en sont originaires et qui vivent en métropole,
mérite cet effort collectif pour dépasser la ligne qui, habituellement, partage
le Parlement. Il vous appartient désormais, après l'Assemblée nationale, de le
leur dire. C'est à cela que le Gouvernement vous convie !
(Applaudissements
sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain
et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Monsieur le
président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, réunie au Sénat
le mardi 3 octobre 2000, la commission mixte paritaire chargée de proposer un
texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi d'orientation
pour l'outre-mer n'a pu parvenir à un accord. Elle a en effet très vite
constaté l'impossibilité d'aboutir à un texte commun s'agissant de deux
dispositions majeures du projet de loi, respectivement prévues par les articles
38 et 39 approuvés par l'Assemblée nationale mais supprimés par le Sénat en
première lecture. Il s'agit, d'une part, de la création d'un second département
à la Réunion et, d'autre part, de l'institution dans les autres départements
d'outre-mer d'un congrès réunissant le conseil général et le conseil régional
et ayant vocation à formuler des propositions d'évolution institutionnelle.
Saisie en nouvelle lecture à la suite de l'échec de la commission mixte
paritaire, l'Assemblée nationale est revenue sur nombre des modifications
apportées par le Sénat.
Mes chers collègues, je vous rappelle que le projet de loi d'orientation pour
l'outre-mer a été modifié par le Sénat au mois de juin dernier ; à l'issue de
la première lecture dans chaque assemblée, vingt-quatre articles ont été votés
dans les mêmes termes ; il restait cinquante-neuf articles en discussion, parmi
lesquels de nombreux articles additionnels.
Les modifications de fond apportées par le Sénat ont concerné, pour
l'essentiel, d'une part, les mesures économiques et sociales destinées à
favoriser l'emploi et, d'autre part, les aspects institutionnels.
Compte tenu de la situation économique et sociale actuelle des départements
d'outre-mer, caractérisée par le chômage massif qui frappe surtout la jeunesse
- 35,7 % de demandeurs d'emploi à la Réunion, 30,3 % en Martinique, 28,8 % en
Guadeloupe, 21,4 % en Guyane - et par la montée de l'exclusion, la commission
des lois a souligné, lors de l'examen du projet de loi d'orientation en
première lecture, la priorité absolue à donner aux mesures économiques et
sociales destinées à favoriser la création d'emplois.
Suivant les propositions de la commission des affaires sociales, saisie pour
avis, le Sénat a renforcé la portée des mesures prévues par le projet de loi
d'orientation en adoptant les amendements présentés par son rapporteur, M.
Jean-Louis Lorrain, afin de favoriser les créations d'emplois et d'améliorer
l'insertion en incitant au retour à l'activité.
Le Sénat a voulu améliorer la compétitivité des départements d'outre-mer par
rapport aux pays environnants à salaires très bas et charges sociales quasiment
inexistantes - car c'est bien le noeud de la question ! - et amplifier la
baisse du coût du travail par la réduction des charges sociales.
C'est ainsi que nous avons étendu le bénéfice des exonérations de cotisations
sociales patronales prévues par l'article 2 et ciblé l'effort sur les
entreprises exportatrices.
Notre assemblée a cherché également à favoriser la formation et l'insertion
professionnelle des jeunes et à faciliter l'octroi du congé emploi-solidarité
et de l'allocation de retour à l'activité.
En matière institutionnelle, je rappelle que notre assemblée, adoptant les
conclusions de la commission des lois, a supprimé l'article 38, qui prévoit la
création d'un second département à la Réunion, après avoir constaté l'avis
défavorable du conseil général, du conseil régional et l'hostilité de la
population, consultée par sondages et qui, il y a quelques jours encore, a
manifesté contre la création d'un second département, appuyée en cela par les
organisations socioprofessionnelles. Nous pourrions d'ailleurs prendre le pari,
monsieur le secrétaire d'Etat, que, si une consultation avait lieu - mais, vous
l'avez dit, cela pose un problème sur le plan institutionnel - cet article 38
serait repoussé.
Notre assemblée a estimé que la création d'un second département ne permettait
en rien de résoudre le problème de l'emploi, cette réforme ayant, en outre, un
coût important pour les finances publiques.
Notre assemblée a également supprimé l'article 39, créant dans les régions
d'outre-mer monodépartementales une nouvelle entité, le congrès, constitué par
la réunion du conseil général et du conseil régional, et ayant vocation à
délibérer de toute proposition relative à l'évolution institutionnelle en vue
de sa transmission au Gouvernement, qui pourrait ensuite consulter les
populations intéressées.
Nous avons en effet constaté que le projet de création du congrès était loin
de faire l'unanimité parmi les élus locaux, puisqu'il a suscité l'avis
défavorable de six des huit assemblées locales concernées, que la procédure
envisagée serait difficile à faire fonctionner et qu'elle risquait d'aboutir,
de fait, à la création d'une troisième assemblée locale dont le rôle serait
ambigu. Nous nous sommes d'ailleurs interrogés sur la constitutionnalité du
dispositif.
Cependant, monsieur le secrétaire d'Etat, nous sommes nombreux en commission
des lois, avec notre président Jacques Larché, à réfléchir à ce difficile
problème de la consultation des populations, problème auquel il faudra, je le
crois, que nous trouvions une solution tous ensemble.
En ce qui concerne les aspects institutionnels, traités aux titres V, VI et
VII, d'une manière générale, la commission des lois a jugé insuffisantes les
dispositions prévues par le projet de loi d'orientation, eu égard à la
situation constatée dans les départements d'outre-mer au cours de deux récentes
missions de délégations de la commission.
Il apparaît désormais nécessaire d'envisager des évolutions institutionnelles
différenciées - c'est moi qui, pour la première fois, ai utilisé l'expression «
cousu main », qui n'est pas loin de votre « sur mesure » - afin de mieux
prendre en compte les spécificités et l'identité culturelle des différents
départements, en leur permettant d'accéder à une autonomie accrue. Depuis le
début, la position du Sénat n'a jamais varié sur ce point.
En revanche, notre assemblée a approuvé les dispositions tendant à conférer
aux départements et régions d'outre-mer de nouvelles compétences en matière
d'action internationale dans leur environnement régional, afin de favoriser le
développement de la coopération régionale décentralisée, visée aux articles 22
et 23, qu'elle a enrichis de plusieurs amendements.
Le Sénat a également approuvé les dispositions allant dans le sens d'un
élargissement des compétences exercées au niveau local et d'un
approfondissement de la décentralisation, sous réserve d'un certain nombre
d'amendements tendant à en améliorer la rédaction.
En outre, sur l'initative de son rapporteur - on voudra bien m'excuser de le
dire - et dans le souci de veiller à une utilisation efficace des fonds
structurels européens, qui constituent un atout essentiel pour le développement
économique des départements d'outre-mer au cours des prochaines années - 23
milliards de francs pour la période 2000-2006 : c'est tout de même très
important ! - le Sénat a proposé - l'Assemblée nationale l'a accepté - de
consacrer dans la loi l'existence d'une commission de suivi de l'utilisation
des fonds structurels européens, instance de concertation qui serait coprésidée
par le préfet et par les présidents du conseil régional et du conseil général,
et qui réunirait l'ensemble des interlocuteurs concernés afin d'assurer un
suivi régulier de l'utilisation de ces fonds.
Pourquoi cette disposition ? Parce que le maire que je suis d'une commune qui
était éligible à l'objectif 5 b sait que l'on a parfois, pour diverses raisons
d'ailleurs, mais notamment en raison d'un manque de fonds de concours, des
difficultés à utiliser la totalité des fonds structurels européens. Peut-être
faudra-t-il modifier les règles internes régissant les crédits qui viennent
abonder les fonds européens, car il serait dommage que ces sommes s'en
retournent à Bruxelles.
Les autres dispositions du projet de loi d'orientation n'ont pas fait l'objet
de divergences majeures entre les deux assemblées. Nous y avons néanmoins
apporté un certain nombre d'améliorations, notamment sur l'initiative de nos
commissions des affaires économiques et des affaires culturelles et de leurs
rapporteurs, MM. Jean Huchon et Victor Reux, à qui je me plais à rendre
hommage, de même qu'à M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur pour avis de la
commission des affaires sociales.
Par ailleurs, notre assemblée a inséré dans le volet économique et social du
texte un certain nombre d'articles additionnels, parmi lesquels celui qui
prévoit la possibilité de transférer les forêts domaniales de l'Etat dans le
patrimoine des collectivités territoriales guyanaises dans un but de
développement économique, suivant la proposition de notre excellent collègue M.
Georges Othily, sénateur de Guyane.
Enfin, les dispositions relatives à Saint-Pierre-et-Miquelon ont été
approuvées par le Sénat, qui les a complétées par plusieurs amendements
concernant notamment le régime de protection sociale applicable dans cette
collectivité territoriale à statut particulier, sur la proposition de notre
collègue Victor Reux, sénateur de l'archipel.
Il est en outre à noter que l'article 12
bis
, qui prévoit la
suppression de la prime d'éloignement dont bénéficient les fonctionnaires des
départements d'outre-mer, a été adopté conforme par le Sénat et n'est donc plus
en discussion.
M. Jean-Jacques Hyest.
Tant mieux !
M. José Balarello,
rapporteur.
A cet égard, monsieur le secrétaire d'Etat, je tiens, en mon
nom personnel et au nom de la commission des lois du Sénat, à appeler
l'attention du Gouvernement sur la nécessité de prévoir des mesures
transitoires adaptées, car nous avons tous reçu - sans doute comme vous - de
nombreuses protestations de fonctionnaires de l'outre-mer. Il faudra donc, dans
le décret qui sera pris pour l'application de cet article, préciser que cette
mesure s'applique aux seuls fonctionnaires qui feront l'objet d'une affectation
dans les départements d'outre-mer après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi
et non à ceux qui y sont déjà affectés, pour lesquels le versement de la prime
d'éloignement est en cours, qui, bien souvent, ont fait des projets, ont
réalisé des emprunts, et pour lesquels l'application de la mesure
déstabiliserait les budgets.
J'en viens aux travaux réalisés par l'Assemblée nationale en nouvelle
lecture.
En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a adopté dix-sept articles dans la
rédaction issue des travaux du Sénat et a approuvé un certain nombre de
modifications d'ordre rédactionnel ou technique apportées par le Sénat.
S'agissant des dispositions ayant fait l'objet d'une divergence de fond,
l'Assemblée nationale est, pour l'essentiel, revenue à son texte de première
lecture, tant sur le volet économique et social que sur le volet
institutionnel, bien que M. Jérôme Lambert, rapporteur au nom de la commission
des lois, ait reconnu dans son rapport que les « avancées sénatoriales »
avaient été « nombreuses et constructives ». Vous venez d'ailleurs, monsieur le
secrétaire d'Etat, de le confirmer à cette tribune.
Cependant, l'Assemblée nationale, en matière économique, a supprimé les
modifications apportées par le Sénat qui tendaient à privilégier l'emploi, en
constatant que ces mesures, pour « intéressantes qu'elles soient », allaient
trop loin.
Tel est également l'avis du Gouvernement, nous venons de l'entendre. Nous le
déplorons, car les économies réalisées seront largement dépassées par les
dépenses induites par le chômage élevé qui sévira dans les départements
d'outre-mer dans les années qui viennent. Il nous faut y réfléchir, monsieur le
secrétaire d'Etat, car la situation risque de dégénérer, si nous n'y prenons
garde.
S'agissant des dispositions introduites par le Sénat pour favoriser
l'insertion professionnelle des jeunes, l'Assemblée nationale a approuvé
l'article 9
bis
A, qui étend le champ des activités ouvertes aux emplois
jeunes.
En ce qui concerne les amendements adoptés par le Sénat afin d'inciter au
retour à l'activité, si l'Assemblée nationale a approuvé les modifications
apportées à l'article 13 relatif à l'allocation de retour à l'activité, l'ARA,
elle a, en revanche, rétabli, à l'article 9
quater,
l'obligation faite
aux entreprises d'avoir réduit la durée du travail à 35 heures hebdomadaires
pour pouvoir bénéficier du dispositif de congé-solidarité.
Monsieur le secrétaire d'Etat, compte tenu de l'environnement des départements
d'outre-mer, que ce soit dans la Caraïbe ou dans l'océan Indien, est-il bien
sérieux d'imposer les trente-cinq heures aux entreprises, alors que, nous le
savons, les pays voisins ne sont soumis à aucune réglementation du travail ?
L'Assemblée nationale a supprimé deux articles additionnels insérés par le
Sénat : l'article 13
bis,
tendant à la mise en place de conventions de
retour à l'emploi, et l'article 11
bis,
qui avait pour objet de faire
compenser par l'Etat la charge supplémentaire des départements résultant de
l'alignement du RMI.
En ce qui concerne le volet institutionnel, après avoir souhaité marquer en
préambule, dès l'article 1er, la perspective d'une évolution institutionnelle
différenciée de chacun des départements d'outre-mer ainsi que la possibilité
offerte aux assemblées locales des départements français d'Amérique de proposer
des évolutions statutaires et à leurs populations d'être consultées sur ces
évolutions - nous proposerons d'ailleurs une rédaction différente par voie
d'amendement - l'Assemblée nationale a rétabli, sous réserve de certaines
modifications, les deux principales dispositions du projet de loi d'orientation
qui ont été supprimées par le Sénat et sont à l'origine, comme je l'ai indiqué,
de l'échec de la commision mixte paritaire.
S'agissant de la bidépartementalisation de la Réunion, non seulement
l'Assemblée nationale en a rétabli le principe posé à l'article 38, mais, au
lieu de renvoyer sa mise en oeuvre à une loi ultérieure, comme le prévoyait le
texte adopté en première lecture, elle a avancé au 1er janvier 2001 son entrée
en vigueur, sur l'initiative de M. Michel Tamaya et des autres députés
réunionnais, qui ont notamment fait valoir leur crainte qu'une loi ultérieure
ne puisse être adoptée dans des délais assez rapprochés pour permettre la mise
en place de la réforme d'ici au 1er janvier 2002, compte tenu des prochaines
échéances électorales.
En conséquence, l'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par le
Gouvernement afin de préciser les modalités de la création de ce second
département à la Réunion au 1er janvier prochain, devenu l'article 38
bis.
Je rappelle par ailleurs que le projet procédait également au découpage des
deux futurs départements.
Suivant la proposition de sa commission des lois, l'Assemblée nationale a
également rétabli l'article 39, prévoyant la création dans les régions
d'outre-mer monodépartementales d'un congrès réunissant le conseil général et
le conseil régional, et ayant vocation à délibérer de propositions d'évolution
institutionnelle. Il y a eu tout de même une avancée puisque l'Assemblée
nationale, en deuxième lecture, a adopté la nouvelle appellation de « congrès
des élus départementaux et régionaux ».
L'Assemblée nationale a pris en compte, sur ce dernier point, les observations
que j'avais formulées. Lors du débat en première lecture, j'avais en effet
souligné les risques de confusion avec le Congrès du Parlement se réunissant à
Versailles, voire avec le Congrès américain.
Si l'Assemblée nationale a approuvé un certain nombre d'amendements adoptés
par le Sénat sur les autres dispositions du projet de loi, sous réserve de
certaines précisions ou améliorations rédactionnelles, notamment dans le
domaine culturel ou dans celui du logement, elle est, en revanche, revenue à
son texte initial sur diverses dispositions.
L'Assemblée nationale a cependant approuvé la plupart des modifications
apportées par le Sénat au titre V, relatif à la coopération régionale, et je
m'en félicite.
Elle a, en outre, approuvé, sous réserve de modifications rédactionnelles,
l'article 37
ter,
inséré par le Sénat sur l'initiative de son rapporteur
afin de consacrer dans la loi, comme je l'ai indiqué voilà un instant,
l'existence d'une commission de suivi des fonds structurels européens.
Elle a, en revanche, rejeté l'article 9
quinquies A
relatif aux forêts
domaniales guyanaises. Mais je connais la ténacité de notre collègue Georges
Othily ; il n'en restera pas là.
L'Assemblée nationale a renvoyé le règlement de cette question à une future
loi sur la forêt guyanaise. Je suis certain que notre collègue Georges Othily
se fera un plaisir de déposer une proposition de loi, car il m'apparaît que ce
problème est important et qu'il nous faut le régler rapidement.
Quelles sont, aujourd'hui, les propositions de la commission des lois du Sénat
en nouvelle lecture ?
La commission des lois se félicite, tout d'abord, que l'Assemblée nationale
ait adopté dix-sept articles dans les mêmes termes que le Sénat et ait, en
outre, approuvé un certain nombre d'autres modifications diverses ou de
compléments que nous avons apportés aux différents volets du projet de loi
d'orientation. Sur les cinquante et un articles encore en navette, elle vous
propose donc d'adopter vingt-sept articles sans modification.
En revanche, la commission constate que, s'agissant des principales
dispositions du texte, qui ont soulevé de réelles divergences de fond entre les
deux assemblées en première lecture, l'Assemblée nationale a campé sur ses
positions sans prendre en compte les arguments développés par notre
assemblée.
Considérant que ces arguments sont néanmoins toujours fondés, la commission
propose donc au Sénat d'en revenir, sur ces principaux points, au texte adopté
par lui en première lecture en ce qui concerne tant le volet économique et
social que le volet institutionnel.
Cependant, la commission considère que, compte tenu de la gravité de la
situation économique actuelle des départements d'outre-mer, priorité absolue
doit être donnée aux actions susceptibles de réduire le chômage massif qui
frappe aujourd'hui la jeunesse de ces départements, sauf à risquer une
explosion sociale d'ici à quelques années. Je pense que vous en êtes conscient,
monsieur le secrétaire d'Etat, ainsi que le Gouvernement.
La commission des lois estime donc indispensable de renforcer la portée des
mesures prévues par le projet en faveur de l'emploi et de l'insertion. Aussi
vous proposera-t-elle de rétablir les amendements adoptés en ce sens par le
Sénat en première lecture, sur l'initiative de sa commission des affaires
sociales. Je ne reprendrai pas ces mesures, car vous les connaissez ; elles
avaient principalement pour objet d'étendre le bénéfice des exonérations
sociales aux entreprises de moins de vingt salariés au lieu de dix. Vous nous
avez dit que cela coûterait fort cher. Je pense néanmoins que c'est
indispensable - je vous l'ai dit - dans le contexte des Caraïbes, de l'océan
Indien et des pays limitrophes.
La commission proposera également de supprimer à nouveau la possibilité d'un
abandon des créances sociales et fiscales, quitte à établir des moratoires car
cette mesure serait une prime donnée aux entreprises qui se sont abstenues de
régler leurs charges sociales et fiscales.
M. Jean-Jacques Hyest.
Une prime à l'incivisme !
M. José Balarello,
rapporteur.
De même qu'en première lecture, la commission des lois
regrette l'insuffisance du volet institutionnel du projet de loi eu égard à la
diversité des situations locales. Ce constat la conduit à accepter d'inscrire,
à l'article 1er, ce qu'a fait l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, la
possibilité pour la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et la Réunion, dans le
cadre de la République d'évoluer à l'avenir vers de organisations
institutionnelles qui leur soient propres.
S'agissant plus particulièrement de la Réunion, elle tient néanmoins à faire
observer que cette rédaction reste compatible avec le souhait de l'ensemble des
élus réunionnais de conserver le statut de département d'outre-mer, sans
toutefois exclure définitivement toute perspective d'évolution de
l'organisation institutionnelle de la Réunion.
La commission proposera toutefois - peut-être est-ce un voeu pieux, monsieur
le secrétaire d'Etat ? - de supprimer la référence au terme de « pacte » qui
n'est pas l'oeuvre du rapporteur de l'Assemblée nationale, notre collègue
Jérôme Lambert. Les auteurs du texte adopté par l'Assemblée nationale devraient
en effet se pencher sur l'histoire de France durant la fin du XVIIIe et le
début du XIXe où existait le « pacte colonial ».
(M. Georges Othily s'exlame.)
Cependant, la commission persiste à considérer que les deux principales
dispositions institutionnelles du projet de loi, prévues par les articles 38,
38
bis
et 39, sont inadaptées et inopportunes ; elle vous proposera donc
à nouveau de les supprimer compte tenu des précisions apportées voilà quelques
instants.
Par ailleurs, la commission vous proposera également de revenir au texte
adopté par le Sénat en première lecture sur un certain nombre de dispositions,
telles que la possibilité de transférer, dans certaines conditions, les forêts
domaniales de l'Etat dans le patrimoine des collectivités territoriales
guyanaises.
En conclusion, comme elle l'avait fait en première lecture, la commission des
lois tient à aborder les perspectives d'avenir, le présent texte ne constituant
à ses yeux qu'une simple loi d'étape dans la mesure où elle s'apparente
davantage à un texte portant diverses dispositions relatives à l'outre-mer qu'à
la grande réforme institutionnelle qu'il nous faudra tôt ou tard réaliser aux
Antilles et en Guyane. Vous avez d'ailleurs rappelé, monsieur le secrétaire
d'Etat, la position du président de la commission des lois, M. Jacques Larché,
qui est conforme à celle de la commission des lois du Sénat et de son
rapporteur.
A cet égard, tout en soulignant la nécessité de préserver les acquis de la
départementalisation et le bénéfice de l'intégration au sein de l'Union
européenne et des fonds correspondants, la commission des lois rappelle que les
obstacles juridiques constitués par l'article 73 de la Constitution et
l'article 299-2 du traité d'Amsterdam ne doivent pas s'opposer définitivement à
toute évolution du statut de département d'outre-mer vers une autonomie accrue
et, le cas échéant, différenciée, à laquelle aspirent les populations
concernées.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, au
bénéfice de l'ensemble de ces observations et sous réserve des amendements
qu'elle vous soumettra, la commission des lois vous propose d'adopter le
présent projet de loi d'orientation pour l'outre-mer.
(Applaudissements sur
les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, de l'Union centriste et
sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République : 13 minutes ;
Groupe socialiste : 11 minutes ;
Groupe de l'Union centriste : 9 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen : 7 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen : 6 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Lauret.
M. Edmond Lauret.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
trois années ont été nécessaires pour préparer ce projet de loi, censé
développer les activités économiques, l'aménagement du territoire et l'emploi
dans les DOM.
Hélas, il faut reconnaître, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'après les coupes
claires pratiquées en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale dans les
propositions du Sénat, ce texte entraînera une forte déception outre-mer.
Sur le plan économique, il ne reste de notre texte que la restauration et
l'amélioration de la loi Perben de 1994. L'exonération des charges patronales
de sécurité sociale pour les petites entreprises répond, certes, à nos
préoccupations et à nos demandes répétées, mais sa limitation aux seules
entreprises de moins de dix salariés entraînera, de l'avis de tous les experts,
un effet de seuil et une distorsion de concurrence.
Les dispositions relatives à l'emploi des jeunes - le projet
initiatives-jeunes - sont timides et n'auront pas d'effets sensibles, compte
tenu de l'importance du chômage des jeunes en outre-mer, à la Réunion en
particulier.
La solution est ailleurs, car le tissu économique des DOM ne permet pas -
encore moins qu'en métropole - la pérennisation des emplois jeunes, des
contrats emploi consolidés, les CEC, les contrats emploi-solidarité, les CES,
et autres emplois de l'économie alternative que vous privilégiez au détriment
des emplois du secteur productif.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, votre texte ne prévoit rien en
faveur du plan export, rien pour le logement, rien pour les 12 000 employés
communaux non titulaires.
Sur le plan social, là encore, vous avez raté le rendez-vous avec les
habitants des DOM, les Réunionnais en particulier.
Tous les partis politiques, toutes les collectivités locales, tous les
syndicats, toutes les associations de chômeurs réclament l'alignement immédiat
du RMI et de l'allocation de parent isolé, du complément familial et de
l'allocation des mères de familles de plus de cinq enfants.
Les 20 % retenus pour alimenter la créance de proratisation ne bénéficient pas
aux RMIstes car, paradoxalement, leurs faibles revenus leur interdisent l'accès
aux logements sociaux. C'est un comble !
Or le Gouvernement oppose un veto à l'alignement du RMI dans un délai
raisonnable.
En réalité, monsieur le secrétaire d'Etat, les « mesurettes » que comporte ce
projet de loi n'ont qu'un seul but : faire avaler par la population la
couleuvre qui s'appelle la bidépartementalisation, et ce à des fins purement
électoralistes, pour sanctionner les électrices et les électeurs de mon
département qui, en 1998, ont fait le choix de confier à la droite le contrôle
politique du conseil général.
Dois-je vous rappeler, monsieur le secrétaire d'Etat, que la population de la
Réunion, les élus locaux, se sont déclarés hostiles à ce découpage inutile,
dangereux, et très coûteux ?
Dois-je vous rappeler l'hostilité du conseil général et du conseil régional
qui, tous les deux, à deux reprises, se sont prononcés, et contre le projet
gouvernemental, et contre le principe même de la bidépartementalisation ?
Dois-je vous rappeler l'hostilité des syndicats, du patronat, des chômeurs, de
la chambre de commerce et d'industrie, de l'église, bref, de l'ensemble des
forces vives ?
Dois-je vous rappeler les résultats de trois sondages successifs, IPSOS et
Louis Harris, qui tous les trois ont montré l'hostilité grandissante de la
population à ce coup de force ?
Je précise que le dernier de ces sondages, paru le mois dernier, fait
apparaître que 63 % de nos concitoyens de la Réunion refusent ce « charcutage »
; qu'à Saint-Denis, ville dont le député Tamaya, auteur du rapport contesté,
est le maire, seuls 13 % de la population sont favorables à leur premier
magistrat. Cela explique votre précipitation, votre affolement, à mettre en
oeuvre le découpage deux mois avant les élections municipales et cantonales de
mars, par une pitoyable manoeuvre digne d'une république bananière, et en
violation des règles démocratiques élémentaires.
Dois-je vous rappeler la lettre du 17 février dernier de M. le Premier
ministre qui fixait deux objectifs à ce projet : l'emploi et la prise en compte
de la volonté du peuple et des élus locaux ?
Or, ce nouvel article 38, issu d'un amendement d'origine parlementaire
qualifié chez nous d'« amendement de la honte », d'ailleurs, à mon sens, non
conforme à l'article 40 de la Constitution, ne créera pas d'emplois - M.
Queyranne l'a reconnu publiquement à la télévision - et ne tient compte ni de
la volonté populaire ni de celles des élus locaux !
Monsieur le secrétaire d'Etat, les Réunionnaises et les Réunionnais m'ont
demandé de vous dire deux choses.
D'abord, nous n'accepterons pas la politique du « fait accompli ». C'est à la
population de dire si elle veut ou non de ce projet : c'est une question de
morale et de démocratie sur laquelle nous ne transigerons pas !
Ensuite, ce genre de procédé, courant dans les pays totalitaires de l'ex-bloc
soviétique, ne peut pas être appliqué en France, pays des droits de l'homme. A
moins que certains, ici à Paris, ne nous considèrent comme des sous-Français,
tout juste bons à tendre la main en disant : « merci Bwana ! »
Eh bien non, monsieur le secrétaire d'Etat, Non, mes chers collègues, nous ne
sommes pas les bâtards de la République française ! Vous ne pouvez pas accepter
qu'une décision aussi importante pour l'unité et l'avenir de notre département
soit imposée « à la hussarde » contre l'avis largement majoritaire de notre
population.
Auriez-vous, mes chers collègues, accepté une telle humiliation de vos
populations dans vos propres départements ? A l'évidence, non !
Alors, mes chers collègues, je vous demanderai de ne pas vous rendre complices
de ce viol de la conscience populaire et de ne pas participer à la casse de
l'unité de notre petit département.
Vous ne devez pas, vous ne pouvez pas couper en deux l'île de Lacaussade, de
Leconte de Lisle, de Roland Garros et de Michel Debré : « Créole un jour,
créole toujours », disait-il.
J'ajoute encore que M. Raymond Barre, notre ancien Premier ministre, a
qualifié hier le projet de découpage de son île d'absurde et dangereux, et a
réclamé la consultation pour avis de la population.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je voudrais, avant de terminer, vous poser
publiquement deux questions, qui d'ailleurs sont liées.
Pouvez-vous nous communiquer le coût exact de cette bidépartementalisation ?
Des chiffres énormes ont été cités, variant de 300 millions de francs à plus de
400 millions de francs par an.
Où sont inscrits ces crédits ? Je ne les ai pas repérés dans le projet de loi
de finances pour 2001.
Pour conclure, monsieur le secrétaire d'Etat, et même si je suis
fondamentalement hostile à l'écriture en créole à l'école que vous voulez nous
imposer contre notre volonté, je m'adresserai à vous en créole :
«
Zot y veut coup' a nous,
Sans consult' a nous ?
Eh ben, si zot y coup' a nous,
En mars, zot va gout a nous ! » (Applaudissements sur les travées du RPR,
des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur
certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
nous sommes amenés à examiner le projet de loi d'orientation relatif à
l'outre-mer en nouvelle lecture. Notre excellent rapporteur, José Balarello, a
dit combien le Sénat avait travaillé sur le volet économique et social et
apporté certaines précisions.
A cet égard, je me contenterai donc, monsieur le secrétaire d'Etat, de dire
que je suis personnellement choqué que l'on supprime les dettes fiscales et
sociales. On ne doit y toucher qu'avec une extrême précaution !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
On ne les supprime pas !
M. Jean-Jacques Hyest.
Vous nous le préciserez ! Mais cela nous est quand même apparu comme une
suppression des dettes. Réjouissons-nous s'il s'agit simplement d'examiner
chaque situation en particulier avant de prendre les mesures nécessaires, étant
toutefois précisé que cette possibilité existe déjà, ne serait-ce que dans le
cadre des procédures collectives.
Je crois dès lors que nous pourrons aboutir à un accord sur ce point, car il
est vrai qu'un certain nombre d'entreprises connaissent, dans ces départements,
des difficultés et qu'il faut trouver des solutions, mais je ne suis pas sûr
qu'il soit nécessaire de légiférer à ce sujet : les dispositifs existants
peuvent suffire.
Je n'en dirai pas plus sur le volet économique et social.
L'ensemble de la réprésentation nationale considère, semble-t-il, aujourd'hui,
après le Président de la République et le Gouvernement, qu'une évolution des
départements d'outre-mer est souhaitable. En fait, l'environnement à la fois
géographique et culturel doit permettre à ces départements d'évoluer, à
condition que les propositions recueillent l'accord de tous, du moins d'une
large majorité, car il serait dangereux d'imposer des réformes qui ne sont pas
acceptées par l'ensemble des populations et des élus.
D'ailleurs, je me fais une réflexion, monsieur le secrétaire d'Etat.
Récemment, nous avons été conduits à examiner la situation de Mayotte. Alors
que les parlementaires étaient contre et les élus locaux pour, on a consulté la
population, ce qui a donné le résultat que nous avons connu.
Inversement, nous avons entendu parler - comparaison n'est pas raison, mais on
ne peut pas ne pas s'interroger - de certains accords dits « de Matignon », à
partir desquels, après consultation des élus régionaux, sera élaboré un projet
de loi visant à supprimer des départements dans une île.
Cela montre que l'expérience après un certain nombre d'années n'est pas
complètement pertinente et qu'il convient de trouver un autre système plus
opportun pour l'unité de la Corse.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vais maintenant vous parler de la
bidépartementalisation de la Réunion, mais sans doute pas avec la même fougue
que notre collègue M. Lauret, qui est élu de ce département et qui vit donc mal
ce coup de force institutionnel.
Il s'agit bien d'un coup de force institutionnel puisque, selon le texte
initial du projet de loi, la bidépartementalisation, c'était pour après 2002.
Cette solution ne me paraissait pas pertinente, mais ce délai permettait au
moins de se préparer. L'Assemblée nationale, en nouvelle lecture, sans l'avis
de sa commission des lois sur un article qui comportait trente-quatre
amendements a voté sans discussion et sans examen. Ce n'est pas une bonne
méthode pour légiférer dans le domaine institutionnel.
Certains points démontrent par ailleurs que la bidépartementalisation pose
des problèmes.
L'élection des députés, on n'en parle pas ! On la reporte à une loi
ultérieure.
En revanche, bizarrement, sur les trois sénateurs, il y en aura un pour le
Nord et deux pour le Sud, alors que la population du Nord sera de 340 000
habitants et celle du Sud de 370 000. Une telle disparité ne me paraît pas
convenable, elle pose un problème constitutionnel.
Il s'agit là de quelques exemples d'une précipitation qui traduit une mauvaise
approche de l'évolution institutionnelle de la Réunion. Mais il en est d'autres
qui témoignent que, en fait, l'île de la Réunion forme un tout.
Ainsi, en matière de sécurité civile, on crée un service interdépartemental de
secours et d'incendie alors qu'on devrait créer un service par département ! Si
un département se suffit à lui-même, comme c'est le cas sur le reste du
territoire, je ne vois pas pourquoi on créerait un service
interdépartemental.
Les choses sont tellement liées que, même pour l'eau, qui représente une
question fondamentale pour la vie - nous connaissons bien les problèmes qui se
posent à la Réunion en matière d'eau potable - on prévoit également de créer un
service interdépartemental.
Honnêtement, si le fait de créer deux départements me paraissait cohérent, je
serais d'accord, mais tel n'est pas le cas. Je pense que cela ne contribuera en
rien au développement économique et social qu'attendent les Réunionnais, mais
que cela créera des déséquilibres, sans rien changer en matière de déplacements
ni de rééquilibrage économique. Créer une nouvelle structure risque de
compliquer davantage encore les choses.
M. Lauret a noté en outre qu'il n'existait pas d'étude d'impact, puisqu'il
s'agit d'un amendement qui a été déposé en cours de discussion. Cela est un peu
dommage, d'autant qu'il faudra bien nous dire combien coûtera la
bidépartementalisation, car elle a certainement un coût.
On lit par ailleurs dans le projet de loi que le département qui ne
bénéficiera pas des services des fonctionnaires territoriaux pourra recruter
des contractuels, alors que, dans quelque temps, nous examinerons un texte
relatif à la précarité dans la fonction publique et tendant à résorber le
nombre des contractuels.
Tout cela témoigne d'une improvisation totale. Bien entendu, il est toujours
facile de nommer un préfet - on trouve toujours des préfets disponibles, on le
sait bien, dans la République - mais je crois que ce n'est pas suffisant.
Je regrette vraiment que la réflexion d'ensemble n'ait pas été menée sur une
évolution institutionnelle qui est souhaitée. Mais je dois constater que, de ce
point de vue, le projet de loi débouche sur peu de choses. Je pense donc que
nous aurons à réfléchir à nouveau ensemble pour que les départements
d'outre-mer, avec la consultation des populations, puisqu'elle est prévue par
ailleurs, puissent proposer des structures qui leur conviennent, qui soient
adaptées à leur situation, et, surtout, qui contribuent à leur développement,
ce que ne permet pas le texte soumis à notre examen.
Pour toutes ces raisons, mon groupe soutiendra, bien sûr, les propositions de
la commission des lois qui visent à supprimer notamment tous les articles
concernant l'avenir institutionnel de l'outre-mer, en regrettant que la chance
de bâtir un projet plus ambitieux n'ait pas été saisie.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Payet.
M. Lylian Payet.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
nous examinons aujourd'hui, en nouvelle lecture, le projet de loi d'orientation
pour l'outre-mer, tel que nous l'avions étudié, ou presque, en première lecture
puisque, après l'échec de la commission mixte paritaire, l'Assemblée nationale
a rétabli pour l'essentiel le texte qu'elle avait voté au mois de mai
dernier.
Sans vouloir reprendre les termes du discours que j'avais prononcé à cette
même tribune le 13 juin - de toute façon, le temps qui m'est imparti ne me le
permettrait pas - je souhaiterais néanmoins insister sur quelques points qui me
paraissent fontamentaux et que j'avais développés à l'époque.
En premier lieu, je tiens à redire que le rattrapage sur trois ou sept ans de
certaines prestations sociales sur le niveau métroplitain me paraît toujours
aussi inacceptable au regard du principe de l'égalité entre les citoyens, car
l'application de ce principe ne souffre pas de délai.
J'ai dit et je redis que plus rien, juridiquement, ne justifie la différence
dans le montant versé aux allocataires selon qu'ils résident en métropole ou
dans un département d'outre-mer.
J'ai dit et je redis qu'à la Réunion cette revendication dont je me fais
l'écho fait l'objet d'un consensus, ce qui est suffisamment rare pour être
souligné.
Je sais bien que la procédure ne me permet pas de redéposer des amendements
proposant un alignement immédiat du revenu minimum d'insertion et de
l'allocation de parent isolé, mais l'intention demeure.
Je sais bien aussi, monsieur le secrétaire d'Etat, car vous l'avez dit tant à
l'Assemblée que devant la commission des affaires sociales, que, s'agissant du
RMI, le délai de trois ans est un maximum et que, d'ici à la fin de l'année, le
calendrier exact de l'alignement serait défini. J'estime que nous sommes
presque à la fin de l'année : pouvez-vous aujourd'hui nous donner de plus
amples précisions sur ce point ?
Outre cet aspect social, qui demeure à mes yeux primordial, je regrette que,
sur l'aspect économique, l'Assemblée nationale n'ait pas retenu les
améliorations qu'avait apportées le Sénat afin de renforcer les dispositifs
d'aide à l'emploi et à l'insertion. Notre commission des lois proposera de les
rétablir. C'est très bien ainsi car n'oublions pas, mes chers collègues, que le
problème majeur qui se pose dans nos départements c'est le chômage. C'est sur
cette question que nous devons mobiliser nos énergies et travailler ensemble
pour éviter l'explosion sociale.
Or, force est de constater que l'on retiendra surtout de l'examen de ce projet
de loi les passions qu'il a soulevées autour de deux questions seulement :
êtes-vous pour ou contre la bidépartementalisation de la Réunion ? Etes-vous
pour ou contre le congrès aux Antilles ?
J'en viens donc maintenant au sujet qui divise, je dirai même qui fâche : le
volet institutionnel. C'est le principal sujet de désaccord entre l'Assemblée
nationale et le Sénat, celui qui a provoqué l'échec de la commission mixte
paritaire.
L'Assemblée nationale a non seulement rétabli la création d'un second
département à la Réunion, qui avait été supprimée par le Sénat, mais elle l'a
avancée au 1er janvier 2001 et, sur l'initiative du Gouvernement, elle a défini
les modalités de sa mise en oeuvre. Nous avons les uns et les autres exprimé
nos positions lors du débat en première lecture. Est-il vraiment utile de
reprendre la discussion aujourd'hui ?...
La commission des lois du Sénat proposera de supprimer les articles 38 et 39.
Ceux qui avaient voté cette suppression au mois de juin referont bien entendu
de même aujourd'hui. Nul doute que l'Assemblée nationale, en dernier lieu,
rétablira ces dispositions.
Je dirai simplement à ce sujet que je regrette sincèrement que cette question
ait été le centre d'un combat politique, pour ne pas dire politicien, surtout à
la Réunion, qui a occulté les autres dispositions du projet de loi en
diabolisant la bidépartementalisation et en jetant l'anathème sur ceux qui la
défendent. Il suffit pour s'en convaincre d'avoir écouté certains discours.
Depuis, les passions se sont apaisées à la Réunion. Pour beaucoup de
Réunionnais, malgré ce que l'on dit ici ou là, la messe est dite. Même la
presse, par ses articles de fond, explique ce qui va se passer dans les deux
départements.
Quant à moi, je consacrerai mon énergie au développement des deux départements
créés dans un objectif de développement général de la Réunion et pour le plus
grand bien des Réunionnais, et ce sans avoir à respecter les consignes de
parti, car mon parti, c'est la Réunion.
Monsieur le secrétaire d'Etat, dès que la loi sera promulguée, nous comptons
sur votre diligence pour faire paraître au plus tôt les nombreux décrets
d'application nécessaires afin de répondre aux attentes des populations
d'outre-mer. Globalement, cette loi d'orientation est une chance pour la
Réunion.
(Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les
travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Vergès.
M. Paul Vergès.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
l'Assemblée constituante, en adoptant à l'unanimité, le 19 mars 1946, la loi de
départementalisation, ouvrait, pour les quatre vieilles colonies, comme on les
appelait, l'ère de l'égalité. Cinquante-cinq ans plus tard, la loi
d'orientation pour l'outre-mer annonce l'ouverture d'une ère nouvelle à la
Réunion.
Après la réalisation prochaine et définitive de l'égalité sociale, cette ère
nouvelle sera placée sous le double signe du développement durable et de la
responsabilité reconnue aux Réunionnais.
A l'évidence, le projet de loi d'orientation marque une étape importante dans
la marche des Réunionnais vers l'égalité et vers le développement,
indissociables l'une de l'autre.
Il s'agit d'une étape finale vers l'égalité, commencée en 1946 et aujourd'hui
quasiment achevée avec l'engagement répété du Gouvernement de procéder à
l'alignement du RMI dans les meilleurs délais.
Il s'agit d'une étape décisive dans la marche vers le développement, ouverte
dès 1992 par les Réunionnais, avec l'élaboration d'un Plan de développememnt
actif. L'élaboration d'un projet de développement solidaire, global et cohérent
constitue en effet à la Réunion une priorité stratégique depuis plus d'une
décennie.
L'entrée en vigueur de la loi au 1er janvier 2001 concrétise aujourd'hui ces
efforts.
Par l'effort budgétaire sans précédent qu'il représente, par l'ampleur des
mesures de soutien au secteur productif, par le caractère volontaire et
novateur des dispositifs tendant à la création massive d'emplois dans le
secteur traditionnel comme dans l'économie solidaire, par la valorisation de
nos nombreux atouts, notamment en matière de coopération internationale, par
son caractère global et cohérent, ce projet de loi d'orientation fait renaître
l'espoir d'un renversement des tendances.
En raison de la simultanéité dans l'application de la loi d'orientation, du
dispositif de soutien fiscal à l'investissement, que l'on appelle la
défiscalisation, du contrat de plan Etat-région pour 2000-2006, du plan de
développement régional avec l'Union européenne, les conditions semblent
aujourd'hui objectivement réunies pour qu'un « bond en avant » soit opéré.
Mais passer de la mythologie du développement à sa réelle concrétisation
suppose de part et d'autre des efforts continus et soutenus.
Cela signifie que, si le vote par le Parlement de la loi marque
l'aboutissement d'un processus d'élaboration législatif, ce vote représente
surtout un point de départ dans l'action afin d'inscrire dans le quotidien des
Réunionnais les changements attendus. La tâche est immense ; elle est devant
nous. A la Réunion, le 1er janvier 2001 doit sonner l'An I du développement
durable !
Les Réunionnais, comme en témoigne leur implication dans l'élaboration de ce
projet de loi, seront au rendez-vous. Les acteurs du développement, les
collectivités locales, les entrepreneurs, les artisans, les pêcheurs, les
agriculteurs, les jeunes et le monde associatif ont accompagné pas à pas, au
cours de ces deux années, la préparation de cette loi ; ils sauront tirer le
meilleur des mesures qui sont proposées. Les dizaines de milliers de chômeurs
aussi - et en premier lieu les jeunes - qui attendent les créations
d'emplois.
C'est une responsabilité immense pour tous - élus comme acteurs économiques -
car une telle conjonction d'éléments favorables est rare dans l'histoire d'un
pays.
Nous serons, pour notre part, attentifs à la prise rapide des décrets
d'application et à l'accompagnement qu'apporteront les services déconcentrés de
l'Etat à la mise en oeuvre dans les meilleures conditions des mesures inscrites
dans la loi.
Ces efforts ne doivent pas occulter l'ampleur des réformes qui restent encore
sans réponse ; dans le cadre de l'élaboration de la loi Sapin, des solutions
doivent être proposées au problème très sérieux de la fonction publique
territoriale outre-mer.
Nous en avons longuement débattu au cours de la première lecture et chacun
s'accorde sur le fait que l'avenir de notre administration communale en
dépend.
Avant de conclure, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, je dirai un mot sur le volet institutionnel, qui a largement
été discuté en première lecture devant notre assemblée.
L'Assemblée nationale a rétabli, pour les départements français d'Amérique,
l'article 39, et, pour la Réunion, l'article 38, qui instaure un second
département au 1er janvier 2001.
La commission des lois de notre assemblée a confirmé sa proposition de
suppression de ces deux articles.
Je veux, sans insister, souligner que la présente loi forme un tout global et
cohérent. Le projet de développement qui se dessine fait du volet économique de
la loi un élément indissociable des autres volets : social, culturel et
politique.
A la Réunion, il est important que les mesures d'ordre économique et social
puissent se déployer dans un cadre favorisant un aménagement plus équilibré du
territoire, que permettra, précisément, la création d'un second département.
Je tiens aussi à dire avec mon collègue Robert Bret, qui interviendra sur cet
aspect dans le débat, qu'à l'heure où des réflexions légitimes sont engagées
pour donner un nouveau souffle à la décentralisation le
statu quo
que la
commission des lois propose en fait à l'outre-mer laisse perplexe.
Le sens historique commande de répondre à cette aspiration à un pas en avant
en faveur d'un développement durable dans la responsabilité reconnue.
Au-delà des réponses immédiates à la situation d'urgence que connaissent nos
régions d'outre-mer, nous ne devons pas perdre de vue des problématiques
essentielles - comme la croissance démographique ou les conséquences de l'effet
de serre sur le climat - qui, bien que moins apparentes pour certaines,
accumulent chaque jour les éléments qui bouleverseront la réalité de demain.
La réelle prise en compte de ces données et leur anticipation sont la
condition pour que les efforts importants réalisés aujourd'hui ne soient pas
annihilés demain. Mais notre séance signifie que nous nous acheminerons dans
quelques semaines vers ce que nous appellerons, encore une fois, l'An I du
développement durable et solidaire de la Réunion.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste
républicain et citoyen, sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines
travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Lise.
M. Claude Lise.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
ne sais pas si tous, ici, nous mesurons bien l'impatience des futurs
bénéficiaires de la loi d'orientation pour l'outre-mer.
Je ne sais pas si nous avons suffisamment conscience de l'état d'esprit dans
lequel peut se trouver, par exemple, celui qui attend de savoir s'il va ou non
se lancer dans une opération de développement de sa PME ou de son hôtel, de son
restaurant, de son commerce ou encore de son exploitation agricole, ou de
l'état d'esprit de celui qui, plus simplement, veut savoir s'il va enfin
pouvoir procéder au minimum d'embauche lui permettant de travailler désormais
dans les conditions minimales d'efficacité et de rentabilité. Il s'agit d'une
interrogation angoissante émanant notamment, nous le savons, d'une majorité
d'artisans ou de petits patrons pêcheurs.
Je ne sais pas si nous avons suffisamment conscience de l'état d'esprit de
celle ou de celui dont l'activité ne peut plus se poursuivre sans la mise en
oeuvre rapide de véritables plans de sauvetage contre les effets d'un trop
lourd endettement social et fiscal. Et de l'état d'esprit du jeune demandeur
d'emploi, du chômeur de longue durée ou du RMIste suspendu à l'espoir de
pouvoir créer, grâce à une aide appropriée, sa propre entreprise.
Tous ont vraiment hâte de voir mises en oeuvre les nombreuses dispositions du
projet de loi d'orientation sur lesquelles je suis longuement intervenu en
première lecture et dont ils savent pouvoir attendre beaucoup quoi qu'en
disent, avec une parfaite mauvaise foi, ceux qui parlent à ce propos de «
mesurettes ». Je pense aux allégements de charges, au projet initiative jeune,
à l'allocation de retour à l'activité, aux primes à la création d'emplois, aux
plans d'apurement des dettes sociales et fiscales, etc.
Ils ne mettent nullement en cause la méthode d'élaboration de ce projet de
loi, qui, pour une fois, a permis d'accorder le temps qu'il fallait à la
consultation des acteurs politiques, économiques, sociaux et culturels des
DOM.
Pourtant, ils ne comprennent pas que, au terme d'une première lecture qui a
permis non seulement à l'Assemblée nationale et au Sénat d'améliorer et
d'enrichir incontestablement le texte mais aussi de clarifier les questions qui
pouvaient faire débat, députés et sénateurs ne soient pas parvenus à un accord
permettant une mise en application, la plus rapide possible, du projet de
loi.
Ils ont surtout le sentiment qu'en la matière ce sont des intérêts partisans
qui ont prévalu et que, au bout des stratégies qu'ils devinent, il ne reste pas
grand-chose de leurs préoccupations quotidiennes.
Comment comprendre, en effet, la position de blocage obstiné affichée par la
majorité de la Haute Assemblée à l'encontre de l'article 38 et de l'article 39
?
Mon collègue Paul Vergès a rapidement dit ce qu'il fallait au sujet de
l'article 38.
S'agissant de l'article 39, qui intéresse plus particulièrement les
départements français d'Amérique, vous me permettrez de faire fi des
faux-semblants et de dire clairement où se situe réellement le débat.
Il suffit d'examiner les choses avec un tant soit peu d'objectivité pour se
rendre à l'évidence !
La suppression de l'article 39 est réclamée non pas parce que les dispositions
que comporte cet article apparaissent contestables en elles-mêmes, mais tout
simplement parce que celles-ci ne conviennent pas à la démarche politique
empruntée depuis quelque temps par trois personnalités politiques qui président
les trois conseils régionaux des DFA, et dont l'une se trouve être membre de la
majorité sénatoriale.
Cela est si vrai que j'en connais plus d'un ici qui ont d'abord accueilli
favorablement la méthode d'évolution institutionnelle et statutaire
différenciée, démocratique et transparente que j'ai proposé de retenir pour les
DOM et que l'on retrouve, pour l'essentiel, à l'article 39, puis qui ont changé
de position depuis la publication d'un certain « Appel de Basse-Terre ».
En fait, cet appel n'est rien d'autre qu'un compromis passé entre ses
signataires - qui appartiennent à trois camps jusque-là opposés : le camp
indépendantiste, le camp autonomiste et celui que l'on appelait
traditionnellement le camp départementaliste - sur un objectif d'évolution
statutaire qu'ils estiment indispensable pour les trois DFA.
On ne voit donc pas, au premier abord, pourquoi il faudrait mettre en
parallèle, et plus encore en opposition, ce qui se présente comme un projet, ou
plus exactement une ébauche de projet, et les dispositions contenues à
l'article 39 du projet de loi d'orientation qui, elles, constituent un cadre
légal et une méthode d'évolution institutionnelle ou statutaire.
Autrement dit, rien n'empêchait - et n'empêche toujours - les tenants de
l'Appel de Basse-Terre de continuer à étoffer leur projet, jusqu'ici inachevé,
et de décider de le soumettre aux élus locaux réunis en congrès dans chacun des
trois départements concernés sitôt la promulgation de la loi d'orientation.
Alors il faut bien trouver de mauvaises raisons à un refus dont on ne veut pas
avouer les vrais motifs !
C'est ainsi qu'on nous dit qu'il n'est pas nécessaire de faire inscrire dans
la loi la possibilité pour les élus départementaux et régionaux de se réunir en
congrès. Quoi de plus évident, en effet !
Sauf que, soyons sérieux, l'article 39 ne se résume nullement à la simple
réunion en congrès des élus locaux.
Il fixe également les modalités de prise en compte, par les instances
gouvernementales, de tout projet d'ordre institutionnel et, surtout, il
prévoit, en cas de proposition de changement de statut, la mise en oeuvre d'une
consultation des populations intéressées.
Mais, s'agissant du seul congrès, si son inscription dans la loi est tellement
inutile, pourquoi tant de beaux esprits dépensent depuis des mois autant
d'énergie pour l'en empêcher ? Pourquoi certains ont-ils fait une fixation
quasi névrotique sur cette question, au point d'avoir réussi, pendant assez
longtemps, à occulter toute la partie économique et sociale du projet de loi
d'orientation ?
Alors on nous dit : « Oui, mais, de toute façon, ça ne passera pas la barrière
du Conseil constitutionnel ! » Et comme le propos cache mal ce qui est le plus
souvent un souhait, ceux qui le tiennent s'apprêtent en général à faire en
sorte qu'il y ait à coup sûr saisine du juge constitutionnel.
Dans ces conditions, malgré ce qu'en pense le Conseil d'Etat et nombre
d'éminents constitutionnalistes, on ne peut nier l'existence du risque. Mais,
pour autant qu'il existe, je ne vois pas pourquoi il ne faudrait pas l'assumer.
Je ne vois pas non plus pourquoi cela devrait nous priver de l'occasion de voir
si, avec le temps, compte tenu de l'évolution des esprits sur les questions
institutionnelles, de l'apport de l'Europe dans ce domaine, notamment de
l'existence de l'article 299-2 du traité d'Amsterdam, le Conseil
constitutionnel n'a pas quelque peu infléchi son interprétation jusqu'ici
extrêmement restrictive de l'article 73 de la Constitution.
Il est d'ailleurs curieux de constater que ceux qui semblent si sourcilleux
s'agissant de la constitutionnalité du congrès ne s'attardent pas trop sur le
point de savoir quel sort pourrait être réservé par le Conseil constitutionnel
à leur propre projet, qui, tel qu'il se dessine, pose manifestement des
problèmes autrement plus épineux de compatibilité avec la Constitution
actuelle.
Pour ma part, même dans le cas où l'article 39 serait censuré par le Conseil
constitutionnel, je considère que subsisterait malgré tout un acquis
indéniable.
En effet, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, le seul fait qu'un
gouvernement ait accepté d'inscrire dans un texte législatif une procédure
d'évolution institutionnelle et statutaire différenciée des DFA constitue une
importante victoire politique.
Le vote de cette disposition par le Parlement constituera une seconde et
encore plus importante victoire. Ce sera, pour la première fois, l'obtention
d'une reconnaissance officielle du droit à l'autodétermination des peuples
martiniquais, guadeloupéen et guyanais.
A partir de là, il est incontestable que, désormais, rien ne sera plus comme
avant.
Et même dans l'hypothèse d'une censure du Conseil constitutionnel, les élus
locaux se trouveront dans un contexte beaucoup plus favorable qu'auparavant
pour réclamer en même temps que les modifications de la Constitution absolument
indispensables à la mise en oeuvre d'un éventuel changement de statut celles
qui permettront une consultation des populations concernées.
Cette consultation des populations est pour moi le point fondamental, et je ne
suis pas sûr qu'il n'existe pas là une vraie divergence avec les tenants de la
démarche de Basse-Terre. Certes, ceux-ci proclament qu'ils sont partisans de
consultations locales en cas d'évolution statutaire. Ce serait d'ailleurs
politiquement suicidaire pour eux de dire autre chose, tant les citoyens de nos
départements y sont profondément attachés.
Mais je m'interroge sur ce qui, dans l'article 39, constitue leur cible
réelle. A travers le congrès, n'est-ce pas avant tout la procédure de
consultation locale qui est visée ? Je suis d'autant plus porté à le croire
qu'un amendement présenté par la commission des lois tend à supprimer, à
l'article 1er, le paragraphe introduit par l'Assemblée nationale pour
précisément mettre en valeur, dès le début du texte, la nécessité de garantir,
dans le cadre de tout processus d'évolution, la maîtrise locale de la décision
finale.
Sur un plan plus général, je suis convaincu qu'il existe, en réalité, une
divergence fondamentale entre deux démarches face à la nécessité de doter les
actuels DFA d'un niveau de responsabilité locale suffisamment important pour
leur permettre de mieux convevoir leur développement, de mieux préserver leur
identité et de mieux maîtriser leur avenir en fonction des aspirations de leurs
peuples. Cette divergence ne porte pas forcément sur le modèle d'autonomie
régionale pouvant correspondre à cette nécessité ; elle porte essentiellement
sur la voie à emprunter pour y parvenir.
Je suis, pour ma part, évidemment favorable à toute discussion visant à
rechercher le statut d'autonomie le plus pertinent pour la Martinique. Cela ne
devrait étonner personne puisque, militant autonomiste de longue date, j'ai
fait le choix de répondre à un appel qui date, lui, de 1956, l'appel d'Aimé
Césaire qui se conclut par le fameux : « L'heure de nous-mêmes a sonné ! »
Simplement, en matière de statuts, je demande à voir de très près, persuadé
que, plus un pays est petit, plus il faut être exigeant sur la présence de
contre-pouvoirs et de garde-fous démocratiques.
Par ailleurs, même si un statut pouvait m'apparaître particulièrement indiqué
pour la Martinique, je ne me sentirais pas le droit de l'imposer à qui que ce
soit, d'autant que je suis intimement convaincu que la voie d'évolution choisie
conditionne largement ce que deviendra un projet. « Le but est dans le chemin »
disent, à juste titre, les maîtres bouddhistes.
On le voit, le véritable débat se situe, comme j'ai déjà eu l'occasion de le
dire à cette tribune, entre ceux pour qui toute évolution statutaire dans un
DOM doit s'opérer selon des voies réellement démocratiques et ceux pour qui
elle doit être l'affaire de minorités agissantes s'octroyant le droit de
parler, de négocier et de décider à la place du peuple.
Il est évident que ceux qui ont décidé d'opter pour la deuxième solution ne
peuvent que combattre la procédure prévue à l'article 39. Face à une telle
alternative, je ne peux vraiment pas croire que la Haute Assemblée puisse
persister à faire le choix de l'aveuglement. Je souhaite donc que, sur
l'article 39, l'on n'assiste pas une nouvelle fois à un vote mécanique mais que
chacun ait vraiment à coeur de voter en conscience.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes collègues, le projet
de loi d'orientation pour l'outre-mer tel qu'il nous est soumis est un très bon
projet. Il peut encore être quelque peu enrichi. C'est dans cette optique que
je présenterai tout à l'heure trois amendements.
Il ne doit cependant être ni mutilé ni dénaturé. Il doit absolument conserver
toute sa cohérence si l'on veut qu'il traduise une réelle volonté de rupture
dans la manière habituelle d'appréhender les réalités des départements
d'outre-mer.
N'ayons garde désormais, en nous attaquant aux problèmes économiques et
sociaux qui s'y posent et dont on connaît l'acuité, d'oublier la demande de
responsabilité des peuples.
C'est seulement à ces conditions que, avec l'ensemble du groupe socialiste, je
serai en mesure d'émettre un vote favorable sur le texte qui sortira des
travaux de notre assemblée.
(Applaudissements sur les travées socialistes et
sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à Mme Michaux-Chevry.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
l'annonce du projet de loi d'orientation pour l'outre-mer a été accueillie de
façon favorable. Il le fut, d'abord, parce que, depuis la loi Pons, puis la loi
Perben, l'outre-mer semblait oublié. C'est la raison pour laquelle les
parlementaires de tous bords politiques réclamaient au Gouvernement un débat de
fond sur l'outre-mer.
Ensuite, le fait de confier à deux parlementaires de l'outer-mer la mission
d'émettre des propositions ne pouvait que créer un grand espoir : celui de voir
prendre en compte la réalité de nos problèmes.
Hélas ! la désillusion allait poindre rapidement.
En effet, au rapport Lise-Tamaya, alors toujours en gestation, se sont
substitués d'autres rapports techniques - le rapport Mossé, le rapport Senners,
le rapport Fragonard - qui ont occulté le rapport des parlementaires en mission
et, tandis qu'une grande publicité a été donnée au rapport Fragonard, le
rapport Lise-Tamaya est arrivé, lui, tout doucement, par la poste !
Le projet de loi tant attendu fut finalement publié dans la précipitation le
13 décembre, à la suite de la déclaration de Basse-Terre du 1er décembre,
déclaration que vous devriez lire, monsieur Lise. En tout cas, je peux vous
dire qu'il n'a jamais été question pour nous, qui connaissons mieux la violence
que vous, d'imposer notre point de vue aux populations. Au contraire, nous
avons cherché à ouvrir entre nous, loin des clivages politiques, une
consultation, un débat, nous avons souhaité entendre et écouter nos
compatriotes.
Cela gêne beaucoup que, en Guadeloupe, nous soyons arrivés à faire ce que
certains n'ont pu obtenir. C'était une gageure que de faire siéger ensemble M.
Marie-Jeanne, qui réclame l'indépendance, M. Karam, autonomiste, et moi qui ai
toujours défendu la présence française au péril de ma vie et de celle de ma
famille, ce que vous semblez oublier.
Le projet de loi actuel ne tient pas compte de certains avis pertinents des
rapports techniques ni même des propositions - je suis plus objective que vous,
mon cher collègue - que vous aviez formulées dans votre rapport en vue de
déboucher sur plus de décentralisation et sur la recherche de nouveaux moyens
financiers pour les collectivités.
De même, le Gouvernement ne fait aucun cas des avis défavorables des
collectivités territoriales. Le conseil régional de Guadeloupe, composé de
membres de la majorité et de l'opposition, a ainsi voté contre le projet de loi
et pour la déclaration de Basse-Terre et les études qui ont suivi.
Le projet de loi était considéré à l'époque comme tellement important qu'on a
pu le comparer à l'abolition de l'esclavage, mais il a subi depuis de très
nombreuses modifications.
Vous ne m'avez pas convaincue tout à l'heure, monsieur le secrétaire d'Etat,
quand vous avez déclaré qu'il fallait consulter les populations des
départements français d'Amérique à propos des institutions alors que, d'ores et
déjà, en vertu du point de vue d'élus locaux et de certaines personnes, vous
avez décidé d'appliquer la bidépartementalisation. Je considère, pour ma part,
que la consultation des populations est un devoir sacré, une condition du
respect de la démocratie.
J'ai relevé dans ce texte quantité de contorsions qui me gênent ; je vais les
rappeler rapidement.
Le Gouvernement a conscience du fait que les charges sociales et fiscales
pénalisent les entreprises de l'outre-mer qui sont fragiles, mais il ne propose
que quelques mesurettes, et non pas un dispositif global plus lisible.
J'ai entendu tout à l'heure M. le rapporteur, parlant des 35 heures, montrer
le handicap que ce dispositif représentait par rapport aux pays de la zone.
Mais enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, qui chez nous travaille trente-cinq
heures par semaine ? Vous avez oublié Noël, Pâques, le 1er novembre, le 2
novembre, le carnaval, qui dure neuf jours, etc.
(Sourires.)
Il fallait
mettre tout cela à plat !
Il faut prendre conscience des réalités de l'outre-mer !
Par ailleurs, fixer à dix salariés le seuil maximum permettant de bénéficier
des exonérations revient à créer une concurrence déloyale lors de la
participation aux appels d'offre parce qu'une entreprise qui emploiera dix
salariés pratiquera des prix plus intéressants que celle qui en comptera
onze.
Une autre contradiction me paraît devoir être relevée : la sous-consommation
des fonds structurels européens induit comme solution la création d'une
commission que j'appellerai « commission de bavardage ». En effet, cette
solution traduit une méconnaissance des causes profondes et réelles de la
sous-consommation.
Sous-consommation, pourquoi ? Le département de la Guadeloupe n'a pas consommé
les 120 millions de francs destinés à ses ports parce que ce département est en
faillite chronique.
Sous-consommation pourquoi ? Parce que la région Guadeloupe n'a pas reçu les
217 millions de francs qui devaient lui être versés au titre des années 1998,
1999 et 2000.
Sous-consommation, pourquoi ? Parce que les porteurs de projets n'ont pas les
moyens de les faire avancer.
Pour remédier à cette sous-consommation, nous avions proposé la mise en place
d'un fonds régional de préfinancement des fonds européens. Nous n'avons jamais
obtenu de réponse sur ce point.
Vous proposez que soit créé un véritable comité de suivi, mais ce comité de
suivi existe ! Il est obligatoire ! Le comité de suivi est prévu aux pages 23
et suivantes du DOCUP, le document unique de programmation. Il se réunit au
moins deux fois par an. Il module les plans, il établit un déflateur qui permet
une meilleure répartition. Je peux dire que, dans la région que je préside, 90
% des fonds européens ont été consommés grâce à une répartition très
intelligente qui s'exerce au niveau du comité de suivi.
Pour répondre à l'éloignement - et je ne parle pas d'une liaison entre la
capitale régionale et Paris comme on l'a toujours favorisée en Corse - nous
demandons un traitement de l'archipel guadeloupéen, qui comporte six îles. Pour
répondre à ce handicap, le Gouvernement ne propose qu'une mesure, qui est déjà
en application, d'ailleurs : réduire le prix du livre.
Certes, il doit y avoir un CAPES de créole. C'est très bien ! Mais quel créole
allez-vous enseigner dans nos écoles ? Celui de Basse-Terre, de Grande-Terre ou
de Marie-Galante ? En tout cas, attention au créole américain, qui est en train
de pénétrer dans la zone de la Caraïbe !
Autre motif d'étonnement : l'article 36
bis.
Cet article est sans fondement. Il crée une discrimination entre les îles de
Saint-Barthélémy, de Saint-Martin et les autres îles de l'archipel. De plus,
monsieur le secrétaire d'Etat, il méconnaît le contenu du contrat de plan signé
avec l'Etat qui, à la page 65, comporte déjà un dispositif de développement des
îles comprenant des mesures spécifiques, non pas seulement pour Saint-Martin et
Saint-Barthélemy, mais pour les six îles qui composent l'archipel de la
Guadeloupe. Il y a des mesures pour Saint-Martin, Saint-Barthélemy,
Marie-Galante, Grande Terre, Basse Terre et Desirade, et ce depuis le XIe plan,
soit 1994.
Autre ambiguïté : le congrès.
Le fonctionnement du congrès plaît à certains de nos collègues, mais il est
pour le moins tortueux ! Il était d'abord convenu que le congrès délibérerait,
que la décision serait transmise au Premier ministre et qu'à la réunion
suivante un procès-verbal viendrait confirmer les décisions déjà transmises.
Maintenant, chaque assemblée sera amenée à entériner les décisions du
Congrès... Ce n'est pas sérieux, monsieur le secrétaire d'Etat !
A l'heure actuelle - peut-être les élections qui se profilent perturbent-elles
certaines personnes, je peux le comprendre - une grève des transports frappe la
Guadeloupe. Cette grève dure depuis deux mois et l'on ne parvient pas à réunir
autour de la même table des représentants du conseil général et du conseil
régional pour trouver une solution à ce problème qui touche les populations les
plus déshéritées. Je le répète, ce n'est pas sérieux, monsieur le secrétaire
!
Il n'est pas sérieux non plus, monsieur le secrétaire d'Etat, que RFO ait
complètement transformé vos propos. Au demeurant, la population, qui est sans
doute plus intelligente qu'on ne le croit, a compris que M. le secrétaire
d'Etat n'avait pas pu dire cela. Cela a évité bien des perturbations !
L'affaire des transports est également symptomatique. Le conseil général
propose de faire voter une quatrième assemblée, l'assemblée des transporteurs,
et d'en faire des fonctionnaires.
Toutes ces questions montrent bien que le fonctionnement du congrès est
tortueux.
Nous n'avons pas peur du congrès maintenant, mon cher collègue Lise, car, en
Guadeloupe, nous sommes majoritaires. Le congrès fera donc ce que le conseil
régional décidera. C'est le fonctionnement du congrès qui n'est pas bon. Nous
l'avons dit. Si c'est la première fois qu'on en parle ici, c'est parce que -
vous l'avez peut-être oublié - c'est la première fois que j'interviens dans ce
débat.
Bref, le projet de loi qui nous est soumis est confus. Il traduit une
méconnaissance du fait domien et l'oubli de données importantes.
S'agissant de la banane antillaise, par exemple, la France aurait été bien
inspirée d'utiliser la jurisprudence intelligente de l'Espagne, qui a appliqué
la préférence nationale sur son territoire, et ne pas laisser la banane
antillaise, française, européenne, se trouver en concurrence avec la « banane
dollar » américaine.
J'en viens au problème de la pêche, monsieur le secrétaire d'Etat. Depuis
1987, nous entendons parler des zones territoriales et de leur délimitation.
Or, quand un Français de l'hexagone est arrêté dans une île quelconque, on
dépêche des émissaires pour régler le problème et quand un marin-pêcheur de la
Guadeloupe est arrêté, emprisonné à Sainte-Lucie ou à Antigua, ce sont les élus
locaux qui doivent se débrouiller sur le terrain pour tenter de trouver une
solution.
Parallèlement, le problème des zones territoriales n'est pas réglé et nous
continuons à voir des bateaux étrangers venir piller nos eaux territoriales.
Le thème de la coopération a été évoqué et chacun s'est montré très satisfait.
J'ai bien entendu vos propos sur ce point, monsieur le secrétaire d'Etat.
Mais votre coopération est bien à plat. Pourquoi ?
Le premier discours de coopération, le plus important, a été prononcé par M.
Rocard, alors Premier ministre. Ce fut son fameux discours de Cayenne.
Puis, M. Alain Juppé, ministre des affaires étrangères mit sur pied
l'association des Etats de la Caraïbe, dont l'acte de naissance fut signé à
Carthagène et ratifié par une loi du 29 décembre 1997.
Or, que s'est-il passé la semaine dernière, monsieur le secrétaire d'Etat ?
Votre collègue secrétaire d'Etat au tourisme est arrivée en catimini en
Guadeloupe pour accueillir les ministres de tous les Etats compris entre Cuba
et le Venezuela, afin d'y tenir une réunion sur le tourisme, domaine qui nous
intéresse au premier chef. Nous n'avons été ni invités ni informés. Nous
n'avons même pas pu nous rendre à l'aéroport et faire preuve d'un minimum de
correction vis-à-vis de nos voisins et, suprême insulte, le secrétaire général
de l'AEC, l'Association européenne de coopération, a quitté par ses propres
moyens Saint-Martin et Saint-François et est venu à Basse-Terre nous saluer -
ce qui fait deux heures de route aller et deux heures de route retour - pour
nous dire qu'il ne comprenait pas que la France viole les accords de l'AEC.
Rencontre des ministres des transports à Panama : ni la Guadeloupe, ni la
Martinique, ni la Guyane n'en sont informées.
Rencontre encore au Costa Rica : ni la Guadeloupe, ni la Martinique, ni la
Guyane n'en sont informées !
Et l'on vient me parler de coopération régionale, de possibilité de passer des
accords internationaux ! Lesquels ?
Je vois aussi dans le projet que l'on va consulter le conseil économique et
social départemental. Je ne connais pas de conseil économique et social
départemental. Allez-vous en créer un ? Je ne connais que le conseil économique
et social régional.
J'ajoute que la coopération est en danger, monsieur le secrétaire d'Etat. La
France, sans rien dire, a abandonné son siège au sein du conseil
d'administration de la banque de développement de la Caraïbe. De ce fait,
actuellement, aucune de nos entreprises ne peut obtenir de marché dans la
Caraïbe.
Ce retrait de la France me semble démontrer le désintérêt du Gouvernement pour
ce qui se passe dans la zone caraïbe. Or elle a un rôle stratégique
considérable à y jouer.
Au moment où les Etats de cette zone, qui sont presque tous francophiles, qui
sont liés à nous par l'histoire et la culture, prennent conscience de l'apport
de l'Europe, qui permet notamment aux départements de la Guadeloupe et de la
Martinique d'apparaître comme très avancés en matière de télécommunications ou
d'énergies renouvelables, voilà la France qui se retire de la banque de
développement, alors que celle-ci constitue un lien indispensable !
Je pense, contrairement à ceux qui ont attaqué la déclaration de Basse-Terre,
que nous avons créé un espace de dialogue, où nous faisons tout pour écarter la
méchanceté, la médisance, la violence, la haine, où nous nous efforçons de
partager avec les autres ce sentiment fort de la place de la Guadeloupe, de la
Martinique et de la Guyane dans la Caraïbe. Cette place doit être de mieux en
mieux reconnue, grâce à notre action personnelle, à celle de la France et à
celle de l'Europe, actions que nous avons menées en complémentarité en faveur
de l'ensemble de la région Caraïbe. Il n'y a là nulle conception dictatoriale.
Ce qui gêne sans doute beaucoup de gens, c'est que nous ayons ainsi innové.
Quoi qu'il en soit, pour ma part, je n'apporterai pas mon soutien à ce projet
de loi. Notre déception a été trop grande. Nous attendions des mesures beaucoup
plus fortes, beaucoup plus amples en matière de développement économique. Nous
attendions des mesures plus appuyées en faveur de la jeunesse ; tout ce qui est
proposé ici pour les jeunes, nous l'avons déjà mis en place en Guadeloupe.
Je vous signale, monsieur le secrétaire d'Etat, que beaucoup d'athlètes
guadeloupéens, lors des grandes compétions sportives internationales, font
monter le drapeau français et résonner la Marseillaise. Malheureusement, en
regard des résultats que nous avons l'honneur d'offrir à la France, la
participation du budget de l'Etat à la vie sportive en Guadeloupe est vraiment
insignifiante !
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Conformément à l'usage mais aussi parce que les
interventions que nous avons entendues l'exigent, je souhaiterais répondre à
l'ensemble des orateurs, en essayant de clarifier un certain nombre de points,
voire de désamorcer quelques querelles qui ne me paraissent pas fondées
s'agissant d'un texte que je crois profondément utile pour l'outre-mer.
Monsieur le rapporteur, vous avez établi, comme en première lecture, sur la
situation économique et sociale des départements d'outre-mer, un diagnostic qui
ne diverge en rien de celui que porte le Gouvernement.
Vous avez notamment insisté sur la nécessité d'améliorer la compétitivité des
entreprises et sur les disparités régionales qui faussent la concurrence entre
les entreprises des départements d'outre-mer et celles d'Etats voisins, dont, à
l'évidence, les systèmes de protection sociale sont très éloignés de ce que
l'égalité des droits a permis d'instaurer dans ces mêmes départements.
Votre diagnostic correspond tout à fait à celui qui a fondé, dans un premier
temps, le rapport de M. Claude Lise et du député M. Michel Tamaya, puis le
projet de loi d'orientation du Gouvernement.
Quand j'entends quelque peu sous-estimer - comme Mme Michaux-Chevry vient
encore de le faire à l'instant - l'effort qu'il sera possible de consentir
aussitôt que cette loi d'orientation aura été définitivement approuvée par le
Parlement, force m'est de rappeler que, jusqu'à présent, l'effort de notre pays
en matière d'allégement de charges sociales dans les départements d'outre-mer
plafonnait à moins de un milliard de francs. Or, grâce au dispositif que je
vous propose d'adopter, mesdames, messieurs les sénateurs, ce même effort
s'élèvera à plus de 3,5 milliards de francs. Il s'agit d'un effort appuyé,
essentiel, qui ne manquera pas de marquer l'histoire économique de l'outre-mer.
Cet effort relève, à mes yeux, tout simplement de la solidarité nationale, mais
je ne l'en considère pas moins comme historique.
S'agissant de la coopération régionale - et je réponds ici également à Mme
Michaux-Chevry - pour être effectivement une idée ancienne, elle n'est pas pour
autant une idée fausse.
Moi, je crois profondément à la coopération régionale. Pour la première fois,
nous donnons aux principales collectivités de l'outre-mer, départements et
régions, la possibilité de tenir leur rang dans l'espace régional en leur
permettant - nous y reviendrons tout à l'heure dans le débat - de conclure des
accords avec les Etats voisins et de participer aux associations de coopération
régionale non plus sur un strapontin, mais en tant que membres à part
entière.
Au moins sur le principe, il me semble y avoir là une convergence entre la
majorité sénatoriale et le Gouvernement, même si, sur les modalités, nous ne
parvenons manifestement pas tout à fait à nous entendre.
Vous avez rappelé, monsieur le rapporteur, qu'un amendement d'origine
parlementaire avait mis fin à la prime d'éloignement dont bénéficient les
fonctionnaires.
Je voudrais vous rassurer sur un point : cette mesure n'est pas rétroactive.
Nous ne savons pas encore, au demeurant, quelle forme elle prendra dans
l'avenir puisqu'un décret est nécessaire à son application.
En tout cas, ainsi que je le précisais ce matin encore à l'une des principales
organisations représentant les fonctionnaires - les enseignants, en
l'occurrence - rien ne sera fait sans une intense consultation. Celle-ci, bien
sûr, ne peut commencer avant que la loi soit adoptée par le Parlement. Mais je
suis prêt, dès sa promulgation, à rencontrer les organisations représentant les
agents publics pour évoquer les conditions d'application de cette mesure qui
relèvent du pouvoir réglementaire, étant entendu que le Parlement - Assemblée
nationale et Sénat - s'est prononcé pour la fin de cette prime d'éloignement,
du moins dans la forme que l'on connaît aujourd'hui.
S'agissant des 35 heures, bien sûr, il n'est pas question pour moi de relancer
dans cet hémicyle un débat qui a été mené avec talent et brio par Martine Aubry
il y a maintenant près de deux ans. Mais enfin, comment peut-on vouloir
sérieusement défendre l'égalité des droits dans les départements d'outre-mer,
au nom même des effets positifs de la départementalisation, et considérer que,
sur une question aussi essentielle, il doit y avoir deux poids et deux mesures
: les 35 heures en métropole et on ne sait quoi dans les départements
d'outre-mer ? J'ai en effet cru comprendre que, dans certaines situations, on
pouvait y travailler neuf jours d'affilée !
En vérité, il est essentiel que soit respectée l'égalité des droits des
salariés, dans les départements d'outre-mer comme en métropole. Mais cette
égalité vaut aussi pour les décisions qui seront proposées à l'intention des
petites et moyennes entreprises en vue de les faire bénéficier d'un certain
nombre d'assouplissements.
J'en viens à ce procès d'incivisme que j'ai vu poindre curieusement à propos
des entreprises de l'outre-mer et de la possibilité d'apurement des charges
sociales qui figure dans le projet de loi. Ce point a été évoqué par M. le
rapporteur, et aussi par M. Hyest. Il me semble voir dans ce procès une
singulière contradiction.
Nous voulons tous prendre en compte les difficultés des entreprises de
l'outre-mer. On va même parfois jusqu'à s'apitoyer sur leur sort. Or je ne
crois pas que ce soit ce qu'elles demandent. Elles demandent simplement que
l'on prenne en considération leurs problèmes spécifiques, liés à l'étroitesse
du marché, à l'insularité, aux difficultés de communication.
Dans ce projet de loi d'orientation, il ne s'agit pas d'effacer, comme sur une
ardoise magique, les dettes sociales des entreprises de l'outre-mer.
D'ailleurs, ce n'est pas rendre service aux départements d'outre-mer et aux
entreprises qui y sont implantées que de laisser planer dans l'opinion,
notamment métropolitaine, l'idée selon laquelle le Gouvernement et la majorité
de l'Assemblée nationale auraient engagé un plan visant à effacer purement et
simplement les dettes sociales des entreprises de l'outre-mer.
Il s'agit de tenir compte de difficultés qui sont importantes, de situations
économiques qui sont déprimées dans certains secteurs des départements
d'outre-mer, et cela essentiellement grâce à deux mesures : l'annulation des
pénalités et des majorations de retard et, après examen de la situation des
entreprises, un abandon de créances, qui ne doit pas aller au-delà de 50 % de
la dette.
M. Jean-Jacques Hyest.
Ce n'est pas dit !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
C'est clair pour les dettes sociales, mais nous y
reviendrons lors de la discussion des articles.
M. Lauret a évoqué les bienfaits de la loi Perben. Cette loi a, certes,
constitué un dispositif d'allégement des charges sociales, mais vous auriez été
tout à fait fondé, monsieur le sénateur, à en souligner l'insuffisance et la
timidité. En effet, le bilan du coût budgétaire de l'application de cette loi
est quatre fois inférieur au coût du dispositif que nous proposons aujourd'hui
de mettre en place, malheureusement sans votre soutien.
Mais je remarque que, dans votre département, votre position est minoritaire
sur ce point, comme elle l'est, d'ailleurs, en ce qui concerne la
bidépartementalisation.
Est-ce offenser la démocratie que de rappeler que sept parlementaires de la
Réunion sur huit sont favorables à la bidépartementalisation ? Est-ce offenser
la démocratie que de rappeler que deux sénateurs sur trois sont favorables à la
bidépartementalisation ?
Je dois dire, monsieur le sénateur, que j'ai trouvé bien excessif le procès
que vous avez instruit tout à l'heure. La Réunion souhaite demeurer dans le
droit commun de la République et maintenir un système départemental. Est-il
absurde, incohérent, dès lors, d'envisager, pour une région qui comptera plus
d'un million d'habitants dans une quinzaine d'années, une
bidépartementalisation ?
(Protestations sur quelques travées des Républicains et Indépendants, du RPR
et de l'Union centriste.)
Y a-t-il improvisation, alors que ce débat se déroule depuis des mois et que
les modalités précises de la bidépartementalisation figuraient déjà dans
l'avant-projet de loi que le Gouvernement a transmis au Conseil d'Etat ? Il y a
aujourd'hui débat au Parlement sur les modalités de la bidépartementalisation,
comme il y a eu échange, voilà maintenant plus d'un an, avec le Conseil d'Etat,
sur la façon de procéder. Est-ce là travailler dans l'improvisation et la
précipitation ?
M. Lucien Lanier.
Pourquoi vouloir passer en force ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je crois que l'on fait, sur ce point, deux, voire
trois faux procès, dans un but évident de désinformation de la population ;
mais, monsieur Lauret, je pense que nous aurons l'occasion de nous expliquer
très bientôt à cet égard, et peut-être même dans votre belle région de la
Réunion.
Dans le premier acte de cette tragédie de désinformation que l'on tente de
jouer - mais je ne crois pas que ce soit un succès durable à la Réunion - on
essaie de faire accroire que la bidépartementalisation est un gadget pour des
élus locaux en mal de mandat.
Je rappellerai simplement que la bidépartementalisation ne crée pas un siège
de conseiller général de plus.
M. Pierre Fauchon,
vice-président de la commission des lois constitutionnelles, de législation,
du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Elle a
tout de même un coût !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
J'y reviendrai, monsieur Fauchon !
Le second procès n'a pas été évoqué, il est vrai, dans cet hémicycle, mais
j'ai lu dans de nombreux écrits, y compris sous la plume d'un élu réunionnais,
que la création d'un nouveau département serait anachronique à un moment où la
fin des départements serait programmée. Qui considère que la fin des
départements est programmée ? Certainement pas le Gouvernement ! Certainement
pas la commission Mauroy ! Certainement pas le Sénat !
M. Jean-Jacques Hyest.
Ah ça non !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je vous remercie de le confirmer, monsieur le sénateur
!
Par conséquent, nous ne sommes pas engagés aujourd'hui dans une réflexion qui
conduirait à la fin des départements. Nous rappelons, au contraire, que le
département, comme espace de solidarité et comme initiateur d'équipements, a
toute sa place dans le paysage territorial de la France, donc aussi à la
Réunion.
On a évoqué la consultation. Comme je l'ai rappelé tout à l'heure - et je le
referai peut-être en répondant à Mme Michaux-Chevry - quand il s'agit de rompre
avec le droit commun, quand il s'agit d'évoluer vers des dispositions
statutaires qui peuvent réclamer, le moment venu, une modification de la
consultation, alors, effectivement - et c'était bien le sens des propos
convergents du Président de la République et du Premier ministre - il est
nécessaire de prendre l'avis des populations.
Il s'agit aujourd'hui d'une réorganisation territoriale, voulue, encore une
fois, par la très grande majorité des parlementaires représentant la Réunion au
Parlement de la République...
M. Pierre Fauchon,
vice-président de la commission des lois.
Il n'y a pas que les
parlementaires !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
... et, très sincèrement, nous avons là de bonnes
raisons de penser que, au prix d'une meilleure explication excluant les propos
partisans et la désinformation, nous pourrons convaincre la majorité des
habitants de la Réunion qu'il s'agit d'une bonne mesure, ce pour trois raisons
essentielles...
(M. Edmond Lauret brandit un document.)
L'explication
n'a pas commencé, monsieur le sénateur ! Je suis sûr que vos collègues
sénateurs ici présents, comme les députés qui ont déposé un amendement voilà
quelques semaines, vont entamer cette explication qui n'a pas encore eu
lieu.
La bidépartementalisation revêt trois aspects.
Il y a une bidépartementalisation des services publics de l'Etat comme de la
collectivité départementale, mieux répartis, plus proches de la population et
des citoyens. Est-ce un objectif indécent à poursuivre ?
Il y a une bidépartementalisation sociale. Vous connaissez comme moi le nombre
actuel de bénéficiaires du RMI à la Réunion. Vous savez que la volonté
convergente des élus locaux et du Gouvernement est d'aller au plus vite vers
l'alignement progressif du RMI dans les départements d'outre-mer sur celui de
métropole. Vous savez également, j'en suis sûr, que le souhait des institutions
locales et du Gouvernement est de faire en sorte que ces politiques d'insertion
soient menées au plus près du terrain. La bidépartementalisation a donc
également un sens social.
J'en arrive au troisième aspect de la bidépartementalisation, s'il faut aller
encore plus loin dans l'argumentation : il s'agit de l'aménagement plus
harmonieux d'un territoire dont vous connaissez mieux que moi, monsieur le
sénateur, les difficultés et la géographie tourmentée. Nous constatons, en
effet, aujourd'hui, un déséquilibre en matière d'aménagement de ce territoire.
Les grandes infrastructures de communication - M. Vergès nous en a souvent
entretenu - sont tout à fait significatives à cet égard.
La mise en oeuvre de la bidépartementalisation doit effectivement faire
l'objet d'une concertation avec les élus locaux, mais elle doit surtout être
progressive : en affirmant la nécessité que le « coup d'envoi » soit donné au
1er janvier 2001, l'Assemblée nationale n'entend pas pour autant que la
bidépartementalisation soit achevée au 1er janvier 2001. A défaut, nous
pourrions en effet parler de précipitation et, nécessairement, d'improvisation.
Le Gouvernement ne s'est pas opposé à cet amendement parlementaire.
L'Etat n'entend pas, d'ici au 1er janvier 2001, doubler les effectifs, je suis
désolé de devoir vous le dire. La nouvelle assemblée départementale devra, à
nombre d'élus constants, organiser progressivement sa structure. Tant l'Etat
que cette collectivité départementale devront être exemplaires dans l'emploi
des derniers publics et dans la mise en oeuvre de la bidépartementalisation.
Les estimations dont je dispose sont loin des chiffres absolument
fantasmatiques qui ont été brandis par les adversaires de la
bidépartementalisation : 400 millions de francs, 500 millions de francs. C'est
tout à fait délirant ! Le moment venu, je communiquerai des chiffres précis
pour le compte de l'Etat. Vous serez surpris de l'approche modeste que nous
avons de la mise en oeuvre de la bidépartementalisation. L'Etat peut être
modeste et exemplaire !
M. Jean-Jacques Hyest.
Si on faisait des études d'impact, on pourrait le savoir dès à présent !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je ne reviendrai pas sur le procès en incivisme...
M. Jean-Jacques Hyest.
J'ai parlé de risque !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je vous remercie d'atténuer cette accusation, monsieur
Hyest !
M. Payet a rappelé, et je lui en sais gré, l'importance qu'attachent les élus
de la Réunion, toutes tendances confondues, à l'alignement progressif du RMI.
J'ai eu l'occasion d'indiquer à plusieurs reprises que le délai de trois ans
qui avait été évoqué par le Gouvernement était un maximum et que je souhaitais,
pour ma part, que nous puissions aller plus vite. Avant la fin de cette année,
j'espère être en mesure d'indiquer le calendrier définitif de l'application de
cette mesure, dont je sais, encore une fois, qu'elle est très importante pour
cette île.
M. Vergès a évoqué, et je l'en remercie, le fait que la loi d'orientation
n'était pas aujourd'hui le seul dispositif mis à la disposition des
départements d'outre-mer pour favoriser leur développement. Certes, ce
dispositif est essentiel. J'ai essayé tout à l'heure d'en donner quelques
aperçus, au moins au travers de la mesure la plus importante, en termes
budgétaire, que représentent les allégements de charges sociales. Mais, bien
entendu, d'autres mesures sont prévues, dont nous débattrons peut-être
aujourd'hui.
Il est important de souligner que, à côté de la loi d'orientation, qui est en
quelque sorte la clé de voûte, on trouve la nouvelle loi de soutien fiscal pour
l'investissement outre-mer, dont je voudrais dire encore une fois qu'elle est
non seulement plus équitable - ce qui était l'objectif du Gouvernement - donc
plus pérenne, mais également et surtout plus efficace. S'il était nécessaire
d'en faire la démonstration, je serais ravi que nous puissions y revenir.
Il y a, ensuite, les contrats de plan, qui représentent un effort en forte
augmentation pour les départements d'outre-mer.
Il y a, enfin, les fonds européens, qui participent aujourd'hui de la
solidarité financière au profit des collectivités locales et des entreprises de
l'outre-mer.
C'est l'ensemble de ces dispositifs qu'il faut avoir à l'esprit lorsque l'on
veut prendre la mesure de l'effort accompli actuellement par la France en
direction des départements d'outre-mer.
Vous avez également souhaité, monsieur Vergès - et nous nous en sommes déjà
entretenus - que l'entrée en vigueur de la loi d'orientation ne soit pas
différée et que l'année 2001 ne soit pas, sur ce point, une année de jachère.
C'est également mon souhait et des instructions ont été données pour que la
préparation des décrets soit engagée au plus vite. Bien sûr, il faut que cette
loi d'orientation soit adoptée, mais des mesures ont été prises pour éviter
tout retard. Il s'agit, en effet, d'un élément important : c'est parce que nous
croyons à la force et à la pertinence de cette loi d'orientation que nous
devons veiller à ce que son application ne soit pas différée.
M. Claude Lise, qui est un des inspirateurs de cette loi d'orientation, a très
sereinement, mais avec beaucoup de force, évoqué ses effets sur les entreprises
: pour la très grande majorité d'entre elles, la loi d'orientation est une
bonne nouvelle et son application est de nature à modifier considérablement
l'économie des départements d'outre-mer. Il fallait le rappeler et vous l'avez
fait, monsieur le sénateur !
Vous avez également fait allusion au congrès des élus départementaux et
régionaux et vous avez dit combien cette méthode démocratique, sereine et
progressive était, peut-être plus que d'autres méthodes que l'on a pu évoquer
au cours des derniers mois, de nature à garantir, pour ceux des départements
d'outre-mer qui le souhaitent, une évolution vers des scénarios statutaires
dont il nous appartiendra, bien sûr, le moment venu, de débattre.
Mme Lucette Michaux-Chevry a plaidé, avec beaucoup de fougue, pour une
évolution statutaire des départements d'outre-mer, en tout cas des départements
français d'Amérique. Je suis profondément convaincu qu'après avoir été, pour la
première fois ce soir, une adversaire résolue de la loi d'orientation, vous ne
serez pas la dernière, madame le sénateur, à vous saisir de l'opportunité
historique que constituent le congrès, et, plus généralement, la volonté
convergente des partis politiques de notre pays de voir l'outre-mer évoluer sur
le plan statutaire.
S'agissant du problème des transports, madame le sénateur, vous avez pris le
risque de valider, au nom du conseil régional, des propositions qui ne sont pas
constitutionnelles et qui négligent les règles élémentaires d'organisation des
services publics. Alors, ne vous en prenez qu'à vous-même !
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Vous avez lu la délibération du conseil régional ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
J'ai lu, en effet, la façon dont le conseil régional a
pris position.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Vous l'avez mal lue !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
J'ai lu également, et je l'ai transmis au président du
conseil régional, autorité organisatrice en matière de transports publics,
l'avis du Conseil d'Etat qui fixe un certain nombre de règles évidentes en
matière d'organisation des transports publics. Je vous renvoie donc encore une
fois à la lecture de cet avis.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
C'est une accusation politicienne !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
S'il est politicien de se référer à un avis du Conseil
d'Etat sur un sujet aussi fondamental, je suis contraint de renvoyer tous ceux
qui le souhaitent à la lecture de cet avis du Conseil d'Etat. Nous avons
souhaité le rendre public, parce qu'il dit le droit avec beaucoup de
précision.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Je respecte le droit et je connais les décisions du conseil régional ! Nous
n'avons pas violé la loi ! Nous avons donné un point de vue. Je vous
transmettrai les délibérations du conseil régional.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Vous avez validé une proposition...
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Je n'ai rien validé du tout ! Vous n'avez rien lu !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
... vous avez validé une proposition qui n'était pas
conforme au droit. D'ailleurs, le Conseil d'Etat a très clairement rappelé quel
était le droit.
S'agissant de la coopération régionale, comme je l'ai indiqué tout à l'heure,
la loi donne aux régions et aux départements la possibilité de conclure des
accords internationaux et d'être membres associés d'organisations
internationales dans l'espace régional. Il s'agit, me semble-t-il, d'un progrès
considérable. Je suis persuadé que la région de Guadeloupe ne sera pas la
dernière à s'emparer de ces possibilités.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, peut être un peu longuement et avec une passion qui
n'a d'égale que celle des intervenants de votre assemblée, les réponses que je
souhaitais apporter aux intervenants.
M. Pierre Fauchon,
vice-président de la commission.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le vice-président de la commission.
M. Pierre Fauchon,
vice-président de la commission.
Monsieur le ministre, permettez-moi, à
la place que j'occupe à titre provisoire et avec un certain regret car le
président de la commission connaît beaucoup mieux que moi le détail de cette
question, de formuler deux observations.
Tout d'abord, vous avez cru pouvoir dire que le Sénat a l'habitude de
s'opposer aux évolutions de l'outre-mer ; je ne pense pas me tromper en disant
que c'était l'une des phrases de votre discours introductif. Je suis obligé de
m'inscrire en faux contre cette déclaration, car elle ne correspond pas à la
vérité.
S'agissant de la Nouvelle-Calédonie, tout au long d'un débat qui a été assez
important, nous avons beaucoup innové et essayé d'inventer des formes
nouvelles, y compris au mépris des traditions juridiques, puisqu'il nous a paru
qu'il fallait les dépasser.
De même, pour ce qui est du présent projet de loi, il est possible que nous
ayons des divergences de vues sur ses modalités d'application et que nous ne
considérions pas comme une solution miraculeuse le fait de diviser en deux un
département. En effet, si elle était miraculeuse, il faudrait généraliser cette
mesure à l'ensemble du territoire national et en tirer des leçons, car ce
serait alors très profitable pour le développement économique.
Mais, d'une manière générale, je crois qu'il serait inexact de dire que notre
assemblée n'a pas montré le souci, partagé par tous, d'ailleurs, de faire
évoluer ces pays d'une manière convenable, afin de les adapter aux conditions
nouvelles de l'existence et à l'évolution du monde.
Ensuite, je relève dans vos propos, sans entrer dans le fond du débat sur la
division de la Réunion, que vous irez sur place mener une campagne
d'explications et que vous ne doutez pas - parce que vous avez confiance en
vous-même, ce qui est tout à fait sympathique - de parvenir à convaincre.
Cela fera tout de même beaucoup de monde à convaincre, monsieur le secrétaire
d'Etat. Vous n'ignorez pas, en effet, que vous avez en face de vous tout de
même la majorité de deux assemblées locales, soit bien plus que sept ou huit
parlementaires : comme les hommes sont égaux entre eux, une assemblée qui
compte plus de quarante membres, l'autre, au moins plusieurs dizaines, qui vous
disent l'une et l'autre que votre projet est une erreur, et qu'ils n'en voient
pas l'intérêt ; des sondages répétés qui vont dans le même sens, qui ne sont
naturellement que des sondages, mais qui, quand ils se succèdent et se
confortent, méritent au moins qu'on se pose des questions ; bref, tout cela
fait beaucoup.
Alors, venir nous dire que l'on va d'abord prendre la décision et l'exécuter,
et ensuite seulement l'expliquer témoigne d'une façon de procéder extrêmement
surprenante dans une situation qui est pour le moins inquiétante.
Le texte d'origine prévoyait un délai entre la prise de la décision et sa mise
en application. La solution nous paraissait déjà tout à fait suspecte, mais
elle se défendait intellectuellement. Au contraire, la solution qui consiste à
agir d'abord - non sans une certaine précipitation, d'ailleurs, parce que le
1er janvier 2001, c'est demain - pour s'expliquer ensuite n'appartient plus
tout à fait à la même conception de la démocratie. Pour parler franc, cela
s'apparente un peu à des procédés qui relèvent du centralisme démocratique.
Mais la démocratie telle que nous l'entendons voudrait que la consultation
précède la décision !
(Applaudissements sur les travées de l'Union
centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que, aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir
de la deuxième lecture au Sénat des projets ou propositions de loi, la
discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du
Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. - Le développement économique, l'aménagement du territoire et
l'emploi dans les départements d'outre-mer constituent, en raison de leur
situation économique et sociale structurelle reconnue notamment par l'article
299, paragraphe 2, du traité instituant la Communauté européenne, des priorités
pour la Nation. »
« Ces priorités sont mises en oeuvre par la présente loi qui vise également à
promouvoir le développement durable de ces départements, à valoriser leurs
atouts régionaux, à compenser leurs retards d'équipement, à assurer l'égalité
sociale et l'accès de tous à l'éducation, la formation et la culture ainsi que
l'égalité entre les hommes et les femmes. Elles impliquent l'accroissement des
responsabilités locales ainsi que le renforcement de la décentralisation et de
la coopération régionale.
« La présente loi a également pour objet de poursuivre, avec les départements
d'outre-mer et Saint-Pierre-et-Miquelon, la rénovation du pacte qui unit
l'outre-mer à la République.
« A ce titre, elle reconnaît à la Guadeloupe, à la Guyane, à la Martinique et
à la Réunion la possibilité de disposer à l'avenir d'une organisation
institutionnelle qui leur soit propre. Respectant l'attachement des Réunionnais
à ce que l'organisation de leur île s'inscrive dans le droit commun, elle
accorde aux assemblées locales des départements français d'Amérique la capacité
de proposer des évolutions statutaires. Dans ce cadre, elle pose le principe de
la consultation des populations sur les évolutions qui seraient envisagées.
»
Sur l'article, la parole est à M. Lise.
M. Claude Lise.
J'interviens sur l'article 1er pour dire combien je me félicite de la
rédaction nouvelle que le Gouvernement a proposée lors de la nouvelle lecture
du projet de loi d'orientation à l'Assemblée nationale. Ainsi, le Gouvernement
précise bien ses intentions et renforce l'article 39, dont j'ai souligné tout à
l'heure, dans mon intervention liminaire, le caractère absolument
fondamental.
J'avais moi-même déjà proposé, en première lecture, que soit inscrit, dès cet
article 1er, l'objectif fondamental qui consiste à ouvrir aux départements
d'outre-mer des perspectives d'évolution, non seulement d'ordre institutionnel,
mais également d'ordre statutaire. Et la nuance a toute son importance, j'en
veux pour preuve le fait que, précisément, la commission des lois du Sénat
souhaite faire disparaître le mot « statutaire ». Ce n'est certainement pas
sans raison.
Je déplore donc que notre commission des lois ait décidé d'amender cet article
pour supprimer ce que je considère, moi, comme essentiel, à savoir l'ouverture
réalisée à l'Assemblée nationale en faveur de la prise en compte d'éventuelles
évolutions institutionnelles et statutaires.
Je déplore encore davantage que, dans la foulée, comme si de rien n'était, la
commission des lois en arrive à remettre en cause le principe de la
consultation des populations sur les évolutions qui seraient éventuellement
envisagées. Certes, M. le rapporteur nous a affirmé tout à l'heure qu'il était
pour la consultation des populations. D'ailleurs, j'ai entendu plusieurs autres
intervenants, hostiles à la procédure prévue à l'article 39, hostiles à
l'inscription, dès l'article 1er, du principe de la consultation, dire qu'ils
étaient pour cette consultation. Alors je m'interroge : cette consultation
est-elle réellement souhaitée ? Les amendements déposés par la commission des
lois ainsi que les positions affichées en première lecture, et encore tout à
l'heure, me paraissent bien contradictoires. Le Sénat va-t-il continuer à se
complaire dans ses contradictions ? J'espère que, malgré tout, la raison et la
sagesse finiront par l'emporter !
M. le président.
Par amendement n° 1, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
supprimer le troisième alinéa de l'article 1er.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement vise à supprimer la disposition introduite par
l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, qui précise que « la présente loi a
pour objet de poursuivre, avec les départements d'outre-mer et
Saint-Pierre-et-Miquelon, la rénovation du pacte qui unit l'outre-mer à la
République ».
Nous avons considéré que cette notion de « pacte » n'avait pas de
signification juridique. En outre, ce terme pourrait rappeler, certes,
involontairement, mais néanmoins fâcheusement, le « pacte colonial », qui
désignait, aux xviiie et xixe siècles, le système réservant à la métropole le
marché colonial, ce qui irait manifestement à l'encontre des intentions des
rédacteurs du texte. Nous tenions tout de même à en faire part au Sénat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Il a tenu à introduire dans la loi un objectif à ses yeux essentiel, qu'il est
donc important de mentionner dès l'article 1er. C'est cet article qui donne un
cap à ce texte et qui en fait véritablement un projet de loi d'orientation. La
rénovation du pacte républicain est, tout au long de la législature, en effet,
l'un des fils conducteurs de l'action de ce gouvernement. Ce pacte, à la fois
de développement et de solidarité, entre la République et l'outre-mer, me
paraît avoir toute sa place dans le texte.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Robert Bret.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
L'article 1er est, à nos yeux, significatif de l'évolution positive apportée
au texte du projet de loi lors de la nouvelle lecture à l'Assemblée nationale.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez déposé, au nom du Gouvernement, un
amendement qui marque la volonté de donner aux départements d'outre-mer une
perspective d'évolution institutionnelle réelle.
Le groupe communiste républicain et citoyen ne peut que soutenir cette
ouverture permettant, enfin, une réflexion sur une évolution statutaire
différenciée de chacun des DOM dans le respect de leur diversité, d'autant plus
que nous avions fortement reproché à votre prédécesseur, M. Jean-Jacques
Queyranne, le manque d'ambition en matière d'évolution institutionnelle du
projet de loi qu'il présentait en première lecture. Ce texte était bien loin,
en effet, des enjeux et des attentes exprimées par les populations des DOM.
Leurs aspirations à la responsabilisation et à l'émancipation sont réelles et
s'affirment toujours plus fortement.
Il y a urgence - nous l'avions déjà souligné lors du précédent débat - à
trouver des réponses novatrices pour résoudre la très grave crise structurelle
que connaissent ces régions aujourd'hui.
La rénovation du « pacte » - même s'il eût été plus judicieux d'employer un
autre mot - unissant l'outre-mer à la République que vous avez proposée dans
votre amendement à l'article 1er est un premier pas important dans cette
voie.
Les populations domiennes doivent avoir les moyens de définir elles-mêmes les
nouvelles formes d'un développement durable et autocentré indispensable pour
l'avenir de leurs territoires, et ce dans la diversité des approches et des
situations locales, vous l'avez rappelé il y a un instant, monsieur le
secrétaire d'Etat.
L'affirmation du principe de la consultation des populations sur les
évolutions statutaires contenue dans cet amendement est également intéressante
dans cette optique. Malheureusement, la commission des lois du Sénat a proposé
des amendements à l'article 1er modifié qui vident l'amendement gouvernemental
d'une grande partie de son apport.
Notre groupe ne votera pas ces amendements déposés par la commission des lois
du Sénat, qui, de notre point de vue, vont à l'encontre des aspirations
formulées par la majorité des populations des départements d'outre-mer.
Il faudrait, au contraire, pour répondre à ces attentes, aller plus loin et
permettre que soit précisé le contenu des possibilités d'évolution.
En effet, si nous soutenons le contenu de l'article 1er tel qu'il a été
modifié par l'Assemblée nationale, il y reste néanmoins des imprécisions et un
certain flou qui devront être rapidement corrigés au moyen de propositions
concrètes.
Je me situe, vous l'aurez compris, dans la perspective d'une réinsertion de la
totalité de votre amendement, monsieur le secrétaire d'Etat, lors du prochain
passage du texte à l'Assemblée nationale. Nous sommes convaincus que cela est
possible et nous prendrons, en tant que parlementaires communistes, dans la
prochaine période, toutes les initiatives pour que la parole et les
propositions des populations domiennes soient entendues sur ce sujet. Je pense,
monsieur le secrétaire d'Etat, que vous partagez cette ambition et vous pouvez
compter sur notre entier soutien dans cette tâche.
(Applaudissements sur les
travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Patrice Gélard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
Je prends la parole en cet instant pour me rallier aux propositions de notre
rapporteur. Je m'y rallie d'autant plus volontiers que les termes utilisés dans
le débat qui précède me paraissent d'une imprécision juridique gravissime.
Tout d'abord, le mot « pacte » que vous avez utilisé, monsieur le secrétaire
d'Etat, est tout à fait inadapté. D'une part, il rappelle fâcheusement le pacte
colonial et, d'autre part, il rappelle non moins fâcheusement les fameux «
pactes » que Gorbatchev avait voulu mettre en place avec les collectivités qui
constituaient l'URSS. C'est un mauvais terme qui n'a pas sa place dans les
relations qui unissent à l'heure actuelle la métropole et les départements
d'outre-mer.
Il est un second terme sur lequel je ne suis pas d'accord : le « statut » ne
correspond pas à la situation. Tout d'abord, un statut s'oppose à la loi ; un
statut, c'est le statut de la fonction publique, c'est le statut d'une
entreprise anonyme ou d'une association ; ce ne peut être le texte qui régit
les départements d'outre-mer, c'est trop médiocre. C'est la raison pour
laquelle je pense que la réflexion sur le texte rédigé par l'Assemblée
nationale a été bâclée.
Je me rallie donc naturellement à ce que propose M. le rapporteur de la
commission des lois.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Les deux amendements suivants sont présentés par M. Balarello, au nom de la
commission.
L'amendement n° 2 tend à rédiger comme suit la première phrase du dernier
alinéa de l'article 1er : « Dans le cadre de la République, la Guadeloupe, la
Guyane, la Martinique et la Réunion ont la possibilité d'évoluer à l'avenir
vers des organisations institutionnelles qui leur soient propres. »
L'amendement n° 3 vise à supprimer les deuxième et troisième phrases du
dernier alinéa de l'article 1er.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 2 et
3.
M. José Balarello,
rapporteur.
A la simple lecture de l'amendement n° 2, on comprend qu'il
s'agit d'ouvrir la possibilité pour la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et
la Réunion d'évoluer à l'avenir vers des organisations institutionnelles qui
leur soient propres dans le cadre de la République.
Quant à l'amendement n° 3, il s'agit d'une coordination avec la suppression du
congrès proposée à l'article 39.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 2 et 3 ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Les deux alinéas que ces amendements tendent à
supprimer sont, à mes yeux, des pièces essentielles de cette loi d'orientation
qui ont été apportées dans le débat parlementaire par un amendement déposé par
le Gouvernement en nouvelle lecture, à l'Assemblée nationale.
Il s'agit d'affirmer le principe d'une évolution différenciée et d'une
évolution choisie par les départements d'outre-mer. Il s'agit également - c'est
en quoi je suis un peu surpris car rien, dans l'intervention de M. le
rapporteur, ne préparait à de tels amendements - de distinguer entre, d'une
part, les départements français d'Amérique, où l'aspiration à une évolution
statutaire existe depuis de nombreuses années et, d'autre part, l'île de la
Réunion, où la demande de maintien dans le droit commun fait en effet l'objet
d'un consensus qui, sur ce point au moins, ne s'est pas démenti tout au long
des débats.
Il y a donc quelque contradiction à reconnaître, comme M. le rapporteur tout à
l'heure, et je suis d'accord avec lui, ainsi que le Gouvernement, qu'il s'agit
de mettre au point des évolutions sur mesure pour les départements d'outre-mer
et, dans le même temps, alors que cet article tend à affirmer la possibilité
d'une évolution différenciée, à faire disparaître cette mention.
Alors que l'on a indiqué à plusieurs reprises - et encore vous-même, monsieur
le vice-président, tout à l'heure - que la consultation des populations est
essentielle lorsque l'on veut engager une évolution statutaire, il me paraît
également dommage que la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale soit
supprimée par l'amendement n° 3. Là encore, si l'on veut une évolution
différenciée et une évolution choisie, la rédaction actuelle me paraît apporter
toutes les garanties.
Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. José Balarello,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
La commission des lois s'est rendue dans tous les
départements d'outre-mer, à l'occasion de deux voyages. Nous sommes allés
d'abord aux Antilles, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy et en Guyane, puis,
quelques mois plus tard, à la Réunion, profitant de cette mission pour nous
rendre à Mayotte puisque j'étais le rapporteur du texte sur l'évolution
institutionnelle de cette collectivité territoriale.
Grâce à ces missions, nous nous sommes rendu compte que l'on ne pouvait
adopter une structure commune à tous les départements d'outre-mer et qu'il
fallait, selon la formulation que j'avais employée devant M. Queyranne en
commission des lois, « faire du cousu main ».
L'évolution du projet de loi le montre. Dans l'article 1er, il n'y avait rien
sur ce point dans le texte initial, et il n'y avait toujours rien après le
passage en première lecture à l'Assemblée nationale. C'est à la suite du
passage devant le Sénat, et grâce à l'intervention de plusieurs de nos
collègues, de votre rapporteur et du président de la commission des lois, que
l'Assemblée nationale et le Gouvernement ont pris en compte ce désir
d'évolution institutionnelle en introduisant un amendement à l'article 1er.
Il faut cependant avouer que la référence au pacte, M. Gélard l'a dit beaucoup
mieux que moi, est totalement inadaptée. Il y a des références qu'il vaut mieux
éviter et, de surcroît, du point de vue juridique, celle-ci ne signifie
absolument rien. C'est la raison pour laquelle la commission des lois a «
bâtonné », si je puis utiliser cette expression qu'emploient souvent les
juristes, le terme de « pacte ».
Notre amendement n° 2 le précise bien : « Dans le cadre de la République, la
Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et la Réunion ont la possibilité d'évoluer
à l'avenir vers des organisations institutionnelles qui leur soient propres. »
Cela signifie
ipso facto
que, si la Réunion ne veut pas évoluer ou
souhaite maintenir ses institutions, elle est bien évidemment libre de le
faire.
Je crois donc que nous faisons très clairement référence à l'évolution
institutionnelle dans l'amendement n° 2.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je tiens une nouvelle fois à circonscrire les
désaccords, du moins à ne pas en aggraver la portée, et à répondre aussi à M.
le vice-président de la commission des lois qui craignait tout à l'heure que je
n'aie pas perçu la volonté réformatrice du Sénat s'agissant du statut des
départements d'outre-mer.
M. Pierre Fauchon,
vice-président de la commission.
Vous avez des excuses, monsieur le
secrétaire d'Etat !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Effectivement, puisque je n'étais pas encore membre du
Gouvernement lorsque le Sénat a examiné ce texte en première lecture.
M. Pierre Fauchon,
vice-président de la commission.
C'est pourquoi je disais que vous aviez
des excuses !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
J'ai cependant pris connaissance de vos interventions,
notamment de celle du président de la commission, M. Jacques Larché, à qui je
souhaite un prompt rétablissement afin qu'il puisse reprendre ses travaux à vos
côtés.
Monsieur le rapporteur, en fait, vous amputez la rédaction actuelle et vous
proposez une nouvelle rédaction. Certes, vous ne niez pas aux départements
d'outre-mer la possibilité d'une évolution. Je vous donne acte. D'ailleurs, au
sein de toutes les forces politiques de notre pays, de l'Assemblée nationale et
du Sénat, s'exprime depuis des mois sinon des années une volonté convergente,
qui se manifeste très clairement ce soir.
Nous allons plus loin, en proposant que cette évolution soit différenciée. A
ce titre, il est nécessaire, si l'on veut être précis et donner une véritable
orientation à ce texte, de différencier les départements français d'Amérique et
la Réunion. A défaut, on crée parfois la confusion, voire la peur, qui n'est
pas la meilleure conseillère s'agissant de sujets aussi essentiels.
Par ailleurs, votre proposition ne reprend pas l'idée que cette évolution doit
être choisie. En effet, votre rédaction ne fait pas état de la consultation des
populations, dont l'Assemblée nationale, en reprenant l'amendement du
Gouvernement, a souhaité avec force poser le principe.
Encore une fois, concevez qu'il y a là quelques différences qui ne me
permettent pas d'adhérer totalement aux amendements que vous proposez.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
M. le président.
« Art. 2. - I. - Au chapitre II du titre V du livre VII du code de la sécurité
sociale, il est inséré, après l'article L. 752-3, un article L. 752-3-1 ainsi
rédigé :
«
Art. L. 752-3-1
. - Dans les départements mentionnés à l'article L.
751-1, les entreprises sont exonérées du paiement des cotisations à leur charge
au titre de la législation de sécurité sociale, dans les conditions suivantes
:
«
I. -
L'exonération est égale à 100 % du montant des cotisations
patronales dans la limite d'un montant de rémunération égal au salaire minimum
de croissance majoré de 30 %.
«
II. -
Cette exonération est applicable aux cotisations afférentes aux
salaires et rémunérations des salariés employés par :
« 1° Les entreprises, employeurs et organismes mentionnés à l'article L. 131-2
du code du travail, occupant dix salariés au plus, dénombrés selon les
dispositions de l'article L. 421-2 du code du travail. Si avant le 31 décembre
2001 l'effectif vient à dépasser le seuil de dix salariés, le bénéfice intégral
de l'exonération est maintenu dans la limite de dix salariés jusqu'au 31
décembre 2002 ; puis son montant est affecté d'un coefficient de 80 % en 2003,
60 % en 2004, 40 % en 2005 et 20 % en 2006. Si après le 31 décembre 2001 au
cours d'une année civile l'effectif vient à dépasser le seuil de dix salariés,
le bénéfice intégral de l'exonération est maintenu, dans la limite de dix
salariés, pendant un an ; puis son montant est affecté d'un coefficient de 80 %
la deuxième année, 60 % la troisième, 40 % la quatrième et 20 % la cinquième.
Un décret fixe les conditions dans lesquelles le bénéfice de l'exonération est
acquis au cas où l'effectif d'une entreprise passe au-dessous de onze
salariés.
« Dans le cas d'entreprises comptant plusieurs établissements, la condition
d'effectif s'apprécie en prenant en compte l'effectif total employé par
l'ensemble des établissements de l'entreprise dans le département.
« Les dispositions du présent article s'appliquent aux entreprises artisanales
immatriculées au répertoire des métiers ;
« 2° Les entreprises, quel que soit leur effectif, des secteurs de
l'industrie, du tourisme, de l'hôtellerie, de la restauration, de la presse, de
la production audiovisuelle, des énergies renouvelables, des nouvelles
technologies de l'information et de la communication, de la pêche, de la
conchyliculture, de l'aquaculture et de l'agriculture, à l'exclusion des
entreprises publiques et des établissements publics mentionnés à l'article L.
131-2 du code du travail.
« Ces dispositions sont également applicables au secteur du bâtiment et des
travaux publics, l'exonération étant égale à 50 % du taux de l'exonération
prévue au I.
«
III. -
Par dérogation aux dispositions des articles L. 241-13-1 et L.
711-13-1, les entreprises mentionnées au II qui remplissent les conditions
prévues aux articles 19 et 21 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative
à la réduction négociée du temps de travail bénéficient en outre d'un
allégement des cotisations dues par elles au titre de la législation de
sécurité sociale dont le montant par salarié est fixé par décret. Le montant
total de cet allégement, cumulé avec les exonérations prévues au I, ne peut
excéder le total des cotisations patronales de sécurité sociale dues par
l'entreprise ou l'établissement. Les entreprises bénéficient d'un droit
d'option entre l'exonération prévue au présent article et les allégements
prévus à l'article 3 de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et
d'incitation relative à la réduction du temps de travail et aux articles 20, 21
et 23 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 précitée.
«
IV. -
Lorsque dans une même entreprise ou un même établissement sont
exercées plusieurs activités, l'exonération est applicable au titre des
salariés employés dans chacune des activités relevant des secteurs visés au 2°
du II, au taux correspondant à cette activité.
« Les exonérations et allégements prévus par le présent article ne peuvent
être cumulés avec une autre exonération totale ou partielle de cotisations
patronales de sécurité sociale.
«
IV
bis. - Toute condamnation pénale de l'entreprise ou du chef
d'entreprise pour fraude fiscale, travail dissimulé, marchandage ou prêt
illicite de main-d'oeuvre, en application des articles L. 152-3, L. 152-3-1, L.
362-3, L. 362-4, L. 362-5 et L. 362-6 du code du travail, entraîne la
suppression des allégements et exonérations de cotisations sociales prévus au
présent article.
«
V. -
Un décret en Conseil d'Etat détermine, en tant que de besoin,
les modalités d'application du présent article. »
« II et III. -
Supprimés.
»
Par amendement n° 4 rectifié, M. Balarello, au nom de la commission, propose
:
A. - A la fin du I du texte présenté par le I de cet article pour l'article L.
752-3-1 du code de la sécurité sociale, de remplacer le pourcentage : « 30 % »
par le pourcentage : « 50 % » ;
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, d'insérer
après le I un paragraphe ainsi rédigé :
« I
bis.
- Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité
sociale résultant de la majoration de la limite fixée au I de l'article L.
752-3-1 du code de la sécurité sociale sont compensées, à due concurrence, par
la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575
A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement reprend le texte d'un amendement présenté en
première lecture par M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur pour avis de la
commission des affaires sociales, tendant à porter la limite de l'exonération
de cotisations sociales patronales prévue à l'article 2 de 1,3 SMIC à 1,5 SMIC,
afin de lui donner une plus grande efficacité.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
J'ai eu l'occasion, à plusieurs reprises, de dire quel
effort nouveau en direction de l'économie des départements d'outre-mer
représentait pour la nation le dispositif d'exonération des cotisations
patronales de sécurité sociale. Il représente, en année pleine, un coût de 3,5
milliards de francs. Il s'agit, je le réaffirme solennellement, d'un effort
sans précédent en matière de réduction du coût du travail dans les départements
d'outre-mer, effort quatre fois plus important qu'actuellement.
Je comprends bien le souci du Sénat de ne pas s'arrêter en chemin. Toutefois,
j'ai le sentiment qu'en portant le seuil d'exonération à 1,3 SMIC le
Gouvernement, avec l'accord de l'Assemblée nationale, a fait un pas décisif.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. José Balarello,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
L'un de nos collègues a parlé tout à l'heure d'une étude
d'impact s'agissant de la bidépartementalisation. Je pense que, du point de vue
économique, il eût été important que le Gouvernement réalise une étude d'impact
approfondie, fasse le compte des indemnités de chômage qu'il paie, des RMI
qu'il verse, et, en regard, examine combien de créations d'emplois pouvaient
être espérées de l'application de la mesure qui a été proposée.
J'ajouterai, monsieur le secrétaire d'Etat, que tant l'Assemblée nationale que
le Sénat ont supprimé, sur la proposition du Gouvernement, l'indemnité dite
d'éloignement. Je crois que cela représente une ressource nouvelle importante
pour développer l'emploi dans les départements d'outre-mer, ce qui est vital,
car nous savons tous que si nous ne faisons pas baisser le taux de chômage nous
aurons, dans les cinq ans à venir, des problèmes graves à régler dans les
départements d'outre-mer. Donc, la priorité des priorités, c'est la baisse du
chômage dans les départements d'outre-mer.
C'est la raison pour laquelle nous maintenons cet amendement qui vise, lui
aussi, à résorber le chômage.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4 rectifié, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 5, M. Balarello, au nom de la commission, propose :
A. - Après le deuxième alinéa (1°) du II du texte présenté par le I de
l'article 2 pour l'article L. 752-3-1 du code de la sécurité sociale, d'insérer
un alinéa ainsi rédigé :
« Cette exonération est également applicable aux entreprises, employeurs et
organismes mentionnés à l'article L. 131-2 du code du travail, occupant de 11 à
20 salariés dénombrés selon les dispositions de l'article L. 421-2 du code du
travail. Mais, dans ce cas, elle ne concerne que les cotisations patronales
afférentes aux dix salaires ou rémunérations les moins élevés. Lorsque pendant
une année civile, l'effectif vient à dépasser le seuil de 20 salariés, le
bénéfice de l'exonération est maintenu dans les conditions fixées à l'alinéa
précédent. »
B. - En conséquence, de rétablir le II de cet article dans la rédaction
suivante :
« II. - Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale
résultant du troisième alinéa du II de l'article L. 752-3-1 du code de la
sécurité sociale sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe
additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Il s'agit de rétablir le texte qui avait été adopté par le
Sénat en première lecture et qui vise à étendre le bénéfice de l'exonération de
cotisations patronales aux dix premières rémunérations des entreprises de vingt
salariés au plus, au lieu de dix salariés comme le prévoit le projet de loi.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Il s'agit d'un article important, qui a déjà été
examiné en première lecture. Comme M. Jean-Jack Queyranne avait alors eu
l'occasion de vous dire, cet amendement ne supprime pas l'effet de seuil, il le
repousse et le place à vingt et un salariés, même s'il est vrai que l'impact
est moindre proportionnellement. D'ailleurs, cette extension n'aurait sans
doute pas toutes les vertus qu'on lui prête sur l'emploi local. En effet, cette
exonération de charges sociales permettra notamment à une partie du travail
dissimulé de rejoindre les rangs du travail légal. Or, la plupart des
entreprises où l'on observe ce recours au travail dissimulé sont de petites
entreprises.
Enfin, le coût de cette extension - et nous ne pouvons écarter cet argument -
serait supérieur à 400 millions de francs, sans contrepartie évidente en termes
de création d'emplois.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement émet un avis
défavorable, en précisant, une fois encore, que le coût budgétaire du
dispositif prévu sera quatre fois plus important qu'actuellement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 6, M. Balarello, au nom de la commission, propose :
A. - Dans l'avant-dernier alinéa (2°) du II du texte présenté par le I de
l'article 2 pour l'article L. 752-3-1 du code de la sécurité sociale, après les
mots : « production audiovisuelle, », d'insérer les mots : « du bâtiment et des
travaux publics, de la formation professionnelle, des transports régionaux
aériens et maritimes ayant leur siège et leur établissement principal dans le
département, » ;
B. - En conséquence, de supprimer le dernier alinéa du II du texte présenté
par le I de cet article pour l'article L. 752-3-1 du code de la sécurité
sociale.
C. - En conséquence, de rétablir le III de cet article dans la rédaction
suivante :
III. - Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale
résultant de l'extension aux secteurs du bâtiment et travaux publics, de la
formation professionnelle et des transports régionaux aériens et maritimes, des
exonérations prévues au II de l'article L. 752-3-1 du code de la sécurité
sociale sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe
additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Il s'agit, là encore, de préserver l'emploi. Cet amendement
vise à compléter la liste des secteurs d'activités pouvant bénéficier de
l'exonération de charges sociales prévue par l'article 2, quel que soit
l'effectif des entreprises concernées, en y ajoutant le bâtiment et les travaux
publics, à taux plein, ainsi que la formation professionnelle et les transports
régionaux aériens et maritimes.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement s'est montré tout à fait ouvert aux
propositions des parlementaires visant à élargir le périmètre de ce dispositif
d'exonération des cotisations patronales de sécurité sociale. Je l'ai dit tout
à l'heure : c'est à ce titre que nous avons retenu le secteur des nouvelles
technologies - M. Claude Lise avait insisté sur ce point - et le secteur des
énergies renouvelables, à la demande de votre collègue M. Vergès, qui y attache
beaucoup d'importance, et à juste titre, car les énergies renouvelables sont
particulièrement essentielles dans les départements d'outre-mer.
Par ailleurs, le Gouvernement considère qu'aller au-delà de l'extension
proposée pourrait contrevenir à des règles communautaires. L'argument essentiel
que nous avons utilisé pour définir ce périmètre est bien le caractère exposé
des secteurs auxquels cette exonération s'applique.
Aussi, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 3
M. le président.
« Art. 3. - I. -
Non modifié.
« II. - Les marins propriétaires embarqués et, sans préjudice de l'article 2,
les marins-pêcheurs, exerçant leurs activités dans les départements mentionnés
à l'article L. 751-1 du code de la sécurité sociale, bénéficient dans les mêmes
limites d'une réduction de moitié du montant des cotisations et contributions
visées ci-dessus ; cette réduction est appliquée par les organismes dont ils
relèvent.
« Dès lors que l'état de catastrophe naturelle est reconnu sur le territoire
d'un département d'outre-mer, ou sur une portion de ce dit territoire, par
arrêté constatant notamment l'effet destructeur du choc mécanique d'une houle
cyclonique, les marins-pêcheurs propriétaires embarqués ayant subi un préjudice
matériel découlant de cette catastrophe naturelle peuvent bénéficier soit d'un
report de trois mois pour le paiement des arriérés de cotisations et
contributions visées ci-dessus pour ceux qui ne sont pas à jour de paiement de
leur rôle d'équipage, soit d'une exonération égale à 100 % des cotisations
d'allocations familiales, d'assurance maladie et d'assurance vieillesse des
employeurs et travailleurs indépendants jusqu'au 31 décembre de l'année civile
au cours de laquelle la catastrophe naturelle a eu lieu, pour ceux qui sont à
jour de leur paiement de rôle d'équipage.
« III. -
Non modifié
.
« IV à VII. -
Supprimés.
« VIII. - Les pertes de recettes pour les organismes collectant les
cotisations d'allocations familiales, d'assurance maladie et d'assurance
vieillesse des marins-pêcheurs propriétaires embarqués, résultant de
l'exonération en cas de catastrophe naturelle prévue au deuxième alinéa du II
sont compensées, à due concurrence, par la création d'un prélèvement sur les
sommes engagées dans les départements d'outre-mer dans les courses et jeux.
»
Par amendement n° 39, le Gouvernement propose, dans le deuxième alinéa du II
de cet article, de remplacer les mots : « jusqu'au 31 décembre de l'année
civile au cours de laquelle la catastrophe naturelle a eu lieu » par les mots :
« pendant les six mois suivant la catastrophe naturelle ».
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Un amendement adopté à l'Assemblée nationale vise
notamment à exonérer les pêcheurs du paiement des cotisations sociales en cas
de catastrophe naturelle.
Toutefois, la référence au 31 décembre de l'année au cours de laquelle s'est
produite la catastrophe naturelle aboutirait à des allégements très variables
selon les départements et les périodes cycloniques. En effet, si la date de la
catastrophe naturelle est proche de la fin de l'année, la durée de
l'exonération peut se révéler trop courte pour permettre d'aider véritablement
les bénéficiaires.
C'est pourquoi il est proposé de retenir une période de six mois suivant la
catastrophe naturelle, fait générateur de cette exonération. C'est, me
semble-t-il, une mesure de bon sens.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission.
M. José Balarello,
rapporteur.
La commission émet un avis favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 39, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 40, le Gouvernement propose de supprimer le VIII de
l'article 3.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement vise à lever le gage correspondant à
l'amendement précédent.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 40, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
pour coordination
M. le président.
« Art. 4. - L'article L. 762-4 du code rural est ainsi modifié :
« 1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les exploitants agricoles exerçant leur activité sur des exploitations de
moins de quarante hectares pondérés sont exonérés des cotisations relatives aux
prestations familiales, à l'assurance maladie, invalidité, maternité et à
l'assurance vieillesse dans des conditions fixées par décret. » ;
« 2° Le deuxième alinéa est supprimé. »
- (Adopté.)
Article 5
M. le président.
« Art. 5. - I. - Les entreprises installées et exerçant leur activité au 1er
janvier 2000 dans les départements d'outre-mer peuvent demander, dans un délai
de douze mois à compter de la publication de la présente loi, aux caisses de
sécurité sociale compétentes de leur département, le sursis à poursuites pour
le règlement de leurs créances, antérieures au 1er janvier 2000, relatives aux
cotisations patronales de sécurité sociale, ainsi qu'aux pénalités et
majorations de retard correspondantes.
« Les dispositions prévues au précédent alinéa sont applicables aux créances,
même déclarées et constatées après cette date, qu'elles aient fait l'objet ou
non de notifications ou mises en demeure, telles que prévues par le code de la
sécurité sociale et le code rural.
« Cette demande entraîne de plein droit une suspension de six mois des
poursuites afférentes auxdites créances ainsi que la suspension du calcul des
pénalités et majorations de retard durant cette période.
« II. - Durant ce délai de six mois, un plan d'apurement est signé entre
l'entreprise et les caisses compétentes. Sa durée est au maximum de sept ans.
Il peut comporter l'annulation des pénalités et majorations de retard. De plus,
un abandon partiel des créances constatées au 31 décembre 1999, dans la limite
de 50 %, peut être prononcé afin de tenir compte de la situation de
l'entreprise, garantir sa pérennité et le paiement ultérieur des cotisations.
Les modalités d'instruction des dossiers et les conditions dans lesquelles
intervient la décision sont fixées par voie réglementaire.
« Cet abandon partiel est subordonné au paiement effectif de la part salariale
des cotisations ou, à défaut, à la signature d'un échéancier de paiement d'une
durée maximale de deux ans.
« II
bis.
- Toute condamnation pénale de l'entreprise ou du chef
d'entreprise pour fraude fiscale, travail dissimulé, marchandage, prêt illicite
de main-d'oeuvre, en application des articles L. 152-3, L. 152-3-1, L. 362-3,
L. 362-4, L. 362-5 et L. 362-6 du code du travail, ou, après mise en demeure,
le non-respect de l'échéancier du plan ou le non-paiement des cotisations dues
postérieurement à la signature de ce plan entraîne la caducité du plan
d'apurement.
« III et IV. -
Non modifiés.
« V. - Les dispositions du présent article s'appliquent aux entrepreneurs et
travailleurs indépendants, y compris dans les secteurs de l'agriculture et de
la pêche, pour les contributions et les cotisations obligatoires de sécurité
sociale.
« Par dérogation à l'alinéa ci-dessus, les cotisations d'assurance vieillesse
dues au titre des exercices antérieurs à 1996 à raison de l'exercice de l'une
des professions visées aux articles L. 622-3, L. 622-4 et L. 622-5 du code de
la sécurité sociale et à la caisse mentionnée à l'article L. 723-1 du même code
peuvent, à raison de leur ancienneté, être annulées, sous réserve du respect
d'un plan d'apurement visé au II. Les périodes au titre desquelles cet abandon
intervient ne sont pas prises en compte pour le calcul des prestations servies
par ces régimes.
« De même, en cas d'abandon partiel de créances en matière d'assurance
vieillesse, dans les conditions prévues au II, les droits sont minorés dans une
proportion identique.
« Les modalités d'application du présent article sont déterminées, en tant que
de besoin, par décret en Conseil d'Etat.
« VI. -
Supprimé.
« VII. - Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale
résultant du II sont compensées par le relèvement, à due concurrence, des
droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 7, M. Balarello, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit le II de cet article :
« II. - Durant ce délai de six mois, un plan d'apurement peut être signé entre
l'entreprise et les caisses compétentes afin de tenir compte de la situation de
l'entreprise, garantir sa pérennité et le paiement ultérieur des cotisations.
Sa durée est au maximum de sept ans. Il peut comporter l'annulation des
pénalités et majorations de retard applicables aux créances constatées au 1er
janvier 2000. Les modalités d'instruction des dossiers et les conditions dans
lesquelles intervient la décision sont fixées par voie réglementaire. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement vise au rétablissement du texte adopté par le
Sénat en première lecture : il s'agit de prévoir la possibilité, et non
l'obligation, pour les entreprises de conduire un plan d'apurement avec les
caisses de sécurité sociale.
Nous avons d'ailleurs constaté, en lisant le compte rendu des débats à
l'Assemblée nationale, que M. Jérôme Lambert, rapporteur de la commission des
lois, partage notre point de vue dans la mesure où il considére que le droit
des contrats s'oppose à une telle obligation.
J'ajoute que, s'agissant d'entreprises non viables, la signature obligatoire
d'un tel plan n'aboutirait qu'à retarder artificiellement une mort annoncée.
Par ailleurs, cet amendement tend à supprimer à nouveau, comme le Sénat l'a
fait en première lecture, la possibilité d'un abandon partiel de créances. Vous
avez précisé tout à l'heure, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il s'agissait
bien d'un abandon partiel. J'observe néanmoins que la possibilité d'un abandon
des créances sociales risque de constituer un précédent lourd de conséquences,
en exerçant un « effet d'appel », les entreprises renonçant purement et
simplement à payer leurs cotisations sociales, mais aussi en risquant
d'alimenter des anticipations de futures « amnisties sociales ».
En outre, une telle disposition instituerait incontestablement une inégalité à
l'égard des entreprises qui, elles, ont fait l'effort de payer leurs
cotisations.
Nous nous demandons d'ailleurs s'il n'y a pas là un risque
d'inconstitutionnalité dans la mesure où cette rédaction entraînerait une
inégalité de traitement entre les entreprises métropolitaines et les
entreprises des départements d'outre-mer, inégalité qui peut difficilement être
justifiée par une différence de situation.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
Je me suis inscrit tout à l'heure en faux contre cette idée d'amnistie
sociale, et je regrette, monsieur le rapporteur, de ne pas avoir été entendu
sur ce point.
Je ne rappellerai pas quelles sont les difficultés spécifiques des entreprises
de l'outre-mer, car nous les avons évoquées à plusieurs reprises au cours de ce
débat. Je redirai simplement que la disposition que vous entendez supprimer
permettrait d'assainir la situation financière des entreprises des départements
d'outre-mer, et ce en cohérence avec l'entrée en vigueur du dispositif
d'exonération de l'article 2 de la loi d'orientation, qui prévoit des
allégements de charges.
Il est donc important, à mes yeux, de maintenir la possibilité d'abandonner
ces créances sociales à hauteur de 50 %. C'est non pas un effacement intégral
ou une amnistie, mais un apurement partiel qui est clairement plafonné par la
loi.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 8, M. Balarello, au nom de la commission, propose, après le
II de l'article 5, d'insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« II
bis
A. - Le plan d'apurement peut être suspendu pour une durée de
trois à six mois, et prorogé d'autant, si l'entreprise peut se prévaloir d'un
préjudice matériel dû à un aléa climatique, suite à la publication d'un arrêté
portant constatation de l'état de catastrophe naturelle sur le territoire d'un
département d'outre-mer ou sur une portion de ce dit territoire dans lequel
elle est implantée. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement vise à maintenir la suppression de la
référence à la force majeure, décidée par l'Assemblée nationale, tout en
conservant un tempérament à l'automaticité de la caducité du plan d'apurement
en cas de cyclone.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 9, M. Balarello, au nom de la commission, propose, dans le
II
bis
de l'article 5, après les mots : « fraude fiscale, », d'insérer
les mots : « en application de l'article 1741 du code général des impôts, ou
pour ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement vise à préciser la notion de fraude fiscale en
visant l'article 1741 du code général des impôts qui s'y rapporte.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, accepté par le Gourvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 10, M. Balarello, au nom de la commission, propose, dans la
première phrase du deuxième alinéa du V de l'article 5, après les mots : « du
même code », d'insérer les mots : « , ainsi que les pénalités et majorations de
retard correspondantes, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement vise à assurer la cohérence avec le régime
applicable aux entreprises, lequel prévoit que le plan d'apurement peut
comporter l'annulation des pénalités et majorations de retard applicables à ces
créances.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement émet un avis défavorable, et ce pour
les raisons qu'il a déjà évoquées tout à l'heure.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 41, le Gouvernement propose de supprimer le VII de l'article
5.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement vise à lever le gage introduit en
nouvelle lecture à l'Assemblée nationale.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 41, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Article 6
M. le président.
« Art. 6. - I. - Les entreprises industrielles, commerciales, artisanales,
agricoles, ou du secteur de la pêche, ainsi que les contribuables exerçant des
professions non commerciales installés et exerçant leur activité au 1er janvier
2000 dans un département d'outre-mer peuvent demander, dans un délai de douze
mois à compter de la publication de la présente loi, l'adoption d'un plan
d'apurement de leurs dettes fiscales au 31 décembre 1999.
« Les précédentes dispositions s'appliquent aux dettes fiscales antérieures au
31 décembre 1999, même déclarées et constatées au-delà du 1er janvier 2000, que
celles-ci aient fait l'objet ou non de l'établissement de rôles, de
notifications, d'avis à tiers détenteur.
« Pendant une période de six mois à compter du dépôt de la demande, le sursis
de paiement de ces dettes est de droit et les mesures de recouvrement forcé
sont suspendues. Cette suspension des poursuites est accompagnée d'une
suspension du calcul des majorations et intérêts de retard pendant la période
mentionnée à l'alinéa précédent.
« II. - Si la demande du contribuable est acceptée, le plan d'apurement est
signé dans le délai de six mois mentionné au I. Il est d'une durée maximum de
sept ans. Sauf mauvaise foi, le contribuable peut bénéficier de remises totales
ou partielles de ses impositions directes, y compris les majorations et
intérêts de retard, afin de tenir compte de la situation de l'entreprise, de
garantir sa pérennité et le respect ultérieur de ses obligations fiscales.
« En cas de signature d'un plan d'apurement, l'entreprise qui a fait l'objet
d'une taxation d'office pourra bénéficier d'un réexamen de sa situation en vue
d'une imposition sur des bases réelles.
« Le plan d'apurement peut être suspendu pour une durée de trois à six mois,
et prorogé d'autant, si l'entreprise peut se prévaloir d'un préjudice matériel
dû à l'effet d'un aléa climatique, suite à la publication d'un arrêté portant
constatation de l'état de catastrophe naturelle sur le territoire d'un
département d'outre-mer ou sur une portion de ce dit territoire dans lequel
elle est implantée.
« III. -
Non modifié.
« IV. - Toute condamnation pénale de l'entreprise ou du chef d'entreprise pour
travail dissimulé, marchandage, prêt illicite de main-d'oeuvre ou fraude
fiscale, en application des articles L. 152-3, L. 152-3-1, L. 362-3, L. 362-4,
L. 362-5 et L. 362-6 du code du travail, ou, après mise en demeure, le
non-respect de l'échéancier du plan d'apurement ou le non-paiement des charges
fiscales dues postérieurement à la signature de ce plan entraîne la caducité du
plan d'apurement.
« V. - Ne peuvent bénéficier des dispositions du présent article les
entreprises ou les chefs d'entreprise ayant été condamnés pénalement, en
application des articles L. 152-3, L. 152-3-1, L. 362-3, L. 362-4, L. 362-5 et
L. 362-6 du code du travail, pour travail dissimulé, marchandage, prêt illicite
de main-d'oeuvre ou pour fraude fiscale au cours des cinq dernières années
précédant la publication de la présente loi.
« VI et VII. -
Non modifiés.
« VIII. -
Supprimé.
»
Par amendement n° 62 rectifié, le Gouvernement propose, après les mots : « 1er
janvier 2000 », de supprimer la fin du deuxième alinéa du I de cet article.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement est purement rédactionnel. Il a pour
objet d'éviter tout risque d'interprétation restrictive de la disposition de
l'article 6 permettant aux contribuables de demander, dans un délai de douze
mois à compter de la publication de la loi, l'adoption d'un plan d'apurement de
leur dette fiscale dont l'origine est antérieure au 31 décembre 1999, même si
la mise en recouvrement intervient postérieurement à cette date.
La rédaction actuelle de l'article 6 comporte une liste qui, en fait, ne
couvre pas l'ensemble du champ concerné. Ainsi, les dettes fiscales peuvent
donner lieu à l'établissement d'avis de mise en recouvrement, pour la TVA, par
exemple, et à des mesures de poursuites telles que les saisies immobilières ou
les ventes globales de fonds de commerce.
Il est donc préférable d'éviter une liste qui pourrait être interprétée comme
limitative et de retenir une rédaction qui soit à la fois plus claire et plus
concise.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
La rectification de cet amendement étant intervenue après la
réunion de la commission, cette dernière n'a pu se prononcer à cet égard.
Cependant, à titre personnel, j'émets un avis favorable sur ce texte.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 62 rectifié, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 11, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit le premier alinéa du II de l'article 6 :
« II. - Si la demande du contribuable est acceptée, le plan d'apurement est
signé dans le délai de six mois mentionné au I afin de tenir compte de la
situation de l'entreprise, de garantir sa pérennité et le respect ultérieur de
ses obligations fiscales. Il est d'une durée maximum de sept ans. Il peut
comporter l'annulation des majorations et intérêts de retard pour les dettes
constatées au 31 décembre 1999. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement vise à supprimer la possibilité de remises
partielles ou totales de créances fiscales.
En effet, l'article L. 247 du livre des procédures fiscales prévoit déjà la
possibilité de bénéficier de remises gracieuses, totales ou partielles -
d'ailleurs, la presse, ces derniers temps, n'a pas manqué d'évoquer des remises
gracieuses en matière de procédure fiscale... - en s'adressant au directeur des
services fiscaux, voire au directeur régional ou au ministre pour des montants
plus importants. Cette nouvelle mesure apparaît donc pour partie redondante.
Des plans d'apurement ou de règlement peuvent déjà être accordés par la
commission des chefs des services financiers qui réunit, sous la présidence du
trésorier-payeur général, le directeur des services fiscaux ainsi que le
directeur de l'URSSAF.
Par ailleurs, cette nouvelle rédaction permettrait de supprimer la référence
faite à la mauvaise foi, qui paraît trop imprécise. C'est pourquoi la
commission vous demande, mes chers collègues, d'adopter cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
En effet, le texte qui vous est soumis, mesdames, messieurs les sénateurs,
prévoit la possibilité d'accorder aux entreprises en difficulté des remises
totales ou partielles de leurs impositions directes, sauf en cas de mauvaise
foi.
Il vise par ailleurs à instaurer une procédure individualisée qui - j'insiste
sur ce point - devrait permettre de sauvegarder les emplois et donc de garantir
la pérennité de l'entreprise ainsi que le respect ultérieur de ses obligations
fiscales. C'est bien pour maintenir la portée de ce dispositif que je ne suis
pas favorable à la rédaction proposée par la commission.
Quant à la restriction apportée pour les redevables à l'encontre desquels la
mauvaise foi est établie, elle est fondée sur la nécessité de ne pas accorder
de remises gracieuses d'imposition à ceux qui ont connaissance des manquements
constatés ou qui ont voulu minorer leurs impôts. Voilà pourquoi le Gouvernement
n'est pas favorable à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté).
M. le président.
Par amendement n° 12, M. Balarello, au nom de la commission, propose, dans le
dernier alinéa du II de l'article 6, après les mots : « préjudice matériel dû à
», de supprimer les mots : « l'effet d' ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 13, M. Balarello, au nom de la commission, propose :
A. - Dans le IV de l'article 6, après les mots : « main-d'oeuvre », de
supprimer les mots : « ou fraude fiscale ».
B. - En conséquence, dans le paragraphe IV de cet article, après les mots : «
code du travail, », d'insérer les mots : « ou pour fraude fiscale en
application de l'article 1741 du code général des impôts ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de précision, qui vise à mieux
définir la fraude fiscale en faisant référence à l'article correspondant du
code général des impôts. C'est un texte de coordination avec l'amendement n° 9
présenté à l'article 5.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 14, M. Balarello, au nom de la commission, propose, dans le
V de l'article 6, après les mots : « fraude fiscale », d'insérer les mots : « ,
en application de l'article 1741 du code général des impôts, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Il s'agit également d'un amendement de coordination, monsieur
le président.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Article 7
M. le président.
« Art. 7. - I. - Il est créé, au chapitre II du titre III du livre VIII du
code du travail, une section 6 ainsi rédigée :
« Section 6
« Aide à la création d'emploi
«
Art. L. 832-7
. - Une prime à la création d'emploi financée par
l'Etat est instituée pour les entreprises dont l'un au moins des établissements
est implanté dans un département d'outre-mer, qui contribuent à l'accroissement
et à la diversification des débouchés commerciaux matériels et immatériels.
« Cette aide est versée aux entreprises agréées par le représentant de l'Etat
dans le département, qui, après avis du président du conseil régional, s'assure
que l'activité de l'entreprise présente un intérêt pour le développement
économique du département.
« L'aide est versée pendant dix ans, de façon dégressive, pour les créations
nettes d'emplois postérieures à la date de l'agrément. Son montant et les
conditions de sa dégressivité sont fixés par décret.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application du présent
article.
« II. -
Supprimé.
»
Par amendement n° 15, M. Balarello, au nom de la commission, propose :
A. - Après l'avant-dernier alinéa du texte présenté par le I de l'article 7
pour l'article L. 832-7 du code du travail, d'insérer un alinéa additionnel
ainsi rédigé :
« Pour les entreprises ainsi agréées, l'exonération prévue au I de l'article
L. 752-3-1 du code de la sécurité sociale est égale à 100 % du montant des
cotisations dans la limite du plafond de la sécurité sociale. »
B. - De rétablir le II de l'article 7 dans la rédaction suivante :
« II. - Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale
résultant de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 832-7 du code du travail
sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle
aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement vise à relever l'exonération de cotisations
sociales prévue à l'article 2 du présent projet de loi pour les entreprises
bénéficiant de la prime à l'exportation, l'exonération portant non plus sur 1,3
SMIC, mais sur le plafond de la sécurité sociale, soit un salaire de 14 700
francs brut par mois. Il s'agit toujours, conformément au voeu des commissions
saisies de ce texte - nous étions trois rapporteurs en première lecture - de
favoriser l'emploi.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Pour les raisons que j'ai déjà exposées tout à
l'heure, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ce texte.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7, ainsi modifié.
(L'article 7 est adopté.)
Article 7
bis
(pour coordination)
M. le président.
L'article 7
bis
a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Articles 7 quater et 7 quinquies
M. le président.
« Art. 7
quater.
- La compétence de la chambre de commerce, d'industrie
et des métiers de Saint-Pierre-et-Miquelon est étendue au secteur agricole.
« L'appellation de la chambre consulaire devient : chambre d'agriculture, de
commerce, d'industrie et des métiers.
« Une section agricole peut être créée après avis du conseil général.
« Toute autre section peut être créée après avis du conseil général.
« Un décret en Conseil d'Etat précisera les modalités d'application du présent
article. »
- (Adopté.)
« Art. 7
quinquies.
- Le Gouvernement transmet chaque année au
Parlement, à l'appui de la loi de finances, un rapport sur les conditions de
fixation des taux bancaires dans les départements d'outre-mer et sur les
raisons de leur écart par rapport aux taux pratiqués en métropole. »
- (Adopté.)
Article 9
M. le président.
« Art. 9. - Dans le chapitre II du titre III du livre VIII du code du travail,
il est inséré un article L. 832-6 ainsi rédigé :
«
Art. L. 832-6
. - Dans les départements d'outre-mer, les jeunes âgés
de dix-huit à trente ans ainsi que les bénéficiaires du dispositif prévu à
l'article L. 322-4-18 arrivant au terme de leur contrat peuvent bénéficier
d'une aide financière de l'Etat dénommée aide à un projet initiative-jeune, en
vue de faciliter la réalisation d'un projet professionnel.
« Cette aide bénéficie aux jeunes qui :
«
a)
Soit créent ou reprennent une entreprise à but lucratif dont le
siège et l'établissement principal sont situés dans un département d'outre-mer
et dont ils assurent la direction effective ; dans ce cas, l'aide de l'Etat
prend la forme d'un capital versé en deux ou plusieurs fractions ;
«
b)
Soit poursuivent, hors du département d'outre-mer dans lequel est
situé le centre de leurs intérêts ou pour ce qui concerne l'archipel de la
Guadeloupe, hors des îles des Saintes, de Marie-Galante, de la Désirade, de
Saint-Martin et de Saint-Barthélemy où est situé le centre de leurs intérêts,
une formation professionnelle proposée par l'Agence nationale pour l'insertion
et la promotion des travailleurs d'outre-mer ou par tout organisme agréé par
l'Etat ; dans ces cas, l'aide de l'Etat prend la forme d'une mensualité, dans
la limite de deux ans, à laquelle peut s'ajouter la prise en charge de frais
liés à la formation.
« La décision d'attribution de l'aide est prise par le représentant de l'Etat
dans le département, qui apprécie la réalité, la consistance et la viabilité du
projet.
« L'aide, dont le montant est fixé par décret, est versée à compter de la date
de la création effective de l'entreprise ou de celle du début de la
formation.
« Un même jeune peut bénéficier successivement des deux types d'aide si, après
avoir suivi une formation en mobilité, il crée une entreprise dans les
conditions fixées au présent article.
« L'aide en capital est exonérée de toutes charges sociales et fiscales.
L'aide mensuelle est soumise à cotisations sociales dans les conditions prévues
à l'article L. 962-3. Elle fait partie, le cas échéant, des ressources pour le
calcul du revenu minimum d'insertion ou d'autres prestations sociales.
« Toute personne qui aura frauduleusement bénéficié ou tenté de bénéficier de
l'aide afférente au projet initiative-jeune sera punie des peines prévues aux
articles 313-1 à 313-3 du code pénal.
« Les jeunes bénéficiant ou ayant bénéficié de l'aide à un projet
initiative-jeune et créant ou reprenant une entreprise à but lucratif dont le
siège et l'établissement principal sont situés dans un département d'outre-mer
et dont ils assurent la direction effective peuvent également bénéficier des
aides prévues à l'article L. 351-24.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent
article et notamment celles de la suspension ou de la suppression de l'aide,
ainsi que celles relatives au non-cumul de cette aide avec d'autres aides
publiques. »
Par amendement n° 42, le Gouvernement propose, dans le quatrième alinéa
(b)
du texte présenté par l'article 9 pour l'article L. 832-6 du code du
travail, après les mots : « par tout organisme agréé », d'insérer les mots : «
à cet effet ».
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Il s'agit d'un amendement de précision. En effet, les
organismes concernés par ces programmes initiative-jeune doivent avoir un
agrément spécifique, car il ne peut s'agir d'un agrément général qui aurait été
donné pour un objet plus large.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 42, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 50, le Gouvernement propose, dans le sixième alinéa du texte
présenté par l'article 9 pour l'article L. 832-6 du code du travail, après les
mots : « dont le montant », d'insérer le mot : « maximum ».
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
C'est un amendement de précision qui a pour objet de
permettre d'apporter une aide financière adaptée aux projets professionnels des
jeunes. De plus, l'aide ne peut dépasser - c'est une évidence - le niveau des
dépenses réelles qui sont occasionnées par ce projet. Aussi est-il nécessaire
de préciser que le montant de l'aide qui sera fixée par le décret est un
maximum et non pas un montant uniforme.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 50, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9, modifié.
(L'article 9 est adopté.)
Article 9 bis A
M. le président.
« Art. 9
bis
A. - Le chapitre II du titre III du livre VIII du code du
travail est complété par un article L. 832-7-1 ainsi rédigé :
«
Art. L. 832-7-1
. - Dans les départements d'outre-mer, le champ des
activités mentionnées au premier alinéa de l'article L. 322-4-18 s'étend aux
activités de coopération internationale régionale et notamment d'aide
humanitaire. »
Par amendement n° 16, M. Balarello, au nom de la commission, propose, dans le
texte présenté par cet article pour l'article L. 832-7-1 du code du travail, de
supprimer le mot : « notamment ».
Par amendement n° 17 rectifié, M. Balarello, au nom de la commission, propose
de compléter le texte présenté par l'article 9
bis
A pour l'article
L.832-7-1 du code du travail par le mot : « régionale. ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre ces deux amendements.
M. José Balarello,
rapporteur.
L'amendement n° 16 est d'ordre rédactionnel. Il concerne la
disposition introduite par le Sénat en première lecture afin d'étendre le champ
des activités ouvertes aux emplois-jeunes à la coopération régionale et à
l'aide humanitaire.
Par ailleurs, il vise à supprimer le mot « notamment », qui est source
d'insécurité juridique.
M. Patrice Gélard.
Très bien !
M. José Balarello,
rapporteur.
Je dois dire que le président de la commission des lois, M.
Jacques Larché, a plusieurs fois insisté pour que nous n'utilisions pas le
terme « notamment » en commission des lois.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
L'Assemblée nationale a adopté un amendement
rédactionnel afin de préciser que l'élargissement du champ d'intervention des
emplois-jeunes au titre de l'aide humanitaire s'inscrit dans le cadre de la
coopération internationale régionale. Cet amendement, approuvé par le
Gouvernement, a complété de façon satisfaisante la rédaction de l'article 9
bis
A.
S'agissant de la suppression du terme « notamment », objet de l'amendement n°
16, le Gouvernement n'y voit pas d'inconvénient.
En revanche, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 17 rectifié,
car il considère que la rédaction de l'Assemblée nationale est satisfaisante
sur ce point.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17 rectifié, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9
bis
A, modifié.
(L'article 9
bis
A est adopté.)
Article 9 bis B
M. le président.
L'article 9
bis
B a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Mais, par amendement n° 18, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
le rétablir dans la rédaction suivante :
« Dans le premier alinéa de l'article L. 832-2 du code du travail, après les
mots : "favoriser l'insertion professionnelle", sont insérés les mots : "des
jeunes âgés de dix-huit à vingt-cinq ans rencontrant des difficultés
particulières d'accès à l'emploi,". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement vise à rétablir l'article 9
bis
B,
adopté par le Sénat en première lecture, afin de recentrer les contrats d'accès
à l'emploi sur les jeunes les plus en difficulté.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
S'agissant d'une matière réglementaire, le
Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 9
bis
B est rétabli dans cette rédaction.
Article 9
ter
(coordination)
M. le président.
« Art. 9
ter
. - L'article L. 720-4 du code de commerce est ainsi rédigé
:
«
Art. L. 720-4
. - Dans les départements d'outre-mer, sauf dérogation
motivée de la Commission nationale d'équipement commercial, l'autorisation
demandée ne peut être accordée, que celle-ci concerne l'ensemble du projet ou
une partie seulement, lorsqu'elle a pour conséquence de porter au-delà d'un
seuil de 25 %, sur l'ensemble du territoire du département ou d'un pays de ce
département ou d'une agglomération au sens des articles 25 et 26 de la loi n°
99-533 du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement
durable du territoire, ou d'augmenter, si elle est supérieure à ce seuil
au-delà duquel la demande est automatiquement rejetée, qu'il s'agisse d'un ou
de plusieurs transferts, changements d'activité, extensions, ou toute opération
de concentration, la surface totale des grandes et moyennes surfaces de détail
dans lesquelles sont mis en vente des produits alimentaires, ou la part de son
chiffre d'affaires annuel hors taxes incluant toutes les ventes au détail sur
place, par correspondance ou par tout autre moyen de communication, et
appartenant :
« - soit à une même enseigne ;
« - soit à une même société, ou une de ses filiales, ou une société dans
laquelle l'un des associés du groupe possède une fraction du capital comprise
entre 10 % et 50 %, ou une société contrôlée par cette même société au sens de
l'article L. 233-3 ;
« - soit contrôlée directement ou indirectement par au moins un associé du
groupe exerçant sur elle une influence au sens de l'article L. 233-16, ou ayant
un dirigeant de droit ou de fait commun. »
- (Adopté.)
Article 9 quater
M. le président.
« Art. 9
quater.
- I. - Afin de favoriser l'embauche de jeunes dans les
départements d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de
Saint-Pierre-et-Miquelon par la cessation d'activité de salariés âgés, l'Etat,
le conseil régional ou le conseil général ainsi que les organisations
syndicales d'employeurs et de salariés représentatives dans le département
peuvent passer une convention-cadre aux fins de la mise en place d'un
dispositif dénommé congé-solidarité.
« La convention-cadre fixe les engagements respectifs de l'Etat, du conseil
régional et du conseil général.
« La convention-cadre doit être conclue au plus tard le 31 décembre 2001. Elle
désigne, avec son accord, l'organisme gestionnaire de l'allocation de
congé-solidarité.
« II et III. -
Non modifiés
.
« IV. - La convention-cadre fixe également les contreparties de la mise en
oeuvre du congé-solidarité dans les limites suivantes :
« 1° La durée collective du travail est fixée à au plus soit trente-cinq
heures hebdomadaires, soit 1 600 heures sur l'année ;
« 2° Pour chaque salarié adhérant à la convention d'application du
congé-solidarité, l'employeur est tenu d'embaucher un jeune âgé d'au plus
trente ans sous contrat à durée indéterminée fixant un horaire au moins égal à
celui du salarié remplacé et conclu dans le délai fixé par cette convention et
qui ne peut excéder six mois ;
« 3° L'effectif atteint à la date de la dernière embauche à laquelle est tenu
l'employeur et déterminé selon les modalités prévues à l'article L. 421-2 du
code du travail ne doit pas être réduit pendant la durée fixée par la
convention et qui ne peut être inférieure à deux ans. »
« V à VIII. -
Non modifiés.
»
Par amendement n° 43, Le Gouvernement propose, dans le premier alinéa du I de
cet article, de supprimer les mots : « et dans la collectivité territoriale de
Saint-Pierre-et-Miquelon ».
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Il s'agit d'harmoniser la rédaction proposée afin
d'éviter toute confusion.
Pour que l'article s'applique bien à la collectivité territoriale de
Saint-Pierre-et-Miquelon, il sera proposé parallèlement un amendement à
l'article 40, tendant à ajouter l'article 9
quater
dans l'énumération
des articles du présent projet de loi s'appliquant à
Saint-Pierre-et-Miquelon.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 43, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 19, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit le IV de l'article 9
quater
:
« IV. - La convention-cadre fixe également les conditions de mise en oeuvre du
congé-solidarité dans l'entreprise.
« Elle prévoit que, pour chaque salarié adhérant à la convention, l'employeur
est tenu d'embaucher un jeune âgé d'au plus trente ans sous contrat de travail
à durée indéterminée, pour une durée de travail effectif au moins égale à celle
effectuée par le salarié adhérant à la convention.
« Elle fixe aussi le délai dans lequel doit être conclu ce contrat de travail,
ce délai ne pouvant excéder six mois, ainsi que la durée pendant laquelle
l'effectif de l'entreprise, déterminé selon les modalités prévues à l'article
L. 421-2 du code du travail, ne peut être inférieur à l'effectif constaté à la
date de signature de la convention, cette durée ne pouvant être inférieure à
deux ans. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 63, présenté par MM. Lise,
Larifla, Désiré et les membres du groupe socialiste et tendant :
A. - Dans le deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 19 pour le
IV de l'article 9
quater
, après les mots : « à durée indéterminée », à
insérer les mots : « ou un jeune bénéficiaire du dispositif prévu à l'article
L. 322-4-18 du code du travail arrivant au terme de leur contrat ».
B. - A compléter
in fine
l'amendement n° 19 par un alinéa ainsi rédigé
:
« Les pertes de recettes éventuelles résultant de l'extension aux jeunes
employés dans le cadre d'un contrat emploi-jeune du dispositif proposé sont
compensées par l'augmentation à due concurrence des droits de consommation
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 58, MM. Lise, Larifla, Désiré et les membres du groupe
socialiste proposent :
A. - Dans le troisième alinéa (2°) du IV de l'article 9
quater
, après
les mots : « à durée indéterminée », d'insérer les mots : « ou un jeune
bénéficiaire du dispositif prévu à l'article L. 322-4-18 du code du travail
arrivant au terme de leur contrat ».
B. - De compenser les pertes de recettes éventuelles résultant de l'extension
aux jeunes employés dans le cadre d'un contrat emploi-jeune du dispositif
proposé par l'augmentation à due concurrence des droits de consommation prévus
aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 19.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement tend à supprimer l'obligation pour
l'entreprise d'avoir réduit la durée du travail à 35 heures hebdomadaires pour
bénéficier du congé emploi-solidarité. En effet, cette obligation est
contre-productive, les entreprises de moins de vingt salariés n'étant soumises
à la réduction de la durée légale du travail à 35 heures qu'à partir de 2002.
Une telle mesure les écarterait de fait du dispositif, alors qu'elles
constituent la très grande majorité des employeurs dans les départements
d'outre-mer.
M. le président.
La parole est à M. Lise, pour présenter le sous-amendement n° 63 et
l'amendement n° 58.
M. Claude Lise.
Mon amendement n° 58 deviendra sans objet si celui de la commission est
adopté. C'est la raison pour laquelle j'ai également déposé un sous-amendement
de repli à l'amendement n° 19.
L'un et l'autre ont pour objet de permettre, dans le cadre du congé
emploi-solidarité, outre l'embauche d'un jeune d'au plus trente ans sous
contrat à durée indéterminée, celle d'un jeune bénéficiaire d'un contrat
emploi-jeune parvenu à son terme.
Ils s'inscrivent dans la suite logique d'une disposition identique, adoptée en
première lecture à l'article 39, pour le projet initiative jeune.
Aussi, j'espère que notre Haute Assemblée voudra bien aujourd'hui, à défaut de
pouvoir adopter l'amendement n° 58, adopter le sous-amendement n° 63, pour
aller dans le même sens.
Nous savons que nombre d'emplois-jeunes ont été institués dans nos
départements d'outre-mer. Mais ces mesures, pour efficaces qu'elles soient,
sont limitées dans le temps. En effet, la volonté du Gouvernement est de
pérenniser les emplois-jeunes, mais nous savons bien que c'est difficile. Le
sous-amendement n° 63 n'a donc d'autre objet que de contribuer à cette
pérennisation.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 63 ?
M. José Balarello,
rapporteur.
La commission n'est pas opposée au sous-amendement de M.
Lise, sous réserve d'une rectification formelle : dans le A, il faut écrire «
son contrat » au lieu de « leur contrat ».
M. le président.
Monsieur Lise, acceptez-vous la rectification proposée par M. le rapporteur
?
M. Claude Lise.
Tout à fait, monsieur le président.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 63 rectifié, présenté par MM. Lise,
Larifla, Désiré et les membres du groupe socialiste, et tendant :
A. - Dans le deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 19 pour le
IV de l'article 9
quater
, après les mots : « à durée indéterminée », à
insérer les mots : « ou un jeune bénéficiaire du dispositif prévu à l'article
L. 322-4-18 du code du travail arrivant au terme de son contrat ».
B. - A compléter
in fine
l'amendement n° 19 par un alinéa ainsi rédigé
:
« Les pertes de recettes éventuelles résultant de l'extension aux jeunes
employés dans le cadre d'un contrat emploi-jeune du dispositif proposé sont
compensées par l'augmentation, à due concurrence, des droits de consommation
prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 19, le sous-amendement n°
63 rectifié et l'amendement n° 58 ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 19,
pour des raisons que j'ai longuement exposées tout à l'heure.
Sans doute avons-nous, M. le rapporteur et moi-même, quelques différences
d'appréciation sur l'impact de la réduction du temps de travail sur le chômage.
Pour ma part, je considère que la loi Aubry a eu dans notre pays des effets
tout à fait positifs et je serais au regret de constater que l'on doive en
restreindre la portée dans les départements d'outre-mer.
M. José Balarello,
rapporteur.
Attendez 2002 !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Cela me conduit donc à émettre un avis défavorable sur
le sous-amendement n° 63 rectifié de M. Lise, considérant d'ailleurs que son
souhait est satisfait par l'amendement n° 58, auquel je suis en revanche
favorable et dont je lève le gage.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 63 rectifié, accepté par la commission
et repoussé par le Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 19, repoussé par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° 58 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9
quater
, modifié.
(L'article 9
quater
est adopté.)
Article 9 quinquies A
M. le président.
L'Assemblée nationale a supprimé l'article 9
quinquies
A.
Mais, par amendemenent n° 20, M. Balarello, au nom de la commission, propose
de le rétablir dans la rédaction suivante :
« Les bois et forêts domaniaux de l'Etat peuvent être transférés dans le
patrimoine des collectivités territoriales guyanaises dans un but de
développement économique, dans des conditions fixées par décret en Conseil
d'Etat. Pour l'entretien et la gestion de ce domaine, il est créé un office
régional de la forêt dont le statut et la composition sont fixés par le même
décret. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement tend à rétablir l'article 9
quinquies
A, adopté en première lecture sur l'initiative de notre collègue Georges
Othily, afin de permettre le transfert des forêts domaniales de l'Etat dans le
patrimoine des collectivités territoriales guyanaises, dans un objectif de
développement économique.
Sur ce sujet très important, monsieur le secrétaire d'Etat, le Gouvernement
peut-il s'engager à déposer prochainement un projet de loi ? Envisage-t-il de
fixer une date butoir en la matière ?
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Si tel était le cas, monsieur le rapporteur,
retireriez-vous votre amendement ?
Ce que je peux vous dire - et c'est un engagement que je prends - c'est qu'une
concertation a été engagée avec l'ensemble des acteurs locaux professionnels et
avec les élus et que, les premières orientations étant arrêtées, un premier
texte pourrait voir le jour avant la fin de cette année. Il nous sera alors
possible de nous engager plus avant sur un calendrier !
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 20.
M. Georges Othily.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Othily.
M. Georges Othily.
L'ensemble des élus de Guyane ont demandé au sénateur guyanais que je suis de
déposer un amendement pour que l'Etat transfère aux collectivités guyanaises
les bois et forêts.
J'ai moi-même déposé, voilà deux ans, une proposition de loi tendant à
modifier le code forestier à cette fin. Cela étant, comme le Gouvernement est
maître de l'ordre du jour du Sénat, cette proposition de loi n'a pas encore été
appelée en discussion dans cette enceinte.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez déclaré à l'Assemblée nationale, le
11 octobre dernier, qu'il n'apparaîtrait pas opportun au Gouvernement
d'anticiper sur les discussions qui peuvent avoir lieu à l'échelon local dans
ce domaine.
Cependant, j'observe également que M. Jérôme Lambert, l'excellent rapporteur
de la commission des lois de l'Assemblée nationale, avait fait en sorte que cet
amendement, auquel le Gouvernement ne s'est pas déclaré favorable, soit
adopté.
Or, monsieur le secrétaire d'Etat, les discussions au sujet des nouvelles
dispositions du code forestier sont achevées depuis le 17 août 2000 et - c'est
une information que je vous livre - ont été définitivement adoptées le 7
septembre, à dix heures, à la préfecture régionale de Guyane, salle
Félix-Eboué, les dispositions qui permettront peut-être au Gouvernement de
soumettre au Parlement un projet de loi tendant à modifier le code
forestier.
J'ai participé à ces discussions et j'ai fortement imprimé ma marque à ces
dispositions, à telle enseigne que l'on s'est servi de la proposition de loi
que j'avais déposée pour élaborer ces dernières.
Vous comprendrez donc très bien que, puisque nous en sommes au stade de la
discussion d'un projet de loi d'orientation et que vous vous prononcez
aujourd'hui en faveur de l'inscription dans la loi de cette possibilité, pour
la collectivité guyanaise, de devenir propriétaire du domaine forestier, nous
revenions à la charge le moment venu.
En attendant, nous allons, bien sûr, adopter l'amendement que notre excellent
rapporteur, M. José Balarello, propose à notre Haute Assemblée d'adopter
aujourd'hui.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 9
quinquies
A est rétabli dans cette
rédaction.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une
heures trente-cinq, sous la présidence de M. Jacques Valade.)
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
vice-président
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion en nouvelle lecture du projet de loi
d'orientation relatif à l'outre-mer.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 9
quinquies
.
Article 9 quinquies
M. le président.
L'article 9
quinquies
a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Articles 9 septies A, 9 septies et 9 octies
M. le président.
« Art. 9
septies
A. - L'article 21 de la loi n° 94-638 du 25 juillet
1994 tendant à favoriser l'emploi, l'insertion et les activités économiques
dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette instance paritaire de concertation rend, après consultation des
collectivités régionales et départementales de chaque département d'outre-mer,
un rapport annuel assorti de propositions susceptibles de diminuer le coût des
transports outre-mer. Ce rapport annuel sera transmis au Gouvernement. »
- (Adopté.)
« Art. 9
septies.
- Dans les départements d'outre-mer, les conditions
d'accès à l'activité de transporteur public routier de personnes sont aménagées
en ce qui concerne les conditions de capacité professionnelle et de capacité
financière pour les artisans exploitant personnellement un seul véhicule,
lorsque ce véhicule a une capacité maximale de neuf places, conducteur inclus,
ou pour les entreprises qui n'utilisent qu'un seul véhicule de ce type.
« Les modalités d'application du présent article sont précisées par décret en
Conseil d'Etat. »
- (Adopté.)
« Art. 9
octies. -
Dans les départements de la Guadeloupe, de la
Martinique et de la Guyane, par dérogation à la loi n° 82-1153 du 30 décembre
1982 d'orientation des transports intérieurs, et aux prescriptions du chapitre
Ier du titre Ier du livre IV de la première partie du code général des
collectivités territoriales, les conventions et les autorisations relatives aux
services réguliers de transport public routier de personnes, encore en vigueur
à la date de promulgation de la présente loi ou venues à échéance au plus tôt
au 1er janvier 1995, sont réputées avoir poursuivi leurs effets, si l'autorité
organisatrice de transport compétente le décide, pour une durée ne pouvant
excéder dix-huit mois après la promulgation de la loi, sous réserve des
décisions juridictionnelles passées en force de chose jugée. Dans ce délai, une
loi définira un nouveau dispositif d'organisation des transports publics
terrestres de personnes, portant en particulier sur les modalités d'attribution
des lignes, les financements et la gestion de ce service public. Cette loi
précisera également les conditions dans lesquelles s'effectuera le passage du
dispositif actuel à ce nouveau dispositif. -
(Adopté.)
Article 10
M. le président.
Art. 10. - Au chapitre II du titre Ier du livre VIII du code du travail, il
est créé un article L. 812-1, ainsi rédigé :
«
Art. L. 812-1. -
L'article L. 129-2, à l'exception de son
avant-dernier alinéa, n'est pas applicable dans les départements d'outre-mer.
Dans ces départements, il est créé un titre de travail simplifié pour assurer
la rémunération et pour la déclaration en vue du paiement des cotisations
sociales :
« - des personnes employées par des entreprises, employeurs et organismes
mentionnés à l'article L. 131-2 occupant moins de onze salariés ;
« - des personnes effectuant des travaux et services au domicile des
particuliers.
« L'activité de ces personnes est réputée être salariée.
« Lorsque l'activité s'exerce en entreprise, elle ne peut excéder pour la même
personne cent jours consécutifs ou non par année civile dans la même
entreprise.
« Le titre de travail simplifié ne peut être utilisé qu'avec l'accord du
salarié. Il se substitue à la remise du bulletin de paie prévu par l'article L.
143-3. L'entreprise doit cependant satisfaire à l'obligation visée à l'article
L. 320.
« L'employeur et le salarié qui utilisent le titre de travail simplifié sont
réputés satisfaire aux obligations mises à la charge de l'un ou l'autre par les
articles L. 122-3-1 et L. 212-4-3, ainsi qu'aux déclarations au titre de la
médecine du travail et du régime des prestations mentionnées à l'article L.
351-2.
« La rémunération portée sur le titre de travail simplifié inclut une
indemnité de congés payés dont le montant est égal à un dixième de la
rémunération hormis lorsque s'applique le régime des professions affiliées aux
caisses de compensation prévues à l'article L. 223-16.
« Les titres de travail simplifiés sont émis et délivrés par les
établissements de crédit ou par les institutions ou services énumérés à
l'article de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au
contrôle des établissements de crédit, dans le cadre de la convention prévue à
l'avant-dernier alinéa de l'article L. 129-2.
« Les cotisations sociales d'origine légale ou conventionnelle imposées par la
loi dues au titre des rémunérations versées aux salariés visés au présent
article sont calculées sur une base forfaitaire réduite et font l'objet d'un
versement unique à la caisse générale de sécurité sociale.
« Par dérogation, ces cotisations peuvent être calculées, d'un commun accord
entre l'employeur et le salarié, sur les rémunérations réellement versées au
salarié.
« Les modalités de gestion et de répartition de ce versement unique font
l'objet d'un accord entre les organismes concernés avant le 1er juillet 2001. A
défaut d'accord à cette date, ces modalités sont fixées par arrêté
interministériel.
« Les modalités d'application du présent article sont déterminées par décret
en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 21, M. Balarello, au nom de la commission des lois, propose,
après le huitième alinéa du texte présenté par cet article pour l'article L.
812-1 du code du travail, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les salariés visés au présent article ne sont pas pris en compte pour le
calcul de l'effectif au sens de l'article L. 421-2. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement tend à préciser que les salariés bénéficiant
du titre de travail simplifié ne seront pas pris en compte dans le calcul de
l'effectif de l'entreprise.
Cet amendement s'inscrit toujours dans la même philosophie de la commission
des lois, de la commission des affaires économiques et du Plan et de la
commission des affaires sociales du Sénat, qui vise à développer l'emploi dans
les départements d'outre-mer.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, repoussé par le Gouvernement.
M. Robert Bret.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 10, ainsi modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Article additionnel après l'article 11
M. le président.
Par amendement n° 59, MM. Lise, Larifla, Désiré et les membres du groupe
socialiste proposent, après l'article 11, d'insérer un article additionnel
ainsi rédigé :
« La section I du chapitre IV du titre Ier du livre VIII du code du travail et
les articles L. 814-1 à L. 814-4 sont supprimés. »
La parole est à M. Lise.
M. Claude Lise.
Cet amendement vise à supprimer un certain nombre d'articles du code du
travail qui fixent les modalités d'évolution du SMIC dans les départements
d'outre-mer.
En effet, si le SMIC de ces département a bien été aligné sur le niveau
métropolitain en 1996 en vertu de ce que l'on a appelé la politique d'égalité
sociale initiée par le Premier ministre de l'époque, Michel Rocard, le
Gouvernement n'a pas, depuis cette date, supprimé dans le code du travail les
articles spécifiques concernant les modalités d'évolution du SMIC outre-mer.
Ainsi, un simple décret permettrait à nouveau de différencier le SMIC outre-mer
du SMIC métropole.
Il est donc proposé, conformément à la politique de l'égalité sociale
poursuivie par l'actuel gouvernement, d'abroger ces articles qui n'ont plus
lieu d'être.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
La commission est défavorable à cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement, au nom
du principe d'égalité sociale qui est affirmé par le projet de loi
d'orientation pour l'outre-mer, puisque le taux horaire du SMIC outre-mer est
identique à celui qui est applicable en métropole.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 59, repoussé par la commission et accepté par
le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 11.
Article 11 bis
M. le président.
L'article 11
bis
a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Mais, par amendement n° 22, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
rétablir cet article dans la rédaction suivante :
« I. - A compter de la publication de la présente loi, la charge
supplémentaire, résultant de l'article 11, que supportent les départements
d'outre-mer au titre des actions d'insertion prévues à l'article 38 de la loi
n° 88-1088 du 1er décembre 1988 précitée est compensée par une majoration de la
dotation globale de fonctionnement.
« II. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du I est compensée, à due
concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement a effectivement pour objet de rétablir
l'article 11
bis,
introduit par le Sénat en première lecture, afin
d'assurer la compensation par l'Etat de la charge supplémentaire résultant pour
les départements du financement des crédits d'insertion liés aux conséquences
de l'alignement du RMI. Ces crédits d'insertion étant calés sur l'importance
des sommes versées au cours de l'exercice précédent par l'Etat dans le
département au titre de l'allocation de RMI, il est certain que cet alignement
du RMI entraînera un surcroît de dépenses pour les départements d'outre-mer.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
L'avis du Gouvernement est défavorable,
essentiellement pour deux raisons, monsieur le rapporteur.
La première, c'est que les charges résultant de l'insertion des RMIstes n'ont
pas fait l'objet d'une compensation pour les départements de métropole ou pour
les départements d'outre-mer jusqu'à présent.
La seconde - c'est peut-être celle-là qui peut emporter votre conviction,
monsieur le rapporteur - c'est qu'au fond, notre objectif, le vôtre comme celui
du Gouvernement, c'est bien de réduire le nombre des bénéficiaires du RMI. A
cet égard, la loi d'orientation comprend toute une série de dispositions, tel
le revenu de solidarité qui résulte d'un amendement déposé par votre collègue
M. Lise et qui permettra à plusieurs milliers de bénéficiaires du RMI de sortir
de leur situation et d'obtenir un meilleur revenu.
M. José Balarello,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Dieu vous entende, monsieur le secrétaire d'Etat, parce que,
à ce moment-là, il est certain que la participation de l'Etat pour compenser
les dépenses ainsi induites pour les finances départementales sera minime !
Vous pourriez donc accepter cet amendement, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 11
bis
est rétabli dans cette rédaction.
Article 13 bis
M. le président.
L'article 13
bis
a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Mais, par amendement n° 23, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
le rétablir dans la rédaction suivante :
« Le chapitre II du titre III du livre VIII du code du travail est complété
par un article L. 832-8-1 ainsi rédigé :
«
Art. L. 832-8-1.
- Dans les départements d'outre-mer, à titre
expérimental et à partir du 1er janvier 2001, tout bénéficiaire du revenu
minimum d'insertion depuis un an peut, dans le cadre d'un contrat d'accès à
l'emploi à mi-temps prévu à l'article L. 832-2, conclure une convention de
retour à l'activité avec son employeur et l'agence départementale
d'insertion.
« Pendant la durée de la convention, le bénéficiaire a droit au maintien
intégral de l'allocation de revenu minimum d'insertion.
« Un bilan de ces conventions de retour à l'activité sera réalisé et rendu
public dans chaque département pour le 1er janvier 2003.
« Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application du
présent article, notamment en ce qui concerne les actions de formation devant
bénéficier aux personnes concluant une convention de retour à l'activité ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement tend effectivement à rétablir l'article 13
bis,
qui avait été introduit par le Sénat en première lecture, afin de
mettre en place des conventions de retour à l'activité permettant aux
bénéficiaires du RMI depuis plus d'un an de reprendre une activité
professionnelle par le biais d'un contrat d'accès à l'emploi à mi-temps tout en
continuant à percevoir l'allocation de RMI pendant la durée de la convention.
Ce dispositif est important car il peut inciter les RMIstes à rechercher un
emploi.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement
tendant à rétablir un dispositif qui avait été adopté par le Sénat en première
lecture, car il lui paraît présenter plusieurs inconvénients. Il est d'abord
contraire à l'esprit de l'allocation de retour à l'activité qui remplace le RMI
dès la reprise de l'activité. Il aurait ensuite, et cela nous renvoie à la
discussion que nous avons eue à l'instant, le double inconvénient de conserver
la personne dans le dispositif du RMI, ce qui n'est pas souhaitable, mais aussi
de maintenir au même niveau les dépenses du conseil général au titre de
l'insertion, ce que vous déploriez, monsieur le rapporteur, en quelque sorte
tout à l'heure.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 13
bis
est rétabli dans cette rédaction.
Article 16
M. le président.
« Art. 16. - Il est rétabli, dans le titre IV du livre III du code de
l'urbanisme, un article L. 340-2 ainsi rédigé :
«
Art. L. 340-2
. - Il est créé, en Guadeloupe, en Guyane, en
Martinique et à la Réunion, un fonds régional d'aménagement foncier et urbain
qui coordonne les interventions financières de l'Etat, des collectivités
territoriales et de l'Union européenne, en vue d'assurer la constitution de
réserves foncières et la réalisation des équipements nécessaires à
l'aménagement d'espaces déjà urbanisés ou qui ont vocation à l'être en vertu
des documents d'urbanisme applicables.
« Le fonds régional participe également au financement des études préalables à
la réalisation de ces opérations.
« Pour la mise en oeuvre du dispositif, une convention est passée avec une
institution financière chargée de regrouper les fonds et de verser les
aides.
« Les représentants des maîtres d'ouvrages sociaux sont consultés sur la
gestion et l'évaluation de ces fonds.
« La présidence du fonds régional d'aménagement foncier et urbain est assurée
alternativement et par période d'un an par le président du conseil général et
par le président du conseil régional. A la Réunion, la présidence de ce fonds
est assurée alternativement et par période d'un an par le président du conseil
régional et, conjointement, par les deux présidents de conseil général.
« L'association des maires désigne deux représentants pour siéger au fonds
régional d'aménagement foncier et urbain.
« Les autres modalités d'organisation et de fonctionnement des fonds régionaux
sont définies par décret. »
Par amendement n° 24, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
supprimer la seconde phrase du cinquième alinéa du texte proposé par cet
article pour l'article L. 340-2 du code de l'urbanisme.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination avec la suppression
de la bidépartementalisation de la Réunion, problème que nous allons examiner
dans un instant.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Défavorable en raison de l'exposé même des motifs de
cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 16, ainsi modifié.
(L'article 16 est adopté.)
Article 17
(pour coordination)
M. le président.
« Art. 17. - Le premier alinéa de l'article 721-1 du code de l'éducation est
complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsqu'un institut universitaire de formation des maîtres est créé dans une
académie qui ne comprend aucune université, il est rattaché à une ou plusieurs
universités d'une autre académie. »
- (Adopté.)
Article 18 bis
M. le président.
« Art. 18
bis.
- I. - Il est inséré, après l'article L. 311-5 du code
de l'éducation, un article L. 311-6 ainsi rédigé :
«
Art. L. 311-6
. - Le conseil de l'éducation nationale institué dans
les départements et les régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique et de
la Réunion peut se prononcer sur le calendrier des rythmes scolaires, rendre
tout avis sur les programmes des enseignements dispensés dans les écoles,
collèges et lycées implantés dans ces départements et régions et émettre toute
proposition en vue de l'adaptation de ceux-ci aux spécificités locales.
« II. - L'article L. 311-6 du même code devient l'article L. 311-7. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet
d'une discussion commune.
Par amendement n° 25, M. Balarello, au nom de la commission, propose, dans le
texte présenté par le I de cet article pour l'article L. 311-6 du code de
l'éducation de remplacer les mots : « peut se prononcer sur le calendrier des
rythmes scolaires, rendre tout avis sur les programmes des enseignements » par
les mots : « peut rendre tout avis sur le calendrier des rythmes scolaires et
les programmes des enseignements ».
Par amendement n° 44, le Gouvernement propose, dans le texte présenté par le I
de cet article pour l'article L. 311-6 du code de l'éducation, de remplacer les
mots : « peut se prononcer sur le calendrier des rythmes scolaires » par les
mots : « peut être consulté et émettre des voeux sur le calendrier et les
rythmes scolaires ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 25.
M. José Balarello,
rapporteur.
La commission retire cet amendement car elle est satisfaite
par l'amendement n° 44 du Gouvernement, auquel elle se rallie.
M. le président.
L'amendement n° 25 est retiré.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat, pour présenter l'amendement n° 44.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Il s'agit d'un amendement de cohérence car la formule
« le calendrier des rythmes scolaires » n'a pas de sens. En effet, elle
regroupe deux thèmes différents : le calendrier de l'année scolaire, d'une
part, et les rythmes scolaires, d'autre part. L'amendement fait donc référence
au décret de 1985 relatif aux conseils de l'éducation nationale dans les
départements et les académies.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 44, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 18
bis,
ainsi modifié.
(L'article 18
bis
est adopté.)
Articles 18 ter , 19 bis et 20
M. le président.
« Art. 18
ter
. - Il est institué un conseil culturel de l'île de
Saint-Martin. Ce conseil a notamment pour mission de proposer aux responsables
de l'île de Saint-Martin et du département de la Guadeloupe, ainsi qu'au
préfet, toute mesure de nature à préserver et développer les acquis culturels
spécifiques de l'île. Il peut être consulté par le préfet et les collectivités
territoriales. » -
(Adopté.)
« Art. 19
bis.
- Afin d'assurer l'égalité d'accès de
Saint-Pierre-et-Miquelon aux nouvelles technologies de l'information et de la
communication, l'Etat mettra en place au plus tard le 1er janvier 2002 un
dispositif compensant le surcoût engendré par la surtaxe satellitaire supportée
dans cette collectivité. »
- (Adopté.)
« Art. 20. - Les oeuvres cinématographiques peuvent bénéficier d'une aide
sélective spécifique si elles sont tournées en tout ou en partie dans les
départements d'outre-mer ou à Saint-Pierre-et-Miquelon. Les modalités de cette
aide, gérée par le Centre national de la cinématographie en concertation avec
l'Etat, sont déterminées par voie réglementaire. »
- (Adopté.)
Article 21 bis
M. le président.
« Art. 21
bis.
- Après le premier alinéa du II de l'article 44 de la
loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il
est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Elle assure la continuité territoriale des autres sociétés nationales de
programme en prenant en compte les particularités propres aux départements
d'outre-mer selon des modalités déterminées par son cahier des missions et des
charges après consultation de chaque conseil régional. »
Par amendement n° 47, M. Vergès propose, dans le texte présenté par cet
article pour insérer un alinéa après le premier alinéa du II de l'article 44 de
la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, après les mots : « la continuité
territoriale des », de remplacer les mots : « autres sociétés nationales de
programme » par les mots : « trois sociétés nationales de programme, suivant
des dispositifs qui peuvent être différenciés. »
La parole est à M. Vergès.
M. Paul Vergès.
C'est un problème bien simple : il s'agit de la reprise, avec une
clarification, d'un amendement qui avait été voté par le Sénat en première
lecture et tendant à faciliter l'accord de RFO.
Cet amendement concerne le droit à l'image et précise que les solutions
peuvent être différentes à la Réunion et dans les départements français
d'Amérique.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
J'avoue - mais peut-être connaissons-nous mal le problème -
ne pas comprendre le sens de cet amendement, qui vise à remplacer les mots «
autres sociétés nationales de programmes » par les mots, à mon avis plus
restrictifs - mais M. Vergès nous démontrera peut-être le contraire - « trois
sociétés nationales de programme ».
J'aimerais que M. Vergès nous donne quelques explications sur ce point.
M. Paul Vergès
Je demande la parole.
La parole est à M. Vergès.
M. Paul Vergès.
Cet amendement signifie qu'il n'existe aucune réticence à l'encontre de la
structure actuelle de la société de radiodiffusion et de télévision pour
l'outre-mer. Nous demandons que RFO soit chargée d'assurer la continuité
territoriale des chaînes publiques entre la métropole et la Réunion,
c'est-à-dire que cette société soit la responsable de la retransmission des
chaînes publiques que nous ne réceptionnons pas, à savoir France 2, France 3,
La Cinq et Arte.
Nous allons même plus loin : nous faisons confiance à RFO pour retransmettre
intégralement les émissions des chaînes publiques métropolitaines.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement, qui vise en effet à affirmer le
principe de la continuité territoriale, des chaînes publiques et à en confier à
RFO l'entière responsabilité, va dans le bon sens, dans un sens qu'admet le
Gouvernement : la continuité territoriale des chaînes publiques.
Je serais d'autant plus tenté d'émettre un avis favorable sur cet amendement,
qu'il prévoit une mise en oeuvre différenciée de cette continuité territoriale
qui pourrait en effet être à l'origine d'une meilleure adaptation aux réalités
locales.
Toutefois, la rédaction initiale évoque les « trois sociétés nationales de
programme ». Comment ferons-nous si, demain, il y en a quatre ?
De ce fait, monsieur le sénateur, ne pourriez-vous pas modifier votre
amendement en maintenant, en effet, la différenciation, mais en inscrivant dans
la loi les « autres sociétés nationales de programme », c'est-à-dire les trois
qui existent aujourd'hui, plus d'autres qui seraient éventuellement créées
demain ?
Sous cette réserve, le Gouvernement serait favorable à votre proposition,
monsieur Vergès.
M. le président.
Acceptez-vous la rectification proposée par M. le secrétaire d'Etat, monsieur
Vergès ?
M. Paul Vergès.
J'accepte la proposition de M. le secrétaire d'Etat, qui nous donne
satisfaction.
Deux idées prévalent en effet : la diffusion des programmes des chaînes
nationales et la différenciation entre la Réunion et les départements français
d'Amérique.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 47 rectifié, présenté par M. Vergès, et
visant dans le texte proposé par l'article 21
bis
pour insérer un alinéa
après le premier alinéa du II de l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30
septembre 1986, après les mots : « la continuité territoriale des », à
remplacer les mots : « autres sociétés nationales de programme », par les mots
: « autres sociétés nationales de programme, suivant des dispositifs qui
peuvent être différenciés ».
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
Sagesse.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 47 rectifié, accepté par le Gouvernement et
pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 21
bis,
ainsi modifié.
(L'article 21
bis
est adopté.)
Article 22
M. le président.
« Art. 22. - Dans le chapitre Ier du titre IV du livre IV de la troisième
partie du code général des collectivités territoriales, sont insérés les
articles L. 3441-2 à L. 3441-7 ainsi rédigés :
«
Art. L. 3441-2
. - Dans les régions d'outre-mer ne comportant qu'un
seul département, le conseil général peut adresser au Gouvernement des
propositions en vue de la conclusion d'engagements internationaux concernant la
coopération régionale entre la République française et, selon le cas, les Etats
de la Caraïbe, les Etats voisins de la Guyane et les Etats de l'océan Indien,
ou d'accords avec des organismes régionaux des aires correspondantes, y compris
des organismes régionaux dépendant des institutions spécialisées des Nations
unies.
«
Art. L. 3441-3 à 3441-5
. -
Non modifiés.
«
Art. L. 3441-6
. - Les conseils généraux des départements d'outre-mer
peuvent saisir le Gouvernement de toute proposition tendant à l'adhésion de la
France aux organismes régionaux mentionnés au premier alinéa de l'article L.
3441-3. »
«
Art. L. 3441-7
. -
Non modifié.
«
Art. L. 3441-8
. -
Supprimé
. »
Par amendement n° 26, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit le début du texte présenté par cet article pour l'article L.
3441-2 du code général des collectivités territoriales :
« Le conseil général de chaque département d'outre-mer peut adresser... »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination : nous proposons en
effet de supprimer les articles 38 et 38
bis
prévoyant la création de
deux départements à la Réunion.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 27 est présenté par M. Balarello, au nom de la commission.
L'amendement n° 60 est déposé par M. Lise et les membres du groupe
socialiste.
Tous deux tendent à rédiger comme suit le texte proposé par l'article 22 pour
l'article L. 3441-6 du code général des collectivités territoriales :
«
Art. L. 3441-6. -
Les départements d'outre-mer peuvent, avec l'accord
des autorités de la République, être membres associés des organismes régionaux
mentionnés à l'alinéa 1er de l'article L. 3441-3 ou observateurs auprès de
ceux-ci.
« Les conseils généraux de ces départements peuvent saisir le Gouvernement de
toutes propositions tendant à l'adhésion de la France à de tels organismes.
»
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 27.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement a pour objet de permettre aux départements
d'outre-mer de devenir membres associés des organisations internationales
régionales.
M. le président.
La parole est à M. Lise, pour défendre l'amendement n° 60.
M. Claude Lise.
Les arguments qui ont été présentés à l'appui des modifications de l'article
22 annulant la possibilité, pour les conseils généraux, de devenir membres
associés ou observateurs au sein d'organismes internationaux ne sont fondés ni
sur le plan juridique ni sur le plan fonctionnel.
Par ailleurs, aucun texte n'est venu conférer une légitimité particulière aux
exécutifs régionaux en matière de représentation extérieure.
En matière de coopération, les partenaires des départements d'outre-mer ne
sont pas uniquement intéressés par les questions de développement économique,
qui relèvent essentiellement des régions, mais également par tout ce qui
concerne le sanitaire et le social, domaines de prédilection des conseils
généraux, ainsi que par l'éducation, la culture, l'environnement, secteurs où
les départements ont des compétences aussi importantes que les régions. C'est
la raison pour laquelle les conseils généraux sont déjà impliqués, et parfois
fortement, dans des actions de coopération régionale.
Réserver à un seul exécutif local la participation aux travaux des organismes
internationaux risquerait de compromettre les avancées déjà obtenues en matière
de coopération régionale. Il n'y a d'ailleurs pas, en fait, de difficulté à
permettre la représentation des deux collectivités. Il ne s'agit pas du tout
d'installer les deux exécutifs sur un même siège.
Les organismes pouvant offrir un siège d'observateur ou de membre associé à un
département d'outre-mer sont multiples. Dans la zone caraïbe, je citerai
notamment le l'OECS, l'AEC, le CARICOM, le CARIFORUM, etc. Les exécutifs
départementaux et régionaux peuvent aisément se partager les sièges à occuper
ou organiser pour chacun d'entre eux un système de représentations
tournantes.
Par ailleurs, les commissions techniques qui existent dans beaucoup de ces
organismes peuvent trouver avantage à bénéficier des compétences ou de
l'expérience acquise par l'une ou l'autre de ces collectivités.
Il suffit que les exécutifs se mettent d'accord localement sur une politique
de représentation tenant compte de leurs compétences respectives et des
desiderata des partenaires et des responsables de ces organismes régionaux. Une
instance peut permettre cette concertation, celle que nous avons prévue à
l'article 23 de ce projet de loi.
Il serait vraiment dommage qu'une loi qui vise à élargir le champ des
compétences locales fixe déjà des modalités de mise en oeuvre contraignantes et
pouvant finalement aboutir à restreindre le pouvoir d'initiative local.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements identiques ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
L'intervention du rapporteur comme celle de M. Lise
emportent la conviction du Gouvernement d'autant plus que c'est la position
qu'il a défendue, hélas ! dans beaucoup de succès, à l'Assemblée nationale.
En effet, le Gouvernement ne souhaite pas trancher entre le département et la
région, les compétences de ces deux collectivités pouvant les conduire, l'une
et l'autre, à intervenir dans l'espace régional pour mener des actions de
coopération ou pour participer à des associations internationales.
Au nom du Gouvernement, je suis donc favorable à ces deux amendements.
M le président.
Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 27 et 60.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Michaux-Chevry.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Monsieur le président, je souscris pleinement à la demande de mon collègue M.
Lise, car je pense qu'en matière de coopération décentralisée il y a des
compétences qui relèvent du département et d'autres de la région.
Je voudrais toutefois vous rappeler, monsieur le secrétaire d'Etat, que chacun
doit rester à sa place. Or, dans le cadre de l'AEC, la France se fait
représenter par ses ministres et non par le département ou la région.
C'est ainsi que votre collègue, le ministre de l'équipement, des transports et
du logement a assisté à Panama et au Costa Rica à une réunion technique sur les
transports. Récemment, lors d'une réunion technique sur le tourisme qui s'est
tenue en Guadeloupe et à laquelle participaient des ministres de Cuba et du
Vénézuela ni les autorités départementales ni les autorités régionales de
Guadeloupe et de Martinique n'étaient présentes.
Le Gouvernement lui-même devrait respecter les accords passés avec l'AEC,
présentés à l'époque par le ministre des affaires étrangères, M. Juppé, et
ratifiés par la loi du 29 septembre 1997.
Si l'on continue l'éparpillement des interventions de la France dans la zone,
c'est tout le travail réalisé par nos assemblées qui sera remis en cause.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n° 27 et 60, acceptés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 22, modifié.
(L'article 22 est adopté.)
Articles 23 et 24
M. le président.
« Art. 23. - Dans le chapitre III du titre III du livre IV de la quatrième
partie du code général des collectivités territoriales, sont insérés les
articles L. 4433-4-1 à L. 4433-4-7 ainsi rédigés :
«
Art. L. 4433-4-1 à L. 4433-4-7
. -
Non modifiés.
«
Art. L. 4433-4-8
. -
Supprimé.
»
- (Adopté.)
« Art. 24. - I. - Au titre IV du livre IV de la troisième partie du code
général des collectivités territoriales, il est créé un chapitre IV intitulé :
"Attributions", comprenant les articles L. 3444-1 à L. 3444-5 ainsi rédigés
:
«
Art. L. 3444-1 à L. 3444-3
. -
Non modifiés.
«
Art. L. 3444-4
. - Les conseils généraux d'outre-mer sont consultés
par l'Autorité de régulation des télécommunications avant toute décision
d'attribution d'autorisation délivrée en application des articles L. 33-1 et L.
34-1 du code des postes et télécommunications pour des réseaux ou services
locaux ou interrégionaux.
« L'avis des conseils généraux est réputé donné en l'absence de notification à
l'Autorité de régulation des télécommunications d'un avis exprès dans un délai
de deux semaines à compter de la saisine.
«
Art. L. 3444-5
. - Les conseils généraux d'outre-mer sont consultés
sur les projets d'attribution ou de renouvellement des concessions portuaires
et aéroportuaires concernant ces départements. »
« II. - Dans le chapitre III du titre III du livre IV de la quatrième partie
du code général des collectivités territoriales, sont insérés quatre articles
L. 4433-3-1, L. 4433-3-2, L. 4433-3-3 et L. 4433-3-4 ainsi rédigés :
«
Art. L. 4433-3-1 et L. 4433-3-2
. -
Non modifiés.
«
Art. L. 4433-3-3
. - Les conseils régionaux d'outre-mer sont
consultés par l'Autorité de régulation des télécommunications avant toute
décision d'attribution d'autorisation délivrée en application des articles L.
33-1 et L. 34-1 du code des postes et télécommunications pour des réseaux ou
services locaux ou interrégionaux.
« L'avis des conseils régionaux est réputé donné en l'absence de notification
à l'Autorité de régulation des télécommunications d'un avis exprès dans un
délai de deux semaines à compter de la saisine.
«
Art. L. 4433-3-4
. - Les conseils régionaux d'outre-mer sont
consultés sur les projets d'attribution ou de renouvellement des concessions
portuaires et aéroportuaires concernant ces régions. »
- (Adopté.)
Article 24 ter
M. le président.
« Art. 24
ter.
- Le Gouvernement adresse tous les deux ans aux conseils
régionaux de Guadeloupe, de Martinique, de Guyane et de la Réunion un rapport
relatif à la problématique des échanges aériens, maritimes et des
télécommunications. Ce rapport pourra ensuite faire l'objet de recommandations
de la part des conseils régionaux. »
Par amendement n° 28, M. Balarello, au nom de la commission, propose, après
les mots : « rapport relatif », de rédiger comme suit la fin de la première
phrase de cet article : « aux transports maritimes et aériens ainsi qu'aux
télécommunications. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello.
rapporteur
Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 24
ter,
ainsi modifié.
(L'article 24
ter
est adopté.)
Article 31
M. le président.
« Art. 31. - Au chapitre IV du titre IV du livre IV de la troisième partie du
code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L.
3444-6 ainsi rédigé :
«
Art. L. 3444-6
. - Dans les départements d'outre-mer, le conseil
général est saisi pour avis, avant le 31 décembre de chaque année, des
orientations générales de la programmation des aides de l'Etat au logement pour
l'année suivante.
« Ces orientations générales portent sur la répartition des aides par
dispositif, d'une part, et la répartition des aides par bassin d'habitat au
sens de l'article 441-1-4 du code de la construction et de l'habitation,
d'autre part.
« Le conseil régional peut être saisi pour avis sur ces orientations, par le
représentant de l'Etat dans le département. Dans le cas où il est saisi, le
conseil régional doit rendre son avis au plus tard le 31 décembre de chaque
année.
« La présidence du conseil départemental de l'habitat est assurée par le
président du conseil général.
«
Art. L. 3444-5 à L. 3444-7
. -
Supprimés.
»
Par amendement n° 29, M. Babarello, au nom de la commission, propose, dans le
premier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article L. 3444-6 du
code général des collectivités territoriales, de remplacer les mots : « le
conseil général est saisi » par les mots : « le conseil général et le conseil
régional sont saisis ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement tend à prévoir une saisine obligatoire - et
non facultative, comme l'a prévu l'Assemblée nationale - du conseil régional
sur les orientations générales de la programmation des aides au logement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 29, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 30, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
supprimer l'avant-dernier alinéa du texte présenté par l'article 31 pour
l'article L. 3444-6 du code général des collectivités territoriales.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de conséquence de l'amendement
précédent : l'alinéa visé n'est plus nécessaire puisque, désormais, le conseil
régional est saisi dans les mêmes conditions que le conseil général
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 30, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 31 rectifié, M. Balarello, au nom de la commission, propose
:
I. - De compléter l'article 31 par quatre alinéas ainsi rédigés :
«
Art. L. 3444-7.
- Dans les départements d'outre-mer, les compétences
en matière d'amélioration de l'habitat privé sont exercées par le
département.
« Les charges transférées aux départements en application des dispositions du
présent article sont compensées dans les conditions fixées par les articles L.
1614-1 à L. 1614-3. Toutefois, par dérogation à l'article L. 1614-1, le montant
de ces charges est égal, la première année du transfert, à la moyenne annuelle
des dotations de l'Etat destinées à l'amélioration de l'habitat privé dans le
département pendant les cinq année précédant le transfert.
«
Art. L. 3444-8.
- Les services de l'Etat qui participent à l'exercice
des compétences tranférées aux départements en application de l'article L.
3444-7 sont, en tant que de besoin, mis à disposition des départements dans les
conditions prévues à l'article L. 4151-1.
«
Art. L. 3444-9.
- Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités
des transferts de compétences prévus aux articles L. 3444-7 et L. 3444-8. »
II. - En conséquence, de rédiger comme suit le premier alinéa de l'article n°
31 :
« Au chapitre IV du titre IV du livre IV de la troisième partie du code
général des collectivités territoriales, sont insérés quatre articles L. 3444-6
à L. 3444-9 ainsi rédigés : »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Il s'agit de prévoir, dans les départements d'outre-mer, le
transfert au département du bloc de compétences relatif à l'amélioration de
l'habitat privé.
Ce transfert présente l'intérêt d'aller dans le sens d'une plus grande
autonomie des départements d'outre-mer, objet sous-jacent de ce projet de loi
d'orientation pour l'outre-mer, ainsi que le président de la commission des
lois l'avait souligné en première lecture.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Il convient d'abord d'observer que les collectivités départementales exercent
déjà des compétences dans le domaine de l'amélioration de l'habitat privé.
Par ailleurs, la présidence du conseil départemental de l'habitat par le
président du conseil général permet désormais à ce dernier d'être plus impliqué
dans la programmation des aides de l'Etat aux logements neufs ou à
l'amélioration des logements existants.
J'ajoute que, comme le Gouvernement s'y était engagé devant votre assemblée,
le ministère de l'équipement, des transports et du logement, va envoyer avant
la fin de cette année une mission dans les départements d'outre-mer pour
apprécier le fonctionnement du dispositif d'amélioration de l'habitat privé.
Il ne m'apparaît pas souhaitable de revenir ainsi sur la fongibilité des aides
au logement, en détachant une partie des crédits qui sont inscrits sur la ligne
budgétaire unique pour le logement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 31 rectifié.
M. Claude Lise.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lise.
M. Claude Lise.
L'amendement de la commission des lois reprend un amendement que j'avais
présenté en première lecture. Je l'avais retiré précisément en raison de
l'annonce qui avait été faite de l'envoi d'une mission dans les départements
d'outre-mer.
Chacun le comprendra, en la présente circonstance, je ne peux que
m'abstenir.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 31 rectifié, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 31, modifié.
(L'article 31 est adopté.)
Article 32
M. le président.
« Art. 32. - I. -
Non modifié.
« II. - Après l'article 2563-7 du code général des collectivités
territoriales, il est inséré un article 2563-8 ainsi rédigé :
«
Art. L. 2563-8
. - Les conseils municipaux de Saint-Martin et de
Saint-Barthélemy peuvent, par délibération, demander à la région ou au
département de la Guadeloupe de leur transférer pour une durée déterminée leurs
compétences dans les domaines de la formation professionnelle, de l'action
sanitaire, de l'environnement, du tourisme, de la voirie classée en route
départementale, des ports maritimes de commerce et de pêche ou des aéroports,
de l'aménagement du territoire, du transport, de l'urbanisme, de la culture et
du sport.
« Le maire de la commune notifie cette délibération à l'exécutif de la
collectivité compétente.
« Par délibération notifiée à la commune, le conseil régional ou le conseil
général se prononce sur la demande des conseils municipaux de Saint-Martin et
de Saint-Barthélemy dans un délai de trois mois à compter de la date de
notification de la demande.
« Une convention, passée entre la commune et la région ou le département de la
Guadeloupe, précise les conditions financières dans lesquelles les compétences
sont transférées par le département et la région ainsi que, le cas échéant, les
conditions de mise à disposition des personnels. Les sommes afférentes aux
compétences transférées doivent être au moins égales à celles qui étaient
dépensées sur le territoire de la commune à ce titre, en fonctionnement,
l'année civile précédente et en investissement, en moyenne annuelle sur les
cinq années précédentes. Ces sommes présentent le caractère de dépenses
obligatoires.
« La convention prévoit la durée pendant laquelle l'exercice de la ou des
compétences de la région ou du département est transféré à la commune. Cette
durée ne peut être inférieure à six ans. Ces conventions peuvent être dénoncées
avec un préavis d'un an.
« L'exercice de ces compétences par les communes de Saint-Martin et de
Saint-Barthélemy entraîne de plein droit l'application des dispositions des
trois premiers alinéas de l'article 1321-1, des deux premiers alinéas de
l'article 1321-2 et des articles L. 1321-3, L. 1321-4 et L. 1321-5.
« Les communes sont substituées de plein droit à la région ou au département
dans l'ensemble des actes qui ont été pris par ces autorités à la date du
transfert, pour l'exercice des compétences transférées. A partir de l'entrée en
vigueur du transfert de compétences, elles peuvent procéder à leur
modification.
« Les communes sont substituées de plein droit au département ou à la région
dans les contrats conclus par ces collectivités avant l'entrée en vigueur du
transfert de compétences, sans que cette substitution n'entraîne, au profit des
cocontractants, aucun droit à résiliation ou à indemnisation.
« Le département ou la région informent leurs cocontractants de cette
substitution, dans le délai d'un mois suivant l'entrée en vigueur du transfert
de compétences. »
- (Adopté.)
Article 33
M. le président.
« Art. 33. - I. - Après l'article 2563-2 du code général des collectivités
territoriales, il est inséré un article 2563-2-1 ainsi rédigé :
«
Art. L. 2563-2-1
. - Le montant total de la dotation forfaitaire des
communes des départements d'outre-mer est majoré en 2001 d'une somme de 40
millions de francs, prélevée sur la dotation d'aménagement instituée à
l'article 2334-13.
« Cette majoration est répartie entre les départements d'outre-mer
proportionnellement à la population telle qu'elle est définie à l'article L.
2334-2. Elle est ensuite répartie entre les communes à l'intérieur de chacun de
ses départements, sauf pour la Guyane, au prorata de leur population ainsi
définie. La répartition entre les communes de Guyane se fait à concurrence de
75 % au prorata de la population ainsi définie et à concurrence de 25 % à parts
égales entre elles. »
« II. -
Supprimé.
»
Par amendement n° 32, M. Balarello, au nom de la commission des lois, propose
:
A. - A la fin du premier alinéa du texte présenté par le I de cet article pour
l'article L. 2563-2-1 du code général des collectivités territoriales, de
supprimer les mots : « , prélevée sur la dotation d'aménagement instituée à
l'article L. 2334-13. »
B. - De rétablir le II de cet article dans la rédaction suivante :
« II. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensée à due
concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement a pour objet de supprimer le prélèvement de 40
millions de francs sur la dotation d'aménagement prévu par le projet de loi
pour financer la majoration de la dotation forfaitaire des communes des
départements d'outre-mer.
La commission des lois estime qu'il est anormal de pénaliser, par le biais
d'un tel prélèvement, l'ensemble des communes françaises.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je suis défavorable à cet amendement qui, non
seulement est contraire à l'article 40 de la Constitution, mais aurait surtout
pour effet de supprimer ce prélèvement sur la dotation d'aménagement auquel le
Gouvernement souhaite qu'il soit procédé, afin que la somme en question puisse
être consacrée aux communes des départements d'outre-mer.
L'évolution globale de la DGF, vous le savez d'ores et déjà, mesdames,
messieurs les sénateurs, sera plus favorable en 2001 qu'en 2000. Le prélèvement
sur la dotation d'aménagement paraît donc pertinent.
M. José Balarello,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Je me permets simplement de faire remarquer à M. le
secrétaire d'Etat que notre amendement est gagé.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 32, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 33, ainsi modifié.
(L'article 33 est adopté.)
Article 33 bis
M. le président.
L'article 33
bis
a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Article 36
M. le président.
« Art. 36. - I et II. -
Non modifiés.
« III. - L'article 266
quater
du code des douanes est complété par un 4
ainsi rédigé :
« 4. Par dérogation aux dispositions du présent article, les communes de
Saint-Barthélemy et de Saint-Martin fixent, par délibération du conseil
municipal et dans la limite de 1,50 franc par litre de carburant consommé, les
taux de la taxe spéciale de consommation sur les produits visés au premier
alinéa et perçoivent cette taxe sur leur territoire, en lieu et place du
conseil régional. Les recettes correspondantes sont affectées à des fonds
d'investissement destinés à financer l'entretien et la modernisation de la
voirie des îles de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin. En conséquence, les
communes de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin ne bénéficient plus du
reversement aux communes par la région de la Guadeloupe du produit de la taxe
spéciale de consommation sur les produits visé au premier alinéa. »
« IV. -
Non modifié
. »
Par amendement n° 61, le Gouvernement propose de rédiger comme suit le III de
cet article :
« III. - 1° L'article 266
quater
du code des douanes est complété par
un 4 ainsi rédigé :
« 4. Par dérogation aux dispositions du présent article, les communes de
Saint-Barthélemy et de Saint-Martin fixent, par délibération du conseil
municipal et dans la limite de 1,50 franc par litre, les taux de la taxe
spéciale sur les produits visés au premier alinéa en lieu et place du conseil
régional de la Guadeloupe. »
« 2° Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
«
a)
Le chapitre III du titre VI livre V de la deuxième partie est
complété par un article L. 2563-9 ainsi rédigé :
«
Art. L. 2563-9
. - Les conseils municipaux de Saint-Martin et de
Saint-Barthélemy fixent le taux de la taxe spéciale de consommation prévue à
l'article 266
quater
du code des douanes, dans la limite prévue par le 4
de cet article. Le produit en est inscrite au budget de chacune de ces
communes.
« Ces communes doivent consacrer le produit de la taxe à la voirie dont elles
ont la charge ou au développement des transports publics de personnes. »
«
b)
Dans le chapitre IV du titre III du livre IV de la quatrième
partie, après l'article L. 4434-4, il est inséré un article L. 4434-4-1 ainsi
rédigé :
«
Art. L. 4434-4-1
. - Les articles L. 4434-2, L. 4434-3 et L. 4434-4 ne
sont pas applicables aux communes de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy. »
La parole est M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement a simplement pour objet de clarifier la
codification des dispositions relatives à l'affectation de la taxe spéciale
visée par l'article 36 pour les communes de Saint-Martin et de
Saint-Barthélemy.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 61, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 36, ainsi modifié.
(L'article 36 est adopté.)
Article additionnel après l'article 36
M. le président.
Par amendement n° 51, Mme Michaux-Chevry et les membres du groupe du
Rassemblement pour la République et apparentés proposent d'insérer, après
l'article 36, un article additionnel ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions de l'article 10 de la loi n° 92-676 du 17
juillet 1992 relative à l'octroi de mer et portant mise en oeuvre de la
décision du Conseil des ministres des Communautés européennes n° 89-688 du 22
décembre 1989, les communes de Saint-Barthélemy et Saint-Martin fixent, par
délibération du conseil municipal et dans la limite des taux arrêtés par ladite
loi, une taxe
ad valorem
à percevoir sur les produits et les
marchandises pénétrant sur leur territoire.
« Les recettes correspondantes sont affectées au fonds de fonctionnement
desdites communes. En conséquence, les communes de Saint-Barthélemy et
Saint-Martin ne bénéficient plus de l'affectation prévue à l'article 16 de la
loi susvisée. »
La parole est à Mme Michaux-Chevry.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Dans la continuité de ce qui vient d'être voté, nous demandons que, par
dérogation aux dispositions de l'article 10 de la loi de 1992, soit créée une
taxe
ad valorem
sur toutes les marchandises qui entrent à Saint-Martin
et à Saint-Barthélemy, taxe dont le produit viendra abonder le fonds de
fonctionnement de ces deux collectivités.
C'est une question de justice sociale.
Je rappelle que, à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy, on ne paie pas la taxe
sur les carburants. Or ces communes reçoivent leur part de la région, et cela
au détriment des autres communes de Guadeloupe. Il en va de même pour l'octroi
de mer.
Il est donc juste d'instituer cette taxe
ad valorem
sur les
marchandises, à l'instar de ce que le Gouvernement a fait pour le fonds
routier.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
La commission est défavorable à cet amendement, qui tend à
créer, au profit des communes de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, une taxe
sur les marchandises pénétrant sur leur territoire.
A Saint-Barthélemy, une telle taxe existe déjà : il s'agit du droit de
quai,...
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Ça n'a rien à voir !
M. José Balarello,
rapporteur.
... perçu en application de l'article 10 de la loi de
finances pour 1974.
A Saint-Martin, la création d'une telle taxe n'est pas souhaitée compte tenu
du statut de zone franche de l'île, caractérisé par l'absence d'impôts
indirects.
M. le président de la commission des lois et moi-même avons reçu assez
longuement les représentants de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, et ceux-ci
se sont clairement opposés à l'institution de taxes supplémentaires. Il faut
rappeler en particulier que, à Saint-Martin, la partie française de l'île est
en concurrence directe avec la partie néérlandaise, dont le statut est très
attractif pour les investisseurs. C'est pourquoi il faut se montrer très
prudent.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est également défavorable à cet
amendement pour deux raisons que j'exposerai brièvement à Mme Michaux-Chevry,
qui est, décidément, ce soir, un peu fâchée avec le droit.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Pas du tout ! Je le connais mieux que vous et je l'applique !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Tout d'abord, cet amendement n'est pas conforme à la
jurisprudence du Conseil constitutionnel relative à l'article 45 de la
Constitution, car il est sans lien direct avec une quelconque disposition
restant en discussion au cours de cette nouvelle lecture.
Mais, surtout, cet amendement n'est pas conforme à la décision du conseil des
ministres des Communautés européennes de décembre 1989 ni à la jurisprudence de
la Cour de justice des Communautés européennes.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
N'importe quoi !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Ce n'est pas moi qui dit le droit, madame
Michaux-Chevry !
Cette décision et cette jurisprudence interdisent en effet la création d'une
taxe d'effet équivalent à un droit de douane. Or c'est bien le cas avec la taxe
prévue par votre amendement qui frappe les produits et les marchandises
pénétrant sur le territoire des deux communes de l'archipel du nord de la
Guadeloupe.
Tels sont donc les deux motifs pour lesquels, loin de tout esprit polémique,
le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
M. le Président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 51.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Michaux-Chevry.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous excuse parce que vous connaissez mal le
fonctionnement des collectivités de l'outre-mer.
Le président du conseil régional que je suis fixe la taxe qu'on appelle
l'octroi de mer, qui a été prorogée par la loi de 1992 et qui a reçu l'aval des
instances communautaires.
A Saint-Martin et à Saint-Barthélemy, l'octroi de mer ne s'applique pas parce
que ces communes n'en veulent pas !
Quant au droit de quai, cher rapporteur, c'est une taxe qui est perçue à
l'arrivée des marchandises sur le port. Elle est toute différente de l'octroi
de mer, qui touche toutes les marchandises entrant dans les départements
d'outre-mer.
Pour des raisons historiques, à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy, on ne
payait ni pour l'octroi de mer ni pour le fonds routier. Monsieur le sécrétaire
d'Etat, vous venez de demander que Saint-Martin et Saint-Barthélemy se voient
appliquer une taxe sur l'essence achetée en zone hollandaise, que nous payons,
que vous payez, et qui profite à la zone hollandaise.
Je ne fais que demander la même chose pour l'octroi de mer.
Monsieur le secrétaire d'Etat, comment pouvez-vous admettre que, sur l'île de
Marie-Galante, où la population est très pauvre, on paye l'octroi de mer sur le
lait, sur le beurre, sur le pain, sur les livres, mais que, à Saint-Martin et à
Saint-Barthélemy, on en soit exonéré ?
Permettez-moi de vous préciser, mes chers collègues, combien nous versons
chaque année, au titre de l'octroi de mer, à Saint-Martin, où cette taxe ne
s'applique pas : 80 millions de francs ! S'agissant de Saint-Barthélemy, le «
cadeau » est de 20 millions de francs ! Je signale que la ville de
Pointe-à-Pitre ne touche, elle, au titre de l'octroi de mer, que 23 millions de
francs !
L'exécutif régional que je suis demande donc que soit prévue une dérogation à
la loi de 1992 qui a fixé les compétences exclusives de la région en matière
d'octroi de mer, afin que ces îles se voient appliquer l'octroi de mer. Et ce
n'est pas parce qu'elles sont confrontées à la zone hollandaise qu'elles
doivent bénéficier d'un régime particulier !
De toute façon, monsieur le secrétaire d'Etat, la collectivité régionale a le
droit d'intervenir, ce que je ne manquerai pas de faire même si ce sont mes
amis politiques.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Madame Michaux-Chevry, s'il s'agissait simplement de
procéder à une sorte d'harmonisation fiscale concernant Saint-Martin et
Saint-Barthélemy, je serais tenté de vous suivre.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Mais c'est cela !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Malheureusement, je vous le répète, les décisions
européennes s'y opposent de la façon la plus catégorique.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 51, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 36.
Article 36 bis
M. le président.
« Art. 36
bis
. - Dans le chapitre III du titre III du livre IV de la
quatrième partie du code général des collectivités territoriales, il est inséré
un article L. 4433-4-8 ainsi rédigé :
«
Art. L. 4433-4-8
. - Le contrat de plan conclu entre l'Etat et la
région de la Guadeloupe est complété par un chapitre spécifique à la commune de
Saint-Barthélemy et un chapitre spécifique à la commune de Saint-Martin. »
Par amendement n° 52, Mme Michaux-Chevry et les membres du groupe du
rassemblement pour la République et apparentés proposent de supprimer cet
article.
La parole est à Mme Michaux-Chevry.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
L'article 36
bis
prévoit un dispositif spécifique pour les îles du
Nord, que vous aimez beaucoup. Or le contrat de plan comporte une mesure
dérogatoire intitulée « développement des îles » ; cette mesure concerne
l'ensemble des îles de l'archipel guadeloupéen, c'est-à-dire Saint-Martin,
Saint-Barthélemy, Marie-Galante, Grande-Terre, Basse-Terre, La Désirade. Par
conséquent, toutes les îles bénéficient d'une disposition spéciale depuis le
XIe Plan 1994-1999.
Or l'article 36
bis
prévoit, je le répète, un dispositif spécifique.
Cet article est inopérant ! Toutes les îles, notamment Saint-Martin, sont
reconnues par les instances communautaires par décision du conseil régional de
la Guadeloupe.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
Défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je suis à nouveau conduit à émettre un avis
défavorable.
L'article 36
bis
avait été introduit en première lecture au Sénat par
un amendement de la commission des lois et M. Jacques Larché, président de la
commission des lois, s'était personnellement investi. Le Gouvernement avait
donné un avis favorable sur cet amendement dans la mesure où la rédaction
permettait de mettre en évidence les besoins spécifiques de Saint-Martin et de
Saint-Barthélemy. Un débat très riche a eu lieu à l'Assemblée nationale à ce
sujet. Pour autant, le Gouvernement n'a pas accédé à toutes les demandes qui
émanaient de ces îles.
Sur ce point précis, j'avoue, madame Michaux-Chevry, que je comprends mal les
raisons de votre position, mais peut-être allez-vous me donner davantage
d'explications.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 52.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Michaux-Chevry.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
A la page 67 du document qui a été signé entre la région de Guadeloupe et
l'Etat figure ceci : « Développement des îles - mesures spécifiques pour
Saint-Martin, Saint-Barthélemy, Marie-Galante, La Désirade. »
Dès lors, pourquoi créer un dispositif spécifique à Saint-Martin ou à
Saint-Barthélemy ? Mais le Gouvernement n'a peut-être pas lu le document que
nous avons signé ensemble !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 52, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 36
bis
est supprimé.
Article 37
M. le président.
« Art. 37. - I. - L'article L. 2561-1 du code général des collectivités
territoriales est ainsi rédigé :
«
Art. L. 2561-1
. - Ne sont pas applicables aux communes des
départements de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique et de la Réunion les
dispositions des chapitres III et IV du titre Ier du livre Ier de la présente
partie ainsi que celles de l'article L. 2123-21. »
« II. - L'article L. 2562-1 du même code est abrogé.
« III. - L'article L. 1424-24 du même code est ainsi modifié :
« 1° Le septième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Dans les départements d'outre-mer, les adjoints au maire peuvent être élus.
» ;
« 2° Dans le huitième alinéa, après les mots : "chaque maire", sont insérés
les mots : "ou, dans les départements d'outre-mer, chaque adjoint au maire". »
- (Adopté.)
Article 37 ter
M. le président.
« Art. 37
ter
. - Dans le chapitre III du titre III du livre IV de la
quatrième partie du code général des collectivités territoriales, il est inséré
un article L. 4433-4-9 ainsi rédigé :
«
Art. L. 4433-4-9
. - Dans chacune des régions de la Guadeloupe, de la
Guyane, de la Martinique et de la Réunion, il est créé une commission de suivi
de l'utilisation des fonds structurels européens.
« Coprésidée par le préfet, le président du conseil régional et le président
du conseil général, cette commission est en outre composée des parlementaires
de la région, d'un représentant du conseil économique et social régional, d'un
représentant du conseil de la culture, de l'éducation et de l'environnement,
d'un représentant de l'association des maires, de représentants des chambres
consulaires et de représentants des services techniques de l'Etat.
« Cette commission établit un rapport semestriel sur la consommation des
crédits. »
Par amendement n° 53, Mme Michaux-Chevry et les membres du groupe du
Rassemblement pour la République et apparentés proposent de supprimer cet
article.
La parole est à Mme Michaux-Chevry.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Cet amendement a pour objet de supprimer l'article 37
ter,
lequel tend
à créer une commission que je qualifierai « de bavardage ». En effet,
coprésidée par le préfet, le président du conseil régional et le président du
conseil général, elle sera composée d'une multitude de représentants, dont ceux
de l'association des maires.
Cette commission est chargée du suivi de l'utilisation des fonds structurels
européens. Or, dans le DOCUP que nous avons signé, est prévu un comité national
de suivi des évaluations, qui se réunit au moins deux fois par an. Ce dernier
permet de jouer avec la consommation des crédits du contrat de plan, d'un côté
ou de l'autre.
Un comité de suivi existe. Il est donc inutile de créer une commission !
Au dire de certains, les fonds européens qui ne sont pas consommés seraient
remboursés ! C'est une erreur ! Les fonds européens ne sont remboursés qu'après
que toutes les pièces justificatives ont été présentés au comité national de
suivi des fonds européens.
L'article 37
ter
est inopérant et nous ne pouvons pas accepter que des
textes de cette nature figurent dans un projet de loi.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
Madame Michaux-Chevry, je comprends très bien votre position
: vous êtes présidente du conseil régional de la Guadeloupe dont font partie
Saint-Martin et Saint-Barthélemy.
En métropole, nous nous sommes aperçus à différentes reprises, dans nombre de
régions et de départements, que l'on n'arrivait pas à consommer les fonds
structurels européens, ce pour des raisons bien précises : les collectivités
locales ne parvenaient pas à réaliser leur part - la part communale ou
départementale - à telle enseigne que, à l'heure actuelle, toujours sur
l'
Interreg II,
les fonds structurels européens restent partiellement
inutilisés.
Il faut savoir que, sur la période 2000-2006, les départements d'outre-mer
vont percevoir 23 milliards de francs de fonds structurels européens. Il s'agit
de sommes très importantes. Si, en amont, des projets ne sont pas mis au point
et acceptés par Bruxelles, il est certain que les fonds structurels européens
ne seront pas utilisés en totalité dans les DOM.
C'est la raison pour laquelle nous avons demandé la mise en place d'une
commission de suivi. Cela n'enlève rien, madame Michaux-Chevry, à votre
autorité de présidente du conseil général. Cela vous rendra simplement service,
car vous parviendrez difficilement à monter des dossiers
(Mme Michaux-Chevry
s'esclaffe)
qui soient acceptables par Bruxelles en vue de l'utilisation de
tous ces fonds structurels européens.
Le Sénat a donc fait preuve de sagesse en introduisant cette disposition en
première lecture. Certes, l'Assemblée nationale a ajouté quelques représentants
- comme ceux du conseil, de la culture, de l'éducation et de l'environnement -
que le Sénat n'avait pas prévus. Cela étant, la commission persiste à émettre
un avis défavorable sur l'amendement n° 53.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement avait émis un avis favorable sur
l'amendement qui avait été initialement présenté par M. le rapporteur. Je ne
vois pas de raison de supprimer cet article. Le Gouvernement est donc
défavorable à cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 53.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Michaux-Chevry.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Je suis très contente que le rapporteur ait envie de me soutenir, mais je
tiens à lui dire que je suis grande, majeure et que je me défends bien.
Actuellement, en Guadeloupe, nous avons utilisé 257 millions de francs de
fonds structurels européens et les crédits prévus au contrat de plan 1994-1999
ont été consommés à hauteur de 90 %. Pourquoi les fonds européens ne sont-ils
pas consommés ? Est-ce la commission des lois du Sénat qui va se réunir à la
préfecture et décider ceci ou cela qui permettra de mettre en place les
dossiers éligibles ? Pour que les dossiers soient éligibles, il faut d'abord
que le Gouvernement nous laisse mettre en place un fonds de préfinancement des
fonds européens, puisque la région de Guadeloupe a les moyens de le faire.
Croyez-vous qu'un agriculteur ruiné par un cyclone, qui a fait l'avance des
fonds s'agissant de dossiers européens, peut attendre pendant deux ans que ces
sommes transitent par le budget du ministère des finances ?
Savez-vous, mes chers collègues, que, à l'heure où je vous parle - et M. le
secrétaire d'Etat ne me démentira pas - sur les années 1998-1999, on doit à la
région de Guadeloupe 257 millions de francs, que l'Europe a déjà payés et qui
ne lui ont pas été reversés ?
Qu'allons-nous faire ? Nous allons créer de petites structures locales pour
aider les entreprises, les socioprofessionnels, la chambre des métiers, à
monter leurs dossiers.
Croyez-vous que c'est une commission réunissant l'association des maires, la
chambre de commerce, le conseil économique et social qui, en bavardant pendant
deux heures à la préfecture, va régler le problème de financement des fonds
européens ? Le comité national de suivi de l'utilisation des fonds européens
existe. Il fonctionne parfaitement ; il nous contrôle.
Mes chers collègues, je tiens à vous dire que, connaissant bien mon contrat de
plan, je sais que, durant les trois premières années, si je veux obtenir un «
bonus », il faut que je consomme beaucoup, et je consommerai beaucoup. Par
conséquent, je n'ai pas besoin d'une grand-messe solennelle pour m'empêcher de
travailler.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
M. José Balarello,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Je ferai simplement deux remarques à Mme Michaux-Chevry.
Premièrement, il n'y a pas que la Guadeloupe parmi les départements
d'outre-mer.
Deuxièmement, le dernier alinéa du texte de l'amendement sénatorial adopté en
première lecture prévoit les dispositions suivantes : « Cette commission
établit un rapport semestriel sur la consommation des crédits ». La solution
consiste peut-être à faire figurer dans ce rapport les propositions de
préfinancement des parts communales, départementales et régionales,
propositions qui ne sont jamais faites, ce qui est à l'origine - Mme
Michaux-Chevry vient de le dire - de la sous-consommation des crédits
européens.
Comme les crédits européens sont multipliés par
x
dans la période
2000-2006, si vous n'avez pas consommé la totalité des crédits européens - vous
l'avez dit vous-même, madame Michaux-Chevry : vous n'en avez consommé que 90 %
- avec la multiplication de ces crédits d'importance salutaire pour les
départements d'outre-mer, vous n'arriverez pas davantage à les consommer.
Raison de plus pour que la commission de suivi vous donne brièvement, dans un
rapport, les causes de cette sous-consommation.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 53, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 37
ter
est supprimé.
Chapitre IV
De la création de deux départements à la Réunion
M. le président.
Par amendement n° 33, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
supprimer cette division et son intitulé.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
La commission demande la réserve de cet amendement
jusqu'après l'examen de l'article 38
bis
, monsieur le président. Il
s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
La réserve est ordonnée.
Article 38
M. le président.
« Art. 38. - Il est créé au 1er janvier 2001 sur le territoire de la Réunion
deux départements qui prennent respectivement les noms de département de la
Réunion du Nord et de département de la Réunion du Sud.
« Le département de la Réunion du Nord comprend les communes suivantes : La
Possession, Le Port, Saint-Denis, Sainte-Rose, Sainte-Marie, Sainte-Suzanne,
Saint-André, Bras-Panon, Saint-Benoît, La Plaine-des-Palmistes et Salazie. Le
chef-lieu du département du Nord est Saint-Denis.
« Le département de la Réunion du Sud comprend les communes suivantes : Les
Trois-Bassins, Saint-Paul, L'Etang-Salé, Saint-Leu, Les Avirons, Saint-Louis,
Cilaos, Entre-Deux, Le Tampon, Saint-Pierre, Petite-Ile, Saint-Joseph et
Saint-Philippe. Le chef-lieu du département de la Réunion du Sud est
Saint-Pierre.
« Le département de la Réunion est supprimé à la date de création des nouveaux
départements. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune. Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 34 est présenté par M. Balarello, au nom de la commission.
L'amendement n° 54 est déposé par M. Lauret et les membres du groupe du
Rassemblement pour la République et apparentés.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
Par amendement n° 48 M. Vergès propose, à la fin du premier alinéa de cet
article, de remplacer les mots : « département de la Réunion du Nord et de
département de la Réunion du Sud », par les mots : « département de la Réunion
Au-Vent et de département de la Réunion Sous-le-Vent. ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 34.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement a pour objet, je le rappelle, de supprimer
l'article 38, qui prévoit la bidépartementalisation de la Réunion. Selon le
texte adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, cette mesure
devrait entrer en vigueur dès le 1er janvier 2001.
Une telle réforme, qui aurait pu être justifiée par des considérations
relatives à l'évolution démographique ou à l'aménagement du territoire, ne
devrait être envisagée que si elle rencontrait l'accord unanime des élus
réunionnais. Or tel n'est pas le cas.
Si une majorité des parlementaires de l'île s'est prononcée en faveur de la
création d'un second département, en revanche, le conseil régional et le
conseil général ont émis un avis défavorable sur l'avant-projet de loi soumis à
concertation par le Gouvernement.
Cette réforme - vous l'avez laissé entendre, monsieur le secrétaire d'Etat -
ne devrait pas non plus être envisagée sans l'adhésion de la population. Or la
population réunionnaise, consultée par sondage, a montré sa vive hostilité à ce
projet. Selon un sondage récent, 63 % des Réunionnais sont opposés à la
création d'un second département. La presse locale s'est fait l'écho de
différentes manifestations contre les deux départements.
En outre, il serait plus opportun de s'attacher à lutter contre le chômage des
jeunes, problème majeur à la Réunion, plutôt que de créer un second département
entraînant des dépenses publiques supplémentaires.
Enfin, permettez-moi de faire remarquer au Gouvernement que, tant sur le plan
des principes que sur le plan pratique, il apparaît inhabituel et déraisonnable
de modifier de façon aussi substantielle les règles du jeu à moins de six mois
des élections cantonales. Il est à craindre que cette réforme, déjà peu
souhaitée sur place, soit d'autant moins bien acceptée que sa mise en oeuvre
apparaîtra brusquée. Il pourrait en effet s'écouler moins d'un mois entre la
promulgation de la loi et la création du second département !
Telle est la raison pour laquelle la commission des lois demande la
suppression de cet article.
M. le président.
La parole est à Lauret, pour défendre l'amendement n° 54.
M. Edmond Lauret.
Une très forte opposition s'exprime contre le projet de bidépartementalisation
de l'île de la Réunion. Elle vient des assemblées locales, conseil général et
conseil régional, qui non seulement ont refusé le projet de découpage, mais
également se sont prononcées contre le principe même de la
bidépartementalisation.
Se sont aussi prononcés contre ce projet le patronat et les syndicats locaux,
les associations de chômeurs, les chambres de commerce et d'industrie ; bref,
toutes les forces vives du département.
Le Président de la République, M. Jacques Chirac, à l'occasion d'un discours
prononcé à la Martinique, le 11 mars 2000, avait conditionné l'aboutissement du
dosseir à l'accord préalable des élus. Cet accord préalable n'est pas intervenu
à ce jour.
Par ailleurs, la population consultée par sondage a clairement montré son
hostilité.
Comme l'indiquait M. le rapporteur, 63 % des habitants de la Réunion
s'opposent à ce projet de découpage, l'estimant cher, inutile et dangereux.
Dans le chef-lieu, Saint-Denis, dont M. Tamaya, auteur du rapport contesté, est
le député, 13 % seulement de la population sont favorables à cette
proposition.
Enfin, l'article 38 est contraire à l'article 40 de la Constitution. En effet,
issu d'un amendement parlementaire adopté par l'Assemblée nationale, cet
article a pour effet d'aggraver les charges publiques. Il ne me semble donc pas
recevable.
M. le président.
La parole est à M. Vergès, pour défendre l'amendement n° 48.
M. Paul Vergès.
Cet amendement est de pure logique. Permettez-moi un rappel historique.
Dès le début de son histoire, l'île de la Réunion a été partagée en deux
régions bien distinctes, dont les contours correspondent aux deux
départements.
La dénomination de ces deux régions découlait d'un décret de la Constituante
du 17 décembre 1790 divisant l'île en deux districts : celui de la
Réunion-du-Vent et celui de la Réunion-sous-le-Vent, chacun d'eux ayant à sa
tête une assemblée administrative, j'allais dire un conseil général. Ces
dénominations sont confirmées, sous l'influence des sociétés populaires, le 10
Brumaire an III.
Je pense qu'il y a là une continuité historique à respecter. Nous proposons
donc qu'au lieu de parler du département du Nord, qui oublie l'Est, et du
département du Sud, qui oublie l'Ouest, nous reprenions les dénominations
historiques.
Mais, s'agissant de l'article 38 et d'un certain nombre d'amendements qui
l'affectent, je voudrais appeler l'attention de mes collègues sur une
interprétation que je considère très large de la Constitution.
Nous discutons des départements d'outre-mer. Or je lis, à l'article 72 de la
Constitution, que les collectivités territoriales de la République « sont les
communes, les départements et les territoires d'outre-mer ». Il n'est pas
question des « départements » d'outre-mer. Et l'article 72 précise que « toute
autre collectivité territoriale est créée par la loi ». Quant à l'article 73,
il prévoit que « le régime législatif et l'organisation administrative des
départements d'outre-mer peuvent faire l'objet de mesures d'adaptation
nécessitées par la situation particulière ».
Or j'entends ici des collègues formuler toutes sortes de demandes concernant
la création d'un deuxième département. Il faudrait, nous dit-on, consulter la
population. Autant alors dire clairement qu'il s'agit ici de se prononcer pour
ou contre l'exercice du droit à l'autodétermination, c'est-à-dire du droit des
peuples à disposer d'eux-mêmes.
M. Pierre Hérisson.
Et la République ?
M. Paul Vergès.
L'article 72 - « Les collectivités de la République sont les communes, les
départements et les territoires d'outre-mer » - implique que ces départements
font partie de la République, ce qui interdit, en cas de changement de statut,
que l'on consulte la population concernée. Car un changement de statut exige la
consultation de l'ensemble du peuple français,...
M. Paul Masson.
C'est valable pour la Corse !
M. Paul Vergès.
... de l'ensemble de la République.
Vous avez eu l'exemple du changement de statut de la Nouvelle-Calédonie, et
vous serez consultés pour la modification de celui de la Polynésie, soit par un
référendum, comme pour la Nouvelle-Calédonie, soit par la réunion du Parlement
en Congrès.
Si vous introduisez, dans l'organisation interne des collectivités de la
République, la consultation de la population de la collectivité concernée, à ce
moment-là, vous créez, parmi les collectivités de la République, des
collectivités particulières. Notre collègue va jusqu'à dire que, si l'on touche
au périmètre du département de la Réunion, toute la population sera consultée.
C'est contraire à l'esprit de tout le droit public. Prenez le cas d'une commune
qui fait l'objet d'un détachement. C'est le conseil municipal tout entier qui
décide de ce détachement, et la population de la zone détachée, elle, va élire
des représentants pour appliquer la décision du conseil municipal.
On peut donc être pour ou contre la bidépartementalisation, mais, en l'espèce,
prévoir la consultation des populations, c'est contraire à l'esprit de la
Constitution. Ou bien alors il s'agit de l'exercice du droit à
l'autodétermination, mais autant être clair et le dire.
Encore une fois, mes chers collègues, les articles 72 et 73 de la
Constitution, qui concernent l'organisation interne de la République, imposent,
pour tout changement de statut, la consultation de l'ensemble de la
République.
J'ai entendu parler ce soir encore de « sondages ». Mais c'est abdiquer les
droits du Parlement, c'est abdiquer le droit du Parlement de légiférer sur tout
changement de statut. Les sondages, comme disait l'autre, ça va, ça vient !
(Sourires.)
Le seul sondage grandeur nature que nous aurons, c'est dans quatre mois. Et
là, j'aurais tendance à être d'accord - une fois n'est pas coutume - avec le
secrétaire de la fédération du RPR de la Réunion
(Sourires sur les travées du RPR),
quelqu'un de très bien, d'ailleurs -
qui, il y a quarante-huit heures encore, à la télévision, demandait que la
bidépartementalisation ne soit pas placée au centre des élections municipales,
au risque que cela se retourne contre nous et que cela nous divise.
Entendez son appel plutôt que celui des sirènes d'ici.
M. le Président de la République a dit, en Martinique, qu'il était favorable à
la création de deux départements, à condition qu'on consulte les élus. Mais ils
ont été consultés ! C'est l'unanimité des députés et deux sénateurs sur trois !
Et j'entends répéter ici que les deux assemblées se sont prononcées contre : ce
n'est plus vrai ! La majorité dans les deux assemblées, et je parle sous le
contrôle de notre collègue M. Edmond Lauret,...
M. Edmond Lauret.
Nous avons quatre délibérations !
M. Paul Vergès.
Certes, mais la majorité très courte - deux ou trois voix - a été acquise en
fonction, et vous le savez,...
M. Edmond Lauret.
Elle a été acquise, oui ou non ?
M. Paul Vergès.
Oui, mais parce qu'un périmètre n'avait pas été accepté.
M. Edmond Lauret.
C'est faux !
M. Paul Vergès.
Ce périmètre ayant été changé, ceux qui avaient voté contre ont voté pour.
M. Edmond Lauret.
C'est faux !
M. Paul Vergès.
Mais n'interprétez pas les déclarations de nos collègues socialistes : chacun
son domaine !
(Sourires sur les travées du RPR.)
Cette parenthèse étant fermée, j'attire l'attention de nos collègues sur le
fait que les procédures que je vois suggérées ici, de sondage ou de
consultation de la population, sont contraires à la Constitution de la
République, sauf exception, et cette exception, c'est de prononcer le droit à
l'autodétermination des habitants des quatre régions d'outre-mer. A ce
moment-là, vous aurez la voix calédonienne. Lorsque l'on a créé les
départements de la région parisienne, lorsque l'on a créé l'assemblée de Corse
et que d'un département on en a fait deux, jamais vous n'avez eu cette
consultation interne : s'agissant de territoires de la République, c'est le
Parlement qui a statué.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 48 ?
M. José Balarello,
rapporteur.
La commission a émis un avis bien évidemment défavorable sur
l'amendement n° 48.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 34, 54 et 48 ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
J'ai eu l'occasion, lors de la discussion générale,
d'avancer un certain nombre d'arguments qui, à mon sens, plaidaient fermement
pour la bidépartementalisation. Je ne voudrais pas renouveler cette
démonstration, mais je souhaite relever un des termes employés par M. Payet,
qui a évoqué la « diabolisation » de la bidépartementalisation à laquelle il
est de bon ton de se livrer ce soir.
En effet, un certain nombre des arguments mis en avant ce soir me paraissent
tout à fait erronés. Il est vrai que les assemblées locales ont pris leur
position sur la base d'un partage entre les deux départements qui n'est pas
celui que propose aujourd'hui au Parlement le Gouvernement.
M. Edmond Lauret.
Non, c'est faux !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Il est vrai également que, si un certain nombre d'élus
locaux, au conseil général comme au conseil régional, se sont sans doute
prononcés contre la bidépartementalisation par principe et pour des raisons de
fond qui leur appartiennent, d'autres, en revanche - permettez-moi, monsieur
Lauret, de le dire, d'autant plus qu'il s'agit d'élus locaux appartenant, pour
plusieurs d'entre eux, au parti socialiste - ont fondé leur position pour
l'essentiel sur le partage initialement opéré par le projet soumis à ces
assemblées.
M. Edmond Lauret.
C'est faux !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Donc, cela conduit, sinon à contredire, du moins à
relativiser ces décisions.
Vous avez également indiqué, monsieur le rapporteur, que, par ce dispositif,
on allait modifier les règles du jeu électoral six mois avant les élections
cantonales. Or, dans la proposition du Gouvernement, rien n'est changé. Il n'y
a ni création de canton ni nouveaux conseillers généraux à la Réunion, malgré
la bidépartementalisation ni modification de la durée des mandats - on n'abroge
pas les mandats existants - ni modification des séries qui doivent être
renouvelées. Donc, il n'y a pas, à proprement parler, modification des règles
du jeu électoral. Il était de mon devoir de le dire.
Enfin, vous n'entendrez jamais le Gouvernement faire de la
bidépartementalisation la seule priorité de la politique qui est menée en
faveur de l'île de la Réunion. La bidépartementalisation est, certes, l'un des
éléments importants du projet de loi d'orientation pour l'outre-mer. Pour
autant, nous sommes ici très majoritairement d'accord pour considérer que le
combat principal, l'enjeu majeur, c'est bien la lutte contre le chômage.
Et nous avons, en effet, dans ce texte, des réponses concrètes à ce problème.
Il suffit de voir d'ailleurs, au-delà même du projet de loi d'orientation,
l'accueil presque unanime réservé par tous les milieux professionnels de la
Réunion au nouveau texte de soutien fiscal à l'investissement outre-mer pour
bien comprendre que nous avons engagé avec l'ensemble des acteurs
socioprofessionnels de cette île un dialogue que je crois tout à fait
fructueux, et qui permettra effectivement de s'attaquer à ce qui est
aujourd'hui l'enjeu majeur, c'est-à-dire le chômage.
M. José Balarello,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Monsieur le secrétaire d'Etat, en affirmant que vous ne
modifiez pas les règles du jeu, vous allez un peu loin. En effet, à l'Assemblée
nationale, vous avez ajouté : « Il est créé au 1er janvier 2001...
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Les députés l'ont souhaité !
M. José Balarello,
rapporteur.
Certes, les députés l'ont souhaité, mais vous l'avez accepté
! Vous avez ajouté, disais-je, « Il est créé au 1er janvier 2001 sur le
territoire de la Réunion deux départements... » Vous n'allez pas nous dire que
cela n'interfère pas avec les élections cantonales qui auront lieu en mars
2001, c'est-à-dire deux mois et demi ou trois mois plus tard.
(Eh oui ! sur
plusieurs travées du RPR.)
Puisque vous changez la structure même du
département, ne venez pas nous dire que les séries ne sont pas modifiées.
M. Hilaire Flandre.
C'est du charcutage !
M. José Balarello,
rapporteur.
En effet, vous avez d'ores et déjà prévu la date, ce qui est
assez exceptionnel. Je vois vos collaborateurs sourire.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Ils sont fatigués !
M. José Balarello,
rapporteur.
Peut-être en savent-ils plus que moi à ce sujet.
(Sourires
sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Permettez-moi également de vous dire que vous avez « charcuté » le
département. En effet, vous avez d'ores et déjà prévu les communes et les
cantons qui composeront les futurs conseils généraux.
(Marques d'approbation
sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et
Indépendants.)
MM. Pierre Hérisson et Jean-Jacques Hyest.
Et les sénateurs !
M. José Balarello,
rapporteur.
Personnellement, je n'ai jamais vu faire cela à quelques mois
des élections !
(Applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Louis de Broissia.
Ils sont pris la main dans le sac !
M. le président.
Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 34 et n° 54.
M. Edmond Lauret.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lauret.
M. Edmond Lauret.
En ce qui concerne les votes des assemblées locales, je voudrais « tordre le
cou » à ce qui est dit ce soir sur les travées de la gauche de cet
hémicycle.
Dans chaque assemblée, conseil général et conseil régional, deux votes ont eu
lieu. Le premier concernait le projet du Gouvernement, avec un premier
découpage. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous autorise à m'interrompre si
ce que je dis n'est pas la vérité. Le conseil général et le conseil régional
ont refusé ce projet. Certains conseillers généraux et conseillers régionaux
socialistes ont alors présenté une motion sur le principe de la
bidépartementalisation avec un autre découpage éventuel. Le conseil général et
le conseil régional ont voté contre. Bref, on a voté contre le projet du
Gouvernement et contre le principe même de la bidépartementalisation.
Mme Nelly Olin.
C'est clair !
M. Edmond Lauret.
Par ailleurs, je fais remarquer à M. le secrétaire d'Etat qu'en ce qui
concerne, notamment, les élections sénatoriales, on modifie les règles du jeu,
puisque nous allons passer du scrutin proportionnel au scrutin majoritaire.
M. Jean-Jacques Hyest.
C'est plutôt un bien !
M. Edmond Lauret.
Notre problème à la Réunion, c'est l'emploi. Avec la bidépartementalisation,
nous aurons quelques emplois de hauts fonctionnaires, un préfet, un
trésorier-payeur général, un directeur des impôts. Moi, je préfère des emplois
d'ouvrier dans l'industrie, des emplois d'agriculteur et des emplois dans le
tourisme.
(Applaudissements sur les travées du RPR et sur plusieurs travées
de l'Union centriste.)
M. Paul Girod.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod.
J'ai été le rapporteur du statut des régions d'outre-mer, voilà bien des
années. Cela m'a amené à aller à la Réunion et à connaître cette île
superbe.
J'avoue que je suis un peu désarçonné par le débat qui a lieu en ce moment. En
effet, si j'ai bien compris, les élus locaux ont, par des votes successifs,
émis au minimum des réserves sur la réforme qui est proposée.
Nous sommes à quatre mois et demi des élections cantonales. On nous explique
qu'il est urgent de changer totalement la configuration administrative et,
soyons clairs, politique de l'île, et que le point d'appui du Gouvernement est
le changement d'opinion d'un groupe politique à l'intérieur des deux assemblées
qui régissent actuellement la vie de cette île. Pour ma part, dès que j'entends
dire qu'un groupe politique vient de changer d'opinion à lui seul, j'ai tout de
suite quelque scrupule à suivre le raisonnement qu'on tente de m'instiller.
Mais il y a beaucoup plus grave. En définitive, on va s'appuyer sur une
opinion plus ou moins bien formulée par des assemblées en fin de mandat. Il
serait si simple de reporter une réforme éventuelle après les élections qui
vont venir, en sachant que, bien évidemment, la campagne électorale se
déroulera sur ce thème-là.
M. Jean-Claude Carle.
Bien sûr !
M. Paul Girod.
On saura qui est mandaté par la population pour dire qu'il est d'accord pour
une départementalisation et qui est mandaté pour dire le contraire. Nous
examinerons, tout à l'heure, un amendement qui tend à prévoir une consultation
de la population. Je ne suis pas absolument certain qu'il soit totalement
constitutionnel, même si j'indique d'avance à M. Lauret que je le soutiendrai.
Dans la réalité, nous allons avoir une consultation du peuple normalement
organisée,...
M. Hilaire Flandre.
Grandeur nature !
M. Paul Girod.
... et la campagne électorale qui la précédera sera effectivement faite sur ce
thème. Par conséquent, la réponse de la population sera connue par le résultat
des élections si l'on ne change rien avant ; dans le cas contraire, on aura une
réponse qui sera d'avance biaisée par rapport à une population qui a son
sentiment sur l'affaire et dont on nous dit que seuls les élus nationaux sont
responsables de la réponse.
Pour ma part, je crois que l'on se trompe totalement de débat et qu'il faut
revenir à ce qui est l'essentiel de notre vie démocratique.
M. Jacques Peyrat.
C'est vrai !
M. Paul Girod.
Quand il y a une question posée et que l'on a en plus à quelque trois mois
près l'occasion d'avoir la réponse de la population, on attend la réponse de la
population. C'est pourquoi je voterai les amendements de suppression.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants, ainsi que sur plusieurs travées de l'Union centriste.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 34 et 54, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'article 38 est supprimé et l'amendement n° 48 n'a plus
d'objet.
Article 38 bis
M. le président.
« Art. 38
bis.
- 1. Dès leur création, les départements de la Réunion
du Nord et de la Réunion du Sud sont, pour l'application des textes de nature
législative ou réglementaire applicables au département de la Réunion,
substitués à ce département.
« Dès leur création, les nouveaux départements sont substitués de plein droit
au département de la Réunion dans toutes ses délibérations et tous ses
actes.
« Les contrats sont exécutés dans les conditions antérieures jusqu'à leur
échéance, sauf accord contraire des parties. La substitution des nouveaux
départements au département de la Réunion dans les contrats conclus par
celui-ci n'entraîne aucun droit à résiliation ou à indemnisation pour le
cocontractant. Ce dernier est informé de cette substitution par le nouveau
département.
« 2. Le mandat des représentants du département de la Réunion dans les
organismes extérieurs prend fin à la date de la désignation des représentants
des nouveaux départements. Lorsque les attributions d'un de ces organismes
s'exercent sur le territoire des deux nouveaux départements, chacun de ceux-ci
dispose d'au moins un représentant dans cet organisme. Lorsque le nombre de
représentants du département de la Réunion est supérieur à deux, les sièges
sont répartis entre les deux nouveaux départements en proportion de leur
population.
« Le mandat des administrateurs des organismes chargés de la gestion d'un
service public dans le département de la Réunion prend fin à compter de
l'installation des administrateurs des organismes chargés de la gestion de ce
service dans les limites des nouveaux départements.
« 3. Sauf exceptions prévues par la présente loi, les nouveaux conseils
généraux procèdent à la création des établissements publics départementaux
prévus par les dispositions législatives en vigueur. Les établissements
nouvellement créés se substituent aux anciens établissements dans les
conditions fixées aux 1 à 14, sous réserve des adaptations prévues par décret
en Conseil d'Etat.
« 4. Les emplois afférents aux personnels de l'ancien département de la
Réunion sont répartis entre les nouveaux départements dans un délai de six mois
à compter de leur création. Cette répartition est constatée par un procès
verbal établi contradictoirement entre les présidents des conseils généraux des
nouveaux départements.
« A défaut d'accord, les emplois sont répartis par un décret en Conseil d'Etat
pris dans les six mois suivant l'expiration du délai prévu à l'alinéa
ci-dessus.
« 5. Lorsque la répartition des emplois prévue au 4 est effectuée, chaque
agent de l'ancien département est invité à formuler ses voeux pour être affecté
sur l'un de ces emplois. Ces voeux sont satisfaits dans la limite des emplois
disponibles.
« Les emplois non pourvus à l'issue de la procédure prévue au premier alinéa
sont proposés aux agents non encore affectés par accord conjoint des deux
présidents des conseils généraux.
« 6. En cas de refus par un fonctionnaire de l'affectation qui lui est
proposée dans le cadre de la procédure prévue au deuxième alinéa du 5, il est
fait application des dispositions des articles 97 et 97
bis
de la loi n°
84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la
fonction publique territoriale. Toutefois, pour l'application de ces
dispositions :
« - la période de maintien en surnombre prévue au premier alinéa du I de
l'article 97 est portée à trois ans ;
« - la contribution prévue au premier alinéa de l'article 97
bis
est
versée par le département de la Réunion du Nord.
« En cas de refus par un agent contractuel de l'affectation qui lui est
proposée, l'agent conserve son emploi, le cas échéant en surnombre, jusqu'au
terme normal de son contrat, lorsque celui ci est à durée déterminée.
« 7. Pendant une période de trois ans à compter de la création des nouveaux
départements, il ne peut être fait appel à des personnes extérieures pour
pourvoir les emplois de ceux ci qu'à défaut de candidats parmi les personnels
de l'ancien département possédant les qualifications requises.
« Les personnels de l'ancien département de la Réunion conservent dans les
nouveaux départements leurs droits acquis et l'ensemble des avantages dont ils
bénéficiaient.
« 8. A compter de la création des nouveaux départements, les personnels du
département de la Réunion sont provisoirement affectés au département de la
Réunion du Nord.
« A compter de la même date et jusqu'à l'expiration d'un délai d'un an après
la répartition des emplois prévue au 4, le président du conseil général de la
Réunion du Sud dispose, en tant que de besoin, des services du département de
la Réunion du Nord pour la préparation et l'exécution des délibérations du
conseil général. Il adresse directement aux chefs de service toutes
instructions nécessaires pour l'exécution des tâches qu'il leur confie et dont
il contrôle l'exécution. Il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité,
donner délégation de signature aux chefs de service pour l'exécution des
missions qu'il leur confie.
« 9. Il est rétabli, après l'article 18 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984
précitée, un article 18
bis
ainsi rédigé :
«
Art. 18
bis. - Les communes des départements de la Réunion du Nord
et de la Réunion du Sud et leurs établissements publics remplissant les
conditions d'affiliation obligatoires définies à l'article 15 sont affiliés
obligatoirement à un centre interdépartemental unique qui assure les missions
normalement dévolues aux centres de gestion.
« Les départements de la Réunion du Nord et de la Réunion du Sud, les communes
situées dans ces départements, leurs établissements publics ainsi que la région
de la Réunion et les établissements publics à vocation régionale ou
interdépartementale dont le siège est situé dans la région peuvent s'affilier
volontairement à ce centre interdépartemental unique dans les conditions
prévues à l'article 15.
« Les dispositions du présent article entrent en vigueur au 1er janvier 2001.
»
« 10. Un décret déterminera les modalités d'une compensation financière entre
les deux nouveaux départements, destinée à compenser les surcroîts de dépenses
supportés par le département de la Réunion du Nord, dus notamment à
l'affectation dans cette collectivité des personnels non répartis entre les
deux départements.
« 11. Dès la création des nouveaux départements, les biens meubles et
immeubles du département de la Réunion, à l'exclusion de ceux mentionnés au 13,
ainsi que les droits et obligations qui leur sont attachés sont transférés de
plein droit dans le patrimoine du nouveau département sur le territoire duquel
ils sont situés.
« Les nouveaux départements peuvent s'accorder pour modifier la répartition
résultant des transferts prévus au premier alinéa.
« 12. Lorsque les biens mentionnés au 11 sont situés hors du territoire de la
Réunion, ces biens, ainsi que les droits et obligations qui s'y attachent, sont
transférés par accord entre les nouvelles collectivités à l'une d'entre elles
ou à une institution interdépartementale. Si aucun accord n'est intervenu dans
les six mois suivant la création des nouveaux départements, le transfert est
effectué par un décret en Conseil d'Etat.
« 13. Les disponibilités déposées au Trésor, les engagements financiers donnés
ou reçus, les capitaux et les immobilisations incorporelles du département de
la Réunion sont répartis entre les nouveaux départements proportionnellement à
leur population.
« Dans un délai de six mois à compter de la création des nouveaux
départements, le transfert définitif des biens mentionnés au premier alinéa est
constaté par un procès verbal établi contradictoirement entre les présidents
des conseils généraux des nouveaux départements et précisant la nature, la
situation juridique et l'état des biens transférés. A défaut d'accord, les
nouveaux départements peuvent recourir, deux mois au moins avant l'expiration
du délai mentionné précédemment, à l'arbitrage du président de la chambre
régionale des comptes.
« Toutefois, sur la demande conjointe des deux nouveaux départements ou si
aucun accord ou arbitrage n'est intervenu dans le délai prévu à l'alinéa
précédent, la répartition des biens mentionnés au premier alinéa est effectuée
par un décret en Conseil d'Etat pris dans les six mois suivant l'expiration de
ce délai.
« Jusqu'à leur répartition, les biens mentionnés au premier alinéa sont
provisoirement affectés au département de la Réunion du Nord.
« 14. Les transferts de biens, droits et obligations prévus à la présente
section ne donnent lieu à aucune indemnité, droit, taxe, salaire ou
honoraire.
« 15. L'article L. 1424-49 du code général des collectivités territoriales est
complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. - Les dispositions du présent chapitre s'appliquent à la Réunion dans
les conditions suivantes :
« 1° Le service d'incendie et de secours de la Réunion est un service
interdépartemental.
« Le service interdépartemental d'incendie et de secours se substitue au
service départemental dans tous ses biens, droits et obligations ;
« 2° Le règlement opérationnel est arrêté conjointement par les deux préfets
dans les conditions prévues à l'article L. 1424-4 ;
« 3° Le schéma interdépartemental d'analyse et de couverture des risques est
élaboré, arrêté et révisé sous l'autorité conjointe des deux préfets dans les
conditions prévues à l'article L. 1424-7 ;
« 4° En 2001, la contribution prévue à l'article L. 1424-35 est répartie entre
les deux départements au prorata de leur population ;
« 5° Le contrôle de légalité et le contrôle budgétaire des actes du service
interdépartemental d'incendie et de secours sont exercés par le préfet du
département de la Réunion du Nord ;
« 6° Pour l'application à la Réunion des dispositions du présent code, il y a
lieu de lire : "service interdépartemental d'incendie et de secours" au lieu de
: "service départemental d'incendie et de secours" ;
« 7° Pour l'application à la Réunion des dispositions du présent chapitre, il
y a lieu de lire :
« - "préfet de région" au lieu de : "autorité compétente de l'Etat" et de :
"préfet", sauf pour l'application des articles L. 1424-3, L. 1424-4, L. 1424-7
et L. 1424-33 ;
« - "conseils généraux" au lieu de : "conseil général" ;
« - "présidents des conseils généraux" au lieu de : "président du conseil
général" ;
« - "départements" au lieu de : "département" ;
« - "schéma interdépartemental d'analyse et de couverture des risques" au lieu
de : "schéma départemental d'analyse et de couverture des risques" ;
« - "corps interdépartemental" au lieu de : "corps départemental" ;
« - "commission consultative interdépartementale" au lieu de : "commission
consultative départementale" ;
« - "directeur interdépartemental" au lieu de : "directeur départemental" ;
« - "centre opérationnel interdépartemental" au lieu de : "centre opérationnel
départemental".
« 16.
a)
Par dérogation à l'article 30 de la présente loi, il est créé
à la Réunion un office de l'eau interdépartemental.
« Les modalités d'organisation de cet office sont fixées par décret en Conseil
d'Etat.
«
b)
Par dérogation à l'article L. 213-4 du code de l'environnement, il
est créé à la Réunion un comité de bassin. Ce comité de bassin, outre les
compétences qui lui sont conférées par l'article L. 213-2 du même code, est
associé, s'il y a lieu, à l'élaboration des adaptations facilitant
l'application des dispositions des chapitres Ier à IV, VI et VII du titre Ier
du livre II dudit code.
« 17. L'arrêté des comptes du dernier exercice du département de la Réunion
est constitué par le vote du conseil général de chacun des nouveaux
départements sur le compte administratif présenté conjointement par les
présidents des conseils généraux des nouveaux départements après transmission
du compte de gestion établi par le comptable du département de la Réunion. Le
compte administratif est arrêté si une majorité des voix ne s'est pas dégagée
contre son adoption dans une au moins des deux assemblées. Le vote intervient
dans un délai de trois mois à compter de l'installation des conseils
généraux.
« Si les comptes du département de la Réunion n'ont pas été arrêtés dans les
délais prévus au premier alinéa, l'arrêté des comptes est effectué
conjointement par les préfets des départements de la Réunion du Nord et de la
Réunion du Sud, après avis de la chambre régionale des comptes. Les préfets
transmettent alors le premier budget primitif des nouveaux départements à la
chambre régionale des comptes.
« Les nouveaux départements procèdent par délibération budgétaire à la reprise
de l'actif, du passif et des résultats de fonctionnement et d'investissement du
département de la Réunion, conformément à la répartition résultant de
l'application des dispositions des 11 à 13. Le détail des opérations non
budgétaires justifiant cette reprise est joint en annexe au document budgétaire
procédant à la reprise des résultats.
« 18. Dès la création des nouveaux départements et jusqu'à l'adoption de leur
budget, les présidents des conseils généraux peuvent mettre en recouvrement les
recettes et engager, liquider et mandater les dépenses de la section de
fonctionnement, dans la limite de celles inscrites au dernier budget du
département de la Réunion et réparties au prorata de la population de leur
département.
« Les présidents des conseils généraux peuvent également mandater les dépenses
afférentes au remboursement en capital des annuités de la dette venant à
échéance avant le vote du budget, dans la limite des engagements financiers
transférés conformément aux dispositions du 13.
« 19. Jusqu'à l'adoption du budget des nouveaux départements, ou jusqu'au 31
mars en l'absence d'adoption du budget avant cette date, les présidents des
conseils généraux peuvent engager, liquider et mandater les dépenses
d'investissement, dans la limite du quart des crédits ouverts du dernier budget
du département de la Réunion et répartis au prorata de la population de leur
département, non compris les crédits afférents au remboursement de la dette.
Les dépenses à caractère pluriannuel incluses dans une autorisation de
programme peuvent être liquidées et mandatées par les présidents des conseils
généraux, dans la limite des crédits de paiement prévus au titre de l'exercice
par la délibération d'ouverture d'autorisation de programme et, lorsque
l'autorisation de programme concerne des travaux intéressant les deux nouveaux
départements, répartis au prorata de la population de leur département.
« Les actes des présidents des conseils généraux prévus au premier alinéa ne
peuvent être effectués que sur autorisation du conseil général précisant le
montant et l'affectation des crédits. Les crédits correspondants sont inscrits
au budget du département lors de son adoption. Le comptable est en droit de
payer les mandats et de recouvrer les titres de recettes émis dans les
conditions ci-dessus.
« 20. Pour l'application en 2001 aux nouveaux départements des dispositions du
I de l'article 1636 B
sexies
du code général des impôts, les taux de
référence sont ceux votés en 2000 par le département de la Réunion.
« 21. A compter de 2001, les nouveaux départements perçoivent les
compensations versées en contrepartie des pertes de recettes résultant
d'exonérations ou d'abattements institués au titre de la taxe d'habitation, des
taxes foncières et de la taxe professionnelle qui étaient antérieurement
perçues par le département de la Réunion.
« Pour le calcul de ces compensations, il est fait application des taux
appliqués pour le calcul des mêmes compensations versées au département de la
Réunion et des bases constatées sur le territoire de chacun des nouveaux
départements.
« Toutefois, pour l'application en 2001 du présent article :
« - la compensation prévue au IV de l'article 6 de la loi de finances pour
1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1986) est calculée dans les mêmes conditions
que lorsqu'elle était perçue par le département de la Réunion et versée au
prorata des bases de taxe professionnelle notifiées au nouveau département ;
« - le montant des bases d'imposition exonérées mentionné au deuxième alinéa
du II de l'article 21 de la loi de finances pour 1992 (n° 91-1322 du 31
décembre 1991) est égal au montant des bases exonérées l'année précédente sur
la partie du territoire du département de la Réunion correspondant au nouveau
département ;
« - le produit des taxes mentionnées au troisième alinéa du III de l'article 9
de la loi de finances pour 1993 (n° 92-1376 du 30 décembre 1992) est celui
constaté l'année précédente sur la partie du territoire du département de la
Réunion correspondant au nouveau département ;
« - la perte de base mentionnée au II du D de l'article 44 de la loi de
finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) est celle constatée sur les
seuls établissements existants au 1er janvier 1999 sur la partie du territoire
du département de la Réunion correspondant au nouveau département.
« 22. En 2001, jusqu'au vote du budget primitif de chacun des nouveaux
départements, les attributions mensuelles de taxes et impositions perçues par
voie de rôle sont calculées dans la limite du douzième du montant des
impositions et taxes prévues l'année précédente au budget du département de la
Réunion et constatées pour la même année sur la partie du territoire du
département de la Réunion correspondant au nouveau département.
« 23.
a)
Le B de l'article L. 4434-3 du code général des collectivités
territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« A la Réunion, les sommes prévues au 1° sont affectées à chaque département
au prorata de sa population. Celles prévues au 2° sont affectées à chaque
département au prorata de sa population et de la longueur de sa voirie classée
dans le domaine public départemental. Ces deux critères sont affectés d'un même
coefficient.
«
b)
L'article L. 4434-4 du même code est complété par un alinéa ainsi
rédigé ;
« Pour l'application du premier alinéa à la Réunion, la référence à la
dotation globale de fonctionnement du département est remplacée par la
référence à la somme des dotations globales de fonctionnement des deux
départements. En 2001, la progression s'apprécie par rapport à la dotation
globale de fonctionnement du département de la Réunion en 2000. »
« 24. Pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement attribuée en
2001 aux départements de la Réunion du Nord et de la Réunion du Sud, la
référence aux dotations perçues l'année précédente est remplacée par la
référence aux dotations perçues l'année précédente par le département de la
Réunion et réparties entre les nouveaux départements au prorata de leur
population telle qu'elle est définie à l'article L. 3334-2 du code général des
collectivités territoriales.
« Jusqu'à la notification de la dotation globale de fonctionnement attribuée
en 2001 aux nouveaux départements, les versements mensuels leur revenant au
titre de cette dotation sont calculés dans les mêmes conditions qu'à l'alinéa
précédent.
« 25. En 2001, pour l'application aux nouveaux départements de l'avant-dernier
alinéa de l'article L. 3334-11 du code général des collectivités territoriales
relatif à la dotation globale d'équipement, la référence au montant des crédits
reçus l'année précédente est remplacée par la référence au montant des crédits
reçus l'année précédente par le département de la Réunion et réparti entre les
nouveaux départements au prorata :
« - des dépenses réelles d'investissement du département de la Réunion
réalisées sur le territoire de chacun d'entre eux au cours de l'année
précédente ;
« - de la longueur de la voirie classée dans le domaine public départemental
dévolue à chacun des deux départements.
« 26. Les attributions du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur
ajoutée dues en application des articles L. 1615-1 à L. 1615-10 du code général
des collectivités territoriales sont réparties entre les nouveaux départements
en prenant en compte, pour chacun d'entre eux, les dépenses réelles
d'investissement éligibles réalisées par le département de la Réunion et
afférentes à des biens dont la propriété leur a été définitivement dévolue.
« 27. A titre provisoire, la dotation générale de décentralisation attribuée
en 2001 et 2002 aux nouveaux départements en application des articles L. 1614-1
à L. 1614-7 du code général des collectivités territoriales est égale à celle
qu'aurait perçue le département de la Réunion pour la même période, répartie au
prorata de la population de chacun des deux départements.
« Le droit à compensation relatif à chacune des compétences transférées est
réparti entre les nouveaux départements :
« - au prorata de leur population pour l'action sociale, le fonctionnement des
bibliothèques et les partages de services effectués en application de la loi n°
85-1098 du 11 octobre 1985 relative à la prise en charge par l'Etat, les
départements et les régions des dépenses de personnel, de fonctionnement et
d'équipement des services placés sous leur autorité ;
« - au prorata de la population scolarisée dans les collèges pour le
fonctionnement des collèges et les transports scolaires.
« Le produit théorique de la fiscalité transférée à l'ancien département de la
Réunion en compensation des transferts de compétence est réparti entre les
nouveaux départements au prorata de la fiscalité réelle perçue par chacun
d'entre eux en 2001.
« 28. Les conseillers généraux représentant les cantons compris dans les
limites des départements de la Réunion du Nord et de la Réunion du Sud forment
de plein droit les conseils généraux de ces départements jusqu'à l'expiration
normale de leur mandat.
« Le conseil général de la Réunion du Nord et le conseil général de la Réunion
du Sud se réunissent de plein droit le deuxième vendredi du mois de janvier
2001.
« Ils élisent le président, la commission permanente et le bureau du conseil
général dans les conditions fixées par le chapitre II du titre II du livre Ier
de la troisième partie du code général des collectivités territoriales.
« 29.
a)
Les dispositions figurant au tableau n° 5 annexé au code
électoral dans la colonne "Série B" et relatives à l'élection des sénateurs de
la Réunion sont remplacées par les dispositions suivantes :
Réunion du Nord |
1 |
Réunion du Sud | 2 |
« b) Les dispositions figurant au tableau n° 6 annexé au même code sont remplacées par les dispositions suivantes :
Réunion du Nord |
1 |
Réunion du Sud | 2 |
« c) Les dispositions du présent 29 entrent en vigueur au prochain renouvellement de la série à laquelle appartiennent les départements de la Réunion.
« 30. a) Les dispositions figurant au tableau n° 7 annexé au code électoral et relatives à la répartition des conseillers régionaux de la Réunion entre les collèges chargés de l'élection des sénateurs de la Réunion sont remplacées par les dispositions suivantes :
RÉGION |
EFFECTIF GLOBAL du conseil régional |
DÉPARTEMENT |
CONSEILLERS
électoral sénatorial |
---|---|---|---|
Réunion | 45 | Réunion du Nord | 22 |
. | . | Réunion du Sud | 23 |
«
b)
Dans le mois qui suit la création des nouveaux départements, le
conseil régional procède à la répartition de ses membres entre les collèges
électoraux chargés de l'élection des sénateurs dans les conditions prévues aux
articles L. 293-1 à L. 293-3 du code électoral.
« 31. Les dispositions relatives à la délimitation des circonscriptions
législatives dans les départements de la Réunion du Nord et de la Réunion du
Sud feront l'objet d'une loi ultérieure.
« 32. Pendant la durée nécessaire à la mise en place effective des
institutions et services départementaux, le préfet de la Réunion du Sud aura à
sa disposition les services de l'Etat placés auprès du préfet de région, préfet
de la Réunion du Nord.
« 33. Des décrets en Conseil d'Etat fixent, en tant que de besoin, les
modalités d'application du présent article. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 35 est présenté par M. Balarello, au nom de la commission.
L'amendement n° 55 est proposé par M. Lauret et les membres du groupe du
Rassemblement pour la République et apparentés.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 35.
M. José Balarello,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'amendement
précédent, puisqu'il tend à supprimer l'article 38
bis
introduit par
l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, lequel précise les modalités de la
création au 1er janvier 2001 d'un second département à la Réunion.
M. le président.
La parole est à M. Lauret, pour défendre l'amendement n° 55.
M. Edmond Lauret.
L'article 38
bis
concerne de nombreuses et capitales dispositions qui
sont caractéristiques du projet de loi - suppression d'un département,
répartition des emplois et du patrimoine entre les deux nouveaux départements,
répartition des moyens financiers, représentation des collectivités locales
départementale et régionale au Sénat, conséquence sur la poursuite des mandats
des conseillers généraux - et qui, de ce fait, devraient, à mon sens, faire
l'objet d'un véritable projet de loi et respecter les dispositions de l'article
39, notamment la délibération du conseil des ministres après avis du Conseil
d'Etat, ce qui n'a pas été le cas.
Par ailleurs, cet amendement tire les conséquences du rejet de l'article 38
par la Haute Assemblée.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
L'Assemblée nationale a voté en nouvelle lecture un
amendement qui avait été déposé, je le rappelle de nouveau, par les cinq
députés de l'île de la Réunion. Cet amendement avance la création du second
département de la Réunion au 1er janvier 2001. En conséquence le Gouvernement a
souhaité prévoir dans le projet de loi les modalités concrètes de mise en
oeuvre de cette création. Vous l'avez compris, il n'y a là, au fond, qu'une
recherche de cohérence. Je souligne donc qu'il s'agissait et qu'il s'agit
toujours, avant peut-être que le Sénat ne le supprime, d'un amendement de
cohérence indispensable pour que le législateur exerce dans cette matière toute
sa compétence. En cela, cet amendement est recevable, puisqu'il constitue le
complément indispensable au fonctionnement régulier et continu des institutions
départementales dans l'île de la Réunion.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur les amendements de
suppression.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 35 et 55, repoussés par le
Gouvernement.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président.
En conséquence, l'article 38
bis
est supprimé.
Article additionnel après l'article 38 bis
M. le président.
Par amendement n° 56, M. Lauret propose d'insérer, après l'article 38
bis,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Le statut monodépartemental de la Réunion est confirmé. Toute modification
du périmètre de ce département devra être précédée d'une consultation pour avis
de sa population. »
La parole est à M. Lauret.
M. Edmond Lauret.
La possibilité d'organiser la consultation des populations des départements
d'outre-mer constitue une mesure d'adaptation qui semble entrer dans le champ
de l'article 73 de la Constitution.
En effet, les départements d'outre-mer étant les seules régions françaises
monodépartementales, cette situation singulière justifie qu'une procédure
spécifique de consultation de leur population sur les évolutions
institutionnelles soit mise en place.
La possibilité d'organiser une telle consultation à l'échelle d'une
collectivité territoriale d'outre-mer supracommunale a d'ailleurs été reconnue
par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 4 mai 2000 relative à la loi
organisant la consultation de la population de Mayotte sur l'évolution
institutionnelle de ce territoire.
Le projet de bidépartementalisation de la Réunion voulu par le Gouvernement
suscite une très forte opposition de la population et des élus locaux du
conseil régional et du conseil général, ainsi que de l'ensemble des forces
vives de l'île.
Trois sondages réalisés en l'espace d'un an ont confirmé cette hostilité, le
dernier faisant apparaître que 63 % des habitants s'opposent à ce découpage de
l'île.
Une consultation pour avis s'impose donc ; elle aura le mérite de permettre au
Gouvernement de prendre sa décision en connaissance de cause.
Dans une démocratie qui se respecte, on ne peut pas refuser que la population
dise son sentiment ou admettre que la population soit bâillonnée par un
amendement tel l'amendement n° 211 déposé à l'Assemblée nationale par M. Elie
Hoarau, M. Claude Hoarau et par Mme Bello, qui visait à ne pas faire appel à la
consultation de la population.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
La commission a longuement discuté du problème qui nous est
soumis par M. Lauret.
J'indique d'emblée que notre commission a décidé de s'en remettre à la sagesse
du Sénat. Certes, il faudra en arriver tôt ou tard, et le plus tôt sera le
mieux, à la consultation des populations, non seulement dans les départements
d'outre-mer mais peut-être aussi ailleurs, dans d'autres secteurs que je ne
nommerai pas ce soir.
M. Jean-Jacques Hyest.
Ah !
M. José Balarello,
rapporteur.
Cela étant, nous nous sommes demandé si cet amendement
n'était pas contraire à la Constitution. Certes, nous avons le précédent de la
consultation de Mayotte.
M. Lucien Lanier.
Oui !
M. José Balarello,
rapporteur.
J'avais été le rapporteur du texte. Nous avons examiné la
décision du Conseil constitutionnel du 4 mai 2000 concernant Mayotte. Je vous
donne lecture du considérant relatif à la consultation :
« Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa du préambule de la Constitution
de 1958, en vertu de ces principes et de celui de la libre détermination des
peuples, la République offre aux territoires d'outre-mer qui manifestent la
volonté d'y adhérer des institutions nouvelles fondées sur l'idéal commun de
liberté, d'égalité et de fraternité et conçues en vue de leur évolution
démocratique ;
« Que pour la mise en oeuvre de ces dispositions, les autorités compétentes de
la République sont, dans le cadre de la Constitution, habilitées à consulter
les populations d'outre-mer intéressées, non seulement sur la volonté de se
maintenir au sein de la République française ou d'accéder à l'indépendance,
mais également sur l'évolution statutaire de leurs collectivités territoriales
à l'intérieur de la République ;
« Que toutefois, dans cette dernière éventualité, lesdites autorités ne
sauraient être liées en vertu de l'article 72 de la Constitution par le
résultat de cette consultation. »
Le problème provient du fait que le deuxième alinéa du préambule de la
Constitution stipule que : « En vertu de ces principes et de celui de la libre
détermination des peuples, la République offre aux territoires d'outre-mer qui
manifestent la volonté d'y adhérer des institutions nouvelles fondées sur
l'idéal commun de liberté, d'égalité et de fraternité et conçues en vue de leur
évolution démocratique. »
C'est la raison pour laquelle la commission des lois s'est interrogée sur la
constitutionnalité de la consultation envisagée et a recherché des éléments
susceptibles d'apporter une réponse, notamment la décision du Conseil
constitutionnel du 4 mai 2000 concernant Mayotte.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
J'ai le sentiment que, derrière la sagesse du Sénat
qu'invoquait à l'instant M. le rapporteur, se cache sans doute quelque embarras
devant plusieurs arguments juridiques que M. Balarello aurait certainement
souhaité évoquer et qui plaident contre la constitutionnalité de cet
amendement.
Je voudrais dire simplement, pour ma part, qu'est affirmé à l'article 1er du
projet de loi d'orientation pour l'outre-mer le droit à la consultation des
populations en cas d'« évolutions statutaires ». Or, une réforme
administrative, une modification des limites des départements constituent non
pas une évolution statutaire mais une décision relevant très clairement de la
responsabilité du Parlement. J'ai envie de dire, à ce stade de la discussion,
mesdames, messieurs les sénateurs, que les parlementaires prennent dans ce
domaine leurs responsabilités, avec la possibilité de fixer dans la loi les
nouvelles limites des départements.
Je n'ai d'ailleurs pas entendu M. le Président de la République, qui s'est
exprimé au moins à deux reprises sur le principe de la bidépartementalisation,
poser en préalable comme condition nécessaire la consultation des populations.
Il s'agit bien là, je le répète, d'une réforme d'ordre administratif, à la
différence, bien sûr, d'autres épisodes récents pour lesquels il a été
nécessaire d'opérer une consultation locale ou une consultation nationale : je
pense, à cet égard, à la Nouvelle-Calédonie ou à Mayotte.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 56.
M. Edmond Lauret.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lauret.
M. Edmond Lauret.
Je dois avouer que je ne comprends plus, monsieur le secrétaire d'Etat ! J'ai
cité, dans l'exposé des motifs de mon amendement, un paragraphe entier du
rapport de M. Jérôme Lambert, qui n'appartient pas à nos rangs. Alors, vérité à
l'Assemblée nationale, erreur au Sénat ? M. Jérôme Lambert dit que c'est
possible. Je ne comprends plus ! En tout cas, je maintiens mon amendement.
M. Georges Othily.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Othily.
M. Georges Othily.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
nous avons adopté, dans le corps de l'article 1er du projet de loi
d'orientation, voilà quelques instants, une phrase aux termes de laquelle, dans
le cadre de la République, la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et la
Réunion ont la possibilité d'évoluer, à l'avenir, vers une organisation
institutionnelle qui leur soit propre.
Je suis favorable à toute évolution institutionnelle des départements
d'outre-mer, parce que le département et la loi ne doivent pas être figés. Je
considère que la consultation est souhaitable, valable et possible.
La consultation des Français est un élément essentiel de la démocratie,
principalement de sa forme directe. Elle a été considérablement renforcée sous
la Ve République, qui l'a placée sur le même plan que la démocratie
représentative au sein de l'article 3 de la Constitution de 1958. Le premier
alinéa de ce dernier dispose en effet ceci : « La souveraineté nationale
appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du
référendum. »
Le deuxième alinéa de ce même article précise cependant ceci : « Aucune
section du peuple ni aucun individu ne peut s'en attribuer l'exercice. » La
consultation d'une fraction du corps électoral est entourée de règles
constitutionnelles qui sont d'autant plus solennelles qu'elles ne bénéficient
pas de définition incontestée.
L'actualité du droit de l'outre-mer a donné l'occasion au Conseil
constitutionnel de préciser certains éléments de la consultation des
populations d'une partie du territoire français, dans sa décision 2000-428 DC
du 4 mai 2000, à propos de la loi organisant une consultation à Mayotte.
Les précisions apportées par le juge constitutionnel ne résolvent pas toutes
les difficultés relatives à une telle consultation, mais il est possible de
classer celles-ci autour de quatre questions : quelle est la population ou
quelles sont les populations qui peuvent être consultées ? Quel est l'objet de
la question qui peut être posée ? Quelle peut être la portée d'une telle
consultation ? Quelles sont les conditions formelles qui doivent entourer la
consultation ?
Dans sa décision du 4 mai 2000, le Conseil constitutionnel considère que la
consultation et la loi qui l'organise trouvent leur fondement dans l'alinéa 2
du préambule de la Constitution de 1958. Notre excellent rapporteur ayant cité
in extenso
le sixième considérant de cette décision, je n'y reviendrai
pas.
Cette argumentation du Conseil constitutionnel appelle plusieurs observations,
mais je n'en citerai qu'une : le Conseil a une conception assez peu précise de
la notion de « peuples » ou de « populations d'outre-mer ». Si le premier terme
renvoie expressément à des peuples distincts du peuple français, ceux des
territoires d'outre-mer existant en 1958 et qui devaient se prononcer sur
l'acceptation des nouvelles institutions, la notion de « population d'outre-mer
» est beaucoup plus neutre et ne paraît désigner qu'un groupe de personnes
géographiquement déterminées, par leur situation « ultra-marine », sans
qu'elles forment pour autant un véritable « peuple ». La référence aux
populations d'outre-mer est renouvelée au douzième considérant de la décision
de mai 2000.
Il n'est pas indifférent de constater que, si des populations d'outre-mer
peuvent être consultées, et non des peuples, celles des départements
d'outre-mer peuvent l'être aussi. La seule limite posée par le Conseil
constitutionnel concerne l'outre-mer, ce qui interdit d'organiser une
consultation en métropole, sous réserve de la question de la Corse dont la
situation ultra-marine est désormais évoquée de manière expresse par certains
commentateurs ou analystes.
Le Conseil constitutionnel semble alors assimiler tout « territoire
d'outre-mer » au sens géographique du mot aux « territoires d'outre-mer » au
sens juridique du même mot. Dans ce cas, on ne voit pas ce qui interdirait non
plus la consultation dans les départements d'outre-mer, sauf à estimer que ce
qui est possible à Mayotte ne l'est pas dans les départements d'outre-mer au
motif que Mayotte fut, autrefois, dans le cadre des Comores, un véritable
territoire d'outre-mer. Mayotte n'est cependant pas non plus un département
d'outre-mer, ni à l'heure actuelle ni même dans le cadre du futur statut, même
si l'île sera une « collectivité départementale ».
Le Conseil constitutionnel considère d'ailleurs que les populations concernées
peuvent également être consultées sur des évolutions statutaires, ce qui, à mon
avis, élargit considérablement le champ de ces consultations.
Je terminerai cet exposé par quatre remarques.
Les populations d'outre-mer, mais elles seules, peuvent être consultées. Cela
vise aussi bien les populations des départements d'outre-mer que des
territoires d'outre-mer. La seule incertitude concerne les limites de
l'outre-mer, et, à cet égard, je pense à la Corse.
La question posée peut concerner un autre objet que celui du maintien ou non
du territoire dans le sein de la République française. Ainsi, une question sur
l'avenir, sur l'évolution du statut de la collectivité territoriale ou un autre
objet, peut être posée. Il n'y a pas de limite matérielle à la question
posée.
Il y a, en revanche, une limite dans la formulation : la consultation ne peut
être qu'une demande d'avis et certainement pas une obligation qui viendrait
lier les législateurs que nous sommes.
La consultation, par conséquent, doit correspondre à des critères de clarté et
de loyauté, et ne doit pas tromper la population sur le sens caché de la
question. Parmi ces exigences figure notamment et principalement celle selon
laquelle la consultation ne doit pas être un référendum déguisé.
M. Patrice Gélard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
L'amendement n° 56 soulève beaucoup plus de problèmes qu'il n'y paraît.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je crois d'ailleurs que vous n'avez pas assez
bien répondu à la question posée par cet amendement.
En effet, nous avons une carence de réflexion en ce qui concerne - et notre
collègue Georges Othily l'a très bien dit à l'instant même - la différence
entre territoire et département d'outre-mer.
Voilà bien longtemps que le droit d'outre-mer n'est plus enseigné dans les
universités de droit - c'est d'ailleurs bien dommage ! -, la dernière édition
d'un manuel de droit d'outre-mer datant, si mes souvenirs sont exacts, de 1962,
son auteur étant François Luchaire, ancien membre du Conseil
constitutionnel.
Il est temps, monsieur le secrétaire d'Etat, que vos services lancent une
étude, une recherche sur ces concepts juridiques que nous n'étudions plus
depuis longtemps et qui mériteraient pourtant de l'être. En effet, nous nous
trouvons ici au coeur même de problèmes de droit, de droit constitutionnel et
administratif en particulier.
A l'heure actuelle, nous ne savons pas, avec les outils juridiques dont nous
disposons, régler le problème posé. On l'a bien vu, la notion de consultation
soulève nombre de problèmes : la consultation est-elle permise ou pas par la
Constitution ? Est-elle un référendum ? Est-elle un simple avis ? Qui doit-on
consulter ? Comment doit-on consulter ? Comment doit-on poser les questions ?
La consultation engage-t-elle l'ensemble du peuple français de la République
une et indivisible ? Le département d'outre-mer a-t-il une autre vocation que
de faire partie de la République une et indivisible ? Voilà toute une série de
questions que nous devons soulever et que nous ne sommes pas en mesure de
régler aujourd'hui.
Je regrette, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous n'ayez pas fait preuve
d'esprit révolutionnaire dans ce domaine en reconnaissant que des problèmes
existent et qu'ils doivent donc être traités, qu'il est normal que le
département engage un grand débat sur ces questions de consultation de
population. A terme, cela concerne non pas seulement l'outre-mer, mais aussi la
métropole, nos régions, le problème des minorités nationales, la question des
langues, autant de sujets qu'il faut pouvoir traiter avec des outils juridiques
nouveaux que nous n'avons pas.
J'étais prêt à demander à M. Lauret de retirer son amendement si le
Gouvernement manifestait un début d'esprit d'ouverture dans cette nécessaire
réflexion que nous devons entamer. Je n'ai pas noté ce début d'ouverture. C'est
la raison pour laquelle je voterai l'amendement !
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je tiens à dire à M. Gélard que je suis tout à fait
ouvert à un tel débat, y compris dans cet hémicycle, bien évidemment. Encore
faudrait-il qu'il ait lieu au bon moment de la discussion. Or, le bon moment,
ce n'est certainement pas l'article 38 de ce projet de loi, qui concerne la
bidépartementalisation, c'est-à-dire, je le répète, une réforme administrative,
laquelle n'est en rien une évolution statutaire et ne relève en rien de la
consultation des populations !
De grâce, par conséquent, considérons que nous ferions fausse route, les uns
et les autres, en évoquant, à l'occasion de la bidépartementalisation, ces
questions absolument fondatrices pour la République dans sa relation avec
l'outre-mer !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 56, repoussé par le Gouvernement et pour
lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 38
bis.
Intitulé du chapitre IV du titre VI (suite)
M. le président.
Nous en revenons à l'amendement n° 33, qui a été précédemment réservé, et qui
tend à supprimer la division du chapitre IV du titre VI et son intitulé.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination avec la suppression
des articles 38 et 38
bis.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 33.
M. Paul Girod.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod.
J'entends bien le raisonnement de M. le rapporteur, mais, comme nous avons
voté l'amendement n° 56 de notre collègue M. Lauret, je ne suis pas sûr que la
suppression de cette division et de son intitulé soit parfaitement « calée ».
Mais je reconnais qu'il s'agit presque là d'un détail...
Je veux toutefois faire remarquer à M. le secrétaire d'Etat, s'il me permet un
instant d'humour - ce qui n'est pas facile dans un débat aussi grave - qu'il y
a actuellement, en France, un grand débat entre la région et le département et
qu'il est de bon ton, ici ou là, de dire que le département est dépassé.
Monsieur le secrétaire d'Etat, ne serait-il pas plus simple de dire que le
nombre de départements par région est proportionnel à la distance qui sépare la
région de Paris : au-delà de 10 000 kilomètres, le nombre de départements
pourrait aller jusqu'à deux ; en dessous de 10 000 kilomètres, il n'y aurait
qu'un seul département par région ? Voilà qui règlerait le problème
institutionnel sur lequel on glose tant depuis longtemps et de théoriser
l'ensemble de l'action du Gouvernement.
(Sourires.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 33, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, la division du chapitre IV du titre VI et son l'intitulé sont
supprimés.
TITRE VII
DE LA DÉMOCRATIE LOCALE
ET DE L'ÉVOLUTION
DES DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER
M. le président.
Par amendement n° 36, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
supprimer cette division et son intitulé.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
S'agissant d'un amendement de coordination avec la
suppression de l'article 39, relatif au congrès et qui constitue l'article
unique du titre VII du présent projet de loi, j'en demande la réserve
jusqu'après l'examen dudit article 39.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
La réserve est ordonnée.
Article 39
M. le président.
« Art. 39. - La cinquième partie du code général des collectivités
territoriales est complétée par un livre IX ainsi rédigé :
« LIVRE IX
« MESURES D'ADAPTATIONS
PARTICULIÈRES AUX DÉPARTEMENTS
ET AUX RÉGIONS D'OUTRE-MER
« TITRE UNIOUE
« LE CONGRÈS DES ÉLUS DÉPARTEMENTAUX
ET RÉGIONAUX
« Chapitre Ier
« Composition
«
Art. L. 5911-1
. - Dans les régions d'outre-mer qui comprennent un
seul département, il est créé un congrès des élus départementaux et régionaux
composé des conseillers généraux et des conseillers régionaux.
« Les députés et les sénateurs élus dans le département qui ne sont membres ni
du conseil général ni du conseil régional siègent au congrès des élus
départementaux et régionaux avec voix consultative.
« A peine de sanctionner un élu du suffrage universel, le vote des conseillers
appartenant aux deux assemblées sera deux fois recueilli.
« Chapitre II
« Fonctionnement
« Section 1
« Réunions
«
Art. L. 5912-1
. - Le congrès des élus départementaux et régionaux se
réunit à la demande du conseil général ou du conseil régional, sur un ordre du
jour déterminé par délibération prise à la majorité des suffrages exprimés des
membres de l'assemblée.
« La convocation est adressée aux membres du congrès des élus départementaux
et régionaux au moins dix jours francs avant celui de la réunion. Elle est
accompagnée d'un rapport sur chacun des points inscrits à l'ordre du jour.
« Le congrès des élus départementaux et régionaux ne peut se réunir lorsque le
conseil général ou le conseil régional tient séance.
« Section 2
« Organisation et séances
«
Art. L. 5912-2
. - Les séances du congrès des élus départementaux et
régionaux sont publiques.
« Néanmoins, sur la demande de cinq membres ou du président, le congrès des
élus départementaux et régionaux peut décider, sans débat, à la majorité
absolue des membres présents ou représentés, qu'il se réunit à huis clos.
« Sans préjudice des pouvoirs que le président du congrès des élus
départementaux et régionaux tient de l'article L. 5912-3, ces séances peuvent
être retransmises par les moyens de communication audiovisuelle.
«
Art. L. 5912-3
. - Le président a seul la police du congrès des élus
départementaux et régionaux.
« Il peut faire expulser de l'auditoire ou arrêter tout individu qui trouble
l'ordre.
« En cas de crime ou de délit, il en dresse procès verbal et le procureur de
la République en est immédiatement saisi.
«
Art. L. 5912-4
. - Le procès verbal de chaque séance, rédigé par un
des secrétaires, est approuvé au commencement de la séance suivante et signé
par le président et le secrétaire.
« Il contient les rapports, les noms des membres qui ont pris part à la
discussion et l'analyse de leurs opinions.
« Les procès-verbaux des séances du congrès des élus départementaux et
régionaux sont publiés. Ils sont transmis au conseil général et au conseil
régional par le président du congrès des élus départementaux et régionaux.
« Tout électeur ou contribuable du département ou de la région a le droit de
demander la communication sans déplacement et de prendre copie des procès
verbaux des séances du congrès des élus départementaux et régionaux et de les
reproduire par voie de presse.
« Chapitre III
« Le président
«
Art. L. 5913-1
. - Lorsque les conditions de sa réunion sont remplies
conformément aux dispositions de l'article L. 5912-1, le congrès des élus
départementaux et régionaux est convoqué et présidé, le premier semestre de
chaque année, par le président du conseil général, et, le deuxième semestre,
par le président du conseil régional.
« En cas d'empêchement, le président du conseil général ou le président du
conseil régional est remplacé, respectivement dans les conditions prévues à la
première phrase du premier alinéa de l'article L. 3122-2 et de l'article L.
4133-2.
«
Art. L. 5913-2
. - L'assemblée dont le président est issu met à la
disposition du congrès des élus départementaux et régionaux les moyens
nécessaires à son fonctionnement : ces moyens doivent notamment permettre
d'assurer le secrétariat des séances.
« Chapitre IV
« Garanties conférées aux conseillers généraux et aux conseillers régionaux
participant au congrès des élus départementaux et régionaux
«
Art. L. 5914-1
. - Lorsque le congrès des élus départementaux et
régionaux se réunit, les articles L. 3123-1 à L. 3123-6 et L. 4135-1 à L.
4135-6 sont applicables respectivement aux conseillers généraux et aux
conseillers régionaux.
« Chapitre V
« Rôle du congrès des élus départementaux
et régionaux
«
Art. L. 5915-1
. - Le congrès des élus départementaux et régionaux
délibère de toute proposition d'évolution institutionnelle, de toute
proposition relative à de nouveaux transferts de compétences de l'Etat vers le
département et la région concernés, ainsi que de toute modification de la
répartition des compétences entre ces collectivités locales.
«
Art. L. 5915-2
. - Les propositions mentionnées à l'article L. 5915-1
sont transmises dans un délai de quinze jours francs au conseil général et au
conseil régional, qui, avant de délibérer, consultent obligatoirement le
conseil économique et social du département et le conseil de la culture, de
l'éducation et de l'environnement. Elles sont également transmises au Premier
ministre.
«
Art. L. 5915-3
. - Le conseil général et le conseil régional
délibèrent sur les propositions du congrès des élus départementaux et
régionaux.
« Les délibérations adoptées par le conseil général et le conseil régional
sont transmises au Premier ministre par le président de l'assemblée
concernée.
« Le Premier ministre en accuse réception dans les quinze jours et fixe le
délai dans lequel il apportera une réponse.
« Chapitre VI
« Consultation des populations
«
Art. L. 5916-1
. - Le Gouvernement peut, notamment au vu des
propositions mentionnées à l'article L. 5915-1 et des délibérations adoptées
dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 5915-3, déposer
un projet de loi organisant une consultation pour recueillir l'avis de la
population du département concerné sur les matières mentionnées à l'article L.
5915-1. »
Par amendement n° 37, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
supprimer l'article 39.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement tend à supprimer l'article 39, qui prévoit la
création, dans les régions d'outre-mer monodépartementales, d'un congrès des
élus départementaux et régionaux réunissant le conseil régional et le conseil
général et ayant vocation à faire des propositions en matière d'évolution
institutionnelle.
Comme j'ai déjà eu l'honneur de l'indiquer dans mon intervention liminaire, le
projet de création d'un tel congrès est loin de faire l'unanimité parmi les
élus des départements d'outre-mer. Il a notamment suscité l'avis défavorable de
six des huit assemblées locales concernées.
La procédure envisagée serait particulièrement lourde : réunion solennelle en
congrès du conseil régional et du conseil génénral, puis délibération de ces
deux assemblées sur les propositions du congrès, et enfin transmission au
Premier ministre, en vue d'une éventuelle consultation de la population
locale.
La commission des lois a considéré que cette procédure risquait d'être
difficile à mettre en oeuvre et d'aboutir, de fait, à la création d'une
troisième assemblée locale dont le rôle serait ambigu.
J'enregistre cependant que la commission des lois a obtenu quelques
satisfactions puisque, en nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a pris en
compte les observations formulées par le Sénat et par son rapporteur quant aux
risques de confusion résultant de l'emploi du mot « congrès » et a retenu une
nouvelle appellation, à savoir le « congrès des élus départementaux et
régionaux »
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
En créant le congrès des élus départementaux et régionaux, l'article 39 fonde
en effet la reconnaissance du droit à l'évolution des départements d'outre-mer
qui le souhaitent, et en fixe les modalités démocratiques. N'a-t-il pas été
beaucoup question de démocratie ce soir ? Or je suis au regret de constater que
cette démarche démocratique, progressive, sereine, évitant les conflits - du
moins ceux qui ne se déroulent pas dans le cadre des assemblées démocratiques -
ne trouve pas grâce aux yeux de votre assemblée.
Sur le fond, je crois que, grâce à cette création du congrès - si le Parlement
la retient finalement - les élus des conseils généraux et des conseils
régionaux des départements d'outre-mer concernés pourront se saisir de la
question de l'évolution statutaire et proposer des réformes allant au-delà de
la simple adaptation des droits et des règlements prévue à l'article 73 de la
Constitution : les propositions qui auront émergé localement et qui auront été
retenues par les forces politiques locales pourront être soumises à l'avis des
populations locales.
On a beaucoup parlé de consultation des populations. Je note, là encore avec
regret, que, lorsqu'il s'agit d'en ouvrir clairement la possibilité par la loi,
votre assemblée décide de ne pas le faire.
Voilà pourquoi, monsieur le président, le Gouvernement est défavorable à cet
amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 37.
M. Claude Lise.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Lise.
M. Claude Lise.
Monsieur le président, je ne vais pas reprendre tous les arguments de mon
intervention dans la discussion générale : j'ai assez longuement exposé ma
position et souligné les contradictions dans lesquelles le Sénat, ou du moins
sa majorité, se complaît chaque fois qu'il est question d'aborder l'aspect
institutionnel de ce projet de loi d'orientation.
Nos collègues de la majorité sont toujours pour le principe du droit à
l'évolution des différents peuples des départements d'outre-mer, pour l'accès
au droit à l'évolution, mais ils sont systématiquement contre les moyens qui
permettent cette évolution.
L'article 39 ne se réduit absolument pas à la mise en place de ce que l'on
appelle « congrès » et qui n'est que la réunion périodique du conseil général
et du conseil régional pour discuter d'un projet d'évolution institutionnelle
ou statutaire ! Cela n'a, bien entendu, rien à voir - sauf à se placer sur le
plan de la polémique - avec une troisième assemblée !
L'article 39 fixe également les modalités de prise en compte par tout
gouvernement d'un éventuel projet issu des travaux d'un congrès qui se serait
mis en place dans l'un ou l'autre département.
Surtout, il prévoit ce dont nous avons parlé longuement tout à l'heure, à
savoir la nécessité d'une consultation des populations concernées.
Sans entrer dans le débat juridique, permettez-moi de vous dire que je suis de
ceux qui pensent que, si la possibilité de consulter les populations
localement, comme cela a été fait à Mayotte, ne passe pas la barrière
constitutionnelle, alors il faudra modifier la Constitution, car nous ne nous
en sortirons pas autrement.
Les populations n'entendent pas que qui que ce soit s'arroge le droit de les
placer d'office dans une évolution sans avoir au préalable recueilli leur
adhésion !
Pour moi, l'intérêt de la procédure prévue par l'article 39 est d'organiser
tout un processus d'évolution institutionnelle selon une méthode démocratique
parfaitement transparente, selon une méthode qui assure la maîtrise locale de
l'initiative et qui confie cette maîtrise locale aux élus locaux - c'est-à-dire
aux représentants des populations concernés, qui ont une légitimité pour faire
des propositions - et non à tel ou tel groupe de personnalités ou à tel ou tel
groupe de pression.
L'article 39 prévoit la maîtrise locale de la décision finale à l'issue d'une
consultation locale et je demeure persuadé qu'en arrière-plan du débat entre
partisans et adversaires de cet article 39, il faut bien percevoir l'existence
d'une divergence fondamentale entre ceux qui tiennent à une voie démocratique
d'évolution institutionnelle pour les départements d'outre-mer et ceux qui
considèrent que toute évolution doit être l'affaire de minorités agissantes qui
s'arrogent le droit de parler au nom des populations, de négocier en leur
nom.
Par conséquent, pour ma part, je ne peux que voter contre cet amendement de
suppression de l'article 39.
M. Guy Allouche.
Très bien !
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Michaux-Chevry.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
comprends très bien l'attitude de la Haute Assemblée. C'est une attitude de
sagesse, car le Sénat démontre qu'il connaît bien le fonctionnement de nos
collectivités.
Comment le sénateur Lise nous fera-t-il admettre que les élus des deux
assemblées de la Guadeloupe et de la Martinique pourraient se réunir, puis
retourner dans leur assemblée respective pour délibérer ? Or c'est bien ce que
prévoit l'article L. 5915-3 ! Chaque assemblée fait ses propositions, puis, à
la réunion suivante, alors que l'on a déjà délibéré, on établit un
procès-verbal et l'on vote ce qu'on a délibéré séparément.
Compte tenu du mode de fonctionnement de nos assemblées, cette procédure ne «
tient pas la route » ! Le plus sage est que le Gouvernement ait la possibilité
de demander à chaque assemblée de se prononcer sur l'avenir institutionnel de
sa région et de son département.
Par ailleurs, les décisions des assemblées vont être notifiées au Premier
ministre. Si celui-ci reçoit un avis du conseil régional de la Guadeloupe et un
autre avis contraire du conseil général, il devra alors choisir pour nous !
C'est un faux débat, selon moi, et si, de façon pernicieuse, notre collègue
Claude Lise prétend que certaines personnes s'octroient le droit de parler au
nom des collectivités...
M. Claude Lise.
C'est le cas en ce moment !
Mme Lucette Michaux-Chevry.
...c'est qu'il pense plus particulièrement à une personne qui s'appelle le
sénateur Michaux-Chevry !
Soyons très clairs : j'ai eu le courage, mon cher collègue - ce que vous ne
savez pas faire - de demander un débat public, pour que l'on arrête de se
couper en morceaux entre nationalistes inintéressants et départementalistes
intéressants. En effet, tout cela ne peut que provoquer la pose de bombes et
susciter la haine et la violence, engendrant la déstabilisation dans nos
familles.
J'ai eu le courage, moi - publiquement, non pas la nuit, non pas en cachette,
comme vos amis -, de dire au président du conseil régional de la Martinique : «
Arrêtons de parler d'indépendance. Essayons, dans le cadre des institutions de
le République française et dans le cadre de l'Europe, d'ouvrir un débat. » Et
il m'a approuvée !
M. Claude Lise.
C'est un chiffon de papier qui n'engage à rien !
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Que vous soyez jaloux de n'avoir pas pu obtenir ce résultat, je peux le
comprendre, mais soyons sérieux ! Le congrès ne nous apportera rien du tout et
nous parviendrons, en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à faire avancer,
sans vous et sans le congrès, mais dans la sagesse, l'évolution des
institutions de nos régions.
Sachez qu'est née, dans nos régions - et nos collègues doivent le comprendre -
une volonté non de rejeter la France ou l'Europe, mais d'obtenir davantage de
responsabilités, une meilleure prise en compte de nos identités respectives
dans notre développement. Il existe de plus en plus une volonté de
participation, chez les jeunes en particulier.
Quant aux sondages qui sont actuellement réalisés, mon cher collègue, sachez
que ceux qui visent la grand-mère que je suis sont très, très élevés, parce
qu'ils reconnaissent que j'ai raison !
(Bravo ! et applaudissements sur les
travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. Claude Lise.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lise.
M. Claude Lise.
Je ne peux pas laisser passer l'idée selon laquelle les élus des conseils
généraux et des conseils régionaux seraient incapables de se réunir ! Au
demeurant, ils le font déjà au sein de diverses commissions, malgré les
antagonismes politiques.
Au moment où nous demandons plus de responsabilités, il serait tout de même
curieux de nous faire passer pour des irresponsables !
Il est vrai que certains ont des intérêts politiques à refuser une réunion en
congrès des élus locaux, la majorité pouvant éventuellement leur échapper au
moment du vote sur tel ou tel projet. Mais on ne se réunit pas uniquement pour
décider d'un projet ! On se réunit aussi pour élaborer un projet.
L'intérêt du congrès est, précisement, de se doter d'un lieu apaisé de débat
sur les problèmes institutionnels, afin que ce débat n'ait pas lieu dans la
rue, que n'importe qui ne siège pas dans n'importe quelle commission, comme
cela se fait en ce moment, selon la plus pure tradition populiste. Ainsi, les
partisans de Basse-Terre, en Martinique, réunissent des commissions où
n'importe qui peut venir siéger. Est-ce là une conception démocratique
permettant d'élaborer un statut pour nos pays ?
Non ! le congrès est une instance où un débat apaisé peut avoir lieu, dans
laquelle sont réunis des élus qui représentent le peuple. Ils ont reçu mandat
pour représenter ce peuple et ils ne font que des propositions au
Gouvernement.
La question qui se pose est de savoir quel sens nous donnons à nos
institutions démocratiques !
M. Patrice Gélard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Pourquoi ne pas mettre
une usine à gaz quand le fil à couper le beurre suffit ?
(Sourires sur les
travées du RPR.)
Voilà exactement le débat dans lequel nous sommes ! On ne
sait pas quoi inventer pour faire plus compliqué !
Mais l'idée qui fonde cette proposition est de prétendre que le conseil
général et le conseil régional ont mal travaillé : on va donc créer un organe
qui les coiffera. Cela s'appelle le soviétisme : on rajoute soviet après
soviet, pour, en fin de compte, aboutir à un résultat que tout le monde
connaît, qui est l'inefficacité totale et la paralysie totale de ces
institutions.
En fait, cela ne va pas, et vous le savez bien, monsieur le secrétaire d'Etat
; vous savez bien que cette invention du congrès ne rime à rien et ne s'appuie
sur rien. En effet, comme l'ont dit très justement M. Lise et Mme
Michaux-Chevry, les conseillers généraux et les conseillers régionaux se
rencontrent tout le temps ; ce ne sont pas deux mondes à part. Il n'y a pas une
commission départementale ou régionale qui ne se réunisse sans les
représentants des deux. On ne signe pas un contrat de plan Etat-région sans la
participation des uns et des autres.
Alors, à quoi sert cette institution supplémentaire ? A mon avis, c'est de la
pure démagogie, et vous le savez tous aussi bien que moi. C'est pour créer une
structure de plus. On en meurt des structures que l'on crée les unes au-dessus
des autres et qui n'ont aucune signification.
Etre contre ce congrès, ce n'est pas de la ringardise ; au contraire, c'est
vous qui êtes ringards en proposant ce genre d'institution. C'est un peu comme
si on dégageait en touche : il y a un problème, on crée une commission comme
ci, une commission comme ça, uniquement pour faire face à une difficulté que
l'on ne sait pas résoudre.
En vérité, le fond de l'affaire, avec ce congrès, c'est que ce texte de loi
que nous discutons aujourd'hui n'a pas été assez réfléchi et ne va pas assez
loin dans ce qu'il fallait faire.
(Applaudissements sur les travées du RPR
et des Républicains et Indépendants.)
M. Josselin de Rohan.
Et ce n'est pas constitutionnel !
M. Pierre Fauchon.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Fauchon.
M. Pierre Fauchon.
Je tiens à dire, à titre personnel, et à mon grand regret, à l'égard des
derniers intervenants, que, selon moi, l'idée de ce congrès était, en réalité,
tout à fait raisonnable.
Cette procédure mérite, à tout le moins, d'être tentée. Je suis surpris de
voir l'opposition qu'elle semble susciter. Nous sommes dans une situation qui
rappelle un peu celle de 1789 lorsqu'on a invité les Etats généraux à siéger en
assemblée particulière et non tous ensemble.
Il nous est, en effet, proposé un mécanisme dans lequel les deux assemblées se
réuniraient pour délibérer ensemble des questions concernant leur avenir. Leurs
conclusions, si elles aboutissent, ce qui n'est pas certain - mais pourquoi et
au nom de quoi les en empêcher ? - seraient ensuite soumises séparément à
chaque assemblée. Enfin, le Gouvernement français déciderait, comme il le
souhaiterait, en fonction des résultats de ces différentes consultations.
Pourquoi s'opposer à celles-ci ?
Il s'agit de problèmes nouveaux qui ne figurent pas dans les programmes
habituels de ces assemblées, qui se situent dans des perspectives à beaucoup
plus long terme et qui sont fondamentaux. Il serait assez normal de réunir tous
les élus concernés, afin qu'ils délibèrent en commun sur une problématique
commune qui dépasse les problématiques particulières de chacune des
assemblées.
Nous aurions tort, me semble-t-il, de refuser ce congrès dont on ne peut
préjuger le résultat, car ce refus serait nécessairement interprété comme une
intention de maintenir envers et contre tout le statu quo, ce qui ne répond pas
aux problèmes que connaissent aujourd'hui ces départements.
(Applaudissements sur certaines travées socialistes.)
M. Josselin de Rohan.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. de Rohan.
M. Josselin de Rohan.
Je n'avais pas l'intention d'intervenir dans cette discussion, mais le propos
de notre excellent collègue Pierre Fauchon, qui permet au débat de rebondir,
m'y incite.
En réalité, il faut choisir : ou bien on choisit une structure départementale
ou bien on choisit une structure régionale.
On aurait pu également imaginer une structure semblable à celle qui existe à
Paris, où une même assemblée peut à la fois être un conseil municipal et un
conseil général. C'était envisageable, mais cela n'a pas été fait.
Ainsi, on vient plaquer une troisième structure au-dessus des deux autres en
prétendant qu'elle n'est pas une structure, qu'elle ne sera qu'une réunion plus
ou moins occasionnelle d'élus et qu'elle n'aura pas d'injonction à donner à ces
deux assemblées. Dans ce cas, si telle est vraiment l'intention du législateur,
il ne sert strictement à rien d'instaurer ce congrès.
Un congrès, une fois créé, voudra se donner de l'épaisseur, exister en tant
que tel, et il viendra se surajouter aux deux autres structures. Et alors, là,
nous allons vers la polysynodie, c'est-à-dire vers la confusion la plus totale
!
En réalité, vous n'avez pas voulu choisir entre un statut départemental
aménagé et un statut territorial tel que celui que préconisait Mme le président
du conseil régional de la Guadeloupe, elle n'était pas toute seule, et cela a
beaucoup ému certains. Je ne suis pas sûr d'ailleurs qu'un jour on n'aboutira
pas à la situation qu'elle souhaite. Mais, en tout cas, une chose est certaine,
à ne pas choisir ou à proposer des organismes hybrides comme ceux que vous nous
présentez, et dont la constitutionnalité d'ailleurs est douteuse, je ne crois
pas que vous fassiez avancer le débat !
(Très bien ! et applaudissements sur
les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je souhaite dire au Sénat, avant qu'il ne se prononce
sur l'un des articles essentiels de ce projet de loi, l'article 39, devant
quelle insoutenable contradiction il se trouve en cet instant.
En effet, vous semblez, depuis le début de ce débat, accréditer avec sincérité
le désir d'évolution statutaire des départements d'outre-mer pour des raisons
qui relèvent de leur identité, de leur histoire, de leur géographie, de leurs
choix de projets collectifs également. Mais lorsque nous évoquons enfin, au
terme de l'examen de ce texte, les moyens qu'il convient de se donner - et M.
Lise, je crois, a mis le doigt sur cette insoutenable contradiction - les
modalités, la méthode à suivre pour y parvenir, vous ne proposez aucune
alternative aux propositions qui sont faites par le Gouvernement dans le
prolongement du rapport de MM. Lise et Tamaya, c'est-à-dire la création de ce
congrès - qui n'est pas, monsieur de Rohan, une troisième assemblée - qui est
en effet une réunion solennelle des assemblées existantes sur un sujet
essentiel : l'évolution statutaire.
Quelle alternative proposez-vous ? Est-ce dans la rue, madame Michaux-Chevry,
qu'il faut décider de ces choses ?
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Non, au sein de chaque assemblée !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Quand on fait de grandes déclarations à Basse-Terre,
encore faut-il, lorsque l'on en vient à des propositions concrètes, être au
rendez-vous de cette histoire là. Or je crains que vous n'y soyez pas ce soir,
madame le sénateur !
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Je vous répondrai !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Les Etats généraux ont été évoqués tout à l'heure, et
c'est un précédent tout à fait illustre. Pour autant, monsieur Gélard, les
Etats généraux étaient-ils « ringards » au regard de l'histoire de France ?
Vous êtes un trop bon spécialiste des institutions de l'ex-Union soviétique
pour ne pas savoir distinguer les institutions démocratiques et celles qui ne
le sont pas.
Je crois que, dans la proposition aujourd'hui contenue dans ce texte,
transparaît la volonté sincère de créer le cadre démocratique nécessaire à
l'évolution statutaire des départements d'outre-mer. Peut-on adhérer à cet
objectif ? Peut-on adhérer à cette fin sans en prévoir les moyens ?
Madame Lucette Michaux-Chevry, vous pouviez proposer d'amender la procédure du
congrès si vous la trouviez trop complexe, trop longue, trop redondante
peut-être dans son déroulement, mais non pas demander de la supprimer purement
et simplement, ce qui me paraît - et je le redis encore une fois - une
insoutenable contradiction dans le sens même politique de l'expression que vous
avez ce soir réservée au Sénat.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 37, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 39 est supprimé.
Intitulé du titre VII (suite)
M. le président.
Nous en revenons à l'amendement n° 36, qui a été précédemment réservé, et qui
tend à supprimer la division du titre VII et son intitulé.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de conséquence de la suppression de
l'article 39.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 36, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, la division du titre VII et son intitulé sont supprimés.
Article 40
M. le président.
« Art. 40. - Les dispositions des articles 4, 7, 7
quinquies
, 8, 9, 9
bis
A, 10, 13 et 20 sont applicables dans la collectivité territoriale
de Saint-Pierre-et-Miquelon.
« Les dispositions prévues aux articles 2, 3, 5, 6, 16, 21 et 33 sont rendues
applicables à la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon sous
réserve des adaptations nécessaires.
« Les exonérations totales ou partielles de cotisations sociales prévues par
l'article 3 s'appliquent de façon identique à Saint-Pierre-et-Miquelon, dans la
limite du plafond de sécurité sociale en vigueur dans la collectivité
territoriale.
Par amendement n° 57, M. Reux propose, dans le premier alinéa de cet article,
de remplacer les références :« , 7, 7
quinquies
, 8, 9, 9
bis
A,
10, » par les références : « , 7 à 10, 12
ter
, ».
La parole est à M. Reux.
M. Victor Reux.
Il s'agit de faire bénéficier la collectivité territoriale de
Saint-Pierre-et-Miquelon des mesures concernant le revenu de solidarité dont
peuvent bénéficier les personnes qui perçoivent depuis au moins deux ans le
RMI, ainsi que le précise l'article 12
ter
.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
La commission est favorable à cet amendement, sous réserve
d'une modification rédactionnelle, consistant à ajouter après la référence «
10, » la référence « 12
ter
».
M. le président.
Monsieur Reux, acceptez-vous de modifier votre amendement ainsi que vous le
suggère la commission.
M. Victor Reux.
Bien volontiers, monsieur le président.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 57 rectifié, présenté par M. Reux, et
tendant, dans le premier alinéa de l'article 40, à compléter les références : «
, 7, 7
quinquies
, 8, 9, 9
bis
A, 10, » par la référence : « 12
ter
, ».
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 57 rectifié, accepté par la commission et par
le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 45, le Gouvernement propose, dans le deuxième alinéa de
l'article 40, après les mots : « aux articles 2, 3, 5, 6, », d'insérer les mots
: « 9
quater
, ».
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Il s'agit d'énumérer dans l'article 40 l'ensemble des
mesures du projet de loi qui s'appliquent à la collectivité de
Saint-Pierre-et-Miquelon, et ce afin d'éviter toute confusion. Nous l'avons vu
à un stade plus en avant de nos débats.
Cet amendement fait suite à l'amendement déposé à l'article 9
quater
.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 45, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 40, modifié.
(L'article 40 est adopté.)
Article 40 ter A
M. le président.
« Art. 40
ter
A. - I. - Au second alinéa du III de l'article 119 de la
loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la
fonction publique territoriale, les références : "L. 417-8, L. 417-9" sont
supprimées.
« II. - Le dernier alinéa de l'article 80 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986
portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière
est supprimé. »
- (Adopté.)
Article 40 ter
M. le président.
« Art. 40
ter
. - I. - La loi n° 75-534 du 30 juin 1975 d'orientation en
faveur des personnes handicapées est complétée par un article 63 ainsi rédigé
:
«
Art. 63
. - Les articles 1er, 2, 6, 7 (premier alinéa du I et II), 8,
32 à 34, 39, 43, 46 et 47, 52 à 54, 56 et 57 de la présente loi sont
applicables à la collectivité territoriale de Saint Pierre et Miquelon sous
réserve des adaptations suivantes :
« 1° A l'article 6 :
«
a)
Au premier alinéa, les mots : "chaque département" sont remplacés
par les mots : "la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon" et
les mots : "le tribunal de grande instance" par les mots : "le tribunal
d'instance" ;
«
b)
Aux I
bis,
IV et VI, les mots : "commission départementale
de l'éducation spéciale" sont remplacés par les mots : "commission de
l'éducation spéciale" ;
«
c)
Au V, les mots : "la juridiction du contentieux technique de la
sécurité sociale" sont remplacés par les mots : "les juridictions de droit
commun" » ;
« 2° A l'article 7, les mots : "les régimes d'assurance maladie" sont
remplacés par les mots : "la caisse de prévoyance sociale" ;
« 3° A l'article 57, les mots : "des commissions départementales de
l'éducation spéciale" sont remplacés par les mots : "de la commission de
l'éducation spéciale". »
« II à IV. -
Non modifiés
»
« V. - L'article L. 251 1 du code de l'éducation est complété par un alinéa
ainsi rédigé :
« Aux articles L. 112 1 et L. 351 2, les mots : "commission départementale
d'éducation spéciale" sont remplacés par les mots : "commission territoriale
d'éducation spéciale". »
Par amendement n° 38, M. Balarello, au nom de la commission, propose, dans le
quatrième alinéa (1°
b
) et le dernier alinéa du texte présenté par le I
de l'article 40
ter
pour l'article 63 de la loi n° 75-534 du 30 juin
1975 d'orientation en faveur des personnes handicapées, de remplacer les mots :
« commission de l'éducation spéciale » par les mots : « commission territoriale
de l'éducation spéciale ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 38, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 40
ter,
ainsi modifié.
(L'article 40
ter
est adopté.)
Articles 40 quater et 40 sexies
M. le président.
« Art. 40
quater
. - I. - Après le chapitre II du titre II de la loi n°
87-563 du 17 juillet 1987 portant réforme du régime d'assurance vieillesse
applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, il est inséré un chapitre II
bis
intitulé : "Allocation spéciale", comprenant les articles 32
bis
à
32
quater
ainsi rédigés :
«
Art. 32
bis. - Toute personne résidant sur le territoire de la
collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon et y ayant résidé ou
ayant résidé sur le territoire métropolitain, dans un département ou un
territoire d'outre-mer ou à Mayotte pendant une durée et dans des conditions
déterminées et ayant atteint au premier jour d'un trimestre civil un âge
minimum abaissé en cas d'inaptitude au travail peut prétendre au bénéfice d'une
allocation spéciale vieillesse si elle ne relève ni d'une organisation autonome
d'allocation de vieillesse ni d'un régime vieillesse de sécurité sociale.
« En outre, le total des ressources personnelles de l'intéressé ou des époux
et de l'allocation ne doit pas excéder des plafonds de ressources déterminés
différents pour une personne seule ou un ménage.
« Lorsque le total de l'allocation spéciale et des ressources personnelles du
requérant ou des époux dépasse respectivement ces maxima, l'allocation est
réduite en conséquence.
« Un décret précise les conditions d'application du présent article.
«
Art. 32
ter. - L'allocation spéciale est accordée sur demande
expresse des intéressés.
« Il est statué sur cette demande par la caisse de prévoyance sociale.
« L'allocation spéciale est liquidée et servie par ladite caisse.
«
Art. 32
quater. - Les charges de la caisse de prévoyance sociale de
Saint-Pierre-et-Miquelon afférentes au service de l'allocation spéciale sont
couvertes au moyen d'une subvention spécifique de l'Etat dont les modalités de
versement seront fixées par décret. »
« II à IV. -
Non modifiés. - (Adopté.)
« Art. 40
sexies
. - Après l'article 42-10 de la loi n° 88-1088 du 1er
décembre précitée, il est inséré un article 42-15 ainsi rédigé :
«
Art. 42-15
. - A Saint-Pierre-et-Miquelon, une commission territoriale
d'insertion se substitue au conseil départemental d'insertion visé à l'article
35 et à la commission locale d'insertion visée à l'article 42-1, et se voit
confier les missions qui leur sont dévolues.
« La commission territoriale d'insertion élabore et adopte un programme
territorial d'insertion selon les modalités qui sont prévues à l'article 36
pour le programme départemental d'insertion.
« Coprésidée par le préfet et le président du conseil général, la commission
territoriale d'insertion est composée de représentants de l'Etat, de la
collectivité territoriale, des communes et d'organismes ou associations
intervenant dans le domaine de l'insertion. Le préfet et le président du
conseil général en arrêtent la liste des membres.
« Un comité technique est désigné en son sein pour assurer la continuité de la
commission territoriale, et notamment pour l'examen des contrats d'insertion. »
- (Adopté.)
Article additionnel après l'article 41 quater
M. le président.
Par amendement n° 49, MM. Reux et Lauret proposent d'insérer, après l'article
41
quater,
un article additionnel ainsi rédigé :
« Ceux des agents des corps de l'Etat pour l'administration de
Saint-Pierre-et-Miquelon qui auraient postulé après la départementalisation
intervenue en 1976 pour la fonction publique locale ou pour la fonction
publique hospitalière se voient maintenir le bénéfice des dispositions prévues
par le décret n° 52-1050 du 10 septembre 1952 portant attribution d'une
indemnité temporaire aux personnels retraités tributaires du code des pensions
civiles et militaires et de la caisse des retraites de la France d'outre-mer en
résidence dans les territoires relevant du ministère de la France d'outre-mer
ou dans le département de la Réunion. »
La parole est à M. Reux.
M. Victor Reux.
Cet amendement concerne les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers de
Saint-Pierre-et-Miquelon.
En juin 1975, après la publication de la loi n° 74-640 du 12 juillet 1974 et
du décret n° 75-479 du 4 juin 1975, les fonctionnaires locaux en service à
Saint-Pierre-et-Miquelon ont été intégrés dans des « corps de l'Etat pour
l'administration de Saint-Pierre-et-Miquelon ». Ces corps étaient gérés par le
secrétariat d'Etat aux départements et territoires d'outre-mer dans le cadre
d'un budget spécifique.
Ces corps ont été maintenus lors de la départementalisation qui est intervenue
en 1976. Ce changement de statut a conduit à une prise en charge directe des
ministères techniques, qui ont été amenés à créer les postes budgétaires
correspondants. Les auxiliaires locaux devenus auxiliaires d'Etat ont eu
vocation à être titularisés dans ces corps.
C'est ainsi que les agents des collectivités locales, environ 200, ont été
plus ou moins contraints à demander leur intégration dans les corps régis par
le code de la santé et le code des communes étendus par l'ordonnance du 26
septembre 1977, le Gouvernement leur ayant garanti une parité de situation.
Si la réglementation en matière d'évolution de carrières et de rémunérations
est parfaitement identique que l'on soit agent des collectivités locales ou
agent de l'Etat, la réglementation en matière de retraite est apparue
différente lors de la première demande de mise à la retraite du fait du
différentiel de 40 %.
En effet, la retraite servie par la CNRACL n'a pas été abondée de l'indemnité
compensatrice de 40 %, contrairement à celle dont bénéficient les pensionnés de
l'Etat qui résident à Saint-Pierre-et-Miquelon.
Il convient de tenir les engagements pris, en assurant une parité de situation
en matière de retraite entre les agents des collectivités locales et les agents
de l'Etat en service dans cet archipel qui, depuis juin 1985, est devenu « une
collectivité territoriale de la République ».
L'incidence financière de cette mesure serait faible, je tiens à le souligner,
eu égard au nombre des personnes en service dans ces administrations :
vingt-deux seulement perçoivent actuellement une retraite des collectivités
locales.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement tend à faire bénéficier certains
fonctionnaires retraités de la collectivité territoriale de
Saint-Pierre-et-Miquelon d'une indemnité permettant d'aligner leur situation
sur celle des agents retraités de l'Etat.
S'il ne concernait que Saint-Pierre-et-Miquelon, le problème serait
effectivement de faible ampleur. C'est la raison pour laquelle la commission
s'en remet à la sagesse du Sénat et souhaite connaître l'avis du
Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cet
amendement.
Je pourrais, bien sûr, invoquer l'article 40 de la Constitution - je ne
manquerai d'ailleurs pas de le faire - en raison du coût budgétaire de cette
mesure. En effet, au-delà de son application à Saint-Pierre-et-Miquelon qui
concernerait, ainsi que cela a été indiqué, vingt-deux agents en retraite plus
quelques dizaines de personnels supplémentaires ayant demandé leur intégration
dans la fonction publique locale ou hospitalière, il est clair que cette
disposition serait très certainement examinée de très près dans les autres
départements d'outre-mer, s'agissant non seulement des agents des collectivités
territoriales, mais aussi de ceux de l'Etat.
Pour toutes ces raisons, monsieur le rapporteur, le Gouvernement est
défavorable à cet amendement.
M. José Balarello,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Comme je l'ai laissé entendre, monsieur le président, il
faudrait peut-être connaître très exactement le nombre des agents qui seraient
fondés, dans les autres départements d'outre-mer, à réclamer l'application
d'une telle mesure. A Saint-Pierre-et-Miquelon, il s'agirait d'une vingtaine de
personnes seulement, mais, monsieur le secrétaire d'Etat, j'aimerais savoir à
combien vous évaluez le nombre de ces agents dans l'ensemble des départements
d'outre-mer.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
A plusieurs milliers, monsieur le rapporteur !
M. José Balarello,
rapporteur.
Au bénéfice de ces observations, j'émets un avis
défavorable.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le président, cet argument du nombre des
agents concernés ne m'exonère pas d'invoquer l'article 40.
M. le président.
L'article 40 de la Constitution est-il applicable ?
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Il l'est, monsieur le président.
M. le président.
L'article 40 étant applicable, l'amendement n° 49 n'est pas recevable.
Article 41
(Pour coordination)
M. le président.
« Art. 41. - La loi n° 85-595 du 11 juin 1985 relative au statut de l'archipel
de Saint-Pierre-et-Miquelon est ainsi modifiée :
« 1°
Non modifié
;
« 2°
Supprimé
;
« 3° Dans le premier alinéa de l'article 28, les mots : "trois mois" sont
remplacés par les mots : "un mois". »
- (Adopté.)
M. le président.
Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l'objet de la nouvelle
lecture.
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M.
Vergès pour explication de vote.
M. Paul Vergès.
Mes chers collègues, vous connaissez le contenu des dispositions économiques,
sociales et culturelles de cette loi d'orientation. Nous pouvons dire que,
depuis 1946, jamais nous n'avons eu autant de mesures et autant de moyens. Cela
signifie que ce qui est réclamé depuis des années et des années pour un
développement durable de la Réunion est désormais possible si nous allons vers
ce partenariat entre les institutions sociales, le Gouvernement et la majorité
du Parlement.
Je veux également dire que la suppression de la création d'un deuxième
département réclamé, je le répète, par l'ensemble des élus de la Réunion...
M. Edmond Lauret.
C'est faux !
M. Paul Vergès.
... revient à remettre en cause l'aménagement équilibré du territoire. Mais
peu importe ! L'important, ce soir, comme un certain nombre d'orateurs l'ont
souligné, c'est que toute modification soit du régime administratif, soit du
régime institutionnel d'une collectivité peut partir de la revendication des
forces politiques locales.
Ce raisonnement est d'une logique parfaite, il n'y a là aucun jugement de
valeur. Les dispositions votées par le Sénat vont dans ce sens : toute
modification devra être précédée d'une consultation pour avis de la population.
Entre l'initiative du Parlement et le contenu de la revendication locale, c'est
la revendication locale qui l'emportera.
C'est un choix d'évolution pour l'outre-mer. Je comprends parfaitement cette
logique. Elle exige toutefois que les populations de ces pays soient éclairées
sur le choix du Parlement afin qu'elles sachent quelles procédures devront être
engagées.
Le vote de ce soir de la majorité sénatoriale donnera un élan considérable aux
forces qui, sur place, veulent très vite changer de statut. C'est la leçon que
je voulais tirer avec vous. L'avenir le dira. Nous verrons ce qu'il
adviendra.
Le plus important, et je conclurai sur ce point, est que les conditions
matérielles existent pour que chacun prenne ses responsabilités. On ne pourra
plus dire à Paris : à la Réunion ou aux Antilles, ils n'utilisent pas les
moyens qu'on leur donne. Sur place, on ne pourra pas dire : nous ne pouvons pas
avancer, parce que Paris ne suit pas.
Chacun est aujourd'hui au pied du mur pour engager le développement durable de
son département ou de sa région.
En raison de cet arsenal de mesures, le président du conseil général de la
Réunion disait qu'il souhaitait que le Parlement vote le plus vite possible ce
projet de loi d'orientation qui a le soutien de « tous les élus locaux et de
tous les acteurs économiques ». C'est du jamais vu dans le cadre de la
politique pour l'outre-mer.
Voilà pourquoi j'espère qu'en dernière lecture l'Assemblée nationale rétablira
un deuxième département et qu'avec cet arsenal de mesures et cette réforme
administrative nous irons vers le développement.
M. le président.
La parole est à M. Lise pour explication de vote.
M. Claude Lise.
Nous voici parvenus à la conclusion de nos travaux sur le projet de loi
d'orientation pour l'outre-mer. Sa mise en application est très attendue dans
nos départements, notamment toutes les mesures économiques et sociales qui ont
été évoquées à plusieurs reprises par les acteurs économiques et les jeunes en
attente d'un emploi.
Le Sénat a incontestablement contribué à enrichir le projet de loi sur
certains points, notamment en première lecture.
Il convient de se féliciter également de l'apport du Sénat au cours de cette
nouvelle lecture, puisqu'il a rétabli notamment les prérogatives des conseils
généraux dans le cadre de la coopération régionale.
S'agissant du volet économique et social du projet de loi d'orientation, les
propositions qui ont été faites par la majorité tendent malheureusement, le
plus souvent, à dépasser l'enveloppe budgétaire qui nous était allouée. Chacun
sait donc très bien qu'il s'agit de mesures sans suite. Il est regrettable que
certains se soient obstinés simplement dans des effets d'annonce.
Cette loi traduira pourtant un effort sans précédent de l'Etat en direction de
nos départements, un effort budgétaire quatre fois plus important que celui que
représentait la loi Perben de 1994. On comprend mal, par conséquent, que
certains, encore aujourd'hui, aient parlé de « mesurettes » à propos des
dispositions très importantes que contient ce texte.
Il importe que cet effort demeure ciblé sur l'objectif premier du texte, qui
est la création d'emplois pérennes. Il n'est pas sûr que l'esprit de surenchère
qui a parfois prévalu dans certaines propositions corresponde vraiment à cet
objectif.
Mais ce qu'il faut vraiment déplorer avec force, c'est le manque de cohérence
de la majorité sénatoriale concernant le volet institutionnel de ce projet de
loi. En supprimant les articles 38 et 39, la majorité sénatoriale a une fois de
plus dénaturé le texte, comme elle l'avait fait en première lecture. Elle s'est
enfermée encore dans une contradiction.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez parlé d'insoutenable contradiction.
J'espère qu'il n'y a pas eu en tout cas une insoutenable légèreté. L'histoire
jugera
(Protestations sur certaines travées du RPR),
comme elle l'a fait
à propos de l'attitude du Sénat lors des débats sur l'assemblée unique.
A l'époque, il y avait eu la même obstination. Et ceux qui aujourd'hui nous
disent que l'on aurait dû mettre en place une assemblée unique sont précisément
ceux-là mêmes qui étaient contre une assemblée unique en 1982. J'ai
parfaitement le souvenir de ce qui s'est alors passé au Parlement. Je crois que
l'on regrettera de la même manière d'avoir refusé aujourd'hui l'instance de
délibération de l'article 39.
On ne peut pas à la fois affirmer son adhésion à l'idée de permettre une
évolution institutionnelle différenciée de chacun des départements d'outre-mer
et refuser les moyens démocratiques qui permettent de parvenir à cette
évolution différenciée.
Compte tenu de ces observations et conformément à ce qui a été annoncé dans la
discussion générale, le groupe socialiste et apparentés va donc voter contre le
texte tel qu'il résulte des travaux du Sénat.
(Applaudissements sur les
travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Othily.
M. Georges Othily.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, à
l'heure où nous terminons l'examen du projet de loi d'orientation relatif à
l'outre-mer, chacun d'entre nous, en tant que représentant de la nation, doit
se poser plusieurs questions.
Que restera-t-il du texte que nous venons d'adopter, après son passage devant
l'Assemblée nationale, avec l'application de l'article 45, alinéa 4, de la
Constitution ?
Alors que le Gouvernement a déclaré l'urgence sur ce texte - comme sur bien
d'autres, d'ailleurs -, en tant que parlementaires, nous ne pouvons,
parallèlement, que regretter l'utilisation généralisée de ce procédé,
entraînant, avec la « procédure » du dernier mot, le mépris de la position
sénatoriale.
Que conservera le Conseil constitutionnel de l'ensemble du dispositif
lorsqu'il sera amené à contrôler la constitutionnalité du texte ?
Le renvoi au pouvoir réglementaire dans nombre de dispositions paraît tout
autant critiquable. J'ai relevé autant de décrets à prendre ou de consultations
à mener avec les assemblées départementales ou régionales qu'il y a d'articles
dans la loi ! Le législateur doit-il laisser autant de latitude à l'exécutif
pour appliquer la loi ? Quel sera, en fait, le véritable visage du dispositif
que le Parlement examine actuellement ? Personne ne peut, aujourd'hui, le dire
avec exactitude.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous venez de vous embarquer dans le grand
bateau de l'outre-mer et, en tant que représentant de la plus grande région de
France et d'outre-mer, je vous souhaite la bienvenue.
Ce texte, qui a tout de même le mérite d'exister, montre l'intérêt que le
Gouvernement porte à l'outre-mer, en donnant à la Guadeloupe, à la Martinique,
à la Réunion et à la Guyane la possibilité de disposer à l'avenir d'une
organisation institutionnelle propre. C'est déjà une avancée notable.
Mais, sans remettre en cause l'oeuvre du constituant de 1958, qui a été utile
en son temps, je considère que le statut de département d'outre-mer est
aujourd'hui trop strict pour certains des départements auxquels il
s'applique.
Les Guyanais, dans leur très grande majorité, se situent dans une autre
logique. Nous avons d'ailleurs déjà entamé avec votre prédécesseur des
discussions en vue d'une évolution institutionnelle de la Guyane.
Je compte donc sur l'écoute attentive du Gouvernement à l'égard des requêtes
formulées par les régions d'outre-mer et, notamment, par la région Guyane.
Nous ne souhaitons pas, en tout cas en Guyane, que la rue décide de l'avenir
de notre pays. Cette région désire prendre son destin en main, quitter son
statut d'assisté, tout en demeurant, j'insiste sur ce point, dans le sein de la
République.
Le Sénat a rétabli un certain nombre de dispositions qui avaient été rejetées
par l'Assemblée nationale. Au nom des peuples d'outre-mer, monsieur le
secrétaire d'Etat, nous vous demandons de ne pas dépouiller le texte que le
Sénat va voter ce soir. Vous aurez peut-être accompli avec nous l'oeuvre la
plus belle, en tant que représentant d'un gouvernement qui semble n'avoir pas
encore bien compris le sens dans lequel le Sénat veut s'engager avec les
peuples d'outre-mer.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union
centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Lanier.
M. Lucien Lanier.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je n'aurais pas pris la parole si vous n'aviez
pas eu, tout à l'heure, un mot qui m'a surpris.
Vous avez indiqué dans votre intervention que cette loi n'était pas une loi
d'étape. J'en déduis donc que vous la considérez comme définitive. C'est
dommage ! En effet, cette loi, pendant trois ans, nous l'avons attendue avec
impatience. Au terme de ces trois ans, nous pouvions espérer qu'on nous
présenterait une loi de programme, et nous aurions mis tout notre coeur à
améliorer et à voter une loi qui aurait vraiment changé les choses, qui aurait
été véritablement porteuse d'avenir.
Au lieu de quoi nous avons eu une loi d'orientation qui n'est guère qu'une
série de mesures portant sur l'outre-mer par lesquelles on tente de colmater
des brèches en train de s'ouvrir, c'est-à-dire des mesures prises sous l'empire
de la nécessité et de l'urgence.
Monsieur le secrétaire d'Etat, ne venez pas nous dire que c'est le Sénat qui
est immobiliste, qui est « ringard », comme cela fut dit jadis. Le Sénat
voulait une loi vivante, qui soit digne des années et peut-être même des
décennies à venir, susceptible de porter l'outre-mer vers son destin. Or on
nous propose simplement de confirmer l'outre-mer dans des institutions qui sont
maintenant bien anciennes. Nous aurions pu nous entendre sur le volet
économique et social de votre texte. J'en veux pour preuve les nombreux
amendements qui ont été proposés pour améliorer cette partie du texte. En
revanche, il nous était impossible d'accepter le volet institutionnel eu égard
aux deux éléments sur lesquels il reposait : la bidépartementalisation de la
Réunion - qui ne s'explique que pour des raisons politiques - et le congrès,
qui dissimulait manifestement la création d'une troisième assemblée dans les
trois autres départements d'outre-mer.
Non, monsieur le secrétaire d'Etat, nous ne sommes pas ringards. Mais nous
sommes déçus par un texte qui, en définitive, ne modifiera pas grand-chose, et
que vous avez voulu, comme votre prédécesseur, faire passer en force : un texte
à prendre ou à laisser ! En première lecture, j'avais « laissé », en
m'abstenant. Aujourd'hui, je voterai le texte tel qu'il a été modifié par nos
excellents rapporteurs.
Nous verrons ce que vous aurez bien voulu en laisser substituer à l'issue de
l'ultime lecture à l'Assemblée nationale. En effet, jusqu'à présent, vous avez
refusé tout ce qui était proposé, vous en tenant à cette tactique du passage en
force, sans doute fidèle à cette devise : « Nous finirons par triompher parce
que nous sommes les plus forts. »
(Applaudissements sur les travées du RPR,
des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Lauret.
M. Edmond Lauret.
Je souhaite tout d'abord remercier les commissions, leurs rapporteurs et la
majorité du Sénat du travail accompli au cours des deux lectures de ce projet.
En 1997, deux textes soutenaient l'économie des départements d'outre-mer : la
loi Pons et la loi Perben. La loi Pons a été décapitée. La loi Perben est
aujourd'hui restaurée, voire améliorée. C'est bien, mais il n'y a pas de quoi
pavoiser !
Sur le plan institutionnel, le Sénat a rendu justice et parole aux
collectivités locales et aux populations, en particulier à la population de la
Réunion. Je m'en félicite.
Je remercie mes collègues d'avoir fait échec aux députés communistes qui, par
un amendement scélérat, entendaient baîllonner les Réunionnais en leur refusant
d'être consultés sur leur devenir.
Nous mettons au défi les députés socialistes et communistes, en particulier
ceux de la Réunion, de revenir sur ce qui a été voté ce soir par la majorité
sénatoriale.
M. Marcel Charmant.
Ils vont se gêner !
(Sourires sur les travées socialistes.)
M. Edmond Lauret.
Sinon, le sondage grandeur nature qui aura lieu les 11 et 18 mars prochains
saura les rappeler à la réalité !
M. Guy Allouche.
Ils tremblent déjà !
(Nouveaux sourires sur les mêmes travées.)
M. Edmond Lauret.
Quant à l'avenir social et économique des départements d'outre-mer, je crois
qu'il devra faire l'objet d'une autre loi, d'une vraie loi de programme. C'est
une telle loi que nous nous attacherons à mettre au point, je l'espère, à
partir de 2002.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains
et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est M. Lylian Payet.
M. Lylian Payet.
Au cours de la discussion générale, j'ai dit que ce projet de loi était un bon
projet pour l'outre-mer, notamment pour la Réunion. Force est de constater
qu'après les supressions votées par la majorité sénatoriale il est devenu un
projet sans âme, sans force. Je ne serai donc pas complice du vote qui aura
lieu dans quelques instants parce que les Réunionnais attendent autre chose.
Je ne dirai pas que le Sénat est « ringard », mais je dirai qu'il est tout de
même très frileux quand il s'agit de prendre des décisions essentielles pour
l'outre-mer.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du
groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à Mme Michaux-Chevry.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Certes, le débat a été un peu houleux - jusqu'à M. le secrétaire d'Etat, qui
m'a prise à partie, mais je lui répondrai sur mon terrain, le moment venu
(sourires)
- mais cette passion qui s'est manifestée témoigne à la fois
de la gravité de la situation de l'outre-mer et, il faut le dire, de l'intérêt
que tous ici, quelles que soient les travées sur lesquelles vous siégez, vous
portez à ces morceaux de la France qui sont loin mais qui partagent avec vous
des valeurs extrêmement profondes.
En tout cas, je ne peux pas laisser dire devant la Haute Assemblée que, depuis
1946, rien n'a été fait pour l'outre-mer.
En 1986, toute une série de mesures rétablissant l'égalité sociale dans nos
départements ont été prises par le gouvernement de Jacques Chirac.
(Très
bien ! sur les travées du RPR.)
N'en avez-vous pas été satisfait, monsieur
Vergès, vous qui étiez alors député ?
En juin 1987, ce fut le mémorandum, qui a permis aux départements d'outre-mer
d'obtenir le doublement des fonds structurels. Et je n'aurai garde d'oublier la
loi Perben, la création des zones franches.
Comment, dès lors, prétendre que rien n'a été fait depuis 1946 ?
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
Au demeurant, si cela était avéré, c'est aussi bien la droite que la gauche
qui se trouveraient mises en accusation. Cela signifierait que la France, quel
que soit son gouvernement, ignore nos régions. Or ce n'est pas le cas.
J'ajouterai, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous n'avez pas fait preuve de
suffisamment de souplesse et que vous connaissez mal nos régions. Oser me faire
la leçon, à moi, en me disant que ce n'est pas dans la rue que je vais régler
les problèmes ! Souffrez que je vous rappelle que, alors qu'il était Premier
ministre, M. Rocard, par des propos qu'il avait prononcés en Guadeloupe, a mis
en danger ma vie, ainsi que celle des membres de ma famille.
Non, ce n'est pas par la rue que je souhaite voir régler les problèmes de
l'outre-mer. C'est par le dialogue, par la concertation. Et je ne me laisse pas
impressionner par les attaques de certains sbires qui, à la radio et à la
télévision, se plaisent à faire croire que j'ai changé de bord, que je suis
devenue indépendantiste !
Je suis sereine, je ne traite pas les dossiers d'avenir de nos régions avec
légèreté, mais j'ai conscience que monte une revendication très forte de tous
nos jeunes, que nous avons formés, qui ont accédé aux grandes écoles et qui,
revenus chez nous, ne peuvent qu'attendre un contrat emploi-solidarité ou un
emploi-jeune. Ce n'est pas suffisant !
Ce projet de loi, bien amendé par le Sénat, n'est encore, pour moi, qu'une
étape. Il faut avoir le courage de traiter autrement l'outre-mer. Il faut que
les fonctionnaires respectent vraiment les populations de l'outre-mer. Il faut
que les problèmes de l'outre-mer soient appréhendés d'une manière autre que
superficielle.
Quand je constate le soin que met le Premier ministre à recevoir des
indépendantistes - peut-être des assassins - pour essayer de régler les
problèmes de la Corse, je me sens confortée dans mon choix de la sérénité !
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste.)
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, dans mon propos introductif, je formulais le voeu de pouvoir
convaincre la majorité sénatoriale que le projet de loi d'orientation, préparé
par le Gouvernement en étroite concertation avec tous les acteurs locaux -
est-il besoin de rappeler les plus de mille consultations auxquelles se sont
livrés Claude Lise et Michel Tamaya ? - et adopté par l'Assemblée nationale à
une large majorité, exprimait pour l'outre-mer une ambition à la hauteur des
enjeux qui s'y posent et surtout de la place qui doit être la sienne dans la
République. Sur ces enjeux, nous établissons, au fond, le même diagnostic,
ainsi que je le disais tout à l'heure à M. le rapporteur.
Je ne suis pas sûr d'avoir totalement réussi cette mission. J'ai souhaité, en
tout cas, comme l'avait fait Jean-Jack Queyranne avant moi, en première
lecture, vous faire partager notre conviction que ce texte, cinquante-quatre
ans après la loi du 19 mars 1946, exprimait une nouvelle vision politique sur
l'outre-mer, vision dans laquelle chacun, quelle que soit la famille de pensée
qui est la sienne, pouvait se reconnaître, sans renoncer pour autant à ses
propres engagements. Les positions exprimées publiquement par le Président de
la République, dont chacun a bien vu qu'elles rejoignaient, sur tous les points
importants, les orientations du Gouvernement, pouvaient, en effet, vous y
inciter.
Au travers de ce débat, j'ai compris - surtout, chacun aura compris - que le
Sénat, comme avant lui l'Assemblée nationale, donnait acte au Gouvernement -
vous l'avez fait ce soir, parfois avec quelques restrictions - qu'il avait
élaboré, en faveur des départements d'outre-mer, un véritable plan de
développement économique et social, réaffirmant tout à la fois une solidarité
accrue de la nation et le refus du mal développement.
Je n'ai pas eu beaucoup de difficulté à vous en convaincre, car les chiffres
parlaient d'eux-mêmes, notamment cet effort sans précédent d'exonération des
charges sociales et, quelles que soient les précautions de langage, je crois
que vous étiez déjà convaincus sur ce point. De cette conviction partagée est
né ce soir un dialogue entre le Gouvernement et la Haute Assemblée. Je
souhaite, bien sûr, vous en remercier.
Mes regrets sont d'autant plus vifs de constater qu'à l'inverse la majorité
sénatoriale n'a pas voulu, à l'exception de quelques-uns de ses membres, saisir
la chance qui lui était offerte de faire la preuve qu'elle était sincèrement et
complètement acquise à la perspective d'une évolution institutionnelle pour les
départements d'outre-mer qui le souhaitent.
Il y a dans cette position, je le redis solennellement, une insoutenable
contradiction : peut-on, encore une fois, refuser les moyens quand on accepte
la fin ?
J'ai bien noté, sur ce point, l'affirmation qui a été celle de M. Fauchon.
D'ailleurs, elle aurait été celle de M. Jacques Larché s'il avait été présent
ce soir ; ses positions en première lecture en témoignent et, pour m'en être
entretenu récemment avec lui, je connais son sentiment à ce sujet.
Convenez cependant, eu égard aux positions qui ont été si longtemps celles des
familles politiques dont vous vous réclamez, que la question devait vous être
posée de manière solennelle et c'est ce que je fais.
Pour ma part, en constatant que la majorité sénatoriale a, une nouvelle fois,
rejeté l'article 39 du projet de loi, qui est véritablement la clé de voûte de
ce volet institutionnel, mes regrets se doublent d'un constat. Derrière
l'affichage d'une convergence dans les principes, derrière les critiques de
détail concernant telle ou telle modalité jugée trop complexe, je n'ai discerné
aucune alternative politique aux orientations du Gouvernement.
Peut-on, je le répète, s'affirmer favorable à l'évolution institutionnelle,
rejeter les voies et moyens retenus par le Gouvernement et ne proposer aucune
alternative ?
En fait, je suis contraint de vous dire, mesdames, messieurs les sénateurs,
que la démonstration a été faite ce soir que, dans ce pays, l'opposition n'a
pas souhaité présenter un vrai projet pour l'outre-mer.
(Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. Jean Delaneau.
C'est une caricature !
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat.
Pour sa part, et je le dis avec autant de sérénité que
Mme Michaux-Chevry tout à l'heure, le Gouvernement n'a pas de doute sur le fait
que la rénovation du pacte républicain dans notre pays passe aussi par
l'outre-mer - il s'agit d'un chantier difficile, douloureux parfois - dont la
diversité sera pleinement reconnue, un outre-mer dont chacune des collectivités
pourra, dans l'avenir, trouver la place qui correspond le mieux à son identité
et à ses aspirations. C'est bien là notre ambition et c'est bien là notre
projet.
Pour l'outre-mer, mais aussi pour l'idée que nous nous faisons de ce que doit
être une république - sûre de ses valeurs, mais tolérante, ouverte et moderne -
soyez convaincus, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous mettrons en
oeuvre ce projet de loi.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
M. Josselin de Rohan.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. de Rohan.
M. Josselin de Rohan.
Monsieur le président, je demande une suspension de séance de quelques
instants.
M. le président.
Il va être fait droit, bien sûr, à votre demande, monsieur de Rohan.
Avant de suspendre la séance, je rappelle au Sénat que deux textes sont encore
inscrits à l'ordre du jour de cette séance nocturne : tout d'abord, le projet
de loi portant habilitation du Gouvernement à transposer, par ordonnances, des
directives communautaires et, ensuite, une demande de discussion immédiate
d'une proposition de loi.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue le mercredi 8 novembre 2000 à zéro heure vingt, est
reprise à zéro heure quarante.)
M. le président. La séance est reprise.
7
TRANSPOSITIONS PAR ORDONNANCES
DE DIRECTIVES COMMUNAUTAIRES
Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi
déclaré d'urgence
M. le président.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration
d'urgence, du projet de loi (n° 473, 1999-2000) portant habilitation du
Gouvernement à transposer, par ordonnances, des directives communautaires et à
mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire. [Rapport n° 30
(2000-2001) et avis n°s 32, 31, 35 et 36 (2000-2001).]
Dans la discussion des articles, nous en étions parvenus à l'article 4.
Article 4
M. le président.
« Art. 4. - Outre les mesures législatives nécessaires à la transposition de
la directive 1999/62/CE du 17 juin 1999 relative à la taxation des poids lourds
pour l'utilisation de certaines infrastructures mentionnée à l'article 1er, et
afin de faciliter, notamment, la mise en oeuvre des dispositions du droit
communautaire relatives aux marchés publics de travaux, le Gouvernement est
autorisé à prendre, par ordonnances, les mesures législatives requises pour
:
« 1° Supprimer la garantie de reprise de passif accordée par l'Etat aux
sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes, prolonger les durées
actuelles des concessions et prévoir les conditions dans lesquelles ces
modifications seront appliquées dans les comptes des sociétés, au titre de
l'exercice ouvert au 1er janvier 2000 ;
« 2° Redéfinir les règles, notamment en les unifiant et les simplifiant,
relatives à l'institution de péages pour l'usage d'infrastructures routières et
de certains ouvrages d'art compris dans la voirie nationale, départementale et
communale, y compris lorsque la gestion de ces ouvrages d'art est assurée par
un établissement public de coopération intercommunale. »
Sur l'article, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Monsieur le
président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous voici de nouveau réunis pour
la suite de l'examen d'un texte qui est particulièrement important et urgent
pour la politique d'infrastructures de notre pays. A ce point de la discussion,
je ne reviendrai pas en détail sur ce que j'ai déclaré ici même, le 25 octobre
dernier.
Je vous dirai simplement que je suis dans le même état d'esprit de
dialogue.
Il n'a jamais été dans mon intention, ni dans celle du Gouvernement,
d'escamoter le débat sur la réforme des autoroutes et de priver ainsi la
représentation nationale du droit de dire son mot et d'amender au fond cet
article 4.
Je vous renouvelle d'ailleurs l'engagement pris devant vous, voilà deux
semaines, de débattre au fond de la réforme des autoroutes avant de saisir du
projet d'ordonnance le Conseil d'Etat, à l'occasion d'une question orale avec
débat, par exemple.
Comme il l'a montré à maintes reprises et encore dernièrement, avec la
discussion du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement
urbains, le Sénat sait se faire force de proposition. Il serait dommage qu'il
n'en aille pas aujourd'hui ainsi.
Vous le savez, la technique financière de l'adossement, qui a contribué de
manière efficace et décisive pendant des années à la construction du réseau
autoroutier dont notre pays bénéficie, n'est plus compatible avec la
législation communautaire. Nous le savons précisément depuis l'arrêt du Conseil
d'Etat sur la concession de l'A 86-ouest. Pourtant, je le rappelle, cette
autoroute avait été validée par la section des travaux publics du Conseil
d'Etat - je ne mets donc pas en cause mes prédécesseurs signataires - mais la
section du contentieux nous a obligés à recommencer la procédure.
A partir de là, pendant plus de deux ans, le Gouvernement a discuté avec la
Commission européenne pour élaborer un nouveau dispositif juridique permettant
de réaliser de nouvelles sections nécessaires à désenclaver et à parfaire le
maillage autoroutier. Et nombre d'entre vous, mesdames, messieurs les
sénateurs, sont très demandeurs ! La Commission ne nous a transmis son accord
qu'au début du mois d'octobre. Dans ces conditions, comment aurions-nous pu
aller plus vite ?
Les dispositions de l'ordonnance découlant de l'article 4 devraient d'abord
servir, puisqu'on ne peut plus recourir à l'adossement, au financement des
subventions publiques d'équilibre pour les autoroutes A 28, en Normandie, A 19,
dans le Loiret, et A 41, en Haute-Savoie, notamment.
Nous savons tous que les élus locaux attendent souvent avec impatience la
construction de ces nouvelles sections d'autoroute. Il faut être clair :
actuellement, le budget de l'Etat n'est pas doté de crédits suffisants pour
financer les dépenses nouvelles correspondant à ces subventions d'équilibre.
M. Alain Lambert.
L'Etat n'a pas les moyens, parce qu'il gaspille l'argent !
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Dans ces
conditions, comment faire ?
M. Alain Lambert.
Et les trente-cinq heures, alors ?
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Il existe
plusieurs possibilités. On peut décider - telle est peut-être votre position,
monsieur Lambert, mais cela m'étonnerait un peu - une fiscalité
supplémentaire.
(M. Lambert fait des signes de dénégation.)
Vous n'êtes pas d'accord ?
Moi non plus ! On peut aussi décider un redéploiement des crédits réservés aux
contrats de plan... Ce n'est pas votre position ? Ce n'est pas la mienne non
plus ! Ou bien encore, on peut décider la mise en place urgente d'un nouveau
mode de financement compatible avec le droit communautaire.
Mesdames, messieurs les sénateurs, c'est précisément cette troisième solution,
sage, raisonnable et conforme à l'intérêt général que le Gouvernement a choisie
et que je vous propose.
C'est aussi parce que nous ne pouvons pas attendre dix-huit mois à deux ans la
réalisation d'un parcours législatif complet que nous avons pris le parti
d'utiliser le véhicule législatif que représente ce projet de loi
d'habilitation. Le calendrier législatif, qui est largement conditionné par les
textes déjà en discussion et les vacances parlementaires dues aux élections
municipales et cantonales, ne nous permet pas de faire autrement.
Par ailleurs, je confirme, notamment au groupe qui siège le plus à gauche dans
cet hémicycle, car il avait posé fortement le problème lors de la dernière
discussion, qu'il n'est pas dans l'intention du Gouvernement d'instituer des
péages sur les autoroutes à construire, et encore moins de rendre payantes
celles qui existent déjà et qui sont gratuites.
Avec ce nouveau système et après satisfaction des besoins de subventions
d'équilibre aux autoroutes concédées, nous comptons à terme, grâce aux moyens
dont disposeront alors les SEMCA, financer ces infrastructures nouvelles, y
compris les infrastructures de l'intermodalité, et donner ainsi une nouvelle
impulsion à la politique multimodale que nous nous efforçons de conduire depuis
plus de trois ans.
Je crois que, sur des sujets comme celui qui nous occupe ce soir, il faut
savoir ne pas ouvrir de vaines polémiques. J'en appelle donc au sens des
responsabilités de chacune et de chacun et je souhaite que les amendements de
suppression puissent être retirés.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les observations que je voulais
faire avant la discussion de cet article 4.
M. le président.
La parole est à M. Poniatowski, rapporteur pour avis.
M. Ladislas Poniatowski,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur le ministre, de votre intervention du 25 octobre dernier, voilà
presque quinze jours, et de ce que vous venez de confirmer à l'instant, j'ai
retenu essentiellement trois points, qui constituent au demeurant autant de
promesses de votre part.
Sur le fond tout d'abord, vous avez déclaré que l'ordonnance prévue à
l'article 4 aurait essentiellement pour objet de supprimer les avantages dont
bénéficient les SEMCA, les sociétés d'économie mixte concessionnaires
d'autoroutes - la garantie de reprise du passif - et, en contrepartie,
d'allonger la durée de leur concession de douze ans à quinze ans.
Vous avez insisté sur le fait que les aménagements auxquels le Gouvernement
souhaite pouvoir procéder rapidement sont autant de conditions nécessaires pour
que les SEMCA puissent, compte tenu de leur savoir-faire, continuer à jouer un
rôle dans l'attribution des futures concessions, notamment celles que vous
venez de rappeler : l'A 19 et l'A 41.
Vous avez même laissé entendre que l'attribution de ces nouvelles concessions
serait conditionnée par les modifications comptables envisagées dans le projet
d'ordonnance, puisque vous avez lié la question de l'attribution de ces
concessions avec celle de la ressource fiscale sur laquelle compte le
Gouvernement dès 2001 en application des nouvelles dispositions comptables
énoncées dans la première partie de votre projet d'ordonnance, au chapitre
Ier.
Si je comprends bien, c'est toute la gestion 2000 des sociétés d'autoroutes
qui pourrait alors faire l'objet d'une nouvelle lecture comptable permettant de
faire apparaître un bénéfice qui sera soumis l'année prochaine à l'impôt sur
les sociétés. Le pari peut paraître audacieux, mais tel est l'engagement que
vous avez pris le 25 octobre dernier, monsieur le ministre.
Vous avez, par ailleurs, souhaité nous faire parvenir un certain nombre de
signes d'apaisement. Parmi ceux-là, je relèverai une deuxième promesse : le
Gouvernement s'engage à déposer le projet de loi de ratification avant la fin
de l'actuelle session, c'est-à-dire avant la fin du mois de juin 2001, et à
l'inscrire à l'ordre du jour du Parlement avant la fin de la législature.
Sans attendre cette échéance - et c'est là votre troisième promesse - vous
avez pris l'engagement que serait organisé au Sénat avant la fin du mois de
janvier prochain un débat, soit sous la forme d'une déclaration du Gouvernement
suivie d'un débat, soit par l'inscription à l'ordre du jour prioritaire du
Sénat d'une question orale avec débat au cours de la deuxième quinzaine du mois
de janvier 2001.
Sur tous ces engagements, monsieur le ministre, je vous dis : chiche. Je dois
pourtant vous dire que nous sommes quelque peu échaudés...
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Pourtant vous me
connaissez !
M. Ladislas Poniatowski,
rapporteur pour avis.
Justement, je vous connais !
Nous avons été quelque peu échaudés, disais-je, car de promesses vous n'en
avez point été avare depuis votre entrée en fonctions.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Elles ont toutes
été tenues !
M. Alain Lambert.
Les promesses n'engagent que ceux qui y croient !
M. Ladislas Poniatowski,
rapporteur pour avis.
Sur le sujet qui nous occupe, il y a notamment
celle que vous nous avez faite à plusieurs reprises, notamment devant la
commission des finances et devant la commission des affaires économiques, en
novembre 1999, à propos de l'inscription rapide d'un projet de loi sur la
réforme du système autoroutier, afin qu'un grand débat parlementaire puisse
s'engager dès que les négociations que vous conduisez à Bruxelles seraient
achevées.
Sur le fond, vous savez que la plupart des dispositions contenues dans le
projet d'ordonnance ne soulèveront pas d'objections majeures de notre part.
En ce qui me concerne, je crois avoir dit et répété - je ne suis pas le seul
car nous avons été plusieurs dans cet hémicycle, dont MM. François, Poncet,
Jacques Oudin et Gérard Larcher - que j'étais tout à fait partisan de
moderniser le statut de nos sociétés d'économie mixte concessionnaires
d'autoroutes afin qu'elles soient placées sur un pied d'égalité totale avec les
sociétés privées, qu'elles soient nationales ou européennes.
L'idée de compenser la suppression d'un avantage dérogatoire au droit commun -
la garantie de reprise du passif en fin de concession - par l'allongement de la
durée des concessions me paraît astucieuse. Cet allongement permettra en effet
d'amortir les charges financières des sociétés sur une plus longue période et,
partant, de dégager un bénéfice comptable. Vous nous annoncez que l'application
immédiate des nouvelles règles comptables dans le projet d'ordonnance pourra
faire apparaître ce bénéfice dès 2000. Je vous en donne acte.
Je pense donc possible d'opérer une distinction entre ce que vous avez
vous-même qualifié de partie essentielle du projet d'ordonnance, c'est-à-dire
la modernisation des statuts des SEMCA, et la question des nouvelles normes en
matière de péage pour l'usage des infrastructures routières.
Je rappelle, au passage, que si les dispositions relatives aux SEMCA peuvent
être considérées comme s'insérant dans la mise en oeuvre de la directive
communautaire sur les marchés publics de travaux, ce que vous annoncez dans le
domaine des péages va bien au-delà de la transposition de la directive du 17
juin 1999, relative à la taxation des poids lourds pour l'utilisation de
certaines infrastructures, puisque vous voulez l'étendre notamment aux
véhicules légers ; on en a parlé voilà quinze jours, monsieur le ministre.
Je pense m'exprimer au nom de la plupart d'entre nous en vous disant qu'un
débat parlementaire nous paraît essentiel sur la réforme des péages. Je
souligne que cette discussion ne retardera en rien l'attribution des
concessions en cours de négociation ou en préparation.
Je voudrais, enfin, insister sur deux points, monsieur le ministre.
En décidant de procéder à la réforme des autoroutes par voie d'ordonnance,
vous privez le pays d'un débat démocratique autour d'un texte législatif majeur
et vous comprendrez notre déception, ici, dans cet hémicycle.
Je souhaiterais, ensuite, souligner que votre insistance à lier l'adoption de
l'article 4 et l'attribution des nouvelles concessions autoroutières dans des
délais raisonnables est apparue à beaucoup d'entre nous comme une pression
choquante. Accepter de séparer dans l'article 4 ce qui relève de la
modernisation des SEMCA et le volet consacré aux péages revient à céder, tout
au moins en partie, à cette pression.
Consciente des intérêts supérieurs du pays, la commission des affaires
économiques a néanmoins décidé de vous prendre au mot et de modifier sa
proposition. Afin de n'entraver en rien le bon déroulement des procédures
d'attribution des nouvelles concessions, elle a accepté l'idée que la partie du
projet concernant la modernisation des SEMCA soit prise par ordonnance.
Il va sans dire que c'est avec une extrême vigilance qu'elle attend les suites
qui seront données aux promesses que j'ai évoquées voilà quelques instants.
C'est pourquoi nous proposons, au nom de la commission des affaires
économiques, l'amendement n° 14 rectifié, qui prévoit une nouvelle rédaction de
l'article 4 supprimant les dispositions relatives aux péages du champ de la
future ordonnance.
M. le président.
Sur cet article, je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet
d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 19 est présenté par M. Badré, au nom de la commission des
finances.
L'amendement n° 47 est déposé par M. Lefebvre, Mme Borvo, M. Bret, Mme
Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Mme Luc,
MM. Muzeau, Ralite, Renar, Mme Terrade et M. Vergès.
Tous deux tendent à supprimer l'article 4.
Par amendement n° 4, M. Hoeffel, au nom de la commission des lois, propose,
dans le premier alinéa de l'article 4, après les mots : « par ordonnances, »,
d'insérer les mots : « dans les conditions prévues à l'article 38 de la
Constitution, ».
Cet amendement est affecté d'un sous-amendement n° 49, présenté par M. Masson,
et tendant :
A. - A compléter
in fine
l'amendement n° 4 par trois alinéas ainsi
rédigés :
« II. - Après le premier alinéa, rédiger comme suit la fin de cet article :
« 1° Supprimer la garantie de reprise de passif accordée par l'Etat aux
sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes ;
« 2° Prolonger les durées actuelles des concessions et prévoir les conditions
dans lesquelles ces modifications seront appliquées dans les comptes des
sociétés, au titre de l'exercice ouvert au 1er janvier 2000. »
B. - En conséquence, à faire précéder cet amendement de la mention : « I. -
».
Par amendement n° 14 rectifié, M. Poniatowski, au nom de la commission des
affaires économiques, propose de remplacer les deux derniers alinéas (1° et 2°)
de l'article 4 par trois alinéas ainsi rédigés :
« - supprimer la garantie de reprise de passif accordée par l'Etat aux
sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes ;
« - prolonger les durées actuelles des concessions desdites sociétés ;
« - prévoir les conditions dans lesquelles ces modifications seront appliquées
dans les comptes des sociétés au titre de l'exercice ouvert au 1er janvier
2000. »
La parole est à M. Badré, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n°
19.
M. Denis Badré,
rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
La commission des finances, en
adoptant l'amendement n° 19, s'est prononcée pour la supression de l'article 4
du projet de loi que vous nous soumettez, monsieur le ministre. J'essaierai
d'éviter les redites par rapport aux excellents propos que vient de tenir notre
collègue, M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis de la commission des
affaires économiques, en revenant néanmoins sur les principales raisons qui ont
amené la commission des finances à prendre cette position.
Réformer le système autoroutier mérite largement, à notre sens, le dépôt d'un
projet de loi et la tenue d'un débat parlementaire, ce à quoi vous vous étiez
engagé à plusieurs reprises devant notre commission, monsieur le ministre,
notamment en décembre 1999 - j'en ai un souvenir personnel très précis.
En constituant une commission d'enquête sur les transports, en 1998, le Sénat
a préparé ce débat. Il a, depuis, poursuivi ses investigations par
l'intermédiaire d'un groupe de travail sur les infrastructures de transport -
c'est dire si nous sommes en plein dans le sujet - mis en place au sein de
notre commission des finances, présidé par notre collègue M. Jacques Oudin dont
vous savez combien il s'est donné à cette réflexion. Ce groupe de travail
rendait - c'est une coïncidence intéressante - ses conclusions en commission
des finances le jour où je présentais moi-même mon rapport sur ce projet de loi
d'habilitation.
Le rapport présenté par M. Jacques Oudin est apparu répondre parfaitement aux
ambitions de notre commission des finances. Il est apparu comme apportant des
propositions nombreuses, concrètes et donc, à l'évidence, de nature à enrichir
un débat parlementaire sur ce sujet.
Alors, monsieur le ministre, pourquoi nous priver d'un débat qui ne pourrait
qu'être riche et fécond ? Le Sénat est ici prêt en temps et en heure. Nous
regrettons que ce soit le Gouvernement qui se dérobe devant un rendez-vous
nécessaire, utile et possible.
Le deuxième argument retenu par la commission des finances est le suivant :
les dispositions que vous proposez de retenir par ordonnance ne résultent pas,
à notre sens, de la transposition de directives communautaires, du moins dans
l'esprit dans lequel l'ensemble du projet de loi a été conçu.
La première partie de l'article 4 du projet de loi, que M. Ladislas
Poniatowski évoquait voilà un instant, qui traite de l'adossement, transcrit le
résultat d'une négociation que vous avez menée, monsieur le ministre, avec la
Commission en échangeant la suppression de la garantie de reprise du passif des
SEMCA par l'Etat contre un allongement des concessions. Vous souhaitiez
d'ailleurs un allongement portant cette durée à vingt ans. Vous avez obtenu un
allongement de douze à quinze ans, ce qui est un peu moins ; mais c'est le jeu
des négociations, et nous devons l'accepter. Cependant, il n'y a pas là de
directive en jeu.
S'agissant du reste de l'article, M. Ladislas Poniatowski a indiqué en quoi il
pourrait se raccrocher à des directives. Néanmoins, cette manière de les
accrocher reste assez ténue et il n'y a pas de résultat de négociations
particulières à faire ratifier.
Il y a donc plutôt un projet franco-français, au demeurant assez flou. Nous ne
voyons pas pourquoi ce texte aurait sa place dans un projet de loi vous
habilitant à transcrire des directives par ordonnance. Or, s'il n'y a pas de
directive, il n'y a donc
a fortiori
pas d'urgence à transcrire des
directives, et même pas d'urgence du tout, sinon celle, que nous ressentons
tous très fortement, de relancer l'investissement autoroutier ; mais ce n'est
justement pas l'objet de votre projet.
En fait, vous avez d'ailleurs très pratiquement pu procéder sans nouvelles
dispositions législatives à une mise en concurrence pour engager la réalisation
d'un tronçon de l'autoroute A 86 que je connais bien et dont nous avons parlé
dans votre bureau même. Vous n'avez pas eu besoin de dispositions législatives
pour mettre en concurrence les entreprises susceptibles de réaliser cette
autoroute A 86 à l'ouest de Paris, pas plus d'ailleurs, à ma connaissance, que
vous n'avez eu besoin de dispositions législatives nouvelles pour lancer
l'autoroute A 28.
Restons cependant sur un argument lié au rythme des réalisations
autoroutières, argument que vous avez largement utilisé pour tenter de nous
convaincre d'adopter votre projet et la procédure des ordonnances qu'il
comporte. Nous ne voyons pas en quoi un refus d'habilitation entraînerait un
ralentissement des investissements autoroutiers. Ce ralentissement n'a pas
vraiment besoin d'un tel refus de notre part ; il est malheureusement déjà
engagé, et nous le déplorons. Il résulte déjà des choix du Gouvernement ou
plutôt de la difficulté que vous avez à choisir entre différentes politiques,
de la difficulté que vous avez à trouver une synthèse entre les nécessités de
la protection de l'environnement et la nécessaire relance d'un programme
autoroutier qui est en panne.
En fait, monsieur le ministre, il semble bien que, après une simple réforme
financière et comptable des SEMCA, vous voulez mettre en place une nouvelle
forme de financement de nos autoroutes, mais aussi de nos infrastructures
routières.
Et c'est là que nous entrons dans le flou ; et c'est là que s'impose, de
l'avis de la commission des finances, un débat parlemantaire. L'enjeu est trop
important et l'urgence insuffisamment avérée pour que nous acceptions la
procédure que vous nous proposez. La commission des finances invite donc le
Sénat à supprimer cet article.
M. le président.
La parole est à M. Lefebvre, pour présenter l'amendement n° 47.
M. Pierre Lefebvre.
Notre amendement de suppression porte tant sur la forme que sur le fond.
Sur la forme, je ne répéterai pas en détail ce qui a été indiqué plusieurs
fois au cours de ce débat par mes amis du groupe communiste républicain et
citoyen : la pratique des ordonnances en elle-même est préjudiciable au
fonctionnement démocratique de nos institutions. Les droits du Parlement sont
en effet bafoués dans ce cadre.
Nous dénonçons l'article 38 avec d'autant plus de force que le récent
référendum a montré le décalage croissant entre les citoyens et la
politique.
Cette pratique est particulièrement regrettable s'agissant de la transposition
de normes européennes. Ces normes sont élaborées dans la plupart des cas sans
débat réel et en dehors d'un contrôle citoyen, du fait de la complexité et de
la multiplicité des sujets. Comment espérer rapprocher l'Europe des citoyens en
écartant le Parlement national lui-même d'une discussion approfondie et sereine
de la transposition de ces normes ? Voilà pour la forme.
Sur le fond, je souhaite avant toute chose, puisque je viens d'aborder la
question européenne, approuver avec force l'attitude de fermeté du ministre des
transports, de l'équipement et du logement, sur le problème dit du « paquet
ferroviaire », c'est-à-dire sur le devenir du service public des chemins de fer
en Europe. Monsieur le ministre, vous vous opposez à l'offensive libérale dans
ce domaine ; sachez que nous vous soutenons fermement.
Sur le fond, je souhaite vous interroger sur quelques points, conscient, comme
l'a rappelé mon ami Robert Bret dans son intervention au cours de la discussion
générale, de l'urgence d'une prise de décision en matière de financement du
transport ferroviaire.
Renoncer au principe de gratuité, faciliter la généralisation des péages, en
instaurer de nouveaux sur des ouvrages urbains réalisés par les collectivités
locales ou territoriales, cela sera-t-il la conséquence de cet article 4 qui
va, selon nous, au-delà de la transposition européenne ? Quelle organisation,
quel programme pour le plan autoroutier ?
Selon vous, monsieur le ministre, les ressources nouvelles dégagées par cette
réforme permettront-elles réellement de s'opposer à la déferlante du transport
routier ? N'est-il pas temps d'engager un débat de grande ampleur permettant
une prise de décision historique en faveur du rail ?
Nous serons à vos côtés, monsieur le ministre, pour exiger un débat en ce sens
! Pourquoi ne pas réfléchir aussi, pour financer les grands travaux, au
lancement d'un emprunt d'Etat, que les Français, si soucieux de la sécurité sur
les routes et de la lutte pour l'environnement, ne pourront qu'approuver
vivement ?
Le financement nouveau qui sous-tend cet article 4 ne nous semble pas à la
hauteur de l'enjeu, même s'il pourrait constituer un pas en avant.
L'importance des questions que nous posons nous conduit - vous le comprendrez
certainement, monsieur le ministre - à souhaiter un débat approfondi, source
d'échanges.
Nous souhaitons par conséquent la suppression de l'article 4 du projet de loi,
mais sans aucun doute pour des raisons tout à fait différentes de celles qui
ont été invoquées par la commission des affaires économiques et son
rapporteur.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 4.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
C'est un
simple amendement de précision : les mesures autorisées par l'article 4 du
projet de loi devront respecter les conditions définies par l'article 38 de la
Constitution. Ce n'est pas de là que surgiront les difficultés les plus
importantes au cours de ce débat !
MM. Denis Badré et Ladislas Poniatowski,
rapporteurs pour avis.
C'est vrai !
M. le président.
La parole est à M. Masson, pour défendre le sous-amendement n° 49.
M. Paul Masson.
Ce sous-amendement, qui avait bien entendu été rédigé avant le dépôt de
l'amendement n° 14 rectifié de la commission des affaires économiques, a pour
objet de limiter le champ de l'habilitation demandée par le Gouvernement.
En effet, je rejoins tout à fait les deux rapporteurs pour avis quand ils
considèrent qu'il faut aborder cet article 4 avec la plus grande
circonspection. Nous savons que le rapport avec les directives est extrêmement
ténu. Nous savons par ailleurs que M. le ministre ne cache pas ses intentions
lointaines, l'exposé des motifs du projet de loi étant parfaitement explicite
sur la finalité de la prospective.
Je ne veux pas ici, à cette heure, encombrer le débat de ces considérations
assez avancées, mais je dois reconnaître que donner au Gouvernement, par le jeu
de l'ordonnance, un dispositif lui permettant de « redéfinir les règles,
notamment en les unifiant et les simplifiant, relatives à l'institution de
péages », c'est lui accorder un outil considérable qui le rendrait à même de
décider des péages sur la voirie nationale, départementale et communale, y
compris lorsque la gestion de ces ouvrages d'art est assumée par un
établissement public.
M. Alain Lambert.
Eh oui !
M. Paul Masson.
Voilà qui nous rend un peu soupçonneux.
En revanche, monsieur le ministre, le rapport de M. Poniatowski, au nom de la
commission des affaires économiques, que j'ai lu attentivement, me remplit
d'aise.
Voici ce qui figure à la page 118 de ce rapport : « Les observations de votre
commission (...) seront pour l'essentiel de deux ordres.
« Tout d'abord, les orientations de la réforme proposée par le Gouvernement
vont, pour l'essentiel, dans le sens préconisé par le Sénat depuis un certain
nombre d'années. » Je rejoins là le combat mené par M. Oudin de façon à la fois
dynamique et pertinente pour faire déboucher ces propositions sénatoriales.
« Il est remarquable de constater que le "discours" gouvernemental qui
accompagne les nouvelles mesures est bien différent de celui qui était tenu en
1997 quand le Sénat décidait de créer une commission d'enquête sur le sujet ».
En effet, une commission d'enquête a été créée sur cette question, et elle a
déposé des conclusions.
« Le Gouvernement semble s'être rallié à ces positions et recommandations de
bon sens.
« Il convient de s'en féliciter. »
Par conséquent, le Sénat ayant eu raison par anticipation et le Gouvernement
s'étant rallié en quelque sorte à la position du Sénat - ce n'est pas moi qui
le dis, c'est le rapport - nous serions assez malvenus aujourd'hui de rejeter
toutes ces propositions en vrac.
Je remercie M. le rapporteur pour avis d'avoir rectifié son amendement n° 14
et d'avoir repris quasiment le sous-amendement que j'avais déposé.
Bien évidemment, si la commission des finances retirait son amendement n° 19
tendant à la suppression de l'article 4, qui doit être mis aux voix avant
l'amendement n° 14 rectifié, je me rallierai alors à ce dernier, et je
retirerai le sous-amendement n° 49.
J'ajouterai un dernier mot : j'attire l'attention de la majorité de la Haute
assemblée qui veut que l'on reprenne le système de la procédure autoroutière ;
nous sommes en effet un certain nombre à savoir très exactement où en sont les
cahiers des charges des sociétés publiques autoroutières.
Or si l'on veut reprendre ce système, il ne faut pas commencer par retirer de
la loi d'habilitation toute possibilité de débat. En effet, si nous supprimons
ce soir l'article 4, ce dernier ne fera pas l'objet d'une nouvelle lecture à
l'Assemblée nationale, sauf volonté gouvernementale de présenter un nouveau
dispositif. Nous nous en remettrons donc totalement à la bonne volonté du
Gouvernement et de sa majorité.
Pour ma part, je suis plus prudent et, plutôt que de jeter le bébé avec l'eau
du bain, je préfère considérer que l'eau du bain, qui est un peu trouble, doit
être vidée, mais que le bébé doit être conservé !
(Sourires.)
Voilà pourquoi, si l'amendement n° 14 rectifié était appelé par priorité, je
me rallierais alors volontiers à la position de M. le rapporteur pour avis.
(Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Poniatowski, rapporteur pour avis, pour présenter
l'amendement n° 14 rectifié.
M. Ladislas Poniatowski,
rapporteur pour avis.
Etant longuement intervenu au début du débat sur
l'article 4, je serai bref dans la présentation de cet amendement.
Contrairement aux deux premiers amendements n°s 19 et 47, l'amendement n° 14
rectifié tend à conserver la moitié de la rédaction de cet article 4, à savoir
le volet concernant le statut des sociétés d'économie mixte, que vient
d'évoquer excellemment notre collègue M. Masson. Il vise en outre à retirer le
volet concernant les péages avec une très légère modification dans la
présentation.
Bien que l'amendement n° 14 rectifié et le sous-amendement n° 49 aillent tout
à fait dans le même sens, j'avoue avoir une petite préférence pour le premier,
ce dont je demande à M. Masson de bien vouloir m'excuser.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 19, 47 et 14
rectifié, ainsi que sur le sous-amendement n° 49 ?
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
La commission des lois, saisie au fond, demande que
l'amendement n° 14 rectifié soit mis aux voix par priorité.
(Sourires sur
les travées des Républicains et Indépendants.)
L'affaire est sérieuse, mes chers collègues !
M. Henri de Raincourt.
Absolument !
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Il s'agit d'arbitrer entre deux considérations aussi
fondamentales l'une que l'autre : d'une part, les droits du Parlement ; d'autre
part, et sans que cela soit contradictoire, l'intérêt du pays.
M. Jean-Claude Gaudin.
Très bien !
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Les rapporteurs pour avis, MM. Poniatowski et Badré, ainsi
que tous les intervenants qui ont défendu les autres amendements, ont rappelé à
juste titre une fois de plus - et nous l'avions fait voilà dix jours - la
procédure inadmissible qui consiste à priver le Parlement d'un débat
parlementaire de fond sur des problèmes aussi fondamentaux pour l'avenir du
pays.
MM. Jean-Claude Gaudin et Henri de Raincourt.
Très bien !
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Cela étant, quel est, à ce point du débat, l'intérêt
fondamental du pays ?
L'idéal, bien sûr, eût été, monsieur le ministre, que le Parlement n'ait pas
été privé de ses droits,...
M. Josselin de Rohan.
Exactement !
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
... qu'il ait pu être saisi à temps des projets de loi,
s'agissant de son avenir, sur des sujets aussi essentiels que les
infrastructures de transports.
Prise entre ces deux considérations, la commission des lois estime devoir
rechercher une solution de conciliation.
M. Jean-Claude Gaudin.
Très bien !
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Bien sûr, elle n'a pas pu se réunir pour examiner
l'amendement n° 14 rectifié de la commission des affaires économiques.
M. Jean-Claude Gaudin.
Qu'elle le fasse !
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Mais il est des circonstances dans lesquelles une commission
- et peut-être son rapporteur - doit pouvoir prendre un risque et faire une
proposition. En soumettant au vote l'amendement n° 14 rectifié, nous pouvons
concilier les exigences légitimes du Parlement et les nécessités impératives de
l'intérêt du pays.
(Très bien ! sur les travées des Républicains et
Indépendants et du RPR.)
Je souhaite donc que ce débat sur l'article 4 puisse être clarifié par un vote
du Sénat sur l'amendement n° 14 rectifié,...
M. Hubert Falco.
Il le sera !
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
... même si la commission saisie au fond n'a pas pu respecter
toutes les formes en la matière. Mais chacun comprendra qu'à cette heure
d'autres impératifs exigent des prises de position rapides !
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur la demande de priorité formulée par la
commission ?
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Le Gouvernement
l'accepte.
M. le président.
La priorité est ordonnée.
La parole est à M. le ministre, pour donner l'avis du Gouvernement sur les
amendements 19, 47, 4 et 14 rectifié, ainsi que sur le sous-amendement n°
49.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Monsieur le
rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous ai bien écoutés.
Vous avez rappelé qu'en novembre 1999 je m'étais engagé devant la commission
des affaires économiques et devant la commission des finances du Sénat à
déposer un projet de loi destiné à réformer le financement des autoroutes.
Il est vrai que je vous avais dit cela, mais je vous avais dit aussi que
j'attendais, pour le faire, la fin de la discussion avec la Commission de
Bruxelles. En effet, comme je l'ai rappelé tout à l'heure, notre système actuel
de financement n'étant plus juridiquement valable, il convenait d'en trouver un
autre.
C'est la raison pour laquelle - et cela aussi je vous l'avais dit en novembre
1999 - le Gouvernement a engagé des discussions avec la Commission européenne
dès l'été 1998, pour s'assurer que la solution qu'il envisageait était en tout
état de cause compatible avec la réglementation communautaire en matière de
concurrence et d'aide des Etats.
Mais Bruxelles ne nous a rendu son avis - positif - sur les dispositions
envisagées, notamment en ce qui concerne l'allongement de la durée des
concessions - qui diffère d'ailleurs d'une SEMCA à l'autre - qu'au début du
mois d'octobre 2000, ce qui est donc tout à fait récent.
Nous ne pouvions aller plus vite, car le Conseil d'Etat n'aurait pas accepté
de rendre un avis sur un projet de loi sans connaître la position de la
Commission européenne.
En réalité, la situation est simple : pardonnez-moi de le formuler ainsi, mais
l'Etat est aujourd'hui dans l'incapacité de concéder la réalisation des projets
d'autoroutes actuellement envisagés et réclamés par nos concitoyens dans
plusieurs endroits. En effet, compte tenu de l'abandon de l'adossement, comment
l'Etat pourrait-il financer les subventions d'équilibre de ces nouveaux projets
lorsqu'elles sont nécessaires ? Faudrait-il remettre en cause ces projets, même
provisoirement ? Ce n'est pas l'avis du Gouvernement, ni le vôtre, j'en suis
convaincu.
Par ailleurs, et contrairement à ce qui a pu être dit, il est absolument
indispensable que le régime d'exploitation des sociétés d'économie mixte
concessionnaires d'autoroutes soit adapté si nous voulons - et,
personnellement, je le souhaite vivement - qu'elles puissent répondre aux
appels à candidature qui doivent ou qui devront être lancés. Dans le cas
contraire, nous nous exposerions à des risques de nouveaux contentieux pour
non-respect des règles relatives à la concurrence.
Vous comprenez donc le souci qui a guidé le Gouvernement - j'y insiste - dans
sa décision de recourir à la procédure des ordonnances pour réformer le système
autoroutier. Il ne s'agissait pas, bien au contraire, d'empêcher un débat que
vous réclamez, ce qui est tout à fait compréhensible, mais de mettre en oeuvre
rapidement cette réforme.
C'est ce même souci qui me conduit ce soir à prendre en considération
l'amendement n° 14 rectifié de la commission des affaires sociales ainsi que le
sous-amendement de M. Masson, dont l'objectif est identique, même si M. Masson
a, en quelque sorte, montré la voie.
Je préférerais, bien entendu, que l'article 4 soit voté en l'état, car il
participe de cette réforme d'ensemble autoroutière que je vous avais présentée
et dont j'ai donné connaissance à vos commissions dans le détail. Tout cela
forme un tout cohérent mes yeux, et j'ai noté, en outre, que la plupart de ses
dispositions avaient été accueillies plutôt favorablement.
A cet égard, je veux rappeler à nouveau que cette réforme indispensable n'a
pas pour objet d'instaurer systématiquement des péages, je veux le dire à M.
Lefebvre avec toute la force nécessaire : il ne s'agit pas d'instaurer des
péages sur les autoroutes construites et déjà gratuites
(Mme Beaudeau proteste),...
M. Jean-Claude Gaudin.
On ne vous croit pas !
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
... ainsi que je
m'y suis engagé lors du dernier débat, pas plus qu'il ne s'agit de mettre des
péages sur les routes départementales ou sur les routes nationales. C'est hors
de question !
M. Alain Lambert.
La loi le permet !
M. Hubert Falco.
Donnez-nous des sous pour faire un deuxième tunnel à Toulon !
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Vous auriez pu
le souligner, monsieur Masson, puisque je me suis engagé, et, si M. Oudin était
là, il pourrait le confirmer.
L'objectif unique, je le répète, est de définir un nouveau système de
financement, l'adossement n'étant plus possible aujourd'hui.
Cela étant, compte tenu de l'importance que présente la première partie de
l'habilitation - celle qui est retenue par l'amendement de M. Poniatowski et
par le sous-amendement de M. Masson, et que M. Hoeffel, que je remercie, a pris
en considération dans son intervention -, pour une réforme que je compte mettre
en oeuvre sans perdre de temps, je ne souhaite pas de blocage de la discussion.
Je suis donc favorable à cet amendement et à ce sous-amendement,...
M. Jean-Claude Gaudin.
Très bien !
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
... comme je
suis favorable à la discussion au sujet de l'ordonnance, je l'ai dit tout à
l'heure et je n'y reviens pas.
Je précise donc que, en ce qui concerne la modification du code de la voirie
routière qu'il nous est proposé ce soir de disjoindre, celle-ci fera l'objet
d'une discussion par la suite, à l'occasion de l'examen d'un projet de loi
ordinaire.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union
centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix, par priorité, l'amendement n° 14 rectifié.
M. Pierre Lefebvre.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre.
Monsieur le ministre, j'ai le regret de vous dire que notre groupe n'est pas
entièrement convaincu
(Rires sur les travées des Républicains et
Indépendants, du RPR et de l'Union centriste)
par les explications que vous
avez bien voulu nous donner,...
M. Jean-Claude Gaudin.
Encore un effort, monsieur le ministre !
M. Pierre Lefebvre.
... tant dans votre intervention liminaire que dans les propos que vous venez
de tenir.
M. Alain Lambert.
Il n'a pas confiance dans le Gouvernement. Il a raison !
M. Pierre Lefebvre.
Nos inquiétudes demeurent particulièrement vives, tant en ce qui concerne la
gratuité des autoroutes, à propos de laquelle vous venez de prendre des
engagements, qu'en ce qui concerne les péages urbains qui pourraient être
institués dès lors que seront créés des ouvrages par les collectivités locales
ou territoriales.
Après avoir entendu l'ensemble de l'argumentation de la majorité sénatoriale,
nous voulons cependant, parce qu'il s'agit d'une question importante pour
l'avenir du pays et de sa population, réagir dans un esprit de
responsabilité.
Nous voulons surtout, monsieur le ministre, vous soutenir dans votre volonté
de rééquilibrer la politique des transports en faveur du rail.
M. Pierre Hérisson.
Ce n'est pas le sujet !
M. Pierre Lefebvre.
Pour toutes ces raisons et parce que nous n'avons pas les mêmes motivations
que ceux qui viennent de s'exprimer pour soutenir leur amendement, nous allons
retirer le nôtre.
Pour autant, nous ne voterons pas les amendements soutenus par la droite
sénatoriale...
M. Dominique Braye.
C'est le grand écart !
M. Pierre Lefebvre.
... car ils sont loin, mes chers collègues, de clarifier la situation, et ils
sous-tendent des motifs bien éloignés des nôtres et de l'intérêt public.
M. Henri de Raincourt.
Toujours le grand capital !
M. Hubert Falco.
Il n'y a que la gauche qui s'occupe de l'intérêt public !
M. le président.
L'amendement n° 47 est retiré.
Monsieur Masson, j'ai cru comprendre que vous retireriez votre sous-amendement
si l'amendement n° 14 rectifié était adopté ?
M. Paul Masson.
Je le retire, en effet, monsieur le président.
M. le président.
Le sous-amendement n° 49 est retiré.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Je veux
remercier M. Lefebvre, qui a posé les questions essentielles.
M. Alain Lambert.
Elles étaient pertinentes ! Mais la conclusion était moins bonne...
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
J'apprécie
l'attitude de son groupe.
(Exclamations ironiques sur les travées des
Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. Henri de Raincourt.
C'est bien le moins !
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Oui, mais c'est
parce qu'il avait un doute sur vos propres intentions, vous l'avez compris !
Je veux que ce soit clair : en ce qui concerne les péages urbains, je précise
que rien dans le code de la voirie routière ne les autorise. Rien ! Je suis
donc à l'aise pour vous dire ce que je vous ai dit tout à l'heure à propos des
intentions du Gouvernement : le discours ne sera pas contredit par la suite.
M. Dominique Braye.
C'est de l'acrobatie !
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Par ailleurs, en
ce qui concerne l'effort en faveur du transport ferroviaire, je puis vous dire
que la démarche du Gouvernement, que ce soit en tant que président du conseil
des ministres européen des transports ou au plan national, s'inscrit tout à
fait dans cette volonté de donner un élan et des moyens nouveaux à ce mode de
transport dans tous les domaines, qu'il s'agisse de la grande vitesse, des
lignes classiques, des TER ou du transport des marchandises. Si nous
maintenions le rythme actuel, ce n'est pas en dix ans mais en six ans que nous
doublerions le transport des marchandises par le fer, contribuant ainsi au
désengorgement de nos routes et autouroutes.
Je souhaitais apporter ces réponses aux questions que vous avez soulevées,
monsieur le sénateur.
M. Jacques Bellanger.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Bellanger.
M. Jacques Bellanger.
Depuis le début de cette discussion, j'ai un peu l'impression d'être au
spectacle : je vois se dérouler une pièce bien organisée. J'ai peut-être tort,
mais cela me rappelle un vieux roman de Georges Duhamel,
Le Club des
Lyonnais
. J'ai fort envie de dire que je me retrouve dans le personnage du
vieux libraire qui se voulait spectacteur pur.
Cela étant, nous appartenons à une majorité et nous savons ce que cela
signifie. Monsieur le ministre, puisque vous acceptez cet amendement, nous le
voterons !
M. Henri de Raincourt.
Toutes mes condoléances !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Tout à l'heure, le rapporteur de
la commission des lois, M. Daniel Hoeffel, a cherché la conciliation. Cette
conciliation, c'est le Sénat qui la trouve dans sa sagesse.
La commission des finances souhaite donc vous donner son avis en laissant
naturellement le Sénat, dans son immense sagesse, prendre la bonne décision.
M. Jean-Claude Gaudin.
Il vous suivra !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Je n'en suis pas sûr, monsieur
Gaudin.
(Sourires.)
Je vais m'efforcer de mériter votre confiance, trop
spontanée, exprimée en cet instant.
Mes chers collègues, nous n'avons pas confiance dans le Gouvernement.
M. Henri de Raincourt.
Vous n'avez pas tort !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Merci de cet acte qui nous est
donné !
Nous n'avons pas confiance dans le Gouvernement, parce qu'il peut lui arriver
de ne pas nous dire tout à fait la vérité...
M. Jean-Claude Gaudin.
Très bien !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
... et, ce soir, il ne nous a
pas dit la vérité.
En tout cas, monsieur le ministre, et je lis mon texte parce que vous pourrez
me démentir et nous pourrons, le cas échéant, opposer, devant la commission des
finances, les autorités européennes et les autorités françaises, pour trancher
le débat que j'ouvre en cet instant.
J'affirme devant le Sénat que la Commission européenne n'a jamais dit que
notre système autoroutier était contraire au droit européen. Je l'affirme, et
donc cela n'est pas parce que notre droit français n'est pas conforme au droit
autoroutier européen que les propositions qui nous sont faites ce soir nous
sont présentées.
Mes chers collègues, cela devait être dit. Il ne vous a pas échappé que je
n'ai pas encore été démenti...
Le Gouvernement cherche des moyens. D'ailleurs, M. le ministre ne me
cherchait-il pas tout à l'heure dans les travées, lorsque je lui ai fait
remarquer que le Gouvernement auquel il appartenait n'utilisait pas bien les
moyens dont il disposait ?
En effet, dois-je vous rappeler que, cette année, le Gouvernement auquel
appartient M. Gayssot consacrera autant d'argent pour financer les 35 heures
dans le privé que pour l'investissement de l'Etat dans sa totalité ?
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Les 35 heures,
c'est notre fierté !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Monsieur le ministre, je me
réjouis que vous en soyez fier, car cela me donne des raisons, tout en ayant de
la considération pour votre personne, de vous combattre. En effet, je ne suis
pas content, je ne soutiens pas et je combats, politiquement bien sûr, un
gouvernement qui consacre plus d'argent public au financement des 35 heures
dans le privé qu'à tout l'investissement public de la France.
Monsieur le ministre, vous cherchez des moyens. Je voudrais rappeler que le
budget des routes va chuter de plus de 17 % pour 2001. Moi, je n'ai pas
confiance et la commission des finances n'a pas confiance dans vos méthodes,
car elle craint que vous ne vous serviez précisément des ressources qui sont
celles des autoroutes pour financer d'autres desseins.
Mes chers collègues, à chacun son rôle. Le mien est ingrat ce soir. Je ne
cherche pas à vous détourner de votre volonté de conciliation. Voilà ce que
j'avais à vous dire ce soir, au nom de la commission des finances.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE).
M. Josselin de Rohan.
Quel talent !
M. Paul Masson.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Masson.
M. Paul Masson.
Bien sûr, je suivrai le rapporteur pour avis de la commission des affaires
économiques et je voterai son amendement. Mais je saisirai l'occasion de cette
explication de vote pour poser une question à M. le ministre et tirer ensuite
de ce débat une considération.
Monsieur le ministre, ce soir, il y a ici une majorité relativement
confortable qui soutient une proposition issue de la majorité du Sénat. Cette
proposition, vous l'avez approuvée. La question que je vous pose est donc la
suivante : défendrez-vous, au nom du Gouvernement, cette solution devant
l'Assemblée nationale et devant votre majorité ?
M. Ladislas Poniatowski,
rapporteur pour avis.
Très bonne question !
M. Paul Masson.
J'ai compris que oui, puisque vous avez accepté l'amendement, que le groupe
socialiste a déclaré qu'il allait le voter et que le groupe communiste
républicain et citoyen a retiré son amendement de suppression. Mais j'aimerais
que vous nous le confirmiez ce soir.
Quant à ma considération, elle est brève, monsieur le ministre : je dois
constater que cette anomalie démocratique sénatoriale, à laquelle, parfois, on
s'est référé dans le passé, présente quelquefois l'avantage de générer des
solutions de compromis qui conduisent le Gouvernement à s'y
rallier.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Monsieur le
sénateur, je répondrai tout d'abord à votre question précise.
Si je n'avais pas l'intention de défendre la même position à l'Assemblée
nationale, je n'aurais pas donné un avis favorable. S'il s'était agi d'une
manoeuvre, d'un compromis ou d'une compromission, peut-être, à la limite, je
m'en serais remis à la sagesse du Sénat. Mais je ne suis pas comme cela.
Le texte qui vous est proposé comprend deux parties. L'une est directement
liée à des éléments d'urgence par rapport à la réforme puisqu'il n'est plus
possible de faire un adossement. Vous pourrez toujours, monsieur le président
de la commission des finances, prétendre le contraire mais c'est le Conseil
d'Etat lui-même qui l'a dit. Je veux bien tout ce que vous voulez. Peut-être ne
considérez-vous pas les avis du Conseil d'Etat comme suffisamment explicites.
Mais il l'a dit, c'est ainsi !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Vous auriez pu m'interrompre,
tout à l'heure !
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
On peut évoquer
les 35 heures, le PACS, et tout ce que voulez pour parler de la réforme
autoroutière. Là, il y a urgence. La preuve en est que les conditions n'étaient
pas réunies et que le Conseil d'Etat a invalidé, en quelque sorte, une partie
de la déclaration d'utilité publique de l'A 86 en faisant référence au droit
communautaire et aux traités au nom de la concurrence.
Je n'ai jamais dit que le système qui a été mis en place dans le passé n'était
pas bon. Je dis simplement qu'à l'avenir il n'est plus possible de procéder
ainsi. Il ne faut pas se crisper. D'ailleurs, vous ne vous crispez pas,
monsieur Lambert...
(Sourires.)
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Non !
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Nous sommes
rassurés.
Ensuite, vous ajoutez un élément. Là aussi c'est pour l'information. Vous êtes
au fait de ces questions. Le budget qui va nous être présenté, dites-vous,
baisse de 17 % l'an prochain. Je vais vous dire la vérité.
Les autorisations de programme - vous le savez, monsieur Gaudin - permettent
de commencer les travaux. Et on les paie ensuite avec les crédits de paiement.
Pour faire les travaux et être dans les normes compatibles avec la durée du
contrat de plan, comme l'an dernier nous n'avons pas réalisé le septième du
contrat de plan, cette année nous allons plus loin en autorisations de
programme pour respecter les engagements passés dans le contrat de plan, à
l'inverse de vous, monsieur Lambert, qui n'aviez pu réaliser qu'à peine 80 %
des objectifs prévus dans le XIe Plan.
Vous n'avez pas confiance dans ce Gouvernement ? Vous l'avez dit et c'est pour
cela d'ailleurs que vous faites partie de la majorité sénatoriale et que vous
êtes dans l'opposition nationale, c'est votre droit le plus absolu. Mais ce
Gouvernement il dit ce qu'il fait et fait ce qu'il dit.
(Applaudissements
sur les travées socialistes.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'amendement n° 19 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, modifié.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Le groupe communiste votre contre.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5
M. le président.
« Art. 5. - Les ordonnances prévues aux articles précédents devront être
prises dans les délais suivants :
«
a)
Dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi pour
celles :
« 1° transposant les directives mentionnées au I de l'article 1er ;
« 2° mettant en oeuvre le droit communautaire dans les domaines mentionnés au
I de l'article 2 ;
« 3° prenant les mesures prévues à l'article 3 et à l'article 4 ;
«
b)
Dans les dix mois suivant la promulgation de la présente loi pour
celles :
« 1° transposant les directives mentionnées au II de l'article 1er ;
« 2° mettant en oeuvre le droit communautaire dans les domaines mentionnés au
II de l'article 2. »
« Des projets de lois de ratification des ordonnances devront être déposés
devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de l'expiration des
délais mentionnés aux alinéas précédents. »
Par amendement n° 5, M. Hoeffel, au nom de la commission des lois, propose,
dans le premier alinéa de cet article, de remplacer les mots : « aux articles
précédents », par les mots : « par la présente loi ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Il s'agit d'une simple amélioration rédactionnelle.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 17, M. Jourdain, au nom de la commission des affaires
sociales, propose :
A. - Après le premier alinéa de l'article 5, d'insérer un alinéa ainsi rédigé
:
« ... Dans les trois mois suivant la promulgation de la présente loi pour
celle prenant les mesures prévues à l'article 3 ».
B. - En conséquence, dans le cinquième alinéa (3° du
a)
de cet article,
de supprimer les mots : « à l'article 3 et ».
La parole est à M. Jourdain, rapporteur pour avis.
M. André Jourdain,
rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales.
Fidèle à sa
logique de faire prévaloir l'urgence, la commission des affaires sociales
propose d'adopter un amendement ramenant de six à trois mois le délai laissé au
Gouvernement pour prendre l'ordonnance relative à la refonte du code de la
mutualité.
Cet amendement n'est pas incompatible avec l'amendement adopté par la
commission des lois réduisant de six à quatre mois le délai laissé au
Gouvernement pour prendre l'ensemble des ordonnances. Il a été adopté par la
commission des affaires sociales alors que la commission des lois avait déjà
arrêté sa position.
Pourquoi un traitement différencié ? Tout d'abord seule l'urgence, comme l'a
expliqué le Gouvernement, justifie la transposition des directives d'assurance
aux mutuelles ainsi que la réforme du code de la mutualité par voie
d'ordonnance. Ensuite, de nombreux éléments laissent penser que le projet
d'ordonnance a fait l'objet d'une concertation étroite. Il suffirait de
reprendre le projet de loi mort-né qui devait être adopté par le conseil des
ministres le 1er août dernier et de le présenter aux différentes instances :
Conseil supérieur de la mutualité, Conseil national des assurances, Conseil
d'Etat, etc.
La publication de l'ordonnance dans un délai de trois mois, puis le dépôt du
projet de ratification, également dans un délai de trois mois - la commission
des lois demande deux mois - devrait permettre que le débat de ratification
s'ouvre avant la fin de la présente session parlementaire.
M. Jean-Claude Carle.
Très bien !
M. André Jourdain,
rapporteur pour avis.
Nous aurions ainsi le débat souhaité par l'ensemble
de nos commissions, en particulier par la commission des finances.
J'ai noté d'ailleurs que la lettre d'ordre du jour du Gouvernement prévoyait
un dernier mot à l'Assemblée nationale au cours de la deuxième quinzaine de
décembre. Mais si l'Assemblée nationale, dans sa sagesse, suit le Sénat, le
projet de loi d'habilitation pourrait être adopté définitivement dès la
deuxième quinzaine du mois de novembre.
Telles sont les raisons qui ont conduit la commission des affaires sociales à
vous proposer d'adopter cet amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Sagesse positive.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Le Gouvernement
est défavorable à cet amendement.
Je m'en explique : le Gouvernement a examiné précisément cette question des
délais au regard des consultations pour avis qui sont nécessaires, les
différents organismes concernés étant les quatre caisses nationales de la
sécurité sociale, les trois conseils supérieurs de la fonction publique, le
Conseil supérieur de la mutualité, le Conseil national des assurances et le
Conseil d'Etat.
Si le Gouvernement est défavorable à cet amendement n° 17, ce n'est pas par
principe, c'est parce qu'il serait impossible de procéder à ces consultations
dans ce délai de trois mois. Prendre cet engagement sans pouvoir le tenir, ce
serait négatif.
Mais j'indique d'emblée que je serai favorable à l'amendement n° 6, qui
prévoit un délai de quatre mois. Peut-être pourriez-vous dans ces conditions,
monsieur le rapporteur pour avis, vous rallier à cette proposition qui réduit
le délai de six à quatre mois.
M. le président.
Monsieur le rapporteur pour avis, acceptez-vous cette suggestion ?
M. André Jourdain,
rapporteur pour avis.
Monsieur le ministre, je regrette quelque peu
l'absence de votre collègue, M. Guy Hascoët, qui avait pris certains
engagements non fermes, mais qui semblait favorable au raccourcissement des
délais. Cependant, si vous confirmez que vous acceptez le délai de quatre mois,
je retirerai l'amendement n° 17.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Je vous le
confirme.
M. André Jourdain,
rapporteur pour avis.
Dans ces conditions, je retire l'amendement.
M. le président.
L'amendement n° 17 est retiré.
Par amendement n° 6, M. Hoeffel, au nom de la commission des lois, propose,
dans le deuxième alinéa de l'article 5, de remplacer les mots : « six mois »,
par les mots : « quatre mois ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Cet amendement a précisément pour objet de ramener de six
mois à quatre mois le délai d'habilitation pour les projets d'ordonnances. Or
ces projets d'ordonnances sont apparemment pour l'essentiel dejà prêts. Rien ne
devrait donc s'opposer à fixer le délai à quatre mois.
Monsieur le ministre, je vous remercie d'ailleurs d'avoir d'ores et déjà donné
un avis favorable à cette solution.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Favorable, en
effet.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 7, M. Hoeffel, au nom de la commission des lois, propose,
dans le troisième alinéa de l'article 5, après le mot : « transposant »,
d'insérer les mots : « en tout ou en partie ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Il s'agit d'un simple amendement de précision.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 8, M. Hoeffel, au nom de la commission des lois, propose,
dans le sixième alinéa (b) de l'article 5, de remplacer les mots : « dix mois
», par les mots : « huit mois ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
Il s'agit d'une proposition de réduction de dix mois à huit
mois pour le délai nécessaire afin de prendre certaines ordonnances, qui
s'ajoute au délai de trois mois prévu pour le dépôt des projets de loi de
ratification.
Je pense que, là encore, rien ne devrait fondamentalement s'opposer à ce «
coup d'accélérateur », d'autant que l'urgence a été considérée comme un facteur
important par le Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
L'examen de la
chronologie que vous proposez montre que le délai de huit mois aboutit au mois
d'août.
En réalité, vous proposez un délai de sept mois, cela risque d'être vécu
ainsi. Peut-être n'aviez-vous pas fait le calcul. Il faut cependant en tenir
compte.
Je m'en remets cependant à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, pour lequel le Gouvernement s'en remet à
la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 9, M. Hoeffel, au nom de la commission des lois, propose,
dans le septième alinéa (1°) de l'article 5, après le mot : « transposant »,
d'insérer les mots : « en tout ou en partie ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
C'est un simple amendement de précision, par coordination
avec la rédaction qui a été retenue à l'article 1er.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° 10, M. Hoeffel, au nom de la commission des lois, propose de
rédiger comme suit le dernier alinéa de l'article 5 :
« Des projets de loi de ratification des ordonnances devront être déposés
devant le Parlement au plus tard le dernier jour du deuxième mois à compter de
l'expiration des délais mentionnés aux alinéas précédents. »
Par amendement n° 48, Mme Borvo, M. Bret, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme
Bidard-Reydet, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Muzeau,
Ralite, Renar, Mme Terrade et M. Vergès proposent, dans le dernier alinéa de
l'article 5, après les mots : "trois mois", d'insérer les mots : "et débattus
dans un délai d'un an". »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 10.
M. Daniel Hoeffel,
rapporteur.
L'amendement n° 10 a un double objet. D'une part, il tend à
réduire à deux mois le délai de dépôt des projets de lois de ratification à
compter de l'expiration des délais d'habilitation. D'autre part, il vise à
fixer une date limite pour ce dépôt par référence à la solution retenue pour
l'habilitationcodification.
Là encore, il s'agit d'une coordination avec les réductions de délai que nous
avons préalablement proposées.
M. le président.
La parole est à Mme Borvo, pour défendre l'amendement n° 48.
Mme Nicole Borvo.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 48 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 10 ?
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Le Gouvernement
émet un avis défavorable, parce que la contrainte est telle que réduire le
délai d'un mois ne paraît pas réalisable. En effet, il faut également tenir
compte des contraintes de procédure, qu'il s'agisse de la saisine du Conseil
d'Etat ou du passage en conseil des ministres.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M.
Sutour pour explication de vote.
M. Simon Sutour.
Comme nous l'avons indiqué dans la discussion générale, le groupe socialiste
s'est opposé aux différents amendements visant au retrait de directives, à
l'exception de celui concernant Natura 2000, pour lequel il s'est abstenu.
Le Gouvernement nous demande de transposer par ordonnances des directives
communautaires et de mettre en oeuvre certaines dispositions de droit
communautaire, il ne demande pas au Parlement de légiférer, comme ce fut le cas
par le passé sur des sujets d'importance, tels que la sécurité sociale.
Je rappelle que, au 30 septembre 2000, 176 directives européennes n'avaient
pas été transposées en droit national. Cette situation représente un handicap
certain alors que la France assure la présidence de l'Union européenne. Il
convient de rattraper ce retard.
C'est pourquoi le groupe socialiste, conscient du caractère exceptionnel de la
prodécure employée, conscient, comme Pierre Moscovici, ministre délégué chargé
des affaires européennes, l'a indiqué devant la commission des lois, de la
nécessité que le Parlement et le Gouvernement mènent conjointement une
réflexion pour apporter une réponse définitive à ce problème, conscient de
l'urgence de la situation, regrette le retrait d'un certain nombre de
directives du projet de loi et votera donc contre le texte amendé par la
majorité sénatoriale.
M. Jacques Bellanger.
Très bien !
M. le président.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Mes chers collègues, comme vous avez eu l'occasion de l'entendre, nous
défendons une position de principe à plus d'un titre, nous l'avons dit dans la
discussion générale, et nous l'avons manifesté en déposant une question
préalable.
Nous défendons une position de principe, d'abord par rapport aux droits et aux
pouvoirs du Parlement. Nous avons eu l'occasion de développer cette thèse au
moment de la discussion sur le quinquennat, mais le débat ne s'est
malheureusement pas engagé sur ce thème, ce que nous avons d'ailleurs
regretté.
Selon nous, les droits et les pouvoirs du Parlement doivent être respectés et
revalorisés. Or la procédure qui consiste à faire adopter par ordonnance un
train de dispositions considérables ne va pas dans ce sens, bien au contraire,
quels que soient les motifs invoqués. La procédure des ordonnances bafoue les
droits élémentaires du Parlement, et nous tenons à le dire encore une fois.
Nous défendons une position de principe, ensuite, quant aux rapports entre le
droit communautaire et le droit national.
Notre démarche ne traduit évidemment pas un refus systématique du droit
communautaire. Nous avons dit clairement que nous voulions nous inscrire dans
une « évolution institutionnelle » et nous avons fait des propositions dans ce
sens. Il y va de l'intérêt de la construction européenne et de notre pays. Nous
souhaitons donc que des engagements soient pris dans le sens de la
démocratisation du droit communautaire et du droit des parlements nationaux.
Par ailleurs, nous mesurons que nombre de dispositions qui nous ont été
soumises - personne ne dit le contraire - concernent des pans entiers de la vie
de nos concitoyens et vont conditionner des évolutions très importantes. Elles
méritent donc d'être débattues, comme nous avons eu l'occasion de le dire à
plusieurs reprises.
Personne ici ne pourra me dire le contraire. On le voit déjà avec les
directives relatives aux télécommunications, au gaz, à l'électricité, à La
Poste..., et il serait temps de faire un bilan avant d'aller plus loin dans la
déréglementation prônée depuis des années par la Commission européenne.
Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons que confirmer notre opposition à ce
texte.
Nos craintes n'ont pas été dissipées. Notre position, contrairement aux propos
de la majorité sénatoriale, est loin des querelles politiciennes ; nous
entendons faire entendre notre singularité et contribuer à ce que le
Gouvernement réponde aux attentes de démocratisation de la vie politique. Nous
voterons donc contre ce projet de loi.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
8
RECONNAISSANCE
DU GÉNOCIDE ARMÉNIEN
Demande de discussion immédiate
d'une proposition de loi
(
suite
)
M. le président.
Je rappelle au Sénat que, en application de l'article 30, alinéas 1 et 4 du
règlement du Sénat, M. Jacques Pelletier et cinquante-neuf de ses collègues ont
demandé la discussion immédiate de la proposition de loi de MM. Jacques
Pelletier, Robert Bret, Jean-Claude Gaudin, Bernard Piras, Michel Mercier et
Jacques Oudin relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915.
Le délai prévu par l'article 30, alinéa 2, du règlement est expiré et le Sénat
a terminé l'examen de l'ordre du jour prioritaire.
En conséquence, je vais appeler le Sénat à statuer sur la demande de
discussion immédiate.
Je rappelle que, en application de l'alinéa 6 de l'article 30 du règlement, le
débat engagé sur cette demande ne peut jamais porter sur le fond.
Ont seuls droit à la parole l'auteur de la demande, un orateur « contre », le
président ou le rapporteur de la commission et le Gouvernement.
Aucune explication de vote n'est admise.
La parole est à M. Pelletier, auteur de la demande de discussion immédiate
(Applaudissements.)
M. Jacques Pelletier.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'Assemblée
nationale a reconnu à l'unanimité, le 29 mai 1998, le génocide arménien de
1915.
Depuis, aucune inscription à l'ordre du jour de notre assemblée n'a été
possible. Certains ont avancé qu'il n'appartenait pas au Parlement de qualifier
l'Histoire, tâche dévolue à l'exécutif en sa qualité de responsable de la
politique étrangère de la France.
Que les parlementaires ne soient pas des historiens, je veux bien le croire.
Mais je suis persuadé que ce que nous faisons s'apparente à l'interprétation de
travaux de recherche.
Que faut-il faire lorsque la communauté scientifique est unanime pour
qualifier tel événement de génocide ? Il me semble qu'il est de notre devoir,
parce que nous sommes les représentants du peuple français, de reconnaître ce
qui a été démontré scientifiquement.
Plus d'un an et demi après le vote de l'Assemblée nationale, le Sénat peut
enfin se prononcer sur cette question, et je tiens à féliciter ceux qui n'ont
jamais baissé les bras ; je me suis d'ailleurs associé à leurs démarches pour
que cette proposition de loi soit exminée au Sénat. La détermination finit
toujours par payer !
La reconnaissance du génocide arménien est un acte symbolique qui n'a d'autre
prétention que d'affirmer : « Oui, selon l'avis des chercheurs, au vu de
nombreux témoignages et du travail minutieux de vérification des faits, les
événements dont ont été victimes les populations arméniennes d'Asie mineure en
1915 ont bel et bien constitué le premier génocide du xxe siècle. »
Le terme de « génocide » a été défini pour la première fois en 1943 par
Lemkin. Il désigne un plan coordonné et méthodique visant à détruire les
fondations de la vie de groupes nationaux, dans le dessein final d'annihiler
ces groupes eux-mêmes.
Le génocide est dirigé contre le groupe national en tant que tel, et les
actions qu'il implique sont dirigées contre les individus, non pas en fonction
de leurs qualités individuelles, mais en tant que membres du groupe national en
question.
A partir de ce concept initial a été élaborée la définition de l'assemblée
générale des Nations unies du 9 décembre 1948. Cette définition comporte cinq
éléments essentiels : le meurtre, l'atteinte grave à l'intégrité physique ou
mentale, la soumission intentionnelle à des conditions d'existence devant
entraîner la destruction physique totale ou partielle, les mesures visant à
entraver les naissances, le transfert forcé des enfants.
Le génocide se caractérise par l'intention de détruire un groupe de personnes,
un groupe national, ethnique, racial ou religieux.
Les événements de 1915 répondent en tous points à l'acception tant
conceptuelle que juridique du génocide.
Le génocide arménien trouve ses fondements dans le déclin de l'Empire ottoman,
qui exerce alors une forte répression contre l'ensemble de ses minorités et
qui, en 1895-1896, lance les premiers pogroms contre les Arméniens.
En 1909, la doctrine de « turquisation intransigeante », mise en application
de façon systématique par les « Jeunes Turcs » arrivés au pouvoir l'année
précédente, causera déjà la mort de 20 000 Arméniens.
Lors de la Première Guerre mondiale, l'Etat turc de l'époque rendit la
minorité arménienne responsable de la défaite et s'engagea dans la voie du
massacre collectif : les notables, puis les soldats arméniens de l'armée turque
furent massacrés.
La loi provisoire de déportation du 30 mai 1915, qui sera déclarée
inconstitutionnelle par le Parlement turc en 1918, puis la loi du 10 juin 1915
définissant la manière d'enregistrer les biens des déportés sont les seuls
actes législatifs turcs signifiant le génocide.
Il reste que, en moins d'un an, entre 800 000 et 1 500 000 Arméniens périront.
Les survivants seront islamisés systématiquement.
Les responsables « Jeunes Turcs » du génocide seront, du reste, jugés et
condamnés à mort par contumace en 1919 par le gouvernement turc.
Aucun doute ne persiste sur la réalité historique du génocide.
Le Parlement français, en reconnaissant la réalité du génocide arménien de
1915, souhaite se faire entendre autant des descendants des victimes du
génocide que de l'Etat qui l'a perpétré, celui-là même qui souhaite aujourd'hui
rejoindre notre grand projet européen.
Mes chers collègues, l'Allemagne a commis, voilà plus de cinquante ans, ce que
l'on a qualifié à l'époque d' « irréparable ». Et pourtant, par la volonté d'un
peuple tout entier et par une foi inébranlable en un idéal de paix, nos voisins
et amis allemands ont montré au monde que, aussi terrible soit-elle, l'histoire
reste l'histoire, qu'elle ne sert qu'à guider le présent pour mieux construire
l'avenir.
M. Jean-Claude Gaudin.
Très bien !
M. Jacques Pelletier.
Reconnaître le génocide arménien de 1915 ne revient pas à affirmer que la
Turquie d'aujourd'hui est une nation barbare. Aucune nation du monde ne peut se
prévaloir d'avoir été un modèle d'humanité à travers son histoire. Nous savons
tous qu'à un moment ou à un autre notre peuple, le peuple dont nous sommes les
descendants, celui dont nous assumons l'héritage a, lui aussi, commis
l'irréparable.
Nous ne sommes pas pour autant, aujourd'hui, des barbares. Il ne nous
appartient pas de juger les faits passés. En revanche, nous devons les analyser
pour mieux les comprendre et pour que plus jamais ce dont nous avons honte
aujourd'hui ne puisse se répéter.
M. Louis Boyer.
Il faut y croire !
M. Jacques Pelletier.
La Turquie souhaite intégrer l'Union européenne. Il me semble que, dès lors,
les représentants des citoyens français que nous sommes ont le devoir de
demander au pays au nom duquel un massacre a été commis qu'il prenne conscience
de ses actes et qu'il en perpétue le souvenir.
Cette démarche s'inscrit tout naturellement dans le respect du droit à la
mémoire : pourrions-nous accepter un Etat qui n'a pas reconnu son passé ? Non,
cela va de soi.
La Turquie a intérêt à reconnaître ce génocide et à montrer aux populations
arméniennes de Turquie ou de la diaspora que l'heure est au pardon et à la
réconciliation.
Certes, des générations d'Arméniens auront été marquées par ces événements
terribles, mais l'heure ne doit plus être aux rancoeurs. L'heure est à la
construction d'un avenir meilleur, dans lequel la paix et l'harmonie
triompheront des maux du passé.
Il ne subsiste pas, aujourd'hui, de culpabilité collective allemande par
rapport au génocide juif. Mais c'est uniquement parce que les dirigeants
allemands de l'après-guerre ont accepté l'idée de responsabilité.
Qu'on me permettre de reprendre un propos de Paul Ricoeur : « Le pardon, s'il
a un sens et s'il existe, constitue l'horizon commun de la mémoire. »
Quelle est donc la portée profonde de la reconnaissance, par le Parlement
français, d'événements qui se sont déroulés il y a quatre-vingt-cinq ans, dans
un pays étranger ? Cette portée n'est que symbolique puisqu'il ne s'agit en
aucun cas de condamner la Turquie actuelle. Il s'agit, au contraire, de lui
tracer la voie vers l'ouverture.
Cet acte nourrira l'espoir de participer à une paix durable entre les Turcs et
les Arméniens, à la consolidation de leurs démocraties respectives et au
renforcement des droits de l'homme.
Je souhaite ardemment que la Turquie reconnaisse, elle aussi, le génocide de
1915. Par là, elle s'acquitterait d'une partie de la dette contractée à
l'encontre des Arméniens du monde entier.
L'immunité se mérite : elle implique la reconnaissance publique de ses crimes
et l'acceptation des nouvelles règles démocratiques.
Les Arméniens, si le devoir de mémoire est affirmé, pourront ainsi explorer la
nouvelle voie du pardon accordé à ceux qui admettent leurs offenses.
Le Parlement français souhaite tendre une perche à la Turquie. Il appartiendra
désormais à celle-ci de la saisir, sans jamais croire que nous souhaitons la
noyer sous des flots de condamnations.
Mais dire du passé qu'il n'a jamais existé est bien pis que la torture ou la
mort. Nier ce génocide, c'est vouloir faire une nouvelle fois disparaître ce
peuple, sa mémoire et le patrimoine que les Arméniens représentent pour
l'humanité.
Les faits sont les faits, et il n'appartient à personne de les modifier ou de
les faire oublier.
Aujourd'hui, la repentance est à l'honneur : l'Eglise pour ses positions
envers les juifs, la France pour la torture en Algérie, le Président de la
République, en 1995, pour la rafle du Vel-d'Hiv...
Une nation se grandit en regardant son passé en face, et c'est tout ce que
nous souhaitons à la Turquie.
Personne n'entend mettre en cause une quelconque responsabilité du peuple turc
ou de ses dirigeants actuels : le génocide a eu lieu il y a quatre-vingt-cinq
ans et le système politique de la Turquie d'aujourd'hui n'a rien à voir avec
celui de l'Empire ottoman.
Le problème n'est pas tant de convaincre les Turcs, ou d'autres, car quiconque
s'est penché sur ce douloureux problème sait qu'il y a bien eu génocide. Il
s'agit d'amener la Turquie à comprendre que la persistance dans le
négationnisme présente pour elle plus d'inconvénients qu'elle ne lui procure
d'avantages.
En d'autres termes, le contexte international doit être tel que la pression
dépasse le seuil critique. Les ambitions européennes d'Ankara créent
précisément un tel contexte. Nous souhaitons que les esprits mûrissent.
Le Parlement français, défenseur des libertés et des droits de l'homme, doit
aujourd'hui reconnaître les événements de 1915 en Asie mineure comme le premier
génocide du siècle qui s'achève.
Puisqu'il est question du devoir de mémoire, il faut agir pour que ce crime
s'inscrive dans notre conscience collective et serve d'enseignement pour en
empêcher le renouvellement. Nous savons tous que nous ne sommes jamais
complètement à l'abri de tels débordements ; récemment, le Cambodge, le Rwanda,
le Kosovo et quelques autres furent là, hélàs ! pour nous le rappeler.
Je souhaiterais, pour conclure, citer encore une phrase du philosophe Paul
Ricoeur qui illustre cet impératif de qualification du passé comme élément
fondateur de la construction du futur : « Sous l'histoire, la mémoire et
l'oubli. Sous la mémoire, l'oubli et la vie. Mais écrire la vie est une autre
histoire. »
(Applaudissements.)
M. Jean-Claude Gaudin.
Excellent !
M. le président.
La parole est à M. Delong, contre la demande de discussion immédiate.
M. Jacques-Richard Delong.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, se prononcer
contre la discussion de cette proposition de loi, c'est faire preuve non pas de
dureté, mais de rigueur.
Se prononcer contre la discussion de cette proposition de loi, c'est non pas
nier l'existence du génocide de plusieurs centaines de milliers d'Arméniens
pendant une période troublée de la fin de l'Empire ottoman et de la Première
Guerre mondiale, mais affirmer l'incompétence du Parlement et l'inopportunité
de légiférer en cette matière.
Se prononcer contre la discussion de cette proposition de loi, c'est refuser
non pas de faire mémoire, mais la manipulation du devoir de mémoire au service
des intérêts du présent.
Se prononcer contre la discussion de cette proposition de loi, c'est non pas
faire oeuvre d'injustice, mais servir la paix.
On peut douter très fortement de la constitutionnalité de cette proposition de
loi.
Il est inapproprié d'utiliser la loi pour reconnaître des faits. Le professeur
Guy Carcassonne écrivait dans
Le Point
daté du 30 avril 1999, après que
notre conférence des présidents eut décidé de ne pas inscrire à l'ordre du jour
du Sénat la proposition de loi ayant le même objet, adoptée par l'Assemblée
nationale : « Cette proposition consiste à introduire dans notre droit une
catégorie à vrai dire stupéfiante, celle de la vérité par détermination de la
loi. Le Parlement se verra sommé, au lieu de définir le légal de l'illégal, de
dire le vrai. Le genre législatif est menacé de dénaturation. »
La loi doit avoir des effets d'ordre interne. La proposition de loi se borne à
constater des faits extérieurs à la compétence territoriale du Parlement
français. Elle n'en tire aucune conséquence dans l'ordre juridique interne.
Si l'on pouvait reconnaître un effet à cette proposition de loi, dès lors
qu'elle serait adoptée, ce serait la force d'une injonction au Gouvernement de
la République d'agir, notamment dans les instances internationales, en
conformité avec les principes énoncés par les auteurs de la proposition. Or
j'affirme que le Parlement n'a pas, aux termes de la Constitution, la
possibilité d'adresser des injonctions au Gouvernement, y compris et surtout
dans le domaine diplomatique. La Constitution définit les compétences de chaque
organe. Dans le domaine diplomatique, elle confère au Parlement le pouvoir de
ratifier les traités internationaux, non celui de les négocier ni celui de
fixer des limites à l'exécutif pour la négociation de ceux-ci.
Je m'étonne que le Premier ministre n'ait pas, dès le passage à l'Assemblée
nationale, soulevé l'irrecevabilité constitutionnelle de ce texte. Ayons garde
de ne pas créer un précédent, qui, en d'autres temps et sur d'autres sujets,
conduirait à paralyser l'action diplomatique du Président de la République et
du Gouvernement.
Le Parlement devrait veiller à ne pas se substituer aux historiens ou aux
juges. Le constat des faits et leur qualification, s'il s'agit de crimes,
n'appartient pas au Parlement. Le Parlement, statuant dans l'ordre interne, se
borne, et c'est tant mieux, à définir la nature des crimes et à fixer les
modalités de leur répression. Jamais il ne se substitue aux juridictions.
Lorsque les auteurs des crimes sont encore vivants, ils peuvent être poursuivis
devant des juridictions nationales ou internationales. En matière de crimes
contre l'humanité, il n'y a pas de prescription.
Lorque les faits sont plus anciens, ils appartiennent à l'histoire et au
travail des historiens. Le Parlement n'a pas à orienter ce travail de mémoire.
Il doit l'encourager, non le guider. Sinon, toutes les manipulations sont
possibles. Imaginons notre assemblée condamnant, dans un bel élan, en 1946,
l'Allemagne pour le massacre de Katyn et obligée de se déjuger trente ans plus
tard après maints débats où le politique n'aurait cédé que difficilement devant
la vérité historique. Ne rentrons pas dans un engrenage où le risque est
certain et à l'horizon duquel se profile
Big Brother,
du
1984
de
George Orwell : « Qui commande le passé commande l'avenir, qui commande le
présent commande le passé. » En commandant le présent, il s'agit bien de
commander tout à la fois le passé et l'avenir.
Quel est, au fond, l'objet du texte qui nous est soumis ?
Constater ? C'est le domaine des historiens. Juger ? C'est le domaine des
juges. Calmer une douleur ? Mais celle-ci ne se calmera que lorsque le travail
de mémoire aura été mené conjointement par les Arméniens et les Turcs dans un
esprit de pardon et de réconciliation, comme certains, au sein des deux
communautés, ont déjà commencé à le faire.
Non, la vraie raison, celle qui n'est pas affichée, c'est de renforcer le
poids d'une partie contre une autre partie, dans un autre débat, dans un autre
conflit sous-jacent. Ce conflit, c'est celui du Caucase, de l'Azerbaïdjan et de
l'Arménie, qui s'est soldé par une guerre ouverte et par l'occupation d'une
portion importante du territoire azéri, dépassant les secteurs à population
arménienne dominante, et, derrière ce conflit, la rivalité entre la Turquie et
la Russie, pour l'accès maritime hier, pour le débouché occidental des
ressources pétrolières d'Asie centrale aujourd'hui.
D'ailleurs, il suffit d'analyser, selon les Etats dans lesquels de telles
propositions sont introduites, par qui elles sont introduites et sur quel
ressort de l'opinion publique elles s'appuient. En France et aux Etats-Unis,
qui sont caractérisés par de nombreuses communautés d'ascendance arménienne,
c'est le devoir de mémoire qui est mis en avant et la puissance du groupe de
pression dans les élections locales des villes où sont implantées ces
communautés. En Italie, en Belgique, en Allemagne, c'est la peur de
l'immigration turque et le risque encouru par l'Europe en cas d'adhésion de la
Turquie, et on ne s'étonnera plus de voir une proposition identique introduite
par M. Bossi et la Ligue du Nord ; les seuls textes votés à ce jour l'ont été
par la Russie et la Grèce !
Dans ces rivalités, la France doit-elle prendre parti ? Si oui, quel parti ?
En discutant cette proposition de loi, elle prendra nécessairement parti. En la
votant, elle prendra le parti de l'Arménie. En la rejetant, elle prendra le
parti de l'Azerbaïdjan et de la Turquie et encourra le risque d'une
qualification perverse de négationnisme parce qu'elle niera des faits que
nombre d'historiens ont déjà qualifiés.
D'ailleurs, en ne reconnaissant que ces seuls faits, ne courrons-nous pas le
risque de nier ou de sous-estimer les autres génocides que, hélas ! l'humanité
a produits au cours de son histoire et qu'elle continue à produire ? Quels
arguments opposerons-nous aux défenseurs des autres causes ? Et demain -
aujourd'hui déjà, peut-être - nombreux seront ceux, et pourquoi s'en
priveraient-ils dès lors que le Rubicon est franchi, qui déposeront des
propositions de loi ou des amendements pour reconnaître le génocide des
Tibétains depuis 1959, des Rwandais, des musulmans de Bosnie et des Albanais du
Kosovo, des Cambodgiens sous Pol Pot, des Indiens d'Amérique au siècle dernier,
des aborigènes d'Australie, sans compter les massacres perpétrés par les
Soviets dans les ex-territoires de l'URSS ou l'utilisation excessive de la
force en Palestine.
Devrons-nous attendre que le Sénat des Etats-Unis, le
Bundestag,
la
Douma,
ou la Grande Assemblée nationale de Turquie reconnaissent les
massacres perpétrés dans les colonies de l'Empire français ou sur notre propre
territoire du côté de Nantes et de la Vendée entre 1793 et 1795
(Exclamations sur les travées socialistes.)
- je sais que cela ne vous
fait pas plaisir, mais vous l'entendrez quand même ! - et aux heures sombres de
notre histoire récente sous le régime de Vichy, pour balayer devant notre
propre et immaculée porte républicaine ? Il ne faudrait pas, en effet, comme
l'écrivait récemment Henri Amouroux dans une communication aux Académies, «
qu'au devoir de mémoire des crimes des uns corresponde obligatoirement le
devoir d'oubli des crimes des autres ».
Il n'est ni dans l'intérêt de la France ni dans l'intérêt de la paix de
discuter un tel texte.
L'intérêt de la France, c'est le rétablissement de la paix au Caucase. Elle
déploie ses efforts dans le cadre du groupe de Minsk. Le président du Sénat
lui-même participe à ces efforts en organisant des contacts entre les
présidents des parlements du Caucase du Sud.
M. René-Pierre Signé.
Cela n'a rien à voir !
M. Jacques-Richard Delong.
Même si ces efforts n'ont pas encore débouché sur un traité de paix, au moins
ont-ils permis d'arrêter la guerre ouverte. En se prononçant sur cette
proposition de loi, la France perdra la confiance de l'une ou l'autre partie et
ne sera plus un arbitre crédible.
L'intérêt de la France, c'est le développement de bonnes relations avec la
Turquie. Que l'on s'en offusque ou que l'on s'en moque, peu importe, mais nul
ne peut nier que le vote aura une influence sur les relations avec la Turquie.
Je passe rapidement sur l'importance du commerce extérieur entre la France et
la Turquie.
Ayons aussi le souci de comprendre l'effet de telles décisions sur la
situation politique intérieure de la Turquie. Pendant plus de soixante ans, ces
événements qui se sont déroulés sur son territoire, mais sous l'ancien régime,
ont été occultés de la mémoire des Turcs. La révélation de la blessure
persistante dans la relation avec les Arméniens a été catapultée dans l'opinion
publique turque par les attentats meurtriers commis par l'ASALA dans les années
soixante-dix, notamment en France.
La réflexion sur le devoir de mémoire n'en est qu'à ses balbutiements dans les
sphères intellectuelles. Elle n'est pas encore soutenue par les hommes
politiques, car la division et l'instabilité des partis condamnent
immanquablement celui qui se lancera seul sur ce terrain risqué.
J'en parle en connaissance de cause pour avoir abordé moi-même le problème
avec le président turc, avec le Premier ministre, M. Bulent Ecevit, et avec le
ministre des affaires étrangères de Turquie, voilà moins de trois mois.
M. René-Pierre Signé.
Il a déjà pris parti !
M. Jacques-Richard Delong.
N'oublions pas qu'il a fallu plus de cinquante ans à la France pour
reconnaître les crimes de Vichy pendant la Seconde Guerre mondiale. Ayons garde
de ne pas tuer dans l'oeuf les premières avancées du devoir de mémoire et de
trop exciter dans ce pays le démon nationaliste qui sommeille.
L'intérêt de la paix, c'est l'évolution de la Turquie, son ancrage dans la
sphère européenne. Si la France a soutenu le processus de candidature de la
Turquie à l'adhésion à l'Union européenne, ce n'est pas seulement dans la
perspective d'un élargissement des marchés commerciaux. C'est aussi pour qu'aux
portes du Moyen-Orient, en proie à de fréquentes convulsions, qu'aux portes de
l'Asie centrale, l'Europe, à travers un pays stable, puisse bénéficier d'une
capacité d'influence. C'est aussi pour permettre aux Turcs de progresser sur la
voie de la démocratie et des droits de l'homme
(Murmures sur les travées
socialistes),
pour leur permettre d'effectuer l'évolution culturelle
nécessaire pour s'intégrer dans le processus de mondialisation. Si les Turcs
ont fait le choix de l'Europe, s'ils sont prêts à se lancer - ils en mesurent
le risque - dans cette aventure culturelle, c'est bien pour cette raison.
L'intérêt de la paix, c'est le rapprochement entre la Turquie et l'Arménie. Ce
n'est pas d'exaspérer les tensions nationalistes entre ces deux pays.
N'oublions pas la présence d'une communauté de quatre-vingt mille Turcs
d'origine arménienne, très bien intégrés, mais qui aujourd'hui s'inquiètent des
poussées de fièvre suscitées par nos initiatives.
Je citerai simplement, en date du 8 octobre dernier, la voix du patriarche
d'Istanbul Mesrob II pour lequel « il n'est pas positif que le Parlement d'un
pays tiers s'occupe de cette question », ainsi que celle de Hrant Dink,
directeur de la publicatioin de l'hebdomadaire bilingue
Agos
, principal
organe de la communauté arménienne : « Je sais comment sont morts mes
grands-parents, alors peu m'importe qu'ils appellent cela génocide, pogrom ou
déportation. » N'oublions pas non plus ceux qui vivent du commerce
transfrontalier et les nombreux Arméniens d'Arménie qui vivent en Turquie, le
plus souvent sans papier, car « c'est le seul pays de la région où l'on puisse
gagner son pain quoditien ».
(Murmures sur les travées socialistes.)
N'oublions pas l'Arménie, pays enclavé, dont le développement dépend de
l'ouverture de la frontière avec la Turquie.
Créons au contraire, en développant nos lien d'amitié avec ces deux pays, en
favorisant toutes les initiatives qui, sur place ou en France, peuvent
contribuer à une meilleure compréhension de cette tragédie, un climat propice à
ce travail de mémoire qui doit être un travail commun, un travail fondé, comme
l'écrit Paul Ricoeur, sur une volonté de pardon, et surtout pas sur une volonté
de revanche.
Mme Nicole Borvo.
Vous ne citez pas Paul Ricoeur à bon escient !
M. René-Pierre Signé.
Il ne l'a pas compris !
M. Jacques-Richard Delong.
En conclusion, m'appuyant sur les mêmes motivations, exprimées ou non, tant
par le gouvernement français à trois reprises, par son ministre des affaires
étrangères et par son ministre des affaires européennes, que par notre
conférence des présidents, qui a toujours refusé d'inscrire ce texte à l'ordre
du jour réservé du Sénat, que par l'exécutif américain ; je pense ici à la
lettre adressée par le président Clinton à la Chambre des représentants - les
Américains sont disciplinés -
(Exclamations indignées sur les travées
socialistes)...
Mme Hélène Luc.
Vous manquez vraiment d'arguments !
M. Jacques-Richard Delong.
... qui en a suivi les recommandations, le 19 octobre dernier, j'en appelle
une fois encore à la sagesse et à la constance que les Français attendent du
Sénat et je vous invite, mes chers collègues, à rejeter, comme vous l'avez fait
le 21 mars dernier, et pour les mêmes motifs, la demande de discussion
immédiate de cette proposition de loi.
(Applaudissements sur certaines
travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste et sur
certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Xavier de Villepin,
président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers
collègues, à ce stade de la procédure qui vient d'être engagée, je m'en
remettrai, en tant que président de la commission des affaires étrangères de la
défense et des forces armées, à la sagesse de la Haute Assemblée.
Dans l'hypothèse où le vote qui va intervenir aboutirait à l'organisation d'un
débat sur le fond du texte qui nous est soumis, je me proposerais alors
d'exposer mon opinion sur le sujet, opinion que la plupart d'entre vous
connaissent d'ailleurs déjà.
(Applaudissements sur les travées de l'Union
centriste du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jack Queyranne,
ministre des relations avec le Parlement.
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, les massacres d'Arméniens commis en 1915
dans l'ancien empire ottoman ont douloureusement marqué l'histoire du xxe
siècle.
La France a toujours veillé à perpétuer le souvenir des victimes de cette
barbarie programmée, qui a laissé dans la mémoire collective une blessure
ineffaçable.
Notre pays, fidèle à sa tradition d'asile, s'honore d'avoir été l'une des
grandes terres d'accueil des rescapés de ces atrocités, échappés dans des
conditions effroyables de leur terre natale.
Ces rescapés sont arrivés dans le plus grand dénuement. Mais ils ont su, par
leur travail, par le sens de la famille et des valeurs communes, s'installer
dans notre pays et y construire leur avenir. Leurs descendants sont aujourd'hui
pleinement intégrés dans notre communauté nationale, qu'ils ont enrichie de
leurs talents. Ils restent fidèles aux sacrifices de leurs parents et à une
culture qu'ils ont su faire vivre loin de ses terres d'origine.
Ce qu'ils expriment aujourd'hui n'est pas un désir de vengeance ou de
revanche, mais c'est une reconnaissance et un hommage à leur anciens. Ces
enfants et ces petits-enfants de déracinés et de sacrifiés ne peuvent
oublier.
En témoignage de leur contribution à notre identité nationale, ils vous
demandent aujourd'hui de vous prononcer sur une déclaration de principe.
Nous ne pouvons, quant à nous, oublier que, au cours des deux guerres
mondiales, les Français d'origine arménienne ont payé le prix du sang pour
défendre la liberté de leur patrie d'adoption. Le sacrifice de ces filles et de
ces fils de la République dans le combat pour la dignité humaine mérite
l'hommage de notre pays.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le 28 mai 1998 l'Assemblée nationale a
adopté, à l'unanimité des présents, une proposition de loi rédigée sous la
forme d'un article unique disposant : « La France reconnaît publiquement le
génocide arménien de 1915. »
Le Gouvernement en a pris acte. Votre assemblée a souhaité se prononcer à son
tour sur une proposition identique. A travers votre initiative, le Gouvernement
mesure la profondeur des sentiments qui animent l'ensemble de la représentation
nationale sur cette question.
Dans le respect de ces sentiments et en gardant à l'esprit l'horreur de la
tragédie qui les inspire, la question peut se poser, au regard de la
Constitution, de savoir s'il est du ressort de la loi de qualifier
l'histoire.
Le ministre des affaires étrangères, M. Hubert Védrine, s'est exprimé à ce
sujet le 17 mars 1999, devant votre commission des affaires étrangères, de la
défense et des forces armées. Interrogé de nouveau par cette même commission le
4 octobre dernier, il a confirmé la position qu'il avait précédemment exposée
quant à l'opportunité d'une démarche législative et à ses incidences sur la
diplomatie française.
Cette position, vous le savez, est partagée par l'ensemble des autorités
françaises.
Sur les massacres de 1915, le Gouvernement s'associe - je le dis de nouveau
avec force et émotion - à la peine et au souvenir. Le devoir de mémoire envers
les victimes de la barbarie est sacré.
Vous savez aussi que la conduite de la politique extérieure a ses propres
exigences. Elle doit être menée au regard de l'histoire, de ses tragédies, mais
aussi en tenant compte de la réalité du monde d'aujourd'hui.
Je veux réaffirmer ici que la politique étrangère de la France est une
politique de paix. Dans la conduite de cette politique, le Gouvernement oeuvre
à la stabilité entre les Etats, il encourage la réconciliation entre les
peuples, sans jamais transiger sur les valeurs qui sont les nôtres.
C'est ce qu'il fait dans cette région du monde comprise entre la Méditerranée
et la mer Caspienne, région au destin tourmenté où affleurent en permanence les
conflits entre nations. Par la recherche du dialogue avec tous, la France vise
à éradiquer les causes des conflits, à surmonter les antagonismes, à faire
progresser la coexistence et la coopération entre tous les peuples
concernés.
La France souhaite la réconciliation entre la Turquie et l'Arménie. Elle
souhaite aussi la réconciliation entre l'Arménie et ses autres voisins. Si l'on
veut favoriser ce processus, on doit veiller à éviter le risque de crispations
et de malentendus.
La France est l'amie de l'Arménie. Elle est aussi l'amie de la Turquie
moderne, qui ne peut être tenue pour responsable des faits survenus dans les
convulsions de la fin de l'Empire ottoman.
Ces relations d'amitié avec l'ensemble des pays de la région fondent le rôle
que la France a été invitée à jouer dans le règlement des crises qui affectent
cet espace géographique travaillé par les démons du nationalisme.
La France - je veux le rappeler - est l'un des premiers pays à avoir reconnu
la République d'Arménie. Nous entretenons avec ce nouvel Etat souverain des
rapports d'une grande densité humaine. Nous avons concouru de toutes nos forces
à la stabilité de cette jeune république.
Les intérêts à long terme de l'Arménie résident dans l'instauration de liens
de coopération et de compréhension mutuelle avec ses voisins. Ces liens doivent
favoriser le rapprochement des peuples et le développement de l'économie et de
la démocratie.
Avec la Turquie, la France entretient depuis longtemps des relations fortes et
suivies dans de nombreux domaines. Il appartient à ce grand pays, que nous
respectons, d'assumer les zones d'ombre et les épisodes douloureux du passé.
C'est une tâche difficile, nous le savons. Un regard lucide sur le passé peut y
concourir.
Il est de l'intérêt de la France et de l'Europe que la Turquie consolide son
évolution dans le sens de la modernité. La France continuera à oeuvrer pour le
rapprochement de la Turquie avec l'Union européenne dans le cadre défini par le
Conseil européen d'Helsinki, à la fin de l'année dernière.
Cette décision prise par les chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union est un
geste vers la Turquie pour qu'elle s'engage avec détermination et sincérité sur
la voie de la consolidation de la démocratie et du respect des droits de
l'homme.
Pour être entendue, la France doit veiller à préserver son image de
compréhension et d'ouverture, jusqu'ici reconnue par toutes les parties. C'est
ce crédit diplomatique qui lui a permis de jouer un rôle utile, dans le cadre
du groupe dit « de Minsk », chargé d'une mission de médiation sur le
Haut-Karabakh, dans le cadre de l'Organisation sur la sécurité et la
coopération en Europe.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le vote qui interviendra aujourd'hui
concerne un passé douloureux. Il ne vaut ni pour le présent, ni pour
l'avenir.
Mais soyez conscients, en prenant votre décision, que la voix de la France
doit continuer à être écoutée dans toute cette région et que, loin de
stigmatiser, elle doit chercher à apaiser. Le travail patient et attentif de
notre pays en faveur de la paix et de la sécurité doit se poursuivre.
Notre amitié avec le peuple arménien comme avec le peuple turc doit rester
entière.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles
du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Je mets aux voix la demande de discussion immédiate, pour laquelle la
commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
(La demande de discussion immédiate est adoptée.)
(Applaudissements sur les travées socialistes, sur certaines travées du groupe
communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE, de
l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Discussion immédiate
et adoption de la proposition de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion immédiate de la proposition de loi de
MM. Jacques Pelletier, Robert Bret, Jean-Claude Gaudin, Bernard Piras, Michel
Mercier et Jacques Oudin relative à la reconnaissance du génocide arménien de
1915 (n° 60, 2000-2001).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le président de la
commission.
M. Xavier de Villepin,
président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers
collègues, la proposition de loi sur laquelle nous sommes appelés à débattre
est identique à celle que l'Assemblée nationale a adoptée le 29 mai 1998, que
ni le Gouvernement ni la conférence des présidents n'ont souhaité inscrire à
l'ordre du jour, tant prioritaire que complémentaire, de notre Haute Assemblée
et, par conséquent, la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées du Sénat n'a pas été conduite, formellement, à l'examiner. J'ai
cependant toujours veillé à la tenir informée de ma proposition personnelle sur
ce texte.
Le Sénat vient, à l'instant, de décider l'inscription immédiate de la
proposition sénatoriale et, dans ce débat qui s'ouvre, je souhaite expliquer
les raisons qui, à titre personnel, me conduiront à voter contre l'adoption du
texte qui nous est soumis.
Avant toute chose, je crois qu'il importe de définir clairement ce qui est en
débat à cet instant. S'agit-il de la réalité historique des massacres, ou
encore de leur qualification juridique ? Non. Je ne pense pas que quiconque,
dans notre assemblée, porte une appréciation fondamentalement différente de
celle de nos collègues députés sur ce moment tragique de l'histoire et sur les
massacres perpétrés, en 1915, contre la communauté arménienne sur le territoire
de l'Empire ottoman en guerre.
Mme Hélène Luc.
Alors, il faut le reconnaître !
M. Xavier de Villepin,
président de la commission.
Ce préalable me semble essentiel. Et c'est
pourquoi, à mes yeux, le texte voté par l'Assemblée nationale le 29 mai 1998
constitue en lui-même un geste politique fort, consacré par l'ensemble des
groupes politiques qui la composent et qui, en ce sens, a répondu à une
préoccupation morale, légitime et respectable, de nos compatriotes d'origine
arménienne.
Mais pourquoi, dès lors, tant d'insistance à vouloir franchir une étape
supplémentaire en demandant au Parlement de légiférer sur cette question, alors
même que le vote d'un tel texte par les deux assemblées, en transformant un
message politique en loi de la République, lui donnera une tout autre portée,
sur les deux plans juridique et diplomatique ?
L'argument juridique, en premier lieu, est essentiel et pourrait, à lui seul,
expliquer la démarche sénatoriale.
L'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 délimite le domaine de la
loi et précise le caractère normatif de tout texte législatif dans le cadre de
ce domaine : la loi fixe des règles et détermine des principes fondamentaux ;
elle crée des droits et des obligations ; elle définit des normes dans les
matières énumérées par la Constitution. Or, cette proposition de loi n'a pas
d'ambition normative, et chacun, parmi ses promoteurs mêmes, s'accorde à ne lui
reconnaître qu'une valeur de symbole. La forme législative utilisée soulève
donc une question essentielle quant à sa conformité à la définition
constitutionnelle de la loi.
Le texte qui nous est soumis s'apparente davantage, en fait, à la procédure de
résolution que notre Constitution, à l'exception d'un domaine communautaire
précisément délimité par son article 88-4, a délibérément écarté - on peut le
regretter - des moyens d'action parlementaires. Comme le disait M. Jack Lang,
alors président de la commission des affaires étrangères à l'Assemblée
nationale, lors de l'examen de la proposition de loi en commission : «
L'adoption de ce texte constituera un précédent intéressant pour l'institution
parlementaire qui s'est vue privée du droit de voter des résolutions. »
Convient-il cependant que des élus, les élus que nous sommes, contreviennent
aux règles qui régissent et délimitent leurs compétences, fût-ce pour un sujet
aussi grave ? Je ne le crois pas.
Le vote d'une telle loi entraînerait également, par-delà les difficultés
juridiques qui viennent d'être soulignées, des incidences diplomatiques, je
dirais même humaines, considérables.
Le vote de cette proposition, sa transformation, tôt ou tard, en loi de la
République, aurait une première incidence diplomatique négative, dans la mesure
où le travail conduit depuis des années, avec persévérance, par tous les
gouvernements français qui se sont succédé a été de rapprocher la Turquie de
l'Europe nouvelle qui se construit. Chacun attend de ce pays des évolutions
significatives dans le domaine des droits de l'homme, du respect des minorités,
de l'Etat de droit. C'est aussi ce patient travail de rapprochement progressif
qui, en faisant tomber les crispations présentes, pourra un jour conduire le
peuple turc et ses responsables à considérer cette partie de leur passé avec
toute la sérénité nécessaire. L'adoption d'un tel texte aurait, je le crains,
un effet contraire à celui que nous recherchons.
Un incidence diplomatique dangereuse, ensuite, lorsque nous portons notre
attention vers le Sud-Caucase, où le grave conflit entre l'Arménie et
l'Azerbaïdjan traverse depuis des années une phase diplomatique critique, et
où, dans le cadre du groupe de Minsk, la France, avec la Russie et les
Etats-Unis, s'efforce de promouvoir une solution pacifique durable. Cette
responsabilité suppose, évidemment, que notre pays conserve la neutralité
nécessaire vis-à-vis des parties en présence, comme dans tous les conflits où
il s'efforce d'être médiateur de paix. L'écho négatif de ce vote ne manquerait
évidemment pas de se propager, par-delà la Turquie elle-même, dans les pays
turcophones de l'Asie centrale ex-soviétique.
Est-il par ailleurs bien responsable, est-il, je le souligne, de l'intérêt de
la France, de contribuer à ajouter, dans une vaste zone proche-orientale déjà
bien éprouvée, une source supplémentaire de rancoeur ?
Enfin, le vote de ce texte aurait une incidence diplomatique plus
qu'inopportune, au moment où les responsables turcs et arméniens eux-mêmes, se
tournant vers l'avenir, ont ébauché une démarche d'ouverture réciproque, certes
timide et fragile, mais qui autorise de vrais espoirs. Mais voilà que la
Turquie, à tort ou à raison, considère aujourd'hui l'Arménie comme l'origine de
tous les mouvements tendant, de par le monde, à obtenir, de la part de
parlements de pays tiers, la reconnaissance légale du génocide. Gardons-nous
d'inscrire le Sénat dans cette logique de tensions bilatérales par parlement
étranger interposé !
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en évitant
de faire d'un message politique légitime une loi de la République, nous
pourrions préserver la portée profondément symbolique du texte adopté par
l'Assemblée nationale. Comme un écho à l'accueil que voilà quelque
quatre-vingt-cinq ans, notre pays, pour son honneur, sut réserver aux
survivants de cette épouvantable tragédie.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, telles sont
les raisons qui, comme je l'ai indiqué au début de cette intervention, me
conduiront à voter contre le texte qui nous est proposé.
(Applaudissements
sur plusieurs travées de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants,
ainsi que sur de nombreuses travées du RPR).
M. le président.
La parole est à M. Peyrat.
M. Jacques Peyrat.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes
réunis, une nouvelle fois, pour débattre solennellement de la reconnaissance du
génocide arménien.
Les faits, personne ne peut les contester : en 1915, au milieu des dernières
convulsions de l'Empire ottoman, le peuple arménien est déporté, massacré, dans
des conditions d'horreur qui en font la première grande tragédie du xxe
siècle.
Une bonne partie des rescapés ont choisi la France. Souvent, ils sont
installés dans des villes comme Marseille, Valence, Nice, et beaucoup d'autres
encore que je ne connais pas aussi intimement que les trois villes que je viens
de citer. La France s'est enrichie de la vitalité d'une population qui, tout en
conservant son identité, a su, souvent, donner son sang pour notre nation aux
heures les plus sombres de son histoire.
Aujourd'hui, la communauté française issue de ce peuple martyrisé, privée de
ses racines par un silence qui, pour certains, pourrait apparaître complice,
nous réclame justice. Et ce cri, cet appel nous ne pouvons pas ne pas
l'entendre, en dépit des scrupules juridiques qu'ont pu avoir et qu'auront
encore peut-être après moi les uns et les autres lorsqu'ils se demandent s'il
appartient bien au Parlement de qualifier l'histoire et si l'on peut adopter un
texte à la portée plus symbolique que normative.
Mais j'observe que ce génocide a été reconnu par les instances
internationales, l'ONU - Organisation des Nations unies - par le Parlement
européen, par notre Assemblée nationale, où, voilà deux ans, en tant que
député, je votais déjà pour la reconnaissance du génocide arménien et, plus
modestement, par le conseil municipal de la ville de Nice qui a voté
unanimement pour que ce génocide soit reconnu, comme l'a fait d'ailleurs
l'Assemblée nationale.
Comment ne pas comprendre ce qu'attend de nous une génération de jeunes
Français d'origine arménienne qui ont vu leurs pères, sinon refouler, du moins
enfouir au plus profond d'eux-mêmes des souvenirs trop douloureux pour être
dits. Il est légitime que la tragédie d'un peuple et le drame de plusieurs
générations de Français d'origine arménienne soient enfin reconnus par la
France.
Ce qui me semble indéniable, c'est que le peuple arménien a été la victime de
massacres organisés, prémédités, ce qui répond d'ailleurs à la définition de
nos dictionnaires, qui assurent et développent notre langue en même temps
qu'ils enrichissent notre culture : le génocide est une « extermination
systématique d'un groupe humain, national, ethnique, religieux ».
C'est le crime le plus odieux, dans sa conception comme dans ses conséquences
; c'est d'ailleurs pourquoi il est imprescriptible. Le génocide, ce n'est pas
simplement des morts ou une immense souffrance physique ; c'est également un
crime culturel, dès lors que le massacre des hommes s'accompagne aussi de
l'élimination d'une culture et manifeste une volonté d'effacer toute trace
d'une histoire.
Le génocide arménien a aussi été cela : des villes, des noms ont été rayés de
la carte, des monuments ont perdu leur véritable identité. Au-delà de la
destruction physique matérielle, il y a une destruction mentale, l'éradication
d'un mode de vie, d'une culture, d'une civilisation - que l'on se doit de
condamner.
La France, la France éternelle, la patrie des droits de l'homme, a des valeurs
qui nous empêchent de nous dérober longtemps à ce devoir sacré de mémoire. Nous
nous devons de ne pas taire la vérité quand certains tentent de la nier, quitte
à admettre, chez nous aussi, à côté des heures glorieuses contées dans
les
Quarante jours du Moussa Dagh
, des jours plus sombres, comme l'abandon de
la Cilicie en 1921, rappelé à l'Assemblée nationale par Patrick Devedjian.
On ne peut pas laisser indéfiniment étouffer sous une chape de silence un
génocide exemplaire par les méthodes. C'est une affaire de dignité. Tenir un
langage de vérité est une nécessité, alors que nous ne sommes malheureusement
pas à l'abri d'une résurgence toujours possible de la barbarie.
Reconnaître publiquement le génocide arménien est un acte fondamental qui, à
la réflexion, va au-delà de la politique étrangère, pour relever de la
politique tout court : l'universalisme qui sous-tend la Déclaration des droits
de l'homme nous invite à faire de cette reconnaissance une façon de prévenir de
nouveaux crimes contre l'humanité. La France est l'amie de l'Arménie ; elle est
aussi l'amie de la Turquie et des autres pays de la région, auxquels elle
adresse une parole de vérité et de paix.
La Turquie est un grand pays, plein de promesses, aux confins - cela a été
rappelé - d'arcs de crises : Balkans, Proche-Orient, Caucase. Elle a peut-être
vocation à s'ancrer à l'Europe, mais elle ne pourra le faire que si elle a le
courage de regarder son passé.
La lettre de l'ambassadeur de Turquie que j'ai reçue comme nombre d'entre nous
m'a laissé perplexe, sachant que les actes des procès des unionistes, procès
qui eurent lieu à Constantinople en 1919 et qui se conclurent par la
condamnation à mort des principaux responsables, attestent de ces massacres.
Il ne s'agit pas de fermer les portes de l'Union européenne à la Turquie. Nous
pouvons espérer des candidats qu'ils satisfassent non seulement à certains
critères de développement économique mais encore à certaines conditions
politiques, comme le respect des valeurs démocratiques.
Toutefois, cette prise de position ne doit pas affecter le rôle que la France
doit jouer dans le processus de paix dans la région. Celui-ci doit être
encouragé. La France doit intensifier ses efforts pour qu'un dialogue direct se
noue un jour entre la Turquie et l'Arménie et, en particulier, pour que cesse
le blocus que subit cette dernière.
Le temps pour moi est venu de reconnaître au regard de l'Histoire comme du
droit la réalité du premier génocide du xxe siècle. Un mouvement général de
repentance est lancé. La France elle-même a accepté de se pencher sur son
passé.
Que l'exemple de notre pays soit suivi, et la politique pourra retrouver ses
fondements ethniques tels qu'ils résultent de la Déclaration des droits de
l'homme. Le Sénat, qui a montré la voie au xixe siècle quand il s'est agi de la
reconnaissance de l'esclavage, sait placer la morale au coeur du politique.
Pour moi, ce vote est nécessaire ; il y va, me semble-t-il, de l'honneur de la
France et de la fidélité à ses idées comme à son histoire.
Je comprends bien, monsieur le président de la commission, les problèmes de
forme, les problèmes de fond, les intérêts politiques, économiques ou de tout
autre nature. Mais, à la lumière de ce que nous savons s'être passé, il est bon
de libérer enfin son coeur et, après avoir reçu une partie des rescapés, de
savoir aussi donner à leurs morts une sépulture.
(Applaudissements sur les
travées du RPR, ainsi que sur certaines travées des Républicains et
Indépendants, de l'Union centriste, du RDSE, du groupe communiste républicain
et citoyen, et sur certaines travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. de Broissia.
M. Louis de Broissia.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le sujet
législatif qui nous rassemble nombreux cette nuit n'est pas habituel ; il n'est
pas léger ; il n'est pas sans conséquences ni pour notre nation ni pour la
façon dont elle est perçue dans le monde.
Ce sujet mérite donc d'être traité avec une gravité inhabituelle,
exceptionnelle, à la mesure d'un sujet terrible qui nous mobilise puisque le
Sénat est appelé cette nuit à reconnaître, après l'Assemblée nationale, la
réalité du génocide arménien perpétré en 1915.
Je voterai ce texte parce qu'il est fondé sur une vérité indubitable et parce
que nous avons des égards légitimes vis-à-vis d'un peuple fier, noble, digne du
plus grand respect dans le concert des nations.
Toutefois, mes chers collègues, - permettez-moi de vous le dire avec gravité,
avant M. Huriet - je juge ce texte désespérément et tragiquement
insuffisant.
L'Asssemblée nationale s'est donc prononcée avec une unanimité qui n'est pas
toujours un bon signe législatif. Elle n'a pas sombré dans le débat ou la
querelle droite-gauche, majorité-opposition, ce qui est à son honneur ;
néanmoins, elle a expédié, comme pour s'en débarrasser, le débat d'opportunité
législative.
M. Dominique Braye.
Très bien !
M. Louis de Broissia.
La Haute Assemblée a le mérite et l'honneur de ne pas écarter ce débat, et des
orateurs talentueux se succèdent pour dire s'il faut délibérer ou non sur un
sujet inhabituel, puisque la France n'est en rien concernée par ce qui s'est
passé en 1915 en Arménie, et pas même par la repentance si à la mode et dont
nous faisons, monsieur le ministre, un trop grand abus. Je siégeais encore à
l'Assemblée nationale lorsque je fus traité par le Premier ministre de
descendant d'esclavagistes, ce dont je garde un souvenir cruel.
Mais en conscience, mes chers collègues, si la démonstration est faite, cette
nuit, de l'opportunité nationale et internationale de ce texte, j'ai la
certitude, avec mon ami Claude Huriet et beaucoup d'autres, que la seule
reconnaissance d'un génocide commis à l'encontre du peuple arménien voilà
quatre-vingt-cinq ans serait - et je pèse mes mots - un acte de dédouanement
moral, un acte de facilité législative et un acte d'oubli volontaire de
génocides contemporains. J'ai entendu mon prédécesseur parler du premier
génocide du xxe siècle. Il y en a eu beaucoup d'autres.
J'écarte bien sûr de ma pensée le fait que certains pourraient voter un texte
par commodité morale ou électorale, en pensant qu'ils ont dans leur ville, dans
leur département, des représentants organisés tout à fait respectables de ces
Français d'origine arménienne. Mais
quid
des Français d'origine kurde,
cambodgienne, tibétaine, tutsie - je pourrais vous en citer bien d'autres - qui
maintiennent très légitimement la flamme du souvenir ?
Mais mes chers collègues, notre droit, nos lois - et, au Sénat, nous y sommes
sensibles - ne sont pas communautaires. Lorsque je consulte sur Internet
l'affreux annuaire des génocides, publié en langue anglaise, je lis qu'un
génocide a frappé l'Arménie - je ne le conteste pas -, mais aussi le malheureux
Kurdistan - cela continue d'ailleurs -,les populations du Tibet toutes entières
- cela continue également ! - le Cambodge - nous en sortons tout juste - les
Tutsis du Rwanda - cela continue aussi. Y a-t-il un doute quelconque sur chacun
de ces génocides ? Il n'y en a pas ! Et le Parlement a déjà légiféré naguère
sur la Shoah, en particulier en condamnant l'imbécillité du révisionnisme.
Notre pays a également adopté la Charte des Nations unies. L'assemblée
générale de l'ONU du 9 décembre 1948, déjà citée par notre collègue M.
Pelletier, a qualifié le génocide.
Peut-on, mes chers collègues, contourner la comptabilité atroce des génocides
du xxe siècle dont ont été victimes 1,5 million d'Arméniens, 6 millions de
Juifs d'Europe, 800 000 Tziganes, 1,2 million de Tibétains, 1,7 million de
Khmers et 1,5 million de Tutsis ?
Comment pourrait-on, mes chers collègues, en retenant ce soir légitimement le
génocide arménien, dire au peuple tibétain, au peuple kurde, au peuple juif, au
peuple tzigane et au peuple tutsi que nous n'avons pas eu une pensée pour eux
?
M. Dominique Braye.
Absolument !
M. Louis de Broissia.
C'est la raison d'être de notre amendement, que nous avons déposé en notre âme
et conscience au nom de tous ces peuples qui, aujourd'hui, souffrent encore.
M. Dominique Braye.
Bravo !
M. Louis de Broissia.
Voulez-vous attendre, mes chers collègues, qu'ils aient définitivement disparu
de la surface du globe pour vous prononcer ? Voulez-vous que ce soient leurs
enfants, les enfants de leurs enfants qui viennent, au xxiie siècle, réclamer
aux portes de nos palais nationaux ?
Pensez-vous que, ce soir, au Sénat, nous n'assumerons qu'une partie de nos
responsabilités que nous venons de décider d'exercer au nom du peuple français
? Que dirions-nous alors, demain matin, aux jeunes Tibétains, aux jeunes Tutsis
et aux jeunes Kurdes : revenez nous voir dans cinquante ans, dans
quatre-vingt-cinq ans ? Alors nous réclamerons-ils un peu plus tard, comme
l'écrivait Victor Hugo, de la poudre et des balles ?
Mes chers collègues, je vous en conjure : je sais que cette enceinte a
toujours été marquée par l'honneur et par l'engagement de chacune et chacun
d'entre nous. Je voterai en conscience la reconnaissance du premier génocide du
xxe siècle, celui perpétré sur l'Arménie. Mais je n'oublierai pas tous les
autres. Par ce vote complet, non tronqué, le Sénat déclarera que la France
entend tourner la page d'un siècle, hélas ! appelé « le siècle des génocides ».
(Bravo ! et applaudissements sur les travées du RPR ainsi que sur certaines
travées des Républicains et Indépendants de l'Union centriste et du
RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Pelchat.
M. Michel Pelchat.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, quel est
l'objet de texte qui nous est soumis ce soir ?
On nous propose de nous prononcer sur la réalité des massacres de 1915 ou sur
leur qualification juridique. Or je ne crois pas que l'appréciation portée par
chacun d'entre nous ici sur la tragédie vécue par la communauté arménienne en
1915, dans ce qui était alors l'Empire ottoman, soit différente de celle qui a
été portée par nos collègues députés, comme l'a très bien M. le président de la
commission des affaires étrangères : nous sommes tous d'accord pour convenir
qu'il s'agit de crimes abominables, d'un génocide.
Ce qui est en débat ce soir, c'est essentiellement la forme législative ainsi
utilisée pour qualifier l'Histoire et qui ne correspond ni à l'esprit ni à la
lettre de notre constitution. Les législateurs que nous sommes ne doivent-ils
pas être les premiers à respecter les textes supérieurs qui régissent leurs
compétences ?
A cet égard, la forme législative de ce texte soulève une première
interrogation d'ordre juridique : le dispositif relève-t-il du domaine de la
loi ?
En effet, comme cela à également été rappelé, l'article 34 de la Constitution
du 4 octobre 1958 délimite le domaine de la loi et précise le caractère
normatif de tout texte législatif dans le cadre de ce domaine : la loi crée des
droits et des obligations et définit des normes dans les matières énumérées par
la Constitution.
Or cette proposition de loi n'a pas de portée normative : elle s'apparente à
une procédure de résolution, dont l'objet serait de signifier au Gouvernement
une position prise par la majorité d'une assemblée sur un problème donné. Mais,
à l'exception d'un domaine communautaire précisément encadré par l'article
88-4, notre Constitution a explicitement écarté cette procédure des moyens
d'action parlementaires à l'égard de l'exécutif.
C'est pourquoi le président de la commission des affaires étrangères de
l'Assemblée nationale, juriste éminent, a dit, au moment de l'examen en
commission d'une proposition de loi semblable à celle qui nous est présentée ce
soir : « L'adoption de ce texte [constituerait] un précédent intéressant pour
l'institution parlementaire qui s'est vue privée du droit de voter des
résolutions ».
Néanmoins, au-delà de la seule valeur symbolique dont pourrait être revêtu ce
texte, je rappellerai simplement que, au regard de notre Constitution, il n'est
pas du ressort de la loi de qualifier l'Histoire.
D'ailleurs, les diverses instances parlementaires - que ce soit le Conseil de
l'Europe, le Parlement européen ou tel ou tel parlement national - qui ont pris
une décision sur le sujet du génocide arménien de 1915 l'ont fait non pas par
le vote d'une loi, mais par des procédures de motions ou de résolutions qui,
tout en permettant d'exprimer solennellement une conviction, sont dépourvues de
toute valeur normative. Cela a été dit par de précédents orateurs, mais je le
répète car c'est une vérité qu'il faut examiner comme telle.
Tel ne serait pas, en revanche, le cas du texte soumis ce soir à l'examen du
Sénat car, une fois voté par le Parlement, il deviendrait loi de la
République.
De ce fait, monsieur le ministre, il engagerait solennellement la France dans
une démarche dont le volet diplomatique et géostratégique ne peut pas être
méconnu.
J'en arrive ainsi à la seconde objection d'ordre institutionnel qui peut, dès
lors, être soulevée à l'encontre de la procédure suivie : revient-il au
Parlement d'effectuer, au nom de la France et en dehors de toute initiative
gouvernementale - ce que, au demeurant, on peut regretter, monsieur le
ministre, permettez-moi de le dire -, d'effectuer un geste qui, par-delà son
incontestable contenu moral, constitue, par ricochet, une prise de position
diplomatique ou qui, à tout le moins, sera inévitablement interprété comme tel
?
Chacun s'accorde à reconnaître que la Constitution a, là encore, clairement et
explicitement confié au Président de la République et au Gouvernement la
responsabilité de la conduite de la politique étrangère de la France, suivant
en cela une pratique et une tradition institutionnelle bien ancrée.
Le Parlement dispose bien d'un pouvoir de contrôle et de celui d'autoriser la
ratification des traités internationaux, mais la négociation de ces derniers,
et plus généralement toute l'action diplomatique du pays, relève du seul
pouvoir exécutif, très absent dans le débat de ce soir.
(M. le ministre marque son étonnement.)
Redoutant une dénaturation du pouvoir législatif, le professeur Guy
Carcassonne, éminent spécialiste du droit constitutionnel, a, dans un article
de presse du 30 avril 1999, qui a déjà été cité mais que je cite à
nouveau,...
M. Jean-Claude Gaudin.
Il a beaucoup écrit !
M. Michel Pelchat.
... déploré « l'introduction dans notre droit de la vérité historique par
détermination de la loi ».
Je pense que, avant de nous engouffrer dans une telle évolution juridique, il
est de notre devoir de législateurs d'y regarder à deux fois.
Au surplus, et de façon superfétatoire, je demanderai pourquoi le Parlement
français devrait qualifier particulièrement les massacres dont furent victimes
des centaines de milliers d'Arméniens en 1915 plutôt, ainsi que le disait notre
collègue M. de Broissia, que ceux dont furent victimes les républicains sous
Franco, sans oublier l'exécution sauvage de plusieurs milliers de soldats
polonais dans la forêt de Katyn, alors que ceux-ci venaient rejoindre ceux
qu'ils croyaient être des alliés dans le combat contre le nazisme, ou le
massacre de 150 000 harkis au lendemain du retrait de la France d'Algérie.
Faut-il avoir des préférences en matière de crime ? Ces massacres n'ont-ils
pas tous été également abominables ?
Pourquoi notre Parlement ne se prononcerait-il pas non plus sur les conditions
inhumaines d'emprisonnement de 200 000 officiers vietnamiens, en 1975, par
l'armée nord-vietnamienne, dans des conditions de totale violation de la
convention de Genève sur les prisonniers de guerre, à tel point que plus du
quart d'entre eux n'en sont jamais revenus ?
Au lieu de cela, la France a reçu officiellement M. Lê Kha Phieu, secrétaire
général du parti communiste vietnamien, qui fut l'artisan de nombreux massacres
pendant la guerre du Vietnam et qui continue à opprimer le peuple
vietnamien.
A l'époque du franquisme, j'aurais été sans aucun doute du côté des
républicains. Ce n'est pas pour cela que, aujourd'hui, il me viendrait à
l'esprit de demander la condamnation de l'Espagne pour les crimes abominables
de Franco, car j'estime qu'une telle condamnation n'aurait que des effets
dévastateurs pour ce pays et pour les relations franco-espagnoles. Laissons
donc aux Espagnols le soin d'assumer leur histoire, comme le font du reste très
bien aujourd'hui les Chiliens avec Pinochet, sans aucune ingérence extérieure.
(Murmures sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
Alors qu'aujourd'hui même la communauté internationale tente péniblement
d'éteindre les conflits entre Palestiniens et Israéliens, dans cette partie du
monde où la haine ne cesse de repousser la paix, ne prenons pas la
responsabilité de réveiller les haines qui ont existé - sans aucun doute -
entre Turcs et Arméniens dans l'Empire ottoman.
En pleine campagne présidentielle, les Américains eux-mêmes, incités par
l'intervention personnelle du président Clinton, n'ont pas voulu prendre ce
risque !
Je crois que le véritable humanisme ne consiste pas à agir contre la paix et
l'amité entre les peuples.
Laissons donc aux Turcs et aux Arméniens le soin d'assumer leur passé, leur
histoire, et ne jouons pas aux apprentis sorciers !
Telles sont les raisons qui me conduisent, par-delà la gravité de cette
tragédie, que chacun d'entre nous a présente à l'esprit, à ne pas voter une
telle proposition de loi
(Applaudissements sur certaines travées des
Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
Monsieur le président, je voudrais tout d'abord vous faire part de ma surprise
et de ma désapprobation au sujet de l'organisation de notre débat. Je me
demande même si le règlement de notre Haute Assemblée a bien été respecté en la
circonstance.
M. le président.
Monsieur Bret, pardonnez-moi de vous interrompre, mais je tiens à vous dire
que le règlement a été rigoureusement respecté ! En quoi ne l'aurait-il pas été
?
M. Robert Bret.
Dans la mesure où l'on ne savait pas si la demande de discussion immédiate du
présent texte allait être adoptée, il me semble que l'on aurait dû demander qui
souhaitait intervenir dans le débat ! Or nous assistons à un débat organisé.
Comment la liste des intervenants a-t-elle été établie ?
M. le président.
Votre demande d'intervention, monsieur Bret, a été enregistrée par le service
de la séance !
M. Robert Bret.
Est-on sûr qu'il n'y aura pas d'autres intervenants ?
M. le président.
J'ai noté le nom de ceux qui ont souhaité intervenir sans en référer
auparavant au service de la séance ! C'est ainsi que MM. Claude Huriet, Bernard
Piras et Gérard Collomb se sont inscrits, et cette liste n'est pas limitative :
si M. Fischer veut s'inscrire, il sera inscrit également !
Vous mettez en doute la régularité de la procédure...
M. Robert Bret.
Je m'interroge !
M. le président.
Oui, mais vous vous interrogez en condamnant !
M. Henri de Raincourt.
C'est désagréable !
M. Dominique Braye.
C'est scandaleux !
M. le président.
Nous avons respecté rigoureusement le règlement du Sénat !
M. Robert Bret.
Dont acte !
M. Dominique Braye.
C'est scandaleux ! Qu'est-ce que c'est que ces procédés ?
M. Jacques-Richard Delong.
C'est le règlement du KGB !
M. le président.
Un texte a été déposé, monsieur Bret, et, dès lors, chaque sénateur peut
s'inscrire dans le débat : encore une fois, trois intervenants - quatre à
l'instant - se sont inscrits au-delà de ceux qu'avait enregistrés le service de
la séance. Et je suis prêt à inscrire tous ceux qui ont l'intention
d'intervenir, je n'entends décourager aucune bonne volonté. Nous avons le temps
!
M. Dominique Braye.
C'est décourageant !
M. Patrick Lassourd.
Et les morts dus au communisme ?
M. le président.
Veuillez poursuivre, monsieur Bret, je vous en prie.
M. Robert Bret.
Monsieur le président, c'est avec solennité, mais aussi avec une grande
émotion, que j'interviens aujourd'hui,...
M. Dominique Braye.
Il ne fallait pas commencer comme cela !
M. Robert Bret.
... en pensant aux Arméniens, à tous les Arméniens qui sont venus en France,
patrie des droits de l'homme, ainsi qu'à leurs descendants.
Pourquoi ont-ils quitté leur terre natale ? Pourquoi ont-ils abandonné leurs
biens ? Pourquoi ont-ils débarqué à Marseille voilà quatre-vingt-cinq ans,
délaissant à tout jamais des siècles de souvenirs ?
M. Dominique Braye.
Et c'est lui qui dit cela ?
M. Patrick Lassourd.
Et les morts de Staline ?
(Exclamations sur les travées du groupe
communiste républicain et citoyen.)
Mme Hélène Luc.
Allons, un peu de dignité, s'il vous plaît !
M. le président.
Mes chers collègues, j'admire votre enthousiasme et votre dynamisme à cette
heure avancée du matin ! Mais laissez l'orateur s'exprimer.
M. Dominique Braye.
Ce que dit M. Bret est scandaleux !
M. Robert Bret.
Est-ce là le résultat d'un choix librement consenti ?
La réponse se présente, toute simple : s'ils ont débarqué à Marseille, c'est
parce qu'ils avaient pu, contrairement à beaucoup de leurs amis et de leurs
proches, échapper au génocide. Contraints, ils quittaient leur terre ancestrale
pour échapper aux persécutions et à une mort certaine.
Oui, il faut bien le dire, l'extermination des populations arméniennes
constitue, au sens de la Convention de 1948 de l'ONU, un crime imprescriptible
de génocide.
Ce génocide, la commission des droits de l'homme de l'ONU l'a reconnu en
1985.
En 1987, ce fut l'adoption par le Parlement européen d'une résolution qui
conditionnait l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne à la
reconnaissance du génocide, reconnaissance qu'elle continue, soit dit en
passant, de refuser aujourd'hui.
Les récents courriers que nous avons tous reçus l'attestent clairement, le
dernier en date émanant d'ailleurs de l'ambassadeur de Turquie.
Et, le 29 mai 1998, les députés, unanimes, debout dans l'hémicycle, adoptèrent
cet article unique : « La France reconnaît publiquement le génocide arménien de
1915. »
Il n'était pas concevable de laisser cette tragédie aux portes du Sénat !
Enfin, le Sénat va se prononcer sur la tragédie du peuple arménien, pour la
mémoire des victimes et de leurs proches.
Il aura fallu deux années pour que nous puissions enfin en débattre. Deux ans
de discussions et de blocages : le Gouvernement, comme la conférence des
présidents de notre Haute Assemblée, se refusait à inscrire à l'ordre du jour
cette loi votée par l'Assemblée nationale.
M. Dominique Braye.
Le Gouvernement aurait dû l'inscrire !
M. Bernard Piras.
Allons, un peu de dignité !
M. Robert Bret.
En février 1999, avec Bernard Piras, Gilbert Chabroux, Guy Fischer,
Marie-Claude Beaudeau et, bien entendu, Hélène Luc - qui, à maintes reprises,
lors de la conférence des présidents, a posé la question de l'inscription à
l'ordre du jour de cette proposition de loi - mais aussi avec de nombreux
autres collègues socialistes et communistes, nous avons déposé une proposition
de loi identique à celle qu'avait adoptée l'Assemblée nationale.
Le 21 mars dernier, lors de la demande de discussion immédiate de cette
proposition, dont j'étais le premier signataire, nous n'avions pu débattre du
fond, car l'orateur qui était contre, le président de la commission des
affaires étrangères et le Gouvernement nous avaient alors affirmé que « la
reconnaissance du génocide est un fait étranger au domaine de la loi, qu'il
n'appartenait pas à une assemblée parlementaire de qualifier des faits
historiques survenus il y a plus de quatre-vingts ans dans un autre pays ».
M. Hilaire Flandre.
Cela n'a pas changé !
M. Robert Bret.
Les mêmes arguments ont été repris une nouvelle fois aujourd'hui.
Malgré le soutien de plusieurs collègues de la majorité sénatoriale, notre
demande de discussion immédiate avait alors été rejetée.
Convaincus que la représentation nationale doit pouvoir, dans des moments
forts, adresser des messages à l'opinion publique nationale et internationale,
nous ne pouvions en rester là.
Dans la mesure où notre Constitution ne prévoit pas que le Parlement ait le
pouvoir de voter des résolutions, le seul moyen de s'exprimer au niveau
nécessaire n'est autre que le vote d'une loi. Il n'y a pas d'autre moyen !
M. Dominique Braye.
C'est faux !
M. Robert Bret.
Les droits humains ne sont pas une notion théorique, et on ne peut effacer un
fait historique.
Le génocide arménien n'est pas un souvenir inscrit dans les annales de
l'Histoire et simplement relégué dans les livres ; il est profondément enraciné
dans la mémoire collective de la communauté arménienne comme réalité concrète
et vivante.
La France, pays des droits de l'homme, son Parlement, n'ont-ils pas pour rôle
premier de transmettre la mémoire à l'égard des jeunes générations ?
Contrairement à ce que certains ont prétendu, la reconnaissance du génocide
arménien permettra - j'en suis convaincu -, un grand pas vers un dialogue
sincère et effectif entre les nouvelles générations arméniennes et turques.
On ne peut pas construire l'avenir si le passé est nié ou falsifié.
Comment nier, en effet, le caractère de génocide au massacre d'un million cinq
cents mille Arméniens assassinés de 1894 jusqu'à la nuit tragique de 1915 qui
demeure inscrite à jamais dans la mémoire de l'humanité ?
M. Dominique Braye.
Et les quatre-vingts millions en Russie ?
M. Robert Bret.
Le peuple turc a la capacité de faire face à cette histoire tragique. Il a les
moyens d'analyser et d'assumer ces événements terribles.
Je considère que notre action d'aujourd'hui est non pas un défi à l'égard de
ce peuple, mais, au contraire, un appui pour affronter le passé et regarder
l'avenir.
Oui, il faut croire au dialogue. La reconnaissance du génocide arménien ouvre
la voie à la réconciliation des deux peuples.
Pour toutes ces raisons, avec Jacques Pelletier, Jean-Claude Gaudin, Bernard
Piras, Michel Mercier et Jacques Oudin, représentant chacun l'éventail des
groupes de la Haute Assemblée, j'ai cosigné cette proposition de loi qui vous
est aujourd'hui soumise.
Je remercie Jacques Pelletier d'avoir accepté ma proposition d'en être le
premier signataire.
Soucieux d'obtenir l'adoption dès aujourd'hui de cette proposition de loi et
dépassant les clivages politiques traditionnels qui nous opposent, nous vous
appelons solennellement, mes chers collègues, à la voter et à repousser les
amendements qui nous serons présentés lors de la discussion de l'article
unique.
Sachez que les familles de ces un million cinq cent mille personnes qui ont
été massacrées en 1915 sont à votre écoute aujourd'hui.
M. Dominique Braye.
Et les quatre-vingts millions en ex-URSS ?
M. Robert Bret.
En votant cette proposition de loi, nous sommes et nous serons à leur côté
pour que jamais le silence ne retombe sur les fosses communes. En votant cette
proposition de loi, la Haute Assemblée en ressortira grandie.
(Très bien !
et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen
et sur celles du groupe socialiste.)
M. le président.
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je crois que
nous vivons un moment important qui justifie l'existence même d'un Parlement.
Nous avons à nous interroger sur des faits historiques qui sont dans la mémoire
de chacun et que personne ne songe à nier. Il est vrai, le citoyen que je suis
le dit et le reconnaît : il y a eu un génocide en Arménie en 1915.
Pour autant, est-ce le rôle du Parlement français de l'inscrire ce soir dans
une loi normative ? La reconnaissance des citoyens est une chose, l'inscription
dans la loi par un Parlement, autre chose.
Nous avons le devoir d'être de ceux qui expliquent à nos concitoyens la
réalité de ce qui fut une épreuve terrible pour un peuple dont nous avons
recueilli les survivants après le drame. Nous avons à aider nos concitoyens à
prendre conscience du premier génocide du xxe siècle qui, hélas ! certains
l'ont dit, en a connu beaucoup d'autres. Pourtant, je suis persuadé que nous
n'avons pas à l'inscrire dans une loi normative de la République.
Nous l'avons fait, on l'a dit tout à l'heure, indirectement pour la Shoah dans
la mesure où certains de nos concitoyens se sont permis de prendre des
positions qui la niaient, voire qui insultaient ceux qui en ont été les
victimes, mais c'est de nos concitoyens qu'il s'agissait. Et force est de
reconnaître aussi que la France, en tant que collectivité, n'a pas été absente,
hélas, de la réalisation de ce qui a été un des plus grands drames et des plus
systèmatiques de notre époque.
Mais nous ne sommes pas dans la même situation s'agissant du génocide
arménien. Je pense que la lecture stricte de notre Constitution ne nous permet
pas les résolutions et ne nous autorise pas à les inscrire dans la loi. Je suis
d'ailleurs persuadé que, si une loi était votée et déférée au Conseil
constitutionnel, celui-ci ne manquerait pas de constater que le Parlement est
sorti de son domaine en arrêtant une loi de la République sur un sujet de cet
ordre.
C'est la première raison pour laquelle, tout à l'heure, je voterai la motion
tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité et, si elle était repoussée, je
m'abstiendrai ensuite de continuer à participer aux débats, considérant que
l'on me ferait sortir de mon rôle de législateur.
Une seconde raison m'amène à être très circonspect sur cette affaire. Une des
plus belles phrases qui existent en matière humanitaire est la suivante : « Je
ne te demande ni quel est ton pays, ni quelle est ta race, je te demande quelle
est ta souffrance ». C'est ce que nous avons fait, collectivement en France
quand les Arméniens sont venus se réfugier chez nous. Nous ne leur avons pas
demandé qui ils étaient. Nous avons simplement considéré leurs souffrances et
nous avons fait ce que nous avons pu collectivement pour y faire face.
Est-il dans les traditions de notre République de voir se développer des
opérations, j'allais dire à caractère communautariste ?
M. Dominique Braye.
Absolument !
M. Paul Girod.
Est-il dans les traditions de notre pays de voir s'ouvrir au sein de notre
société des catégories ? Je n'en suis pas persuadé non plus. C'est la seconde
raison pour laquelle je pense que, autant notre devoir de parlementaire est de
proclamer à l'extérieur de cet hémicycle, auprès de tous nos concitoyens, la
compassion, la solidarité que nous devons à nos compatriotes d'origine
arménienne, autant je ne suis pas certain que nous rendions à ces mêmes
compatriotes et à l'ensemble de notre pays un service distingué en les
distinguant justement en tant que communauté.
Je le dis avec beaucoup de gravité et beaucoup d'émotion car j'appartiens à
une génération qui, comme nombre d'entre nous, a subi, dans sa population
civile, un certain nombre de catastrophes entre 1939 et 1945. Et à cette
époque, l'ouverture des mains des uns vers les autres était un devoir de
solidarité que nous avions les uns envers les autres, comme nous l'avions fait
après 1915.
Je ne crois pas que nous ayons intérêt, en tant que législateurs, à consacrer
des fissures de cet ordre.
Alors, à nos compatriotes d'origine arménienne, je dis : votre souffrance, je
la comprends ; je ne vous demande ni d'où vous venez, ni qui vous êtes. Cette
souffrance-là, je lui tends la main, je le fais en tant que citoyen, mais je ne
crois pas que nous ayons le devoir, moins encore le droit, de transformer les
institutions internes à notre République et l'entente solide de notre peuple
dans une opération de ce genre.
Je le dis avec beaucoup d'émotion. Aucune espèce de considération de politique
étrangère n'est présente dans mon esprit en cet instant. C'est à la solidité et
à l'unité de notre peuple que je pense en premier.
(Bravo et
applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout
génocide - au sens de la convention 260-A pour la prévention et la répression
du crime de génocide, approuvée par l'assemblée générale des Nations unies le 9
décembre 1948 - heurte profondément la conscience universelle.
Nul ne peut rester insensible aux drames qui, tout au long de l'histoire, ont
atteint des populations entières, hommes, femmes, enfants, dont
l'anéantissement était programmé pour leur appartenance à une race, à un groupe
ethnique ou religieux.
Pour cette raison, nous devons compatir à la tragédie qu'ont vécue les
Arméniens voilà quatre-vingt-cinq ans.
Mais la reconnaissance par la France de ce génocide, dans lequel - cela a été
dit - notre pays n'était nullement impliqué, pose trois graves
interrogations.
Est-il de la compétence d'un parlement national de reconnaître par la loi des
événements dramatiques survenus dans un autre pays ? Une telle démarche est à
l'évidence de nature différente de la « repentance » évoquée par plusieurs
d'entre vous et proclamée par les hautes autorités de l'Etat pour des périodes
tragiques qui ont marqué notre propre histoire.
Quelles sont les raisons profondes qui ont incité les auteurs de la
proposition de loi à recourir à une procédure exceptionnelle pour que la Haute
Assemblée décide d'en débattre ? Et pourquoi maintenant ?
Enfin, pourquoi proposent-ils une reconnaissance publique du seul génocide
arménien ?
Toutes ces questions troublantes, à vrai dire, méritent des réponses claires.
Si notre assemblée, rejetant la motion d'irrecevabilité présentée par plusieurs
de nos collègues, apporte une réponse positive à la première question, notre
vote dépendra alors des explications que nous sommes en droit d'attendre,
concernant la dernière : pourquoi la France devrait-elle reconnaître le seul
génocide arménien ? Une telle démarche signifie-t-elle que les auteurs de la
proposition établissent des degrés dans l'horreur d'un génocide ?
Pour notre part, au plus profond de notre conscience, nous ne pouvons
l'accepter pas plus que nous ne pouvons accepter de clouer au pilori un pays
qui, certes, doit assumer son passé, en exonérant de leurs responsabilités -
non moins lourdes - d'autres pays dont les crimes sont aussi abominables.
Trop nombreux ont été les génocides qui se sont succédé durant le siècle
écoulé, faisant des millions de victimes que la mémoire collective ne doit pas
oublier.
C'est la raison pour laquelle, avec certains de mes collègues, nous avons
décidé de déposer un amendement par lequel, sans remonter à travers les
siècles, la France reconnaît d'autres génocides commis depuis 1915 dans
différents pays du monde.
Mes chers collègues, si la France, à travers le vote du Parlement,
reconnaissait le seul génocide arménien, elle se singulariserait et beaucoup
s'interrogeraient sur les raisons cachées d'une telle attitude « sélective ».
Si, au contraire, la France, patrie des Droits de l'homme, reconnaissait les
tragédies intervenues au cours du xxe siècle, qualifié parfois de « siècle des
génocides », elle s'honorerait et la prise de conscience collective à laquelle
elle aurait ainsi contribué serait susceptible d'en prévenir la résurgence.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Piras.
M. Bernard Piras.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai
longtemps espéré ce moment, et c'est donc avec une certaine émotion que
j'interviens aujourd'hui, au nom de mes collègues du groupe socialiste. Avec
eux et avec ceux du groupe communiste républicain et citoyen et quelques
individualités membres d'autres groupes, nous avons depuis des mois beaucoup
oeuvré pour permettre l'adoption définitive de cette proposition de loi
relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915.
J'associe à mon intervention tous les signataires de la proposition de loi n°
238 ainsi que tous les sénateurs qui ont voté pour la discussion immédiate.
En effet, comme vous le savez, cette proposition de loi n° 238 avait déjà fait
l'objet d'une procédure de demande de discussion immédiate, rejetée le 21 mars
dernier. Cette précédente initiative, par la prise de conscience qu'elle a
engendrée, est indiscutablement à l'origine de la réussite de celle que nous
sommes amenés à examiner aujourd'hui.
La possibilité qui m'est donnée de m'exprimer à cette tribune signifie que la
première phase de cette seconde procédure s'est déroulée favorablement. Je ne
doute pas qu'elle ira cette fois à son terme.
Je ne m'attarderai pas sur le long et difficile cheminement de ce texte, me
contentant de constater que la raison, mais aussi le coeur, l'ont finalement
emporté. La cause que nous défendons est bonne. Reconnaissons qu'il eût été
fort regrettable que cette initiative parlementaire tombe dans l'oubli, comme
ce fut trop longtemps le cas pour les événements de 1915, sans avoir pu aboutir
définitivement.
Quelles sont les raisons qui nous conduisent à débattre de cette proposition
de loi, laquelle ne comporte qu'un article : « La France reconnaît publiquement
le génocide arménien de 1915 » ? En effet, voilà quatre-vingt-cinq ans de cela,
le peuple arménien vivant dans l'Empire ottoman a connu une période tragique,
laquelle s'est traduite par la disparition des deux tiers de sa population -
soit 1,5 million d'Arméniens exterminés - tandis que la majorité des
survivants, à savoir 800 000 Arméniens, se sont exilés à travers le monde,
notamment en France.
Cependant, le constat de ces événements ne suffit pas à expliquer que nous
ayons ce débat aujourd'hui. Nous sommes ici car ces massacres sont passés
quasiment inaperçus. Ils n'ont pas fait l'objet de la reconnaissance
internationale légitime qu'ils méritent, laquelle aurait pu conduire à
qualifier et à condamner ces actes de barbarie, et, peut-être - qui sait ? -
contribuer à nous préserver des atrocités qui se sont succédé au cours de ce
xxe siècle.
Par cet article, nous qualifions ces événements de génocide, et cela
conformément à la définition qui est donnée de ce terme par les Nations unies.
Personne ne pourra objectivement contester une telle qualification d'actes
ayant abouti, selon un plan prémédité, organisé et planifié, à vider l'Anatolie
orientale des Arméniens. Nous sommes donc amenés à nous prononcer sur ces
événements, car le premier génocide du xxe siècle a fait l'objet d'un oubli
pour certains et, pire, d'une négation pour d'autres. Notre démarche est donc
autant juridique qu'historique.
Mais quel sens devons-nous donner à cette reconnaissance publique ? Pour ma
part, et j'espère que nombre d'entre vous partageront cette opinion, j'estime
que cette démarche parlementaire est porteuse de plusieurs symboles forts qu'il
convient d'expliciter.
En premier lieu, cette initiative est l'occasion pour la France de rappeler et
de démontrer qu'elle demeure la patrie des droits de l'homme.
L'adoption définitive de cette reconnaissance est la preuve que le peuple
français, à travers ses représentants légitimes, a su privilégier le respect
des grands principes universels, sans donner la priorité à de supposés intérêts
économiques et diplomatiques.
Si la France n'est pas la première nation à reconnaître et à qualifier cette
tragédie, ce que l'on peut peut-être regretter, elle demeure malgré tout la
première grande puissance d'Europe occidentale à le faire. La France a
d'ailleurs prouvé qu'elle portait également ce regard intransigeant sur son
histoire lointaine ou récente. Cela a été le cas pour l'esclavage, la rafle du
Vél d'Hiv et, plus récemment, pour la guerre d'Algérie.
Si la vérité historique est parfois difficile à entendre, elle demeure
indispensable pour la construction d'un avenir meilleur. La reconnaissance des
erreurs du passé est la seule voie pour progresser, qu'il s'agisse des
civilisations ou de l'humanité tout entière.
En deuxième lieu, contrairement aux arguments souvent avancés par les
opposants de cette initiative, une telle reconnaissance ne représente pas un
obstacle à l'établissement d'une paix durable entre l'Arménie et la Turquie.
C'est au contraire un élément favorisant.
Cette reconnaissance ne constitue pas absolument la condamnation de la Turquie
actuelle, elle modifie le regard porté sur son histoire. Celui-ci est
nécessairement appelé à évoluer, notamment dans le cadre de l'entrée de ce pays
au sein de l'Union européenne.
Un nouvel éclairage sur ces faits historiques, un éclairage conforme à la
vérité ne peut qu'apaiser les rancoeurs et non les exacerber car, si rancoeur
il y a, elle ne peut venir que du peuple victime, à savoir le peuple arménien.
Le seul sentiment que les Turcs peuvent nourrir est celui d'une « fierté
blessée », comme cela a pu être le cas pour nous Français au regard des faits
qui se sont déroulés sous le gouvernement de Vichy.
En troisième lieu, la reconnaissance de ce génocide est l'occasion, pour les
représentants du peuple français que nous sommes, de témoigner de notre amitié
et de notre attachement à l'Arménie, plus particulièrement à la très importante
communauté vivant chez nous.
Depuis trois générations, cette communauté, en s'installant dans notre pays,
nous a fait confiance, elle a démontré sa faculté et sa volonté d'intégration,
elle a participé de manière très active à nos côtés lors de la Première, puis
de la Seconde Guerre mondiale et nombre de ses enfants se sont sacrifiés pour
notre patrie, pour notre République.
Mes chers collègues, souvenez-vous de « l'Affiche rouge », de cette chanson
merveilleuse et émouvante, sur un texte de Louis Aragon et interprétée par Léo
Ferré, qui relate l'action des résistants appartenant au groupe
Missak-Manouchian. Cette communauté a également contribué à l'essor économique
et culturel de notre pays par l'esprit dynamique qui la caractérise.
Prétendre, comme certains l'ont fait, que cette initiative parlementaire
serait purement électoraliste, c'est mettre en cause notre conscience
politique. Cela me semble, de plus, constituer une absurdité, puisque cette
proposition de loi a fait l'objet d'un large consensus de la part des
parlementaires. L'origine diverse, très représentative des divers groupes
politiques, des signataires de cette proposition de loi n° 60, devrait mettre
un terme à une telle polémique.
L'adoption définitive de cette proposition de loi marquera la force d'idées
majeures : la France demeure la patrie des droits de l'homme ; la paix durable
ne peut être fondée sur le rejet ou sur la négation de la vérité historique ;
la France manifeste son attachement à la communauté arménienne.
Les événements de 1915 ne peuvent se confiner à l'histoire bilatérale de deux
pays, ils doivent à tout prix entrer dans la conscience collective afin de la
faire progresser. C'est à cette oeuvre-là que nous participons aujourd'hui.
Nous pouvons légitimement en être fiers.
(Applaudissements sur les travées
socialistes, sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que
sur certaines travées du RDSE. - M. Adnot applaudit également.)
M. le président.
La parole est à M. Collomb.
M. Gérard Collomb.
Il n'est plus de peuple, il n'est plus de dirigeant qui, aujourd'hui, n'ait à
faire face devant la conscience universelle à la réalité de son histoire.
La seule vraie question qui devrait donc nous préoccuper ce soir devrait être
celle de savoir si nous avons la conviction profonde, intime, totale qu'il y a
bien eu génocide du peuple arménien en 1915. Mes chers collègues, si nous ne
nous posions que cette question - la seule vraie question, - ce soir, nous
voterions à l'unanimité la reconnaissance du génocide du peuple arménien.
Comme l'attestent les témoignages bouleversants des survivants de l'époque,
les travaux de tous les historiens qui ont travaillé sur cette période : oui !
1915 vit bien se dérouler le premier génocide du xxe siècle.
M. Patrick Lassourd.
Personne ne le conteste !
M. Gérard Collomb.
Dès lors, quelles raisons pourraient nous amener à passer sous silence ce
génocide du peuple arménien ?
Des raisons juridiques ? Nous savons trop que l'invocation du droit peut
recouvrir les plus profondes injustices. Nous connaissons l'adage :
Summum
jus, summa injuria !
Au nom de la Constitution, au nom du fait que le législateur prendrait des
prérogatives par rapport au pouvoir exécutif, nous accepterions de passer sous
silence le premier génocide du xxe siècle ?
Comment ne pas voir que nous ne pouvons guère nous réfugier derrière des
raisons juridiques ?
M. Hilaire Flandre.
Cela sent les urnes !
M. Gérard Collomb.
Quant à la volonté de préserver de bonnes relations avec la Turquie, la
plupart des collègues qui vont voter pour la reconnaissance du génocide
arménien, ce soir, ne se reconnaissent pas comme des ennemis de la Turquie,
bien au contraire.
Nous pensons que c'est en aidant la Turquie à reconnaître le génocide arménien
et à faire face aux pages les plus sombres de son histoire que nous l'aiderons
à progresser dans la voie démocratique. Et, ce soir, nous avons conscience, en
accomplissant cet acte, d'aider en Turquie les forces qui luttent pour
l'approfondissement de la démocratie dans ce pays.
Comment ne pas voir que c'est parce que l'Allemagne, après guerre, par la voix
de ses dirigeants les plus éminents, a su reconnaître les crimes d'un passé
pourtant récent qu'elle a pu rejoindre la communauté des pays démocratiques et
nouer des liens d'amitié avec notre pays ?
Il est donc faux de dire que c'est en oubliant le passé que l'on pourrait
permettre l'établissement de relations nouvelles entre l'Arménie et la Turquie.
C'est au contraire en aidant la Turquie à reconnaître le passé que l'on pourra
permettre que s'établissent, dans cette région du monde, des relations
nouvelles fondées sur la paix et sur la coopération.
Alors, on nous dit qu'il y aurait d'autres génocides dans l'histoire
contemporaine.
Plusieurs sénateurs du RPR.
Qu'il y aurait !
M. Gérard Collomb.
C'est vrai, il y en a eu d'autres. Mais comment ne pas voir que, les unes
après les autres, les pages noires de l'humanité font toutes l'objet d'enquêtes
et de réexamens ?
Je crois, au contraire, que c'est un progrès de la conscience universelle
contemporaine de ne plus accepter que tel ou tel sujet soit occulté pour des
raisons qui sont le plus souvent des raisons d'Etat ou des raisons d'ordre
idéologique.
Il n'y a plus, aujourd'hui - c'est un énorme progrès - de sujet tabou. Tous
les crimes de l'histoire contemporaine deviennent objets de débat, avant de
devenir objets de réprobation et de condamnation. C'est ainsi, peut-être,
qu'une nouvelle conception des relations humaines est en train de naître,
fondée sur le droit, et non plus sur la force et la violence la plus
extrême.
Mes chers collègues qui citez les crimes de l'histoire contemporaine, vous
pouvez être rassurés : le passage au crible de notre histoire n'épargnera rien
ni personne. Il me semble que, désormais, ils seront de moins de en moins
nombreux, ceux qui accepteront de couvrir, par solidarité idéologique, les
crimes qui ont pu être commis, quels que soient ceux qui les ont commis.
Mes chers collègues, la reconnaissance du génocide arménien, ce soir,
constitue un pas déterminant dans ce progrès de la conscience humaine.
M. Roland Courteau.
Très bien !
M. Gérard Collomb.
C'est pourquoi nous devrions, comme nos collègues de l'Assemblée nationale,
voter à l'unanimité la reconnaissance du génocide arménien.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du
groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier.
Le génocide arménien de 1915 est une vérité historique qui n'est sûrement pas
suffisamment connue ni reconnue, mais, le débat soulevé dans l'opinion depuis
plusieurs mois à propos d'une reconnaissance publique officielle de ce drame
humain a déjà en partie combattu l'ignorance qui pouvait l'entourer.
On comprend toutefois que les descendants des victimes massacrés en 1915 ne se
satisfassent pas d'une simple médiatisation de l'évocation historique. Ils
souhaitent un acte solennel de la République française : celui qui est attaché
à la loi.
Mais la loi est-elle appropriée à son objet en une telle circonstance ? Je ne
le crois pas pour trois raisons.
J'écarterai rapidement la première catégorie de raisons, celles qui sont les
plus discutables, celles qui sont évoquées au titre de l'opportunité ou des
intérêts économiques et qui inciteraient à rester silencieux pour ne pas
heurter, froisser ou contrarier tel ou tel d'entre eux. Selon moi, les intérêts
matériels doivent, par principe, s'incliner devant les impératifs de la
justice. Ce n'est donc pas, à mon avis, pour ménager ces intérêts qu'on
pourrait écarter la voie législative quant à la reconnaissance du génocide
arménien.
Vient ensuite l'argument constitutionnel : il a du poids dans un Etat de
droit, car le respect du droit est le seul moyen à notre portée pour établir la
justice humaine, tandis que son mépris conduit irrémédiablement et promptement
à l'injustice ; on descend en effet plus vite sur ce chemin qu'on ne le gravit.
Or notre constitution ne confie pas à la loi la fonction pour laquelle elle est
ici sollicitée. La proposition de loi que nous examinons risquerait
vraisemblablement la censure du Conseil constitutionnel.
Mais je n'insisterai pas sur ce point pour ne pas me limiter à ce que certains
pourraient considérer comme un formalisme excessif face à l'ampleur d'un drame
humain devant lequel je m'incline avec émotion.
En vérité, l'interrogation la plus grave me paraît fondée sur l'ambiguïté qui
résulte inévitablement de l'affirmation d'une vérité historique par une loi
établie historiquement selon une procédure majoritaire.
Le fondement d'une loi est, en effet, moins assuré que la vérité qu'elle
prétendrait valider.
La vérité historique du génocide arménien est intangible et incontestable. En
revanche, la vérité d'une loi n'est formellement liée qu'à l'existence
historique de la majorité qui l'a votée. Elle est réformable par une autre
majorité et n'a pas plus de poids qu'une loi opposée votée par une majorité
différente.
C'est pourquoi on s'est jusqu'ici abstenu, en France, à ma connaissance, de
faire écrire l'histoire par la loi.
Les vérités officielles, même quand elles coïncident avec mes sentiments, ne
recueillent pas mon adhésion précisément parce que le coeur fait pour la
fraternité laisse la raison établir et protéger la liberté et l'égalité.
Mes sentiments d'amitié à l'égard du peuple arménien, y compris dans mes
convictions les plus profondes, sont très puissants. Cela n'est pourtant pas
suffisant pour faire taire mon attachement à une vérité d'ordre supérieur,
celle de l'intelligence et de la raison, sans laquelle aucune autre vérité ne
peut être fondée, aucune justice ne peut être espérée.
C'est la raison pour laquelle, dans l'intérêt même du peuple arménien - qui,
en cette affaire, recherche la réparation d'une injustice abominable par une
voie qui n'est pas la bonne - et pour défendre la pérennité des institutions de
la République française, je m'oppose à cette proposition de loi.
Les Arméniens retireraient d'une telle loi une satisfaction psychologique
incontestable mais sans aucune portée juridique, sans aucune réparation
effective et concrète. En revanche, mesurons bien l'atteinte portée à notre
pratique institutionnelle par une telle loi. L'esprit républicain n'est pas
établi sur les bons sentiments. Je regrette que ceux qui sont les gardiens de
notre République n'aient pas su le dire clairement avant que l'Assemblée
nationale se précipite dans une impasse juridique. C'est pour cela que le Sénat
est confronté, cette nuit, à ce dilemme majeur.
(Très bien ! et
applaudissements sur certaines travées des Républicains et Indépendants et du
RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Durand-Chastel.
M. Hubert Durand-Chastel.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la
proposition de loi que nous débattons cette nuit est d'une grande importance. A
l'évidence, il y a conflit entre des intérêts locaux, nationaux, certes
légitimes, et les enjeux internationaux, d'une tout autre ampleur.
Le Gouvernement a défini nettement sa position dès le vote de l'Assemblée
nationale par la voix du ministre des affaires étrangères, M. Hubert Védrine,
position que celui-ci il a d'ailleurs réitérée récemment devant la commission
des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, à savoir que, le
Parlement étant un organisme législatif, il n'a pas à décider d'un point
d'histoire. M. le ministre des relations avec le Parlement vient, du reste, de
le rappeler.
Sur ce même problème, le président Clinton a obtenu, le 19 octobre dernier, le
retrait de la résolution présentée à l'ordre du jour de la Chambre des
représentants visant à reconnaître le génocide arménien en faisant part à son
président de ses « fortes inquiétudes quant à l'opportunité de cette résolution
au regard des intérêts américains au Moyen-Orient ». C'est également, comme
cela a déjà été indiqué, la position du patriarche des Arméniens de Turquie qui
a affirmé : «Ce »problème ne devrait pas être exploité par des politiciens pour
leurs propres intérêts. »
La France, qui a soutenu la demande d'adhésion de la Turquie à l'Union
européenne, et qui entretient par ailleurs d'excellentes relations avec
l'Arménie, n'a pas à intervenir par voie législative sur cet événement, si
terrible soit-il, qui date de quatre-vingt-cinq ans et appartient à
l'histoire.
J'ajoute, pour terminer, que l'adoption de cette proposition de loi
soulèverait sans doute plus de difficultés qu'elle n'en résoudrait.
Pour toutes ces raisons, il convient de voter contre le texte qui nous est
présenté.
(Applaudissements sur certaines travées du RRR et des Républicains
et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues,
l'Affiche
rouge
, le très célèbre poème de Louis Aragon, évoque, dans une strophe
moins connue que les premiers vers, l'espoir du peuple arménien en la vie
retrouvée, en son indéfectible amitié envers la nation française. Ce sont ces
quelques
vers qui s'imposent ce soir à moi. Voici les paroles que l'auteur prête à l'un
des condamnés du groupe Manouchian, en fait à Missek Manouchian lui-même :
Un grand soleil d'hiver éclaire la colline
Que la nature est belle et que le coeur me fend
La justice viendra sur nos pas triomphants
Ma Mélinée ô mon amour mon orpheline
Et je te dis de vivre et d'avoir un enfant.
C'était le pardon, la continuité, l'espoir, la mort atroce rendue plus légère
par la confiance en la justice des hommes, des Français.
Comment imaginer que, l'esprit ainsi apaisé avant la mort, ces hommes, nos
frères arméniens, ne se seraient toujours pas vu rendre justice du plus ancien
de leurs tourments quatre-vingt-cinq ans plus tard ?
Aujourd'hui, alors que notre assemblée, réunie autour d'une proposition de loi
signée par l'ensemble de ses familles politiques, est peut-être à quelques pas
de reconnaître - enfin ! - le génocide arménien de 1915, je veux croire que
l'intelligence, dépassant tous les clivages, permettra à chacun de prendre
position en son âme et conscience en faveur de la justice.
Aussi, mes chers collègues, c'est avec émotion que je pense ce soir au bonheur
qui sera celui de la communauté arménienne - particulièrement celle de la
région Rhône-Alpes - si notre assemblée vote cette proposition de loi.
Je suis né à Décines, dans le Rhône, cité de la soie où j'ai passé vingt ans
de ma vie auprès de la communauté arménienne. Tout enfant, j'en ai partagé les
malheurs, les valeurs. Ses espoirs, je les ai fait miens.
Je me souviens particulièrement d'un jour de 1975 où, au pied de la sculpture
dédiée aux victimes du génocide, Arsène Margossian, adjoint au maire de
Décines, s'exprimait ainsi devant une foule recueillie : « Ô morts de 1915,
chers morts sans sépulture dont on entrevoit à travers ce monument les corps
suppliciés, dormez en paix ! »
De mon histoire personnelle, je tiens pour sûr que la reconnaissance du
génocide arménien est bien plus qu'un simple rétablissement de la vérité
historique. Parce qu'un peuple martyr ne peut se désintéresser du sort de ses
frères humains, comme en témoigne, en France, l'engagement des Arméniens dans
la guerre, contre le fascisme. Parce qu'un peuple qui a connu la torture, le
génocide, l'oubli ne pouvait pas se contenter de panser ses plaies mais se
devait au contraire d'être de tous les combats qui eurent pour enjeu l'avenir
de l'humanité.
M. Jean-Claude Gaudin.
Le nôtre en particulier !
M. Guy Fischer.
Je regretterai simplement ce soir que nous ayons dû recourir à la procédure de
discussion immédiate.
Mais nous connaissons d'avance la réponse !
Mes chers collègues, notre vote de ce soir sera un acte de paix, de
réconciliation. Reconnaître officiellement la torture, les massacres, est
toujours un pas vers la stabilité des démocraties. L'impunité, en revanche, est
toujours négative et susceptible de mettre en péril la voie démocratique des
peuples, quels qu'ils soient. Ainsi, la reconnaissance du génocide d'un peuple
sert la reconnaissance de la souffrance et des aspirations de l'humanité tout
entière.
C'est pourquoi je veux vous dire mon immense espoir à l'idée qu'une grave
erreur historique est sur le point d'être enfin corrigée, qu'un peuple va se
voir rétabli dans son droit et pouvoir continuer son chemin libéré de deux
grands poids : l'erreur et la méconnaissance. Car, comme le disait Elie Wiesel,
prix Nobel de la paix « oublier les victimes du génocide, c'est les assassiner
une seconde fois ».
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste
républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Exception d'irrecevabilité
M. le président.
Je suis saisi par MM. Jacques-Richard Delong et Michel Pelchat d'une motion n°
3 tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 2, du règlement, le Sénat déclare
irrecevable la proposition de loi relative à la reconnaissance du génocide
arménien de 1915 (n° 60, 2000-2001). »
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement
du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative
ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire pour
quinze minutes, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond
et le Gouvernement.
La parole est à M. Delong, auteur de la motion.
M. Jacques-Richard Delong.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais
faire en sorte que mes propos dépassionnent la discussion.
M. Marcel Charmant.
Ça va être dur !
M. Jacques-Richard Delong.
Nous avons choisi de débattre de la proposition de loi relative au génocide
arménien, et je peux comprendre qu'une majorité d'entre nous aient eu le désir
d'exprimer leur position sur cette tragédie.
Le débat a eu lieu, les différentes positions ont été exprimées.
Faut-il, dès lors, se prononcer sur le fond de cette proposition de loi, en
voter le dispositif, le faire entrer dans notre droit positif et utiliser une
procédure douteuse sur le plan constitutionnel ?
La loi doit avoir des effets d'ordre interne. La proposition de loi se borne à
constater des faits extérieurs à la compétence territoriale du Parlement
français. Elle n'en tire aucune conséquence dans l'ordre juridique interne. M.
de Villepin a développé les arguments fondés sur l'article 34 de la
Constitution du 4 octobre 1958 et cité le président de la commission des
affaires étrangères de l'Assemblée nationale lors de l'examen en commission
d'une proposition visant le même objet : « Ce texte aura surtout une valeur
symbolique. »
Le secrétaire d'Etat aux anciens combattants s'est lui-même interrogé en ces
termes à l'occasion du débat du 28 mai 1998 à l'Assemblée nationale : « la
question se pose, au regard de la Constitution, de savoir s'il est du ressort
de la loi de qualifier l'histoire ». Les mêmes réserves ont été exprimées par
le ministre des affaires étrangères, le 17 mars 1999, devant la commission des
affaires étrangères du Sénat. La question se pose encore aujourd'hui.
Les relations avec l'étranger n'entrent pas dans les compétences législatives
du Parlement. Aucune des dispositions de l'article 34 de la Constitution ou
d'autres articles de celle-ci ne donnent compétence au législateur pour
intervenir dans le domaine diplomatique. L'article 37 de la Constitution
indique que « les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont
un caractère réglementaire ». Nous nous trouvons donc bien là dans le domaine
des compétences de l'exécutif, et non dans celui du pouvoir législatif. Il
n'est pas de la compétence du Parlement d'intervenir dans ce domaine par la
voie législative. Le Parlement français est donc incompétent
ratione
materiae et ratione locci.
Le texte s'apparente davantage, en fait, M. de Villepin l'a rappelé, à la
procédure des résolutions tendant à exprimer, à l'intention du Gouvernement,
une position prise par une majorité d'une assemblée sur tel ou tel sujet,
procédure que notre Constitution, à l'exception du domaine communautaire
précisément encadré par l'article 88-4, a explicitement écarté des moyens
d'action parlementaires, comme l'avait confirmé le Conseil constitutionnel par
ses décisions des 17, 18 et 24 juin 1959 relatives au projet de règlement de
l'Assemblée nationale.
Cette intention de recourir à une proposition de loi du fait de
l'impossibilité constitutionnelle d'utiliser la procédure des résolutions a
d'ailleurs été exprimée par le président de la commission des affaires
étrangères de l'Assemblée nationale lui-même. Il était donc bien conscient du
détournement de procédure qu'il cautionnait et, en fin politique, il affirmait
les souhaits de sa commission tout en tendant au Gouvernement le moyen de
sortir de cet imbroglio.
Si l'on peut reconnaître, en revanche, un effet à cette proposition de loi,
dès lors qu'elle serait adoptée, ce serait la force d'une injonction au
Gouvernement de la République d'agir, notamment dans les instances
internationales, en conformité avec les principes énoncés par les auteurs de la
proposition de loi. Or j'affirme que le Parlement n'a pas, aux termes de la
Constitution, la possibilité d'adresser des injonctions au Gouvernement, y
compris et surtout dans le domaine diplomatique.
La Constitution définit les compétences de chaque organe. Dans le domaine
diplomatique, elle confère au Parlement le pouvoir d'autoriser la ratification
des traités internationaux, non celui de les négocier ni celui de fixer des
limites à l'exécutif pour la négociation de ceux-ci. Il s'agit d'une
prérogative exclusive du Président de la République.
Quand le Parlement a souhaité intervenir
a priori,
il l'a fait en
modifiant la Constitution et en y introduisant une dérogation explicite au
principe, comme avec l'article 88-4 dans le domaine des compétences de l'Union
européenne. Encore cet article précise-t-il qu'il s'agit des « propositions
d'actes communautaires comportant des dispositions de nature législative » et
encore se contente-t-il d'accorder aux assemblées parlementaires un pouvoir de
donner des avis, sous forme de résolutions et non sous forme législative.
Cette incompétence du Parlement pour agir
a priori
a un sens comme
prérogative conférée à l'exécutif en matière diplomatique. La polysynodie n'est
pas adaptée à l'action diplomatique. Le Parlement est saisi
a
posteriori
, il ratifie les traités, et le Gouvernement est responsable
devant l'Assemblée nationale. Il contrôle, mais n'agit pas directement. Il ne
délivre pas de mandat au Gouvernement.
Ayons garde, au détour du vote de cette proposition de loi, de ne pas créer un
précédent, la source d'une coutume constitutionnelle, qui, en d'autres temps et
sur d'autres sujets, conduirait à paralyser l'action diplomatique du Président
de la République et du Gouvernement. Il s'agit ici d'une question de
principe.
J'affirme donc, en l'absence de dispositions constitutionnelles explicites,
l'incompétence du Parlement à statuer par voie législative en cette matière.
Monsieur le ministre, je m'étonne que le Premier ministre n'ait pas, dès le
passage à l'Assemblée nationale, soulevé l'irrecevabilité constitutionnelle de
ce texte. Je rappelle qu'en application de l'article 41 de la Constitution «
s'il apparaît au cours de la procédure législative » - l'article ne dit pas au
moment de son inscription à l'ordre du jour, il signifie à tout moment de la
procédure - « qu'une proposition ou un amendement n'est pas du domaine de la
loi (...), le Gouvernement peut opposer l'irrecevabilité ». Il n'est pas trop
tard pour le faire !
(M. Marcel Charmant s'exclame.)
Je suis persuadé,
d'ailleurs, que le Conseil constitutionnel pourrait utilement apprécier ce
différend.
Je vous propose, mes chers collègues, de faire preuve de rigueur, de respecter
les compétences de chaque organe telles qu'elles ont été définies par la
Constitution, et de voter la présente motion tendant à opposer l'exception
d'irrecevabilité. C'est le moins que je puisse vous demander.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Gaudin, contre la motion.
M. Jean-Claude Gaudin.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous venez
d'entendre les arguments avancés par notre collègue Jacques-Richard Delong, qui
a souhaité défendre devant vous une motion tendant à opposer l'exception
d'irrecevabilité. C'est son droit !
Si je souhaite prendre la parole ce matin contre cette motion de procédure,
c'est que je ne suis pas convaincu par les arguments qu'il vient de vous
présenter. Je les combats et je ne me contente pas de vous le dire, je vais
essayer de vous le démontrer.
Une proposition de loi vous a été présentée par notre éminent collègue Jacques
Pelletier qui, en sa qualité d'ancien médiateur de la République, est un homme
qui a profondément le sens du consensus et il saura, je l'espère, nous le faire
partager.
Cette proposition de loi est consensuelle dans la mesure où des sénateurs de
chaque groupe politique de notre assemblée ont accepté de la cosigner. Ce cas
est suffisamment rare pour que je me permette de le souligner solennellement à
cette tribune.
(Marques d'approbation sur les travées socialistes et sur
celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
Ce texte ne vise en aucune manière, j'insiste sur ce point, à rendre le
gouvernement turc actuel responsable des atrocités perpétrées en 1915. Loin de
nous cette idée, et je tiens à le dire à notre collègue M. Delong.
Il ne s'agit nullement pour nous de nous substituer à la Turquie dans la
gestion de son histoire. Il s'agit d'un acte du Parlement français, qui
s'honorerait de cettre reconnaissance pour et devant l'histoire. En effet, même
si cette proposition de loi commune n'est juridiquement pas la même que celle
qui a été votée en mai 1998 à l'Assemblée nationale, elle l'est sur le fond :
les termes en sont rigoureusement les mêmes, l'article unique étant rédigé de
façon strictement identique.
Si le Sénat reconnaît officiellement aujourd'hui le génocide arménien de 1915,
comme l'ont fait les députés au Palais-Bourbon, voilà deux ans, le Parlement
français aura, dans son ensemble et sur le fond, reconnu ce premier génocide du
xxe siècle.
Cependant, je le répète, cette démarche n'a nullement pour objet d'opposer
notre pays à la Turquie.
Certains nous diront que le moment est mal choisi. Depuis plusieurs années, le
discours est toujours le même.
La situation au Proche-Orient est explosive. Effectivement, elle l'est,
parfois même très gravement, mais, hélas ! elle l'est très souvent.
Pouvons-nous vraiment en prendre prétexte pour refuser la reconnaissance
légitime d'un massacre dont la vérité historique est avérée ?
D'autres nous diront que les intérêts économiques de notre pays passent par
des marchés très importants avec la Turquie. Mais n'est-il pas quelque peu
immoral d'avancer cet argument lorsqu'on traite d'un sujet aussi grave que la
reconnaissance d'un génocide et de centaines de milliers de morts ?
D'autres encore diront - on l'a entendu à cette tribune - que la loi n'a pas à
qualifier l'histoire. Cela a été un argument supplémentaire lorque j'avais
demandé, lors de la précédente session, l'inscription à l'ordre du jour de la
proposition de loi portant reconnaissance du génocide arménien de 1915.
Pourtant, mes chers collègues, le Sénat a eu l'occasion, et plusieurs fois dans
cet hémicycle, de qualifier l'histoire, en nommant les Justes de l'Etat
d'Israël notamment, il n'y a pas si longtemps, ou au sujet de la guerre
d'Algérie. Alors, est-ce encore un nouveau prétexte ? Il me semble bien que
oui, malheureusement.
D'autres enfin diront, comme certains orateurs l'ont souligné, que la Chambre
des représentants du Congrès des Etats-Unis s'apprêtait, voilà peu de temps, à
voter le reconnaissance du génocide arménien et que, sous l'influence du
président Bill Clinton, elle y a, provisoirement je l'espère, renoncé. Est-ce
un exemple à suivre ? Permettez-moi, mes chers collègues, d'en douter
fortement. L'indépendance nationale compte pour nous aussi, même si nous ne
sommes pas issus du gaullisme.
(Sourires.)
De multiples raisons et de nombreux arguments seront toujours avancés pour
nous demander de renoncer, de nous taire, de taire la voix des représentants du
peuple. Mais elle ne se taira jamais tant qu'elle n'aura pas donné satisfaction
aux représentants des communautés arméniennes.
L'accumulation de l'ensemble de ces arguments, chaque fois différents au
demeurant, que ce soit la situation au Kosovo ou encore dans le sud du Caucase,
montre d'ailleurs qu'aucun d'entre eux n'est réellement valable ni vraiment
justifiable au regard de ce qui s'est passé en 1915.
Peut-être ai-je fait preuve d'un peu de naïveté en demandant déjà, voilà
vingt-deux ans, alors que j'étais jeune député, la reconnaissance du génocide
arménien. Mais je suis de ceux qui ne mettront jamais en balance les intérêts
économiques ou diplomatiques de notre pays avec la reconnaissance de tous ces
morts. Bien sûr, nous savons - certains de mes collègues l'ont souligné avec
beaucoup d'émotion - que d'autres génocides ont été perpétrés à travers
l'histoire. Celui de la Shoah me revient immédiatement en mémoire, mais
d'autres ont également été commis à travers le monde, dans plusieurs pays,
parfois même beaucoup plus récemment qu'en 1915.
M. Louis de Broissia.
Il y en a encore aujourd'hui !
M. Jean-Claude Gaudin.
Sans doute faudra-t-il les reconnaître aussi pour rétablir la vérité face à
l'histoire...,
M. Louis de Broissia.
Quand ?
M. Jean-Claude Gaudin.
.. pour sensibiliser les générations futures aux désastres qui ont eu lieu
dans le passé, afin que les mêmes événements ne puissent jamais se reproduire.
Mais, aujourd'hui, monsieur de Broissia, nous parlons du génocide arménien. Ne
mélangeons pas des événements aussi dramatiques et qui, me semble-t-il,
méritent un traitement à part.
(M. Dominique Braye s'exclame.)
J'ai entendu que certains souhaitaient élargir notre débat de ce soir à des
atrocités qui ont été perpétrées en d'autres lieux, en d'autres temps. Cela est
tout à fait respectable et nous partageons tous cette analyse. Mais il ne faut
pas aujourd'hui entrer dans ce débat. Consacrons-nous ce matin au peuple
arménien et à lui seul. Il le mérite !
Je tiens à rappeler ici, d'ailleurs après plusieurs d'entre vous, mes chers
collègues, que les communautés arméniennes de France se sont parfaitement
intégrées à notre population. Beaucoup d'Arméniens sont des éléments moteurs,
en politique, par exemple, après tout - c'est à nous d'en parler - ou encore
dans l'économie ou la culture, où ils se sont particulièrement illustrés.
Vous avez bien voulu en citer plusieurs, notamment le célèbre et talentueux
metteur en scène de cinéma, Henri Verneuil. Tous demandent, avec insistance et
depuis toujours, la reconnaissance par la France du drame dont leurs ancêtres
ont été victimes.
Je vous le dis sincèrement, mes chers collègues, et je vous le dis peut-être
aussi un peu solennellement : le moment est venu.
Le moment est venu pour notre assemblée de reconnaître officiellement ce
génocide, après avoir affiché de nombreuses réticences, infondées à mes yeux,
car la Turquie elle-même s'honorerait d'accepter le principe de notre
démarche.
Si la Turquie veut, à terme, intégrer l'Union européenne, et nous savons tous
qu'elle souhaite nous rejoindre, elle doit être en mesure d'assumer pleinement
son passé. Elle doit prendre exemple sur l'Allemagne, qui a immédiatement
reconnu sa responsabilité dans l'Holocauste.
Ce n'est nullement une honte ni une humiliation pour une nation que de
reconnaître une telle responsabilité : c'est un devoir de mémoire envers
l'histoire.
Par respect pour le peuple arménien, je crois foncièrement que la Turquie
doit, une fois pour toutes, abandonner les thèses négationnistes.
Si elle veut jouer pleinement son rôle à l'avenir au sein de l'Europe, il faut
qu'elle accepte sa propre histoire, même une histoire cruelle et douloureuse à
assumer.
La Haute Assemblée est attachée à la Déclaration des droits de l'homme, elle
l'a montré à de nombreuses reprises. Elle est attachée aux valeurs de liberté
et a condamné de tout temps les thèses idéologiques, d'où qu'elles viennent,
qui ont abouti à ces drames sanglants pour l'humanité que vous avez rappelés
précédemment, chers collègues de Broissia et Huriet.
Aujourd'hui, elle doit poursuivre dans cette voie et accepter de discuter sur
le fond la proposition de loi qui a été signée par un membre de chaque groupe
politique du Sénat.
Les Nations unies, à travers le rapport Whitaker et par le biais de la
commission des droits de l'homme, ont reconnu ce génocide en 1985. Le Parlement
européen, sous la forme d'une résolution conditionnelle, a, lui aussi, deux ans
après, reconnu ce génocide.
En 1998, ce fut le tour de l'Assemblée nationale, où tous nos amis, les
nôtres, puis nos adversaires ont, à l'unanimité, exprimé le même vote.
Aujourd'hui, à nous de compléter cette reconnaissance par un vote favorable du
Sénat qui, même si notre proposition de loi, cher président Girod, ne devient
pas, juridiquement parlant, une loi de la République ce matin, permettrait de
dire que les deux chambres du Parlement français ont, chacune, reconnu le
génocide arménien de 1915.
Faire en sorte que la date du 8 novembre 2000 soit une date historique pour la
communauté arménienne : voilà notre objectif.
C'est pour toutes ces raisons que je pense non pas qu'il faille adopter la
motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité que notre éminent
collègue, M. Delong, nous a proposée, mais au contraire qu'il faut la
repousser.
Pour ma part, je m'inspirerai largement de la déclaration très modérée de
notre collègue M. Pelletier par laquelle il a exprimé, en fait, le sentiment de
la quasi-totalité d'entre nous, reconnaissons-le, en faveur de la
reconnaissance de ce génocide prouvé historiquement. C'est l'histoire ! Et il
faudrait aussi que le Parlement le dise, que le Sénat le dise.
Je suis convaincu que le Sénat de la République va s'honorer ce matin en
votant justement la proposition de notre collègue M. Pelletier.
(Applaudissements sur certaines travées des Républicains et Indépendants, du
RPR, de l'Union centriste et du RDSE, ainsi que sur les travées socialistes et
sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement
du Sénat, la parole peut être accordée pour explication de vote pour une durée
n'excédant pas cinq minutes à un représentant de chaque groupe.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, quel
étonnement et quelle stupeur d'entendre ce matin s'opposer à la demande de
discussion immédiate, puis défendre une motion tendant à opposer l'exception
d'irrecevabilité pour éviter la reconnaissance du génocide perpétré en 1915
contre le peuple arménien.
M. Alain Dufaut.
Elle n'a rien compris !
M. Jacques-Richard Delong.
Vous n'avez rien compris et vous mentez, madame !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Cette motion apparaît en totale contradiction avec l'unanimité qui s'est
exprimée à l'Assemblée nationale, où tous les groupes, sans exception, ont voté
la proposition de loi. Votre motion apparaît en négation de l'histoire qui a vu
1,5 million d'Arméniens assassinés parce que précisément Arméniens.
(Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. Henri de Raincourt.
C'est faux ! Arrêtez de mentir !
M. Jacques-Richard Delong.
Mensonge !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Etonnante oui, parce que j'étais présente lorsque, le 27 avril dernier, ici,
au Sénat, au cours d'une séance de questions d'actualité au Gouvernement, M.
Adrien Gouteyron, s'exprimant au nom de son groupe, déclarait : « Les
manifestations de la communauté arménienne de France doivent susciter sur
l'ensemble de nos travées non seulement la compréhension mais également le
respect. Ces 450 000 de nos compatriotes ont un vrai devoir de mémoire à
remplir, devoir que nous devons assumer avec eux pour que ne sombre pas dans
l'oubli le souvenir de ces événements tragiques. » Le
Journal officiel
précise même : « Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE
».
M. René-Pierre Signé.
Intéressant !
M. Henri de Raincourt.
Et la gauche ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Votre motion, monsieur Delong, est moralement condamnable, d'autres que moi
l'ont dit tout à l'heure. Elle se fonde sur le refus de reconnaissance d'un
fait historique ayant conduit au massacre - faut-il le répéter ? - de 1,5
million de personnes, laissant 600 000 survivants dont nombre d'entre eux ont
rejoint notre pays et dont les descendants sont français.
M. Dominique Braye.
Ils ne sont pas allés à Moscou, c'est sûr !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Cette motion est faite d'illusion et de perversité politique. Comment
pourrait-on admettre que le refus de la reconnaissance du génocide arménien
puisse valoriser l'Etat turc et lui permettre de rejoindre dans sa conception
démocratique la Communauté européenne ? C'est la reconnaissance du génocide,
liée à son devoir de mémoire, qui pourrait donner à l'Etat turc une autorité
fondée sur des valeurs démocratiques.
M. Jacques-Richard Delong.
Madame, ne parlez pas de démocratie, vous ne savez pas ce que c'est !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Si votre motion était adoptée, vous porteriez la responsabilité d'isoler la
France dans le contexte international.
Faut-il rappeler que de nombreux Etats ont également reconnu ce génocide ?
M. Hilaire Flandre.
La Russie ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je ne citerai que l'Italie et l'Uruguay dans la dernière période, rappelant
que d'autres s'apprêtent à le faire.
M. Jacques-Richard Delong.
Et le KGB ?
(Protestations sur les travées socialistes ainsi que sur celles
du groupe communiste républicain et citoyen.)
Si vous n'êtes pas contents,
c'est pareil !
M. Hilaire Flandre.
Et la Chine ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Si votre motion était votée, vous ne créeriez que des complications nouvelles
contraires à un règlement du processus de réconciliation à l'oeuvre dans le
Caucase du Sud.
Par votre motion, vous voulez accréditer l'idée que notre Constitution
n'autoriserait pas le Parlement à qualifier l'histoire.
M. Henri de Raincourt.
C'est vrai !
M. Hilaire Flandre.
C'est un fait.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Dois-je vous le rappeler, si, effectivement, la vérité historique ne peut pas
être déterminée par la loi, le Conseil constitutionnel a admis que les
parlementaires s'étaient vu accorder une compétence de reconnaissance de
l'histoire. L'argument d'irrecevabilité se fondant sur l'inconstitutionnalité
apparaît sans fondement, d'autant plus que la Constitution de 1958 enrichie du
préambule de celle de 1946 et de la Déclaration des droits de l'homme de 1789,
le permet.
L'article 34 de la Constitution habilite le Parlement à déterminer les
principes fondamentaux de son intervention. Ce ne serait en tout cas pas la
première fois, d'autres collègues l'ont dit avant moi, que le Sénat, comme
l'Assemblée nationale, adopterait ce type de disposition législative à
caractère historique. C'est le cas, par exemple, de la loi du 10 juillet 2000,
instaurant une journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes
et antisémites de l'Etat français et d'hommage aux Justes de France.
Fallait-il, au nom du principe que les auteurs de la motion tentent d'édicter,
refuser une telle proposition de loi ? Peu ici, vous le savez, en sont
persuadés.
Nous avons eu également un important débat sur l'abolition de l'esclavage, à
l'occasion de son 150e anniversaire dans notre pays. Fallait-il également
refuser une telle discussion ?
La reconnaissance d'un génocide exprime la primauté du principe de protection
de la dignité humaine. Vous ne pouvez pas vous appuyer sur des obstacles
juridiques. Votre motion est bien l'expression de considérations politiques.
Je crois pouvoir affirmer que le chef de l'Etat, même s'il ne juge pas
souhaitable l'inscription de la proposition de loi à l'ordre du jour du Sénat,
ne rejette cependant pas la possibilité d'une intervention législative en la
matière. L'exécutif n'a nullement usé de ses moyens institutionnels pour
sanctionner ou prévenir une immixtion législative dans sa « chasse gardée », M.
le ministre nous l'a redit ce soir.
L'Assemblée nationale a estimé, dans un jugement pacifiste, que la
reconnaissance du génocide était condition de paix dans cette région du monde.
Votre motion ne vise-t-elle pas, en fait, objectivement, à calmer les menaces
économiques proférées par l'Etat turc ?
Vous l'avez compris, mes chers collègues, le groupe communiste républicain et
citoyen ne votera pas la motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité,
et souhaite que le Sénat la rejette, répondant ainsi à l'attente des 400 000
Français d'origine arménienne qui espèrent en la vérité de l'histoire et en
appellent au respect des valeurs de leur pays.
(Applaudissements sur les
travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées
socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Chabroux.
M. Gilbert Chabroux.
M'exprimant au nom de mes collègues socialistes, je voudrais expliquer notre
opposition à la motion d'irrecevabilité présentée par M. Jacques-Richard
Delong, pour pouvoir, ensuite, voter la reconnaissance du génocide arménien.
Le 21 mars dernier, en présentant la demande de discussion immédiate de cette
proposition de loi, j'exprimais l'émotion que je ressentais, l'émotion que nous
étions nombreux à ressentir en pensant à nos compatriotes d'origine arménienne
qui avaient l'espoir que nous allions enfin reconnaître le génocide de 1915.
Ce soir, j'exprime la même émotion. Nous avons franchi un pas en acceptant de
discuter de cette proposition de loi. Il y a eu une réelle évolution. Des
obstacles paraissent levés. L'espoir est plus grand. Nous devrions enfin
aboutir et adopter ensemble ce texte.
Pourquoi la Haute Assemblée ne pourrait-elle pas faire ce qu'a fait
l'Assemblée nationale, à l'unanimité ?
Sur une telle question, les clivages politiques n'ont pas de sens. Il s'agit
d'un problème de conscience, et chacun d'entre nous connaît la vérité, la
réalité historique. Nous avons tous été sensibles à l'action qui a été menée
par nos compatriotes d'origine arménienne par leurs associations, par tous
leurs amis et par les militants des droits de l'homme.
Sans haine, mais avec la force qui est celle de la vérité irrépressible, ils
ont mené, ils mènent encore un très beau combat, celui de l'honneur et de la
justice. Il fallait ce combat pour honorer le devoir de mémoire à l'égard des
victimes du génocide.
Les deux arguments principaux qui ont été avancés pour ne pas reconnaître le
génocide arménien paraissent bien faibles au regard de la responsabilité morale
qui est la nôtre. D'abord, il n'appartiendrait pas à la loi de « qualifier »
l'histoire. Mais le texte de la Constitution ne contient pas une telle
interdiction. Et le 23 mars, le Sénat a adopté à l'unanimité une loi
reconnaissant à l'esclavage et à la traite négrière la qualification de crime
contre l'humanité. Il faudrait citer aussi la loi Gayssot, qui permet de lutter
contre la négation des crimes commis par la barbarie nazie. On peut regretter
que cette loi ne soit pas étendue au cas arménien, comme aux autres
génocides,...
Un sénateur du RPR.
Au cas soviétique !
M. Gilbert Chabroux.
... comme aux autres crimes contre l'humanité. En tout cas, la reconnaissance
d'un génocide constitue une réponse au phénomène négationniste.
Quant à l'argument selon lequel débattre du génocide arménien ne servirait
qu'à raviver les haines et à contrarier le processus de réconciliation dans les
Etats du Caucase du Sud, nous savons tous que c'est le contraire qui est vrai.
C'est la reconnaissance du génocide qui permettra de mettre en oeuvre un
véritable processus de paix.
Je voudrais reprendre les propos que tenait, ici, à cette tribune, M.
Jean-Jack Queyranne, à l'occasion de l'adoption de la loi sur l'esclavage : «
il n'y a pas de possibilité de construire un avenir avec les peuples qui ont
été opprimés, détruits dans leur chair et dans leur culture si on ne se résout
pas à assumer l'histoire. Il n'y a pas de justice ni de paix sans vérité. »
Il est très vraisemblable que nous n'aurions pas à voter le texte qui nous est
soumis et à reconnaître l'histoire si les responsables du génocide arménien ou
leurs descendants avaient fait oeuvre de reconnaissance au lieu de s'enfermer
dans le silence ou la négation.
La reconnaissance du génocide arménien doit s'accompagner de la dénonciation
du gouvernement turc de l'époque, comme nous le faisons pour la responsabilité
de l'Allemagne nazie dans la Shoah. Ce n'est pas faire preuve d'ostracisme
envers le peuple turc, dont il convient, au contraire, d'aider le cheminement
vers un Etat pleinement démocratique. La démocratie ne peut s'accommoder de la
négation du passé. Et puisque la France assure la présidence de l'Union
européenne, nous devons dire à la Turquie que l'Europe est avant tout un
système de valeurs qui l'emporte sur les rapports de forces et que, pour en
faire partie, il faut assumer son histoire.
Mes chers collègues, le XXe siècle s'achève. Nous allons en dresser le bilan.
Il est, pour une large part, horrible : deux guerres mondiales, les
abominations auxquelles ont conduit le racisme et le fascisme,...
M. Henri de Raincourt.
Et le communisme !
M. Dominique Braye.
Le communisme, ce sont plus de 80 millions de morts !
M. Gilbert Chabroux.
... des génocides, le premier d'entre eux ayant été le génocide arménien qui
précédait de vingt-cinq ans celui du peuple juif, la Shoah, et combien d'autres
ensuite, vous l'avez dit. Il est juste temps, avant d'aborder un nouveau
siècle, de savoir reconnaître ces atrocités pour ce qu'elles ont été. La
reconnaissance du génocide des Arméniens a valeur de prévention. Le chemin sera
encore long pour construire un monde qui devrait être celui de la paix, de la
solidarité et de la fraternité.
Mais, cette date du 8 novembre 2000, au Sénat, restera, ainsi que l'a dit M.
Jean-Claude Gaudin une étape importante. D'abord, il nous faut rejeter la
motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité. Ensuite, c'est avec une
grande émotion et beaucoup d'espoir que mes collègues du groupe socialiste et
moi-même voterons la proposition de loi relative à la reconnaissance du
génocide arménien.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur
celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix la motion n° 3, tendant à opposer l'exception
d'irrecevabilité.
Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet de la
proposition de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Nombre de votants | 234 |
Nombre de suffrages exprimés | 229 |
Majorité absolue des suffrages | 115 |
Pour l'adoption | 58 |
Contre | 171 |
Le Sénat n'a pas adopté. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur quelques travées de l'Union centriste. - Mme Nelly Olin applaudit également.)
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. - La France reconnaît publiquement le génocide arménien de 1915. »
Par amendement n° 1 rectifié
ter
, MM. Huriet, de Broissia, Autain,
Badré, Darcos, Esneu, Haenel, Herment, Lauret, Lanier, Mathieu, Poirier et
Vasselle proposent de compléter
in fine
cet article par les mots : «
ainsi que les génocides intervenus depuis lors ».
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 4, présenté par MM. Braye,
Vial, Martin, César, Gélard, Flandre et Lassourd, et tendant, dans le texte
proposé par l'amendement n° 1 rectifié
ter
pour compléter cet article,
après les mots : « ainsi que », à insérer les mots : « tous ».
La parole est à M. Huriet, pour présenter l'amendement n° 1 rectifié
ter
.
M. Claude Huriet.
Je souligne la diversité des cosignataires de cet amendement : elle reflète le
souci de consensus qui s'est exprimé à travers les cosignatures de la
proposition de loi de notre collègue M. Jacques Pelletier.
Je souligne aussi la simplicité de la rédaction et la clarté de l'objet.
Finalement, mes chers collègues, cet amendement vise à mettre en conformité le
texte que nous allons adopter dans un instant avec la plupart des déclarations
que nous avons entendues au cours de cette nuit.
En effet, plusieurs d'entre vous ont fait référence au premier génocide du xxe
siècle, que nous avons à reconnaître à travers cette proposition de loi, mais
la plupart d'entre vous ont assorti cette constatation d'une remarque selon
laquelle le premier des génocides du xxe siècle a été, hélas ! suivi d'autres
génocides, que personne, à l'heure actuelle, ne peut contester. Aussi nous
paraît-il légitime d'assortir les considérations concernant le génocide du
peuple arménien de l'hommage et de la reconnaissance que nous devons aux
victimes d'autres génocides qui se sont perpétrés au cours du xxe siècle.
Tel est l'objet de cet amendement que nous espérons voir adopté. Monsieur
Gaudin, votre argument selon lequel on pourrait traiter ultérieurement des
autres génocides n'est pas valable. Vous avez dit - et cette formulation m'a
fait un peu de peine - qu'il fallait nous concentrer aujourd'hui sur le drame
subi voilà quatre-vingt-cinq ans par le peuple arménien car celui-ci le mérite.
Permettez-moi de vous dire, mon cher collègue, que les autres peuples qui ont
été victimes au cours des dernières années de génocides aussi affreux méritent
aussi notre attention et notre respect.
(Applaudissements sur plusieurs
travées de l'Union centriste et du groupe du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Braye, pour défendre le sous-amendement n° 4.
M. Dominique Braye.
La nuit que nous vivons aujourd'hui est particulièrement importante et
solennelle et en appelle à la conscience de chacun d'entre nous. Notre présence
d'ailleurs, aussi nombreuse dans l'hémicycle à une heure aussi tardive, le
prouve à l'évidence. Le sous-amendement que je vous présente a simplement pour
objet d'ajouter le mot « tous » afin que l'amendement n° 1 rectifié
ter
vise bien à la reconnaissance de tous les génocides perpétrés depuis le
génocide arménien au cours du xxe siècle.
Pourquoi cette précision ? Parce qu'il me semble impossible de choisir de
reconnaître, et donc, implicitement, de condamner spécifiquement, un génocide
plutôt que d'autres. L'horreur ne se divise pas, pas plus qu'elle ne se
hiérarchise.
Notre indignation et notre réprobation, mes chers collègues, ne sauraient donc
en aucun cas être sélectives.
Je fais partie de ceux de mes collègues, très nombreux, qui n'étaient pas
favorables à l'inscription à l'ordre du jour de nos travaux de cette
proposition de loi. Il est évident que la reconnaissance du génocide arménien
de 1915 ne relève pas de notre compétence. Ce n'est pas le rôle du Parlement
français que de voter des lois visant à commenter des drames historiques
survenus dans des pays étrangers
(Exclamations sur les travées
socialistes.)
...
M. René-Pierre Signé.
Déjà dit !
M. Dominique Braye.
... et n'impliquant en aucune façon la responsabilité de la France. De même,
nous savons que ce texte est anticonstitutionnel. C'est bien pourquoi j'ai voté
la motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité, présentée par notre
collègue M. Jacques-Richard Delong.
(Nouvelles exclamations sur les mêmes
travées.)
Cela ne veut évidemment pas dire, mes chers collègues, et ce
serait malhonnête de le prétendre, que je nie la réalité des souffrances
endurées par le peuple arménien lors du génocide de 1915.
Mme Hélène Luc.
Alors, votez la proposition de loi !
M. Dominique Braye.
Dans notre assemblée, personne ne conteste les faits, plusieurs orateurs l'ont
dit aujourd'hui à la tribune. La vague d'immigration arménienne que nous avons
connue en France à cette époque, comme d'autres pays, est évidemment
consécutive à l'exode massif des Arméniens qui ont fui les persécutions dont
ils faisaient l'objet sur leur terre natale.
M. René-Pierre Signé.
On l'a déjà dit !
M. Dominique Braye.
Mais je persiste à penser que c'est le rôle des Arméniens eux-mêmes
d'entretenir la mémoire de ce génocide, que c'est aussi le rôle des historiens
de relater cette sombre page de l'histoire et que c'est également le rôle des
Nations unies de condamner ce type de crime.
En effet, une fois encore, pourquoi le Parlement français devrait-il légiférer
pour reconnaître les génocides de l'histoire du monde entier ?
Cela étant, le processus étant engagé, nous devons maintenant adopter une
position pragmatique et de bon sens. Puisque cette proposition de loi est
désormais en discussion et puisqu'elle a des chances d'être adoptée, alors que
notre position soit équitable, cohérente, raisonnable et, surtout, respectueuse
de la condition humaine !
Après la reconnaissance du génocide arménien, allons-nous ensuite reconnaître
successivement un par un - comme nous le proposait d'ailleurs notre collègue M.
Gaudin - chacun des terribles génocides du xxe siècle commis sur tous les
continents, sous chacun des types de dictature possible et imaginable, à
l'encontre de tous les groupes humains persécutés, qu'ils soient des nations,
des peuples, des ethnies, des minorités raciales ou religieuses ? Ce serait
bien évidemment impossible et utopique.
Puisque la Haute Assemblée souhaite reconnaître le génocide arménien, il est
impossible de ne pas reconnaître alors tous les génocides perpétrés depuis
1915.
Je n'imagine d'ailleurs pas qu'un seul Arménien puisse nous reprocher de nous
préoccuper de tous les génocides du xxe siècle.
(Exclamations sur les
travées socialistes.)
Comme je le disais précédemment, l'horreur ne se
divise pas mes chers collègues
(M. Signé s'exclame),
et toutes les
victimes de ces crimes ont subi des actes de barbarie similaires.
En effet, si l'extermination des Juifs et des Tziganes par les nazis, des
Tibétains par les Chinois, des Cambodgiens par les Khmers rouges ou des Tutsis
par les Hutus sont des cas ô combien dramatiques et horribles, nous ne devons
pas oublier que d'autres génocides monstrueux ont été commis contre d'autres
groupes humains, au nom de différentes idéologies dévoyées ou de fanatismes
aveugles.
Comment oublier, par exemple, qu'au nom de l'idéologie, 80 millions d'êtres
humains ont péri en Union soviétique...
M. René-Pierre Signé.
Cela fait bien cinq minutes qu'il parle !
Mme Hélène Luc.
Effectivement !
M. Dominique Braye.
... et 40 millions en Chine ?
M. le président.
Monsieur Braye, je vous prie de bien vouloir conclure !
M. Marcel Charmant.
Cela fait plus de cinq minutes qu'il parle !
M. Dominique Braye.
Je conclus, monsieur le président.
Je vous demande donc, mes chers collègues, de voter mon sous-amendement afin
que nous stigmatisions tous les génocides de ce siècle ô combien chargé
d'horreurs et d'exterminations.
Je sais que ceux d'entre nous qui ont souhaité voir la Haute Assemblée
reconnaître le génocide arménien de 1915 sont animés par une grande générosité
et une grande compassion envers les survivants et les enfants des survivants de
ce drame terrible, et je les comprends parfaitement.
Mais, je vous le demande solennellement, mes chers collègues : en toute
conscience, devons-nous reconnaître officiellement ce génocide
(M. Signé
s'exclame)
tout en passant sous silence tous les autres ?
M. Robert Bret.
Il recommence son discours !
M. Dominique Braye.
Si nous agissons de la sorte, nous insulterons la mémoire des centaines de
millions de victimes des autres génocides et la souffrance de leur descendance.
(Vives protestations sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Veuillez conclure, monsieur Braye !
M. Dominique Braye.
Si nous reconnaissons tant le génocide arménien que tous les autres génocides,
mes chers collègues, nous grandirons l'image de notre assemblée ; mais si nous
ne reconnaissons que le génocide arménien, nous la ternirons de façon durable.
Voilà pourquoi je vous demande de voter mon sous-amendement.
(Applaudissements sur certaines travées du RPR.)
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 1 rectifié
ter
et
sur le sous-amendement n° 4 ?
M. Xavier de Villepin,
président de la commission.
Le sous-amendement n° 4 comme l'amendement n°
1 rectifié
ter
, auquel il se rapporte, obéissent, c'est vrai, à la même
logique que celle qui anime les auteurs de la proposition de loi en
discussion.
Cela étant, et quelle que soit l'importance, que nul ne nie ici, des tragédies
humaines évoquées par l'amendement, je crois que l'on doit leur appliquer le
même raisonnement juridique que celui que j'ai tenu tout à l'heure sur la
proposition de loi elle-même : cela ne relève en aucun cas de la définition de
la loi, telle que l'exprime la Constitution.
Je demande donc à mes collègues et amis signataires de l'amendement et du
sous-amendement de bien vouloir m'en excuser, mais, en ce qui me concerne et en
toute logique avec ce que j'ai exposé précédemment, je ne pourrai voter ni
l'amendement ni le sous-amendement.
M. René-Pierre Signé.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne,
ministre des relations avec le Parlement.
Le Gouvernement s'en remet à la
sagesse de la Haute Assemblée sur l'amendement et sur le sous-amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 4.
M. Gérard Collomb.
Je demande la parole contre le sous-amendement.
M. le président.
La parole est à M. Collomb.
M. Gérard Collomb.
Notre collègue M. Braye a bien fait de prendre la parole sur son
sous-amendement, car cela montre ce qui risquerait de se produire si nous
votions l'amendement.
En effet, M. Braye a eu l'honnêteté de nous expliquer sa position : il est
contre la reconnaissance du génocide arménien. Etant donné qu'il a été battu,
il propose un amendement de diversion pour que, cette nuit, nous ne votions pas
la reconnaissance du génocide arménien mais que nous diluions notre vote dans
une espèce de non-dit.
M. Dominique Braye.
C'est un raisonnement fallacieux et malhonnête !
M. Hilaire Flandre.
C'est honteux !
M. Gérard Collomb.
En fait, il n'y aurait plus aucun sens au vote de cette nuit. C'est pourquoi
je me prononcerai contre le sous-amendement et contre l'amendement.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Yann Gaillard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard.
Je pense que nous sommes à un moment tout à fait décisif.
(Murmures sur les
travées socialistes.)
Un certain nombre d'entre nous ont été sensibles aux arguments juridiques,
lesquels me paraissent encore tout à fait fondés. Mais l'affaire est maintenant
close puisque le Sénat ne nous a pas suivis à cet égard. Nous sommes donc sur
le terrain non plus du droit - je m'en excuse auprès de M. le président de la
commission des affaires étrangères - mais de la morale et de l'histoire ! Le
Sénat a désiré s'inscrire dans l'histoire et, à partir du moment où il a pris
cette décision, il n'y pas de raison de se limiter à un génocide et de ne pas
parler des autres.
Je ne comprends vraiment pas qu'on parle de diversion quand il s'agit de
reconnaître des événements considérables qui ont souillé l'humanité pendant ce
siècle. C'est la même chose ! Pour ma part, je suis tout à fait prêt maintenant
à voter la reconnaissance du génocide arménien à condition que les autres
génocides, tels qu'ils ont été énumérés dans l'amendement de M. de Broissia,
soient également reconnus, et je ne comprendrais pas que tous nos collègues qui
ont avancé des arguments aussi émouvants pendant toute cette soirée renoncent
tout d'un coup à leur mission civilisatrice et historique pour ne plus parler
que d'une seule question.
(Protestations sur les travées socialistes et sur
celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
Mme Nicole Borvo.
C'est inacceptable !
M. Yann Gaillard.
Je vous assure que je suis franchement indigné par cette affaire !
Puisque le Sénat considère que les arguments juridiques ne sont pas fondés et
que nous avons été battus, je suis prêt à voter maintenant la reconnaissance du
génocide arménien ; mais pas seulement celui-là, les autres aussi ! C'est
pourquoi je voterai l'amendement n° 1 rectifié
ter
et le sous-amendement
n° 4.
Un sénateur du RPR.
Très bien !
M. Louis de Broissia.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. de Broissia.
M. Louis de Broissia.
J'ai entendu avec beaucoup d'intérêt les propos de notre collègue M. Collomb.
Il ne me fera pas le reproche qu'il adressait au sous-amendement, car j'ai dit
clairement dans mon intervention - et j'ai l'habitude d'aller au bout de ma
logique - que je soutenais la reconnaissance du génocide arménien, de son
horreur, et que je pensais que nous commettrions un oubli dramatique qui
entacherait, à mon sens, la solidité de l'argumentation du Sénat en ne
profitant pas de l'occasion pour reconnaître que, derrière le génocide
arménien, un grand nombre d'autres génocides se sont déroulés au cours du xxe
siècle. Cela a été reconnu par les Nations unies et l'annuaire du génocide
existe.
L'occasion nous est donnée de le reconnaître à notre tour, au travers d'un
amendement dont nous avons mesuré, avec Claude Huriet, le caractère
diplomatique. Ne voulant pas engager la France dans des conflits internationaux
- car nous avons aussi le sentiment de notre responsabilité dans le monde -,
nous avons écarté volontairement, dans le texte de notre amendement, les
génocides perpétrés pourtant aujourd'hui - nous le savons, c'est patent, c'est
prouvé - à l'encontre des Tibétains, des Tutsis, préférant, sans les
mentionner, dire que d'autres génocides ont eu lieu au cours du xxe siècle.
Cet amendement constitue simplement la confirmation du vote que le Sénat vient
d'émettre. Il ne faut pas dire que l'on a été pour ou contre : le Sénat a voté
la reconnaissance du génocide arménien, et c'est une bonne chose. Je m'en
réjouis, et je pense que, si nous voulons aujourd'hui, nous, sénateurs, par
rapport à une discussion qui a pris beaucoup de temps comparativement à
l'Assemblée nationale et que nous avons donc eu vocation à enrichir, tenir
compte de la fin de ce siècle au cours duquel nous allons nous prononcer, nous
avons l'occasion historique de reconnaître, avec beaucoup d'humilité, que le
xxe siècle a été un siècle de génocides.
Mme Nicole Borvo.
Il ne s'agit pas de cela !
M. Louis de Broissia.
Derrière le génocide arménien, il y a eu beaucoup d'autres génocides. Nous
sous-entendons que nous nous battrons, au cours du xxie siècle, pour qu'il n'y
en ait plus.
Mme Nicole Borvo.
Il ne s'agit pas de cela !
M. Louis de Broissia.
Je pense que l'amendement n° 1 rectifié
ter
que j'ai déposé avec Claude
Huriet répond à cette mission du Sénat.
Mme Nicole Borvo.
Il ne s'agit pas de cela !
M. Louis de Broissia.
L'occasion nous est présentée.
M. René-Pierre Signé.
C'est complètement défiguré !
M. Louis de Broissia.
Je peux vous dire que je le voterai, et je souhaite que ceux qui ne le
voteront pas n'aient pas honte, un jour, d'avoir agi ainsi.
M. René-Pierre Signé.
C'est complètement défiguré !
M. Philippe Adnot.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Adnot.
M. Philippe Adnot.
Etant favorable à la reconnaissance du génocide arménien, je voterai
l'amendement et le sous-amendement.
M. René-Pierre Signé.
Il n'a pas compris !
Mme Nicole Borvo.
Cela n'a rien à voir !
M. Philippe Adnot.
En effet, je souhaite que nous soyons à la fois pour cette reconnaissance du
génocide arménien et contre tous les génocides passés, présents et,
malheureusement, peut-être, à venir. Je pense que, pour terminer cette nuit,
nous devrions nous prononcer unanimement contre tous les génocides.
(Applaudissements sur certaines travées du RPR et de l'Union
centriste.)
Mme Nicole Borvo.
Nous sommes contre les génocides ! Il ne s'agit pas de cela ! Cela n'a rien à
voir !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 4, repoussé par la commission et pour
lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1 rectifié
ter
, repoussé par la
commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 2 rectifié
bis
, MM. Huriet, de Broissia, Autain,
Badré, Darcos, Esneu, Haenel, Herment, Lauret, Lanier, Mathieu, Poirier et
Vasselle proposent de rédiger comme suit l'intitulé de la proposition de loi
:
« Proposition de loi relative à la reconnaissance de génocides, survenus au
xxe siècle. ».
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 5, présenté par MM. Braye,
Vial, Martin, César, Gélard, Flandre et Lassourd, tendant, dans le texte
proposé par l'amendement n° 2 pour l'intitulé de la proposition de loi, après
les mots : « reconnaissance de », à insérer les mots : « tous les ».
Cet amendement et ce sous-amendement n'ont plus d'objet.
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'article unique de la proposition de loi, je donne
la parole à Mme Luc pour explication de vote.
Mme Hélène Luc.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans la vie
d'un Parlement, il est des décisions qui s'inscrivent à jamais dans l'histoire
des sociétés.
M. Dominique Braye.
Oui ! Il faut condamner tous les génocides !
Mme Hélène Luc.
Aujourd'hui, le Sénat, deux ans et demi après l'Assemblée nationale,...
M. Dominique Braye.
Vous faites de la morale, mais il y a eu 80 millions de morts en URSS !
M. Hilaire Flandre.
C'est une honte !
M. le président.
Laissez parler Mme Luc !
Mme Hélène Luc.
... le Sénat, disais-je, va donc à son tour consacrer par son vote un acte
majeur de mémoire et de vérité.
M. Dominique Braye.
Allons donc !
Mme Hélène Luc.
Nous avons en effet le pouvoir, au nom des citoyens français que nous
représentons, de faire de notre pays l'un de ceux qui met solennellement et
institutionnellement un terme à plus de 85 années d'occultation...
M. Patrick Lassourd.
Il y a eu 80 millions de morts en URSS !
Mme Hélène Luc.
... et de négation d'un événement parmi les plus tragiques de l'histoire du
xxe siècle.
La nuit du 24 avril 1915 a marqué le début d'une vaste opération
d'extermination du peuple arménien.
M. Dominique Braye.
Et l'extermination rouge ?
Mme Hélène Luc.
Quatre-vingt-cinq ans ont taraudé les générations successives et taraudent
toujours et toujours les membres des familles de la communauté arménienne
meurtrie et entravée dans son travail d'élucidation, de reconnaissance, de
deuil et de justice, meurtrie et entravée dans la nécessaire construction de
son histoire et de son identité personnelle, familiale et nationale.
Nous sommes nombreux, j'en suis convaincue, au-delà des contradictions et des
blocages qui ont jalonné ces deux dernières années d'organisation du débat au
Sénat, à avoir été impressionnés par l'intensité de la souffrance qui perdure
dans l'intimité de la mémoire de chacun des citoyens arméniens vivant sur notre
sol.
Ce sol où, ne l'oublions pas, des Français d'origine arménienne à qui nous
devons tant, célèbres comme Missak Manouchian, l'un des héros de
L'Affiche
rouge
, ou d'autres moins connus que lui, versèrent leur sang pour faire
vivre la France et les valeurs d'universalité, d'humanisme et de liberté, ce
sol où les Arméniens sont nombreux à contribuer aux richesses de la France dans
les domaines artistique, médical, artisanal ou parmi les ouvriers qualifiés.
A travers le mouvement puissant et acharné de leurs associations
représentatives, à travers les témoignages émouvants et empreints d'une grande
dignité qu'ils nous ont adressés, les membres de la communauté arménienne ont
su porter la juste cause et l'indispensable revendication de la reconnaissance
officielle du génocide de 1915.
Ils ont su nous rappeler que le devoir de mémoire et de vérité, pour un grand
pays comme le nôtre, loin d'affaiblir celui-ci, au contraire, le confortera
dans la fidélité à ses valeurs, le renforcera dans son combat permanent pour la
défense des droits de l'homme.
M. Hubert Falco.
Allez ! C'est terminé !
Mme Hélène Luc.
La France, dès lors qu'elle aura honoré l'histoire en initiant cet acte fort,
n'en sera que mieux à même de jouer par la suite un rôle moteur dans la
recherche de relations pacifiées et durables entre les peuples turc et
arméniens.
M. Hubert Falco.
Arrêtez-la !
Mme Hélène Luc.
La communauté internationale saura alors, j'en suis persuadée, nous accorder
toute sa considération pour l'attitude constructive que notre pays aura prise à
l'égard de la tragédie de 1915.
Le débat de ce jour, à travers les interventions prononcées, à l'instar de
celles de mes amis Robert Bret et Guy Fischer, au nom du groupe communiste
républicain et citoyen, a rappelé des faits historiques incontestables et le
bien-fondé de la proposition de loi que nous allons voter.
Je ne veux retenir ce soir que les propos forts que nous avons entendus et qui
ont pour moi, pour tous les sénateurs du groupe communiste républicain et
citoyen, une résonance particulière, comme c'est le cas, je n'en doute pas,
pour ceux qui, sur plusieurs travées de cette assemblée, n'ont ménagé ni leurs
efforts ni leur volonté d'aboutir pour convaincre, rassembler et rechercher un
assentiment majoritaire.
M. le président.
Madame la présidente, veuillez conclure. Vous avez déjà dépassé votre temps de
parole.
Mme Hélène Luc.
Relayant le travail inlassable de Guy Ducoloné, député des Hauts-de-Seine, qui
a déposé une proposition de loi en 1965, je me suis, en tant que présidente du
groupe communiste républicain et citoyen et avec tous les sénateurs qui le
composent, engagée aux côtés des Arméniens, avec notamment le comité du 24
avril et son président, M. Govcyan, et avec toutes les associations qui ont
conduit une action persévérante et remarquable.
M. Hubert Falco.
Monsieur le président, arrêtez-la !
M. le président.
Madame Luc, je vous prie de conclure !
Mme Hélène Luc.
J'ai en particulier en mémoire les puissantes manifestations du 11 mars, la
marche du 24 avril à Alfortville, ainsi que la marche de Matignon au Sénat, le
18 juin dernier, où nous étions présents.
L'engagement pris d'aller jusqu'au bout pour obtenir cette reconnaissance a
été tenu, malgré les pressions, malgré les manoeuvres de dernière minute.
(Protestations sur certaines travées des Républicains et Indépendants et du
RPR.)
M. Hubert Falco.
Même vos collègues n'en peuvent plus, arrêtez-vous !
Mme Hélène Luc.
Je me suis employée, à l'occasion de onze conférences des présidents...
M. le président.
Madame Luc, c'est terminé !
Mme Hélène Luc.
... à faire inscrire ce texte à l'ordre du jour de notre assemblée.
M. Hubert Falco.
Monsieur le président, coupez-lui la parole ! C'est insupportable !
Mme Hélène Luc.
Quelques minutes encore !
M. Hubert Falco.
Non !
Mme Hélène Luc.
Concluons dans la dignité !
M. le président.
C'est à vous de conclure, madame !
M. Hubert Falco.
Vous êtes ridicule, avec vos papiers à la main !
Mme Hélène Luc.
Je souhaite qu'un jour la Turquie reconnaisse aussi ce génocide, et je
voudrais saluer les Arméniens et leurs représentants qui sont présents dans nos
tribunes.
(Protestations sur les travées des Républicains et Indépendants et
du RPR.)
M. le président.
Madame Luc, je vous remercie. C'est terminé !
M. Hubert Falco.
On ne vous écoute plus !
Mme Hélène Luc.
Une dernière chose : je veux appeler solennellement aujourd'hui les sénatrices
et les sénateurs à voter cette proposition de loi, cosignée par cinq groupes
politiques.
M. Hubert Falco.
Vous allez nous faire regretter de l'avoir votée. Arrêtez-vous !
Mme Hélène Luc.
Cette prise de position honorera le Sénat et démontrera le respect que nous
avons de la souffrance des Arméniens.
(Applaudissements sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Claude Huriet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet.
Je tiens à exprimer les raisons pour lesquelles, avec regret, je voterai
contre cette proposition de loi.
Au-delà de la déception que peut éprouver tout auteur d'un amendement qui n'a
pas été adopté, les conditions dans lesquelles ce vote est intervenu montrent à
l'évidence que la recherche de consensus n'était pas, mes chers collègues,
votre préoccupation essentielle...
M. Hubert Falco.
Très bien !
M. Claude Huriet.
... et qu'en refusant de reconnaître les autres génocides vous avez introduit
une sorte de sélection qui vous amène à constater qu'il y a des génocides qui
sont acceptables pour la conscience universelle et d'autres qui ne le sont
pas.
C'est contre cette analyse tout à fait sommaire et politicienne que je veux
émettre un vote négatif.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique de la proposition de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu).
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Nombre de votants | 208 |
Nombre de suffrages exprimés | 204 |
Majorité absolue des suffrages | 103 |
Pour l'adoption | 164 |
Contre | 40 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur certaines travées socialistes, sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur certaines travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
9
COMMUNICATION DE L'ADOPTION DÉFINITIVE
DE TEXTES SOUMIS EN APPLICATION-DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre une communication,
en date du
2 novembre 2000, l'informant de l'adoption définitive de treize textes soumis
en application de l'article 88-4 de la Constitution suivants :
E 934. - Proposition de directive du Conseil relative aux véhicules hors
d'usage, adoptée le 18 septembre 2000 ;
E 1158. - Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil
concernant l'accès à l'activité des institutions de monnaie électronique et son
exercice, ainsi que la surveillance prudentielle de ces institutions.
Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la
directive 77/780/CEE visant à la coordination des dispositions législatives,
réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des
établissements de crédits et son exercice, adoptée le 18 septembre 2000 ;
E 1191. - Proposition de directive du Conseil modifiant la directive
77/388/CEE en ce qui concerne la détermination du redevable de la taxe sur la
valeur ajoutée, adoptée le 17 octobre 2000 ;
E 1284. - Proposition de décicison du Conseil relative au système des
ressources propres de l'Union européenne, adoptée le 29 septembre 2000 ;
E 1291. - Proposition de décision du Conseil concernant la conclusion de
l'amendement au protocole de Montréal relatif à des substances qui
appauvrissent la couche d'ozone, adoptée le 17 octobre 2000 ;
E 1453. - Initiative de la République portugaise en vue de l'adoption d'une
décision du Conseil portant création d'un secrétariat pour les autorités de
contrôle communes chargées de la protection des données, instituées par la
convention portant création d'un office européen de police (convention
Europol), la convention sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des
douanes et la convention d'application de l'accord de Schengen relatif à la
suppression graduelle des contrôles aux frontières communes : actes législatifs
et autres instruments, adoptée le 17 octobre 2000 ;
E 1463 : annexe 2. - Avant-projet de budget rectificatif et supplémentaire n°
2/2000, section 1 : Parlement ; section III : Conseil, adopté suite à l'arrêt
définitif signé par le président du Parlement européen le 6 juillet 2000 ;
E 1495. - Proposition de règlement (CE) du Conseil modifiant le règlement (CE)
n° 384/96 relatif à la défense contre les importations qui font l'objet d'un
dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne, adoptée le
9 octobre 2000 ;
E 1530. - Proposition de règlement du Conseil établissant certaines
concessions sous forme de contingents tarifaires communautaires pour certains
produits agricoles et prévoyant l'adaptation autonome et transitoire de
certaines concessions agricoles prévues dans l'accord européen avec la
République tchèque, adoptée le 17 octobre 2000 ;
E 1533. - Proposition de règlement du Conseil établissant certaines
concessions sous forme de contingents tarifaires communautaires pour certains
produits agricoles et prévoyants, l'adaptation autonome et transitoire de
certaines concessions agricoles prévues dans l'accord européen avec la
République slovaque, adoptée le 17 octobre 2000 ;
E 1534. - Proposition de règlement du Conseil établissant certaines
concessions sous forme de contingents tarifaires communautaires pour certains
produits agricoles et prévoyant l'adaptation autonome et transitoire de
certaines concessions agricoles prévues dans l'accord européen avec la
Lettonie, adoptée le 17 octobre 2000 ;
E 1535. - Proposition de règlement du Conseil établissant certaines
concessions sous forme de contingents tarifaires communautaires pour certains
produits agricoles et prévoyant l'adaptation autonome et transitoire de
certaines concessions agricoles prévues dans l'accord européen avec la
Roumanie, adoptée le 17 octobre 2000 ;
E 1536. - Proposition de règlement du Conseil établissant certaines
concessions sous forme de contingents tarifaires communautaires pour certains
produits agricoles et prévoyant l'adaptation autonome et transitoire de
certaines concessions agricoles prévues dans l'accord européen avec la
République de Bulgarie, adoptée le 9 octobre 2000.
10
DÉPOT D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de MM. Jacques Baudot, Louis de Broissia, Auguste Cazalet,
Marcel-Pierre Cléach, Hubert Durand-Chastel, Francis Giraud, Rémi Herment,
Bernard Joly, Lucien Neuwirth et Michel Pelchat une proposition de loi relative
à la décristallisation de la retraite du combattant des anciens combattants de
l'ex-Union française.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 66, distribuée et renvoyée à la
commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle
d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
11
TEXTES SOUMIS AU SÉNAT
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4
DE LA CONSTITUTION
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de règlement du Conseil portant organisation des marchés dans le
secteur du sucre.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1585 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de décision du Conseil concernant la conclusion de l'accord sous
forme d'échange de lettres relatif à l'application provisoire du protocole
fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues dans
l'accord entre la Communauté économique européenne et la République de Côte
d'Ivoire concernant la pêche au large de la Côte d'Ivoire, pour la période du
1er juillet 2000 au 30 juin 2003.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1586 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à
l'action des Etats membres en matière d'exigences de service public et à
l'attribution de contrats
de service public dans le domaine des transports de voyageurs par chemin de
fer, par route et par voie navigable.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1587 et distribué.
12
RENVOI POUR AVIS
M. le président. J'informe le Sénat que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, adopté par l'Assemblée nationale (n° 64, 2000-2001) dont la commission des affaires sociales est saisie au fond, est renvoyé pour avis, à sa demande, à la commission des finances du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
13
DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION
M. le président.
J'ai reçu de MM. Joseph Ostermann et Gérard Braun un rapport d'information
fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des
comptes économiques de la nation sur la situation, la gestion et les
rémunérations des personnels du ministère de l'emploi.
Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 65 et distribué.
14
DÉPÔT RATTACHÉS POUR ORDRE
AU PROCÈS-VERBAL
DE LA SÉANCE DU 31 OCTOBRE 2000
DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 2001, adopté par l'Assemblée
nationale.
Ce projet de loi sera imprimé sous le numéro 64, distribué et renvoyé à la
commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle
d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
TEXTE SOUMIS EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4
DE LA CONSTITUTION
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le texte suivant,
soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la
Constitution :
- Lettre rectificative numéro 2 à l'avant-projet de budget pour 2001 - partie
III - Commission.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1584 et distribué.
15
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée à aujourd'hui, mercredi 8 novembre 2000, à quinze heures et le soir :
Discussion du projet de loi n° 11 (2000-2001), adopté par l'Assemblée
nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'épargne salariale.
Rapport n° 63 (2000-2001) de M. Joseph Ostermann, fait au nom de la commission
des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la
nation.
Avis n° 61 (2000-2001), de M. Jean Chérioux, fait au nom de la commission des
affaires sociales.
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus
recevable.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Délai limite pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, adopté par
l'Assemblée nationale (n° 64, 2000-2001).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
lundi 13 novembre 2000, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : ouverture de la discussion
générale.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 8 novembre 2000, à cinq heures
vingt-cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES DU SÉNAT
établi par le Sénat dans sa séance du mardi 7 novembre 2000
à la suite des conclusions de la conférence des présidents
Mercredi 8 novembre 2000 :
Ordre du jour prioritaire
A
15 heures
et le soir :
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence,
relatif à l'épargne salariale (n° 11, 2000-2001) .
(Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
La conférence des présidents a fixé à trois heures la durée globale du temps
dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes
ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ; le délai limite pour les
inscriptions de parole dans la discussion générale est expiré.)
Jeudi 9 novembre 2000 :
A
9 h 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration
d'urgence, relatif à l'épargne salariale (n° 11, 2000-2001).
A
15 heures
et, éventuellement, le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de
la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3° Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration
d'urgence, relatif à l'épargne salariale (n° 11, 2000-2001).
Mardi 14 novembre 2000 :
A
9 h 30 :
1° Dix-huit questions orales (l'ordre d'appel des questions sera fixé
ultérieurement) :
- n° 892 de Mme Janine Bardou à M. le ministre de l'économie, des finances et
de l'industrie (Régime fiscal des micro-entreprises) ;
- n° 898 de M. Daniel Eckenspieller à M. le ministre de l'économie, des
finances et de l'industrie (TVA applicable au bois-énergie) ;
- n° 900 de M. Jean Besson à M. le secrétaire d'Etat au logement (Réforme de
l'aide personnalisée au logement) ;
- n° 904 de M. Robert Laufoaulu à M. le ministre de l'éducation nationale
(Enseignement des langues wallisienne et futunienne et place de
Wallis-et-Futuna dans la nouvelle organisation de l'enseignement supérieur dans
le Pacifique) ;
- n° 905 de M. Jean-Claude Carle à Mme le ministre de l'emploi et de la
solidarité (Réforme des aides à l'embauche de jeunes en contrat de
qualification) ;
- n° 906 de M. Bernard Cazeau transmise à Mme le ministre de l'emploi et de la
solidarité (Reconstitution de carrière des médecins sous contrat dans les
centres hospitaliers publics) ;
- n° 910 de M. Bernard Piras transmise à M. le ministre de l'intérieur
(Financement des réseaux de distribution d'eau potable) ;
- n° 911 de M. Philippe de Gaulle à M. le secrétaire d'Etat à la défense
chargé des anciens combattants (Fiscalité applicable aux retraites mutualistes
des anciens combattants) ;
- n° 913 de M. Joseph Ostermann à M. le ministre de l'intérieur (Financement
des services d'incendie et de secours) ;
- n° 914 de Mme Nicole Borvo à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité
(Ventes de terrains par l'Assistance publique de Paris) ;
- n° 915 de M. Guy Vissac à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche
(Reconstitution des forêts dévastées par la tempête de 1999) ;
- n° 917 de Mme Hélène Luc à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité
(Seuils de revenus donnant accès à la CMU) ;
- n° 918 de M. Jean-Marie Poirier à M. le ministre de l'intérieur (Contenu des
conventions de coordination policière) ;
- n° 921 de M. Jean Huchon à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité
(Fonctionnement des centres anticancéreux) ;
- n° 925 de M. Paul Girod à M. le ministre de l'équipement, des transports et
du logement (Création d'un troisième aéroport) ;
- n° 931 de M. Lucien Lanier à M. le ministre de l'intérieur (Petite
délinquance à Vincennes et à Saint-Mandé) ;
- n° 932 de M. Jean-Pierre Demerliat à M. le ministre de l'agriculture et de
la pêche (Transport du bois abattu par les tempêtes de fin 1999) ;
- n° 941 de M. Gérard César à Mme le secrétaire d'Etat à la santé et aux
handicapés (Situation du centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande).
Ordre du jour prioritaire
A
16 heures
et le soir :
2° Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, adopté par
l'Assemblée nationale (n° 64, 2000-2001).
(La conférence des présidents a fixé :
- à l'ouverture de la discussion générale, le délai limite pour le dépôt des
amendements à ce texte ;
- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la
discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la
liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les
inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17
heures, le lundi 13 novembre 2000.)
Mercredi 15 novembre 2000 :
Ordre du jour prioritaire
A
15 heures
et le soir :
Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, adopté
par l'Assemblée nationale (n° 64, 2000-2001).
Jeudi 16 novembre 2000 :
A
9 h 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001,
adopté par l'Assemblée nationale (n° 64, 2000-2001).
A
15 heures
et, éventuellement, le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de
la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3° Suite de l'ordre du jour du matin.
Mardi 21 novembre 2000 :
Ordre du jour réservé
A
10 h 30 :
1° Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi de M. Jean
Bizet et plusieurs de ses collègues tendant à moderniser le statut des sociétés
d'économie mixte locales (n° 455, 1999-2000).
(La conférence des présidents a fixé au lundi 20 novembre 2000, à 17
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)
A
16 heures :
2° Question orale avec débat n° 27 de M. Jean-Jacques Hyest à Mme le garde des
sceaux, ministre de la justice, sur la suite des conclusions de la commission
d'enquête du Sénat sur les conditions de détention dans les établissements
pénitentiaires.
(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du
règlement, la conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale
du temps dont disposeront dans le débat les orateurs des groupes ou ne figurant
sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les
inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17
heures, le lundi 20 novembre 2000.)
3° Question orale européenne avec débat n° QE 11 de M. Hubert Haenel à M. le
ministre de la défense sur l'état de la mise en place des instruments
politiques et militaires nécessaires à la gestion des crises.
(La discussion de cette question orale européenne s'effectuera selon les
modalités prévues à l'article 83
ter
du règlement.)
Le soir :
4° Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi de M.
Michel Dreyfus-Schmidt et plusieurs de ses collègues tendant à harmoniser
l'article 626 du code de procédure pénale avec les nouveaux articles 149 et
suivants du même code (n° 474, 1999-2000).
(La conférence des présidents a fixé au lundi 20 novembre 2000, à 17
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)
5° Conclusions de la commission des affaires culturelles (n° 387, 1999-2000)
sur la proposition de loi de M. Louis de Broissia modifiant la loi n° 57-32 du
10 janvier 1957 portant statut de l'Agence France-Presse (n° 368,
1999-2000).
(La conférence des présidents a fixé au lundi 20 novembre 2000, à 17
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)
Mercredi 22 novembre 2000 :
Ordre du jour prioritaire
A
15 heures
et, éventuellement, le soir :
1° Proposition de loi organique, adoptée par l'Assemblée nationale après
déclaration d'urgence, destinée à améliorer l'équité des élections à
l'assemblée de la Polynésie française (n° 439, 1999-2000).
(La conférence des présidents a fixé au mardi 21 novembre 2000, à 17
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)
2° Projet de loi organique modifiant les règles applicables à la carrière des
magistrats (n° 483, 1999-2000).
(La conférence des présidents a fixé au mardi 21 novembre 2000, à 17
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)
3° Projet de loi relatif à la résorption de l'emploi précaire et à la
modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu'au temps de
travail dans la fonction publique territoriale (urgence déclarée) (n° 20,
2000-2001).
(La conférence des présidents a décidé :
- de fixer au mardi 21 novembre 2000, à 17 heures, le délai limite pour le
dépôt des amendements à ce texte ;
- de limiter à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la
discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la
liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les
inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17
heures, le mardi 21 novembre 2000.)
Jeudi 23 novembre 2000 :
Ordre du jour prioritaire
A
9 h 30 :
1° Eventuellement, suite de l'ordre du jour de la veille.
A
11 heures,
à
15 heures
et, éventuellement, le soir :
2° Sous réserve de sa transmission, projet de loi de finances pour 2001 (AN,
n° 2585).
(Voir ci-après les règles et le calendrier de la discussion budgétaire du
jeudi 23 novembre 2000 au mardi 12 décembre 2000.)
*
* *
En outre :
Jeudi 30 novembre 2000 :
Ordre du jour prioritaire
A
16 heures :
Conclusions de la commission mixte paritaire ou nouvelle lecture du projet de
loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.
(La conférence des présidents a fixé au mercredi 29 novembre 2000, à 17
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte.)
Jeudi 7 décembre 2000 :
A
15 heures :
Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de
la séance avant 11 heures.)
Règles et calendrier de la discussion du projet de loi de finances pour 2001
(du jeudi 23 novembre 2000, à 11 heures, au mardi 12 décembre 2000)
Les modalités de discussion et la répartition des temps de parole sont fixées
comme suit :
1° Délais limites pour le dépôt des amendements :
La conférence des présidents a fixé les délais limites suivants pour le dépôt
des amendements :
- le
jeudi 23 novembre 2000,
à
11 heures,
pour les amendements
aux articles de la première partie du projet de loi ;
- la
veille du jour prévu pour la discussion,
à
17 heures,
pour
les amendements aux divers crédits budgétaires et aux articles rattachés ;
- le
vendredi 8 décembre 2000,
à
16 heures,
pour les
amendements aux articles de la deuxième partie non rattachés à l'examen des
crédits.
2° La répartition des temps de parole sera établie en fonction de la durée de
chaque discussion telle que celle-ci a été évaluée par la commission des
finances (le temps de discussion des crédits, articles rattachés et amendements
faisant, le cas échéant, l'objet d'une estimation et s'imputant sur le temps de
parole à répartir).
Les temps de parole dont disposeront les rapporteurs des commissions et les
groupes, ainsi que, le cas échéant, le président des commissions saisies pour
avis ou des délégations parlementaires, pour chacune des discussions prévues,
sont fixés comme suit :
a)
Les rapporteurs spéciaux de la commission des finances disposeront
de :
- quinze minutes pour les budgets dont la durée prévue pour la discussion
dépasse deux heures ;
- dix minutes pour les budgets dont la durée prévue pour la discussion est
inférieure ou égale à deux heures ;
- cinq minutes pour certains fascicules budgétaires ou budgets annexes.
b)
Les rapporteurs pour avis disposeront de :
- dix minutes pour les budgets dont la durée prévue pour la discussion dépasse
deux heures, ce temps étant réduit à cinq minutes pour les budgets sur lesquels
trois avis ou plus sont présentés ;
- cinq minutes pour les budgets dont la durée prévue pour la discussion est
inférieure ou égale à deux heures.
c)
Les groupes :
Le temps de parole des groupes sera réparti conformément aux règles suivantes
:
- pour chaque discussion, il sera attribué un temps forfaitaire de dix minutes
à chaque groupe et de cinq minutes à la réunion administrative des sénateurs ne
figurant sur la liste d'aucun groupe lorsque le temps global disponible sera au
moins égal à une heure trente, le reliquat étant réparti entre eux
proportionnellement à leurs effectifs ;
- lorsque le temps global disponible est inférieur à une heure trente, la
répartition s'effectuera uniquement en proportion des effectifs. Toutefois,
aucune attribution ne pourra être inférieure à cinq minutes.
Les résultats des calculs, effectués conformément à ces règles, seront
communiqués aux présidents des groupes et des commissions.
Les interventions éventuelles des présidents des commissions saisies pour avis
ou des délégations parlementaires s'imputeront sur le temps de parole de leur
groupe.
Dans le cadre du temps global imparti à chaque groupe, aucune intervention ne
devra dépasser dix minutes.
Par ailleurs, pour les explications de vote sur la première partie, il sera
attribué un temps de dix minutes à chaque groupe et un temps de cinq minutes à
la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe
; pour les explications de vote sur l'ensemble du projet de loi de finances, le
temps attribué à chaque groupe sera de dix minutes et celui attribué à la
réunion administrative sera de cinq minutes.
Dans le cadre d'une journée de discussion, chaque groupe ou la réunion
administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe pourra
demander le report du temps ou d'une partie du temps de parole qui lui est
imparti pour un budget à la discussion d'un autre budget inscrit le même jour,
en prévenant le service de la séance la veille avant 17 heures. Toutefois,
cette faculté ne pourra pas être utilisée pour les attributions de temps de
parole forfaitaires de cinq minutes affectées à la discussion de certains
budgets et pour les attributions minimales de cinq minutes.
3° Les inscriptions de parole devront être communiquées au service de la
séance :
- pour la discussion générale, le
mercredi 22 novembre 2000,
avant
17 heures ;
- pour les discussions portant sur les crédits de chaque ministère, la veille
du jour prévu pour la discussion, avant
17 heures.
En outre, la durée d'intervention de chacun des orateurs devra être
communiquée au service de la séance lors des inscriptions de parole.
En application de l'article 29
bis
du règlement, l'ordre des
interventions dans la discussion générale du projet de loi de finances et dans
les principales discussions portant sur les crédits des différents ministères
sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel il a été procédé au début
de la session.
*
* *
L'expérimentation d'une nouvelle formule de discussion
pour deux fascicules budgétaires
Pour la discussion de deux fascicules, Transports terrestres et Environnement,
sera expérimentée une nouvelle procédure fondée sur le principe d'une réponse
immédiate du Gouvernement aux différents intervenants, rapporteurs ou orateurs
des groupes.
Les orateurs des groupes interviendront pour chaque question pendant cinq
minutes maximum ; cette durée est fixée à trois minutes pour la réunion
administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe. La
réponse du Gouvernement sera limitée à trois minutes, chaque orateur disposant
d'un droit de réplique de deux minutes maximum.
Le nombre des questions sera réparti en fonction du principe de la répartition
proportionnelle des groupes politiques.
A N N E X E I
CALENDRIER DE LA DISCUSSION DU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2001
ADOPTÉ PAR LA CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS DU 7 NOVEMBRE 2000
DATE |
DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI |
DURÉE PRÉVUE |
---|---|---|
Jeudi 23 novembre 2000 |
||
A 11 heures, à 15 heures et, éventuellement, le soir. | Discussion générale | 6 heures |
Nota. - Délai limite pour le dépôt des amendements aux articles de la première partie à 11 heures. |
||
Vendredi 24 novembre 2000 |
||
A 15 heures. | Examen des articles de la première partie. | 5 heures |
Nota. - La commission des finances se réunira à 9 h 30 pour l'examen des amendements aux articles de la première partie. |
||
Lundi 27 novembre 2000 |
||
A 10 h 30, à 15 heures et le soir. | Examen des articles de la première partie (suite) | 9 h 30 |
Mardi 28 novembre 2000 |
||
A 9 h 30, à 15 heures et le soir. | Examen des articles de la première partie (suite) | 4 h 30 |
. | A 16 heures : débat sur les recettes des collectivités locales (examen des articles 5, 26 , 26 bis, 26 ter et 27) | 3 heures |
. | Examen des articles de la première partie (suite) | 3 h 30 |
Mercredi 29 novembre 2000 |
||
A 9 h 30, à 15 heures et, éventuellement, le soir. Nota. - L'examen des crédits relatifs au ministère des affaires européennes interviendra à l'occasion de l'examen de l'article 28. |
Examen de l'article 28 : évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes Examen des articles de la première partie (suite et fin) |
3 heures 8 heures |
. |
Eventuellement, seconde délibération sur la première partie. Explications de vote sur l'ensemble de la première partie. Scrutin public ordinaire de droit. |
|
Jeudi 30 novembre 2000 |
||
A 9 h 30, à 15 heures et le soir. |
A 9 h 30 et à 15 heures : Outre-mer |
4 heures |
. |
A 16 heures : CMP ou nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. |
|
. |
Le soir : Anciens combattants (+ articles 51 à 53) |
2 h 30 |
Vendredi 1er décembre 2000 |
||
A 9 h 30, à 15 heures et le soir. |
Equipement, transports et logement :
|
1 h 30 3 heures |
. |
III. - Transports et sécurité routière (*) : 1. Transports 2. Sécurité routière 3. Routes |
3 h 30 |
. |
4. Transport aérien et météorologie Budget annexe de l'aviation civile |
1 h 30 |
. |
IV. - Mer : - marine marchande - ports maritimes |
1 h 30 |
Samedi 2 décembre 2000 |
||
A 9 h 30, à 15 heures et le soir. | Jeunesse et sports | 2 heures |
. |
Emploi et solidarité : III. - Ville |
2 heures |
. |
Communication (crédits du Conseil supérieur de l'audiovisuel, d'aides à la presse et à l'audiovisuel inscrits au budget des services généraux du Premier ministre : article 46 et lignes 40 et 41 de l'état E annexé à l'article 42). |
|
. | Culture | 3 heures |
Lundi 4 décembre 2000 |
||
A 9 h 30, à 15 heures et le soir. |
Emploi et solidarité : I. - Emploi (+ articles 57 à 60) |
3 heures |
. | II. - Santé et solidarité (+ articles 54 à 56) | 4 heures |
. |
Services du Premier ministre : I. - Services généraux |
0 h 30 |
. | II. - Secrétariat général de la défense nationale | 0 h 15 |
. | III. - Conseil économique et social | 0 h 15 |
. | IV. - Plan | 0 h 30 |
. | Budget annexe des Journaux officiels | 0 h 10 |
. | Fonction publique et réforme de l'Etat | 1 h 30 |
Mardi 5 décembre 2000 |
||
A 9 h 30, à 15 heures et le soir. |
Aménagement du territoire et environnement : I. - Aménagement du territoire |
2 heures |
. | II. - Environnement (*) | 3 heures |
. | Affaires étrangères (et aide au développement) | 5 heures |
Mercredi 6 décembre 2000 |
||
A 9 h 30, à 15 heures et le soir. Nota. - La commission des finances se réunira à 14 heures pour examiner les articles non rattachés de la deuxième partie. |
Intérieur et décentralisation : Sécurité |
2 h 30 |
. | Décentralisation | 2 h 30 |
. |
Education nationale : I. - Enseignement scolaire |
3 h 30 |
. | II. - Enseignement supérieur | 2 h 30 |
Jeudi 7 décembre 2000 |
||
A 9 h 30, à 16 heures et le soir. Nota. - Questions d'actualité au Gouvernement de 15 heures à 16 heures. |
Agriculture et pêche (+ articles 49 et 50) | 5 heures |
. | Budget annexe des prestations sociales agricoles | 1 heure |
. | Défense | 4 h 30 |
. |
Exposé d'ensemble et dépenses en capital (article 34). Dépenses ordinaires (article 33). |
|
Vendredi 8 décembre 2000 |
||
A 10 heures, à 15 heures et le soir. Nota. - Délai limite pour le dépôt des amendements aux articles non rattachés de la deuxième partie à 16 heures. |
Charges communes Comptes spéciaux du Trésor (+ articles 37 à 41) |
1 h 30 |
. | Budget annexe des Monnaies et médailles | 0 h 10 |
. |
Economie, finances et industrie : Services financiers (et consommation) |
1 heure |
. | Industrie (et Poste) | 3 heures |
. | Petites et moyennes entreprises, commerce et artisanat | 2 heures |
. | Commerce extérieur | 1 heure |
. | Recherche | 2 heures |
Samedi 9 décembre 2000 |
||
A 10 heures et à 15 heures. |
Eventuellement, discussions reportées. |
|
Lundi 11 décembre 2000 |
||
A 9 h 30. | Budgets annexes de l'ordre de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération | 0 h 20 |
. | Justice (+ article 61) | 3 heures |
A 16 heures et le soir. | Articles de la deuxième partie non joints aux crédits | 6 h 30 |
Nota. - La commission des finances se réunira à 14 heures pour examiner les amendements aux articles non rattachés de la deuxième partie. |
||
Mardi 12 décembre 2000 |
||
A 10 heures, à 15 heures et le soir. |
Suite et fin de la discussion des articles de la deuxième partie non joints aux
crédits.
|
(*) Procédure expérimentale de questions et de réponses suivies d'un droit de réplique des auteurs de questions.
A N N E X E I I
DATES PRÉVISIONNELLES DES SÉANCES MENSUELLES RÉSERVÉES ET DES SÉANCES DE QUESTIONS DE NOVEMBRE 2000 À JUIN 2001
Novembre 2000
Jeudi 9 novembre,
à
15 heures :
questions d'actualité au
Gouvernement.
Mardi 14 novembre,
matin :
questions orales.
Jeudi 16 novembre,
à
15 heures :
questions d'actualité au
Gouvernement.
Mardi 21 novembre : séance mensuelle réservée.
Décembre 2000
Jeudi 7 décembre,
à
15 heures :
questions d'actualité au
Gouvernement.
Jeudi 14 décembre : séance mensuelle réservée.
Jeudi 14 décembre,
à
15 heures :
questions d'actualité au
Gouvernement.
Mardi 19 décembre,
matin :
questions orales.
Janvier 2001
Jeudi 11 janvier,
à
15 heures :
questions d'actualité au
Gouvernement.
Mardi 16 janvier,
matin :
questions orales.
Jeudi 18 janvier : séance mensuelle réservée.
Jeudi 25 janvier,
à
15 heures :
questions d'actualité au
Gouvernement.
Mardi 30 janvier,
matin :
questions orales.
Février 2001
Jeudi 1er février,
à
15 heures :
questions d'actualité au
Gouvernement.
Mardi 6 février,
à
9 h 30 :
questions orales.
Jeudi 8 février : séance mensuelle réservée.
Mars 2001
Mardi 27 mars,
matin :
questions orales.
Jeudi 29 mars : séance mensuelle réservée.
Jeudi 29 mars,
à
15 heures :
questions d'actualité au
Gouvernement.
Avril 2001
Mardi 3 avril,
matin :
questions orales.
Jeudi 5 avril,
à
15 heures :
questions d'actualité au
Gouvernement.
Jeudi 19 avril,
à
15 heures :
questions d'actualité au
Gouvernement.
Mardi 24 avril,
matin :
questions orales.
Jeudi 26 avril : séance mensuelle réservée.
Mai 2001
Jeudi 10 mai,
à
15 heures :
questions d'actualité au
Gouvernement.
Mardi 15 mai,
matin :
questions orales.
Jeudi 17 mai : séance mensuelle réservée.
Mardi 29 mai,
matin :
questions orales.
Jeudi 31 mai,
à
15 heures :
questions d'actualité au
Gouvernement.
Juin 2001
Jeudi 7 juin,
à
15 heures :
questions d'actualité au
Gouvernement.
Mardi 12 juin,
matin :
questions orales.
Jeudi 14 juin : séance mensuelle réservée.
Mardi 26 juin,
matin :
questions orales.
Jeudi 28 juin,
à
15 heures :
questions d'actualité au
Gouvernement.
A N N E X E I I I
Questions orales inscrites à l'ordre du jour
du mardi 14 novembre 2000
N° 892. - Mme Janine Bardou interroge M. le ministre de l'économie, des
finances et de l'industrie sur le problème soulevé par l'aménagement du régime
des micro-entreprises, opéré par l'instruction fiscale du 20 juillet 1999,
supprimant le régime de forfait et relevant les seuils d'application du régime
micro-entreprises et de la franchise de la TVA.
S'il semblait, en effet, nécessaire de circonscrire l'application du régime de
la franchise en base de TVA dans le secteur du bâtiment à un nombre restreint
d'entreprises, il convenait de ne pas alourdir pour autant les charges
financières et administratives des autres entreprises du bâtiment.
Or l'instruction fiscale précitée énonce que la notion d'activité mixte
s'applique notamment aux entrepreneurs du bâtiment qui fournissent non
seulement la main-d'oeuvre, mais aussi les matériaux ou matières premières
entrant à titre principal dans l'ouvrage. Ce texte précise ensuite que, pour
cette activité, le régime micro-entreprises n'est applicable que si le chiffre
d'affaires global de l'entreprise n'excède pas 500 000 francs (hors taxes) et
si le chiffre d'affaires annuel aux opérations autres que les ventes ou la
fourniture de logement ne dépasse pas 175 000 francs (hors taxes).
Il est évident qu'une telle mesure entraînera de graves conséquences
financières pour certaines catégories d'entreprises, car la notion d'activité
mixte influe sur la détermination des seuils de régime d'imposition,
d'exonération et de déduction de certains impôts et taxes, dissuadant par là
même l'embauche.
De plus, l'alourdissement administratif résultant de l'obligation de
différencier la part afférente aux matériaux et celle afférente à la
main-d'oeuvre qui en découle paraît incompatible avec la volonté du
Gouvernement de favoriser les démarches de simplifications administratives de
la petite entreprise. En effet, la pratique des entreprises du bâtiment
consiste le plus souvent en un établissement de leurs factures au mètre carré,
au mètre linéaire ou encore au forfait (fourniture et pose).
En conséquence, elle lui demande de bien vouloir clarifier cette question qui
ne manque pas d'inquiéter les entreprises artisanales du bâtiment favorables,
quant à elles, au maintien de la doctrine administrative précédente, relative à
la notion d'activité mixte et associée à l'ancien régime de forfait.
N° 898. - M. Daniel Eckenspieller attire l'attention de M. le ministre de
l'économie, des finances et de l'industrie sur le taux de TVA appliqué à
l'usage du bois-énergie.
En effet, notre pays possède un patrimoine forestier considérable qui ne
cesse, de surcroît, de s'étendre, notamment dans les fonds de vallée où la
forêt prend possession des versants autrefois pâturés.
Aussi, un certain nombre de collectivités, d'associations ou d'entreprises se
sont-elles orientées vers la production de chaleur à partir de cette source
d'énergie. La distribution calorifique par des réseaux de chaleur se voit
appliquer un taux de TVA de 19,6 %.
La tempête de décembre 1999 a conduit à créer des stocks considérables de bois
chablis qui se trouvent ainsi disponibles.
Par ailleurs, l'augmentation vertigineuse du prix des produits pétroliers a
induit une charge difficilement supportable tant pour les particuliers que pour
les collectivités.
Dans ce contexte, la réduction de 19,6 % à 5,5 % du taux de TVA appliqué à la
distribution de chaleur à partir de l'énergie-bois aurait le triple mérite de
conforter les usagers ayant déjà fait ce choix, d'en inciter d'autres à suivre
leur exemple, et de donner un signal fort dans le cadre du développement des
énergies renouvelables.
Le Premier ministre a indiqué, le 29 mai dernier, que l'objectif du
Gouvernement était de parvenir d'ici à 2006 à substituer par le bois-énergie
quelque 500 000 tonnes équivalent pétrole supplémentaires, ce qui, outre une
économie intéressante d'énergie fossile, réduirait chaque année de 2 millions
de tonnes les émissions de CO2 et créerait 3 000 emplois nouveaux.
Il lui demande donc si la loi de finances pour 2001 ira en ce sens et si le
taux réduit de TVA sera appliqué à l'utilisation de l'énergie-bois.
N° 900. - M. Jean Besson sollicite l'attention toute particulière de M. le
secrétaire d'Etat au logement sur la réforme des aides personnalisées au
logement.
Les décrets du 30 janvier 1997 et du 7 juillet 2000 relatifs aux ressources et
à l'évaluation forfaitaire des revenus posent des difficultés importantes, par
rapport au public concerné.
En effet, ces nouvelles dispositions qui sont mises en oeuvre à compter du 1er
juillet 2000 s'appliquent notamment aux personnes au revenu précaire et faible,
comme les apprentis et les contrats emplois-solidarité (CES). Cette catégorie
bénéficiait précédemment de la prise en considération de certains abattements
dans le calcul de leur APL, ce qui laissait à leur charge une part résiduelle
supportable, au regard de leurs revenus.
Or, à l'application de ce dispositif, dont l'objectif est d'harmoniser les
modalités de calcul, il apparaît que le montant de l'APL défini selon ces
modifications législatives pénalise ce public dont les revenus sont déjà
faibles.
Dès lors, ces apprentis, stagiaires ou CES renoncent, notamment dans les zones
rurales, à se loger dans les foyers qui leur sont destinés et privilégient des
solutions de « fortune », occasionnant des déplacements journaliers plus
lointains, ce qui génère fatigue, accidents, donc mauvaises conditions de
travail. De plus, ces dispositions déséquilibrent les recrutements des foyers
de jeunes travailleurs, par exemple, dont le rôle économique, notamment en zone
rurale, constitue un enjeu important.
Il souhaite que les dispositions des textes législatifs cités précédemment
soient amendées afin qu'elles soient en cohérence avec l'objectif affirmé lors
de la Conférence nationale sur la famille, ouverte le 15 juin 2000, qui prévoit
notamment un barème unique pour l'APL et avec l'engagement qu'aucun ménage ne
verrait son aide diminuée du fait de cette harmonisation.
N° 904. - M. Robert Laufoaulu appelle l'attention de M. le ministre de
l'éducation nationale, d'une part, sur l'enseignement des langues wallisienne
et futunisienne dans les établissements scolaires et universitaires, d'autre
part, sur la situation du territoire de Wallis-et-Futuna du point de vue de
l'enseignement supérieur. Pour ce qui concerne le premier point, la loi n°
51-46 du 11 janvier 1951, dite loi Deixonne, a mis en place un enseignement de
langue et culture régionales couvrant l'ensemble de la scolarité. Les
dispositions de cette loi, qui s'appliquaient initialement au basque, au
breton, au catalan et à l'occitan, ont été successivement étendues à d'autres
langues, notamment au tahitien (décret du 12 mai 1981) et aux langues
mélanésiennes (arrêté du 20 octobre 1992). Il souhaiterait donc connaître sa
position sur la possibilité d'étendre cette loi aux langues wallisienne et
futunienne.
S'agissant du deuxième point, l'université française du Pacifique, dont la
compétence s'exerçait sur les trois territoires français du Pacifique Sud, est
désormais scindée en deux entités distinctes : l'université de Polynésie
française et l'université de Nouvelle-Calédonie. En conséquence, il
souhaiterait savoir quelle sera la place exacte de Wallis-et-Futuna dans cette
nouvelle organisation de l'enseignement supérieur, et notamment, dans la
logique de la première partie de cette question, quelle pourrait être la place
de l'enseignement des langues wallisienne et futunienne dans l'enseignement
supérieur.
N° 905. - M. Jean-Claude Carle appelle l'attention de Mme le ministre de
l'emploi et de la solidarité sur le projet de décret visant à réformer les
aides forfaitaires pour les contrats de qualification.
Ce mécanisme permet d'octroyer une aide de 5 000 ou 7 000 francs aux
employeurs qui concluent des contrats de qualification avec des jeunes
éligibles au dispositif. La suppression de cette aide à l'embauche ne
manquerait pas d'avoir des conséquences particulièrement graves sur le
fonctionnement des groupements d'employeurs pour l'insertion et la
qualification (GEIQ). Ces structures, dont l'instance nationale est
conventionnée depuis de nombreuses années avec le ministère en charge du
travail, embauchent notamment, et mettent à disposition des employeurs membres
du GEIQ, des jeunes sans qualification. Le contrat de qualification est le
contrat majoritairement mis en oeuvre au sein de ce réseau, fort de près de 90
entités. Grâce à la formation en alternance et à l'accompagnement
socioprofessionnel réalisé par le GEIQ, les jeunes salariés du GEIQ se
qualifient et s'insèrent, à l'issue de leur contrat, dans une proportion très
satisfaisante au sein d'entreprises, membres ou pas du groupement. En tant
qu'employeur, le GEIQ bénéficie de l'aide forfaitaire à l'embauche. C'est
principalement grâce à cette aide que l'accompagnement socioprofessionnel est
réalisé. En effet, alors même que les GEIQ participent pleinement à l'insertion
par l'activité économique, ils ne bénéficient d'aucune aide publique pérenne.
Dès lors, la suppression de l'aide forfaitaire à l'embauche limiterait la
capacité des GEIQ à accompagner les publics en grande difficulté qu'ils
accueillent.
C'est pourquoi il souhaiterait avoir l'assurance que sera maintenue pour les
entreprises de 10 salariés et plus, à l'instar de ce qui est envisagé pour
l'aide forfaitaire à l'apprentissage, la prime à l'embauche pour les jeunes en
contrat de qualification.
N° 906. - M. Bernard Cazeau souhaite attirer l'attention de M. le ministre de
la fonction publique et de la réforme de l'Etat sur le problème de
reconstitution de carrière et de reconnaissance d'ancienneté de statut des
médecins sous contrat dans les centres hospitaliers publics.
En effet, à l'issue du dernier concours national de praticien hospitalier, les
médecins sous contrat dans les centres hospitaliers de Bergerac et Périgueux se
sont inscrits sur les listes d'aptitude aux fonctions de praticien hospitalier
parues au
Journal officiel
du 27 février 2000. Or, les textes
réglementaires ne permettent pas de prendre en compte, au titre de
l'ancienneté, l'ensemble des années passées au sein du service public
hospitalier, leur situation étant trop atypique.
La situation est particulièrement préoccupante pour les médecins nommés ou
dont le dossier est en cours d'instruction au ministère de la santé. Cette
situation concernera, à terme, près de 23 médecins des services d'urgences, des
services d'assistance médicale d'urgence (SAMU) et des services médicaux
d'urgence et de réanimation (SMUR) des hôpitaux de Bergerac, Périgueux et
Sarlat.
En conséquence, il souhaiterait connaître les mesures qu'il entend mettre en
oeuvre pour résoudre ce problème.
N° 910. - M. Bernard Piras attire l'attention de M. le ministre de
l'équipement, des transports et du logement sur la réglementation qui encadre
le financement des réseaux de distribution d'eau potable.
Il apparaît que pour l'extension des réseaux publics nécessitée par des
projets de constructions nouvelles, le code de l'urbanisme organise trois
dispositifs permettant de financer tout ou partie des réseaux d'eau potable
rendus directement nécessaires par des projets de construction ou de
développement urbain.
Il s'agit des articles L. 332-6-1 (2°,
d
) (coût des travaux), L. 332-9
(PAE, plan d'aménagement d'ensemble) et L. 311-4-1 (ZAC, zone d'aménagement
concerté).
Excepté ces trois hypothèses, il semble que, faute de base légale, les
collectivités publiques, communes ou groupements de communes, ne peuvent
instituer de droits ou taxes de branchement.
Depuis toujours, le financement des collectivités publiques chargées de la
distribution d'eau potable est assuré par différentes recettes dont « les
droits de branchement ».
Il s'interroge pour l'avenir. A cet égard, il est clair que la disparition de
ce revenu pour les collectivités, mais surtout pour les syndicats
intercommunaux, risque de créer des difficultés financières importantes,
susceptibles de compromettre leur équilibre budgétaire et d'alourdir fortement
le prix de l'eau.
Il lui demande si une réforme est envisagée pour lever toute ambiguïté sur ces
droits de branchement.
N° 911. - M. Philippe de Gaulle interroge M. le secrétaire d'Etat à la défense
chargé des anciens combattants sur la modification par certains centres des
impôts de la fiscalité applicable à la retraite mutualiste des anciens
combattants. En effet, les versements supplémentaires qu'effectuent chaque
année les anciens combattants pour suivre l'évolution du plafond majorable leur
ouvrent droit à un nouveau montant de rente qui excède, pour beaucoup d'entre
eux, le plafond défiscalisé.
En conséquence, la fraction de rente excédentaire est alors soumise à la
fiscalité des rentes viagères à titre onéreux, ce que personne ne conteste, en
tenant compte de la date d'entrée en jouissance de chaque nouveau titre de
retraite correspondant au dernier versement.
Or, cette année, pour la première fois des adhérents se voient attribuer des
redressements fiscaux basés sur une date d'entrée en jouissance à la date
initiale de la première retraite à capital définitif, soit généralement
lorsqu'ils ont atteint un âge entre 50 et 59 ans, et non pas d'après l'année de
l'investissement concerné. Cette nouvelle position de certains centres d'impôts
est sans fondement.
Il lui demande d'examiner ce problème de manière à ce que la question soit
réglée avant le 31 décembre prochain, date limite des recours fiscaux des
intéressés et l'établissement de leur déclaration d'impôt de l'année.
N° 913. - M. Joseph Ostermann attire l'attention de M. le ministre de
l'intérieur sur le financement des services d'incendie et de secours (SDIS).
La réforme portant départementalisation des SDIS instituée en 1996 a prévu un
large financement par les collectivités locales, l'Etat, quant à lui, réservant
une part de la dotation globale d'équipement (DGE) (350 MF sur trois ans) à
l'aide à l'équipement des SDIS.
Or, depuis 1996, on assiste à l'explosion des budgets des SDIS.
Ainsi, dans le département du Bas-Rhin, ce dernier a augmenté de 10 % par an
depuis 1996. Pour 2001, une augmentation de plus de 20 % est prévue.
Cette forte croissance est due non seulement à une remise à niveau en matière
de matériels, de structures et d'équipements mais aussi et surtout à la
multiplication de mesures nouvelles en matière de régime de service, de régimes
indemnitaires ainsi qu'au renforcement des services de santé.
Les collectivités locales sont par conséquent contraintes de financer des
dépenses supplémentaires que leur impose l'Etat sans contrepartie. Or,
celles-ci n'étaient pas préparées à faire face à ces dépenses nouvelles et ne
peuvent, par conséquent, pas les assumer.
Dans le rapport qu'il vient de remettre au Gouvernement, le député de la
Somme, Jacques Fleury, conclut lui-même que pour de nombreux élus l'incidence
du coût des SDIS devient insupportable dans la fiscalité locale.
Les 350 MF de DGE attribués par l'Etat ne peuvent suffire, et ce d'autant plus
que la suppression de la vignette automobile prive les départements de 12 MF de
recettes fiscales.
Il lui demande par conséquent s'il ne conviendrait pas, avant de présenter
tout nouveau projet de loi sur la sécurité civile qui impliquerait encore de
nouvelles dépenses, de prévoir une contribution supplémentaire de la part de
l'Etat.
Il rappelle que la sécurité demeure une des missions régaliennes de l'Etat.
N° 914. - Mme Nicole Borvo attire l'attention de Mme le ministre de l'emploi
et de la solidarité sur le devenir des terrains libérés par les hôpitaux
Laennec, Boucicaut et une partie de Broussais après la création de l'hôpital
européen Georges-Pompidou.
Ces terrains appartiennent à l'Assistance publique - hôpitaux de Paris
(AP-HP). Leur emprise est d'environ 110 000 mètres carrés. Ils sont situés au
coeur de Paris, respectivement dans les 7e, 15e et 14e arrondissements.
Les instructions des autorités de tutelle de l'AP-HP conduisent celle-ci à
céder ces terrains afin d'autofinancer le nouvel hôpital Georges-Pompidou.
En ce qui concerne l'hôpial Laennec, la Cogedim pourrait acheter l'ensemble du
site de Laennec, y compris la partie historique, sans condition suspensive,
pour un montant de 500 millions de francs. Ce promoteur y prévoirait la
création d'un hôtel quatre étoiles dans une partie des bâtiments classés
monuments historiques, la réalisation d'une maison de retraite privée de luxe,
la construction de 170 logements ultrarésidentiels, vendables entre 50 000 et
60 000 francs le mètre carré. Il y aurait seulement 50 logements prêt locatif
intermédiaire (PLI) et 10 logements prêt locatif aidé (PLA) alors que le 7e
arrondissement est parmi les arrondissements où le logement social est quasi
absent.
Tous ces projets interviennent alors qu'il est important de préserver le
domaine public et de contenir la spéculation immobilière.
Il y a, à Paris, de très importants besoins collectifs, de mixité sociale et
d'équipements. C'est particulièrement vrai dans les 7e, 15e et 14e
arrondissements où ces terrains se trouvent.
Faut-il rappeler que la récente convention Etat-ville de Paris sur le logement
signée en mars 1999 par M. le secrétaire d'Etat au logement stipule que : «
Lorsque les terrains appartiennent à des établissements publics, des protocoles
tripartites seront recherchés afin de définir les objectifs de production de
logements sociaux. » C'est pourquoi elle lui demande de contribuer à l'arrêt
des procédures en cours et d'organiser une consultation entre l'Etat, la
région, la ville de Paris et l'AP-HP en vue de se saisir d'une occasion pour
satisfaire les besoins collectifs, de mixité sociale et d'équipements de la
capitale.
N° 915. - M. Guy Vissac attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture
et de la pêche sur les difficultés rencontrées en Haute-Loire dans la
reconstitution de la forêt après la tempête du mois de décembre. Il lui
rappelle qu'une circulaire du ministère de l'agriculture du 31 août 2000, qui
prévoit les modalités de ladite reconstitution, abaisse le seuil des aides à un
hectare _ sans autre précision _ par projet. Il lui indique qu'un courrier
ultérieur précise qu'il s'agit d'un hectare, et ce d'un seul tenant. Or, il
tient à lui préciser, à ce sujet, qu'en Haute-Loire, comme dans d'autres zones
de montagne, les propriétés forestières sont de petite taille _ de l'ordre de
1,5 hectare en plusieurs parcelles _ et que la tempête n'a pas automatiquement
dévasté les peuplements forestiers sur un hectare d'un seul tenant. Il en
résulte qu'un nombre important de petits propriétaires vont être écartés du
dispositif d'aides de l'Etat, compte tenu du fait qu'ils ont à reconstituer une
trouée de surface plus faible (0,4-0,5 ha) que celle prévue actuellement. Il
lui demande donc de lui préciser comment il entend améliorer le dispositif afin
que les petits producteurs de bois ne soient pas pénalisés, comme c'est hélas
le cas en raison du seuil prévu par la présente circulaire.
N° 917. - Mme Hélène Luc attire l'attention de Mme le ministre de l'emploi et
de la solidarité sur les conséquences, préjudiciables à des ayants droit, de
l'insuffisance du seuil de revenus donnant accès à la couverture maladie
universelle (CMU).
Elle souligne le fait que plusieurs conseils généraux, dont le Val-de-Marne,
avaient retenu jusqu'à maintenant le montant de 3 800 francs comme seuil de
pauvreté pour l'attribution de l'aide médicale gratuite, et non 3 500 francs
comme le prévoit actuellement la loi.
C'est pourquoi elle lui demande quelles dispositions elle compte prendre pour
relever le plafond de la CMU et ainsi harmoniser les seuils départementaux et
nationaux, afin d'empêcher que 11 000 bénéficiaires de l'aide médicale gratuite
dans le Val-de-Marne, de même que dans sept autres départements, ne soient
exclus de la CMU.
N° 918. - M. Jean-Marie Poirier souhaite appeler l'attention de M. le ministre
de l'intérieur sur les difficultés liées à la conclusion des conventions de
coordination policière entre l'Etat et les communes prévues à l'article 2 de la
loi n° 99-231 du 15 avril 1999 relative aux polices municipales dont le cadre a
été précisé par le décret n° 2000-275 du 24 mars 2000 déterminant les clauses
de la convention type.
Dans la circulaire NOR : INTD9900095C du 16 avril 1999 relative à
l'application de la loi du 15 avril 1999, l'attention des préfets des
départements est appelée sur la nécessité de faire prévaloir le caractère
concret et pratique des conventions de coordination conclues, et de s'adapter
tant à la situation initiale qu'à l'évolution des circonstances locales
(paragraphe 1.1.2.1). Or, on peut regretter l'interprétation trop rigide qui
est faite de la loi dans certains départements lorsque celle-ci conduit à
imposer un quasi-rapport de conformité de la convention de coordination conclue
aux stipulations du décret du 24 mars 2000.
A titre d'exemple, il lui fait part des difficultés rencontrées par la commune
de Sucy-en-Brie qui s'est vu refuser par le préfet l'insertion de deux alinéas
de précision à la convention type qui avaient pour but d'améliorer
l'information réciproque entre les services.
Le premier aménagement prévoyait une information périodique du maire par le
commissaire de police nationale en ce qui concerne l'activité du commissariat
sur le territoire communal et l'évolution des actes de délinquance.
Le second aménagement prévoyait d'étendre les mécanismes d'échange rapide et
réciproque d'informations aux événements particulièrement importants, alors que
la convention type ne mentionne que le cas des personnes signalées disparues et
celui des véhicules volés.
Alors que la circulaire susvisée stipule que « le législateur n'a pas entendu
imposer un rapport de conformité des conventions conclues au niveau local avec
les clauses de la convention type », on peut s'interroger sur la marge de
manoeuvre laissée à la procédure conventionnelle dans un cas tel que celui
précédemment évoqué.
Il lui demande en conséquence de bien vouloir lui préciser quelle est sa
conception de la négociation des conventions de coordination policière entre
l'Etat et les communes, et de lui indiquer les domaines identifiés sur lesquels
peuvent porter les aménagements locaux à la convention type.
N° 921. - M. Jean Huchon appelle l'attention de Mme le ministre de l'emploi et
de la solidarité sur la situation financière extrêmement préoccupante des
centres anticancéreux.
Il lui indique, en effet, que les progrès évidents de la science ont permis la
mise au point de traitements médicamenteux nouveaux, dont l'efficacité est
incontestable, et qui doivent pouvoir profiter à l'ensemble des malades.
Or, il lui fait observer que ces nouveaux traitements sont générateurs de
coûts beaucoup plus élevés pour les centres anticancéreux.
En conséquence, il lui demande si, dans le cadre du projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 2000, les moyens nécessaires à une
lutte moderne contre le cancer seront dégagés pour permettre aux centres
anticancéreux de pouvoir exercer leur mission.
N° 925. - M. Paul Girod demande à M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement _ se référant aux nombreuses déclarations relatives à
l'absolue nécessité de mettre en oeuvre un troisième aéroport, en
Ile-de-France, avec ceux de Roissy et d'Orly arrivés à saturation _ de lui
préciser le parti qu'il a pris à cet égard puisqu'il avait annoncé le mercredi
26 juillet 2000 qu'une décision sur « l'opportunité de construire un troisième
aéroport sera prise avant la fin de l'été », soit avant le 22 septembre (
Le
Monde,
28 juillet 2000).
N° 931. - M. Lucien Lanier souligne à M. le ministre de l'intérieur que les
villes de Saint-Mandé et Vincennes connaissent actuellement un accroissement
inquiétant de la petite délinquance.
Le caractère résidentiel de ces communes semblait les garantir de la violence
urbaine. La réalité est tout autre en raison du rassemblement d'éléments
extérieurs se livrant à des actes de délinquance, de plus en plus du fait de
mineurs.
Ainsi, depuis le 1er janvier 2000, la police municipale de Saint-Mandé a
procédé à 88 mises à la disposition de la police nationale dans le cadre des
délits de flagrance contre 137 en 1999. Sur la circonscription, les vols avec
violence sont en augmentation de 30 % par rapport à 1999. Quant à la
délinquance générale, elle est en augmentation de 14 % alors que la hausse
départementale, déjà forte, est de 10 %.
Au regard de cette dégradation, les moyens dont dispose la police nationale ne
cessent de s'affaiblir.
Le poste de police de Saint-Mandé, faute d'effectif, n'est plus qu'un bureau
d'accueil qui ne permet ni action de prévention ni intervention répressive.
Face à cette insécurité croissante, il lui demande d'examiner, avec une toute
particulière attention, la possibilité d'autoriser la mise en place d'une
police de proximité et l'affectation du personnel nécessaire à son efficacité.
Tout en constituant une dissuasion réelle à l'encontre d'une délinquance
caractérisée par sa mobilité, ce développement est d'une urgence justifiée,
d'autant que ces communes totalisent 22 écoles, 6 collèges et 6 lycées.
N° 932. - M. Jean-Pierre Demerliat attire l'attention de M. le ministre de
l'agriculture et de la pêche sur les conséquences de la tempête du 27 décembre
1999, et plus particulièrement sur les deux points suivants :
- les nombreux embâcles restant sur les cours d'eau risquent, après les
premières crues d'hiver, de s'accumuler en amont des ponts et causer des
dommages importants ;
- le transport des chablis résultant de la tempête se fait principalement,
voire uniquement, par route. La voirie, particulièrement la voirie communale,
risque de ce fait de souffrir considérablement cet hiver, après les pluies et
les gels.
Il lui demande donc quelles mesures peuvent être prises pour prévenir ces
difficultés et au besoin y remédier.
N° 941. - M. Gérard César attire l'attention de Mme le secrétaire d'Etat à la
santé et aux handicapés sur la situation inadmissible du centre hospitalier de
Sainte-Foy-la-Grande et les risques qu'elle implique en matière de santé
publique.
Depuis plusieurs mois maintenant, tout semble fait pour transformer le centre
hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande en simple « maison de convalescence ».
L'hôpital de Sainte-Foy-la-Grande a fait preuve de son utilité et de son
efficacité, mais les réductions de moyens, tant humains que financiers, subies
peu à peu, mettent gravement en cause l'avenir de cet établissement.
Cette situation et les menaces qui pèsent sur les établissements de santé
publics et privés du Bergeracois inquiètent à juste titre les populations de
ces secteurs des départements de la Dordogne et de la Gironde.
L'instauration d'une chirurgie ambulatoire sans hospitalisation, l'abandon de
la chirurgie vitale et de l'anesthésie-réanimation compromettent également
l'avenir des services de médecine à Sainte-Foy-la-Grande.
L'absence d'un véritable service d'urgence sur ce centre hospitalier est,
également, préoccupante. Les services d'urgence de Libourne et de Bordeaux sont
surchargés et les difficultés de circulation entre ces trois villes ne font
qu'accentuer les risques pour les personnes malades ou accidentées.
L'ensemble de ces décisions lourdes pour l'avenir de l'hôpital de
Sainte-Foy-la-Grande, très préjudiciables à la qualité du service public de
santé en pays foyen, émanent exclusivement d'un rapport de mission ministériel
d'expertise, à la fois « partiel et partial ».
Il lui demande quelles mesures elle entend prendre pour permettre le maintien
à Sainte-Foy-la-Grande d'un hôpital complet et polyvalent avec de véritables
services de chirurgie et d'anesthésie-réanimation.
A N N E X E I V
Questions orales avec débat inscrites à l'ordre du jour
de la séance du mardi 21 novembre 2000
N° 27. - M. Jean-Jacques Hyest rappelle à Mme le garde des sceaux, ministre de
la justice, les conclusions de la commission d'enquête du Sénat sur les
conditions de détention dans les établissements pénitentiaires en France, dont
le rapport a été déposé le 29 juin dernier.
De son côté, la commission présidée par M. Canivet a également préconisé
certaines réformes concernant le fonctionnement des établissements
pénitentiaires.
Un mouvement important du personnel pénitentiaire a amené le Gouvernement à
promettre des mesures pour améliorer la situation de ces personnels.
Compte tenu de l'urgence des mesures à prendre, la commission d'enquête a
privilégié des propositions concrètes susceptibles d'être mises en oeuvre
rapidement.
Un débat sur la politique pénitentiaire serait très utile, mais un certain
nombre de mesures concernant les conditions de détention ne sont pas de nature
législative, le plus urgent étant l'amélioration des conditions de détention et
le renforcement des contrôles, ainsi que la remotivation des personnels.
C'est pourquoi M. Jean-Jacques Hyest demande à Mme le garde des sceaux de
préciser les intentions du Gouvernement sur ce sujet brûlant.
N° QE 11. - M. Hubert Haenel demande à M. le ministre de la défense quels ont
été les progrès réalisés en matière de politique européenne de sécurité et de
défense depuis que le Conseil européen d'Helsinki a décidé la constitution
d'une force européenne terrestre de 60 000 hommes, opérationnelle et projetable
sur des théâtres extérieurs, et que le Conseil européen de Feira s'est prononcé
pour la formation d'une force de police européenne de 5 000 policiers.
Il souhaite notamment connaître l'état de la mise en place des instruments
politiques et militaires nécessaires à la gestion des crises et recueillir le
sentiment du Gouvernement sur les chances de voir progresser, d'ici à la fin de
la présidence française, cette construction ambitieuse.
ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA RÉSERVE MILITAIRE
En application du décret n° 2000-890 du 13 septembre 2000, M. le président du Sénat a désigné, le 3 novembre 2000, MM. Bertrand Auban et Serge Vinçon en qualité de membres titulaires et MM. Michel Caldaguès et André Rouvière en qualité de membres suppléants du Conseil supérieur de la réserve militaire.
NOMINATION DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
M. Charles Descours a été nommé rapporteur des équilibres financiers généraux
et de l'assurance maladie, M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur de la famille, et
M. Alain Vasselle, rapporteur de l'assurance vieillesse, du projet de loi n° 64
(2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité
sociale pour 2001.
M. Jacques Oudin a été nommé rapporteur pour avis du projet de loi n° 64
(2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité
sociale pour 2001, dont la commission des affaires sociales est saisie au fond.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Situation du centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande
941.
- 6 novembre 2000. -
M. Gérard César
attire l'attention de
Mme le secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés
sur la situation inadmissible du centre hospitalier de Sainte-Foy-la-Grande et
les risques qu'elle implique en matière de santé publique. Depuis plusieurs
mois maintenant tout semble fait pour transformer le centre hospitalier de
Sainte-Foy-la-Grande en simple « maison de convalescence ». L'hôpital de
Sainte-Foy-la-Grande a fait preuve de son utilité et de son efficacité, mais
les réductions de moyens, tant humains que financiers, subies peu à peu,
mettent gravement en cause l'avenir de cet établissement. Cette situation et
les menaces qui pèsent sur les établissements de santé publics et privés du
bergeracois inquiètent à juste titre les populations de ces secteurs des
départements de la Dordogne et de la Gironde. L'instauration d'une chirurgie
ambulatoire sans hospitalisation, l'abandon de la chirurgie vitale et de
l'anesthésie-réanimation compromettent également l'avenir des services de
médecine à Sainte-Foy-la-Grande. L'absence d'un véritable service d'urgence sur
ce centre hospitalier est, également, préoccupante. Les services d'urgence de
Libourne et de Bordeaux sont surchargés et les difficultés de circulation entre
ces trois villes ne font qu'accentuer les risques pour les personnes malades ou
accidentées. L'ensemble de ces décisions lourdes pour l'avenir de l'hôpital de
Sainte-Foy-la-Grande, très préjudiciables à la qualité du service public de
santé en pays foyen, émanent exclusivement d'un rapport de mission ministériel
d'expertise, à la fois « partiel et partial ». Il lui demande quelles mesures
elle entend prendre pour permettre le maintien à Sainte-Foy-la-Grande d'un
hôpital complet et polyvalent avec de véritables services de chirurgie et
d'anesthésie-réanimation.
ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mardi 7 novembre 2000
SCRUTIN (n° 14)
sur la motion n° 3, présentée par MM. Jacques-Richard Delong et Michel Pelchat,
tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité à la proposition de loi,
présentée par M. Jacques Pelletier et plusieurs de ses collègues, relative à la
reconnaissance du génocide arménien de 1915.
Nombre de votants : | 233 |
Nombre de suffrages exprimés : | 228 |
Pour : | 57 |
Contre : | 171 |
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (17) :
Contre :
17.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :
Pour :
6. _ MM. Jean-Michel Baylet, Jean François-Poncet, Paul Girod,
Aymeri de Montesquiou, Georges Mouly et Georges Othily.
Contre :
12.
N'ont pas pris part au vote :
5. _ MM. Georges Berchet, Jacques
Bimbenet, Fernand Demilly, Pierre Jeambrun et Bernard Joly.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :
Pour :
10. _ M. Dominique Braye, Mme Paulette Brisepierre, MM. Jacques
Delong, Michel Esneu, Hilaire Flandre, Yann Gaillard, Patrice Gélard, André
Jourdain, Patrick Lassourd et Paul Masson.
Contre :
21. _ MM. Jean Bernard, Louis de Broissia, Charles
Ceccaldi-Raynaud, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli, Charles Descours,
Alain Dufaut, Bernard Fournier, Charles Ginésy, Francis Giraud, Adrien
Gouteyron, Roger Karoutchi, Lucien Lanier, René-Georges Laurin, Philippe
Marini, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin, MM. Jacques Oudin, Jacques Peyrat,
Jean-Pierre Schosteck et Guy Vissac.
N'ont pas pris part au vote :
68, dont M. Christian Poncelet, président
du Sénat, et M. Jacques Valade, qui présidait la séance.
GROUPE SOCIALISTE (77) :
Contre :
77.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (52) :
Pour :
24.
Contre :
20. _ MM. Jean-Paul Amoudry, Philippe Arnaud, Denis Badré,
Bernard Barraux, Jean Bernadaux, Daniel Bernardet, Gérard Deriot, André
Diligent, Serge Franchis, Marcel Henry, Pierre Hérisson, Rémi Herment, Daniel
Hoeffel, Claude Huriet, Pierre Jarlier, Marcel Lesbros, Michel Mercier, René
Monory, Jean-Marie Poirier et Philippe Richert.
Abstention :
1. _ M. Jean-Louis Lorrain.
N'ont pas pris part au vote :
7. _ MM. Didier Borotra, Jean-Pierre
Cantegrit, Jean Faure, Francis Grignon, Jean Huchon, René Marquès et Louis
Mercier.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (46) :
Pour :
15. _ MM. Joël Bourdin, Jean Boyer, Louis Boyer, Jean Delaneau,
Ambroise Dupont, Jean-Léonce Dupont, Jean-Paul Emorine, André Ferrand, Louis
Grillot, Jean-François Humbert, Michel Pelchat, Bernard Plasait, Ladislas
Poniatowski, Henri de Raincourt et Charles Revet.
Contre :
20.
Abstentions :
3. _ M. James Bordas, Mme Anne Heinis et M. Jean
Pépin.
N'ont pas pris part au vote :
8. _ MM. Christian Bonnet, Charles-Henri
de Cossé-Brissac, Jean-Paul Emin, Guy Poirieux, André Pourny, Jean Puech,
Jean-Pierre Raffarin et Henri Revol.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :
Pour :
2. _ MM. Hubert Durand-Chastel et Bernard Seillier.
Contre :
4.
Abstention :
1. _ M. Philippe Darniche.
Ont voté pour
Jean Arthuis
René Ballayer
Jacques Baudot
Jean-Michel Baylet
Michel Bécot
Claude Belot
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Jean-Guy Branger
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Jean Delaneau
Jacques Delong
Marcel Deneux
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Pierre Fauchon
André Ferrand
Hilaire Flandre
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
Patrice Gélard
Paul Girod
Louis Grillot
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
André Jourdain
Alain Lambert
Patrick Lassourd
Henri Le Breton
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Paul Masson
Louis Moinard
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Philippe Nogrix
Georges Othily
Michel Pelchat
Bernard Plasait
Ladislas Poniatowski
Henri de Raincourt
Charles Revet
Bernard Seillier
Michel Souplet
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Ont voté contre
François Abadie
Nicolas About
Philippe Adnot
Guy Allouche
Jean-Paul Amoudry
Bernard Angels
Philippe Arnaud
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Denis Badré
José Balarello
Janine Bardou
Bernard Barraux
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Louis de Broissia
Guy-Pierre Cabanel
Claire-Lise Campion
Jean-Claude Carle
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Charles Ceccaldi-Raynaud
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Yvon Collin
Gérard Collomb
Raymond Courrière
Roland Courteau
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Gérard Deriot
Dinah Derycke
Charles Descours
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
André Diligent
Claude Domeizel
Jacques Dominati
Jacques Donnay
Michel Dreyfus-Schmidt
Alain Dufaut
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Hubert Falco
Léon Fatous
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Charles Ginésy
Francis Giraud
Serge Godard
Adrien Gouteyron
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Roger Hesling
Daniel Hoeffel
Roland Huguet
Claude Huriet
Pierre Jarlier
Charles Jolibois
Alain Journet
Roger Karoutchi
Philippe Labeyrie
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Lucien Lanier
Jacques Larché
Dominique Larifla
René-Georges Laurin
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Marcel Lesbros
Claude Lise
Paul Loridant
Roland du Luart
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
François Marc
Philippe Marini
Marc Massion
Serge Mathieu
Pierre Mauroy
Michel Mercier
Gérard Miquel
René Monory
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Jacques Oudin
Jean-Marc Pastor
Lylian Payet
Jacques Pelletier
Guy Penne
Daniel Percheron
Jacques Peyrat
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Xavier Pintat
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Jean-Marie Poirier
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Jean-Marie Rausch
Ivan Renar
Philippe Richert
Roger Rinchet
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Jean-Pierre Schosteck
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Raymond Soucaret
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Henri Torre
Pierre-Yvon Tremel
François Trucy
Alex Türk
André Vallet
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Guy Vissac
Henri Weber
Abstentions
James Bordas, Philippe Darniche, Anne Heinis, Jean-Louis Lorrain et Jean
Pépin.
N'ont pas pris part au vote
Louis Althapé
Pierre André
Georges Berchet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
Paul Blanc
Christian Bonnet
Didier Borotra
Gérard Braun
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Auguste Cazalet
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Xavier Darcos
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean-Paul Delevoye
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Michel Doublet
Paul Dubrule
Xavier Dugoin
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean Faure
Gaston Flosse
Philippe François
Philippe de Gaulle
Alain Gérard
François Gerbaud
Daniel Goulet
Alain Gournac
Francis Grignon
Georges Gruillot
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Alain Hethener
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Pierre Jeambrun
Bernard Joly
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Gérard Larcher
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Simon Loueckhote
Max Marest
René Marquès
Pierre Martin
Louis Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Bernard Murat
Paul Natali
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Guy Poirieux
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Victor Reux
Henri Revol
Henri de Richemont
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
René Trégouët
Maurice Ulrich
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Serge Vinçon
N'ont pas pris part au vote
Christian Poncelet, président du Sénat, et Jacques Valade, qui présidait la
séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : | 234 |
Nombre des suffrages exprimés | 229 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 115 |
Pour : | 58 |
Contre : | 171 |
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.
SCRUTIN (n° 15)
sur l'ensemble de la proposition de loi, présentée par M. Jacques Pelletier et
plusieurs de ses collègues, relative à la reconnaissance du génocide arménien
de 1915.
Nombre de votants : | 208 |
Nombre de suffrages exprimés : | 204 |
Pour : | 164 |
Contre : | 40 |
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (17) :
Pour :
17.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :
Pour :
13.
N'ont pas pris part au vote :
10. _ MM. Jean-Michel Baylet, Georges
Berchet, Jacques Bimbenet, Fernand Demilly, Paul Girod, Pierre Jeambrun,
Bernard Joly, Aymeri de Montesquiou, Georges Mouly et Georges Othily.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :
Pour :
20. _ MM. Jean Bernard, Charles Ceccaldi-Raynaud, Jean-Patrick
Courtois, Charles de Cuttoli, Charles Descours, Alain Dufaut, Bernard Fournier,
Charles Ginésy, Francis Giraud, Adrien Gouteyron, Roger Karoutchi, Lucien
Lanier, René-Georges Laurin, Philippe Marini, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin,
MM. Jacques Oudin, Jacques Peyrat, Jean-Pierre Schosteck et Guy Vissac.
Contre :
5. _ Mme Paulette Brisepierre, MM. Robert Del Picchia,
Jacques Delong, André Jourdain et Paul Masson.
N'ont pas pris part au vote :
74, dont M. Christian Poncelet, président
du Sénat, et M. Jacques Valade, qui présidait la séance.
GROUPE SOCIALISTE (77) :
Pour :
71.
N'ont pas pris part au vote :
6. _ M. Robert Badinter, Mme Maryse
Bergé-Lavigne, M. Pierre Biarnès, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Michel
Charasse et André Rouvière.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (52) :
Pour :
19. _ MM. Jean-Paul Amoudry, Philippe Arnaud, Denis Badré,
Bernard Barraux, Jean Bernadaux, Daniel Bernardet, Gérard Deriot, André
Diligent, Serge Franchis, Marcel Henry, Pierre Hérisson, Rémi Herment, Daniel
Hoeffel, Pierre Jarlier, Marcel Lesbros, Michel Mercier, René Monory,
Jean-Marie Poirier et Philippe Richert.
Contre :
25.
Abstention :
1. _ M. Jean-Louis Lorrain.
N'ont pas pris part au vote :
7. _ MM. Didier Borotra, Jean-Pierre
Cantegrit, Jean Faure, Francis Grignon, Jean Huchon, René Marquès et Louis
Mercier.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (46) :
Pour :
24.
Contre :
9. _ MM. Joël Bourdin, Jean Boyer, Ambroise Dupont, André
Ferrand, Jean-François Humbert, Michel Pelchat, Ladislas Poniatowski, Henri de
Raincourt et Charles Revet.
Abstentions :
3. _ M. Jean-Paul Emorine, Mme Anne Heinis et M. Jean
Pépin.
N'ont pas pris part au vote :
10. _ MM. Christian Bonnet, Louis Boyer,
Charles-Henri de Cossé-Brissac, Jean Delaneau, Jean-Paul Emin, Guy Poirieux,
André Pourny, Jean Puech, Jean-Pierre Raffarin et Henri Revol.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :
Contre :
1. _ M. Hubert Durand-Chastel.
N'ont pas pris part au vote :
6.
Ont voté pour
François Abadie
Nicolas About
Guy Allouche
Jean-Paul Amoudry
Bernard Angels
Philippe Arnaud
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Denis Badré
José Balarello
Janine Bardou
Bernard Barraux
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Jean Besson
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
James Bordas
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Guy-Pierre Cabanel
Claire-Lise Campion
Jean-Claude Carle
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gilbert Chabroux
Marcel Charmant
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Yvon Collin
Gérard Collomb
Raymond Courrière
Roland Courteau
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Gérard Deriot
Dinah Derycke
Charles Descours
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
André Diligent
Claude Domeizel
Jacques Dominati
Michel Dreyfus-Schmidt
Alain Dufaut
Jean-Léonce Dupont
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Hubert Falco
Léon Fatous
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Jean François-Poncet
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Charles Ginésy
Francis Giraud
Serge Godard
Adrien Gouteyron
Louis Grillot
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Roger Hesling
Daniel Hoeffel
Roland Huguet
Pierre Jarlier
Charles Jolibois
Alain Journet
Roger Karoutchi
Philippe Labeyrie
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Lucien Lanier
Jacques Larché
Dominique Larifla
René-Georges Laurin
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Marcel Lesbros
Claude Lise
Paul Loridant
Roland du Luart
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
François Marc
Philippe Marini
Marc Massion
Serge Mathieu
Pierre Mauroy
Michel Mercier
Gérard Miquel
René Monory
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Jacques Oudin
Jean-Marc Pastor
Lylian Payet
Jacques Pelletier
Guy Penne
Daniel Percheron
Jacques Peyrat
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Xavier Pintat
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Jean-Marie Rausch
Ivan Renar
Philippe Richert
Roger Rinchet
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Gérard Roujas
Claude Saunier
Jean-Pierre Schosteck
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Raymond Soucaret
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Henri Torre
Pierre-Yvon Tremel
François Trucy
André Vallet
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Guy Vissac
Henri Weber
Ont voté contre
Jean Arthuis
René Ballayer
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Joël Bourdin
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Paulette Brisepierre
Robert Del Picchia
Jacques Delong
Marcel Deneux
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Pierre Fauchon
André Ferrand
Yves Fréville
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Jean-Jacques Hyest
André Jourdain
Alain Lambert
Henri Le Breton
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Paul Masson
Louis Moinard
Philippe Nogrix
Michel Pelchat
Ladislas Poniatowski
Henri de Raincourt
Charles Revet
Michel Souplet
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Abstentions
Jean-Paul Emorine, Anne Heinis, Jean-Louis Lorrain et Jean Pépin.
N'ont pas pris part au vote
Philippe Adnot
Louis Althapé
Pierre André
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Georges Berchet
Maryse Bergé-Lavigne
Roger Besse
Pierre Biarnès
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
Paul Blanc
Christian Bonnet
Didier Borotra
Louis Boyer
Gérard Braun
Dominique Braye
Louis de Broissia
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Auguste Cazalet
Monique Cerisier-ben Guiga
Gérard César
Michel Charasse
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Jacques Donnay
Michel Doublet
Paul Dubrule
Xavier Dugoin
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Michel Esneu
Jean Faure
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Alfred Foy
Philippe François
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Francis Grignon
Georges Gruillot
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Alain Hethener
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Pierre Jeambrun
Bernard Joly
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Gérard Larcher
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Simon Loueckhote
Max Marest
René Marquès
Pierre Martin
Louis Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Paul Natali
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Guy Poirieux
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Victor Reux
Henri Revol
Henri de Richemont
Yves Rispat
Josselin de Rohan
André Rouvière
Michel Rufin
Bernard Seillier
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
René Trégouët
Alex Türk
Maurice Ulrich
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Serge Vinçon
N'ont pas pris part au vote
Christian Poncelet, président du Sénat, et Jacques Valade, qui présidait la
séance.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes
à la liste de scrutin ci-dessus.