Séance du 21 mars 2000






SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Décès d'un sénateur (p. 1 ).

3. Démission d'un membre d'une délégation parlementaire (p. 2 ).

4. Protection des trésors nationaux. - Adoption d'une proposition de loi en deuxième lecture (p. 3 ).
Discussion générale : Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication ; MM. Serge Lagauche, rapporteur de la commission des affaires culturelles ; Ivan Renar.
Clôture de la discussion générale.

Article 2 (p. 4 )

Amendement n° 1 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 3 (supprimé)

Article 4. - Adoption (p. 5 )

Article 4 bis (supprimé)

Article 5 (p. 6 )

Amendement n° 2 rectifié de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption.
Amendement n° 3 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption.
Amendement n° 4 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre, M. Yann Gaillard. - Adoption.
Amendement n° 5 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption.
Amendement n° 6 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 6 bis (p. 7 )

Amendement n° 7 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre, M. Yann Gaillard. - Rejet.
Adoption de l'article.

Article 6 ter (p. 8 )

Amendement n° 8 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre, MM. Yann Gaillard, Ivan Renar. - Rejet.
Adoption de l'article.

Article 7 (p. 9 )

Amendement n° 9 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le ministre, MM. Ivan Renar. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Vote sur l'ensemble (p. 10 )

M. Lucien Neuwirth.
Adoption de la proposition de loi.

Suspension en reprise de la séance (p. 11 )

5. Remplacement d'un sénateur décédé (p. 12 ).

6. Communication à propos d'une commission mixte paritaire (p. 13 ).

7. Reconnaissance du génocide arménien. - Demande de discussion immédiate d'une proposition de loi (p. 14 ).

8. Relations avec les administrations. - Discussion d'un projet de loi en nouvelle lecture (p. 15 ).
Discussion générale : MM. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation ; Jean-Paul Amoudry, rapporteur de la commission des lois ; Jacques Mahéas, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, M. Robert Bret.
Clôture de la discussion générale.

Article 2 (p. 16 )

Amendement n° 2 de la commission. - MM. le rapporteur, Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer ; Jacques Mahéas. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 4 (p. 17 )

Amendement n° 3 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Jacques Mahéas. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 8 (p. 18 )

Amendement n° 4 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Jacques Mahéas. - Adoption.
Amendement n° 5 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 8 bis. - Adoption (p. 19 )

Article 10 (p. 20 )

Amendements n°s 6 et 7 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Jacques Mahéas. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article 13 bis (p. 21 )

Amendements n°s 16, 28 rectifié (priorité) de M. Josselin de Rohan, 25 à 27 de M. Philippe Darniche et 13 rectifié bis (priorité) de M. Jacques Larché repris par la commission. - MM. Alain Gérard, Philippe Darniche, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Jacques Mahéas. - Adoption, après une demande de priorité, des amendements n°s 13 rectifié bis et 28 rectifié, les amendements n°s 16, 26 et 27 devenant sans objet ; retrait de l'amendement n° 25.
Adoption de l'article modifié.

Article 13 ter (p. 22 )

Amendements n°s 17, 29 rectifié (priorité) de M. Josselin de Rohan et 15 rectifié bis (priorité) de M. Jacques Larché repris par la commission. - MM. Alain Gérard, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption, après une demande de priorité, des amendements n°s 15 rectifié bis et 29 rectifié, l'amendement n° 17 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.

Article 14 (p. 23 )

Amendement n° 18 rectifié de M. Daniel Hoeffel. - MM. Daniel Hoeffel, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Adoption de l'article.

Article 21 (p. 24 )

Amendement n° 8 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Jacques Mahéas. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles 22, 22 bis, 24, 24 bis,
25, 26 et 26 ter A. - Adoption (p. 25 )

Article 26 quater (p. 26 )

MM. Robert Bret, Jacques Mahéas.
Amendement n° 9 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 10 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 26 quinquies (p. 27 )

Amendement n° 11 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 27 AA. - Adoption (p. 28 )

Article additionnel après l'article 27 AA (p. 29 )

Amendements identiques n°s 1 rectifié bis de M. Alain Gérard et 20 de M. François Marc. - MM. Alain Gérard, François Marc, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Gérard Le Cam. - Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.

Articles 27 et 27 bis. - Adoption (p. 30 )

Vote sur l'ensemble (p. 31 )

MM. Daniel Hoeffel, Jacques Mahéas, Robert Bret.
Adoption, par scrutin public, du projet de loi.

Suspension et reprise de la séance (p. 32 )

9. Mise au point au sujet d'un vote (p. 33 ).
MM. Jean Delaneau, le président.

10. Conseil d'administration d'Air France. - Adoption d'un projet de loi (p. 34 ).
Discussion générale : MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Jean-François Le Grand, rapporteur de la commission des affaires étrangères ; Ladislas Poniatowski, Jean-Pierre Plancade, Serge Vinçon, Pierre Lefebvre.

Suspension et reprise de la séance (p. 35 )

M. le ministre.
Clôture de la discussion générale.

Articles 1er et 2. - Adoption (p. 36 )

Article 3 (p. 37 )

Amendements n°s 1 et 2 de M. Ladislas Poniatowski. - MM. Ladislas Poniatowski, le rapporteur, le ministre, Pierre Lefebvre, Jean-Pierre Plancade. - Adoption, par scrutin public, de l'amendement n° 1, adoption de l'amendement n° 2.
Adoption de l'article modifié.

Vote sur l'ensemble (p. 38 )

MM. Pierre Lefebvre, Jean-Pierre Plancade.
Adoption du projet de loi.

11. Reconnaissance du génocide arménien. - Demande de discussion immédiate d'une proposition de loi (suite) (p. 39 ).

MM. Gilbert Chabroux, auteur de la demande ; Serge Vinçon, Xavier de Villepin, président de la commission des affaires étrangères ; Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes.
Rejet, par scrutin public, de la demande de discussion immédiate.

12. Dépôt de questions orales avec débat (p. 40 ).

13. Transmission d'un projet de loi (p. 41 ).

14. Dépôt de propositions de loi (p. 42 ).

15. Textes soumis en application de l'article 88-4 de la Constitution (p. 43 ).

16. Renvoi pour avis (p. 44 ).

17. Dépôt de rapports (p. 45 ).

18. Dépôt de rapports d'information (p. 46 ).

19. Ordre du jour (p. 47 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures trente.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le procès-verbal de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté.

2

DÉCÈS D'UN SÉNATEUR

M. le président. J'ai le profond regret de vous faire part du décès de notre collègue Jean-Jacques Robert, sénateur de l'Essonne, survenu le 18 mars 2000.

3

DÉMISSION D'UN MEMBRE
D'UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE

M. le président. M. le président a reçu la démission de M. René Trégouët comme membre de la délégation du Sénat pour l'Union européenne.
La nomination de son remplaçant pourrait être inscrite à l'ordre du jour de la séance de demain, à dix-huit heures.
Il n'y a pas d'opposition ?...
Il en est ainsi décidé.

4

PROTECTION DES TRÉSORS NATIONAUX

Adoption d'une proposition de loi en deuxième lecture

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture de la proposition de loi (n° 253, 1999-2000), modifiée par l'Assemblée nationale, relative à la protection des trésors nationaux et modifiant la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane. [Rapport n° 267 (1999-2000).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, comme je l'avais souligné lors de la première lecture de cette proposition de loi, l'initiative de M. Serge Lagauche et de Mme Dinah Derycke est particulièrement opportune à un moment où se développe le marché de l'art de notre pays.
Chacun a perçu la pertinence des dispositions législatives qui nous sont proposées. L'Assemblée nationale a souligné l'urgence d'une telle réforme de la loi de 1992 afin de donner une plus grande fluidité au marché et de permettre à l'Etat de protéger les chefs-d'oeuvre du patrimoine national.
Je ne reviendrai pas sur les effets bénéfiques de la loi de 1992 qui a permis à l'Etat d'assumer en toute plénitude ses missions de protection du patrimoine national. Le travail de la commission des refus de certificat progresse et de nouvelles interdictions ont été édictées afin de permettre l'enrichissement des collections publiques.
Tel est bien le souci premier de la loi de 1992 qui accompagne l'action de l'Etat et des collectivités pour l'acquisition des oeuvres d'art patrimoniales. Même si nous reconnaissons tous que les moyens demeurent insuffisants, les résultats obtenus ne sont pas négligeables ; ils devraient s'améliorer dans le futur dès lors que l'application des mesures proposées par votre assemblée sera mise en oeuvre.
Le texte modifié par l'Assemblée nationale reprend en grande partie les mesures destinées à simplifier et alléger les formalités administratives nécessaires pour exporter les biens culturels. Toutes les avancées relatives à la durée du certificat, à l'importation et à l'exportation à titre temporaire sur le territoire national des biens culturels, au délai d'instruction des demandes de certificat, aux modalités d'estimation des oeuvres et à une plus large concertation avec les professionnels ont été retenues.
Je me réjouis que votre commission se soit prononcée favorablement sur plusieurs articles modifiés par l'Assemblée nationale. Nous évoquerons vos propositions lors de l'examen des amendements et je ne doute pas que notre débat puisse contribuer à rendre le présent texte encore plus précis.
A plusieurs reprises, dans les deux assemblées, les orateurs se sont exprimés sur la nécessité d'accompagner cette réforme de la loi de 1992 de dispositions fiscales complémentaires.
Le récent débat que nous avons eu ici même à l'occasion de l'examen de la proposition de loi de M. le sénateur Yann Gaillard m'a offert l'occasion de vous préciser que certains aménagements pourraient trouver leur place dans le cadre de l'amélioration de loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques.
Je reste persuadée que la mobilisation des collectionneurs et acheteurs potentiels passe aussi par d'autres moyens. J'ai rappelé le rôle essentiel de la procédure des dations. Elle témoigne de l'intérêt que l'Etat porte aux oeuvres majeures et aux grandes collections privées. Elle constitue l'une des réponses les plus appropriées que nombre de pays européens ont d'ailleurs également mise en oeuvre avec les mêmes objectifs que les nôtres.
Il nous faut, en outre, encourager les sociétés d'amis des musées qui, elles aussi, s'associent à de nombreuses acquisitions au bénéfice des musées nationaux et territoriaux.
Comme je l'ai précisé lors du débat sur le marché de l'art, le développement de ce secteur économique et culturel et la poursuite de l'enrichissement du patrimoine national dépendent fondamentalement du maintien de l'exonération des oeuvres d'art de l'impôt de solidarité sur la fortune.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement a montré sa détermination pour répondre à l'attente de la représentation nationale et de tous les acteurs de terrain, pour une protection renforcée du patrimoine national, pour une mise en conformité de la loi de 1992 avec le fonctionnement du marché de l'art et ses exigences économiques.
Cet objectif, j'en suis convaincue, est atteint par le texte proposé par M. Serge Lagauche et Mme Dinah Derycke. C'est pourquoi je souhaite que nous puissions le mettre en oeuvre le plus rapidement possible.
La commission des affaires culturelles du Sénat a déposé deux amendements de suppression des articles 6 bis et 6 ter qui ont été votés par l'Assemblée nationale.
Ces articles reprennent les dispositifs suggérés par le Gouvernement relatifs à deux établissements publics, celui du Centre national de la cinématographie et celui du Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou.
J'ai demandé leur examen dans le cadre de la présente proposition de loi, car ils ont une incidence sur l'application de la loi de 1992 dans leur domaine respectif.
L'ordonnance du 3 juillet 1945 devait permettre de contrôler le contenu des oeuvres cinématographiques sortant de France afin de s'assurer de « l'image de marque » de notre pays à l'étranger.
Cette formalité apparaît de nos jours particulièrement inadaptée pour préserver les objectifs initialement envisagés. En réalité, les demandes de visas d'exportation ne servent plus qu'à fournir au Centre national de la cinématographie des éléments statistiques que celui-ci peut obtenir par d'autres moyens. Pour faciliter la circulation de ces oeuvres, il convient donc de procéder à la suppression de cette obligation, ce qui permettra également d'atteindre un objectif gouvernemental important : la simplification des formalités administratives.
S'agissant du Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou, je rappelle qu'il est administré par un président nommé par décret en conseil des ministres et assisté de deux instances consultatives distinctes : d'une part, un « conseil de direction », d'autre part, un « conseil d'orientation ».
Il est apparu nécessaire de modifier l'organisation particulière de cet établissement public culturel, peu conforme aux règles générales de fonctionnement des établissements publics, et de donner au centre Pompidou une assise juridique plus sûre.
A cet effet, il est prévu de créer un conseil d'administration, seul organe collectif de direction qui regroupera à l'avenir l'ensemble des attributions des deux conseils.
La composition du futur conseil d'administration sera similaire à celle de l'actuel conseil d'orientation et devra assurer la représentation de l'Etat, du Parlement, de la ville de Paris, ainsi que de personnalités qualifiées et du personnel de l'établissement.
Je tiens à rappeler que les conservateurs du Musée national d'art moderne contribuent par leurs analyses, dans leur domaine de compétence, celui de l'art moderne et contemporain, à l'argumentation des avis des membres de la commission qui examine les demandes de certificat de sortie du territoire des biens culturels ; au demeurant, certains trésors nationaux ont été intégrés dans les collections du Musée national d'art moderne du centre Georges-Pompidou.
C'est à ce doube titre que je souhaite que votre assemblée retienne l'article 6 ter .
Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à remercier très chaleureusement M. Lagauche et Mme Derycke pour leur contribution. Ils nous ont permis d'engager l'indispensable rénovation de la loi du 31 décembre 1992 sur les trésors nationaux, qui est étroitement liée, je le répète, aux actions que nous menons ensemble pour l'enrichissement des collections publiques, la protection du patrimoine et la relance du marché de l'art de notre pays.
Je me félicite que votre assemblée soit à l'origine de ce nouveau dispositif. Il nous appartient ensemble de lui donner toute la place qui lui revient dans le cadre législatif lié au patrimoine et à la création.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Lagauche, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'Assemblée nationale a examiné, le 1er mars dernier, la proposition de loi relative à la protection des trésors nationaux, que le Sénat avait adoptée le 26 janvier dernier.
Si je me félicite de l'inscription rapide de cette proposition de loi d'origine sénatoriale à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, je ne peux que constater que le texte qui nous revient a changé de nature.
L'Assemblée nationale a, en effet, transformé un texte dont le dispositif devait remédier aux lacunes de la loi du 31 décembre 1992 en un texte « portant diverses dispositions d'ordre culturel ».
L'invention de ce genre législatif inédit, jusqu'ici réservé aux domaines sociaux et financiers, résulte de l'adoption par l'Assemblée nationale, sur proposition du Gouvernement, de deux articles nouveaux dépourvus de tout lien avec la protection des trésors nationaux : le premier procède à un toilettage très ponctuel du code de l'industrie cinématographique et consiste, en fait, en une simple mesure de simplification administrative, depuis longtemps dans les cartons ; le second opère une réforme des organes dirigeants du Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou, réforme dont les conditions d'examen par le Parlement sont pour le moins expéditives.
Ces ajouts sont d'autant plus regrettables que si deux articles seulement ont été adoptés en des termes identiques, l'Assemblée nationale a approuvé l'essentiel du dispositif voté par le Sénat, portant une appréciation nettement positive sur les objectifs recherchés par les auteurs de la proposition de loi.
Je vous en rappellerai brièvement l'économie.
La loi de 1992, qui s'est substituée à la loi douanière de 1941, a considérablement assoupli le mécanisme de contrôle des exportations de biens culturels en instaurant un dispositif très libéral qui ne permet guère à l'Etat que de retarder la sortie d'oeuvres majeures, à moins de les acquérir.
En effet, la logique de la loi de 1992 voulait qu'en cas de refus du certificat, nécessaire pour exporter une oeuvre d'art, l'administration tire, dans un délai de trois ans, les conséquences de la qualité de « trésor national » en entamant une procédure de classement.
Or, la Cour de cassation a neutralisé cette alternative : elle a, en effet, condamné l'Etat à verser une indemnité de 145 millions de francs au propriétaire d'un tableau de Van Gogh frappé d'une interdiction définitive d'exportation à la suite d'une mesure de classement. C'est la fameuse jurisprudence Walter.
La solution de l'acquisition trouve elle-même des limites dans la mesure où, à supposer qu'il dispose des fonds nécessaires, l'Etat se trouve à la merci d'un refus du propriétaire de se dessaisir de son bien, faute notamment d'une procédure permettant une évaluation du bien.
Afin de lever cet obstacle, la proposition de loi, s'inspirant en cela du dispositif britannique, complète la loi de 1992 par un article nouveau qui précise les modalités d'une procédure d'expertise.
En l'absence d'accord amiable sur le prix d'une oeuvre, il reviendra à des experts désignés par l'Etat et le propriétaire d'arrêter le prix du bien. Si le propriétaire refuse de vendre à ce prix, le refus du certificat pourra alors être renouvelé, possibilité que n'ouvrait pas la loi de 1992.
Au-delà, la proposition de loi visait à limiter l'incidence du dispositif de contrôle des exportations de biens culturels sur le fonctionnement du marché de l'art.
En allongeant la durée de validité des certificats de libre circulation et en excluant l'application de la loi de 1913 pour les biens importés depuis moins de cinquante ans, elle permettait de rassurer les propriétaires sur les conditions dans lesquelles ils peuvent disposer de leurs biens.
Afin d'éviter des formalités lourdes et injustifiées pour les transactions opérées sur le marché de l'art français, elle dispensait de certificat les exportations de biens culturels importés à titre temporaire.
En outre, elle tentait de remédier à l'incompréhension qui prévaut entre l'administration et le monde du marché de l'art en assurant une plus grande transparence du contrôle des exportations d'oeuvres d'art grâce à une modification de la composition de la commission chargée de formuler un avis sur les refus de délivrance des certificats et à la publication de ses avis, destiné à en renforcer l'autorité.
Enfin, conscient des limites auxquelles se heurtaient ces avancées du fait des montants modestes des crédits d'acquisition, le Sénat, sur proposition de la commission des finances, avait souhaité compléter les conclusions de la commission par une mesure fiscale : l'exonération de droits de mutation à titre gratuit pour les biens classés en accord avec leur propriétaire.
L'Assemblée nationale a approuvé l'essentiel du dispositif adopté par le Sénat.
Les modifications apportées par les députés ne remettent pas en cause les orientations retenues par le Sénat tant pour les dispositions introduisant dans la loi de 1992 une procédure d'acquisition que pour celles qui sont destinées à limiter les incidences du contrôle des exportations d'oeuvres d'art.
Des précisions ont pu être utilement apportées : je pense notamment aux dispositions précisant dans quelles conditions seront pris en charge les frais d'expertise imposés par la procédure d'acquisition, qui permettront d'éviter d'inutiles contentieux.
En revanche, de manière moins heureuse, l'Assemblée nationale a supprimé la précision introduite par le Sénat en première lecture visant à prévoir que la décision de renouvellement du refus de certificat n'ouvre droit à aucune indemnité. Le silence de la loi sur ce point risque d'être interprété en sens contraire. Si tel était le cas, il est fort à craindre que l'Etat ne se retrouve dans une situation comparable à celle qui prévaut dans le cadre de la loi de 1913 en cas de classement d'un objet mobilier.
De même, je regrette que l'Assemblée nationale ait supprimé certaines dispositions destinées à garantir la souplesse des procédures de contrôle des exportations.
Enfin, l'Assemblée nationale a supprimé la mesure fiscale introduite sur l'initiative de la commission des finances du Sénat, notamment au motif que cet article sortait du champ législatif couvert par la proposition de loi.
Nous ne pouvons que regretter que l'Assemblée nationale n'ait pas fait preuve de la même rigueur à l'égard des amendements proposés par le Gouvernement qui ont comme seul point commun de ne pas avoir trouvé jusqu'à présent un support législatif adapté à leur examen par le Parlement.
S'agissant de la suppression du visa d'exportation des films, cette mesure aurait sans doute mieux sa place dans une réforme d'ensemble du code de l'industrie cinématographique, dont nombre de dispositions sont obsolètes. Cette refonte qui s'impose à plusieurs titres pourrait être au demeurant utilement opérée à l'occasion de l'élaboration du code de la communication et du cinéma que l'on nous promet pour la fin de la législature.
La modification de la loi de 1975 relative au statut du centre Georges-Pompidou, si elle présente l'apparence de la logique, apparaît quant à elle un peu précipitée ; les modalités expéditives d'examen de ce texte se doublent, semble-t-il, d'une absence de concertation avec les responsables actuels de cet établissement public, qui vient de rouvrir ses portes au public.
Compte tenu de ces observations, vous comprendrez bien que je proposerai d'abord de redonner au dispositif de la proposition de loi sa cohérence, en supprimant les deux cavaliers qui ont été introduits par l'Assemblée nationale.
En ce qui concerne les dispositions de la proposition de loi relatives aux trésors nationaux, il me semble indispensable de réintroduire la disposition visant à préciser que le renouvellement du refus du certificat n'ouvre pas droit à indemnisation. Je rappellerai que l'analyse du Sénat était que le renouvellement du refus de certificat n'engendre aucun préjudice, ce qui justifiait que le principe de l'indemnisation soit exclu. La suppression de cette disposition pourrait, a contrario, être interprétée comme ouvrant droit à une indemnisation. Dans ce cas, l'Etat risque bien de se trouver confronté à une nouvelle affaire Walter, ce qui serait fort préjudiciable pour les collections publiques.
Aujourd'hui, l'acquisition demeure la seule voie possible pour permettre à l'Etat de retenir des oeuvres majeures sur le territoire national. Se priver de cette alternative en écartant la possibilité de renouveler les refus de certificat reviendrait à renoncer à toute velléité de contrôle des exportations d'oeuvres d'art.
Je proposerai également de réintroduire des dispositions adoptées par le Sénat et supprimées par l'Assemblée nationale, qui permettaient de garantir la souplesse des mécanismes prévus par la proposition de loi. Parmi celles-ci, figurent notamment la possibilité ouverte au propriétaire en cas de renouvellement du refus du certificat de redemander une expertise du bien et la compétence accordée à l'Etat en cas de refus de ses offres d'achat pour apprécier s'il y a lieu ou non de renouveler le refus de certificat. Ces dispositions me semblent opportunes. J'ai souligné en première lecture la nécessité de réconcilier le monde du marché de l'art avec celui des collections publiques. En ce domaine, les rigidités administratives sont, je crois, à l'origine de beaucoup de malentendus. L'Etat doit apprendre à comprendre les préoccupations des propriétaires d'oeuvres d'art.
Compte tenu de ces observations, je vous proposerai donc, mes chers collègues, d'adopter en deuxième lecture la présente proposition de loi, sous réserve des amendements que je présenterai.
M. le président. La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, lors de la discussion générale, en première lecture, de la proposition de loi qui nous est soumise, nous exprimions notre soutien à un dispositif visant à concilier le dynamisme du marché de l'art avec la protection de nos trésors nationaux.
La proposition de loi, qui visait alors la mise en place d'une expertise contradictoire pour la délivrance d'un certificat attestant qu'un bien ne présente pas le caractère de trésor national et qui prévoyait la fixation contradictoire d'un prix du marché et un maintien « indéfini » du refus de délivrer le certificat de non-appartenance au trésor national, dans l'hypothèse d'un refus de vente du propriétaire du bien à l'Etat, était, nous semble-t-il, de nature à protéger au mieux notre patrimoine national.
Certes, l'ajout de dispositions fiscales en faveur d'éventuels acquéreurs privés, proposé par la commission des finances de notre Haute Assemblée, tordait un peu l'esprit du texte.
Fort heureusement, l'Assemblée nationale est revenue sur ces dispositions.
Autrement plus inquiétante est la réécriture de l'article 5 pour ce qui concerne le renouvellement par l'Etat du refus d'accorder le certificat de non-appartenance au patrimoine national, qui pourrait entraîner indemnisation du propriétaire, ce qui, de fait, rendrait caduc pour partie l'excellent travail accompli par notre collègue Serge Lagauche.
Dans cette hypothèse, en effet, nous partageons l'analyse de M. le rapporteur, qui distingue en l'occurrence le classement de l'interdiction d'exportation et qui indique que : « La procédure instaurée par la proposition de loi crée une situation très différente, qui ne permet pas de considérer le préjudice résultant du refus de certificat comme certain et donc indemnisable. En effet, on ne peut pas considérer qu'il y a un préjudice matériel résultant d'une dépréciation dans la mesure où l'Etat offre de payer le bien au prix du marché international. »
C'est pourquoi nous sommes favorables à une réécriture de cet article ; nous voterons donc les amendements de la commission.
L'Assemblée nationale a, sur la demande du Gouvernement, introduit dans la proposition de loi deux articles nouveaux, l'un concernant la suppression du visa d'exportation pour les films cinématographiques, l'autre visant la suppression du conseil d'orientation du Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou.
Là encore, nous partageons la perplexité et l'analyse de M. le rapporteur sur la nécessité d'introduire dans la proposition de loi des articles n'ayant que très peu de proximité avec le texte de la proposition de loi initiale.
Pour ce qui concerne la suppression du conseil d'orientation du Centre Georges-Pompidou, nous pensons également que nous ne sommes pas en possession de toutes les informations nous permettant de légiférer au mieux des intérêts des représentants au conseil d'administration du centre.
Je rappelle en outre, madame la ministre, que je suis à l'initiative d'une proposition de loi concernant les établissements publics à vocation culturelle, dont la visée très générale justifie pleinement, me semble-t-il, que le débat sur les structures juridiques des établissements culturels dans notre pays soit ouvert et trouve une issue positive le plus vite possible, au-delà même des mouvements de cavalerie sur la ligne du front. (Sourires.)
Telles sont le réflexions dont je souhaitais vous faire part, madame la ministre, mes chers collègues, au cours de ce deuxième débat sur cette proposition de loi.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que, aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets ou propositions de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique.

Article 2



M. le président.
« Art. 2. - L'article 7 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 précitée est ainsi modifié :
« 1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Il est accordé aux biens culturels licitement importés dans le territoire douanier depuis moins de cinquante ans. » ;
« 2° Dans la première phrase du quatrième alinéa, après les mots : "par décret en Conseil d'Etat, ", sont insérés les mots : "à parité" ;
« 3° Au début de la première phrase du dernier alinéa, après le mot : "décision", sont insérés les mots : "de refus" ;
« 4° La dernière phrase du dernier alinéa est complétée par les mots : "et publiée dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat". »
Par amendement n° 1, M. Lagauche, au nom de la commission, propose de rédiger ainsi le quatrième alinéa (2°) de cet article :
« 2° Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :
« Le refus de délivrance du certificat ne peut intervenir qu'après avis motivé d'une commission composée à parité de représentants de l'Etat et de personnalités qualifiées et présidée par un membre du Conseil d'Etat. Un décret en Conseil d'Etat fixe ses modalités de désignation et les conditions de publication de ses avis. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Lagauche, rapporteur. L'Assemblée nationale est revenue sur le principe de publication des avis de la commission chargée de donner un avis sur les décisions de refus du certificat pour prévoir, à la place, la publication des décisions de refus. Si cette disposition est inspirée par le même légitime souci de transparence, elle ne répond pas à l'objectif du Sénat qui était de conférer une plus grande autorité à cette instance, dont il élargissait par ailleurs la composition. Le présent amendement tend donc à rétablir le principe de publicité des avis de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je suis favorable à cet amendement. D'abord, parce qu'il assure une plus grande transparence des avis de la commission prévue à l'article 7 de la loi de 1992, par leur publication. Ensuite, parce que cette disposition ne peut qu'améliorer les relations de l'administration et des propriétaires de biens culturels en assurant une meilleure connaissance des critères de qualité artistiques et historiques qui sont retenus pour la qualification de trésors nationaux.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, ainsi modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 3

M. le président. L'article 3 a été supprimé par l'Assemblée nationale.

Article 4



M. le président.
« Art. 4. - L'article 9 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 précitée est ainsi modifié :
« 1° Dans le premier alinéa, les mots : "trois ans" sont remplacés par les mots : "trente mois" ;
« 2° Le second alinéa est ainsi rédigé :
« Après ce délai, le refus de délivrance du certificat ne peut être renouvelé que dans le cas prévu au sixième alinéa de l'article 9-1, sans préjudice du classement du bien en application des lois du 31 décembre 1913 et n° 79-18 du 3 janvier 1979 précitées ou de sa revendication par l'Etat en application des lois du 27 septembre 1941 portant réglementation des fouilles archéologiques et n° 89-874 du 1er décembre 1989 relative aux biens culturels maritimes. » ;
« 3° L'article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les demandes de certificat sont également irrecevables en cas d'offre d'achat du bien par l'Etat dans les conditions prévues à l'article 9-1, jusqu'à l'expiration des délais prévus aux cinquième, sixième et septième alinéas du même article. » - (Adopté.)

Article 4 bis

M. le président. L'article 4 bis a été supprimé par l'Assemblée nationale.

Article 5



M. le président.
« Art. 5. - Après l'article 9 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 précitée, sont insérés les articles 9-1 à 9-4 ainsi rédigés :
« Art. 9-1 . - Dans le délai prévu au premier alinéa de l'article 9, l'autorité administrative peut, dans l'intérêt des collections publiques, présenter une offre d'achat. Cette offre tient compte des prix pratiqués sur le marché international.
« Si le propriétaire du bien n'accepte pas l'offre d'achat dans un délai de trois mois, l'autorité administrative peut faire procéder à une expertise pour fixer le prix du bien dans les conditions fixées aux troisième et quatrième alinéas.
« L'autorité administrative et le propriétaire du bien désignent, chacun à leurs frais, un expert. En cas de carence, le juge des référés procède à la désignation. Ces experts rendent un rapport conjoint dans un délai de trois mois à compter de leur désignation.
« En cas de divergences entre ces experts, le prix du bien est fixé par un expert désigné conjointement par l'autorité administrative et le propriétaire du bien ou, à défaut d'accord, par le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés. Cet expert, rémunéré à parts égales par les deux parties, rend son rapport dans les conditions prévues au troisième alinéa.
« L'autorité administrative dispose d'un délai de deux mois à compter de la remise du rapport d'expertise fixant le prix du bien pour adresser au propriétaire une offre d'achat à la valeur d'expertise. A l'issue de ce délai, en l'absence d'offre d'achat présentée par l'Etat, le certificat ne peut plus être refusé.
« Si, dans un délai de deux mois à compter de l'offre d'achat, le propriétaire la refuse ou n'a pas fait savoir qu'il l'acceptait, le refus de délivrance du certificat est renouvelé.
« Si le propriétaire du bien accepte l'offre d'achat, le paiement doit intervenir dans un délai de six mois à compter de l'accord du propriétaire à peine de résolution de la vente.
« En cas de renouvellement du refus de certificat, la procédure définie aux alinéas précédents demeure applicable.
« L'autorité administrative peut également procéder à l'acquisition des biens visés au deuxième alinéa de l'article 9 pour le compte de toute personne publique.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article.
« Art. 9-2 . - L'acquéreur, le donataire, le copartageant, l'héritier ou le légataire d'un bien culturel reconnu trésor national et non classé en application des lois du 31 décembre 1913 et n° 79-18 du 3 janvier 1979 précitées doit, dans le délai de trois mois suivant la date de l'acte constatant la mutation, le partage ou la déclaration de succession, aviser l'Etat qu'il en est devenu propriétaire.
« Art. 9-3 . - Tout propriétaire qui aliène un bien culturel visé à l'article 9-2 est tenu, à peine de nullité de la vente, de faire connaître à l'acquéreur l'existence du refus de délivrance du certificat mentionné à l'article 7 et, le cas échéant, les offres d'achat adressées dans les conditions prévues à l'article 9-1.
« Art. 9-4 . - Non modifié. »
Par amendement n° 2 rectifié, M. Lagauche, au nom de la commission, propose, dans la deuxième phrase du troisième alinéa du texte présenté par cet article pour l'article 9-1 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992, de remplacer les mots : « juge des référés » par les mots : « président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Lagauche, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel. L'Assemblée nationale a entendu préciser le juge compétent pour désigner les experts en cas de carence de l'Etat ou du propriétaire. Il s'agit là d'une précision utile. C'est au président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés que doit en revenir la charge aux deux étapes de la procédure.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2 rectifié, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 3, M. Lagauche, au nom de la commission, propose de rédiger ainsi le début de la seconde phrase du quatrième alinéa du texte présenté par l'article 5 pour l'article 9-1 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 : « Cet expert dont la rémunération est supportée pour moitié par chacune des parties rend... ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Lagauche, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 4, M. Lagauche, au nom de la commission, propose, à la fin du sixième alinéa du texte présenté par l'article 5 pour l'article 9-1 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992, de remplacer les mots : « est renouvelé » par les mots : « peut être renouvelé ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Lagauche, rapporteur. En l'occurrence, il s'agit de l'hypothèse selon laquelle le propriétaire refuse une offre d'achat. Là où vous aviez laissé à l'Etat une marge d'appréciation pour juger de l'opportunité de renouveler le refus du certificat, l'Assemblée nationale a prévu que le renouvellement serait automatique. La prodédure que nous avons souhaité mettre en place se voulait souple. Toute procédure automatique va à l'encontre de cet objectif pourtant nécessaire dans un domaine où il convient de recréer les conditions d'une négociation entre l'administration et les collectionneurs.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement émet un avis défavorable.
Pour la cohérence du nouveau dispositif d'expertise et d'acquisition des trésors nationaux, il me semble souhaitable que, en cas de refus par le propriétaire d'accepter l'offre d'achat de l'Etat, le certificat de circulation soit automatiquement refusé. En effet, dans cette situation, la décision de délivrance du certificat ne peut être librement laissée à l'appréciation de l'administration, qui doit rester liée - c'est le principe de continuité de l'Etat - par la précédente décision de reconnaissance du statut de trésor national à un bien culturel et tenue par les conséquences inhérentes à cette décision, dont celles qui sont relatives au maintien sur le territoire français du bien, sauf dans les cas expressément prévus par la présente proposition de loi.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 4.
M. Yann Gaillard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard. Madame la ministre, je ne comprends pas pourquoi vous refusez une souplesse que vous offre M. le rapporteur. C'est vous qui détenez la clé : pourquoi voulez-vous vous lier vous-même ? Je crois que la rédaction proposée par M. Lagauche est bonne, au moins pour ce qui concerne ces questions administratives. Par conséquent, je voterai cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 5, M. Lagauche, au nom de la commission, propose de compléter in fine le sixième alinéa du texte présenté par l'article 5 pour l'article 9-1 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 par une phrase ainsi rédigée : « Aucune indemnité n'est due à ce titre. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Lagauche, rapporteur. J'ai exposé longuement les motifs qui m'ont conduit à déposer cet amendement. Il s'agit d'une précision essentielle pour garantir l'efficacité d'ensemble du dispositif.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Sur ce point, dont nous avons déjà longuement débattu au cours de la première lecture, tant ici qu'à l'Assemblée nationale, l'arbitrage rendu au sein du Gouvernement n'a pas changé, et mon avis sur cet amendement est donc nécessairement défavorable.
Je comprends les motifs qui ont amené la commission des affaires culturelles du Sénat à proposer la suppression de l'indemnisation du propriétaire d'un trésor national en cas de renouvellement du refus d'exportation, après une proposition d'achat au prix du marché international refusée par le propriétaire.
Toutefois, le Gouvernement souhaite ne pas supprimer, dans la loi de 1992, la possibilité d'une indemnisation dans les cas et conditions définis par la jurisprudence administrative, ce qui, évidemment, restreint fortement les possibilités.
Cela ne veut pas dire qu'au regard des principes dégagés par le Conseil d'Etat le propriétaire d'un trésor national qui aura refusé l'offre d'achat au prix du marché international puisse justifier d'un préjudice direct, matériel et spécial de nature à lui ouvrir un droit à indemnité.
Par ailleurs, je ne pense pas que la jurisprudence sur l'indemnisation du classement, au titre de la loi du 31 décembre 1913, soit transposable au refus de certificat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 6, M. Lagauche, au nom de la commission, propose de rédiger ainsi l'antépénultième alinéa du texte présenté par l'article 5 pour l'article 9-1 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 :
« En cas de renouvellement du refus du certificat, le propriétaire du bien peut faire procéder à une expertise dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas. Si l'autorité administrative refuse d'acquérir le bien au prix d'expertise, le refus de délivrance ne peut être renouvelé. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Lagauche, rapporteur. Le Sénat, en première lecture, avait souhaité réserver au propriétaire d'un trésor national la possibilité de demander qu'il soit procédé à une nouvelle expertise du bien. Dans ce cas, si l'Etat refusait d'acquérir l'oeuvre au prix fixé par l'expertise, le refus du certificat ne pouvait plus être renouvelé.
L'Assemblée nationale a supprimé cette possibilité, et je vous propose donc de la rétablir. En effet, cette disposition s'impose à plusieurs titres : d'une part, le marché de l'art est, par définition, un marché fluctuant, et il n'est donc pas opportun de figer définitivement la valeur d'un bien ; d'autre part, pour des motifs d'équité, il n'est pas envisageable de permettre à l'Etat de refuser indéfiniment un certificat à des propriétaires qui souhaiteraient relancer une procédure d'acquisition.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Il me semble que les deux précisions apportées par cet amendement sont satisfaites par la proposition de rédaction des cinquième et neuvième alinéas de l'article 9-1 de la loi du 31 décembre 1992.
S'agissant de la possibilité offerte au propriétaire de demander une nouvelle expertise du bien en cas de renouvellement du refus de certificat, la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale pour le neuvième alinéa de l'article 9-1 me paraît satisfaire cet objectif tout en réservant la même faculté pour l'Etat.
En effet, il convient, dans cette situation, de permettre non seulement au propriétaire mais aussi à l'Etat de renouveler la procédure d'estimation pour tenir compte des éléments nouveaux susceptibles d'affecter le bien ou la situation de chaque partie.
Pour ce qui concerne la précision relative à la délivrance du certificat du bien culturel que l'Etat a refusé d'acquérir, la dernière phrase du cinquième alinéa de l'article 9-1 répond à ce souci. Je vous en rappelle les termes : « A l'issue de ce délai, en l'absence d'offre d'achat présentée par l'Etat, le certificat ne peut plus être refusé. »
Il me semble que ce texte répond au souci exprimé par la commission.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, ainsi modifié.

(L'article 5 est adopté.)

Article 6 bis



M. le président.
« Art. 6 bis. - I. - L'article 19 du code de l'industrie cinématographique est ainsi rédigé :
« Art. 19 . - La représentation cinématographique est subordonnée à l'obtention de visas délivrés par le ministre chargé du cinéma. »
« II. - Le troisième alinéa de l'article 22 du même code est supprimé. »
Par amendement n° 7, M. Lagauche, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Lagauche, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer la disposition introduite par l'Assemblée nationale, sur l'initiative du Gouvernement, concernant le code de l'industrie cinématographique. Cette disposition, qui consiste en une simple mesure administrative relevant au demeurant du domaine réglementaire, trouvera mieux sa place dans la refonte d'ensemble du code de l'industrie cinématographique qui devrait être effectuée à l'occasion de l'élaboration du code de la communication et du cinéma.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le rapporteur, j'ai bien entendu l'avis que vous avez exprimé sur ce point dans votre intervention, lors de la discussion générale. Sachez que je ne suis pas favorable à l'ajout de dispositions qui pourraient être considérées, d'une certaine façon, comme des « cavaliers », pratique qui, je le sais bien, n'est pas du meilleur art législatif.
Si vous reconnaissez l'intérêt de cette disposition, qui participe, comme vous l'avez indiqué dans votre propos, de la simplification des formalités administratives, vous êtes néanmoins défavorable à son insertion dans cette proposition de loi.
Je voudrais justifier l'importance de cette disposition. Cette réforme du code de l'industrie cinématographique trouve sa place dans la présente proposition de loi réformant la législation relative à la circulation des biens culturels, parmi lesquels figurent les oeuvres cinématographiques.
En outre, la proposition de loi vise plusieurs objectifs. Il s'agit, d'une part, de remédier aux lacunes du dispositif de protection du patrimoine national prévu par la loi du 31 janvier 1992, et, d'autre part, d'assouplir les formalités à l'exportation des biens culturels.
Or, la suppression du visa à l'exportation des films vers les pays tiers correspond à la seconde finalité. J'ajoute que l'article 15 de la loi du 31 décembre 1992 avait déjà supprimé la formalité du visa pour les films dans le cadre de la circulation intracommunautaire. Il s'agit donc, aujourd'hui, d'étendre la portée d'une mesure introduite par la loi de 1992.
C'est pourquoi le Gouvernement considère que cette proposition de réforme, ponctuelle certes, entre parfaitement, par sa nature, ses objectifs et par l'histoire même des dispositions liées à l'élaboration de la loi de 1992, dans le cadre de cette proposition de loi.
Dans ces conditions, tout en prenant acte du reproche formulé par M. le rapporteur, je voudrais, mesdames, messieurs les sénateurs, vous rendre sensibles à cette disposition qui permettrait d'améliorer nettement la situation pour les oeuvres cinématographiques, ce à quoi, je sais, vous êtes particulièrement attachés.
M. Emmanuel Hamel. Oh que oui !
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 7.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 7.
M. Yann Gaillard. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard. Nous n'avons pas eu le temps d'étudier sérieusement cette question.
Mme la ministre vient de déployer des prodiges oratoires pour tenter de nous démontrer l'existence d'un lien entre ces deux textes, et elle assimile donc les productions cinématographiques à des biens que l'on pourrait éventuellement exporter.
Contrairement à ce qu'elle a dit, il n'y a, c'est évident, vraiment aucun lien. Je n'ai pas étudié le fond de cette question, mais, pour cette seule raison de procédure, je voterai contre cette disposition.
M. Ivan Renar. Vous êtes donc favorable à l'amendement !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6 bis.

(L'article 6 bis est adopté.)

Article 6 ter



M. le président.
« Art. 6 ter. - L'article 4 de la loi n° 75-1 du 3 janvier 1975 portant création du Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou est ainsi rédigé :
« Art. 4 . - L'établissement public est administré par un conseil d'administration et dirigé par un président nommé par décret en conseil des ministres.
« Le conseil d'administration comprend des représentants de l'Etat, des parlementaires, le maire de Paris ou son représentant, des personnalités qualifiées ainsi que des représentants élus du personnel.
« La composition du conseil d'administration est fixée par décret en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 8, M. Lagauche, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Lagauche, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer la disposition introduite par l'Assemblée nationale, sur proposition du Gouvernement, en vue de modifier la loi du 3 janvier 1975 qui fixe les statuts du Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou.
Cette disposition répond au souci légitime de doter cette institution d'un statut comparable à celui des autres grands établissements publics relevant de la tutelle du ministère de la culture.
Cependant, il semble qu'en cette matière les préoccupations d'efficacité administrative qui honorent le Gouvernement n'aient pas permis de mener cette réforme en concertation avec les dirigeants actuels du Centre.
Mais, madame la ministre, si vous vous montrez aussi convaincante que sur l'amendement précédent, je crains que vos propos n'emportent le succès ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le rapporteur, vous êtes très encourageant ! (Nouveaux sourires.)
En tout état de cause, je ne peux être que défavorable à un amendement tendant à supprimer une disposition introduite dans ce texte sur mon initiative, et ce, alors même que le Musée national d'art moderne du Centre Georges-Pompidou vient de rouvrir et qu'il prend une dimension nouvelle grâce aux investissements pluriannuels dégagés et aux acquisitions rendues possibles ces derniers temps, avec l'objectif de présenter plus amplement au public les richesses du patrimoine national.
La commission propose de supprimer l'article 6 ter , adopté par l'Assemblée nationale, qui vise à mettre en place un conseil d'administration en vue de doter le Centre Georges-Pompidou d'une structure juridique qui serait véritablement associée aux décisions et ne se limiterait donc pas à rendre des avis. En effet, un établissement tel que le Centre Georges-Pompidou est confronté, en plus des décisions à caractère scientifique, à des décisions plus lourdes, des décisions financières.
La volonté de moderniser cette structure et de renforcer les pouvoirs des organes dirigeants a conduit à rechercher une formule plus adaptée, qui traduit le caractère plus concerté que doit avoir un établissement rendant à la population un service public culturel.
Il me paraît parfaitement logique que, au-delà des instances dirigeantes proprement dites, l'Etat, le Parlement, le personnel, les personnalités qualifiées, qui sont d'ailleurs aujourd'hui engagées dans le conseil d'orientation, puissent donner pleinement leur avis et se prononcer au sein de ce conseil d'administration.
Cette réforme structurelle devrait donc permettre d'approfondir ces actions en confortant le rôle et les attributions du conseil d'orientation, présidé actuellement de façon tout à fait remarquable par M. le sénateur Marcel Vidal, dans un souci à la fois de sagesse et d'évolution, et conformément à l'éthique du service public. Cet organe regrouperait la totalité des compétences dévolues aujourd'hui aux deux organismes distincts que sont le conseil de direction et le conseil d'orientation.
Je reconnais que cette proposition de réforme structurelle n'est pas intrinsèquement liée à la présente proposition de loi au regard de l'identité des objectifs recherchés ; assurer la défense du patrimoine national, améliorer la connaissance et la diffusion de ce patrimoine auprès des différents publics sans oublier, comme je le soulignais dans mon allocution introductive, le rôle d'expertise assuré par les conservateurs du musée national d'art moderne, tels sont les seuls motifs qui peuvent en effet plaider pour l'introduction de cette disposition dans le texte.
L'Assemblée nationale a été sensible à la transformation du Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou ainsi qu'à la nécessité de mieux reconnaître la contribution du conseil d'orientation et de garantir que ce grand établissement, original en lui-même, ne puisse pas être, à terme, fragilisé par une structuration ne correspondant plus tout à fait à l'énormité de son budget et à la portée de ses responsabilités.
Voilà pourquoi, en toute sagesse, l'Assemblée nationale, après un débat au cours duquel, comme l'a dit M. le rapporteur, j'ai dû faire face à toutes les remontrances qui se devaient d'être exprimées, a malgré tout introduit cette disposition dans le texte. Même si je comprends le reproche qui m'est fait, je plaide néanmoins en faveur d'un établissement qui, aujourd'hui, se remet en perspective et qui, je crois, est l'image de notre action en matière d'oeuvres d'art, puisque la collection nationale dont dispose le Centre Pompidou est l'une des plus importantes de France.
J'émets donc, au nom du Gouvernement, un avis défavorable sur l'amendement n° 8.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 8.
M. Yann Gaillard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard. Permettez-moi de m'exprimer en cet instant en tant que membre du conseil d'orientation du Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou.
Sur le fond, je sais gré à Mme la ministre de sa franchise : elle n'a pas essayé de nous prouver que la présente disposition ne constituait pas un cavalier. Quoi qu'il en soit, si la nuance est importante sur le plan de la procédure, elle l'est moins sur le fond.
Le conseil d'orientation est un organe très utile, mais son fonctionnement est un peu vicié en raison de l'absence de conseil d'administration. C'est ainsi que nous ne devrions nous prononcer que sur les grandes questions relatives à la politique artistique du centre, mais que, dans la mesure où les représentants du personnel siègent au conseil d'orientation, le tiers de nos délibérations est consacré à des questions souvent mineures, même si elles sont très importantes pour un personnel qui n'a pas d'autre occasion de se faire entendre.
Il serait donc préférable d'organiser la gestion du Centre Georges-Pompidou de manière plus classique, avec un conseil d'administration au sein duquel tout le monde serait représenté.
Je me pose toutefois un certain nombre de questions.
Tout d'abord, je me demande si l'on a consulté notre collègue M. Vidal, qui a accompli la mission qui lui a été confiée avec beaucoup de sagesse et de compétence. Il serait regrettable que cette réforme intervienne dans ces conditions, sans qu'il ait été amené à donner son avis ! En tout cas, je peux confirmer que les membres du conseil d'orientation n'ont pas été consultés.
Ensuite, je me demande ce que pense le personnel d'une telle réforme. Or, par les temps qui courent, madame la ministre, je crois que le Gouvernement aurait tout intérêt à ménager les syndicats qui font partie de sa clientèle : quand on observe ce qui se passe dans d'autres domaines et compte tenu de ce que je sais de l'état d'esprit des personnels du Centre Georges-Pompidou, qui sont particulièrement revendicatifs, je voudrais être sûr qu'un tel texte ne sera pas pour eux prétexte à manifestations ou mouvements de mauvaise humeur plus ou moins fondés.
Sur le fond, je ne suis pas complètement en désaccord, mais j'estime que cette mesure est mal préparée psychologiquement et juridiquement. Je m'abstiendrai donc.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je souhaite répondre à M. Gaillard, que je remercie de son intervention.
Cette question lancinante a été évoquée, même si elle n'a pas été traitée de façon approfondie, au cours de ces derniers mois.
Les personnels souhaitent, vous l'avez dit, être davantage présents dans les décisions. Par ailleurs, nous souhaitions donner un statut d'administrateur à ceux qui, sous la conduite éclairée, attentive et judicieuse de votre collègue M. Vidal, consacrent beaucoup de temps à l'examen des dossiers. Nous avons donc saisi l'opportunité de ce texte - je le dis en toute simplicité - pour élaborer une structure qui permette de tenir compte de la portée des décisions du conseil d'orientation, tout en étant plus reconnue qu'aujourd'hui dans la vie de l'établissement.
La composition multiple de Beaubourg, qui compte de nombreuses unités, est parfois la cause de quelques difficultés et de quelques oppositions. Il faut donc trouver le moyen de donner aux décisions prises un caractère réellement représentatif de l'ensemble des acteurs concernés. Et, si le personnel est présent - or, je l'ai dit, il souhaite l'être - ce sera aussi un moyen pour lui de se sentir davantage concerné par la vie de l'établissement.
J'ai vécu beaucoup de conseils d'administration, j'ai aussi parfois été destinataire de quelques frustrations dans le suivi de l'expression du conseil d'orientation, mais je peux vous dire que, dans l'ensemble, tout se passe bien. Il n'y a donc pas, a priori, de nuages noirs à l'horizon, même si cette décision doit être prise. Cela vous permettra, en tout cas, de mieux fonder juridiquement les décisions tout en assurant une réelle reconnaissance des représentants du personnel. Cela rééquilibrera, en quelque sorte, le fonctionnement de l'établissement.
Nous devons également être attentifs à la fragilité de l'établissement, qui est très lourd à gérer. C'est d'ailleurs à la suite d'un plaidoyer très convaincant du président Aillagon, qui souhaitait être entouré d'administrateurs - même s'il respecte profondément les membres du conseil d'orientation - que j'ai été amenée à prendre cette décision.
Si j'ai été convaincue, c'est parce que j'ai bien compris son souci - qui est d'ailleurs à son honneur - de permettre au débat d'être approfondi, en impliquant toutes les personnes concernées.
M. Serge Lagauche, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Lagauche, rapporteur. Je vous remercie de vos explications, madame la ministre. Cependant, la commission a regretté que le présent débat n'ait pas eu lieu au préalable...
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Bien sûr !
M. Serge Lagauche, rapporteur. ... et je suis lié par ses décisions. Or elle a estimé qu'elle ne pouvait pas, sans avoir été davantage informée et sans discussion, accepter un tel dispositif.
Enfin, pour en avoir discuté avec notre collègue Marcel Vidal, je peux ajouter - mais je le fais à titre tout à fait personnel et cela n'engage pas la commission - que notre collègue est tout à fait d'accord avec une réforme de ce type.
M. Ivan Renar. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. J'ai moi aussi le plus grand souci du bon fonctionnement de cette grande maison qu'est le Centre Georges-Pompidou, mais je ne pense pas que ce soit de cette manière qu'il faille procéder.
Un conseil d'administration serait en effet préférable à un conseil d'orientation, pour toutes les raisons que vous nous avez rappelées, mais c'est une question qui aurait mérité en elle-même un débat spécifique. Je pense d'ailleurs qu'il faudra songer un jour à la création d'un établissement public culturel.
Quoi qu'il en soit, en l'occurrence, la concertation n'a pas pu avoir lieu et la réflexion n'a pas pu être achevée. Je ne crois donc pas qu'une proposition de loi relative à la protection des trésors nationaux soit une couveuse naturelle pour ce type de cavalier. (Sourires.) Pour ma part, je pense qu'il serait préférable - le texte doit d'ailleurs retourner ensuite à l'Assemblée nationale - d'organiser un débat, y compris sur la loi de 1975, qui peut sans doute être modifiée.
Permettez-moi, en conclusion, d'ajouter un élément : j'ai beaucoup d'amitié pour vous, madame la ministre, mais j'ai aussi le souci de l'honnêteté intellectuelle. Or, tout à l'heure, je crois qu'un quiproquo s'est produit avec notre collègue Yann Gaillard : je ne veux pas être considéré comme le guide de la pensée ou de l'action de la majorité sénatoriale, mais je crois que notre collègue s'est exprimé tout à l'heure contre l'amendement n° 7 alors qu'il était pour. Je m'explique : notre collègue Yann Gaillard était, en fait, contre l'amendement de l'Assemblée nationale, que notre collègue Serge Lagauche nous proposait de supprimer. Par conséquent, il s'est prononcé contre ce pour quoi il était pour. C'est du Pierre Dac ! (Sourires.) Il a ainsi manifesté son accord avec l'Assemblée nationale. Il faut marquer ce jour d'une pierre blanche ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. L'article 6 bis ayant été voté conforme, il ne reviendra pas en discussion, monsieur Renar !
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6 ter.

(L'article 6 ter est adopté.)

Article 7



M. le président.
« Art. 7. - Les dispositions des articles 1er à 6 de la présente loi sont applicables aux biens culturels auxquels a été délivré le certificat prévu par l'article 5 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 précitée ou qui, à la date d'entrée en vigueur de la loi, font l'objet d'un refus de certificat, à l'exception du délai prévu au premier alinéa de l'article 9 de cette même loi, qui demeure fixé à trois ans. »
Par amendement n° 9, M. Lagauche, au nom de la commission, propose de rédiger ainsi cet article :
« Les dispositions de la présente loi, à l'exception de celles du 1° de l'article 4, sont applicables aux biens culturels auxquels a été délivré le certificat prévu par l'article 5 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 précitée ou qui, à la date d'entrée en vigueur de la loi, font l'objet d'un refus de certificat. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Lagauche, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Je suis tout à fait favorable à cet amendement.
Je profite de ce que j'ai la parole pour présenter publiquement mes excuses à M. le rapporteur, car je sais que la technique des cavaliers contrarie fortement votre commission. Je m'engage donc à être plus respectueuse des procédures auxquelles, je le sais, votre assemblée est attachée.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 9.
M. Ivan Renar. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Je vais voter pour cet amendement, monsieur le président, en espérant que ce n'est pas parce que notre collègue s'appelle Lagauche que la droite va voter contre. (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 7 est ainsi rédigé.
Les autres dispositions de la proposition de loi ne font pas l'objet de la deuxième lecture.

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Neuwirth, pour explication de vote.
M. Lucien Neuwirth. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous avons examinée aujourd'hui en deuxième lecture est un texte dont l'importance ne peut être sous-estimée. En effet, le dispositif prévu vise à renforcer le processus de protection de notre patrimoine culturel, qui est un élément fondamental de notre identité nationale et de la mémoire historique de notre pays.
La France, c'est vrai, a malheureusement perdu sa place de leader au sein du marché de l'art. Si, au début des années cinquante, notre pays était au centre du marché de l'art mondial, aujourd'hui, la France est loin derrière les Etats-Unis et la Grande-Bretagne.
Notre pays subit un peu plus chaque année la fuite de son patrimoine culturel, et ce pour deux raisons. En premier lieu, notre législation est, pour l'instant, inadaptée en matière de ventes publiques et de protection des trésors nationaux ; en second lieu, il existe une carence en matière de dispositions fiscales et légales en faveur du mécénat, carence que j'avais signalée lorsque j'avais rapporté le projet de loi sur le mécénat.
L'Etat doit s'engager et mettre en oeuvre des moyens financiers qui nous permettent de conserver sur notre territoire les trésors nationaux.
Même si cette réforme reste modeste, cette proposition de loi a déclenché une véritable prise de conscience et a permis d'ouvrir le débat sur des problèmes qui, jusqu'alors, étaient laissés de côté.
C'est pourquoi notre groupe votera ce texte, convaincu qu'il est que la protection de notre patrimoine national exige la mise en place d'une véritable politique française en la matière.
Cependant, nous regrettons que les propositions formulées par notre excellent collègue Yann Gaillard n'aient pas toutes été retenues. Je tiens d'ailleurs à le féliciter pour la grande qualité de son travail, qui fait honneur, encore une fois, à notre groupe.
Il s'agit là, madame la ministre, d'un premier pas. C'est pourquoi notre groupe l'accompagnera, en espérant que, bientôt, nous arriverons au bout du chemin. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président. Je constate que la proposition de loi a été adoptée à l'unanimité !
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est supendue.
(La séance, suspendue à onze heures trente, est reprise à seize heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.
Monsieur le ministre, je suis heureux de vous voir dégagé des ennuis de circulation, qui sont malheureusement fréquents dans Paris en ce moment.

5

REMPLACEMENT D'UN SÉNATEUR DÉCÉDÉ

M. le président. J'informe le Sénat que M. le ministre de l'intérieur a fait connaître à M. le président du Sénat que M. Max Marest est appelé à remplacer, en qualité de sénateur de l'Essonne, à compter du 19 mars 2000, M. Jean-Jacques Robert, décédé le 18 mars 2000.

6

COMMUNICATION À PROPOS
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le président. J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi modifiant le code pénal et le code de procédure pénale et relatif à la lutte contre la corruption est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

7

RECONNAISSANCE DU GÉNOCIDE ARMÉNIEN

Demande de discussion immédiate
d'une proposition de loi

M. le président. En application de l'article 30 du règlement, MM. Chabroux et Bret demandent la discussion immédiate de la proposition de loi de MM. Robert Bret, Bernard Piras et plusieurs de leurs collègues relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915 (n° 238, 1998-1999).
Cette demande est signée par au moins trente sénateurs.
Conformément au quatrième alinéa de l'article 30 du règlement, il va être procédé à l'appel nominal des signataires.
Huissier, veuillez procéder à l'appel nominal.

(L'appel nominal a lieu.) Ont signé cette demande et répondu à l'appel de leur nom : MM. Guy Allouche, Bernard Angels, Bertrand Auban, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Jean-Luc Bécart, Jean-Pierre Bel, Mmes Danielle Bidard-Reydet, Nicole Borvo, Yolande Boyer, MM. Robert Bret, Bernard Cazeau, Gilbert Chabroux, Marcel Charmant, Gérard Collomb, Raymond Courrière, Marcel Debarge, Mmes Dinah Derycke, Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Claude Domeizel, Michel Duffour, Léon Fatous, Guy Fischer, Thierry Foucaud, Serge Godard, Jean-Noël Guérini, Claude Haut, Serge Lagauche, Gérard Le Cam, Pierre Lefebvre, André Lejeune, Mme Hélène Luc, MM. Jacques Mahéas, François Marc, Marc Massion, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Jean-Marc Pastor, Daniel Percheron, Jean-Claude Peyronnet, Jean-François Picheral, Bernard Piras, Jean-Pierre Plancade, Mme Gisèle Printz, MM. Ivan Renar, René-Pierre Signé, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, André Vézinhet, Marcel Vidal et Marcel Bony.

M. le président. Mes chers collègues, la présence d'au moins trente signataires ayant été constatée, il va être procédé à l'affichage de la demande de discussion immédiate sur laquelle le Sénat sera appelé à statuer, conformément à l'article 30 du règlement, au cours de la présente séance, après l'expiration du délai minimum d'une heure et après la fin de l'examen du dernier texte inscrit par priorité à l'ordre du jour.
La demande va être communiquée sur-le-champ au Gouvernement.

8

RELATIONS AVEC LES ADMINISTRATIONS

Adoption d'un projet de loi en nouvelle lecture

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi (n° 256 rectifié, 1999-2000), adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations. [Rapport n° 268 (1999-2000).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, pour la troisième fois, le projet de loi que je vous propose d'adopter, relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, vient en débat devant vous. Ce texte contribuera à une oeuvre de réforme de l'Etat entreprise depuis longtemps, marquée par quelques grandes étapes comme la décentralisation, le renouveau du service public et l'effort accru de déconcentration de ces dernières années.
Il s'agit d'obtenir que les administrations, toutes les administrations, soient plus simples d'accès, plus rapides dans leurs réponses, plus claires dans leur fonctionnement, car tout cela constitue aussi bien une demande constante du public qu'une nécessaire amélioration des droits des citoyens.
De nombreuses dispositions sont désormais adoptées par les deux chambres du Parlement dans une rédaction identique. Toutefois, à mon grand regret, la commission mixte paritaire réunie le 19 janvier dernier n'est pas parvenue à élaborer un texte commun.
Nous allons donc revenir sur les points sur lesquels le désaccord de votre assemblée s'est déjà exprimé, et je ne demande qu'à expliquer encore une fois la position du Gouvernement sur chacun d'eux.
Je fais, en particulier, allusion à l'article 2, qui institue l'obligation pour les administrations d'organiser un accès simple aux normes de droit et fait de la diffusion des textes juridiques une mission de service public, ainsi qu'au premier alinéa de l'article 8, qui oblige l'administration qui détient un document à le communiquer à celui qui en fait la demande.
Ces dispositions manifestent le souci du Gouvernement et du législateur de faciliter l'accès au droit et aux documents que les administrations doivent faire connaître, sans contraindre le public à reproduire, par ses démarches, les complexités de notre organisation administrative.
Les avancées qu'ont permises les précédentes lectures de ce projet démontrent néanmoins clairement que nous partageons l'ambition de défendre notre service public, en même temps que d'accroître les droits des citoyens.
Je me réjouis, en particulier, de ce que, désormais, il n'y ait plus entre nous de désaccord quant aux recours des associations devant le juge. Sur ce point, je partage, comme je vous l'ai dit, votre souci d'éviter les recours abusifs, mais je vous ai proposé une autre démarche, qui consiste à engager une réflexion d'ensemble sur cette vraie question. Je constate avec plaisir que vous avez accepté cette démarche puisque vous ne proposez plus le dépôt obligatoire d'un cautionnement avant certains recours.
Je pense aussi à l'article 10, qui améliore la transparence sur l'utilisation des fonds publics, en créant à cet effet une voie d'information simplifiée, notamment en instaurant, pour les organismes bénéficiaires de subventions, l'obligation de retracer dans un compte rendu financier, qui sera communicable au public, l'utilisation de la subvention.
Je note que votre commission a approuvé, dans l'ensemble, cet effort de transparence et qu'il n'y a plus, désormais, de désaccord important sur cet objectif.
Il reste pourtant un point essentiel sur lequel nous n'avons pas encore avancé vers une meilleure compréhension réciproque : la transposition législative de la jurisprudence « Berkani ». Je m'expliquerai encore une fois devant vous sur l'objectif visé par le texte qui vous est proposé. Je souhaite toutefois vous rappeler dès maintenant l'essentiel du débat sur ce point.
Les agents contractuels des services publics administratifs, qui, sous l'empire des jurisprudences antérieures, étaient considérés comme « agents de droit privé », car ne participant pas directement à l'exécution du service public, seront désormais régis par le droit public. Il s'agit, pour le Gouvernement, de préciser le sort de ceux qui ont été recrutés antérieurement, et donc dans des conditions de droit privé.
Une clause spécifique dans chacun des deux articles du texte prévoit qu'ils bénéficieront d'un droit d'option pendant un an pour choisir entre les deux régimes - droit public ou droit privé. En effet, ils peuvent avoir avantage à conserver leur statut de droit privé, notamment pour pouvoir cumuler plusieurs emplois lorsqu'ils ne travaillent pour une administration qu'à temps incomplet.
Une autre clause prévoit l'octroi d'un contrat à durée indéterminée pour ceux d'entre eux qui auront été recrutés avant la date de promulgation de la loi.
Les deux articles qui appliquent ces dispositions aux contractuels de l'Etat et à ceux des collectivités territoriales ont provoqué l'échec de la commission mixte paritaire. Vous aviez alors, en effet, adopté un texte moins favorable aux agents, aux termes duquel ces salariés deviendraient, en choisissant de devenir salariés de droit public, des contractuels à durée déterminée.
Un amendement adopté par votre commission des lois reprend, aujourd'hui, une rédaction qui conduirait au même résultat. Le Gouvernement ne peut pas souscrire à un tel retour en arrière, qui mettrait en situation de précarité des salariés qui, pour le moment et pour une part d'entre eux, ont une situation stable. Je vous demanderai encore, aujourd'hui, de conserver aux agents le bénéfice de la situation la plus favorable.
Sur la même question, j'ai bien noté également le souci que vous manifestez à propos des recrutés locaux. Un amendement de votre commission des lois étend le bénéfice des dispositions de l'article 26 quater aux personnes recrutées par les services français à l'étranger.
Je me bornerai, car nous évoquerons ce sujet important au cours de l'examen des articles, à rappeler que cette question particulière est l'objet de la plus grande attention du Gouvernement, qui avait accueilli très favorablement l'introduction par l'Assemblée nationale d'un alinéa supplémentaire à l'article 26 quater prévoyant qu'un rapport informera le Parlement, dans un délai d'un an, sur le bilan du statut social des personnes ainsi recrutées.
Avant de conclure, je me permettrai de vous dire ma surprise face aux amendements déposés respectivement par M. Larché et M. de Rohan visant, à l'occasion de cette nouvelle lecture et pour la première fois, à supprimer les articles 13 bis et 13 ter qui, somme toute, se bornent à étendre aux régions et départements un dispositif concourant à la démocratie locale et qui existe déjà depuis plusieurs années pour les communes.
Vous aviez admis cette extension lors du précédent débat, étant bien entendu que le recours ainsi ouvert est d'une utilisation assez rare dans les communes et n'est ouvert que sous un strict contrôle du juge administratif.
Je suis sûr que ce dernier débat mettra en lumière, avant tout, notre volonté commune de répondre toujours mieux aux besoins de la population et aux exigences de notre temps en matière de services publics. Nous allons promouvoir l'évolution des administrations vers plus d'accessibilité, d'efficacité, de rapidité de réaction : nous répondrons ainsi à une demande persistante et légitime de nos concitoyens.
Au-delà des évolutions structurelles, toujours difficiles à conduire, au-delà de la poursuite de la décentralisation souhaitée par beaucoup, il n'est pas secondaire de moderniser, au quotidien, la pratique des services publics, plus particulièrement celle des administrations. Ce projet de loi constitue une étape supplémentaire attendue. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire qui s'est réunie le 19 janvier 2000 n'est pas parvenue à élaborer un texte commun en vue de renforcer les droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
Pourtant, au cours de la navette législative, les positions des deux assemblées s'étaient rapprochées. Un consensus a été trouvé sur nombre de dispositions. Il s'agit notamment de la mise en cohérence des grandes lois relatives à la transparence administrative : loi « informatique et libertés », loi relative à la communication des documents administratifs et loi sur les archives. Il en a été de même s'agissant des mesures de transparence financière, de l'aménagement des procédures administratives et des dispositions confortant le rôle et les moyens du médiateur de la République.
Nous pouvons sans doute regretter que certains malentendus n'aient pu être levés au cours des lectures successives de ce texte - deux lectures dans chaque assemblée et une nouvelle lecture à l'Assemblée nationale. Ces malentendus expliquent sans doute le nombre important des articles restant en discussion, le Sénat étant saisi en nouvelle lecture de vingt-trois articles, alors que le projet de loi initial en comportait vingt-huit. Il est vrai - faut-il le rappeler ? - qu'une part de cette « inflation législative » est due à l'adjonction par le Gouvernement de « cavaliers » relatifs à la fonction publique.
Au cours de la commission mixte paritaire, trois sujets ont été présentés comme « non négociables » par l'Assemblée nationale. Il s'agit des dispositions concernant la lutte contre les recours abusifs, les maisons des services publics et la transposition dans la loi de la jurisprudence « Berkani » relative aux agents non titulaires de la fonction publique.
Sur les trois points d'achoppement de la commission mixte paritaire, la commission des lois du Sénat considère qu'un rapprochement avec la position de l'Assemblée nationale est possible. Afin d'aboutir à un compromis global et équilibré, la commission vous proposera de reprendre les avancées que j'avais proposées en commisison mixte paritaire.
En premier lieu, l'article 5 bis tendait à la consignation d'une somme d'argent par les associations déposant un recours devant la juridiction administrative. Deux principes devaient être conciliés : l'exigence d'une bonne administration de la justice, d'une part, l'égal accès des requérants à la justice, d'autre part.
Le Sénat avait souligné l'intérêt d'inscrire dans la loi le principe de la lutte contre les recours abusifs qui entravent le fonctionnement de la justice administrative et menacent de paralysie l'activité des collectivités publiques. L'Assemblée nationale, tout en reconnaissant la pertinence du problème soulevé, a maintenu en nouvelle lecture la suppression de cet article. La commission des lois du Sénat vous proposera de disjoindre cet article du présent projet de loi, afin de traiter cette question à l'occasion d'un texte législatif mieux approprié.
Je me permets à cet égard de rappeler l'engagement pris par M. le ministre lors du précédent débat et réitéré aujourd'hui, tendant à l'ouverture d'une réflexion. Je me permets également, monsieur le ministre, de souligner le caractère nécessaire et urgent de cette mise en chantier.
Deuxième point important du débat, les articles 24 à 26 donnent un cadre législatif à la création des maisons des services publics. Bien que les deux assemblées n'aient pas de divergence de fond, elles s'opposent quant à l'opportunité d'inscrire ces dispositions dans une loi autonome, alors que la loi d'orientation sur l'aménagement et le développement durable du territoire qui est en vigueur traite déjà des maisons des services publics.
La commission des lois proposera d'adopter ces articles dans la rédaction retenue par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, bien qu'une telle solution présente des inconvénients en termes de qualité législative. Qu'importe en effet que le dispositif des maisons des services publics figure dans la loi « Zuccarelli » ou dans la loi « Voynet » ! L'essentiel n'est-il pas, monsieur le ministre, que les citoyens aient un « accès simple aux règles de droit » ? A cet « accès simple », vous avez vous-même exprimé l'attachement du Gouvernement lorsque, en séance publique, à l'Assemblée nationale, vous avez défendu l'inscription du principe des maisons des services publics dans la loi relative à l'aménagement du territoire.
Dernier point présenté comme « non négociable » en commission mixte paritaire, les articles 26 quater et 26 quinquies , relatifs aux conséquences de la jurisprudence « Berkani » du tribunal des conflits pour les agents non titulaires de l'Etat et de la fonction publique territoriale, et qui ont été introduits en cours de navette par le Gouvernement.
Ces articles donnent force de loi à la jurisprudence selon laquelle les agents travaillant pour le compte d'un service public administratif géré par une personne publique sont, quel que soit leur emploi, des agents contractuels de droit public. Ils sont devenus le principal enjeu du présent projet de loi, qui, décidément, aura subi bien des contorsions, pour en arriver aujourd'hui à un contenu fort différent de sa consistance originelle.
Leurs implications sont en effet considérables pour les employeurs publics, au premier rang desquels on trouve les employeurs locaux. Lors de la commission mixte paritaire, mes collègues sénateurs avaient insisté sur les risques qu'allait engendrer l'embauche massive de ces personnels sous contrat de droit public à durée indéterminée. J'avais alors proposé une rédaction de conciliation équilibrée et conforme aux principes actuels du droit de la fonction publique.
En quoi consistait-elle ?
Tout en acceptant d'inscrire dans la loi les conséquences de la jurisprudence « Berkani », je vous propose d'y apporter deux correctifs importants : d'une part, il n'est pas souhaitable de rendre automatique l'attribution d'un contrat de droit public aux agents concernés, cette modalité devant rester une faculté, en accord avec l'employeur, d'autre part, la notion trop imprécise de « contrats de droit public à durée indéterminée » constitue une novation juridique incertaine. Conformément au droit commun des contrats de recrutement dans la fonction publique, je proposerai de prévoir des contrats de trois ans renouvelables par reconduction expresse, c'est-à-dire avec l'accord de l'employeur.
Après avoir, dans un premier temps, adopté cette solution de conciliation pour la fonction publique de l'Etat, la commission mixte paritaire a finalement échoué sur la coordination en matière de fonction publique territoriale.
Mes chers collègues, considérant que cette rédaction respecte les droits des agents tout en tenant compte des contraintes pesant sur les employeurs, la commission des lois vous invitera à adopter la proposition que j'avais formulée en commission mixte paritaire.
Ainsi, sur sept articles concernant trois sujets présentés comme « non négociables » par l'Assemblée nationale, la commission des lois proposera au Sénat d'en adopter cinq dans la rédaction retenue par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture. Je souhaite que cet effort de rapprochement ne soit pas le seul fait des sénateurs, mais trouve un écho lors de la lecture définitive à l'Assemblée nationale.
Les autres dispositions du projet de loi peuvent elles aussi, a fortiori , donner lieu à un consensus dans les deux assemblées.
Malgré notre volonté de rapprochement avec l'Assemblée nationale, force est cependant de constater que certaines dispositions du texte sont apparues sous un jour nouveau lors de cette dernière lecture au Sénat. Je veux insister sur deux d'entre elles.
Tout d'abord, une interrogation demeure sur le champ d'application de la loi, bien que les deux assemblées aient adopté dans les mêmes termes, dès la première lecture, l'article 1er définissant les autorités administratives soumises au présent projet de loi. En raison de la grande diversité des questions soulevées par ce texte, le champ d'application de la loi appelle sans doute des précisions de la part du Gouvernement. En particulier, pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, dans quelle mesure le projet de loi s'appliquera aux autorités administratives indépendantes ? Celles-ci sont en effet régies par des textes spéciaux, précisant par exemple la nature de leurs décisions.
De plus, certaines interrogations ont été soulevées concernant l'action en substitution des contribuables, actuellement applicable aux seules communes et structures intercommunales, et que le projet de loi, sur l'initiative de l'Assemblée nationale, étend aux départements et aux régions.
L'action en substitution, aussi appelée « autorisation de plaider », est une procédure subsidiaire, qui permet de pallier la carence d'une commune dont l'action a été sollicitée.
Le contribuable qui souhaite engager une action juridictionnelle au nom de la commune, que ce soit en matière administrative, civile ou pénale, adresse sa demande d'autorisation au tribunal administratif. Le contribuable ne sera autorisé à plaider au nom de la commune que si celle-ci, appelée à en délibérer, a négligé ou refusé d'agir en justice.
En pareil cas, la décision du tribunal administratif ne présente pas de caractère juridictionnel.
Selon une jurisprudence constante, deux conditions sont requises pour obtenir l'autorisation de plaider : d'une part, le recours ne doit pas être dépourvu de chances de succès, d'autre part, il doit offrir un intérêt suffisant pour la commune.
Cette procédure, qui existe dans les communes depuis la loi municipale du 18 juillet 1937, remonte à une époque où les maires n'avaient pas la capacité d'engager la commune en justice de leur seule initiative ; ils devaient au préalable obtenir l'autorisation du conseil de préfecture.
De ce fait, cette procédure pose quelques problèmes de principe : d'une part, l'intervention d'autorités administratives dans le déclenchement d'une action en justice peut paraître curieuse au regard du principe de séparation des pouvoirs ; d'autre part, la survivance d'une tutelle exercée par l'Etat sur les collectivités locales est surprenante depuis l'intervention des lois de décentralisation de 1982-1983.
Il est vrai que le Conseil d'Etat a fait une utilisation circonstanciée des deux conditions de recevabilité de l'autorisation de plaider. Sa jurisprudence est assez stricte, dans le souci de ne conduire ni à une paralysie des communes ni à l'encombrement des tribunaux administratifs.
La commission des lois proposera des aménagements à cette procédure, afin de tenir compte des spécificités et de la taille des collectivités concernées, départementales et régionales.
Tout d'abord, il ne faudrait pas que des réunions extraordinaires se multiplient au point de paralyser le conseil général ou le conseil régional. La commission proposera donc de remplacer la réunion extraordinaire du conseil général par une réunion qui se tiendra dans les conditions de droit commun.
Ensuite, les tribunaux administratifs doivent disposer des moyens leurs permettant de santionner les tentatives d'instrumentalisation de la justice. A cet effet, la commission des lois proposera d'étendre la sanction pour recours abusif aux demandes abusives d'autorisation de plaider.
Sour le bénéfice de ces propositions, la commission vous propose, mes chers collègues, d'adopter en nouvelle lecture le projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous voici saisis aujourd'hui pour la troisième fois de ce projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations que nous avons pris l'habitude d'appeler projet DCRA.
A ce stade du débat, il pourrait paraître superflu de revenir sur le détail des mesures proposées. C'est pourquoi je me contenterai de rappeler d'une phrase l'objet de ce projet de loi : offrir aux citoyens une administration plus proche, plus accessible, plus transparente et faciliter leurs démarches en simplifiant les procédures.
Or, si l'ambition revendiquée dans ce texte, dont personne ne conteste ni la portée ni l'objectif, est de simplifier les procédures administratives - et donc la vie quotidienne des Français - il est à déplorer que ce maître mot de simplification n'ait guère illustré nos débats ! Mais, comme le diraient familièrement les Shadoks, pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?
Remettre sur le métier le même ouvrage n'a évidemment pas que des désavantages et bien des dispositions ont été enrichies ; certaines sont déjà adoptées conformes, en particulier le volet concernant le médiateur de la République, la transparence, avec l'articulation entre la loi « informatique et libertés » et la loi « archives », la délivrance d'un accusé de réception aux demandes, la réduction des délais de décisions implicites d'acceptation et l'aménagement des décisions implicites de rejet.
Néanmoins, des raisons plus ou moins légitimes liées aux aléas du calendrier parlementaire ont conduit Gouvernement et parlementaires à introduire bon nombre de dispositions nouvelles. Or, tandis que, sur le texte initial, les différentes navettes ont permis un rapprochement entre les deux assemblées, c'est autour de ces ajouts que se sont cristallisés les désaccords persistants.
Parmi ces pommes de discorde récurrentes, on trouvait ainsi, principalement, la lutte contre les recours abusifs des associations - article 5 bis - les maisons des services publics - articles 24 à 26 - et la transposition dans la loi de la jurisprudence dite « Berkani », relative aux non-titulaires de la fonction publique - articles 26 quater et 26 quinquies .
Nous nous félicitons de voir que cette ultime lecture va permettre de résoudre les deux premiers points. La commission des lois du Sénat renonce à l'amendement qui visait à imposer la consignation d'une somme d'argent aux associations souhaitant déposer un recours pour excès de pouvoir contre, par exemple, une autorisation d'urbanisme. Il importait que la capacité d'expression du citoyen ne soit pas entravée, même si nous avons conscience du fait qu'il existe, de la part de certaines associations, des pratiques de recours abusifs, pratiques contre lesquelles il conviendra de déterminer des mesures adéquates dans un cadre législatif plus approprié.
Autre sujet de satisfaction, le Sénat accepte d'intégrer les dispositions concernant les maisons des services publics dans une logique d'amélioration des relations entre administrations et usagers, et non plus seulement dans une logique d'aménagement du territoire.
Je note également, pour m'en réjouir, d'autres avancées en direction du texte de l'Assemblée nationale, s'agissant de dispositions d'ordre technique que je ne détaillerai pas ici.
Demeure néanmoins le principal point de dissension entre Assemblée nationale et Sénat, cause de l'échec de la commission mixte paritaire du 19 janvier dernier - et cause, peut-être, d'une quatrième lecture, même si je souhaite que nous trouvions aujourd'hui, monsieur le rapporteur, un terrain d'entente ! Il s'agit, vous l'aurez deviné, de l'adaptation de la jurisprudence « Berkani », sur laquelle nos positions divergent.
Notre rapporteur propose, en effet, de faire bénéficier les agents non titulaires déjà en fonction d'un contrat d'une durée maximale de trois ans, renouvelable par reconduction expresse. Or nous ne pouvons pas nous satisfaire d'une telle proposition, sachant que les personnels concernés disposent actuellement d'un contrat de droit privé à durée indéterminée.
Il s'agirait d'un net recul par rapport au texte du Gouvernement, qui envisage un contrat de droit public à durée indéterminée, avec un délai d'option d'un an pendant lequel les agents pourront choisir un contrat de droit privé soumis aux dispositions du code du travail.
Ce dispositif, issu de nombreuses concertations, a reçu l'accord des syndicats et semble seul à même de répondre aux difficultés constatées. A l'inverse, proposer aux 15 000 agents concernés des contrats à durée déterminée reconductibles ne ferait qu'aggraver des situations de précarité déjà préoccupantes et faire la part belle aux employeurs.
Nous y reviendrons éventuellement à l'appel de l'article, mais je voudrais ouvrir tout de suite une parenthèse en forme d'interrogation à propos de la liste des emplois concernés. Est-on sûr de réaliser pleinement l'objectif fixé, à savoir mettre fin aux contentieux et, surtout, à des situations de précarité durement ressenties, alors qu'il est extrêmement difficile de dresser une liste exhaustive qui ne laisserait personne sur le bord du chemin ?
En ce qui concerne les recrutés locaux, vous connaissez la position des socialistes. Notre collègue Mme Monique Cerisier-ben Guiga interviendra sur ce sujet.
Enfin, j'aimerais souligner un dernier point en regrettant que notre Haute Assemblée refuse qu'une autorité administrative soit compétente pour communiquer un document qu'elle détient sans en être l'auteur. C'est là faire montre d'une vision un peu conservatrice du service public, et perdre de vue les objectifs de transparence et de simplification qui doivent être les nôtres. On me rétorquera qu'il est toujours possible de faire appel à la justice ou à la Commission d'accès aux documents administratifs, la CADA. Mais, cette dernière, toute diligente soit-elle, connaît des délais de réponse de un à trois mois, ce qui entrave pour le moins toute démarche qui nécessiterait la communication simple et rapide d'un document : l'objectif recherché est pourtant bien de faciliter les démarches administratives des citoyens.
Malgré les divergences qui nous séparent encore, je crois que nous pouvons tous nous réjouir du fait qu'après quatre années de débats sur l'amélioration des relations entre les citoyens et l'administration - pour mémoire, sous le précédent gouvernement, M. Perben avait déposé, en septembre 1996, un texte qui avait fait l'objet de deux lectures dans chaque assemblée - nous approchions du but et qu'un texte soit enfin adopté.
Rendre l'Etat plus proche du citoyen, plus accessible et plus efficace est une des priorités du Gouvernement. Ce texte en est un des éléments. Il s'inscrit bien sûr dans la perspective plus large de la réforme de l'Etat. Au fond, il s'agit, avant tout, de simplifier les démarches administratives de nos concitoyens par des mesures de bon sens dont ils apprécieront, au quotidien, l'aspect tout à fait concret.
Cette ultime lecture va permettre de rapprocher encore le point de vue des deux assemblées. Le groupe socialiste, favorable au texte qui revient de l'Assemblée nationale, reste néanmoins très attentif à l'examen des articles, et réserve son vote à l'issue de nos travaux.
M. le président. La parole est à Mme Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, au mois de juillet de l'an dernier, à la suite d'une mission, j'ai remis au Premier ministre, M. Lionel Jospin, un rapport sur l'exclusion sociale dans les communautés françaises à l'étranger.
Je tiens à répéter ici solennellement que l'exclusion sociale chez les Français de l'étranger commence dans les services de l'Etat à l'étranger ; la précarité, la pauvreté sont dans nos propres services ! La loi prévoirait-elle dix lectures de ce texte qu'à la dixième lecture je protesterais encore, au nom des agents contractuels des services de l'Etat à l'étranger, contre leur exclusion du bénéfice du contrat de droit public reconnu par cette loi à leurs homologues de France !
En effet, s'il est un secteur où la protection juridique offerte aux salariés par un tel contrat serait nécessaire, c'est bien celui-là. En trente ans de vie à l'étranger, en huit ans de mandat sénatorial, je n'ai jamais vu l'Etat français se conduire en bon employeur à l'égard des recrutés locaux de ses propres services.
Il existe heureusement des ambassadeurs, des directeurs d'institut et des consuls qui se montrent humains, qui traitent avec respect et justice les personnels non fonctionnaires de leurs services, s'efforçant d'améliorer leurs conditions salariales et contractuelles. Mais j'ai eu le regret de constater tout au long de ces années que ces bons comportements d'employeurs n'étaient pas aussi répandus qu'on pourrait le souhaiter.
L'ambassadeur Amiot lui-même, dans le rapport qu'il a remis voilà un an au ministre des affaires étrangères sur les recrutés locaux, déplore ce qu'il appelle diplomatiquement et pudiquement des dérapages trop nombreux, que j'ai constatés comme lui.
Je citerai, parmi les cas les plus fréquents, l'arbitraire dans le recrutement et le licenciement, l'arbitraire dans la fixation de la rémunération, les tâches supplémentaires, parfois d'ordre privé, exigées et non rémunérées, les attitudes méprisantes à l'égard de personnes qui n'ont d'autre choix, face à la perte de leur gagne-pain, que de courber l'échine. C'est d'ailleurs ce dernier aspect de leur condition qui fait l'objet des plaintes les plus vives et récurrentes des agents contractuels et vacataires que je rencontre lors de mes tournées.
Toutefois, ce n'est pas aux personnes qu'il faut s'en prendre, c'est au système ! C'est l'Etat qui place ses fonctionnaires d'autorité dans une position malsaine. La relation d'employeur à employé traduit un rapport de force inégal, qui est la source des dérives que j'ai évoquées, lorsqu'un contrat de travail et des garanties solides ne sont pas offerts à la partie la plus faible en contrepartie de la sujétion qui lui est imposée. C'est là le B-A-BA du droit du travail en France depuis maintenant cent-cinquante ans, mais on ne s'en est pas encore aperçu dans la plupart des services de l'Etat à l'étranger !
Le ministère des affaires étrangères, alerté par les justes protestations des syndicats, a reconnu depuis bientôt trois ans le caractère inacceptable de la situation faite à ses agents contractuels et, pis encore, à ses vacataires. Mais tout se passe comme si ce ministère avait tellement intériorisé les contraintes budgétaires qui l'ont étranglé de 1985 à 1999 qu'il semble avoir, de lui-même, accepté que ses agents ne bénéficient pas des mêmes droits que leurs homologues employés par les autres services de l'Etat en France.
Ainsi, ce qui est possible pour le jardinier du préfet ne le serait pas pour la secrétaire de l'ambassadeur. C'est quand même un peu étonnant !
En contrepartie de l'absence de contrat de droit public, il nous est proposé un plan d'action pour la valorisation et l'amélioration de la gestion du recrutement local, qui a été exposé dans un télégramme diplomatique du 13 novembre 1999. Les diverses prescriptions faites aux chefs de poste visent à améliorer la situation juridique, salariale et sociale des recrutés locaux et à mieux intégrer les agents de recrutement local au sein des ressources humaines des postes. J'admire ce langage diplomatique qui correspond assez peu à ce que je constate un peu partout.
A défaut de reconnaître aux agents contractuels de l'Etat à l'étranger les mêmes droits et garanties qu'à leurs homologues de France, consigne est donnée de mieux les traiter. C'est déjà cela, mais nous ne pouvons nous en satisfaire, car cela ne compense pas l'inégalité de traitement entre agents de l'Etat qui est ainsi instituée. En effet, le fond du problème est politique et budgétaire.
Il est politique, car il manifeste une fois de plus l'idée bien ancrée que ce qui est bon et légitime pour les Français de France ne l'est pas pour les Français établis à l'étranger. Cette discrimination serait en quelque sorte dans l'ordre des choses. Comment un parlementaire peut-il se résigner à ce que la devise républicaine soit si peu mise en pratique, dès les frontières franchies !
Mais ne nous y trompons pas, la contrainte budgétaire pèse beaucoup dans cet « oubli » opportun du principe d'égalité républicain. Les services de l'Etat à l'étranger, et tout particulièrement le ministère des affaires étrangères, ne fonctionneraient plus aujourd'hui sans leurs 14 000 recrutés locaux, dont près de 3 000 Français, auxquels s'ajoutent les milliers de vacataires payés à la journée ou à l'heure et dépourvus de droits sociaux.
Dans le seul réseau diplomatique et consulaire, 1 200 recrutés locaux français accomplissent exactement les mêmes tâches que les fonctionnaires du ministère des affaires étrangères : immatriculation consulaire, délivrance de pièces d'identité, service de la nationalité, secrétariat des chefs de poste, comptabilité, délivrance des visas.
A l'exception d'un quart d'entre eux, employés dans les pays de l'OCDE, ils sont mal rétribués, leurs cotisations d'assurance maladie et d'assurance vieillesse sont à leur charge et il arrive trop souvent qu'ils ne puissent pas les payer sur des salaires trop bas.
Les recrutés locaux de dix pays ont bénéficié en 1999 d'une prise en charge de ces cotisations. C'est un progrès, mais il faudrait aller très vite pour que cesse l'état de fait actuel. Voir des salariés privés de soins médicaux et atteindre la vieillesse sans la moindre pension, après avoir travaillé toute leur vie pour l'Etat, ce n'est plus tolérable aujourd'hui.
Ce n'est plus tolérable non plus de relever, comme j'ai pu le faire encore au mois de janvier, des différences du simple au triple pour des emplois de même nature dans les services d'une ambassade d'Afrique récemment visitée, les deux extrémités de l'échelle relevant d'ailleurs du ministère des finances. C'est quand même assez remarquable !
Enfin, cessons de nous gargariser de francophonie, si la diffusion de la langue et de la culture françaises ne peut plus être assurée que dans des conditions salariales et statutaires inacceptables. Aujourd'hui, les instituts culturels s'autofinancent en recourant aux services de professeurs employés à la vacation, souvent sans aucune base juridique d'embauche, sans parler des stagiaires diplômés de français langue étrangère, non rémunérés, et dont le stage ne débouche sur aucun emploi. C'est vraiment glorieux !
Cette francophonie devient un véritable miroir aux alouettes pour des quantités de jeunes qui travaillent pour elle, ainsi que pour des personnes plus âgées qui lui ont consacré toute leur vie et qui, en définitive, vieilliront dans la misère.
Pour conclure, je prends acte de l'ajout de la référence au respect des conventions internationales dans l'article 26 quater, alinéa 5, qui sera - je l'espère - repris par l'Assemblée nationale, même si le Sénat le supprime. Je signale simplement que, s'il faut faire référence au respect des conventions internationales dans ce texte, c'est bien parce que, actuellement, on ne les respecte pas.
Je prends acte également de l'annonce de la présentation par le Gouvernement d'un rapport après consultation de l'ensemble des organisations syndicales représentatives, rapport qui permettra une évaluation du statut social de l'ensemble des personnels sous contrat travaillant à l'étranger.
Au demeurant, la situation est très préoccupante, monsieur le secrétaire d'Etat. Il faudra instaurer une véritable égalité de traitement entre les agents contractuels de l'Etat et ceux de l'étranger. Il faudra, enfin, garantir les conditions d'un réel progrès social dans les services de l'Etat à l'étranger. En 2001, il ne sera pas trop tard ! (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je serai bref car nous nous sommes, les uns et les autres, largement exprimés sur ce texte que nous examinons pour la troisième fois en une année, voire pour la quatrième fois si l'on compte les travaux effectués en commission mixte paritaire.
Ce projet de loi participe du mouvement plus large de la réforme de l'Etat. Il est au coeur de la modernisation des services publics en visant à rendre l'administration plus efficace et plus proche de nos concitoyens.
Lutter contre les inégalités en garantissant l'égal accès de tous au service public, quels que soient la condition sociale et l'endroit où l'on se trouve, telle est, à nos yeux, la véritable ambition d'une administration moderne et accessible qui promeut l'usager au rang de citoyen et rompt de manière irréversible avec la conception de l'administré sujet.
Pour rendre ces dispositions efficaces, l'administration a besoin de moyens. En témoigne l'incessante accumulation de dossiers sur les bureaux des caisses d'allocations familiales, auxquelles aucun crédit supplémentaire n'a été accordé pour la mise en oeuvre de la couverture maladie universelle.
Il faut cesser, comme le fait trop souvent la majorité sénatoriale, de considérer les fonctionnaires en surnombre et de ne voir les administrations qu'au travers du coût qu'elles représentent pour l'Etat.
Investir dans le secteur public est une réponse d'avenir, profondément moderne, favorisant un développement économique et social fructueux. C'est d'autant plus possible aujourd'hui avec l'existence de la cagnotte fiscale.
Les parlementaires communistes n'hésitent donc pas à demander des crédits supplémentaires, à soutenir les revendications syndicales relatives notamment à l'application des 35 heures et aux salaires, tout comme ils ont soutenu la lutte menée par les agents des impôts pour que leur administration réponde encore mieux aux besoins des citoyens.
Ils se félicitent à ce propos que le Gouvernement ait retiré son projet de réforme mal engagé. Il faut que les discussions se poursuivent aujourd'hui avec les organisations syndicales sur d'autres bases : la modernisation du service public ne pourra se faire sans, et a fortiori, contre les salariés concernés.
Pour les mêmes raisons, nous soutenons la lutte des agents de l'éducation nationale, secteur dans lequel un plan de création d'emplois a été annoncé par le Premier ministre. Il reste toutefois à préciser rapidement le nombre exact de ces créations de postes, comme cela a été fait pour le secteur hospitalier.
Le tabou du gel des emplois publics semble enfin bousculé, et je ne peux que m'en réjouir.
Pour en revenir au sujet qui nous occupe aujourd'hui, je dirai que la question des moyens se pose plus particulièrement pour les maisons de service public dont - nous l'espérons - la mise en place répondra non pas à une logique de rationalisation des services publics, mais à une réelle mise en commun des énergies permettant d'améliorer la qualité desdits services.
Après ces remarques d'ordre général, je m'arrêterai quelques instants plus particulièrement sur le projet de loi.
Les navettes parlementaires ont permis de trouver des points d'accord sur bon nombre d'articles et notamment sur le champ d'application de la loi et la définition des autorités administratives soumises aux dispositions du texte, sur la cohérence des lois « informatique et liberté » et « archives », sur l'obligation de transparence financière, enfin sur l'amélioration des procédures administratives, telle l'obligation d'accuser réception ou la réduction des délais applicables.
Ces nombreux points témoignent de la volonté de tous d'améliorer l'accès aux règles de droit et la transparence administrative. Aussi, nous ne comprenons pas l'acharnement mis par la commission à refuser d'adopter l'article 2, qui affirme un droit à l'information, ou l'article 8, qui rend obligatoire la communication des documents administratifs.
Ces mesures sont pourtant au coeur de la transparence administrative et nécessaires à l'amélioration des relations entre les autorités administratives et les citoyens.
Ce sont les articles 26 quater et 26 quinquies qui ont, avant tout, conduit à l'échec de la commission mixte paritaire. Les raisons qui vous ont amenés à repousser ces articles, mes chers collègues, sont diamétralement opposées aux nôtres.
Vous refusez que les agents publics, visés par ces articles, bénéficient d'un contrat à durée indéterminée. Vous souhaitez maintenir ces agents dans la précarité. Nous voulons, tout au contraire, élargir les dispositions positives qui figurent au paragraphe I de l'article 26 quater et qui visent à accorder le bénéfice d'un contrat à durée indéterminée à tous les agents.
Je reviendrai sur ces articles au moment de leur examen.
Pour conclure, je voudrais dire de nouveau combien il me semble important d'adopter ce texte dont la philosophie est de tendre à une amélioration sensible des droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
Nous attendrons, bien évidemment, l'issue des travaux de notre assemblée pour nous prononcer sur l'ensemble du texte. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que, aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets ou propositions de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du Parlement n'ont pas encore adopté un texte indentique.

Article 2



M. le président.
« Art. 2. - Le droit de toute personne à l'information est précisé et garanti par le présent chapitre en ce qui concerne la liberté d'accès aux règles de droit applicables aux citoyens.
« Les autorités administratives sont tenues d'organiser un accès simple aux règles de droit qu'elles édictent. La mise à disposition et la diffusion des textes juridiques constituent une mission de service public au bon accomplissement de laquelle il appartient aux autorités administratives de veiller.
« Les modalités d'application du présent article sont déterminées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 2, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit cet article :
« La mise à disposition et la diffusion des normes juridiques constituent une mission de service public selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Cet article tend à ce que les autorités administratives organisent un accès simple aux règles de droit qu'elles édictent. Il a été supprimé par le Sénat, qui en avait souligné le caractère peu normatif. Toutefois, en nouvelle lecture, la commission des lois vous propose d'accepter de définir dans la loi la mission de service public que constituent la mise à disposition et la diffusion des normes juridiques.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer. La commission propose de limiter cet article à la seule mention de l'existence d'une mission de service public attachée à la mise à disposition et à la diffusion de l'information juridique. Je ne peux pas la suivre dans cette vision réductrice.
Permettez-moi de vous rappeler, mesdames, messieurs les sénateurs, que le principe de l'accès simple aux règles de droit, loin d'être dépourvu de portée normative comme cela lui a été reproché, a reçu récemment consécration du Conseil constitutionnel, qui, dans sa décision du 16 décembre 1999, a considéré l'accessibilité et l'intelligibilité de la loi comme des objectifs de valeur constitutionnelle.
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 2.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Sur cet article, le Sénat fait un pas en avant. Alors qu'il l'avait auparavant purement et simplement supprimé, sur proposition de la commission des lois, il va aujourd'hui accepter d'inscrire dans la loi l'idée selon laquelle la mise à disposition et la diffusion des normes juridiques constituent une mission de servive public. C'est la moindre des choses !
Au demeurant, je regrette que le principe d'un accès simple aux règles de droit, seul moyen de garantir le droit de toute personne à l'information, ne figure pas dans la rédaction proposée par la commission. Aussi, pour les raisons invoqués à l'instant par le Gouvernement, nous voterons contre cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 2 est ainsi rédigé.

Article 4



M. le président.
« Art. 4. - Dans ses relations avec l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er, toute personne a le droit de connaître le prénom, le nom, la qualité et l'adresse administratives de l'agent chargé d'instruire sa demande ou de traiter l'affaire qui la concerne ; ces éléments figurent sur les correspondances qui lui sont adressées. Si des motifs intéressant la sécurité publique ou la sécurité des personnes le justifient, l'anonymat de l'agent est respecté.
« Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. »
Par amendement n° 3, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le début de la première phrase du premier alinéa de cet article :
« Dans ses relations avec une personne morale chargée d'une mission de service public, toute personne... »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Cet article tend à lever l'anonymat des relations entre agents publics et citoyens.
Le Sénat a étendu le champ d'application de la levée de l'anonymat à l'ensemble des services publics, considéré que les correspondances administratives faisaient partie des relations entre les citoyens et les services publics, sans qu'il soit besoin de le préciser, et transféré le second alinéa relatif au régime des relations administratives dans le chapitre approprié du projet de loi.
L'Assemblée nationale, en nouvelle lecture, a rétabli son texte de première lecture.
La commission des lois vous soumet aujourd'hui, mes chers collègues, un amendement visant à reprendre la rédaction proposée par l'Assemblée nationale, tout en étendant le champ d'application de cet article aux services publics industriels et commerciaux.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, qui présente l'inconvénient de créer un champ d'application spécifique dès l'article 4, alors que l'article 1er vient de délimiter le champ d'application du projet.
Par ailleurs - et je pense que vous me suivrez sur ce plan, monsieur le rapporteur - les services publics industriels et commerciaux relèvent d'une logique de relations à l'usager très différente de celle des services publics administratifs, et je doute qu'il soit opportun de mélanger les deux.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 3.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Comme lors des lectures précédentes, la majorité du Sénat souhaite étendre, par le biais de cet amendement, le champ d'application de la levée de l'anonymat à l'ensemble des personnes morales chargées d'une mission de service public, alors que le champ d'application des dispositions de cette loi est fixé par l'article 1er, que le Sénat a adopté d'ailleurs. Ne sont visés que les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés de la gestion d'un service public administratif et non les services publics industriels et commerciaux.
Cette nouvelle rédaction peut entraîner des difficultés. Elle ne nous paraît pas opportune. Nous sommes donc contre cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, ainsi modifié.

(L'article 4 est adopté.)

Article 8



M. le président.
« Art. 8. - Le titre Ier de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, est ainsi modifié :
« 1° Non modifié ;
« 2° Le deuxième alinéa de l'article 1er est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Sont considérés comme documents administratifs, au sens du présent titre, tous dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, directives, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives, avis, prévisions et décisions, qui émanent de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes de droit public ou privé chargés de la gestion d'un service public. Ces documents peuvent revêtir la forme d'écrits, d'enregistrements sonores ou visuels, de documents existant sur support informatique ou pouvant être obtenus par un traitement automatisé d'usage courant.
« Ne sont pas considérés comme documents administratifs, au sens du présent titre, les actes des assemblées parlementaires, les avis du Conseil d'Etat et des juridictions administratives, les documents de la Cour des comptes mentionnés à l'article L. 140-9 du code des juridictions financières et les documents des chambres régionales des comptes mentionnés à l'article L. 241-6 du même code, les documents d'instruction des réclamations adressées au Médiateur de la République et les documents préalables à l'élaboration du rapport d'accréditation des établissements de santé visé à l'article L. 710-5 du code de la santé publique. » ;
« 3° L'article 2 est ainsi rédigé :
« Art. 2 . - Sous réserve des dispositions de l'article 6, les autorités mentionnées à l'article 1er sont tenues de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent titre.
« Le droit à communication ne s'applique qu'à des documents achevés. Il ne concerne pas les documents préparatoires à une décision administrative tant qu'elle est en cours d'élaboration. Il ne s'exerce plus lorsque les documents font l'objet d'une diffusion publique. Il ne s'applique pas aux documents réalisés dans le cadre d'un contrat de prestation de services exécuté pour le compte d'une ou de plusieurs personnes déterminées.
« L'administration sollicitée n'est pas tenue de donner suite aux demandes abusives, en particulier par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique. » ;
« 4° Non modifié ;
« 5° Les deux premiers alinéas de l'article 5 sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :
« Une commission dite "Commission d'accès aux documents administratifs" est chargée de veiller au respect de la liberté d'accès aux documents administratifs et aux archives publiques, dans les conditions prévues par le présent titre et par le titre II de la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives. Elle émet des avis lorsqu'elle est saisie par une personne qui rencontre des difficultés pour obtenir la communication d'un document administratif ou pour consulter des documents d'archives publiques, à l'exception des documents mentionnés au 3. de l'article 3 de la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 précitée. La saisine de la commission pour avis est un préalable obligatoire à l'exercice d'un recours contentieux.
« Elle conseille les autorités compétentes sur toute question relative à l'application du présent titre et des dispositions susmentionnées de la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 précitée. Elle peut proposer, à la demande de l'autorité compétente ou à son initiative, toutes modifications de ces textes et toutes mesures de nature à faciliter l'exercice du droit d'accès aux documents administratifs et aux archives publiques et à renforcer la transparence administrative.
« La commission établit un rapport annuel qui est rendu public. Ce rapport retrace notamment les principales difficultés rencontrées par les personnes, au regard des différentes catégories de documents ou d'archives. » ;
« 6° Après l'article 5, il est inséré un article 5-1 ainsi rédigé :
« Art. 5-1 . - La Commission d'accès aux documents administratifs est également compétente pour examiner, dans les conditions prévues aux articles 2 et 5, les questions relatives à l'accès aux documents administratifs mentionnés aux dispositions suivantes :
« - l'article L. 2121-26 du code général des collectivités territoriales,
« - l'article L. 28 du code électoral,
« - le b de l'article L. 104 du livre des procédures fiscales,
« - l'article L. 111 du livre des procédures fiscales,
« - l'article 5 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association et l'article 2 du décret du 16 août 1901,
« - l'article 79 du code civil local d'Alsace-Moselle,
« - les articles L. 213-13 et L. 332-29 du code de l'urbanisme. » ;
« 7° à 9° Non modifiés. »
Par amendement n° 4, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le premier alinéa du texte présenté par le 3° de l'article 8 pour l'article 2 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 :
« Sous réserve des dispositions de l'article 6, les documents administratifs sont de plein droit communicables aux personnes qui en font la demande. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. L'article 8 modifie la loi du 17 juillet 1978 relative à la liberté d'accès aux documents administratifs.
Les principaux points de divergence entre les deux assemblées, au stade de la nouvelle lecture, sont au nombre de deux.
Le Sénat a adopté la rédaction de la loi en vigueur, mettant en exergue le caractère communicable de plein droit des documents administratifs. L'Assemblée nationale a prévu que les autorités concernées sont tenues de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent, même sans en être l'auteur. Le Sénat a souhaité conserver les exceptions à la pratique, couramment admise par la commission d'accès aux documents administratifs, la CADA, selon laquelle les administrations détenant un document sans en être l'auteur le communiquent au demandeur. Il s'agit notamment de préserver l'interdiction pour le préfet de communiquer certains actes des collectivités territoriales qui lui ont été transmis au titre du contrôle de légalité.
L'Assemblée nationale a prévu la compétence de la CADA pour l'application de l'article L. 111 du livre des procédures fiscales, c'est-à-dire pour la communication de la liste des personnes assujetties à la taxe départementale sur le revenu. Avec l'avis favorable du Gouvernement, le Sénat a supprimé cet ajout de l'Assemblée nationale, qui risque de restreindre l'accès effectif aux documents fiscaux.
La commission des lois vous soumet deux amendements tendant à confirmer les positions de principe adoptées par le Sénat en deuxième lecture. Pour le reste - non-communicabilité des contrats réalisés dans le cadre d'un contrat de prestation de service et rapport de la CADA - elle vous propose d'adopter la rédaction proposée par l'Assemblée nationale.
En nouvelle lecture, avec avis de sagesse du Gouvernement, l'Assemblée nationale a précisé que les documents préalables à l'élaboration du rapport d'accréditation des établissements de santé, visés à l'article L. 710-5 du code de la santé publique, ne sont pas des documents administratifs. La commission des lois regrette l'accumulation des dérogations et souligne que toute énumération appelle l'exhaustivité. Il serait regrettable que le législateur revienne sans cesse sur ce texte pour le compléter, au lieu de s'en tenir à quelques principes simples et concis.
La commission des lois vous propose d'adopter l'article 8, ainsi modifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. L'adoption de l'amendement n° 4 aurait pour effet de supprimer le principal intérêt de l'article 8 : à savoir la mention expresse que l'obligation de communiquer pèse sur l'administration qui, je le souligne, détient le document, qu'elle en soit ou non à l'origine.
L'objectif - et c'est tout l'intérêt du texte - est de permettre à l'usager de savoir à qui il doit s'adresser pour obtenir un document.
Le Gouvernement est donc défavorable à la suppression, au 3° de l'article 8, de l'identification de l'autorité administrative tenue de communiquer le document.
Si cette suppression est votée, l'usager risque de se trouver - excusez-moi l'expression - « dans le brouillard » vis-à-vis des administrations concernées !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 4.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Cet amendement vise à supprimer l'obligation de communication qui pèse sur l'administration détentrice du document, qu'elle en soit ou non l'auteur. Or, l'objectif de l'article 8 est de faciliter l'accès des citoyens aux documents administratifs.
L'amendement n° 4 restreint cet accès. Dès lors qu'une administration détient un document administratif communicable, il n'y a aucune raison qu'elle renvoie la personne qui lui en fait la demande vers une autre administration ou vers l'auteur de ce document.
Ainsi, le demandeur sera moins « baladé » et pourra obtenir satisfaction plus rapidement.
En conséquence, nous sommes franchement contre cet amendement.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je ferai un simple commentaire sur ce sujet. Je crois que le droit commun, avec contrôle de la CADA, permet d'avoir très facilement accès aux documents administratifs.
La proposition qui est faite par la Sénat vise justement à éviter la diffusion de documents qui pourraient être détenus par une administration et qui seraient protégés pour telle ou telle raison, soit tenant au secret, soit parce qu'ils ne sont pas achevés.
M. Jacques Mahéas. Ils sont non communicables !
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Oui, mais, souvent, les administrations interrogent la CADA pour connaître la nature d'un document et savoir s'il est ou non communicable.
Dans l'option qui est proposée par le Sénat, ou bien l'administration est sûre de son fait - elle renvoie à l'autorité émettrice du document et il n'y a aucun problème - ou bien il y a un doute et on saisit la CADA, qui fonctionne bien. Cela nous prémunit contre tout risque de diffusion de documents dont la transmission pourrait ensuite donner lieu à problème.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Nous réfutons un tel argument. En fait, il paraît naturel au commun des mortels de demander un document, que ce soit à une autorité détentrice, tel un préfet ou un maire, ou à l'auteur de ce document. C'est une simplification !
Vous compliquez les choses en limitant la demande au seul auteur, qui est d'ailleurs parfois réticent ; nous le voyons notamment dans les communes.
L'exemple que vous avez cité en commission des lois, celui de la chambre régionale des comptes, nous paraît mal choisi puisque vous avez fait allusion à un document de travail concernant les premières observations. Or, ce document n'est pas communicable. Seules les observations définitives sont publiques.
J'imagine les réticences et l'entrave à la vie démocratique qu'entraînerait l'adoption de votre amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 5, M. Amoudry au nom de la commission, propose de supprimer le cinquième alinéa du texte présenté par le 6° de l'article 8 pour l'article 5-1 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je me suis déjà exprimé sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. Sur cet article 8, et plus particulièrement sur la référence à l'article 111 du livre des procédures fiscales, le point de vue des députés divergeait de celui des sénateurs et le Gouvernement s'en était remis à la sagesse de l'Assemblée nationale. Il maintient cette position devant le Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8, modifié.

(L'article 8 est adopté.)

Article 8 bis



M. le président.
« Art. 8 bis. - L'article L. 140-9 du code des juridictions financières est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« A ce titre, elles ne sont notamment pas applicables aux rapports de vérification et avis des comités régionaux ou départementaux d'examen des comptes des organismes de sécurité sociale visés à l'article L. 134-2. » - (Adopté.)

Article 10



M. le président.
« Art. 10. - Les budgets et les comptes des autorités administratives mentionnés à l'article 1er et dotées de la personnalité morale sont communicables à toute personne qui en fait la demande, dans les conditions prévues par la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 précitée.
« La communication de ces documents peut être obtenue tant auprès de l'autorité administrative concernée que de celles qui les détiennent.
« L'autorité administrative qui attribue une subvention doit, lorsque cette subvention dépasse un seuil défini par décret, conclure une convention avec l'organisme de droit privé qui en bénéficie, définissant l'objet, le montant et les conditions d'utilisation de la subvention attribuée.
« Lorsque la subvention est affectée à une dépense déterminée, l'organisme de droit privé bénéficiaire doit produire un compte rendu financier qui atteste de la conformité des dépenses effectuées à l'objet de la subvention. Le compte rendu financier est déposé auprès de l'autorité administrative qui a versé la subvention dans les six mois suivant la fin de l'exercice pour lequel elle a été attribuée.
« Le budget et les comptes de tout organisme de droit privé ayant reçu une subvention, la convention prévue au présent article et le compte rendu financier de la subvention doivent être communiqués à toute personne qui en fait la demande par l'autorité administrative ayant attribué la subvention ou celles qui les détiennent, dans les conditions prévues par la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 précitée.
« Les organismes de droit privé ayant reçu annuellement de l'ensemble des autorités administratives une subvention supérieure à un montant fixé par décret doivent déposer à la préfecture du département où se trouve leur siège social leur budget, leurs comptes, les conventions prévues au présent article et, le cas échéant, les comptes rendus financiers des subventions reçues pour y être consultés. »
Par amendement n° 6, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de supprimer le deuxième alinéa de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Cet amendement, qui vise à supprimer le deuxième alinéa de l'article 10, confirme la position du Sénat en deuxième lecture.
Aux termes de cet article, les autorités administratives dotées de la personnalité morale tiennent leurs comptes à la disposition du public. Cette obligation est étendue aux organismes de droit privé ayant un budget significatif et bénéficiant d'aides ou de subventions publiques.
La commission des lois se félicite qu'en nouvelle lecture l'Assemblée nationale, consciente des difficultés que la notion de « compte d'emploi » des subventions pouvait générer pour les associations, lui ait préféré la notion de « compte rendu financier ».
Le seul point de divergence qui demeure entre les deux assemblées concerne la communication de documents à caractère financier par les autorités administratives qui les détiennent sans en être l'auteur.
La commission des lois vous soumet donc, mes chers collègues, deux amendements visant à supprimer la généralisation de la possibilité, pour une autorité administrative, de communiquer des documents qu'elle n'a pas produits.
Elle vous propose par ailleurs d'accepter l'harmonisation du champ d'application de l'article 10 avec celui du projet de loi, tout en soulignant l'intérêt témoigné par le Sénat, au cours des lectures successives, pour l'extension de ces obligations de transparence financière aux services publics industriels et commerciaux.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. Sur l'article précédent, nous venons d'avoir un débat quant à la détention de documents administratifs par une administration. L'explication a eu lieu, le Sénat a maintenu sa position.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement qui vise plus particulièrement les budgets et les comptes. Il nous apparaît là encore qu'il revient à l'administration qui détient les documents de les communiquer à l'usager, lequel ne doit pas être renvoyé vers l'émetteur de ces documents.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 6.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. L'argumentation que j'ai développée au sujet de l'amendement n° 4 vaut pour celui-ci.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.).
M. le président. Par amendement n° 7, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, dans l'avant-dernier alinéa de l'article 10, de supprimer les mots : « ou celles qui les détiennent ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. J'ai déjà exposé l'objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. Défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 10, modifié.

(L'article 10 est adopté.)

Article 13 bis



M. le président.
« Art. 13 bis. - Le titre III du livre Ier de la troisième partie du code général des collectivités territoriales est complété par un chapitre III ainsi rédigé :

« Chapitre III

« Exercice par un contribuable
des actions appartenant au département

« Art. L. 3133-1 . - Tout contribuable inscrit au rôle du département a le droit d'exercer, tant en demande qu'en défense, à ses frais et risques, avec l'autorisation du tribunal administratif, les actions qu'il croit appartenir au département, et que celui-ci, préalablement appelé à en délibérer, a refusé ou négligé d'exercer.
« Le contribuable adresse au tribunal administratif un mémoire.
« Le président du conseil général soumet ce mémoire au conseil général spécialement convoqué à cet effet. Le délai de convocation peut être abrégé.
« Lorsqu'un jugement est intervenu, le contribuable ne peut se pourvoir en appel ou en cassation qu'en vertu d'une nouvelle autorisation. »
Je suis saisi de huit amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° 12 est présenté par M. Jacques Larché.
L'amendement n° 16 est déposé par M. de Rohan et les membres du groupe du Rassemblement pour la République.
L'amendement n° 21 est présenté par M. de Raincourt et les membres du groupe des Républicains et Indépendants.
Tous trois tendent à supprimer l'article 13 bis.
Par amendement n° 25, MM. Darniche et Adnot proposent, dans le premier alinéa du texte présenté par l'article 13 bis pour l'article L. 3133-1 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « tribunal administratif », d'insérer les mots : « qui fixe le montant d'une somme à consigner auprès du greffe de celui-ci ».
Par amendement n° 26, M. Darniche propose de remplacer l'avant-dernier alinéa du texte présenté par l'article 13 bis pour l'article L. 3133-1 du code général des collectivités territoriales par deux alinéas ainsi rédigés :
« Après y avoir été autorisé, le président du conseil général représente le département à cette instance.
« Le refus d'autorisation du tribunal administratif ouvre droit à réparation du préjudice, y compris moral, subi au titre de cette procédure. »
Par amendement n° 13 rectifié, M. Jacques Larché propose, après les mots : « au conseil général » de remplacer la fin de l'avant-dernier alinéa du texte présenté par l'article 13 bis pour l'article L. 3133-1 du code général des collectivités territoriales par les mots : « réuni dans les conditions prévues aux articles L. 3121-9 et L. 3121-10 ».
Par amendement n° 27, MM. Darniche et Adnot proposent de compléter le texte présenté par l'article 13 bis pour l'article L. 3133-1 du code général des collectivités territoriales par deux alinéas ainsi rédigés :
« La somme consignée est restituée lorsque le recours a abouti à une décision définitive constatant que la requête n'était pas abusive.
« La collectivité territoriale qui s'estime lésée par le recours abusif d'un contribuable dans le cadre du présent article peut solliciter du juge l'octroi de dommages et intérêts dans les conditions des articles 1382 et suivants du code civil. »
Par amendement n° 28 rectifié, M. de Rohan et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent de compléter in fine le texte présenté par l'article 13 bis pour l'article L. 3133-1 du code général des collectivités territoriales par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cas d'une demande jugée abusive ou dilatoire, son auteur encourt une amende dont le montant est fixé par le tribunal administratif. »
L'amendement n° 12 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Gérard, pour défendre l'amendement n° 16.
M. Alain Gérard. L'article 13 bis permet à tout contribuable inscrit au rôle du département d'exercer des actions appartenant au département.
La conséquence en serait, d'une part, un accroissement de la suspicion pénale à l'égard des élus, suspicion que nous nous efforçons pourtant de combattre, d'autre part, un déséquilibre dans les rapports entre administrés et élus, puisque, sur simple rédaction d'un mémoire, un contribuable pourrait obtenir une réunion spéciale du conseil général pour étudier son mémoire, alors même qu'un conseiller général ne le pourrait pas.
Cette disposition, si elle était adoptée, aurait des effets extrêmement nuisibles, puisque de telles actions pourraient obtenir un écho médiatique, alors même que le tribunal administratif compétent ne leur donnerait pas de suite.
Il convient donc de supprimer cet article en attendant de trouver une rédaction qui ne porte pas atteinte aux collectivités territoriales et qui préserve les intérêts des contribuables.
M. le président. L'amendement n° 21 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Darniche, pour présenter les amendements n°s 25 et 26.
M. Philippe Darniche. L'article 13 bis tend à étendre au département l'exercice de l'action en substitution des contribuables, procédure actuellement applicable aux seules communes, en application des articles L. 2232-5 et suivants du code général des collectivités territoriales.
Si cette extension ne peut pas être supprimée - ce que nous verrons tout à l'heure - elle doit toutefois être aménagée pour satisfaire au mieux l'intérêt des différentes parties.
En effet, cette procédure expose à de nombreuses dérives. Je crains notamment un risque important de paralysie pour les conseils généraux qui vont devoir examiner les mémoires déposés par les contribuables, alors qu'aucune garantie ne les protégera contre les recours abusifs, peu sanctionnés, nous le savons, par la juridiction administrative.
C'est pourquoi, aux termes de l'amendement n° 25, le tribunal administratif fixe le montant d'une somme à consigner auprès du greffe de celui-ci. Bien évidemment, cette somme serait restituée après décision définitive prise par le tribunal constatant que la requête n'était pas abusive.
J'en viens à l'amendement n° 26.
L'actuelle rédaction de cet article est profondément déséquilibrée en ce qu'elle donne à tout contribuable le pouvoir d'obtenir une session spéciale du conseil général, pouvoir dont ne dispose aujourd'hui, en vertu de l'article L. 3121-10 du code général des collectivités territoriales, que la commission permanente, ou un tiers des membres du conseil général, ou, en cas de circonstances exceptionnelles, le Gouvernement par décret.
En second lieu, l'article L. 3221-10 du code général des collectivités territoriales confie à la commission permanente une compétence propre en matière de défense dans les procédures contentieuses. Il serait contradictoire de la priver de cette compétence dans l'instance administrative pré-contentieuse qu'organise le nouvel article L. 3133-1.
Par ailleurs, bien que s'agissant d'une procédure administrative devant le tribunal administratif et non d'un jugement, il paraît nécessaire que le département puisse faire valoir sa position et que le contribuable supporte la responsabilité de son mémoire en réparant l'éventuel préjudice subi. En effet, dans le cadre d'une procédure administrative, le tribunal administratif ne peut pas tirer les conséquences prévues dans les cas de requête abusive.
M. le président. L'amendement n° 13 rectifié est-il soutenu ?
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. La commission le reprend, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 13 rectifié bis.
La parole est à M. le rapporteur, pour le défendre.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je voudrais tout d'abord rappeler que les articles 13 bis et 13 ter étendent aux départements et aux régions l'action en substitution des contribuables actuellement applicable aux seules communes et structures intercommunales en application des articles L. 2132-5 et suivants du code général des collectivités territoriales.
L'application dans les communes de ces articles qui ne posent pas de problème de fond n'a pas soulevé de difficulté majeure depuis 1837. Aussi le Sénat a-t-il approuvé, lors des lectures précédentes, l'extension de cette procédure aux départements et régions.
Cependant, la réflexion a progressé depuis ; elle a mis en évidence la nécessité de tenir compte de la spécificité des collectivités concernées.
Les modifications qui nous sont proposées aménagent la procédure applicable sans remettre en cause son bien-fondé.
Il ne paraît pas, en effet, souhaitable, qu'un citoyen puisse provoquer une réunion extraordinaire du conseil général ou du conseil régional : il disposerait ainsi de pouvoirs beaucoup plus importants que ceux que détient un conseiller général ou un conseiller régional et de pouvoirs équivalents à ceux du tiers des membres d'une assemblée territoriale.
C'est pourquoi la commission des lois proposera de retenir les conseils selon les conditions de droit commun et de permettre au tribunal administratif de sanctionner les éventuelles demandes abusives.
Pour ces raisons, je demanderai aux auteurs des amendements visant à la suppression des articles 13 bis et 13 ter de bien vouloir les retirer. Ainsi, le débat serait utilement consacré aux améliorations que le Sénat peut apporter à la procédure d'autorisation de plaider.
M. le président. La parole est à M. Darniche, pour défendre l'amendement n° 27.
M. Philippe Darniche. Cet amendement se situe dans le prolongement de l'amendement n° 25 selon lequel, une fois saisi, le tribunal administratif fixe le montant d'une somme à consigner auprès du greffe.
Le dispositif présenté par cet amendement vise à permettre à toute collectivité territoriale qui s'estime lésée par le recours abusif d'un contribuable de solliciter l'octroi de dommages et intérêts dans les conditions des articles 1382 et suivants du code civil.
En effet, même s'il s'agit non pas d'un jugement, mais d'une procédure administrative devant le tribunal administratif, il est nécessaire, pour le département en particulier, de pouvoir faire valoir sa position et de demander au contribuable sanctionné pour recours abusif de réparer l'éventuel préjudice, y compris moral.
M. le président. La parole est à M. Gérard, pour défendre l'amendement n° 28 rectifié.
M. Alain Gérard. Il s'agit d'un amendement de repli.
L'actuelle rédaction de l'article 13 bis est profondément déséquilibrée, car elle donne à tout contribuable le pouvoir d'obtenir une session spéciale du conseil général.
Par ailleurs, bien que s'agissant d'une procédure administrative devant le tribunal administratif et non d'un jugement, il paraît nécessaire que le département puisse faire valoir sa position et que le contribuable supporte la responsabilité de son mémoire en réparant l'éventuel préjudice subi. En effet, dans le cas d'une procédure administrative, le tribunal administratif ne peut pas tirer les conséquences prévues dans les cas de requêtes abusives.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 16, 25, 26, 27 et 28 rectifié ?
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 16, puisqu'il s'agit d'un amendement de suppression de l'article.
Elle émet également un avis défavorable sur l'amendement n° 25, qui lui paraît satisfait par le droit existant. Cet amendement vise le cas dans lequel le contribuable obtient du tribunal administratif l'autorisation de plaider au nom du département. Dans ce cas, la loi poserait l'obligation, pour le contribuable, de consigner une somme d'argent auprès du greffe du tribunal administratif.
L'obligation de consigner une somme d'argent résulte actuellement d'une disposition réglementaire codifiée à l'article R. 316-4 du code des communes, encore en vigueur. Cet article R. 316-4 dispose que « le tribunal administratif ou le Conseil d'Etat peuvent, s'ils accordent l'autorisation, en subordonner l'effet à la consignation préalable des frais d'instance. Ils fixent dans ce cas la somme à consigner ». Dans ces conditions, il ne semble pas utile de reprendre dans la loi les dispositions actuellement en vigueur.
La commission est défavorable à l'amendement n° 26. Cet amendement a un double objet. D'abord, il tend à substituer le président du conseil général au contribuable qui a obtenu du tribunal administratif l'autorisation de plaider au nom du département. Ensuite, il prévoit que le contribuable qui n'a pas reçu l'autorisation de plaider répare le préjudice qu'il a ainsi causé au département.
Il ne nous semble pas souhaitable que le contribuable cède sa place une fois autorisé à agir en justice au nom de la collectivité. En effet, le contribuable n'est autorisé à agir que si le département a préalablement refusé ou négligé d'engager l'instance. De plus, la jurisprudence admet le pourvoi de la collectivité devant le Conseil d'Etat au contentieux pour demander l'annulation ou la réformation de la décision du tribunal. Je vous renvoie à la décision du Conseil d'Etat en date du 9 juillet 1993, commune de Saint-Pierre.
Le Conseil d'Etat peut refuser l'autorisation précédemment accordée. Il peut fonder sa décision sur des éléments d'information postérieurs à la décision du tribunal. Dès lors, l'exécutif qui souhaiterait représenter lui-même le département dans l'instance autorisée peut actuellement exercer un recours devant le Conseil d'Etat et engager l'action en justice selon les conditions du droit commun. C'est l'article L. 3221-10 du code général des collectivités territoriales : « Le président du conseil général intente toutes les actions au nom du département en vertu de la décision du conseil général et il peut, sur l'avis conforme de la commission permanente, défendre à toute action intentée contre le département. »
De plus, la réparation du préjudice subi par le département ne devrait pas être automatique dans tous les cas où le contribuable n'a pas reçu l'autorisation de plaider. Elle ne devrait concerner que les recours abusifs afin de préserver les cas dans lesquels les contribuables agissent de bonne foi et sans abus.
S'agissant de l'amendement n° 27, la commission émet un avis défavorable. Cet amendement vise à compléter l'amendement n° 25 présenté par les mêmes auteurs, auquel la commission a donné un avis défavorable et qui tend à obliger le contribuable ayant reçu une autorisation de plaider au nom de la collectivité à consigner une somme d'argent au greffe du tribunal administratif. Conformément aux dispositions du code de procédure pénale, qui prévoit la consignation, la somme serait restituée lorsque le recours a abouti à une décision définitive constatant que la requête n'était pas abusive.
L'utilisation de la consignation comme moyen de lutte contre les recours abusifs mériterait sans doute d'être transposée à la juridiction administrative, comme le proposait le Sénat à l'article 5 bis du présent projet de loi, en matière d'urbanisme. Cependant, le cas visé par cet amendement est très différent. Le contribuable qui a reçu une autorisation de plaider répond à deux conditions cumulatives : sa requête a des chances de succès et l'instance qu'il mène présente un intérêt suffisant pour la collectivité. Même si l'arrêt du tribunal administratif accordant l'autorisation ne préjuge en rien le jugement au fond, il ne paraît absolument pas adapté de parler dans ce cas de « requête abusive ».
M. Jacques Mahéas. Tout à fait !
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. La consignation d'une somme d'argent, si elle existe actuellement dans la procédure de substitution des contribuables en vertu de dispositions réglementaires, vise non pas à lutter contre les recours abusifs, mais à s'assurer que le contribuable dispose des moyens financiers suffisants pour mener à terme une procédure qui bénéficie à la collectivité.
Enfin, en cas de requête abusive, cet amendement prévoit l'octroi de dommages et intérêts dans les conditions prévues par le code civil. Il convient de bien distinguer la procédure d'autorisation de plaider de l'instance au fond. A la demande de la collectivité, le juge du fond peut utiliser la procédure des dommages et intérêts - juge pénal et juge civil - ou celle des frais irrépétibles - juge administratif.
Par ailleurs, la commission est favorable à l'amendement n° 28 rectifié. Cet amendement, qui vise à sanctionner les recours abusifs, mérite, en effet, de retenir l'attention. Sa rédaction est calquée sur celle de l'article R. 88 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, dont je rappelle les termes : « Dans le cas de requête jugée abusive, son auteur encourt une amende qui ne peut excéder 20 000 francs. » Il est d'autant plus utile de prévoir une sanction contre les demandes abusives que la jurisprudence actuelle exclut l'application de l'article R. 88 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel pour les arrêts du tribunal administratif accordant ou refusant l'autorisation de plaider, au motif qu'ils ne présentent pas de caractère juridictionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 16, 25, 26, 13 rectifié bis, 27 et 28 rectifié ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. Sur ces amendements, que nous retrouverons à l'article 13 ter puisque l'article 13 bis concerne le département et l'article 13 ter la région, permettez-moi de formuler quelques observations générales qui justifient la position du Gouvernement.
D'abord, nous avons une série d'amendements visant à supprimer l'article 13 bis qui permet l'exercice par un contribuable des actions appartenant au département lorsque le contribuable estime que le département n'exerce pas ses actions. Ces dispositions que le Sénat avait retenues en deuxième lecture figurent aujourd'hui dans le code général des collectivités territoriales, et figurent également au titre des établissements publics de coopération intercommunale.
En tant que vice-président de la communauté urbaine de Lyon, je suis bien placé pour dire que déjà certains contribuables ont souhaité exercer ces actions, bien que la loi soit récente. Je ne vois pas pourquoi une disposition qui existe pour les établissements publics de coopération intercommunale ne serait pas étendue par l'article 13 bis au département et par l'article 13 ter à la région. Cette extension répond à une logique de transparence.
Le deuxième point soulevé par ces amendements concerne la rédaction proposée pour le troisième alinéa du nouvel article L. 3133-1 du code général des collectivités territoriales et selon laquelle « le président du conseil général soumet ce mémoire au conseil général spécialement convoqué à cet effet ». Cette rédaction est en effet ambiguë. Convocation spéciale signifie, selon moi, inscription à l'ordre du jour. En réalité, l'interprétation - puisque nous traitons de points de procédure et Dieu sait si les procéduriers peuvent être nombreux - pourrait faire comprendre que le conseil général est convoqué en session extraordinaire. Aussi, pour que toute ambiguïté soit levée, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 13 rectifié bis.
La troisième question est plus complexe puisqu'elle porte sur la responsabilité d'une requête abusive à la charge du contribuable. Il me semble que, en l'occurrence, il y a confusion entre la sanction des recours abusifs et la réparation du préjudice que le département peut éventuellement demander. En tout état de cause, il ne semble pas utile d'ajouter des dispositions au texte actuel, qui prévoit déjà que le contribuable exerce son action à ses frais et risques, puisque la référence à ces frais et risques réserve la possibilité d'une réparation civile pour le département. C'est pourquoi le Gouvernement est défavorable aux autres amendements qui conduisent à accentuer la responsabilité du contribuable en cas de requête abusive.
J'ajouterai que ces amendements introduiraient un hiatus par rapport à la procédure applicable à l'échelon communal et renforceraient encore ce régime de responsabilité.
Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement n° 13 rectifié bis et défavorable aux amendements n°s 16, 25, 26, 27 et 28 rectifié.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. A ce point du débat, je voudrais souligner que, puisque ce texte est examiné en nouvelle lecture au Sénat, l'Assemblée nationale ne pourra, en lecture définitive, que voter son texte de nouvelle lecture assorti, éventuellement, de nos amendements. La suppression des articles 13 bis et 13 ter ne lui permettrait pas de modifier son point de vue. C'est la raison pour laquelle je demande la priorité pour le vote de l'amendement n° 13 rectifié bis et de l'amendement n° 28 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur la demande de priorité ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. En ce domaine, je laisse la sagesse du Sénat s'exercer.
M. le président. La priorité est ordonnée.
Je vais donc mettre aux voix l'amendement n° 13 rectifié bis .
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Selon nous, l'amendement n° 13 rectifié bis est un amendement de bon sens. Aussi, nous le voterons. Les divers amendements déposés au sein de notre commission visent à substituer une réunion dans les conditions de droit commun à la réunion extraordinaire du conseil général ou du conseil régional - l'explication de vote sera la même à l'article 13 ter qui concerne le conseil régional - spécialement convoqué dès lors qu'un contribuable souhaite exercer un recours au nom du département ou de la région.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13 rectifié bis , accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements n°s 16, 26 et 27 n'ont plus d'objet.
Monsieur Darniche, l'amendement n° 25 est-il maintenu ?
M. Philippe Darniche. Compte tenu des explications de M. le rapporteur, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 25 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 13 bis, modifié.

(L'article 13 bis est adopté.)

Article 13 ter



M. le président.
« Art. 13 ter. - Le titre IV du livre Ier de la quatrième partie du même code est complété par un chapitre III ainsi rédigé :

« Chapitre III

« Exercice par un contribuable
des actions appartenant à la région

« Art. L. 4143-1 . - Tout contribuable inscrit au rôle de la région a le droit d'exercer, tant en demande qu'en défense, à ses frais et risques, avec l'autorisation du tribunal administratif, les actions qu'il croit appartenir à la région, et que celle-ci, préalablement appelée à en délibérer, a refusé ou négligé d'exercer.
« Le contribuable adresse au tribunal administratif un mémoire.
« Le président du conseil régional soumet ce mémoire au conseil régional spécialement convoqué à cet effet. Le délai de convocation peut être abrégé.
« Lorsqu'un jugement est intervenu, le contribuable ne peut se pourvoir en appel ou en cassation qu'en vertu d'une nouvelle autorisation. »
Sur cet article, je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° 14 est présenté par M. Jacques Larché.
L'amendement n° 17 est déposé par M. de Rohan et les membres du groupe du Rassemblement pour la République.
L'amendement n° 22 est présenté par M. de Raincourt et les membres du groupe des Républicains et Indépendants.
Tous trois tendent à supprimer l'article 13 ter .
Par amendement n° 15 rectifié, M. Jacques Larché propose, après les mots : « au conseil régional », de remplacer la fin de l'avant-dernier alinéa du texte présenté par l'article 13 ter pour l'article L. 4143-1 du code général des collectivités territoriales par les mots : « réuni dans les conditions prévues aux articles L. 4132-8 et L. 4132-9 ».
Par amendement n° 29 rectifié, M. de Rohan et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent de compléter in fine le texte présenté par l'article 13 ter pour l'article L. 4143-1 du code général des collectivités territoriales par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cas d'une demande jugée abusive ou dilatoire, son auteur encourt une amende dont le montant est fixé par le tribunal administratif. »
L'amendement n° 14 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Gérard, pour défendre l'amendement n° 17.
M. Alain Gérard. L'article 13 ter vise à permettre à tout contribuable inscrit au rôle de la région d'exercer des actions appartenant à la région.
La conséquence en serait, d'une part, un accroissement de la suspicion pénale à l'égard des élus, que nous nous efforçons pourtant de combattre, et, d'autre part, un déséquilibre dans le rapport entre administrés et élus puisque, sur simple rédaction d'un mémoire, un contribuable pourrait obtenir une réunion spéciale du conseil régional pour étudier son mémoire alors même qu'un conseiller régional ne le pourrait.
Cette disposition, si elle était adoptée, aurait des effets extrêmement nuisibles puisque de telles actions pourraient obtenir un écho médiatique, alors même que le tribunal administratif compétent ne leur donnerait pas de suite.
Il convient donc de supprimer cet article en attendant de trouver une rédaction ne portant pas atteinte aux collectivités territoriales tout en préservant les intérêts des contribuables.
M. le président. L'amendement n° 22 est-il soutenu ?...
L'amendement n° 15 rectifié est-il soutenu ?...
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je le reprends, car la commission avait émis un avis favorable sur ce texte, par coordination.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 15 rectifié bis, présenté par M. Amoudry, au nom de la commission, et tendant, après les mots : « au conseil régional », à remplacer la fin de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 4143-1 du code général des collectivités territoriales par les mots : « réuni dans les conditions prévues aux articles L. 4132-8 et L. 4132-9 ».
La parole est à M. le rapporteur, pour le défendre.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Cet amendement a le même objet que l'amendement n° 13 rectifié bis, précédemment adopté, concernant l'exercice par un contribuable d'un recours contentieux intéressant la région.
M. le président. La parole est à M. Gérard, pour défendre l'amendement n° 29 rectifié.
M. Alain Gérard. L'actuelle rédaction de cet article est profondément déséquilibrée en ce qu'elle donne à tout contribuable le pouvoir d'obtenir une session spéciale du conseil régional, pouvoir dont ne disposent aujourd'hui, en vertu de l'article L. 4132-9 du code général des collectivités territoriales, que la commission permanente ou un tiers des membres du conseil général ou, en cas de circonstances exceptionnelles, le Gouvernement par décret.
Par ailleurs, l'article L. 4231-7 du code général des collectivités territoriales confie à la commission permanente une compétence propre en matière de défense dans les procédures contentieuses. Il serait contradictoire de la priver de cette compétence dans l'instance administrative précontentieuse qu'organise le nouvel article L. 4143-1.
Enfin, bien que s'agissant d'une procédure administrative devant le tribunal administratif et non d'un jugement, il paraît nécessaire que la région puisse faire valoir sa position et que le contribuable supporte la responsabilité de son mémoire en réparant l'éventuel préjudice subi. En effet, dans le cas d'une procédure administrative, le tribunal administratif ne peut pas tirer les conséquences prévues dans les cas de requêtes abusives.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 17 et 29 rectifié ?
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 17, par coordination, et un avis favorable sur l'amendement n° 29 rectifié, également par coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 17, 15 rectifié bis et 29 rectifié ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. Nous reprenons le débat qui a été précédemment mené, à l'article 13 bis, à propos des départements. Ici, il s'agit des régions.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 15 rectifié bis et défavorable aux amendements n°s 17 et 29 rectifié, pour les raisons qui ont déjà été exprimées.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Pour les mêmes raisons que celles que j'ai explicitées à l'occasion de la discussion de l'article 13 bis, la commission demande la priorité de mise aux voix des amendements n°s 15 rectifié bis et 29 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. La priorité est ordonnée.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15 rectifié bis, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 29 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence l'amendement n° 17 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 13 ter, modifié.

(L'article 13 ter est adopté.)

Article 14



M. le président.
« Art. 14. - Toute personne tenue de respecter une date limite ou un délai pour présenter une demande, déposer une déclaration, exécuter un paiement ou produire un document auprès d'une autorité administrative peut satisfaire à cette obligation au plus tard à la date prescrite au moyen d'un envoi postal, le cachet de la poste faisant foi, ou d'un procédé télématique ou informatique homologué permettant de certifier la date d'envoi. Ces dispositions ne sont applicables ni aux procédures régies par le code des marchés publics ni à celles pour lesquelles la présence personnelle du demandeur est exigée en application d'une disposition particulière.
« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 18 rectifié, M. Hoeffel propose d'insérer, après le premier alinéa de cet article, un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions de l'alinéa précédent sont applicables aux requêtes, mémoires et productions adressés aux juridictions administratives, à l'exception de ceux prévus à l'article L. 28 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, ainsi que des documents produits dans le cadre des procédures d'urgence. »
La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel. Cet amendement vise à étendre la règle de la date d'envoi édictée par l'article 14 pour l'accomplissement des formalités administratives aux délais de recours contentieux applicables aux juridictions administratives.
La mise en oeuvre par les greffes de ces juridictions de la règle de la réception est d'ores et déjà la source de nombreuses difficultés. On peut craindre que le maintien de cette règle dérogatoire après l'entrée en vigueur de la présente loi n'aboutisse à multiplier les cas dans lesquels les requérants se verront opposer une forclusion alors qu'ils pensaient légitimement avoir déposé leur recours dans les délais prescrits.
Il est donc proposé d'aligner les juridictions administratives sur le droit commun en ce qui concerne le mode de computation de ces délais, étant souligné que cet alignement ne soulève aucune difficulté technique.
Il me paraît intéressant de rappeler que cette disposition figurait dans l'avant-projet de loi élaboré par le Gouvernement. J'ignore les raisons pour lesquelles elle en a été retirée, mais ces raisons me semblent en tout état de cause étrangères à l'objectif d'amélioration des relations entre les citoyens et l'Etat, qui est celui du présent projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. La commission souhaiterait connaître l'avis du Gouvernement avant de se prononcer.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. Je confirme à M. Hoeffel que cette disposition figurait dans un avant-projet du présent texte ; néanmoins, le Gouvernement ne l'a finalement pas retenue, estimant qu'elle relevait d'un cadre spécifique, qui est celui des relations entre les justiciables et les juridictions administratives.
C'est pourquoi le Gouvernement souhaite que cette question soit examinée non pas dans le cadre des relations des citoyens avec les administrations, mais plutôt dans un texte ultérieur sur les rapports entre les justiciables et les juridictions de l'ordre administratif, par exemple à l'occasion du projet de loi relatif au référé administratif, qui est actuellement en discussion dans l'une des assemblées.
M. Daniel Hoeffel. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse et prends note avec satisfaction que ce problème, qui est réel, fera l'objet d'une étude ultérieure dans un cadre spécifique. Dans ces conditions, je retire cet amendement.
M. Jacques Mahéas. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 18 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14.

(L'article 14 est adopté.)

Article 21



M. le président.
« Art. 21. - Une décision implicite d'acceptation peut être retirée, pour illégalité, par l'autorité administrative :
« 1° Non modifié ;
« 2° Pendant le délai de deux mois à compter de la date à laquelle est intervenue la décision, lorsqu'aucune mesure d'information des tiers n'a été mise en oeuvre ;
« 3° Non modifié. »
Par amendement n° 8, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit l'avant-dernier alinéa (2°) de cet article :
« 2° Lorsqu'aucune mesure d'information des tiers n'a été mise en oeuvre, pendant le délai de deux mois à compter de la date à laquelle est intervenue la décision, ou, sur demande d'un tiers y ayant intérêt, pendant le délai de quatre mois à compter de la même date ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. L'article 21 envisage trois hypothèses pour le retrait par l'administration des décisions implicites d'acceptation illégales, en distinguant selon que les mesures d'information des tiers ont ou non été prises.
Le Sénat avait proposé que, dans le cas où aucune mesure de publicité de la décision administrative n'avait été prise, l'administration puisse retirer la décision administrative illégale à la demande d'un tiers intéressé dans un délai de quatre mois à compter de la date à laquelle est intervenue la décision.
Cette solution équilibrée, qui permet à la fois de garantir les droits des tiers et de préserver la sécurité juridique à laquelle ont droit les bénéficiaires des décisions administratives, avait obtenu l'avis favorable du Gouvernement. L'Assemblée nationale a cependant rétabli un délai de deux mois.
La commission des lois soumet un amendement rétablissant la position du Sénat adoptée en deuxième lecture. Elle vous propose d'adopter l'article 21, ainsi modifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat. En effet, comme l'a expliqué M. le rapporteur, le Sénat, lors de la précédente lecture, avait fait un effort de compromis, et le Gouvernement avait alors émis un avis favorable. Il s'en remet aujourd'hui à la sagesse de la Haute Assemblée, et ce même si l'Assemblée nationale a exprimé son désaccord avec le texte du Sénat.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 8.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. En deuxième lecture, le Gouvernement avait accepté cette solution de compromis. Dans le cas où aucune mesure de publicité de la décision administrative n'a été prise, l'administration pourrait donc retirer la décision administrative illégale à la demande d'un tiers dans un délai de quatre mois à compter de la date à laquelle est intervenue la décision.
Compte tenu des explications apportées et de l'avis de sagesse exprimé par le Gouvernement, les sénateurs socialistes voteront cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. Robert Bret. Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 21, ainsi modifié.

(L'article 21 est adopté.)

Articles 22, 22 bis, 24, 24 bis, 25, 26 et 26 ter A



M. le président.
« Art. 22. - Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'autorité administrative n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique.
« Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables :
« 1° à 3° Non modifiés .
« Les modalités d'application du présent article sont fixées en tant que de besoin par décret en Conseil d'Etat. » - (Adopté.)
« Art. 22 bis. - Les décisions des organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole de salariés ou de non-salariés ordonnant le reversement des prestations sociales indûment perçues sont motivées. Elles indiquent les voies et délais de recours ouverts à l'assuré, ainsi que les conditions et les délais dans lesquels l'assuré peut présenter ses observations écrites ou orales. Dans ce dernier cas, l'assuré peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. » - (Adopté.)
« Art. 24. - Afin de faciliter les démarches des usagers et d'améliorer la proximité des services publics sur le territoire en milieu urbain et rural, une maison des services publics réunit des services publics relevant de l'Etat ou de ses établissements publics, des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics, des organismes de sécurité sociale ou d'autres organismes chargés d'une mission de service public parmi lesquels figure au moins une personne morale de droit public.
« Les agents exerçant leurs fonctions dans les maisons des services publics sont régis par les dispositions prévues par leur statut ou les dispositions législatives et réglementaires les concernant. Le responsable de la maison des services publics est désigné parmi les agents soumis aux dispositions de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.
« La maison des services publics est créée par une convention qui est approuvée par le représentant de l'Etat dans le département.
« Cette convention définit le cadre géographique dans lequel la maison des services publics exerce son activité, les missions qui y sont assurées, les modalités de désignation de son responsable, les prestations qu'elle peut délivrer et les décisions que son responsable peut prendre dans le domaine de compétence de son administration ou signer sur délégation de l'autorité compétente. La convention prévoit également les conditions dans lesquelles les personnels relevant des personnes morales qui y participent exercent leurs fonctions. Elle règle les modalités financières et matérielles de fonctionnement de la maison des services publics ainsi que les modalités d'accès aux services publics des personnes ayant des difficultés pour se déplacer. Les services publics concernés peuvent être proposés, notamment en milieu rural, de façon itinérante dans le cadre géographique défini par la convention.
« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. » - (Adopté.)
« Art. 24 bis. - I. - La première phrase du deuxième alinéa de l'article 29-1 de la loi du d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire est ainsi rédigée :
« A cette fin, les organismes visés au premier alinéa peuvent, dans les conditions prévues par les articles 24 et 25 de la loi du relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, créer des maisons des services publics ou participer à leur fonctionnement, afin d'offrir aux usagers un accès simple, en un lieu unique, à plusieurs services publics ; ces organismes peuvent également, aux mêmes fins et pour maintenir la présence d'un service public de proximité, conclure une convention régie par l'article 26 de la même loi. »
« II. - Dans le IV de l'article 30 de la loi n° 99-533 du 25 juin 1999 d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, après les mots : "maisons des services publics", sont insérés les mots : "prévues par l'article 24 de la loi du relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations". » - (Adopté.)
« Art. 25. - Une ou des maisons des services publics peuvent être créées sous la forme d'un groupement d'intérêt public régi par les dispositions de l'article 21 de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France et soumis aux règles de la comptabilité publique et du code des marchés publics, dans les conditions définies à l'article 24 de la présente loi. Les fonctionnaires qui y travaillent sont mis à disposition ou détachés.
« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. » - (Adopté.)
« Art. 26. - Une convention régie par les dispositions des troisième et quatrième alinéas de l'article 24 peut être conclue par une personne morale chargée d'une mission de service public avec l'Etat, une collectivité territoriale ou une autre personne morale chargée d'une mission de service public afin de maintenir la présence d'un service public de proximité. » - (Adopté.)
« Art. 26 ter A. - Le dernier alinéa de l'article 110 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cette disposition ne saurait interdire aux juridictions compétentes et aux autorités administratives chargées du contrôle de légalité d'exercer leurs missions dans les conditions de droit commun. » - (Adopté.)

Article 26 quater



M. le président.
« Art. 26 quater . - I. - Les agents non titulaires de l'Etat et de ses établissements publics à caractère administratif, en fonctions à la date de publication de la présente loi et qui n'ont pas été recrutés en application des articles 3, 4, 6 et 27 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, bénéficient d'un contrat à durée indéterminée lorsqu'ils assurent :
« 1° Soit des fonctions du niveau de la catégorie C concourant à l'entretien ou au gardiennage de services administratifs ;
« 2° Soit des fonctions de même niveau concourant au fonctionnement de services administratifs de restauration, des hôtels de représentation du Gouvernement dans les régions et les départements, des hôtels de commandement ou des services d'approvisionnement relevant du ministère chargé de la défense.
« Les fonctions mentionnées ci-dessus peuvent être exercées à temps incomplet.
« II. - Les personnels mentionnés au I ci-dessus peuvent demander que le contrat de travail sur la base duquel ils ont été engagés soit un contrat de droit privé soumis aux dispositions du code du travail. Les intéressés disposent d'un délai d'un an à compter de la date de publication de la présente loi pour présenter leur demande. Le bénéfice des dispositions du présent paragraphe leur est reconnu à compter de la date de leur engagement initial.
« III. - Les dispositions des I et II ci-dessus ne s'appliquent pas aux personnels contractuels qui ont été recrutés sur place, avant la date de publication de la présente loi, par les services de l'Etat à l'étranger, sur des contrats de travail soumis au droit local, quelles que soient les fonctions qu'ils exercent.
« IV. - Les dispositions de la loi n° 96-1093 du 16 décembre 1996 relative à l'emploi dans la fonction publique et à diverses mesures d'ordre statutaire ne s'appliquent pas aux agents mentionnés au III ci-dessus.
« V. - Lorsque les nécessités du service le justifient, les services de l'Etat à l'étranger peuvent, dans le respect des conventions internationales du travail, faire appel à des personnels contractuels recrutés sur place, sur des contrats de travail soumis au droit local, pour exercer des fonctions concourant au fonctionnement desdits services.
« Dans le délai d'un an suivant la publication de la présente loi, et après consultation de l'ensemble des organisations syndicales représentatives, le Gouvernement présentera au Parlement un rapport portant sur l'évaluation globale du statut social de l'ensemble des personnels sous contrat travaillant à l'étranger.
« VI. - Les agents visés aux I, II et III du présent article ne peuvent bénéficier des dispositions des articles 73 et suivants de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée, à l'exception de ceux qui ont obtenu une décision de justice passée en force de chose jugée. »
Sur l'article, la parole à M. Bret.
M. Robert Bret. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cet article, introduit de façon inopportune dans ce texte, est celui qui, malheureusement, retarde l'adoption du projet de loi.
En effet, il ne satisfait personne, et les avis et interprétations sont si différents qu'aucun accord n'a pu être trouvé lors de la commission mixte paritaire.
La façon dont le Gouvernement entend limiter la portée de l'arrêt Berkani pose question. Plutôt que de faire bénéficier l'ensemble des agents exerçant une mission de service public de la jurisprudence, à savoir d'un contrat de droit public, il en exclu certains d'entre eux, notamment les agents de catégorie C exerçant une mission autre que la restauration, le gardiennage et l'entretien.
Cela est vrai pour cet article comme pour l'article relatif à la fonction publique territoriale.
Un maire de mon département m'a d'ailleurs interpellé plus particulièrement sur les aides à domicile, du bénéfice desquelles les agents des services administratifs de catégorie C seront également exclus.
La majorité sénatoriale fait le choix non pas de limiter la portée de la jurisprudence Berkani, mais de la contrer en ne faisant bénéficier les agents visés que d'un contrat à durée déterminée de trois ans.
Evidemment, nous ne voterons pas ces amendements.
En revanche, la commission des lois propose de supprimer les dispositions prévoyant de soumettre les recrutés locaux au droit local. Nous voterons cet amendement. En effet, ces mesures sont particulièrement dangereuses au regard des disparités existant à l'échelle internationale en matière de droit du travail. Le droit français est l'un des plus favorables aux salariés, et c'est pourquoi nous souhaitons qu'il s'applique à l'ensemble des agents au service de notre pays, et ce quel que soit l'endroit où ceux-ci travaillent.
Telles sont les remarques que je voulais livrer au nom du groupe communiste républicain et citoyen, remarques qui nous amènent, une fois de plus, à voter contre.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Je me suis déjà exprimé dans la discussion générale, tout comme ma collègue Monique Cerisier-ben Guiga.
Sur le fond du dispositif lui-même, la solution que va proposer la commission des lois nous paraît tout à fait insatisfaisante, car elle conduit à un net recul par rapport au texte du Gouvernement pour les personnels concernés. En effet, ces derniers, qui bénéficient actuellement d'un contrat de droit privé à durée indéterminée, ne pourraient plus bénéficier que d'un contrat, certes de droit public, mais d'une durée maximale de trois ans par reconduction expresse, au bon vouloir de l'employeur.
Nous ne pouvons accepter un dispositif qui aggraverait la situation de précarité de ces personnels, alors même que l'objectif poursuivi est d'y mettre un terme.
Sur le dispositif proposé par le Gouvernement, je vous ai fait part de mes interrogations lors de la discussion générale : plus qu'une liste qui se veut exhaustive, j'aurais préféré une transcription plus stricte de la jurisprudence Berkani, et, plutôt que d'établir une liste des personnels concernés, j'aurais préféré que l'on vise tous les personnels quel que soit leur emploi. Ainsi, on aurait été vraiment sûr de mettre un terme à tous les contentieux et de ne laisser personne sur la touche. Je continue de penser qu'il y a un risque de nouveaux contentieux !
En ce qui concerne les recrutés locaux, je vous demande avec force, au nom du groupe socialiste, monsieur le secrétaire d'Etat, d'intervenir avec détermination auprès de votre collègue du Quai d'Orsay pour faire avancer ce dossier, dans la concertation et dans les meilleurs délais.
M. le président. Par amendement n° 9, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le premier alinéa du I de l'article 26 quater :
« Les agents non titulaires de l'Etat et de ses établissements publics à caractère administratif, en fonctions à la date de publication de la présente loi et qui n'ont pas été recrutés en application des articles 3, 4, 6 et 27 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, peuvent bénéficier d'un contrat d'une durée maximale de trois ans renouvelable par reconduction expresse lorsqu'ils assurent : ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. En première lecture, le Sénat avait considéré que la notion de contrat de droit public à durée indéterminée était trop dérogatoire par rapport au droit commun des contrats de recrutement dans la fonction publique.
L'Assemblée nationale a cependant rétabli ces dispositions, considérant que le droit d'option proposé permettrait aux agents concernés de conserver un statut de droit privé afin de cumuler plusieurs emplois.
En commission mixte paritaire, les sénateurs ont insisté sur les risques que de telles mesures faisaient courir aux collectivités employeurs, mais aussi aux agents. Ils ont mis en évidence le fait que plusieurs questions restaient en suspens, en particulier l'interdiction de cumul entre activités publiques et privées - sujet d'un rapport récemment publié par le Conseil d'Etat - ainsi que la transformation de contrats de droit privé en contrats de droit public à durée indéterminée, véritable innovation juridique de ce projet de loi.
Votre rapporteur avait proposé une solution de conciliation tendant à accepter le principe de la transposition dans la loi de la jurisprudence, en y apportant les deux correctifs qui font l'objet de cet amendement.
La rédaction proposée a été, je le rappelle, adoptée par la commission mixte paritaire, mais tel n'a pas été le cas de la coordination proposée pour l'article 26 quinquies, concernant la fonction publique territoriale. C'est d'ailleurs sur ce point qu'a été constaté l'échec de la commission mixte paritaire, je me devais de rappeler cet élément avant que nous passions au vote.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. Cet amendement est important, puisqu'il concerne la situation de près de 15 000 agents de la fonction publique.
Ces agents étaient, auparavant, soumis à des contrats de droit privé à durée indéterminée. L'arrêt Berkani, rendu par le tribunal des conflits, a donné à ces contrats la nature de droit public, et le Gouvernement s'est inscrit dans cette démarche.
L'amendement que nous propose M. Amoudry, au nom de la commission des lois, viserait à transformer ces contrats de droit public à durée indéterminée en contrats à durée déterminée, pour une durée maximum de trois ans. Même s'il peut y avoir des procédures de reconduction, ce serait là un véritable recul par rapport à la situation qui résulte de la jurisprudence Berkani.
J'ajoute que les agents concernés ont la possibilité d'opter, dans un délai d'un an, soit pour le maintien de leur contrat de droit privé, soit pour un contrat de droit public. Soumis à un contrat de droit public, on comprendrait mal qu'ils passent d'un contrat à durée indéterminée à un contrat à durée déterminée, même renouvelable !
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Je souhaite simplement rappeler à M. le secrétaire d'Etat que, si la jurisprudence Berkani reconnaît la qualité de droit public au contrat, en aucune façon elle ne prévoit une quelconque durée pour ledit contrat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 10, M. Amoudry, au nom de la commission, propose :
A. - De supprimer les III, IV et V de cet article.
B. - En conséquence, de rédiger comme suit le début du VI de cet article :
« VI. - Les agents visés aux I et II du présent article... »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. S'agissant des recrutés locaux, le rapport Amiot préconise « l'intervention du législateur pour neutraliser les effets de la jurisprudence Berkani », afin d'affranchir expressément le recrutement local des règles de la fonction publique française et de poser le principe de l'application du droit local aux agents considérés, y compris en ce qui concerne la compétence de droit commun du juge local.
Le rapport Amiot ajoute qu'eu égard aux lois du 11 janvier 1984, dite « loi Le Pors », et du 16 décembre 1996, dite « loi Perben », les recrutés locaux de nationalité française ont une vocation incontestable à la titularisation dès lors qu'ils en font la demande et en remplissent les conditions.
Alors que la volonté du législateur, exprimée en décembre 1996, c'est-à-dire après l'arrêt Berkani, tendait à placer l'ensemble des agents non titulaires de l'Etat sur un même plan, le rapport Amiot recommande « l'exclusion formelle, décidée par la loi, de tous les recrutés locaux au bénéfice des lois Le Pors et Perben ».
Considérant que la volonté du législateur s'est déjà exprimée récemment lors de l'adoption de la loi Perben, la commission des lois vous propose de supprimer toute référence aux recrutés locaux dans le présent projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Mme Cerisier-ben Guiga a attiré notre attention sur cette question tout à l'heure et, comme l'a indiqué M. le rapporteur, le rapport de l'ambassadeur Amiot a permis de dégager un plan d'action au regard des recrutés locaux.
Par ailleurs, le projet de loi prévoit qu'un nouveau rapport sera remis au Parlement dans un délai d'un an.
Parallèlement, le Quai d'Orsay entend s'engager sur cette question pour régler le problème des recrutés locaux, qui est un dossier difficile car il inclut des données statutaires différentes.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 26 quater, modifié.

(L'article 26 quater est adopté.)

Article 26 quinquies



M. le président.
« Art. 26 quinquies . - I. - Les agents non titulaires des collectivités territoriales et des établissements publics en relevant mentionnés à l'article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, en fonctions à la date de publication de la présente loi, qui n'ont pas été recrutés en application de l'article 3 et des deux derniers alinéas de l'article 38 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée, et qui assurent :
« 1° soit des fonctions du niveau de la catégorie C concourant à l'entretien ou au gardiennage de services administratifs,
« 2° soit des fonctions de même niveau concourant au fonctionnement de services administratifs de restauration,
« bénéficient d'un contrat à durée indéterminée sauf s'ils sont recrutés dans les conditions prévues au d de l'article 38 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée.
« Les agents non titulaires qui bénéficient d'un contrat à durée indéterminée en application du présent paragraphe sont régis par les deuxième et quatrième alinéas de l'article 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée. »
« II. - Les agents non titulaires mentionnés au I ci-dessus peuvent demander que le contrat de travail sur la base duquel ils ont été engagés soit un contrat de droit privé soumis aux dispositions du code du travail. Les intéressés disposent d'un délai d'un an à compter de la date de publication de la présente loi pour présenter leur demande. Le bénéfice des dispositions du présent paragraphe leur est reconnu à compter de la date de leur engagement initial.
« III. - Les agents visés au I et au II ci-dessus ne peuvent bénéficier des dispositions des articles 126 à 135 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée, à l'exception de ceux qui ont obtenu une décision de justice passée en force de chose jugée. »
Par amendement n° 11, M. Amoudry, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit les quatre premiers alinéas du I de cet article :
« Les agents non titulaires des collectivités territoriales et des établissements publics en relevant mentionnés à l'article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, en fonctions à la date de publication de la présente loi, qui n'ont pas été recrutés en application de l'article 3 et des deux derniers alinéas de l'article 38 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée, et qui assurent :
« 1° soit des fonctions du niveau de la catégorie C concourant à l'entretien ou au gardiennage de services administratifs,
« 2° soit des fonctions de même niveau concourant au fonctionnement de services administratifs de restauration,
« peuvent bénéficier d'un contrat d'une durée maximale de trois ans renouvelable par reconduction expresse sauf s'ils sont recrutés dans les conditions prévues au d de l'article 38 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec la solution retenue à l'article 26 quater pour la fonction publique d'Etat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. Défavorable, par coordination.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 26 quinquies, ainsi modifié.

(L'article 26 quinquies est adopté.)

Article 27 AA



M. le président.
« Art. 27 AA. - Sous réserve des décisions passées en force de chose jugée, ont la qualité d'étudiant de deuxième année du premier cycle d'études médicales à l'université de Montpellier I au titre de l'année universitaire 1999-2000 les candidats dont l'admission a été prononcée conformément au classement arrêté par le jury du 20 décembre 1999 et compte tenu du nombre d'étudiants admis à poursuivre ces études fixé à la suite de la reprise de deux épreuves ordonnée par le tribunal administratif de Montpellier dans son jugement du 14 octobre 1999. » - (Adopté.)

Article additionnel après l'article 27 AA



M. le président.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
Le premier, n° 1 rectifié bis, est présenté par MM. Gérard, de Rohan, Esneu et Lassourd.
Le second, n° 20, est déposé par MM. Marc, Le Pensec, Mme Yolande Boyer et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Tous deux tendent à insérer, après l'article 27 AA, un article additionnel ainsi rédigé :
« Sous réserve des décisions passées en force de chose jugée, sont validées les quatre-vingt-huit admissions en deuxième année d'études médicales et odontologiques pour l'année universitaire 1999-2000 intervenues à la suite des épreuves du concours organisé pour l'année universitaire 1998-1999 à l'université de Bretagne occidentale, en tant que leur légalité serait remise en cause sur le fondement de l'irrégularité de la correction des épreuves correspondantes et de la fixation du nombre d'étudiants autorisés à poursuivre ces études. »
La parole est à M. Gérard, pour présenter l'amendement n° 1 rectifié bis.
M. Alain Gérard. Cet amendement vise à valider l'inscription en deuxième année des étudiants en médecine et en odontologie de la faculté de Brest qui avaient été admis à poursuivre ces études.
Le jugement rendu par le tribunal administratif de Rennes le 9 mars 2000, en exigeant l'organisation d'une nouvelle épreuve de « santé communautaire » dans le cadre du concours d'entrée en seconde année du premier cycle d'études médicales de Brest, a mis en évidence une contradiction puisque la liste des candidats admis définitivement, au nombre de quatre-vingt-huit, a été promulguée le 20 octobre 1999, à la suite de la délibération du jury et après qu'il eut été procédé à une recorrection des copies.
Cette décision de procéder à une recorrection des copies a été prise conjointement par toutes les parties concernées, c'est-à-dire l'université de Bretagne occidentale, le ministère de l'éducation nationale et le tribunal administratif. Cette opération a été faite dans le strict respect de l'anonymat, et avec une égalité de traitement pour tous les candidats.
Comme tous les collègues de mon département, j'ai été saisi de ce dossier et je souhaite qu'il y soit trouvée une issue favorable, car ces étudiants se trouvent aujourd'hui dans une situation inacceptable.
J'ai donc déposé un amendement avec MM. de Rohan, Esneu et Lassourd, afin de valider l'admission en deuxième année des étudiants en médecine et en ondotologie qui figurent sur la liste promulguée par le président du jury le 20 octobre 1999.
M. le président. La parole est à M. Marc, pour présenter l'amendement n° 20.
M. François Marc. Cet amendement vise à régulariser rétroactivement l'inscription en deuxième année d'études médicales et odontologiques de quatre-vingt-huit étudiants de l'université de Bretagne occidentale.
En effet, dans un arrêt rendu le 9 mars 2000, le tribunal administratif de Rennes a enjoint l'université de Bretagne occidentale de procéder de nouveau à l'organisation d'une épreuve de médecine, ce qui a eu pour conséquence d'annuler les délibérations du jury d'examen, publiées le 20 octobre 1999, déterminant les étudiants admis en deuxième année d'études médicales et odontologiques.
L'exécution de certains jugements d'annulation est susceptible de créer d'inextricables difficultés administratives et de porter gravement préjudice à des administrés qui ne sont en rien responsables des illégalités censurées.
Faire repasser aux étudiants une épreuve un an après, évidemment sans garantie de succès, reviendrait, pour certains, à leur faire perdre une année d'études. Cette situation, qui n'est pas de leur fait, ne doit pas leur être préjudiciable.
La validation de l'admission des étudiants concernés par le Parlement est donc guidée par un souci d'intérêt général.
Il s'agit, par ailleurs, d'assurer le principe de séparation des pouvoirs législatif et judiciaire ainsi que le respect dû à la chose jugée.
C'est pourquoi cet amendement a pour objet la seule validation des admissions, le législateur ne pouvant effectivement pas valider directement une décision annulée, à savoir la délibération du jury fixant la liste de classement des candidats.
La formulation que je vous soumets avec mes collègues du groupe socialiste respecte scrupuleusement la jurisprudence du Conseil constitutionnel et devrait permettre de mettre les étudiants en deuxième année de médecine et en odontologie de Brest à l'abri d'un nouveau risque d'annulation de leur inscription.
Ces arguments ont été partagés ce matin par la commission des lois, devant laquelle j'ai défendu cet amendement, et j'observe que mon collègue M. Alain Gérard s'y est, lui aussi, rallié, puisqu'il a rectifié son amendement initial.
Une garantie accrue sera donc ainsi unanimement apportée aux étudiants concernés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat. Je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 1 rectifié bis et 20.
M. Gérard Le Cam. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Le Cam.
M. Gérard Le Cam. En tant que parlementaire breton, j'ai moi aussi été saisi de ce problème. Je partage le point de vue de mes collègues MM. Gérard et Marc, et je voterai les amendements qu'ils nous proposent.
M. Jacques Mahéas. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 1 rectifié bis et 20, acceptés par la commission et pour lesquels le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je constate que ces amendements ont été adoptés à l'unanimité, ce qui n'étonnera d'ailleurs pas grand monde.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 27 AA.

Articles 27 et 27 bis



M. le président.
« Art. 27. - I. - Les articles 1er à 4, 6 à 8, 10 et 28 ainsi que le titre II, à l'exception des articles 15 et 22 bis, sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna aux administrations de l'Etat et à leurs établissements publics.
« Pour leur application en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna, les références à la loi n° 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives sont remplacées par les références aux dispositions applicables localement en matière d'archives.
« A l'article 10, pour son application en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna, les mots : "préfecture du département" sont remplacés respectivement par les mots : "Haut-Commissariat de la Nouvelle-Calédonie", "Haut-Commissariat de la Polynésie française" et "Administration supérieure des îles Wallis et Futuna".
« II. - Les articles 1er à 4, 6 à 8, 9, 10, 28, le titre II, à l'exception des articles 15 et 22 bis, ainsi que le titre IV, à l'exception de l'article 24 bis, sont applicables dans la collectivité territoriale de Mayotte.
« A l'article 10, les mots : "préfecture du département" sont remplacés par les mots : "représentation du Gouvernement dans la collectivité territoriale". » - (Adopté.)
« Art. 27 bis. - Le mandat des représentants titulaires et suppléants au comité technique paritaire ministériel institué par le décret n° 94-360 du 6 mai 1994 modifié relatif au comité technique paritaire ministériel du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, est prorogé pour la période du 5 juillet 1997 au 30 juin 2000. » - (Adopté.)
Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l'objet de la nouvelle lecture.

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Hoeffel, pour explication de vote.
M. Daniel Hoeffel. Le groupe de l'Union centriste votera à l'unanimité le texte tel qu'il résulte des travaux du Sénat, et ce pour trois raisons.
Tout d'abord, le problème des relations entre l'administration et les citoyens est plus que jamais fondamental.
Ensuite, il s'agit plus que jamais de rapprocher l'administration des citoyens et de faciliter l'accès de ces derniers à l'administration.
M. Raymond Courrière. Très bien !
M. Daniel Hoeffel. Enfin, ce texte permet aux administrés d'exercer un recours contre certaines décisions des collectivités territoriales sans pour autant, et c'est important, placer ces dernières dans une situation difficile, évitant ainsi de déséquilibrer le rapport entre les administrés et les élus.
Je tiens à remercier, au nom du groupe de l'Union centriste, notre rapporteur, M. Jean-Paul Amoudry, du travail qu'il a effectué au sein de la commission des lois, mais aussi en commission mixte paritaire et en séance plénière, en espérant que, après l'effort accompli par le Sénat en direction de l'Assemblée nationale sur un certain nombre de points, celle-ci voudra bien, en ultime lecture, accepter certains amendements réalistes et de bon sens adoptés cet après-midi par notre assemblée. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Le groupe socialiste se félicite, lui aussi, du climat qui a présidé à nos débats, de la qualité des rapports qui ont pu s'établir avec M. le rapporteur et des avancées qu'a permises la discussion. Nous en prenons acte.
Cependant, il reste, à l'évidence, des points importants sur lesquels nous nous sommes opposés aux amendements de la majorité sénatoriale. S'agissant, notamment, de la communication des documents administratifs et de la jurisprudence Berkani, nous espérons que l'on pourra aller plus loin que ce qu'elle propose.
Aussi, compte tenu de cette situation équilibrée nous nous abstiendrons.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Considérant les nombreux points sur lesquels nous avons relevé notre volonté commune d'améliorer l'accès aux règles de droit et la transparence administrative pour nos concitoyens, mais regrettant, dans le même temps, la position de la majorité sénatoriale sur un certain nombre de points importants, comme la jurisprudence Berkani, son refus d'améliorer le droit à l'information ou de rendre obligatoire la communication des documents adminitratifs, le groupe communiste républicain et citoyen s'abstiendra également.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 42:

Nombre de votants 272
Nombre de suffrages exprimés 172
Majorité absolue des suffrages 87
Pour l'adoption 172

Mes chers collègues, on me signale que M. Gayssot est retardé par quelques difficultés de circulation dans Paris.
En attendant son arrivée, nous allons donc interrompre nos travaux.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures vingt, est reprise à dix-huit heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.

9

MISE AU POINT AU SUJET D'UN VOTE

M. Jean Delaneau. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Delaneau.
M. Jean Delaneau. Monsieur le président, le résultat du scrutin précédent fait apparaître que le groupe des Républicains et Indépendants n'a pas participé au vote, alors qu'il souhaitait voter pour le projet de loi.
M. le président. Acte vous est donné de cette rectification, monsieur Delaneau.

10

CONSEIL D'ADMINISTRATION D'AIR FRANCE

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 254, 1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France et aux relations de cette société avec l'Etat, et portant modification du code de l'aviation civile. [Rapport n° 264 (1999-2000).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, ce projet de loi que l'Assemblée nationale a adopté le 1er mars dernier en première lecture vise à augmenter le nombre des représentants des salariés au sein du conseil d'administration d'Air France et à élargir l'autonomie de gestion de la compagnie nationale.
Le principe de l'élargissement du conseil d'administration en faveur de la représentation des salariés qui ont accepté d'échanger une partie de leurs salaires contre des actions n'est contesté par personne.
L'Assemblée nationale l'a d'ailleurs bien compris, puisqu'il ne s'est pas trouvé un seul député pour voter contre ce texte, les groupes de gauche l'ayant approuvé et les trois groupes de l'opposition s'étant abstenus, sans qu'aucun amendement ne soit déposé.
Les députés de la majorité ont considéré que ce texte contribuait au redressement d'Air France en témoignant une confiance dans l'avenir de l'entreprise de la part de la direction et des salariés, en particulier des personnels navigants.
Les députés de l'opposition ont eu, pour leur part, la sagesse de ne pas vouloir remettre en cause, par une attitude tranchée, l'équilibre social et le climat de confiance qui prévalent aujourd'hui au sein de la compagnie.
Vous l'avez compris, ce projet de loi est en quelque sorte un dernier élément au plan que le Gouvernement a voulu mettre en oeuvre pour le redressement et pour le développement durable de cette entreprise dans laquelle l'Etat restera majoritaire.
Comme vous le savez, Air France s'est trouvée dans une situation difficile au début des années quatre-vingt-dix, lorsque le marché du transport aérien s'est brusquement dégradé, notamment avec la guerre du Golfe.
Les efforts consentis avant 1997 pour la sortir de cette situation ont été réels, et il ne m'appartient surtout pas de les nier.
Il convient également de saluer le travail accompli depuis cette date par le président Spinetta, conformément aux orientations définies par le Gouvernement, ainsi que par son équipe et par l'ensemble des salariés de l'entreprise.
Ils ont en effet fortement contribué à l'embellie que connaît aujourd'hui la compagnie, avec une progression sur l'exercice 1999-2000 de 13 % pour son trafic de passagers et de 7 % pour le fret.
Aujourd'hui, Air France construit une alliance de dimension mondiale, s'engage dans des partenariats, progresse en parts de marchés et, pour la quatrième année consécutive, présente un résultat d'exploitation positif, et ce tout en restant au sein du secteur public, ce que certains d'ailleurs me reprochent.
Les efforts engagés par nos prédécesseurs pour assainir la situation l'avaient au contraire été dans le but essentiel de privatiser l'entreprise, ce qui présentait à terme le risque non négligeable de voir celle-ci subir les effets d'une de ces offres publiques d'achat qui peuvent entraîner la disparition des entreprises qui en sont victimes.
Je vous laisse mesurer les effets qu'aurait pu avoir une OPA sur une entreprise nationale comme Air France, notamment ce qu'il aurait pu advenir pour la desserte aérienne intérieure et extérieure de la France si une telle situation s'était produite.
Dès 1997, l'objectif a été de mettre Air France sur le chemin du développement et de rétablir la confiance, au sein de l'entreprise et vis-à-vis de ses clients habituels ou potentiels.
Pour conquérir ou reconquérir des parts de marchés, il fallait créer une dynamique de conquête qui ne peut réellement s'affirmer que dans le cadre d'un climat social positif.
Depuis 1997, le Gouvernement inscrit ses efforts dans la perspective de la pérennisation de l'entreprise, donc dans le sens de l'intérêt général. Nous sommes désormais très loin des 8 milliards de francs de pertes de 1993 et nous considérons que, en recapitalisant l'entreprise à hauteur de 20 milliards de francs, l'Etat a fait son devoir d'actionnaire.
Certains ont voulu justifier la perspective de privatisation par les exigences communautaires. Mais, vous vous en souvenez sûrement, mesdames, messieurs les sénateurs, la Commission européenne elle-même déclarait, après nos interventions, le 4 septembre 1997 : « Nous ne demandons pas qu'une entreprise soit privée ou publique, mais qu'elle soit concurrentielle et qu'elle suive les règles du marché. »
Il se disait également à l'époque qu'Air France ne pourrait pas nouer d'alliances internationales si l'Etat restait l'actionnaire majoritaire.
Je relève à ce propos que, à l'époque, la perspective de la privatisation n'avait pas conduit à la conclusion d'alliances particulièrement florissantes.
Je note par ailleurs que, depuis, Air France a construit et continue de construire son réseau d'alliances qui permettra d'offrir, sous une marque unique, un réseau mondial formé de l'ensemble des réseaux de ses partenaires.
A cette fin, Air France a signé, le 22 juin dernier, un accord exclusif avec Delta Air Lines, qui a vocation à être complété par d'autres, tel celui qui est négocié avec Aeromexico. De plus, sur le marché européen, Air France a désormais la capacité de croître par des prises de participations.
Elle a récemment pris le contrôle, en France, de Regional Airlines, et, en Irlande, de City Jet. Afin d'améliorer son offre sur le marché domestique, elle fait aujourd'hui à British Airways une offre de rachat d'Air Liberté.
L'amélioration de sa position sur le marché intérieur ne pourra avoir que des effets bénéfiques sur sa compétitivité sur les marchés internationaux.
Parallèlement au rétablissement de sa situation financière, l'appareil de production d'Air France a été profondément restructuré. Une plate-forme de correspondance compétitive, le hub, a été créée à Roissy et elle se développe.
Des navettes ont été mises en place sur les principales lignes du marché intérieur. Le réseau, qui avait été restructuré avec la fermeture des lignes les plus déficitaires, se développe aujourd'hui à nouveau.
L'ouverture du capital, en février 1999, a été et demeure un progrès. La demande privée a très largement dépassé l'offre et l'opération destinée aux salariés a été aussi innovante que réussie. Ni les salariés ni les investisseurs privés n'ont manifestement été découragés par la place importante de l'Etat dans le capital et par le rôle qu'il entend jouer.
Cette présence est, au contraire, apparue aux nouveaux actionnaires comme un gage de sérieux et de stabilité pour la stratégie suivie par la compagnie. Son maintien dans le giron de l'Etat n'est donc ni perçu ni vécu comme un handicap.
A vrai dire, il faut bien se rendre compte du fait que la privatisation totale n'engendre pas automatiquement la confiance, comme l'atteste, parmi d'autres, l'exemple de British Airways, dont le cours de l'action, après avoir pratiquement doublé, a fortement baissé ces derniers temps.
L'ouverture du capital, qui n'incite pas à la spéculation boursière, permet, en fait, à Air France de financer son projet industriel, dont la réussite passe notamment par un renouvellement très important de sa flotte.
La solution choisie permet d'éviter à l'Etat d'avoir à financer ces achats d'avions à partir des deniers publics, ce qui, d'ailleurs et de toute manière, ne serait plus accepté ni par la Commission ni par la Cour de Luxembourg.
Donner à Air France les moyens de renouveler sa flotte, c'est aussi lui donner les moyens d'améliorer ses dessertes, le confort de ses clients et aussi, en définitive, de causer moins de nuisances sonores aux abords des aéroports où elle déploie son activité, car les nouveaux modèles d'avions sont de moins en moins bruyants.
Nous savons tous, mesdames, messieurs les sénateurs, combien ce dernier aspect des choses est important aujourd'hui à proximité de Roissy, d'Orly ou des principaux aéroports de nos régions.
L'ouverture du capital a permis de renforcer sensiblement l'actionnariat salarié qui a été mis en oeuvre pour la première fois par la compagnie en 1995. Elle a contribué au renouveau du dialogue social au sein de l'entreprise après un conflit d'envergure, vous vous en souvenez tous, avant la Coupe du monde de football. Je considère, pour ma part, que la réussite du dialogue social est l'une des conditions essentielles pour la réussite et le renouveau de la compagnie nationale.
Il convient de souligner que la part du capital proposée aux salariés a été plus importante que dans les précédentes opérations d'ouverture de capital d'entreprises publiques, car 15 % des titres ont été cédés, contre 10 % habituellement. Cette offre a été « sur-souscrite » par les salariés, dont près des trois quarts ont participé à l'opération.
La deuxième innovation a été la proposition aux personnels navigants techniques - les pilotes - d'un échange entre salaire et actions. Tout le monde se souvient du conflit de juin 1998 ; pourtant, témoignant de leur confiance dans l'avenir de l'entreprise, près de 80 % des pilotes ont accepté cet échange qui participe directement à la baisse des coûts de production de la société sans que le revenu des pilotes en soit affecté sur la durée de leur carrière.
En conséquence, Air France est maintenant une des entreprises françaises où l'actionnariat salarié est le plus développé, avec environ 11 % du capital.
Enfin, l'entreprise s'est redressée. L'exercice courant devrait se terminer, pour la cinquième année consécutive, par un résultat d'exploitation positif. A l'issue de son dernier exercice, le 31 mars 1999, le résultat net était de 1,64 milliard de francs. Les neuf premiers mois du présent exercice ont vu la compagnie accroître son offre de 12 %, son trafic de 13,3 % et ses recettes de 12,7 %.
Ce développement, conduit à un rythme plus rapide que celui de ses concurrentes européennes, a également été favorisé par l'extension de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, avec l'ouverture de la troisième piste, et l'occupation par Air France du nouveau terminal F à Roissy 2.
Ce développement profite à la compagnie, mais aussi à l'ensemble de la collectivité. Air France a en effet créé plus de 3 500 emplois depuis avril 1997 et compte en créer 6 500 de plus dans les trois prochaines années, grâce à l'effet conjugué de la négociation avec les partenaires sociaux sur la réduction du temps de travail et de la croissance de l'activité.
Alors que la compagnie avait dû supprimer, je le rappelle, 9 000 emplois pendant la crise dont j'ai parlé tout à l'heure, elle en aura créé au total plus de 10 000 entre 1997 et 2002.
Il convient aussi de souligner que la croissance d'Air France, qui gagne des parts de marché en Europe, ne se fait pas au détriment de la rentabilité. La compagnie garde la maîtrise de ses coûts. Il en est résulté, pour les neuf derniers mois de 1999, un résultat d'exploitation de 2,6 milliards de francs, ce qui représente une progression de 45 %.
Ces bons résultats contribuent à la consolidation de la structure financière de l'entreprise. Ainsi, l'endettement diminue, puisqu'il n'était plus que de 9,8 milliards de francs à la fin de l'année contre 14 milliards de francs en mars 1999. Air France a désormais en ce domaine des ratios comparables à ceux des grands transporteurs de l'Union européenne.
On peut donc dire que l'ouverture du capital a été une réussite. Le développement de l'entreprise se poursuit, dans l'appartenance au secteur public, et le présent projet de loi prouve que ce cadre n'est pas synonyme d'immobilisme, au contraire.
Le changement apporté par l'ouverture du capital et par la situation de vive concurrence doit être pris en compte dans le cadre institutionnel régissant la société. La modernisation des relations entre l'entreprise et l'Etat actionnaire doit être l'occasion d'une meilleure implication des salariés.
L'ouverture du capital implique de modifier les conditions d'exercice de la tutelle de l'Etat. Il convient en particulier de recentrer l'exercice de la tutelle sur le conseil d'administration et d'adapter la composition de celui-ci. Tel est l'objet du texte qui vous est proposé.
S'agissant des relations entre l'Etat et l'entreprise, certaines procédures sont inutilement lourdes et des dispositions sont devenues obsolètes car elles relèvent désormais de règlements communautaires. Il vous est par conséquent proposé de les supprimer.
Par ailleurs, le texte vise à recentrer sur le conseil d'administration l'examen des projets d'investissements et de prise de participation de la compagnie.
Modernisation de la tutelle ne veut cependant pas dire suppression de la tutelle. La volonté du Gouvernement étant qu'Air France reste dans le secteur public, l'Etat doit continuer à exercer l'ensemble de ses prérogatives d'actionnaire majoritaire par son intervention dans le conseil d'administration et dans le cadre de la tutelle exercée par le ministère des transports et par celui de l'économie.
Le renforcement de l'actionnariat salarié et l'arrivée de nouveaux actionnaires privés dans le capital d'Air France doivent aussi être pris en compte. C'est l'objet de l'élargissement du conseil d'administration de 18 à 21 membres, qui reflétera ainsi plus fidèlement la structure du capital tout en garantissant la représentation des salariés.
Je précise - c'est une nouveauté - que les salariés auront 6 représentants au conseil d'administration de la compagnie, ce qui correspond à une parité de sièges avec l'Etat.
Cette représentation s'inscrit - j'insiste sur ce point - dans le respect de l'accord signé avec les personnels navigants techniques le 29 octobre 1998. C'est donc un engagement du Gouvernement.
Votre rapporteur, M. Jean-François Le Grand, dont les compétences en matière de transport en général et de transport aérien en particulier sont bien connues,...
M. Jean-Pierre Plancade. Eh, oui !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... propose, dans son rapport, d'adopter conforme le projet de loi issu de l'Assemblée nationale. Cela permettait ainsi la promulgation de cette loi dans le courant du mois prochain.
Cependant, à la suite d'un amendement parlementaire, la commission a modifié sa position. Je vous le dis très sincèrement, il serait dommageable pour l'entreprise que l'entrée en vigueur de la loi soit reportée de presque un an, du fait des navettes parlementaires.
Dans ce domaine comme dans d'autres, je crois qu'il faut savoir dépasser certaines querelles et toute position qui pourrait s'apparenter à du dogmatisme. L'intérêt général, l'esprit de responsabilité et tout simplement la raison doivent l'emporter.
Aussi, je souhaite que vous adoptiez ce projet de loi qui, comme vous le savez, est très attendu par toutes celles et tous ceux qui souhaitent le développement d'Air France. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, un an après l'ouverture du capital d'Air France, il nous est proposé, avec le présent projet de loi, d'en tirer les conséquences juridiques. Autrement dit, le Gouvernement souhaite adapter le statut d'Air France, défini par le code de l'aviation civile, à la nouvelle composition de son capital.
Avant d'aborder ces dispositions, je dirai quelques mots sur le contexte. Comme vous le savez, le marché du transport aérien a connu, depuis une dizaine d'années, une libéralisation accélérée et sans précédent. Aujourd'hui, c'est un marché largement concurrentiel.
Je ne reviendrai pas sur les différentes étapes de cette libéralisation, ni sur l'adoption du deuxième paquet, entre 1990 et 1992, qui a apporté la cinquième liberté, c'est-à-dire le libre accès aux liaisons aériennes entre chaque Etat.
Confrontée à ce nouvel environnement, la compagnie Air France a dû entreprendre une restructuration qui était d'autant plus importante que, il faut le dire, elle y était mal préparée.
Tout d'abord, Air France avait été habituée à une situation de quasi-monopole. Victime de choix stratégiques contestables, elle avait accusé, dans les premières années de la libéralisation du marché, d'importantes pertes de parts de marché, qui se sont d'ailleurs très vite traduites par des pertes financières considérables. Ainsi, en 1994, ces dernières s'élevaient à environ 14 milliards de francs. C'est dire si, aujourd'hui, nous revenons de loin !
Depuis, Air France n'a pu se redresser qu'avec le soutien de l'Etat, qui - il faut le souligner - a procédé, en 1994, à une recapitalisation de 20 milliards de francs. Vous l'avez rappelé tout à l'heure à la tribune, monsieur le ministre, ce sont 20 milliards de francs que l'Etat a apportés, mais permettez-moi d'être un peu plus précis que vous ne l'avez été. En fait, ce sont les contribuables qui les ont apportés, à cette occasion, pour redresser les erreurs stratégiques et permettre à la compagnie de remédier aux différentes défaillances de son actionnaire principal.
M. Jacques Machet. Très bien !
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. On le dit en termes pudiques, vous le constatez !
Cette recapitalisation n'a été autorisée par la Commission européenne - vous l'avez aussi rappelé - que sous réserve de la mise en place d'un plan de redressement financier et commercial sévère, qui commence aujourd'hui à porter ses fruits.
Le redressement est, il faut le dire, spectaculaire. L'exercice comptable de 1999 s'est clos, pour la quatrième année consécutive, sur un résultat d'exploitation positif. En 1998, Air France a conquis le troisième rang européen derrière British Airways et Lufthansa. Les actions structurelles mises en oeuvre par Air France depuis 1994 lui ont permis de renouer avec les profits.
Cette politique s'est développée autour de cinq axes que je ne détaillerai pas, puisque, lors des débats budgétaires ou de l'examen de textes relatifs aux transports aériens, nous avons examiné chacun d'eux. Je les rappellerai simplement pour mémoire : la restructuration du réseau d'Air France, le développement du hub à Roissy, la mise en oeuvre du système de tarification des sièges dit de yield management - nous ne pouvons que nous réjouir du fait qu'Air France ait utilisé cette technique, même si elle l'a fait longtemps après d'autres compagnies étrangères -, la conclusion d'une alliance globale avec Delta Airlines et l'adoption d'un plan d'économies de plus de 3 milliards de francs.
A cet instant, compte tenu de la qualité et de la nature du redressement, nous ne pouvons que féliciter à la fois la direction et les salariés de la compagnie pour leurs performances.
Ce redressement est également la conséquence de l'ouverture du capital d'Air France. Comme vous le savez, la réduction des coûts salariaux des pilotes n'a été possible que grâce à la cession de 12 % du capital à ceux qui ont consenti, au terme de l'opération « salaires contre actions », à des réductions de salaire. Il n'est point besoin de revenir sur les circonstances. C'était, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, l'époque de la Coupe du monde de football...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Juste avant !
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. C'est exact. Cela a peut-être permis d'accélérer la conclusion de l'accord. On peut toujours imaginer, même si ce n'est pas écrit dans les textes, que ceci n'était pas étranger à cela...
Ainsi, 12 % du capital ont été cédés. Aujourd'hui, plus de 72 % des salariés d'Air France détiennent des actions de leur compagnie. Air France est ainsi devenue l'entreprise française cotée ayant l'actionnariat salarié le plus important. Parallèlement, les investisseurs privés ont acquis plus de 30 % du capital d'Air France. Les institutionnels comme les nombreux particuliers qui ont misé sur Air France n'ont pas aujourd'hui à le regretter.
Monsieur le ministre, nous aurions préféré la privatisation au lieu de cette respiration du capital. Nous aurions préféré le grand air ; ce fut un vent modéré. Nous attendions un vol long-courrier ; ce fut du moyen-courrier, l'Etat étant resté actionnaire majoritaire de la société. Sa part devrait se réduire d'ici à 2003 à seulement 53 % du capital. Nous ne sommes donc pas très loin in fine de la privatisation...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Mais nous n'y sommes pas encore !
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. J'y reviendrai dans un instant.
Je me félicite, quant à moi, que le Gouvernement, à l'instigation de son ministre - je vous rends hommage ; comme vous m'avez cité tout à l'heure, c'est un juste retour des choses ! (Sourires) - ait engagé Air France dans cette voie, bien que ce soit quelquefois un peu curieux. Bien entendu, je vous invite à aller plus loin et à autoriser Air France à prendre le large. Encore un petit effort !
Je crois qu'Air France a besoin d'être guidée par un actionnaire capable d'exercer entièrement les responsabilités d'un gestionnaire d'entreprise. Elle a besoin d'un actionnaire capable d'accompagner financièrement son développement et d'assumer sans faiblesse les décisions propres à favoriser son succès.
Les choix industriels sont biaisés et le dialogue social est faussé dès lors que les ministres apparaissent comme des recours d'autant plus mobilisables que pèsent sur eux des pressions électorales et politiques qui peuvent ne pas être guidées parfois par les seuls intérêts de l'entreprise.
Je constate que les transporteurs aériens à statut public ne sont en Europe plus que des exceptions. British Airways et Lufthansa sont depuis longtemps privatisées ; Al Italia et Iberia sont en voie de l'être.
Sans doute m'objecterez-vous les difficultés que connaît British Airways ; on en entend parler ici et là. Cela étant, comparons ce qui est comparable ! Même si British Airways connaît quelques fluctuations dans son évolution, sa privatisation, depuis près de vingt ans, a fait de cette compagnie un leader européen - situation extrêmement confortable au niveau mondial - placé largement encore devant Air France.
Air France risque d'être, à la fin de l'année, la seule grande compagnie européenne encore publique. Il me semble que l'attachement - parfois louable - du Gouvernement à maintenir l'exception française pourrait s'exercer dans d'autres domaines que celui-là !
Je suis toutefois reconnaissant à l'actuelle majorité de n'avoir pas remis en cause la loi du 19 juillet 1993, par laquelle le Parlement a autorisé la privatisation d'Air France. Il faut vous en donner acte, monsieur le ministre, vous n'êtes pas revenu sur cette autorisation qui était accordée au Gouvernement d'aller jusqu'à la privatisation. Il suffirait donc d'un décret. Mais j'ai cru comprendre qu'un tel décret ne serait pas pris tant que vous seriez ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Pas d'ici à ce que je parte !
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. On peut le faire maintenant, et privatiser Air France au cours de la séance ! Il me semble qu'un jour nous y parviendrons.
Venons-en aux dispositions du projet de loi lui-même.
Pour ne rien vous cacher, monsieur le ministre, je crois, dans un premier temps, que ces dispositions étaient un peu inutiles. Aucune d'elles, pour ce qui est des deux premiers articles, en tout cas, ne me paraît strictement indispensable au bon fonctionnement de l'entreprise.
Il est vrai que l'alignement des dispositions du code de l'aviation civile sur le droit communautaire était en toute rigueur nécessaire au respect de la hiérarchie des normes et à la cohérence juridique du texte. Toutefois, chacun le sait - j'ai été récemment rapporteur d'un texte de loi permettant d'adapter le droit français au droit européen - les règlements communautaires sont directement applicables et obligatoires dans tous leurs éléments ; les dispositions actuelles du code de l'aviation civile qui leur sont contraires ne pouvaient donc pas être appliquées.
Quant à l'allégement de la tutelle de l'Etat, annoncé assez généreusement dans l'exposé des motifs, il relève pour une large part d'un toilettage technique de dispositions qui sont - cela m'ennuie d'autant plus de vous le dire que vous avez fait, monsieur le ministre, une présentation importante de cette affaire - soit sans portée réelle, comme la contrainte de l'équilibre financier - qui exigerait le contraire d'une entreprise ? - soit inappliquées, comme les dispositions relatives aux conditions d'exercice du transport aérien.
Mes chers collègues, la portée juridique et pratique des deux premiers articles laisse donc à penser que leur vocation première était d'accompagner l'article 3, qui modifie la composition du conseil d'administration d'Air France.
Cette modification tend à tirer les conséquences de l'ouverture du capital d'Air France opérée en 1999. Elle permet l'introduction de nouveaux administrateurs représentant les actionnaires privés et le renforcement de la présence des représentants des salariés actionnaires.
Je constate néanmoins que l'augmentation du nombre d'administrateurs - seule mesure qui exigeait réellement le recours à la loi, la composition aujourd'hui relevant du décret - n'était pas elle-même indispensable à cet objectif.
Comme vous le savez, monsieur le ministre, il était possible d'atteindre cet objectif sans modifier le nombre global d'administrateurs, c'est-à-dire sans recourir à la loi. Toutefois, j'ai cru comprendre que cette solution avait été écartée en raison de la crainte que des personnalités qualifiées, pourtant nommées par l'Etat, ne manifestent à l'occasion de certains votes une certaine indépendance, voire une indépendance certaine !
Il m'est donc arrivé de penser que ce projet de loi avait pour objectif ultime d'asseoir la majorité de l'Etat au sein du conseil d'administration.
Après réflexion, et suite à de nombreuses auditions, il m'a semblé que ce texte avait cependant une ambition tout autre.
Il permet d'abord de consacrer la participation des salariés actionnaires au conseil d'administration et à la direction d'Air France. C'est à mon sens un élément essentiel de motivation du personnel que son implication dans l'avenir de la société.
Il favorise ensuite l'introduction, pour la première fois depuis sa nationalisation, de représentants d'investisseurs privés au sein du conseil d'administration d'Air France. J'y vois là une consécration ou une affirmation d'un processus qui nous mène plus loin : vers la privatisation, comme je le disais tout à l'heure.
J'ai noté avec intérêt la volonté du Gouvernement d'assurer l'autonomie de gestion d'Air France. Je crois que la suppression de la procédure d'autorisation préalable pour les prises de participation d'Air France lui permettra d'engager sa parole dans des négociations sans devoir demander, pour chaque opération, l'approbation des services de l'Etat.
C'était déjà une réflexion que j'avais présentée voilà deux ou trois ans à l'occasion du vote du budget. J'avais indiqué qu'il était sans doute pénalisant pour Air France d'avoir systématiquement à recourir à l'autorisation préalable avant d'engager des pourparlers ici ou là et d'orienter différemment son activité.
Réjouissons-nous donc de la volonté de desserrer la tutelle de l'Etat sur le conseil d'administration !
Je partage avec vous, monsieur le ministre, le souci qu'Air France puisse se battre à armes égales avec ses concurrents. J'ai trop souvent regretté ici, à cette tribune, le retard pris dans un certain nombre d'alliances ; j'ai trop souvent regretté ici, à cette tribune, la difficulté pour Air France d'évoluer dans ce milieu éminemment concurrentiel pour, aujourd'hui, faire la fine bouche et ne pas dire que ce point nous paraît effectivement tout à fait positif.
Mes chers collègues, parce que ce texte représente une avancée dans la bonne direction, même s'il est encore insuffisant, parce qu'il constitue une étape vers la privatisation, la commission ne vous proposera aucune modification. Nous aurons donc seulement à étudier les amendements déposés par notre collègue M. Poniatowski,...
M. Ladislas Poniatowski. Et adoptés en commission !
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. ... qui ont reçu un avis favorable de la commission ; j'y reviendrai dans un instant.
Cette approbation de principe s'accompagne néanmoins de quelques inquiétudes.
Je regrette notamment que la voie législative empruntée par le Gouvernement pour modifier le conseil d'administration entraîne l'interruption du mandat d'administrateurs désignés voilà à peine trois ans. En la matière, la continuité aurait permis, me semble-t-il, un suivi des dossiers plus propice au sérieux des travaux. La prorogation de l'actuel conseil d'administration avec adjonction de membres nouveaux aurait sans aucun doute été préférable.
Cette réforme aura en outre comme conséquence de provoquer de nouvelles élections syndicales, de sorte que, pour Air France, l'année 2000 sera une année d'élections, comme l'a été l'année 1999. Ce climat permanent de campagne électorale me semble être de nature à raviver les tensions entre les différentes catégories de personnels. De ce point de vue, on aurait pu attendre, de la part du Gouvernement, une attitude plus attentive à la cohésion sociale dans l'entreprise.
Certaines dispositions du projet de loi ont notamment soulevé les inquiétudes de certaines catégories de salariés. Ainsi, les dispositions permettant de prévoir les élections au sein de deux sections de l'assemblée générale composées respectivement du personnel navigant technique actionnaire et des autres salariés traduisent, je le sais, des accords passés par la direction avec les pilotes. Elles ont néanmoins l'inconvénient de raviver le clivage entre les PNT et les autres salariés, qui ont déjà assez mal perçu leur faible représentation au sein du comité d'audit et de stratégie.
Il est vrai, monsieur le ministre, que le fait que certains des salariés aient pu bénéficier, en échange de diminutions de salaire, d'actions de l'entreprise qui leur ont été, en quelque sorte, offertes, alors que d'autres ont dû acquérir les leurs au prix normal, c'est-à-dire au prix coûtant, a créé une différence notable dans la relation à l'intérieur même de l'entreprise.
Monsieur le ministre - faut-il le dire ? - les salariés sont la force de cette entreprise : leur cohésion est un facteur du redressement d'Air France.
Mes chers collègues, en dépit des quelques inquiétudes dont je vous ai fait part, la commission des affaires économiques vous propose d'approuver les dispositions du projet de loi ainsi amendé, qui, bien que de portée limitée, engagent un peu plus, et c'est bien, Air France dans la voie de la privatisation. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Poniatowski.
M. Ladislas Poniatowski. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je n'avais pas l'intention de voter ce projet de loi relatif à l'élargissement du conseil d'administration d'Air France en l'état. Mais s'il est modifié dans le sens des amendements que j'ai déposés et que la commission a approuvés, mon groupe le votera. S'il n'est pas modifié en ce sens, nous ne le voterons pas.
Nous faisons l'objet, je le sais, d'une forte pression pour qu'il soit adopté conforme, « afin de ne pas prendre de retard », avez-vous dit, monsieur le ministre. Mais vous avez attendu presque un an et demi pour le présenter ; on peut bien attendre quelques semaines de plus pour une navette qui ne durera pas un an, monsieur le ministre !
Mme Hélène Luc. Vous faites du zèle par rapport à vos amis de l'Assemblée nationale !
M. Ladislas Poniatowski. Ce texte, mes chers collègues, contrairement à ce qui a été dit, est loin d'être anodin. Il est, en effet, l'aboutissement de deux événements importants qui ont eu lieu en 1998, événements que vous avez rappelés, monsieur le rapporteur, et auxquels vous avez également fait allusion, monsieur le ministre.
Le premier de ces événements, c'est la grève des pilotes d'Air France intervenue lors de la Coupe du monde de football, en juin 1998.
Le second événement, c'est l'ouverture du capital d'Air France, décidée en novembre 1998 et qui a pris effet en février 1999.
Je souhaite revenir sur ces deux événements et tenter de vous convaincre, mes chers collègues, de nous suivre en acceptant la modification sur laquelle la commission a donné un avis favorable ce matin.
Les pilotes d'Air France ont deux particularités. Première particularité : ce sont les pilotes les mieux payés au monde. Je m'en réjouis pour eux, bien sûr, mais cela coûte très cher à l'entreprise, au point de la handicaper par rapport à ses concurrents. Il faut savoir que, en termes de rémunération, les pilotes d'Air France coûtent 40 % de plus que ceux de la Lufthansa et 20 % de plus que ceux de British Airways.
Seconde particularité : lorsqu'ils font grève, c'est systématiquement à la veille de départs en vacances ou de week-ends fériés prolongés, voire à la veille de grands événements, comme ce fut le cas lors du Mondial. Cela leur réussit parfaitement, d'ailleurs, puisqu'ils obtiennent assez facilement des avantages. La preuve : ce sont, je le répète, les pilotes les mieux payés au monde ! La veille du Mondial, monsieur le ministre, ils ont fait fort, ils ont même fait trop fort ! En annonçant qu'ils ne transporteraient pas les centaines de milliers de spectateurs venus du monde entier pour assister aux différents matches organisés à travers notre pays, ils remettaient en cause tout le championnat du monde, avec ses intérêts économiques et financiers, en matière de télédiffusion notamment, intérêts que nous connaissons bien, les uns et les autres. La menace était telle que le Gouvernement, notamment vous-même, monsieur le ministre, était prêt à tout céder. Et il a tout cédé !
Jamais, dans aucune négociation sociale, les revendicateurs n'ont à ce point obtenu tout ce qu'ils réclamaient. Cette négociation, et je pèse mes mots, monsieur le ministre, je considère qu'elle a été honteuse, vous allez voir pourquoi.
Vous avez tout accordé, à qui ? A une toute petite minorité de salariés - 3 600 - les mieux payés de l'entreprise, alors que rien n'a été donné aux 45 000 autres salariés ! Je vous rappelle, au passage, que les dix jours de grève ont coûté cher à Air France, qui a perdu au total 1,8 milliard de francs de recettes pendant que ses avions étaient cloués au sol. Elle a coûté cher aussi aux pilotes en terme d'image dans l'opinion publique. Non seulement ils ont été perçus plus que jamais comme des privilégiés mais aussi comme des êtres peu responsables, dans la mesure où la paralysie de la compagnie a profité surtout à ses concurrents.
Monsieur le ministre, vous n'avez peut-être pas participé directement aux discussions entre la direction d'Air France et les syndicats de pilotes, mais vous étiez à la tête de la cellule de suivi qui a été mise en place dans votre ministère...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. C'est vrai.
M. Ladislas Poniatowski. ... comprenant des représentants du ministère des transports, du ministère de l'économie et des finances et même de Matignon puisque M. Schramek, directeur de cabinet de M. Jospin, fut particulièrement présent dans les derniers jours.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Ça c'est faux !
M. Ladislas Poniatowski. Cette cellule représentait l'Etat actionnaire, ce qui est normal puisque certains éléments de la négociations concernaient précisément l'Etat actionnaire. C'est bien vous qui avez donné le feu vert pour le point fort de l'accord auquel vous faisiez allusion, monsieur le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Ça c'est vrai !
M. Ladislas Poniatowski. En échange d'un gel des salaires pendant sept ans, les pilotes ont obtenu un sacré cadeau en actions, un cadeau tel qu'on n'en avait jamais vu auparavant dans toute l'histoire de la participation dans notre pays.
Les négociations sur ce que l'on appelle « l'échange salaire-actions » n'ont en fait abouti que plus tard puisqu'elle ont redémarré après les vacances, entre septembre et octobre. L'objectif visé était très bon puisqu'il s'agissait d'obtenir une économie sur la masse salariale des pilotes afin de diminuer les coûts d'exploitation et de favoriser corrélativement l'ouverture du capital de la compagnie en valorisant les actions émises.
La cession d'actions aux salariés en échange d'une réduction de salaire - qui dit gel sur plusieurs années dit réduction de salaire - est un procédé qui n'était pas nouveau. Il avait déjà été mis en application peu de temps auparavant dans d'autres pays. C'est ainsi qu'aux Etats-Unis les salariés de United Airlines possèdent 51 % du capital de l'entreprise et ceux de Northwest 37 % du capital. Mais, dans l'une comme dans l'autre entreprise, le dispositif n'a pas été réservé à 3 600 salariés. Dans les deux cas de figure, le capital a été ouvert à tous les salariés.
C'est pour cette raison que j'ai qualifié votre négociation de « honteuse », monsieur le ministre, car elle a créé un nouveau type de participation : la participation réservée aux privilégiés.
M. Michel Pelchat. A deux vitesses !
M. Ladislas Poniatowski. Oui, tout à fait !
Je suis un chaud partisan de la participation, mais de la participation telle qu'elle avait été initiée par le général de Gaulle, c'est-à-dire d'une participation pour tous. Le gouvernement de M. Jospin restera, dans l'histoire sociale de la France, comme étant celui qui aura donné, je dis bien donné - vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur, et vous avez raison - 7 % du capital aux salariés les plus favorisés d'Air France et qui aura vendu 4,5 % du capital aux 45 000 autres salariés d'Air France au prix du marché, même s'ils ont bénéficié d'un petit avantage fiscal au passage, ce qui est exact.
M. Joël Bourdin. C'est la lutte des classes ! (Sourires.)
M. Michel Pelchat. Ce sont des marxistes !
M. Ladislas Poniatowski. Je souhaite vous indiquer que cette première injustice de traitement entre les pilotes et les autres salariés s'est doublée d'une seconde injustice entre les pilotes en exercice à la date de la signature de l'accord et les nouveaux pilotes embauchés depuis.
Au rythme d'environ deux cents nouveaux pilotes par an - d'ici à cinq ou dix ans, vous voyez combien cela fera - ils seront suffisamment puissants pour bloquer à leur tour la compagnie et obtenir un cadeau similaire en capital.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Vous encouragez les grèves !
M. Ladislas Poniatowski. De cet accord, la direction escompte retirer une économie estimée à environ 235 millions de francs par an de la masse salariale...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Un peu plus !
M. Ladislas Poniatowski. Par an.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Un peu plus !
M. Ladislas Poniatowski. La direction donne cette estimation, mais vous connaissez mieux que moi la situation de la masse salariale de l'entreprise, monsieur le ministre.
En échange, le cadeau accordé aux pilotes n'a pas été négligeable puisque la cession gratuite d'actions représente un cadeau de 1,4 milliard de francs, valeur février 1999, c'est-à-dire le jour de la mise sur le marché du capital d'Air France.
Le texte que nous examinons aujourd'hui n'est que la cerise sur le gâteau par rapport à ce cadeau puisqu'il s'agit d'accorder une place supplémentaire au conseil d'administration d'Air France.
Je voudrais m'arrêter maintenant sur le second événement qui a manqué Air France en 1998 : la décision d'ouverture de son capital, qui s'est achevée par une entrée en bourse réussie le lundi 22 février 1999.
Ce fut une entrée en bourse très réussie puisque, finalement, 2,4 millions d'actionnaires individuels - vous aviez raison de le dire tout à l'heure, monsieur le ministre - ont souscrit à l'ouverture du capital pour un prix de 14 euros, soit à peu près 91 francs par titre. La demande avait été telle que, pour la satisfaire « en partie », le nombre d'actions offertes aux particuliers avait été augmenté au détriment des investisseurs institutionnels. Bercy, et c'est un bien, avait tenu à donner une priorité absolue aux petits actionnaires. Les ordres ayant fait l'objet d'une réservation inférieure à dix actions ont été servis et tous ceux qui avait demandé plus n'ont reçu que dix actions. Cela montre le succès de cet appel à l'actionnariat populaire, et je m'en réjouis.
Les investisseurs institutionnels français et internationaux, qui s'étaient bousculés, avaient en définitive reçu un nombre d'actions à peine plus important que les particuliers - 23,6 millions d'actions contre 21,9 millions d'actions.
Monsieur le ministre, vous aviez raison de rappeler que le cumul des réservations de titres des investisseurs particuliers et institutionnels s'élevait à près de cent milliards de francs, pour une offre portant sur seulement quatre milliards de francs.
Les pilotes ont bien sûr largement profité de ce bon accueil. Ils ont profité de ce qui s'est passé depuis car l'action a augmenté en un an de près de 11 %. Cela signifie que le cadeau qui représentait très précisément 1,45 milliard de francs à l'époque représente aujourd'hui 1,64 milliard de francs. Ainsi, près de 85 % des pilotes ont accepté l'offre d'échange « salaire-actions ».
Quant à l'immense majorité des salariés d'Air France qui ont eu le droit d'acheter des actions de leur entreprise, ils ont bénéficié d'un avantage important par rapport aux autres citoyens français : chacun a eu le droit d'acheter plus de dix actions. Je pense que c'est une excellente chose, car il me paraît très intéressant que des salariés puissent détenir une partie du capital de leur entreprise. C'est ainsi que les salariés d'Air France autres que les pilotes sont aujourd'hui propriétaires de 4,4 % du capital de l'entreprise.
La répartition du capital d'Air France est actuellement la suivante : 11,5 % aux salariés de l'entreprise, notamment les pilotes ; 31,7 % aux investisseurs particuliers - les 2 400 000 petits porteurs - et institutionnels ; enfin, 56,8 % à l'Etat, étant entendu que la part de l'Etat ne sera plus que de 53 % en mars 2003.
Le texte que nous examinons aujourd'hui tend à augmenter le nombre de sièges au conseil d'administration d'Air France afin de tenir compte de cette nouvelle répartition. Cependant, nous ne sommes amenés à nous prononcer que sur le nombre : c'est ensuite vous, monsieur le ministre, qui déciderez de la répartition, par voie d'arrêté.
J'ai eu la curiosité de lire le projet d'arrêté. Il y est précisé que l'Etat conservera onze représentants, soit des fonctionnaires, soit des personnalités. Conformément à la loi de 1983 sur le secteur public, les salariés garderont six sièges ; je signale au passage qu'un des sièges est réservé aux pilotes. Les actionnaires autres que l'Etat et les salariés, qui n'avaient aucun siège, en obtiendront deux. Monsieur le ministre, vous avez raison : c'est un premier pas. Il reste que, à Air France, la détention de 32 % du capital donne droit à moins de 10 % des sièges, et je considère qu'il y a là une anomalie : d'où ma proposition.
Ma proposition vous donne d'ailleurs une marge de manoeuvre plus importante, monsieur le ministre. En portant non à vingt et un mais à vingt-trois le nombre de membres du conseil d'administration, je ne cherche pas à me substituer à vous pour déterminer à qui il faut attribuer les deux sièges supplémentaires. Cependant, dans mon esprit, il s'agit évidemment de faire en sorte que ceux qui sont mal représentés au conseil d'administration le soient mieux. Selon moi, il conviendrait donc d'attribuer un des deux sièges supplémentaires aux actionnaires autres que les salariés et l'Etat.
En revanche, vous serez certainement obligé, monsieur le ministre, de réserver le second à l'Etat. En effet, en tant que représentant de la nation, je souhaite que l'Etat qui est majoritaire dans le capital le soit également au sein du conseil d'administration. Mais l'amendement qui a été approuvé ce matin en commission vous permet de réparer une injustice.
Les grands défis auxquels devra faire face Air France au cours des dix prochaines années sont ceux que doivent relever toutes les grandes compagnies mondiales. Les quarante premières compagnies aériennes, même si certaines sont « plus publiques » et d'autres « plus privées », ont d'ailleurs des statuts assez semblables à celui d'Air France.
Il faut savoir que, dans le transport aérien, les fusions et les OPA sont interdites. Sur tous les continents, les compagnies dépendent du domaine souverain des Etats. Même aux Etats-Unis, la loi interdit à un investisseur étranger de posséder plus de 25 % d'un transporteur aérien local. En Europe, les Etats ouvrent plus ou moins le capital de « leur » compagnie nationale, mais tous tiennent mordicus à ce que 51 % du capital restent au moins entre les mains d'investisseurs nationaux. Ces règles, qui tendent à protéger le secteur très particulier qu'est le transport aérien, doivent être maintenues.
Pour faire face à ces défis qui attendent les compagnies, celles-ci prennent des décisions comparables. En particulier, un peu partout, elles concluent des alliances. La plus importante est la fameuse star alliance, qui regroupe United Airlines, Lufthansa, Singapore Airlines, Air Canada et Varig. Mais il y a aussi la « petite alliance », celle qui unit Air France, Delta Airlines et Aero Mexico.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Et ce n'est pas fini !
M. Ladislas Poniatowski. Quel est l'objectif de ces alliances ?
Il s'agit peut-être de contourner l'obstacle des fusions interdites, et pourtant indispensables dans d'autres secteurs économiques, comme on le constate.
Il s'agit sans doute de répondre à des impératifs économiques : mieux négocier les achats d'avions ou de carburant, éviter les doublons de gestion.
Il s'agit surtout de proposer un catalogue de vols et de services plus complets à la clientèle. Aujourd'hui, cela s'accompagne de baisses des tarifs. J'espère que ce sera encore le cas dans l'avenir mais je suis un peu plus sceptique sur ce point.
Les règles qui régissent ces géants du ciel sont les mêmes pour tous. Elles sont du domaine de l'économie de marché. Notre compagnie nationale a tourné le dos à ses difficultés des années quatre-vingt-dix ; M. le rapporteur, avec raison, a insisté sur ce point. Elle a su se désengluer des conflits sociaux à répétition. Elle a accompli d'énormes efforts pour appliquer les règles de management du transport aérien moderne, tout simplement en imitant les autres.
Il ne faut pas retomber dans les mauvaises habitudes, qui risquent d'alourdir le climat social dans l'entreprise. N'oublions pas que les progrès de productivité ont été réalisés par l'ensemble du personnel et non pas seulement par une catégorie. Vous le savez, monsieur le ministre, car vous êtes bien informé, les autres catégories de personnel ont profondément le sentiment que les pilotes bénéficient d'avantages, voire de privilèges.
Nous vous donnons l'occasion d'atténuer cette injustice, comme d'autres, et j'espère que vous la saisirez. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Plancade.
M. Jean-Pierre Plancade. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, bien qu'il comporte un nombre limité d'articles, le projet de loi relatif à l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France et aux relations de cette société avec l'Etat, et portant modification du code de l'aviation civile, n'en constitue pas moins un texte important puisqu'il vient conclure, sur le plan législatif, une série de mesures qui ont permis à la compagnie nationale non seulement de se redresser mais aussi de s'adapter avec succès à son nouvel environnement : secteur fortement concurrentiel, constitution d'un espace aérien communautaire.
La compagnie Air France a connu bien des vicissitudes depuis sa création en 1933 : sa nationalisation en 1945 ; la fusion-absorption d'UTA, en 1992, dont nous subissons encore quelques séquelles, notamment en matière d'indemnisation des salariés, et, sur ce point, monsieur le ministre, nous espérons qu'un accord amiable interviendra rapidement ; en 1994, la constitution d'une société holding, Groupe Air France SA, avec Air Inter ; en 1998, la transformation de la compagnie nationale Air France en société Air France, l'Etat étant alors autorisé à céder gratuitement, dans la limite de 12 % du capital, des actions Air France aux salariés ; enfin, en 1999, la société est cotée en bourse.
Je rappelle qu'en 1994 l'Etat a décidé de recapitaliser Air France pour un peu plus de 20 milliards de francs : c'était le prix à payer pour la survie de cette société. La Commission européenne a donné son accord sur cette participation supplémentaire de l'Etat français en contrepartie de mesures garantissant le fait que cet argent ne pourrait pas être utilisé pour modifier les règles égalitaires de la concurrence.
C'est pourquoi Air France a dû prendre toute une série de mesures - administratives, juridiques, financières - depuis cette date, qui font qu'aujourd'hui elle est devenue une entreprise nouvelle, une entreprise publique exemplaire, socialement et économiquement.
Cette entreprise a vocation à demeurer dans le secteur public précisément parce que un peu plus de 20 milliards de francs ont été injectés dans le capital. Cela justifie pleinement que l'Etat reste actionnaire majoritaire. D'ailleurs, comme le disait tout à l'heure notre excellent collègue M. Le Grand, il s'agit de l'argent des contribuables.
La participation de l'Etat a cependant été ramenée à 57 % aujourd'hui, tandis que 12 % des actions sont détenus par les salariés et 31 % par divers actionnaires, dont la BNP.
Le caractère public de cette entreprise ne lui interdit d'ailleurs pas d'être cotée en bourse et il ne freine pas son développement national ou international.
Sur le plan social, l'accord du 29 octobre 1998 a concrétisé l'opération d'échange « salaire contre actions ». Près de 79 % des pilotes d'Air France ont accepté de réduire leur salaire et ont reçu en échange 1,4 milliard d'actions. Et M. Poniatowski pense qu'il s'agit là d'une injustice ! Le personnel au sol et le personnel navigant, en dehors des pilotes, détiennent, quant à eux, 6 % du capital. Ils les ont obtenus à des conditions différentes, monsieur Poniatowski, de celles qui concernent les pilotes puisque ceux-ci ont accepté une baisse de salaire. En tenant compte des retraités, Air France est ainsi devenue l'entreprise française dont l'actionnariat salarié est le plus important.
L'ouverture du capital à d'autres actionnaires a aussi été un succès puisque des titres ont été achetés par 2 400 000 particuliers et que la demande des investisseurs institutionnels est quarante fois supérieure à l'offre. Sans doute ont-ils également estimé qu'il y avait là une injustice !
Ces constats tendraient à prouver qu'Air France est entrée avec vigueur sur le marché et que, bien que publique, elle est donc considérée par le monde économique comme une entreprise performante. C'est bien la preuve, comme avec France Télécom et Thomson, que le statut d'entreprise du secteur public n'est pas contradictoire avec la performance économique.
M. Marcel Charmant. Très bien !
M. Jean-Pierre Plancade. Sur le plan économique, après une longue période difficile et après la mise en place du plan de redressement, Air France a renoué voilà maintenant cinq ans avec les bénéfices.
Non seulement elle bénéficie d'une progression de son chiffre d'affaires et de son résultat net d'exploitation, mais de surcroît 3 500 emplois ont été créés depuis 1997 et vous nous avez annoncé, monsieur le ministre, qu'elle espérait en créer plus de 6 000 dans les toutes prochaines années.
La société Air France est donc une belle entreprise publique qui n'a plus rien à voir avec celle qui a été créée en 1948 et elle doit continuer à se développer. C'est la raison pour laquelle nous devons encore moderniser ses structures.
Tel est aussi le sens du projet de loi qui nous est soumis.
L'article 1er allège la tutelle de l'Etat sur Air France. Les conditions d'exploitation ne sont plus fixées par le ministre des transports et l'autorisation préalable de la tutelle n'est plus requise. Cet article conforte ainsi l'autonomie de gestion d'Air France, tant demandée dans cette assemblée. Désormais l'Etat ne pourra exercer son rôle que par ses seuls représentants au conseil d'administration.
L'article 2 supprime l'obligation d'équilibre financier et prend en compte les obligations de service public auxquelles doit se soumettre Air France.
L'article 3 supprime tout d'abord une disposition contraire aux règles communautaires proscrivant les aides d'Etat.
Ensuite, il fixe la composition du conseil d'administration et porte le nombre de ses membres de dix-huit à vingt et un, comme l'autorise la loi de 1983 sur la démocratisation du secteur public. Le conseil d'administration comptera donc six représentants de l'Etat, cinq personnalités qualifiées, deux représentants des salariés actionnaires, six représentants des salariés, comme actuellement, et deux représentants des actionnaires autres que les salariés et l'Etat.
Nous estimons souhaitable que l'ensemble des salariés, y compris ceux qui ne font pas partie du personnel navigant technique, puissent participer activement au conseil d'administration.
Nous regrettons par ailleurs que les usagers ne soient plus représentés au conseil d'administration de cette société. J'aimerais, monsieur le ministre, que vous m'indiquiez comment Air France compte assurer le dialogue avec ses clients, qui ont, eux aussi, je peux vous l'assurer, des choses à dire...
Je souhaiterais aborder également deux sujets qui ne sont pas liés directement au projet de loi, mais qui concernent le transport aérien et Air France.
Le développement d'Air France ne pourra se poursuivre que si cette compagnie, tout comme les autres, prend en compte l'exigence environnementale, non seulement en remplaçant les avions les plus bruyants, mais aussi en donnant des consignes à ses pilotes, notamment à l'occasion des atterrissages.
Je suis de ceux qui pensent que les compagnies aériennes ne pourront plus envisager une expansion commerciale sans contribuer au développement durable des territoires concernés, notamment par la réduction du bruit aux abords des plates-formes aéroportuaires.
A ce propos, la proposition de notre collègue le député Jean-Pierre Blazy, qui souhaite que les compagnies acquittent une taxe de trois francs par passager et de un franc par tonne de fret pour alimenter des fonds de compensation contre les nuisances sonores, permettant aux collectivités riveraines des grands aéroports de mener une politique de protection environnementale au bénéfice des populations, me paraît tout à fait intéressante.
La préoccupation environnementale est extrêmement importante, car elle conditionne réellement l'avenir du transport aérien.
Enfin, je voudrais attirer votre attention sur l'inquiétude - mais je sais qu'elle ne vous a pas échappé - des pilotes à la suite de la décision d'Air France et de La Poste de mettre un terme à leur collaboration dans le cadre de l'aéropostale. Connaissez-vous les raisons de ce choix et savez-vous quel est l'avenir des pilotes de l'aéropostale ?
En conclusion, le projet de loi qui nous est soumis procède à un toilettage du code de l'aviation civile ; il permet d'élargir le conseil d'administration aux salariés actionnaires et aux autres ; il donne une autonomie et une liberté de gestion à cette entreprise qui doivent lui permettre d'affronter la concurrence, très dure à l'échelon international, de s'adapter et de préserver son avenir.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, le groupe socialiste votera ce projet de loi sans état d'âme et en l'état ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Vinçon.
M. Serge Vinçon. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 13 décembre 1990, le Sénat a décidé la création d'une commission de contrôle, présidée par M. Cartigny, chargée d'examiner la gestion administrative, financière et technique de l'entreprise nationale Air France.
A l'époque, la crise du Golfe, la concurrence imposée par Bruxelles, la fermeture brutale par l'entreprise nationale de nombreuses lignes internationales au départ de grandes villes de province, sans concertation avec les élus et les responsables économiques locaux, justifiaient, en effet, une réaction de notre assemblée.
La commission de contrôle fut donc décidée sur les fondements suivants : comprendre, analyser et, si possible, apporter une aide à l'entreprise nationale. A la suite de nombreuses auditions et d'une réflexion approfondie, nous avions notamment conclu que la privatisation ne réduisait pas et ne modifiait pas automatiquement l'intérêt national porté aux services aériens.
Malgré le mouvement constaté partout vers la privatisation, nous constations, déjà, qu'il était plus facile d'introduire des capitaux étrangers dans une compagnie privée que dans une société d'Etat.
Aujourd'hui, plus de dix années plus tard, force est de constater que l'adaptation de la compagnie Air France à un environnement de plus en plus concurrentiel passe toujours par sa privatisation.
Or l'ouverture du capital d'Air France a été préférée à la privatisation par le Gouvernement qui est contraint, par le biais de ce projet de loi, d'apporter les adaptations nécessaires à cette timide ouverture de capital.
Alors que M. Edouard Balladur puis M. Alain Juppé, Premiers ministres, considéraient le retour dans le secteur privé du secteur public aérien comme l'un des éléments clés de leur politique économique, vous avez affirmé à de nombreuses reprises, monsieur le ministre, que vous ne souhaitiez ni privatisation ni statu quo.
Cela n'a pas empêché le Gouvernement auquel vous appartenez d'achever, en deux ans, l'adaptation juridique de certaines entreprises publiques au secteur concurrentiel. Ainsi, du « ni-ni », le Gouvernement, avec la bienveillance du membre éminent du parti communiste que vous êtes, monsieur le ministre (Exclamations sur les travées socialistes)...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Et fier de l'être !
M. Serge Vinçon. ... est rapidement passé à une politique plus pragmatique, autorisant la privatisation d'entreprises comme le GAN-CIC et Thomson CSF, ou des cotations en bourse comme pour France Télécom, ou encore la libéralisation pure et simple du plan entier d'un secteur public comme celui de l'électricité avec la mise en concurrence de l'opérateur historique Electricité de France.
Dans le cas particulier de la compagnie Air France, la privatisation devait répondre à un engagement du gouvernement français pris devant la Commission de Bruxelles en 1994 comme condition de la recapitalisation du groupe à hauteur de 20 milliards de francs. A ce titre, je me permets d'ailleurs de rappeler que cet engagement a été validé par le Parlement. En effet, lors de l'adoption de la loi de privatisation du 19 juillet 1993, celui-ci a fait figurer Air France parmi la liste des sociétés privatisables par décret.
Signe de votre clairvoyance, monsieur le ministre, cette loi de juillet 1993 n'a pas été abrogée. Mieux encore, le projet de loi que vous nous soumettez aujourd'hui tente d'intervenir pour apporter les adaptations, sur le plan institutionnel, nécessaires, comme pour toute entreprise du secteur public qui évolue dans une environnement concurrentiel.
Cependant, on ne peut qu'être frappé par le contraste entre l'enjeu crucial que constitue le développement de la compagnie Air France et la modestie de ce projet de loi.
Aujourd'hui, comme hier, nous sommes confrontés à cette récurrente question : n'allons-nous pas causer de graves et irrémédiables problèmes à la compagnie en la maintenant dans la position exceptionnelle, quasi unique dans le monde d'entreprise publique ?
Même si cette entreprise a effectué un redressement spectaculaire, grâce à l'action de son actuel président, M. Jean-Cyril Spinetta, mais aussi grâce à l'action de son prédécesseur, M. Christian Blanc, qui a obtenu, en quatre ans, des résultats remarquables à la tête de la compagnie nationale, les verrous de l'Etat français n'apportent pas au groupe Air France l'assistance dont il aurait besoin dans la recherche de ses alliances.
La preuve en est qu'il n'a toujours pas complété ses alliances avec l'Asie et qu'il n'a pas encore de partenaire européen à part entière.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. On y travaille !
M. Serge Vinçon. Avant-hier déjà, souvenons-nous, la compagnie Iberia refusait de développer un partenariat avec Air France, préférant finalement une solution plus anglo-américaine. Hier encore, souvenons-nous, le récent accord enfin conclu avec Delta Airlines ne provoquait pas d'autres nouvelles alliances pourtant vitales.
Ainsi, la privatisation permettrait définitivement au groupe Air France de répondre à deux enjeux majeurs, qui sont sa compétitivité face à la concurrence internationale et son adaptation au nouveau paysage aérien mondial qui se structure en réseaux d'alliances depuis près de dix ans.
Avec ce projet de loi, le Gouvernement tourne le dos à ces enjeux essentiels pour le transport aérien français, nie le transport aérien du futur et rétrograde Air France dans une époque où l'Etat assurait à la compagnie nationale une protection bienveillante, en la soutenant financièrement, réglementairement et politiquement.
Le Gouvernement préfère donc l'ouverture du capital à la privatisation, renouant ainsi avec le traditionnel pilotage automatique des entreprises publiques par les gouvernements socialistes. Une fois de plus, la politique du Gouvernement est motivée exclusivement par des raisons idéologiques.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Mais non !
M. Serge Vinçon. Vous me répondrez tout à l'heure !
Malgré ce constat et pour conclure, je soutiens, au nom du groupe du Rassemblement pour la République, la position de notre excellent rapporteur, qui propose d'adopter ce projet. Comme l'a souligné notre collègue Jean-François Le Grand, ce texte technique permet en effet une avancée significative dans la bonne direction, celle de la privatisation du groupe Air France. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi qu'il revient à notre assemblée d'examiner aujourd'hui comporte deux volets : d'une part, l'élargissement du conseil d'administration d'Air France et, d'autre part, le renforcement de l'autonomie de gestion de la société.
Ce texte s'inscrit dans le prolongement de l'ouverture du capital du groupe Air France, effective depuis février 1999, et sur laquelle, vous le savez, monsieur le ministre, notre groupe a déjà eu l'occasion d'exprimer ses réserves, ses craintes, tant pour la situation des personnels que pour les obligations d'intérêt général auxquelles Air France doit rester fidèle.
Bien évidemment - et les propos tenus par les députés de l'opposition à l'Assemblée nationale ou ceux qui ont été prononcés dans cette enceinte, en particulier par le rapporteur M. Jean-François Le Grand n'en font pas mystère - Air France serait, à ce jour, sans nul doute privatisée à 100 % si les Français n'avaient pas décidé de changer de majorité en juin 1997.
Mme Hélène Luc. C'est vrai !
M. Pierre Lefebvre. Le maintien de la compagnie nationale dans le secteur public tient probablement aussi, pour une bonne part, à votre présence, monsieur le ministre, au ministère des transports. Du reste, vos propos, et vous venez de les confirmer, ont toujours été sans équivoque sur ce point. Il est non seulement de l'intérêt d'Air France et de ses salariés que l'Etat reste l'actionnaire majoritaire, mais, n'en déplaise aux prédictions funestes de nos collègues de la droite sénatoriale, cette situation n'a en rien freiné, bien au contraire, ni le développement d'Air France sur le plan international ni la conclusion d'accords commerciaux déterminants pour les perspectives de croissance de l'entreprise.
A ce jour, Air France, parmi les compagnies européennes, est l'entreprise dont la situation financière et économique est la plus favorable ; elle dispose, en outre, d'atouts solides que vous avez soutenus, monsieur le ministre - le hub de Roissy-Charles-de-Gaulle n'est pas le moindre - dans un secteur où la concurrence exacerbée que se livrent les transporteurs fait craindre, à terme, l'abandon de dessertes vitales pour le désenclavement de certains territoires, des suppressions de personnels, une détérioration de l'environnement et une dégradation de la qualité et de la sécurité des flottes.
Dans ce contexte lourd de dangers, Air France poursuit son redressement : la dette nette est passée de 14,4 milliards de francs en mars 1999 à 11,7 milliards de francs au 30 septembre de la même année ; la capacité d'autofinancement est passée de 3,5 milliards à 5 milliards de francs ; le résultat net du groupe a progressé de 52 % au cours du premier semestre de l'exercice 1999-2000 ; le trafic passagers a augmenté de 16 % pour un coefficient de remplissage proche, aujourd'hui, de 80 %.
Ces bons résultats sont, de toute évidence, à mettre à l'actif de l'entreprise et de tous ses salariés mais aussi, il faut le dire à l'actif du Gouvernement qui a tout d'abord su créer les conditions d'un climat social plus apaisé au sein de l'entreprise et qui accepte, enfin, de prendre ses responsabilités d'actionnaire principal, de propriétaire des infrastructures aéroportuaires et de garant de la sécurité des passagers et des riverains.
Le redressement d'Air France était inespéré voilà encore cinq ans, à une époque où d'aucuns ne juraient - comme aujourd'hui d'ailleurs - que par la privatisation totale comme seule porte de sortie pour la compagnie. Leur mot d'ordre pouvaient se résumer à ceci : « la privatisation ou la mort ».
Aujourd'hui, Air France n'est pas privatisée et elle est pourtant bien vivante.
Que dire, en revanche, de British Airways, société privatisée depuis de nombreuses années et dont le bilan s'avère particulièrement désastreux,...
Mme Hélène Luc. Eh oui !
M. Robert Bret. Quelle efficacité !
M. Pierre Lefebvre. ... à tel point, d'ailleurs, qu'elle s'apprête à céder Air Liberté, qui pourrait revenir à Air France.
Pour autant, on ne peut considérer Air France comme étant à l'abri de pressions libérales qui s'exercent et qui s'exerceront jusqu'au sein du nouveau conseil d'administration.
L'effacement de l'Etat-tutelle, que prévoit ce projet de loi, conformément au règlement communautaire du 23 juillet 1992, et le désengagement progressif de l'Etat-actionnaire, qui devrait conserver 53 % du capital d'Air France d'ici à 2003, sont autant de facteurs qui offrent des marges de manoeuvre supplémentaires aux intérêts privés dont les préoccupations ne peuvent que conduire à privilégier la recherche du profit maximal par rapport à l'intérêt général et à l'intérêt des salariés.
Dans ce contexte de mixité du capital d'Air France, les salariés-actionnaires seront-ils les jouets de la Bourse ou, pire, les acteurs de leur propre exploitation ?
Pour ma part, je suis convaincu, d'une manière générale, que sans l'obtention de droits nouveaux pour les salariés, sans l'intervention et le contrôle de ceux-ci sur la gestion de l'entreprise, sans l'expression d'une véritable démocratie sociale à tous les échelons, l'actionnariat salarié ne serait, en définitive, rien d'autre que la forme la plus achevée de l'exploitation capitaliste.
Pire, celle-ci s'exercerait avec le concours inconscient de ses victimes, c'est-à-dire des salariés eux-mêmes.
Je ne me fais donc aucune illusion sur les pouvoirs nouveaux dont disposeraient les salariés grâce à leur seule entrée dans le capital.
Parler de droits nouveaux pour les salariés, actionnaires ou non, est, à nos yeux, essentiel si on ne veut pas s'enfermer dans un débat dont les termes et les solutions seraient in fine le reflet des positions patronales.
Ces réflexions dépassent, j'en conviens, le cadre de ce projet de loi. Pour autant, nous ne pouvons ignorer les craintes et les interrogations générées par l'ouverture du capital d'Air France, qui trouve son prolongement et sa confirmation dans ce texte. Notre groupe avait déjà eu l'occasion d'exprimer ces réserves au moment de l'examen du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier de 1998, dont l'article 51 prévoyait, pour les pilotes en grève, le principe d'une baisse de salaire en contrepartie de l'acquisition d'actions d'Air France.
Selon nous, il convient, en outre, de veiller à ce que la nouvelle représentation des différentes catégories de personnels au sein du conseil d'administration d'Air France ne vienne attiser des divisions qui seraient stériles et qui mettraient en péril la cohésion et le dialogue qui commencent à s'instaurer - il faut s'en réjouir - depuis plusieurs mois.
La division des personnels, selon les catégories ou selon leurs statuts, si elle devait se réveiller et trouver à s'exprimer, y compris à l'intérieur du conseil d'administration, ne ferait finalement le jeu que de ceux qui aspirent à démanteler l'entreprise et à obtenir le retrait de la puissance publique dans ce secteur.
D'ores et déjà, cette tension est permanente entre les intérêts contradictoires, d'une part, de l'Etat et des salariés, dont les intérêts convergent vers la satisfaction des besoins des usagers, d'autre part, des groupes financiers, dont le seul objectif est d'adapter la gestion de l'entreprise qu'ils contrôlent partiellement en vue d'optimiser le rendement des actions.
Or l'orientation de la direction d'Air France vers ce que l'on appelle le « gouvernement d'entreprise » ne revient-elle pas, en réalité, à mettre l'entreprise sous contrôle de la finance, sous le regard bienveillant mais impuissant des pouvoirs publics ?
Ce projet de loi, s'il ne vise qu'à une simple mise à jour de la loi pour tenir compte d'une réalité existante, entérine cette évolution vers l'« autonomisation » d'Air France, mais sans offrir par ailleurs de garantie durable sur l'orientation des critères de gestion de la compagnie.
Peut-on se satisfaire d'une situation dans laquelle l'Etat serait seulement informé a posteriori des stratégies d'investissement et de participation élaborées par la direction, comme c'est déjà le cas aujourd'hui ?
Peut-on se satisfaire d'un conseil d'administration qui ne serait, en définitive, qu'une chambre d'enregistrement de décisions prises ailleurs ?
Dans ce cas, les droits reconnus aux salariés actionnaires ne seraient que factices, et ceux-ci n'auraient, dès lors, à attendre de l'achat d'actions que la seule rente financière hypothétique, sans les pouvoirs supplémentaires escomptés et annoncés.
En conclusion, monsieur le ministre, tout en prenant en considération les efforts que vous fournissez pour infléchir le processus de libéralisation du ciel européen qui prévaut depuis de longues années, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen s'interrogent sur un dispositif qui participe, qu'on le veuille ou non, de cette logique.
A cet égard, face au projet néfaste de la Commission de Bruxelles d'avancer vers une séparation des fonctions de fournisseurs de services et des fonctions de contrôle et de régulation pour pousser plus encore la déréglementation du ciel européen, la France doit, à notre avis, saisir l'occasion de la présidence du Conseil qu'elle exercera dans trois mois pour proposer un projet alternatif accordant la priorité aux règles de sécurité d'environnement et favorisant l'harmonisation des normes sociales au niveau des compagnies européennes.
Aussi, monsieur le ministre, nos réserves sur ce texte n'entament en aucune matière le soutien que notre groupe apporte à l'action que vous menez depuis bientôt trois ans à la tête de ce ministère et aux combats que vous aurez également à mener pour contrecarrer les visées de Bruxelles dans les mois à venir. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur certaines travées socialistes.)
M. le président. A la demande de M. le ministre, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt heures.)

M. le président. La séance est reprise.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, sans revenir sur ce que j'ai dit tout à l'heure, je souhaite cependant apporter quelques éléments de réponse aux différents orateurs qui sont intervenus dans ce débat.
Certains s'interrogent pour savoir s'il est juste ou non qu'Air France reste dans le secteur public et considèrent que, depuis longtemps, la compagnie devrait être privatisée ; d'autres - c'est le choix du Gouvernement - considèrent au contraire qu'Air France doit rester dans le secteur public, et s'inquiètent même, à l'instar de M. Lefebvre à l'instant, de l'ouverture du capital qui a récemment été décidée : le système fonctionne-t-il, ne s'agit-il pas d'un handicap pour la compagnie elle-même ?
Depuis 1997 - M. Vinçon l'a souligné - des progrès ont été accomplis, permettant le développement de la compagnie. Ces progrès sont sans doute à mettre au compte du président de l'entreprise, M. Spinetta - mais vous me permettrez au passage de ne pas oublier les salariés - et vous avez même parlé du prédécesseur de M. Spinetta, M. Christian Blanc. Vous avez cependant lancé une petite pique à l'égard du Gouvernement en disant que, dans tout cela, il n'avait pas fait grand-chose. Vous comprendrez que je me sois senti un peu visé ! ( Oui ! sur les travées du RPR.)
Permettez-moi de m'expliquer sur ce point. Mais je ne serais pas trop long, rassurez-vous.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. C'est un plaisir de vous entendre, monsieur le ministre !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. La décision sur les deux pistes supplémentaires à Roissy n'avait pas été prise lorsque j'ai pris mes fonctions. Elle l'a été, et les pistes sont en cours de réalisation.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. C'est un peu court, comme réponse !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Quant à l'accord bilatéral avec les Etats-Unis, il avait été rompu en 1992. La majorité précédente n'en est peut-être pas responsable, mais c'est un fait, il y avait eu rupture en 1992. Depuis, tous les gouvernements successifs ont essayé de passer un accord avec les Américains.
Ces derniers proposaient un accord open sky , c'est-à-dire à ciel ouvert, mais nous considérions, nous, qu'il n'était pas possible de faire n'importe quoi au risque d'être écrasés.
Il est vrai que certains considéraient que, sans la privatisation, avec la gauche - et surtout avec ce ministre des transports - on n'arriverait pas à conclure un bon accord avec les Américains. Or nous avons passé un très bon accord bilatéral : chaque fois que les Etats-Unis gagnent une fréquence, nous en gagnons une aussi et, à l'issue de la période de trois ans qui a été prévue, nous aurons même la possibilité d'aller au-delà pour que l'équilibre soit réel entre les Etats-Unis et la France.
Tout cela favorise particulièrement la compagnie nationale Air France, même si elle n'est pas seule concernée.
Depuis, il y a eu l'alliance avec Delta Airlines. On me dit que le processus a pris du retard. Mais j'ai trouvé la situation que j'ai trouvée ! Si, vraiment, la perspective de la privatisation avait été convaincante - puisque tel était le discours tenu par les gouvernements précédents, ceux de M. Balladur et de M. Juppé, qui promettaient de privatiser, notamment au prétexte que l'Europe, après la capitalisation de 20 milliards de francs, l'exigeait - pourquoi n'avez-vous pas conclu de telles alliances ? Celles qui existaient lorsque j'ai pris mes fonctions étaient, en effet, insuffisantes, vous le savez bien, monsieur le rapporteur.
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Il y aurait beaucoup à dire sur ce point, monsieur le ministre !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Il y aurait sûrement beaucoup à dire, et je reconnais que je suis un peu rapide, ...
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. En effet !
M. Serge Vinçon. Aussi rapide que les avions !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... mais je ne veux pas prendre trop de votre temps.
En tout cas, en ce qui concerne Delta Airlines, rien n'était fait, nous sommes bien d'accord ! Or, cette alliance majeure, c'est nous qui l'avons conclue, et les autres compagnies européennes dont vous parliez avaient déjà passé de telles alliances.
M. Poniatowski a longuement parlé de l'échange salaire-actions. Or ce dispositif a été autorisé par le Parlement dans son principe...
M. Ladislas Poniatowski. Tout à fait !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... et validé par une commission indépendante, l'ex-commission des privatisations, qui a rendu un avis favorable et conforme en soulignant que cette opération comportait un bilan équilibré pour le patrimoine de l'Etat.
Aujourd'hui, vous pouvez, vous, estimer que le résultat est déséquilibré, mais, moi, je ne partage pas cet avis, et je le partage d'autant moins qu'il n'était pas aussi évident que des salariés acceptent qu'une partie de leur salaire soit transformée en actions ! D'ailleurs, combien pensaient que l'on n'y arriverait pas ? Eh bien, cela s'est fait !
S'agissant des autres salariés, monsieur Poniatowski, il convient - je l'ai dit tout à l'heure, mais je le souligne - de rappeler que ceux-ci se sont vus réserver 15 % des titres offerts au lieu des 10 % qui étaient la règle dans les autres opérations d'ouverture, y compris dans les opérations de privatisation.
On peut toujours reprocher au Gouvernement de n'en avoir pas assez fait dans un sens ou d'en avoir trop fait dans l'autre, mais, en tout cas, cela fonctionne, et le personnel est plus associé qu'auparavant à la gestion, y compris au sein du conseil d'administration.
Celui-ci se compose ainsi de six représentants de l'Etat, de cinq personnalités qualifiées - lesquelles jouent pleinement leur rôle d'administrateurs et ne comprennent d'ailleurs pas que des représentants d'entreprises publiques ou de fonctionnaires, puisqu'on y trouve aussi, vous le savez bien, des représentants d'entreprises privées, ce qui amène même certains à craindre que cela n'induise certains risques - et de six représentants des salariés. C'est la loi de la démocratie, monsieur Poniatowski ! Au demeurant, vous l'avez, à juste titre, dit vous-même, si ces derniers avaient deux représentants de plus, il faudrait obligatoirement un représentant supplémentaire pour l'Etat.
S'y ajoutent, c'est exact, deux représentants des salariés actionnaires - et, pour que la représentation ne soit pas inéquitable, ce que vous avez craint, il y a un représentant des salariés actionnaires pilotes et un représentant des salariés actionnaires non pilotes - et deux représentants des actionnaires privés.
Je vous le dis très sincèrement, je ne vois pas ce que pourrait apporter de plus un représentant supplémentaire pour l'Etat ! N'avez-vous d'ailleurs pas dit fort justement, monsieur Poniatowski, que nous aurions la possibilité de faire ce que nous voulons, que cela dépendrait de notre bonne volonté, du décret ?...
Le texte qui vous est proposé me paraît raisonnable. Il n'a pour vocation de mettre en cause ni l'ouverture du capital ni le principe de la majorité pour l'actionnaire public.
L'autonomie de gestion des entreprises publiques - une vieille revendication de votre groupe, monsieur Lefebvre - signifie-t-elle que l'on fait tout ce que l'on veut et n'importe quoi ? Bien sûr que non !
Mme Hélène Luc. Je l'espère !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. La stratégie est fixée par l'actionnaire public, c'est-à-dire par le Gouvernement, dans les lettres de mission. Mais, après, on libère l'entreprise de toute contrainte qui paralyse telle ou telle de ses initiatives : c'est cela, l'autonomie de gestion ! Celle-ci ne réside pas uniquement dans le discours, nous devons faire avancer les choses.
Ce que nous proposons, c'est de faciliter la représentation des actionnaires - disons le mot, puisque c'est le cas - au sein du conseil d'administration, y compris en la personne de représentants salariés actionnaires, et de favoriser l'autonomie de gestion.
M. Plancade a soulevé un problème qui, effectivement est réel, celui des représentants des usagers. Rien n'interdit, au demeurant, de choisir parmi les personnes qualifiées des représentants des « clients » - osons le mot - de l'entreprise ! En effet, Air France évolue désormais dans un contexte totalement concurrentiel. Dans ces conditions, autant le dire très franchement, si l'entreprise veut progresser et rayonner, si elle veut que le progrès social suive le progrès économique - puisque c'est, en fait, le sens de l'action que nous voulons mener dans ce domaine - elle doit avoir au coeur de sa démarche le souci du client et du passager ! Ou alors, il faut vraiment qu'elle fasse autre chose...
L'absence de représentants des usagers ne doit donc surtout pas être interprétée comme l'indice qu'Air France n'aurait pas le souci desdits usagers. J'ai presque envie de vous dire que cela doit être interprété, au contraire, comme la preuve que toute la compagnie et tous les administrateurs ne peuvent qu'avoir le souci des usagers, à défaut de quoi il n'y aurait pas de développement possible pour la compagnie ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. - I. - Le deuxième alinéa de l'article L. 341-1 du code de l'aviation civile est ainsi rédigé :
« Elle a pour objet d'assurer l'exploitation de transports aériens. »
« II. - Au troisième alinéa du même article, les mots : ", après autorisation" sont supprimés. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2

M. le président. « Art. 2. - L'article L. 342-2 du code de l'aviation civile est ainsi rédigé :
« Art. L. 342-2 . - Sous réserve des dispositions applicables aux obligations de service public imposées sur les services aériens réguliers intracommunautaires, les obligations qui sont imposées à la société Air France dans l'intérêt général font l'objet de contrats préalables assortis de cahiers des charges, passés entre la société, d'une part, l'Etat, les collectivités publiques de la métropole et d'outre-mer, d'autre part. » - (Adopté.)

Article 3



M. le président.
« Art. 3. - L'article L. 342-3 du code de l'aviation civile est ainsi rédigé :
« Art. L. 342-3 . - Par dérogation à l'article 4 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public, le conseil d'administration de la société Air France compte vingt et un membres. Indépendamment des représentants de l'Etat, des salariés, des salariés actionnaires ainsi que des actionnaires autres que l'Etat et les salariés, le conseil peut comprendre des personnalités choisies soit en raison de leur compétence technique, scientifique ou économique, soit en raison de leur connaissance du transport aérien. La représentation des salariés actionnaires peut se faire par catégories. Elle peut être subordonnée à la détention par l'ensemble des salariés actionnaires ou par chaque catégorie d'une part minimale du capital social. »
Je suis saisi de deux amendements, présentés par M. Poniatowski.
L'amendement n° 1 vise, à la fin de la première phrase du texte présenté par cet article pour l'article L. 342-3 du code de l'aviation civile, à remplacer les mots : « vingt et un membres » par les mots : « vingt-trois membres ».
L'amendement n° 2 a pour objet de compléter in fine le texte proposé par cet article pour l'article L. 342-3 du code de l'aviation civile par un alinéa ainsi rédigé :
« La composition du conseil d'administration doit également respecter la répartition du capital. »
La parole est à M. Poniatowski.
M. Ladislas Poniatowski. Je ne reviendrai pas sur ce que j'ai dit tout à l'heure, monsieur le ministre : faire passer le nombre des membres du conseil d'administration de vingt et un à vingt-trois n'a rien de révolutionnaire, d'autant que je reste dans le cadre du statut actuel d'Air France et de la loi de 1983 sur le secteur public. Il ne s'agit pas d'introduire le débat sur la privatisation !
Mme Hélène Luc. J'espère bien que non !
M. Ladislas Poniatowski. Cela viendra peut-être un jour, mais ce n'est pas l'objet de la présente discussion.
Même si Air France n'est pas une entreprise privée, il est bon que des actionnaires élus continuent à siéger au sein du conseil d'administration. En revanche, il existe au sein de l'entreprise un certain nombre d'injustices, puisque les pilotes, notamment, demeurent des salariés privilégiés par rapport aux 45 000 autres salariés d'Air France. Et il y a même une injustice parmi les pilotes eux-mêmes, entre ceux qui exerçaient déjà leur activité au moment de la négociation et ceux qui ont été recrutés entre-temps, à un rythme que j'ai rappelé tout à l'heure.
Ma proposition est très simple. Elle vise à tenir compte des nouveaux actionnaires, que ce soient les 2 400 000 tout petits actionnaires, qui ont tous dix actions ou moins, ou les actionnaires institutionnels, qu'on a le devoir de ménager.
Je ne sais pas, monsieur le ministre, ce qui se passera demain, si l'on élargira juste un peu ou si l'on ira vers une privatisation. Mais ce qui est sûr, c'est que l'on ne peut pas dire à ces actionnaires institutionnels qu'ils doivent investir dans notre entreprise nationale, qu'ils auront demain non pas 30 % mais peut-être 40 ou 45 % du capital, que leur argent est donc le bienvenu et, dans le même temps, qu'ils ne seront pas représentés à hauteur de ce capital au sein du conseil d'administration.
Monsieur le ministre, si je dis que ce n'est pas du tout révolutionnaire, c'est parce que, en faisant passer le nombre de 21 à 23, je vous donne une marge de manoeuvre supplémentaire. Votre proposition, que nous voterons a minima, consiste à faire passer le nombre 18 à 21, et comme vous êtes maître de répartir ces 21 sièges, vous serez le maître du jeu dans la répartition des 23 sièges.
Je dirai même que nous pourrions être piégés. Je ne peux en effet que souhaiter que l'un des deux sièges supplémentaires aille aux actionnaires du privé, que ce soient les petits actionnaires ou les actionnaires institutionnels, dire que vous avez le devoir de répartir ainsi, que c'est là un message à adresser auxdits actionnaires. Mais je vous ai dit aussi que je n'admettrais pas que l'Etat français, actionnaire majoritaire, soit minoritaire au conseil d'administration. Voilà pourquoi, s'il y a deux membres de plus, l'un d'eux sera forcément un représentant de l'Etat.
En tout cas, il faut aller vers plus de justice, en essayant d'améliorer la situation d'un certain nombre d'actionnaires qui sont lésés et qui le restent si l'on s'en tient à votre texte.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-François Le Grand, rapporteur. Compte tenu de l'heure, il ne me paraît pas opportun de revenir en long et en large sur l'ensemble des arguments qui ont été invoqués.
Ce matin, en commission, nous avons eu un long débat sur le sujet, long débat qui vient d'être excellemment résumé par M. Poniatowski, et c'est sur la base des arguments avancés que la commission a émis un avis favorable sur les deux amendements, qui sont cohérents.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Ces deux amendements me paraissent participer de la même logique.
Monsieur Poniatowski, d'abord, loin de moi l'intention de piéger qui que ce soit ! Soyez-en sûr, personne ne sera piégé, ni moi ni un autre ! Vous savez à quoi vous en tenir, quant à la composition qui est proposée.
Pour ma part - ce sera mon premier argument - je préférerais que l'entrée des représentants des salariés dans le conseil d'administration intervienne rapidement, parce que cela favorisera la mobilisation générale de l'entreprise pour le développement de son activité.
Cela étant, vous pouvez estimer qu'il faut amender le projet, ce qui suppose des navettes. Cela retardera les choses, mais, après tout, c'est le jeu...
M. Ladislas Poniatowski. ... de la démocratie !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. ... du débat parlementaire.
Mon second argument, c'est qu'avec vingt et un sièges nous sommes dans le haut de la fourchette au regard de tous les conseils d'administration. Vous feriez donc une exception française.
M. Ladislas Poniatowski. Elle existe déjà avec France Télécom.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Non, vingt et un, c'est le haut de la fourchette pour toutes les sociétés cotées en bourse.
L'Assemblée nationale, dans un souci d'efficacité, a adopté les propositions qui sont faites sans amendement. Le Sénat peut estimer qu'il faut les modifier. Mais il est certain que le vote conforme faciliterait les choses pour l'avenir.
Voila pourquoi je demande à leur auteur de retirer ces deux amendements, monsieur le président, faute de quoi le Gouvernement s'y opposera.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Pierre Lefebvre. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. En proposant d'augmenter le nombre des administrateurs, monsieur Poniatowski, vous voulez d'abord doubler le nombre des représentants des actionnaires privés au sein du conseil d'administration,...
M. Ladislas Poniatowski. Ils passent de deux à trois !
M. Pierre Lefebvre. ... même si vous semblez vouloir rééquilibrer la représentation au sein des différentes catégories.
A notre sens, vos deux amendements empiètent sur le pouvoir réglementaire du Gouvernement. Ils sont d'ailleurs conformes à l'objectif que vous ne cessez de viser, à savoir favoriser la conduite et la gestion d'Air France par le secteur financier. Cette action s'inscrit - chacun l'a bien compris, même si vous vous en défendez - dans la volonté de créer les conditions d'une privatisation totale de la compagnie.
Telle n'est pas la position du Gouvernement, qui, à l'inverse, entend conforter le développement et le redressement d'Air France par la présence majoritaire de l'Etat. Telle n'est pas non plus la nôtre, et c'est la raison pour laquelle nous voterons contre les deux amendements.
M. Jean-Pierre Plancade. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Plancade.
M. Jean-Pierre Plancade. Aux arguments déjà invoqués - mais je crains que les arguments ne suffisent pas, parce que M. Poniatowski n'a pas envie d'être convaincu - j'en ajouterai deux autres.
D'abord, l'augmentation du nombre de sièges contribuerait à diluer la représentation des salariés non actionnaires dans le conseil d'administration, ce qui serait parfaitement contraire à l'esprit de la loi de 1983 et à la démocratisation du secteur public.
Ensuite, on ne saurait retarder un projet qui est attendu par la compagnie elle-même, par la direction et par l'ensemble des salariés. Ce n'est pas le rôle du Parlement de s'opposer à un consensus social qui a été obtenu dans une entreprise après une longue grève.
Voilà pourquoi le groupe socialiste votera, lui aussi, contre les deux amendements. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe des Républicains et Indépendants.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 43:

Nombre de votants 319
Nombre de suffrages exprimés 318
Majorité absolue des suffrages 160
Pour l'adoption 218
Contre 100

Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Lefebvre, pour explication de vote.
M. Pierre Lefebvre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous regrettons beaucoup que les deux amendements de M. Poniatowski aient été adoptés. Leur auteur nous a dit tout à l'heure qu'ils n'avaient rien de révolutionnaire ; cela peut expliquer pourquoi les communistes ne les ont pas votés ! (Sourires.)
Ce vote a dénaturé la philosophie du projet, en remettant en cause la répartition des sièges au sein du conseil d'administration.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstiendra donc sur l'ensemble du projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Plancade.
M. Jean-Pierre Plancade. Le groupe socialiste, qui regrette le vote des deux amendements, qui ne fera que retarder encore l'application d'un accord qui avait fait l'objet d'un consensus dans l'entreprise, s'abstiendra également.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)11

RECONNAISSANCE DU GÉNOCIDE ARMÉNIEN

Demande de discussion immédiate
d'une proposition de loi (suite)

M. le président. Je rappelle au Sénat que, en application de l'article 30, alinéas 1 et 4, du règlement du Sénat, MM. Gilbert Chabroux, Robert Bret et quarante-neuf de leurs collègues ont demandé la discussion immédiate de la proposition de loi relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915 (n° 238, 1998-1999).
Le délai prévu par l'article 30, alinéa 2, du règlement est expiré et le Sénat a terminé l'examen de l'ordre du jour prioritaire.
En conséquence, je vais appeler le Sénat à statuer sur la demande de discussion immédiate.
Je rappelle que, en application de l'alinéa 6 de l'article 30 du règlement, le débat engagé sur cette demande ne peut jamais porter sur le fond.
Ont seuls droit à la parole l'auteur de la demande, un orateur contre, le président ou le rapporteur de la commission et le Gouvernement.
Aucune explication de vote n'est admise.
La parole est à M. Chabroux, auteur de la demande.
M. Gilbert Chabroux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est avec émotion que je prends la parole ce soir, en pensant aux Arméniens, à tous les Arméniens qui sont venus en France, patrie des droits de l'homme, et qui ont placé en nous leur confiance, en pensant à leurs descendants, héritiers du génocide, qui vivent intensément ce moment, partagés qu'ils sont entre le doute et l'espoir que nous saurons enfin reconnaître publiquement le génocide de 1915.
Je ne ferai à personne l'injure de penser qu'ici l'un d'entre nous pourrait douter ou nier l'existence de ce génocide. Les faits sont historiquement prouvés.
Nous savons tous que, durant le premier conflit mondial, alors que le gouvernement jeune-turc était entré en guerre contre la Russie, l'Angleterre et la France, la population arménienne de l'Empire ottoman a été la victime de massacres abomidables, d'une barbarie organisée, programmée, visant à sa destruction. Il y eut 1 500 000 morts, les deux tiers de la population furent exterminés. Ce fut un génocide, selon les critères requis par la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948 pour définir ce concept.
Ces atrocités sont gravées dans la mémoire des descendants des victimes ; nous savons combien est grande leur souffrance, et la population française tout entière partage ce sentiment d'un immense malheur qui a frappé les Arméniens. Aujourd'hui, lorsque l'on prononce le mot « Arménien », nos concitoyens pensent « génocide ».
Qui d'entre nous n'a pas dressé, au moment où il s'achève, le bilan, horrible, du xxe siècle : deux guerres mondiales, les abominations auxquelles ont conduit le racisme et le fascisme,...
M. Pierre Fauchon. Et le communisme !
M. Gilbert Chabroux. ... des génocides, le premier ayant été le génocide arménien, qui précédait de vingt-cinq ans celui du peuple juif, la Shoah, et combien d'autres ensuite, jusqu'à la guerre de Tchétchénie...
Albert Camus a dit du xxe siècle - et il n'en a connu qu'une partie ! - que c'était « l'ère du meurtre » : « Plus précisément, c'est l'ère du meurtre de masse politiquement cautionné, de la mort collective préméditée et destinée à servir le pouvoir étatique. » C'est l'ère du génocide.
Mais la question posée par certains de nos collègues n'est pas celle de la réalité du génocide des Arméniens, c'est celle de la « qualification » que la Haute Assemblée serait amenée à porter à l'histoire en reconnaissant officiellement ce génocide. Est-ce le rôle de la loi, la loi qui serait alors une proclamation de la vérité, une résolution ou une déclaration ?
Cette question est posée depuis longtemps. Elle s'est posée aussi dans d'autres pays, et il faut bien la trancher.
M. Christian Poncelet, alors sénateur, avait exprimé en 1982 ses préoccupations au ministre des relations extérieures, M. Claude Cheysson, en lui posant « le problème, non encore résolu à ce jour, de la reconnaissance juridique du génocide arménien par le gouvernement turc de 1915 ». Il lui demandait de « bien vouloir définir sa position sur cette question, notamment en ce qui concerne sa prise en compte éventuelle par notre pays à la tribune de l'Organisation des Nations unies ».
Le ministre, dans sa réponse, avait déploré « le refus constant des autorités turques de reconnaître les massacres de populations arméniennes en 1915 pour un génocide ». Cette même position du Gouvernement sera affirmée à plusieurs reprises, particulièrement par le Premier ministre, M. Pierre Mauroy, et par le ministre de l'intérieur, Gaston Defferre. Nous n'avons pas oublié également la déclaration du Président de la République, François Mitterrand, le 7 janvier 1984, à Vienne, et le retentissement considérable qu'elle a eu, en France et bien au-delà.
M. Jacques Chirac, alors candidat aux élections présidentielles, avait répondu le 24 mars 1995 au questionnaire du Comité de défense de la cause arménienne. A la question : « Le massacre des Arméniens constitue-t-il à vos yeux un acte de génocide ? », sa réponse avait été : « L'acte de génocide est défini par la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, signée à Paris le 9 décembre 1948 et entrée en vigueur le 12 janvier 1951 ». Il ajoutait : « Je crois surtout que le monde ne saurait oublier que les deux tiers de la population arménienne de l'Empire ottoman ont été exterminés en 1915 et 1916 sur l'ordre du gouvernement de ce pays. »
Il y a bien eu un acte de génocide.
La sentence du tribunal permanent des peuples, prestigieux tribunal d'opinion qui s'est tenu en 1984 à la Sorbonne, est on ne peut plus claire : « L'extermination des populations arméniennes constitue un crime imprescriptible de génocide au sens de la convention du 9 décembre 1948. » Il était ajouté : « L'organisation des Nations unies et chacun de ses membres sont en droit de réclamer cette reconnaissance et d'assister le peuple arménien à cette fin. »
Faut-il rappeler que la commission des droits de l'homme de l'ONU n'a pas hésité à qualifier l'histoire en appelant « génocide » le génocide des Arméniens ? Faut-il rappeler également l'adoption par le Parlement européen, le 18 juin 1987, d'une résolution qui subordonnait l'entrée de la Turquie dans ce qui est aujourd'hui l'Union européenne à la reconnaissance de ce génocide ?
Plusieurs parlements ont adopté la même position. Très près de nous, le Sénat de Belgique a reconnu le génocide des Arméniens, il y a exactement deux ans.
Enfin, encore plus près, l'Assemblée nationale, le 29 mai 1998, dans un moment d'intense émotion, tous les députés debout, a adopté à l'unanimité la proposition de loi reconnaissant officiellement le génocide des Arméniens. Nous nous souvenons encore des interventions éloquentes et émouvantes de MM.René Rouquet, Jean-Paul Bret, Roland Blum, Guy Hermier, Patrick Devedjian, Georges Sarre, Didier Migaud, François Rochebloine, Pierre Lellouche, Mme Martine David, MM. Jean-Pierre Foucher, Jean-Bernard Raimond, Christian Estrosi, Richard Cazenave, André Santini, Roger Meï, Daniel Marcovitch et Robert Pandraud.
Alors, pourquoi ne pourrions-nous pas, nous aussi, appeler un génocide un génocide ? Est-ce qualifier l'histoire que d'appeler les faits historiques par leur nom comme nous l'avons fait, le 5 octobre 1999, à l'unanimité, dans un moment de profonde émotion, tous les sénateurs debout, en reconnaissant officiellement la guerre d'Algérie ?
Pourquoi n'avons-nous pas pu débattre de la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale le 29 mai 1998 ? Pourquoi les textes qui ont été proposés, dans le cadre d'initiatives parlementaires - je pense tout particulièrement à celui de M. Robert Bret, signé par MM. Bernard Piras, Guy Fischer, Jean-François Picheral, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Jean-Noël Guérini, Mme Hélène Luc, MM. Marcel Debarge, Serge Lagauche et de nombreux autres sénateurs socialistes ou communistes - n'ont-ils jamais été inscrits à l'ordre du jour du Sénat, alors que nous avons le droit et le devoir de débattre sur un sujet aussi important ?
Pourquoi a-t-il fallu recourir à cette procédure de discussion immédiate que nous n'utilisons pratiquement jamais dans cette assemblée, une procédure qui ressemble à une procédure au rabais, alors qu'il s'agit des droits de l'homme, de crimes contre l'humanité et du premier génocide du xxe siècle ?
Pourquoi a-t-il fallu la détermination et l'insistance de M. Bernard Piras, vice-président du groupe France-Arménie, de M. Robert Bret et des signataires de cette motion de procédure pour que nous puissions seulement poser la question de la discussion de la reconnaissance du génocide des Arméniens ?
Faudra-t-il, si nous échouons ce soir, que nous reposions régulièrement la même question en utilisant la même procédure jusqu'à ce que le Sénat reconnaisse enfin la réalité du génocide des Arméniens ? Car, ainsi que l'a dit M. Patrick Devedjian, « la vérité est irrépressible ; un jour ou l'autre, elle aura droit de cité ».
Pourquoi tant d'obstacles ? Nous connaissons une partie de la réponse, nous ne pouvons y adhérer.
Ainsi, nous ne comprenons pas que les intérêts économiques puissent être supérieurs aux droits de l'homme. Nous sommes, bien sûr, sensibles aux liens commerciaux entre les pays, aux emplois qui en découlent pour notre industrie, mais nous ne pouvons pas imaginer qu'ils pourraient être remis en cause et, de toute façon, un pays comme la France ne peut pas céder à cette forme de chantage.
Nous ne comprenons pas davantage qu'il faille se taire pour ne pas entraver le processus de réconciliation dans les Etats du Caucase du Sud.
L'année dernière, il fallait attendre pour débattre, ce n'était pas le moment : il y avait le Kosovo et le problème des Balkans ! Mais la France, au sein de l'OTAN, frappait la Serbie pour une question d'éthique,...
M. Jacques Delong. Ce n'est pas ce qu'elle a fait de mieux !
M. Gilbert Chabroux. ... de droits de l'homme et de droit des peuples, et pour empêcher qu'il y ait un nouveau génocide !
Ne faut-il pas s'exprimer et se comporter d'une façon plus claire ? La reconnaissance du génocide est en fait un grand pas vers le dialogue. Et il faut que s'établisse un dialogue sincère et effectif entre les nouvelles générations arménienne et turque.
Il suffit de se rappeler ce qui s'est passé pour l'Allemagne, qui a reconnu la Shoah et qui est devenu un grand pays démocratique.
Dans la réponse qu'il vient d'adresser à Ara Krikorian, président du comité de défense de la cause arménienne, pour le remercier de lui avoir remis les actes du colloque sur l'actualité du génocide des Arméniens, le Premier ministre, Lionel Jospin, écrit : « Lorsque l'Assemblée nationale, le 29 mai 1998, en un vote unanime, avait déclaré : "La France reconnaît publiquement le génocide arménien de 1915", c'était là non un acte d'accusation, mais un geste de paix ».
M. Jean Delaneau. Il n'a pas osé l'inscrire à l'ordre du jour !
M. Gilbert Chabroux. C'est bien le même sens qu'il faut donner à notre vote, ce soir. Reconnaître le génocide, c'est s'attaquer aux vraies raisons de l'instabilité dans la région du Caucase.
Il faut privilégier le dialogue, à condition qu'il repose sur des bases claires. N'est-ce pas cette voie du dialogue et de la réconciliation entre les peuples qui a été choisie par le pape Jean-Paul II, le pape qui, voilà quelques jours, demandait pardon pour les erreurs et les violences commises par l'Eglise catholique au cours de ses deux mille ans d'existence ?
M. Jacques Delong. Il a eu tort !
M. Gilbert Chabroux. Jean Jaurès, au sujet du premier génocide des Arméniens perpétré entre 1894 et 1896, écrivait : « L'humanité ne peut plus vivre éternellement avec dans sa cave le cadavre d'un peuple assassiné ».
L'impunité des auteurs du premier génocide du xxe siècle laisse la porte ouverte à de nouveaux génocides. La reconnaissance du génocide des Arméniens a valeur de prévention. N'oublions pas la phrase, terrible, qu'avait prononcée Hitler, en 1939, avant d'envoyer ses généraux attaquer la Pologne : « Qui se souvient encore des Arméniens ? »
Robert Kotcharian, président de la République arménienne, demandait, le 30 mars 1998, la reconnaissance internationale du génocide en disant : « Il n'est pas la tragédie d'un seul peuple, mais celle de l'humanité tout entière ».
Un génocide est forcément universel et intemporel.
Puisse le Sénat, ce soir, après l'Assemblée nationale, se départir d'une attitude qui serait interprétée comme un déni explicite et raviverait, pour les descendants des victimes, une blessure incessamment renouvelée !
Sur une telle question, aussi lourde de sens et de responsabilité, chacun d'entre nous doit se prononcer et voter, en son âme et conscience. C'est, j'y insiste, pour chacun de nous un problème de conscience.
Mes chers collègues, puisse la Haute Assemblée, ce soir, reconnaître officiellement le génocide des Arméniens de 1915 ! (Vifs applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen. - Applaudissements sur certaines travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Vinçon, contre la demande de discussion immédiate.
M. Serge Vinçon. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 17 mars 1999, devant la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées de notre assemblée, M. Hubert Védrine a expliqué les raisons pour lesquelles le Gouvernement ne souhaitait pas l'inscription de ce texte à l'ordre du jour prioritaire du Sénat. Les termes de cette déclaration ont été repris depuis dans plusieurs réponses à des questions écrites de parlementaires. Nous regrettons fortement l'absence de M. Hubert Védrine, qui pourrait confirmer ce soir ses déclarations.
Comme l'a fait remarquer le ministre des affaires étrangères, cette proposition de loi pose des interrogations d'ordre constitutionnel, mais aussi philosophique.
D'une part, ce texte est anticonstitutionnel : il viole les articles 34 et 37 de la Constitution. L'article 34 énonce que la loi fixe des règles concernant différentes matières : elle est normative. L'article 37, quant à lui, stipule que : « Les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont un caractère réglementaire. » Or, il suffit de se reporter au texte de l'article 34 pour constater et enfin comprendre que la matière traitée par la proposition de loi votée le 29 mai dernier par l'Assemblée nationale est tout à fait étrangère aux dispositions de cet article.
D'autre part, le devoir de mémoire doit-il et peut-il prendre la forme d'une loi qui reconnaîtrait ce génocide ? Vous me permettrez de souligner que si ce génocide doit être reconnu, pourquoi les autres ne le seraient-ils pas ?
M. Bernard Piras. Bien sûr !
M. Serge Vinçon. Je pense en particulier à tous les génocides perpétrés au cours des siècles, notamment au xxe siècle.
M. Bernard Piras. Tout à fait d'accord !
M. Serge Vinçon. La mémoire doit-elle être sélective ?
En effet, comme l'a souligné M. Hubert Védrine, au nom du Gouvernement : « Appartient-il à une assemblée parlementaire de qualifier des faits historiques survenus, il y a plus de quatre-vingts ans, dans un autre pays ? Est-ce à la loi de proclamer "la vérité" sur cette tragédie historique ? » Beaucoup répondent que c'est le rôle naturel dévolu aux historiens.
M. Hubert Védrine, au nom du Gouvernement, a également rappelé les fondements de la politique étrangère de la France dans cette région, doutant que le vote de cette loi puisse servir notre diplomatie et notre politique extérieure : « La France est en effet engagée dans un effort important de médiation, aux côtés des Etats-Unis et de la Russie, dans le cadre du groupe de Minsk, en vue d'un règlement pacifique du conflit du Haut-Karabakh et, plus largement, pour qu'une solution pacifique et durable soit apportée aux conflits qui ont ensanglanté cette région du Caucase. Ce conflit paraît au Gouvernement français être l'un de ceux dont la résolution revêt un degré de haute priorité et son règlement permettrait notamment de remédier à la situation d'enclavement dont souffre l'Arménie. »
Le ministre des affaires étrangères, au nom du Gouvernement, a enfin exprimé sa crainte que le vote d'une telle loi « ne serve, avant tout, ceux que tentent le repli sur soi, le nationalisme autoritaire et la répudiation des valeurs de progrès et d'ouverture » et que la France « ne perde son image d'impartialité, de compréhension et d'ouverture, jusqu'ici reconnue par toutes les parties ».
Tout en confirmant et en partageant les sentiments de nos compatriotes d'origine arménienne devant la tragédie vécue par leurs parents ou leurs grands-parents,...
M. Emmanuel Hamel. Nous la reconnaissons !
M. Serge Vinçon. ... et la barbarie qui a marqué l'histoire de leur pays de manière indélébile, nous ne pouvons que faire nôtres les considérations exposées par M. le ministre des affaires étrangères.
M. Bernard Piras. On peut se tromper !
M. Serge Vinçon. En outre, nous avons beaucoup trop d'estime pour la communauté arménienne...
Mme Hélène Luc. Alors il faut voter la demande de discussion immédiate de la proposition de la loi !
M. Serge Vinçon. ... pour nous livrer à des méthodes qui relèvent de l'électoralisme. (Vives protestations sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Bernard Piras. Les Arméniens vous entendent !
M. Guy Fischer. Vous rabaissez le débat !
M. Bernard Piras. C'est un scandale !
M. le président. Mes chers collègues, veuillez laisser M. Serge Vinçon s'exprimer. Dans ce débat, nous devons tous garder notre sang-froid et notre dignité.
M. Serge Vinçon. De plus, nous ne pouvons qu'être étonnés du manque de solidarité des groupes socialiste et communiste à l'égard du Gouvernement. (Exclamations sur les mêmes travées.)
M. Jean-Pierre Plancade. Nous sommes des hommes libres !
Mme Gisèle Printz. Et des femmes libres !
M. Serge Vinçon. En effet, comment le Gouvernement peut-il expliquer autant de contradictions entre son discours et celui des élus qui sont censés le soutenir ?
M. Bernard Piras. Nous sommes des hommes libres !
Un sénateur socialiste. Ce n'est pas vos affaires !
M. Serge Vinçon. En n'inscrivant pas la proposition de loi à l'ordre du jour du Sénat, nous entendons manifester le voeu que l'établissement d'une paix durable dans le Caucase, à laquelle la France travaille ardemment, puisse éviter la répétition des drames qui ont ensanglanté cette région et que les promesses de l'avenir atténuent les douleurs du passé.
Nous n'avons jamais eu dans l'idée de nier les drames et les souffrances du peuple arménien et nous comprenons que nos concitoyens d'origine arménienne en conservent la mémoire. Mais il ne nous appartient pas d'utiliser la loi pour qualifier des faits qui relèvent de l'histoire.
M. le ministre des affaires étrangères ne cesse de répéter que le Gouvernement ne souhaite pas l'inscription à l'ordre du jour de ce texte. Pourquoi ses amis ne le suivent-ils pas ? Quelles sont leurs arrière-pensées ?
M. Michel Pelchat. Bravo !
M. Serge Vinçon. Quant à nous, parce que nous avons le souci de la concorde entre les peuples et parce que nous avons confiance dans leur volonté de construire un monde de paix et de tolérance en surmontant les antagonismes et les anciennes querelles, nous nous opposons à l'inscription de la proposition de loi à l'ordre du jour réservé du Sénat. (Applaudissements sur certaines travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Bernard Piras. Bien timides, les applaudissements !
Mme Hélène Luc. Vous n'avez pas beaucoup d'applaudissements !
M. Bernard Piras. Ils ne sont pas chaleureux !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires étrangères.
M. Xavier de Villepin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, un certain nombre de nos collègues viennent de déposer, à l'ordre du jour de notre assemblée, une demande d'inscription immédiate d'une proposition de loi relative au génocide arménien intervenu en 1915 dans l'ancien Empire ottoman. Je parlerai avec respect pour tous nos collègues, quelle que soit leur opinion.
Comme le règlement du Sénat m'y invite, je n'aborderai pas ce dossier complexe au fond. J'inscrirai cette brève intervention dans la suite logique de la décision récemment prise par la conférence des présidents de notre Haute Assemblée.
Pour ma part, en tant que président de notre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, j'ai toujours exprimé les réserves que suscite, à mon sens, l'éventuelle inscription d'une telle proposition de loi à l'ordre du jour des travaux du Sénat, pour deux raisons. En premier lieu, un tel débat mettrait nécessairement en lumière les réels problèmes juridiques, et notamment constitutionnels, posés par un texte qui conduirait la loi à qualifier des faits historiques. En second lieu, il provoquerait, tout aussi inévitablement, des difficultés d'ordre diplomatique, alors que la France...
M. Marcel Charmant. Pays des droits de l'Homme !
M. Xavier de Villepin, président de la commission des affaires étrangères. ... et le président du Sénat, récemment encore, s'efforcent de favoriser un dialogue de nature à restaurer la stabilité dans la région tourmentée du Caucase du Sud en oeuvrant pour la réconciliation entre les peuples et les Etats qui la composent.
La conférence des présidents, lorsque le sujet a été évoqué devant elle, a d'ailleurs elle-même, à plusieurs reprises, et encore tout récemment pour les mêmes motifs, écarté l'inscription de ce texte du calendrier de nos travaux.
Je précise que si, en effet, notre commission n'a pas, formellement, procédé à l'examen de la proposition de loi, celle-ci n'en a pas moins été évoquée à plusieurs reprises, au cours de nos réunions, et donné lieu, à chaque fois, au regard de ces incidences juridiques et diplomatiques, à des échanges de vues approfondis ainsi qu'à deux auditions de M. le ministre des affaires étrangères.
Nous avons ainsi examiné, de façon très précise, les tenants et les aboutissants de ce dossier important, notamment quant à la procédure législative choisie.
J'ajoute surtout que la déclaration solennelle et courageuse, mais également clairement défavorable au vote de cette loi, faite le 17 mars 1999 par le ministre des affaires étrangères devant notre commission, au nom du Gouvernement et en accord avec le Président de la République, doit nous inciter, mes chers collègues, à examiner cette demande d'inscription immédiate avec toute la gravité et la responsabilité nécessaires.
D'ailleurs, si cette proposition de loi a été renvoyée, pour examen au fond, à notre commission des affaires étrangères, c'est bien qu'elle comporte, si les choses ont un sens, des incidences diplomatiques fortes. Or, à ce propos, il importe de rappeler que la conduite de notre diplomatie et la gestion de nos relations internationales relèvent prioritairement, aux termes de notre Constitution et conformément à notre tradition institutionnelle, des prérogatives présidentielles et gouvernementales.
Dans cette logique, j'avais estimé, avec beaucoup d'autres, que c'était au Gouvernement qu'il revenait de demander l'inscription de la proposition de loi à l'ordre du jour prioritaire du Sénat. Pour les raisons qu'il a précisées à plusieurs reprises devant la commission du Sénat et qui ont été portées à la connaissance de la conférence des présidents, le Gouvernement a indiqué qu'il ne formulerait pas cette demande d'inscription. C'est à mon sens une raison institutionnelle supplémentaire qui doit guider notre réflexion dans le débat d'aujourd'hui.
C'est pour ces raisons, là encore sans préjuger en quelque manière du « fond » du texte qui nous est proposé, en toute logique avec la décision de la conférence des présidents et, monsieur le ministre, prenant en compte la position du Gouvernement, que je vous invite à ne pas inscrire à l'ordre du jour de nos débats cette proposition de loi sur le génocide arménien et, en conséquence, à rejeter la demande de discussion immédiate qui nous est proposée. (Applaudissements sur certaines travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la barbarie programmée dont a été victime en 1915 la communauté arménienne de l'ancien Empire ottoman a marqué l'histoire, notre histoire, de manière indélébile.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. Pierre Moscovici, ministre délégué. Elle fait partie de la mémoire collective des descendants des victimes que notre pays, fidèle à sa tradition d'asile, s'honore d'avoir accueillis. Cette souffrance, cette mémoire blessée, méritent tout notre respect et surtout, au-delà, notre souvenir.
Le gouvernement français comme la représentation nationale doivent veiller à perpétuer ce souvenir et à témoigner de la solidarité de la République à l'égard des Françaises et des Français d'origine arménienne.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. Pierre Moscovici, ministre délégué. Le 28 mai 1998, l'Assemblée nationale a adopté une proposition de loi rédigée sous forme d'un article unique et disposant : « La France reconnaît publiquement le génocide arménien de 1915. »
Le Gouvernement en a pris acte. Vous connaissez sa position sur ce texte. Elle a été, en particulier, exposée par M. Hubert Védrine devant la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées de votre assemblée, le 17 mars de l'année dernière, comme vient de le rappeler M. le président de la commission. C'est moi, ce soir, qui interviens devant vous, au nom de tout le Gouvernement. Cette position - je le rappelle à M. Serge Vinçon - est partagée par l'ensemble des autorités françaises. Elle n'a pas changé. Je vais vous en rappeler les grandes lignes.
Le devoir de mémoire est un devoir sacré. Les plus hautes autorités de l'Etat ont eu, à maintes reprises, l'occasion de démontrer qu'elles y étaient très attachées. J'ai eu moi-même, plus modestement, l'occasion de manifester ma sensibilité sur la question qui nous occupe ce soir.
Le Gouvernement comprend donc les motivations de l'Assemblée nationale et des députés qui sont à l'origine de ce texte, comme, bien sûr, celles des sénateurs qui ont souhaité ce débat. Il a lui-même rendu hommage aux victimes de ces événements avec force et émotion.
La Turquie moderne ne saurait toutefois être tenue pour responsable des faits survenus dans les convulsions de la fin de l'Empire ottoman. Il lui appartient cependant de faire face à ce passé et d'en assumer les zones d'ombre et les épisodes douloureux. C'est une tâche difficile et pénible - nous le savons d'expérience pour notre propre histoire - qui requiert du courage et du temps.
Toutefois, je le dis avec clarté, le gouvernement français ne considère pas qu'il appartient à notre pays de se substituer à la Turquie dans la gestion de son histoire.
Toutes les nations - je le répète, la France en a vécu l'expérience - sont confrontées à des événements tragiques et douloureux, à des « trous noirs » qu'il est bien difficile d'accepter sans honte.
J'ai écouté avec attention le beau discours de Gilbert Chabroux et je veux lui dire, à lui et à tous mes amis, que je suis en profonde sympathie avec sa sensibilité et avec nombre de ses arguments.
Mais M. Chabroux a aussi posé avec beaucoup d'honnêteté la question que nous devons nous poser ce soir en termes très objectifs : appartient-il à la loi de qualifier des événements historiques survenus dans un pays étranger ?
Revient-il au pouvoir législatif de se faire juge, lui-même, en proclamant la vérité sur la tragédie historique que constituent les atrocités survenues il y a plus de quatre-vingts ans ?
Pour ma part, et c'est la position du Gouvernement, je n'en suis pas sûr.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite maintenant rappeler la position des autorités françaises au regard de la situation politique dans le Sud Caucase, afin que vous disposiez de tous les éléments indispensables à l'exercice de votre responsabilité, de notre responsabilité commune qui, sur ce sujet, est grande.
Le contexte régional est complexe, vous le connaissez. L'objectif de la politique étrangère de notre pays est la paix dans cette région. Cela implique de comprendre les tragédies du passé afin d'éviter qu'elles ne se reproduisent. Mais il faut aussi rechercher les compromis, contribuer à éradiquer les sources de tensions et de conflits, faire progresser la coopération entre des nations jadis antagonistes : tels sont les buts que nous poursuivons inlassablement, de la Méditerranée à la Caspienne, et partout ailleurs dans le monde. Ils impliquent - Gilbert Chabroux l'a rappelé - la capacité de discuter avec tous et, surtout, la volonté de se projeter vers l'avenir.
C'est, je crois, l'autre question que vous devez vous poser : cette loi renforcerait-elle notre influence sur des évolutions régionales cruciales pour la stabilité de toute la Méditerranée orientale ? Nous permettrait-elle de peser positivement sur le processus de paix en cours dans le Caucase, notamment dans la médiation entreprise sur le Haut-Karabakh, dans le cadre de l'OSCE ? Le Gouvernement n'en est pas convaincu ; il pense que cette loi aurait sans doute un effet plus mitigé, tant les problèmes sont complexes et imbriqués.
Je veux dire enfin à la Haute Assemblée que des évolutions importantes se dessinent en Turquie. Ce pays a entrepris de se rapprocher de la Grèce, grâce à une évolution profonde, que la France a encouragée, des deux gouvernements. La situation des droits de l'homme en Turquie reste - c'est vrai - très préoccupante, mais des réformes sont en cours, qui peuvent, qui doivent déboucher sur une amélioration.
La Turquie est à présent candidate à l'Union européenne. On peut certes discuter de la décision qui a été prise à Helsinki.
M. Bernard Piras. Elle est en effet discutable !
M. Pierre Moscovici, ministre délégué. Je rappelle toutefois que la France y a clairement souscrit.
Soyons conscients du fait que la décision prise par les chefs d'Etat et de Gouvernement constitue un levier considérable pour que ce pays, la Turquie, engage enfin tous les moyens nécessaires à la consolidation de la démocratie et du respect des droits de l'homme. C'est indispensable et, dans notre esprit, la candidature de la Turquie marque bien une conditionnalité forte pour le développement des relations euro-turques. Mais des avancées ne pourront se faire que si nous préservons aussi bilatéralement avec la Turquie un partenariat stratégique, élément essentiel dans l'effort de stabilisation de la région.
Soyons parfaitement conscients, enfin, du fait que la démocratisation ne compte pas que des partisans en Turquie ; je parle de la Turquie d'aujourd'hui. La cause de l'Europe n'est pas encore assurée de l'emporter en Turquie, loin s'en faut ! Des oppositions puissantes persistent. Notre action doit contribuer à renforcer tous ceux qui sont attachés à l'ancrage de ce pays à l'Europe, mais aussi à la recherche de la stabilité, par l'apaisement de toutes les tensions régionales. Nul ne doit donner des arguments aux partisans du nationalisme, aux tenants d'une « voie particulière » pour la Turquie, une voie qui ouvrirait la porte à des dérives dangereuses.
En disant cela, en rappelant les fondements de la position des autorités françaises, c'est d'abord, bien sûr, vers le peuple arménien, vers les descendants de ceux qui, il y a quatre-vingt-cinq ans, subirent une barbarie criminelle, que se portent mes pensées et celles du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste.)
M. le président. Je mets aux voix la demande de discussion immédiate, acceptée par la commission.
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant l'une, du groupe du RPR et l'autre, du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions prévues par l'article 52 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 44:

Nombre de votants 306
Nombre de suffrages exprimés 302
Majorité absolue des suffrages 152
Pour l'adoption 130
Contre 172

La discussion immédiate n'est pas ordonnée. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
Mme Hélène Luc et M. Guy Fischer. C'est scandaleux !

12

DÉPÔT DE QUESTIONS ORALES AVEC DÉBAT

M. le président. J'informe le Sénat que j'ai été saisi de la question orale avec débat suivante :
M. Jean Arthuis attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie sur le problème du stockage des déchets radioactifs.
La mission collégiale de concertation « Granite » s'est rendue le 13 mars en Mayenne. Cette mission est chargée de rencontrer les élus, les associations et la population des quinze massifs granitiques retenus en France pour l'étude du projet d'implantation d'un laboratoire de qualification géologique en vue de la gestion des déchets radioactifs à haute activité et à durée de vie longue. Elle s'est heurtée à une forte hostilité. En effet, ce projet, qui concerne en Mayenne le massif d'Izé, suscite, et à juste titre, une vive émotion, de nombreuses inquiétudes et interrogations. Cela tient sans doute à l'incompréhension, née de l'absence d'informations claires et cohérentes.
Il doit d'abord être observé que l'annonce de la liste des sites susceptibles d'accueillir le laboratoire est venue non pas par la voie instituée par le Gouvernement mais par un collectif dénommé « Réseau sortir du nucléaire », opposé au principe de l'enfouissement des déchets.
S'agissant de la production de déchets radioactifs à longue durée de vie, les déclarations les plus contradictoires sont prononcées, en effet, au sein du Gouvernement. Ainsi, M. le ministre de l'éducation nationale affirmait le 30 juin 1997 que, le stockage en profondeur des déchets nucléaires étant dangereux pour les générations futures, mieux valait les stocker en surface ou en subsurface. De son côté, l'Agence nationale pour la gestion de déchets radioactifs (ANDRA) indiquait récemment que « certains déchets à vie longue restent actifs pendant plusieurs dizaines, voire centaines de milliers d'années, et que, sur une période aussi longue, la sécurité de leur stockage ne peut reposer sur la pérennité de barrières ouvragées en surface ». Par ailleurs, un très récent rapport parlementaire publié le jeudi 9 mars 2000 par Mme Michèle Rivasi, député de la Drôme, met clairement en évidence le manque total de cohérence de la gestion des déchets radioactifs en France et réclame qu'un plan national soit élaboré à ce sujet. Enfin, le Parlement est toujours dans l'attente d'un futur projet de loi sur la transparence nucléaire promis par le Gouvernement.
Les ambiguïtés de la démarche gouvernementale contribuent à entretenir l'inquiétude, tant des élus que de la population des régions concernées, et à alimenter le rejet de l'accueil éventuel d'un laboratoire de recherche en vue du stockage de déchets hautement radioactifs. Tant d'incohérence ruine l'autorité des membres de la mission collégiale de concertation « Granite ».
Il lui demande donc de lui préciser quels sont les risques réels pour l'environnement du stockage en surface ou en subsurface, et quelle est la politique de l'Etat en matière de déchets nucléaires.
Conformément aux articles 79, 80 du règlement, cette question orale avec débat a été communiquée au Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu ultérieurement.
J'informe le Sénat que j'ai été saisi de la question orale avec débat suivante :
M. Jean-Pierre Fourcade demande à M. le Premier ministre de préciser les orientations qu'il vient d'annoncer sur les perspectives des régimes de retraite dans les prochaines années. Il l'interroge sur les modalités techniques et financières du rapprochement entre les régimes de base et les régimes spéciaux, et sur la juxtaposition des mécanismes de répartition avec ceux de l'épargne salariale (n° 22).
Conformément aux articles 79, 80 du règlement, cette question orale avec débat a été communiquée au Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu ultérieurement.

13

TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI

M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la solidarité et au renouvellement urbains.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 279, distribué et renvoyé à la commission des affaires économiques et du Plan, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

14

DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI

M. le président. J'ai reçu de Mme Dinah Derycke, M. Robert Badinter et des membres du groupe socialiste et apparentés une proposition de loi tendant à sanctionner les propos à caractère discriminatoire.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 274, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de MM. Jean-Claude Gaudin, Michel Mercier, Emmanuel Hamel, Serge Mathieu, Francis Giraud et André Vallet une proposition de loi tendant à permettre aux conseillers d'arrondissement de siéger au conseil d'une communauté urbaine.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 277, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de MM. Jean-Claude Gaudin, André Vallet et Francis Giraud une proposition de loi relative à la révision du plan d'occupation des sols d'une commune membre d'une communauté urbaine.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 278, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

15

TEXTES SOUMIS EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- réforme de la Commission, Livre blanc : partie I (volume I) ; partie II, plan d'action (volume II).
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1424 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition de règlement du Conseil suspendant, pour une période de six mois, le règlement (CE) n° 2151/1999 du Conseil concernant l'interdiction des vols entre les territoires de la Communauté et la République fédérale de Yougoslavie à l'exception de la République du Monténégro et de la province du Kosovo, et modifiant les règlements (CE) n° 1294/1999 et n° 2111/1999 du Conseil en ce qui concerne les paiements et les fournitures effectués en relation avec les vols durant la période de suspension.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1425 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1294/1999 du Conseil relatif à un gel des capitaux et à une interdiction des investissements en relation avec la République fédérale de Yougoslavie (RFY) [et abrogeant les règlements (CE) n° 1295/98 et (CE) n° 1607/98].
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1426 et distribué.

16

RENVOI POUR AVIS

M. le président. J'informe le Sénat que le projet de loi (n° 279, 1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la solidarité et au renouvellement urbains, dont la commission des affaires économiques et du plan est saisie au fond est renvoyé pour avis, à leur demande et sur décision de la conférence des présidents, à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale et à la commission des affaires sociales.

17

DÉPÔT DE RAPPORTS

M. le président. J'ai reçu de M. José Balarello, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi modifiant le code pénal et le code de procédure pénale et relatif à la lutte contre la corruption.
Le rapport sera imprimé sous le n° 275 et distribué.
J'ai reçu de M. Jacques Legendre un rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles sur :
- le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'archéologie préventive (n° 239, 1999-2000) ;
- la proposition de loi de MM. Ivan Renar, Jack Ralite, Mmes Hélène Luc, Marie-Claude Beaudeau, M. Jean-Luc Bécart, Mmes Danielle Bidard-Reydet, Nicole Borvo, MM. Robert Bret, Michel Duffour, Guy Fischer, Thierry Foucaud, Gérard Le Cam, Pierre Lefebvre, Paul Loridant et Mme Odette Terrade relative à l'organisation de l'archéologie (n° 374, 1998-1999).
Le rapport sera imprimé sous le n° 276 et distribué.

18

DÉPÔT DE RAPPORTS D'INFORMATION

M. le président. J'ai reçu un rapport déposé par M. Henri Revol, président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, sur les conséquences des installations de stockage des décrets nucléaires sur la santé publique et l'environnement, établi par Mme Michèle Rivasi, députée, au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.
Le rapport sera imprimé sous le n° 272 et distribué.
J'ai reçu un rapport déposé par M. Henri Revol, président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, sur les conditions d'implantation d'un nouveau synchrotron et le rôle des très grands équipements dans la recherche publique ou privée, en France et en Europe, tome I : les conditions d'implantation d'un nouveau synchroton, établi par M. Christian Cuvilliez, député, et M. René Trégouët, sénateur, au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.
Le rapport sera imprimé sous le n° 273 et distribué.

19

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 22 mars 2000, à dix-huit heures :
1. Nomination d'un membre de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, en remplacement de M. René Trégouët, démissionnaire.
2. Discussion du projet de loi (n° 229, 1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention portant statut de la Cour pénale internationale.
Rapport (n° 259, 1999-2000) de M. André Dulait, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

Délais limites pour les inscriptions
de parole et pour le dépôt des amendements

Projet de loi relatif à l'organisation de la consultation de la population de Mayotte (n° 237, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 22 mars 2000, à dix-sept heures.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité (n° 234, 1998-1999).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 22 mars 2000, à dix-sept heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'archéologie préventive (n° 239, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 27 mars 2000, à dix-sept heures.
Projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes (n° 222, 1999-2000).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 28 mars 2000, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 28 mars 2000, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à vingt et une heures dix.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





DÉCÈS D'UN SÉNATEUR

M. le président du Sénat a le regret de porter à la connaissance de Mmes et MM. les sénateurs qu'il a été avisé du décès de M. Jean-Jacques Robert, sénateur de l'Essonne, survenu le 18 mars 2000.

REMPLACEMENT D'UN SÉNATEUR

Conformément à l'article LO 179 du code électoral, M. le ministre de l'intérieur a fait connaître à M. le président du Sénat qu'en application de l'article LO 320 du code électoral M. Max Marest est appelé à remplacer en qualité de sénateur de l'Essonne, à compter du 19 mars 2000, M. Jean-Jacques Robert, décédé le 18 mars 2000.

MODIFICATIONS AUX LISTES
DES MEMBRES DES GROUPES
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE
(85 au lieu de 86)

Supprimer le nom de M. Jean-Jacques Robert.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE
(8 au lieu de 7)

Ajouter le nom de M. Max Marest.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Devenir de la Maison des métallurgistes

761. - 17 mars 2000. - Mme Nicole Borvo attire l'attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur le devenir de la Maison des métallurgistes (Paris 11e). Ce lieu avec son architecture si particulière, son portail d'entrée, sa cour intérieure, sa structure métallique résonne de toutes les luttes ouvrières qui, depuis 1936, date de l'achat du bâtiment, ont marqué l'histoire de Paris et de notre pays. Il est évident que sa destruction ne manquerait pas d'avoir des conséquences sur tout le quartier. Il serait au contraire souhaitable que la mairie de Paris s'engage à acquérir la Maison des métallurgistes et que dans le contrat de ville signé avec l'Etat, les crédits nécessaires aux travaux de remise en état, en vue d'y installer un équipement de proximité, soient débloqués. Car il est essentiel que ce bâtiment soit sauvé et trouve sa vocation et qu'à cette fin un projet partenarial dynamique se mette en place. Quelles sont les mesures qu'elle compte prendre pour atteindre de tels objectifs ? Ne faudrait-il pas classer ce bâtiment pour éviter sa destruction et favoriser sa renaissance ?

Projet de création d'une communauté d'agglomération
à Sophia-Antipolis

762. - 17 mars 2000. - M. Charles Ginésy attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le projet de création d'une communauté d'agglomération englobant le parc d'activités de haute technologie de Sophia-Antipolis, et ses conséquences sur le devenir d'un syndicat mixte préexistant, qui assure le développement et l'aménagement de cette zone depuis sa création en 1968. En effet, il est envisagé la création d'une communauté d'agglomération dont le périmètre engloberait la quasi-totalité de celui d'un syndicat mixte associant le département, la chambre de commerce et d'industrie et les communes, dont l'objet concerne la gestion de cette zone d'activités tertiaires de haut niveau. Il résulte des dispositions combinées du paragraphe II de l'article L. 5216-7 du code général des collectivités territoriales et du chapitre IV de l'article L. 5216-5, qu'un syndicat mixte préexistant verrait les communes qui le constituent en être exclues dès la publication de l'arrêté portant création de la communauté d'agglomération, pour les compétences obligatoires et optionnelles, sans bien même que le comité syndical n'ait à se prononcer. Dès lors, le syndicat perdrait l'objet pour lequel il a été constitué ainsi que ses partenaires, et serait de fait dissous. Pour maintenir le partenariat actuel entre les communes et le département, il faudrait que la communauté d'agglomération puisse déléguer les compétences obligatoires et optionnelles à une autre structure de coopération mixte, ce qui semble exclu par la loi. En effet, pour une commune, cela reviendrait à déléguer deux fois des compétences à des structures intercommunales successives. Tout ceci paraît impossible en droit et difficilement justifiable en opportunité. Il lui demande de lui confirmer son interprétation et dans le cas contraire de lui indiquer les dispositions qui permettraient aux partenaires actuels de maintenir la structure existante, tant au niveau de son périmètre que de son objet.

Situation scolaire dans le département de l'Aude

763. - 20 mars 2000. - M. Roland Courteau appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie sur la situation scolaire dans le département de l'Aude. Il lui indique qu'il est amené régulièrement à s'entretenir avec des élus, des représentants du corps enseignant et non enseignant, et des parents d'élèves, sur le manque de postes d'enseignants, de personnels administratifs, techniciens, ouvriers et de service (ATOS), de personnels d'encadrement et de personnels du secteur médico-social. C'est ainsi qu'il est souhaité qu'il soit mis fin, dans les meilleurs délais, par l'octroi de moyens conséquents, à des situations pour le moins anormales, telles que : les classes surchargées lorsque les professeurs absents ne sont pas remplacés ; les cours de sciences, de technologie ou de langue dispensés en classe entière et non en groupes de seize à dix-sept élèves ; les horaires réduits à minima dans l'enseignement artistique ; l'impossibilité d'offrir aux élèves en difficulté un soutien scolaire et psychologique suffisant ; les difficultés, pour les agents de service, en nombre insuffisant et souvent non remplacés, pour assurer les travaux d'entretien et d'hygiène. Il est à noter, en outre, que la situation du secteur médico-social est également préoccupante dans le département de l'Aude (manque de médecins scolaires, d'infirmiers, d'assistantes sociales...). Les dysfonctionnements sont difficilement compris, car ils remettent en cause la qualité de l'enseignement et de l'accueil des enfants qui est une condition de réussite pour tous les élèves. C'est pourquoi, il lui demande quelles sont les dispositions qu'il entend mettre en oeuvre, pour répondre aux attentes des élèves, des familles et des personnels de l'éducation nationale, pour améliorer le système scolaire et apporter des solutions adaptées aux problèmes actuels.

Situation de l'hôpital de Montfermeil-Le Raincy

764. - 21 mars 2000. - M. Christian Demuynck souhaite attirer l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur la situation actuelle de l'hôpital intercommunal de Montfermeil-Le Raincy. Cet établissement suractif, qui sert dix communes et 270 000 habitants, dispose des équipements les plus modernes et d'un personnel soignant performant et dévoué. Bien qu'il constitue un élément fondamental de la santé publique dans l'est parisien, cet hôpital risque de voir certains de ses services fermer à brève échéance et ce en raison d'une aberrante logique comptable qui prévaut depuis quelques années. Cette situation ne peut que s'aggraver et créer une intolérable inégalité des citoyens devant la santé, si le Gouvernement n'utilise pas, en faveur de cet établissement, les récentes marges de manoeuvres budgétaires. Il entend connaître et, avec lui, l'ensemble des Séquano-Dyonisiens, quelles mesures le Gouvernement envisage d'engager à court, moyen et long terme, en vue d'assurer le fonctionnement pérenne de cet hôpital indispensable.

Conditions de travail des agents
de la fonction publique territoriale

765. - 21 mars 2000. - M. Gérard Cornu appelle l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation sur le cas d'un agent titulaire à temps complet employé par le service des eaux d'une petite commune rurale. Entrepreneur de travaux agricoles par ailleurs, il effectue en cette qualité des réparations sur le réseau d'eau. Or, il semblerait que cette situation ne soit pas acceptable au regard de la loi et qu'en vertu de l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 posant le principe selon lequel « les fonctionnaires consacrent l'intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées », la commune soit dans l'obligation de la régulariser. Cet agent n'effectuant que huit heures hebdomadaires ne pourrait raisonnablement vivre de ce seul emploi et la conjugaison de ses deux activités au sein du réseau d'eau communal est gage d'efficacité et de réduction des coûts pour la commune. N'y aurait-il pas lieu pour les cas de cette espèce de prévoir un assouplissement de la règle en vigueur instaurant un seuil de tolérance dès lors que l'activité à temps partiel confiée à l'agent ne suffirait pas à assurer sa subsistance ?



ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mardi 21 mars 2000


SCRUTIN (n° 42)



sur l'ensemble du projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

Nombre de votants : 272
Nombre de suffrages exprimés : 172
Pour : 172
Contre : 0

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (17) :
Abstentions : 17.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :

Pour : 17.
Abstentions : 5. - MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin et Gérard Delfau.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. Paul Girod, qui présidait la séance.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (98) :

Pour : 96.
Abstention : 1. - M. Emmanuel Hamel.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. Christian Poncelet, président du Sénat.

GROUPE SOCIALISTE (77) :

Abstentions : 77.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (52) :

Pour : 52.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (46) :

N'ont pas pris part au vote : 46.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (8) :
Pour : 7.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. Max Marest.

Ont voté pour


Philippe Adnot
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
René Ballayer
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Didier Borotra
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Guy-Pierre Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Donnay
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
Michel Esneu
Pierre Fauchon
Jean Faure
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Georges Gruillot
Hubert Haenel
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Pierre Jeambrun
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Roger Karoutchi
Christian de La Malène
Pierre Laffitte
Alain Lambert
Lucien Lanier
Gérard Larcher
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Marcel Lesbros
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Lylian Payet
Jacques Pelletier
Jacques Peyrat
Jean-Marie Poirier
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
René Trégouët
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac

Abstentions


François Abadie
Guy Allouche
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Yvon Collin
Gérard Collomb
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Emmanuel Hamel
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Jean-Luc Mélenchon
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

N'ont pas pris part au vote


Nicolas About
José Balarello
Janine Bardou
Christian Bonnet
James Bordas
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Jean-Claude Carle
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean Delaneau
Jacques Dominati
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
André Ferrand
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Louis Grillot
Anne Heinis
Jean-François Humbert
Charles Jolibois
Jean-Philippe Lachenaud
Jacques Larché
Roland du Luart
Max Marest
Serge Mathieu
Philippe Nachbar
Michel Pelchat
Jean Pépin
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Charles Revet
Henri Revol
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Henri Torre
François Trucy

N'ont pas pris part au vote


MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Paul Girod, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes à la liste de scrutin ci-dessus.

SCRUTIN (n° 43)



sur l'amendement n° 1, présenté par M. Ladislas Poniatowski, à l'article 3 du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France et aux relations de cette société avec l'Etat, et portant modification du code de l'aviation civile (augmentation du nombre de sièges au conseil d'administration).

Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages exprimés : 317
Pour : 217
Contre : 100

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (17) :
Contre : 17.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :

Pour : 17.
Contre : 5. - MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin et Gérard Delfau.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. Paul Girod, qui présidait la séance.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (98) :

Pour : 95.
Contre : 1. - M. Emmanuel Hamel.
Abstention : 1. - M. Alain Gérard.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. Christian Poncelet, président du Sénat.

GROUPE SOCIALISTE (77) :

Contre : 77.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (52) :

Pour : 52.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (46) :

Pour : 46.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (8) :

Pour : 7.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. Max Marest.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
José Balarello
René Ballayer
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Guy-Pierre Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Jacques Donnay
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Hubert Haenel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Roger Karoutchi
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Marcel Lesbros
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac

Ont voté contre


François Abadie
Guy Allouche
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Yvon Collin
Gérard Collomb
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Emmanuel Hamel
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Jean-Luc Mélenchon
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

Abstention


M. Alain Gérard.

N'a pas pris part au vote


M. Max Marest.

N'ont pas pris part au vote


MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Paul Girod, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 319
Nombre de suffrages exprimés : 318
Majorité absolue des suffrages exprimés : 160
Pour l'adoption : 218
Contre : 100

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.

SCRUTIN (n° 44)



sur la demande de discussion immédiate de la proposition de loi relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915.

Nombre de votants : 305
Nombre de suffrages exprimés : 301
Pour : 130
Contre : 171

Le Sénat n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (17) :
Pour : 17.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :

Pour : 10.
Contre : 8. - MM. Fernand Demilly, Pierre Jeambrun, Bernard Joly, Aymeri de Montesquiou, Georges Mouly, Georges Othily, Jean-Marie Rausch et Raymond Soucaret.
N'ont pas pris part au vote : 5. - MM. Paul Girod, qui présidait la séance, Georges Berchet, Jacques Bimbenet, Jean François-Poncet et Pierre Laffitte.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (98) :

Pour : 3. - MM. Charles Descours, Lucien Neuwirth et Jacques Oudin.
Contre : 90.
Abstentions : 3. - MM. Bernard Fournier, Roger Karoutchi et Mme Nelly Olin.
N'ont pas pris part au vote : 2. - M. Christian Poncelet, président du Sénat, et Emmanuel Hamel.

GROUPE SOCIALISTE (77) :

Pour : 77.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (52) :

Pour : 7. - MM. Jean-Paul Amoudry, Philippe Arnaud, Denis Badré, Pierre Jarlier, Marcel Lesbros, Michel Mercier et René Monory.
Contre : 38.
Abstention : 1. - M. Louis Mercier.
N'ont pas pris part au vote : 6. - MM. Bernard Barraux, Didier Borotra, Gérard Deriot, André Diligent, Yves Fréville et Rémi Herment.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (46) :

Pour : 16. - MM. José Balarello, Jean-Claude Carle, Marcel-Pierre Cleach, Jean Clouet, Jacques Dominati, Jean-Paul Emin, Hubert Falco, Jean-Claude Gaudin, Charles Jolibois, Jean-Philippe Lachenaud, Roland du Luart, Serge Mathieu, Jean Pépin, Xavier Pintat, Louis-Ferdinand de Rocca Serra et François Trucy.

Contre : 28.
N'ont pas pris part au vote : 2. - MM. Joël Bourdin et Ladislas Poniatowski.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (8) :

Contre : 7.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. Max Marest.

Ont voté pour


François Abadie
Guy Allouche
Jean-Paul Amoudry
Bernard Angels
Philippe Arnaud
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Denis Badré
José Balarello
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Guy-Pierre Cabanel
Jean-Claude Carle
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Yvon Collin
Gérard Collomb
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Charles Descours
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Claude Domeizel
Jacques Dominati
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Jean-Paul Emin
Claude Estier
Hubert Falco
Léon Fatous
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Jean-Pierre Fourcade
Jean-Claude Gaudin
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Pierre Jarlier
Charles Jolibois
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Jean-Philippe Lachenaud
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Marcel Lesbros
Claude Lise
Paul Loridant
Roland du Luart
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
François Marc
Marc Massion
Serge Mathieu
Pierre Mauroy
Jean-Luc Mélenchon
Michel Mercier
Gérard Miquel
René Monory
Michel Moreigne
Lucien Neuwirth
Jacques Oudin
Jean-Marc Pastor
Lylian Payet
Jacques Pelletier
Guy Penne
Jean Pépin
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Xavier Pintat
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Ivan Renar
Roger Rinchet
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
François Trucy
André Vallet
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

Ont voté contre


Nicolas About
Philippe Adnot
Louis Althapé
Pierre André
Jean Arthuis
René Ballayer
Janine Bardou
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Jean Boyer
Louis Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Jacques Donnay
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Yann Gaillard
René Garrec
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Hubert Haenel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Michel Pelchat
Jacques Peyrat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac

Abstentions


MM. Bernard Fournier, Roger Karoutchi, Louis Mercier et Mme Nelly Olin.

N'ont pas pris part au vote


Bernard Barraux
Georges Berchet
Jacques Bimbenet
Didier Borotra
Joël Bourdin
Gérard Deriot
André Diligent
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Emmanuel Hamel
Rémi Herment
Pierre Laffitte
Max Marest
Ladislas Poniatowski

N'ont pas pris part au vote


MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Paul Girod, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 306
Nombre de suffrages exprimés : 302
Majorité absolue des suffrages exprimés : 152
Pour l'adoption : 130
Contre : 172

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.