Séance du 22 février 2000
M. le président. La parole est à M. Jean Boyer, auteur de la question n° 698, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Jean Boyer. Au travers de cette question adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, je tiens à attirer l'attention du Gouvernement sur certaines conséquences de la modernisation des contributions indirectes.
Ainsi, le service des contributions indirectes de Voiron, dans l'Isère, risque d'être très prochainement fermé pour être regroupé avec d'autres. L'annonce en a été faite de façon quasi officielle.
Ce regroupement est engagé, paraît-il, au nom de la simplification et de l'efficacité ! Il risque, en réalité, de pénaliser les viticulteurs, les caves coopératives, les négociants d'alcools ou de boissons alcooliques et les débitants de tabacs, ainsi qu'en témoignent les nombreuses lettres que j'ai reçues de tous leurs syndicats, de toutes leurs organisations, et dans lesquelles ils manifestaient leur ire.
En effet, ils ne disposeront plus d'un service de proximité apte à maintenir un dialogue constant et constructif avec eux.
Cet éloignement ne peut qu'inquiéter les professionnels, au moment où ils doivent appliquer une réglementation européenne en constante évolution et dont les contraintes et les implications sont très importantes.
En effet, les services plus centralisés des contributions indirectes, moins proches des entreprises, risquent désormais de privilégier l'aspect répressif de leur mission au détriment du conseil, la sanction au détriment du dialogue.
Dans ces conditions, ne serait-il pas préférable de renoncer à la suppression de certains services de proximité, notamment celui de Voiron, qui, je le rappelle, est la capitale de la Chartreuse ?
Ainsi les entreprises ne se verraient pas pénalisées par une modernisation censée rendre le dispositif actuel plus efficace.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat. Monsieur le sénateur, comme bien d'autres aujourd'hui, vous vous inquiétez des conséquences de la modernisation des contributions indirectes.
La douane, puisqu'il s'agit d'elle, a en effet engagé une réflexion pour moderniser ses services à la suite d'un certain nombre de réorganisations, y compris européennes, que vous connaissez bien, l'objectif étant de faciliter la vie de nos entreprises et de nos concitoyens, et non pas de leur créer des difficultés.
Les services des contributions indirectes se caractérisent par des unités de petite taille. Ainsi, le service d'assiette des contributions indirectes, le SACI, de Voiron ne compte qu'un agent.
Dans l'hypothèse où son regroupement serait envisagé avec le bureau de Grenoble, cette mesure n'aurait pas de conséquence sur la qualité du service rendu à l'usager. Les SACI n'ont en effet pas vocation à recevoir le public. Ils exercent des missions de contrôle sur pièces et sur place, essentiellement auprès des entrepôts d'alcools ainsi que des débits de boissons et de tabacs.
Mais, pour le moment, M. Christian Sautter y insiste - on en est au stade de la réflexion ; aucune mesure n'est arrêtée. Le rôle de conseil aux entrepreneurs est un argument que M. Christian Sautter tient à prendre en compte dans la réforme.
Donc, en tout état de cause, monsieur le sénateur, aucune décision de regroupement ne sera prise sans une large concertation préalable et sans la prise en compte, en particulier, des éléments que vous venez de développer.
M. Jean Boyer. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Jean Boyer.
M. Jean Boyer. Madame le secrétaire d'Etat, permettez-moi de vous dire respectueusement que vous ne m'avez pas convaincu.
Le service des contributions indirectes de Voiron illustre en effet un phénomène plus général, qui concerne d'autres services publics dans de nombreux départements et auquel tous ceux qui siègent ici, conscients de ce qui se prépare, sont sensibles.
Le Gouvernement tient un double discours : il prétend relancer la décentralisation, mais, en réalité, ses initiatives ne font que limiter l'autonomie des collectivités locales et accroître le déséquilibre entre la ville et le monde rural.
La réforme de l'administration fiscale en est un des exemples les plus récents, je devrais même dire les plus patents. Elle suscite de légitimes inquiétudes concernant la fermeture et le regroupement de nombreuses trésoreries présentes sur le terrain, alors que celles-ci constituent pourtant des interlocuteurs privilégiés pour les collectivités locales.
Disant cela, je ne fais que traduire le sentiment de centaines de maires, véritablement traumatisés par l'annonce de la mise en place de ce dispositif.
Cela ne fera qu'accentuer un peu plus le sentiment d'isolement que les élus locaux sont nombreux à ressentir.
Cette réforme, comme beaucoup d'autres, a été annoncée sans véritable concertation avec les élus locaux, ce que je ne peux que déplorer.
Vous venez de dire, madame le secrétaire d'Etat, que, pratiquement, rien n'était encore décidé, qu'on verrait plus tard. Je note toutefois que, à l'heure actuelle, dans toutes les villes, dans tous les chefs-lieux de canton, on assiste à des manifestations que je qualifierai d'« éloquentes ».
Parlant toujours en tant que représentant du monde rural, je dirai que d'autres initiatives sont plus insidieuses. Je pense, par exemple, à l'annonce d'une augmentation des concours de l'Etat aux collectivités locales en 2000, qui dissimule la faible progression de la dotation globale de fonctionnement. Je pense également à la dotation de solidarité rurale, qui aurait même été gelée, si je puis dire, si les élus locaux et les parlementaires n'avaient pas protesté avec énergie. D'autres textes encore accentuent le déséquilibre entre la ville et la campagne, comme nous en avons la démonstration chaque jour de façon plus ou moins larvée, ici même, dans cette assemblée, ou en entendant le Gouvernement.
La loi sur l'intercommunalité favorise les zones urbaines et les agglomérations au détriment du monde rural et des petites communes. C'est clair !
La loi sur l'aménagement et le développement du territoire se contente de multiplier les structures institutionnelles sans répondre aux attentes des élus locaux.
Le monde rural est pris entre le marteau et l'enclume : d'un côté, il ne bénéficie d'aucune politique volontariste ; de l'autre, il doit faire face à de multiples tentatives de recentralisation administrative.
Le service des contributions indirectes de Voiron n'est peut-être qu'un modeste exemple entre mille, madame le secrétaire d'Etat. mais, permettez-moi de vous dire que c'est un exemple très significatif.
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