Séance du 22 février 2000
M. le président. La parole est à M. Pastor, auteur de la question n° 666, adressée à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Jean-Marc Pastor. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, qui représentez Mme le garde des sceaux, mes chers collègues, la prestation compensatoire a été instituée par la loi de 1975 sur le divorce. Elle est due par l'un des époux à l'autre, plus démuni, pour préserver son niveau de vie. Malheureusement, elle cause bien souvent, par la suite, des difficultés financières à celui que l'on appelle le débirentier, et l'on assiste fréquemment à des incohérences dans ce domaine.
Lors du divorce, la prestation compensatoire est calculée en fonction notamment des revenus du conjoint qui va la verser. Or, au fil du temps, le débirentier peut perdre son emploi ou connaître une baisse importante de revenus. La prestation compensatoire, elle, en raison de son caractère indemnitaire, n'est jamais modifiée.
De plus, cette prestation est transmissible, c'est-à-dire que, lors du décès du débirentier, sa nouvelle épouse ou ses enfants doivent continuer à verser la prestation à l'ex-conjoint de leur parent défunt.
Consciente de certaines situations paradoxales et parfois dramatiques, Mme le garde des sceaux a chargé le professeur Mme Françoise Dekeuwer-Defossez d'un rapport sur ces questions qui a été rendu public le 14 septembre 1999. Il est préconisé de réformer cette prestation, avec notamment le versement en capital, au moment du divorce, plutôt que sous la forme de rente. Cette disposition figure d'ailleurs, parmi d'autres, dans deux propositions de loi déposées par deux de nos collègues et examinées par le Sénat en février 1998.
Madame la garde de sceaux a envisagé une réforme globale du droit de la famille incluant les questions relatives au divorce et à la prestation compensatoire.
Depuis le dépôt de la présente question orale, l'Assemblée nationale a été saisie du texte traitant spécifiquement de ce problème. Je souhaiterais savoir dans quelle mesure les conclusions du rapport relatif à la prestation compensatoire pourront être reprises dans ce texte.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle. Monsieur le sénateur, voici les éléments de réponse que je peux vous apporter au nom d'Elisabeth Guigou.
Votre question est révélatrice des difficultés suscitées par le régime juridique de la prestation compensatoire tel qu'il résulte de la loi du 1er juillet 1975.
Par cette réforme, le législateur de l'époque avait souhaité mettre un terme au contentieux très abondant, et particulièrement conflictuel, qu'entraînait la révision des pensions alimentaires versées à l'un des époux après divorce. En instituant la prestation compensatoire, il a donc souhaité que les effets pécuniaires du divorce soient réglés une fois pour toutes lors du prononcé de celui-ci.
C'est pourquoi la loi de 1975 privilégie le versement de la prestation en capital et limite les possibilités de sa révision lorsqu'elle est attribuée sous forme de rente.
Les aléas professionnels subis par certains de nos concitoyens et le phénomène des recompositions familiales ont révélé, au fil des ans, un décalage de plus en plus important entre les aspirations du législateur et la réalité quotidienne.
Elizabeth Guigou est donc favorable à une nouvelle réforme des textes en vigueur.
Lors de l'examen par le Sénat, le 25 février 1998, de la proposition de loi de M. About et de celle de M. Pagès, le Gouvernement avait d'ailleurs déposé différents amendements tendant à assouplir les conditions de révision de la rente et à en rendre la charge en principe intransmissible, à moins que les parties ou le juge n'en décident autrement.
Depuis cette date, la réflexion sur ce sujet s'est enrichie de plusieurs propositions contenues dans les rapports remis, en mai 1998, par Mme Irène Théry et, en septembre 1999, par Mme Dekeuwer-Defossez, présidente de la commission sur le droit de la famille.
Ce dernier rapport préconise notamment la possibilité de réviser à la baisse le montant des rentes viagères en cas de modification substantielle de la situation des parties, la limitation de l'obligation des héritiers du débiteur au seul actif successoral ou encore la déductibilité d'une éventuelle pension de réversion du montant de la prestation.
Le rapport fait actuellement l'objet d'une large concertation politique et institutionnelle, ainsi que d'une consultation auprès des associations et des représentants des différentes confessions, dans la perspective d'une présentation des grandes orientations de la réforme à la conférence de la famille en juin 2000.
Toutefois, devant l'acuité des problèmes soulevés, un examen spécifique et anticipé de la question de la réforme de la prestation compensatoire aura lieu demain, mercredi 23 février, à l'Assemblée nationale. La navette parlementaire de la proposition de loi déjà examinée en première lecture par le Sénat devrait se poursuivre et votre assemblée être conduite à la discuter en deuxième lecture en avril prochain.
M. Jean-Marc Pastor. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Pastor.
M. Jean-Marc Pastor. Madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie de ces précisions.
Il s'agit, vous le savez, d'un problème lancinant, dont, en tant que parlementaires, nous sommes régulièrement saisis par diverses associations.
Il est évident que, devant les difficultés qui sont rencontrées dans certains cas pour réaliser la compensation, il y a urgence à « toiletter » le dispositif législatif de 1975.
Je crois que les orientations que vous venez de tracer, madame la secrétaire d'Etat, sont de nature à nous rassurer.
M. Nicolas About. N'oubliez pas les mesures fiscales !
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