Séance du 26 octobre 1999
M. le président. La parole est à M. Robert, auteur de la question n° 580, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Jean-Jacques Robert. Je suis heureux que ce soit vous, monsieur le secrétaire d'Etat, qui répondiez à ma question. Celle-ci se réfère à un texte adopté sous un gouvenement précédent - mais je ne cherche pas à provoquer un différend politique. Dans la continuité du Parlement, je fais appel au gouvernement de la France pour régler une situation qui accable les plus petits, sans défense et abandonnés à leur sort.
Face aux prix pratiqués par la grande distribution, la disparition des petites stations-services détaillantes de carburants se poursuit à un rythme constant.
En mai et en juin 1996, le Parlement a examiné le projet de loi n° 96-588 relatif à la loyauté et à l'équilibre des relations commerciales, dont j'étais le rapporteur pour le Sénat. Nous envisagions de soumettre la vente au détail de carburants au dispositif en vigueur pour réprimer la pratique de prix abusivement bas.
Ce fut malheureusement impossible, car il est apparu, après discussion avec le ministère de l'économie et des finances, qu'il s'agissait non pas de vente mais de revente en l'état. Un compromis fut laborieusement cherché et, après de très nombreuses discussions, trouvé.
Il fut décidé d'étendre la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, due par les grandes et moyennes surfaces, aux installations de distribution de carburants : 60 millions de francs pourraient ainsi être perçus par la caisse de l'organisation autonome nationale d'assurance vieillesse de l'industrie et du commerce, l'ORGANIC, et affectés au comité professionnel de la distribution des carburants, le CPDC, lequel procéderait à la répartition entre les petits pompistes en difficulté.
J'étais, je vous l'avoue, très réticent sur ce procédé, qui me semblait inapproprié. Mais il fallait sortir d'une situation de crise, et l'occasion de traiter ce sujet n'était sûrement pas près de se représenter.
Quelle est la situation après l'adoption de ces dispositions et de ce projet de loi voté par l'Assemblée nationale et par le Sénat ?
L'article 130 de la loi n° 96-1181 du 30 décembre 1996 a étendu l'assiette de la taxe. Le décret n° 97-59 du 15 mai 1997 fixe le taux de cette taxe. Deux ans après l'adoption de la loi, le décret n° 98-112 du 2 mars 1998 établit les modalités de la répartition en prévoyant un arrêté conjoint du ministre chargé de l'industrie, du ministre chargé du commerce et de l'artisanat et du ministre chargé du budget.
Aujourd'hui, que se passe-t-il ? L'ORGANIC collecte depuis mai 1997 cette taxe spécifique, mais rien ne va aux petits pompistes en difficulté. Si l'argent entre dans les caisses, en revanche, l'aide n'est pas attribuée aux pompistes en difficulté.
A mon avis, deux solutions sont possibles : ou bien prendre l'arrêté conjoint et répartir enfin ces sommes aux bénéficiaires, comme prévu ; ou bien, si ce n'est pas possible, supprimer l'excédent de la taxe inemployé qui m'apparaît constituer un prélèvement injustifié. La volonté du législateur, après tant d'années, devrait se traduire dans les actes. J'aimerais savoir, monsieur le secrétaire d'Etat, si vous partagez mon sentiment.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur le comité professionnel de la distribution des carburants, appelé familièrement le CPDC, dont la vocation - vous l'avez fort bien dit - est d'aider les détaillants en carburant, particulièrement en zone rurale où leur survie est difficile, ne serait-ce, comme vous l'avez sous-entendu, que parce que la concurrence des grandes surfaces leur est très préjudiciable.
Le comité professionnel de la distribution des carburants est habituellement financé par une taxe parafiscale sur les huiles minérales dont le montant est de l'ordre de 55 millions de francs.
Puis est venu un nouveau dispositif que vous avez fort bien décrit et dont le dernier élément est le décret du 2 mars 1998, qui a prévu, en modifiant le décret constitutif du comité professionnel de la distribution des carburants, d'affecter à ce dernier une partie de l'excédent de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, la fameuse TACA dont vous avez parlé.
Cette taxe, qui résulte elle-même d'une loi de 1972, est collectée, vous l'avez dit, par l'ORGANIC. Son assiette a été étendue aux pompes à essence des grandes surfaces par l'article 130 de la loi de finances pour 1997 : c'est ce que l'on appelle plus familièrement la taxe Galland, du nom d'un de mes prédécesseurs.
Telle est la situation juridique, que vous avez fort bien rappelée.
On doit donc constater en fin d'année l'excédent de collecte, qui ne peut être déterminé qu'une fois que l'on a versé les indemnités de départ prévues par la loi de 1972 et qu'ont été versées les charges de retraite aux artisans.
Cela étant, vous avez raison, monsieur le sénateur, un arrêté est nécessaire pour fixer le montant de la part de cet excédent à verser au CPDC. Je peux vous dire au nom du Gouvernement que cet arrêté, dont vous demandez la publication rapide, sera pris dès que possible afin de remédier à un retard que je reconnais.
Il me paraît cependant utile de vous livrer une information supplémentaire : vous savez que les pompistes sont soumis à de nouvelles contraintes d'environnement, qui pèsent particulièrement sur les petits pompistes ruraux car ils n'ont pas les moyens de financer les investissements nécessaires. A cette fin, le comité professionnel de la distribution des carburants a prévu cette année des programmes d'aide de mise aux normes environnementales et le Gouvernement abondera très prochainement, je vous l'indique, le budget de ce comité d'une somme de 15 millions de francs, par prélèvement sur l'excédent de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat. Si l'on tient compte des réserves substantielles de ce comité, c'est un véritable appui qui sera apporté aux petits détaillants ruraux pour qu'ils se mettent aux normes environnementales.
Vous le constatez, le Gouvernement est attentif au sort des détaillants de carburant en milieu rural, comme vous l'avez été vous-même en posant votre question.
M. Jean-Jacques Robert. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Robert.
M. Jean-Jacques Robert. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse très précise, même si vous n'avez pas fixé la date de parution de l'arrêté interministériel. Cela étant, vous nous avez habitués à suivre la réalisation des propositions que vous nous faisiez, et j'ai donc tout lieu de penser que, après le laxisme que nous avons connu dans le passé, l'intérêt des petits pompistes sera pris en considération, surtout compte tenu des nouvelles réglementations concernant l'environnement, qui me paraissent excellentes.
Je souhaite que l'on se mette bien en tête - excusez-moi cette expression familière - que le succès de la grande distribution, en matière de vente d'essence et de carburant, est quasi irréversible. Or, nous ne parviendrons à maintenir un réseau de qualité en milieu rural que grâce à ce transfert de taxes, qui permettra d'aider les petits pompistes à s'équiper et à préserver ainsi leurs conditions de travail. Pour cela, ils ont besoin d'aide et de réciprocité.
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