Séance du 19 janvier 1999
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Décès d'anciens sénateurs
(p.
1
).
3.
Désignation d'un sénateur en mission
(p.
2
).
4.
Décisions du Conseil constitutionnel
(p.
3
).
5.
Saisine du Conseil constitutionnel
(p.
4
).
6.
Organisme extraparlementaire
(p.
5
).
7.
Dépôt de rapports du Gouvernement
(p.
6
).
8.
Dépôt d'un rapport en application d'une loi
(p.
7
).
9.
Questions orales sans débat
(p.
8
).
EFFETS DES DÉLINÉATEURS
SUR LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE (p.
9
)
Question de Mme Anne Heinis. - M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Mme Anne Heinis.
DISTORSIONS DE CONCURRENCE
DANS LE DOMAINE DES TRANSPORTS (p.
10
)
Question de M. Philippe Richert. - MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Philippe Richert.
PROLONGEMENT DE LA LIGNE DE TRAMWAY N° 1
ENTRE BOBIGNY ET LA GARE DE NOISY-LE-SEC (p.
11
)
Question de M. Christian Demuynck. - MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Christian Demuynck.
CALENDRIER DE RÉALISATION
DU TGV PERPIGNAN-BARCELONE (p.
12
)
Question de M. Roland Courteau. - MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Roland Courteau.
CONSTRUCTION DE L'AUTOROUTE A 89
BORDEAUX - CLERMONT-FERRAND (p.
13
)
Question de M. Xavier Darcos. - MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Xavier Darcos.
DÉSENCLAVEMENT DU LIMOUSIN (p. 14 )
Question de M. Georges Mouly. - MM. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement ; Georges Mouly.
AVENIR DES JEUNES
BÉNÉFICIANT D'UN REPORT D'INCORPORATION (p.
15
)
Question de M. Daniel Eckenspieller. - MM. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants ; Daniel Eckenspieller.
RÉFORME DES HEURES COMPLÉMENTAIRES
DES ENSEIGNANTS (p.
16
)
Question de M. Bernard Murat. - MM. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat au anciens combattants ; Bernard Murat.
CRÉATION D'UN BTS AQUACOLE
AU LYCÉE AGRICOLE DE CHÂTEAU-CHINON (p.
17
)
Question de M. René-Pierre Signé. - MM. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants ; René-Pierre Signé.
SITUATION DES MÉDECINS RAPATRIÉS D'ALGÉRIE
AU REGARD DE L'ASSURANCE VIEILLESSE (p.
18
)
Question de M. Francis Giraud. - MM. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale ; Francis Giraud.
SYSTÈME DE PERCEPTION DU SUPPLÉMENT
DE LOYER DE SOLIDARITÉ (p.
19
)
Question de M. Patrick Lassourd. - MM. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement ; Patrick Lassourd.
RÉCIPROCITÉ ET RESPECT DES ACCORDS BILATÉRAUX
EN CÔTE D'IVOIRE (p.
20
)
Question de M. Hubert Durand-Chastel. - MM. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement ; Hubert Durand-Chastel.
DEVENIR DU CENTRE NATIONAL D'ÉTUDES
DES TÉLÉCOMMUNICATIONS (p.
21
)
Question de M. Michel Duffour. - MM. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget ; Michel Duffour.
RÉGIME FISCAL DES ÉTABLISSEMENTS
D'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR PRIVÉS (p.
22
)
Question de M. Jean-Paul Hugot. - MM. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget ; Jean-Paul Hugot.
RÉGIME FISCAL DES ASSOCIATIONS
ORGANISATRICES DE SPECTACLES (p.
23
)
Question de M. Alain Dufaut. - MM. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget ; Alain Dufaut.
PRÉLÈVEMENT DE LA TAXE D'HABITATION (p. 24 )
Question de M. Franck Sérusclat. - MM. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget ; Franck Sérusclat.
SUPPRESSION DES VENTES HORS TAXES (p. 25 )
Question de Mme Marie-Claude Beaudeau. - M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget ; Mme Marie-Claude Beaudeau.
MISE EN OEUVRE DE L'INSTRUCTION
BUDGÉTAIRE ET COMPTABLE M 14 (p.
26
)
Question de M. Nicolas About. - MM. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget ; Nicolas About.
Suspension et reprise de la séance (p. 27 )
PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET
10.
Voeux de M. le président
(p.
28
).
MM. le président, Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.
11.
Conférence des présidents
(p.
29
).
12.
Loi d'orientation agricole. -
Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence (p.
30
).
Discussion générale : M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche
; Mme Christiane Lambert, rapporteur de la section de l'agriculture et de
l'alimentation du Conseil économique et social ; Jean François-Poncet,
président de la commission des affaires économiques ; Michel Souplet,
rapporteur de la commission des affaires économiques.
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
MM. Albert Vecten, rapporteur pour avis de la commission des affaires
culturelles ; Dominique Leclerc, rapporteur pour avis de la commission des
affaires sociales ; Gérard Le Cam, Jean-Marc Pastor, Jean Huchon, Jean-Paul
Emorine.
Renvoi de la suite de la discussion.
13.
Dépôt d'une question orale avec débat portant sur des sujets européens
(p.
31
).
14.
Dépôt de rapports
(p.
32
).
15.
Dépôts rattachés pour ordre au procès-verbal de la séance du 22 décembre
1998
(p.
33
).
16.
Ordre du jour
(p.
34
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le procès-verbal de la séance du 22 décembre 1998 a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté.
2
DÉCÈS D'ANCIENS SÉNATEURS
M. le président. J'ai le regret de faire part au Sénat du décès de nos anciens collègues M'Hamet Kheirate, qui fut sénateur de Mostaganem-Thiaret de 1959 à 1962, et Jean de Lachomette, qui fut sénateur de la Haute-Loire de 1948 à 1974.
3
DÉSIGNATION D'UN SÉNATEUR EN MISSION
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :
« Paris, le 18 janvier 1999.
« Monsieur le président,
« J'ai décidé de placer Mme Monique Cerisier-ben Guiga, sénatrice, en mission
temporaire auprès de la ministre de l'emploi et de la solidarité et du ministre
des affaires étrangères.
« Je tenais à vous faire part de cette décision, qui est prise dans le cadre
des dispositions des articles LO 144 et LO 297 du code électoral et qui fera
l'objet d'un décret publié incessamment au
Journal officiel.
« Je vous prie d'agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute
considération. »
« Signé : Lionel Jospin ».
Acte est donné de cette communication.
4
DÉCISIONS DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel
:
- par lettre en date du 30 décembre 1998, le texte des décisions rendues par
le Conseil constitutionnel qui concernent la conformité à la Constitution de la
loi de finances pour 1999 et de la loi de finances rectificative pour 1998 ;
- par lettre en date du 14 janvier 1999, le texte de la décision rendue par le
Conseil constitutionnel qui concerne la conformité à la Constitution de la loi
relative au mode d'élection des conseillers régionaux et des conseillers à
l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux.
Acte est donné de ces communications.
Ces décisions du Conseil constitutionnel ont été publiées au
Journal
officiel,
édition des lois et décrets.
5
SAISINE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel
une lettre par laquelle il informe le Sénat que le Conseil constitutionnel a
été saisi, le 24 décembre 1998, en application de l'article 54 de la
Constitution, par M. le Président de la République et M. le Premier ministre,
du traité portant statut de la Cour pénale internationale signé à Rome le 18
juillet 1998.
Acte est donné de cette communication.
Le texte de la saisine du Conseil constitutionnel est disponible au bureau de
la distribution.
6
ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président.
J'informe le Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de procéder à
la désignation du sénateur appelé à siéger au sein du conseil d'orientation du
Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou, en remplacement de M.
Michel Pelchat, démissionnaire.
En conséquence, j'invite la commission des affaires culturelles à présenter un
candidat.
La nomination du sénateur appelé à siéger au sein de cet organisme
extraparlementaire aura lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par
l'article 9 du règlement.
7
DÉPÔT DE RAPPORTS DU GOUVERNEMENT
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre :
- en application de l'article 18 de la loi de finances pour 1998, le rapport
sur le bilan de l'application du dispositif de défiscalisation des
investissements outre-mer ;
- le rapport établi en application de la loi du 2 février 1995 relative au
renforcement de la protection de l'environnement sur le fonctionnement pour
l'année 1997 du Fonds de modernisation de la gestion des déchets ;
- le rapport du comité national de la coordination gérontologique établi en
application de l'article 1er de la loi n° 97-60 du 24 janvier 1997 tendant,
dans l'attente du vote de la loi instituant une prestation d'autonomie pour les
personnes âgées dépendantes, à mieux répondre aux besoins des personnes âgées
par l'institution d'une prestation spécifique dépendance ;
- le rapport annuel d'information sur la protection et le contrôle des
matières nucléaires pour l'année 1997, établi en application de l'article 10 de
la loi n° 80-572 du 25 juillet 1980.
Acte est donné du dépôt de ces rapports.
8
DÉPÔT D'UN RAPPORT
EN APPLICATION D'UNE LOI
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le président du conseil de surveillance
et de M. le président du directoire du Centre national des caisses d'épargne et
de prévoyance, en application de l'article 5 de la loi n° 91-635 du 10 juillet
1991, le rapport d'activité du groupe Caisse d'épargne pour l'exercice 1997.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
9
QUESTIONS ORALES SANS DÉBAT
M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales sans débat.
effets des délinéateurs sur la sécurité routière
M. le président.
La parole est à Mme Heinis, auteur de la question n° 353, adressée à M. le
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Mme Anne Heinis.
Monsieur le ministre des transports, ma question porte sur l'implantation de
délinéateurs le long de la RN 13, qui relie Paris à la Normandie.
Ces délinéateurs sont des balises munies de dispositifs réfléchissant blancs ;
placés le long des routes, ils en matérialisent le tracé.
A une époque, ces équipements ont été installés de façon relativement
systématique ; puis ils ont été supprimés, notamment dans certains
départements. Il semble donc qu'il y ait une controverse à leur sujet.
Les services de la direction départementale de l'équipement, que nous avons
interrogés, ont répondu que, si ces délinéateurs amélioraient le confort des
usagers, notamment par temps de pluie ou de brouillard, ils favorisaient
également une vitesse plus élevée et pouvaient donc avoir des effets
globalement négatifs sur la sécurité, alors que, de plus, leur maintenance
engendre des contraintes et des coûts.
Nombreux sont les usagers qui ne sont pas de cet avis. Estimant, au contraire,
que ces équipements améliorent la sécurité la nuit - ce qui est d'ailleurs
exact - par temps de pluie ou de brouillard, en particulier sur des sections de
routes considérées comme dangereuses, ils m'ont envoyé une pétition.
Au moment où de nombreux projets - très coûteux - sont à l'étude pour diminuer
le nombre d'accidents mortels, pouvez-vous, monsieur le ministre, pour nous
aider à trancher, nous donner votre avis sur cette question et nous dire si des
études sérieuses ont bien été menées pour apprécier l'effet réel de ces
délinéateurs sur la sécurité routière ?
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Madame la
sénatrice, l'implantation de délinéateurs, ces petits poteaux verticaux
disposés régulièrement le long de la voie et censés améliorer la sécurité
routière, a effectivement fait l'objet, en 1978, de textes de recommandation
figurant dans des guides techniques.
Ainsi, ces équipements ont effectivement été installés de façon systématique
le long de plusieurs routes nationales après 1980, notamment le long de la RN
13, qui vous intéresse plus particulièrement.
En 1992, un bilan de leur utilisation a été effectué. Les services compétents
de mon ministère, le SETRA - service d'études techniques des routes et
autoroutes - et le CERTU - centre d'études avec les réseaux, les transports,
l'urbanisme et les constructions publiques - en ont publié les résultats dans
l'ouvrage
Sécurité des routes et des rues,
qui fait référence en matière
d'équipement et d'aménagement de la voirie routière.
Il est alors apparu que l'utilisation, sur les routes, d'équipements de
guidage visuel en continu, tels que les délinéateurs, n'était, en général, pas
souhaitable. En effet, si les délinéateurs améliorent le confort des usagers -
cela explique, d'ailleurs, les réactions dont vous avez fait état - notamment
la nuit par temps de pluie ou de brouillard, l'excès de confiance qu'ils
engendrent favorise souvent une vitesse plus élevée, alors que la vitesse est
la première cause d'accidents de la route dans notre pays.
Ils peuvent donc avoir des effets globalement négatifs sur la sécurité. De
plus, leur maintenance entraîne des contraintes et des coûts de fonctionnement
supplémentaires, notamment au moment du fauchage des accotements.
Les délinéateurs peuvent cependant être intéressants dans des zones «
chahutées », comme les zones de montagne, qui sont peu propices à des vitesses
élevées.
Il est donc maintenant conseillé aux directions départementales de
l'équipement de traiter de manière homogène les itinéraires sur les routes
nationales.
Il leur est recommandé de concentrer leur efforts sur la qualité de la
signalisation horizontale, au sol, avec la mise en oeuvre de marquages routiers
performants et bien entretenus, sur l'amélioration de la signalisation des
points singuliers de l'itinéraire, comme les virages ou les carrefours, et sur
le traitement des accotements de la route.
Je souhaite conclure sur ce point en vous indiquant, madame Heinis, que les
déposes de délinéateurs réalisées à ce jour par des directions départementales
de l'équipement non seulement n'ont fait apparaître aucune dégradation de la
sécurité, mais ont même plutôt contribué à une amélioration, en raison d'une
diminution de la gravité des accidents.
Mme Anne Heinis.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Heinis.
Mme Anne Heinis.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.
Certes, l'entretien des bermes n'est pas chose facile : il faut démonter les
poteaux pour procéder au fauchage, etc. Mais cet argument, qui a pesé dans la
balance, ne me semble toutefois pas fondé.
Cela étant, je partage tout à fait votre souci d'homogénéiser la signalisation
sur les routes ; c'est très important et il faut sans cesse attirer l'attention
de la DDE sur ce point.
Lorsque j'avais la responsabilité d'une ville et que je demandais des
améliorations, maintes fois il m'a été répondu que la réglementation s'y
opposait et que, de toute façon, il n'était pas possible de donner suite à ma
demande compte tenu des obstacles à surmonter. Mais, deux ans plus tard, sans
que je réitère ma demande, tout d'un coup - et je m'en réjouissais - c'était
devenu possible !
Il faut donc demander aux services de l'équipement d'avoir un dialogue plus
constructif avec les usagers ; c'est probablement la meilleure façon de
progresser.
Je vous remercie de bien vouloir entendre ce message, monsieur le ministre.
DISTORSIONS DE CONCURRENCE
DANS LE DOMAINE DES TRANSPORTS
M. le président.
La parole est à M. Richert, auteur de la question n° 372, adressée à M. le
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Philippe Richert.
Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur les importantes
distorsions de concurrence existant au sein de l'Union européenne dans le
domaine du transport de voyageurs, du fait des législations sociales, fiscales
et techniques très disparates d'un pays de l'Union à l'autre.
Ainsi, tandis qu'en France la journée de travail ne peut excéder douze heures,
aucune limite de temps n'est prévue dans le règlement social européen. Cela
peut signifier pour nos transporteurs l'obligation d'avoir deux conducteurs
quand d'autres, pour le même trajet, n'ont recours qu'à un seul chauffeur.
Dans un autre registre, la longueur maximale des véhicules en France est de 12
mètres, alors qu'elle est de 15 mètres en Allemagne, en Belgique et aux
Pays-Bas.
Enfin, les transporteurs français effectuant des voyages en Allemagne sont
tenus d'acquitter une taxe sur la valeur ajoutée de 16 %, alors que les
transporteurs allemands sont exonérés de la TVA française lors de leur passage
sur notre territoire.
Ces disparités, combinées à de nombreuses autres, pénalisent lourdement les
transporteurs français par rapport à leurs homologues européens et, en
particulier, les sociétés de transports des régions frontalières, comme
l'Alsace.
Alors que le marché unique en matière de transport routier est entré en
vigueur le 1er juillet dernier, permettant aux transporteurs européens de
répondre aux appels d'offres des collectivités partout au sein de l'Union
européenne, les compagnies de transport de voyageurs allemandes peuvent
proposer des prix très compétitifs par rapport à ceux qui sont pratiqués par
leurs collègues français.
Il leur est d'autant plus facile d'afficher des tarifs aussi bas que le
Gouvernement allemand leur verse des subventions d'un montant de 160 000
deutsche Marks, soit 540 000 francs, lorsqu'elles assurent des transports
réguliers ou scolaires.
Je vous demande donc, monsieur le ministre, si ces problèmes de distorsions de
concurrence, spécifiques au transport routier de voyageurs dans les zones
transfrontalières - qui sont réels et peuvent engendrer des préjudices graves -
sont pris en compte dans le cadre des négociations menées actuellement au
niveau communautaire et visant à harmoniser les législations des pays de
l'Union européenne en matière de transport routier.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Monsieur le
sénateur, je tiens à vous assurer que le Gouvernement a le souci de
l'harmonisation des conditions de concurrence dans le domaine du transport
routier, qu'il soit d'ailleurs de voyageurs ou de marchandises, et pas
seulement dans les zones transfrontalières, même si elles sont naturellement
plus exposées aux distorsions de concurrence : aucune réunion des ministres
européens des transports ne se passe sans que j'intervienne sur ce point.
Avec les professionnels du transport, la France défend le principe d'une
harmonisation par le haut des règles sociales et de sécurité à l'échelle
européenne, ce qui aurait dû constituer un élément indissociable de la
construction du Marché unique et de la libéralisation dans les transports
routiers.
Il est indispensable, pour garantir l'équité de la concurrence, renforcer la
sécurité routière, améliorer les conditions de travail et de vie des
conducteurs, favoriser la qualité de service et développer l'emploi, que les
règles de concurrence soient loyales et jouent normalement.
Cette harmonisation doit nécessairement englober trois aspects : une
législation communautaire sur la durée du travail dans les transports routiers,
une législation communautaire sur l'institution d'une formation professionnelle
initiale et continue des conducteurs routiers et une harmonisation des
contrôles et des sanctions. La France a d'ailleurs présenté ses propositions
lors du conseil des ministres européens des transports de décembre 1997, soit
après le conflit qui a eu lieu dans notre pays, et elles ont été formalisées
dans un mémorandum.
Un nouveau règlement n° 2135-98 concernant l'appareil de contrôle électronique
appelé à se substituer à l'actuel chronotachygraphe, longtemps attendu et
demandé par la France, a été publié le 24 septembre 1998. Il va permettre
d'améliorer l'efficacité des contrôles.
De même, à la suite du mémorandum, il convient de se féliciter que la
Commission ait adopté le 18 novembre dernier un projet de directive sur le
temps de travail, qui va pouvoir maintenant être discuté par le conseil des
ministres européens.
La réglementation française prévoit actuellement, comme vous le soulignez, une
longueur maximale de 12 mètres pour les autocars. Cette longueur est inférieure
à la longueur maximale autorisée dans un certain nombre d'autres pays
européens.
Je tiens cependant à vous préciser que cette réglementation, qui figure dans
le code de la route, s'applique à tous les véhicules circulants en France, et
cela quelle que soit leur nationalité. Comme dans d'autres domaines, cette
disposition peut néanmoins être amenée à évoluer en fonction des changements
possibles de la réglementation européenne.
En ce qui concerne les taux de TVA, vous savez qu'ils sont différents d'un
Etat membre à l'autre. Cela ne conduit cependant pas à une distorsion des
conditions de concurrence dans la mesure où, pour une même prestation dans un
Etat donné, tous les transporteurs, quelle que soit leur nationalité, doivent
acquitter la même TVA. Je peux en particulier vous confirmer que les
transporteurs allemands qui exécutent un transport en France ne sont pas plus
exonérés de TVA que les transporteurs français qui exécutent la même
prestation.
Les ministres de l'économie et des finances de l'Union européenne s'efforcent
d'éviter que les législations des pays membres soient contournées. Il s'agit
d'une tâche compliquée, vous avez raison de le souligner, monsieur le sénateur.
Croyez que nous travaillons non seulement à l'harmonisation sociale, mais
également à l'harmonisation des législations fiscales des pays membres, et donc
à celle des taux de TVA.
M. Philippe Richert.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de reconnaître l'importance de ce
dossier.
Vous savez qu'incombe aux collectivités, en particulier aux départements, la
responsabilité des transports scolaires.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Eh oui !
M. Philippe Richert.
Or, s'agissant des transports scolaires dans les régions frontalières, se pose
très directement la question de la concurrence. En effet, aujourd'hui, les
transporteurs de tous les pays membres de l'Union européenne peuvent, en
principe, participer aux appels d'offres et les conditions offertes par
certains pays voisins à leurs transporteurs permettent à ces derniers de
proposer des prix qui se révèlent excessivement intéressants par rapport à ceux
que peuvent pratiquer les transporteurs français.
Je ne voudrais pas que, lors des prochaines adjudications, nous soyons trop
souvent obligés d'écarter les transporteurs français en raison des critères
imposés par la France, qui sont bien plus lourds, bien plus drastiques que ceux
qui sont imposés par nos voisins allemands, par exemple, à leurs propres
transporteurs.
Je vous remercie donc, monsieur le ministre, de l'attention que vous portez à
cette affaire. Je souhaiterais, bien entendu, que les négociations au niveau
européen - car c'est bien là que les choses se passent - puissent aboutir le
plus rapidement possible, et ce d'autant que nos voisins allemands, par
exemple, peuvent accorder des subventions importantes aux entreprises qui, en
Allemagne, font du transport scolaire.
Je vous remercie encore de votre attention, monsieur le ministre, et j'espère
que nous aurons très prochainement l'occasion d'enregistrer un accord.
PROLONGEMENT DE LA LIGNE DE TRAMWAY N° 1
ENTRE BOBIGNY ET LA GARE DE NOISY-LE-SEC
M. le président.
La parole est à M. Demuynck, auteur de la question n° 374, adressée à M. le
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Christian Demuynck.
Monsieur le ministre, le projet de prolongement de la ligne de tramway n° 1 de
Bobigny jusqu'à la gare de Noisy-le-Sec est toujours bloqué, faute de majorité
au conseil régional permettant d'octroyer les crédits nécessaires aux travaux.
En fait, si toutes les parties prenantes, sans exception, sont favorables au
prolongement de la ligne du tramway, le choix retenu suscite de nombreuses
réserves.
Il subsiste, en effet, un contentieux majeur sur la définition du tracé, tant
à Bobigny, avant le pont de Bondy, qu'à Noisy-le-Sec, depuis la traversée de la
RN 3 jusqu'à la gare. Ce contentieux résulte d'une insuffisance de l'écoute
accordée aux Noiséens et aux Balbyniens. Ceux-ci ont pourtant réalisé avec
l'ADRAGAN, association qu'ils ont créée, et l'appui d'experts un contre-tracé
moins cher et validé sur le plan technique par la RATP, la DDE et le STP.
Il est à noter qu'une majorité de conseillers régionaux, dont Jean-Luc Roméro,
élu de Seine-Saint-Denis et par ailleurs conseiller municipal de Bobigny, ainsi
qu'Olivier Deleu, conseiller municipal de Noisy-le-Sec, ont pris position
contre le tracé initial, comme d'ailleurs le groupe des Verts de la mandature
précédente par la voix d'un de ses représentants, M. Christian Feuillet,
aujourd'hui vice-président.
Je tiens aussi à exprimer la crainte d'une centaine d'employés d'entreprises
concernées par les conséquences du projet actuel sur leurs installations, ou
encore de petits commerçants situés avenue Gallieni.
Cette inquiétude économique est à ajouter à celle de plusieurs dizaines de
familles concernées par la démolition de leur pavillon, donc leur
expropriation.
C'est pourquoi le projet de l'ADRAGAN prévoit, lui, le passage du tramway par
la cité de la Sablière, ce qui permettrait de désenclaver ce quartier, écarté
de la vie locale.
La solution réside, comme je l'ai déjà précisé, dans la concertation avec
l'ensemble des parties concernées.
Je souhaite donc savoir, monsieur le ministre, quelle est la position de
l'Etat sur ce dossier, afin de rassurer les différentes parties concernées.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Monsieur le
sénateur, les projets permettant d'améliorer les déplacements de banlieue à
banlieue doivent, selon moi, être désormais prioritaires, notamment en
Ile-de-France, car ils répondent à un besoin très important qui n'a pas été
suffisamment satisfait dans le passé.
Dans l'avenir, les déplacements de banlieue à banlieue devraient augmenter de
40 %, alors que, dans Paris
intra-muros,
ils devraient rester stables.
Il faut donc développer ces rocades.
La ligne de tramway n° 1, qui permet déjà de relier Saint-Denis à Bobigny et
qui fait la preuve de son efficacité - comme, d'ailleurs, celle du Val-de-Seine
- et ce dans d'excellentes conditions de rentabilité et de confort, a permis
une intéressante opération de requalification urbaine des quartiers et des
villes traversés. Pourtant, lors de son lancement - mais vous connaissez la
situation, puisque vous êtes élu de Seine-Saint-Denis ! - certains s'y étaient
opposés, avec les mêmes arguments, parfois, qu'aujourd'hui. Cette ligne connaît
un grand succès, supérieur à toutes les prévisions, ce qui justifie le projet
de son prolongement jusqu'à la gare de Noisy-le-Sec.
Ce projet a fait l'objet d'études très complètes et a été soumis à une enquête
publique. Ont été présentées toutes les variantes envisagées, dont celle que
vous avez signalée, monsieur le sénateur, et les raisons pour lesquelles elles
n'avaient pas été retenues. Après un débat qui s'est déroulé dans la
transparence - chacun a pu exprimer son point de vue - la commission d'enquête
a donné un avis favorable à la déclaration d'utilité publique, que j'ai donc
transmise le 25 novembre dernier au Conseil d'Etat.
Ainsi que vous pouvez le constater, monsieur le sénateur, les choses sont
parfaitement claires en ce qui concerne l'Etat. Celui-ci a fait preuve de
célérité et a pris toutes les responsabilités qui, à ce stade, étaient les
siennes.
A l'heure où le contrat de plan Etat-région va être débattu, je suis persuadé
que les autres partenaires susceptibles d'intervenir dans la réalisation de
cette opération prendront également leurs responsabilités car ce projet est
attendu par les usagers et répond à un réel besoin.
Vous savez peut-être, monsieur le sénateur, que la commission des transports
du conseil régional d'Ile-de-France a voté voilà peu 56 millions de francs pour
la réalisation de ce projet.
Je ne dis pas que le problème est résolu ; mais, puisque vous avez rappelé le
désaccord des Verts, je tiens à souligner que, en l'occurrence, les
représentants des partis de la majorité ont voté favorablement et que ce projet
doit être soumis à la commission permanente, qui doit se réunir jeudi
prochain.
Je veux enfin attirer votre attention, monsieur le sénateur, sur la volonté de
tous, élus locaux et responsables de la RATP, de choisir le meilleur projet et
de tenir compte des problèmes qui pouvaient apparaître.
Il serait regrettable que ce projet ne soit pas réalisé, d'autant que les
obstacles me semblent aujourd'hui surmontés.
M. Christian Demuynck.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Demuynck.
M. Christian Demuynck.
Monsieur le ministre, il est certain que, comme vous, je suis attaché au
développement des transports de banlieue à banlieue et que je considère que ce
projet est tout à fait prioritaire.
Vous avez évoqué l'enquête publique et le rapport d'enquête. Cela me permet de
relever que le projet est considéré comme valable ou non quel que soit l'avis
de la population.
Aucun des acteurs locaux, pas même les membres de l'association que j'ai
évoquée, n'a été associé à l'enquête ou même consulté.
Tout le monde étant favorable à ce projet, la seule difficulté portant sur le
trajet, il serait souhaitable de consulter très rapidement tous les acteurs
concernés.
CALENDRIER DE RÉALISATION
DU TGV PERPIGNAN-BARCELONE
M. le président.
La parole est à M. Courteau, auteur de la question n° 377 adressée à M. le
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Roland Courteau.
Sur l'axe européen Londres - Paris - Barcelone - Madrid la réalisation de la
section à grande vitesse Nîmes - Montpellier - Narbonne - Perpignan - Barcelone
est particulièrement urgente.
Pour des raisons économiques, de protection de l'environnement ou de
saturation des axes ferroviaires, routiers et autoroutiers, mieux vaut une
ligne à grande vitesse que le doublement de l'autoroute.
Pour la première phase, Perpignan - Figueras, c'est bien parti ; pour la
deuxième phase, Nîmes - Montpellier - Narbonne - Perpignan, il n'en est pas de
même. Pourtant, monsieur le ministre, ces deux phases sont liées, sinon
inséparables.
Monsieur le ministre, confirmez-vous la mise en place de la section
internationale Figueras - Perpignan pour 2004 ? Dans quel délai sera pris
l'arrêté du lancement de la déclaration d'utilité publique. Le cahier des
charges sera-t-il défini rapidement et le concessionnaire désigné durant
l'année 1999 ?
Par ailleurs, monsieur le ministre, concernant la première phase, je relève
que, simultanément à la réalisation de cette section, le contournement de Nîmes
et de Montpellier s'impose. Le niveau de saturation du réseau y atteint en
effet un palier difficilement compatible avec un service de qualité. Il sera
d'ailleurs plus élevé encore avec la mise en service de la section Perpignan -
Figueras.
Concernant la deuxième phase, l'axe Montpellier-Perpignan, lors du sommet de
La Rochelle, les ministres français et espagnols sont convenus d'accélérer les
procédures. Or, seules les études d'APS ont été réalisées et approuvées en
1995. Et depuis, plus rien.
L'urgence commande de réduire la bande des 500 mètres sur laquelle tous les
projets sont gelés, qu'il s'agisse de construction, d'extension, de vente,
etc.
De plus, monsieur le ministre, j'attire votre attention sur le fait que les
arrêtés portant sur les périmètres d'études seront respectivement caducs en
l'an 2000, 2001 et 2002. Il importe donc d'aller de l'avant.
Je rappelle la préférence des conseils généraux concernés pour la mise en
place de la DUP. Je rappelle à ce titre que la réalisation de la ligne à grande
vitesse Montpellier - Narbonne - Perpignan est rendue urgente par le haut
niveau de saturation qui sera atteint dès 2010.
La réalisation de cette ligne conditionne de surcroît, par son raccordement, à
Narbonne au réseau existant, la réalisation de la transversale Grand Sud, vers
Toulouse et la région Midi-Pyrénées. Peut-on espérer que cette opération
transversale permettant de circuler à 220 kilomètres à l'heure sera inscrite
dans le prochain contrat de plan ?
J'ajoute enfin que le coeur de mon propos, c'est l'aménagement du territoire
et le développement économique de Narbonne, qui est un carrefour ferroviaire,
routier et autoroutier, qui se doit de retrouver sa juste place dans le
transport ferroviaire par la mise en place de projets reposant sur
l'intermodalité des transports.
(Bravo ! sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Comme vous le
savez, les gouvernements français et espagnol ont signé, le 10 octobre 1995, à
Madrid, un accord concernant la construction et l'exploitation de la section
internationale d'une ligne ferroviaire à grande vitesse entre la France et
l'Espagne.
A la fin de l'année 1996, il a été décidé de lancer les études préparatoires à
l'enquête publique sur le tronçon Perpignan - frontière espagnole. Ces études
sont menées parallèlement à celles qui portent sur l'ensemble de la section
internationale franco-espagnole.
Elles sont conduites par le groupement européen d'intérêt économique Sud
Europe - Méditerranée, qui associe, du côté français, la SNCF et Réseau ferré
de France et, du côté espagnol, la RENFE et le GIF.
Ces études, qui sont difficiles, avancent dans de bonnes conditions. Les
études techniques sont pratiquement terminées, des compléments restant à
effectuer en matière de sécurité.
Concernant les études économiques, les prévisions de trafic pour le fret et
les voyageurs ont été établies. Les études d'exploitation et les bilans
économiques et financiers sont en cours d'achèvement.
Il convient de noter que la décision - importante, comme vous l'avez fort
justement souligné, monsieur le sénateur - de réaliser un projet mixte, conçu
en vue d'accueillir un trafic de voyageurs et de fret, implique certaines
études supplémentaires, notamment en ce qui concerne les modalités
d'exploitation.
Par ailleurs, la réalisation d'un projet binational nécessite, vous le
comprenez aussi, un examen juridique approfondi.
La commission intergouvernementale franco-espagnole devra examiner ces études
et valider leurs résultats. A l'issue de cet examen, le lancement de l'enquête
publique sur le tronçon Perpignan - frontière espagnole pourra intervenir.
Dès la rencontre franco-espagnole d'Ibiza, en juin 1997, j'ai affirmé mon
attachement à la réalisation rapide de cette liaison et nous sommes convenus
qu'elle serait confiée aux entreprises ferroviaires nationales françaises et
espagnoles : SNCF et RFF pour la France, RENFE et GIF pour l'Espagne. J'ai
ensuite veillé à ce que le traité international soit ratifié et à ce que la
conférence intergouvernementale puisse se mettre en place.
Le responsable de la délégation française à la CIG avait d'ailleurs, à ma
demande, rencontré son homologue espagnol et proposé un projet de règlement
intérieur de ladite commission avant le sommet franco-espagnol de La Rochelle
des 21 et 22 novembre dernier.
Au cours de ce sommet, nous avons décidé d'installer la CIG le 9 décembre et
de réaffirmer la perspective de 2004 pour réaliser le projet.
La première réunion de la commission a eu lieu à Paris à la date convenue.
S'agissant maintenant de l'axe ferroviaire languedocien, j'ai demandé au RFF
ainsi qu'à la SNCF de me présenter des propositions pour l'aménagement
progressif de celui-ci, et tenant compte notamment des problèmes de capacité
susceptibles d'apparaître au droit de Nîmes et de Montpellier, du fait de la
mise en service de la section internationale.
J'ajoute que nous travaillons - mais, là aussi, il faut que les départements
et la région participent à cette démarche - au problème des acquisitions de
terrains.
Les améliorations des relations sur l'axe transversal, entre Bordeaux,
Toulouse et Narbonne, relèvent des discussions qui s'ouvriront prochainement à
l'occasion de la préparation des contrats de plan. L'Etat est tout disposé à
prendre sa part et à s'inscrire dans cette démarche.
L'ensemble de ces éléments devrait permettre de répondre à vos interrogations
sur un projet que le Gouvernement considère comme prioritaire, tant pour le
développement des départements du sud du pays que pour l'approfondissement des
relations avec nos voisins espagnols.
Enfin, vous avez souligné l'importance du site de Narbonne et de ses
perspectives. J'ai demandé à la SNCF de faire un point précis, dont je ne
manquerai pas de vous informer dès que j'en disposerai.
M. Roland Courteau.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Courteau.
M. Roland Courteau.
Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse, que je qualifierai
d'encourageante.
Vous comprenez notre attachement à la réalisation de cette liaison à grande
vitesse. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : aujourd'hui, à la frontière
franco-espagnole méditerranéenne, dans les deux sens confondus, seulement 1,2
million de voyageurs utilisent le transport ferroviaire, le flux des
marchandises s'élevant quant à lui à 2,2 millions de tonnes.
Demain, la mise en service de la section Perpignan-Barcelone devrait porter le
nombre des voyageurs à quelque cinq millions et le trafic fret à quelque six
millions de tonnes. Les prévisions de trafic sont encore plus fortes dans
l'hypothèse de la mise en service de la ligne Perpignan-Montpellier.
De telles perspectives nous incitent à parier sur le développement des sites
ferroviaires concernés, notamment celui de Narbonne.
Or, les cheminots de Narbonne et leurs organisations syndicales ont raison
d'affirmer avec force que ce site, qui est au carrefour de deux grands axes
européens et à proximité de Port-la-Nouvelle, dispose des atouts nécessaires
pour son développement si l'on joue la carte de l'intermodalité des
transports.
Quelle est aujourd'hui la position de la direction de la SNCF ? Se
prépare-t-elle à aider le site ferroviaire de Narbonne à relever ce défi
prometteur ? Je m'interroge !
Selon les organisations syndicales, l'activité fret sur Narbonne est en
augmentation. Parfait ! Pourtant, contre toute attente, le fret est sur la
sellette. Il y a en effet eu des suppressions de postes et des menaces de
restructuration et de transfert d'activités. Je ne comprends plus ! La qualité
du service peut en souffrir, avec les conséquences que l'on devine.
Pourtant, les perspectives à court et moyen terme sont encourageantes, je
viens de le démontrer. Ne faudrait-il donc pas, au contraire, sur un site comme
celui de Narbonne, préparer l'avenir en commençant par donner davantage de
moyens humains et matériels ?
Tout affaiblissement du potentiel de ce site nuit gravement à ses chances
d'avenir.
Il s'agit là d'un site déjà sinistré, monsieur le ministre. Pourtant, il ne le
mérite pas.
Les effectifs de cheminots ont diminué de 400 en treize ans. Il faut inverser
la tendance. Les atouts sont réels, les organisations syndicales vous l'ont
écrit. Monsieur le ministre, le site de Narbonne doit retrouver sa juste place.
(Très bien ! sur les travées socialistes.)
CONSTRUCTION DE L'AUTOROUTE A 89
BORDEAUX - CLERMONT-FERRAND
M. le président.
La parole est à M. Darcos, auteur de la question n° 384, adressée à M. le
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Xavier Darcos.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la
réalisation de l'autoroute A 89 Bordeaux - Clermont-Ferrand est un maillon
essentiel de la grande liaison transversale est-ouest qui, pour l'an 2000, doit
relier la façade atlantique à la région Rhône-Alpes, en contribuant au
désenclavement de la région Aquitaine et des régions situées à l'ouest du
Massif central.
Le contrat de plan passé entre l'Etat et la société des Autoroutes du Sud,
concessionnaire du futur ouvrage, avait prévu, pour la période 1995-1999, un
engagement de plus de 10 milliards de francs sur les 16 milliards de francs que
coûtera au total l'opération. Cet engagement a-t-il été respecté ?
Les travaux de l'autoroute A 89, qui affectent le département de la Dordogne
sur une longueur de 111 kilomètres, devaient débuter, selon l'échéancier prévu,
entre le deuxième trimestre de l'année 1996 et l'été 1998. Or le retard de
réalisation de ces travaux me préoccupe, notamment pour l'axe Mussidan -
Brive.
Depuis les années 1950-1955, les Périgourdins attendent avec une impatience
légitime le désenclavement de la Dordogne, qui souffre d'un manque
d'infrastructures routières et ferroviaires, alors même que la desserte
aérienne Paris - Périgueux est actuellement remise en cause et pourrait être
interrompue au 1er février prochain.
C'est dire la nécessité de mettre un terme à ce désenclavement dont les
conséquences économiques sont extrêmement lourdes.
Je souhaiterais donc, monsieur le ministre, que vous me fassiez connaître les
engagements financiers de votre département ministériel pour la réalisation de
l'autoroute A 89, qui devait être mise définitivement en service au 1er janvier
2000.
Cette date ne sera manifestement pas respectée. Je le regrette. Je suis
impatient de recevoir des informations sur le calendrier désormais retenu.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Monsieur le
sénateur, moi aussi je regrette les retards qui ont été pris mais ils ne sont
pas de mon fait, vous le savez bien.
Après avoir eu connaissance de votre question et afin de lever toute
ambiguïté, j'ai demandé à mes services de se rapprocher de la société des
Autoroutes du Sud de la France, l'ASF, et de faire le point sur les conditions
et le calendrier de réalisation de l'autoroute A 89 Bordeaux -
Clermont-Ferrand.
Comme vous le savez, cet axe s'intègre dans la transversale Bordeaux - Genève,
qui constitue une importante opération d'aménagement du territoire. Il est
inscrit au contrat conclu en 1995 entre l'Etat et ASF pour la période
1995-1999.
Sur la durée de ce contrat, un engagement de 10 milliards de francs de travaux
- valeur septembre 1994 - est prévu pour les sections Bordeaux - Périgueux
ouest et Tulle - Clermont-Ferrand. L'Etat s'était engagé envers la Commission
européenne à préciser dans la convention de concession d'ASF les conditions
techniques et financières de réalisation de cette autoroute avant le 31
décembre 1997.
Paru au
Journal officiel
du 31 décembre 1997, le quatrième avenant à
cette convention intègre notamment les conditions techniques et financières de
l'autoroute A 89 Bordeaux - Clermont-Ferrand. Dans son article 7, il fait
mention de mises en service prévisionnelles qui ne seront pas postérieures à
l'année 2007.
La section Arveyres - Saint-Julien - Puy-Lavèze, qui relie en fait la sortie
de Bordeaux au sud-ouest de Clermont-Ferrand, a été déclarée d'utilité publique
par décret du 10 janvier 1996.
Les travaux sont d'ores et déjà en cours aux deux extrémités de l'autoroute
entre Coutras et Montpon-Ménestérol en Aquitaine, entre Ussel Ouest et
Laqueuille, en limite du Puy-de-Dôme. Il est prévu que ces deux sections soient
mises en service au premier semestre 2000.
Les travaux ont par ailleurs été lancés sur les sections Arveyres - Coutras et
Tulle Est - Ussel Ouest, et ils le seront au début de 1999 sur le tronçon
Montpon-Mussidan avec pour objectif une mise en service en 2001.
Enfin, la section centrale Périgueux - Tulle sera programmée dans le prochain
contrat qui sera conclu entre l'Etat et ASF. Dans le Puy-de-Dôme, la section
Saint-Julien - Puy-Lavèze - Combronde a été déclarée d'utilité publique par
décret du 9 janvier 1998. Il n'est cependant pas possible de connaître dès
maintenant le calendrier précis de réalisation de ces deux dernières sections,
car il dépend des résultats des études techniques en cours.
M. Xavier Darcos.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Darcos.
M. Xavier Darcos.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, qui confirme, hélas !
toutes mes craintes.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Mais non !
M. Xavier Darcos.
Vous m'indiquez en effet comme prévision finale avril 2007, soit une échéance
de huit ans ! De plus, vous précisez que le tronçon Mussidan -
Brive-la-Gaillarde fait partie de ces travaux ultimes, qui, aujourd'hui encore,
ne sont pas totalement programmés. Je le répète, Périgueux, une fois de plus,
est la ville la plus mal lotie sur cet itinéraire.
En outre, la Dordogne ne dispose pas de réseau ferroviaire. Les Périgourdins
doivent aller chercher le train à Angoulême s'ils veulent mettre moins de trois
heures pour se rendre à Paris. Le trajet Périgueux - Paris via Limoges demande
aujourd'hui plus de temps qu'il y a trente ans - je dis bien : trente ans !
Les Périgourdins disposeront peut-être d'une autoroute en 2007, si les
engagements d'ASF sont tenus cette fois-ci, ce qui n'a pas été le cas
jusqu'ici.
En tant que sénateur de la Dordogne, je suis obligé de dire, monsieur le
ministre, que ce département n'est pas traité comme il le mérite !
(M. Bernard Murat applaudit.)
DÉSENCLAVEMENT DU LIMOUSIN
M. le président.
La parole est à M. Mouly, auteur de la question n° 393, adressée à M. le
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Georges Mouly.
Avec la question que je veux vous poser, nous allons retrouver, pour partie,
le problème de l'A 89. Cela vous montre l'intérêt - que vous comprenez, j'en
suis persuadé - que nous portons au désenclavement de nos régions.
Je partage les regrets de M. Darcos sur le calendrier. Mais je n'aborderai pas
la question du désenclavement du Limousin de la même façon qu'il y a un an,
lorsque je vous interrogeais sur ce même sujet.
En effet, grâce à des décisions prises sous d'autres gouvernements et à la
volonté aujourd'hui affichée de ce gouvernement de poursuivre à un rythme
appréciable les travaux précédemment entrepris, le désenclavement routier de la
région Limousin commence à devenir réalité, même si les engagements de l'Etat
ne sont pas respectés, comme le rappelait M. Darcos.
J'ai noté, monsieur le ministre, que le retard n'était pas de votre fait. Je
me permettrai cependant de vous interroger sur ce point précis.
Nous sommes conscients, globalement, des avancées réalisées pour le Limousin ;
mais - il en est toujours ainsi - impatiences et légitimes interrogations se
succèdent.
S'agissant des liaisons routières, questions et réflexions concernent la
traversée est-ouest de la région. Pour le Limousin, il faut poursuivre
l'aménagement de la route Centre Europe - Atlantique. Concernant plus
précisément mon département, il est nécessaire d'assurer la continuité de l'A
89 Bordeaux - Clermont-Ferrand.
Comme je l'ai dit, je ne nie pas que les choses ont avancé ici ou là. On le
constate d'ailleurs dans l'est de mon département. Mais la surprise vient de
l'annonce, au cours d'une réunion sur le « 1 % paysage », qu'entre Tulle et
Brive-la-Gaillarde, plus précisément près de Brive-la-Gaillarde - et le maire
ici présent, mon ami Bernard Murat, vous en dirait plus que moi si ce point
précis devait être développé - des problèmes techniques entraînent un nouveau
phasage et que, tout compte fait, si une solution peut être trouvée à ce
problème, ce serait avec un retard de l'ordre de deux ans. Un retard de plus
!
Certes, à l'impossible nul n'est tenu quand il s'agit de raisons techniques ;
mais vous pressentez la question que l'on peut se poser, monsieur le ministre :
le provisoire, comme c'est souvent le cas, ne serait-il pas appelé à durer
longtemps, trop longtemps, pour des raisons autres que techniques ?
Un député de la majorité, et non des moindres, le député de Tulle, disait, à
l'occasion de la réunion, que les contraintes financières faisaient que l'on
devait négocier âprement - je dis bien âprement - face à un interlocuteur qui
s'interroge sur la rentabilité financière des investissements autoroutiers.
Alors, admettez, monsieur le ministre, que ma question sur l'autoroute A 89 est
une forme de contribution à cette négociation - mais dénuée d'âpreté,
reconnaissez-le.
Si la liaison routière Montauban - Brive-laGaillarde - Paris par l'A 20, sur
l'axe nord-sud, se fait, elle, trimestre après trimestre, dans de bonnes
conditions - les travaux avancent en effet à une bonne cadence - il n'en est
pas de même pour la voie ferrée. Certes, rien n'était concrètement prévu pour
l'époque où nous sommes mais, après un essai du train pendulaire, d'aucuns se
demandent si cet essai est jugé ou peut être jugé concluant, si des études sont
faites ou non sur le matériel roulant et sur les dessertes, dessertes
principales ou antennes, si a été ou si doit être effectuée une étude de
marché.
Concernant la ligne Paris - Limoges - Toulouse, qui ne peut espérer le TGV,
contrairement à la région de mon collègue et ami Roland Courteau, on manifeste
une légitime curiosité sur l'état d'avancement d'un projet auquel il est porté
grand intérêt.
Je n'ignore pas que doivent être conclues des conventions avec les trois
régions concernées. Devrait-il y avoir participation financière des
collectivités territoriales, tant sur les infrastructures que sur le matériel ?
C'est une des questions que l'on se pose... parmi tant d'autres.
Comment ne pas revenir, pour terminer, sur la liaison SNCF est-ouest cette
fois, qui, avec l'axe Bordeaux - Lyon, remplit vraiment mal, et même très mal,
en l'état actuel, son rôle de liaison entre l'axe atlantique, l'espace central
et le sillon rhodanien ? Là aussi, quatre régions sont concernées, ce qui n'est
sans doute pas de nature à simplifier les choses.
Voilà, monsieur le ministre, ce que je voulais vous dire. C'est parce que le
Limousin a longtemps été caractérisé par son enclavement, parce que des progrès
ont été et sont encore réalisés pour inverser cette tendance, mais aussi parce
que l'amélioration de l'offre de transport demeure néanmoins d'actualité que
nous aimerions, une fois de plus, qu'un point précis - que nous espérons
positif - puisse être fait dans ce domaine.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Monsieur le
sénateur, je voudrais tout d'abord vous dire que, en accord avec le
Gouvernement, j'attache une attention toute particulière au désenclavement des
régions, et bien sûr à celui de la vôtre, le Limousin.
Il convient, bien entendu, d'envisager une meilleure répartition des trafics
entre les différents modes de transports et donc, ici comme ailleurs, d'avoir
une approche fondée sur la complémentarité de la route et du rail, notamment. A
cet égard, la discussion sur les schémas de service et les contrats de plan
devrait permettre, je pense, d'avancer dans ce sens.
Plus précisément, j'estime que, parallèlement à la mise en service complète de
l'A 20, la ligne ferroviaire Paris - Orléans - Vierzon - Limoges -
Brive-la-Gaillarde -Toulouse doit être adaptée et modernisée. Je peux vous
confirmer que ce projet, qui concerne les régions Centre, Limousin et
Midi-Pyrénées, et qui constitue l'un des grands axes nord-sud de notre pays,
avance tout à fait normalement.
Le comité de pilotage de cette étude, auquel participent tous les partenaires
concernés - Etat, régions, SNCF et RFF - a défini en commun un scénario
réaliste d'amélioration de cette liaison, en ce qui concerne tant
l'infrastructure que les matériels. Un appel d'offres européen a été lancé sur
du matériel pendulaire, qui pourrait être adapté à cette liaison.
Nous devrions maintenant pouvoir lancer rapidement la phase d'étude
d'avant-projet puisque la convention d'étude et le cahier des charges
d'avant-projet viennent d'être transmis aux différents partenaires pour
signature.
Ce projet sera bien évidemment examiné prioritairement dans le cadre des
discussions relatives à l'élaboration des prochains contrats de plan
Etat-région.
En ce qui concerne maintenant la réalisation de l'autoroute A 89, je peux vous
indiquer que les études de mise au point du projet autoroutier entre Brive
Ouest et Tulle Est ont révélé des difficultés géotechniques majeures sur la
commune d'Ussac, à l'est immédiat de l'autoroute A 20, dans le secteur des
Saulières et de Grand Roche.
Un tracé de référence a déjà été présenté sur la commune d'Ussac, mais toutes
les solutions techniques envisageables dans ce secteur ne sont pas encore
totalement validées. En tout état de cause, elles seront soumises à mon
approbation compte tenu de l'incidence de ces difficultés sur le coût et sur
les délais de réalisation de l'A 89.
Je souligne cependant que, plus à l'est, jusqu'à Tulle Est - commune de
Gimel-les-Cascades - les études se sont déroulées tout à fait normalement
malgré la présence d'ouvrages d'art très exceptionnels comme les viaducs de
Tulle et du Chardon.
Par ailleurs, le département de la Corrèze a étudié l'aménagement de la route
départementale 9, qui relie le réseau de voirie du plateau Brive - Tulle à l'A
20, cela afin d'améliorer l'accessibilité de ce secteur de l'A 20.
Dès lors, il est apparu naturel de réaliser le plus rapidement possible cet
aménagement en y branchant provisoirement l'A 89. Cette liaison entre l'A 89 et
l'A 20 permettra ainsi de rejoindre Brive-la-Gaillarde Ouest par l'A 20 et
d'assurer, le plus rapidement possible, la jonction entre Brive-la-Gaillarde et
Saint-Julien-Puy-Lavèze. Cela correspond aux souhaits des sénateurs
concernés.
Entre-temps, et afin de ne pas retarder la mise en service de la section
complète de l'A 89, les financements ainsi différés seront reportés sur la
section Brive-la-Gaillarde - Périgueux pour maintenir le rythme de réalisation
de cette infrastructure. Enfin - je tiens à vous rassurer sur ce point -
parallèlement, les études préliminaires et les acquisitions foncières se
poursuivront sur la commune d'Ussac.
M. Georges Mouly.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Mouly.
M. Georges Mouly.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse circonstanciée.
Pour ce qui concerne la SNCF, j'ai bien noté l'état d'avancement des travaux.
Il s'agit, selon vous, d'un « scénario réaliste », d'un « projet prioritaire
dans le contrat de plan ». Sur ce point, nous ne pouvons que nous montrer
satisfaits et espérer que cette priorité demeurera effective dans le prochain
contrat de plan.
Pour l'A 89, permettez-moi de regretter que le constat de difficultés
techniques ait été opéré aussi tardivement : aux yeux du béotien que je suis,
les difficultés techniques devraient pouvoir se voir plus rapidement.
Cela étant, je note que des efforts sont faits pour que, en l'état actuel des
choses, la meilleure solution possible soit trouvée, y compris grâce à la
participation du département de la Corrèze.
Je souhaite que ce provisoire, qui peut donner relativement satisfaction - je
le reconnais, ainsi que le maire de Brive - dure le moins longtemps possible.
Au demeurant, monsieur le ministre, nous avons apprécié la teneur de votre
réponse.
AVENIR DES JEUNES BÉNÉFICIANT
D'UN REPORT D'INCORPORATION
M. le président.
La parole est à M. Eckenspieller, auteur de la question n° 376, adressée à M.
le ministre de la défense.
M. Daniel Eckenspieller.
Le Gouvernement a accepté, lors de la discussion de la loi portant réforme du
service national, le principe d'un report d'incorporation pour les jeunes gens
bénéficiant d'un contrat de travail de droit privé à durée indéterminée.
Certaines restrictions ont cependant été posées afin de ne pas priver les
armées des effectifs nécessaires à leur bon fonctionnement dans l'attente de
leur totale professionnalisation.
C'est ainsi que l'article L. 5
bis
A du code du service national ne
prévoit ce report que « si l'incorporation immédiate du demandeur a pour
conséquence de compromettre son insertion professionnelle ou la réalisation
d'une première expérience professionnelle ».
Nous avons tous pu constater, dans nos départements, que le report ainsi
institué a suscité un espoir sans commune mesure avec la portée réelle de la
disposition.
Du fait, sans doute, d'un déficit de communication, la plupart des jeunes
intéressés ont considéré que ce report était systématique dès lors qu'ils
étaient titulaires d'un contrat de travail, allant jusqu'à confondre report et
dispense pure et simple.
Les commissions régionales accordant ou refusant ce report ont d'ailleurs
fait, elles aussi, une lecture très large de la loi, lors de leurs premières
réunions.
Confronté à cette interprétation, le ministère de la défense a réagi en
adressant aux préfets une circulaire, non publiée, les appelant à une plus
grande fermeté. Il a par ailleurs contesté nombre de décisions des commissions
devant les tribunaux administratifs.
La position du ministère se justifie dans la mesure où le besoin en effectifs
pourrait ne plus être satisfait en cas d'interprétation trop souple durant la
période de transition précédant la professionnalisation complète des armées.
Mais, au-delà de cet aspect des choses, c'est l'avenir des jeunes qui viennent
d'obtenir le report d'incorporation tant espéré qui doit nous préoccuper
aujourd'hui.
Dans deux ans, les jeunes ayant obtenu ce report demanderont à nouveau le
bénéfice de l'article L. 5
bis
A du code du service national. La loi
fait mention en effet « d'un report d'incorporation d'une durée de deux ans
pouvant être prolongée ».
La situation professionnelle des jeunes au sein de l'entreprise qui les
emploie sera-t-elle systématiquement considérée comme suffisamment stable pour
garantir une insertion professionnelle réelle et durable ?
Au vu des premières décisions octroyant ou refusant le bénéfice du report et
si cette approche est confirmée par les autres juridictions administratives, il
apparaît que seuls les jeunes ayant connu de graves difficultés d'insertion
pourront bénéficier d'un nouveau report.
La première expérience professionnelle, période d'adaptation au monde du
travail, n'est plus compromise passé un délai de douze à dix-huit mois, selon
le commissaire du Gouvernement ayant récemment rendu ses conclusions, sur une
vingtaine d'affaires, auprès du tribunal administratif de Strasbourg.
Le report d'incorporation risque dès lors de n'être prolongé que très
exceptionnellement à l'issue des deux premières années.
Ce choix jurisprudentiel semble contestable, car trop restrictif au regard de
l'esprit de la loi.
Ne convient-il pas d'assouplir les critères pris en compte pour l'octroi du
report et de réaffirmer la possibilité d'un éventuel renouvellement, serait-ce
au prix d'une modification législative ou réglementaire ?
En tout état de cause, les jeunes dispensés devront théoriquement effectuer
tôt ou tard leur service militaire. Mais ne sera-t-il pas inopportun de
rappeler sous les drapeaux des jeunes qui pourraient alors approcher les
vingt-neuf ans, âge auquel on n'est plus assujetti au service actif, alors que
la phase de transition vers l'armée professionnelle devrait être achevée en
2002 ?
En conséquence, une décision politique de principe concernant les jeunes
appelés à faire leur service après un premier report n'est-elle pas
indispensable afin de lever les nombreuses ambiguïtés et incertitudes
auxquelles les uns et les autres se trouvent aujourd'hui confrontés ?
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Pierre Masseret,
secrétaire d'Etat aux anciens combattants.
Monsieur le sénateur, tout
d'abord, je tiens à vous présenter les excuses de M. Alain Richard, ministre de
la défense, qui effectue actuellement un voyage en Corée et qui m'a donc prié
de vous communiquer la réponse qu'il souhaitait apporter à votre question.
J'observe que vous avez déjà largement vous-même apporté des réponses en
faisant état de la législation actuellement applicable. Aussi, je veux rendre
hommage à votre esprit de responsabilité à cet égard.
Vous avez donc rappelé que la loi du 28 octobre 1997 portant réforme du
service national traduit la volonté du Gouvernement et du Parlement de
concilier la priorité nationale accordée à l'emploi des jeunes et le besoin des
armées en appelés du contingent dans la phase cruciale de professionnalisation,
qui s'achèvera en l'an 2000. Il faut en effet tenir compte de ces deux éléments
pour prendre des décisions utiles.
Cette loi a inséré dans le code du travail deux dispositions nouvelles dont
l'importance est patente.
L'article L. 128-18 du code du travail dispose désormais que le contrat de
travail d'un salarié ou d'un apprenti appelé au service national est suspendu
pendant toute la durée du service national actif et non plus rompu comme
c'était le cas jusqu'à présent.
Sur le plan des principes, la réintégration dans l'entreprise est donc de
droit.
L'article L. 122-21, quant à lui, dispose qu'aucun employeur ne peut résilier
le contrat de travail d'un salarié ou d'un apprenti au motif que ce salarié ou
cet apprenti se trouve astreint aux obligations du service national ou se
trouve appelé au service.
En complément, l'article L. 5
bis
A du code du service national ouvre
des possibilités de reports d'incorporation sous certaines conditions
réglementaires pour de jeunes gens titulaires de contrats de droit privé à
durée déterminée ou indéterminée, si l'incorporation immédiate a pour effet de
compromettre l'insertion professionnelle ou la réalisation d'une première
expérience professionnelle du jeune.
Il est exact que des décisions jurisprudentielles récentes ont précisé cette
notion, comme vous venez de le rappeler.
L'octroi de ces reports est du ressort des commissions régionales prévues à
l'article L. 32 du code du service national, qui apprécient chaque situation
individuelle, ce qui est raisonnable. Le ministère de la défense a adressé à
ces commissions une circulaire précisant clairement les conditions d'action du
report pour éviter toute inégalité de traitement entre les décisions des
différentes commissions. Le principe d'égalité de traitement, qui est au coeur
de l'Etat de droit, doit, bien entendu, être respecté au regard du service
national.
S'agissant des jeunes titulaires d'un contrat de travail à durée indéterminée
qui ont obtenu un report de deux ans au titre de cet article L. 5
bis
A,
comme vous l'avez indiqué, la loi prévoit la possibilité d'une prolongation,
laquelle doit faire l'objet d'une demande du jeune dans les mêmes conditions de
procédure que le report initial. De la même manière, la commission régionale
appréciera la situation particulière du demandeur à la date de sa nouvelle
demande pour se prononcer en fonction du même critère relatif à l'insertion
professionnelle.
Ainsi, la procédure garantit en tout état de cause une approche très concrète,
très personnelle, de la situation qui est soumise, tant à la commission que, le
cas échéant, au ministre.
Pour les jeunes titulaires d'un contrat de travail à durée déterminée, le
report cesse au terme du contrat de travail qui l'a justifié.
Donc, le dispositif existe. Il est équilibré et donne des résultats
satisfaisants. Il arrive qu'il suscite effectivement des observations de la
part des jeunes qui aimeraient bien être dispensés du service national. Il faut
être lucide à cet égard.
Le devoir du ministre de la défense et de son département ministériel est de
s'assurer que les armées recevront le nombre d'appelés correspondant à leurs
besoins et que l'égalité de traitement sera garantie.
Vous le savez, la professionnalisation des armées sera achevée à la fin de
l'année 2002. A partir de cette date, quelles que soient les circonstances, il
n'y aura plus d'appelés.
Voilà la réponse que je voulais vous apporter au nom de M. Richard, monsieur
le sénateur.
M. Daniel Eckenspieller.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Eckenspieller.
M. Daniel Eckenspieller.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie des précisions que vous avez
bien voulu m'apporter.
Je voudrais néanmoins souligner encore une fois qu'il s'agit d'un problème qui
concerne, d'une manière très concrète et très immédiate, des milliers de jeunes
gens de notre pays.
En effet, dans le contexte social actuel, il n'est pas facile pour les jeunes
d'orienter leur itinéraire. Aussi devons-nous, me semble-t-il, éloigner de leur
route tout ce qui peut revêtir un caractère trop aléatoire.
Nous sommes là dans un domaine difficile sans doute, mais l'on n'a pas
l'impression qu'à la fois pour ceux qui ont à juger et pour ceux dont la
situation est jugée les choses soient très clairement cadrées.
RÉFORME DES HEURES COMPLÉMENTAIRES
DES ENSEIGNANTS
M. le président.
La parole est à M. Murat, auteur de la question n° 388, adressée à M. le
ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
M. Bernard Murat.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
souhaite attirer l'attention du ministre de l'éducation nationale sur la
publication récente par son cabinet d'un document de cadrage portant réforme
des heures complémentaires des enseignants universitaires.
Ce document prévoit que le nombre d'heures complémentaires par enseignant sera
ramené, sur une période de trois ans, à 50 maximum par an. Il précise que les
heures complémentaires n'ont pas vocation à être effectuées par des
enseignants-chercheurs sauf à permettre des ajustements à la marge : elles
doivent retrouver leur finalité, qui est l'intervention de professionnels ou de
personnalités extérieures dans les cursus professionnalisés.
La démarche adoptée serait, dans un premier temps, de limiter les heures
complémentaires afin de dégager les besoins, puis, dans un second temps,
d'envisager des créations de postes afin de couvrir ces besoins.
Or, même s'il est certain qu'une intervention devient urgente en matière
d'heures complémentaires, les besoins sont déjà appréciables et connus. Cette
démarche, si elle était mal conduite, risquerait de conduire à une dégradation
des enseignements par manque de cohérence compte tenu de la multiplication des
enseignants chargés des mêmes cours.
Prenons le cas concret du département « Gestion des entreprises et des
administrations » de l'IUT de Brive.
Actuellement, 1 126 heures complémentaires par an sont assurées par des
professeurs titulaires ou des vacataires enseignants effectuant plus de 50
heures complémentaires par an.
Les heures libérées par cette réforme atteindraient donc pour ce département
GEA un montant total de 726 heures. Cela représente approximativement un
recrutement de 14 vacataires supplémentaires.
Sur un site délocalisé comme celui de Brive, il semble peu probable de trouver
autant de vacataires professionnels motivés par l'enseignement et, quand bien
même ce serait possible, il faudrait que les enseignements aient lieu en grande
majorité à partir de dix-huit heures. Je vous laisse imaginer quel type de
casse-tête cela constituerait pour les responsables et les conséquences qui en
découleraient pour les étudiants.
Aussi, je propose d'inverser la démarche en créant d'abord des postes, puis
en limitant le nombre des heures complémentaires. C'est une question de simple
bon sens. Cela permettrait de faire en sorte qu'une bonne décision - que nous
reconnaissons comme telle - ne fasse, dans son application, l'objet
d'incompréhensions et de malentendus conduisant les étudiants et leurs
professeurs à se mettre en grève. Négocier sous la pression de la rue n'est
jamais une bonne chose pour un gouvernement quel qu'il soit.
L'occasion m'est donnée d'attirer une nouvelle fois l'attention de M. le
ministre de l'éducation nationale sur l'inadéquation des moyens attribués par
le Gouvernement aux universités par rapport aux annonces qu'il formule et qui
vont souvent dans le sens de nos attentes.
De la même manière, je regrette le manque de concertation qui existe avec les
responsables des sites universitaires et les élèves dans la prise de ces
décisions, ainsi que la méthode utilisée pour leur transmission. Mal comprises,
elles sont mal appliquées.
Cette situation plaide pour une accélération de la décentralisation du système
éducatif vers les régions, en partenariat avec les collectivités locales qui
accueillent les établissements et les structures.
Ces déficits en moyens financiers et en communication mettent souvent dans
l'embarras les maires des villes qui accueillent des sites universitaires. En
effet, dans de nombreux cas, la collectivité locale est apelée à se substituer
à l'Etat pour maintenir, voire développer l'antenne de l'université, qu'elle
accueille, par ailleurs, avec beaucoup de plaisir et une véritable volonté de
jouer le jeu. Mais ce jeu est souvent montré du doigt par la chambre régionale
des comptes et les maires sont, dans ce domaine aussi, des boucs émissaires.
J'évoquerai, parmi beaucoup d'autres exemples, celui d'un CES bibliothécaire à
l'IUT de Brive, dont le contrat venait à échéance à la fin de 1998.
L'université de Limoges n'avait pas les fonds nécessaires pour sa consolidation
; conséquence immédiate : des centaines d'étudiants en grève, appuyés par
l'ensemble des professeurs, demandent au maire que la commune se substitue à
l'Etat. C'est, bien entendu, ce que j'ai décidé de faire pour mettre un terme
au désordre et permettre le maintien de cet emploi jusqu'à la fin de l'année
scolaire ; je précise qu'il s'agit d'un emploi réservé. Mais qu'adviendra-t-il
de cet emploi par la suite ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, comprenez bien le sens de mon propos : je ne
suis pas opposé à cette réforme, et je souhaite qu'elle soit mise en oeuvre.
Mais il faut commencer par dégager les moyens financiers nécessaires afin d'en
assurer au mieux le succès, en pensant d'abord aux enseignants et aux
étudiants.
Je vous serais reconnaissant de bien vouloir éclairer le Sénat quant à la
position de M. le ministre de l'éducation nationale sur ces problèmes.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Pierre Masseret,
secrétaire d'Etat aux anciens combattants.
Monsieur le sénateur, M.
Claude Allègre regrette vivement de ne pouvoir répondre personnellement à votre
intervention. La réponse qu'il m'a chargé de vous transmettre ne concerne
évidemment que le thème des heures complémentaires, c'est-à-dire celui qui
était évoqué dans la question que vous avez déposée, car vous en avez abordé
bien d'autres verbalement. Vous aurez certainement l'occasion d'interroger
directement M. le ministre de l'éducation nationale sur ces autres sujets.
Le document de cadrage auquel vous avez fait allusion a été établi à la suite
d'une large consultation. Il a permis de fixer les orientations à partir
desquelles des textes sont en cours d'élaboration, touchant à la carrière des
enseignants-chercheurs et des enseignants de l'enseignement supérieur, à la
déconcentration de leur gestion, aux dispositifs de reconnaissance de leurs
fonctions et aux heures complémentaires.
L'objectif est bien de limiter le recours aux heures complémentaires pour les
ramener à leur véritable finalité : l'intervention de professionnels dans les
enseignements.
Les projets de texte seront soumis à concertation dans les jours qui viennent.
Une circulaire viendra rappeler la règle du service fait, le paiement des
heures complémentaires ne pouvant intervenir qu'à partir de la cent
quatre-vingt-treizième heure de cours effective ; l'horaire statutaire est
annuel et, je le rappelle, fixé à cent quatre-vingt-douze heures équivalent
travaux dirigés. Un décret limitera à un demi-service, dans un premier temps,
la possibilité pour les personnels statutaires de faire des heures
complémentaires. Dans trois ans, le décret sera plus strict et la limitation
fixée à un tiers de service.
Les universités disposeront ainsi des bases réglementaires et du temps
nécessaires pour maîtriser leurs heures complémentaires et leur offre
d'enseignement. Elles devront aussi, dans le cadre de leurs contrats avec
l'Etat, intégrer en priorité dans leur politique de recrutement les besoins en
enseignants-chercheurs des secteurs disciplinaires qui demeurent
sous-encadrés.
Parallèlement, et dans un contexte de décroissance démographique, M. le
ministre de l'éducation nationale rappelle que l'Etat a créé en deux années -
1998 et 1999 - 4 500 emplois d'enseignant-chercheur ou d'enseignant dans les
établissements d'enseignement supérieur.
M. Bernard Murat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Murat.
M. Bernard Murat.
Je prends acte de votre réponse, monsieur le secrétaire d'Etat.
La question des heures complémentaires s'insère dans un ensemble de problèmes
qui découlent d'un certain manque d'adéquation entre des annonces, ou même des
décisions, qui vont dans la bonne direction et les moyens financiers qui sont
effectivement dégagés. De cette situation, il résulte
in fine,
sur le
terrain, que les enseignants et les étudiants sont complètement désorientés.
Tel est le message de bon sens que je vous demande de bien vouloir transmettre
à M. le ministre de l'éducation nationale. Mais je ne manquerai pas de lui
faire part à nouveau de ce souci majeur.
CRÉATION D'UN BTS AQUACOLE
AU LYCÉE AGRICOLE DE CHÂTEAU-CHINON
M. le président.
La parole est à M. Signé, auteur de la question n° 381, adressée à M. le
ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. René-Pierre Signé.
La DRAF - direction régionale de l'agriculture et de la forêt - de Bourgogne a
présenté, en octobre 1998, la candidature du lycée professionnel agricole - LPA
- du Morvan, sis à Château-Chinon, pour bénéficier de l'ouverture d'une
préparation au brevet de technicien supérieur aquacole ; il s'agissait même de
son voeu n° 1. Cependant, la direction générale de l'enseignement et de la
recherche n'a pas retenu ce projet, prétextant que le LPA de Château-Chinon
connaissait « une croissance trop rapide ».
En outre, le statut du LPA, semble-t-il, ne lui permet pas d'abriter des
classes de BTSA, ou BTS agricole. Seul un changement de son statut en lycée
d'enseignement général et technique agricole, ou LEGTA, lui permettrait de
préparer au BTSA.
Or, ces cinq dernières années, pour ce qui concerne la Bourgogne, les LPA de
Saumur-en-Auxois, de Châtillon-sur-Seine, de Plombières-lès-Dijon sont devenus
des LEGTA par simple création d'un cycle BTSA.
D'autre part, dans la loi d'orientation agricole, il est prévu que, dans les
cinq ans, les LPA et LEGTA seront regroupés en un seul type de lycée.
La décision ne concerne donc pas le projet pédagogique. C'est une décision
politique à prendre pour l'évolution du lycée et en fait pour l'aménagement du
territoire. Le LPA du Morvan développe un enseignement pour une agriculture
particulière qui a une spécificité et une authenticité. Il mérite donc d'être
soutenu pour qu'il puisse jouer pleinement son rôle d'appui à cette agriculture
fragile. Ajouter à l'enseignement dispensé un BTS aquacole dans ce pays d'eaux
vives et de lacs apparaît comme une demande parfaitement justifiée.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Pierre Masseret,
secrétaire d'Etat aux anciens combattants.
Retenu à Bruxelles, M. Jean
Glavany m'a prié, monsieur Signé, de vous apporter sa réponse à votre
question.
Il est exact que, au moment de l'instruction des dossiers présentés par les
établissements d'enseignement pour la rentrée de 1999, les services du
ministère ont examiné avec prudence celui qu'a présenté le LPA de
Château-Chinon. En effet, la répartition des filières conduisant au BTSA dans
les productions aquacoles sur l'ensemble du territoire correspond aujourd'hui à
un équilibre entre les flux de formés et les possibilités d'insertion sur le
marché du travail.
Cette adéquation entre formation et activité professionnelle constitue
indiscutablement une responsabilité du ministère : il convient de faire en
sorte que des jeunes ne s'engagent pas dans des filières qui ne leur
assureraient pas un débouché professionnel.
Même si le taux d'insertion des titulaires de ce BTSA est encore très
convaincant - 81,6 % - il n'en demeure pas moins qu'il se situe au niveau le
plus bas de tous les brevets de technicien supérieur agricole et qu'il affiche
une baisse d'une enquête à l'autre.
Par ailleurs, la dotation en enseignants de l'établissement et l'expérience de
l'équipe pédagogique méritent d'être assez largement confortées avant
d'envisager une extension des filières vers les formations technologiques
supérieures. Sur ce point, une expertise a été demandée à l'inspection
pédagogique de l'enseignement agricole. En cas d'avis favorable, et si le
marché du travail ne se dégrade pas dans ce secteur, une ouverture de BTSA «
Productions aquacoles » pourrait être envisagée pour la rentrée 2000 ou la
rentrée 2001.
M. René-Pierre Signé.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Signé.
M. René-Pierre Signé.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai bien pris note de votre argumentation,
dont je pourrais discuter, pour ne pas dire réfuter, les différents points.
Le LEPA de Château-Chinon mûrit depuis trois ans ce projet d'ouverture d'une
classe de BTS spécialisé en aquaculture. Opportun, ce projet l'est évidemment
dans un contexte de fort développement de la pisciculture. Nécessaire, il l'est
tout autant, que ce soit en termes de formation de jeunes, assurés par la suite
de trouver un emploi, ou en termes de développement de l'activité de notre
région. C'est l'exemple même d'une démarche d'avenir pour le Morvan et la
Nièvre.
Le lycée professionnel agricole du Morvan, au terme d'une évolution
rationnelle, est devenu le premier LEPA de Bourgogne pour le taux de réussite
de ses élèves aux examens d'Etat. De la classe de quatrième au cycle de BTA et
de bac professionnel, la prise en charge pédagogique a connu un développement
continu, allant de pair avec l'équipement du lycée. Aujourd'hui, seuls trois
postes de professeur manquent encore à Château-Chinon pour que puisse être mise
en place la formation BTS aquacole.
Le LEPA de Château-Chinon dispose d'une équipe de direction cohérente, et la
nomination d'un proviseur adjoint a conforté l'équipe pédagogique.
Je relève au passage que ce sont, apparemment, les bons résultats obtenus par
l'établissement qui le pénalisent ! C'est du moins ainsi que j'interprète la
formule : « croissance trop rapide ».
Le LEPA bénéficie aussi d'une organisation pédagogique solide : les
enseignants ont suivi des stages dans les établissements qui disposaient de
cycles de BTS. J'ajoute que les jeunes diplômés qui auraient suivi cette
formation n'auraient aucune difficulté à trouver un premier emploi, en se
tournant vers un réseau hydrographique d'une densité exceptionnelle dans notre
région, sans même parler de l'activité de pêche professionnelle. Pour ceux qui
voudront s'installer dans leur propre exploitation, ils sauront tout des
méthodes de commercialisation nécessaires à la réussite de leur entreprise.
La création d'un BTS aquacole à Château-Chinon - la réponse que vous m'avez
transmise indique qu'elle pourrait intervenir en 2000 - recoupe ainsi la
nouvelle orientation de notre politique agricole, favorable à une production
propre et permettant l'emploi des hommes. Ce n'est pas le moindre de ses atouts.
SITUATION DES MÉDECINS RAPATRIÉS D'ALGÉRIE
AU REGARD DE L'ASSURANCE VIEILLESSE
M. le président.
La parole est à M. Francis Giraud, auteur de la question n° 378, adressée à M.
le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.
M. Francis Giraud.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je voudrais appeler votre attention sur la
situation des médecins rapatriés d'Algérie au regard de l'assurance volontaire
vieillesse, créée en 1962.
A ce jour, dix années d'activité professionnelle, pourtant effectuées à la
demande des pouvoirs publics sous convention, de 1952 à 1962, par les médecins
d'Algérie, avant leur réintégration en métropole, ne sont toujours pas prises
en compte dans le calcul de leur retraite.
A l'Assemblée nationale, interrogé sur ce dossier, vous avez reconnu vous-même
que ce problème résultait d'un « dysfonctionnement administratif », précisant :
« La caisse autonome de retraite des médecins français, la CARMF, a très
longtemps nié, à tort, que les médecins rapatriés aient exercé sous convention
médicale en Algérie, de 1952 à 1962. »
Vous avez ajouté : « Une information exacte - qu'ils n'ont pas eue ! - aurait
permis à ceux-ci de cotiser volontairement à l'avantage social vieillesse dès
1962, date de sa création, jusqu'à 1972, date où il a pris un caractère
obligatoire. »
Voilà donc un double préjudice que les médecins rapatriés continuent de
supporter trente-sept ans après l'indépendance de l'Algérie : dix ans, voire
vingt ans de leur vie professionnelle sont toujours exclus du calcul de leur
retraite !
Beaucoup de rapatriés se sont installés dans le sud de la France, notamment
dans les Bouches-du-Rhône. Aussi, en tant qu'élu de ce département,
souhaiterais-je que ce problème soit résolu rapidement et dans de bonnes
conditions.
Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous confirmer que les conditions
de rachat de points par les intéressés seront bien les conditions de 1962,
année de la création de l'assurance volontaire vieillesse ? Pouvez-vous nous
assurer qu'elles s'appliqueront également à leurs ayants droit ? Enfin, à
quelle date l'ensemble des intéressés retrouveront-ils, en toute justice, la
plénitude de leurs droits ?
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner,
secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.
Depuis que j'ai
qualifié cette situation de « dysfonctionnement », les choses auraient en effet
dû avancer, monsieur le sénateur. Je vais m'efforcer de faire le point avec
vous.
Vous m'avez fait part de vos inquiétudes sur la situation des médecins
rapatriés d'Algérie au regard du régime des allocations supplémentaires de
vieillesse, notamment des conditions qui leur sont offertes pour racheter des
points de retraite au titre des périodes d'exercice professionnel en Algérie,
voilà un certain nombre d'années.
Jusqu'en 1997, les médecins qui en avaient fait la demande auprès de la CARMF,
la Caisse autonome de retraite des médecins français, n'ont pu procéder au
rachat de ces périodes.
La CARMF estimait que, en l'absence d'homologation des conventions
départementales conclues en Algérie par la commission nationale compétente,
prévue par l'ordonnance du 19 octobre 1945 portant organisation de la sécurité
sociale, le caractère conventionnel de leur activité, qui est la condition
posée par la loi pour bénéficier de cette opération de rachat, ne pouvait être
reconnu.
Mais la cour d'appel d'Aix-en-Provence, dans un arrêt du 13 janvier 1997, a
rejeté cette interprétation en raison de l'existence d'une procédure spéciale
d'approbation des conventions locales, prévue dans un arrêté du 10 juin 1949
paru au
Journal officiel
algérien de l'époque.
Au vu de cet arrêt, le conseil d'administration de la CARMF, guidé par un
souci d'équité, a décidé, lors de sa séance du 31 mai 1997, de permettre
immédiatement à tous les médecins rapatriés d'Algérie remplissant les
conditions statutaires d'ouverture du droit à rachat de racheter leurs années
d'exercice sous convention, avec effet au premier jour du trimestre civil
suivant leur demande. Les requérants à un rachat d'annuités peuvent en outre
prétendre à un rappel d'arrérages, dans la limite de la prescription
quinquennale prévue par l'article 2277 du code civil, si l'examen de leur
dossier met en évidence l'existence d'une première demande de rachat
antérieure. Le barème de rachat retenu est celui qui est en vigueur au moment
du paiement du rachat, l'âge pris en compte pour le calcul du montant du rachat
étant l'âge à la date d'effet de la révision des droits. Ce n'est pas simple
!
Cette décision, conforme aux statuts de la caisse, respecte l'arrêt de la cour
d'appel et témoigne de la volonté de la CARMF, malgré les difficultés
financières auxquelles est confronté le régime de l'ASV, de régulariser la
situation des médecins rapatriés d'Algérie. Au demeurant, son caractère
favorable n'a pas échappé aux dizaines de médecins et de conjoints survivants
qui ont d'ores et déjà utilisé ce dispositif.
Les demandes de certains médecins rapatriés d'Algérie, qui viennent en
supplément de cette décision favorable de la CARMF, ne sauraient être
satisfaites sans une profonde modification de la réglementation des rachats,
qui est complexe, vous l'avez constaté, monsieur le sénateur. En l'état actuel
des textes, les possibilités de rachat ne sont ouvertes qu'aux médecins nés
avant 1922 ou ayant adhéré à l'ASV avant 1972 lorsque ce régime était
facultatif et aux conditions de rachat en vigueur au moment où la demande est
présentée, ce que je peux comprendre.
En outre, accéder au souhait d'un rappel complet d'arrérages depuis le début
de la retraite nécessiterait de modifier la loi sur la prescription
quinquennale puisque de nombreux médecins rapatriés ont cessé leur activité
depuis plus de cinq ans. Les problèmes juridiques sont donc d'autant plus
complexes qu'il ne saurait être question d'introduire des dispositions qui
pourraient être jugées discriminatoires par les médecins métropolitains.
Enfin, vous n'ignorez pas que le coût de l'opération pourrait se révéler très
onéreux alors même que le redressement du régime de l'ASV, confronté à la
perspective d'une cessation de paiement, va exiger des efforts financiers
importants de la part de l'ensemble des actifs et des retraités.
A titre d'exemple, je rappelle que, avec le dispositif actuel, un médecin âgé
de quatre-vingts ans en 1997 a pu bénéficier, avec un rachat payé 15 180
francs, d'un rappel de plus de 132 600 francs, et qu'accéder à la demande de
rappel complet depuis le début de la retraite conduirait à lui verser un rappel
supplémentaire de 200 000 francs.
Le Gouvernement souhaite donc traiter ce dossier - les choses ont avancé
depuis ma précédente réponse, mais, je le répète, la situation est complexe -
en concertation avec l'ensemble des parties intéressées et saisira ainsi
prochainement le conseil d'administration de la CARMF pour qu'il examine votre
proposition et donne son avis sur les mesures supplémentaires de régularisation
qu'il faut envisager.
Je regrette de ne pouvoir vous faire une réponse plus optimiste, mais elle est
juridiquement complète. Voilà où nous en sommes, monsieur le sénateur.
M. Francis Giraud.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Giraud.
M. Francis Giraud.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie des précisions que vous m'avez
apportées et de la clarté avec laquelle vous exposez ces difficultés
administratives.
Nous sommes médecins tous les deux. Attendre la disparition du patient pour
appliquer le traitement me paraît inconvenant, d'autant que plus de trente-sept
ans se sont déjà écoulés. Aussi, j'espère que le Gouvernement agira auprès de
la CARMF pour que justice soit rendue à ces médecins, qui n'ont pas démérité.
SYSTE`ME DE PERCEPTION DU SUPPLÉMENT
DE LOYER DE SOLIDARITÉ
M. le président.
La parole est à M. Lassourd, auteur de la question n° 373, adressée à M. le
secrétaire d'Etat au logement.
M. Patrick Lassourd.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le problème que je soulève aujourd'hui revêt, à
mes yeux, une importance majeure pour l'aménagement du territoire. Premier
facteur d'insertion, le logement contribue en effet très largement à
l'équilibre social, économique et démographique de nos départements.
L'excellent principe du « surloyer », dont le dispositif a été réaménagé par
la loi Périssol en 1996, répondait au double objectif d'équité et de mixité
sociales. Il visait à rendre obligatoire un supplément de loyer auprès des
locataires d'HLM dont les revenus dépassent de 40 % le plafond de ressources
autorisées, laissant aux organismes d'HLM des marges d'appréciation locale,
puisque la perception du surloyer est facultative lorsque les ressources
dépassent de 10 à 40 % le plafond.
Le Gouvernement d'alors témoignait ainsi son souci de maintenir, avec une
relative souplesse, une population mixte dans les HLM, afin de répondre au
mieux aux besoins et réalités du terrain.
Cette appréciation des situations locales laissée aux organismes d'HLM
constituait la condition de réussite du système. Mon expérience de président de
l'OPAC - Office public d'aménagement et de construction - d'Ille-et-Vilaine me
le confirme tous les jours.
Les problèmes de logement, qui touchent une matière éminemment sociale et
humaine, doivent en effet être appréhendés de la manière la plus réaliste
possible. Seule une démarche souple et de proximité peut donc être efficace.
Or, le Gouvernement auquel vous appartenez, monsieur le secrétaire d'Etat, a
considérablement altéré le dispositif, en le rendant de plus en plus complexe
et détaché des réalités du terrain.
Je veux d'abord parler de la taxe-contribution que doivent régler à l'Etat
tous les organismes d'HLM, fondée non pas sur la recette réelle des surloyers,
mais sur des critères définis arbitrairement.
Ensuite, je regrette les dernières modalités de calcul des surloyers, qui
aboutissent à les minorer, alors même que la contribution à l'Etat est
maintenue à un niveau identique.
Cette bureaucratisation a finalement détourné le surloyer de son objectif de
solidarité et d'équité. Les organismes d'HLM doivent désormais faire face à des
frais d'enquête de plus en plus lourds - pour l'OPAC d'Ille-et-Vilaine, le coût
des 12 000 enquêtes est de l'ordre de 100 000 francs - qui, conjugués au
paiement de la taxe, ne favorisent pas leur équilibre budgétaire. Cela ne peut
être que dommageable pour les candidats comme pour les occupants des HLM.
C'est pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, je propose que la capacité
d'appliquer le surloyer, tant dans son principe que dans ses modalités, soit
laissée à l'appréciation des conseils d'administration des HLM. Il faut croire
en leur sagesse et en leur connaissance des données locales.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat au logement.
Monsieur le sénateur, je réponds d'autant
plus volontiers à votre question que votre qualité de président d'organisme
d'HLM ne peut que faciliter notre compréhension mutuelle.
Tout ce qui concerne la taxe, l'assiette et les enquêtes de ressources dépend
de décisions antérieures à ma prise de fonction.
Le supplément de loyer de solidarité a toujours trouvé sa justification au
croisement de deux préoccupations, d'une part, la mixité sociale, par le
maintien dans le parc d'HLM des ménages dont les revenus ont augmenté, la
légitimité de ce maintien étant l'acquittement d'un supplément de loyer de
solidarité ; d'autre part, l'équité sociale, selon laquelle les locataires dont
les ressources dépassent sensiblement les plafonds acquittent des loyers très
élevés ou, plus exactement, soit un peu moins aidés par l'Etat qu'ils ne
l'étaient lorsque leurs ressources étaient moindres.
Il a semblé au Gouvernement - et j'en appelle à votre réflexion, monsieur le
sénateur - que ces deux objectifs avaient été partiellement perdus de vue. Des
ménages dont les ressources étaient légèrement supérieures au plafond pouvaient
très bien avoir à supporter un supplément de loyer de solidarité au taux fort,
car il n'y avait aucun encadrement, et quelques organismes n'avaient pas fait
dans la nuance ! De trop fortes différences dans les barèmes appliqués créaient
sur le territoire national une grande disparité de traitement que rien ne
justifiait et qui contredisait bien souvent l'ojectif de mixité sociale.
Certains barèmes trop dissuasifs ne pouvaient, en effet, que pousser
brutalement des ménages des classes « moyennes basses » à quitter le parc
social.
Enfin, le produit du supplément de loyer de solidarité servait à financer le
FSL, le Fonds de solidarité pour le logement : la solidarité face aux
difficultés d'accès ou de maintien dans le logement, notamment en matière
d'impayés de loyers, que ce soit dans le parc social ou le parc privé, revenait
à demander un effort à une fraction des locataires du seul parc social.
Le Gouvernement et le Parlement ont pris, dès 1998, trois types de mesures
pour mettre fin à ces défauts et à ces dérives du système.
Premièrement, le retour à un financement du FSL reposant sur une vraie
solidarité nationale a été décidé. Depuis la loi de finances pour 1998, le FSL,
dont les moyens ont été fortement augmentés, est financé par le budget général
et non plus par le SLS.
Deuxièmement, les plafonds pour les petits ménages ont été relevés par
l'arrêté du 28 juin 1998. Le relèvement concerne les ménages sans enfant à
charge ou avec un seul enfant à charge, qui étaient très pénalisés par le
système précédent.
De même a été supprimée la distinction opérée entre les ménages en fonction de
l'exercice ou non d'une activité par le conjoint, distinction qui entraînait un
SLS élevé pour de nombreux couples comportant un inactif, en particulier un
retraité, et qui était à l'origine de changements de situation assez brutaux
quand l'un des deux membres du ménage devenait inactif. Grâce à ces décisions,
61 % des ménages sont actuellement éligibles au parc HLM en fonction de leurs
ressources, contre 55 % auparavant.
Troisièmement, l'encadrement - et non pas l'uniformisation - des barèmes a été
réalisé par la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions
et le décret du 15 novembre 1998. Le seuil de déclenchement du SLS pour
dépassement des plafonds a été relevé de 10 % à 20 %, pour éviter les problèmes
de cette taxation au moindre dépassement, et les valeurs des éléments servant
au calcul du SLS ont été plafonnées afin d'assurer aux locataires un traitement
équitable, quel que soit le bailleur.
Le relèvement des plafonds et du seuil de déclenchement du SLS ont fait passer
de 550 000 à environ 300 000 le nombre de ménages susceptibles d'être concernés
par le SLS, qui est ainsi mieux ciblé sur les ménages du parc social ayant les
revenus les plus élevés.
L'application des nouvelles dispositions a représenté, j'en conviens, un
certain travail pour les organismes d'HLM ; mais celui-ci a été très utile. En
effet, en fixant des règles socialement justes, harmonisées et stables, les
décisions qui ont été prises ne « vident pas le SLS de sa substance ». Elles
renforcent, au contraire, son rôle comme élément d'une politique favorisant la
mixité dans le parc social, mixité dont la nécessité n'est plus à démontrer.
Telles sont les précisions que je souhaitais vous apporter sur l'esprit de la
démarche suivie, monsieur le sénateur. J'espère que vous pourrez convenir que
cette dernière n'a pas détourné de son objet le dispositif mais que, en le
rendant plus juste, elle va sûrement aider à le rendre plus acceptable et plus
efficace dans ses effets.
M. Patrick Lassourd.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd.
Monsieur le ministre, je vous donne acte des modifications que vous avez
apportées en matière de logement social et qui, comme le relèvement des
plafonds notamment, constituent à mon avis des progrès. Ainsi, désormais, 61 %
des ménages, au lieu de 55 % auparavant, sont éligibles aux organismes d'HLM.
Je vous rappelle cependant qu'en 1980 80 % des ménages en France étaient
éligibles à un logement HLM et que la situation s'était donc considérablement
dégradée dans les années ultérieures.
Il n'était pas normal - j'en suis moi aussi convaincu - de financer le FSL par
le supplément de loyer de solidarité. Cette mesure, bien que prise par un
gouvernement que je soutenais, ne me paraissait pas judicieuse.
Cela dit, monsieur le secrétaire d'Etat, vos propos ne m'ont pas complètement
convaincu. En effet, les principes d'équité et de mixité sociale doivent être
respectés de façon très forte. Or, d'une certaine manière, le supplément de
loyer de solidarité y contribuait. Il apparaissait en particulier comme la
contrepartie acquittée par tout locataire afin de pouvoir rester dans son
logement, quelle que soit l'évolution de ses revenus.
Actuellement, certains locataires disposant de peu de ressources sont choqués
de constater que d'autres locataires percevant quelquefois des revenus
importants bénéficient toujours d'un logement HLM parce qu'ils occupent ce
dernier depuis longtemps. Ainsi, je peux vous citer le cas de personnes qui
habitent depuis vingt ans un logement HLM à Rennes et qui possèdent une
résidence secondaire en pleine propriété à Saint-Malo.
Il faudrait donc, à mon avis, que les conseils d'administration fixent le
montant du surloyer de solidarité, dans une fourchette bien entendu définie et
dans un cadre déterminé par l'Etat, de façon que la compétence et la
responsabilité de ce dernier soient affirmées sans ambiguïté. Ces surloyers
pourraient être fixés, par exemple, en fonction du niveau des loyers du secteur
privé, qui sont très différents selon le lieu d'implantation des logements - en
secteur rural, urbain ou suburbain - selon la date de construction de
l'immeuble, la date d'entrée du locataire dans les lieux, selon que l'immeuble
a ou non été réhabilité, et aussi selon les services rendus - présence d'un
gardien, d'espaces verts - et le lieu géographique dans la ville. Tous ces
éléments pourraient inspirer les conseils d'administration pour les modalités
d'application d'un surloyer.
Nous pourrions même refuser toute application du supplément de loyer de
solidarité pour éviter, par exemple, des phénomènes de ghettoïsation.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je prends acte de votre réponse. Mais je crois
sincèrement que les nouvelles modalités de calcul ne permettront pas
d'atteindre les objectifs de mixité et d'équité qui sont les vôtres.
M. le président.
Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la conférence des
présidents doit se réunir à douze heures quinze. Or, sept questions sont
inscrites à notre ordre du jour.
Je me permets donc de vous rappeler que l'auteur de la question dispose de
trois minutes pour poser celle-ci et de deux minutes pour répondre au
Gouvernement.
En respectant cette règle, nous devrions pouvoir suspendre notre séance à une
heure raisonnable.
RÉCIPROCITÉ ET RESPECT DES ACCORDS
BILATÉRAUX EN CÔTE D'IVOIRE
M. le président.
La parole est à M. Durand-Chastel, auteur de la question n° 387, adressée à M.
le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.
M. Hubert Durand-Chastel.
Ma question, adressée à M. le ministre délégué à la coopération et à la
francophonie, porte sur le problème malheureusement récurrent de la réciprocité
et du respect des accords bilatéraux avec certains pays où nos compatriotes
résident, notamment en Afrique.
Il s'agit ici des conditions de délivrance des cartes de résident pour
étrangers en Côte d'Ivoire et de leurs conséquences pour la communauté
française de ce pays. Un décret du 4 août 1998 du gouvernement ivoirien a en
effet triplé le coût de la carte de résident des ressortissants étrangers, ce
dernier passant de 50 000 francs CFA à 150 000 francs CFA, soit 1 500 francs
français.
Cette décision intervient alors que, contrairement à ce que prévoient les
accords bilatéraux en vigueur, les Français sont contraints de renouveler tous
les ans leur carte de résident. Or, la convention conclue entre la République
de Côte d'Ivoire et la République française sur la circulation des personnes,
signée à Paris le 8 octobre 1976 - décret du 9 juin 1977 - prévoit en effet, en
son article 6, que, à l'issue de la première délivrance d'une carte de résident
d'un an, le titulaire de cette carte pourra obtenir une carte de résident
valable trois ans renouvelable.
Au vu de ces faits préjudiciables à nos compatriotes, je souhaite savoir si le
gouvernement français compte intervenir vigoureusement auprès du gouvernement
ivoirien pour que la réciprocité soit respectée et que les accords bilatéraux
soient enfin appliqués.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat au logement.
Monsieur le sénateur, M. Josselin, en
déplacement à l'étranger, vous prie de bien vouloir l'excuser. Il m'a chargé de
vous indiquer que son attention a été appelée à plusieurs reprises, tant par
les services français que par les représentants du Conseil supérieur des
Français de l'étranger en Côte d'Ivoire, sur les problèmes que vous venez
d'évoquer.
Compte tenu des difficultés rencontrées par nos ressortissants - augmentation
importante des tarifs des cartes de séjour et impossibilité d'obtenir des
titres de séjour de longue durée - M. Josselin a demandé aux autorités
ivoiriennes, qui ont accepté, d'inscrire cette question à l'ordre du jour de la
deuxième session de la grande commission mixte franco-ivoirienne, qui s'est
tenue à Abidjan les 14 et 15 décembre 1998.
M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie a par ailleurs
demandé à la direction des Français à l'étranger du ministère des affaires
étrangères, également saisie du problème, de dépêcher l'un de ses représentants
à Abidjan pour diriger la délégation française aux travaux de la
sous-commission
ad hoc
sur les questions consulaires, qui s'est tenue à
Abidjan pendant la commission mixte et à laquelle participait également le
consul général de France en poste à Abidjan.
Cette sous-commission devait rechercher une solution satisfaisante au problème
soulevé et, en sa qualité de coprésident de la commission mixte, mon collègue a
été particulièrement attentif aux résultats des travaux de cette
sous-commission.
Pendant son séjour à Abidjan, il a été reçu le 14 décembre 1998 en audience
par le président ivoirien, M. Konan Bédié, qui a d'ailleurs abordé de lui-même
la question des cartes de séjour des résidents français. Le président Bédié
avait donc bien connaissance de la réalité de cette difficulté.
Faisant référence aux principes de réciprocité et d'égalité de traitement, le
Président Bédié a promis que les conditions de durée et de coût de la carte de
séjour des Français en Côte d'Ivoire seraient modifiées pour se rapprocher
précisément des conditions que la France fait aux ressortissants ivoiriens.
Nous ne pouvons, je crois, que nous satisfaire de la réponse d'ouverture que
le chef de l'Etat ivoirien a faite et dont ont été informés, au sortir de cette
audience, les membres de la communauté française invités à la résidence de
France par notre ambassadeur à Abidjan. M. Josselin en a également informé les
représentants élus du Conseil supérieur des Français de l'étranger en
Côte-d'Ivoire, le 15 décembre 1998.
Cette décision d'ouverture a été entérinée dans le procès-verbal de la
sous-commission sur les questions consulaires et dans le communiqué final de la
commission mixte, dont M. Josselin souhaite que je vous cite les terme précis
:
« S'agissant de la convention bilatérale relative à la circulation et au
séjour des personnes, signée à Abidjan le 21 septembre 1992 et entrée en
vigueur le 1er avril 1995, les deux parties ont rappelé leur attachement à cet
élément fondamental de la relation entre les deux Etats, notamment dans la
perspective de la mise en place d'un partenariat renforcé en matière de
coopération.
« Dans cet esprit, et pour répondre aux sollicitations de la partie française,
la partie ivoirienne a marqué son ouverture en matière de délivrance de cartes
de séjour sur une base pluriannuelle et son souci d'appliquer les principes de
réciprocité et d'égalité à ce sujet comme en matière de tarifs, qui pourraient,
ultérieurement, faire l'objet d'ajustements périodiques concertés. Elle a
donné, sur ces deux points, les assurances d'une mise en oeuvre la plus rapide
possible. »
La représentation française en Côte d'Ivoire et ses interlocuteurs au
ministère ivoirien des affaires étrangères et au Conseil national de sécurité
sont convenus de dégager très rapidement les modalités pratiques de cet accord,
qui pourrait, à brève échéance, se concrétiser de la manière suivante : nos
ressortissants ayant déjà acquitté 150 000 francs CFA seraient considérés
l'avoir fait pour une période de trois ans, la carte de séjour étant de fait
pluriannuelle, ou seraient remboursés du trop-versé si la validité de la carte
ne demeurait qu'annuelle ; pour les paiements à venir, 50 000 francs CFA
seulement seraient exigés, la validité de la carte restant dans ce cas
annuelle.
Il appartiendra naturellement à notre représentation en Côte d'Ivoire de
veiller à l'application de ces décisions, qui seront sans nul doute de nature à
apaiser les inquiétudes de la communauté française en Côte d'Ivoire,
inquiétudes dont vous venez de vous faire l'écho, monsieur le sénateur.
M. Hubert Durand-Chastel.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Durand-Chastel.
M. Hubert Durand-Chastel.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'Etat.
Il apparaît donc plus que jamais urgent de ne pas toujours attendre et
d'exiger le respect des accords passés, afin que des instructions précises
soient communiquées aux différents commissariats ivoiriens, dans les meilleurs
délais. Il s'agit en effet d'éviter tous types de débordements susceptibles de
nuire aux bonnes relations entretenues jusqu'à présent entre la communauté
française et les Ivoiriens.
J'ajoute que nombre de résidents des Etats-Unis d'Amérique en Côte d'Ivoire
n'ont pas de carte de résident et ne s'en préoccupent pas. Il est inutile que
notre pays signe des accords laborieux si nous ne sommes pas décidés à en
exiger la pleine application !
DEVENIR DU CENTRE NATIONAL D'ÉTUDES
DES TÉLÉCOMMUNICATIONS
M. le président.
La parole est à M. Duffour, auteur de la question n° 363, adressée à M. le
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Michel Duffour.
Monsieur le secrétaire d'Etat, les incertitudes qui pèsent sur le devenir du
Centre national d'études des télécommunications, le CNET, inquiètent nombre de
salariés de mon département des Hauts-de-Seine, mais aussi, plus largement, du
pays tout entier.
Depuis plus de cinquante ans, cet organisme public a permis d'assurer
l'indépendance technologique de notre pays en aidant au développement de
nouvelles technologies de pointe.
Or, dans deux sites des Hauts-de-Seine, Issy-les-Moulineaux et Bagneux, des
missions ont été abandonnées, des fermetures d'équipements et de laboratoires
sont programmées.
Tout retard pris dans le développement des technologies permettant d'élargir
la capacité de produire, de diffuser et de partager l'information risque de
pénaliser lourdement l'avenir de notre pays.
La question des missions de service public, quel que soit le statut de
l'opérateur France Télécom, est déterminante pour maintenir une indépendance
d'intervention dans un domaine de pointe et pour ses conséquences en matière
d'emplois très qualifiés.
Il ne serait pas souhaitable que l'ouverture du capital entraîne une logique
de gestion exclusivement orientée vers la satisfaction des marchés.
Aucune décision n'a encore été prise, à ma connaissance, mais il semble que
des incitations fortes existent du côté de la direction de France Télécom pour
réduire les effectifs dans le domaine de la recherche industrielle et dans
celui de la recherche fondamentale. S'il est naturel que France Télécom cherche
des alliances nationales ou européennes dans la perspective d'un développement,
cela ne peut se traduire par un affaiblissement dans des domaines aussi
essentiels.
France Télécom, même avec un capital ouvert, reste, à mes yeux, un opérateur
public ; il ne peut donc se comporter comme si aucune mission de service public
ne lui incombait.
L'intérêt général, le besoin d'entrer dans la société d'information du xxie
siècle sans exclure personne, la nature de service public des missions méritent
que le Gouvernement s'attache à garantir le potentiel technologique du CNET, la
pérennité de ses établissements et le maintien de ses emplois.
Aussi souhaiterais-je connaître les mesures et les initiatives que le
Gouvernement compte prendre à ce sujet.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat au budget.
Monsieur le sénateur, vous vous préoccupez
de l'avenir du Centre national d'études des télécommunications, qui est - vous
l'avez rappelé - le centre de recherche et de développement de France
Télécom.
La recherche française dans le domaine des télécommunications - vous l'avez
également rappelé - se situe au tout premier rang mondial. Au sein de cette
recherche, le CNET a à son actif des découvertes tout à fait majeures qui ont
été adoptées à travers le monde - je pense notamment à la norme GSM pour le
téléphone mobile et à la communication ATM, dont les spécialistes reconnaissent
l'intérêt.
Le Gouvernement a demandé à deux experts, MM. Didier Lombard et Gilles Kahn,
de réfléchir à l'avenir de la recherche. Ces deux experts ont proposé la
création d'un réseau national de recherche en télécommunications, doté de
moyens, fédérant l'ensemble des laboratoires publics existants - le CNET,
l'Institut national de recherche en informatique et en automatique, l'INRIA, le
Commissariat à l'énergie atomique, le CNRS, les écoles d'ingénieurs, les
universités - et associant à cet effort public les laboratoires des industriels
et des opérateurs de télécommunication de façon que, face à une concurrence
internationale extrêmement forte, nous ayons un potentiel maximal.
En décembre 1997, le Gouvernement a décidé de mettre en place un tel réseau à
l'échelle nationale. Un comité d'orientation composé de représentants de
l'Etat, des organismes de recherche et des entreprises a été nommé et le
Gouvernement a accordé au réseau un soutien spécifique de 260 millions de
francs en 1998, somme qui a été reconduite en 1999.
Le réseau national permet d'orienter fortement la recherche amont en
télécommunications en France, tout en permettant un dialogue plus large et une
coopération plus étroite entre la recherche publique et les entreprises du
secteur.
Une concurrence forte se développe dans ce qu'on appelle les secteurs à valeur
ajoutée des télécommunications. Il est donc important que notre dispositif de
recherche soit réorienté pour donner à notre pays, au service public et à
l'emploi le maximum d'atouts.
Le Gouvernement est très attaché au maintien et au renforcement de la
recherche en télécommunications en France, recherche dont le Centre national
d'études des télécommunications constitue, à l'évidence, le coeur. Le CNET va
travailler en liaison avec les laboratoires de recherche publique, mais aussi
avec les industriels, de façon que notre activité dans le domaine des
télécommunications réponde, certes, à l'exigence de service public, sur
laquelle vous avez eu raison d'insister, mais aussi à celles de compétitivité
et de création d'emplois. Le Gouvernement a demandé au président de France
Télécom d'y veiller particulièrement.
M. Michel Duffour.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je prends acte de votre réponse, que je
communiquerai aux salariés et aux syndicats du CNET. Je prends également acte
de votre détermination et de votre engagement.
Néanmoins, mes inquiétudes subsistent, car l'importance de l'entreprise France
Télécom est telle que le choix stratégique fait par ses dirigeants est tout à
fait déterminant en ce domaine. J'ai toutefois bien noté, à cet égard, votre
dernière phrase.
RÉGIME FISCAL DES ÉTABLISSEMENTS
D'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR PRIVÉS
M. le président.
La parole est à M. Hugot, auteur de la question n° 383, adressée à M. le
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Jean-Paul Hugot.
Monsieur le secrétaire d'Etat, ma question concerne l'assujettissement aux
impôts commerciaux des établissements d'enseignement supérieur privés organisés
en association.
Dans sa circulaire du 14 septembre dernier, relative au développement de la
vie associative, Lionel Jospin affirmait : « J'entends que la politique du
Gouvernement reconnaisse et promeuve le développement d'une vie associative
indispensable à une démocratie moderne et nécessaire à des activités d'utilité
sociale de plus en plus nombreuses. »
Je souhaite attirer votre attention, monsieur le secrétaire d'Etat au budget,
sur la contradiction apparente entre ces propos et la politique menée par le
Gouvernement s'agissant notamment des établissements d'enseignement supérieur
que je viens d'évoquer.
La nouvelle instruction fiscale portant sur le régime fiscal des associations,
publiée le 15 septembre 1998 au
Bulletin officiel
des impôts par
vous-même, met en effet en place un dispositif d'assujettissement des
associations aux impôts commerciaux.
Permettez-moi de vous alerter plus particulièrement sur les conséquences de
l'application de ce dispositif aux établissements d'enseignement supérieur
privés organisés en association et régis par la loi du 1er juillet 1901.
L'utilité sociale de l'activité des associations, justement mise en exergue
par M. Jospin, n'est plus à démontrer en matière d'établissements
d'enseignement supérieur. En effet, à l'heure où nombreux sont ceux, notamment
parmi les jeunes, qui sont confrontés à des difficultés majeures en termes
d'orientation, de formation et, en conséquence, d'accès à l'emploi, il est
indispensable que toutes les initiatives prises par des personnes privées pour
remédier à ces difficultés et présentant, du même coup, une utilité sociale
soient encouragées avec vigueur.
D'ailleurs, outre cette utilité sociale commune aux secteurs public et privé
de l'enseignement, l'initiative privée constitue en la matière -
reconnaissons-le - un complément indispensable aux offres de formation
présentées par le secteur public.
Cette initiative privée est le garant à la fois de la pluralité dans notre
démocratie et de l'efficience de notre modèle de formation. Les Français
rappellent d'ailleurs régulièrement leur attachement à cet équilibre dans le
système éducatif.
Pourtant, l'application de l'instruction susvisée aux établissements en cause
constitue une véritable entrave à l'accomplissement des missions qui sont les
leurs, entrave qui vient d'ailleurs s'ajouter, pour un certain nombre d'entre
eux, à des baisses importantes de subventions du ministère de l'éducation
nationale.
Néanmoins, je n'imagine pas, monsieur le secrétaire d'Etat, que votre
gouvernement ait la volonté de priver le pays de l'initiative privée en matière
d'enseignement supérieur !
Aussi, en raison de son incontestable utilité sociale et au regard de
l'indispensable formation de nos compatriotes et de notre jeunesse, à laquelle
travaillent aussi bien le secteur privé que le secteur public, j'aimerais
savoir ce que le Gouvernement entend faire pour, au minimum, reconsidérer la
mesure fiscale qui, frappant les établissements d'enseignement supérieur privés
organisés en association, menace à la fois l'offre de formation et l'équilibre
de l'enseignement supérieur français.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat au budget.
Monsieur le sénateur, évoquant la fiscalité
des associations qui gèrent des établissements d'enseignement supérieur privé,
vous avez fait référence à l'instruction fiscale que j'ai effectivement publiée
le 15 septembre 1998 et qui porte sur la fiscalité de l'ensemble des
associations dans leur diversité.
Je vous rassure tout de suite : il n'est nullement question, dans cette
instruction fiscale, de remettre en cause en quoi que ce soit un principe aussi
fondamental que celui de la liberté de l'enseignement.
Cette instruction, je le rappelle, a pour objectif premier de clarifier les
règles fiscales applicables aux associations. En effet, lorsque nous sommes
arrivés au Gouvernement, en juin 1997, très nombreux étaient les contentieux
fiscaux liés au fait que la frontière entre activités désintéressées et
activités lucratives n'était pas claire ; si le principe était bien posé,
depuis la loi de 1901, que les associations étaient présumées être à but non
lucratif, avec le temps et du fait de la pratique des difficultés avaient
surgi.
Nous avons donc voulu à la fois clarifier les règles et réaffirmer le principe
selon lequel les associations qui n'exercent aucune activité commerciale sont
exonérées de plein droit des impôts commerciaux.
En ce qui concerne plus particulièrement les établissements d'enseignement
supérieur privés, il convient de distinguer deux cas.
Soit ces établissements d'enseignement supérieur privés concurrencent des
entreprises qui exercent exactement dans le même domaine - ce n'est pas le cas
le plus fréquent - et ils sont alors assujettis aux impôts commerciaux de la
façon que je préciserai dans un instant.
Soit aucune entreprise - j'insiste sur le mot « entreprise » - n'est
concurrencée par lesdites associations - c'est le cas général - et
l'exonération des impôts commerciaux est alors de plein droit. C'est là un
principe rassurant qu'il fallait réaffirmer.
Imaginons donc - j'y reviens - qu'il y ait effectivement concurrence avec une
entreprise qui fournit les mêmes prestations au voisinage de l'association.
Même dans ce cas, ces établissements ont une fiscalité avantageuse. Ils sont
en effet exonérés de taxe professionnelle s'ils ont passé une convention en
application de la loi du 12 novembre 1968 ou s'ils ont fait l'objet d'une
reconnaissance d'utilité publique.
Ils sont par ailleurs exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'ils
exercent leur activité dans le cadre des textes énumérés par l'article 261-4-4
du code général des impôts. C'est peut-être quelque peu technique, mais au
moins la réponse a-t-elle le mérite d'être précise !
Il me semble donc que, y compris en ce qui concerne les établissements
d'enseignement supérieur privés, non seulement il n'y a aucune atteinte au
principe de la liberté de l'enseignement mais que ces associations pourront
aussi en pratique, d'ici au 1er mai prochain, examiner leur cas, solliciter les
conseils qu'elles souhaitent et opter ainsi pour un statut fiscal qui, dans
l'immense majorité des cas, leur sera plus favorable que par le passé.
M. Jean-Paul Hugot.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Hugot.
M. Jean-Paul Hugot.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je prends acte de votre réponse. Je note que
les distinctions techniques auxquelles vous avez procédé viennent bien
circonscrire le champ d'application de la mesure.
Comme vous le proposez, les mois qui viennent pourront être consacrés à un
ajustement individualisé de l'approche technique fiscale dont vous parlez. Il
faut savoir qu'au-delà même des formations, dans leur dimension technicienne
dispensée par ces établissements, la préoccupation de maintenir des foyers
d'initiatives privés devrait amener à arbitrer en cas de doute en faveur du
développement de ces institutions.
RÉGIME FISCAL DES ASSOCIATIONS ORGANISATRICES
DE SPECTACLES
M. le président.
La parole est à M. Dufaut, auteur de la question n° 385, adressée à M. le
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Alain Dufaut.
Monsieur le secrétaire d'Etat, ma question concerne la même instruction
fiscale que celle que vient d'évoquer à l'instant mon collègue M. Jean-Paul
Hugot, mais se rapporte cette fois aux préoccupations exprimées par les
responsables des associations organisatrices de spectacles au regard des
conséquences de la réforme du régime fiscal des associations de la loi de
1901.
En effet, l'instruction du 15 septembre 1998, dont le louable objectif - vous
venez de le rappeler - était de clarifier les structures issues de la loi de
1901 suscite un certain nombre d'interrogations pour le cas particulier des
associations qui gèrent des théâtres locaux ou des festivals, et bénéficient à
ce titre de subventions de collectivités publiques.
Il est permis de s'interroger en particulier sur la qualification juridique de
leurs activités. Si ces associations sont reconnues comme étant à but lucratif,
elles verront leurs excédents assujettis à l'impôt sur les sociétés au taux de
36,66 %. Dans le cas où elles seraient considérées à but non lucratif, les
impôts et taxes qu'elles auraient à acquitter se révèleraient sans doute encore
plus importants puisque le remboursement des frais de TVA deviendrait
impossible et les taxes sur les salaires augmenteraient sensiblement.
Cette situation risque de mettre en cause l'existence même de certaines de ces
structures, ce qui entre assurément en contradiction totale avec l'esprit ayant
présidé à l'élaboration de l'instruction précitée.
Une nouvelle fois, monsieur le secrétaire d'Etat - et nous le déplorons - ce
sont les collectivités locales qui constateront un désengagement de l'Etat à
leur détriment, puisque elles seront sans doute condamnées à abonder le budget
des théâtres et festivals si elles ne veulent pas que les structures cessent
leur activité.
Cela est particulièrement vrai dans mon département, le Vaucluse, terre de
culture, où ont pris forme, vous le savez, trois des plus célèbres festivals ;
je veux parler, bien sûr, des Chorégies d'Orange, du festival de
Vaison-la-Romaine et, bien entendu, du festival d'Avignon.
Vous comprendrez, monsieur le secrétaire d'Etat, que je souhaite connaître
votre position sur ce problème et les mesures que vous envisagez de prendre
pour le résoudre le plus rapidement possible.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat au budget.
Monsieur le sénateur, votre question porte,
sous un autre angle, sur la même instruction fiscale du 15 septembre dernier,
dont l'objectif, je le rappelle, est d'accroître la sécurité fiscale des
associations en général - je vais essayer de vous le montrer - et des
associations organisatrices de spectacles en particulier.
Avant d'aborder le cas spécifique important que vous avez cité, je souhaite
vous rappeler deux mesures favorables aux associations qui figurent dans le
budget pour 1999.
Premièrement, les droits des associations seront renforcés en cas de litige
avec l'administration fiscale ; le débat sera donc plus équilibré.
Deuxièmement - c'est un point sur lequel j'insiste parce qu'il est très
important pour les associations qui organisent des spectacles - les
collectivités locales ont désormais la possibilité d'exonérer totalement de
taxe professionnelle les associations culturelles.
En ce qui concerne les associations organisatrices de spectacles, il faut bien
reconnaître que certaines d'entre elles s'étaient placées dans une position
ambiguë : elles ne payaient aucun impôt commercial mais, dans le même temps,
elles déduisaient la taxe sur la valeur ajoutée qu'elles payaient. Cette
situation n'était conforme ni à la loi ni au droit communautaire.
Ces associations ont aujourd'hui jusqu'au 1er avril prochain - elles pourront
s'entourer des conseils qu'elles souhaitent - pour opter entre deux
possibilités.
La première possibilité qui leur est offerte est d'être exonérées entièrement
des impôts commerciaux si elles n'exercent pas d'activité commerciale qui soit
concurrente d'une activité d'entreprise. Dans ce cas-là, elles ne pourront pas
déduire la TVA.
Elles peuvent - seconde possibilité - décider d'être imposables aux impôts
commerciaux si elle exercent une activité concurrentielle. Toutefois, je
rappelle que le taux de la taxe sur la valeur ajoutée des associations
organisatrices de spectacles est de 2,1 % - taux très modéré - alors que leurs
achats sont en général soumis au taux de 20,6 %. En outre, elles pourront
éventuellement - cela dépend des collectivités locales - être exonérées de taxe
professionnelle. Quant à l'impôt sur les bénéfices, il est rare que ces
associations enregistrent des soldes positifs ; le problème ne se pose donc pas
vraiment.
Il me semble, monsieur Dufaut, vous avoir apporté des précisions qui montrent
que, dans un cas comme dans l'autre, les associations organisatrices de
spectacles pourront opter pour un statut fiscal clair et, je le pense, dans
l'ensemble, tout à fait avantageux.
M. Alain Dufaut.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Dufaut.
M. Alain Dufaut.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'Etat. Je tiens à
rappeler que les spectacles à caractère culturel sont loin de s'autofinancer.
Le festival d'Avignon, par exemple, en dépit de son budget très important,
perçoit une subvention d'équilibre de 60 %. Il y a un véritable problème.
Il conviendra, au-delà des mesures que vous avez évoquées et que nous
connaissons déjà - la ville d'Avignon a déjà exonéré le festival de taxe
professionnelle - d'affiner les données de manière à rassurer les gens qui
s'occupent de l'organisation de festivals, car ils sont souvent désemparés, ne
sachant pas très bien quelle est pour eux la meilleure option à partir des
textes actuels. Il faut plus de précisions puis nous trancherons.
prélèvement de la taxe d'habitation
M. le président.
La parole est à M. Sérusclat, auteur de la question n° 386, adressée à M. le
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Franck Sérusclat.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je modifierai un peu l'énoncé de ma question
par rapport au texte écrit que j'avais déposé.
Nous représentons tous, tout au moins la plupart d'entre nous, un foyer
fiscal, sur lequel est prélevé l'impôt sur le revenu. D'ailleurs, ce
prélèvement est effectué de telle sorte que, en général, dès le neuvième ou le
dixième mois de l'année, l'impôt a été réglé dans sa totalité ; l'Etat dispose
ainsi d'une avance par rapport à ses propres besoins. Mais cela permet aussi au
contribuable de bénéficier de trois mois pendant lesquels il a moins de charges
à payer.
Je trouve cependant curieux que ce même foyer fiscal serve de référence pour
le prélèvement des taxes locales. Celles-ci peuvent, dans certains cas, être
réparties au sein du foyer, ou être à la charge du propriétaire de
l'habitation, qui peut être la femme et non le chef de famille. Cette notion de
« chef de famille », d'ailleurs, existe-t-elle encore avec l'évolution des
relations dans les couples ? Pourtant, les services fiscaux s'y référent
encore. On a ainsi la surprise de constater que la taxe locale d'habitation est
prélevée sur le compte personnel du mari, alors que la résidence est propriété
de la femme. En outre, cette pratique ne tient pas compte du régime matrimonial
des époux, notamment s'ils se sont mariés sous le régime de la séparation de
biens.
Ce peut être gênant, inattendu, car on peut avoir prévu le paiement de l'impôt
sur le revenu et pas celui des taxes locales. Et l'on est dépourvu de moyens
pour faire face à d'autres charges.
J'ajoute que, procéder ainsi, c'est accepter la signature - qu'elle ne
possède pas - de la femme sur le compte-chèques du mari.
Je trouve ces procédés quelque peu abusifs. J'aimerais en connaître les
raisons : s'agit-il d'une facilité, ou d'un droit pour les services fiscaux de
prélever l'argent « où cela les arrange » ?
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat au budget.
Monsieur le sénateur, vous posez le problème
d'un couple marié sous le régime de la séparation de biens qui doit acquitter,
sur des biens qui peuvent éventuellement appartenir à l'épouse, la taxe
d'habitation.
Vous fondant sur un cas particulier, vous avez constaté que les services
fiscaux prélevaient cette taxe d'habitation sur le compte du mari, arguant
qu'il est le chef de famille.
Pour vous rassurer tout à fait, je vous dirai que le principe est très clair :
l'Etat doit prélever le montant de la taxe d'habitation, en l'occurrence, sur
le compte choisi par le couple. Il n'y a donc pas de difficulté de principe en
la matière.
Dans la pratique, vous soulignez que ce n'est pas systématiquement le cas. Je
ne peux qu'inviter les personnes qui se sont plaintes auprès de vous à
s'adresser à leur trésorerie de rattachement pour que le prélèvement se fasse
bien sur le compte de leur choix.
Sur le principe, vous avez tout à fait raison. Dans la pratique, il y a
parfois, dans une vaste administration, quelques dysfonctionnements. Je vous
prie de présenter aux intéressés mes excuses pour ces dysfonctionnements. Mais,
je le répète, le principe n'est absolument pas en cause, monsieur le
sénateur.
M. Franck Sérusclat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat.
Je ne peux que vous remercier, monsieur le secrétaire d'Etat, de votre
réponse, qui entre, d'ailleurs, dans la logique ordinaire - mais y a-t-il des
logiques illogiques ? ... Je pense que, dorénavant, les services fiscaux
tiendront compte des remarques que vous venez de formuler.
SUPPRESSION DES VENTES HORS TAXES
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau, auteur de la question n° 389, adressée à M. le
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le secrétaire d'Etat, dans le rapport fait au nom de la commission
des finances concernant les crédits du tourisme pour 1999, j'avais attiré
l'attention du Gouvernement sur la nécessité d'abolir la directive de la
Communauté européenne prévoyant l'arrêt, à la date du 30 juin 1999, des ventes
hors taxes réalisées lors des voyages à l'intérieur de l'Union européenne.
Nous n'avons plus que cinq mois pour décider. Monsieur le secrétaire d'Etat,
nous attendons donc une réponse claire de la part du Gouvernement que vous
représentez ici : le Gouvernement est-il favorable à la suppression de cette
date butoir et à l'adoption d'une disposition nouvelle pour maintenir les
ventes hors taxes ? Quelle action mène-t-il actuellement pour réussir ?
En effet, une telle décision répondrait aux intérêts européens, à ceux des
prix et à ceux de l'emploi. Elle aurait, à l'échelon national et même, bien
entendu, européen, des conséquences décisives pour le maintien d'une activité
française de haut niveau.
Une telle décision est-elle favorable à l'Europe ? Je le crois.
Les voyageurs peuvent acheter des achats de produits de qualité dans un
environnement de qualité ; le prestige de nos produits concourt au rayonnement
de notre pays.
Cette décision est-elle intéressante en matière de prix ?
Le commerce est intégré aux rituels du voyage. Il participe au financement des
aéroports et des compagnies. Sa suppression, vous le savez, entraînerait la
hausse du prix des billets. Ainsi, entre Calais et la Grande-Bretagne, la
société de ferry Sea-France réalise 55 % de son chiffre d'affaires avec le
duty free.
Sans lui, le doublement du prix du billet serait à
prévoir.
Pour l'aéroport de Tarbes, ce type de commerce représente 70 % des recettes et
pour Aéroports de Paris, 17 %, soit 800 millions de francs. Sa disparition
représenterait un manque à gagner de 240 millions de francs. Comment faire pour
se passer de telles recettes ? Là aussi, des hausses du prix des billets sont à
prévoir !
Est-ce l'intérêt de l'emploi de maintenir les ventes hors taxes ?
En Europe, 140 000 personnes participent à cette activité. Les compagnies
maritimes emploient, par exemple, 3 500 personnes dans le Pas-de-Calais.
Ce ne sont pas seulement les villes maritimes ou possédant un aéroport qui
sont concernées ; seront touchées de grandes régions françaises, celles qui
produisent du cognac - qui le sont déjà fortement - ainsi que celles qui
produisent le champagne et les parfums, c'est-à-dire une bonne dizaine de
départements, dont les Alpes-Maritimes, les Hautes-Pyrénées, le Finistère,
l'Ille-et-Vilaine, Cherbourg, Caen, la Champagne et les Charentes,
notamment.
Par ailleurs, le transport aérien est sous la menace de la suppression de 4
000 emplois, notamment parmi les personnels navigants commerciaux.
Où est l'intérêt de notre pays ?
Je me limiterai à ce propos à noter que 40 % des ventes hors taxes réalisées
dans le monde concernent des produits français.
Tout le monde reconnaît les graves conséquences qu'aurait l'application de la
directive au mois de juillet 1999. MM. Jospin et Blair ont d'ailleurs exprimé
leur refus de retenir cette date. Mais ce n'est pas suffisant.
Les Quinze, au sommet de Vienne, se sont donnés jusqu'à la fin du mois de mars
pour prendre une décision. Vous-même, monsieur le secrétaire d'Etat, avez
reconnu les conséquences sur l'emploi et l'économie de certaines régions
françaises. Mais, évidemment, ces déclarations ne suffisent pas.
Alerté par les salariés de ces secteurs, mon groupe a déposé une proposition
de loi tendant à ne pas appliquer cette directive le 30 juin 1999. Cette
suppression permettrait de revoir l'ensemble des problèmes posés en toute
sérénité, de prévoir une modification des conditions d'exercice du commerce
hors taxes par la préparation d'une nouvelle directive et de définir la
ressource substitutive à inscrire au code général des impôts.
Notre proposition est donc, monsieur le secrétaire d'Etat, très
responsable.
La décision prise en 1991 s'accompagnait d'un engagement touchant à
l'harmonisation fiscale. Huit années plus tard, où en sommes-nous ? La
commission des finances du Sénat n'est encore informée de rien. Une étude
serait pourtant urgente.
L'Irlande, l'Allemagne, l'Espagne, la Belgique, la Finlande sont concernées
et, comme la France, s'inquiètent des conséquences de la fin du
duty-free.
Par ailleurs, l'Italie a décidé de reporter l'application de cette mesure
en 2002. Pourquoi pas nous ?
Ce délai permettrait d'étudier une solution d'ensemble préservant l'emploi,
valorisant et assurant la pérennité du commerce hors taxes, selon des règles
nouvelles qui garantiraient les prix et le rayonnement de notre pays.
Ma question est donc simple, monsieur le secrétaire d'Etat : que comptez-vous
faire et où en sommes-nous aujourd'hui ?
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat au budget.
Madame la sénatrice, vous m'interrogez sur
les ventes hors taxes. Vous avez, dans un exposé très clair, rappelé que des
directives communautaires prises en 1991 prévoient la suppression du régime des
ventes hors taxes entre pays de l'Union européenne - et non à l'égard des pays
extérieurs à l'Union européenne - à compter du 30 juin 1999.
Le Gouvernement auquel j'appartiens a immédiatement compris quelles
difficultés sociales pouvaient résulter de la suppression, maintenant
imminente, de ce régime dérogatoire. C'est pourquoi il a agi et continuera à
agir.
Vous savez que le Premier ministre a, dès le 2 mars 1998, demandé à M. Capet,
qui est député du Pas-de-Calais et qui connaît particulièrement bien le sujet,
d'examiner les conséquences économiques et sociales de cette suppression.
M. Capet a mis en évidence, dans son excellent rapport, que la suppression
brutale des ventes hors taxes aurait des conséquences dommageables en matière
d'emploi, notamment pour le Calaisis, mais pas seulement pour celui-ci.
En conséquence, il a proposé un dispositif progressif de taxation aux droits
d'accise, pour laisser le temps aux professionnels de s'adapter.
Le Gouvernement français soutient activement cette proposition devant la
Commission de Bruxelles.
Comme vous l'avez rappelé, cette question a notamment été abordée lors du
récent conseil franco-britannique entre les deux Premiers ministres et lors du
conseil des chefs d'Etat et de Gouvernement qui s'est tenu à Vienne, les 11 et
12 décembre 1998.
Vous voyez donc que le Gouvernement est particulièrement déterminé à trouver
une solution. Sa recherche est en cours et la représentation nationale sera
évidemment tenue informée de l'évolution de cette question.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
La réponse que vous venez de m'apporter, monsieur le secrétaire d'Etat, est
très imprécise ; elle ne me satisfait donc pas pleinement.
Nous sommes à cinq mois de la date butoir. Or, alors que l'Europe souhaitée
par le Gouvernement - et M. le Premier ministre l'a confirmé hier, devant le
Congrès, à Versailles - a comme priorité l'emploi, l'une des premières
décisions tendrait à en supprimer 140 000.
J'ai lu que le Gouvernement faisait référence à un éventuel moratoire. Je
souhaiterais savoir ce qu'il en est.
J'ai également lu que le président Jacques Santer avait déclaré : « Si
prorogation il y a, elle sera très limitée. » Il n'a donc été question que
d'une prorogation de quelques mois.
Or, je persiste à croire, je tiens à le redire, qu'il faudra quelques années
pour redéfinir ces ventes hors taxes. Je persiste également à croire que
l'ensemble du secteur est concerné et pas seulement le trafic transmanche.
Nous avions été satisfaits du rapport de M. Capet, qui contenait un constat et
quelques propositions. Mais celles-ci n'ont pas été complètement prises en
compte. S'en tenir, comme je l'ai lu, au seul trafic transmanche serait très
insuffisant pour notre pays.
Je tiens à rappeler qu'il s'agit de productions qui font vivre des milliers de
personnes ; je pense notamment au champagne, aux parfums de la Côte d'Azur et
au cognac des Charentes.
Exclure les vols aériens de toute décision prorogeant les ventes hors taxes
au-delà de juin 1999 se traduirait par des déficits pour les aéroports et par
des suppressions d'emplois.
Le commerce hors taxes est un test pour l'Europe de l'emploi et du progrès
social, je tiens à le répéter. Avec ce problème, nous quittons la théorie : le
Gouvernement sera jugé sur ses actes et il serait dommageable que cette
nouvelle Europe commence avec la suppression de 140 000 emplois !
MISE EN OEUVRE DE L'INSTRUCTION BUDGÉTAIRE
ET COMPTABLE M 14
M. le président.
La parole est à M. About, auteur de la question n° 390, adressée à M. le
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Nicolas About.
Le 10 novembre dernier, ont été publiés au
Journal officiel
les
derniers décrets relatifs à l'instruction budgétaire et comptable M 14 des
collectivités locales. Cette publication, beaucoup trop tardive, pénalise
fortement les communes qui ont fait le choix, depuis plusieurs années, de voter
leur budget au mois de décembre.
Ces communes sont pénalisées, car elles n'ont pas les moyens matériels de
s'adapter. A titre d'exemple, le simple travail d'adaptation des logiciels
informatiques réclamera en moyenne cinquante jours pour les sociétés
prestataires de services. Les nouvelles maquettes budgétaires ne seront donc
pas disponibles avant la fin du mois de février 1999 ! Les communes qui ont
voté leur budget en décembre sur la base de la précédente nomenclature doivent
donc transposer leur budget dans sa nouvelle version, annuler celui de décembre
et revoter le budget primitif pour 1999, et ce avant le 31 mars 1999.
Par curiosité, il serait intéressant de savoir comment les communes, notamment
celles qui ont moins de 5 000 habitants, pourront - c'est un laps de temps très
court - gérer la période de transition de trois mois, que leur concède
l'Etat.
Au-delà des difficultés matérielles qui se posent, j'attire votre attention,
monsieur le secrétaire d'Etat, sur les changements perpétuels de nomenclature
que l'Etat fait subir aux collectivités locales depuis dix ans. Bien sûr, il
est louable de vouloir ajuster la M 14 aux réalités fonctionnelles des communes
plutôt que de s'en tenir à la nomenclature fonctionnelle des administrations.
Mais, aujourd'hui, l'instabilité des textes est une véritable calamité pour nos
petites communes, qui ont bien d'autres charges à assumer.
Qu'on ne nous dise pas que ces textes ont fait l'objet d'une concertation avec
le comité des finances locales. La gestation de la M 14 s'est faite en dix ans.
Ne pouvait-on prévoir une solution durable dès le départ ? Quand donc les
préoccupations réelles des acteurs locaux seront-elles prises en compte ?
Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, quand l'Etat respectera-t-il le principe
fondamental de la libre administration des collectivités locales, qui est
inscrit dans notre Constitution, mais qui est si souvent écorné ?
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter,
secrétaire d'Etat au budget.
Monsieur le sénateur, vous avez évoqué
l'instruction budgétaire et comptable M 14, et je voudrais vous apporter
quelques précisions.
Il y a eu des mises à jour en 1999 avec, en premier lieu, la refonte de la
nouvelle nomenclature fonctionnelle applicable aux communautés de 3 500
habitants et plus.
Un groupe de travail a fonctionné au sein du comité des finances locales. Je
rends d'ailleurs hommage à ce groupe de travail, qui a mené à bien cette
refonte au cours du premier semestre de l'année 1998.
La nouvelle nomenclature fonctionnelle a ainsi été adoptée par le comité des
finances locales le 8 juillet 1998.
D'autres modifications de l'instruction M 14 ont été approuvées lors de la
même séance du comité des finances locales du 8 juillet 1998.
Elles ont donné lieu à un travail de refonte des maquettes budgétaires au
cours de l'été 1998, afin de prendre en compte la nouvelle nomenclature
fonctionnelle, les adaptations des plans de comptes par nature. L'ensemble de
ces aménagements ont été approuvés par le comité des finances locales le 8
septembre.
J'en viens directement à votre question pour souligner l'importance de la
réunion qui a été organisée le 10 septembre 1998, sous l'égide de l'Association
des maires de France, afin d'informer, de façon précoce, les sociétés de
services informatiques des modifications qui doivent être apportées à
l'instruction M 14 pour l'exercice 1999.
A titre d'exemple, la direction générale de la comptabilité publique et la
direction générale des collectivités locales ont remis à chacune de ces
sociétés une maquette budgétaire pour chaque catégorie de communes.
Ensuite, le 10 novembre, un arrêté a formellement publié l'instruction M 14
ainsi que les décrets nécessaires. Mais je crois que, grâce à cette réunion du
10 septembre, tout avait été fait pour préparer au mieux les budgets, même ceux
qui allaient être votés par les collectivités territoriales avant le 31
décembre 1998.
Je vous rappelle par ailleurs, monsieur le sénateur, ce que j'ai dit à
l'occasion du dernier congrès de l'Association des maires de France. Pour
Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, et pour moi-même, sous
réserve de la nécessaire prise en compte des nouvelles dispositions d'ordre
législatif, il est souhaitable désormais de stabiliser pour quelques exercices
les maquettes et les nomenclatures budgétaires. La stabilité que vous appelez
de vos voeux est donc décidée pour l'avenir.
J'espère ainsi vous avoir complètement rassuré, monsieur le sénateur.
M. Nicolas About.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. About.
M. Nicolas About.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez fait état de toutes les réunions qui
se sont tenues pour préparer les modifications nécessaires. Mais, nous le
savons tous, il faut attendre la sortie du décret pour connaître réellement le
contenu des modifications qui vont être apportées, car certaines d'entre elles
peuvent être envisagées au dernier moment - cela s'est déjà vu !
Je souhaite vraiment savoir quelles sont les communes de France qui ont
réussi à s'adapter à l'instruction M 14 avant le 31 décembre. J'ai
personnellement fait voter à ma commune son budget ; comme je le fais depuis
vingt-deux ans. Mais ce n'est pas en deux mois qu'on peut changer des
procédures budgétaires ! Ce qui nous est demandé n'est pas raisonnable.
Je pense que le bon sens - mais il est vrai que le bon sens étant la chose la
moins bien partagée, c'est difficile ! - aurait consisté à dispenser les
communes qui ont voté leur budget avant le 31 décembre de revoter le budget
primitif pour 1999 avant le 31 mars. Ce n'est malheureusement pas le cas. On ne
peut que le regretter.
Je me félicite toutefois, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous ayez demandé
que soient stabilisés les documents. Ce sera une bonne chose. Au moins les
pourront-ils s'attacher à leur véritable tâche, à savoir la gestion de leur
collectivité.
M. le président.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons
interrompre maintenant nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quinze, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)
PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET
M. le président. La séance est reprise.
10
VOEUX DE M. LE PRÉSIDENT
M. le président.
Avant de passer à l'ordre du jour, qui appelle, vous le savez, la discussion
du projet de loi d'orientation agricole, je voudrais, mes chers collègues, vous
adresser à toutes et à tous les voeux les plus chaleureux que je forme pour
vous-mêmes et ceux qui vous sont chers au début de cette année 1999.
Puisse cette dernière année du siècle vous apporter toutes les satisfactions
que vous espérez.
Ces souhaits, monsieur le ministre, ne sont pas à usage exclusivement
sénatorial : ils vous concernent également, vous dont je salue la présence
aujourd'hui dans cet hémicycle, où vous êtes venu pour défendre, dans vos
nouvelles fonctions, votre premier texte important. A vous aussi, bonne et
heureuse année !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le président, je vous
remercie de vos voeux, qui me vont droit au coeur.
A mon tour, j'adresse à vous-même, à ceux qui vous sont chers et à cette noble assemblée mes voeux personnels et ceux du Gouvernement pour cette année qui commence. (Applaudissements.) 11
CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS
M. le président.
La conférence des présidents a établi comme suit l'ordre du jour des
prochaines séances du Sénat :
A. -
Mercredi 20 janvier 1999
:
Ordre du jour prioritaire
A quinze heures et le soir :
Suite du projet de loi d'orientation agricole, adopté par l'Assemblée
nationale après déclaration d'urgence (n° 18, 1998-1999).
M. Pierre Joxe, Premier président de la Cour des comptes, déposera à dix-sept
heures trente, sur le bureau du Sénat, le rapport annuel de la Cour des
comptes.
B. -
Jeudi 21 janvier 1999
:
A neuf heures trente :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite du projet de loi d'orientation agricole, adopté par l'Assemblée
nationale après déclaration d'urgence (n° 18, 1998-1999) ;
A quinze heures et le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement ;
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la
séance avant onze heures ;
Ordre du jour prioritaire
3° Suite de l'ordre du jour du matin.
C. -
Mardi 26 janvier 1999
:
Ordre du jour prioritaire
A neuf heures trente et à seize heures :
Projet de loi constitutionnelle, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à
l'égalité entre les femmes et les hommes (n° 130, 1998-1999) ;
La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 25 janvier 1999 à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt
des amendements à ce projet de loi constitutionnelle ;
- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat,
les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le lundi 25 janvier
1999 ;
La conférence des présidents a décidé qu'il serait procédé à un scrutin public
à la tribune lors du vote sur l'ensemble du projet de loi constitutionnelle.
D. -
Mercredi 27 janvier 1999
:
Ordre du jour prioritaire
A quinze heures et le soir :
1° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant prorogation des
mandats des membres des conseils consultatifs et des conseils d'orientation et
de surveillance des caisses d'épargne et de prévoyance (n° 133, 1998-1999) ;
La conférence des présidents a fixé au mardi 26 janvier 1999, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi ;
2° Suite du projet de loi d'orientation agricole, adopté par l'Assemblée
nationale après déclaration d'urgence (n° 18, 1998-1999).
E. -
Jeudi 28 janvier 1999
:
Ordre du jour établi en application de l'article 48,
troisième alinéa, de la Constitution
A neuf heures trente :
1° Conclusions de la commission des affaires économiques (n° 502, 1997-1998)
sur :
- la proposition de loi de M. Jean-Luc Bécart et plusieurs de ses collègues,
tendant à frapper de nullité d'ordre public toute clause de mutation
immobilière exonérant les exploitants de mines de leur responsabilité en
matière de dommages liés à leur activité minière (n° 220, 1996-1997) ;
- la proposition de loi de M. Claude Huriet et plusieurs de ses collègues,
complétant le code minier (n° 298 rectifié, 1996-1997) ;
- la proposition de loi de Mme Gisèle Printz et des membres du groupe
socialiste et apparentés, relative à la prévention des risques miniers après la
fin de l'exploitation (n° 229, 1997-1998) ;
- la proposition de loi de Mme Gisèle Printz et des membres du groupe
socialiste et apparentés, relative à la responsabilité des dommages liés à
l'exploitation minière (n° 235 rectifié, 1997-1998) ;
- la proposition de loi de M. Jean-Paul Delevoye et plusieurs de ses
collègues, relative à la responsabilité en matière de dommages consécutifs à
l'exploitation minière (n° 247, 1997-1998) ;
- la proposition de loi de M. Jean-Paul Delevoye et plusieurs de ses
collègues, relative à la prévention des risques miniers après la fin de
l'exploitation (n° 248, 1997-1998) ;
La conférence des présidents a fixé :
- au mercredi 27 janvier 1999, à dix-sept heures, le délai limite pour le
dépôt des amendements à ces conclusions ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion
générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun
groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le mercredi 27
janvier 1999 ;
A quinze heures :
2° Question orale avec débat n° 8 de M. Paul Masson à M. le Premier ministre
sur le redéploiement des forces de sécurité ;
En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du règlement,
la conférence des présidents a fixé à trois heures la durée globale du temps
dont disposeront, dans le débat sur cette question, les orateurs des divers
groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le mercredi 27
janvier 1999 ;
3° Proposition de loi de M. Alain Vasselle, relative à l'amélioration de la
prise en charge des personnes atteintes de démence sénile et, en particulier,
de la maladie d'Alzheimer (n° 210, 1997-1998) ;
La conférence des présidents a fixé au mercredi 27 janvier 1999, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de
loi.
F. -
Mardi 2 février 1999
:
Ordre du jour prioritaire
A neuf heures trente et à seize heures :
- suite du projet de loi d'orientation agricole, adopté par l'Assemblée
nationale après déclaration d'urgence (n° 18, 1998-1999).
G. -
Mercredi 3 février 1999 :
Ordre du jour prioritaire
A quinze heures :
1° Projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration
d'urgence, relatif à la Nouvelle-Calédonie (n° 146, 1998-1999) ;
2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration
d'urgence, relatif à la Nouvelle-Calédonie (n° 145, 1998-1999).
La conférence des présidents a décidé qu'il serait procédé à une discussion
générale commune de ces deux projets de loi ;
La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 2 février 1999, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt
des amendements à ces deux projets de loi ;
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion
générale commune, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste
d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le mardi 2 février
1999.
H. -
Jeudi 4 février 1999 :
A neuf heures trente :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite de l'ordre du jour de la veille ;
2° Deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par
l'Assemblée nationale en deuxième lecture, portant modification de l'ordonnance
n° 45-2339 du 13 octobre 1945, relative aux spectacles (n° 512, 1997-1998) ;
La conférence des présidents a fixé au mercredi 3 février 1999, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi ;
A quinze heures :
3° Questions d'actualité au Gouvernement ;
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la
séance avant onze heures ;
Ordre du jour prioritaire
4° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, tendant à limiter
les licenciements des salariés de plus de cinquante ans (n° 114, 1998-1999)
;
La conférence des présidents a fixé :
- au mercredi 3 février 1999, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt
des amendements à ce projet de loi ;
- à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la
discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la
liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le mercredi 3
février 1999.
I. -
Mardi 9 février 1999 :
A neuf heures trente :
1° Dix-huit questions orales sans débat :
L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.
Ordre du jour prioritaire
N° 361 de M. Gérard Larcher à M. le ministre de l'équipement, des transports
et du logement (aménagement de la nationale 10 entre Rambouillet, Bel Air et
Ablis) ;
N° 367 de M. Francis Grignon à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice
(législation relative à la prise illégale d'intérêts) ;
N° 391 de M. Alain Gournac à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et
de l'environnement (dégradations dues aux graffitis) ;
N° 394 de M. Dominique Leclerc à Mme le ministre de l'aménagement du
territoire et de l'environnement (aménagement de la Loire et de ses affluents)
;
N° 395 de Mme Nicole Borvo à M. le ministre de l'éducation nationale, de la
recherche et de la technologie (désamiantage de Jussieu) ;
N° 397 de M. Bernard Fournier à M. le ministre délégué chargé des affaires
européennes (importation et distribution de médicaments) ;
N° 398 de M. Georges Othily à M. le ministre de l'économie, des finances et de
l'industrie (statut de l'institut d'émission des départements d'outre-mer) ;
N° 399 de M. Bernard Joly à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité
(majoration pour enfants servie aux veuves civiles) ;
N° 400 de M. Michel Barnier à M. le ministre de l'équipement, des transports
et du logement (liaisons transalpines pour les voyageurs et les marchandises)
;
N° 403 de Mme Gisèle Printz à Mme le ministre délégué à l'enseignement
scolaire (organisations des voyages scolaires) ;
N° 405 de M. Claude Domeizel à M. le ministre de l'économie, des finances et
de l'industrie (conditions d'installation de débits de tabac en zone de
montagne) ;
N° 406 de Mme Nelly Olin à M. le ministre de l'équipement, des transports et
du logement (service public ferroviaire en Val-d'Oise) ;
N° 408 de M. Pierre-Yvon Tremel à M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement (situation du CEVA, centre d'études et de
valorisation des algues) ;
N° 409 de M. Guy Vissac à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de
l'environnement (plan d'aménagement de la Loire) ;
N° 410 de M. Adrien Gouteyron à M. le ministre de l'économie, des finances et
de l'industrie (coût et conséquences du passage informatique à l'an 2000) ;
N° 411 de M. Jean-Marie Poirier à M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement (restructuration de l'aéroport d'Orly) ;
N° 413 de M. Jacques Peyrat à Mme le ministre de l'aménagement du territoire
et de l'environnement (aménagement du territoire dans les Alpes-Maritimes) ;
N° 414 de M. Charles Descours à M. le Premier ministre (application de la loi
sur la veille sanitaire) ;
A seize heures :
Ordre du jour prioritaire
2° Deuxième lecture, sous réserve de sa transmission, du projet de loi relatif
aux alternatives aux poursuites et renforçant l'efficacité de la procédure
pénale (A.N., n° 998) ;
La conférence des présidents a fixé au lundi 8 février 1999, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
J. -
Mercredi 10 février 1999 :
Ordre du jour prioritaire
A quinze heures :
Deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, portant
diverses mesures relatives à la sécurité routière (n° 118, 1998-1999) ;
La conférence des présidents a fixé au mardi 9 février 1999, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
K. -
Jeudi 11 février 1999 :
Ordre du jour établi en application de l'article 48,
troisième alinéa, de la Constitution
A neuf heures trente :
1° Question orale avec débat n° QE 4 de M. Michel Barnier à M. le ministre des
affaires étrangères, sur l'avenir de la politique étrangère et de sécurité
commune ;
La discussion de cette question orale s'effectuera selon les modalités prévues
à l'article 83
ter
du règlement.
A quinze heures :
2° Proposition de loi de M. Philippe Arnaud et plusieurs de ses collègues
tendant à assurer un service minimum en cas de grève dans les services et
entreprises publics (n° 491, 1997-1998) ;
La conférence des présidents a fixé :
- au mercredi 10 février 1999, à dix-sept heures, le délai limite pour le
dépôt des amendements à cette proposition de loi ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion
générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun
groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le mercredi 10
février 1999.
L. -
Mardi 16 février 1999 :
A neuf heures trente :
1° Questions orales sans débat ;
A seize heures et le soir :
Ordre du jour prioritaire
2° Eventuellement, conclusions des commissions mixtes paritaires sur le projet
de loi organique et le projet de loi, relatifs à la Nouvelle-Calédonie ;
3° Projet de loi portant création de l'autorité de contrôle technique de
l'environnement sonore aéroportuaire (n° 8, 1998-1999) ;
La conférence des présidents a fixé au lundi 15 février 1999, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi ;
4° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif aux enquêtes
techniques sur les accidents et les incidents dans l'aviation civile (n° 516,
1997-1998) ;
La conférence des présidents a fixé au lundi 15 février 1999, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
M. -
Mercredi 17 février 1999 :
Ordre du jour prioritaire
A quinze heures :
Deuxième lecture, sous réserve de sa transmission, du projet de loi relatif
aux polices municipales (A.N., n° 960).
La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 16 février 1999, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt
des amendements à ce projet de loi ;
- à deux heures, la durée globale du temps dont disposeront, dans la
discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la
liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance avant dix-sept heures, le mardi 16 février
1999.
N. -
Jeudi 18 février 1999 :
A neuf heures trente :
Ordre du jour prioritaire
1° Eventuellement, suite de l'ordre du jour de la veille ;
2° Projet de loi sur l'innovation et la recherche (n° 152, 1998-1999).
La conférence des présidents a fixé :
- au mercredi 17 février 1999, à dix-sept heures, le délai limite pour le
dépôt des amendements à ce projet de loi ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion
générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun
groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le mercredi 17
février 1999.
A quinze heures :
3° Questions d'actualité au Gouvernement.
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la
séance avant onze heures.
Ordre du jour prioritaire
4° Suite de l'ordre du jour du matin.
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence
des présidents relatives à la tenue des séances ?...
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence
des présidents s'agissant de l'ordre du jour établi en application de l'article
48, alinéa 3, de la Constitution ?...
Ces propositions sont adoptées.
Vous constaterez, mes chers collègues, que le programme des travaux du Sénat a
été établi pour un mois. C'est ce que vous aviez souhaité, afin d'aménager vos
emplois du temps.
Je tiens à remercier le Gouvernement pour ce progrès et je lui demande de bien
vouloir persévérer dans cette voie.
12
LOI D'ORIENTATION AGRICOLE
Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 18, 1998-1999)
d'orientation agricole, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration
d'urgence. [Rapport n° 129 (1998-1999) ; avis n°s 132 (1998-1999) et 151
(1998-1999]).
Avant d'ouvrir la discussion, je dois vous rappeler que le Conseil économique
et social a demandé que, conformément aux dispositions de l'article 69 de la
Constitution, Mme Christiane Lambert, rapporteur de la section de l'agriculture
et de l'alimentation, puisse, pour ce texte, exposer l'avis du Conseil
économique et social devant le Sénat.
Conformément à l'article 69 de la Constitution et à l'article 42 de notre
règlement, huissiers, veuillez introduire Mme Christiane Lambert.
(Mme Christiane Lambert est introduite selon le cérémonial d'usage.)
Permettez-moi, madame, en mon nom propre et au nom de tous mes collègues, de
vous souhaiter la bienvenue à la Haute Assemblée.
Je rappelle qu'en application de l'article 42, alinéa 4, du règlement le
représentant du Conseil économique et social expose devant le Sénat l'avis du
Conseil avant la présentation du rapport de la commission saisie au fond.
D'autre part, le représentant du Conseil économique et social a accès dans
l'hémicycle pendant toute la durée de la discussion en séance publique. A la
demande du président de la commission saisie au fond, la parole lui est
accordée pour donner le point de vue du Conseil sur tel ou tel amendement ou
sur tel ou tel point particulier de la discussion.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, votre assemblée est aujourd'hui appelée à
examiner en première lecture ce projet de loi d'orientation agricole.
En vérité, ce texte a déjà une longue histoire.
Celle-ci a commencé en 1996, lors du cinquantième anniversaire de la
Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles, à l'occasion duquel
le Président de la République, M. Jacques Chirac, s'était engagé à demander au
Gouvernement de soumettre au Parlement, dans les meilleurs délais, un projet de
loi d'orientation agricole.
C'est ainsi que M. Philippe Vasseur, l'un de mes prédécesseurs, avait déposé
un tel texte sur le bureau de la Haute Assemblée, texte qui n'a cependant pu
être discuté du fait de la dissolution de l'Assemblée nationale.
Mon prédécesseur immédiat, mon ami Louis Le Pensec, a rouvert le chantier,
procédant à une très large concertation, reprenant un certain nombre d'acquis
du travail déjà effectué, tout en y apportant des compléments ou des
modifications.
Le présent projet de loi a été soumis, lors de la dernière rentrée
parlementaire, à l'Assemblée nationale, qui l'a adopté le 13 octobre 1998.
Il s'agit évidemment d'un texte important, voire fondamental, ne serait-ce que
parce que l'on ne vote pas de loi d'orientation tous les jours ! Mais surtout,
notre agriculture a besoin de voir précisés un certain nombre de concepts, et
ce texte est attendu par des centaines de milliers d'agriculteurs. Les pouvoirs
publics doivent tracer un cap, définir une politique à moyen et long terme pour
l'agriculture française, ce qui détermine aussi, en fin de compte, l'avenir de
l'agriculture européenne.
J'aborde cette discussion avec une totale ouverture d'esprit.
J'étais député quand l'Assemblée nationale a examiné ce texte en première
lecture, et je l'ai voté. Qu'on n'attende donc pas de moi que je ne le défende
pas : je le défendrai à la fois dans un souci de cohérence personnelle et au
nom de la solidarité gouvernementale. Au demeurant, je considère que ce texte
est équilibré et qu'il répond bien aux problèmes qui se posent à notre
agriculture. Je soutiens les grands principes qu'il met en oeuvre et les choix
généraux qu'il tend à opérer.
Pour autant, je n'oublie pas que j'ai été parlementaire, et je souhaite que le
débat, au Sénat, permette d'apporter au texte les précisions qui s'avéreront
nécessaires, éventuellement de l'alléger, de lever certaines ambiguïtés qu'il
comporte. C'est d'ailleurs la vocation même du débat parlementaire que
d'enrichir les textes.
D'ailleurs, à l'issue de la première lecture à l'Assemblée nationale, comme
d'autres députés, j'avais conscience que, dans le feu de la discussion, nous
avions parfois quelque peu « chargé la barque ». Cela s'est produit avec ce
texte comme cela se produit avec d'autres.
Ma propre ouverture d'esprit est d'ailleurs à la mesure de celle dont ont su
faire preuve vos commissions et vos rapporteurs, MM. Souplet, Vecten et
Leclerc, qui ont accompli un travail remarquable. Je tiens en particulier à
saluer ici leur souci de mener avec le ministère des échanges constructifs,
manifestant clairement leur volonté d'oeuvrer dans le sens d'une amélioration
du texte.
Il ne me paraît pas inutile de mettre ce projet de loi d'orientation en regard
de l'actualité, notamment des débats qui se déroulent en ce moment à propos du
financement de l'Union européenne, du « Paquet Santer », autrement dit d'Agenda
2000. Ces débats touchent évidemment la politique agricole commune, et donc la
politique agricole de notre pays.
Ils ont été amorcés voilà plusieurs mois déjà, à l'occasion des derniers
conseils agricoles, mais ils ont pris un tour plus aigu il y a quelques
semaines au sein du groupe dit « de haut niveau. » Ces derniers jours, et ce
matin encore, à Bruxelles, ont été menées des négociations qui sont au coeur de
la politique agricole commune.
Je voudrais redire devant vous, en introduction à cette discussion, ce que
j'ai été amené à dire, au nom de la France, lors du conseil agricole, à savoir
que la France abordait la négociation de la politique agricole commune avec
quelques idées simples mais qu'elle tient à proclamer haut et fort, car elles
correspondent pour elle à un choix politique de fond, choix avalisé non
seulement par le Gouvernement mais aussi par le Président de la République.
La première idée, c'est qu'il ne saurait être question de signer quelque
accord agricole que ce soit sans que cet accord soit relié à l'ensemble des
points qui sont envisagés dans le cadre du financement d'Agenda 2000.
Il est hors de question pour la France de signer un accord sur la PAC, dont la
France est la première bénéficiaire, sans que, parallèlement, les autres pays
fassent aussi les efforts nécessaires.
Il faut à tout prix échapper au piège bien connu des négociateurs de mauvaise
foi qui disent : « Tout ce qui est à moi est à moi, tout ce qui est à toi se
discute. »
Eh bien, nous ne discuterons pas de la politique agricole commune tant qu'on
ne parlera pas du reste. Plus exactement, nous voulons bien en discuter pour
faire avancer les idées mais nous ne signerons pas d'accord sur la PAC tant
qu'il n'y aura pas d'accord sur l'ensemble, tant qu'il n'y aura pas d'accord
sur la remise en cause du chèque britannique, tant qu'il n'y aura pas d'accord
sur la réforme des fonds structurels, tant qu'il n'y aura pas d'accord sur
l'égilibilité au fonds de cohésion, tant qu'il n'y aura pas d'accord sur les
revendications budgétaires allemandes - celles-ci sont recevables, certes, mais
pas en l'état - tant qu'il n'y aura pas d'accord sur les recettes, en
particulier sur les clés de financement et sur l'idée, qui avance bon an mal
an, d'une clé de financement liée au produit intérieur brut.
M. Emmanuel Hamel.
Très bien ! Soyez ferme !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
C'est un ensemble qu'il faut
signer, et nous n'accepterons pas que la politique agricole commune soit prise
en otage dans cette négociation, car ce sont les agriculteurs français qui
seraient en fait pris en otage. Or il n'est pas question de demander des
efforts aux agriculteurs, en particulier aux agriculteurs français, sans en
demander aux autres parties intéressées.
Le deuxième point que nous avons soulevé à cette occasion, au nom de la
France, a trait à l'intégration, de façon raisonnée mais dès le début des
discussions, de ce que l'on appelle la contrainte budgétaire.
En effet, cette contrainte budgétaire s'impose à nous puisque l'Allemagne - je
l'ai dit voilà un instant - a posé le problème. Nous ne pouvons, bien
évidemment, que respecter le souci exprimé par un grand pays ami, même si,
comme je l'ai déjà souligné, toutes les affirmations de nos voisins ne doivent
pas forcément être reçues sans examen.
Ainsi, les revendications budgétaires allemandes sont sur bien des points et à
bien des égards déraisonnables, s'agissant notamment du total des montants en
jeu.
Quoi qu'il en soit, même si nos amis allemands ne soulevaient pas la question
de la contrainte budgétaire, celle-ci s'imposerait à nous puisque les pays de
l'Union européenne ont ratifié le pacte de stabilité et de croissance et ont
engagé une lutte, que je crois utile, nécessaire et porteuse d'avenir, contre
les déficits publics.
En outre, lorsque l'on gère des crédits publics, on doit de toute façon
toujours se préoccuper de la légitimité de leur affectation.
J'estime donc nécessaire que nous nous interrogions aujourd'hui, à l'échelon
tant français qu'européen, sur la légitimité des aides que nous accordons à
l'agriculture. Il s'agit là, selon moi, d'un service à rendre aux
agriculteurs.
Par conséquent, nous souhaitons que la PAC soit économe.
Cela aura évidemment des conséquences, car il existe alors deux manières
d'aborder la négociation : soit on prend d'entrée de jeu en compte cette
contrainte budgétaire - j'y reviendrai - soit on fait comme si elle n'existait
pas, conformément à la malheureuse tendance de la Commission européenne.
Dans cette dernière hypothèse, on élabore alors une belle réforme, comme la
Commission européenne le fait si souvent, une réforme coûteuse, très coûteuse
même, et au bout du compte, puisque l'on ne sait pas comment la financer, on
présente un jour l'addition, comme dans un restaurant ou dans un hôtel, et on
demande aux partenaires de contribuer à son règlement ; cela s'appelle le
cofinancement.
J'ai dit hier, d'une manière aussi ferme et solennelle que possible, que la
France, à tous les niveaux de ses pouvoirs publics, rejetait l'hypothèse du
cofinancement de la politique agricole commune, et refusait en tout cas
d'envisager le cofinancement des aides directes, c'est-à-dire de celles qui
sont destinées au soutien des marchés.
Cette attitude tient à des questions de principe, mais aussi à des motivations
concrètes. Nous refusons en effet que cet acquis communautaire que représentent
les organisations communes de marché soit démantelé, ou risque de l'être, par
une « renationalisation » des aides directes. Nous refusons d'entrer dans cette
logique, car soit l'on s'engage dans la voie d'un cofinancement aléatoire, ce
qui pourrait engendrer des distorsions de concurrence, soit l'on essaie
d'imposer le cofinancement, et alors certains parlements nationaux pourraient
ne pas se soumettre et objecter que les payeurs doivent être les décideurs, ce
en quoi, d'une certaine manière, ils n'auraient pas tort.
Par conséquent, nous refusons, pour ces questions de principe, de voir un
acquis communautaire remis en cause par la mise en place du cofinancement, et
afin d'écarter cette menace nous demandons que la contrainte budgétaire soit
prise en compte dès le début des négociations.
Cela signifie, par exemple, qu'il ne faut entreprendre une réforme de
l'organisation du marché du lait, qui serait terriblement et coûteuse et que
rien ne justifie dans l'état actuel du marché mondial et européen du lait.
Cela signifie aussi qu'il faut renoncer, s'agissant de la viande bovine, à ces
baisses excessives de prix - elles atteignent 30 % - qui sont déraisonnables et
qui nous exposent aux pires risques. En effet, leur compensation coûterait très
cher, et l'absence de compensation porterait lourdement préjudice aux
éleveurs.
Cela signifie, enfin, qu'il faut évaluer les conséquences budgétaires à chaque
stade de la négociation et faire en sorte que la politique agricole commune que
nous allons construire soit économe.
Le troisième point que j'ai évoqué au nom de la France n'est pas le moins
important, et il est peut-être même le plus incontournable sur le plan
politique : nous voulons que la politique agricole commune soit réorientée.
Nous abordons-là le thème qui est au coeur du projet de loi dont nous débattons
aujourd'hui et dans les jours qui viennent.
Réorienter la politique agricole commune, cela implique de prendre en compte
l'évolution de l'agriculture française et européenne, de tirer les leçons de
l'application de la politique agricole commune décidée en 1992, de faire le
point, d'une façon plus générale, sur les réalités agricoles.
A cet égard, je vous indiquerai brièvement quels enseignements je tire
aujourd'hui de l'examen de la situation agricole qui prévaut en France et en
Europe.
Quel est le plus grand risque que court l'agriculture en France et en Europe ?
C'est de voir se répandre, dans la société, dans l'opinion, dans un certain
nombre de cercles politiques, professionnels, syndicaux ou autres, cette idée
que l'agriculture coûte cher et occupe un nombre de moins en moins élevé
d'actifs, lesquels polluent de plus en plus nos nappes phréatiques et nos sols
et produisent une alimentation peu sûre et de mauvaise qualité. Telle est ma
plus grande crainte pour l'avenir de l'agriculture, tel est le plus grand
risque que court cette dernière. Or cette opinion tend à se répandre dans le
public.
La conclusion concrète que j'en tire est que le modèle agricole européen que
nous voulons construire devra être économe, concerner le plus grand nombre
possible d'agriculteurs, épargner nos sols et nos rivières et viser à produire
une alimentation sûre et de bonne qualité.
Voilà pourquoi nous devons d'abord définir, aux échelons européen et national,
le modèle agricole que nous voulons bâtir, afin d'adapter en conséquence la
politique agricole commune et la loi d'orientation agricole. Tel est l'objet du
projet de loi que je vous présente.
Incidemment, c'est aussi pour cette raison que la France propose une
réorientation des aides agricoles. Il s'agit de sortir de cette logique absurde
suivant laquelle, depuis des années, plus un agriculteur produit, plus il
reçoit d'argent. Ainsi, le montant des primes accordées à un exploitant qui
possède mille hectares de terres et qui produit en conséquence sera cent fois
supérieur à celui dont bénéficiera son collègue qui cultive dix hectares. C'est
cette logique à la fois infernale et injuste poussant au productivisme et
aboutissant à ce que 20 % des exploitations perçoivent 80 % des aides qu'il
faut remettre en cause.
C'est pourquoi la France a proposé solennellement hier, et pour la première
fois, que la nouvelle politique agricole commune prévoie la réorientation des
aides, par le biais de la réduction progressive du montant des aides directes,
dont je parlais voilà un instant et qui ressortissent à l'acquis communautaire.
Les crédits ainsi dégagés pourraient ensuite être affectés selon une logique
liée non plus aux prix, aux marchés et à la production, mais aux
caractéristiques de l'exploitation. Il s'agirait donc d'une aide à la personne,
et non plus au produit.
C'est une réorientation de fond, qui serait possible à l'échelon européen
grâce à ce redéploiement des moyens au profit des aides dites du « deuxième
pilier » - développement rural - selon des critères, qu'il nous faudra définir,
touchant à l'emploi, à l'environnement, au territoire. Je reviendrai sur ce
point.
Cette proposition de réorientation, que j'ai formulée hier au nom de la France
et qui a reçu un écho plus que favorable - elle pourrait faire son chemin dans
les semaines qui viennent ; c'est du moins ce que je souhaite car j'estime que
c'est indispensable pour l'agriculture européenne - est au coeur du projet de
loi d'orientation agricole que je suis venu défendre devant le Sénat.
Je vais maintenant présenter les sept grands principes qui, s'inscrivant dans
le droit-fil de cette réorientation de la politique agricole européenne et
nationale, ont guidé l'élaboration de ce texte.
Le premier de ces principes est celui du pluralisme et de la démocratie, qui
vont de soi dans une assemblée démocratique comme le Sénat et dans une
démocratie représentative comme la nôtre. Sa mise en oeuvre devait cependant
être encore améliorée, et à cet égard les représentants de la principale
organisation professionnelle agricole française affirment désormais
publiquement qu'ils acceptent l'idée du pluralisme et qu'ils sont prêts à
l'appliquer pleinement.
Cela doit être fait à tous les échelons de la vie professionnelle, selon les
deux règles qui fondent la démocratie et le pluralisme : le respect du fait
majoritaire, sans lequel aucune démocratie n'est possible, et le respect des
minorités, parce que les démocraties qui ne respectent pas les minorités ne
sont pas véritablement des démocraties.
Ce pluralisme, le projet de loi prévoit tranquillement et sereinement de
l'enrichir, au bénéfice de l'ensemble des organismes qui gèrent ou cogèrent
l'agriculture. Je pense que nous pouvons tous saluer cette avancée.
Le deuxième principe concerne les structures et repose sur deux idées
simples.
Tout d'abord, il n'y a pas d'avenir possible pour l'agriculture sans une
politique audacieuse et ambitieuse d'installation de jeunes agriculteurs, non
seulement dans le cadre familial, mais aussi hors de celui-ci. A cette fin, un
contrôle sur les structures doit être exercé, en vue de faciliter les
transitions et les transactions. Je pense que nous devrions tous être d'accord
sur ce point, car nous savons bien que, dans la période d'incertitudes que nous
traversons, les décisions d'installation sont gelées partout en France et en
Europe. Les conversations que j'ai eues avec mes collègues me l'ont confirmé.
Il nous faut donc instituer un dispositif efficace afin que, dès la levée de
ces incertitudes, nous puissions relancer une politique d'installation aussi
ambitieuse que possible.
Notre objectif est non pas de mettre en place un système administré ou un
carcan bureaucratique, mais de faire circuler l'information et régner la
transparence en matière de transactions et de structures. Cette exigence de
transparence est la seconde idée qui nous a guidés dans la rédaction du texte
en ce qui concerne les structures.
Le troisième principe a trait au volet social. Je l'évoquerai rapidement, car
nous y reviendrons lors de l'examen des articles et MM. les rapporteurs en
parleront sans doute.
Il s'agit de poursuivre l'oeuvre entamée de recherche de la parité entre le
monde agricole et le reste de la société. La parité signifie que lorsque l'on
paie les mêmes cotisations, on doit bénéficier des mêmes prestations, et
inversement.
Il s'agit aussi de poursuivre la revalorisation des retraites, plus
particulièrement des petites retraites,...
M. Roland Courteau.
Très bien !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
... pour lesquelles le
Gouvernement a déjà consenti des efforts, à la suite de certains de ses
prédécesseurs, mais peut-être avec plus de détermination et surtout en
s'attachant davantage au cas des retraites les plus modestes. Nous devrons
confirmer cet effort dans les années qui viennent,...
M. Jean-Pierre Plancade.
Très bien !
Mme Hélène Luc.
En particulier en faveur des femmes !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
... afin de tenir les
engagements pluriannuels que nous avons pris.
S'agissant des femmes, madame Luc, vous pensez bien que je ne vous contredirai
pas !
M. Gérard César.
Pas les femmes : les conjoints !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Le quatrième principe porte sur
la formation, sujet sur lequel je serai bref.
Il ne saurait être question, pour le Gouvernement, de remettre en cause
l'équilibre des lois de 1984. Cela serait dangereux et engendrerait des
perturbations. Par conséquent, le projet de loi vise simplement, sur ce point,
à moderniser le dispositif existant, qui nous paraît satisfaisant.
Le cinquième principe concerne l'espace agricole.
A cet égard, les zones agricoles protégées en milieu péri-urbain permettent de
limiter l'expansion parfois délirante des zones urbaines, mais surtout elles
contribuent à la qualité de la vie en milieu urbain.
Le sixième principe touche à la sécurité alimentaire et à la qualité des
produits.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, nos concitoyens nous poussent à nous engager
toujours plus avant dans la mise en oeuvre concrète du principe de « plus
grande précaution », qui exige à la fois information, transparence et
traçabilité.
M. René-Pierre Signé.
Eh oui !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Les contrôles doivent être
permanents, et la mise en place du dispositif de biovigilance que nous
évoquerons au cours de ce débat s'impose.
Le septième principe est le plus important, et vous me permettrez, mesdames,
messieurs les sénateurs, d'en parler plus longuement.
Il s'agit d'enrichir la profession d'agriculteur, en affirmant officiellement
ses nouvelles dimensions, ou plus exactement des dimensions anciennes qui
n'étaient pas reconnues jusqu'alors, mais qui sont essentielles pour
l'équilibre de notre société.
Il convient de mettre en évidence le fait que l'agriculteur produit, certes -
j'y reviendrai dans un instant - mais qu'il aménage aussi le territoire, qu'il
entretient les paysages, qu'il peut préserver l'environnement, qu'il doit créer
de l'emploi et qu'il est un acteur social. L'agriculteur, c'est tout cela.
L'agriculteur, c'est évidemment d'abord un producteur. Il n'est absolument pas
dans l'esprit du contrat territorial d'exploitation, qui est l'outil central de
reconnaissance de la multifonctionnalité que je viens d'évoquer, de nier cette
dimension de producteur. L'agriculteur sera toujours - et heureusement ! -
celui qui produit des biens agricoles pour notre alimentation, car il a pour
vocation de nourrir la planète, au-delà de la population française, au-delà de
la population européenne.
Mais cet agriculteur qui produit, c'est aussi un homme, une femme ou un ménage
qui exerce les fonctions que j'évoquais tout à l'heure et qui doivent être
encouragées.
Comme je l'ai dit voilà un instant, comme je l'ai dit hier au Conseil
agricole, cela vaut en particulier pour l'emploi. Il est question partout de
l'emploi en Europe, à tous les niveaux politiques, des présidents de la
République et chefs d'Etat aux chefs de gouvernement, en passant par les
ministres de l'économie et des finances. Aucune réunion européenne n'a lieu
sans que l'on y évoque la priorité qui doit être donnée à la lutte contre le
chômage, ce mal qui ronge nos sociétés, et à l'emploi. Par quelle absurdité, ou
incohérence, les ministres de l'agriculture et les responsables agricoles
seraient-ils les seuls à ne pas évoquer l'emploi ? Comment accepter que toutes
les politiques soient orientées vers l'emploi, sauf la politique agricole
commune et la politique agricole nationale ?
Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement considère que le CTE doit
être un instrument de développement de l'emploi dans le monde agricole, qu'il
s'agisse des chefs d'exploitation, par l'installation, ou des salariés
agricoles.
M. René-Pierre Signé.
Très bien !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
C'est très important. En
l'occurrence, nous avons une bataille à livrer et le CTE doit nous aider à la
gagner.
Mais le CTE, c'est aussi la reconnaissance d'autres tâches : la protection de
l'environnement et des paysages, l'entretien et la préservation des
territoires, l'animation du milieu rural.
Toutes ces tâches - certaines sont traditionnelles et sont donc déjà
effectuées par les agriculteurs, d'autres sont innovantes - doivent être
officiellement reconnues et encouragées. Le CTE a pour objet de contractualiser
ce lien entre les pouvoirs publics, entre la collectivité nationale, entre
nous, la société, et l'agriculteur.
M. Bernard Murat.
Des kolkhozes !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Vous évoquez les kolkhozes,
monsieur le sénateur ?
M. Bernard Murat.
Eh oui ! On y viendra !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Au-delà de la forme, qui me
paraît un peu exagérée - mais je vous encourage volontiers à recourir à ce type
d'excès car cela m'aide à faire passer mes idées ! - je vous en prie, gardons
la mesure. Examinez l'organisation qui est proposée.
A en croire certains propos ou articles sur le projet de loi d'orientation
agricole, on mettrait en place un carcan administratif et bureaucratique pour
l'agriculture française, alors que, partout ailleurs en Europe, on ne penserait
qu'à se libérer d'un tel carcan.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous laisserais volontiers ma place
quelques heures
(Sourires.)...
M. Hilaire Flandre.
Chiche !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
... au Conseil agricole à
Bruxelles pour que vous voyiez à quel rythme nos collègues européens
s'efforcent de se libérer de ce carcan bureaucratique. En effet, à la table des
négociations, pas une minute ne s'écoule sans que l'on nous propose une
nouvelle prime. Vous parlez d'un libéralisme ! Ce qui sévit partout en Europe,
ce n'est pas ce grand vent de libération des carcans, c'est, au contraire, la
volonté de réguler, d'aider les plus petits, ceux qui sont en difficulté,
d'ajuster les aides à ceux qui en ont besoin.
M. René-Pierre Signé.
C'est la solidarité !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
C'est l'idée de réorienter et
de prendre en compte des nouveaux besoins de l'agriculture.
Je noterai soigneusement ces informations et je vous les communiquerai si vous
le souhaitez. Ainsi, vous le constaterez, loin de ce grand vent de libéralisme
qui - je ne le nie pas - souffle parfois, notamment au sein de la Commission,
les pays européens cherchent surtout à être efficaces, justes, concrets et
pragmatiques.
M. Emmanuel Hamel.
Soyez-le vous-même !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Eh bien ! c'est l'objectif que
nous cherchons à atteindre avec le CTE.
Quoi de plus beau qu'un contrat, qui n'est pas la forme la plus élaborée de la
bureaucratie et de la paperasserie ! Le contrat, c'est la responsabilité qui
est affichée ; le contrat, c'est la responsabilité de l'exploitant agricole
face à la responsabilité de la société ; le contrat, c'est une action de
responsabilité pluriannuelle. Je pense que le CTE, qui, j'en suis certain, va
être consacré par cette loi d'orientation, sera un outil extrêmement
novateur.
Aussi, je voudrais vous dire ici, aussi précisément que possible, comment je
conçois ce CTE.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je ne veux pas que ce contrat soit un
instrument monolithique, concentré, centralisé, bureaucratique, et ce pour une
raison simple : je veux que cela marche, et j'y crois. C'est pourquoi je veux
être pragmatique, et pour cela le dispositif doit être décentralisé, adapté à
la réalité du terrain ; il doit reconnaître la diversité des situations.
En effet, il y a non pas « les » agriculteurs, mais « des » agriculteurs, qui
sont chacun dans une situation particulière, avec une exploitation
particulière, avec des problèmes particuliers. Le CTE doit reconnaître cette
diversité et doit être suffisamment décentralisé pour que le dispositif ait des
chances de réussir.
Pour ce faire, nous achevons une phase de préfiguration. Celle-ci a concerné
quatre-vingts départements. C'est vous dire si les organisations
professionnelles agricoles sont réticentes ! Elles ont toutes demandé, dans
l'ensemble des départements, à participer à cette préfiguration.
A l'issue de cette phase de préfiguration, qui s'achèvera à la fin du mois, le
ministère organisera avec tous ceux qui sont concernés, et même au-delà, avec
l'opinion, des débats publics, afin de prendre en compte le formidable
bouillonnement qui a été constaté dans l'ensemble des départements.
Je n'ai pas lu les quatre-vingts contributions ; elles ne sont d'ailleurs pas
encore toutes parvenues au ministère. S'agissant de celles que j'ai lues, elles
sont de qualité diverse. Certains départements sont un peu conformistes, - je
ne les citerai pas, afin de ne blesser personne - d'autres sont très audacieux
et très novateurs.
M. Raymond Courrière.
L'Aude !
(Sourires.)
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Cette phase de préfiguration a
donné lieu à un très bel effort de réflexion collective sur l'avenir de notre
agriculture. Il nous faut maintenant prendre en compte cet effort et organiser
un débat public pour tirer des leçons sur ce qu'il faut faire comme sur ce
qu'il ne faut pas faire. Il faudra parfois recadrer les débats en disant :
attention ! le CTE n'est pas fait pour cela ; là, vous avez raison, il faut
l'encourager.
Mais nous devons surtout, je l'ai dit tout à l'heure, avoir pour obsession de
reconnaître la diversité. C'est pourquoi, à titre personnel, je me suis
toujours méfié de ce que l'on appelle les contrats types. Je ne veux pas d'un
contrat type, qui serait un carcan. Je veux presque autant de contrats types
que de réalités agricoles, partout sur l'ensemble du territoire. Il faut
laisser l'éventail du choix sur des grandes options, sachant que les contrats
territoriaux d'exploitation comporteront deux grands volets : un volet
économique et social et un volet territorial et environnemental. Dans ces
volets, l'innovation et la diversité doivent trouver leur place.
Nous organiserons ce débat dans les semaines à venir. Les décrets
d'application de la loi seront pris au printemps prochain et, je l'espère, les
premiers contrats territoriaux d'exploitation pourront être signés au mois de
septembre ou d'octobre. En tout cas, c'est le cap que je me suis fixé.
Pour cela, vous le savez, nous disposons des moyens nécessaires. Dans le
budget, 300 millions de francs sont inscrits pour le contrat territorial
d'exploitation, auxquels s'ajoutent 150 millions de francs d'aides européennes
qui sont d'ores et déjà acquis.
Ces 450 millions de francs qui financeront le CTE pour la dernière partie de
1999 ne sont pas à la hauteur des enjeux, j'en suis bien d'accord. Nous
disposerons - je l'espère, et je le pense même maintenant - des crédits
européens réorientés, ainsi que je l'ai demandé tout à l'heure - vous le voyez,
la boucle se ferme. Grâce à la réorientation des crédits des aides directes
vers le développement rural, c'est-à-dire le deuxième pilier, nous pourrons
financer le contrat territorial d'exploitation. Je pense que c'est en bonne
voie. Il faudra sans doute opérer d'autres choix budgétaires, pour lesquels,
j'en suis sûr, dans quelques mois, si je suis encore là.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs je me suis efforcé de
ne pas être trop long, mais je l'ai été malgré tout un peu - telles sont les
grandes orientations de ce projet de loi que, à la suite de mon prédécesseur et
ami M. Le Pensec, qui a réalisé un excellent travail, je suis heureux de vous
présenter au nom du Gouvernement tout entier. Je suis convaincu que la
discussion qui va s'engager enrichira encore ce texte. Je vous remercie par
avance de votre contribution.
(Bravo ! et applaudissements sur les travées socialistes et sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à Mme le rapporteur du Conseil économique et social.
Mme Christiane Lambert,
rapporteur de la section de l'agriculture et de l'alimentation du Conseil
économique et social.
Monsieur le président, je vous remercie de me donner
la parole pour présenter l'avis du Conseil économique et social sur le projet
de loi d'orientation agricole avant que s'ouvre le débat général.
Le Conseil économique et social a effectué un travail approfondi d'analyse de
ce texte. L'ensemble des corps socioprofessionnels ont participé à ce travail
et l'ont adopté à une très importante majorité. Les agriculteurs présents au
Conseil économique et social ont approuvé à l'unanimité l'avis que j'ai porté
en leur nom.
Vous avouerai-je mon émotion en présentant cet avis, qui constitue le message
qu'un corps socioprofessionnel adresse par ma voix au législateur ? En effet,
avant d'être une militante syndicale qui a longtemps porté l'étendard des
jeunes agriculteurs, je suis une agricultrice passionnée par son métier.
L'histoire des politiques agricoles révèle que, de tout temps, l'intervention
de l'Etat en lien avec la profession visait un double objectif : adapter
l'agriculture aux évolutions de l'économie, d'une part, et aux mutations de la
société, d'autre part.
Il s'agissait d'abord, de nourrir les hommes tout en structurant le
développement des exploitations agricoles et des filières par la formation, la
vulgarisation, la forte organisation économique, la promotion et
l'exportation.
Puis les objectifs ont évolué vers un accompagnement plus ciblé selon la
diversité des territoires, l'attente de productions plus qualitatives, la
préoccupation environnementale et les évolutions démographiques.
Au fil des années, l'Etat s'est ainsi attaché à assurer la cohérence entre
aspiration au changement et gestion des changements.
Le Conseil économique et social affirme qu'une loi d'orientation agricole doit
marquer une réelle offre d'ouverture de l'agriculture sur la société, comme
l'ont constituée, en leur temps, les lois de 1960 et 1962.
L'intérêt croissant porté à l'alimentation, aux conditions de production, à la
santé, à l'espace, à l'emploi, à la vitalité des zones rurales, à la gestion
des ressources naturelles révèle l'attachement culturel de nos concitoyens à un
modèle de développement efficace et équilibré.
Ces éléments sont autant de défis nouveaux pour l'agriculture, qu'elle doit
intégrer dans sa nouvelle performance globale, performance qui sera désormais
tout à la fois économique, sociale, territoriale et environnementale.
Le Conseil économique et social a d'ailleurs souligné que depuis de nombreuses
années bon nombre d'agriculteurs ont déjà progressivement adapté leurs
stratégies d'exploitation, anticipant parfois des réglementations
administratives, le plus souvent dans un cadre structuré par les organisations
professionnelles agricoles. Sur le terrain, cela constitue donc non pas une
révolution, mais l'amplification d'une modernisation qualitative, à l'image de
la prise en compte de considérations sociales et environnementales par des
entreprises en nombre croissant, dans tous les secteurs de l'économie.
Nous nous sommes attachés, dans cet avis, à constater la réalité d'aujourd'hui
et à définir les tendances lourdes du contexte dans lequel évoluera demain
l'agriculture. Nous ne pouvons en effet ignorer des enjeux plus larges qui
peuvent sembler plus lointains mais qui ont pourtant une incidence directe sur
l'ensemble des acteurs économiques.
Je veux parler des évolutions qui se dessinent à l'échelon mondial, avec une
économie de plus en plus ouverte, une forte expansion de la demande alimentaire
mondiale, une libéralisation des échanges dont l'agriculture ne peut plus
s'abstraire depuis les accords de Marrakech.
Des distorsions subsistent cependant tant sur le plan social que le plan
environnemental, faussant la loyauté des échanges, sans parler du dumping
économique pratiqué par certains pays en totale contradiction avec les
exigences libérales qu'ils imposent aux autres Etats.
Il s'agit également de la réforme des politiques européennes agricole, rurale
et socio-structurelle dans le cadre de l'Agenda 2000, qui prépare en
particulier l'élargissement de l'Union européenne aux pays d'Europe centrale et
orientale.
Les premières propositions de la Commission montrent l'inadéquation manifeste
des solutions proposées face aux problèmes pourtant lucidement analysés.
La volonté d'alignement sur des prix mondiaux très théoriques et le
renforcement du soutien aux facteurs de production conduisent à une
concentration des structures et à une simplification des systèmes de production
vers des produits standard. L'agriculture se trouve fragilisée et appauvrie,
l'installation de nouveaux exploitants devient encore plus difficile. C'est la
poursuite de la logique néfaste enclenchée depuis 1992.
Le récent retournement des marchés confirme pourtant la permanence des risques
de crises et la nécessité du maintien de mécanismes de régulation au sein
d'organisations communes de marché renforcées et modernisées.
Enfin, sur le plan national, si notre agriculture est confortée par les succès
économiques de nos exportations et de nos industries agro-alimentaires, elle
souffre d'une baisse extrêmement importante du nombre de ses actifs qui conduit
à une forte dévitalisation de zones rurales entières.
Le retournement démographique actuel, caractérisé par un faible nombre de
départs en retraite, ne permet plus de compter sur des restructurations
importantes pour améliorer le revenu individuel des agriculteurs. Il devient
alors plus que jamais impératif de trouver de nouvelles voies de création de
richesses.
Dans cet environnement, face à la suprématie de la standardisation prônée par
certains pays, l'agriculture française se doit de conserver les valeurs qu'elle
porte au bénéfice de la société tout entière, dans l'équilibre entre respect de
la responsabilité humaine, vocation productive et exportatrice, culture de la
solidarité entre les territoires.
Ce choix doit servir de référence dans la perspective des prochaines échéances
européennes et internationales. Il faut affirmer que l'agriculture, par son
activité de production, crée des richesses pour des marchés nationaux,
européens et mondiaux, mais qu'elle fournit aussi des emplois et des biens
immatériels pour la société.
L'agriculture joue également, et de façon indissociable, un rôle dans
l'occupation et l'aménagement du territoire, l'emploi et l'animation du milieu
rural, la préservation des ressources naturelles et des paysages.
Selon l'adage : « vouloir, c'est commencer », le Conseil économique et social
affiche d'emblée une vision volontariste. En effet, il ne faut pas laisser à
d'autres pays ou à d'autres instances la responsabilité de la décision. Il faut
analyser les défis pour les relever et non pour s'en protéger.
Le projet de loi d'orientation agricole arrive donc à un moment stratégique
des calendriers tant national qu'européen et mondial. Nous sommes à un
carrefour de l'histoire où notre société doit choisir entre des lendemains
ouverts et un destin plus résigné.
Elaborer une loi d'orientation capable de répondre à ces enjeux nouveaux,
c'est proposer un cadre fiable et souple pour garantir une régulation des
marchés appuyée sur la discipline des professionnels, pour conquérir des
marchés plus segmentés et plus complexes ; c'est mettre en place des mesures
novatrices pour favoriser l'initiative économique des acteurs de l'agriculture,
en complémentarité avec les autres acteurs économiques.
Un tel choix doit inciter à prévoir dans la loi d'orientation un cadre visant
à moderniser les modalités de l'intervention publique pour éviter tant les
excès du libéralisme que les freins du dirigisme.
Le Président de la République a souhaité ce texte en mars 1996, en affichant
une double ambition pour l'agriculture française, dans le cadre d'un pacte
renouvelé avec la nation : donner à l'agriculture une réelle compétitivité sur
les marchés intérieur et extérieur, mais également réussir le renouvellement
des générations pour que l'agriculture puisse continuer à remplir ses missions
de création de richesses et d'emplois, de valorisation des territoires et de
contribution au rayonnement de notre pays.
Un premier projet, conduit par le précédent gouvernement, a permis de réaliser
un travail important, dont certains éléments ont été repris par le texte
actuel. Ce dernier consacre le bien-fondé des objectifs fixés par le Président
de la République au travers des quatre orientations principales que le
ministère de l'agriculture, d'abord avec M. Le Pensec puis avec vous, monsieur
le ministre, a assignées à ce texte de loi et que le Conseil économique et
social approuve.
Ainsi, le projet de loi vise tout d'abord à pérenniser l'activité agricole en
favorisant l'emploi salarié et l'installation des jeunes agriculteurs, pour
atteindre les objectifs fixés par la charte nationale de l'installation, signée
en 1995.
Par ailleurs, il a pour objet de renforcer la présence de l'agriculture sur
les marchés intérieur et extérieur en confortant la dimension qualitative de la
production agricole.
Ensuite, il tend à valoriser la richesse et la diversité des potentiels
territoriaux pour augmenter la valeur ajoutée globale du secteur agricole.
Enfin, il tente d'apporter une réponse aux attentes qualitatives de la
société, pour un développement durable de l'agriculture et pour une meilleure
compréhension de l'intervention publique en sa faveur.
Pour le Conseil économique et social, ces axes visent plus largement à ancrer
davantage l'économie agricole à la réalité territoriale. Ils constituent une
réelle orientation pour le projet de loi, propre à accompagner l'agriculture de
façon plus efficace, plus transparente et plus lisible.
Toutefois, cette réelle orientation ne doit pas exonérer les pouvoirs publics
de leur devoir d'organisation et de régulation en amont de l'activité, car il
est toujours plus efficace de réguler les marchés que de gérer les crises
a
posteriori.
Or le projet de loi souffre de lacunes dans ce domaine.
L'inscription de la territorialité de l'agriculture comme orientation majeure
contribue avant tout à assurer la reconnaissance de la multifonctionnalité de
l'agriculture en consacrant son rôle de gestion dynamique de l'espace et des
ressources naturelles ainsi que sa contribution à la création d'emplois, qui
découlent de la fonction de production.
Promouvoir un développement économique ancré dans les atouts territoriaux
permettra de préserver la diversité des régions pour mieux valoriser leurs
productions et, ainsi, pour augmenter la valeur ajoutée globale de
l'agriculture.
Cette orientation permettra de sortir de l'actuelle spirale de concentration
et d'uniformisation de l'agriculture qui nuit à l'installation des jeunes
agriculteurs et au maintien d'exploitations à taille humaine et à
responsabilité personnelle. Le Conseil économique et social considère qu'elle
favorisera la recherche de créneaux porteurs en liaison avec les partenaires
économiques régionaux.
Cette dimension qualitative des productions se retrouve en effet de plus en
plus dans les stratégies des entreprises agro-alimentaires valorisant le
savoir-faire des régions françaises sur les marchés mondiaux, démontrant leur
capacité à s'affranchir des contraintes du commerce international et des
contingents d'exportation sur les produits de base, notamment la diminution
drastique des restitutions déjà engagée.
C'est en réalité en amplifiant la différenciation de ses productions,
c'est-à-dire en mettant en avant la diversité et la typicité de nos
territoires, que la France pourra riposter à la logique de mondialisation,
lutter contre la délocalisation des productions, et donc maintenir l'emploi.
L'agriculture renforcera ainsi son rôle d'acteur essentiel du monde rural. Ce
sont les bases d'un contrat durable entre l'agriculture et la nation,
clarifiant contribution et rôle respectifs, fondant la nouvelle légitimité de
l'intervention et des soutiens publics.
Le projet de loi prévoit une nouvelle forme de soutiens tenant compte de
l'ensemble des fonctions de l'agriculture - économique, sociale, territoriale
et environnementale - pour favoriser une gestion plus contractuelle du
développement agricole. C'est la proposition du contrat territorial
d'exploitation, le CTE.
Le Conseil économique et social salue cette initiative qui vise à prendre en
considération des objectifs d'intérêt général et propose une autre approche de
l'intervention publique qui devra impérativement rester complémentaire et
indissociable d'une véritable politique de gestion et de régulation des
marchés.
Il souhaite que cette proposition favorise véritablement une nouvelle
stratégie de développement des exploitations en soutenant les initiatives, les
projets d'entreprise individuels et collectifs, de production de biens et de
services mettant en valeur les atouts territoriaux et environnementaux. Il faut
faire du CTE un levier d'action dynamique en faveur du développement durable
des exploitations agricoles. Il s'agit, en fait, de passer d'une logique de
guichet à une logique de projets.
Il convient toutefois de se méfier des slogans comme des effets de balancier.
S'il s'agit bien d'une orientation donnée par la loi, le Conseil économique et
social pense qu'elle doit s'appliquer progressivement pour s'enraciner
efficacement.
Cette orientation doit être suffisamment forte pour constituer une réelle
inflexion, mais fixer des objectifs accessibles au plus grand nombre
d'agriculteurs. Il ne faut pas tomber dans la logique du « tout territoire »,
car l'agriculture ne pourra durablement valoriser l'espace rural que si elle
est d'abord présente sur des marchés.
Les souhaits du Conseil économique et social ont d'ailleurs été entendus par
l'Assemblée nationale, qui a modifié le texte pour favoriser, à travers le CTE,
une approche de projet économique global, intégrant les différentes fonctions
de l'exploitation et cohérent avec les récents projets agricoles
départementaux.
C'est cette approche que pourraient renforcer les amendements proposés à ce
jour par la commission des affaires économiques et du Plan du Sénat. Il est
impératif, cependant, de les compléter par un article donnant aux commissions
départementales d'orientation les moyens de contrôler la cohérence de chaque
contrat avec les orientations globales et locales. Il semble que ce soit une
demande forte issue de l'exercice de préfiguration conduit à ce jour.
L'intervention coordonnée des différents échelons national, régional,
départemental et local devra permettre de concrétiser l'implication globale de
tous les intervenants de la politique agricole. Cela doit se faire en cohérence
avec tous ces acteurs, l'Etat assumant son rôle d'orientation et de régulation,
en particulier dans le cadre des futurs contrats de plan Etat-région
actuellement en préparation.
Cet effort commun doit se retrouver dans des contributions réellement
conséquentes au financement des contrats. Les contributions nationales devront
être plus ambitieuses que de simples redéploiements. Elles pourront s'articuler
par la suite avec les différents fonds européens, issus de la politique de
marchés, de la politique rurale et de la politique socio-structurelle.
Pour le Conseil économique et social, cette nouvelle approche pourrait être la
nouvelle base de cohérence à l'échelon européen afin d'harmoniser les pratiques
des Etats et d'éviter ainsi les risques de distorsion. Une telle préoccupation
est d'ailleurs particulièrement de mise à l'heure de l'introduction de l'euro
qui vise, notamment, à résorber les distorsions de charges et de situations.
Cette nouvelle approche des aides publiques permettra aussi d'envisager une
forme de modulation dynamique vers des soutiens plus découplés et compatibles
avec les contraintes du commerce mondial.
Si l'ancrage territorial est une option jugée positive, il ne doit pas
estomper la nécessité d'une régulation efficace de l'économie agricole
permettant aux acteurs d'entreprendre, de conquérir des marchés, de les
organiser, de gagner en compétitivité, d'encourager les investissements, de
développer les relations au sein des filières, de la production à la
distribution.
Sur ces différents points, le Conseil économique et social a déploré les
lacunes de nombreux sujets insuffisamment traités ou non abordés par le projet
de loi. Cependant, l'Assemblée nationale a déjà apporté des améliorations
substantielles, et la commission des affaires économiques et du Plan du Sénat
va elle aussi dans ce sens en reprenant un certain nombre d'amendements dans
lesquels le Conseil économique et social retrouve ses propositions.
Concernant le statut des entreprises et des personnes, le projet de loi vise à
modifier la définition de l'activité agricole. Le texte d'origine proposait une
rédaction régressive par rapport aux textes en vigueur, rédaction qui ne
clarifiait pas l'état actuel du droit. L'Assemblée nationale a proposé une
version inadaptée qui pourrait faire perdre à un certain nombre d'agriculteurs
leur statut d'exploitant. Face à de nombreuses incompréhensions entre les
différents acteurs du milieu rural, mettant en péril la complémentarité de ces
derniers, la voie de la sagesse - c'est d'ailleurs l'avis de la commission des
affaires économiques et du Plan du Sénat - consiste à s'en tenir aux textes
actuellement en vigueur ainsi qu'à la jurisprudence qui les a opportunément
explicités.
La loi devra pourtant évoluer pour tendre vers une égalité de droits et de
devoirs entre les différents acteurs, selon les recommandations du Conseil
économique et social.
Les auteurs du présent projet de loi proposent la mise en place effective du
registre de l'agriculture, et la définition de l'exploitant agricole lui
donnera le caractère opérationnel voulu. Réaffirmer la place et le rôle de
l'agriculteur en tant que véritable chef d'entreprise, comme le propose votre
commission, renforcera l'efficacité de ce dispositif.
Le statut de conjoint collaborateur représente une adaptation positive qui
doit être impérativement complétée par des améliorations des retraites
agricoles, pour lesquelles le projet de budget pour 1999 ne constitue qu'un
progrès inachevé.
Répondant à une véritable attente des agriculteurs sur le terrain, le projet
de loi tend à doter d'une meilleure efficacité la politique des structures pour
faciliter l'installation de nombreux jeunes et assurer l'orientation plus
ciblée du foncier.
Le Conseil juge cette orientation positive, mais considère qu'il serait
également souhaitable d'accompagner cette politique par des éléments incitatifs
pour faciliter la transmission des exploitations agricoles, donner un statut
aux droits à produire, encourager le portage du foncier agricole et adapter le
statut de fermage, notamment pour installer des jeunes en succession non
familiale. C'est sur l'ensemble de ces éléments que devrait porter le rapport
souhaité par votre commission.
Il est regrettable que le projet de loi élude le problème de la fiscalité
agricole, qui serait pourtant nécessaire pour permettre à la fois la réactivité
des entreprises et la gestion des risques : la mise en place d'une assurance
récolte, telle qu'elle existe déjà dans de nombreux pays, doit être
accélérée.
M. Raymond Courrière.
Très bien !
Mme Christiane Lambert,
rapporteur du Conseil économique et social.
Le projet initial traitait
insuffisamment de l'organisation économique des producteurs. Leurs efforts
d'organisation doivent être encouragés, que ce soit dans le cadre de
groupements de producteurs ou des interprofessions.
Sur ces sujets, les propositions soumises par votre commission à votre
assemblée devraient, tel que l'avait souhaité le Conseil économique et social,
compléter heureusement les dipositions votées par l'Assemblée nationale, en
particulier sur l'adaptation des règles de concurrence renforçant les
possibilités de réaction des interprofessions ou des filières en cas de
crise.
La législation de l'intégration devrait être revue et complétée pour faire
face à un phénomène qui s'étend dangeureusement.
Les producteurs doivent pouvoir pérenniser leurs outils coopératifs par une
défiscalisation de leurs investissements en aval et, pour cela, les compléments
que votre commission souhaite apporter à l'article 30
bis
répondent aux
préoccupations du Conseil.
Les agriculteurs doivent également avoir les moyens de communiquer
efficacement sur leur activité, leurs métiers et leurs savoir-faire, et c'est
pour cela que le Conseil économique et social a souhaité la création d'un fonds
de communication et qu'il approuve la proposition de mise en place d'un tel
fonds formulée par l'Assemblée nationale.
Concernant la qualité des produits, celle-ci doit être clairement distinguée
des politiques de marques qui répondent à des préoccupations de marketing
commercial.
Les objectifs du soutien public aux démarches de qualité doivent être triples
: territorialiser la production, augmenter sa valeur ajoutée au profit des
producteurs et, enfin, faciliter l'information et la satisfaction des
consommateurs.
Pour le Conseil économique et social, les outils proposés par la loi ne sont
pas en adéquation avec ces objectifs, et les évolutions que vous pourrez
obtenir sur ce chapitre répondent aux préoccupations du Conseil. Elles seront
donc déterminantes.
Concernant le volet « espace rural et environnement », il nous paraît évident
que l'adaptation des méthodes de production à la protection de l'environnement
et à la gestion durable de l'espace agricole peut être intelligemment prise en
compte de façon incitative dans le cadre des contrats territoriaux
d'exploitation, pour concilier efficacité économique et occupation de
l'espace.
Mais il convient aussi de maintenir des outils efficaces pour permettre que la
gestion de l'espace rural soit assurée en complémentarité par les agriculteurs
et les autres acteurs du milieu rural. A ce titre, il est urgent que le fonds
de gestion de l'espace rural soit doté d'une ressource propre et pérenne.
Des aménagements intéressants sont apportés par le projet de loi à l'exercice
de l'emploi salarié par l'avant-projet, en particulier sur les conditions de
travail.
L'abaissement des charges des employeurs est aussi un facteur de maintien et
de création d'emplois durables, permanents et saisonniers, qu'il conviendrait
de favoriser.
L'enseignement, la formation, la recherche et le développement devront, dans
leurs objectifs et dans leurs moyens, accompagner les évolutions de
l'agriculture de façon à mieux prendre en compte ses nouvelles missions et sa
dimension plus qualitative.
En conclusion, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi
d'orientation agricole représente un choix décisif pour notre pays, attendu
avec espoir par les agriculteurs pour renforcer leurs liens avec l'ensemble de
nos concitoyens.
La contribution du Conseil économique et social, avant que vous examiniez ce
projet, est d'apporter des éléments contructifs pour conforter le dynamisme et
la créativité des projets d'agriculteurs nombreux et performants, partenaires
des autres acteurs des filières et du milieu rural. La rénovation des
politiques publiques tend donc à favoriser leur place au sein de la société
pour qu'ils soient, plus qu'hier, économiquement efficaces, socialement utiles
et politiquement compris.
Ce modèle doit être source de modernité et de sécurité, d'équilibre et
d'efficacité, créateur d'emplois, afin de sceller durablement un nouveau
contrat avec l'ensemble de la société.
Mais il ne faudrait pas que le modèle que nous dessinons pour notre pays soit
contredit par les réformes que pourrait entreprendre l'Europe dans le cadre de
la politique agricole commune.
M. Emmanuel Hamel.
Méfions-nous de l'Europe !
Mme Christiane Lambert,
rapporteur du Conseil économique et social.
C'est pourquoi le Conseil
économique et social affirme qu'il est indispensable que vous légifériez en
adoptant ce texte, afin que ce dernier constitue un signal fort adressé à nos
partenaires européens pour leur montrer que l'on peut réellement mettre en
place en Europe une agriculture qui, tout en conservant une place éminente sur
les marchés mondiaux, présente une utilité forte pour la société par sa
contribution aux causes d'intérêt général que sont l'emploi, l'occupation
dynamique de l'espace et la protection de l'environnement.
Ce message arrive à un moment crucial. En effet, malgré la création réussie et
porteuse d'espoir de l'euro et la volonté affichée de poursuite de
l'intégration européenne, certains membres de l'Union s'interrogent sur les
capacités d'une Europe en panne d'idées à orienter durablement nos économies
sur la voie de la prospérité. Ils en profitent pour remettre en cause le
principe de solidarité par d'hasardeuses et inacceptables propositions de
cofinancements nationaux des dépenses agricoles européennes.
Il faudra donc une volonté française forte, portée par les pouvoirs publics et
leurs administrations, ainsi que par l'ensemble des organisations
professionnelles agricoles, pour garder une cohérence entre la politique
nationale et la politique européenne.
La France a l'occasion de prouver que l'agriculture, qui a été le moteur de la
construction européenne, peut et doit le demeurer, parce qu'elle est, sur notre
continent, originale, dynamique, créatrice de richesses et d'emplois, ancrée
dans notre histoire et notre culture communes et, par là même, facteur
d'identité et de cohésion de l'Europe. Ainsi, ce n'est pas seulement du blé qui
lève de la terre qu'on laboure, c'est une civilisation tout entière.
Si les lois de 1960 et 1962 ont constitué la base du succès pour le
développement de notre agriculture, c'est surtout parce que, au-delà des doutes
du quotidien, l'ensemble des responsables politiques et des grands dirigeants
agricoles se les sont appropriées et se sont engagés sans réserve à les mettre
en oeuvre.
Près de quarante ans plus tard, l'histoire se renouvelle. Cette loi
d'orientation connaîtra le même destin si, par vos amendements et votre
engagement, vous montrez votre volonté de consolider notre agriculture, de
confirmer la construction européenne, de renforcer le rayonnement de la France
dans le monde et, par là même, de faire entrer de plain-pied les agriculteurs
français dans le troisième millénaire.
(Applaudissements.)
M. le président.
Madame, permettez-moi de vous adresser mes très cordiales félicitations pour
l'excellente intervention que vous venez de présenter au Sénat.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Je voudrais à mon tour, au nom
du Gouvernement, féliciter Mme Lambert et la remercier de la qualité
remarquable de son travail,...
M. Emmanuel Hamel.
Elle est toujours remarquable !
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
... qualité qui n'étonnera pas
ceux qui connaissent son parcours et ses capacités. Ce travail honore, je
crois, le Conseil économique et social et éclairera très utilement nos travaux.
(Applaudissements.)
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques et
du Plan.
M. Jean François-Poncet,
président de la commission des affaires économiques et du Plan.
Je veux à
mon tour remercier Mme Lambert de son excellent exposé, dont la commission
s'est très largement inspirée.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues,
l'agriculture française n'a pas cessé d'être, au coeur de ce siècle - et ce
depuis près de cinquante ans - au centre des grandes mutations qui ont
bouleversé l'économie et la société.
Au cours de cette période, elle a multiplié sa production par sept ; dans le
même temps, le nombre des exploitations a diminué des deux tiers et la part des
dépenses consacrées par les ménages à l'alimentation, ainsi d'ailleurs que les
prix à la production, ont diminué de plus de moitié.
Aucun secteur de l'économie nationale n'a connu autant de traumatismes
successifs ; aucun n'a réagi avec autant de dynamisme et de succès ; aucun n'a
autant contribué à faire de la France une des toutes premières puissances
économiques mondiales.
M. Charles Revet.
Très bien !
M. Jean François-Poncet,
président de la commission des affaires économiques.
L'Etat a accompagné
cette immense révolution verte. Il a aidé l'agriculture à faire évoluer ses
structures, à organiser ses marchés, à financer ses investissements. Le Marché
commun, d'une part, les grandes lois de 1960-1962 et celles qui les ont ensuite
complétées, d'autre part, ont joué à cet égard un rôle aussi décisif
qu'heureux.
Seulement, voilà ! L'évolution ne s'est pas arrêtée. L'agriculture est
aujourd'hui confrontée à des défis nouveaux de grande ampleur, que nous devons
l'aider à relever.
Premier défi : la politique agricole commune est remise en question une fois
de plus. Elle l'est de l'intérieur de la Communauté, où certains de nos
partenaires lui reprochent de coûter trop cher ; elle le sera demain de
l'extérieur, face au nouvel assaut qu'elle subira lors des négociations qui
auront lieu dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce.
Deuxième défi : le consommateur exprime des exigences nouvelles. La qualité,
la traçabilité, la sécurité des produits alimentaires deviennent des impératifs
impossibles à ignorer.
Troisième défi : la société veut, à juste titre, protéger son environnement
contre des pollutions auxquelles la recherche d'une productivité maximale a
acculé certains secteurs de l'agriculture.
Parallèlement, la société demande que soit préservé le rôle essentiel de
l'agriculture dans l'occupation du territoire et l'entretien des paysages. Nos
concitoyens n'acceptent, nous le savons tous, ni la désertification ni les
friches, dont l'extension menace l'espace rural.
A l'évidence, l'élaboration d'un grand texte d'orientation s'imposait. Le
Président de la République l'avait demandé ; Philippe Vasseur l'avait mis en
chantier ; votre prédécesseur, monsieur le ministre, l'a soumis à l'Assemblée
nationale ; les agriculteurs l'attendent ; vous-même, monsieur le ministre,
défendez ce texte à partir d'aujourd'hui devant le Sénat, avec un talent et une
fougue auxquels je tenais à rendre hommage.
M. Emmanuel Hamel.
Très bien !
M. Jean François-Poncet,
président de la commission des affaires européennes.
Il n'y a donc aucune
divergence de vues entre nous sur la nécessité d'élaborer une loi fondatrice
complétant et corrigeant, sans les effacer, les lois qui l'ont précédée et dont
je rappelais tout à l'heure l'existence.
De divergence, il n'y en a pas non plus, monsieur le ministre, sur nombre
d'objectifs et de dispositions du texte que vous nous soumettez. En effet,
reconnaître la multifonctionnalité de l'agriculture et promouvoir sa
pluriactivité, inciter les producteurs à recourir à des pratiques plus
respectueuses de l'environnement, valoriser, par une politique de qualité et
d'origine, les spécificités de nos territoires, répartir plus équitablement les
aides publiques, porter, enfin, les retraites agricoles au niveau de celles des
autres catégories sociales, donner aux conjoints un statut correspondant à
l'éminente contribution qu'ils apportent à la marche des exploitations sont
autant de priorités auxquelles la commission des affaires économiques, unanime,
adhère depuis longtemps.
En revanche, comme l'exprimera mieux que je ne saurais le faire le rapporteur
de la commission, M. Michel Souplet, la commission, dans sa majorité - je dis
bien « dans sa majorité » et non « à l'unanimité » - s'est interrogée sur la
finalité fondamentale du projet et - il faut bien le dire - sur certaines des
principales mesures qu'il vise à mettre en oeuvre.
J'évoquerai d'abord, d'un mot, la philosophie du texte.
Reconnaître la multifonctionnalité de l'agriculture ne doit pas - à nos yeux,
en tout cas ! - conduire à minorer le contenu économique de sa mission.
L'agriculteur est avant tout et d'abord un producteur. La noblesse de son
métier est de travailler pour nourrir ses semblables. L'agriculture ne sera
présente sur nos territoires que si elle est d'abord présente sur nos
marchés.
M. Philippe François.
Parfaitement !
M. Jean François-Poncet,
président de la commission des affaires économiques.
J'ai pris bonne
note, monsieur le ministre, de ce que vous avez dit sur ce sujet. Vous dire
que, pour autant, la lecture du texte nous conduit à vous rejoindre dans vos
conclusions est un pas que, pour le moment - nous verrons ce qu'il en sera à la
fin de ce débat - je ne veux pas franchir.
Pourquoi ? Précisément parce que le projet que nous avons à examiner traite
cette vocation économique - la principale, à nos yeux - comme si elle était
appelée à devenir peu à peu l'accessoire.
M. Philippe François.
Très bien !
M. Jean François-Poncet,
président de la commission des affaires économiques.
En particulier, le
texte ne met nulle part l'accent sur les positions acquises par l'agriculture
française sur les marchés mondiaux. Nulle part, il n'expose ce qui doit être
fait pour conforter ces positions.
Ai-je besoin de rappeler que la valeur de nos exportations agricoles et
agroalimentaires a été multipliée par dix en vingt-cinq ans ? Dois-je encore
rappeler - tout le monde ici le sait - que la France est devenue le deuxième
exportateur mondial de produits agricoles, derrière les Etats-Unis, et qu'elle
est le premier exportateur mondial de produits agricoles transformés ?
Conserver et développer ces positions, que nous avons conquises en partie,
c'est vrai, grâce aux restitutions mises en oeuvre par la politique agricole
européenne, est, à nos yeux, un objectif central de toute politique agricole
ambitieuse.
(Très bien ! sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains
et Indépendants.)
Les Etats-Unis et un certain nombre d'autres pays, nous le savons bien,
s'opposeront à l'Europe sur ce point dans les négociations de l'OMC.
M. Charles Revet.
Comme toujours !
M. Jean François-Poncet,
président de la commission des affaires économiques.
Tel fut d'ailleurs
le cas dans les négociations du GATT !
Il appartiendra au Gouvernement, et à vous-même, monsieur le ministre, de
veiller à ce que la Communauté résiste aux pressions qui s'exerceront sur elle
et défende coûte que coûte la vocation exportatrice de l'agriculture
européenne, en général, et de l'agriculture française en particulier.
A défaut, il se résignerait à un repli dont il nous a semblé trouver la trace
dans le projet de loi qui nous est soumis.
Il n'est toutefois pas dans nos intentions de faire au Gouvernement un procès
d'intention, et c'est pourquoi je vous demande de répondre clairement à la
question fondamentale suivante : quelle est l'ambition du Gouvernement pour
notre agriculture ?
Un sénateur du groupe du RPR.
Aucune !
M. Jean François-Poncet,
président de la commission des affaires économiques.
Quelle place
revendique-t-il pour elle sur les marchés dans le monde de demain, un monde qui
comptera plus de dix milliards d'êtres humains ?
Cette première question débouche très directement sur une deuxième, qui
concerne, elle, les charges sociales et fiscales qui pèsent sur l'agriculture.
Vous savez à quel point les agriculteurs y sont sensibles.
La compétitivité de nos productions non seulement à l'exportation mais à
l'intérieur de nos frontières dépend en effet de l'harmonisation des charges et
des législations au sein de l'Union européenne. Or, de cela, le projet de loi
ne parle pas.
Dès lors, je serais presque tenté de vous demander, au nom du Sud-Ouest, que
nous représentons tous les deux, monsieur le ministre,...
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Pas ici ! En tout cas pas moi
!
M. Jean François-Poncet,
président de la commission des affaires économiques.
... ce que vous
comptez faire pour mettre nos producteurs de fruits et légumes à égalité de
charges et de chances avec leurs concurrents espagnols.
Plus généralement, quelles mesures comptez-vous prendre pour éliminer, enfin,
les anomalies fiscales dont pâtit notre agriculture ?
Après la finalité, j'en viens - je serai très bref - aux moyens devant
permettre la mise en oeuvre du texte, à commencer, bien entendu, par le contrat
territorial d'exploitation, ou CTE, que vous avez défendu avec tant de fougue,
monsieur le ministre.
L'idée, en elle-même, est intéressante, et le fait est qu'elle est bien reçue
par les agriculteurs, en tout cas par ceux avec lesquels j'ai pu m'en
entretenir.
M. Gérard Cornu.
Pas par tous !
M. Jean François-Poncet,
président de la commission des affaires économiques.
Elle peut permettre,
c'est vrai, une meilleure adaptation des productions aux spécificités des
territoires, en même temps, d'ailleurs, qu'une répartition plus équitable des
aides publiques. La majorité de la commission n'en a pas moins exprimé des
réserves sur deux points particuliers.
A ses yeux, le CTE porte en lui l'évident danger d'une étatisation, sinon
d'une bureaucratisation de l'agriculture,...
M. Charles Revet.
C'est une certitude !
M. Jean François-Poncet,
président de la commission des affaires économiques.
... qui serait un
grand mal en soi.
Je ne suis pas sûr, monsieur le ministre, que le fait que l'on déconcentre les
négociations et que l'on en confie l'arbitrage aux préfets, et le fait que les
contrats épouseront la diversité des territoires leur enlèvent le caractère
étatique et bureaucratique que nous redoutons.
M. Gérard Cornu.
Tout à fait !
M. Jean François-Poncet,
président de la commission des affaires économiques.
De surcroît - je
rends chacun attentif à ce point - les contrats feront que l'on mettra
automatiquement en cause la responsabilité de l'Etat si les orientations
auxquelles il souscrit se révèlent fâcheuses ou calamiteuses. Je vois déjà le
cortège des récriminations et des exigences reconventionnelles que le système
risque d'engendrer ! L'agriculteur aura en effet tendance à oublier qu'il a,
lui aussi, signé le contrat et il rendra responsable l'Etat cosignataire.
M. Gérard Cornu.
Eh oui !
M. Jean François-Poncet,
président de la commission des affaires économiques.
Attendons-nous à des
demandes et à des contentieux qui pourraient beaucoup compliquer les choses à
l'avenir !
Par ailleurs, la commission ne comprend pas - vous y avez fait référence,
monsieur le ministre - comment un modeste crédit de 300 millions de francs - je
sais bien qu'il s'agit simplement des contrats de la fin de l'année ! - peut
permettre au CTE de jouer le rôle central qui lui est assigné.
Votre prédécesseur avait, à l'Assemblée nationale, promis de dégager les
moyens nécessaires par redéploiement de crédits existants. Mais au détriment de
quelles actions ces redéploiements s'effectueront-ils ? Faudra-t-il déshabiller
le fonds d'installation agricole, ou les offices, ou les OGAF, qui sont déjà
insuffisamment dotés ?
L'Europe paiera, nous dites-vous, monsieur le ministre. Mais ne faut-il pas
craindre qu'en cherchant à mobiliser les aides communautaires pour des actions
aussi étroitement liées à des spécificités nationales on ne donne des armes à
ceux de nos partenaires qui militent pour une renationalisation de la politique
agricole commune ?
Le bon accueil que vous avez reçu à Bruxelles ne me rassure donc qu'à moitié,
je dois vous le dire très franchement. Méfiez-vous des rebondissements
qu'entraînera la demande que nous formulons !
Pour conclure sur le CTE, je dirai que l'idée est bonne, mais que les
conditions de sa mise en oeuvre nous semblent devoir être revues et précisées.
M. Souplet proposera des amendements qui répondent à ces préoccupations et que,
je l'espère, vous pourrez accepter.
Reste le problème de la structure foncière des exploitations. Il est probable
que la politique des structures a besoin d'une mise à jour pour favoriser
l'installation des jeunes plutôt que la concentration des exploitations. Mais
faut-il aller jusqu'à subordonner la transmission des exploitations au sein
d'une même famille au blanc-seing de la commission départementale d'orientation
agricole ?
M. Patrick Lassourd.
Très bien !
M. Jean François-Poncet,
président de la commission des affaires économiques.
Très franchement,
nous ne le croyons pas, et il semble que l'immense majorité des agriculteurs,
avec nous, ne le croient pas non plus !
Plusieurs sénateurs du RDSE et de l'Union centriste.
Tout à fait !
M. Jean François-Poncet,
président de la commission des affaires économiques.
Nous estimons, en
revanche, qu'il y a lieu d'accorder aux cédants des avantages fiscaux et
financiers pour les inciter à transmettre leur exploitation à des jeunes.
M. Patrick Lassourd.
Très bien !
M. Jean François-Poncet,
président de la commission des affaires économiques.
Monsieur le
ministre, je veux, en terminant, formuler simplement un espoir : puissent les
amendements de la commission permettre au texte qui nous est soumis de mieux
répondre aux espérances d'un monde agricole qu'il serait grave de décevoir au
moment où il va entrer dans une zone de grande turbulence européenne et
mondiale ; il est, en fait, de notre devoir de l'aider à en surmonter les
risques.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Souplet,
rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan.
Chère
Christiane, je te remercie pour les paroles que tu as bien voulu prononcer
devant notre assemblée.
M. Emmanuel Hamel.
Un tutoiement en séance publique ?
M. Michel Souplet,
rapporteur.
Elles attestent du bon travail réalisé par le Conseil
économique et social, et nous avons pour habitude de respecter le travail des
gens compétents dans le secteur qui est le leur !
Les hasards de la vie et les diverses responsabilités que j'ai assumées ont
fait que j'ai eu l'honneur de participer aux discussions des accords de Stresa
et à l'élaboration du traité de Rome.
Trois ans plus tard, les agriculteurs français, au travers de leurs
organisations professionnelles, passaient un contrat avec l'Etat, et les lois
d'orientation agricoles de 1960 et de 1962 voyaient le jour.
Ces deux textes, revus et adaptés, ont permis la mutation extraordinaire de
l'agriculture et son adaptation aux exigences nouvelles des citoyens et des
consommateurs.
En quarante ans, la France, grande importatrice de denrées alimentaires dans
les années cinquante, est devenue l'un des premiers pays exportateurs mondiaux,
avec, aujourd'hui, plus de 67 milliards de francs d'excédents de la balance
commerciale.
A l'aube du troisième millénaire, alors qu'une réforme de la politique
agricole commune est en cours et que vous allez, monsieur le ministre, avoir à
défendre avec acharnement, obstination et efficacité les intérêts de la France
et de ses agriculteurs, il était urgent de bien redéfinir le rôle de ces
derniers dans la société. Le projet de loi d'orientation que vous nous proposez
pourrait être ce nouveau contrat entre le pays et les acteurs du monde
agricole.
Hier, nous étions à Versailles pour décider ensemble...
M. Emmanuel Hamel.
Pas tous !
M. Philippe François.
Sauf Hamel !
(Rires.)
M. Michel Souplet,
rapporteur.
... d'une avancée importante dans la construction de
l'Europe,...
M. Emmanuel Hamel.
Quelle Europe !
M. Michel Souplet,
rapporteur.
... à laquelle nous sommes tous très attachés.
Demain vont commencer les discussions, âpres mais fondamentales, de
l'Organisation mondiale du commerce, et nos partenaires les plus coriaces,
adeptes du plus grand libéralisme pour les autres mais sachant par ailleurs
très bien se protéger eux-mêmes, entendent exiger et obtenir des concessions
qui seraient inacceptables de leurs partenaires européens.
M. Charles Revet.
Vous avez raison !
M. Michel Souplet,
rapporteur.
Monsieur le ministre, permettez-moi de dire ici, du haut de
cette tribune, que les cartes sont biseautées. Nous ne jouons pas dans la même
cour.
Les Etats de l'Union européenne sont des pays à forte démographie, à surface
agricole utile non extensible, plutôt même en réduction, dans lesquels les
problèmes d'aménagement du territoire et d'environnement sont prioritaires.
Toutes ces contraintes sont inconnues des grands pays exportateurs que sont les
Etats-Unis, le Canada, la Nouvelle-Zélande ou l'Australie. Les conditions de
production et les coûts y sont bien différents.
Notre indépendance alimentaire doit être confirmée. Nos efforts pour remplir
nos missions - sociale et environnementale - doivent être reconnus et
rémunérés, et ce sont bien ces fonctions nouvelles que nous avons ensemble à
définir dans le texte que nous allons discuter.
J'ai eu l'occasion de participer en septembre dernier au congrès de la
Confédération européenne de l'agriculture à Lubiana, confédération qui regroupe
les représentants des organisations professionnelles agricoles des quinze pays
de l'Union et les dix pays proches et futurs candidats. A l'unanimité, et
devant les représentants politiques de certains Etats, il a été souhaité la
définition d'un « modèle européen d'entreprise agricole » pour justifier le
droit à la différence et faire obstacle au libéralisme total qui ne serait que
la « loi de la jungle ».
Notre ambition, au Sénat, serait de faire voter un texte qui pourrait être ce
modèle et sur lequel nos négociations communautaires pourraient peut-être
s'appuyer.
Dans cet état d'esprit et avant de vous présenter les conclusions de la
commission des affaires économiques sur ce projet de loi d'orientation
agricole, je souhaite rappeler l'importance qu'un tel texte revêt non seulement
pour le monde paysan, mais aussi pour l'ensemble de nos concitoyens, même s'ils
n'en ont pas toujours pris conscience.
Il est essentiel que nous ne les décevions pas, car notre société de ruptures
et d'absence de repères serait encore plus fragilisée.
Loin de moi la volonté de voir disparaître les débats idéologiques ou de ne
pas tenir compte des idées de chacun, mais je suis intimement persuadé que le
monde agricole et rural perdrait beaucoup, aujourd'hui, à être la proie de
conflits stériles.
Ce projet de loi est loin d'être parfait ; votre rapporteur en est convaincu
et, comme vous le verrez, il vous propose de l'améliorer sur de très nombreux
points.
Néanmoins, soulignons dès à présent, et gardons en mémoire que ce texte
reprend une grande partie des dispositions du projet de loi d'orientation pour
l'agriculture, la forêt et l'alimentation déposé le 6 mai 1997 sur le bureau du
Sénat par Philippe Vasseur, ministre à l'époque,...
M. Charles Revet.
C'est vrai !
M. Michel Souplet,
rapporteur.
... à la demande du Président de la République, et que
j'avais, durant un mois, étudié en détail.
C'est le cas, notamment, du contrôle des structures, d'une partie de
l'organisation interprofessionnelle, du volet social, des dispositions
relatives à l'enseignement et de quelques dispositions concernant la
qualité.
En outre, la quasi-intégralité du volet sanitaire que la commission des
affaires économiques vous propose est issue du projet de loi relatif à la
qualité sanitaire des denrées proposé également par M. Philippe Vasseur et
adopté par l'Assemblée nationale et le Sénat au cours du premier trimestre
1997. Ce texte avait fait l'objet d'un excellent rapport de notre collègue
Marcel Deneux. Ce volet sanitaire a été accepté par le Gouvernement.
Par ailleurs, la proposition de loi n° 8 rectifié portant dispositions
urgentes en faveur de l'agriculture, rapportée excellemment par notre collègue
Gérard César et adoptée par l'ensemble de la majorité sénatoriale au mois de
décembre dernier, est satisfaite par ce projet de loi sur de nombreux
points.
J'ai donc souhaité travailler dans un esprit constructif et ouvert, mais,
soyez-en sûr, déterminé.
Enfin, il me paraît indispensable pour le Sénat, comme l'a souligné à maintes
reprises M. Christian Poncelet, président de la Haute Assemblée, d'adopter une
démarche pragmatique, notamment sur un projet de loi d'orientation agricole qui
devrait s'appliquer pour les dix années à venir. La commission des affaires
économiques a donc abordé sans complaisance le texte qui lui était soumis tout
en souhaitant ardemment qu'il soit marqué par l'empreinte du Sénat.
Le rapport que j'ai maintenant l'honneur de vous présenter, mes chers
collègues, est perfectible, mais je vais essayer, devant vous, d'en démontrer
l'équilibre.
Je commencerai par l'environnement du projet de loi.
« Une société indifférente à l'ordre de ses fins devient, comme par réflexe,
une société d'indifférence. » Ces mots de Pierre Emmanuel ont guidé mes
travaux, que je vais vous présenter en deux points : le premier rappelle
brièvement l'environnement de ce projet de loi ; le second justifie les choix
que la commission des affaires économiques vous propose de retenir.
Ayant présenté son avant-projet en janvier 1998, le Gouvernement a transmis
pour avis ce texte au Conseil économique et social, qui s'est prononcé le 27
mai dernier, comme nous l'a rappelé, voilà quelques instants, Mme Christiane
Lambert. La commission de la production et des échanges a examiné ce projet de
loi en juillet dernier. L'Assemblée nationale en a débattu en octobre.
Ce texte s'inscrit dans la longue tradition des lois agricoles.
Dès l'après-guerre, l'impératif de reconstruction et de modernisation de
l'économie s'est traduit en agriculture par le plan Marshall puis par les lois
de 1960 et 1962, dont la force est d'avoir su ouvrir des perspectives, tracé
les lignes directrices qui ont permis la formidable modernisation et le large
développement, notamment à l'exportation, de notre secteur agricole et
alimentaire.
La loi d'orientation de 1960 procédait d'une volonté de rénover les structures
de production, de façon que les exploitants parviennent à une parité de revenus
et de condition de vie avec les autres catégories professionnelles. De nombreux
textes d'adaptation ont été votés depuis, jusqu'à la loi du 1er février 1995 de
modernisation de l'agriculture, que j'ai eu l'honneur de rapporter devant la
Haute Assemblée.
A ce stade de la réflexion, la commission des affaires économiques souhaite se
féliciter de la diligence dont ont fait preuve les deux précédents
gouvernements dans l'application de la loi de modernisation de 1995.
Ce texte de modernisation de l'agriculture étant récent, certains ont exprimé
leur scepticisme quant à l'utilité de mettre en chantier une nouvelle loi
d'orientation. Plusieurs autres arguments ont été avancés : incertitudes liées
au contexte international ; complexité des chantiers communautaires sur la
prochaine décennie ; intégration totale de l'agriculture dans l'économie ;
diminution de la population active agricole et du poids de ce secteur dans le
PIB, etc.
Je ne partage pas du tout cette analyse, croyez-le bien, monsieur le
ministre.
Il est aujourd'hui de bon ton de montrer du doigt les agriculteurs, accusés
tour à tour d'être des pollueurs, des consommateurs excessifs d'eau, des
budgétivores, des productivistes...
Ces critiques, formulées le plus souvent par des citadins ayant du monde rural
une vision bucolique, résultant presque exclusivement de leur promenade
dominicale, procèdent d'une interprétation singulièrement réductrice de la
réalité, et contribuent sans justification à propager dans l'opinion publique
une image négative du monde agricole.
La commission des affaires économiques souhaite rappeler, à cet égard,
quelques réalités de l'agriculture.
De la gravure de « la charrue » sur un rocher de la vallée des Merveilles
entre 1000 et 2000 ans avant notre ère, à l'agriculture imaginaire de Max Ernst
dans le
Paysage au germe de blé
en 1934, l'agriculture a toujours été
porteuse d'une dimension symbolique forte : le rattachement à la terre, la
confrontation aux réalités, le respect du vivant sont autant de valeurs que
nous redécouvrons peu à peu.
L'agriculture française, faut-il le rappeler est un des secteurs les plus
importants en terme d'emplois : ce sont en effet près de 700 000 entrepreneurs,
plus de 350 000 conjoints d'agriculteurs, près de 300 000 aides familiaux et
140 000 salariés permanents.
En outre, l'industrie agro-alimentaire emploie près de 400 000 personnes. Je
rappelle qu'un emploi en agriculture correspond en moyenne à quatre emplois
induits.
Au plan économique, l'excédent agro-alimentaire de notre balance commerciale
s'est élevé à près de 67 milliards de francs en 1997. Le secteur des industries
agro-alimentaires est le premier secteur industriel français, avec un chiffre
d'affaires qui avoisine les 800 milliards de francs.
Des productions comme le blé et le vin constituent les fers de lance de nos
exportations.
Les agriculteurs français ont su, par ailleurs, s'adapter - de manière
exceptionnelle - à un environnement en pleine mutation : réceptif à toutes les
nouveautés en matière culturale, sur la plan de la mécanisation et de
l'information, le monde agricole a su utiliser les progrès de la recherche tout
en sauvegardant et en diversifiant les dispositifs d'entraide et de solidarité
existants. C'est cet alliage de modernité et de tradition qui explique les
formidables performances du secteur coopératif. Les organisations agricoles,
par leur professionnalisme et leur dynamisme, donnent au quotidien le
témoignage de cette remarquable capacité d'adaptation.
Mais l'agriculture française, ce ne sont pas seulement des femmes et des
hommes courageux, dynamiques, créatifs, des produits et des services à haute
valeur ajoutée, c'est aussi l'occupation d'un immense espace - 80 % de la
superficie du territoire français - et, par-delà, le refus de la
diversification. La richesse et la diversité de nos terroirs seraient vouées à
la disparition sans la présence du monde agricole.
Nos concitoyens recherchent de plus en plus l'air pur aux portes de la
capitale ou au plus profond de la Lozère. Mais, sans l'élevage bovin,
l'agriculture péninsulaire, la culture des céréales, nous nous trouverions
devant des zones de friches inaccessibles. Quel en serait le coût pour la
collectivité en termes de nuisances, de dangers, de risque d'incendie ?
Ces « pays » auxquels nous sommes tant rattachés seraient vides et en friche,
sans paysans. N'aurions-nous pas tendance, aujourd'hui, à l'oublier ?
Au niveau européen, le quarantième anniversaire de la conférence de Stresa de
juillet 1958 nous rappelle l'importance de ce brillant exercice de cogestion
entre la Commission européenne, les ministres de l'agriculture des Six et les
organisations professionnelles agricoles qui ont jeté les fondements de la PAC.
Cette conférence, aujourd'hui entre légende et oubli, a donné un élan essentiel
à l'agriculture européenne qui, à cette époque, était dans l'ensemble peu
performante, l'Europe étant alors largement dépendante du reste du monde pour
la plupart des produits alimentaires de base. Aujourd'hui, représentant plus de
372 millions de consommateurs à hauts revenus et une production finale de plus
de 200 milliards d'euros, la Communauté à Quinze constitue le premier marché
alimentaire mondial.
Mais, au-delà de cette réussite de l'agriculture européenne, c'est tout le
succès de la construction communautaire que l'on doit constater. L'un des
intervenants a dit tout à l'heure que ce sont les agriculteurs et les
organisations professionnelles qui ont forgé l'Europe et qui en ont été les
bâtisseurs. En effet, la PAC a été longtemps la seule politique intégrée de la
CEE, Stresa marquant d'une pierre blanche le chemin de la construction
européenne. Aujourd'hui, l'après-Stresa est commencé et la PAC doit se remettre
en phase avec les demandes de la société.
A l'heure de la mondialisation, dans un monde où s'effectue la reconstruction
économique des blocs internationaux, l'agriculture, engagée dans ce processus
au même titre que les autres secteurs économiques, est un élément essentiel
dans les changements qui s'opèrent. Ainsi, derrière les évolutions observées en
Russie, en Chine, en Inde ou en Amérique latine, c'est le problème agricole et
alimentaire qui reste au centre des débats.
Ce projet de loi d'orientation doit avoir pour objectif de préparer le cadre
nécessaire à l'expansion des filières, des entreprises agroalimentaires et des
exportations pour les vingt années à venir. Elle doit être non seulement une
réforme en profondeur de l'existant, mais aussi, et surtout, une ouverture sur
le futur. L'agriculture française doit relever de nouveaux défis pour faire
face aux réformes des organisations de marché, aux exigences toujours
croissantes des consommateurs et des opinions publiques, et rester un acteur
majeur du développement rural.
Si la commission des affaires économiques voit dans ce projet de loi
d'orientation une opportunité à saisir, elle souhaite cependant souligner que
sa réussite exige de s'affranchir du court terme, de privilégier une approche
globale et d'être lucide sur les tendances lourdes du commerce
international.
Ce texte doit répondre à une double nécessité : l'une pour les agriculteurs,
qui ont besoin de disposer de repères face à leur métier, l'autre pour la
société, qui a besoin de tisser des liens nouveaux avec l'agriculture.
Dans un environnement international et communautaire incertain, il est plus
que jamais impératif de doter l'agriculture française, en perpétuelle mutation,
des instruments nécessaires pour mettre ce secteur d'activité en phase avec les
attentes de la société.
Le projet de loi d'orientation agricole, adopté en première lecture par
l'Assemblée nationale, comporte 106 articles, soit 41 articles de plus que le
projet de loi initial.
Votre rapporteur, mes chers collègues, ne vous présentera pas le détail de ce
texte d'orientation, qui vient d'être exposé par M. le ministre.
Je dois ici me féliciter de la collaboration étroite avec les deux rapporteurs
pour avis et leurs services. Mes excellents collègues, M. Dominique Leclerc,
rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, et M. Albert
Vecten, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, ont
étudié respectivement les chapitres sur le statut des personnes, le
développement de l'emploi, le fonctionnement des organismes de mutualité
sociale agricole, sur la formation des personnes, le développement agricole et
la recherche agronomique et vétérinaire.
La commission des affaires économiques a émis un avis favorable sur l'ensemble
des amendements présentés par la commission des affaires sociales et par celle
des affaires culturelles.
J'en viens à la position de la commission des affaires économiques sur ce
texte, que je résumerai ainsi : un accord sur le principe et des réserves sur
la mise en oeuvre.
La commission des affaires économiques se félicite de la prise en compte par
le Gouvernement de la nécessité d'élaborer un projet de loi d'orientation
agricole. Comme l'a rappelé le président de notre commission, le contexte
international et communautaire, comme la situation de l'agriculture française,
rendent en effet urgente la définition de nouvelles orientations dans ce
secteur d'activité.
Néanmoins, la commission croit qu'il faut « donner plus de souffle » à ce
texte.
Nous constatons tout d'abord que les consultations n'ont pas abouti à un
projet suffisamment global.
S'inspirant des méthodes de travail mises en place par M. Philippe Vasseur,
tant pour la loi d'orientation pour la pêche maritime et les cultures marines
que pour le projet de loi d'orientation pour l'agriculture, la forêt et
l'alimentation, le ministère de l'agriculture a engagé, d'octobre 1997 à
janvier 1998, une phase de consultations.
Le groupe de travail créé à l'automne 1997 et composé de représentants de
l'ensemble des organisations professionnelles, des syndicats, des associations
de consommateurs ou du cadre de vie, a été le lieu d'un large débat entre
toutes les parties prenantes pour élaborer un projet de loi qui, au-delà du
secteur agricole et agroalimentaire, s'adresse à l'ensemble de la société. Il a
achevé ses travaux le 22 janvier 1998.
J'ai bien noté que le Gouvernement souhaitait dissocier le secteur agricole du
secteur forestier, un projet de loi de modernisation forestière devant être
présenté au Parlement dans les mois à venir.
Néanmoins, la commission des affaires économiques constate, tout d'abord, que
le projet de loi, initialement composé de 64 articles, en contient près du
double après l'examen du texte par l'Assemblée nationale. Certes, le
Gouvernement pourrait arguer qu'il laisse ainsi s'exprimer la volonté du
législateur, ce dont je le remercie. La commission est cependant plus encline à
penser que le projet initial du Gouvernement s'est révélé nettement trop
réducteur par rapport aux ambitions et aux objectifs annoncés.
De plus, de nombreux volets importants manquent au projet de loi et certains
sont très lacunaires. Ainsi, la dimension économique de l'agriculture est
évoquée sans pour autant être encouragée.
D'ailleurs, l'absence, le refus du terme « entreprise » est révélateur de la
démarche du Gouvernement. Si les dimensions territoriale, sociale et
environnementale de l'agriculture sont essentielles, l'oubli de la fonction
économique de ce secteur d'activité est un non-sens.
La commission des affaires économiques regrette ainsi le silence de ce texte
sur le statut des droits à produire, sur la création éventuelle d'un fonds
agricole et sur le statut du bail rural. Cette démarche qui consiste à ignorer
les difficultés tant que la situation n'est pas devenue insupportable aura des
conséquences néfastes, à moyen terme, pour l'ensemble de notre secteur
agricole.
En outre, le texte ne prévoit quasiment aucune disposition fiscale. Or,
comment peut-on orienter notre agriculture sans clarifier la fiscalité agricole
?
Enfin, le volet « qualité sanitaire » s'est révélé nettement insuffisant et
confus, surtout après l'examen du texte par l'Assemblée nationale.
Nous estimons ensuite qu'il s'agit d'un contrat à l'avenir incertain entre
l'agriculture et la société.
Ce projet de loi se donne pour objectif de réconcilier la société avec le
monde agricole, qui est trop souvent accusé des pires maux. Malheureusement,
certaines dispositions fragilisent, à terme, cette « réconciliation ».
Je pourrais citer quelques exemples particulièrement révélateurs.
Il en va ainsi du trop grand flou des dispositions relatives au CTE, contrat
territorial d'exploitation, et à son financement, qui a déjà été évoqué
précédemment. Si le CTE constitue une idée intéressante, sa mise en oeuvre peut
se révéler problématique. En effet, rien n'est dit sur la pérennité du
dispositif ni sur la valeur du contrat.
La question de son financement présuppose, d'une part, l'instauration
progressive d'un cofinancement des aides communautaires et laisse, d'autre
part, planer le doute sur une éventuelle participation, à terme, des
collectivités locales.
Outre qu'il risque de faire imploser la PAC, la commission des affaires
économiques est bien certaine que l'échec du CTE serait catastrophique pour
l'agriculture française, non seulement en termes économiques et financiers,
mais aussi en termes d'image pour le monde agricole.
Le renforcement excessif du contrôle des structures peut se révéler
contre-productif. Certes, l'occupation de notre territoire nécessite un
encouragement à l'installation, qui passe notamment par une surveillance des
concentrations. Néanmoins, l'agriculture a déjà la réputation d'être un secteur
très administré : on ne doit pas renforcer cette image dans l'esprit du
public.
M. Philippe François.
Absolument !
M. Michel Souplet,
rapporteur.
La notion d'entreprise agricole est absente du projet de la
loi d'orientation agricole. Il s'agit là d'une erreur politique grave.
Si, aujourd'hui, l'agriculteur est souvent considéré par un grand nombre de
personnes comme un « chasseur de primes », seule la naissance d'un véritable
droit de l'entreprise agricole, qui tienne évidemment compte d'un certain
nombre de contraintes d'occupation des territoires, pourra faire évoluer et
changer les mentalités.
Le renforcement de la qualité est l'un des objectifs du projet de loi.
Or, d'une part, certaines dispositions, telles que l'instauration d'une
indication géographique protégée autonome, risquent d'accentuer une complexité
déjà fort importante en ce domaine et de ne pas apparaître au consommateur
comme un véritable progrès qualitatif.
D'autre part, les mesures relatives à la biovigilance et aux produits
antiparasitaires, introduites à la hâte par l'Assemblée nationale, non
seulement sont d'une redoutable complexité, mais constituent un formidable
danger qui pourrait, à terme, dans le meilleur des cas, créer une confusion
dans l'esprit du public et, dans le pire des cas, fragiliser tout le système de
protection sanitaire des denrées destinées à l'homme et à l'animal.
Enfin, une dimension stratégique fait défaut à ce projet de loi.
Ce texte présente en effet le travers de ne pas prendre assez en compte, nous
semble-t-il, la dimension internationale et communautaire de la politique
agricole.
L'une des ambitions majeures de ce projet de loi d'orientation devrait être de
préparer le cadre nécessaire à l'ensemble du secteur agricole pour les
prochaines années, afin de mieux anticiper les évolutions de l'environnement
international.
Or cette dimension est extraordinairement négligée par le projet de loi.
Certes, le ministre de l'agriculture considère que le fait de fabriquer et
d'exporter des produits agricoles à haute valeur ajoutée est essentiel. Mais
s'en tenir là serait une grave erreur sur le plan tant politique
qu'économique.
En premier lieu, il n'est pas sain d'opposer les exportations de produits
bruts à celles des produits à haute valeur ajoutée. Toute exportation doit être
encouragée et valorisée. Nier cette évidence, c'est faire fi de la réalité des
marchés agricoles. En effet, lors de chaque déplacement aux Etats-Unis, nos
partenaires commencent, dans les discussions, par évoquer l'exportation de
produits agricoles bruts. Souhaitons-nous nous retirer de ces marchés ?
Sûrement pas !
En second lieu, face au développement dans de nombreux pays d'industries
agroalimentaires, l'exportation de matières premières peut s'avérer
déterminante dans les années à venir.
Cette absence de prise en compte de la dimension exportatrice de notre
agriculture s'accompagne d'un paradoxe inquiétant. Alors que les propositions
du « paquet Santer » encouragent la compétitivité de l'agriculture européenne,
prévoient une baisse généralisée des prix et font une priorité de la promotion
de la conquête de marchés extérieurs, le projet de loi vise presque
exclusivement à orienter l'agriculture vers des modes de production plus
soucieux de l'environnement et de la qualité des produits, moins axés sur la
recherche de la productivité, et organise une sur-administration de
l'agriculture française. Le renforcement du contrôle des structures et la mise
en place à terme de plusieurs milliers de contrats entre les agriculteurs et
les pouvoirs publics en constituent deux exemples.
Ces réserves ont conduit la commission des affaires économiques, tout en
respectant l'architecture et la philosophie globales de ce projet de loi, à
proposer un certain nombre de modifications.
Il faut ouvrir certains dossiers.
La commission des affaires économiques a relevé que des dossiers importants
n'étaient pas abordés.
Elle a considéré par ailleurs que certaines dispositions devaient être
modifiées afin d'en améliorer la portée.
Elle a estimé, enfin, que les différents volets du projet de loi pouvaient
être utilement complétés, dans le prolongement des mesures déjà proposées.
La commission des affaires économiques regrette par ailleurs le quasi-silence
du projet de loi sur la fiscalité et l'entreprise agricoles.
Ce texte ne fait pas référence à la notion d'entreprise agricole. Le projet de
loi d'orientation sur l'agriculture proposé par M. Philippe Vasseur en 1997
avait lancé une première réflexion sur la reconnaissance de l'entreprise
agricole, en instaurant un fonds agricole regroupant certains éléments
corporels et incorporels et en prévoyant une certaine cessibilité du bail
rural.
Certes, une telle démarche est complexe ; elle nécessite un véritable travail
de réflexion dans lequel les professionnels ont toute leur place.
Néanmoins, il appartient à un projet de loi d'orientation de définir les
grands axes d'une politique. Or, il est clair qu'un de ces axes majeurs devrait
être la promotion de la notion d'entreprise agricole.
C'est pourquoi la commission des affaires économiques vous propose plusieurs
aménagements afin de reconnaître la notion d'entreprise dans les intitulés d'un
titre et d'un chapitre du projet de loi et de prévoir une étude sur
l'intégration économique.
Votre rapporteur est conscient du fait que la mise en place d'un dispositif
fiscal global au niveau agricole est une entreprise difficile. Néanmoins, le
projet de loi ayant été annoncé en juin 1997, le Gouvernement n'a-t-il pas eu
le temps d'effectuer une large consultation sur ce sujet afin de proposer
quelques mesures ? Certes, le monde agricole apparaît parfois divisé sur ce
thème, j'en conviens. Cependant, votre commission des affaires économiques a
souhaité inscrire dans ce texte quelques dispositions fiscales ciblées et
certaines pistes de réflexion afin que ce dossier progresse rapidement.
Il s'agit de la déduction des parts sociales de coopératives à insérer dans
les DPI, les déductions pour investissement, d'un dispositif de préretraite
visant à encourager l'installation et d'une étude rapide visant à comparer les
charges sociales et fiscales entre les différents acteurs du monde rural -
agriculteurs, commerçants, artisans - et à faire des propositions concrètes. Il
est en effet urgent de faire le point sur la fiscalité agricole.
Par ailleurs, la commission des affaires économiques a estimé nécessaire de
renforcer certains dispositifs.
L'article 43
ter
est consacré uniquement à la mise en oeuvre de la
surveillance biologique du territoire en matière d'OGM. Un premier article
additionnel après l'article 43
ter
traite des produits phytosanitaires,
un deuxième est relatif aux produits antiparasitaires à usage agricole, un
troisième porte sur les matières fertilisantes et les supports de culture.
Ce schéma concilie les préoccupations actuelles du projet de loi et la
nécessité de renforcer le contrôle et la protection des végétaux.
Les différentes dispositions reprises par la commission des affaires
économiques sont en grande partie issues du projet de loi n° 228, adopté par
l'Assemblée nationale, relatif à la qualité sanitaire des denrées destinées à
l'alimentation humaine ou animale. M. Marcel Deneux avait présenté, au nom de
notre commission, un rapport annexé au procès-verbal de la séance du 26 mars
1997. Par ailleurs, le remarquable rapport de M. Jean Bizet a, lui aussi,
inspiré votre rapporteur quant au problème des OGM.
J'en viens maintenant aux quelques modifications apportées au texte.
Nous vous proposons un certain nombre de modifications qui respectent
l'architecture du projet de loi, que la commission ne souhaite pas remettre en
cause.
En ce qui concerne l'article 1er
bis,
votre commission vous propose
d'en revenir à la rédaction du décret de 1990 afin d'assurer la
représentativité syndicale, que vous avez évoquée tout à l'heure, monsieur le
ministre, sans pour autant paralyser les organismes interprofessionnels.
Sur le CTE, la commission des affaires économiques, tout en maintenant ce
dispositif, procède à une nouvelle rédaction de l'article 2 afin de rendre le
texte plus cohérent dans ses objectifs et son contenu.
A cette occasion, la commission supprime la notion de « projets à caractère
particulier présentés par les agriculteurs » afin de donner une certaine
cohérence économique au CTE. Elle assure également une meilleure articulation
entre les contrats-types, le cahier des charges et le CTE en privilégiant la
responsabilité de l'agriculteur pour élaborer son projet d'exploitation. Elle
évite aussi un cumul des critères relatifs au plafonnement et à la
modulation.
Sur l'exploitation agricole, la commision des affaires économiques vous
propose de supprimer l'article 6, rétablissant ainsi la législation de 1988. En
effet, il apparaît aujourd'hui clairement qu'un texte de consensus est
impossible sur ce sujet. Il suffit pour s'en convaincre de considérer les
différentes réactions suscitées par les rédactions du mois de juillet dernier
de la commission de la production et des échanges et celle d'octobre dernier de
l'Assemblée nationale. La commission des affaires économiques souhaite sur ce
point affirmer deux principes qui doivent guider l'action des pouvoirs publics
et des professionnels en la matière.
En premier lieu, il est inconcevable de diversifier l'activité agricole au nom
de l'aménagement du territoire ou de l'emploi et, parallèlement, de ne pas
favoriser concrètement le développement de l'agriculture. En second lieu,
toutes les activités exercées en milieu rural et ayant la même nature, même si
elle sont pratiquées par différentes sortes de professionnels - artisans,
commerçants, agriculteurs - doivent être soumises aux mêmes règles sociales,
fiscales et sanitaires.
La commission des affaires économiques propose de supprimer les articles 12
bis
et 12
ter
relatifs à l'insaisissabilité de certains biens
agricoles afin de ne pas créer une nouvelle exception agricole injustifiée
vis-à-vis des autres catégories professionnelles.
Nous proposons d'atténuer le contrôle sur les structures, en relevant les
seuils de déclenchement, en tenant compte des liens de parenté et en diminuant
le plafond de la sanction pécuniaire en cas de violation des règles relatives à
ce contrôle.
Sur la qualité des produits, la mise en place d'une indication géographique
protégée, l'IGP, autonome, c'est-à-dire non liée à un label ou à une
certification de conformité, a été écartée.
Voyons enfin les différents compléments aux dispositions figurant dans le
texte.
Concernant le registre de l'agriculture, votre rapporteur souhaite lier la
possibilité de participer aux élections des chambres d'agriculture à
l'inscription sur ce registre et d'en encourager la généralisation.
Sur l'organisation interprofessionnelle, la commission des affaires
économiques a souhaité, sans remettre en cause la possible création
d'interprofessions spécifiques pour l'agriculture biologique et les produits
montagne, encourager la création de sections au sein même des interprofessions
générales.
Sur les accords de crise, la commission des affaires économiques a rendu
possible l'homologation des contrats conclus entre organisations
professionnelles lorsque ceux-ci ne peuvent pas être étendus.
Par ailleurs, pour ce qui concerne les représentants des propriétaires, il
apparaît justifié que ceux-ci puissent intégrer le Conseil supérieur
d'orientation.
De même, la législation relative aux appellations d'origine contrôlées et à
l'Institut national des appellations d'origine a été toilettée et complétée. La
notion de zone agricole protégée a été renforcée. Les utilisations à usage non
alimentaire des productions agricoles doivent être encouragées. Dans le rapport
que lui a demandé M. le Premier ministre, M. Desmarescaux estime que un million
d'hectares seraient ainsi susceptibles d'être transformés pour être destinés à
des usages non alimentaires.
Les petites carrières de marne pourraient être soumises seulement à un régime
de déclaration.
Enfin, et ce sera ma conclusion, les agriculteurs attendent beaucoup de cette
loi. Mais prenons garde de ne pas donner des espoirs qui soient demain
déçus.
Oui, nous voulons éviter la désertification ! Oui, nous voulons encourager
l'installation des jeunes ! Mais, pour ce faire, il faut que soient prévues des
mesures incitatives fortes afin que les cédants trouvent, dans la valorisation
de leur capital d'exploitation, la retraite complémentaire - dont ils ont bien
besoin - qui sera la reconnaissance de longues années de labeur.
Pour l'instant, ces mesures n'apparaissent pas ! Il faut, monsieur le
ministre, convaincre Bercy de leur nécessité. Sinon, l'installation des jeunes
demeurera un leurre !
Je souhaite que le texte amélioré par la Haute Assemblée soit voté à l'issue
de nos débats. Ces débats doivent être dignes de nos paysans, respectueux des
choix exprimés par les dirigeants élus de nos organisations professionnelles
agricoles représentatives.
Pour être un outil performant, la loi d'orientation agricole doit convenir à
ses utilisateurs. C'est là mon souhait le plus cher, monsieur le ministre !
(Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des
Républicains et Indépendants, et du RPR, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
(M. Jean Faure remplace M. Christian Poncelet au feuteuil de la
présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président
M. le président.
La parole est à M. Vecten, rapporteur pour avis.
M. Albert Vecten,
rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Monsieur
le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi
d'orientation agricole dont nous commençons aujourd'hui l'examen comporte un
titre VI consacré à la formation des personnes, au développement agricole et à
la recherche agricole, dont la commission des affaires culturelles s'est saisie
pour avis.
Je me félicite qu'à l'occasion d'une nouvelle loi d'orientation agricole
l'enseignement et la formation n'aient pas été oubliés. Ils ont en effet un
rôle majeur à jouer dans l'adaptation d'un monde rural et agricole confronté à
de nouveaux défis.
Néanmoins, force est de constater que le texte que vous nous proposez,
monsieur le ministre, n'apporte pas de grands changements. Ses dispositions se
contentent, pour l'essentiel, d'actualiser les lois des 9 juillet et 31
décembre 1984, plus connues sous le nom de « lois Rocard ».
Cette modestie, si elle peut surprendre dans un projet de loi de ce genre,
présente néanmoins l'avantage de préserver l'architecture de l'enseignement
agricole telle qu'elle a été définie en 1984. Le cadre tracé alors - tout le
monde s'accorde à le reconnaître - a parfaitement rempli son rôle.
Dans un contexte budgétaire moins favorable que celui de l'éducation
nationale, il a permis de répondre aux exigences du développement agricole et
rural.
Depuis près de quinze ans, cet enseignement a en effet contribué à améliorer
le niveau général de formation des ses diplômés tout en assurant l'égalité des
chances et la promotion de ses élèves.
La réussite de l'enseignement technique agricole fait désormais figure
d'exemple au sein de l'enseignement technologique et professionel.
Connaissant avec retard les mêmes évolutions que l'éducation nationale, il
semble désormais être arrivé à maturité ; il accueillait à la rentrée de 1998
plus de 177 000 élèves. Après des années de forte croissance, due à
l'allongement de la scolarité, on assiste depuis deux ans à une progression
plus modérée de ses effectifs.
Le regain d'intérêt des jeunes pour l'enseignement agricole, qui concerne
également - je tiens à le souligner - la formation par l'apprentissage, dont
les effectifs ont plus que doublé entre 1977 et 1996, s'est manifesté à tous
les niveaux d'enseignement et non plus pour les seules formations courtes,
comme cela avait été longtemps le cas. Ces évolutions se sont accompagnées
d'une diversification de l'origine sociale des élèves. Les élèves issus de
familles d'agriculteurs ou de salariés agricoles ne représentent plus
aujourd'hui que 21 % des effectifs, contre 36 % en 1989.
L'attrait de cette filière de formation, qui se caractérise par des méthodes
pédagogiques originales, tient essentiellement dans le fait qu'elle apparaît
comme un enseignement « qui marche », et qui marche même très bien ; les taux
de réussite aux examens, de poursuite d'études et surtout d'insertion
professionnelle des diplômés en témoignent.
D'après les résultats des dernières enquêtes statistiques réalisées par le
ministère de l'agriculture, le taux d'insertion atteint 65,5 % pour les
titulaires du brevet d'études professionnelles agricoles, 78 % pour les
titulaires du brevet de technicien agricole et près de 90 % pour les titulaires
du brevet de technicien supérieur agricole.
Ces résultats doivent, je crois, être l'occasion de mener une réflexion sur
l'évolution de notre enseignement technologique et professionnel, qui pèche
aujourd'hui par son insuffisante adaptation aux réalités professionnelles.
A ce titre, je vous proposerai un amendement tendant à assurer une meilleure
prise en charge du coût des stages effectués par les élèves de l'enseignement
technique. Leur coût croissant pour les familles ne doit pas être l'occasion de
remettre en cause leur place au sein de la pédagogie. Leur nombre comme leur
fréquence sont, en effet, sans doute pour une large part à l'origine de la
réussite de l'enseignement agricole en matière d'insertion professionnelle.
Le bilan de l'enseignement agricole semble cependant moins satisfaisant pour
les formations supérieures, dont la rénovation a pris un certain retard et pour
lesquelles un effort de modernisation s'impose à l'évidence. L'enseignement
supérieur, comme la recherche agronomique et vétérinaire, reste handicapé par
la taille modeste de ses établissements et leur faible propension à travailler
en réseau.
J'en viens maintenant au dispositif proposé par le Gouvernement.
Le titre VI du projet de loi d'orientation agricole répond à trois
préoccupations principales. Il actualise les dispositions des lois Rocard
concernant l'enseignement technique. Par ailleurs, répondant à une inspiration
que je ne pourrais que soutenir, il relance la rénovation des formations
supérieures. Enfin, il consacre, dans la loi, l'existence de la recherche
agronomique et vétérinaire.
Vous avez, monsieur le ministre, souhaité que le législateur améliore le texte
du Gouvernement - et vous l'y avez encore incité tout à l'heure. C'est avec un
souci d'objectivité et d'efficacité que la commission des affaires culturelles
a répondu à votre invitation.
Les modifications qu'elle proposera répondent tout d'abord à la volonté de
réaffirmer les principes et les équilibres issus des lois de 1984 qui
constituent, je le crois, le gage du succès de l'enseignement agricole. En
outre, parce que la loi doit répondre à un impératif de clarté, la commission a
souhaité, d'une part, alléger la rédaction du projet de loi chaque fois que
cela était possible et, d'autre part, préserver la cohérence des dispositions
du livre VIII du code rural.
Le projet de loi a pour objet, en premier lieu, d'actualiser les dispositions
des lois de 1984 relatives à l'enseignement technique. Les modifications
proposées sont de deux ordres.
Les premières assurent la coordination des textes de 1984 avec les lois
postérieures. Je ne m'y attarderai pas longuement. Je me contenterai de
souligner qu'elles étaient partiellement inutiles ; tel est le cas de celles
qui tirent les conséquences de la loi d'orientation de 1989 sur l'éducation,
qui s'applique déjà à l'enseignement agricole en vertu de son article 28
codifié en tête du livre VIII du code rural.
La seconde série de modifications vise en quelque sorte à dépoussiérer les
lois de 1984 afin de tenir compte des évolutions qu'a connues, depuis,
l'enseignement technique. Ces modifications appellent, de ma part, des
appréciations contrastées.
Les articles 51 et 52 du projet de loi modifient les articles L. 811-1 et L.
811-2 du code rural définissant les missions et l'objet de l'enseignement et de
la formation professionnelle agricoles publics, donc aussi de l'enseignement
privé sous contrat, puisque, je vous le rappelle, les lois de 1984 ont établi
une stricte égalité en la matière entre le public et le privé sous contrat.
Les quatre missions traditionnelles de l'enseignement agricole, auxquelles les
enseignants et les familles sont très attachés, sont à bon escient conservées.
Je les citerai pour mémoire : formation initiale et continue, participation à
l'animation du milieu rural, contribution aux activités de développement et
d'expérimentation et coopération internationale.
Les champs professionnels des formations techniques sont redéfinis. Ceux-ci
sont constitués par les métiers agricoles entendus au sens large, mais prennent
également en compte les formations dans les domaines des services et de
l'aménagement rural, ce dont je me félicite, car celles-ci sont susceptibles de
contribuer à la revitalisation rurale.
Cependant - et c'est là que, sous le prétexte d'une adaptation des
dispositions actuellement en vigueur, il est porté atteinte aux principes posés
en 1984 - le projet de loi limite leur champ d'application à l'enseignement
technique, qu'il définit comme allant de la classe de quatrième au premier
cycle de l'enseignement supérieur inclus. Cette précision va à l'encontre de
l'intention du législateur de 1984, qui entendait ces dispositions comme
s'appliquant à l'ensemble de l'enseignement agricole.
Par ailleurs, elle a pour effet de faire apparaître une disparité entre
l'enseignement technique public et l'enseignement technique privé. En effet,
l'article 59 du projet de loi ne modifie pas la rédaction actuelle du code qui
limite les formations du privé à celles qui vont de la classe de quatrième à la
dernière année de formation des techniciens supérieurs. En pratique, le projet
de loi interdit aux établissements d'ouvrir des classes post-baccalauréat
autres que les classes de BTS. En cela elle introduit, sous le prétexte d'une
clarification des dispositions du code rural, une rupture par rapport à
l'équilibre voulu par la loi du 31 décembre 1984, qui établissait une stricte
égalité entre les formations dispensées par l'enseignement technique public et
l'enseignement privé sous contrat.
En raison de son attachement à ce principe, la commission des affaires
culturelles vous proposera de rétablir cette égalité afin que les deux
composantes de l'enseignement technique puisse dispenser les mêmes formations,
de la quatrième à la fin du premier cycle de l'enseignement supérieur
inclus.
Dans le même souci d'actualiser les lois de 1984, mais sur ce point à juste
titre, l'article 53 du projet de loi modifie les règles relatives aux
structures des établissements publics locaux d'enseignement agricole. Les
dispositions proposées n'apportent pas de grands changements. Elles reprennent
en effet pour l'essentiel celles qui figurent déjà dans les textes
réglementaires d'application de la loi du 9 juillet 1984. La seule avancée
résulte d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale et prévoyant une
harmonisation des statuts des lycées professionnels agricoles et des lycées
d'enseignement général et technologique agricoles, harmonisation dont je vous
proposerai de préciser les modalités.
Le deuxième objectif visé par le titre VI du projet de loi d'orientation
répond à la volonté légitime du Gouvernement de relancer la modernisation de
l'enseignement supérieur. En ce domaine, les dispositions proposées sont plus
novatrices bien que d'inégale importance.
Parmi les moins significatives, j'évoquerai la redéfinition des missions de
l'enseignement supérieur agricole. Plus déclarative que normative, elle reprend
pour une large part certaines des dispositions du titre Ier de la loi du 26
janvier 1984 sur l'enseignement supérieur, qui s'appliquait déjà à
l'enseignement supérieur agricole.
Je citerai également l'article 56 relatif au statut des établissements
d'enseignement supérieur. Cet article n'exclut pas que, comme la rédaction
actuelle le permettait, ces établissements puissent prendre le statut prévu par
la loi de 1984, à savoir celui d'établissement public à caractère scientifique,
culturel et professionnel. En outre, les règles proposées sont proches de
celles qui sont fixées par cette loi pour les écoles ou instituts extérieurs
aux universités.
En revanche, trois des dispositions du projet de loi d'orientation concernant
l'enseignement supérieur méritent d'être relevées.
Il s'agit en premier lieu du principe affirmé à l'article 55 selon lequel le
ministre chargé de l'enseignement supérieur est associé à la tutelle et à la
définition du projet pédagogique des établissements d'enseignement
supérieur.
Nous avons voulu voir dans cette disposition la manifestation du souci de
garantir la cohérence des formations supérieures et de favoriser la
collaboration entre les établissements. Cette disposition doit se comprendre,
je crois, dans le cadre de l'article L. 811-1 du code rural, qui dispose que
l'enseignement agricole est en effet une nécessité.
Je rappellerai qu'une partie des formations de l'enseignement supérieur
agricole sont dispensées dans des établissements du second degré. Etablir une
distinction entre enseignement technique et enseignement supérieur ne pourrait
que remettre en cause les filières de promotion, qui sont un des succès les
plus évidents de l'enseignement agricole. C'est une des raisons pour lesquelles
nous devons veiller à ce que l'article L. 811-1 du code rural s'applique
toujours à l'enseignement supérieur.
Deux autres dispositions apparaissent également importantes.
Premièrement, l'article 55 prévoit que les établissements d'enseignement
supérieur ont vocation à délivrer des diplômes de troisième cycle. Cela
correspond à une nécessité, les formations de troisième cycle s'étant mises en
place dans l'enseignement supérieur agricole en l'absence de cadre
juridique.
Deuxièmement, l'article 57 ouvre aux établissements d'enseignement supérieur
agricole la possibilité de constituer entre eux ou avec d'autres personnes
morales de droit public ou de droit privé des groupements d'intérêt public.
Les finalités de ces GIP recouvrent celles qui sont visées par la loi de 1982
sur la recherche et par la loi de 1984 sur l'enseignement supérieur concernant
la gestion en commun d'activités ou d'équipements. Elles visent également la
création de pôles de compétences à vocation internationale.
Le rapport remis en 1994 par notre collègue M. Pierre Laffitte à M. Jean
Puech, alors ministre de l'agriculture, soulignait déjà la nécessité de
constituer, en collaboration avec les organismes de recherche et les
universités, des pôles régionaux susceptibles de bénéficier d'un rayonnement
international. Je souhaite que cette disposition rende possible une
restructuration qui, à bien des points de vue, apparaît nécessaire.
Si ces dispositions sont pour la plupart opportunes, il faut toutefois
souligner qu'elles ne peuvent, à elles seules, suffire à permettre la
rénovation de l'enseignement supérieur. Celle-ci exige des moyens budgétaires
qui ont, jusqu'à présent, fait défaut, le projet de loi de finances pour 1999
ayant malheureusement confirmé cette tendance.
Enfin, le projet de loi répond à un troisième objectif qui est de consacrer
dans la loi l'existence de la recherche agronomique et vétérinaire. Il s'agit
plus d'un effet d'annonce.
Le dispositif proposé, dont je vous suggérerai de préciser la rédaction, est,
en effet, peu législatif et, surtout, peu normatif. Un de ses mérites est,
néanmoins, de souligner la mission d'expertise qui incombe à la recherche,
notamment dans les domaines de la sécurité sanitaire et de la protection de
l'environnement. En effet, cette mission ne semble pas assumée de manière
totalement satisfaisante par les organismes publics de recherche, comme l'ont
prouvé les difficultés rencontrées lors de la crise de la « vache folle » pour
disposer d'experts dotés des compétences et, surtout, de l'indépendance
nécessaires.
Vous l'avez compris, monsieur le ministre, c'est avec le souci de permettre à
l'enseignement agricole de consolider sa réussite que la commission des
affaires culturelles a abordé l'examen du titre VI du projet de loi
d'orientation agricole. Cela suppose, je le répète à nouveau, de conserver les
principes et les équilibres des lois de 1984.
C'est de ce souci, mes chers collègues, que participent les amendements que
vous proposera la commission, qui, sous réserve de leur adoption, a donné un
avis favorable à l'adoption du titre VI du projet de loi.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR, des
Républicains et Indépendants et du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Leclerc, rapporteur pour avis.
M. Dominique Leclerc,
rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales.
Monsieur le
président, monsieur le ministre, madame, mes chers collègues, près de quarante
ans après les deux grandes lois d'orientation souhaitées par le général de
Gaulle et par Michel Debré, un nouveau projet de loi d'orientation agricole est
soumis aujourd'hui au Parlement.
C'est vrai que l'agriculture est un secteur où des mutations impressionnantes
se sont succédé. Leur encadrement par de grands objectifs paraît
souhaitable.
Comme l'a rappelé le Président de la République le 2 octobre 1998 devant la
chambre d'agricultured'Aurillac, « pour s'épanouir, une agriculture performante
a besoin d'un cadre législatif et réglementaire qui libère les énergies ».
L'objectif est bien de sceller un nouveau pacte entre les agriculteurs et la
société.
Je ne reviendrai ni sur la genèse ni sur la philosophie générale de ce projet,
qui vous a été présenté parM. Souplet, rapporteur au fond. Je me contenterai de
réaffirmer que le projet de loi que nous examinons aujourd'hui se situe en
retrait par rapport aux objectifs initialement affichés.
Certes, la méthode d'élaboration a suivi l'orientation dégagée par M. le
Premier ministre dans sa déclaration de politique générale du 19 juin 1997. Les
organisations syndicales, les différents acteurs du monde agricole, les
associations de consommateurs et de l'environnement ont été consultés en amont
du débat interministériel.
Malgré ces nombreuses consultations préalables, la réflexion gouvernementale
n'a pas débouché sur un projet suffisamment ambitieux. La dimension stratégique
fait défaut du fait d'une prise en compte insuffisante de la dimension
européenne et internationale de la politique agricole. Le texte souffre
également de la vision trop administrée de l'agriculture et de son avenir que
pose le Gouvernement.
Le volet social du projet de loi se situe aux chapitres III, IV et V du titre
II. La commission des affaires sociales s'est également saisie de l'article 1er
ter,
relatif à un rapport sur les retraites.
Monsieur le ministre, il n'y a pas si longtemps, vous avez été rapporteur pour
avis du budget annexe des prestations sociales agricoles de la commission des
affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale. Vous
connaissez ainsi parfaitement les grands enjeux de la protection sociale
agricole. Or, s'il est un des aspects du projet de loi qui n'est pas tout à
fait à la hauteur des enjeux, c'est tout particulièrement ce volet social.
Mais, à l'occasion de la présentation de vos voeux à la presse, vous vous êtes
déclaré, monsieur le ministre, ouvert à toutes les suggestions pour améliorer
le texte ; vous nous l'avez redit ce soir.
La commission a des suggestions à formuler. Avant de les présenter, et pour
mieux les argumenter, je souhaite revenir rapidement sur les principaux enjeux
sociaux auxquels est aujourd'hui confronté le monde agricole.
En effet, les mutations sociales sont loin d'être les moins importantes des
révolutions qu'a connues l'agriculture. L'agriculture est devenue un
entrepreneur. Le régime de sécurité sociale agricole a préservé son autonomie,
mais, aujourd'hui, il est fragilisé. L'emploi agricole a considérablement
diminué et, surtout, changé de nature.
Dans ce contexte social en mutation, trois enjeux apparaissent à mes yeux
cruciaux pour l'avenir du monde agricole : les deux premiers concernent la
protection sociale et le dernier a trait à l'emploi.
Le premier enjeu, celui des retraites, est incontournable. Le choix effectué
en 1952 par les agriculteurs de cotiser peu sur des revenus peu élevés a
aujourd'hui de funestes conséquences.
La réforme des cotisations qui est intervenue en 1990 n'aura d'effets réels,
il faut le rappeler, que dans les prochaines années.
Le montant des pensions de retraite versées à des personnes ayant travaillé
dans des conditions difficiles pendant plus de quarante ans apparaît
aujourd'hui très faible.
A cet égard, je souhaite rappeler quelques chiffres.
Le montant mensuel dont disposent les retraités agricoles à carrière complète
s'élevait, au 31 décembre 1996, donc avant les revalorisations de 1997, 1998 et
1999, à 2 700 francs pour les chefs d'exploitation, entre 1 500 et 1 600 francs
pour les conjoints et aides familiaux. La moyenne des pensions de retraite
agricoles était d'un peu plus de 1 900 francs par mois en 1995, contre une
moyennne supérieure à 8 400 francs pour les retraités du régime général,
cumulant, c'est vrai, pension de base et pension de retraite complémentaire.
Bien évidemment, les agriculteurs n'ont pas cotisé autant que les salariés
mais est-ce une raison pour les laisser dans cette situation difficile et leur
faire payer, près d'un demi-siècle plus tard, le choix de 1952 ?
Certes, d'importantes mesures de revalorisation se sont succédé, notamment
depuis 1994. La dernière en date, intervenue après la loi de finances pour
1999, s'attache à fixer un plancher minimal pour les personnes qui disposent
d'une carrière de près de 150 trimestres en agriculture : 3 000 francs pour les
chefs d'exploitation, 2 800 francs pour les veufs et les veuves, 2 500 francs
pour les aides familiaux seuls et 2 200 francs pour les aides familiaux
mariés.
Toutefois, ces mesures de revalorisation, qui ont eu pour effet pervers de
compliquer de manière excessive les règles d'attribution, sont restées
insuffisantes, nous le savons tous, pour répondre aux attentes des retraités.
Le montant minimum des retraites agricoles reste nettement en deçà du montant
minimum vieillesse, soit 3 540 francs, ou 539,73 euros au 1er janvier 1999.
Nombre d'agriculteurs retraités, on le sait, ne demandent pas le complément
versé par le fonds de solidarité vieillesse pour atteindre ce minimum, car
cette allocation supplémentaire, d'une part, est récupérable sur les
successions et, d'autre part, n'est versée qu'à partir de soixante-cinq ans.
Le deuxième enjeu est celui de la modernisation du régime de sécurité sociale
agricole.
La mutualité sociale agricole a connu une crise grave en 1997, avec les
dérives de sa caisse centrale ou plus exactement, le démembrement de sa caisse
centrale, tout cela a été relevé par la Cour des comptes. Elle a toutefois
entamé une modernisation qui pourrait servir d'exemple, à bien des égards, aux
caisses du régime général.
Deuxième régime de protection sociale en France, elle compte 4,5 millions
d'assurés. La gestion multirisques en fait un régime simple et proche de ses
assurés.
Le processus d'élection de ses administrateurs, même s'il mérite probablement
d'être revu, lui donne un caractère démocratique incontournable.
La MSA est pionnière en matière de réseaux de filières et de soins. Elle joue
un rôle majeur pour prévenir et pour lutter contre la précarité en milieu
rural.
Une convention d'objectifs et de gestion décrivant les nouveaux rapports
contractuels entre l'Etat et la caisse centrale est soumise à votre signature,
monsieur le ministre.
A partir du moment où le redressement de la caisse centrale est en cours,
grâce à une nouvelle équipe dirigeante, il est essentiel de ne pas fragiliser
l'avenir du régime agricole, mais au contraire de le conforter.
Le troisième enjeu est celui de l'avenir de l'emploi agricole.
La population active agricole a très fortement diminué au cours de ces
dernières années. Alors que le nombre d'actifs agricoles s'élevait encore à 1
870 000 personnes en 1980, il n'était plus que de 950 000 en 1997.
Cette diminution de la population active agricole recouvre cependant des
évolutions très différentes selon qu'il s'agit des actifs familiaux ou des
salariés. En effet, si l'on assiste à une diminution rapide du nombre d'actifs
familiaux, l'évolution de l'emploi salarié est beaucoup plus contrastée.
Certes, le nombre de salariés permanents continue de diminuer : ils sont
environ 150 000 aujourd'hui, contre 325 000 en 1970. En revanche, le nombre
total de salariés agricoles augmente régulièrement depuis 1991, pour atteindre
près de 1 400 000 personnes, du fait du recours aux salariés occasionnels.
Il semble donc que l'emploi salarié agricole n'ait pas à subir un destin
inéluctable de disparition progressive. Il tend au contraire à devenir un
gisement d'emplois d'appoint qu'il importe de développer.
Ce développement de l'emploi occasionnel souligne d'ailleurs avec force la
seconde mutation de l'emploi agricole : la progression de la pluriactivité. En
1996, 28 % des exploitants agricoles étaient pluriactifs, soit 212 000
personnes, contre seulement 18 % en 1992. Il appartient à la loi d'accompagner
cette évolution.
Mais, face à ces enjeux, et en dépit de certains aspects positifs, la
dimension sociale du projet de loi manque d'ambition et de cohérence.
Les aspects sociaux du projet de loi étaient, à l'origine, très modestes. Il
s'agissait avant tout d'articles déclaratifs et de rares dispositions
normatives, au demeurant d'ampleur limitée.
Pour ce qui est des articles déclaratifs, le champ de la politique agricole
est étendu par la reconnaissance de la « fonction sociale » de l'agriculture.
Le projet tend en effet à donner une triple fonction à l'agriculture :
économique, environnementale et sociale. Or la « fonction sociale » de
l'agriculture apparaît comme la plus difficile à définir. Il semblerait que ce
concept soit centré sur la priorité accordée à l'emploi : installation de
jeunes agriculteurs, viabilité des exploitations existantes, transmission dans
les meilleures conditions possibles. L'objectif serait ainsi d'enrayer la chute
des effectifs agricoles.
Les dispositions normatives du projet du Gouvernement étaient également
d'ampleur limitée. Il s'agissait principalement du statut du conjoint
collaborateur d'exploitation et du « titre emploi simplifié agricole », deux
dispositions déjà présentes dans le projet Vasseur.
La commission des affaires sociales a constaté à cet égard deux absences
particulièrement regrettables.
Le projet de loi initial ne comportait d'abord aucune disposition majeure
concernant la revalorisation des retraites. Il n'abordait pas non plus la
question du statut fiscal et social des exploitations agricoles. Or la nouvelle
définition de l'activité agricole prévue dans le projet de loi rend nécessaire
une adaptation du régime fiscal et social des exploitations. Il apparaît ainsi
urgent de rapprocher la fiscalité agricole d'une véritable fiscalité
d'entreprise, afin de faciliter la transmission des exploitations. Cette
redéfinition de la fiscalité agricole doit inclure l'étude des charges sociales
pesant sur les exploitants, qui sont devenus, je le repète, de véritables
entrepreneurs.
Si le texte du Gouvernement manque d'ambition, il manque aussi de cohérence.
De bien des points de vue, il ressemble plus à un texte portant diverses
dispositions d'ordre social en matière agricole qu'à un réel projet de loi
d'orientation.
La commission des affaires sociales a ainsi l'impression que le projet de loi
n'a pas trouvé d'équilibre dans ses lignes directrices. Le Gouvernement semble
hésiter entre un souci de pragmatisme et une démarche parfois plus rigide,
empreinte d'« étatisme ».
Certains articles témoignent d'une recherche de la souplesse et d'une réelle
écoute du terrain. C'est le cas, par exemple, de la création du « titre emploi
simplifié agricole », de l'institution du statut de conjoint collaborateur ou
de la simplification du mode de calcul des cotisations sociales pour les
nouveaux installés.
En revanche, d'autres articles relèvent d'une logique technocratique et ne
font que renforcer les contraintes existantes. La création de divers comités
plus ou moins utiles aura pour conséquence inéluctable d'aggraver les charges
pesant sur les agriculteurs. Le renforcement parfois excessif des contrôles
témoigne de la vision par trop administrée qu'a le Gouvernement de
l'agriculture et de son avenir.
La première lecture à l'Assemblée nationale a cependant donné lieu à un
enrichissement du projet de loi ; cet enrichissement reste toutefois
insuffisant et la cohérence du texte n'en est que plus fragile encore.
D'abord, l'Assemblée nationale a souhaité que soient établis deux rapports :
l'un relatif aux retraites agricoles, et l'autre portant sur « l'adaptation de
la fiscalité agricole, des charges sociales et de la transmission des
exploitations ».
En ce qui concerne les dispositions relatives aux salariés agricoles,
l'Assemblée nationale a complété le projet de loi initial en adoptant trois
articles additionnels visant à développer les possibilités de formation
professionnelle continue et à lutter - mais de manière sans doute inappropriée
- contre le risque de précarisation de l'emploi salarié.
Enfin, le Gouvernement a jugé bon de présenter cinq amendements relatifs à la
mutualité sociale agricole, déposés une semaine avant l'examen en séance
publique, sans que la caisse centrale ait été réellement consultée. Ces
amendements, justifiés par la crise grave qui a touché la caisse centrale en
1997, paraissent bien tardifs ; la nécessité des dispositions proposées serait
beaucoup plus évidente si elles avaient été incluses dans le texte du projet
adopté par le conseil des ministres du 10 juin 1998.
Dans ce contexte, la commission des affaires sociales a souhaité apporter une
contribution significative à l'enrichissement et à la mise en cohérence de ce
texte.
Elle est consciente de la complexité des domaines en cause et ne méconnaît pas
l'utilité qu'il y a à demander des rapports au Gouvernement. Les problèmes
abordés pourront ainsi faire l'objet d'un diagnostic « concerté » - pour ne pas
dire « partagé » - avec l'ensemble des acteurs du monde rural. Il lui semble
néanmoins que le Parlement ne saurait renoncer à un pouvoir d'intiative à
partir du moment où le Gouvernement présente un projet de loi « d'orientation
».
C'est pourquoi la commission des affaires sociales propose un dispositif
d'amendements visant à développer le volet social du projet de loi et à en
renforcer la cohérence dans le sens d'un plus grand pragmatisme.
En ce qui concerne les retraites agricoles, elle estime qu'il est désormais
important d'inscrire dans la loi l'objectif tendant à porter les pensions les
plus basses au niveau du minimum vieillesse, sous réserve que les intéressés
aient cotisé trente-sept années et demie. Nous ne pouvons plus nous contenter
de renvoyer à un nouveau rapport. Répéter le procédé utilisé en 1997 et en 1998
par le Gouvernement et qui consistait à proposer une revalorisation
via
un amendement au projet de loi de finances ne me paraît pas souhaitable. Il
faut clairement fixer un objectif, une orientation, conformément, d'ailleurs, à
l'intitulé même du projet de loi. L'objectif peut sembler peut-être timide ; il
n'en est que plus crédible. La commission des affaires sociales proposera, sur
ce point, l'adoption d'un article additionnel avant l'article 1er
ter
.
Le rapport demandé à l'article 1er
ter
par l'Assemblée nationale est
complémentaire. Il est certainement utile. Je vous proposerai d'en améliorer le
contenu.
Il faut simplifier le mode de calcul. Il est nécessaire de disposer d'une
étude sur le financement d'un régime de retraite complémentaire obligatoire. Il
est important de connaître précisément le coût de toutes les mesures de
revalorisation.
En ce qui concerne les charges sociales, nous proposerons une mesure unique et
simple, portant sur l'exonération dont bénéficient les jeunes agriculteurs. Il
s'agit de la majorer afin que les jeunes agriculteurs retrouvent l'avantage
relatif dont ils bénéficiaient par rapport aux autres catégories d'exploitants
avant la substitution de la CSG aux cotisations d'assurance maladie opérée par
la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998.
La commission des affaires sociales proposera également d'adopter deux
dispositions représentant un réel progrès social dans le monde agricole : l'une
vise à déterminer un montant minimum pour les pensions de réversion ; l'autre
étend au régime agricole les règles d'insaisissabilité et d'incessibilité
partielles applicables aux pensions et rentes des régimes d'assurance
vieillesse et d'assurance invalidité.
S'agissant des dispositions relatives aux salariés agricoles, nous croyons
souhaitable d'étendre le champ d'application du titre emploi simplifié agricole
afin d'accompagner le développement de l'emploi. Notre commission estime
également nécessaire de redéfinir les dispositions censées limiter la
précarisation des salariés mais qui risquent au contraire de freiner le
développement de l'emploi salarié agricole.
Enfin, concernant les dispositions relatives à la mutualité sociale agricole,
la commission des affaires sociales souhaite favoriser l'adoption de
dispositions permettant un meilleur fonctionnement de la tutelle sans pour
autant accroître de manière disproportionnée les outils de cette tutelle,
notamment par l'institution d'un commissaire du Gouvernement. Je suis persuadé
que le Gouvernement a sous-estimé l'effet psychologique de cette mesure, qui
est désastreux.
Enfin, la commission des affaires sociales proposera une série d'amendements
visant à simplifier le fonctionnement de la MSA.
Lors de la discussion des articles, j'expliciterai de manière plus détaillée
les propositions de la commission des affaires sociales.
Je crois pouvoir affirmer que nous avons réussi à développer le contenu social
du projet de loi d'orientation agricole et - pourquoi ne pas le dire ? - à lui
donner un peu plus de « souffle ».
(Applaudissements sur les travées du RPR,
de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur
certaines travées du RDSE.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République : 60 minutes ;
Groupe socialiste : 50 minutes ;
Groupe de l'Union centriste : 39 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants : 36 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen : 25 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen : 22 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Le Cam.
M. Gérard Le Cam.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame le rapporteur du Conseil
économique et social, mes chers collègues, je tiens tout d'abord à féliciter
ceux qui m'ont précédé à cette tribune pour la qualité de leurs rapports, même
si, à l'évidence, je ne partage pas toutes leurs analyses.
Le projet de loi qu'il revient à notre Haute Assemblée d'examiner aujourd'hui
revêt une importance capitale pour le devenir de notre agriculture, pour ces
hommes et ces femmes qui exercent ce métier, noble mais dur, d'agriculteur.
Peut-être devrais-je plutôt parler du métier de paysan, ce beau mot chargé de
sens et aussi un peu, c'est vrai, de nostalgie.
Certains, ici, préfèrent user des termes d'entrepreneur agricole ou de chef
d'entreprise. Nous touchons là déjà à une différence de conception du rôle et
de la place de l'agriculture dans la société.
Il y a une approche humaine, qui est notamment celle des communistes, attachée
aux liens qui unissent l'agriculteur à la terre qu'il exploite, à son
environnement, au territoire où il a ses racines. Il y a une approche plus
financière, qui est celle des libéraux, qui conçoivent l'exploitation agricole
sous l'angle de l'activité marchande, parfois au mépris des hommes et des
territoires.
Les débats que nous aurons dans cette enceinte, les discussions concernant la
réforme de la politique agricole commune et bientôt le lancement des
négociations multilatérales au sein de l'Organisation mondiale du commerce
verront s'affronter ces deux approches, qui me paraissent inconciliables.
Voulons-nous en effet une agriculture inscrite dans la durée, plus respectueuse
des populations et des espaces, ou bien une agriculture orientée uniquement
vers la conquête des marchés mondiaux à des prix compétitifs qui n'ont
d'ailleurs aucune signification économique réelle ?
Le libéralisme appliqué au secteur de l'agriculture et de l'agro-alimentaire
et la guerre économique que se livrent l'Union européenne et les Etats-Unis
donnent lieu à un bilan pourtant désastreux. Que l'on en juge.
Depuis les premières lois d'orientation agricoles de 1960 et 1962, axées sur
le développement de la production et sur la concentration des exploitations, le
nombre d'actifs agricoles est passé de 4 millions à moins de 1,4 million
aujourd'hui, soit à peine 5 % de la population active française. Le nombre
d'exploitations agricoles a chuté, quant à lui, de 2 millions en 1960 à 680 000
en 1997, avec, ces dernières années, un rythme de 30 000 disparitions
d'exploitation par an.
Compte tenu de la pyramide des âges de ce secteur, nous nous orientons à moyen
terme vers une agriculture fonctionnant avec seulement 100 000 à 150 000
exploitants. On assiste aujourd'hui, en effet, à quatre départs en retraite
pour une seule installation. En vérité, le modèle d'agriculture qui prévaut
depuis bientôt quarante ans, et qui a, certes, connu ses heures de gloire, est
aujourd'hui, reconnaissons-le, indéfendable.
La crise porcine, dont je peux mesurer les effets dans mon département, les
Côtes-d'Armor, illustre, mieux que n'importe quel discours, les dangers du
libéralisme.
Aujourd'hui, on doit se poser une seule question : à qui profite la crise ?
Certainement pas aux petits producteurs, et en particulier aux jeunes
installés récemment, qui sont confrontés au dilemme : faillite ou endettement.
Ni aux consommateurs, qui n'ont pas vu baisser les prix à la distribution.
Les véritables gagnants de la crise du porc sont, d'un côté, les gros
exploitants, qui ont les moyens de faire face à une surproduction qu'ils ont
eux-mêmes développée et qui s'apprêtent aujourd'hui à récupérer les marchés et
les exploitations délaissées par les petits producteurs, et, de l'autre, les
principaux intermédiaires et les distributeurs, qui augmentent grassement leur
marge, mais aussi les banques, qui, à l'heure actuelle, font du démarchage
auprès des clients qui ont le couteau sous la gorge.
Que dire, en outre, de l'accroissement des déséquilibres territoriaux et de
l'accélération de la désertification rurale provoqués par le développement des
phénomènes sociétaires et par la concentration excessive des exploitations ?
Cette tendance ne constitue pas une dérive des politiques menées depuis
plusieurs décennies, elle en était tout au contraire l'objectif déclaré.
Concentration, expansionnisme, productivisme, ont eu pour contrepartie la
suppression des emplois en agriculture, la détérioration des paysages, les
pollutions de toutes sortes et la déstructuration des territoires et des
espaces naturels.
J'évoquerai, ensuite, l'insécurité sanitaire.
La crise de la « vache folle », là encore, n'est en aucune façon une dérive du
libéralisme, elle en est la conséquence directe. Les enjeux actuels autour des
organismes génétiquement modifiés suscitent les mêmes inquiétudes de notre part
s'il s'agit d'en laisser la maîtrise aux puissances financières qui contrôlent
les filières de la transformation et de la distribution des produits offerts
aux consommateurs. La production de qualité, contrôlée à tous les stades de la
production, de la transformation, du conditionnement et de la distribution,
relève aujourd'hui autant de l'intérêt du producteur que de l'intérêt du
consommateur. Le producteur y trouve les voies du développement durable et de
la légitimité économique ; le consommateur y trouvera, quant à lui, la sécurité
et, plus simplement, le plaisir d'une nourriture saine.
Enfin, il y a l'insécurité alimentaire mondiale, d'autant plus insupportable
que les richesses produites de par le monde sont largement suffisantes pour
nourrir les six milliards d'individus qui peuplent notre planète. Le problème
de la suffisance alimentaire peut être réglé ; la véritable question, c'est la
répartition des biens alimentaires. Or non seulement le marché est incapable
d'assurer cette juste redistribution des marchandises, mais il organise ces
inégalités et ces injustices.
Parler de l'arme alimentaire n'est pas une gageure : c'est la réalité d'un
système capitaliste qui tend à asphyxier les productions des pays du tiers
monde pour enrichir les firmes multinationales américaines et européennes.
Aujourd'hui, l'Union européenne a beau jeu de vanter la part qu'elle réserve à
l'aide alimentaire aux pays victimes de famine et de malnutrition, alors que,
par ailleurs, elle participe à l'appauvrissement de ces pays, incapables
d'affronter les règles du commerce international.
La course effrénée à la baisse des cours mondiaux sur les matières premières
avec pour seul objectif de se partager les marchés des pays en développement
est le plus sûr moyen d'enfoncer ces populations dans la guerre, la famine, la
violence et, ne l'oublions pas, dans la migration vers les pays opulents du
Nord. A l'inverse, nous pensons que l'Union européenne, au lieu d'orienter les
prix à la baisse au niveau des cours mondiaux, devrait, d'une part, contribuer
à relever le cours des échanges alimentaires et, d'autre part, favoriser le
développement de produits à haute valeur ajoutée.
Telle n'est pas l'optique de l'OMC, ni celle des propositions de la Commission
de Bruxelles, bien au contraire.
De nombreux pays de l'Union européenne, dont la France, l'ensemble des
syndicats agricoles ainsi que des partis politiques ont exprimé leur refus de
voir aboutir les orientations et les propositions du « paquet Santer ».
Vous-même, monsieur le ministre, vous avez adopté une attitude de fermeté. Nous
nous en réjouissons, mais nous n'ignorons pas, hélas ! la force des partisans
de l'ultralibéralisme qui ont montré leur capacité à faire aboutir les projets
les plus inacceptables, à l'image de la réforme de la PAC en 1992. La
Commission européenne procède non seulement à la prolongation de cette réforme,
mais aussi à son aggravation.
En effet, il est proposé une baisse des soutiens des prix sur les produits de
base en contrepartie d'une compensation partielle par des aides directes. Or,
n'en doutons pas, les mêmes mesures produiront les mêmes effets dévastateurs,
c'est-à-dire la disparition de 200 000 exploitations françaises depuis 1992, de
300 000 actifs agricoles et, sur le plan européen, de 2,4 millions
d'exploitations.
Non seulement les agriculteurs auraient tout à perdre avec une telle réforme,
eu égard aux perspectives de baisse de revenus évaluées à 13 % s'agissant du
revenu moyen d'un agriculteur, mais ils seraient incités à accroître davantage
leur productivité pour garantir un niveau de revenu équivalent.
Nous touchons là à une contradiction entre, d'une part, les préoccupations du
monde agricole en termes d'environnement, d'aménagement du territoire et de
qualité des produits, que traduit le présent projet de loi, et, d'autre part,
la poursuite d'un modèle d'agriculture productiviste et intensif que promeut le
« paquet Santer ».
Précisément - et le groupe communiste républicain et citoyen militera en ce
sens - cette loi d'orientation agricole doit, monsieur le ministre, vous donner
les arguments et la légitimité pour amener nos partenaires européens sur une
position différente des schémas de Bruxelles.
Mme Hélène Luc.
Très bien !
M. Gérard Le Cam.
Nous n'accepterons pas, quant à nous, une reproduction de l'épisode de 1992,
de même que nous refusons de préparer l'Europe à faire des concessions aux
propositions des Etats-Unis en prélude aux négociations de l'OMC.
Il s'agit bien du démantèlement de la politique agricole commune et de
l'abandon de deux principes fondamentaux.
Tout d'abord, le principe de la préférence communautaire, qui a déjà été mis à
mal par les accords du GATT en 1994, ou, plus réellement, par la décision de
mettre en place une zone de libre - échange avec les pays du MERCOSUR.
Ensuite, le principe de la solidarité financière, qui est menacée par la
remise en cause des contributions financières de certains Etats membres, et
l'hypothèse émise d'un cofinancement ou d'une renationalisation de la PAC. A
cet égard, notre groupe proposera de modifier l'article 1er du texte, en
affirmant son attachement à ces deux principes.
Mes chers collègues, la logique de cette réforme est directement liée à la
mise en place de l'euro, qui, comme tout citoyen a pu le mesurer le 1er janvier
dernier, est avant tout le produit des marchés financiers, mais en aucun cas la
réponse aux aspirations des peuples.
La réduction des crédits de la politique agricole, qui représentent 44 % du
budget communautaire, et la politique structurelle, qui compte pour 37 % du
total, constituent le revers de la médaille euro et du pacte de stabilité.
Peut-on, mes chers collègues, se satisfaire de la création de l'euro en éludant
cet aspect du problème ? En outre, comme nous n'avons cessé de le dire, à
défaut d'ajustements monétaires, la monnaie unique donnera lieu à des
ajustements réels décuplés en termes de productivité et de pouvoir d'achat, qui
seront fatals pour les petites exploitations. Le projet de la Commission
européenne est cohérent : il s'agit de sacrifier la PAC pour l'euro. En effet,
en substituant une politique d'aides directes
a minima
à la politique de
soutien aux prix, on veut adapter l'agriculture européenne aux conditions du
marché mondial, niveler les prix vers le bas et mettre ainsi l'euro en position
de concurrencer le dollar. Or, la compétition accrue entre l'euro et le dollar
ne pourra, selon nous, qu'accroître l'instabilité du système financier
international.
On le voit, la question des réorientations de l'agriculture française dans les
années à venir ne peut être dissociée d'une réflexion approfondie sur son
financement.
Aujourd'hui, chacun reconnaît que les aides publiques ont favorisé la
concentration et l'agrandissement des exploitations, et ont ainsi déstructuré
le monde rural et agricole. Selon un récent rapport d'information remis par Mme
Béatrice Marre, « la PAC orientée vers une logique de course à la productivité
a eu pour effet de subventionner la suppression des emplois agricoles et de
détruire les équilibres territoriaux ». Toujours d'après ce rapport, 60 % des
aides européennes sont allées à 22 % des exploitations, et 18 % d'entres elles
en sont totalement exclues. Ainsi, aujourd'hui, l'essentiel des aides
européennes est alloué aux agriculteurs qui augmentent la surface de leur
exploitation et qui se spécialisent sur des productions de base qui, on le
sait, ont une faible valeur ajoutée.
C'est ainsi que la valeur ajoutée de l'agriculture a cessé d'augmenter parce
que l'on a favorisé cette uniformisation et cette spécialisation de la
production.
Le « paquet Santer », au lieu de tirer les leçons de la faillite de la PAC,
concentre à nouveau son attention en faveur du développement de ces mêmes
productions aux dépens de produits plus sophistiqués et transformés avant leur
commercialisation.
L'article 4 du projet de loi prévoit que les aides financières de l'Etat
seront modulées et plafonnées sur la base de critères économiques, de facteurs
environnementaux, d'aménagement du territoire et du nombre d'actifs. Mais
encore faut-il que cette meilleure répartition des aides à l'échelon national
ne soit pas une façon de rendre plus acceptable une baisse draconnienne des
fonds en provenance du FEOGA.
La meilleure prise en compte du qualitatif doit-elle évacuer le quantitatif ?
Non, bien sûr, mais le volume de production ne doit plus être l'unique critère
d'attribution des aides. L'intérêt de ce projet de loi, en reconnaissant pour
la première fois la notion de multifonctionnalité de l'agriculture, est de
prévoir le découplage progressif des aides et de la production et, par-là même,
de reconsidérer les rapports entre les agriculteurs et la société.
La création du contrat territorial d'exploitation, le CTE, figure de proue de
ce projet de loi, est la traduction la plus concrète de cette nouvelle approche
diversifiée de l'agriculture.
Par le CTE, il s'agit non pas de compléter ou d'accommoder le modèle
productiviste existant de quelques projets agro-environnementaux, mais bien de
transformer les conditions et les modes de production de l'exploitation vers
une production de qualité en adéquation avec l'emploi, l'environnement et les
territoires.
Selon nous, le CTE ne doit pas être la négation de l'acte de production, qui
reste central et fondamental. Au contraire, il doit le revaloriser et le
renouveler au sein d'un monde rural rééquilibré et revivifié.
Nous le savons tous, il y a l'esprit de la loi et l'application qui en sera
faite. Le CTE est un outil. A ce titre, il peut permettre de casser le cercle
vicieux d'une agriculture productiviste qui appauvrit les campagnes, comme il
peut, si nous n'y prenons garde, générer une dualité de l'activité agricole.
C'est, ne nous leurrons pas, la volonté à peine cachée de la Commission
européenne.
Ainsi, il y aurait d'un côté une agriculture intensive orientée exclusivement
vers l'exportation de produits bas de gamme à prix réduit et, de l'autre,
subsisterait, grâce au soutien des Etats, une agriculture protégée, à vocation
sociale et écologique.
Pour ce qui nous concerne, nous refusons l'alternative entre une agriculture
duale et une agriculture uniforme.
Les exploitants agricoles aspirent eux-mêmes à produire autrement pour être en
phase avec les demandes exprimées par la société. Il faut, pour cela, les
accompagner en ce sens en garantissant une rémunération de leur travail par les
prix et, ensuite, soutenir les activités que le marché est incapable
d'assimiler.
La mise en place du CTE est, par conséquent, indissociable d'une politique de
soutien aux prix.
J'aurai l'occasion de revenir, lors de l'examen des articles, sur la question
épineuse du mode de financement du CTE et - c'est à mon avis un élément
essentiel pour sa réussite - sur la garantie pour l'exploitant souscrivant à un
contrat d'y trouver son compte.
M. Hilaire Flandre.
Vous croyez au père Noël !
M. Gérard Le Cam.
Nous verrons bien !
Un autre point suscitera, je n'en doute pas, de longs débats parmi nous :
c'est celui de la définition de l'activité agricole. Sans y insister dans le
cadre de mon intervention, je tiens cependant à observer les incohérences - le
mot est d'ailleurs faible - entre le discours des députés de droite et celui
des membres de la majorité sénatoriale, les premiers estimant que la définition
proposée initialement était trop large, et les seconds suggérant à l'inverse
d'aller plus loin.
Notre groupe défendra une ligne claire et cohérente : les agriculteurs doivent
avoir accès à la pluriactivité s'ils le désirent et là où cela peut
effectivement être nécessaire, à la condition toutefois de ne pas porter
ombrage au monde artisanal. Nous proposerons, à cet égard, quelques
aménagements à l'article 6, afin de lever les dernières ambiguïtés sur ce
sujet.
Le texte vise ensuite à renforcer et à clarifier la législation dans le
domaine du contrôle des structures. Certains voudront voir dans ce dispositif
une dérive vers la suradministration dans le transfert des exploitations. J'y
vois, pour ma part, une démocratisation de l'accès au foncier dès lors que
l'ensemble des organisations syndicales en est partie prenante, notamment à
travers les CDOA, les commissions départementales d'orientation agricole.
Ce processus participe, en effet, d'une politique ambitieuse en faveur de
l'installation des jeunes, qui reste par trop timorée : seulement un jeune sur
deux bénéficie, à l'heure actuelle, d'un appui financier pour s'installer. Les
industries situées en amont et en aval de la production devraient se mobiliser
à cet égard ; de même, les banques devraient mettre à disposition des jeunes
des prêts à taux très bonifiés.
La situation de précarité des agriculteurs sur le départ contraint, hélas ! le
plus souvent ces derniers à céder leur exploitation à des groupements désireux
de s'agrandir.
Ce constat me conduit directement à la question des retraites agricoles.
Le dernier débat budgétaire m'avait donné l'occasion de défendre, au nom de
mon groupe, une revalorisation des retraites agricoles, à hauteur du minimum
vieillesse dans l'immédiat pour atteindre progressivement l'objectif de 75 % du
SMIC brut à la fin de la législature.
L'argument de la discrimination par rapport à certains salariés du régime
général nous a alors été opposé : ces derniers, en cotisant davantage,
bénéficieraient d'une pension moindre.
J'observe, d'une part, que le régime obligatoire n'a été créé qu'en 1952 et,
d'autre part, que le déséquilibre entre actifs et retraités de l'agriculture
est inverse à celui du régime général. On compte en effet 700 000 exploitants
pour deux millions de retraités, soit un actif pour trois retraités, contre
quatre pour un chez les salariés.
Enfin, peut-on, au nom de cette prétendue « inégalité », accepter que des
femmes et des hommes ayant sacrifié leur vie, leur santé et leur jeunesse pour
la terre vivent aujourd'hui avec moins de 3 000 francs par mois ? Et n'oublions
pas que le niveau des cotisations versées était sans commune mesure avec la
quantité de travail fourni chaque jour de l'année !
Si une étude différenciée des situations diverses des agriculteurs à la
retraite est opportune, elle ne peut nous détourner des engagements pris à
l'égard de cette population, dont le mécontentement va grandissant. J'aurai
l'occasion de proposer à la Haute Assemblée deux mesures attendues par les
retraités de l'agriculture : d'une part, la validation des annuités non
cotisées d'avant 1952, date de la création du régime obligatoire, et d'autre
part, la revalorisation de l'actif successoral, tant il est vrai que,
aujourd'hui, de nombreux retraités préfèrent renoncer au minimum vieillesse
auquel ils ont droit pour ne pas pénaliser leurs héritiers.
Ce texte prévoit, par ailleurs, la création d'un nouveau statut pour les
conjoints. Cette disposition ne pourra que favoriser les agricultrices dans la
conquête de leur autonomie juridique et financière, ce dont il faut se
féliciter. Je proposerai d'ailleurs à la Haute Assemblée de permettre aux
femmes de l'agriculture de bénéficier d'un congé de maternité d'une durée égale
à celui des salariées. Cette mesure irait dans le sens de l'égalité et de la
justice sociale.
J'en viens à l'autre versant de ce projet de loi, le renforcement du contrôle
de l'Etat sur les organismes de la mutualité sociale agricole, la MSA. Ce
renforcement ne peut, à lui seul, suffire à éviter les opérations douteuses et
les malversations que la Cour des comptes a révélées en 1997. Le mode
d'élection aux caisses de la MSA doit impérativement être révisé afin d'assurer
le contrôle démocratique de la gestion des caisses locales. Nous ferons des
propositions sur ce point.
Enfin, ce projet de loi innove dans le sens d'une meilleure maîtrise des prix,
que ce soit dans le cadre d'un accord interprofessionnel ou en cas de crises
conjoncturelles. La libéralisation des prix décidée, en 1986, par le
gouvernement Chirac n'est à l'évidence pas adaptée à la réalité économique des
producteurs, même si elle est conforme aux réglementations européennes.
J'observe, pour m'en réjouir, que l'idée d'un coefficient multiplicateur fait
son chemin. Cette mesure, si elle était retenue, permettrait d'éviter les
écarts abusifs observés aujourd'hui, notamment dans le secteur porcin ou dans
celui des fruits et légumes, entre le prix à la production et le prix à la
consommation.
Un tel dispositif présenterait trois avantages : tout d'abord, il aurait pour
effet de mieux répartir la valeur ajoutée au sein de la filière entre
production, transformation et distribution ; par ailleurs, il permettrait au
consommateur de pouvoir profiter à son tour de la chute des cours, ce qui
donnerait lieu à une augmentation de la demande et, indirectement, à une
augmentation des prix à la production ; enfin, il inciterait les intermédiaires
à acheter plus cher les produits aux exploitations pour accroître leur marge
dans les mêmes proportions.
Ce mécanisme mérite, à mon avis, une réflexion plus globale à l'échelle
européenne, afin de parvenir à plus de justice économique dans les situations
exceptionnelles que l'on peut prévoir.
J'évoquerai, pour conclure, les dispositions en faveur de la qualité et de
l'identification des produits, puis la question de l'enseignement agricole.
Tout d'abord, il faut apprécier la place que réserve ce texte aux associations
de consommateurs, qui pourront désormais donner leur avis au sein des
commissions consultatives au côté des représentants des organisations
syndicales agricoles. Il y a là une évolution culturelle qui répond aux
nouvelles exigences de nos concitoyens.
S'agissant des signes d'identification des produits, une bonne politique en la
matière consisterait, selon nous, à valoriser les signes existants plutôt
qu'ajouter à la confusion des consommateurs.
Nous préférons, pour notre part, une gestion de quelques signes fiables et
crédibles pour le consommateur, plutôt que la multiplication de références
parfois douteuses.
Ce texte mérite, me semble-t-il, d'être précisé, comme le souhaite d'ailleurs
M. le rapporteur.
Enfin, le titre VI du projet de loi relatif à l'enseignement agricole, qui
n'apporte pas de transformations majeures à la législation en vigueur, doit
nous donner l'occasion de préserver les acquis de l'enseignement agricole
public, lequel ne représente plus aujourd'hui que 40 % de l'enseignement
agricole.
Nous demandons que les établissements publics puissent jouir de possibilités
identiques à celles qui sont réservées à l'enseignement privé et qu'ils soient
en mesure de mettre à la disposition des élèves les mêmes services que dans
l'enseignement général.
Ce projet de loi d'orientation agricole, dont nous approuvons les grands axes,
ne trouvera sa véritable efficacité que s'il s'articule avec une politique
européenne rénovée et démocratique, à l'opposé des dogmes du libéralisme. En
effet, une loi française, aussi ambitieuse et novatrice soit-elle, ne saurait
être suffisante si les propositions de la Commission de Bruxelles aboutissaient
en l'état.
Il ne peut y avoir, pour les communistes que nous sommes, de bonne gestion des
dégâts du libéralisme. C'est dire si cette loi trouvera son salut, avant tout,
hors de nos frontières.
C'est pourquoi, par nos propositions et par notre conception d'une agriculture
durable, solidaire et humaine, nous voulons contribuer à améliorer, à
consolider ce texte et, ainsi, à donner à la France les moyens de résister et
de réorienter la politique agricole lors des grandes négociations à venir.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Pastor.
M. Jean-Marc Pastor.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, mes chers collègues, je
me bornerai, dans un propos très court, à évoquer les points essentiels de ce
texte, mes collègues et moi-même nous proposant d'entrer dans le détail lors de
la discussion des articles.
Nous abordons aujourd'hui la discussion d'un projet de loi majeur puisqu'il
s'agit du troisième texte d'orientation agricole de la Ve République : l'enjeu
est de taille, puisqu'il est question de tracer des pistes, de proposer des
orientations pour l'avenir de notre agriculture.
Le monde agricole appelait ce texte de loi depuis de nombreuses années. M. le
Premier ministre, lui-même, s'était engagé à le mettre en chantier lors de la
déclaration de politique générale de son gouvernement, en juin 1997.
La lourde tâche de son élaboration en est revenue d'abord à notre nouveau
collègue M. Louis le Pensec, qui, dans le contexte particulièrement difficile
de la réforme de la politique agricole commune, a fait preuve d'une
détermination que je tiens à saluer.
L'effort de concertation et la volonté de dialogue ont été poursuivis avec
vous, monsieur le ministre. Sans préjuger le travail à venir, je tiens donc, au
nom de mes collègues, à vous remercier pour la qualité des relations de travail
que nous avons entretenues.
Je saluerai également l'importance du travail méticuleux et de longue haleine
mené par M. Michel Souplet, rapporteur, travail marqué par le dialogue et les
échanges, même si quelques divergences d'importance sont parfois apparues.
Je ne voudrais pas non plus oublier nos collègues rapporteurs pour avis de la
commission des affaires sociales, dont les contributions permettent une avancée
réelle de ce projet de loi.
Je ferai quelques réflexions générales sur l'ensemble du texte qui nous est
transmis par l'Assemblée nationale, laissant le soin à mes collègues ayant
étudié plus précisément les différents titres de s'exprimer à cet égard après
moi.
Au terme de nombreuses auditions, la mission sociale économique et
environnementale de notre agriculture apparaît avec force. Permettez-moi,
monsieur le ministre, mes chers collègues, quelques remarques à cet égard.
Premièrement, le Gouvernement et l'Assemblée nationale, oubliant un peu qu'il
s'agissait d'un projet de loi d'orientation, c'est-à-dire d'un projet de
loi-cadre, ont cédé à la tentation d'entrer par trop dans le détail, au point
que le texte a parfois un peu perdu en lisibilité.
Deuxièmement, l'article 40, traitant de la description des critères de
qualité, est illisible, ce qui nous obligera à revenir sur ce point.
Troisièmement, les CTE, innovation majeure du texte sur laquelle mon collègue
André Lejeune reviendra plus en détail, ont suscité un véritable engouement :
plus de quatre-vingts départements, avec des expériences diverses, y
travaillent de pied ferme. Je pense, monsieur le ministre, que, sitôt le débat
sur la PAC achevé, il conviendra de préciser le cadre général dans lequel les
gens pourront s'engager, s'agissant des CTE.
Quatrièmement, enfin, j'ai noté des difficultés d'appréciation - cela a
d'ailleurs été soulevé à cette tribune - sur la définition de l'agriculteur.
Tout en favorisant la multifonctionnalité de l'agriculteur et de
l'agriculture, il conviendra de travailler sur la question de l'équilibre avec
les autres partenaires du monde rural que sont les artisans et les
commerçants.
La commission des affaires économiques a déposé divers amendements visant à
améliorer le texte adopté par l'Assemblée nationale, et nous voterons - je
tiens à le préciser - une grande partie d'entre eux. Mais nous serons également
conduits à défendre un certain nombre d'amendements.
Il en sera notamment ainsi s'agissant du statut de l'employé rural, simple
adaptation entre la mutualité sociale agricole, la MSA, et la Caisse nationale
de retraite des agents des collectivités locales, la CNRACL, afin de faire
évoluer les groupements d'employeurs ouverts aux petites communes.
Nous souhaitons éviter que cette loi ne soit fermée, afin qu'elle puisse
rebondir et trouver un prolongement sur des questions, soulevées à cette
tribune, qui ne peuvent trouver réponse dans un seul texte de loi : il s'agit
de l'évolution de la fiscalité agricole, de la gestion et plus particulièrement
des droits à produire, de la transmission du patrimoine ; il s'agit également
de revenir sur des équilibres économiques entre le producteur, le
transformateur, le consommateur et le distributeur autour de la gestion des
critères de qualité et du développement des plus-values qui sont associées à
ces derniers, de se pencher sur l'intégration agricole et la régulation des
marchés, enfin de mieux apprécier les équilibres nécessaires, pour un monde
rural plus harmonieux, avec les artisans et les commerçants.
Ce vaste chantier ne peut être réglé par une simple loi d'orientation ou
loi-cadre. Il convient de l'aborder dans le temps, dans la sérénité et en
dehors de toutes les pressions qui peuvent exister ici ou là, tant les
incidences peuvent être déterminantes.
Aussi, monsieur le ministre, nous vous proposerons que la loi qui sera adoptée
soit prolongée par un rapport parlementaire, élaboré en concertation avec
l'ensemble des partenaires concernés - une date butoir serait bien sûr prévue -
afin que des textes puissent ensuite préciser un certain nombre d'éléments
capitaux pour notre agriculture et notre ruralité.
M. André Lejeune.
Très bien !
M. Jean-Marc Pastor.
Ce texte pourrait aussi trouver un prolongement dynamique autour du cadrage
des CTE, car il est nécessaire que le Parlement s'attache à rendre transparent
cet acte économique et fiscal.
M. Bernard Piras.
Absolument !
M. Jean-Marc Pastor.
A cet égard, les journées à venir seront déterminantes et elles nous
permettront certainement de préciser l'ensemble de ce cadre.
La réforme de la politique agricole commune et la discussion de ce projet de
loi d'orientation agricole vont nous permettre d'accompagner l'évolution de
notre agriculture afin de préserver l'avenir de la ruralité et d'éviter les
profonds déséquilibres et les inégalités que nous connaissons dans l'octroi des
soutiens publics, enjeu des CTE.
Enfin, je partage les propos de Mme Lambert sur la mission économique,
sociale, territoriale et environnementale de l'agriculture. Voilà qui
justifiait sans doute une loi préservant la transparence et l'efficacité des
soutiens à notre agriculture !
M. Marcel Charmant.
Très bien !
M. Jean-Marc Pastor.
Respectueuse de la condition humaine de l'agriculture, respectueuse des
nouveaux équilibres territoriaux, cette loi devra, dans son application,
moraliser l'intervention publique. Le contrat entre la société et l'agriculture
est un vaste pari qui devra valoriser nos territoires et nos savoir-faire,
spécificité purement française, contre la mondialisation.
La logique des projets est de nature à redonner toutes ses lettres de noblesse
à notre agriculture, qui est confrontée aujourd'hui à un choix décisif et qui
représente un grand espoir pour l'emploi, pour la gestion de l'espace, pour la
protection de l'environnement. Une ère nouvelle germe aujourd'hui, celle,
enfin, de la réconciliation entre l'agriculture et la société.
Notre assemblée vous proposera, monsieur le ministre, plusieurs amendements,
dont l'essentiel n'aura d'autre objet que de bonifier le texte. Notre groupe
s'y associera, dans l'intérêt du monde agricole et du monde rural.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. Emmanuel Hamel.
Vive le Tarn !
(Sourires.)
M. Hilaire Flandre.
Une fois que M. Pastor aura accepté le bénéfice réel, ça ira !
M. le président.
La parole est à M. Huchon.
M. Jean Huchon.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame le rapporteur du Conseil
économique et social et chère compatriote, mes chers collègues, depuis 1960,
plusieurs lois ont guidé notre agriculture. Le résultat a été bon, j'en suis le
témoin et j'en ai été l'acteur : pendant plus de trente ans, j'ai pratiqué la
polyculture et l'élevage dans une exploitation de dimension modeste ; j'ai vécu
le progrès sous toutes ses formes : l'arrivée de la mécanisation, l'emploi
raisonnable des engrais, l'utilisation des semences sélectionnées,
l'amélioration de la voirie et de l'habitation.
Tout cet effort constructif, celui de l'exploitant, des organisations
professionnelles, de l'Etat, des collectivités locales, a fait que notre
agriculture, qui, en 1950, n'arrivait pas à nourrir le peuple de France, nous a
permis, trente ans plus tard, de nous ranger parmi les grands pays agricoles du
monde et d'alimenter les bons résultats de la balance commerciale en exportant
ce que nous produisons, après satisfaction de nos propres besoins.
Les rendements ont largement augmenté, ils ont triplé pour le lait et pour le
blé. En outre, des méthodes quasi industrielles ont généré une production hors
sol importante.
Cette évolution mérite le respect. Aussi ajouterai-je, à l'intention
particulière de mon ami M. Le Cam, que je n'ai pas reconnu dans ce
productivisme la situation et l'atmosphère dantesques qu'il a décrites. Je
l'invite à venir sur le terrain, chez moi. Il verra que ce n'est pas Verdun, et
que les choses ne se passent pas si mal.
M. Gérard Le Cam.
Ce n'est pas pareil partout !
M. Jean Huchon.
Cette évolution a aussi permis de rendre acceptable le coût du panier de la
ménagère et les Français ont pu se nourrir à bas prix, tout au moins en ce qui
concerne les produits basiques de l'alimentation.
Certes, des abus et des problèmes de pollution ou d'agression de
l'environnement se sont produits, mais, globalement, le bilan est positif.
Bref, parlons maintenant de l'avenir.
Nous avons à débattre de ce qui s'est passé depuis l'adoption d'une loi
d'orientation vieille de quarante ans. Beaucoup de choses ont changé, il faut
s'adapter. A cet effet, votre projet de loi comporte plusieurs volets, monsieur
le ministre.
Dans mon court propos, j'évoquerai rapidement quelques aspects de ce texte.
Tout d'abord, s'agissant de la définition générale des objectifs, monsieur le
ministre, nous pensons que vos propos sont quelque peu restrictifs. J'ai évoqué
tout à l'heure le rôle exportateur de notre agriculture : cette possibilité
doit quand même lui être conservée, faute de quoi nous devrons nous résoudre à
laisser une grande partie de notre territoire en friche.
Nos exploitants et les entreprises - je dis bien les entreprises -
agroalimentaires qui constituent les filières ont déjà obtenu des succès
importants. Au moment où la faim dans le monde est encore une réalité, au
moment où de nombreux pays souvent surpeuplés s'ouvrent au progrès, nous avons
à jouer la carte des produits agricoles et agroalimentaires. Or nous estimons
que votre texte est un peu timide dans ce domaine. Il a, certes, déjà été
amendé par l'Assemblée nationale, et nous allons poursuivre dans ce sens.
La pièce maîtresse de votre dispositif - tout le monde le reconnaît et
beaucoup s'en inquiètent - est indiscutablement le contrat territorial
d'exploitation, nouvelle méthode de répartition des aides présentée comme
l'innovation majeure de la loi d'orientation agricole.
Cette mesure, qui vise à inscrire l'exploitation agricole dans une démarche
contractuelle et à rétribuer d'autres fonctions que la production, suscite un
enthousiasme mitigé.
Le texte est un peu imprécis et les moyens financiers ridiculement
insuffisants. De plus, ils sont le résultat d'un redéploiement interne du
budget de l'agriculture. Bref, un sentiment de doute est largement partagé par
la profession et l'on parle des CTE comme de la meilleure ou de la pire des
choses.
Le CTE, contrat individuel, doit néanmoins s'insérer dans une action positive.
Son objectif, s'il peut comporter un volet lié à l'environnement ou à
l'entretien de la nature, doit également être dirigé vers la production et la
valeur ajoutée. Les agriculteurs sont des entrepreneurs, ils ont la charge
d'une entreprise et ils doivent avoir à coeur de la faire fonctionner. C'est un
métier qui doit les faire vivre.
M. Gérard César.
Très juste !
M. Jean Huchon.
Je me dois d'évoquer l'inquiétude que suscite la mise en place des CTE.
S'agit-il de l'instauration d'une agriculture supercontrôlée et
superadministrée ? Serait-ce l'avènement d'une activité économique totalement
bureaucratique ?
Bien sûr, je ne le souhaite pas, mais je dois vous faire part, monsieur le
ministre, d'informations qui me sont parvenues aujourd'hui : alors que la loi
n'est pas encore votée - elle est examinée en première lecture par le Sénat et
les décrets d'application sont loin d'être publiés - les organisations
parapubliques et paraprofessionnelles effectuent déjà sur le terrain des
démarches pour établir des CTE. Cette action me paraît particulièrement
déplacée et choquante : on se demande un peu à quoi servent les parlementaires
si on commence à appliquer les lois avant qu'elles soient votées.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
Par ailleurs, la loi s'appuie beaucoup sur la CDOA, institution qui prend
auprès des professionnels un relent un peu collectiviste qui n'est pas
forcément signe d'efficacité et de confiance. Je pense néanmoins qu'elle est
nécessaire et que le mouvement des structures doit être contrôlé : sinon, nous
assisterions à un dépeçage systématique lors des transmissions et à la
quasi-impossibilité pour les jeunes de trouver des terres et de s'installer.
J'espère cependant que des mesures réglementaires seront prises pour que ces
commissions travaillent dans la transparence la plus totale. Il est
indispensable que leur fonctionnement soit connu et reconnu comme juste et
impartial.
Je voudrais évoquer rapidement le douloureux problème des retraites des
exploitants. C'est un sujet qui ne peut qu'inspirer la gêne à l'ensemble du
monde politique. N'oublions pas que de nombreux retraités agricoles - je pense
aux veuves d'exploitants - perçoivent souvent une pension inférieure au RMI !
Les présidents de la République successifs ont fait des promesses
spectaculaires - 75 % du SMIC - mais, hélas ! nos retraités sont silencieux,
ils n'empêchent pas les trains de rouler, ils ne troublent pas la quiétude des
Français. On ne les écoute donc pas et on les laisse croupir dans la
quasi-misère. De grâce, monsieur le ministre, poursuivez votre action dans ce
domaine. Il faut parvenir à ces fameux 75 % du SMIC, qui constituent un bon
minimum.
Je souhaiterais également parler de l'article 6, de la multiactivité et de la
plurifonctionnalité des agriculteurs. Les dispositions prévues dans cet article
ayant provoqué une très vive émotion dans le monde de l'artisanat, du commerce
et des PME, la commission des affaires économiques et du Plan du Sénat a
supprimé cet article. Nous pouvons en être satisfaits. La loi prévoit
d'ailleurs d'autres dispositions à cet égard.
La partie fiscale du texte nous laisse sur notre faim. Quand verrons-nous
apparaître une fiscalité favorisant les installations de jeunes susceptible,
par sa simplicité, d'être comprise par tous et appliquée au service de
l'économie ? Il faut éviter les pièges permanents sur lesquels trébuchent ceux
qui travaillent et qui produisent !
De même, sur le plan social, il y aurait beaucoup à faire. Le système de
protection sociale agricole présente une caractéristique particulière, M.
Leclerc en a longuement parlé tout à l'heure. Ce système est complètement
déséquilibré par une démographie spécifique - peu de cotisants et beaucoup de
retraités - et, depuis toujours, en raison de l'exode rural, la MSA a financé
les enfants des familles agricoles qui sont ensuite partis cotiser dans
d'autres régimes. Une remise à plat paraît donc nécessaire, mais elle ne figure
pas dans le texte que nous examinons aujourd'hui et nous le regrettons.
Une longue partie du projet de loi est consacrée à la reconnaissance de la
qualité et à la traçabilité. Cela suppose une identification simple des
produits, compréhensible par les consommateurs. C'est un sujet d'actualité,
mais c'est aussi un sujet compliqué.
Le projet de loi d'orientation aurait dû renforcer les dispositifs existants,
en s'appuyant sur les labels et sur les AOC. Mais vous avez apporté une
nouvelle caractéristique, l'IGP, l'indication géographique protégée. Si l'on
pense aussi à l'agriculture biologique, on parvient à un empilement de grades,
de qualités, dans lesquels les consommateurs ont parfois du mal à se
retrouver.
J'en viens à l'enseignement agricole, qui relève de votre administration,
monsieur le ministre. Elle s'en tire d'ailleurs très bien !
Il faut conforter l'enseignement agricole dans ce qui fait son originalité et
son succès, qui se traduisent par un taux de placement élevé des élèves sur le
marché du travail et par l'existence de liens forts et constants avec les
professionnels : que ces élèves soient de niveau universitaire dans les écoles
supérieures ou qu'ils suivent un enseignement par alternance dans des
organismes sociaux, les résultats sont satisfaisants et ils permettent aux
jeunes d'assurer leur avenir.
Avant de terminer, monsieur le ministre, je ne peux manquer d'évoquer un sujet
complètement passé sous silence dans votre texte, à savoir le volet économique
et le volet revenus.
L'agriculture est une profession indispensable, puisqu'elle est chargée de
produire la nourriture des hommes. Rien n'est donc plus normal que cette
profession - noble entre toutes - procure un revenu décent à ceux qui
l'exercent. Hélas ! ce n'est pas le cas.
Parce que nous vivons dans une économie mondialisée, nous avons à subir les
cours du marché mondial. Or ceux-ci n'ont rien à voir avec les prix de revient,
ils ne sont que le résultat des grands marchés mondiaux.
Monsieur le ministre, vous pouvez élaborer et faire voter la plus brillante
des lois d'orientation, l'avenir de l'agriculture sera compromis si le
Gouvernement n'assume pas son rôle de force d'équilibre dans l'économie
française. Je pense notamment à la grande distribution et à la réforme de la
PAC.
L'influence et l'activité de la grande distribution sont en progrès constant.
La force de discussion des professionnels agricoles est souvent sommaire, ces
derniers étant assujettis à des charges fiscales, sociales et salariales trente
fois plus élevées que celles qui sont pratiquées dans des pays concurrents.
Cela nous met perpétuellement en position difficile. Or nous avons la preuve
qu'il entre en France des produits - de la viande, notamment - qui ne subissent
ni les mêmes tests ni les mêmes contrôles et qui ne se conforment pas aux mêmes
exigences que les produits nationaux. Nous ne demandons pas des contrôles
laxistes pour les producteurs français, mais nous voulons que les produits
d'importation soient traités avec la même rigueur que les produits français.
M. Hilaire Flandre.
Et les mêmes garanties !
M. Jean Huchon.
Ce sont là, monsieur le ministre, des situations que nous vivons
douloureusement sur le terrain, surtout en un moment où la crise du porc
conduit à une panique et à une détresse sur laquelle je ne m'étendrai pas.
Mais, là encore, nous détenons la preuve que, dans un marché qui croule sous la
quantité, arrivent toujours des camions étrangers chargés de produits achetés à
des cours encore plus bas.
Quant à la réforme de la PAC, vous en avez longuement parlé et nous avons
apprécié votre détermination. Dans ces conditions, je n'insisterai pas
davantage sur ce sujet. Nous vous faisons confiance, monsieur le ministre, pour
défendre l'intérêt de la France et de ses agriculteurs.
Après avoir été littéralement assommée par l'annonce de l'Agenda 2000 et du
projet Santer, l'agriculture prend conscience de ce qui la menace et compte sur
le pouvoir pour prendre en compte ses intérêts vitaux.
En conclusion, monsieur le ministre, nous commençons l'examen d'un projet de
loi qui n'a d'intérêt ou de justification que s'il marque une volonté politique
forte. L'agriculture de notre pays mérite cette volonté politique. Elle est
productive et performante, c'est une valeur économique dont nous devons tirer
parti. S'il faut reconnaître son rôle de valorisation du territoire et de
protection de l'environnement, c'est avant tout l'exercice d'un métier et la
gestion d'une entreprise rentable.
Le projet de loi qui nous est présenté exprime de bonnes intentions, mais le
débat que nous allons avoir doit nous apporter des précisions que, pour
l'instant, nous n'avons pas obtenues. Sous l'impulsion de leurs excellents
rapporteurs, nos commissions ont déjà amendé un texte que nous voulons encore
enrichir. Sous réserve de la prise en compte d'un certain nombre de ces
amendements, nous voterons ce texte.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Emorine.
M. Jean-Paul Emorine.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'aube du
XXIe siècle, la France peut envisager favorablement une loi d'orientation
agricole qui laisse espérer une agriculture remplissant sa fonction primaire :
produire, tout en préservant l'environnement, et sans oublier les marchés
mondiaux et la modernisation technique, qui se développe tous les jours.
Sur toutes les travées de notre Haute Assemblée, il me semble que nous pouvons
partager ce constat.
Préparer un projet de loi qui permette à l'agriculture française de relever
les grands défis du siècle prochain fut une des priorités du gouvernement
d'Alain Juppé. Il était aussi question de redéfinir un « contrat » entre les
agriculteurs et la société.
C'est pourquoi Philippe Vasseur, alors ministre de l'agriculture, au nom du
gouvernement de l'époque, a déposé, le 6 mai 1997, un projet de loi
d'orientation pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt. Le titre, à lui
seul, traçait des perspectives différentes de celles que trace votre texte,
monsieur le ministre. Son ambition était plus large, et son angle d'attaque
plus productif.
Je ne fais pas ce rappel par hasard. Nous étions confrontés à la même
problématique globale.
Il convenait, et il convient toujours, de donner à notre pays de bons
arguments pour les discussions sur la réforme de la politique agricole commune
et pour les négociations au sein de l'Organisation mondiale du commerce. C'est
pourquoi rien - et surtout aucun dispositif nouveau - ne doit être laissé au
hasard.
Il convenait, et il convient toujours, de renouveler le contrat entre la
nation et son agriculture. C'est la raison pour laquelle Philippe Vasseur avait
été conduit à proposer le « plan de gestion durable », et pour laquelle le «
contrat territorial d'exploitation » est maintenant proposé. Ces deux cadres
sont cependant différents dans leurs conceptions juridiques, je dirai même
politiques.
Nos visions de l'agriculture demeurent opposées, monsieur le ministre. Les
projets de loi qui les matérialisent suivent deux logiques contraires. L'une
est entrepreneuriale, et c'est celle qui a la préférence du Sénat ; l'autre est
administrée et, comme nous allons le voir avec le CTE, donne prise à des
éléments pouvant s'adapter à une renationalisation de la PAC. C'est de cette «
renationalisation insidideuse » que nous ne voulons pas.
Ce risque est regrettable pour l'Union européenne agricole, dont nous
considérons indispensable de poursuivre l'édification. Comme l'a rappelé le
Conseil économique et social dans son rapport, qu'a fort bien exposé Mme
Christiane Lambert, l'Agenda 2000 poursuit la logique néfaste engagée depuis la
réforme de la PAC de 1992. L'attitude de la Commission européenne est en partie
dictée par des exigences libérales extérieures.
Elle est toutefois contraire à la nécessaire harmonisation des règles de
concurrence d'un marché unique qu'il convient pourtant de parachever. Cela peut
conduire à un démantèlement inacceptable de la seule politique véritablement
intégrée de l'Union européenne. A l'heure de la création de la monnaie unique,
nous ne devons pas accepter un tel affaiblissement des ferments d'une politique
économique européenne dynamique.
La mission sénatoriale sur la PAC, à laquelle j'avais eu l'honneur de
participer, avait tracé des perspectives intéressantes, qui ont d'ailleurs été
reprises avec détermination dans une résolution du Sénat au mois de décembre
dernier. C'est la position collective de la majorité sénatoriale, et nous nous
y tenons avec fermeté.
Notre vision de l'agriculture a été bien rappelée par le Président de la
République, à Aurillac, en octobre 1998 : « Economique et territoriale,
entrepreneuriale et humaine, productive et sociale ». Donner vie à ces
qualificatifs est un peu le fil conducteur du travail que nous pouvons faire
ici, au sein de notre Haute Assemblée. C'est en tout cas ce que le groupe des
Républicains et Indépendants envisage d'effectuer.
Je souhaite rendre hommage au travail considérable qu'a accompli notre
collègue Michel Souplet, au nom de la commission des affaires économiques. Sa
tâche n'était pas aisée.
Le projet de loi qui nous est proposé, excepté le fait qui consiste à fournir
des produits de qualité, ce qui paraît bien naturel pour répondre à l'attente
des consommateurs, accentue en effet les contraintes.
Plus qu'une orientation, il nous propose une « réorientation » de notre
agriculture. Il néglige trop sa vocation productrice pour en affirmer les
débouchés externes. L'exposé des motifs du texte ne fait-il pas état d'«
agriculteurs producteurs de services et de paysage » ?
M. René-Pierre Signé.
Et alors ?
M. Jean-Paul Emorine.
Tel est le cas, en premier lieu, du contrat territorial d'exploitation. Selon
nous, celui-ci fait entrer l'agriculture dans une logique trop administrative,
en raison de la manière dont est conçue sa mise en oeuvre.
Un secteur d'activité qui procède à une « étatisation » de la rétribution de
produits ou de services est-il encore un secteur économique à proprement parler
? Or tel sera le cas de l'agriculteur qui contractera avec l'Etat dans le cadre
du CTE.
La diversification éventuelle de son activité professionnelle sera contrôlée
par l'Etat. Le respect de l'environnement agricole départemental sera contrôlé
par l'Etat. Il s'agit non plus, en l'occurrence, d'une politique publique mais
d'une fonctionnarisation des agriculteurs.
Est-ce la manière que nous choisissons pour nous attaquer aux marchés
agricoles mondiaux ? Est-ce la méthode adéquate pour relever le défi de la
nécessaire augmentation, demain, de la production agricole probablement par le
recours aux biotechnologies ?
Selon le vice-président de la Banque mondiale, il y aura trois milliards
d'individus supplémentaires dans le monde avant que la population ne se
stabilise. Les enjeux industriels sont énormes pour l'agrochimie.
Les partenariats entre recherche privée et recherche publique sont déjà
engagés et sont encore à développer. Le CTE n'est-il pas dérisoire, dans un tel
contexte ?
Le CTE n'est pourtant pas contesté, dans son principe, par la majorité des
organisations professionnelles. Les plus fortes interrogations portent sur les
moyens financiers qui lui sont consacrés.
M. Jean Bizet.
Bravo !
M. Jean-Paul Emorine.
Nous en avons longuement parlé au cours de la discussion de la loi de finances
pour 1999 ; je n'y reviens donc pas. L'avenir est, en résumé, loin d'être
garanti pour ce qui est du financement du CTE !
Le Gouvernement français acceptera-t-il la baisse de certaines aides directes
européennes, comme vous l'avez dit publiquement tout à l'heure, monsieur le
ministre ?
Qu'adviendra-t-il alors de la place du CTE dans le financement de
l'agriculture ? Ne donnera-t-il pas prise à une forme de « renationalisation »
de la PAC ?
Les modifications tendant à extraire les aides européennes délivrées dans le
cadre des organisations communes de marché ou à prévoir l'information du
propriétaire sont intéressantes. Mais ne faut-il pas encore mieux faire
ressortir la priorité productive qui est la nôtre ?
Je souhaite que vous puissiez nous éclairer sur le résultat des préfigurations
réalisées dans plus de quatre-vingts départements concernant le contenu du CTE.
Comment les futurs contrats s'articuleront-ils concrètement avec les contrats
de plan Etat-régions ? N'y a-t-il pas, pour nos collectivités locales, un fort
risque de contribution financière supplémentaire ?
Un autre exemple de la « réorientation » de l'agriculture est la composition
du Conseil supérieur d'orientation et la possible évolution de la composition
des commissions départementales d'orientation de l'agriculture.
Le conseil sera désormais ouvert aux représentants des associations agréées de
protection de l'environnement. Sans contester le rôle que ces associations
peuvent jouer dans l'évolution positive de nos politiques publiques touchant à
l'environnement, il ne faudrait pas que nous tombions dans le travers
consistant à placer des écologistes « alibi » partout. Laissons l'agriculture à
ses professionnels !
M. Gérard César.
Très bien !
M. Jean-Paul Emorine.
Dans ce texte, il est important que la notion d'entreprise puisse être
développée. Notre commission des affaires économiques y veille, avec un titre
consacré à l'entreprise agricole.
Certains de nos collègues souhaitent lui donner une substance juridique plus
solide, notamment en proposant un amendement sur la création du fonds
agricole.
Le niveau de formation des jeunes agriculteurs permet d'affirmer la réalité de
l'entreprise agricole. Nous nous félicitons que le volet relatif à
l'enseignement permette de conforter ce niveau et nous remercions notre
commission des affaires culturelles d'avoir veillé à garantir les réussites
obtenues par la loi de 1984, tout en défendant une égalité de moyens entre les
deux secteurs, public et privé.
L'organisation professionnelle et l'interprofession doivent s'engager sur la
qualité des produits, sur leur valorisation et sur les indispensables relations
avec la filière. Les modifications proposées par les différents groupes de
notre assemblée permettront de mieux préciser les choses.
Il faut, en particulier, parvenir à une bonne solution concernant les
interprofessions nationales spécifiques. Nous espérons que, sur ce volet, un
bon dialogue s'engagera avec vous, monsieur le ministre.
L'interprofession et les organisations professionnelles doivent avoir
également à l'esprit la notion de responsabilité entre la production et la
consommation. La mise en place d'un comité de biovigilance peut être le garant
de la bonne utilisation de l'ensemble des produits à usage agricole. Il
convient de clarifier les conditions de contrôle en distinguant bien les
organismes génétiquement modifiés.
Notre groupe a également souhaité apporter sa contribution aux réflexions en
cours sur deux sujets majeurs pour les agriculteurs.
Il s'agit, d'une part, de la revalorisation des retraites ; à cet égard, nous
nous situons au-delà des perspectives tracées par la commission des affaires
sociales, puisque nous proposons comme objectif 80 % du SMIC.
Il s'agit, d'autre part, de la mise en place de l'assurance récolte. Il faut,
sur ce dossier, accélérer le calendrier de mise en oeuvre et permettre
l'adoption d'un dispositif dès la loi de finances pour l'an 2000. Il faut
pouvoir l'adosser au fonds des calamités existant, en améliorant son
fonctionnement et son abondement par l'Etat. Nombre de nos partenaires,
européens mais aussi américains, ont fait ce choix de l'engagement des fonds
publics sur cette affaire. Il en va de l'intérêt de notre pays, et même de
l'Europe, dans les négociations internationales à venir, comme le rappelle
justement le rapport du Conseil économique et social sur le sujet.
Mettre en place un système d'assurance récolte peut permettre de pallier les
inconvénients de certaines restrictions internationales envisagées.
Afin de promouvoir l'installation, nous soutenons, bien entendu, l'amendement
proposé par la commission des affaires économiques sur la préretraite. Il est
le fruit d'une bonne collaboration entre nous. Je suggérerai simplement une
modification pour affirmer encore plus explicitement la destination des terres
et des bâtiments à un jeune.
Sur la qualité, nous avons tenu à proposer une définition du label « fermier
», et à clarifier l'article concernant les AOC viticoles.
Nous proposerons de faciliter l'accès à la certification des produits des
petites entreprises, en élargissant la simplification des procédures de
contrôle auxquelles elles doivent faire face et en en allégeant le coût.
Nous soulèverons, enfin, la question de l'autorisation préalable du bailleur
pour l'épandage des boues des stations d'épuration sur les sols agricoles. Nous
savons qu'il s'agit d'une question délicate. Nous serons très attentifs à la
réponse du Gouvernement sur ce point.
Nous espérons ainsi modifier ce texte afin de donner à notre agriculture les
moyens de prendre toute sa place dans la nouvelle politique commune.
(Très
bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du
RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
13
DÉPO^T D'UNE QUESTION ORALE AVEC DÉBAT
PORTANT SUR DES SUJETS EUROPÉENS
M. le président.
J'informe le Sénat que j'ai été saisi de la question orale avec débat portant
sur des sujets européens suivante :
M. Michel Barnier attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères
sur la politique étrangère et de sécurité commune de l'Union européenne et ses
perspectives d'avenir à la veille de la ratification, par la France, du traité
d'Amsterdam. Ce texte comporte en effet plusieurs dispositions nouvelles et
réalistes susceptibles de renforcer la présence de l'Union sur la scène
internationale si les Etats membres en ont la volonté, notamment la création
d'un haut représentant pour la PESC, qui devrait être prochainement nommé.
Il souhaite notamment connaître le sentiment du Gouvernement sur la nature des
liens qui pourraient unir demain l'Union européenne et l'Union de l'Europe
occidentale, ainsi que sur les conditions dans lesquelles l'identité européenne
de sécurité et de défense pourrait s'affirmer au sein de l'Alliance atlantique
(n° QE 4).
Conformément aux articles 79, 80 et 83
bis
du règlement, cette question
orale avec débat portant sur des sujets européens a été communiquée au
Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu
ultérieurement.
11
DÉPO^T DE RAPPORTS
M. le président.
J'ai reçu de M. Lucien Neuwirth un rapport fait au nom de la commission des
affaires sociales sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale,
créant le Conseil national des communes « Compagnon de la Libération » (n° 142,
1998-1999).
Le rapport sera imprimé sous le n° 154 et distribué.
J'ai reçu de M. Alain Vasselle un rapport fait au nom de la commission des
affaires sociales sur la proposition de loi de MM. Alain Vasselle, Michel
Alloncle, Louis Althapé, Jean Bernard, Roger Besse, Paul Blanc, Mme Paulette
Brisepierre, MM. Michel Caldaguès, Robert Calmejane, Jean-Pierre Camoin,
Auguste Cazalet, Gérard César, Charles de Cuttoli, Désiré Debavelaere,
Jean-Paul Delevoye, Jacques Delong, Charles Descours, Michel Doublet, Daniel
Eckenspieller, Yann Gaillard, Patrice Gélard, Alain Gérard, Charles Ginésy,
Daniel Goulet, Adrien Gouteyron, Georges Gruillot, Hubert Haenel, Emmanuel
Hamel, Bernard Hugo, Jean-Paul Hugot, Roger Husson, André Jourdain, Alain
Joyandet, Christian de La Malène, Lucien Lanier, Edmond Lauret, Dominique
Leclerc, Jacques Legendre, Jean-François Le Grand, Maurice Lombard, Philippe
Marini, Pierre Martin, Jacques de Menou, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin, MM.
Joseph Ostermann, Roger Rigaudière, Jean-Jacques Robert, Michel Rufin,
Jean-Pierre Schosteck et René Trégouët relative à l'amélioration de la prise en
charge des personnes atteintes de démence sénile et, en particulier, de la
maladie d'Alzheimer (n° 210, 1997-1998).
Le rapport sera imprimé sous le n° 155 et distribué.
15
DÉPO^TS RATTACHÉS POUR ORDRE AU PROCE`S-VERBAL DE LA SÉANCE DU 22 DÉCEMBRE 1998
DÉPO^T DE PROJETS DE LOI
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu le 7 janvier 1999 de M. le Premier ministre un
projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la
République française et de Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne
relatif à la création de l'Université franco-allemande.
Ce projet de loi a été imprimé sous le n° 148, distribué et renvoyé à la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous
réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les
conditions prévues par le règlement.
M. le président du Sénat a reçu le 7 janvier 1999 de M. le Premier ministre un
projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'assistance
administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le
Gouvernement de la République d'Afrique du Sud pour la prévention, la
recherche, la constatation et la poursuite des fraudes douanières.
Ce projet de loi a été imprimé sous le n° 149, distribué et renvoyé à la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous
réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les
conditions prévues par le règlement.
M. le président du Sénat a reçu le 7 janvier 1999 de M. le Premier ministre un
projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'assistance
administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le
Gouvernement de la République slovaque pour la prévention, la recherche et la
poursuite des fraudes douanières.
Ce projet de loi a été imprimé sous le n° 150, distribué et renvoyé à la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous
réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les
conditions prévues par le règlement.
M. le président du Sénat a reçu le 14 janvier 1999 de M. le Premier ministre
un projet de loi sur l'innovation et la recherche.
Ce projet de loi sera imprimé sous le n° 152, distribué et renvoyé à la
commission des affaires culturelles, sous réserve de la constitution éventuelle
d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
M. le président du Sénat a reçu, le 14 janvier 1999, de M. le Premier ministre
un projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les
administrations.
Ce projet de loi sera imprimé sous le n° 153, distribué et renvoyé à la
commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel,
du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution
éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le
règlement.
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu, le 23 décembre 1998, de MM. Serge Mathieu et
Jean Boyer une proposition de loi tendant à autoriser la vente des boissons
alcoolisées lors de certaines compétitions sportives et de manifestations à
caractère agricole ou touristique.
Cette proposition de loi sera imprimée sous le n° 147, distribuée et renvoyée
à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution
éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le
règlement.
DÉPÔT DE PROPOSITIONS D'ACTE COMMUNAUTAIRE
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu, le 24 décembre 1998, de M. le Premier
ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de décision du Conseil sur les arrangements monétaires relatifs
aux collectivités territoriales françaises de Saint-Pierre-et-Miquelon et
Mayotte.
Cette proposition d'acte communautaire a été imprimée sous le n° E-1195 et
distribuée.
M. le président du Sénat a reçu, le 24 décembre 1998, de M. le Premier
ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion par la Communauté
européenne de l'accord intérimaire sur le commerce et les mesures
d'accompagnement entre la Commission européenne, la Communauté européenne du
charbon et de l'acier et la Communauté européenne de l'énergie atomique, d'une
part, et le Turkménistan, d'autre part. Projet de décision de la Commission
relative à la conclusion de l'accord intérimaire au nom de la Communauté
européenne du charbon et de l'acier et de la Communauté européenne de l'énergie
atomique, d'une part, et le Turkménistan, d'autre part.
Cette proposition d'acte communautaire a été imprimée sous le n° E-1196 et
distribuée.
M. le président du Sénat a reçu, le 24 décembre 1998, de M. le Premier
ministre, la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de décision du Conseil relative à l'acceptation, par la Communauté
européenne, de l'amendement au texte de l'accord de la Commission générale des
pêches pour la Méditerranée portant établissement d'un budget autonome pour
ladite organisation.
Cette proposition d'acte communautaire a été imprimée sous le n° E-1197 et
distribuée.
M. le président du Sénat a reçu, le 24 décembre 1998, de M. le Premier
ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de règlement (CE, EURATOM) du Conseil instituant un office
européen d'enquêtes antifraude.
Cette proposition d'acte communautaire a été imprimée sous le n° E-1198 et
distribuée.
M. le président du Sénat a reçu, le 6 janvier 1999, de M. le Premier ministre
la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de décision du Conseil autorisant la République française à
appliquer ou à continuer à appliquer des réductions ou des exonérations
concernant les droits d'accises sur les huiles minérales utilisées à des fins
spécifiques, conformément à la procédure prévue à l'article 8, paragraphe 4, de
la directive 92/81/CEE.
Cette proposition d'acte communautaire a été imprimée sous le n° E-1199 et
distribuée.
M. le président du Sénat a reçu, le 11 janvier 1999, de M. le Premier ministre
la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de règlement (CE) du Conseil concernant l'instrument financier
pour l'environnement (LIFE).
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le n° E-1200 et
distribuée.
M. le président du Sénat a reçu, le 13 janvier 1999, de M. le Premier ministre
la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Décision du Conseil autorisant certains Etats membres, conformément à la
directive 92/81/CEE, à appliquer ou à continuer à appliquer à certaines huiles
minérales des réductions de taux d'accise ou des exonérations d'accises, et
portant modification de la décision 97/425/CE.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le n° E-1201 et
distribuée.
DÉPÔT D'UN AVIS
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu, le 12 janvier 1999, de M. Dominique Leclerc,
un avis présenté au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de
loi d'orientation agricole, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration
d'urgence (n° 18, 1998-1999).
Cet avis sera imprimé sous le numéro 151 et distribué.
16
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au mercredi 20 janvier 1999, à quinze heures et le soir :
Suite de la discussion du projet de loi (n° 18, 1998-1999) d'orientation
agricole, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence.
Rapport (n° 129, 1998-1999) de M. Michel Souplet, fait au nom de la commission
des affaires économiques et du Plan.
Avis (n° 132, 1998-1999) de M. Albert Vecten, fait au nom de la commission des
affaires culturelles.
Avis (n° 151, 1998-1999) de M. Dominique Leclerc, fait au nom de la commission
des affaires sociales.
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus
recevable.
Aucun amendement n'est plus recevable.
M. Pierre Joxe, premier président de la Cour des comptes, déposera, à dix-sept
heures trente, sur le bureau du Sénat le rapport annuel de la Cour des
comptes.
Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
Projet de loi constitutionnelle, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à
l'égalité entre les femmes et les hommes (n° 130, 1998-1999) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
lundi 25 janvier 1999, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 25 janvier 1999, à dix-sept
heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant prorogation des
mandats des membres des conseils consultatifs et des conseils d'orientation et
de surveillance des caisses d'épargne et de prévoyance (n° 133, 1998-1999) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 26 janvier 1999, à dix-sept
heures.
Conclusions de la commission des affaires économiques (n° 502, 1997-1998) sur
:
- la proposition de loi de M. Jean-Luc Bécart et plusieurs de ses collègues
tendant à frapper de nullité d'ordre public toute clause de mutation
immobilière exonérant les exploitants de mines de leur responsabilité en
matière de dommages liés à leur activité minière (n° 220, 1996-1997) ;
- la proposition de loi de M. Claude Huriet et plusieurs de ses collègues
complétant le code minier (n° 298 rectifié, 1996-1997) ;
- la proposition de loi de Mme Gisèle Printz et des membres du groupe
socialiste et apparentés relative à la prévention des risques miniers après la
fin de l'exploitation (n° 229, 1997-1998) ;
- la proposition de loi de Mme Gisèle Printz et des membres du groupe
socialiste et apparentés relative à la responsabilité des dommages liés à
l'exploitation minière (n° 235 rectifié, 1997-1998) ;
- la proposition de loi de M. Jean-Paul Delevoye et plusieurs de ses collègues
relative à la responsabilité en matière de dommages consécutifs à
l'exploitation minière (n° 247, 1997-1998) ;
- la proposition de loi de M. Jean-Paul Delevoye et plusieurs de ses collègues
relative à la prévention des risques miniers après la fin de l'exploitation (n°
248, 1997-1998) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
mercredi 27 janvier 1999, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 27 janvier 1999, à
dix-sept heures ;
Question orale avec débat n° 8 de M. Paul Masson à M. le Premier ministre sur
le redéploiement des forces de sécurité :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mercredi 27
janvier 1999, à dix-sept heures.
Proposition de loi de M. Alain Vasselle relative à l'amélioration de la prise
en charge des personnes atteintes de démence sénile et, en particulier, de la
maladie d'Alzheimer (n° 210, 1997-1998) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 27 janvier 1999, à
dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES DU SÉNAT
établi par le Sénat dans sa séance du mardi 19 janvier 1999
à la suite des conclusions de la conférence des présidents
Mercredi 20 janvier 1999 :
Ordre du jour prioritaire
A
15 heures
et le soir :
Suite du projet de loi d'orientation agricole, adopté par l'Assemblée
nationale après déclaration d'urgence (n° 18, 1998-1999).
M. Pierre Joxe, premier président de la Cour des comptes, déposera à 17 h 30,
sur le bureau du Sénat, le rapport annuel de la Cour des comptes.
Jeudi 21 janvier 1999 :
Ordre du jour prioritaire
A
9 h 30 :
1° Suite du projet de loi d'orientation agricole, adopté par l'Assemblée
nationale après déclaration d'urgence (n° 18, 1998-1999).
A
15 heures
et le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de
la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3° Suite de l'ordre du jour du matin.
Mardi 26 janvier 1999 :
Ordre du jour prioritaire
A
9 h 30
et à
16 heures :
Projet de loi constitutionnelle, adopté par l'Assemblée nationale, relatif
à l'égalité entre les femmes et les hommes (n° 130, 1998-1999).
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 25 janvier 1999, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des
amendements à ce projet de loi constitutionnelle ;
- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat,
les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun
groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 25 janvier
1999.
La conférence des présidents a décidé qu'il serait procédé à un scrutin public
à la tribune lors du vote sur l'ensemble du projet de loi
constitutionnelle.)
Mercredi 27 janvier 1999 :
Ordre du jour prioritaire
A
15 heures
et le soir :
1° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant prorogation des
mandats des membres des conseils consultatifs et des conseils d'orientation et
de surveillance des caisses d'épargne et de prévoyance (n° 133, 1998-1999).
(La conférence des présidents a fixé au mardi 26 janvier 1999, à 17 heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)
2° Suite du projet de loi d'orientation agricole, adopté par l'Assemblée
nationale après déclaration d'urgence (n° 18, 1998-1999).
Jeudi 28 janvier 1999 :
Ordre du jour établi en application de l'article 48,
troisième alinéa, de la Constitution
A
9 h 30 :
1° Conclusions de la commission des affaires économiques (n° 502, 1997-1998)
sur :
- la proposition de loi de M. Jean-Luc Bécart et plusieurs de ses collègues
tendant à frapper de nullité d'ordre public toute clause de mutation
immobilière exonérant les exploitants de mines de leur responsabilité en
matière de dommages liés à leur activité minière (n° 220, 1996-1997) ;
- la proposition de loi de M. Claude Huriet et plusieurs de ses collègues
complétant le code minier (n° 298 rectifié, 1996-1997) ;
- la proposition de loi de Mme Gisèle Printz et des membres du groupe
socialiste et apparentés relative à la prévention des risques miniers après la
fin de l'exploitation (n° 229, 1997-1998) ;
- la proposition de loi de Mme Gisèle Printz et des membres du groupe
socialiste et apparentés relative à la responsabilité des dommages liés à
l'exploitation minière (n° 235 rectifié, 1997-1998) ;
- la proposition de loi de M. Jean-Paul Delevoye et plusieurs de ses collègues
relative à la responsabilité en matière de dommages consécutifs à
l'exploitation minière (n° 247, 1997-1998) ;
- la proposition de loi de M. Jean-Paul Delevoye et plusieurs de ses collègues
relative à la prévention des risques miniers après la fin de l'exploitation (n°
248, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé :
- au mercredi 27 janvier 1999, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des
amendements à ces conclusions ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion
générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun
groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 27 janvier
1999).
A
15 heures :
2° Question orale avec débat n° 8 de M. Paul Masson à M. le Premier ministre
sur le redéploiement des forces de sécurité.
(En application des premier et deuxième alinéas de l'article 82 du
règlement, la conférence des présidents a fixé à trois heures la durée globale
du temps dont disposeront, dans le débat sur cette question, les orateurs des
divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 27 janvier
1999).
3° Proposition de loi de M. Alain Vasselle relative à l'amélioration de la
prise en charge des personnes atteintes de démence sénile et, en particulier,
de la maladie d'Alzheimer (n° 210, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au mercredi 27 janvier 1999, à 17
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de
loi.)
Mardi 2 février 1999 :
Ordre du jour prioritaire
A
9 h 30
et à
16 heures :
Suite du projet de loi d'orientation agricole, adopté par l'Assemblée
nationale après déclaration d'urgence (n° 18, 1998-1999).
Mercredi 3 février 1999 :
Ordre du jour prioritaire
A
15 heures :
1° Projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration
d'urgence, relatif à la Nouvelle-Calédonie (n° 146, 1998-1999) ;
2° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration
d'urgence, relatif à la Nouvelle-Calédonie (n° 145, 1998-1999).
(La conférence des présidents a décidé qu'il serait procédé à une
discussion générale commune de ces deux projets de loi.)
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 2 février 1999, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des
amendements à ces deux projets de loi ;
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion
générale commune, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste
d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 2 février
1999.)
Jeudi 4 février 1999 :
A
9 h 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite de l'ordre du jour de la veille.
2° Deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par
l'Assemblée nationale en deuxième lecture, portant modification de l'ordonnance
n° 45-2339 du 13 octobre 1945 relative aux spectacles (n° 512, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au mercredi 3 février 1999, à 17
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de
loi.)
A
15 heures :
3° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de
la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
4° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, tendant à limiter
les licenciements des salariés de plus de cinquante ans (n° 114, 1998-1999).
(La conférence des présidents a fixé :
- au mercredi 3 février 1999, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des
amendements à cette proposition de loi ;
- à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la
discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la
liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 3 février
1999.)
Mardi 9 février 1999 :
A
9 h 30 :
1° Dix-huit questions orales sans débat (l'ordre d'appel des questions sera
fixé ultérieurement) :
- n° 361 de M. Gérard Larcher à M. le ministre de l'équipement, des transports
et du logement (Aménagement de la nationale 10 entre Rambouillet, Bel-Air et
Ablis) ;
- n° 367 de M. Francis Grignon à Mme le garde des sceaux, ministre de la
justice (Législation relative à la prise illégale d'intérêts) ;
- n° 391 de M. Alain Gournac à Mme le ministre de l'aménagement du territoire
et de l'environnement (Dégradations dues aux graffitis) ;
- n° 394 de M. Dominique Leclerc à Mme le ministre de l'aménagement du
territoire et de l'environnement (Aménagement de la Loire et de ses affluents)
;
- n° 395 de Mme Nicole Borvo à M. le ministre de l'éducation nationale, de la
recherche et de la technologie (Désamiantage de Jussieu) ;
- n° 397 de M. Bernard Fournier à M. le ministre chargé des affaires
européennes (Importation et distribution de médicaments) ;
- n° 398 de M. Georges Othily à M. le ministre de l'économie, des finances et
de l'industrie (Statut de l'Institut d'émission des départements d'outre-mer)
;
- n° 399 de M. Bernard Joly à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité
(Majoration pour enfants servie aux veuves civiles) ;
- n° 400 de M. Michel Barnier à M. le ministre de l'équipement, des transports
et du logement (Liaisons transalpines pour les voyageurs et les marchandises)
;
- n° 403 de Mme Gisèle Printz à Mme le ministre délégué à l'enseignement
scolaire (Organisation des voyages scolaires) ;
- n° 405 de M. Claude Domeizel à M. le ministre de l'économie, des finances et
de l'industrie (Conditions d'installation de débits de tabac en zone de
montagne) ;
- n° 406 de Mme Nelly Olin à M. le ministre de l'équipement, des transports et
du logement (Service public ferroviaire en Val-d'Oise) ;
- n° 408 de M. Pierre-Yvon Tremel à M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement (Situation du CEVA, centre d'études et de
valorisation des algues) ;
- n° 409 de M. Guy Vissac à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et
de l'environnement (Plan d'aménagement de la Loire) ;
- n° 410 de M. Adrien Gouteyron à M. le ministre de l'économie, des finances
et de l'industrie (Coût et conséquences du passsage informatique à l'an 2000)
;
- n° 411 de M. Jean-Marie Poirier à M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement (Restructuration de l'aéroport d'Orly) ;
- n° 413 de M. Jacques Peyrat à Mme le ministre de l'aménagement du territoire
et de l'environnement (Aménagement du territoire dans les Alpes-Maritimes) ;
- n° 414 de M. Charles Descours à M. le Premier ministre (Application de la
loi sur la veille sanitaire).
A
16 heures :
Ordre du jour prioritaire
2° Deuxième lecture, sous réserve de sa transmission, du projet de loi relatif
aux alternatives aux poursuites et renforçant l'efficacité de la procédure
pénale (AN, n° 998).
(La conférence des présidents a fixé au lundi 8 février 1999, à 17 heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)
Mercredi 10 février 1999 :
A
15 heures :
Ordre du jour prioritaire
Deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, portant
diverses mesures relatives à la sécurité routière (n° 118, 1998-1999).
(La conférence des présidents a fixé au mardi 9 février 1999, à 17 heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)
Jeudi 11 février 1999 :
Ordre du jour établi en application de l'article 48,
troisième alinéa, de la Constitution
A
9 h 30 :
1° Question orale européenne avec débat (n° QE 4) de M. Michel Barnier à M. le
ministre des affaires étrangères, sur l'avenir de la politique étrangère et de
sécurité commune.
(La discussion de cette question orale s'effectuera selon les modalités
prévues à l'article 83
ter
du règlement.)
A
15 heures :
2° Proposition de loi de M. Philippe Arnaud et plusieurs de ses collègues
tendant à assurer un service minimum en cas de grève dans les services et
entreprises publics (n° 491, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé :
- au mercredi 10 février 1999, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des
amendements à cette proposition de loi ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion
générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun
groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 10 février
1999.)
Mardi 16 février 1999 :
A
9 h 30 :
1° Questions orales sans débat.
A
16 heures
et le soir :
Ordre du jour prioritaire
2° Eventuellement, conclusions des commissions mixtes paritaires sur le projet
de loi organique et le projet de loi relatifs à la Nouvelle-Calédonie.
3° Projet de loi portant création de l'autorité de contrôle technique de
l'environnement sonore aéroportuaire (n° 8, 1998-1999).
(La conférence des présidents a fixé au lundi 15 février 1999, à 17 heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)
4° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif aux enquêtes
techniques sur les accidents et les incidents dans l'aviation civile (n° 516,
1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au lundi 15 février 1999, à 17 heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)
Mercredi 17 février 1999 :
Ordre du jour prioritaire
A
15 heures :
Deuxième lecture, sous réserve de sa transmission, du projet de loi
relatif aux polices municipales (AN, n° 960).
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 16 février 1999, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des
amendements à ce projet de loi ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion
générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun
groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 16 février
1999.)
Jeudi 18 février 1999 :
A
9 h 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Eventuellement, suite de l'ordre du jour de la veille.
2° Projet de loi sur l'innovation et la recherche (n° 152, 1998-1999).
(La conférence des présidents a fixé :
- au mercredi 17 février 1999, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des
amendements à ce projet de loi ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion
générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun
groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 17 février
1999.)
A
15 heures :
3° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de
la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
4° Suite de l'ordre du jour du matin.
NOMINATION DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
M. Louis Souvet a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 114
(1998-1999), adoptée par l'Assemblée nationale, tendant à limiter les
licenciements des salariés de plus de cinquante ans.
COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL,
DU RÈGLEMENT ET D'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
M. Jean-Jacques Hyest a été nommé rapporteur du projet de loi n° 145
(1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence,
relatif à la Nouvelle-Calédonie, dont la commission des lois est saisie au fond.
COMMISSION DES FINANCES
M. Philippe Marini a été nommé rapporteur du projet de loi n° 133 (1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale, portant prorogation des mandats des membres des conseils consultatifs et des conseils d'orientation et de surveillance des caisses d'épargne et de prévoyance.
NOMINATION DU BUREAU
D'UNE MISSION COMMUNE D'INFORMATION
Dans sa séance du mardi 19 janvier 1999, la mission commune d'information
chargée de dresser le bilan de la décentralisation et de proposer les
améliorations de nature à faciliter l'exercice des compétences locales a
procédé à la nomination de son bureau, qui est ainsi constitué :
Président :
M. Jean-Paul Delevoye.
Vice-présidents :
M. Jacques Bellanger ;
M. Joël Bourdin ;
M. Paul Girod.
Secrétaires :
M. Robert Bret ;
M. Louis de Broissia ;
M. Jean-François Picheral ;
M. Lylian Payet.
Rapporteur :
M. Michel Mercier.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Plan d'aménagement de la Loire
409.
- 17 décembre 1998. -
M. Guy Vissac
attire l'attention de
Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement
sur le problème de la mise en oeuvre du plan Loire Grandeur Nature à l'heure où
sa pérennité semble compromise. Ce plan comprend notamment la réalisation d'une
salmoniculture dans le Haut-Allier, dont l'objectif est la restauration du
saumon dans l'Allier. Il lui indique que ce plan recèle une portée économique
certaine tant pour les pêcheurs, les hôteliers que les professions du tourisme
de l'axe Loire - Allier. Il lui rappelle que bien que l'Etat soit l'instigateur
et le signataire du plan Loire, son opposition à la construction du barrage de
Chambouchard a pour effet de bloquer les financements de l'Etablissement public
d'aménagement de la Loire et de ses affluents (EPALA) - dont ceux consacrés à
la salmoniculture - et ce, à hauteur de 12 millions de francs. Il lui rappelle
enfin que, sans le concours financier de l'EPALA ou sans la légitime
compensation de l'Etat - étant donné son engagement -, le projet de
salmoniculture semble, hélas, compromis. Il entend donc lui demander quelles
mesures concrètes elle entend prendre afin, d'une part, de débloquer la
situation et, d'autre part, d'assurer la viabilité et la réussite de ce
plan.
Coût et conséquences du passage informatique à l'an 2000
410.
- 23 décembre 1998. -
M. Adrien Gouteyron
attire l'attention de
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie
sur le coût et les conséquences du passage informatique à l'an 2000. Pour
l'Union européenne, les difficultés seront plus importantes encore : le passage
à l'euro au 1er janvier constituera, en effet, le deuxième chantier
informatique mondial le plus important après le passage à l'an 2000. Il lui
rappelle à ce sujet qu'il n'y aura pas assez de programmeurs pour faire face à
la fois à la conversion vers l'euro et au passage à l'an 2000. Il lui rappelle
également que les conséquences éventuelles du passage informatique à l'an 2000
concernent tous les appareils dont le fonctionnement est assuré par des
composants électroniques, et touche donc des secteurs tels que la fourniture de
l'énergie électrique, les télécommunications ou les transactions financières.
Il lui demande donc, d'une part - bien que le Gouvernement ait « décrété la
mobilisation générale », sans vouloir « ni dramatiser ni banaliser » - pourquoi
ce « bogue » de l'an 2000 n'est pas classé - comme c'est le cas aux Etats-Unis
ou en Grande-Bretagne - au rang de « priorité nationale ». Il souhaite, d'autre
part, savoir s'il envisage de dresser un état précis et chiffré des lieux, tant
pour les PME que pour les administrations, afin de prendre des mesures
concrètes allant au-delà des incitations et des incantations. Il lui demande,
enfin, si le secteur de l'informatique n'a pas besoin rapidement d'une autorité
de régulation pour éviter que des appareils estampillés « compatibles an 2000 »
le soient sur la foi d'un test qui néglige le coeur du système, l'horloge en
temps réel.
Restructuration de l'aéroport d'Orly
411.
- 24 décembre 1998. -
M. Jean-Marie Poirier
souhaite appeler l'attention de
M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement
sur les projets de restructuration de l'aéroport d'Orly. La mobilisation des
élus et des associations de riverains pour la défense de l'environnement autour
de l'aéroport d'Orly a permis d'obtenir de sérieuses avancées telles que la loi
n° 92-1444 du 31 décembre 1992 sur la lutte contre le bruit, l'arrêté de 1994
instituant un plafond de 250 000 créneaux horaires annuels ou encore le décret
du 27 mai 1997 instituant des sanctions administratives et portant organisation
du contrôle et de la prévention des nuisances sonores liées aux aérodromes. Ces
dispositifs constituent un acquis collectif que les habitants du Val-de-Marne
ne souhaitent pas voir remettre en cause. L'évolution d'un transfert
d'activités d'Air France et d'une modification de la répartition du trafic
entre Orly et Roissy - Charles-de-Gaulle a récemment changé les perspectives.
S'il est légitime de s'inquiéter pour l'emploi local et l'avenir des activités
en cause, on peut s'interroger sur la récente montée en puissance des demandes
de révision de l'actuel plafond d'exploitation de l'aéroport. En effet, à la
faveur de la concertation prolongée qui a été ouverte, et sous le prétexte des
progrès technologiques des appareils, plusieurs compagnies aériennes et la
direction d'Aéroports de Paris entendent trouver une compensation dans les
restructurations en obtenant l'aménagement de la réglementation et faire «
sauter le verrou » des 250 000 créneaux horaires. On évoque ainsi la
possibilité de mettre en place un nouveau système de plafond d'activité fondé
sur une « enveloppe de bruit », sans dire que la plupart des compagnies ne
seront pas en mesure de renouveler entièrement leur parc d'appareils avant de
nombreuses années. Il est donc essentiel de mettre fin aux spéculations, en
délivrant un message clair sur l'avenir de l'aéroport. Il souhaite en
conséquence lui demander s'il entend ou non accéder à la requête des compagnies
et autoriser l'attribution de créneaux horaires supplémentaires à Orly. Il lui
demande en outre de lui préciser ses intentions en matière d'amélioration de la
protection contre les nuisances sonores aéroportuaires en Val-de-Marne et
notamment le rôle précis que remplirait la nouvelle autorité de contrôle de
l'environnement sonore aéroportuaire (ACTESA) à ce niveau.
Réforme des fonds structurels
et avenirs des scieries
412.
- 24 décembre 1998. -
M. Maurice Blin
attire l'attention de
M. le ministre de l'agriculture et de la pêche
sur la réforme du régime de fonds structurels tendant à exclure de ses
interventions les scieries agricoles. Les scieries sont parmi les premiers
employeurs en milieu rural notamment dans les zones forestières qui couvrent
aujourd'hui 27 % du territoire national. Elles mobilisent une ressource
sylvicole abondante et renouvelable mise à la disposition de l'industrie du
bois. Pour répondre aux perspectives ouvertes par le rapport Bianco qui
pourraient permettre un fort développement de l'emploi en zone rurale, les
scieries ont besoin de réaliser de forts investissements. Ceux-ci devraient
être accompagnés par les aides, notamment communautaires et nationales, prévues
dans les zones éligibles à ce type d'actions. Dans ces conditions, il est
essentiel que la réforme annoncée du régime des Fonds structurels européens
n'écarte pas du bénéfice de ses interventions, dans son volet sylvicole, les
scieries implantées en milieu rural. Comment le ministre compte-t-il intervenir
auprès des instances communautaires pour défendre et développer un facteur
économique essentiel au développement rural.
Aménagement du territoire dans les Alpes-Maritimes
413.
- 5 janvier 1999. -
M. Jacques Peyrat
indique à
Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement
qu'après avoir pris connaissance des conclusions du dernier comité
interministériel de l'aménagement du territoire (CIADT) du 15 décembre dernier
et du communiqué de presse conjoint du président de la région PACA, et de la
présidente de la commission de l'aménagement du territoire de la région, qui se
rejouissaient des nombreuses et importantes mesures prises pour l'agglomération
marseillaise, les élus des Alpes-Maritimes souhaiteraient savoir s'il existe de
la part du Gouvernement une volonté identique pour aider au développement de
leur département. Il souhaiterait donc connaître de façon précise ses objectifs
concernant les grands dossiers d'aménagement et de développement que les
Alpes-Maritimes attendent depuis de trop nombreuses années : 1. le
désenclavement de la région grâce au grand projet ouvrant l'accès vers l'Italie
du Nord et améliorant les relations directes vers Rhône-Alpes via Digne et
Grenoble. Ce projet permettrait ainsi aux deux grandes régions françaises que
sont PACA et Rhône-Alpes de se rapprocher d'un bassin d'activités et d'emplois
prospère de 11 millions d'habitants sur l'axe Milan-Turin ; 2. l'amélioration
des dessertes autour de l'agglomération niçoise (RN 202
bis
, A 58, TCSP,
fin du doublement de l'AUS, construction d'un centre multimodal aux entrées est
et ouest de la ville) ; 3. le développement économique (restructuration et
modernisation du port, endiguement du Var pour permettre l'indispensable
développement économique de la ville dans cette vallée). Il lui demande donc
s'il est possible d'envisager l'inscription de ces projets vitaux pour le
désenclavement et le développement du département azuréen dans le prochain
contrat de plan Etat-région, comme le seront toutes les mesures prises en
faveur de Marseille lors du dernier CIADT.
Application de la loi sur la veille sanitaire
414.
- 6 janvier 1999. -
M. Charles Descours
attire l'attention de
M. le Premier ministre
sur l'application de la loi n° 98-535 du 1er juillet 1998 relative au
renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des
produits destinés à l'homme. S'il s'adresse à lui c'est parce que ce domaine
couvre plusieurs ministères et qu'il lui revient une position d'arbitrage. Il
souhaiterait savoir où en sont les décrets d'application dont la sortie était
prévue par la loi le 31 décembre (art. 29) et quelles sont les raisons de ce
retard. Il souhaiterait également être rassuré sur la teneur de ces décrets et
savoir s'ils seront bien le reflet de l'esprit de la loi. Deux questions
essentielles restent en effet en suspens : la transparence des travaux des
agences de sécurité sanitaire sera-t-elle assurée ? Son niveau d'expertise
sera-t-il suffisant et contradictoire avec un niveau d'excellence permettant la
reconnaissance européenne et internationale des avis formulés ?
Avenir des tribunaux de commerce
415.
- 13 janvier 1999. -
M. Georges Mouly
attire l'attention de
Mme le garde des sceaux, ministre de la justice,
sur la situation des tribunaux de commerce, dont la suppression d'un certain
nombre serait préconisée par la mission ministérielle chargée de la réforme de
la carte judiciaire. Il lui demande de bien vouloir lui préciser la position du
Gouvernement sur cette question qui, par certains aspects, touche à
l'aménagement du territoire.
Augmentation indispensable des effectifs de gendarmerie
416.
- 13 janvier 1999. -
M. Jean-Jacques Robert
attire l'attention de
M. le ministre de la défense
sur les conséquences des conclusions du conseil de sécurité du 27 avril dernier
décidant du redéploiement dans un délai de trois ans des effectifs de police et
de gendarmerie. Face à la situation actuelle toujours plus inquiétante et où
l'insécurité est partout, il ne suffit pas de redéployer les effectifs actuels
déjà insuffisants, mais il faut les augmenter de façon importante pour que ce
plan soit efficace sur le terrain.
Campagne de dépistage du cancer du sein
en Ile-de-France
417.
- 14 janvier 1999. -
Mme Nicole Borvo
attire l'attention de
M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale
sur le fait que le cancer du sein tue 1 900 femmes par an en Ile-de-France. Il
induit un taux de mortalité nettement supérieur à ce qu'il est dans les autres
régions. En 1994 déjà, il a été prôné le lancement d'une campagne de dépistage
systématique et gratuit du cancer du sein. L'actuel Gouvernement plaide en
faveur d'une généralisation de ces campagnes qui ont déjà prouvé leur
efficacité dans les départements où elles ont été lancées. A Paris, on dénombre
212 000 femmes âgées de cinquante à soixante-neuf ans susceptibles de
bénéficier d'un tel dépistage financé à parité par la Caisse nationale
d'assurance maladie et par le département. Lors du débat budgétaire des 14 et
15 décembre dernier au Conseil de Paris, il a été déposé un amendement visant à
dégager les 32 MF nécessaires pour financer une telle mesure. Cet amendement a
constitué la base d'un voeu adopté par l'Assemblée. Elle lui demande comment le
Gouvernement compte participer à la mise en oeuvre d'une telle action qui peut
réduire d'environ un tiers les décès dus au cancer du sein.
Aménagement de la ligne Paris-Bâle
418.
- 14 janvier 1999. -
M. Yann Gaillard
attire l'attention de
M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement
sur le dossier de la ligne Paris-Bâle. Alors que l'annonce, il y a quelques
semaines, de la mise en place d'un comité interrégional constitué d'élus avait
fait naître un nouvel espoir chez les usagers qui réclament l'électrification
de la ligne depuis fort longtemps, un problème de pollution dû aux locomotives
Diesel vient compliquer ce dossier, voire menacer son avenir. Suite à
l'incident survenu, fin 1998, dans une école du quartier de la Villette, à
proximité du dépôt de locomotives Diesel - les élèves avaient été incommodés
par les gaz d'échappement - et, après les interventions des riverains de la
gare de l'Est, un expert a été désigné afin d'enquêter sur cette situation. Son
rapport, remis en décembre dernier, propose d'interdire au diesel l'entrée de
la capitale. Pour ce faire, l'une des solutions envisagée n'est autre que
l'électrification de la ligne, ce qui recueille l'assentiment des populations,
élus, usagers, syndicats et associations. Toutefois, une autre solution - de
court terme - serait de transférer le dépôt de locomotives Diesel de la
Villette à Gretz ou Noisy-le-Sec : les trains seraient tractés par des
locomotives électrique de Paris-gare de l'Est jusqu'à Gretz ou Noisy. Si la
SNCF devait opter pour cette solution, la perte de temps qu'elle occasionnerait
pour les usagers serait considérable (dix à quinze minutes). L'électrification
ne paraît-elle pas opportune même si les travaux ne sont pas réalisés à court
terme ? Est-il, en effet, encore besoin de préciser que la ligne Paris-Bâle est
la dernière grande ligne non électrifiée ! Il le remercie d'indiquer une bonne
fois pour toutes quelle est la position du Gouvernement sur ce dossier.
Avenir des GRETA
419.
- 14 janvier 1999. -
M. Jean-Marc Pastor
attire l'attention de
M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie
sur les difficultés que rencontrent les GRETA, groupements d'établissements de
l'éducation nationale, chargés de la formation continue. Cette mission de
service public leur a été conférée par la loi n° 71-575 du 16 juillet 1971
instituant la formation professionnelle continue, et réaffirmée par la loi
d'orientation sur l'éducation n° 89-486 du 10 juillet 1989. Ces lois font des
GRETA un dispositif de formation continue original : ils tirent l'essentiel de
leurs ressources de fonds publics (Etat et région) affectés à la fonction
publique, ainsi que de fonds affectés par les entreprises à la formation de
leurs personnels dans le cadre de leurs obligations. Exerçant une mission de
service public, les GRETA fournissent notamment des services de formation de
proximité par l'action de leurs réseaux d'établissements. Ils assurent de ce
fait l'ensemble des contraintes du services public et ne peuvent limiter leurs
activités aux seules actions de formation « rentables », entraînant ainsi une
distorsion par rapport aux autres organismes chargés de formation. L'équilibre
budgétaire des GRETA s'en trouve donc particulièrement affecté, une grande
majorité d'entre eux connaissant des situations de déficit. Cela risque de
compromettre leur avenir à moyen terme. C'est pourquoi, il souhaiterait savoir
si des mesures réglementaires ne pourraient pas être prises en vue de préserver
l'avenir des GRETA, ce qui paraît indispensable au maintien d'un rôle public
fort dans le domaine de la formation continue.
Conséquences des faillites d'armateurs
sur la situation des marins
420.
- 14 janvier 1999. -
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
souhaite interroger
M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement
sur les situations inextricables que connaissent des marins étrangers,
embarqués sur des navires appartenant à des armateurs en faillite, et qui sont
actuellement bloqués dans des ports français. Si le mouvement associatif et les
collectivités locales se mobilisent pour assurer le quotidien de ces marins,
ces incidents se multiplient depuis plusieurs années sans qu'aucune solution
durable ne semble envisagée, malgré la multiplication de conventions
internationales et les initiatives suggérées par les syndicats internationaux
de marins. Elle souhaiterait connaître les suites données au groupe de travail
qui s'est réuni le 6 octobre dernier à l'intiative du ministre, ainsi que la
position des autorités françaises sur la création d'une assurance mondiale
obligatoire, proposition émise dans le cadre d'un groupe d'experts BIT-OMI
(Bureau international du travail - Office des migrations internationales).
Equipement de radiocommunication mobile
421.
- 14 janvier 1999. -
M. Jean-Jacques Robert
attire l'attention de
M. le secrétaire d'Etat à l'industrie
sur les difficultés rencontrées par les consommateurs, à l'occasion de l'achat
d'un téléphone mobile. Il lui demande, d'une part, de prendre les dispositions
pour qu'une fois signé ce contrat d'achat l'acheteur dispose d'un délai de
rétractation de sept jours, comme pratiqué pour d'autres biens d'équipement de
consommation courante. D'autre part, afin de permettre une meilleure protection
de ce consommateur, il est convaincu que devrait être sanctionné le caractère
abusif de certaines clauses de ces contrats d'achat, notamment les clauses
autorisant unilatéralement et au gré de l'opérateur la modification des
conditions de facturation.
Médicaments génériques
422.
- 14 janvier 1999. -
M. Jean-Jacques Robert
attire l'attention de
Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité
sur le projet de protocole d'accord conclu avec les organisations
professionnelles pharmaceutiques, à propos de médicaments génériques. Ce projet
d'accord octroie aux pharmaciens d'officine le droit de substituer des
médicaments génériques entre eux, et un médicament générique à un médicament de
référence. Il n'est pas donné aux pharmaciens l'obligation de le faire, mais
ils y sont incités par la possibilité d'accroître leurs marges. Faire faire des
économies au régime d'assurance maladie par la délivrance de médicaments moins
coûteux ne doit pas faire oublier le respect du libre choix du patient. C'est
pourquoi il lui demande que ce droit de substitution accordé aux pharmaciens
soit également assorti d'un droit pour le patient d'accepter ou de refuser
cette substitution. Il ne saurait être question que cette substitution soit
effectuée sans l'accord préalable du patient, maître de l'exécution de son
ordonnance médicale prescrite par le praticien de son choix.
Réforme du système de mutation des enseignants
423.
- 15 janvier 1999. -
M. Jean-Marc Pastor
attire l'attention de
M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie
sur le projet de réforme du mouvement des enseignants du second degré, tel
qu'il est prévu pour la rentrée 1999. En effet, dans le but de rapprocher
l'éducation nationale de ses personnels et en particulier d'en humaniser la
gestion, il est prévu de déconcentrer le mouvement national, qui se déroulerait
en deux temps : une phase inter-académique, préparatoire, suivie d'une phase
intra-académique, préparatoire, suivie d'une phase intra-académique, qui
permettrait l'affectation définitive des personnels. Il est certes nécessaire
de réviser les procédures actuellement en vigueur pour la mutation des
enseignants : en effet, à l'heure actuelle, un enseignant qui souhaite muter
d'un collège à un autre dans une ville doit participer au mouvement national
qui est long (il dure plus de six mois) et complexe dans son organisation. De
plus, sur 100 000 demandes annuelles de changements d'affectation, un tiers
seulement concerne un changement d'académie, la majorité des candidats à la
mutation effectuant des voeux internes à leur académie. C'est pourquoi les
principes de la réforme projetée semblent aller dans le sens d'une accélération
des procédures et d'une amélioration du service rendu aux enseignants.
Toutefois des inquiétudes se font jour, notamment sur le déroulement de chaque
phase : qui y participera ? Selon quels critères ? Comment et par qui seront
prises les décisions au sein de chaque « étape » ? Qu'adviendra-t-il des
barèmes ? Il le remercie de bien vouloir lui apporter toutes les précisions
relatives à ce projet et de lui confirmer sa date de mise en oeuvre.
Fiscalité applicable en matière
de vente directe sur Internet
424.
- 19 janvier 1999. -
M. Ambroise Dupont
attire l'attention
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie
sur les conditions de vente directe par Internet au sein de l'Union européenne.
Dans le cadre du régime transitoire de taxe sur la valeur ajoutée, les produits
achetés sur Internet sont taxés dans le pays de destination car ils sont
assimilés à des exportations. Les acheteurs européens de produits français
doivent alors effectuer eux-mêmes les formalités douanières et acquitter la
taxe sur la valeur ajoutée et les diverses autres taxes locales. Ces
obligations sont compréhensibles lorsque le destinataire est une entreprise
mais deviennent dissuasives lorsqu'il s'agit d'un particulier. En conséquence,
elles pénalisent l'extension du commerce électronique européen en général et
les petites et moyennes entreprises en particulier, celles-ci ne pouvant
contourner la difficulté en implantant des filiales dans les différentss pays
de l'Union européenne, au contraire des grands groupes internationaux. La
Commission européenne a proposé, le 22 juillet 1996, un nouveau système de TVA
dont l'un des principaux éléments était un lieu unique de taxation que les
entreprises pouvaient déterminer librement. Cette proposition n'a cependant pas
abouti en raison d'un risque de délocalisation des entreprises qui pouvaient
dès lors choisir le pays offrant les meilleures conditions en matière de TVA.
Néanmoins, au moment où se met en place la monnaie unique, il lui demande s'il
compte proposer des solutions pour simplifier les démarches douanières et
fiscales liées à la vente directe par Internet au sein de l'Union européenne.
En effet, cette simplification ouvrirait de nouveaux débouchés aux petites
entreprises françaises qui ne disposent pas de réseaux de distribution
internationaux et, ainsi, favoriserait leur développement et la création
d'emplois.
Travaux de déviation sur la RN 125
425.
- 19 janvier 1999. -
M. Bertrand Auban
attire l'attention de
M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement
sur la nécessité de l'inscription au prochain contrat de plan entre l'Etat et
la région Midi-Pyrénées de la réalisation des déviations de Saint-Béat, Arlos
et Fos sur la RN 125. Il souligne que ces déviations constitueront le seul
débouché de Midi-Pyrénées vers deux importantes régions espagnoles, la
Catalogne et le Val-d'Aran. Il insiste particulièrement sur les nuisances et
les dangers actuellement supportés par les populations des communes traversées
par la RN 125. Il rappelle que le conseil général de Haute-Garonne a manifesté
à de nombreuses reprises que la réalisation de ces déviations constituait pour
lui une priorité du prochain contrat de plan. Il lui demande que l'Etat affirme
sa volonté d'inscrire ces déviations au contrat de plan Etat - région
Midi-Pyrénées.
Coût des fouilles archéologiques et politique du logement
426.
- 19 janvier 1999. -
M. Yann Gaillard
attire l'attention de
Mme le ministre de la culture et de la communication
sur les fouilles archéologiques et les difficultés financières qu'elles
occasionnent aux petites communes, notamment dans le secteur du logement.
Ainsi, le maire d'une commune, qui dépose une demande de lotir sur un terrain
communal, peut voir apparaître des contraintes et des frais imprévus à la suite
de la découverte de vestiges sur le chantier. En effet, le service régional de
l'archéologie est parfois amené à prescrire des opérations de fouilles sur ces
sites. Les travaux sont à la charge du maître d'ouvrage, c'est-à-dire, dans le
cas précis, de la commune. Ces opérations, non seulement retardent l'avancement
des travaux, mais peuvent également grever de façon substantielle le budget des
petites communes. L'intervention d'archéologues pendant plusieurs jours, voire
plusieurs semaines, peut en effet rapidement faire monter la facture. S'il
n'est pas question de remettre en cause le bien-fondé de telles recherches qui
permettent de connaître chaque fois un peu mieux notre passé, il souligne que
la prise en charge financière de telles opérations par les communes, et surtout
par les plus petites d'entre elles, constitue un poids si lourd qu'il risque
dans certains cas de stopper des projets de développement. A preuve, l'exemple
d'un maire de département de l'Aube, ayant porté à sa connaissance le devis
d'une campagne de fouilles sur un terrain communal où il envisageait de
construire un lotissement ; ce devis se montait à plus de 130 000 francs TTC
pour une commune de 380 habitants dont le budget, comme celui de la plupart des
communes rurales, est serré. Le maire ne peut apparemment prétendre à aucune
aide... Car s'il existe bien des aides éventuelles en matière de logement
social, rien n'est prévu lorsqu'il s'agit de lotissements communaux. Si le coût
supplémentaire lié aux fouilles lui était imposé, il abandonnerait tout
bonnement son projet, ce qui est dommage pour le développement rural. Il lui
demande s'il n'est pas possible, alors d'envisager la prise en charge intégrale
de tels coûts par l'Etat, et ce, afin de laisser une chance au monde rural de
se développer.
Fermeture du centre de prélèvement
de moelle osseuse de l'hôpital de Valence
427. - 19 janvier 1999. - M. Michel Teston attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale sur les conséquences de la fermeture du centre de prélèvement de moelle osseuse de l'hôpital de Valence. En effet, la loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 a institué que seuls les établissements hospitaliers habilités à effectuer des greffes d'organes peuvent bénéficier du statut de « centre préleveur de moelle osseuse ». Si les motivations du législateur en la matière sont pertinentes, cela n'est pas sans avoir des conséquences importantes en ce qui concerne les départements de la Drôme et de l'Ardèche. La fermeture du centre de prélèvement de Valence impose aux donneurs volontaires de moelle osseuse de se déplacer jusqu'à Lyon ou Grenoble pour effectuer leur don. Les deux donneurs inscrits pour le début de l'année 1999 ont indiqué qu'ils renonceraient à leur don s'ils devaient se déplacer à plus de 150 kilomètres. Par ailleurs, le centre de Grenoble a déjà fait connaître qu'il se trouvait dans l'incapacité d'accueillir des donneurs supplémentaires, en raison de ses possibilités de prélèvements limitées. Or le centre de prélèvement de Valence bénéficie de toutes les garanties sanitaires. Le médecin responsable des prélèvements est d'ailleurs un médecin spécialiste exerçant à Lyon. Enfin, tous les acteurs du monde médical de la région s'accordent pour reconnaître les qualités d'accueil très attractives du centre de Valence. La fermeture de ce centre apparaît donc comme un véritable frein au recrutement de nouveaux volontaires et au développement du fichier national des donneurs, qui reste bien souvent la seule chance de survie offerte aux malades leucémiques n'ayant pas de donneurs compatibles dans leur fratrie. Tout le travail effectué par les associations de bénévoles oeuvrant pour le recrutement de nouveaux donneurs risque d'être ainsi rendu encore plus difficile qu'il ne l'est déjà. Aussi, il lui demande de bien vouloir prendre toutes les mesures dérogatoires possibles pour permettre le maintien de l'agrément du centre hospitalier de Valence comme centre préleveur de moelle osseuse.