Séance du 23 juin 1998






D'ENFOUISSEMENT TECHNIQUE DE BEAUCHÊNE
À SAINT-FROMOND (MANCHE)

M. le président. La parole est à M. Le Grand, auteur de la question n° 292, adressée à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
M. Jean-François Le Grand. En application de l'article 23-3 du décret du 20 septembre 1997 et de la circulaire n° 97-103 du 18 juillet 1997, l'ouverture d'un centre d'enfouissement technique de classe II oblige l'exploitant du site à fournir, lors de la publication de l'arrêté du préfet donnant autorisation d'exploiter, une garantie financière concernant le montant des travaux à exécuter en cas de défaillance de l'exploitant pour la remise en état partielle ou définitive du site lorsque survient un sinistre. L'intention est bonne.
Aucune banque, aucune société d'assurance consultées, ni même l'ADEME, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, n'ont accepté de donner une garantie financière ou une caution bancaire, estimant qu'elles pouvaient être entraînées en cas de pollution à supporter des frais dépassant le montant de la caution donnée et dont la durée pourrait être allongée par jurisprudence des tribunaux. J'ai consulté toutes les grandes compagnies ainsi que la fédération française des sociétés d'assurances. Elles ont toutes exprimé une réponse négative.
Les services du ministère de l'aménagement du territoire ainsi que la direction du Trésor ont été informés de ce refus des compagnies d'assurances de participer à ce dispositif de garanties financières sans qu'aucune solution ait été apportée à ce problème.
S'agissant du centre d'enfouissement technique de Beauchêne à Saint-Fromond qui est exploité par un syndicat intercommunal à vocation multiple, un SIVOM, un arrêté préfectoral est en cours de préparation. Mais cet arrêté ne peut pas être publié dans la mesure où il n'applique pas le décret puisque aucune garantie financière n'est obtenue. Il s'agit, je le rappelle, d'un syndicat intercommunal, donc d'une garantie des collectivités.
Je souhaite que vous puissiez apporter une réponse à ce sujet, faute de quoi aucun centre d'enfouissement technique de classe II ne pourra être exploité. J'eusse préféré que Mme le ministre de l'environnement me réponde elle-même à ce sujet mais vous avez indiqué qu'elle se trouve au Danemark. Toutefois, il est assez logique que le ministre du logement me réponde puisque, s'il n'y avait pas d'habitat, il n'y aurait pas d'habitants et donc pas de déchets. (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Vous avez effectivement fait observer avec humour, monsieur le sénateur, qu'à partir de l'habitat il est possible de toucher à bien des domaines et à nombre de préoccupations. Je vous remercie en tout cas de la compréhension que vous avez exprimée dans votre propos.
Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement qui est empêchée de vous répondre personnellement - elle vous prie de bien vouloir l'en excuser - a pris connaissance, avec un grand intérêt, de la question concernant les garanties financières des installations de stockage de déchets.
La mise en exploitation de la décharge de Beauchêne à Saint-Fromond, prévue en septembre 1998, est en effet conditionnée à un acte de cautionnement délivré par un organisme financier au futur exploitant de la décharge et attestant de la constitution de ses garanties financières.
Comme vous l'avez souligné, l'exploitant n'a pas trouvé, à ce jour, d'organisme financier acceptant de le cautionner.
Les services du ministère de l'environnement sont à la disposition de l'exploitant pour lui communiquer les noms d'assurances et de courtiers qui ont mis au point un système de mutualisation des garanties financières qu'ils sont venus présenter aux services du ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement voilà quelques jours. Il semble qu'aujourd'hui il soit possible d'apporter une réponse au problème.
Ce système a déjà été adopté par une dizaine d'exploitants de décharges de déchets ménagers et assimilés, dont certains, à l'instar du cas que vous avez évoqué, s'étaient vu refuser tout autre système financier.
Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement espère que l'exploitant concerné trouvera ainsi les garanties financières indispensables à la bonne gestion de ce type d'installations qui peut présenter, sur le long terme, des risques pour l'environnement, ce qui explique, bien sûr, les précautions qui ont été prises.
Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments qui ont pu être réunis pour répondre au problème que vous avez soulevé. Celui-ci peut, semble-t-il, être résolu grâce à la mise en point, toute récente, avec des assurances et des courtiers, d'un dispositif mutualisé, dont les coordonnées pourront être communiquées à l'exploitant dont vous exprimez les préoccupations.
M. Jean-François Le Grand. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Le Grand.
M. Jean-François Le Grand. Monsieur le secrétaire d'Etat, je me demande si le mieux n'est pas l'ennemi du bien. Vous m'indiquez que les noms de compagnies, de courtiers d'assurance vont m'être communiqués. J'en prends acte et vous remercie. Mais je regrette d'avoir dû poser une question orale pour obtenir une réponse de ce type.
Permettez-moi d'attirer votre attention sur le fait que c'est à un SIVOM, et donc à une collectivité, que l'on demande une garantie bancaire. Si j'approuve une telle démarche lorsqu'il s'agit d'un gestionnaire privé - ce dernier peut être défaillant, disparaître et, comme cela s'est vu pour d'autres cas de pollution, notamment sur des sites industriels, le problème n'est alors plus traité - je ne la comprends pas s'agissant d'un SIVOM. En effet, il résulte des textes régissant les syndicats intercommunaux une obligation de suivi, même après la disparition du syndicat : les collectivités membres du syndicat sont tenues d'honorer les engagements pris. Par conséquent, à partir du moment ou le SIVOM s'engage à exploiter un centre d'enfouissement technique de classe II, il prend bien évidemment tous les risques inhérents à ce centre d'enfouissement technique, risques parmi lesquels figurent les risques de pollution d'origine accidentelle ou autre.
Par conséquent, pourquoi exiger, en plus, une garantie financière auprès d'une compagnie ou d'un courtier d'assurance ? Des frais supplémentaires seraient alors imposés aux contribuables. Or les centres d'enfouissement techniques coûtent déja fort cher, et le traitement de la tonne de déchets atteint des sommes faramineuses. Ajouter un coût à ce coût dépasserait donc l'entendement.
Si je comprends que ces textes soient maintenus pour les gestionnaires privés, je trouve néanmoins illogique qu'il en aille de même pour des collectivités.
J'aimerais donc, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous transmettiez à Mme Voynet, quand elle rentrera du Danemark, mes observations, si tant est que vous les ayez trouvées pertinentes. (M. le secrétaire d'Etat fait un signe d'assentissement.)

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