Séance du 18 juin 1998







M. le président. La séance est reprise.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Monsieur le président, le vice-président de la commission des lois que je suis doit bien confesser son embarras, notamment vis-à-vis de Mme le garde des sceaux, mais force est de reconnaître que l'examen, par la commission, du texte relatif au Conseil supérieur de la magistrature, que l'on ne peut pas différer davantage puisque le Sénat doit en débattre la semaine prochaine, se révèle plus long que nous ne l'avions imaginé.
Dans ces conditions, le président de la commission des lois m'a mandaté pour solliciter de la bienveillance des uns et des autres et de la compréhension du Gouvernement l'autorisation de reporter l'examen en séance publique du projet de loi concernant la procédure pénale à cet après-midi, après les questions d'actualité au Gouvernement.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. De même que le criminel tient le civil en l'état, c'est, à mon avis, l'assemblée plénière qui doit tenir la commission en l'état, et non pas le contraire.
Dès lors, monsieur le président, je demande que nous continuions nos travaux comme prévu, fût-ce avec beaucoup de retard, et je me permets de vous proposer de consulter le Sénat pour trancher cette question.
M. le président. Monsieur Dreyfus-Schmidt, je pense, comme vous, que la séance publique doit l'emporter sur la réunion de la commission.
M. Jean-Jacques Robert. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Robert.
M. Jean-Jacques Robert. Je partage entièrement le point de vue qui vient d'être exprimé par M. Dreyfus-Schmidt comme par vous-même, monsieur le président.
De telles méthodes de travail me paraissent en effet inadmissibles. La séance publique doit primer sur les réunions des commissions, lesquelles n'ont qu'à organiser leurs travaux en fonction de l'ordre du jour du Sénat.
M. le président. Madame le garde des sceaux, souhaitez-vous vous exprimer sur la demande de la commission ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Monsieur le président, je suis très embarrassée : chacun est soumis aux contraintes de son emploi du temps et le fait qu'il soit ainsi bouleversé ne peut qu'entraîner des complications.
Sans vouloir m'opposer formellement à cette demande de la commission des lois, je tiens à souligner qu'il me paraîtrait plus naturel que la séance publique se déroule conformément aux conclusions de la conférence des présidents.
Cela étant, si la commission des lois insiste, je suis bien entendu à la disposition du Sénat pour revenir cet après-midi, mais à condition que l'examen de ce texte puisse effectivement s'achever au cours de cette séance.
M. le président. Madame le garde des sceaux, mes chers collègues, afin que nous soyons pleinement éclairés, je vais faire demander à M. le président de la commission des lois de nous rejoindre dans l'hémicycle.

(M. le président charge un huissier d'aller quérir M. le président de la commission des lois. - Après quelques minutes, celui-ci gagne l'hémicycle.)
M. le président. Monsieur le président de la commission des lois, j'ai ouvert la séance à dix heures trente, conformément à l'ordre du jour arrêté hier. J'ai déjà procédé à une suspension de séance de cinq minutes, à la demande de M. le rapporteur. Maintenant, il nous est demandé de ne plus siéger du tout ce matin !
Je souhaiterais que vous donniez votre position sur cette nouvelle demande de suspension afin que le Sénat puisse trancher.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Le Sénat tranchera dans le sens qu'il estimera souhaitable, monsieur le président.
La démarche que je viens effectuer en cet instant est motivée par le fait que le débat que nous venons d'engager en commission des lois se révèle assez long et difficile. Il concerne, je le rappelle, la Constitution.
Compte tenu du point où nous en sommes maintenant, il est plus courtois à l'égard de Mme le garde des sceaux que la suite de l'examen en séance publique du projet de loi relatif aux alternatives aux poursuites et renforçant l'efficacité de la procédure pénale soit reportée à cet après-midi, de telle manière que nous n'allions pas de suspension en suspension.
M. Robert Pagès. Nous sommes là, nous !
M. Jacques Larché, président de la commission.
Je vous pris de m'en excuser, mais la situation dans laquelle je me trouve n'est pas habituelle.
A la demande de la totalité des membres de la commission des lois, je demande donc au Sénat de bien vouloir reporter en début d'après-midi la suite de l'examen du présent texte.
Faut-il le rappeler, la commission des lois est réunie pour examiner un projet de loi constitutionnelle qui sera discuté en séance publique mardi prochain. Le rapport doit être distribué d'ici là. Nous avons certaines questions de fond à trancher.
Tel est le problème auquel nous sommes confrontés. Je pensais que la question pouvait être réglée aisément. Cela dit, il est tout à fait légitime que le Sénat soit consulté et prenne une décision, comme il lui incombe, et je ne préjuge pas cette décision.
Si, conformément à ma demande, le Sénat décide de reprendre l'examen de ce texte cet après-midi, nous pourrons terminer notre débat en commission, qui risque de durer encore deux ou trois heures.
M. Robert Pagès. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès. M. le président de la commission des lois vient de nous dire que cette proposition émanait de l'ensemble des membres de la commission des lois. Ce n'est pas exact car, personnellement, j'ai pris une position différente, puisque j'ai quitté la réunion de la commission pour rejoindre l'hémicycle. Sans négliger le débat sur le Conseil supérieur de la magistrature qui s'est engagé en commission, j'estime que la discussion que nous avons commencée ici-même, en séance publique, n'a pas moins d'importance. Du reste, un certain nombre de collègues ont pris leurs dispositions pour être présents.
Pour l'heure, en ce qui les concerne, les membres du groupe communiste républicain et citoyen souhaitent que le Sénat poursuive ses travaux en séance publique.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole.
M. le président. Je vous donne la parole en vous invitant à la concision, monsieur Dreyfus-Schmidt, car nous avons déjà perdu beaucoup de temps.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je serai très bref, monsieur le président. Vous aviez tout à l'heure envisagé de consulter le Sénat. Par déférence, vous avez demandé à M. le président de la commission des lois de gagner l'hémicycle. Il y vient non pas seul mais accompagné d'un certain nombre de nos collègues. Je ne veux pas préjuger leur position, mais cela fausse le débat dans la mesure où, tout à l'heure, le sénateurs présents dans l'hémicycle, et de toutes tendances, semblaient d'accord pour que nous poursuivions nos travaux.
J'ai déjà eu l'occasion de le dire, y compris en commission, je regrette vivement que la commission des lois se réunisse alors que le Sénat siège en séance publique. J'estime cependant que la commission doit s'incliner devant le Sénat - et devant l'ordre du jour prioritaire - et non le contraire.
Je le rappelle à M. le président de la commission, prévoyant que les débats ne seraient pas simples, j'avais proposé que la commission poursuive ses travaux hier soir alors que le Sénat ne siégeait pas. Il n'en a pas étéd'accord.
Je demande maintenant que nous puissions reprendre la discussion du projet de loi relatif aux alternatives aux poursuites et renforçant l'efficacité de la procédure pénale. Que ceux qui veulent aller en commission s'y rendent, mais qu'ils n'empêchent pas le Sénat dedélibérer !
M. Jacques Larché, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché, président de la commission. Je constate une fois encore que notre collègue M. Dreyfus-Schmidt fait tout ce qui est en son pouvoir pour faciliter les choses !
Il ne s'agit pas de demander à la commission de s'incliner devant le Sénat ou au Sénat de s'incliner devant la commission. Cette position est absolument stupide.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je vous en prie !
M. Jacques Larché, président de la commission. Je la trouve stupide, et je me permets de vous le dire.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Si je vous le disais chaque fois que je trouve telles vos positions !
M. Jacques Larché, président de la commission. Il ne s'agit pas de cela. Il faut trouver des modalités de travail qui nous permettent d'aboutir sur un texte qu'à tort ou à raison on considère comme fondamental. Le projet dont est saisie la commission a trait à la Constitution. Que les membres de la commission aient rejoint cet hémicycle, je ne vois pas en quoi cela peut être choquant !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. J'ai bien entendu les explications de M. le président de la commission des lois. Je suis prête à revenir cet après-midi, mais il me faut l'assurance que nous terminerons à dix-neuf heures trente. J'ai un engagement impératif ensuite qui m'interdit tout décalage.
M. Jacques Larché, président de la commission. Nous terminerons à dix-neuf heures trente.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Assurance impossible à donner !
M. le président. Tout dépend de la façon dont se déroulera le débat, mais je pense que la présidence peut prendre l'engagement de lever la séance à dix-neuf heures trente, quel que soit l'état d'avancement de la discussion.
Je consulte le Sénat sur la demande de suspension formulée par M. le président de la commission des lois.

(Le Sénat décide de suspendre la séance.)
M. le président. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures dix, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. René Monory.)