Séance du 11 juin 1998
M. le président. Par amendement n° 61, M. Seillier, au nom de la commission des affaires sociales, propose d'insérer, après l'article 30, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A compter du 1er août 1998, le montant des primes d'assurances versées au titre de la garantie du risque de loyers impayés ouvre droit à un crédit d'impôt au titre de l'impôt sur le revenu dans la limite d'un plafond égal à 1 800 francs par an.
« Ce crédit d'impôt est exclusif de la déduction au titre des revenus fonciers prévue au a bis du 1° de l'article 31 du code général des impôts.
« II. - La perte de ressources résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement est le premier volet du dispositif incitatif proposé par la commission pour faciliter la remise sur le marché des logements vacants.
Il est prévu, à l'article 31 du code général des impôts, que le montant des primes d'assurances versées au titre de la garantie du risque de loyers impayés est déductible du revenu net foncier pour le calcul de l'impôt sur le revenu.
Ces dispositifs de garantie d'impayés sont très appréciés par les bailleurs, qui redoutent souvent de prendre un locataire en raison des risques de non-paiement et des conséquences ultérieures.
Il est proposé d'améliorer le régime fiscal de ces primes d'assurances en les transformant en un crédit d'impôt déductible de l'impôt sur le revenu.
Afin d'éviter de générer des inégalités, le crédit d'impôt est plafonné à 1 800 francs par an, par référence à un loyer dont le produit annuel total serait de 60 000 francs.
Bien entendu, le crédit d'impôt et la déduction précitée au titre des revenus fonciers ne seront pas cumulables.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement ne conçoit pas que cette disposition puisse être prise indépendamment du projet de loi qui est en préparation sur le statut du bailleur privé.
J'attire l'attention du Sénat sur le fait que, aujourd'hui, les primes d'assurances pour loyers impayés sont déjà déductibles des revenus fonciers.
J'ajoute que transformer la déductibilité en un crédit d'impôt aurait un coût d'au moins un milliard de francs.
Dans ces conditions, il ne paraît pas envisageable, au sein d'un texte relatif à la lutte contre les exclusions, de prendre une telle mesure, qui devrait plutôt être débattue lors de la discussion du futur projet de loi traitant de la propriété foncière.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 61.
M. André Vezinhet. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Vezinhet.
M. André Vezinhet. Cet article additionnel aurait pu être intéressant si le crédit d'impôt prévu avait été encadré. Il faudrait à tout le moins qu'il fût lié à l'allocation logement pour les personnes défavorisées. Ces deux conditions sont indispensables.
En conséquence, nous voterons contre cet amendement.
M. Alain Vasselle. Il fallait le sous-amender !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 61, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 98:
Nombre de votants | 317 |
Nombre de suffrages exprimés | 316 |
Majorité absolue des suffrages | 159 |
Pour l'adoption | 219 |
Contre | 97 |
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 30.
Par amendement n° 62, M. Seillier, au nom de la commission des affaires sociales, propose d'insérer, après l'article 30, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 32 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 4. A compter du 1er août 1998, le montant du revenu brut annuel prévu au 1 ci-dessus est doublé pour les logements vacants depuis plus de deux ans et mis en location à compter de cette date. »
« II. - La perte de ressources résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement constitue le second volet du dispositif incitatif proposé par la commission des affaires sociales pour remplacer la taxe sur les logements vacants supprimée à l'article 30.
Dans le cadre de l'article 3 de la loi de finances pour 1998, un dispositif simplifié a été mis en place pour la déclaration des revenus des propriétaires fonciers.
Aux termes de l'article 32 du code général des impôts, lorsque le montant du revenu brut annuel perçu au titre d'un logement n'excède pas 30 000 francs, le revenu imposable correspondant est fixé, sur demande du contribuable, à une somme égale au montant de ce revenu brut, diminué d'un abattement d'un tiers. Les contribuables portent directement le montant du revenu brut annuel sur leur déclaration.
Cette simplification des obligations déclaratives est appréciée par les contribuables. Il est proposé de l'étendre aux revenus fonciers qui n'excèdent pas 60 000 francs par an, soit 5 000 francs par mois, lorsqu'un logement vacant depuis deux ans est remis en location.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. En fait, le Gouvernement a deux raisons de ne pas souhaiter l'adoption de cet amendement.
Tout d'abord, la mesure rendrait plus complexe le dispositif, que nous souhaitons, au contraire, simplifier, en matière d'obligations déclaratives des bailleurs. Je pense, en fait, à la complexité qui résulterait de la location simultanée d'un logement antérieurement vacant et d'un autre logement : pour deux revenus fonciers, le bailleur serait soumis à deux régimes différents.
Ensuite, et surtout, il semble au Gouvernement que, tel qu'il est rédigé, l'amendement n° 62 irait à l'encontre de l'objectif recherché : doubler pour les logements vacants la limite en deçà de laquelle les bailleurs peuvent être imposés de façon forfaitaire. Or, en doublant non pas cette limite, mais le revenu lui-même, cet amendement aurait pour effet de taxer le propriétaire qui loue un logement antérieurement vacant deux fois plus qu'un autre propriétaire qui perçoit des revenus fonciers d'un même montant.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 62, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 30.
Par amendement n° 402 rectifié, MM. Vasselle, Ostermann, Gournac et les membres du groupe du RPR proposent d'insérer, après l'article 30, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le III de l'article 1414 du code général des impôts, il est inséré un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« III bis. - Les bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique visée à l'article L. 351-10 du code du travail sont dégrevés d'office de la taxe d'habitation afférente à leur résidence principale lorsqu'ils occupent cette habitation dans les conditions prévues à l'article 1390 et lorsque le montant des revenus de l'année précédente n'excède pas la limite prévue à l'article 1417.
« II. - Le prélèvement sur les recettes de l'Etat institué par le II de l'article 21 de la loi n° 91-1322 du 30 décembre 1991 est majoré à due concurrence de la perte de recettes des collectivités territoriales.
« III. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par une majoration des droits visés aux articles 575 et 575 A du code des impôts. »
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Cet amendement tend à exonérer de la taxe d'habitation les personnes bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique. Il s'agit d'une mesure qui vise à harmoniser l'ensemble du dispositif quant à ce type d'allocation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Le dispositif d'exonération de la taxe d'habitation est un mécanisme assez complexe. Par conséquent, la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
En effet, contrairement au RMI - mais les signataires de l'amendement doivent le savoir - l'allocation de solidarité spécifique n'est pas une allocation différentielle, de sorte que des ménages à revenus intermédiaires peuvent être concernés par l'allocation de solidarité spécifique.
Certes, les bénéficiaires de cette allocation peuvent, dans un certain nombre de cas, avoir des ressources qui ne dépassent pas le RMI. Mais, dans cette hypothèse, ils devraient bénéficier du nouveau dégrèvement d'office qui est institué par la loi de finances pour 1998 et qui est codifié à l'article 1414 bis du code général des impôts.
Par conséquent, si l'amendement concerne les bénéficiaires de l'ASS dont les revenus ne dépassent pas le RMI, ceux-ci sont satisfaits. S'il vise les autres, il est préférable de renvoyer l'examen de leur situation à une éventuelle réforme de la taxe d'habitation.
M. le président. Monsieur Vasselle, l'amendement n° 402 rectifié est-il maintenu ?
M. Alain Vasselle. Je prends bonne note de l'information que vient de donner M. le ministre et, par sagesse, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 402 rectifié est retiré.
Mes chers collègues, nous allons suspendre la séance.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, pour faciliter l'organisation des travaux, je tiens à préciser la suite de nos débats.
Le chapitre II, relatif à l'accès au logement, pourrait être achevé ce soir.
Demain matin, le Sénat pourrait examiner le chapitre III, relatif à l'accès aux soins, et le chapitre IV concernant l'exercice de la citoyenneté, qui seront défendus par M. le secrétaire d'Etat à la santé, puis le chapitre V du titre II, relatif à l'égalité des chances par l'éducation et la culture.
Demain à quinze heures, après, le cas échéant, la fin de la discussion de ce chapitre, seraient examinés le chapitre II du titre II, relatif aux saisies, puis le chapitre III, relatif au maintien dans le logement, que je défendrais, ainsi que les éventuels articles du chapitre que nous examinons ce jour si nous ne parvenions pas ce soir à son terme.
Nous reprendrions le chapitre Ier de ce titre, relatif à la procédure de traitement des situations de surendettement, après le dîner, en présence de Mme la secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat.
Mardi 16 juin, le matin et, éventuellement, à seize heures, le Sénat pourrait enfin examiner le chapitre IV, relatif aux moyens d'existence, et le titre III, relatif aux institutions sociales. Les explications de vote et le vote devraient alors se dérouler en fin d'après-midi, comme cela était prévu.
Ainsi, nous pourrions faire coïncider la suite logique des travaux du Sénat avec les disponibilités des différents membres du Gouvernement chargés de défendre les dispositions de ce projet de loi devant la Haute Assemblée.
M. le président. Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne pense pas que nous puissions terminer ce soir la discussion du volet « logement », sur lequel il reste encore cent dix amendements à examiner.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission accepte la proposition du Gouvernement, tout en formulant deux observations.
Tout d'abord, elle regrette que le Gouvernement ait quelques difficultés à être représenté au banc, ce qui entraîne des demandes de réserve et de priorité.
Ensuite, elle souligne comme vous, monsieur le président, l'optimisme du Gouvernement, qui pense achever ce soir l'examen du chapitre II relatif à l'accès au logement. Je rappelle, en effet, que 110 amendements restent en discussion. Même si chacun accomplissait un effort de concision, ce serait probablement insuffisant.
M. le président. Permettez-moi, monsieur le secrétaire d'Etat, de réitérer mon scepticisme quant à l'achèvement cette nuit du chapitre II consacré à l'accès au logement.
Je vous rappelle que, le mardi 16 juin, en fin d'après-midi et le soir, est inscrite à l'ordre du jour du Sénat une déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, relative à la politique de réduction des risques en matière de toxicomanie.
Par conséquent, l'organisation de la suite des travaux que vous proposez me semble relever d'un certain optimisme.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)