Séance du 2 juin 1998







M. le président. La parole est à M. de Menou, auteur de la question n° 267, adressée à M. le secrétaire d'Etat au budget. M. Jacques de Menou. Monsieur le secrétaire d'Etat, le problème que je soulève aujourd'hui concerne le montant des loyers que peuvent percevoir les communes, communautés de communes ou syndicats intercommunaux à vocation multiple, les SIVOM, sur les investissements immobiliers qu'ils réalisent en faveur du commerce rural ou des PME-PMI.
Le cas précis d'une commune du Finistère ayant acquis un immeuble pour le rénover et y installer un commerce de proximité illustre ces abus. L'opération a bénéficié d'une aide du conseil général, de l'Europe, de la région et du fonds d'intervention pour la sauvegarde, la transmission et la restructuration des activités commerciales et artisanales, le FISAC, l'aide en fonctionnement de ce fonds prévoyant une réduction de loyer pendant trois ans à condition qu'un effort comparable soit accompli par la commune.
Or, la direction des services fiscaux conteste aujourd'hui ce dispositif. Elle estime que le loyer normal doit être au moins égal à 4 % de la valeur brute de l'investissement total.
Cette position me paraît inacceptable, dès lors que l'administration conditionne le remboursement de la TVA payée par la commune à la réévaluation fictive du loyer et demande donc à la commune de verser la TVA sur cette base fictive.
Il serait normal que le calcul de l'administration fiscale se fasse sur le coût net de l'investissement par la commune - coût total de l'investissement diminué des subventions reçues - et que les aides ainsi accordées aux communes viennent en diminution réelle des charges de loyer facturées par elles aux locataires, qui, en toute logique, doivent être, en tant que PME, PMI et petits commerces, les principaux bénéficiaires de ce dispositif. C'est d'ailleurs l'objet du FISAC de donner une subvention de fonctionnement pour faire baisser le prix du loyer, en demandant à la commune d'en faire autant.
A l'heure où l'aménagement du territoire est prôné comme une priorité et où les efforts pour dynamiser les communes rurales par des commerces relais et des bâtiments industriels pour recevoir les PME se concrétisent grâce à des aides européennes, régionales, départementales, voire de la dotation au développement rural, la DDR, et du FISAC, dont l'objet est précisément de faire diminuer les loyers, il semble injuste de pénaliser financièrement ces communes par des mécanismes fiscaux qui me paraissent pour le moins inadaptés.
Je signale, en outre, qu'au regard des règlements européens qui, avec raison, se préoccupent de la juste concurrence et des systèmes d'aides excessifs qui faussent les lois de la concurrence, la règle de minimis s'applique en l'espèce. Il s'agit en effet de petits commerces ruraux ou de petites PME dont l'influence à l'échelon de la concurrence européenne est inexistante. La règle de minimis leur permet donc d'échapper aux contraintes européennes et vous laisse, monsieur le secrétaire d'Etat, pleine liberté d'appréciation sur ce dossier très important pour l'économie du monde rural.
J'ajoute que, le 7 novembre dernier, j'avais saisi de ce problème Mme Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat, que je connais fort bien puisqu'elle habite dans une ville près de chez moi. Elle m'a indiqué qu'elle en saisirait M. Sautter le plus rapidement possible. Le 30 janvier, M. Sautter m'a écrit en m'informant qu'il y réfléchissait, qu'il examinait la question.
J'espère qu'aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'Etat, vous pourrez me donner cette réponse qu'attendent avec impatience les maires concernés.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé. Monsieur le sénateur, je ne veux pas m'immiscer dans le dialogue qui s'est engagé entre Mme Lebranchu et M. Sautter.
Vous avez adressé votre question à M. le secrétaire d'Etat au budget, qui, tenu de participer, ce matin, à une réunion, m'a prié de vous transmettre la réponse suivante.
Le Gouvernement est particulièrement sensible aux questions d'aménagement du territoire et aux efforts faits pour dynamiser les communes rurales. Tel est le principe.
Mais vous comprendrez, monsieur le sénateur, que la taxe sur la valeur ajoutée ne puisse pas être utilisée comme un moyen de subventionner les communes. Il s'agit d'un impôt, qui, par définition, doit se traduire par des recettes pour l'Etat et qui, de surcroît, obéit à des règles harmonisées par des directives européennes, même si, en l'occurrence, vous l'avez signalé, la concurrence s'exerce peu.
Or, l'un des principes fondamentaux de cet impôt, c'est que les recettes soumises à la taxe incluent le coût des dépenses, et notamment des investissements. Cette règle est essentielle pour les finances publiques, et elle s'applique à tous les redevables sans distinction.
Pour les locations d'immeubles, il est admis que cette condition est remplie si le loyer est au moins égal à 4 % du prix de revient de l'immeuble.
Mais il est vrai que, lorsque l'immeuble a été financé en grande partie par des subventions, ce qui est généralement le cas pour les communes rurales, les loyers sont souvent inférieurs à ce seuil de 4 %.
Aussi, pour que les collectivités locales qui sont placées dans cette situation puissent néanmoins bénéficier de la déduction intégrale de la taxe sur la valeur ajoutée supportée au titre de l'investissement, une règle particulière a été mise en place.
La commune acquitte un montant de taxe sur la valeur ajoutée calculé sur une base égale à 4 % du prix de revient même si le loyer est inférieur. En contrepartie, elle peut déduire immédiatement l'intégralité de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à l'investissement.
J'espère, monsieur le sénateur, que cette disposition répond en grande partie, sinon complètement, à votre préoccupation.
M. Jacques de Menou. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. de Menou.
M. Jacques de Menou. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de la clarté de votre réponse, qui, malheureusement, ne fait que confirmer la position du fisc.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Eh oui !
M. Jacques de Menou. Je ne puis que regretter que le fisc réalise des profits sur les aides que nous accordons aux communes. Ce n'est pas normal.
M. le secrétaire d'Etat au budget fait valoir que la TVA n'est pas un moyen de subvention. C'est vrai, mais en fonction du taux appliqué au loyer la TVA sera remboursée plus ou moins vite. Or, il m'apparaît que, pour les communes de 300, 500, voire 1 000 habitants, qui consentent de gros efforts pour maintenir une vie économique, le fisc pourrait accepter un délai de remboursement plus long que pour les communes qui ne produisent pas ces efforts.
Je suis donc en total désaccord avec la réponse de M. le secrétaire d'Etat au budget. Il faudra revoir cette question, car cette disposition est très mal ressentie par les communes concernées, qui ne comprennent pas qu'on se fonde sur un bail fictif, sur lequel on calcule une TVA fictive qui permet au fisc d'être remboursé plus vite. Encore une fois, ce n'est pas normal.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat. Je transmettrai, naturellement, ces observations à M. le secrétaire d'Etat au budget.

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