M. le président. La parole est à M. Demuynck.
M. Christian Demuynck. Ma question s'adresse à Mme le ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire.
Le 2 mars dernier, en pleine période électorale, vous vous êtes rendue à Bobigny pour présenter votre plan de rattrapage scolaire pour la Seine-Saint-Denis.
Votre visite a d'ailleurs fait l'objet par la suite d'un fort tapage médiatique, à quelques jours des élections locales.
Quoi qu'il en soit, votre plan annoncé à la hâte a rapidement provoqué un mécontentement généralisé dans les établissements de ce département. Et je dois dire qu'il y a de quoi !
Certaines mesures d'urgence, comme la nomination de quelques dizaines de médecins, infirmières et assistantes sociales, figuraient déjà dans le plan anti-violence présenté par sept ministres du Gouvernement le 5 novembre 1997. Représenter les mêmes mesures cinq mois plus tard vient conforter l'idée que votre démarche était électoraliste.
D'après certains enseignants, il faudrait créer 1 000 postes d'encadrement et d'enseignants. Vous en avez annoncé 60 sur deux ans. Les 3 500 emplois-jeunes que vous prévoyez ne répondent pas aux nécessités de lutte contre la violence et l'échec scolaire.
Cet après-midi, et pour la quatrième fois depuis une quinzaine de jours, enseignants, parents d'élèves et collégiens de Seine-Saint-Denis manifestent à Paris pour demander plus de moyens pour leur établissement. La violence, l'incivilité, l'illettrisme y sont tellement répandus que l'on pourrait considérer ce département comme sinistré dans son ensemble et classer en zone prioritaire la quasi-totalité des cent quatorze collèges de la Seine-Saint-Denis.
Ainsi, 35 % des jeunes sortent du système scolaire sans aucune qualification, soit quatre fois plus que la moyenne nationale, et 48,4 % seulement y obtiennent le bac, contre 61,5 % dans le reste de la France.
Madame le ministre, avant que vous me répondiez que rien n'a été fait par le précédent gouvernement, je voudrais rapporter les propos du député socialiste Bruno Leroux, tels qu'on peut les lire dans le compte rendu analytique : M. Leroux a reconnu lui-même avant-hier sur les bancs de l'Assemblée nationale « qu'il y a dix ans qu'on fait porter un effort prioritaire vers les zones les plus défavorisées ».
Je voudrais rappeler aussi que le gouvernement précédent s'est attaché à intervenir sur les quartiers difficiles, notamment par la création de 400 zones urbaines sensibles, dont 60 pour la Seine-Saint-Denis, dans le cadre du pacte de relance pour la ville.
Madame le ministre, je vous ai entendue tout à l'heure répondre à l'une de nos collègues que les mesures à prendre doivent être étudiées et travaillées, ce qui revient à dire, en quelque sorte, que votre déplacement à Bobigny était purement médiatique. Madame le ministre, quand proposerez-vous un vrai plan de rattrapage...
M. Alain Gournac. Un vrai !
M. Christian Demuynck. ... ambitieux, applicable à toute la Seine-Saint-Denis ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Alain Gournac. Bonne question !
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire. Monsieur le sénateur, Claude Allègre et moi-même avons en effet annoncé un plan de rattrappage pour la Seine-Saint-Denis le 2 mars. Nous sommes aujourd'hui le 26 mars. Vingt-six moins deux font vingt-quatre ! (Ah ! sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Comment pouvons-nous faire en vingt-quatre jours, monsieur le sénateur, ce que vous n'avez pas fait en quatre ans ? (Exclamations sur les travées du RPR.)
Par ailleurs, lors de la table ronde à laquelle Claude Allègre et moi-même avons participé, tous les élus de toutes les tendances politiques étaient rassemblés. Un certain nombre d'élus du RPR étaient présents, et ils se sont publiquement félicités du plan de rattrapage pour la Seine-Saint-Denis.
Je crois donc qu'il faut regarder les choses en face !
Laissez-moi vous dire, monsieur le sénateur, que je suis un peu peinée de l'image misérabiliste que vous venez de donner de la Seine-Saint-Denis ! Vous parlez de « violence », d'« illettrisme », vous évoquez des statistiques.
M. Dominique Braye. C'est la réalité ! Ce n'est pas les Deux-Sèvres !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Sachez que, m'étant rendue personnellement dans un certain nombre d'établissements de ce département, j'y ai trouvé des trésors de compétence, de dévouement et d'imagination.
M. Christian Demuynck. Bien sûr !
M. Dominique Braye. C'est de la démagogie !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Aujourd'hui, tous les élus responsables doivent se mobiliser pour cristalliser cette compétence et cette énergie de façon positive par rapport à une tâche qui est en effet difficile.
M. Dominique Braye. Ce n'est pas par la démagogie que l'on réglera les problèmes !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Si l'on observe aujourd'hui l'expression d'une impatience, c'est parce qu'il y a un espoir. Quand il n'y a pas d'espoir, comme ce fut le cas lorsque vous exerciez les responsabilités dans ce pays, il n'y a pas d'expression d'impatience ! (Vives protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Dominique Braye. On ne résoudra jamais les problèmes en abordant les choses ainsi !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Aujourd'hui, les premières décisions ont été prises. Jamais des mesures de cette ampleur n'étaient intervenues pour ce département, qui le mérite.
Les réunions de travail sont actuellement en cours pour arrêter la deuxième vague de ce plan de rattrapage. L'engagement a été pris par le Gouvernement d'arrêter cette deuxième vague avant le 1er mai.
Aujourd'hui, le Gouvernement a entendu l'expression de ces impatiences. Il souhaite que le travail reprenne. Ce dernier a d'ailleurs continué dans de nombreux établissements. Les équipes pédagogiques s'emploient à la mise en place des réseaux d'éducation prioritaire et du dispositif complémentaire que nous nous sommes engagés à apporter.
Désormais, les procédures sont claires. Les objectifs sont arrêtés. La volonté gouvernementale est totale. Nous avons bon espoir de réaliser avant le 1er mai un dispositif complet qui saura apporter à nouveau à ce département toute la modernisation qu'il mérite pour offrir aux élèves la réussite scolaire à laquelle, comme partout en France, ils ont droit. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
FINANCEMENT DES INFRASTRUCTURES ROUTIÈRES