SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Loi de finances pour 1998.
- Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
1
).
Economie, finances et industrie
(suite)
IV. - PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES,
COMMERCE ET ARTISANAT (p.
2
)
MM. René Ballayer, rapporteur spécial de la commission des finances ;
Jean-Jacques Robert, rapporteur pour avis de la commission des affaires
économiques ; Mme Odette Terrade, MM. André Jourdain, Kléber Malécot, Mme Anne
Heinis, MM. Bernard Dussaut, Joseph Ostermann, André Egu, René Régnault,
Jean-Jacques Robert.
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises,
au commerce et à l'artisanat.
Crédits des titres III à VI. - Adoption (p.
3
)
Suspension et reprise de la séance
(p.
4
)
Equipement, transports et logement
(suite)
(p.
5
)
III. - LOGEMENT (p.
6
)
MM. Henri Collard, rapporteur spécial de la commission des finances ; William
Chervy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ;
Jacques Bimbenet, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales,
pour le logement social ; Mme Odette Terrade, MM. Joseph Ostermann, André Egu,
José Balarello, André Vezinhet, Marcel-Pierre Cléach, Gérard Delfau, Mme
Danièle Pourtaud.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.
Crédits du titre III (p. 7 )
Mme Odette Terrade, M. le secrétaire d'Etat.
Vote des crédits réservé.
Crédits du titre IV (p. 8 )
Mme Nicole Borvo.
Vote des crédits réservé.
Crédits du titre V. - Vote réservé (p.
9
)
Crédits du titre VI (p.
10
)
M. Alain Vasselle.
Vote des crédits réservé.
Article additionnel après l'article 67
Amendement n° II-74 rectifié de M. Chervy. - MM. William Chervy, le rapporteur spécial, le secrétaire d'Etat, José Balarello, Mme Nicole Borvo, MM. Alain Vasselle, André Vezinhet. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Suspension et reprise de la séance (p. 11 )
PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
V. - TOURISME (p.
12
)
MM. Paul Loridant, rapporteur spécial de la commission des finances ; Charles
Ginésy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Jean
Besson, Bernard Joly, Robert Pagès, Joseph Ostermann, André Egu, Bernard
Plasait, Marcel Bony.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme.
Crédits du titre III (p. 13 )
M. le rapporteur spécial.
Adoption, par scrutin public, des crédits modifiés (p.
14
)
Crédits du titre IV (p.
15
)
Amendements n°s II-55 de M. Goulet et II-54 de M. Ostermann. - MM. Joseph Ostermann, le rapporteur spécial, Mme le secétaire d'Etat - Retrait des amendements.
Adoption des crédits modifiés (p.
16
)
Crédits des titres V et VI. - Adoption
des crédits modifiés (p.
17
)
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du
logement.
3.
Ordre du jour.
(p.
18
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE
DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
LOI DE FINANCES POUR 1998
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale. [N°s 84 et 85 (1997-1998).]
Economie, finances et industrie
(suite)
IV. - PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES,
COMMERCE ET ARTISANAT
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
l'économie, les finances et l'industrie : IV. - Petites et moyennes
entreprises, commerce et artisanat.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. René Ballayer,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, madame le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, après deux années de forte baisse, les
crédits du commerce et de l'artisanat connaîtront une légère diminution de 2,8
%, passant de 437 millions de francs en loi de finances initiale pour 1997 à
425 millions de francs dans le projet de loi de finances pour 1998.
Toutefois, ce ralentissement du processus de réduction des crédits doit être
relativisé. En effet, avec la prise en compte des crédits réellement
disponibles pour 1997, la baisse des crédits atteint 12,3 %.
Cette contraction des crédits du ministère pèsera, contrairement à l'année
dernière, sur les crédits de paiement des dépenses ordinaires, en baisse de 6
%, après une baisse de 14 % l'an passé.
En revanche, les crédits d'investissement du titre VI, qui atteindront 22,8
millions de francs, augmentent de plus de 135 %. Cette forte hausse est due,
pour l'essentiel, à l'exécution des contrats de plan Etat-région.
L'essentiel de la baisse des crédits pèsera sur les interventions économiques
du titre IV, qui constituent plus de 90 % des crédits du ministère. En effet,
les crédits d'intervention sont réduits de 25 millions de francs, soit une
diminution de 6,3 %.
Ce sont les interventions en faveur de l'artisanat qui subissent la totalité
de la baisse de ces crédits. En effet, l'artisanat voit ses dotations passer de
175,2 millions de francs à 155 millions de francs en 1998, soit une baisse de
11,5 %.
Cette baisse pèse apparemment sur les actions territoriales, dont les crédits
passent de 103,6 millions de francs à 85 millions de francs. En réalité, elle
traduit un redéploiement de ces crédits, qui passe par une baisse importante
des aides budgétaires à la formation continue des artisans, baisse « masquée »
par les transferts des crédits destinés au soutien à l'institut supérieur des
métiers, l'ISM.
La réduction des aides budgétaires à la formation est donc imputée sur
l'article correspondant aux actions territoriales, dont le montant reste quasi
identique entre 1997 et 1998, soit 86 millions de francs.
Par ailleurs, pour la formation des artisans, la baisse des crédits
budgétaires sera compensée par le mécanisme de financement mis en place par
l'article 132 de la loi de finances de 1997.
Pourtant, madame le secrétaire d'Etat, les incidences de cette mesure ne sont
pas négligeables. Ainsi, pour la chambre des métiers de la Mayenne, elle se
traduira par une perte de ressources de 350 000 francs. Globalement, on
enregistre une diminution de 40 millions de francs pour les chambres des
métiers.
Les interventions en faveur du commerce progressent, quant à elles, de 7,5 %.
Cette hausse des crédits profite exclusivement à la formation, dont les crédits
passent de 48,1 millions de francs à 53 millions de francs.
S'agissant des prêts bonifiés aux artisans, en 1997, avec 159 millions de
francs d'interventions budgétaires, une première enveloppe d'environ 2
milliards de francs a été distribuée au taux de 3,5 %, suivie d'une seconde
enveloppe de 1,5 milliard de francs qui a pu être dégagée par un recours aux
ressources du FISAC, le fonds d'intervention pour la sauvegarde, la
transmission et la restructuration des activités commerciales et artisanales.
Je tiens d'ailleurs à souligner qu'il faudra éviter de systématiser ce type de
prélèvement sur un fonds qui n'est pas destiné par nature à financer de la
bonification.
Pour 1998, les crédits budgétaires sont en baisse de 5,7 % et atteignent 150
millions de francs. Cette réduction traduit un amortissement progressif des
prêts contractés avant le 31 décembre 1997 et non une réduction des dotations.
Celles-ci permettraient de distribuer une enveloppe de 2 milliards de francs
sur ressources budgétaires uniquement.
Par ailleurs, plusieurs mesures fiscales en faveur des PME seront adoptées
dans le projet de loi de finances pour 1998, qu'il s'agisse du soutien à
l'emploi, du soutien aux entreprises innovantes et à la création d'entreprise,
du soutien aux entreprises du bâtiment et des travaux publics ou de la lutte
contre le travail au noir.
Sur ce dernier volet, les mesures engagées me paraissent encore timides, même
si des améliorations ont été apportées par l'Assemblée nationale. Elles ne
peuvent constituer qu'un premier pas dans la bonne direction.
Cependant, les données budgétaires sont loin de traduire l'intégralité des
concours publics de toute nature affectés au secteur du commerce et de
l'artisanat.
Ces moyens d'intervention extrabudgétaire se traduisent, tout d'abord, par
l'intervention de plusieurs fonds.
Je citerai tout d'abord le FISAC, dont l'enveloppe pour 1998 devrait connaître
une augmentation substantielle. Peut-être pourrions-nous avoir aujourd'hui,
madame le secrétaire d'Etat, des précisions sur le montant définitif de son
enveloppe ?
Ce renforcement des crédits devra s'accompagner, me semble-t-il, d'une
réflexion sur le recentrage des actions de ce fonds autour de la notion de
territoire. Vous avez d'ailleurs vous-même souligné, madame le secrétaire
d'Etat, « la nécessité d'ouvrir un débat sur l'emploi des ressources du FISAC,
dont les interventions manquent de plus en plus de cohérence par rapport aux
territoires où elles s'appliquent ».
Je citerai également le fonds national d'aménagement et de développement du
territoire, le FNADT, et les fonds locaux d'adaptation du commerce rural, dont
les actions sont, à tout le moins, difficilement contrôlables.
Enfin, il faut noter l'intervention de divers fonds européens, tels le fonds
social européen, le FSE, et le fonds européen de développement régional, le
FEDER. Pour ce dernier, les mesures développées s'articulent avec les contrats
de plan Etat-région et l'on peut estimer à 500 millions de francs le montant
des crédits susceptibles de profiter aux secteurs du commerce et de l'artisanat
pour la période 1994-1999.
Je m'interroge - et je souhaiterais, madame le secrétaire d'Etat, avoir votre
avis - sur l'efficacité d'une telle multiplicité d'intervenants et sur les
risques d'interventions croisées sans réelle coordination d'ensemble que
celle-ci doit forcément générer.
Enfin, les mesures prises dans le cadre du budget sont également relayées par
une politique gouvernementale qui contribue à développer le secteur.
Cette dernière s'est révélée particulièrement active pendant la période
1995-1997. Elle s'est, tout d'abord, manifestée par une adaptation de la
fiscalité des entreprises à la situation spécifique des PME, par les premières
mesures en faveur de la simplification administrative et par une réforme sur la
moralisation de la concurrence. Elle a été ensuite marquée par la loi du 5
juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de
l'artisanat, qui a créé la nécessié d'une qualification artisanale, très
attendue par le secteur, et qui a surtout profondément réformé la loi Royer en
modifiant les règles de l'urbanisme commercial afin de lutter contre le
développement pléthorique de la grande distribution. Enfin, une réforme
importante du financement et de l'organisation de la formation continue des
artisans est intervenue en 1997.
Selon vos récentes déclarations, madame le secrétaire d'Etat, les perspectives
de réforme devraient porter, dans l'immédiat, sur la simplification des
formalités administratives des entreprises. Une communication sur les grandes
lignes de cette réforme a eu lieu récemment en conseil des ministres. Peut-être
pourriez-vous tout à l'heure nous en donner la substance ?
Pour conclure mon propos, j'observerai que, avec 425 millions de francs, les
crédits sont certainement arrivés à un niveau qui n'autorise plus de baisse
significative, sauf à remettre en cause leur existence même.
En 1996, comme je vous le rappelais tout à l'heure, d'importantes réformes
législatives ont été votées. Deux sont toujours en attente des textes
d'application nécessaires à leur mise en oeuvre.
Il s'agit d'abord des dispositions de la loi du 5 juillet 1996 relatives à la
qualification artisanale ; aucun des décrets prévus n'a été pris, ce qui ne
peut qu'être préjudiciable à un secteur où le respect de l'identité des métiers
est facteur de développement et de qualité. Ensuite, l'application de la
réforme de la formation continue des artisans a pris du retard, entraînant
ainsi des dysfonctionnements dans la prise en charge des actions de cette
formation.
Je souhaiterais par ailleurs que soient rapidement clarifiées lers conditions
de la compensation financière du basculement pour les commerçants et artisans
des cotisations maladie sur la contribution sociale généralisée, la CSG. Les
professionnels du secteur attendent des réponses précises du Gouvernement sur
ce point.
S'agissant de l'application aux PME de la réduction du temps de travail à
trente-cinq heures, le Gouvernement a récemment décidé qu'elle n'aurait lieu
pour les entreprises de moins de vingt salariés qu'en 2002. Mais cette décision
ne résout pas le problème de fond : les conséquences économiques pour les PME
de la réduction du temps de travail sans diminution de salaire.
Enfin, il me paraît urgent que la réflexion engagée au niveau européen en vue
d'alléger le taux de TVA sur les activités à fort coefficient de main-d'oeuvre
se transforme en action. Le secteur du bâtiment est très demandeur de cette
réforme pour lutter efficacement contre le travail au noir, ainsi que celui de
la restauration traditionnelle, injustement concurrencée par la restauration
rapide.
Sous réserve de ces quelques remarques, la commission des finances vous
propose, mes chers collègues, d'adopter les crédits du commerce et de
l'artisanat.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Jacques Robert,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, étant
donné le peu de temps dont je dispose pour m'exprimer, je m'associe à
l'excellente analyse des crédits budgétaires réalisée par notre collègue M.
Ballayer, rapporteur au fond.
Au nom de la commission des affaires économiques, je ferai quelques
remarques.
La première concerne la simplification administrative et l'excès de «
paperasserie » et de tracasseries.
Madame le secrétaire d'Etat, vous avez fait une communication sur ce sujet
voilà quelques jours. Après en avoir brièvement parcouru le texte, j'ai noté
que, pour les petites entreprises, vous envisagiez la globalisation des charges
sociales. Mais pourquoi imposer un prélèvement automatique pour le règlement ?
J'y vois un manque de confiance dans l'entreprise, voire une atteinte à la
liberté du chef d'entreprise, et vous donnez l'impression d'offrir d'une main
et de reprendre de l'autre.
Par ailleurs, vous évoquez les autres entreprises, mais de quelle taille ? Je
suis persuadé que nous le saurons bientôt !
Vous prévoyez en outre que l'écart entre la rémunération brute et le salaire
effectivement perçu fera l'objet d'un relevé annuel, afin de faire apparaître
les charges. Je trouve cette solution excellente et j'estime qu'elle mérite
d'être étoffée. Il n'en reste pas moins que les différentes féodalités que nous
connaissons parmi ceux qui appellent les cotisations sociales continueront à ne
pas retenir une base unique pour le calcul de la cotisation.
(Mme le secrétaire d'Etat opine.)
Tant que vous n'aurez pas abouti,
madame le secrétaire d'Etat, vos bonnes intentions resteront vaines.
S'agissant du cachet de la poste, cela fait cinq ou six ans que nous attendons
la mesure que vous préconisez ; mais pourquoi repousser son application au
milieu de l'année prochaine ? En effet, rien ne s'oppose à ce que, dès le 1er
janvier, vous nous donniez la grande joie de la mettre en oeuvre.
Deuxième remarque : que devient l'établissement public d'aménagement et de
restructuration des espaces commerciaux et artisanaux, créé par la loi de 1996
- j'ai l'honneur d'être membre de son conseil d'administration - qui ne s'est
jamais réuni ?
Troisième remarque : la commission des affaires économiques regrette que les
emplois-jeunes, qui mobiliseront 9 milliards de francs en 1998, ne débouchent
pas à terme sur des emplois réels et durables. Mais je ne polémiquerai pas à ce
sujet.
En revanche, ne pensez-vous pas qu'il aurait mieux valu étendre cette mesure
aux entreprises relevant des chambres de métiers et à celles, par exemple, qui
emploient moins de dix personnes ? Elles auraient créé des emplois qui, au
terme des cinq ans, auraient perduré et auraient répondu aux besoins des
artisans et des petites entreprises qui hésitent, à cause du montant des
charges globales, à embaucher. En même temps, vous auriez lutté contre ce que
mon collègue M. Ballayer appelait le « travail au noir ».
Quatrième remarque : nous sommes toujours préoccupés par les difficultés
rencontrées par les PME s'agissant des marchés publics. En effet, les grandes
entreprises écrasent les prix et compensent la faiblesse de leurs marges par
une insupportable pression exercée sur les PME sous-traitantes. Nous comptons
sur vous, madame le secrétaire d'Etat, pour mettre fin à ces comportements de
négriers.
Cinquième remarque : je rappelle que, suite aux dispositions législatives
adoptées en 1996, le gouvernement précédent s'était engagé à aider les petites
stations-service au moyen d'un fonds alimenté par un élargissement de
l'assiette de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat. Or ce fonds, qui
devait percevoir 60 millions de francs à ce titre, n'a toujours pas été doté.
Depuis l'adoption de ce texte, 1000 stations-service ont encore disparu.
Sixième remarque : la suppression des ventes hors taxes dans les boutiques
duty free
est programmée pour le 1er juillet 1999. Les conséquences de
cette décision porteront sur les produits, mais aussi sur quelques milliers
d'emplois.
Septième remarque : nous regrettons que l'Assemblée nationale ait adopté un
amendement au projet de loi de finances tendant à créer une taxe de 1 % sur les
publicités hors médias au profit de la presse nationale et régionale. Le Sénat
a réduit l'assiette de cette taxe et prévu qu'elle ne viserait pas les
publicités adressées par la poste. C'est un pas en avant, qui devrait vous
inciter à aller plus loin, car les entreprises subiront de plein fouet cette
taxe, qui équivaut en fait à une hausse de 1 % de la TVA.
Accepteriez-vous, si cette disposition ne pouvait être revue avant la fin de
l'examen du projet de loi de finances, d'en reporter l'application d'un an afin
de permettre que s'instaure un débat ? En effet, l'équivalent de 1 point de
TVA, c'est quand même important à l'heure où chacun affirme qu'il faut réduire
les charges.
Enfin, je souhaiterais que les opérations financées par le fonds
d'intervention pour la sauvegarde, la transmission et la restructuration des
activités commerciales et artisanales, le FISAC, en particulier les opérations
de restructuration du commerce et de l'artisanat, qui donnent satisfaction,
soient déconcentrées, avec un pourcentage supplémentaire.
Ma liste de demandes, qui est aussi celle de la commission des affaires
économiques, n'est pas nouvelle. C'est un vrai monstre du Loch Ness, qui refait
régulièrement surface depuis des années.
M. le président.
Monsieur le rapporteur pour avis, vous avez déjà nettement dépassé votre temps
de parole.
M. Jean-Jacques Robert,
rapporteur pour avis.
J'en termine. Je disposais de cinq minutes, cela
fait une minute et demie pour le commerce, pour l'artisanat et pour les PME
!
M. le président.
Ce n'est pas ma faute, monsieur le rapporteur pour avis, plaignez-vous auprès
de votre groupe.
M. Jean-Jacques Robert,
rapporteur pour avis.
En conclusion, nous nous en remettons à la sagesse
du Sénat.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
- groupe du Rassemblement pour la République, 40 minutes ;
- groupe socialiste, 19 minutes ;
- groupe de l'Union centriste, 18 minutes ;
- groupe des Républicains et Indépendants, 11 minutes ;
- groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les
PME-PMI, le commerce et l'artisanat représentent un secteur fondamental de
notre économie, et d'abord, bien entendu, en termes d'emplois, puisque, en
1997, l'artisanat comptait 795 000 entreprises et 2,3 millions d'actifs, le
commerce employant pour sa part 2,5 millions de salariés et 460 000
non-salariés.
Les PME, quant à elles, comptaient, en 1995, 12,2 millions de salariés pour
les établissements de moins de 500 salariés, et 3,5 millions pour ceux de moins
de dix salariés.
A ce propos, j'aimerais évoquer leurs conditions de travail. Celles-ci sont
souvent particulièrement difficiles et semblent même, pour quelques secteurs
d'activité, dater d'un autre temps. Il est important que tous les salariés,
quelle que soit la nature de l'entreprise qui les emploie, ne soient pas, dans
les faits, privés de la protection du droit du travail. Le problème est le même
en ce qui concerne les salaires, qui méritent, de façon générale, une
revalorisation, et souvent tout particulièrement dans ce secteur des petites et
moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat.
S'agissant du projet gouvernemental d'instaurer les trente-cinq heures
hebdomadaires de travail, je ne pense pas, comme mes collègues siégeant sur les
travées de droite, que cette mesure mettra « à genoux » les petites et moyennes
entreprises. Elle sera rendue viable grâce aux deux ans de délai prévus pour sa
mise en oeuvre et aux aides financières envisagées, lesquelles seront
éventuellement accompagnées de dispositions plus structurelles.
Les pouvoirs publics, comme les entreprises, devront faire preuve de
créativité et de réalisme. En tout état de cause, les trente-cinq heures
peuvent être une chance pour l'économie de notre pays, mais également pour tous
les salariés. Des mesures telles que des repos compensateurs et le roulement
d'équipes pourraient être envisagées.
L'activité des PME, du commerce et de l'artisanat est fortement liée à la
consommation des ménages. C'est pourquoi il nous paraît urgent, comme nous
l'avons répété à plusieurs reprises, de relancer l'économie par des dispositifs
favorisant la consommation et le pouvoir d'achat. Nous avons fait, à ce titre,
plusieurs propositions. La décision de créer des emplois-jeunes s'inscrit dans
cette perspective de « déprécarisation » des familles. C'est pourquoi nous
l'avons soutenue.
L'abaissement de la TVA pourrait lui aussi participer de la même logique.
Par ailleurs, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen ont
formulé des propositions s'inspirant des engagements énoncés dans la
déclaration commune des formations de la majorité.
Il s'agit, par exemple, de réformer le crédit, de conforter le secteur public
bancaire et financier, de relever le plafond des comptes pour le développement
industriels, les CODEVI, et d'engager une réforme structurelle de la fiscalité
visant à moduler les impôts supportés par les entreprises et les cotisations
sociales en fonction des créations d'emplois, de la durée du temps de travail,
de l'effort de formation et des salaires.
Nous pensons également qu'il faut agir pour inciter les grands groupes
industriels à coopérer avec les PME et à s'engager avec elles dans des
coproductions assorties de contrats à long terme.
S'agissant de la Banque de développement des PME, la BDPME, nous aurions
préféré que les petites et moyennes entreprises dont l'activité concerne un
domaine plus traditionnel bénéficient des mêmes conditions de financement que
celles qui sont consenties aux PME innovantes. De plus, madame le secrétaire
d'Etat, pourriez-vous nous indiquer quel rôle incitatif compte faire jouer le
Gouvernement à cet organisme ?
Je suis également préoccupée non seulement par les difficultés que rencontrent
les PME pour accéder aux marchés publics, mais aussi par les délais de paiement
qui leur sont imposés lorsqu'elles y parviennent.
Au-delà de la trente-cinquième mesure de simplification que vous avez annoncée
mercredi, envisagez-vous, madame le secrétaire d'Etat, d'autres pistes de
réflexion ? Pourriez-vous les porter à notre connaissance ?
Je souhaite, pour conclure, évoquer un cas particulièrement scandaleux, celui
des magasins proposant des biens de consommation en location avec option
d'achat. Une nouvelle surface de vente de ce type a ouvert ses portes la
semaine dernière au Havre sous une enseigne anglaise bien connue.
Je sais, madame le secrétaire d'Etat, que vous partagez mon souci de parvenir
à un règlement équilibré de ce problème. Nous savons que les systèmes de
location avec option d'achat sont tout à fait légaux. Pourtant, il est injuste,
et même immoral, d'appliquer aux plus pauvres de nos concitoyens des taux de
crédit exorbitants et, par conséquent, de les amener à payer des articles
d'usage quotidien jusqu'à deux fois leur prix.
M. René Régnault.
Oui, c'est scandaleux !
Mme Odette Terrade.
Enfin, madame le secrétaire d'Etat, nous approuvons les trente-sept mesures de
simplification administrative que vous venez d'annoncer en conseil des
ministres. Elles répondent à une réelle attente. Cette volonté de simplifier
les formalités administratives des PME devra perdurer et se renforcer.
Au regard des dispositions adoptées et des engagements pris, le groupe
communiste républicain et citoyen votera ces crédits, dans le même esprit que
celui qui a inspiré nos collègues de l'Assemblée nationale, c'est-à-dire qu'il
s'agit d'un encouragement à confirmer le changement de stratégie qui
s'amorce.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Jourdain.
M. André Jourdain.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous
sommes ici tous d'accord sur l'importance économique du secteur de l'artisanat,
du commerce et des PME, et nous connaissons tous les attentes des entreprises
de ce secteur : moins de subventions, mais davantage d'allégements de charges
et de simplification administrative.
Le gouvernement précédent avait reconnu le rôle essentiel joué par ces
entreprises. Ainsi, il avait pris d'importantes mesures en leur faveur, telles
que la baisse des charges, la réduction de l'impôt sur les sociétés ou encore
la création du statut social et fiscal des travailleurs indépendants.
Or votre projet de budget, madame le sécrétaire d'Etat, remet en cause
certaines de ces avancées.
Premièrement, l'article 65 du projet de loi de finances limite, d'une part, la
réduction progressive des cotisations sociales aux salaires inférieurs à 1,30
fois le SMIC, au lieu de 1,33 fois le SMIC, et rétablit, d'autre part, le
principe de la proratisation. Non seulement cette mesure remet en cause la
nécessaire politique de baisse du coût du travail peu qualifié, mais, en outre,
elle porte atteinte au développement du temps partiel, très répandu dans les
petites entreprises.
Deuxièmement, vous décidez de supprimer la provision pour licenciement ou pour
fluctuation des cours.
Troisièmement, vous supprimez l'exonération de 30 % sur les cotisations
sociales des créateurs d'entreprises, instituée en 1994 par la loi « Madelin
».
Enfin, la loi de financement de la sécurité sociale relève délibérément le
taux de cotisation de la CSG, sans compensation pour les travailleurs
indépendants, contrairement à ce qui est prévu pour les travailleurs salariés.
Il s'agit là, me semble-t-il, d'une véritable discrimination sociale.
S'agissant du passage aux trente-cinq heures, si nous savons enfin qu'il
entrera en vigueur pour les entreprises de moins de vingt salariés à compter de
2002, nous connaissons également les effets pervers qu'il ne manquera pas de
provoquer.
Ainsi, une distorsion de concurrence sera inévitablement créée entre les
entreprises de dix-neuf salariés et celles de vingt et un salariés.
D'une manière plus générale, la limitation du temps de travail hebdomadaire à
trente-cinq heures, rendue obligatoire pour tous après 2002, aura des
conséquences très néfastes pour les petites entreprises.
En effet, nombre d'entre elles ne pourront réaliser les gains de productivité
nécessaires pour compenser le surcoût induit par la baisse du temps de
travail.
J'aimerais maintenant aborder le problème de l'accès à la profession dans
l'artisanat afin d'obtenir de votre part, madame le secrétaire d'Etat, une
réponse précise concernant les décrets d'application de la loi du 5 juillet
1996.
Ces décrets n'ont toujours pas été publiés. Or, depuis la publication de la
loi, un certain nombre d'artisans non qualifiés se sont installés ; ils sont
donc dans une situation de vide juridique quant à leur statut. Ces
entrepreneurs seront-ils présumés qualifiés et donc « régularisés » avant la
parution du décret ? Si ce n'est pas le cas, le décret prévoira-t-il des
mesures spécifiques les concernant afin qu'ils puissent répondre aux critères
de qualification retenus ?
De nombreux artisans attendent votre décision, et je vous remercie par avance
de bien vouloir leur répondre sur ce point. La législation doit en effet
exister pour clarifier les situations et non pour les rendre incertaines et
encore plus complexes.
Dans ce domaine, l'attente des PME est très claire : moins de dirigisme et
d'interventionnisme étatique, plus de souplesse administrative et fiscale. Si
certaines de leurs revendications sont prises en compte dans les mesures de
simplification que vous venez d'annoncer, d'autres points restent en suspens.
En effet, simplifier l'environnement des PME, c'est, par exemple, faciliter la
transmission des entreprises artisanales en améliorant les dispositions
fiscales et en facilitant l'accès à la qualification.
Pourquoi ne pas permettre aux chambres de métiers d'accéder aux emplois-jeunes
? Les jeunes qui le désirent pourraient ainsi se former à la reprise
d'entreprise et être assurés d'obtenir à la fois une qualification et un emploi
dans le secteur marchand.
Les emplois-jeunes pourraient ainsi être substitués aux CIFA, les contrats
d'installation-formation dans l'artisanat, qui ne sont plus financés depuis
quelques années.
On pourrait d'ailleurs mettre en place un système identique pour former des
jeunes à la création d'entreprise. Les jeunes trouveraient de cette façon des
débouchés certains et pérennisés.
Simplifier l'environnement des PME, c'est également simplifier les procédures
d'appels d'offres pour leur permettre d'accéder plus facilement aux marchés
publics. Un projet de loi, très attendu, avait été déposé par le gouvernement
précédent ; nous aimerions connaître vos intentions, ainsi que celles du
ministère de l'économie et des finances, sur ce sujet.
Notre collègue M. Francis Grignon a publié un excellent rapport sur l'accès
préférentiel des PME américaines aux marchés publics. Si les Etats-Unis ne sont
pas la France, il est possible, néanmoins, de s'inspirer de l'expérience
américaine en la matière et de créer un cadre juridique qui permette aux
petites entreprises d'accéder plus facilement à la commande publique.
Enfin, les PME attendent des réponses précises concernant leur financement et
leurs fonds propres. Les incitations fiscales pour les particuliers sont
insuffisantes compte tenu du risque élevé que présente ce type de placement. Il
faudrait par conséquent créer des fonds d'investissements spécialisés qui
géreraient eux-mêmes l'épargne des particuliers. Par ailleurs, ce système
permettrait de mutualiser le risque, et donc de le réduire.
D'une manière générale, tout ce qui peut contribuer à l'incitation des
investisseurs doit être entrepris, notamment le développement de garanties
publiques pour les organismes qui interviennent en fonds propres dans les
PME.
Je voudrais enfin évoquer les difficultés que rencontrent les petites
entreprises pour accéder aux compétences très pointues de certains cadres. Le
travail à temps partagé, ou multisalariat, constitue à mes yeux une réponse
pour les PME qui n'ont pas les moyens d'embaucher des cadres à temps plein.
Seul le partage d'un salarié permettrait à ces petites entreprises de
bénéficier des compétences qui leur font défaut et d'accroître ainsi leur
compétitivité.
Or, il existe actuellement trop de freins pour que le multisalariat puisse se
développer. J'aimerais donc connaître vos projets dans ce domaine, madame le
secrétaire d'Etat.
Ce budget contient quelques initiatives positives. Cependant, si, d'un côté,
vous annoncez des simplifications, de l'autre, vous revenez à la proratisation
du temps partiel, proratisation qui avait été abandonnée, surtout par souci de
simplification. Vous retournez donc vers la complexité.
De plus, ce budget est inclus dans une politique générale qui contient des
mesures néfastes - par exemple les trente-cinq heures - pour l'avenir de nos
petites entreprises. Par conséquent, monsieur le président, madame le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je ne le voterai pas.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Malécot.
M. Kléber Malécot.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il
n'est pas nécessaire, je le crois, d'insister sur l'importance du secteur des
métiers, en termes d'activité économique, d'emplois et d'aménagement du
territoire.
Quelques chiffres suffisent pour illustrer cette importance : l'artisanat
représentait 10 % environ de la population active française en 1945, il en
constitue désormais 13 %, alors même que, parallèlement, la population agricole
passait de 33 % à 5 %. Les artisans jouent incontestablement un rôle essentiel
dans l'animation du monde rural, où se trouvent 30 % de leurs entreprises.
Depuis 1987, ce sont au moins 500 000 emplois qui ont été créés dans des
entreprises artisanales, les sociétés de plus de 500 salariés en perdant 530
000.
A côté d'un artisanat traditionnel exercé le plus souvent par une personne
physique, apparaît un nombre croissant d'entreprises employant plusieurs
salariés et s'insérant dans un marché évolutif où une adaptation continue aux
progrès de la technique s'impose. Ce sont ces nouvelles entreprises qui
contribuent notamment aux 37 milliards de francs d'exportations annuelles
assurées par le secteur.
Paradoxalement, malgré son dynamisme et la valeur inestimable du savoir-faire
qu'il recèle, l'artisanat, en France, souffre de nombreux handicaps
structurels.
Il souffre tout d'abord de l'insuffisance notable du nombre des apprentis, qui
a chuté de 34 % entre 1967 et 1995.
Par ailleurs, malgré les efforts entrepris ces dernières années par les
pouvoirs publics, y compris par l'éducation nationale, l'image de l'artisanat
reste souvent assez péjorative. La préférence des parents pour les filières
dites nobles et leurs préjugés négatifs, partagés par beaucoup d'enseignants, à
l'égard de tout métier manuel ont fini par provoquer une dramatique raréfaction
des apprentis dans beaucoup de métiers. Qui, parmi nous, n'a pas entendu dans
son département, en particulier dans les communes rurales, tel ou tel artisan
se plaindre de cette situation, alors même que le chômage des jeunes reste trop
important et que commencent à être mis en place, à grands frais, les
emplois-jeunes ?
L'artisanat souffre d'un deuxième handicap : les charges sociales et fiscales.
Je n'insisterai pas sur ce point, qui a été largement développé par les
orateurs qui m'ont précédé. Néanmoins, nos interlocuteurs nous posent
fréquemment une question, en particulier ceux du secteur du bâtiment et travaux
publics : comment faire pour réduire la taxe professionnelle, alors que le
nombre de faillites se multiplie ?
A ce sujet, la plupart de nos collègues et moi-même espérons que la réflexion
engagée, notamment par le Sénat, ces dernières années sera mise à profit par le
Gouvernement afin que cet impôt anti-économique soit totalement remanié, quant
à son assiette et à ses taux, qui sont, aujourd'hui encore, trop différents
selon les collectivités locales.
Mais le souci plus général des artisans est que leur situation économique et
sociale puisse être rapprochée de celle de leurs concitoyens. Relativement peu
assistée, cette profession réclame une certaine égalité de traitement.
Il en est ainsi, par exemple, pour le calcul de l'assiette de la CSG, qui est
actuellement très défavorable aux artisans par rapport aux salariés. Nombre
d'artisans subiront probablement une perte de revenus l'année prochaine du fait
de l'augmentation de 4,1 % de la CSG.
Il en va de même pour l'accès aux marchés publics.
J'aimerais insister sur ce point car il concerne directement de nombreuses
entreprises artisanales dans nos régions respectives, essentiellement dans le
secteur du bâtiment et des travaux publics.
L'accès limité de ces entreprises aux marchés publics - cela a été rappelé -
s'explique surtout par le développement des marchés négociés et la pratique
d'offres anormalement basses par les entreprises les plus importantes.
Contraintes, le plus souvent, à se contenter de la position de sous-traitance,
les plus petites entreprises sont obligées de réduire leur marge au maximum, ce
qui contrarie évidemment leurs objectifs en matière d'investissement et de
formation.
Après le rapport Trassy-Paillogues, un projet de loi portant réforme du code
des marchés publics a été déposé en mars 1996 à l'Assemblée nationale. Ce texte
consacre la prééminence de « l'offre la mieux-disante » par rapport à « l'offre
anormalement basse ». L'une de ses principales dispositions consiste à scinder
les marchés importants en lots distincts et techniquement homogènes. Ainsi les
PME pourraient-elles soumissionner dans le cadre d'appels d'offres selon des
volumes adaptés à leurs capacités de production.
Madame le secrétaire d'Etat, que va-t-il advenir de cet important projet de
réforme ?
Si nous voulons que subsistent encore en France des entreprises artisanales et
des PME suffisamment compétitives, sans doute faudra-t-il, comme dans d'autres
pays, leur réserver une part significative des marchés publics, c'est-à-dire au
moins 20 %.
Ce matin, dans mon département, j'ai appris les difficultés que rencontrent
les PMI pour obtenir les crédits qui leur sont nécessaires pour investir dans
des matériels dont elles ont besoin. Il apparaît donc urgent d'obtenir des
établissements bancaires une plus grande ouverture à l'égard des
entreprises.
En conclusion, je dirai que les artisans ont besoin avant tout de
reconnaissance au sein d'une société en voie de profonde transformation dans le
cadre d'une économie ouverte.
Je sais que je prêche une convaincue, mais je tenais à vous rappeler ces
quelques faits ainsi que des propositions auxquelles tiennent tout
particulièrement les organisations socioprofessionnelles représentatives de
l'artisanat.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR
et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à Mme Heinis.
Mme Anne Heinis.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
n'entrerai pas dans le détail de ce budget. Les différents rapporteurs l'ont
fait avant moi et je partage leur analyse et leurs voeux.
En plein accord avec mon collègue M. Serge Mathieu, je voudrais, madame le
secrétaire d'Etat, attirer votre attention sur l'importance, dans notre pays,
du rôle des PME et des PMI, en particulier des plus petites, que ce soit dans
les secteurs de l'industrie, du commerce ou de l'artisanat.
Il faut se rappeler que, dans leur ensemble, ce sont elles qui créent un
emploi sur deux. C'est énorme !
Avec l'agriculture, elles jouent de plus un rôle structurant dans le monde
rural - où l'on ne trouve guère de grandes entreprises - par leur contribution
à l'économie, la transmission du savoir-faire, la formation ; elles favorisent
la cohésion sociale des petites communes, qui sont très attachées à ces petites
entreprises qui les font vivre.
Les entreprises de moins de dix salariés, - comme cela a été dit précédemment
- emploient plus de 2 millions de personnes. Si chacune d'elles embauchait un
employé, le nombre des chômeurs serait réduit d'un tiers, et cependant 50 % des
commerces n'ont pas de salarié, leur très petite taille en étant souvent la
cause.
Ces entreprises sont très dynamiques et leurs efforts seraient décuplés si on
allégeait leurs charges et si on simplifiait les formalités administratives
dans lesquelles elles sont engluées.
Elles représentent donc un gisement d'emplois très important.
Plus de liberté, moins de charges, moins de papiers, sont les trois conditions
du développement de l'initiative, de la responsabilité et du dynamisme, ce qui
n'a rien à voir avec un ultralibéralisme débridé.
Ce qu'il faut aux entreprises, c'est, je le répète, qu'elles soient plus
libres d'entreprendre, moins accablées de charges - comme en témoignent les
résultats de l'expérience menée dans l'industrie textile - et qu'elles
retrouvent l'espérance qui conditionne le dynamisme.
Trop de rigidités tuent l'initiative, contribuent à la précarité de l'emploi
et nuisent, en définitive, aux salariés.
Je ne citerai qu'un seul exemple, madame le secrétaire d'Etat, pour lequel
j'ai dû intervenir récemment.
Le mari d'une femme que je connais se suicide, sans que rien puisse le laisser
prévoir, laissant son épouse sans ressources avec trois jeunes enfants. Pour
survivre, elle s'installe comme « couturière d'ameublement » ; c'est sa seule
spécialité !
Elle fait toutes les démarches, mais on lui refuse l'allégement des charges
pour la première année, sous prétexte qu'elle ne peut pas fournir un « projet
d'établissement » en règle et un budget prévisionnel. On croit rêver !
L'affaire sera malgré tout réglée. Mais combien ont échoué et sont restées
dans l'ombre ? Est-il normal de faire intervenir un sénateur ou un député pour
régler ce type de questions ? N'est-ce pas pousser les gens à travailler au
noir ou à s'inscrire au RMI ?
Nous avons de nombreux fonctionnaires intelligents et de bonne volonté pour
régler ces problèmes. C'est sur eux qu'il faut s'appuyer, c'est d'ailleurs avec
eux qu'on parvient à régler les problèmes.
Encore faut-il leur fixer des objectifs clairs, bien définir leur mission et
ne pas laisser l'interprétation des textes à la fantaisie ou à l'esprit
tatillon de certains.
Tous les leviers doivent être utilisés : fiscaux, financiers, sociaux. Pour
les PME et les PMI plus importantes, il faut également que les interventions
des services de l'Etat soient plus concertées et qu'elles laissent une large
place aux accords d'entreprises.
En adaptant la législation et le règlement aux nouvelles données du secteur
commercial et artisanal, le précédent gouvernement avait créé un environnement
favorable sur des bases simples : stabilité juridique et sociale, simplicité
administrative, aides de l'Etat plus efficaces et moins inquisitoriales.
Ainsi, la réduction des droits applicables aux donations-partages, la
rénovation des règles de facturation ou la sanction des prix abusivement bas
avaient pour objet de répondre aux besoins des professionnels.
Le rôle économique et social déterminant des PME ne vous a pas échappé, madame
le secrétaire d'Etat.
Le budget que nous examinons aujourd'hui connaît une diminution atténuée - les
rapporteurs l'ont dit - et il est complété par la volonté de votre gouvernement
de poursuivre la démarche de simplification amorcée depuis 1995.
Parmi les mesures annoncées mercredi dernier, en faveur du petit commerce, je
retiendrai : la suppression pour les très petits employeurs de tout calcul pour
la paie et les cotisations sociales - c'est très important -, la simplification
accrue de la gestion des emplois occasionnels - tout aussi importante - et
l'attribution d'une date unique de paiement pour les impôts et les cotisations
sociales.
Demain, je l'espère, la revalorisation du FISAC devrait permettre la
revitalisation des centres-villes et la défense du multiservice rural.
Les décrets d'application de la loi sur la qualification artisanale sont
encore en attente de publication. Quelles sont, madame le secrétaire d'Etat,
vos intentions sur ce sujet ?
En revanche, face à ces éléments favorables, des nuages noirs s'ammoncellent à
l'horizon.
En effet, les travailleurs indépendants vont subir de plein fouet la forte
augmentation de la CSG prévue par le projet de loi de financement de la
sécurité sociale.
Aucune compensation n'étant envisagée pour les non-salariés gagnant plus de
165 000 francs par an, c'est-à-dire 14 000 francs par mois, leur capacité à
embaucher et à investir sera fortement réduite, alors que nous avons besoin de
tout ce qui peut favoriser la création d'emplois. En effet, il faut un minimum
de revenu pour embaucher, même à temps partiel.
La suppression de l'exonération de charges sociales en faveur de ceux qui
créent ou qui reprennent des entreprises - c'est également important - ne
manquera pas d'avoir des conséquences négatives sur l'emploi.
S'agissant des entreprises, le passage obligatoire aux trente-cinq heures
crée, vous le savez, une grande inquiétude, en particulier dans les petites
unités, où les emplois sont loin d'être toujours interchangeables et sont peu «
divisibles ».
Comment peut-on parler d'équipes qui se relaient quand l'entreprise compte
quatre ou cinq salariés plus le patron ? Je l'ai dit, ce sont deux millions de
salariés qui sont concernés dans les entreprises de moins de dix salariés.
C'est donc un vaste problème.
De plus, le financement des trente-cinq heures a entraîné la baisse des
allégements de charges sur les bas salaires, ce qui met 2,5 milliards de francs
de plus à la charge des entreprises.
Dans un communiqué publié lundi dernier, les organisations représentatives des
PME, très préoccupées par la réduction prochaine de la durée légale du travail,
ont demandé que le coût du travail soit intégralement compensé par les aides de
l'Etat. Elles ont demandé également le respect des accords conclus par les
partenaires sociaux, ainsi que le renoncement à toute augmentation systématique
du SMIC.
En outre, je crains que le renforcement du contrôle administratif des
licenciements, que vous envisagez, ne suscite une forte opposition parmi les
dirigeants des PME et n'encourage pas des relations de confiance pourtant
nécessaires.
Ce qui m'inquiéte, ce ne sont pas les contrôles - il en faut ! - ce sont les
risques d'excès.
Où sont les « conditions propices » au développement des entreprises évoquées
par le Premier ministre lors des assises du commerce, le mois dernier ?
Libérer les énergies productives, c'est aider en priorité les PME à
reconstituer des fonds propres pour réamorcer l'investissement.
En tant que libérale, je vous soumets une véritable mesure dans ce sens : la
détaxation des investissements en fonds propres dans les entreprises petites et
moyennes, artisanales ou commerciales, réalisés par leurs exploitants.
A l'heure où de nouveaux cycles de financement se mettent en place au profit
des petites et moyennes entreprises françaises innovantes, il faut amplifier le
mouvement. Pour favoriser le développement de l'emploi, les mécanismes
d'incitation fiscale doivent se généraliser.
Je sais, madame le secrétaire d'Etat, que vous êtes sensible aux problèmes des
PME-PMI. J'ai d'ailleurs apprécié votre prestation devant la commission des
affaires économiques et du Plan du Sénat.
Je me permets cependant d'attirer votre attention, de la façon la plus
pressante, sur les différents points que je viens d'évoquer, et je souhaite que
vous les fassiez valoir au sein du Gouvernement.
Ne privons pas les PME françaises de la chance de créer des richesses et de
faire reculer le chômage. Aujourd'hui, ce risque existe, ne nous le dissimulons
pas !
Espérant être entendue, je vous remercie des réponses que vous voudrez bien
m'apporter.
Le groupe des Républicains et Indépendants suivra les recommandations de la
commission des finances du Sénat sur ce projet de budget.
(Applaudissements
sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, de l'Union centriste,
ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Dussaut.
M. Bernard Dussaut.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ainsi
que l'a rappelé M. le Premier ministre lors des 8e assises nationales du
commerce voilà un mois, notre économie est porteuse d'un fort potentiel de
croissance, qui est estimé à 3 % pour 1998. La consommation des ménages est en
hausse : elle a progressé de 2,2 % au mois d'octobre dernier, et les
investissements des entreprises devraient, selon toutes les prévisions,
repartir.
Lors de la présentation du projet de loi de finances pour 1998, le ministre de
l'économie et des finances a insisté sur la faible progression des dépenses
publiques, représentant 1,36 %, ce qui est inférieur à l'inflation.
Mais il est vrai que des choix ont dû être faits.
Votre projet de budget, madame la secrétaire d'Etat, est en baisse,
contribuant aux efforts d'économie. En effet, les crédits qui y sont inscrits
sont inférieurs de 2,8 % à ceux qui furent votés dans le cadre de la loi de
finances initiale pour 1997. Cependant, ils sont en hausse de 4,7 % par rapport
aux crédits qui ont été réellement disponibles en 1997.
Je ne peux en outre m'empêcher de rappeler que cette diminution des crédits
est peu importante au regard des diminutions antérieures, avec une baisse de
11,8 % en 1996 par rapport à 1995 et une baisse de 15,6 % en 1997 par rapport à
1996.
Cela étant dit, avec 425 millions de francs, c'est un petit budget, qui ne
regroupe que 13 % des aides budgétaires du ministère de l'économie, des
finances et de l'industrie réservées aux petites et moyennes entreprises.
Je citerai maintenant quelques chiffres.
Le secteur du commerce comprend près de 3 millions d'actifs et a généré en
1996 un chiffre d'affaires représentant 60 % du produit intérieur brut, avec 4
800 milliards de francs.
L'artisanat, c'est 800 000 entreprises, 2,3 millions d'actifs, 250 métiers et
un chiffre d'affaires en 1995 de 832 millions de francs.
Quant aux PME, elles occupaient en 1995 12 millions de personnes, dont 3,5
millions dans de très petites entreprises employant moins de dix salariés.
Nous avons l'occasion de le répéter chaque année, les crédits en faveur des
secteurs d'activités qui nous intéressent aujourd'hui proviennent de multiples
sources : le budget, les crédits extrabudgétaires, les moyens engagés par
d'autres ministères, les financements des organismes bancaires, les
financements des chambres consulaires, les participations des collectivités
territoriales.
La politique à mettre en oeuvre doit donc l'être dans le cadre de partenariats
et de cofinancements, et ses objectifs doivent par conséquent être clairement
définis.
C'est, je crois, ce que le Gouvernement de Lionel Jospin s'est attaché à faire
depuis maintenant presque six mois, notamment par votre entremise, madame la
secrétaire d'Etat.
M. René Régnault.
Très bien !
M. Bernard Dussaut.
Le Gouvernement présente un projet de budget qu'il a placé sous le signe de la
« croissance solidaire » et qui permettra d'assurer le passage à la monnaie
unique.
« La croissance solidaire », cela signifie la relance de l'économie et
l'incitation à la création d'activités et d'emplois.
Les petites et moyennes entreprises, le commerce et l'artisanat sont les
premiers concernés et impliqués dans une telle démarche. Cela se traduit,
madame la secrétaire d'Etat, par votre volonté de développer l'emploi et votre
attachement au tissu économique et social.
Dans son discours de politique générale, M. le Premier ministre a insisté sur
le rôle moteur des petites entreprises dans l'économie de notre pays en
soulignant que « la majorité des emplois créés le sera dans les petites
entreprises ».
Cette constatation a également été faite au niveau européen. Le rapport annuel
de l'observatoire européen des PME, qui a été présenté le 25 novembre dernier,
aboutit à la conclusion que les entreprises qui auraient le plus fort potentiel
de croissance d'emploi sont les micro-entreprises, celles qui emploient moins
de dix salariés.
En création d'emplois, le secteur dont vous avez la charge, madame la
secrétaire d'Etat, est le secteur le plus dynamique. Je me permets de saluer
ici la décision qui a été prise d'écarter les entreprises de moins de vingt
salariés des dispositions relatives au passage aux trente-cinq heures avant
2002.
Dans son rapport « Pour un nouvel environnement administratif des petites et
moyennes entreprises », qui a été récemment remis au Gouvernement, M. Dominique
Baert rappelle que les entreprises de moins de dix salariés représentent, au
1er janvier 1997 - hors entreprises agricoles et financières - 93 % du total
des entreprises en France et que ce sont ces entreprises qui ont joué un rôle
moteur dans la création d'emplois au cours de la période récente.
Il souligne que, entre 1985 et 1992, la part des effectifs employés dans les
PME s'est accrue particulièrement dans les entités les plus petites.
Par ailleurs, dans les PME, les créations nettes d'emplois sont
majoritairement imputables aux créations nettes d'entreprises elle-mêmes.
Cela signifie que faciliter l'embauche dans les PME ou faciliter la création
d'entreprises concourent au même objectif.
Le plus grand nombre d'entreprises n'a aucun salarié. On se prend à imaginer
les incidences qu'aurait le recrutement d'un premier salarié dans chacune
d'elles !
Le rapport du Conseil économique et social sur les enjeux et les conditions du
développement de l'artisanat met en évidence un des aspects essentiels d'une
politique de l'emploi dans le secteur des métiers. Il souligne que « les
petites entreprises des métiers ont pour principal capital les hommes qui les
composent », et je pense que nous sommes tous d'accord pour affirmer que c'est
la qualification de ces hommes qui est le premier capital de l'entreprise
artisanale.
Par la force de sa tradition de l'apprentissage, ce secteur a un rôle
essentiel à jouer, notamment dans l'emploi des jeunes. Il nous faut un
apprentissage de qualité, vous avez vous-même parlé, madame la secrétaire
d'Etat, d'un apprentissage comme formation d'excellence, ne véhiculant plus une
image dévalorisée.
Vous avez présenté mercredi dernier en conseil des ministres trente-sept
mesures de simplification administrative pour les petites et moyennes
entreprises employant moins de dix salariés et les très petites entreprises
n'employant aucun salarié. Cette initiative a été saluée par tous, y compris
par le CNPF !
Les dispositions que vous avez annoncées, comme la possibilité de créer une
entreprise en vingt-quatre heures et des mesures apparemment moins
spectaculaires comme la simplification des feuilles de paie pour les
entreprises de moins de dix salariés, auront des répercussions très concrètes
et très immédiates, car nous savons tous que les contraintes administratives
pèsent plus lourdement sur les très petites entreprises, dont la gestion repose
sur le seul chef d'entreprise.
Il nous faut noter par ailleurs que la majorité des entreprises ne dépasse pas
cinq ans d'existence, mais que, parallèlement, 10 000 entreprises viables
disparaissent chaque année faute de repreneur et que 15 % des artisans en
activité ont plus de cinquante-cinq ans. Toutes les statistiques confirment que
le risque d'échec est beaucoup plus faible lors d'une reprise que dans le cas
de création d'entreprise. Il est indispensable que des dispositions incitatives
soient prises pour faciliter la transmission, même lorsqu'il ne s'agit pas
d'une transmission familiale.
En milieu rural, que les entreprises soient transmises et ne disparaissent pas
revêt une importance particulière, et je sais, madame le secrétaire d'Etat, que
la prise en compte de la vitalité des territoires est pour vous un souci
constant.
M. René Régnault.
Très bien !
M. Bernard Dussaut.
Le fonds d'intervention pour la sauvegarde, la transmission et la
restructuration des activités commerciales et artisanales, le FISAC, constitue
le principal instrument extrabudgétaire du ministère. Il complète
avantageusement et heureusement - suis-je tenté de dire - les crédits réservés
à l'animation économique, qui plafonnent à 145 millions de francs, soit une
baisse de 34 % par rapport au budget précédent.
L'enveloppe qui lui est réservée cette année devrait être d'un montant
similaire à celle qui fut allouée l'année dernière, soit 300 millions de
francs.
Comme vous le savez, ce fonds est très important, parce qu'il permet le
maintien d'activités en zone rurale, avec toutes ses implications pour la vie
dans nos petites communes. Le financement des opérations « Mille villages de
France » et des opérations de restructuration de l'artisanat et du commerce,
notamment, en dépend.
Dans ma petite commune de Monségur, qui compte 1 500 habitants, s'est tenu à
la fin du mois de septembre le forum interrégional des commerces multiservices.
Cette initiative, inscrite dans l'opération « Mille villages de France », est
particulièrement intéressante. Elle regroupe des partenaires publics et privés.
Elle a pour objet d'offrir des services ou des produits de première nécessité
et de proposer d'autres types de services publics ou privés - banque, poste,
journaux - pour les petites communes rurales.
On mesure toute l'importance de ces opérations, lorsque l'on prend conscience
que la moitié à peine des 31 250 communes rurales ont conservé un commerce de
proximité.
Par ailleurs, nous savons que le maintien de la population et de l'activité
économique dans les zones rurales repose de plus en plus sur le renforcement et
le développement d'un tissu de PME. Il est donc indispensable de consolider le
tissu des petites entreprises dans des zones rurales soigneusement délimitées.
Tel est l'objectif des opérations de restructuration de l'artisanat et du
commerce, financées par le FISAC et les contrats de plan Etat-région.
Nous souhaiterions savoir, à ce sujet, si la prolongation d'un an des contrats
de plan aura des incidences sur l'avenir des opérations.
A l'Assemblée nationale, lors de l'examen de votre budget, vous avez fait part
de votre souhait de déconcentrer le fonds pour la sauvegarde, la transmission
et la restructuration des activités commerciales et artisanales. Cela me semble
une bonne chose.
Un rapprochement de la prise de décision du terrain par la délégation du
pouvoir à des commissions régionales et aux préfets de région pour la plupart
des opérations territoriales donnerait la cohérence nécessaire à l'analyse de
l'impact des opérations sur l'emploi et l'environnement.
L'attribution d'une deuxième enveloppe de prêts bonifiés a été accueillie très
favorablement par le monde des métiers, qui y a vu « un signe fort de l'Etat à
l'égard des artisans ».
Ne pourraient-ils pas être plus ouverts encore sur le monde des PME
commerciales, qui sont confrontées aux mêmes problèmes de financement que les
petites entreprises artisanales ?
L'aide aux petites et moyennes entreprises passe également très fortement par
une action sur la fiscalité. Dans le projet de loi de finances pour 1998
figurent plusieurs mesures importantes en leur faveur.
L'activité du secteur du bâtiment est ainsi soutenue par la création d'un
crédit d'impôt sur le revenu pour les dépenses d'entretien et de revêtement des
surfaces réalisées dans l'habitation principale dont le contribuable est
propriétaire ou locataire. Outre son caractère incitatif, cette mesure
contribuera à la lutte contre le travail au noir, qui est une des grandes
préoccupations des artisans du bâtiment par le manque à gagner qu'il
implique.
Par ailleurs, et afin d'encourager la réhabilitation du parc locatif à
caractère social et d'en réduire le coût, un taux réduit de TVA sera appliqué
aux travaux d'amélioration et de réhabilitation d'immeubles de logements
sociaux destinés à la location.
Enfin, le crédit d'impôt de 10 000 francs par emploi net créé au cours des
trois prochaines années permettra de soutenir l'emploi dans les PME.
Toutes ces dispositions sont autant de signes forts du Gouvernement.
Cependant, les chefs d'entreprise de petites unités, au premier rang desquels
les artisans, estiment que demeurent indispensables un certain nombre de
réformes, notamment la déduction fiscale pour investissement - reprenant ce qui
a été mis en place pour les exploitants agricoles - et la baisse de la TVA sur
les activités de main-d'oeuvre.
En ce qui concerne ce second point, il s'agit non pas de baisser la TVA sur
les produits, en particulier sur les achats des « bricoleurs du dimanche »,
mais bien d'appliquer sur la main-d'oeuvre un taux réduit différent de celui
qui est appliqué sur les produits.
Une telle mesure aurait des répercussions favorables non seulement dans le
secteur des métiers en général et du bâtiment en particulier, mais également
dans un secteur comme la restauration traditionnelle de qualité, très
utilisatrice de main-d'oeuvre et prête à créer des emplois.
Je sais que nous dépendons pour cela de Bruxelles, mais je sais aussi que des
négociations ont été ouvertes sur ce sujet à la demande du Parlement européen.
Nous comptons sur vous, madame le secrétaire d'Etat, pour faire entendre notre
voix.
S'agissant de la politique européenne menée en faveur des PME et des
entreprises artisanales, notons que les analyses relatives aux moyens à mettre
en oeuvre pour assurer leur développement et leur pérennité qui sont présentées
dans le rapport de l'observatoire des PME européennes, que je citais plus haut,
rejoignent absolument les nôtres. Selon cet institut, « le taux de survie des
entreprises pourrait être amélioré en réduisant les charges administratives, en
améliorant les conditions de transmission et en réduisant les phénomènes de
délais de paiement ».
Avant de conclure, permettez-moi d'évoquer brièvement le passage à la monnaie
unique.
Le mois dernier, un sondage très instructif a été réalisé sur l'attitude des
Français face au passage à l'euro. Nous avons tous pu en prendre connaissance.
Mais il ne me semble pas inutile de souligner que, désormais commerçants,
artisans et industriels sont favorables, pour 59 % d'entre eux, au passage à la
monnaie unique, contre seulement 46 % au mois d'avril 1997, soit treize points
de plus en six mois.
Certes, madame le secrétaire d'Etat, c'est un budget en baisse que vous nous
présentez aujourd'hui, mais il est sous-tendu par une volonté et une cohérence
politique fortes, tournées vers l'emploi et une meilleure gestion du
territoire. C'est pourquoi le groupe socialiste le votera.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
budget des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat que
nous examinons aujourd'hui est très modeste, voire trop modeste.
Avec 424,8 millions de francs, il ne représente que 0,003 % des budgets civils
et 0,026 % du budget général de la nation, s'inscrivant dans une tendance à la
baisse. Quand on sait que ces chiffres concernent un secteur important pour la
création d'emplois, on peut s'interroger.
Je reconnais que les chefs d'entreprise ne sont pas forcément demandeurs de
crédits supplémentaires. Ils souhaitent, au contraire, disposer du maximum
d'espace de liberté pour exercer sereinement leur activité.
Cela se traduit par une attente forte en matière d'allégement de la fiscalité,
de simplification des formalités administratives et d'assouplissement de
certaines dispositions de la législation du travail. Ils veulent donc moins
d'Etat.
Malheureusement, madame la secrétaire d'Etat, votre budget témoigne d'une
politique en demi-teinte : d'un côté, vous semblez avoir entendu l'appel des
entreprises et vous poursuivez la politique tracée par le Gouvernement
précédent ; d'un autre côté, vous prenez des mesures contraires à leurs
intérêt.
Cette contradiction est visible dans deux des principaux axes de votre
politique budgétaire, que j'aborderai successivement : la formation et
l'emploi.
La formation représente 21 % des crédits prévus pour 1998, avec 93,2 millions
de francs, ce qui est tout à fait honorable, compte tenu de l'importance que
revêtent pour les entreprises, notamment pour les artisans, l'apprentissage et
la formation continue.
Grâce aux réformes engagées depuis quatre ans par les gouvernements précédents
en faveur de l'apprentissage, notre pays dispose d'un cadre législatif et
financier cohérent en matière de formation professionnelle en général et
d'apprentissage en particulier.
L'apprentissage connaît un regain d'intérêt chez les jeunes. En effet, les
effectifs d'apprentis, tombés à 205 000 en 1992, sont remontés à 300 000 cette
année.
L'apprentissage doit être valorisé parce qu'il donne aux jeunes une formation
professionnalisée et de vraies compétences, répondant à un besoin réel des
entreprises. Ce n'est, en effet, pas un hasard si 73 % des jeunes formés en
centre de formation d'apprentissage trouvent un emploi six mois après leur
sortie de l'école.
Il convient de poursuivre l'effort accompli pour introduire progressivement un
changement de mentalité chez les Français, qui considèrent encore
l'apprentissage et l'enseignement professionnel comme une filière de seconde
zone.
En Alsace et dans mon département, le Bas-Rhin, l'apprentissage reste
fortement ancré dans les traditions et les habitudes. Sa spécificité mérite
d'être prise en considération.
M. Lucien Neuwirth.
C'est une bonne chose !
M. Joseph Ostermann.
Pourquoi, par exemple, ne pas généraliser l'opération « Bravo les artisans ! »
destinée à faire connaître les métiers de l'artisanat aux élèves de quatrième
et de troisième des collèges ? Mais, pour cela, il vous faudrait convaincre
votre collègue M. Allègre, qui, à en croire une de ses déclarations récentes,
ne semble pas prendre ce chemin.
Quant à la formation continue, notamment celle des chefs d'entreprises, il me
semble fondamental d'en faire une priorité, dans un souci de pérennité des
entreprises.
Selon une récente étude, la France aurait connu, au premier semestre 1997, le
plus grand nombre de défaillances d'entreprises en Europe, soit plus de 300
000, les plus touchées étant les PME de une à quatre personnes.
C'est la raison pour laquelle je souhaite que soit prolongée la réduction
d'impôt pour la formation du chef d'entreprise et de son conjoint
collaborateur.
Le deuxième axe de votre politique, qui constitue certainement votre priorité,
est l'emploi. Là encore, le budget me semble empreint de contradictions.
Vous proposez des mesures intéressantes comme le crédit d'impôt sur le revenu
pour dépenses d'entretien et de revêtement de surface ou le taux réduit de TVA
pour travaux d'amélioration et de réhabilitation d'immeubles de logements
sociaux destinés à la location, mesures qui, outre l'avantage de constituer un
effet de levier pour les entreprises du bâtiment, seront certainement un outil
supplémentaire de lutte contre le travail illégal. La possibilité offerte d'un
crédit d'impôt de 10 000 francs par emploi créé va également dans le bon
sens.
Mais il est regrettable que la contrainte communautaire ne nous permette pas
d'aller plus loin en instituant un taux de TVA réduit à 5,5 % sur les travaux
d'entretien, d'amélioration et de réhabilitation de l'ensemble des logements,
qu'ils soient sociaux ou non.
Je constate que l'administration européenne dans sa grande complexité empêche
un pays membre de redynamiser et de maintenir à flot tel ou tel secteur de son
économie ; je reviendrai sur ce point ultérieurement.
En outre, le crédit d'impôt de 10 000 francs doit être utilisé pour acquitter
la contribution de 10 % de l'impôt sur les sociétés dans la limite de 500 000
francs alors qu'en même temps vous augmentez ce dernier de 15 %.
Enfin et surtout, vous portez une grave atteinte à la politique de réduction
des charges sociales menée jusqu'à présent et tant demandée par les PME et les
artisans.
En effet, vous limitez la baisse progressive de cotisations patronales sur le
travail peu qualifié pour financer la création d'emplois destinés aux jeunes
dans le secteur public.
En fait, vous déshabillez Pierre pour habiller Paul. C'est clair : le
Gouvernement favorise la création d'emplois dans la fonction publique au
détriment du secteur privé, qui est pourtant le seul susceptible d'en créer et
de les pérenniser et qui, non seulement voit ainsi les mesures d'allégement
fiscal dont il bénéficie rognées, mais aussi va devoir supporter une fiscalité
alourdie pour financer des emplois publics sans perspectives.
Il aurait été tellement plus simple, madame la secrétaire d'Etat, comme je
l'ai proposé par amendement, d'exonérer de charges sociales les entreprises
créatrices d'emplois pour les jeunes. Ainsi, à budget équivalent, l'objectif
aurait été atteint si, sur un total de 2,3 millions de PME, une sur cinq
embauchait un jeune. Les charges reposant sur les salaires sont trop
importantes et, souvent, l'inadéquation de la formation augmente sensiblement
le coût du travail.
Par ailleurs, l'arrêt du plan textile risque d'entraîner une hémorragie
massive d'emplois, ainsi qu'une nouvelle vague de délocalisations, s'il n'est
pas compensé par un plan plus large.
Les avantages accordés à travers ce plan textile constituaient une bouée de
sauvetage pour nos entreprises fortement génératrices de main-d'oeuvre.
L'augmentation des charges et la suppression des quotas d'importation, imposés
auparavant à des pays tels que la Chine, obligent une nouvelle fois nos
entreprises à se délocaliser : la Roumanie, la Pologne et d'autres pays les
accueillent avec joie, mais nous, nous perdons des emplois.
Enfin, pour conclure sur cette question des charges sociales, je souhaiterais
connaître les incidences, pour les entreprises, de la réforme de la géographie
prioritaire de la politique de la ville en cours d'étude par la commission
Sueur.
En effet, dans le cadre du pacte de relance pour la ville, Eric Raoult avait
créé les zones franches destinées à inciter entreprises et commerces à demeurer
ou à s'installer dans les quartiers difficiles et ce, par le biais de diverses
incitations fiscales.
Les emplois-jeunes créés par ce pacte étant - sauf erreur de ma part -
supprimés par le présent projet de loi de finances, il me semble important de
ne pas pénaliser les entreprises par une réforme brutale de la géographie
prioritaire. Pourriez-vous nous éclairer sur ce point ?
Outre une politique de réduction des charges sociales, les PME réclament, pour
créer des emplois, une simplification des formalités administratives et
davantage de flexibilité dans le cadre du code du travail.
Concernant les formalités administratives, une enquête en date de juillet 1996
du ministère de l'industrie évaluait à 100 000 francs le coût annuel supporté
par les PMI françaises pour répondre aux divers formulaires que
l'administration leur envoie.
L'annonce de la poursuite de la réforme engagée par le précédent gouvernement
me semble donc positive. J'en prends acte, madame la secrétaire d'Etat.
Toutefois, parmi les trente-sept mesures que vous proposez pour simplifier la
vie des PME, on ne trouve aucune mesure d'extension de la formule du chèque
emploi-service aux très petites entreprises, alors que votre collègue, Mme
Aubry, m'avait assuré que cette disposition était en préparation. Pourriez-vous
nous éclairer sur ce point ?
Pour clore ce chapitre consacré à l'emploi, évoquons le thème de la
flexibilité du code du travail.
Là encore, je crains que vous ne répondiez nullement aux attentes des PME et
que, bien au contraire, vous suscitiez des inquiétudes, inquiétudes à mon sens
amplement justifiées lorsque le Gouvernement annonce une réduction autoritaire
de la durée du travail.
La référence aux trente-cinq heures pour l'artisanat pose sans aucun doute un
problème, surtout en zones rurales et frontalières, d'autant que le
Gouvernement brandit la menace d'un rétablissement de l'autorisation
administrative de licenciement, quand les PME attendent un toilettage d'un code
du travail rédigé dans un contexte de plein emploi et pour de très grandes
entreprises et qui n'est donc plus adapté aux contraintes qui pèsent sur
elles.
L'entreprise artisanale est tentée de ne pas embaucher, plutôt que d'avoir à
faire face aux contraintes administratives trop nombreuses.
En conclusion, permettez-moi encore de souligner le fait que votre politique
budgétaire est constituée d'avancées et de reculs, notamment en matière
d'emploi. C'est pourquoi je qualifierai ce budget de « budget sans ambition
réellement perceptible ».
Il faudrait impérativement que l'effort consenti en faveur de la création
d'entreprises viables soit également plus prononcé. Compte tenu des difficultés
multiples auxquelles ils seront confrontés, on peut craindre que les créateurs
d'entreprise ne soient moins nombreux à se manifester dans les prochaines
années.
Il convient donc d'être attentif aux attentes des entreprises et, plus
particulièrement, aux attentes des plus petites d'entre elles, qui ont des
revendications précises à formuler en matière de simplification des formalités
administratives, de baisse des charges sociales et de flexibilité du travail.
Il vous reste par conséquent beaucoup à accomplir sur ces deux derniers points,
madame la secrétaire d'Etat.
Ce sont les réponses à ces interrogations et aux questions posées par les
rapporteurs et par les différents intervenants qui détermineront ma position
lors du vote de ce budget.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Egu.
M. André Egu.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les
mesures nouvelles proposées dans ce projet de loi de finances apportent
quelques satisfactions aux artisans et commerçants, mais elles ne sont pas
suffisantes. Globalement, ceux-ci regrettent la baisse du budget, en
particulier en ce qui concerne les crédits d'animation et les bonifications
d'intérêts, dont il aurait fallu doubler l'enveloppe.
Les 320 000 entreprises artisanales du bâtiment de notre pays qui emploient
entre une et vingt-cinq personnes et représentent 56 % des emplois de ce
secteur attendent une vraie reprise de leur activité.
La France se trouve parmi les pays européens ayant, en matière de bâtiments et
de travaux publics, la plus faible production par rapport à sa richesse.
Actuellement, l'essentiel de l'activité de ces entreprises artisanales porte
sur les travaux d'entretien, de rénovation et de réhabilitation des logements.
Les particuliers constituent donc une part très importante de leur
clientèle.
La mesure tendant à une baisse de la TVA seulement applicable aux travaux
d'amélioration réalisés dans les logements sociaux ne me semble pas
suffisamment incitative pour assurer la relance de l'activité de ce secteur.
Pourquoi ne pas l'avoir étendue à l'ensemble des travaux d'entretien et
d'amélioration du logement non aidé ? Le crédit d'impôt, plafonné à 4 000
francs pour une personne seule et à 8 000 francs pour un couple, affectant les
dépenses d'entretien est insuffisant, surtout si le taux de la TVA sur ces
travaux n'est pas abaissé.
Le Gouvernement souhaite, comme nous tous ici, la relance de l'activité et des
investissements. Montrons-nous donc plus ambitieux dans ce budget !
Quand nous demandons une baisse de la TVA, ne nous opposez pas, madame le
secrétaire d'Etat, la sixième directive européenne. La plupart des Etats
membres appliquent des taux réduits pour les activités du bâtiment. Nous
pourrions faire de même, pour peu que l'on veuille interpréter et appliquer
cette directive avec la même souplesse que nos partenaires européens.
Une telle baisse aurait, en France, deux effets immédiats : l'augmentation de
la demande de travaux de la part des particuliers, qui attendent des mesures
incitatives, et la diminution du travail clandestin.
Le volume des travaux compenserait largement la réduction du taux de la taxe.
En outre, le surcroît d'activité dans ce secteur entraînerait, de fait, une
création appréciable d'emplois.
Hélas ! le Gouvernement, chacun le sait, privilégie les emplois dans le
secteur public, au détriment du secteur marchand.
Dans la restauration, elle aussi potentiellement créatrice d'emplois, pourquoi
persiste-t-on à nous opposer, là encore, une directive européenne que notre
pays, s'il en avait la ferme volonté, pourrait faire modifier pour être en
mesure de réduire le taux de TVA frappant la restauration, qu'il s'agisse de la
restauration rapide ou de la restauration traditionnelle ?
Bon nombre de parlementaires, dont mon collègue et ami Pierre Hérisson, sont
intervenus sur le sujet, démontrant, des études sérieuses à l'appui, que la
reprise de l'activité dans ce secteur compenserait largement, au regard du
produit de la TVA, la baisse du taux. L'argument invoqué si souvent, trop
souvent, face à nos demandes ne tient donc pas, là non plus.
Voilà deux exemples de secteurs d'activité à fort potentiel de main-d'oeuvre.
Leur appliquer le taux réduit de TVA pourrait faire baisser le chômage des
jeunes, ainsi que des moins jeunes d'ailleurs, et cela de façon pérenne.
Entre 1998 et 1997, le taux annuel de création d'emplois dans les PME a été,
en Allemagne, deux fois et demie et, aux Pays-Bas, trois fois plus élevé qu'en
France. Cela devrait nous faire réfléchir !
Pourquoi ne pas vouloir aller plus loin que les mesures que vous préconisez et
qui visent à accorder un crédit d'impôt de 10 000 francs par emploi net créé,
ce qui ne constitue pas une mesure durable de résorption du chômage ?
Aller plus loin, cela veut dire faire confiance à nos entreprises, en leur
laissant la possibilité de relancer leurs investissements. Encore faudrait-il
ne pas les pénaliser par des ponctions supplémentaires, par exemple en relevant
l'impôt sur les sociétés, comme vous l'avez fait.
Cette forte pression fiscale réduira leurs capacités financières et les
affaiblira sur le plan de la compétition mondiale. On sait qu'en France
l'investissement n'est pas assez élevé.
La confiance des entreprises et, particulièrement, du tissu des PME constitue
une des clés majeures de la reprise de notre économie.
Faire de plus en plus peser la pression fiscale sur ceux qui tirent la
croissance est une erreur. Les pénaliser et les obliger à créer des emplois
contre leur volonté est aberrant.
Avez-vous si peu confiance dans les entreprises pour ne croire qu'en l'action
de l'Etat pour résorber le chômage, et cela par des mesures dont on ne sait
nullement quel sera le résultat dans cinq ans ?
D'autres obstacles se dressent devant nos entreprises.
Dans la distribution alimentaire et industrielle, par exemple, elles ont
l'obligation de mettre leurs locaux en conformité avec la réglementation
européenne. Mais à quel coût ! Certes, il est louable de prendre des mesures
visant à assurer la qualité et à protéger la santé publique, et les entreprises
y sont favorables. Mais il ne faudrait pas abuser de leur bonne volonté : il
faut leur laisser le temps nécessaire. En effet, souvent, entre le début des
travaux de rénovation ou de construction effectués par ces entreprises et la
mise en exploitation des nouveaux locaux - on pourrait d'ailleurs faire le même
constat pour les collectivités publiques -, la réglementation européenne a
changé ! Quand ce ne sont pas les Etats-Unis qui cherchent à nous imposer leurs
normes !
La durée de réaction est moindre pour une grande entreprise, qu'il s'agisse
des études ou de l'investissement. L'opération est plus difficile pour une
petite entreprise. Parfois, cela prend même un tour dramatique, au point que
l'entreprise ferme ; je connais des exemples.
Il y a là un grave problème que je vous demande, madame la secrétaire d'Etat,
de prendre en considération. Je souhaite que vous mettiez à profit tout le
poids de la France en Europe pour que ces investissements de mise aux normes
européennes, qui sont d'un coût élevé mais qui n'ont aucune rentabilité, qui ne
bénéficient d'aucune aide financière et qui sont également imposés à des
entreprises qui n'exportent pas, puissent être étalés dans le temps et,
surtout, adaptés région par région.
Une réglementation parfois tatillonne perturbe la vie de nos entreprises,
quelle que soit leur taille. Les mesures de simplification administrative vont
donc dans le bon sens, mais il faut faire vite car, aujourd'hui, beaucoup de
responsables de petite entreprise ont de graves difficultés et broient du
noir.
Il est une autre question qui a déjà été amplement abordée, car elle préoccupe
tous les entrepreneurs : je veux parler de la durée du travail.
Assistant depuis deux mois à de nombreuses réunions d'artisans, où se trouvent
également des commerçants et des responsables de PME-PMI, j'y ai rencontré des
hommes et des femmes stupéfaits, atterrés : tous m'ont dit qu'il était abusif
d'imposer les trente-cinq heures payées trente-neuf en l'an 2002 aux
entreprises de moins de vingt salariés. J'ai eu l'occasion de vous entendre
lors de certaines de ces réunions, madame le secrétaire d'Etat, mais j'ai eu
l'impression que vous n'aviez convaincu personne !
(Mme le secrétaire d'Etat
sourit en manifestant son incrédulité.)
Pour ces entrepreneurs, c'est une atteinte à leur indépendance, à leur
capacité de développement et à leur liberté.
La réduction du temps de travail sans réduction de salaire aura des
répercussions innombrables et insoutenables ! Je citerai les principales
d'entre elles : l'augmentation de 10 % des coûts horaires ; les heures
supplémentaires décomptées à partir de la trente-cinquième heure ; dans le cas
d'une semaine de cinq jours de travail de sept heures, l'augmentation relative
des temps improductifs par rapport au travail effectif ; l'augmentation en
chaîne du prix des produits et du matériel d'équipement ; l'impossibilité pour
les trop petites entreprises de créer des équipes successives.
On peut ajouter que ces augmentations des coûts et ce manque de flexibilité
conduiront inévitablement au développement du travail au noir ou du travail non
déclaré. C'est couru d'avance !
Dans différentes déclarations, le Gouvernement a annoncé haut et fort que
l'ensemble de ces réformes ne se ferait pas contre les entreprises. On peut
pourtant affirmer aujourd'hui que les mesures envisagées, et qui vont leur être
imposées, risquent bien de se faire contre elles, faute d'une véritable
concertation préalable. Or rien ne se bâtit dans la contrainte, madame le
secrétaire d'Etat, tout se bâtit dans la confiance.
Une enquête sur la durée du travail vient d'être réalisée auprès des
professionnels : le résultat, qui nous a été communiqué voilà quelques jours,
est édifiant : 5 % seulement acceptent, par obligation, le passage au
trente-cinq heures et 87 % le refusent.
Pour avoir assisté à un débat avec des représentants européens de l'artisanat
sur l'avenir de ces métiers en France et en Europe, j'ai pu mesurer le
scepticisme de nos voisins, pour ne pas dire leur rejet total d'une politique
aussi centralisée et autoritaire. Ils ne l'accepteraient pas dans leurs pays
!
Pour tous, l'artisan est un homme libre, indépendant et créatif, qui ne ménage
pas sa peine pour mettre son savoir-faire et tout son temps au service de sa
clientèle et de la collectivité tout entière. Tous les artisans et commerçants
qui enrichissent la France apportent de la valeur ajoutée - suscitant en outre,
bien souvent, des exportations supplémentaires - savent que, pour réussir,
faire face à leurs échéances, payer leurs salariés, ils doivent retrousser
leurs manches et travailler plus que les autres.
Beaucoup d'artisans travaillent en moyenne plus de soixante heures par
semaine, les agriculteurs cinquante-huit, les commerçants cinquante-sept et les
professions libérales cinquante-trois.
Le travail n'est pas une denrée qui se débite en tranches. Il ne faut pas tuer
les producteurs de richesses.
Je terminerai en évoquant les suites réglementaires des décisions du
Parlement, qui relèvent évidemment du Gouvernement.
Nous restons en attente, madame le secrétaire d'Etat, de la parution des
décrets d'application de la loi du 5 juillet 1996 sur la qualification
artisanale et le fonds de financement de la formation ainsi que ceux qui ont
trait au texte sur la liste des opérations d'équipements collectifs concernant
l'aide à la reconversion des commerçants et artisans victimes des conséquences
d'équipements collectifs. Pouvez-vous nous dire ce qui fait obstacle à la
parution de ces textes ?
Par ailleurs, qu'en est-il de la dotation au fonds national de développement
des entreprises, annoncée par le comité interministériel d'aménagement du
territoire qui s'est tenu au printemps dernier ?
Nos entreprises sont en permanence confrontées à une concurrence exacerbée à
l'échelle mondiale. Même chez nos plus proches voisins européens, certaines
entreprises bénéficient de coûts de main-d'oeuvre extrêmement bas, qui leur
permettent de remporter bon nombre de marchés parce qu'elles pratiquent un
niveau de prix contre lequel nos entreprises ne peuvent lutter. Alors,
imaginons une législation fiscale et sociale adaptée et favorisons l'initiative
dans une dynamique d'aménagement du territoire !
Pour préparer le xxie siècle, il faut des réformes allant dans le sens de la
simplicité et de la souplesse, telles que celles qui avaient été engagées sous
l'autorité de notre collègue Jean-Pierre Raffarin.
Le énième rapport de M. Dominique Baert sur les contraintes bureaucratiques,
avec ses cinquante-cinq solutions d'allégement, doit aboutir - vous nous l'avez
promis - à trente-sept mesures de simplification. C'est très bien. Il faut en
accélérer la mise en oeuvre.
Il faut aussi tout faire pour que les jeunes participent à la vie artisanale
et commerciale et puissent ainsi se sentir à l'aise et utiles dans la société
libre du xxie siècle.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Régnault.
M. René Régnault.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
souhaite évoquer aujourd'hui un problème qui concerne le secteur du commerce et
de l'artisanat comme celui des très petites entreprises : celui de ce que
j'appellerai la « réforme potentielle » des centres de gestion agréés et
habilités.
Comme nos collègues s'en souviennent peut-être, nous avons eu, sur ce sujet,
au Sénat, en décembre 1995, un débat très riche, durant lequel il est apparu
que mon groupe n'était pas le seul à défendre l'existence de ces centres, après
que notre éminent collègue M. Jean Cluzel, notamment, eut mené une action
déterminée à cet égard et donné son nom, en son temps, aux centres dits « BIC
».
Pour ma part, je souhaite rappeler à nouveau le véritable enjeu que constitue
le conseil aux petites entreprises.
Dans ce domaine, les centres de gestion agréés et habilités ont un rôle qu'ils
assument avec un savoir-faire remarquable. Ce rôle, notamment en termes de
formation, est indispensable à la promotion, à l'adaptation et à l'évolution du
secteur.
Or nous savons tous que ces centres se partagent, pour une petite part
seulement, qui n'est pas négligeable, le marché de la tenue de comptabilité
avec l'ordre des experts-comptables.
En 1995, le ministre des finances de l'époque, qui, de surcroît, était un bon
connaisseur de la profession d'expert-comptable, avait cru bon de proposer des
mesures tendant à satisfaire cette profession et à réduire la concurrence,
pourtant saine, qui existait sur ce marché, en essayant de porter un coup aux
centres de gestion.
M. Jean Chérioux.
Ce n'est pas très convenable !
M. René Régnault.
Je vous encourage à vous reporter aux débats de l'époque, monsieur Chérioux !
Votre réaction prouve que je vise juste !
M. Jean Chérioux.
Pas du tout ! Vous êtes à côté !
M. René Régnault.
J'ai été, avec quelques autres de mes collègues placés sur d'autres travées de
cet hémicycle, à l'origine du vote d'un amendement de compromis, permettant à
ces centres de ne pas disparaître. La menace, l'épée de Damoclès, demeure
cependant deux ans plus tard.
A l'époque, le Gouvernement s'était engagé à trouver une solution permettant
de répondre aux besoins des petites entreprises et, par là même, à l'intérêt
général du pays, de notre économie, mais encore de l'aménagement du territoire,
de la revitalisation des territoires ruraux notamment.
Depuis lors, une mission a été menée à cet effet, sous l'égide de M. François
Cailleteau - le fait de citer son nom n'est en rien discourtois, loin s'en faut
- à laquelle n'a été associé aucun parlementaire, comme s'y était engagé le
ministre des finances de l'époque. Je le regrette alors même que j'en avais
fait personnellement la demande, tant au ministre des finances qu'au président
de notre commission.
M. Cailleteau a rendu son rapport tout récemment et je crains qu'il ne puisse
être à l'origine de propositions susceptibles de recueillir un large accord au
sein des professionnels concernés.
Quel est l'enjeu ? Aujourd'hui, il faut développer les petites entreprises -
cela a été dit à plusieurs reprises cet après-midi - et inciter la création et
la pérennisation de celles-ci ; cela a également été dit. Or, que peut-on
constater ?
Pour situer les choses, je donnerai trois chiffres, auxquels je souhaite vous
rendre attentifs : l'ordre des experts-comptables intervient auprès de 1,5
million d'entreprises dans le secteur du commerce et de l'artisanat et les
centres de gestion agréés et habilités auprès de 150 000. En France, nous avons
2,7 millions de PME-PMI. C'est dire combien d'entreprises - 1 million environ !
- restent isolées. Elles se trouvent généralement parmi les plus petites, donc
les plus fragiles, c'est-à-dire celles auxquelles il faut porter un intérêt
particulier.
Il convient de développer le conseil et un conseil, de qualité : les centres
de gestion, s'ils n'existaient pas, mes chers collègues, seraient à
inventer.
Le rôle des petites entreprises est primordial parce qu'elles sont créatrices
d'emplois - les orateurs qui l'ont précédé l'ont dit, quelle que soit leur
appartenance politique - et qu'elles contribuent, par leurs investissements, à
un soutien effectif au secteur industriel - tout le monde l'a également dit.
Néanmoins, trop d'entre elles disparaissent au cours de leurs premières années
d'existence.
Les facteurs d'échec sont nombreux et s'illustrent - cela a encore été dit, et
sur de nombreuses travées - d'abord, par l'insuffisance de réflexion préalable
à l'installation et par la mauvaise préparation des projets d'entreprise ;
ensuite, par le manque de formation des dirigeants à la gestion d'entreprise et
aux exigences de l'environnement administratif, fiscal et social ; enfin, par
la connaissance insuffisante de la part des dirigeants des règles du marché et
de la concurrence, laquelle peut entraîner une inadéquation entre l'offre et la
demande contribuant à la déstabilisation du secteur, souvent à l'encontre des
intérêts bien compris des usagers, dont la déception ne tarde pas à
s'affirmer.
Les petites entreprises dégagent une potentialité de croissance importante. Il
convient donc de les aider en développant l'esprit d'entreprise, en leur
donnant des chances de réussir, en simplifiant l'environnement et en allégeant
les contraintes.
Les centres de gestion assurent aujourd'hui une formation permanente et
individuelle et apportent un accompagnement global à la gestion. Ils assurent
un relais des actions des chambres consulaires et des organisations
professionnelles dans une politique cohérente de secteur. Ce sont des
structures de professionnels, de forme associative et au service des
professionnels.
Les centres apportent des résultats fructueux : les études de la direction
générale des impôts, la DGI, ont confirmé ces résultats ; le débat qui s'est
déroulé ici même, en 1995, l'a également montré, sachant que la DGI donne
l'agrément aux « habilités » et dispose du pouvoir de retrait permanent de
celui-ci. Il s'agit là d'une garantie considérable pour l'Etat, donc pour la
chose publique.
Je tenais à faire état - en forme d'éloge, peut-être - de la situation des
centres de gestion agréés et habilités, parce que j'éprouve quelques craintes
sur leur devenir.
En effet, le rapport de M. Cailleteau prévoit l'unification de la profession.
Les centres de gestion risquent alors de devenir des associations d'expertise
comptable, ce qui ne doit pas être le but recherché. C'est comme si vous
tentiez de rendre miscibles deux liquides qui ne le sont point ! Vous pouvez
toujours les agiter, vous ne parviendrez jamais à obtenir cette mixtion que
certains pourraient espérer.
Tout au contraire, il me paraît fondamental de reconnaître la véritable
spécificité des centres, de reconnaître aux professionnels le droit de
s'organiser, mieux, de les encourager, de mettre en place une réglementation
claire et dynamique et de permettre à ces centres d'agir au niveau des
créateurs, en particulier, ce qu'ils ne sont pas autorisés à faire
aujourd'hui.
La place des petites entreprises est trop importante pour notre économie,
comme en matière d'aménagement du territoire, pour que celles-ci servent
d'enjeu à une bataille de marché où chacun se disputerait la meilleure place
possible. C'est au Gouvernement madame la secrétaire d'Etat, qu'il appartient
de rappeler ce qui relève de l'intérêt général - il est l'exécutif ! - et de
soumettre au Parlement les mesures qui le concernent, en l'invitant à mettre de
côté ce qui relève d'intérêts particuliers.
Pour ma part, je souhaite que puisse venir en discussion dans le prochain
collectif budgétaire de 1997, par exemple, une mesure permettant enfin aux
centres d'exercer des prérogatives en cohérence avec le cadre fiscal offert aux
PME.
En 1995, le Gouvernement a étendu, de manière significative, le champ du
régime simplifié d'imposition, le RSI, lequel s'applique maintenant aux PME
jusqu'à 5 millions de francs de chiffre d'affaires.
Au nom de quelle cohérence les centres de gestion agréés habilités doivent-ils
continuer à assurer la tenue de la comptabilité de ces entreprises uniquement
lorsque le chiffre d'affaires de celles-ci ne dépasse pas un certain seuil du
RSI, en l'occurrence 50 %, après avoir été de 60 % ?
Aucune logique économique ne répond à cette situation, si ce n'est celle qui
aboutirait à préserver un pré carré de marché en faveur d'une profession régie
par un ordre. Je demande et soutiens un « calage » des centres de gestion
agréés et habilités sur le RSI.
Une telle approche n'est pas saine : soit on considère que les PME doivent
bénéficier d'un traitement fiscal allégé, en raison de leur taille, jusqu'à 5
millions de francs de chiffre d'affaires, et, dans ce cas, il convient de
permettre aux centres de gestion agréés et habilités de tenir leur comptabilité
jusqu'à ce seuil, soit on considère que ce seuil est trop élevé pour eux, et
alors aucune justification ne viendrait expliquer qu'on l'ait porté à ce
niveau-là pour les PME.
Par ailleurs, et afin de veiller, dans l'intérêt de tous, à la qualité des
documents de comptabilité établis par les centres de gestion agréés et
habilités, je souhaite que l'on puisse admettre que les comptabilités fassent
l'objet de contrôles par sondages ; comme c'est le cas dans d'autres
secteurs.
Madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie de l'action que vous conduisez
en experte du secteur, sensible à l'aménagement équilibré et dynamique du
territoire. Et je sais de quoi je parle !
Avec les intéressés, je compte sur vous pour prendre en compte les
préoccupations qui ont alimenté mon propos. Comme l'a excellemment exprimé tout
à l'heure mon éminent collègue M. Dussaut, le groupe socialiste du Sénat vous
assure aujourd'hui de son soutien et vous signifie toute sa confiance.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Robert.
M. Jean-Jacques Robert.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
souhaite évoquer trois points supplémentaires à la suite de mon rapport.
En premier lieu, je tiens à attirer votre attention sur l'insuffisance des
résultats s'agissant de la formation professionnelle par alternance.
Le dispositif relatif aux contrats de qualification permet à 75 % environ de
jeunes de demeurer dans l'entreprise. Or, en 1996, le nombre de ces contrats a
chuté de près de 5 %, ce qui représente 5 000 emplois.
Les fonds étaient disponibles ! On a prélevé - je l'ai déploré et je le
déplore toujours - 1 400 millions de francs, ou presque, pour le budget de
l'Etat. Cette année, il reste 1 800 millions de francs pour la fin de
l'exercice.
Les entreprises sont d'accord pour conclure des contrats de qualification.
L'argent est là. Les jeunes sont demandeurs. Or il se trouve, par je ne sais
quel miracle - c'est à se taper la tête contre les murs - que tout le monde se
met en travers pour empêcher la conclusion des contrats. Ce faisant, près de 20
000 jeunes vont s'inscrire à l'ANPE !
Un coup de pouce de la part de votre ministère à l'occasion de votre arrivée
serait le bienvenu, madame la secrétaire d'Etat. Alors que vous cherchiez, au
travers de tant de textes, des emplois pour les jeunes, jamais vous n'avez eu
une telle occasion : l'argent, les entreprises, les candidats !
En deuxième lieu, il faut absolument penser à l'harmonisation des charges
européennes pour l'artisanat. En effet, l'ensemble des artisans qui se trouvent
aux frontières franco-allemande et franco-espagnole sont l'objet d'une
concurrence effrénée de la part de leurs collègues installés de l'autre côté de
la frontière. Malgré leur bonne volonté, ils ne peuvent y répondre ; M.
Ostermann le confirmera.
En troisième lieu, il conviendrait peut-être - nous l'avons déjà demandé l'an
dernier, mais cela nous a été refusé - d'étendre aux résidences secondaires le
bénéfice de la réduction d'impôt qui est accordée aux contribuables
propriétaires pour les dépenses de gros travaux effectués dans leur résidence
principale.
Le crédit d'impôt pour les dépenses d'entretien constitue une bonne mesure. Si
on l'étendait à l'ensemble des résidences, qu'elles soient principales ou
secondaires, on ouvrirait des possibilités de travaux qui seraient nettement
plus profitables aux entreprises qu'une réduction de TVA, toujours très
difficile à obtenir et qui n'emporte pas la conviction de chacun.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à
l'artisanat.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je
tiens tout d'abord à remercier M. Ballayer, rapporteur spécial, et M. Robert,
rapporteur pour avis, pour la qualité de leur rapport.
Je salue aussi l'ensemble des sénateurs et « sénatrices » qui ont assisté aux
travaux de la commission ; le débat a été extrêmement riche, de grande qualité
et a ouvert de nombreuses pistes de travail pour l'avenir. Nous ne nous sommes
pas limités, en effet, au seul projet de loi de finances pour 1998.
Je remercie également Mme Terrade, qui a présenté le rapport relatif au projet
de budget de la consommation.
Je vous remercie tous de vous consacrer à ce secteur économique, dont
l'importance pour la nation n'est pas assez soulignée.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous qui êtes proches de la vie de nos
communes, vous connaissez le rôle essentiel que jouent les commerces de
proximité pour nos villes et nos villages. Vous connaissez également
l'implication des petites entreprises dans la vie sociale et économique. Vous
avez, chacune et chacun, constaté la volonté des chefs d'entreprises de
s'impliquer dans la vie des cités.
Notre pays dispose d'une richesse historique avec un réseau dense de petites
entreprises et de commerces, qui constituent autant d'animateurs de la vie
économique et de ciment pour notre société.
Notre pays a vu se constituer de puissants outils de distribution aptes à
répondre à la demande de consommation de nos concitoyens. Le secteur de la
grande distribution contribue efficacement à l'exportation des produits
français et favorise l'implantation des PME françaises dans les pays émergents
de l'Amérique du Sud et de l'Asie du Sud-Est, par exemple. Ce secteur doit
s'engager avec les autres acteurs économiques vers l'équilibre des formes de
commerce.
Enfin, chacun sait que le dynamisme des PME permet de compenser les pertes
d'emploi dans les grands groupes en restructuration. C'est là que se créent, en
effet, les emplois, que les jeunes sont embauchés et c'est là que je concentre
les moyens de ma politique.
Ces entreprises, ces commerces ne sont pas isolés ; notre pays les accompagne
dans leur développement par un dispositif de formation animé par les
professionnels et les chambres consulaires. J'ai décidé de renforcer et de
moderniser ce dispositif.
La France, disais-je, accompagne ces entreprises par la mise en place d'outils
de développement destinés à faciliter le transfert de technologie, l'accès aux
financements et aux marchés étrangers, parce que l'on oublie trop souvent que
les TPE - les très petites entreprises - et les PME sont aussi des
exportateurs.
Mais s'il faut savoir reconnaître les mesures prises par le passé en faveur
des entreprises de taille petite et moyenne, dans le secteur du commerce, il
faut être conscient qu'elles ont été plus défensives qu'offensives.
Pour plusieurs des mesures proposées, qui étaient utiles et justifiées, il a
été difficile d'obtenir, une fois le texte de loi voté, un consensus auprès des
différents partenaires.
C'est pourquoi, lorsque j'ai pris mes fonctions le 4 juin dernier, aucun
décret d'application n'était encore publié sur ces textes.
Pour vous rassurer tout de suite, je précise d'emblée qu'un certain nombre de
décrets sont aujourd'hui déjà publiés, notamment celui sur la formation, qui
est sorti la semaine dernière. Ces décrets ont été difficiles à rédiger. Nous
nous sommes rendu compte qu'un certain nombre d'éléments donnés par les
différents partenaires, tels que les chambres de métiers ou l'union
professionnelle artisanale, l'UPA, par exemple, n'avaient pas nécessairement
été intégrés de la même façon. C'est pourquoi il nous a fallu du temps.
Ont été à ce jour publiés le décret sur le fonds de promotion et de
communication, le décret relatif à la composition du bureau de l'assemblée
permanente des chambres de métiers, l'APCM, dont les membres sont portés de
onze à douze, ce qui était important, et le décret concernant le fonds
d'assurance formation des artisans.
Certains sont actuellement soumis au Conseil d'Etat et seront donc publiés dès
que ce dernier aura rendu son avis. Il s'agit du décret sur le répertoire des
métiers et de celui sur le nantissement. Seront soumis au Conseil d'Etat le 16
décembre prochain le décret sur la qualification préalable et celui qui est
relatif aux stages de préparation à l'installation.
S'agissant du décret sur la qualification préalable, les fameuses « cinq ans
de formation » ont posé quelques problèmes d'interprétation car il s'agissait
de cinq ans dont la formation initiale. Nous avons donc transformé ces cinq ans
en trois ans auxquels s'ajoutent les deux ans de formation initiale, ce qui a
donné satisfaction à tous.
M. Philippe Adnot.
Très bien !
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
L'ambition du Gouvernement est de mener une politique
globale de développement économique. La volonté exprimée par le Premier
ministre s'est traduite par la constitution d'un secrétariat d'Etat au sein
d'un grand ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, plaçant
ainsi directement les PME, le commerce et l'artisanat au coeur de la politique
économique de notre pays.
Pour servir cette ambition, le Gouvernement a décidé de privilégier les
actions auprès des petites entreprises, car elles sont le plus souvent la
première mais aussi la plus difficile marche à franchir pour la constitution de
la base entreprenariale de notre pays.
C'est, en effet, dans ces petites entreprises que se trouvent ceux qui
créeront les grands groupes de demain, à condition, toutefois, qu'ils disposent
au bon moment de l'accompagnement nécessaire à leur développement.
Le secrétariat d'Etat a également la charge de la consommation, qui constitue
le complément indispensable de toute politique de développement économique.
Sans la confiance des consommateurs, sans leur information et sans leur pouvoir
d'achat, il ne saurait en effet y avoir de marché intérieur pérenne.
Pour traduire ces options, écoute du consommateur et accompagnement du
développement des entreprises, j'ai reçu le ferme soutien de Dominique
Strauss-Kahn et de Christian Sautter, avec qui nous avons préparé le bugdet que
j'ai l'honneur de vous présenter.
Enfin, la volonté de développer l'entreprise sous ses différentes formes,
artisanale, commerciale ou de services, vise non seulement à renforcer la
richesse nationale, mais aussi à réduire le chômage.
C'est dans cet esprit offensif que je mène une campagne d'explication sur le
dispositif qui inquiète certains d'entre vous, celui des trente-cinq heures,
parce que je suis convaincue qu'il est non seulement l'un des moyens de la
résorption du chômage, mais aussi le garant d'une meilleure organisation de la
vie professionnelle dans nos entreprises.
En rencontrant les chefs d'entreprise sur le terrain, je me suis rendu compte
que certains d'entre eux avaient déjà mis en place la réduction du temps de
travail avec de très faibles effectifs. Ils sont la preuve que l'organisation
et l'aménagement du temps de travail peuvent permettre aux petites entreprises
de moins de vingt salariés de parvenir à cette réduction dans les quatre ans
dont elles disposent pour le faire sur la base du volontariat. Il est important
de rappeler que, dans ces négociations, l'accent a été mis sur l'aménagement du
temps de travail et que nos syndicats salariés ont fait un grand pas dans cette
direction.
Un tel dispositif est également de nature, me semble-t-il, à amener l'ensemble
des entreprises, par bassin d'emploi, à discuter entre elles d'une meilleure
organisation, qui permettra, par exemple, pour certaines d'entre elles,
d'améliorer les délais.
Une meilleure compétitivité à partir d'une organisation plus efficace du
travail, une meilleure répartition de l'emploi dans le cadre d'une productivité
améliorée, tels sont les enjeux pour notre économie et pour nos entreprises.
En effet, actuellement, nous vivons non pas une crise dont il serait possible
de sortir, même avec quelques mesures fiscales, mais une formidable mutation
technologique qui, de jour en jour, accroît la productivité et fait baisser les
besoins en salariés.
Or, vous l'avez remarqué comme moi, la croissance est actuellement tirée par
les exportations ; en revanche, le marché intérieur reste trop atone pour tirer
les petites entreprises qui, elles, ont besoin de consommateurs disposant d'un
pouvoir d'achat.
Cette politique, pour réussir, doit pouvoir s'appuyer sur les acquis
européens, et c'est le sens des prises de position françaises à Amsterdam, puis
à Luxembourg, les enjeux économiques européens ne sauraient dorénavant être
dissociés d'une offensive pour l'emploi.
Il est clair que seule une forte cohérence des politiques suivies aux échelons
national et local permettra d'atteindre les objectifs fixés.
A cet égard, le budget du secrétariat d'Etat représente une part modeste des
moyens financiers mobilisés pour le développement des entreprises. Mais, s'il
est modeste, je l'ai voulu efficace, afin qu'il soit le levier d'une politique
offensive en faveur des PME.
Avec 425 millions de francs, le budget du secrétariat d'Etat consacré aux très
petites entreprises ainsi qu'aux petites et moyennes entreprises du commerce et
de l'artisanat ne représente qu'une faible partie des moyens d'action mis au
service du développement de nos entreprises. Il s'agit d'un budget en réduction
maîtrisée pour participer à l'effort de réduction de la dette, mais qui
préserve la capacité d'action du secrétariat d'Etat.
En effet, la réduction par rapport au précédent exercice prévisionnel est de
2,82 %. Elle est donc nettement moins élevée qu'en 1996 et en 1997 où elle
était respectivement de 12,60 % et de 18,08 %.
Plus essentielle qu'une comparaison statistique, l'orientation de la politique
qui sera menée doit requérir votre attention parce qu'elle illustre notre
conception de l'action de l'Etat en faveur des entreprises et de l'emploi.
Il s'agit d'une politique pragmatique, attentive aux attentes du pays,
mobilisée pour l'emploi, ouverte sur l'avenir, pour moderniser l'outil de
gestion, fortement impliquée dans une formation adaptée aux besoins des jeunes
et des entreprises, soucieuse de simplifier les procédures administratives,
vous l'avez tous rappelé, attachée au développement des territoires - et je
sais que vous y tenez autant que moi - une politique, enfin, à l'écoute des
consommateurs et attentive à leur pouvoir d'achat.
Il s'agit, d'abord, d'une politique pragmatique.
J'ai obtenu, en juillet, que les PME réalisant un chiffre d'affaires inférieur
à 50 millions soient exclues de la majoration de l'impôt sur les sociétés.
M. René Régnault.
Très bien !
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
Cette décision ne correspond pas à une option
corporatiste ; elle s'appuie sur une réalité économique et sociale qui doit
être, enfin, prise en compte si l'on souhaite relancer le dynamisme économique
de notre pays, même si chacun reconnaît, aujourd'hui, qu'un seuil unique de 50
millions de francs, quelle que soit la branche, n'est pas pleinement
satisfaisant.
Il s'agit de procurer un environnement favorable à la création et au
développement de l'entreprise, allant de la TPE, trop souvent oubliée, à la
PME.
Des mesures ont déjà été engagées pour faciliter l'accès aux financements, tel
le report d'imposition des plus-values de cession de parts lorsque le prix de
cession est réinvesti dans une entreprise créée depuis moins de cinq ans -
c'est ce que les chefs d'entreprise demandaient depuis longtemps. Ces mesures,
nous les avons défendues conjointement avec mon collègue Christian Pierret.
J'ai également fait adopter, avec facilité, dirai-je, par mes collègues MM.
Strauss-Kahn et Sautter, des mesures fiscales qui recueillent, je le sais,
auprès de nombre d'entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, un
assentiment.
Ainsi, les entreprises innovantes à fort potentiel de croissance pourront
recruter des cadres ou des scientifiques de haut niveau, en attribuant des bons
de souscription de parts de créateurs d'entreprises, qui bénéficient d'un
régime fiscal particulier. Ce point est important, parce que les petites
entreprises ont souvent du mal à embaucher des personnels hautement
qualifiés.
Un crédit d'impôt sur le revenu pour les dépenses d'entretien et de revêtement
des surfaces pour les contribuables, propriétaires ou locataires, est proposé
dans le projet de loi de finances. Cette mesure assainira les relations entre
les entreprises et le client, ainsi qu'entre le client et la facture, si je
puis dire. Elle permet également d'agir contre ce que vous avez appelé le «
travail illégal » et que l'on désigne communément par l'expression « travail au
noir », et de relancer l'activité des PME, fortement utilisatrices de
main-d'oeuvre, en particulier dans le secteur du bâtiment.
Dans la plupart des cas, m'avez-vous dit, cette mesure est insuffisante.
Puis-je rappeler qu'elle n'existait pas auparavant ? C'est la première fois
qu'une telle mesure est prise, et c'est une porte ouverte.
(Marques d'approbation sur les travées socialistes.)
Avec cette mesure, qui va au-delà d'une simple réduction d'impôt sur le
revenu, puisqu'on remboursera ceux qui ne le paient pas, soit un foyer sur
deux, nous ouvrons un nouveau chantier, celui de la TVA des entreprises de
main-d'oeuvre.
Vous savez que M. Monti, commissaire européen chargé des questions fiscales, a
accepté une négociation sur la diminution de la TVA en faveur de ces mêmes
entreprises de main-d'oeuvre. Je serai le porte-parole du Gouvernement
français, avec mes collègues du Gouvernement, et du Parlement français puisque
vous êtes tous d'accord, tant à l'Assemblée qu'au Sénat, dans cette négociation
qui, je le pense, finira par aboutir.
Le choix du Gouvernement consiste non pas à privilégier l'emploi public au
détriment de l'emploi marchand, mais à mener une politique globale en faveur du
développement économique et de l'emploi, ce qui implique, comme je l'ai déjà
dit, une forte cohérence de l'action politique aux échelons locaux, national et
européen.
Une mesure fiscale relative à l'assurance-vie permettra également d'orienter
l'épargne vers les fonds propres des PME-PMI.
Par ailleurs, une aide à la création d'entreprises par les jeunes est prévue
dans le cadre du plan emploi-jeunes ; elle revêtira probablement la forme d'une
avance remboursable, avec une enveloppe destinée à l'accompagnement des jeunes
créateurs.
Cette logique de l'accompagnement, qui est nouvelle, permettra d'ailleurs
localement aux chambres de métiers, aux agences de développement ou aux
chambres de commerce d'être rémunérées pour une prestation parfois un peu
délicate.
Une partie des produits issus de l'ouverture du capital de France Télécom,
soit 1 milliard de francs environ, sera affectée à l'innovation, notamment au
travers du capital-risque, et au développement technologique. Cette mesure est
le résultat positif d'une concertation entre le ministère de l'économie, des
finances et de l'industrie et M. Allègre.
L'action de la banque de développement des petites et moyennes entreprises, la
BDPME, dotée de 1 milliard de francs au titre des fonds de garantie qu'elle
gère dans le cadre du partage du risque financier, mais aussi au titre des
apports en fonds propres des PME, sera développée en privilégiant l'action
régionale. Elle viendra soutenir la réalisation des objectifs des contrats de
plan Etat-région. C'est cela qui fera la force de développement de nos
territoires.
Les prêts bonifiés constituent un levier important de l'action publique en
faveur de l'entreprise artisanale, des restaurateurs et de tous les commerçants
qui ont la double immatriculation.
Les crédits budgétaires, dont la baisse n'obère en rien les nouveaux prêts,
comme un certain nombre d'entre vous l'ont prétendu, s'élèvent à 150 millions
de francs, ce qui permet l'ouverture d'une enveloppe de 2 milliards de frans en
1998. Cette diminution ne fait que suivre celle des taux d'intérêt.
Pour répondre à votre remarque, monsieur Dussaut, j'ai ouvert une réflexion
sur le fonctionnement et le rôle des prêts bonifiés pour adapter les
instruments de financement au développement des PME. Nous nous entretiendrons
encore de ce point en 1998 afin d'arriver à une solution commune.
Le Premier ministre m'a confié la coordination de l'action gouvernementale
pour les professions libérales. Je serai le médiateur de l'ensemble des
professionnels afin de réunir les conditions propices au développement des
entreprises du secteur libéral, qu'elles se situent dans le domaine juridique,
médical ou technique.
Les professionnels libéraux doivent bénéficier des conditions juridiques et
fiscales qui leur ouvrent une situation compétitive aux échelons européen et
international.
Je fais partie de ceux qui pensent que les services ne font pas que suivre la
production ; ils peuvent la précéder, et en particulier l'exportation. Si un
peu plus de droit français avait été introduit dans les grands systèmes
internationaux, nous serions mieux placés sur certains marchés.
Le Gouvernement propose, dans le projet de loi de finances rectificative de
1997, une mesure qui facilitera la transformation en sociétés soumises à
l'impôt sur les sociétés des entreprises libérales ; celles-ci sont d'ailleurs
satisfaites de cette nouvelle ouverture.
J'aborderai maintenant la modernisation de l'outil de gestion par l'accès aux
nouvelles technologies. Il s'agit d'un thème d'action vital pour le commerce,
les PME, l'artisanat, les services et les professions libérales. Il faut, sans
plus tarder, mobiliser des moyens financiers et d'analyse pour anticiper sur
les évolutions à venir.
L'innovation technologique passe par la maîtrise des nouveaux moyens de
communication, elle dépend également d'une meilleure structuration interne des
entreprises et d'un renforcement de la sensibilité et de la réaction des
entreprises à l'environnement européen et international.
A cet effet, les actions suivantes répondront à ces préoccupations.
S'agissant de l'institut supérieur des métiers, qui participe activement, avec
les chambres des métiers et les organismes professionnels, au réseau de
diffusion des « pôles d'innovation et technologie », nous proposons de doter de
18 millions de francs son budget pour 1998.
Pour ce qui relève plus particulièrement de l'artisanat, j'ai retenu, avec
l'appui du Premier ministre, le principe d'un ensemble d' « initiatives pour
l'entreprise artisanale », que nous pourrons exposer à la fin du premier
semestre de 1998.
Il s'agit d'abord de faire évoluer l'image de ce secteur : le fonds de
promotion et de communication mis en place récemment et doté de 50 millions de
francs y contribuera. Cela répond à une préoccupation qui a été exprimée tout à
l'heure. Le développement, qui passe aussi par la conquête des marchés
nouveaux, y compris à l'exportation, sera stimulé par l'information grâce à
l'accès aux nouvelles technologies qui sera privilégié en relation avec mon
collègue, secrétaire d'Etat au commerce extérieur, M. Dondoux.
La création et la transmission de l'entreprise artisanale bénéficiera d'une
aide remboursable de 30 000 francs à 50 000 francs, avec chéquier-conseils pour
les jeunes créateurs d'entreprise, et l'indemnité de départ évoluera, j'en suis
certaine, dès 1998, vers une indemnité de transmission. Il nous appartient de
régler ce délicat passage.
Par ailleurs, le contrat installation formation artisanat, le CIFA, sera
adapté et modernisé.
Pour favoriser le développement des technologies des métiers d'art, afin
d'accéder aux nouveaux marchés, la SEMA, la Société d'encouragement des métiers
d'art, disposera d'une dotation de 10 millions de francs. Nous sommes présents
au Québec jusqu'au milieu de la semaine prochaine.
J'en arrive à la formation, creuset de la compétitivité et de l'emploi.
Elle recueille 21 % de mon budget, soit 93 millions de francs. Ces crédits
sont l'investissement pour notre jeunesse, pour lui permettre de s'insérer dans
les meilleures conditions dans le monde de l'emploi. Il faut également donner
aux différentes professions les moyens concrets d'une évolution permettant à
chaque professionnel de se former aux innovations pour demeurer compétitif.
Sur le plan budgétaire, la baisse des crédits pour l'artisanat est largement
compensée par le financement extrabudgétaire supplémentaire de 50 millions de
francs résultant de la réforme des fonds d'assurance formation ; j'ai indiqué
tout à l'heure que les décrets avaient été publiés la semaine dernière.
La formation des agents techniques du commerce et de l'artisanat dispose de 24
millions de francs pour aider les artisans et les commerçants dans leur
fonction quotidienne de chef d'entreprise, impliquée dans son environnement
économique local.
L'apprentissage constitue une pratique fondamentale pour les jeunes et pour
les entreprises. Son évolution est devenue nécessaire à un double niveau.
D'abord, la diversification et l'adaptation, en particulier aux nouvelles
technologies, et ce pour deux raisons : d'une part, parce que l'artisanat en a
besoin et, d'autre part, parce que les formations doivent revêtir un large
aspect de modernité pour être attirantes aux yeux des jeunes. Il faut également
préparer les jeunes à leur avenir en les formant aussi à devenir des
responsables d'entreprise. J'ai coutume de dire que trop de formations se
bornent à la rédaction du
curriculum vitae
et à la technique de
l'entretien et très peu parlent de création.
Ensuite, il faut préparer les jeunes à leur avenir, en les formant aussi à
devenir des responsables d'entreprise.
L'apprentissage constitue un domaine où l'action publique doit continuer à
élever le niveau de qualification et créer de véritables passerelles vers
l'enseignement supérieur. La qualification est effectivement la clé de l'avenir
des entreprises.
Ainsi, 44 millions de francs sont consacrés à la formation des demandeurs
d'emploi, notamment avec l'institut de formation commerciale permanente,
l'IFOCOP, pour les métiers de la vente.
La formation des créateurs d'entreprise, notamment à la gestion en relation
avec les organismes consulaires, disposera de 11 millions de francs en 1998.
L'accès aux nouvelles technologies de gestion et de communication constitue,
conformément à l'engagement de M. le Premier ministre, la priorité.
D'autres mesures sont en préparation : l'animation du réseau local, une
formation en alternance adaptée aux demandeurs d'emploi - ce qui répond au
quasi-échec du contrat de qualification, vous avez raison, monsieur le
rapporteur pour avis - et au chef d'entreprise, le statut unique du premier
salarié, en liaison avec les services de Mme Martine Aubry.
La simplication des formalités des mesures administratives a animé l'ensemble
de vos interventions. Je le comprends, car elle a animé également, ces quatre
dernières semaines, les services concernés.
Cette action va permettre d'apporter des réponses adaptées aux problèmes
spécifiques des PME, qui représentent, vous l'avez souligné et je le rappelle,
99 % des entreprises du secteur marchand non financier.
J'ai présenté, mercredi dernier, au conseil des ministres le résultat des
consultations qui ont été menées à partir des propositions du rapport réalisé
par M. Dominique Baert, auquel, s'ajoutaient, bien sûr, les rapports antérieurs
: celui de FCI - France communication international - et le livre blanc des
experts-comptables.
Simplifier pour les PME correspond à une démarche et à des mesures.
La simplification administrative, c'est d'abord une volonté politique qui se
traduit par une action continue. Il ne faudra pas se contenter de l'application
des trente-sept mesures en question. La simplification administrative, c'est
aussi le développement et l'utilisation des moyens modernes de transmission des
données.
Si nous avons fait un pas, qualifié de « modeste » par la presse, vers ces
technologies, c'est parce que nombre d'entreprises disposent du Minitel, mais
pas encore d'Internet, il faut s'adapter à la réalité.
La simplification administrative, c'est, en outre, un état d'esprit fondé sur
le respect de l'usager et l'échange - vous avez cité des exemples, madame
Heinis - entre l'usager et les citoyens chefs d'entreprise ou non, à partir
d'objectifs et de directives claires - vous avez raison, madame Heinis.
La simplification administrative, c'est, enfin, l'implication des plus hautes
autorités de l'Etat, et c'est pourquoi la commission pour la simplification des
formalités incombant aux entreprises, la COSIFORME rénovée, dépendra du Premier
ministre.
Les principales mesures de simplification s'inscrivent dans cette démarche.
Ainsi, dès le 1er janvier 1998, une entreprise pourra être créée dans un délai
bref : un jour, sauf, bien sûr, pour les croisements compliqués de capitaux des
très grandes entreprises, qui, elles, ne sont d'ailleurs pas attachées à ce
délai.
Ces mesures permettront de simplifier le bulletin de paie, notamment pour les
TPE, et d'éviter aux chefs d'entreprise d'avoir à faire le calcul des
cotisations chaque mois, tant pour la déclaration que pour le paiement. Vous le
savez, un certain nombre d'URSSAF souhaitent appliquer cette disposition dès
1998, alors qu'elle sera mise en oeuvre en 1999.
Ces mesures permettront de simplifier les échéances de plusieurs déclarations,
tant sociales que fiscales et, vous l'avez dit tout à l'heure, d'éviter
plusieurs transcriptions des mêmes informations.
Elles permettront de supprimer ou de simplifier des obligations déclaratives :
par exemple, les déclarations douanières pour des montants faibles, les
statistiques, mais aussi les obligations comptables, à partir du moment où
l'utilité pour le demandeur n'est pas avérée par rapport aux contraintes
qu'elles entraînent pour les chefs d'entreprise.
Ces mesures permettront de coordonner les exigences des services et de faire
en sorte qu'ils se transmettent les informations. Ainsi, le T-PG sera
l'interlocuteur unique des petites et moyennes entreprises pour les marchés
publics. Plus besoin de faire la course aux certificats !
M. René Régnault.
Très bien !
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
Ces mesures visent aussi à supprimer ou à réduire les
contraintes administratives qui freinent le développement des nouvelles
activités. Il s'agit, par exemple, de prendre en compte les moyens modernes de
transmission.
Il est important - vous en avez parlé tout à l'heure - que nous relisions le
code des marchés publics et que nous le réécrivions ensemble. En effet, le
seuil unique pour les collectivités territoriales ne correspond plus à une
réalité et l'allotissement permettrait aux petites entreprises d'avoir accès à
des marchés qui, actuellement, sont en effet confisqués par un certain nombre
de grands intervenants extérieurs, comme vous l'avez dit pudiquement.
Le développement territorial constitue aussi un axe important de notre
politique.
Cet objectif - assurer le développement des territoires - constitue la ligne
de force des actions qui sont entreprises à partir du secrétariat d'Etat.
La finalité est bien de créer, dans les territoires, les moyens du
développement des activités et de l'emploi.
C'est aussi de parvenir à la mobilisation des ressources de chacun des
territoires, à leur échelle, pour favoriser la création d'activités.
C'est, enfin, de créer une dynamique qui placera l'entreprise au coeur des
préoccupations des élus et des responsables financiers.
C'est d'offrir à chaque créateur, à chaque jeune ou demandeur d'emploi, un
environnement favorable à la réalisation de ses projets.
C'est, avec le soutien des organismes nationaux, de permettre aux petites
entreprises, enracinées dans un territoire qui les porte, de s'ouvrir sur les
marchés extérieurs.
Il s'agit d'une contribution à l'affirmation d'une identité qui forge la
cohésion sociale et économique ainsi que la citoyenneté. J'ai coutume de dire
qu'il y avait autrefois deux facteurs de production, le travail et le capital,
et qu'il en est aujourd'hui un troisième, le territoire.
Pour mener cette politique, je dispose de moyens d'intervention.
Je vous ai dit, voilà quelques instants, que les moyens budgétaires étaient
modestes. Ainsi, je dispose, sur le plan budgétaire, de 145 millions de francs,
soit 34 % de mon budget. Je vous annonce, et je pense que vous en serez tous
satisfaits, que cette capacité financière est amplifiée, c'est-à-dire
globalement doublée par rapport au budget total, avec le FISAC. Celui-ci
enregistre une augmentation de 100 millions de francs par rapport au budget
précédent, portant la dotation de 300 millions de francs à 400 millions de
francs pour 1998.
M. René Régnault.
C'est bien !
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
Les moyens budgétaires viendront financer les
opérations engagées, en particulier les opérations collectives de création, de
restructuration et de transmission d'entreprise - avec les contrats de plan
Etat-région - 23 millions de francs de crédits de paiement et 19 millions de
francs d'autorisations de programme y seront consacrés.
Le report d'un an des contrats de plan Etat-région, qui est le fait du
gouvernement précédent, ne met en aucun cas en danger les programmes pour
lesquels l'Etat s'était déjà engagé. En revanche, nous avons un peu plus de
temps pour préparer le nouveau contrat de plan. Je pense que les TPE, les PME
et le commerce en milieu rural, par exemple, seront au centre des nouveaux
dispositifs proposés.
M. René Régnault.
Très bien !
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
Je souhaite, par ailleurs, que, par bassin d'emploi,
les chambres de commerce et d'industrie et les chambres de métiers utilisent
les emplois-jeunes pour diffuser leur savoir-faire technologique aux
entreprises et pour faciliter, à terme, leur intégration dans le secteur privé
avec des contrats pérennes.
Il faut que nous soyons d'accord sur l'interprétation de ces emplois-jeunes.
Tout à l'heure, certains ont dit qu'il s'agissait essentiellement d'emplois
publics. Dans notre esprit, il s'agit d'emplois qui concernent des secteurs où,
actuellement, les entreprises privées ne sont pas présentes ou sont peu
présentes. Nous souhaitons développer une demande pour que l'entreprise privée
puisse ensuite fournir l'offre. Vous le savez, parmi les contrats conclus entre
les collectivités territoriales et l'Etat, certains précisent que d'ici à deux
ou trois ans au maximum les jeunes concernés ont l'intention de créer leur
propre entreprise de service. C'est cet esprit qu'il faut encourager. Les
chambres de commerce et d'industrie agissent déjà dans cette voie et nous
devons maintenant inciter les chambres des métiers à le faire.
A cet égard, je salue l'action des chambres consulaires avec le dispositif «
Entreprendre en France », qui regroupe actuellement plus de cent soixante «
Espaces Entreprendre », avec vingt-deux partenaires publics et privés. Je salue
leur coopération avec le réseau FIR, France initiative réseau.
Ces moyens relatifs aux actions économiques territoriales seront confortés par
ceux du FISAC, qui seront augmentés.
L'action de cet outil essentiel de la politique en faveur du commerce et de
l'artisanat sera - et vous avez raison de le demander - réorientée.
Un diagnostic objectif des projets sera effectué sur le bassin d'emploi
concerné, afin de mieux analyser l'impact des opérations sur l'emploi et sur
l'environnement économique. La cohérence territoriale des opérations doit être
systématiquement recherchée.
Le FISAC contribuera, notamment, à la redynamisation urbaine du commerce et de
l'artisanat, avec un traitement global des dossiers - foncier, financier,
commercial et artisanal - avec l'ensemble des partenaires : commerçants et
artisans, bailleurs et financeurs, élus des collectivités.
Afin de renforcer la complémentarité des outils, l'EPARECA, l'établissement
public d'intervention foncière prévu par le pacte de relance de la ville - vous
avez raison de demander où en est cet organisme - permettra, avec 130 millions
de francs, de soutenir, par cofinancement, des actions de restructuration
urbaine s'appuyant sur la relance du commerce et de l'artisanat dans les
quartiers difficiles. Son installation va enfin prochainement s'effectuer,
maintenant que les nominations des représentants du Parlement, que nous
attendions, sont intervenues.
En matière de commerce aussi, j'ai voulu donner aux territoires les moyens de
soutenir un développement harmonieux des différentes formes de commerce.
En matière d'urbanisme commercial, mon action est guidée par trois objectifs :
responsabilité, transparence et concertation.
Le premier objectif est celui de la responsabilité.
Les acteurs locaux, les membres des commissions départementales d'équipement
commercial doivent se saisir pleinement de leurs responsabilités et apprécier
un équipement commercial d'abord par rapport à une zone de chalandise. Ce sont
aux acteurs locaux de mesurer les conséquences des projets qui leur sont
soumis. J'ai souhaité aussi exprimer le profond respect que j'ai pour le
travail des élus locaux et la maîtrise qu'ils ont des équilibres économiques de
leur territoire.
M. René Régnault.
Merci pour eux !
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
Le deuxième objectif est celui de la transparence.
Les préfets examineront les dossiers d'équipement commercial, pour pouvoir les
inscrire à l'ordre du jour, en tenant particulièrement compte des questions
liées à l'urbanisme, à l'environnement mais aussi et surtout à l'emploi. Je
viens de leur adresser une directive en ce sens.
Ainsi que l'a annoncé M. le Premier ministre, l'actuel Observatoire de
l'équipement commercial va être remplacé par l'Observatoire national du
commerce, qui sera chargé de suivre notamment l'évolution de l'emploi dans le
commerce.
D'ici à la fin de l'année, un rapport sur l'état d'avancement des
expérimentations des schémas d'équipement commercial ouvrira un débat sur ce
thème au Parlement.
Le troisième objectif est la concertation : mener une politique en vue d'une
saine complémentarité des formes de commerce signifie aussi développer une
meilleure coopération entre les différentes fonctions du commerce, à savoir les
grands commerces, les commerces de proximité, la grande distribution, les
grossistes et les producteurs.
Vous parliez tout à l'heure des relations entre les entreprises ; il faut à
mon avis se poser tous ensemble et très sérieusement la question de la
répartition de la valeur ajoutée entre elles, des producteurs jusqu'aux
distributeurs. Si le Gouvernement ne réglera pas le problème, il pourra en tout
cas y aider par la médiation.
Engager des formes de coopération à long terme entre distributeurs grossistes
et commerçants implantés tant en centre-ville qu'en zones rurales est
essentiel. Les conditions d'approvisionnement de ces derniers sont au coeur de
cette coopération. Le sujet se pose avec une acuité particulière, et il ne peut
être exclu de la politique que j'entends mener sur le commerce.
En ce qui concerne enfin la consommation, il nous faut ensemble assurer le
rétablissement de la confiance, laquelle, lorsqu'elle est mise à mal, provoque
une chute de la consommation et donc des résultats de nos entreprises.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget, vous a présenté le projet
de budget de la consommation. Il s'agit d'un secteur étroitement lié à l'action
menée en faveur des entreprises.
La compétitivité par les coûts a trop longtemps occulté la compétitivité par
la qualité et la confiance. La qualité des produits et des services, le respect
du contrat, le règlement des litiges dans des délais acceptables, mais aussi
les questions d'environnement, de transport, de logement ou de santé font
partie de la vie quotidienne. C'est en ce sens que la consommation peut
stimuler la croissance et l'emploi. C'est elle qui, en créant la demande
intérieure, peut alimenter l'investissement, la croissance et donc l'emploi.
Avec un budget de 25 millions de francs, la problématique de l'Institut
national de la consommation, l'INC, tient essentiellement à son positionnement
futur. Tout au long des dernières années, nous avons en effet assisté à une
évolution de ses activités et de ses moyens, et, lors de ma prise de fonction,
c'est un institut en difficulté, voire en grande difficulté, que j'ai
trouvé.
Manifestement, cette situation tient à un problème de positionnement des
missions de cet établissement dans le mouvement des consommateurs, et, au-delà,
de sa place dans les structures de la consommation.
C'est pourquoi j'ai demandé au groupe de réflexion sur les missions du
ministère de l'économie, des finances et de l'industrie d'intégrer dans ses
analyses l'examen de la situation de l'INC.
Ce qui est vrai de l'INC l'est aussi du mouvement consommateur dans son
entier. Celui-ci est crédité d'un formidable capital de confiance dans
l'opinion publique ; il doit jouer pleinement son rôle de partenaire actif.
Pour ce faire, il doit disposer de moyens financiers lui permettant de faire
face à ses obligations.
La part réservée aux associations dans le projet de budget pour 1998 s'élève à
40 millions de francs, contre 38 millions de francs en 1997, soit une
progression de 5 %.
Pour renforcer encore ces moyens, nous avons décidé, en concertation avec M.
Sautter, d'accroître, pour 1998, cette dotation de 10 millions de francs
supplémentaires, qui témoignent de l'attachement du Gouvernement à l'activité
des associations de consommateurs.
Enfin, il faut rétablir la confiance des consommateurs : c'est le sens de la
création d'une agence de la sécurité sanitaire, dont vous avez déjà ici
débattu. Il faut impérativement établir une chaîne ininterrompue
d'identification des produits ; c'est un combat pour lequel je serai
intransigeante.
Comme l'a souligné M. le Premier ministre, la société de l'information
constitue un enjeu décisif et figure parmi les priorités d'action du
Gouvernement. Nous devons être présents dans ce domaine-là également.
C'est dans ce contexte que M. le ministre de l'économie, des finances et de
l'industrie et l'ensemble des secrétaires d'Etat, dont moi-même, se sont
investis sur la question du commerce électronique, afin d'établir, d'ici à la
fin de l'année, un plan d'action précis. Cette réflexion sera enrichie par les
travaux que nous ont remis, la semaine dernière, les membres du Conseil
national de la consommation. Vous savez en effet qu'il est important de faire
attention non seulement aux conséquences de cette nouvelle forme de commerce,
mais aussi aux droits des consommateurs quand ils achèteront en dehors de leur
pays.
Enfin, la question du surendettement affecte directement nombre de personnes
qui vivent une détresse profonde. Là aussi, il faut trouver des solutions. J'y
travaille dans le cadre d'un projet de loi contre l'exclusion qui vous sera
soumis par Mme Martine Aubry, et pour lequel l'ensemble des ministres et
secrétaires d'Etat concernés - M. Louis Besson pour le logement, Mme Elisabeth
Guigou pour les aspects de droit, et moi-même pour le surendettement -
disposeront de textes précis, enrichis d'ailleurs par les débats du Conseil
national de la consommation de la semaine dernière.
Il est de la responsabilité de l'Etat, en particulier de l'action que je mène
avec M. Dominique Strauss-Kahn, et, au-delà, de la collectivité tout entière de
faire que les PME, le commerce et l'artisanat de demain soient un élément
moteur du paysage économique français et européen, assurant pleinement leur
place dans les évolutions en cours. C'est avec conviction que je mènerai mon
action afin que s'accomplissent ces mutations en faveur d'un progrès économique
qui sera aussi un progrès social.
La qualité des produits, la confiance des consommateurs seront de plus en plus
déterminants pour la conquête et le maintien des marchés tant en France qu'à
l'étranger.
La politique que je vous propose, mesdames, messieurs les sénateurs, est donc
avant tout l'expression d'une passerelle entre les contraintes imposées par la
macroéconomie et une réponse offensive s'appuyant sur la microéconomie.
Il est du rôle de l'Etat de faciliter, d'accompagner la création d'activités.
Il lui appartient aussi de faire progresser les grands enjeux, la construction
européenne, la création d'emploi par le partage du temps de travail.
Devant l'Assemblée nationale, j'ai affirmé que, si un seul artisan s'estime
encore méprisé ou oublié, c'est un échec collectif ; j'ai aussi affirmé que les
entreprises ne demandent pas un assistanat permanent, et je maintiens mes
propos.
Je maintiens également qu'il nous faut tous nous projeter vers l'avenir et
nous approprier dès maintenant les techniques - je pense notamment au commerce
électronique - les outils d'organisation, les éléments de sécurisation des
productions, le maniement de l'euro, qui assureront le futur de nos
entreprises.
Mais il faut dans le même temps s'assurer de ne pas laisser au bord du chemin
les plus fragiles d'entre nous. Il faut donner à chacun de nos jeunes une
chance dans la société économique de demain. C'est pourquoi chaque créateur
doit pouvoir disposer des moyens de réaliser son projet, et chaque territoire
doit pouvoir s'organiser pour développer ses richesses.
J'en viens maintenant à quelques points particuliers évoqués cet
après-midi.
M. le président.
Madame le secrétaire d'Etat, permettez-moi de vous rappeler que, lors de la
dernière conférence des présidents, le Gouvernement a accepté de limiter son
temps de parole à vingt minutes. Or, vous parlez depuis déjà quarante
minutes.
Mme Marylise Lebranchu,
secrétaire d'Etat.
Je n'avais pas la même information, monsieur le
président, et je vous prie donc de bien vouloir m'excuser. Je termine
rapidement mon propos.
S'agissant de la CSG, le plafond est non pas de 165 000 francs, mais de 250
000 francs. Je transmettrai des informations plus détaillées aux sénateurs
ayant posé cette question.
En ce qui concerne les carburants, je suis consciente du problème ; mais ce
sont les professionnels qui n'ont pas pu se mettre d'accord sur la composition
de leur comité.
Quant au 1 % hors médias, rien n'est arrêté ; nous devrons donc y oeuvrer tous
ensemble.
J'en viens aux exonérations pour l'installation la première année. Compte tenu
de la diminution de près de 50 % du plafond de cotisations, la première année,
ce dispositif paraît plus intéressant que l'exonération de 30 % instaurée par
M. Madelin.
J'en viens enfin à la déconcentration du FISAC. J'indiquerai simplement que la
concentration actuelle nous permet d'avoir une vue cohérente de l'ensemble de
ce qui se passe ; or, s'agissant des grands bassins d'emplois, nous avons
besoin de cette cohérence.
En revanche, je ne suis pas opposée à une déconcentration des toutes petites
enveloppes. Mais nous en discuterons à la fois avec vous, avec les services et
avec nos partenaires, car le Gouvernement n'est pas le seul à intervenir dans
la gestion du FISAC.
Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les éléments de réponse que je
souhaitais vous apporter.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant aux états B et
C et concernant l'économie, les finances et l'industrie : IV. - Petites et
moyennes entreprises, commerce et artisanat.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : moins 1 320 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
« Titre IV : 5 951 920 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre IV.
(Ces crédits sont adoptés.)
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 300 000 francs ;
« Crédits de paiement : 300 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 18 770 000 francs ;
« Crédits de paiement : 5 630 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre VI.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant les petites et moyennes entreprises, le commerce et l'artisanat.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques
instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures vingt-cinq, est reprise à dix-sept
heures trente.)
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 1998, adopté
par l'Assemblée nationale.
Equipement, transports et logement (suite)
III. - LOGEMENT
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
l'équipement, les transports et le logement : III. - Logement.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Henri Collard,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les crédits du logement pour 1998, d'un
montant de 39,8 milliards de francs, régressent légèrement, de 1,3 %.
Toutefois, cette réduction est purement optique. En effet, si l'on tient
compte de l'appui des comptes spéciaux du Trésor, soit 7 milliards de francs
destinés au logement en 1998, les crédits sont en augmentation de 6,4 % et
s'élèvent à 47,7 milliards de francs. Si l'on tient compte des dépenses
fiscales relatives au logement social, avec le taux réduit de la TVA à 5,5 %
sur la construction et la réhabilitation, dépenses qui sont des substituts à
des aides à la pierre, l'augmentation est même de 13,6 %, le budget total se
montant à 52 milliards de francs.
Un effort considérable est donc réalisé en faveur du logement dans le budget
pour 1998. C'est pourquoi, mes chers collègues, je peux dès à présent vous dire
que la commission des finances a adopté les crédits du logement sans les
modifier. Cela étant, cela ne veut pas dire qu'elle n'a pas formulé
d'observations.
Ces crédits répondent au souci exprimé par la commission de voir se réduire
tant les dépenses publiques que les prélèvements obligatoires.
Deux priorités se dégagent de ce budget : les aides à la personne et le
logement social.
La première, les aides à la personne, est l'effet d'une contrainte plus que
d'un choix. Depuis le début des années quatre-vingt-dix, tous les budgets du
logement ont subi la pression des aides personnelles, dont la progression
rapide est liée à celle du nombre de ménages bénéficiaires. Leur coût est ainsi
passé de 19 milliards de francs en 1991 à 32 milliards de francs en 1997.
La seconde priorité, le logement social, résulte d'une option claire du
Gouvernement en faveur du logement locatif social de préférence à l'accession à
la propriété.
Un effort très substantiel est réalisé en faveur du logement social. Je le
rappelle, le précédent gouvernement avait engagé cette action dans la loi de
finances pour 1997, en abaissant le taux de la TVA à 5,5 % en faveur du
logement locatif neuf.
Pour 1998, l'effort porte particulièrement sur la réhabilitation.
L'application du taux réduit de la TVA aux travaux effectués sur les logements
sociaux s'accompagne d'une réduction corrélative de la prime PALULOS, prime à
l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale, dont le
taux passe de 20 % à 10 %. Toutefois, comme le taux réduit s'appliquera
également aux travaux financés sur fonds propres, l'avantage fiscal procuré aux
organismes peut être estimé à 1,3 milliard de francs, sans faire l'objet d'une
réduction de crédit correspondante. Le Gouvernement espère ainsi financer 120
000 PALULOS. Il souhaite aussi obtenir des organismes d'HLM qu'ils accélèrent
les procédures et qu'ils créent des emplois, notamment de gardiens d'immeubles
dans les zones urbaines difficiles.
Le Gouvernement entend également utiliser ce surcroît de moyens pour le
financement de la construction sociale. Il s'agit surtout de diversifier
l'offre de prêts locatifs aidés très sociaux, les PLA-TS. En effet,
l'expérience montre qu'il est difficile de réaliser les programmes physiques
initialement décidés. Pour tenter de remédier à cette situation, les
subventions seront majorées pour 10 000 PLA-TS.
Par ailleurs, un programme de 5 000 PLA « reconstruction-démolition » sera
engagé. Il devrait s'agit de prêts locatifs aidés bénéficiant du taux de TVA
réduit et subventionnés à hauteur de 50 000 francs afin de démolir les
logements sociaux vétustes ou devenus inadaptés à la vie urbaine.
L'importance de cet effort devrait permettre la réalisation des programmes
physiques prévus. La commission des finances considère que la réduction du taux
de TVA sur la réhabilitation des logements est une solution d'avenir et
approuve cette réforme. Nous pourrons cependant aller plus loin et la
généraliser à l'ensemble du secteur.
J'observe qu'à l'occasion du récent sommet de Luxembourg sur l'emploi, la
Commission européenne a décidé de proposer au Conseil des Quinze d'expérimenter
l'application du taux réduit sur l'ensemble des travaux de « rénovation et de
réparation des logements, à l'exception de la construction ». La formule a
retenu notre attention et comme nous l'espérons, la vôtre, monsieur le
secrétaire d'Etat. Cette proposition non seulement pourrait avoir des effets
très bénéfiques pour l'économie et l'emploi, mais aussi favoriser le
rééquilibrage entre le logement neuf et le logement ancien. Je souhaite que
cette proposition aboutisse et que le Gouvernement s'engage dans cette voie.
En revanche, contrairement au souhait général des Français, qui sont nombreux
à désirer devenir propriétaires de leur logement, surtout d'un logement
individuel, l'accession à la propriété ne paraît plus être une priorité du
Gouvernement, et l'avenir du prêt à taux zéro ne peut que susciter les plus
grandes inquiétudes.
Rappelons seulement qu'en 1996 140 000 prêts à taux zéro ont été accordés,
dont 60 000, c'est-à-dire près de la moitié, à des accédants disposant d'un
revenu annuel de 100 000 francs, c'est-à-dire moins de 8 500 francs par mois !
On le voit, il s'agissait donc d'une véritable accession sociale. Ces moyens
risquent d'être diminués, et nous le regrettons.
Le projet de loi de finances pour 1998 amplifie le processus tendant à
restreindre la portée de ce prêt réglementé, processus qui, il faut le
reconnaître, s'était engagé dès le budget de 1997, avant l'entrée en fonction
de l'actuel gouvernement, avec la création d'un compte d'affectation spéciale
financé par le 1 % logement et le relèvement de la quotité de travaux
nécessaire.
Les modifications réglementaires associées aux crédits prévus par le présent
projet de loi de finances vont encore accroître les difficultés à la
construction.
Le prêt à taux zéro sera désormais réservé aux primo-accédants, qui comptent,
certes, pour 90 % des souscripteurs, mais de façon non homogène sur l'ensemble
du territoire. La marge accordée aux établissements de crédit sera réduite et
passera de 1,3 % à 1,0 %, ce qui rendra plus difficile encore l'accès aux
crédits pour les détenteurs de revenus modestes.
La subvention en faveur des accédants les plus modestes sera également réduite
puisque les différés d'amortissement les plus longs, qui concernent les ménages
aux revenus les plus bas, sont raccourcis d'un an et demi, passant de dix-sept
ans à quinze ans et demi.
La convention passée par l'Etat avec la participation des employeurs à
l'effort de construction pour le financement de l'aide - d'un montant, je le
rappelle, de 7 milliards de francs - est écornée, en outre, par deux
prélèvements : l'un de 500 millions de francs en faveur du fonds national
d'aide au logement, pour financer l'APL-accession ; l'autre de 260 millions de
francs, pour financer la garantie des prêts d'accession sociale.
Par ailleurs, et la commission des finances le regrette fortement, le
dispositif de sécurisation des accédants - initialement prévu en faveur des
emprunteurs les plus modestes, qui complètent leur prêt sans intérêt avec un
prêt d'accession sociale - n'est toujours pas mis en place. Or ce dispositif
était considéré par le précédent ministre du logement comme le complément
indispensable de sa réforme, compte tenu de la fragilité financière des ménages
susceptibles de postuler au prêt à taux zéro.
Enfin et surtout, malgré un effort du 1 % logement très supérieur en 1998 à ce
qui était attendu, le financement du prêt à taux zéro n'est pas assuré pour
l'année 1999. Or cette impasse de financement fait bon marché de la suppression
des dépenses fiscales associées à l'ancien prêt d'accession à la propriété
décidée par la loi de finances pour 1996. Cette suppression était destinée à
équilibrer le financement de la nouvelle avance.
Je le répète, le choix résidentiel de la très grande majorité des Français se
porte non pas sur le logement locatif social, mais sur l'accession à la
propriété, en particulier l'acquisition d'une maison individuelle. La
commission des finances a toujours été attentive, quoique réservée, à
l'accession à la propriété des ménages les plus modestes, pour des raisons
financières, mais aussi en raison de contraintes de mobilité professionnelle ou
familiale. En revanche, elle considère qu'il est malsain de ne pas mettre à la
disposition des aspirants à l'accession un dispositif complet d'aide publique
qui leur permette d'accéder à la propriété sans risque excessif, et d'une
manière qui préserve les chances de chacun.
Je ne peux qu'accorder foi à votre volonté, monsieur le secrétaire d'Etat, de
conserver un dispositif efficace d'aide à l'accession sociale à la propriété.
Le problème important et urgent à résoudre sera celui du financement du prêt à
taux zéro. Différentes solutions peuvent être étudiées. On peut envisager une
rebudgétisation, au moins partielle, qui tienne compte des économies réalisées
par la suppression des dépenses fiscales. Il sera probablement nécessaire de
faire à nouveau appel au 1 % logement. Un retrait immédiat et total de son aide
paraît exclu ; une sortie progressive s'imposera vraisemblablement. Par
ailleurs, une contribution de l'épargne-logement peut également être envisagée,
par reconversion de la prime d'épargne non assortie d'un prêt destiné à
l'acquisition d'un logement.
D'autres manières de solliciter l'épargne administrée peuvent aussi être
considérées. On pourrait, par exemple, utiliser les surplus du livret A,
actuellement reversés au budget général. Chaque solution nous paraît
insuffisante en elle-même. Il faudra recourir à plusieurs d'entre elles si l'on
ne veut pas que les prêts à taux zéro connaissent le même sort que les prêts
aidés pour l'accession à la propriété, les prêts PAP.
J'éprouve une satisfaction mitigée face au relèvement du barème des aides
personnelles au logement intervenu le 1er juillet dernier.
Satisfaction, certes, car la commission des finances s'était opposée avec
constance au gel des barèmes dès juillet 1993, considérant que ce n'était pas
la bonne méthode pour réaliser des économies. Un tel dispositif frappe en effet
tous les allocataires sans discernement, augmentant les taux d'effort des plus
modestes.
Le relèvement des barèmes au 1er juillet 1997 est de 3,4 % en moyenne, ce qui
représente 2,1 % de hausse de pouvoir solvabilisateur des aides sur un an,
c'est appréciable.
Le Gouvernement prévoit d'actualiser les barèmes le 1er juillet 1998, de façon
à maintenir le pouvoir d'achat des aides sans l'augmenter. Il a prévu, à cet
effet, 500 millions de francs de provision dans le présent budget.
Toutefois, estimant qu'il est hautement souhaitable de comprimer les dépenses
d'aide à la personne, la commission des finances s'est toujours prononcée pour
une uniformisation de ces aides en fonction des niveaux de ressources - et non
en fonction de leur nature - sans favoriser les ménages les mieux logés et en
évitant de dispenser des prestations à des ménages qui n'en ont pas besoin. Or
il nous faut constater qu'aucun effort de rationalisation n'est entrepris en ce
sens.
Au-delà du maintien souhaitable du pouvoir solvabilisateur des aides à la
personne, je ne peux qu'appeler à la poursuite de l'oeuvre de réforme de ces
aides, que le précédent gouvernement avait entreprise avec la fusion des deux
barèmes de l'aide personnalisée au logement.
Je terminerai par une observation sur le parc privé.
L'aide au parc des logements privés, qu'ils soient loués ou occupés par leur
propriétaire, est à peu près maintenue par le présent projet de budget.
La prime à l'amélioration de l'habitat, dont les crédits disponibles se sont
élevés à 900 millions de francs en 1997, est dotée de 800 millions de francs en
1998 et profitera aux logements encore inconfortables en zone rurale.
Les crédits de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat sont
maintenus à 2,2 milliards de francs. Je vous rappelle sur ce point que l'ANAH
lutte au quotidien contre ces deux fléaux que sont l'exclusion et la vacance,
en majorant les taux de subvention aux bailleurs qui acceptent des locataires à
revenus modestes. J'ajoute d'ailleurs qu'elle n'est pas la seule, puisque les
collectivités locales en font général autant.
Enfin et surtout, on ne peut détacher cette analyse de celle des prélèvements
fiscaux qui en constituent l'environnement. C'est notre grand regret !
La réduction d'impôt pour intérêts d'emprunt, qui expire fin 1997, n'est
remplacée par aucun dispositif équivalent. Le crédit d'impôt pour dépenses
d'entretien et de revêtement ne saurait faire office de véritable substitut à
une réduction du taux de la TVA ! Et je rappelle que la taxe additionnelle au
droit de bail s'élèvera à 3,55 milliards de francs en 1998, soit un écart de
prélèvement de 1,35 milliard de francs avec les crédits accordés à l'ANAH.
Le plus préoccupant vient cependant de la loi de financement de la sécurité
sociale. En effet, l'augmentation de 4,9 % à 10 % des contributions sociales
sur les revenus fonciers constitue un prélèvement supplémentaire de l'ordre de
4 milliards de francs à 5 milliards de francs. Comment ne pas considérer cette
pression comme dissuasive de l'investissement en logements, au moment où M. le
secrétaire d'Etat explique qu'il est nécessaire de créer une nouvelle
génération de bailleurs privés à vocation sociale ?
M. Jean Chérioux.
C'est tout à fait juste !
M. Henri Collard,
rapporteur spécial.
En l'occurrence, une bonne intention, que la
commission des finances du Sénat ne peut que saluer, se heurte malheureusement
à une réalité brutale.
A l'issue de ces observations, je vous rappelle, mes chers collègues, que la
commission des finances préconise l'adoption des crédits du secrétariat d'Etat
au logement. Bien sûr, je l'ai dit, ces crédits ne sont pas exempts de
critiques, mais ils témoignent d'un effort imaginatif en faveur du logement et,
surtout, ils montrent qu'il est possible de pratiquer une politique de
réduction conjointe des dépenses et des prélèvements obligatoires. Pour ma
part, monsieur le secrétaire d'Etat, j'encourage le Gouvernement à poursuivre
dans cette même voie.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Je vous remercie, monsieur le rapporteur spécial, d'avoir scrupuleusement
respecté votre temps de parole.
La parole est à M. Chervy, rapporteur pour avis.
M. William Chervy,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous pouvez être satisfait de votre projet
de budget car, outre que vous avez obtenu l'augmentation de vos moyens
budgétaires, vous avez défini des orientations qui devraient soutenir la
relance du secteur du bâtiment, même si certaines décisions adoptées récemment
suscitent de notre part des interrogations, voire des réserves.
Je soulignerai que, pour avoir une vision complète de l'effort budgétaire en
faveur du logement, il faut tenir compte, outre du produit des comptes
d'affectation spéciale, des dépenses fiscales relatives au logement social, qui
constituent des substituts aux aides à la pierre.
Le montant des dépenses budgétaires et fiscales en faveur du logement s'élève
alors à 51,3 milliards de francs, soit une augmentation d'environ 13 %, ce qui
est remarquable.
S'agissant des aides à la personne, dont les crédits augmentent de 9,8 %, il
semble que la réforme engagée par le précédent gouvernement au 1er avril 1997
ne pèse pas de façon significative sur les ménages modestes, et je rappellerai
que l'actualisation et la revalorisation des barèmes décidée au 1er juillet
représente 2,9 milliards de francs en année pleine.
Je me félicite, à ce sujet, que le Gouvernement s'engage à actualiser
régulièrement le niveau de cette allocation, mais je pense qu'il faut engager
une réflexion sur les correctifs à apporter à certaines aberrations de ce
dispositif d'aide, qu'il s'agisse de l'allocation de logement versée aux
étudiants ou, plus généralement, de la prise en compte des revenus d'activité
ou de remplacement dans le calcul de l'aide.
A propos du logement social, il faut se féliciter de ce que le dispositif
prévu par le précédent gouvernement pour la construction de logements sociaux
soit étendu aux travaux de réhabilitation et de rénovation subventionnés ou
financés sur fonds propres des organismes d'habitation à loyer modéré.
La baisse du taux de TVA à 5,5 % permet d'améliorer le financement des prêts
locatifs aidés très sociaux, les PLA-TS, et d'en diversifier l'offre.
Toutes les conditions sont maintenant réunies pour que l'ensemble des acteurs
économiques locaux, notamment les offices d'HLM, s'engagent de façon effective
dans un véritable programme de réhabilitation de leur parc immobilier.
Je voudrais également souligner tout l'intérêt de l'expérimentation des PLA-TS
pour des opérations de reconstruction-démolition car, dans bien des cas,
l'opération est moins coûteuse qu'une réhabilitation lourde et ses effets sont
très positifs pour les populations logées et pour l'image des quartiers ainsi
remodelés.
S'agissant de la définition des logements sociaux pouvant bénéficier de ce
taux de TVA réduit, je souhaite, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous
confirmiez la réponse faite par M. Christian Sautter lors de l'examen de
l'article 11 du projet de loi de finances pour 1998 : selon lui, cette mesure
inclut, au-delà du parc immobilier des HLM, tous les logements locatifs dès
lors qu'ils font l'objet d'une convention avec l'Etat ouvrant droit à l'aide
personnalisée au logement.
Je me félicite également de l'attention portée par les pouvoirs publics au
logement privé, notamment grâce aux majorations de dotations décidées en
juillet 1997 et reconduites pour 1998, tant sur la prime à l'amélioration de
l'habitat que pour l'agence nationale pour l'amélioration de l'habitat. Il faut
également souligner que le mécanisme de l'amortissement accéléré prévu jusqu'au
31 décembre 1998 n'est pas remis en cause, ce qui devrait favoriser la
construction de 30 000 logements par an.
Néanmoins, certaines des orientations prises en matière de logement suscitent,
au sein de la commission des affaires économiques et du Plan, des
inquiétudes.
D'une part, il s'agit des restructurations décidées par le décret du 30
octobre 1997 sur les conditions du prêt à taux zéro, qui ont été jugées
inacceptables par la commission parce que ne tenant aucun compte de l'évolution
des structures familiales pour des raisons d'accroissement naturel ou de
recomposition intervenue à la suite d'une séparation ou d'un décès.
D'autre part, il semble très inquiétant, pour l'avenir du 1 % logement,
qu'aucune solution pérenne ne soit encore définie pour prendre place à partir
du 1er janvier 1999.
Il serait en effet tout aussi préjudiciable de devoir interrompre la
distribution des prêts à taux zéro, qui permet aux classes modestes d'accéder à
la propriété - libérant ainsi des logements HLM - que d'en pérenniser le
financement à partir des ressources du 1 % logement, alors que ce mécanisme est
indispensable pour boucler localement des opérations de construction ou de
rénovation de logements sociaux.
La majorité de la commission s'est également élevée contre l'alourdissement
significatif des prélèvements sociaux sur les revenus fonciers, considérant que
cela décourageait l'investissement immobilier privé et fragilisait la situation
de nombre de petits propriétaires privés qui avaient investi dans la pierre
pour compléter des retraites insuffisantes.
Compte tenu des éléments positifs de ce budget, j'avais proposé à la
commission de donner un avis favorable à l'adoption des crédits du logement -
et je suis toujours persuadé que votre budget, monsieur le secrétaire d'Etat
est excellent - ...
M. René Régnault.
Bien sûr !
M. William Chervy,
rapporteur pour avis.
... mais la majorité de celle-ci, pour marquer son
opposition aux modifications apportées au prêt à taux zéro et, surtout,
dénoncer l'alourdissement de la fiscalité sur les revenus fonciers, a émis un
avis défavorable à l'adoption du budget du logement.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées
de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Bimbenet, rapporteur pour avis.
M. Jacques Bimbenet,
rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour le logement
social.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers
collègues, la commission des affaires sociales a examiné les crédits du budget
du secrétariat d'Etat au logement en s'intéressant plus particulièrement au
logement social, qui constitue un maillon essentiel de la chaîne du
logement.
Le logement social ne peut toutefois être apprécié indépendamment des autres
maillons que constituent, en amont, les mesures en faveur des personnes les
plus défavorisées, et, en aval, l'accession sociale à la propriété et les
différentes formes de logement intermédiaire.
Une politique globale et efficace du logement nécessite un effort continu et
bien réparti pour que se conjuguent la solidarité, la promotion sociale et
l'incitation à l'investissement et à la construction.
Au regard de ces différents critères, la commission des affaires sociales a
porté un avis contrasté sur les crédits du secrétariat d'Etat.
Elle se félicite, certes, de l'effort consenti pour poursuivre la
réhabilitation du parc locatif social et la construction de logements locatifs
sociaux, mais elle s'inquiète des menaces qui pèsent dorénavant sur l'accession
sociale à la propriété et l'investissement locatif. Elle s'interroge par
ailleurs sur le contenu des futures dispositions à destination des plus
démunis.
La commission des affaires sociales s'en est donc remise à la sagesse de notre
Haute Assemblée pour l'adoption des crédits de ce secrétariat d'Etat, en
considérant qu'une éventuelle adoption des crédits devait être conditionnée à
des engagements très clairs de M. le secrétaire d'Etat en faveur des plus
démunis, de l'accession sociale à la propriété et de l'investissement
locatif.
Les deux priorités du Gouvernement en matière de logement portent sur le
développement du logement locatif collectif et sur l'augmentation des revenus
de transfert.
L'effort déployé en faveur du logement collectif social concerne à la fois la
construction et la réhabilitation.
La réforme du financement de la construction de logements locatifs sociaux
réalisée par le précédent gouvernement est maintenue. Elle a consisté à
remplacer les subventions par l'application d'un taux de TVA à 5,5 % au prix de
revient des opérations.
Les objectifs de logements financés pour 1998 sont identiques à ceux de 1997,
avec un total de 80 000 opérations, qui comprend 45 000 PLA normaux, 30 000
PLAT-TS et 5 000 PLA-CCF. L'offre des PLA-TS est diversifiée pour pouvoir
s'adapter à l'ensemble des publics.
Pour aider les personnes en difficulté d'insertion, un programme spécifique de
10 000 PLA-TS parmi les 30 000 qui sont programmés pourra bénéficier d'une
subvention majorée. Par ailleurs, pour résoudre les problèmes des quartiers
très dégradés, dans lesquels des réhabilitations sont difficiles, le
Gouvernement a souhaité réserver 5 000 PLA à des opérations de
démolition-reconstruction qui pourraient faire l'objet de formules de
cofinancement avec les collectivités locales. L'effort fourni en matière de
financement de ce programme est important, puisque la dotation des PLA-TS est
quasiment doublée et atteint 1,6 milliard de francs.
L'effort de réhabilitation du parc locatif social constitue le second volet de
l'action en faveur du logement locatif social. Elle repose principalement sur
deux mesures : la poursuite du programme PALULOS et l'abaissement à 5,5 % du
taux de TVA applicable aux travaux réalisés dans les logements sociaux.
L'objectif de réhabilitation de 120 000 logements au moyen des PALULOS, fixé
par la convention du 17 janvier 1995, devrait être atteint ou dépassé en 1997
et 1998, du fait de l'augmentation des crédits.
Par ailleurs, le Gouvernement a étendu l'application du taux réduit de TVA,
décidé en 1997 pour la construction de logements locatifs sociaux, aux travaux
d'amélioration et de réhabilitation des logements sociaux. Le coût de cette
mesure est estimé à 2,2 milliards de francs pour 1998, et à 2,7 milliards de
francs en année pleine. Cette extension du taux réduit de TVA devrait
équivaloir à une baisse d'environ 12 % du montant des travaux.
Il est toutefois regrettable que le dispositif ne s'applique pas à certains
immeubles privés occupés par des personnes modestes, qui auraient également
besoin d'un soutien à la réhabilitation. Cela met en évidence une différence de
traitement grandissante, qui devient problématique, entre le logement social et
le logement intermédiaire.
En outre, il y a un certain paradoxe à mettre en oeuvre une subvention fiscale
dans un contexte marqué par la reprise de l'activité. Il est à craindre en
effet que cette disposition ne se traduise autant par un effet en termes de
volume, de par l'augmentation du nombre de réhabilitations, que par un effet en
termes de prix, les prestataires profitant de la baisse du coût relatif des
travaux pour augmenter leurs marges. En fait, cette disposition apparaît comme
décalée par rapport au cycle conjoncturel ; pour satisfaire pleinement
l'intérêt général, elle aurait dû être mise en oeuvre dans une période de
récession.
L'effort consenti pour la réhabilitation du parc privé est, quant à lui,
maintenu. Il est assuré par le biais de deux dispositifs : la prime à
l'amélioration de l'habitat, la PAH, et les subventions de l'agence nationale
pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH. Par ailleurs, des incitations
fiscales sont prévues sans condition de ressources.
La dotation budgétaire initiale pour la prime à l'amélioration de l'habitat
était de 600 millions de francs en 1997. Le Gouvernement a décidé de mettre en
place, au second semestre de 1997, des crédits pour réhabiliter 100 000
logements supplémentaires.
Une partie de cet effort budgétaire sera consacrée au financement des primes à
l'amélioration de l'habitat, soit une enveloppe de 250 millions de francs, ce
qui portera à 850 millions de francs les crédits réservés en 1997 à la PAH. Au
total, cette dotation permettra d'engager l'amélioration de plus de 80 000
logements, pour près de 1,5 milliard de francs de travaux.
La dotation correspondante pour 1998 s'élève à 800 millions de francs, soit
une baisse de 50 millions de francs par rapport à la dotation revalorisée pour
1997.
La subvention d'investissement de l'ANAH inscrite dans la loi de finances
initiale pour 1997 se montait, quant à elle, à plus de 2 milliards de francs en
autorisations de programme. Dans l'optique du programme supplémentaire de
réhabilitation de 100 000 logements décidé cet été, 200 millions de francs de
plus ont été attribués à l'ANAH.
En 1998, les crédits de l'ANAH seront préservés, puisque la dotation atteindra
2,2 milliards de francs, soit un montant équivalent au total des crédits pour
1997.
Par ailleurs, les incitations fiscales à la rénovation des logements privés
sont maintenues et développées. Pour compléter le dispositif de réduction
d'impôt prévu par l'article 85 de la loi de finances pour 1997, l'article 49 du
projet de loi de finances pour 1998 crée un crédit d'impôt ouvert aux
contribuables propriétaires ou locataires pour les travaux d'entretien et de
revêtement de surfaces réalisés dans leur résidence principale. Le montant des
dépenses engagé est toutefois limité à 4 000 francs pour une personne seule et
à 8 000 francs pour un couple. Le crédit d'impôt correspond à 15 % du montant
des dépenses, soit 600 francs pour une personne seule et 1 200 francs pour un
couple.
Alors que la situation économique de nombreux locataires et accédants à la
propriété continue de se dégrader, le Gouvernement a souhaité augmenter les
revenus de transfert. Le 1er juillet dernier, il a ainsi décidé d'actualiser le
barème des aides personnelles au logement pour un montant de 2,5 milliards de
francs ; en outre, 500 millions de francs sont prévus pour une nouvelle
actualisation au 1er juillet prochain.
On peut regretter que la réforme des aides entreprises par le précédent
gouvernement n'ait pas été, pour l'instant, poursuivie. Cette réforme est
pourtant nécessaire si l'on souhaite renforcer l'équité et l'efficacité du
dispositif d'aides, comme tend à le démontrer un récent rapport du conseil
supérieur de l'emploi, des revenus et des coûts. Les aides personnelles au
logement sont devenues indispensables, mais elles ne doivent pas constituer un
obstacle à l'insertion professionnelle.
Le principal point faible du projet de budget réside dans les menaces qui
pèsent sur l'accession sociale à la propriété et sur l'investissement
locatif.
En effet, des modifications significatives et coordonnées ont été apportées au
dispositif du prêt à taux zéro, qui limitent son champ d'application et
menacent son existence même. En conséquence de ces mesures d'économies
budgétaires, le nombre attendu des opérations devrait baisser de 10 000 unités,
le dispositif s'étant affirmé comme un véritable succès populaire.
Ainsi, le bénéfice du prêt est réservé aux primo-accédants, la marge des
banques est réduite et les délais de remboursement sont modifiés. Cette
évolution illustre la préférence du Gouvernement pour le logement collectif
social, au détriment du logement individuel, qui a pourtant la faveur des
Français. Cette mesure constitue par ailleurs une nouvelle atteinte à la
famille, puisque l'agrandissement des familles constitue une cause importante
de changement de logement et que ce sont précisément les ménages qui cherchent
à agrandir leur maison qui sont visés par la reconfiguration du prêt. Plus
généralement, cette disposition fragilise la « chaîne du logement », dont la
cohérence avait été rétablie depuis quelques années.
L'investissement locatif est également menacé, le Gouvernement ayant annoncé
que le système d'amortissement accéléré, dit « amortissement Périssol », ne
serait pas reconduit au-delà de 1998. Un nouveau dispositif devra sans doute
être imaginé. Le statut du bailleur privé envisagé par M. le secrétaire d'Etat
devra, quant à lui, être précisé. Si la puissance publique devait se porter
caution pour les locataires, cela constituerait un risque non négligeable pour
la dépense publique.
En matière d'aide aux personnes défavorisées, on peut rappeler que le plan
d'urgence de 1995 avait sensiblement amélioré la situation. Le projet de budget
consolide les mécanismes d'aide, qu'il s'agisse du logement temporaire ou des
actions financées grâce au fonds de solidarité pour le logement, le FSL.
Toutefois, les actions nouvelles tardent à être définies, et la commission des
affaires sociales considère que le prochain projet de loi consacré à la lutte
contre les exclusions devrait s'appuyer sur le projet de loi de renforcement de
la cohésion sociale et l'approfondir. A cet égard, le haut comité pour le
logement des personnes défavorisées a fait récemment des propositions qui
mériteraient d'être prises en considération.
Au bénéfice de ces observations, et après avoir souligné que ce projet de
budget comprenait un certain nombre de dispositions dignes d'intérêt, la
commission des affaires sociales a décidé de s'en remettre à la sagesse de la
Haute Assemblée quant à l'adoption des crédits consacrés au logement social par
le projet de loi de finances pour 1998.
(Applaudissements sur les travées du RDSE et de l'Union centriste, ainsi que
sur certaines travées socialistes.)
M. René Régnault.
Soyez positivement sages !
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 31 minutes ;
Groupe socialiste, 18 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 17 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 16 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 12 minutes.
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
logement est l'une des principales préoccupations de nos concitoyens. Bien
entendu, ce constat est vrai tout d'abord pour tous ceux qui en sont privés et
pour les personnes mal logées qui occupent des logements sans confort ou
surpeuplés, et trouver une solution humaine au problème de toutes ces
populations est une priorité. Il est donc urgent de mobiliser, bien au-delà du
seul secteur du logement social, tous les acteurs et tous les dispositifs
existants, jusqu'à la réquisition.
Plus largement, le logement est également un souci pour la plupart des
salariés, pour lesquels il représente une part de plus en plus grande de leur
budget et pour lesquels se loger correctement suppose des efforts, parfois même
des sacrifices. Le logement est non seulement la caisse de résonance des
difficultés sociales, mais peut également être un facteur d'aggravation des
inégalités.
Par conséquent, la politique du logement que l'on entend mettre en place doit
être conditionnée par la réponse à cette préoccupation. Faut-il ou non réserver
le logement social exclusivement aux plus démunis ? Faut-il ou non pérenniser
le désengagement de l'Etat à son égard ? Des organismes de gestion du logement,
dégagés des règles du marché, ont-ils ou non un avenir ? Comment relancer
l'activité du secteur du bâtiment et des travaux publics ?
Les réponses à ces questions, et il y en a bien d'autres, modèleront, pour une
part, le visage que prendra notre société. Vous aviez vous-même, monsieur le
secrétaire d'Etat, inscrit dans la loi de mai 1990, qui porte votre nom, le
droit au logement. Il faut à présent donner une portée concrète à cette
intention.
Le Gouvernement a commencé à réfléchir sur un certain nombre de points
relatifs au logement. Les parlementaires communistes soutiennent cette volonté
de mise à plat des problèmes, mais nous allons plus loin et réclamons qu'une
conférence nationale sur le logement soit organisée par le Gouvernement, en
collaboration étroite avec la population, les associations de locataires, les
élus locaux et nationaux, les organismes gestionnaires et les bailleurs privés
et publics. Ce grand débat permettrait d'engager une réflexion de fond sur ce
thème et devrait déboucher sur des dispositions législatives.
Le projet de loi doit être une manifestation de la volonté du Gouvernement.
Qu'en est-il du projet de budget pour 1998 ? Il nous est présenté en hausse par
rapport à la loi de finances initiale pour 1997, mais il est relativement
stable si l'on tient compte des gels de crédits décidés postérieurement, et
donc des crédits réellement affectés.
Ce projet de budget amorce une évolution par rapport à la politique du
logement qu'avait menée l'ancienne majorité. Pour autant, il ne marque pas
assez clairement un réel changement de cap, même s'il permet d'aborder un
certain nombre de questions, sur lesquelles nous sommes prêts à travailler de
façon constructive.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen saluent toutes les
mesures allant dans le bon sens.
La première est la revalorisation des allocations logement intervenue en
juillet 1997, qu'il est proposé de consolider et de compléter en 1998. Cette
disposition représente un progrès pour les allocataires ; elle peut cependant
passer inaperçue tant la réforme des barèmes, décidée par le précédent
gouvernement et mise en application cette année, écarte un grand nombre de
bénéficiaires. Il est à noter que, dans cette optique, des personnes perdent le
bénéfice de certaines prestations de la caisse d'allocations familiales et sont
privées, par exemple, de l'allocation de rentrée scolaire, bien que leurs
ressources n'aient pas évolué.
Il conviendrait, monsieur le secrétaire d'Etat, d'établir un bilan précis du
nombre des bénéficiaires de l'APL, qui ne cesse de croître. Cette logique,
encore privilégiée aujourd'hui, du choix de l'aide à la personne au détriment
de l'aide à la pierre a été introduite, dès 1977, par la loi « Barre ».
Conjuguée avec le niveau des taux d'emprunt consentis aux organismes, elle
s'est traduite par une augmentation significative des loyers. Il n'est en effet
pas rare de constater que des logements PLA sont difficiles à attribuer, du
fait du haut niveau des loyers, associé à des plafonds de ressources très
bas.
Le deuxième point positif de ce projet de budget tient à la diminution du taux
de la TVA sur les travaux d'amélioration et de rénovation financés sur fonds
propres et réalisés par les organismes d'HLM. La portée de cette mesure est
toutefois affaiblie par l'instauration d'une PALULOS moyenne de 10 %, qui
portera préjudice aux organismes, surtout à ceux qui disposent d'un parc
immobilier important dans les zones sensibles. Devant la commission de la
production et des échanges de l'Assemblée nationale, vous aviez avancé,
monsieur le secrétaire d'Etat, l'idée d'une modulation des aides en fonction de
la situation des différents organismes. Un tel système ne risquerait-il pas
d'entraîner des effets pervers, puisqu'il pénalisera les organismes dont la
gestion est saine, et de faire supporter aux locataires le manque à gagner dû à
une diminution de la PALULOS ? Comment vous assurerez-vous que les organismes
jugés en meilleure santé que les autres ne répercuteront pas cette différence
du montant de la subvention sur les loyers ?
La troisième mesure positive concerne l'augmentation des crédits alloués à
l'ANAH et au financement de la prime à l'amélioration de l'habitat.
Enfin, permettez-moi de souligner l'effort consenti en faveur du financement
de 80 000 logements sociaux, même si cet objectif de construction reste très
inférieur aux besoins en constructions nouvelles estimés par l'INSEE. Ce point
revêt une importance particulière, tant il est vrai que le logement social
constitue, à nos yeux, le coeur de la politique du logement.
Toutes ces dispositions nous permettent de qualifier ce projet de budget,
comme l'a fait mon amie Janine Jambu à l'Assemblée nationale, de « dispositif
de transition. »
En effet, des interrogations et des inquiétudes demeurent. Afin de mieux
définir quel type de politique du logement social nous voulons mettre en place,
nous nous proposons de prendre des mesures fortes dans les mois à venir.
Tout d'abord, le surloyer imposé aux locataires et aux organismes pourrait
être abrogé. J'aurai l'occasion d'y revenir au cours de l'examen des titres.
Par ailleurs, nous pourrions rétablir les subventions de l'Etat pour la
construction de logements sociaux PLA, qui ont été supprimées en octobre 1996,
abroger les mesures relatives à l'APL prises par le gouvernement Juppé et mises
en oeuvre à compter du 1er juillet 1997, supprimer les avantages fiscaux
exorbitants liés à l'« amortissement Périssol » et, enfin, renoncer à la
ponction de 7 milliards de francs sur le 1 % logement en 1998, qui engendre une
insuffisance de financement pour les opérations de construction et de
rénovation.
Ces mesures permettraient, dans un premier temps, de revenir à la situation
antérieure à l'accession de la droite au gouvernement, en 1995.
Il conviendrait également de prendre des décisions tendant à faire baisser le
montant des loyers. A cet égard, la baisse des taux des emprunts pour le
logement social, l'allongement des durées de remboursement et un retour à
l'aide à la pierre peuvent constituer des pistes de réflexion. En effet, une
simulation réalisée par l'office d'HLM de Rennes a montré qu'avec un prêt
remboursable sur quarante ans au lieu de trente-deux ans, un taux de 2 % au
lieu de 4,8 % et une subvention à la construction de 50 000 francs, un loyer
peut être ramené de 2 000 francs à 1 200 francs.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai noté votre attachement à la mixité sociale
dans les quartiers. Je partage votre préoccupation. Une telle attitude implique
de ne pas créer des ghettos en destinant exclusivement le logement social aux
plus démunis de nos concitoyens. La revalorisation des plafonds de ressources
pour l'attribution d'un logement social, quelle que soit l'implantation
géographique, doit donc être prévue. En effet, ces plafonds de ressources ne
correspondent plus à la réalité sociale et économique.
Nous reviendrons sur cette proposition à l'occasion d'une intervention sur un
titre lors de l'examen des crédits.
Cette volonté de réaliser la mixité sociale exige également que l'Etat mette
en place un dispositif contraignant visant à assurer la répartition du
patrimoine social dans toutes les communes.
Par ailleurs, on peut s'inquiéter de la multiplication des types de prêts, car
celle-ci conduit à une segmentation du logement.
Si nous nous réjouissons d'une amorce ciblée d'un retour de l'aide à la pierre
pour le PLA-TS, nous craignons que ces différences de financement ne conduisent
à diminuer les coûts, ce qui entraînerait des disparités quant à la qualité.
Or, le logement social, y compris celui qui est destiné aux plus démunis, doit
être appréhendé dans sa globalité, au travers des incidences qu'il génère dans
différents domaines au sein du quartier : équipements alentours - transports,
écoles, commerces - sécurité, environnement, emploi.
S'agissant du parc privé, j'ai pu constater dans plusieurs articles que vous
aviez la volonté de créer un statut du bailleur privé par le biais d'un
conventionnement. Nous n'y sommes
a priori
pas hostiles si cette mesure
est mise en oeuvre au sein d'un budget spécifique. Toutefois, il conviendrait
d'associer l'ensemble des partenaires à cette réflexion et de ne pas
l'envisager comme un palliatif au désengagement de l'Etat.
J'aimerais également connaître l'avis du Gouvernement sur la possibilité pour
les organismes d'HLM de gérer les logements vacants, qui a été évoquée à
l'Assemblée nationale. Nous serions quant à nous plutôt favorables à une
solution tendant à confier aux organismes d'HLM la seule attribution des
logements vacants.
Des questions demeurent à propos de l'accession sociale à la propriété. Quels
seront les outils, les modalités et les intervenants après la disparition du
prêt à taux zéro ?
Je souhaite rappeler que nous sommes attachés à une renégociation de la
contribution des entreprises à l'effort de construction et de logement. Il est
urgent de quantifier les besoins des salariés dans ce domaine et de soumettre
cette collecte à un contrôle démocratique et transparent.
Concernant le fonds de garantie de la caisse de garantie du logement social,
la CGLS, nous avons de vives inquiétudes après l'annonce, dans le collectif
budgétaire, d'un prélèvement de 2 milliards de francs.
La ponction décidée risquerait de placer les collectivités locales en première
ligne dans le jeu des garanties et donc de fragiliser leur position. Cela
représenterait, de plus, une restriction pour la mise en oeuvre des plans
d'aide et de redressement assurés par la CGLS.
S'il est vrai que les réserves du fonds de garantie de la CGLS sont
excédentaires, les sommes thésaurisées doivent servir à une véritable politique
de reconstruction du logement social, à l'aide aux quartiers en difficultés, à
la consolidation des organismes d'HLM.
Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous dire ce qu'il en est
exactement ?
Enfin, concernant le logement des jeunes, il apparaît que certains services
fiscaux veulent assujettir les étudiants logés dans les nouvelles cités
universitaires à la taxe d'habitation. Or la réglementation est claire : les
étudiants logés en résidence universitaire sont exonérés du paiement de la taxe
d'habitation ; ceux qui habitent en HLM, par défaut d'un logement en cité
universitaire, ou dans une résidence-studios, cofinancée et construite en
partenariat avec une société d'HLM, doivent bénéficier de la même mesure.
Par ailleurs, une réflexion devrait être engagée concernant des mesures
spécifiques facilitant le logement des jeunes tant pour l'attribution d'un
premier logement que pour leur installation.
Monsieur le secrétaire d'Etat, les sénateurs du groupe communiste républicain
et citoyen seront attentifs aux réponses que vous apporterez et soutiendront
votre budget.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste
républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, en
hausse de 6,7 % par rapport à 1998, les crédits affectés au logement témoignent
de la priorité accordée par votre ministère aux actions sociales, sans
toutefois négliger les mesures de soutien à l'activité du bâtiment.
Ainsi, concernant les aides à la personne, vous proposez de réévaluer les
barèmes, sans pour autant remettre en question la nécessaire réforme de l'APL
mise en place par votre prédécesseur. La décision est positive.
Vous vous inscrivez encore dans le sillage de votre prédécesseur en maintenant
en vigueur l'amortissement Périssol, qui a largement prouvé son efficacité.
J'en prends acte.
Enfin et surtout, vous faites porter l'effort sur la réhabilitation, tant dans
le secteur social que dans le secteur privé.
Je tiens aussi à saluer l'augmentation des crédits de l'ANAH, qui avaient été
réduits trop fortement ces dernières années. En effet, la subvention
d'investissement dont elle bénéficie augmente de 9,2 % et les crédits de
paiement de 11,2 %. La prime à l'amélioration de l'habitat est également bien
dotée, avec des crédits en hausse de 33,3 %.
Ces mesures sont positives compte tenu du rôle primordial que joue l'ANAH,
tout particulièrement en milieu rural, où la réhabilitation et la remise sur le
marché de logements vacants, souvent inconfortables, est un facteur de
développement local, de redynamisation du tissu économique et de valorisation
du patrimoine architectural. Dans les petits bourgs et dans les villes
moyennes, les aides à la réhabilitation constituent de véritables supports de
l'artisanat.
Le parc social, quant à lui, bénéficie d'un taux de TVA réduit en échange de
l'engagement des organismes d'HLM d'accélérer les travaux de réhabilitation de
leur parc et de créer des emplois-jeunes.
Sur ce point, permettez-moi de vous mettre en garde, monsieur le secrétaire
d'Etat : il est à craindre que ces emplois aidés ne viennent concurrencer les
entreprises du bâtiment et des travaux publics et fausser la concurrence.
Il convient donc d'être extrêmement vigilant, car les mesures que vous
proposez par ailleurs pour relancer l'activité risquent de voir leurs effets
atténués sur un secteur du bâtiment déjà fragilisé. Rappelons, en effet, que ce
secteur connaît une récession depuis 1990 et que, malgré une relative embellie,
800 petites et moyenes entreprises continuent de déposer leur bilan chaque
mois, entraînant avec elles la disparition de 2 500 emplois.
Jusqu'à présent, j'ai souligné les points positifs de votre projet de budget.
Mais vous vous doutez bien que je ne peux continuer ainsi. Je souhaiterais, en
effet, exprimer maintenant quelques inquiétudes et quelques interrogations.
Tout d'abord, permettez-moi d'évoquer l'article 49 du projet de loi de
finances pour 1998, qui prévoit la mise en place d'un dispositif censé abaisser
le coût des opérations de réhabilitation en instaurant un crédit d'impôt à
raison des dépenses d'entretien et de revêtement de surface de l'habitation
principale.
D'une part, vous présentez ce dispositif comme étant équivalent à une
réduction du taux de la TVA à 5,5 %. Il est regrettable, selon moi, que, pour
des raisons communautaires, nous ne puissions procéder à cette baisse de la
TVA, qui aurait apporté une simplification. Je vous invite donc à mon tour à
engager des négociations avec nos partenaires européens sur ce sujet.
D'autre part, le montant des dépenses ouvrant droit à ce crédit d'impôt est
plafonné à 4 000 francs pour une personne seule et à 8 000 francs pour un
couple. Ce plafond me paraît beaucoup trop bas, et ce pour deux raisons.
La première est qu'en dessous de 10 000 francs le bricolage représente les
deux tiers des opérations ; les propriétaires ne font appel aux services de
professionnels que pour les travaux au-delà de ce seuil.
De ce fait, l'effet bénéfique de cette mesure sur l'activité du bâtiment et
quant au travail au noir risque d'être très limité.
La seconde raison tient au fait qu'avec ce seuil de 8 000 francs le crédit
d'impôt aura certainement peu d'influence sur le difficile problème des
copropriétés dégradées, qui, de plus en plus, entrent dans une phase
d'importants travaux d'entretien.
La deuxième interrogation que je souhaiterais formuler a trait au prêt à taux
zéro.
Au-delà de l'inquiétude exprimée par notre collègue M. Henri Collard dans son
excellent rapport à propos des mesures restrictives sur la portée de ce prêt
réglementé, je m'étonne, monsieur le secrétaire d'Etat, que, vous qui êtes
tellement attaché à introduire davantage de justice sociale en faveur des plus
démunis, vous ne mettiez pas en place le filet de sécurité prévu par votre
prédécesseur. En effet, à mon sens, le dispositif est loin d'être une mesure «
gadget ».
En effet, un tel système permettrait d'alléger les mensualités de
remboursement de l'accédant à la propriété touché par le chômage. Je me permets
d'ailleurs de vous rappeler que cette proposition faisait partie d'un programme
électoral.
En troisième lieu, je souhaiterais obtenir des engagements de votre part quant
à l'allocation de logement social pour les étudiants. Comme j'ai déjà eu
l'occasion de le dire l'année dernière, cette allocation a généré, depuis sa
création, une série d'effets pervers : une dérive budgétaire, des inégalités
entre les familles et des inégalités entre propriétaires bailleurs.
Ces constats avaient incité le gouvernement d'Alain Juppé à envisager une
réforme de l'ALS, à l'occasion de l'instauration d'un statut social de
l'étudiant, qui n'a malheureusement pas pu voir le jour.
Malgré le caractère urgent d'une telle réforme, non seulement je n'en ai pas
trouvé trace dans votre projet de budget, mais, en plus, un syndicat
d'étudiants vient d'attirer mon attention sur le fait que la première mesure
prise par vos collègues MM. Claude Allègre et Dominique Strauss-Kahn, dans le
cadre de leur plan social pour les étudiants, a consisté à soumettre les
étudiants logés en cités universitaires à la taxe d'habitation.
Monsieur le secrétaire d'Etat, pourriez-vous rassurer notre Haute Assemblée en
nous apportant des éclaircissements sur les zones d'ombre de votre politique
budgétaire que je viens d'évoquer ?
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Egu.
M. André Egu.
Monsieur le secrétaire d'Etat, votre projet de budget s'inscrit dans une
conjoncture que j'aimerais rappeler. De manière générale, l'activité demeure
faible, que se soit au niveau des transactions dans l'ancien résidentiel ou en
ce qui concerne les transactions sur les bureaux et sur les fonds de commerce.
Reconnaissons cependant que cette activité s'est débloquée par rapport à la
même période de l'année précédente, et ce dans toute la France.
On observe une atonie quasi structurelle des reventes à destination des
investissements locatifs et un marché seulement porté par les acquisitions de
résidences principales, en accession à la propriété essentiellement.
En ce qui concerne les bureaux, l'activité s'est légèrement ranimée, mais on
est loin de la vigueur qui serait un signe de la santé du marché. Les
investisseurs sont toujours bien timides, singulièrement les investisseurs
étrangers.
Les causes sont multiples et méritent qu'on s'y arrête.
Le déblocage des marchés résidentiels est dû essentiellement à deux facteurs
importants : la baisse des prix et celle des taux.
Nous devons, à cet égard, saluer l'action du précédent gouvernement, pour
lequel le logement constituait un levier majeur de la croissance. Pas plus
qu'aucun autre, monsieur le secrétaire d'Etat, vous n'avez l'apanage la volonté
de faire de ce secteur une priorité.
Pour les bureaux et les fonds de commerce, le ralentissement général de
l'économie explique évidemment l'absence de marché vivace.
La fiscalité applicable aux mutations à titre onéreux est la seconde
explication.
Sur des marchés tellement ouverts, il est urgent de réduire la fiscalité et de
l'harmoniser avec celle des pays voisins ou des pays comparables. Vous le
savez, monsieur le secrétaire d'Etat, les droits de mutations à titre onéreux
sont une exception française - encore une ! - qui disqualifie la France auprès
des investisseurs étrangers.
Ils freinent la mobilité résidentielle, donc professionnelle, des ménages. Par
ailleurs, ils ne sont plus compensés depuis longtemps par une inflation forte
et ils pénalisent systématiquement les acheteurs. Enfin, ils sont l'une des
causes les plus importantes de l'insuffisance de la rentabilité locative. En
effet, il faut savoir que les biens d'investissement sont, en moyenne,
conservés pendant une dizaine d'années et, de fait, avec un taux de 10 %, c'est
1 % de la valeur du bien qui vient grever chaque année le taux de rendement.
Pardonnez-moi cette franchise, monsieur le secrétaire d'Etat, mais,
aujourd'hui, les droits de mutation à titre onéreux sont aberrants.
Je viens maintenant parler de l'avenir du prêt à taux zéro, qui suscite les
plus grandes inquiétudes.
Le Gouvernement a clairement annoncé sa volonté de pérenniser l'accession
sociale à la propriété, ce dont je me félicite. A cet égard, deux priorités se
dégagent de votre budget : les aides à la personne et le logement social.
Si la première priorité est davantage l'effet d'une contrainte que d'un choix,
la seconde résulte d'une option claire et délibérée de votre part : de votre
préférence pour le logement locatif social plutôt que pour l'accession à la
propriété.
Pourtant - dois-je vous le rappeler ? - le choix résidentiel de la très grande
majorité de nos compatriotes est non pas le logement locatif social, mais
l'accession à la propriété d'une maison individuelle. Je considère comme une
grave erreur de ne pas mettre à la disposition de ceux qui souhaitent acquérir
leur logement un dispositif d'aide leur permettant d'accéder à la propriété
sans risque excessif. C'est ce qu'avait compris le précédent gouvernement, le
succès du prêt à taux zéro en témoignait.
(Exclamations ironiques sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. Gérard Delfau.
Ça c'est extraordinaire !
M. Henri Collard,
rapporteur spécial.
Très bien !
M. André Egu.
De plus, il me semble que le meilleur moyen de protéger les accédants fragiles
est de leur ouvrir le marché des biens les moins chers, c'est-à-dire les
logements existants. En effet, par définition, ces biens sont proposés à des
prix qui intègrent la décote normale, évitant à l'accédant le risque de revente
à perte en cas de difficulté ou de mobilité. Malgré votre volonté de conserver
un dispositif que tout le monde juge efficace, dispositif d'aide à l'accession
sociale à la propriété par excellence, je constate que le financement du prêt à
taux zéro n'est pas assuré pour l'année 1999.
M. Gérard Delfau.
La faute à qui ?
M. André Egu.
C'est toujours difficile de changer autant de politique !
M. Gérard Delfau.
Il fallait le dire à M. Périssol !
M. André Egu.
Plusieurs pistes existent. Elles ont été envisagées par notre rapporteur
spécial : appel au 1 % patronal, contribution de l'épargne logement ou d'autres
sollicitations de l'épargne administrée.
En outre, le dispositif de sécurisation des accédants, initialement prévu en
faveur des emprunteurs les plus modestes qui complètent leur prêt sans intérêt
avec un prêt d'accession sociale, n'est toujours pas mis en place. Or, il
s'agit d'un élément indispensable compte tenu de la fragilité financière des
ménages susceptibles de postuler au prêt à taux zéro.
Enfin, la restriction des conditions de distribution du prêt et la limitation
du bénéfice aux seuls primo-accédants risquent de casser le rythme naturel des
acquisitions immobilières successives adaptées aux évolutions de la cellule
familiale.
Financement mal assuré, pas de sécurisation, champ d'application de plus en
plus étroit, couverture réduite du risque des établissements de crédits,
solvabilisation moindre des ménages modestes... bref, autant dire que c'est la
fin du prêt à taux zéro.
M. Gérard Delfau.
Hélas !
M. André Egu.
Pourtant, celui-ci était une belle réussite. En octobre 1995, il avait
remplacé le prêt aidé pour l'accession à la propriété conçu selon le même
principe : une bonification d'intérêt. C'est le résultat en quantité qu'il faut
juger. Toutefois deux éléments d'importance le différenciait du PAP : son taux
d'intérêt nul - ce qui ne s'était jamais fait auparavant - et sa beaucoup plus
large diffusion, 144 000 en 1996.
Oui, le prêt à taux zéro a marqué un retour de la politique d'accession à la
propriété vers le logement neuf, relançant très fortement les ventes de petites
maisons neuves situées à la périphérie des villes. Allez-vous mettre un terme
aux rêves et aux espérances qui avaient pu être concrétisés ?
(Rires sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste
républicain et citoyen.)
M. Gérard Delfau.
C'est de la politique fiction !
M. André Egu.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il est un autre sujet de préoccupation : quel
sort allez-vous réserver à l'amortissement Périssol ? Son financement est
assuré jusqu'au 31 décembre 1998. Qu'en sera-t-il après ?
Il semble qu'un statut du bailleur privé le remplacera. Pourtant,
l'amortissement Périssol, depuis sa création, a grandement contribué à soutenir
l'investissement privé. Pourquoi, dès lors, supprimer un système qui a fait ses
preuves ?
Vous dites, pour vous justifier, qu'il faut sortir des mesures conjoncturelles
qui ont des effets sur une courte période. Vous précisez, en outre, qu'une aide
de la collectivité doit avoir une contrepartie sociale. Il semble que vous
recherchiez un dispositif réorientant le mécanisme de l'amortissement vers une
clientèle de propriétaires plus sociale et s'élargissant aux logements anciens
avec gros travaux. Comment financerez-vous cette mesure ? Aujourd'hui rien
n'est prévu à cet effet.
Pour ma part, je crois qu'avant toute chose il faut créer de l'activité. C'est
le point le plus important ! Dans ce domaine, la fiscalité est un puissant
levier. Pourquoi ne pas créer un dispositif fiscal simple et efficace de
réduction d'impôts pour travaux dans les résidences principales et satisfaire
le maximum d'accédants ? Le plafond actuel est manifestement insuffisant et la
liste des travaux éligibles trop restrictive. Ne serait-il pas nécessaire
d'améliorer le sort fiscal et financier du bailleur privé dans l'ancien par
tous les moyens ?
D'abord, comme il est plus facile de faire baisser l'activité que de la faire
remonter, évitons les décisions politiques inquiétantes pour les investisseurs
: taxe d'inhabitation, réquisitions et autre administration du marché...
Il faudrait également inciter à la remise sur le marché de logements vacants.
Ne pourrait-on pas imaginer une exonération des revenus fonciers pendant un an
pour les logements vacants depuis plus d'un an qui seraient remis sur le marché
?
Monsieur le secrétaire d'Etat, je profite de ce débat pour mettre l'accent sur
l'état confus du droit applicable à l'immobilier : les textes sont trop
abondants, ils sont trop complexes et la place accordée au contrat est
insuffisante. Il faut alléger, simplifier et préférer la confiance
contractuelle à la brutalité de la loi.
Enfin, j'insiste sur la nécessaire réglementation des activités immobilières.
Il est temps de moderniser les métiers de l'immobilier afin d'y introduire
compétence, conseil et transparence. Tout le monde y trouvera avantage.
Avant de conclure mon propos, monsieur le secrétaire d'Etat, je reconnais que
certaines mesures vont dans le bon sens...
M. Gérard Delfau.
Quand même !
M. André Egu.
... extension du taux réduit de TVA, dispositif tendant à lutter contre le
travail clandestin, actualisation des aides à la personne, augmentation des
moyens affectés à la réhabilitation.
Pourtant, nous demeurons inquiets pour l'avenir. De nombreuses questions
restent sans réponse, mais je suis persuadé que vous nous apporterez ces
réponses. Vous n'avez pas vraiment résolu certains problèmes cruciaux, mais
nous vous faisons confiance.
Malgré ces quelques réserves, nous ne nous opposerons pas à votre budget et
nous suivrons la commission des finances.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, ainsi que sur les
travées des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Balarello.
M. José Balarello.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
lors du vote du budget de 1997, j'indiquais déjà à votre prédécesseur que le
secteur du bâtiment et des travaux publics était le secteur qui avait le plus
souffert au cours de ces dernières années. En effet, il a perdu près de 190 000
emplois de janvier 1990 à juillet 1996 pour le seul secteur du bâtiment. Cette
hémorragie ne s'est point arrêtée, puisque l'effectif salarié de la
construction a diminué de 8 500 personnes au cours du premier semestre de 1997.
Les estimations, cependant, sont un peu plus optimistes pour 1998.
Cette situation a des conséquences sur les baisses de recettes de TVA, sur les
régimes sociaux et sur les rentrées fiscales.
Si l'on ajoute à cela les dégâts occasionnés à nos finances par les aventures
immobilières des banques nationalisées, le fait que le contribuable a dépassé
le seuil de rupture et que l'euro nous impose une limitation de nos déficits,
il est certain, monsieur le secrétaire d'état, que votre budget est difficile à
établir, alors qu'il devrait avoir un important effet de levier sur
l'économie.
Quels sont les choix budgétaires que vous nous proposez ?
Le budget global du logement diminue en volume, puisqu'il passe de 40,3
milliards à 39,8 milliards de francs. Mais il faut y ajouter ce qui est prévu à
l'article 11 du projet de loi de finances, à savoir la TVA à taux réduit à 5,5
% sur les travaux de réhabilitation effectués dans les logements locatifs
sociaux, cela compensant la baisse des PALULOS, dont le taux passe de 20 % à 10
%.
Nous observons également dans ce budget que, d'année en année, les aides à la
personne connaissent de fortes progressions, qu'il s'agisse des subventions au
FNAL, des subventions au FNH pour le financement des APL ou des participations
de l'Etat au FSL et au fonds d'aide aux accédants en difficulté, puisque le
total s'élève à 32 655 milliards de francs, soit une progression de 9,8 % par
rapport à 1997.
S'agissant de l'APL, monsieur le secrétaire d'Etat, je reviens une nouvelle
fois sur ce que j'ai déjà eu l'occasion de dire à votre prédécesseur à
différentes reprises du haut de cette tribune : en période de non-prospérité
économique, le seul système valable, même s'il est compliqué à remettre en
route, est un système mixte qui fait beaucoup plus appel à l'aide à la
pierre.
D'ailleurs, nous savons tous que l'enveloppe budgétaire de 1997 sera, comme
presque toutes les années, insuffisante pour payer la totalité des aides à la
personne, le manque probable étant de 5 milliards à 6 milliards de francs, et
ce alors même que le taux réel d'effort des familles augmente malgré
l'actualisation du barème intervenue le 1er juillet 1997.
Souvent, en effet, des organismes de logement social pratiquent - je le
déplore - des haussses immodérées alors que les charges locatives
augmentent.
A titre indicatif, je rappelle que, de 1990 à 1996, les prestations versées au
titre des aides personnelles ont augmenté de 46 %, alors que le seul FSL
augmentait de 20 % sur une année entre 1995 et 1996. Il est temps, monsieur le
secrétaire d'Etat, de repenser le système et de l'envisager sérieusement et
sans
a priori
. Ayant été, monsieur le secrétaire d'Etat, rapporteur de
la loi qui porte votre nom, je ne doute que vous aurez cette réflexion avec
nous.
J'ai également noté avec intérêt que vous avez prévu 80 000 PLA et 120 000
PALULOS, dont 10 000 PLA très sociaux bénéficiant d'une subvention majorée de
20 %. En outre, vous étendez la TVA à taux réduit aux travaux de rénovation qui
ne bénéficient pas de la PALULOS.
Bonne initiative, monsieur le secrétaire d'Etat, que celle qui consiste à
créer des PLA démolition-reconstruction en partenariat avec les collectivités
locales, bénéficiant de la TVA réduite et d'une subvention de 50 000 francs.
Il ne faut pas que nous hésitions à démolir certains immeubles mal construits,
devenus invivables et générateurs de violence, surtout lorsqu'ils sont situés
dans des quartiers surpeuplés ; nous en avons des exemples tous les jours. A
Nice, lorsque j'étais président de l'office d'HLM, j'ai décidé de faire
dynamiter une tour d'un grand ensemble situé dans un quartier difficile.
J'avais également décidé de le faire à Vallauris pour une autre tour.
S'agissant du secteur privé du logement, j'ai noté votre volonté de remettre
sur le marché les logements privés inoccupés. Leur nombre exact est difficile à
fixer. La FNAIM recense 800 000 logements qui pourraient être occupés alors que
le rapport de l'INSEE en dénombre deux millions. Il est vrai que les critères
sont différents.
Vous avez donc prévu, et c'est une bonne décision, d'augmenter les crédits de
l'ANAH de 9,2 %, pour les porter à 2,2 milliards de francs, et ceux de la prime
à l'amélioration de l'habitat de plus 33 %, pour les porter à 800 millions de
francs.
A ce propos, je suis persuadé que vous vous opposerez à l'idée avancée par
certains de taxer les logements vacants. En effet, si les particuliers laissent
des logements vacants, c'est toujours ou presque parce que le revenu qu'ils en
tirent est négatif. Aux impayés s'ajoutent les dégâts constatés après le départ
de certains locataires, les impôts locaux, les charges élevées, notamment dans
les copropriétés chauffées collectivement, sans parler des frais de
procédure.
Nous devrions réfléchir, monsieur le secrétaire d'Etat, à un système de
garantie des loyers contre un engagement de modération. Dans certaines régions
d'Allemagne, ce système existe et, compte tenu de la multiplicité des aides que
nous versons, cela ne devrait pas coûter au budget des sommes beaucoup plus
importantes. J'ai lu d'ailleurs dans l'
Information immobilière
d'octobre
1997 que nous partageons sur ce sujet la même conviction.
Après ces deux pistes auxquelles je vous propose de réfléchir en commun,
laissez-moi vous faire part d'un regret : vous avez baissé le nombre de prêts à
taux zéro. Le projet de loi de finances ne prévoit en effet que 110 000 prêts
pour 1998 au lieu de 120 000 en 1997, alors que 145 000 ont été distribués en
1996 à des accédants ayant des ressources inférieures à 15 000 francs par mois,
et ce à concurrence de 78 %.
Je regrette également, car je pense que c'est une erreur, que ce prêt soit
réservé aux seuls primo-accédants. De plus, comme je l'ai déjà dit à votre
prédécesseur M. Pierre-André Périssol, c'est également, à mon avis, une erreur
de ne pas baisser à 20 % le montant des travaux dans le système de prêt à taux
zéro pour l'ancien. Je rappelle que le chiffre d'affaires que les artisans
tirent de l'entretien et de l'amélioration des logements représente 140
milliards de francs hors taxes, soit un chiffre d'affaires plus important que
celui que génèrent les constructions neuves.
Dans cet ordre d'idées, il m'apparaît souhaitable qu'une TVA à un taux
intermédiaire entre 5,5 % et 20,6 %, de préférence nettement plus bas que 20,6
%, soit appliquée aux travaux d'entretien et d'amélioration des logements non
aidés.
Cette mesure serait à même de relancer l'activité du BTP, dont la part dans
notre produit intérieur brut n'a cessé de diminuer pour être parmi les plus
faibles d'Europe : elle représentait 10 % du PIB en 1990 et n'était plus que de
8 % en 1995, selon les chiffres de la confédération de l'artisanat et des
petites entreprises du bâtiment.
Cela éviterait beaucoup de « sans facture », et je ne suis pas certain que le
ministre des finances ne s'y retrouverait pas, car le gisement d'emplois réside
dans les PME-PMI, où les artisans sont très nombreux à être en sous-effectif.
Nous le constatons souvent dans nos communes.
M. Serge Franchis.
C'est vrai !
M. José Balarello.
Autre question, monsieur le secrétaire d'Etat : si, pour 1997 et 1998, le
financement de ce prêt est assuré par un prélèvement de 50 % sur les sommes
perçues par les organismes collecteurs du 1 % logement, et ce à hauteur de 7,4
milliards de francs en 1998, nous ne pouvons ignorer que ce prélèvement, qui
devait être exceptionnel, pénalise non seulement les collecteurs du 1 %, mais
la construction du locatif social, certains collecteurs - j'en connais - ayant
même été obligés en 1997 d'emprunter pour assurer des engagements précédemment
souscrits auprès d'organismes d'HLM.
Mais, en 1999, comment, monsieur le secrétaire d'Etat, arriverons-nous à
soutenir l'accession sociale à la propriété, alors que, contrairement à une
idée reçue, la proportion de propriétaires occupants est seulement de 54 % en
France ? Indiquons qu'elle est de 59 % en Belgique, 66 % en Italie, 67 % en
Angleterre et 78 % en Espagne.
Alors que le Français veut, toutes catégories sociales confondues, devenir
propriétaire de son logement, n'allez pas à contre-courant ! Compte tenu de la
baisse des taux d'intérêt, cela entraîne une dépense budgétaire modérée et
libère de surcroît des logements dans le locatif social.
Je terminerai en attirant encore votre attention sur deux points.
D'une part, les plafonds de ressources appliqués par les organismes d'HLM
doivent être réévalués. L'intégration de personnes à revenu moins modeste dans
le parc HLM permettrait en effet une plus grande mixité sociale.
D'autre part, les surloyers devraient, au contraire, être revus à la baisse
pour éviter les départs de locataires souvent anciens, qui sont remplacés par
des familles dans des situations « lourdes », car ce phénomène crée, nous le
savons tous, des ghettos.
En dernier lieu, monsieur le secrétaire d'Etat, je veux attirer votre
attention sur la situation des associations départementales pour l'information
sur le logement, les ADIL, qui réalisent un travail important dans
cinquante-huit départements et animent près de quatre-vingt-dix centres
d'information.
Or il n'est pas normal que leur financement tienne au bon vouloir des
collectivités locales, la participation de l'Etat étant fonction des
subventions reçues de ces dernières. Je vous suggère donc d'instituer un
financement de l'Etat qui soit fondé sur le nombre d'habitants et les activités
de chaque association.
J'ose espérer, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous tiendrez compte de ces
quelques suggestions.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Vezinhet.
M. André Vezinhet.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, au
moment de prendre la parole, je me souviens des inquiétudes qui furent les
nôtres lors du débat des lois de finances des quatre dernières années, plus
particulièrement des années 1996 et 1997, s'agissant du budget du logement.
Les gouvernements d'alors avaient manifestement décidé de sacrifier le
logement sur l'autel des économies. L'on avait même vu, pour la première fois,
le logement social producteur de recettes dans la loi de finances de 1996 au
titre de la taxation sur les surloyers, ces mêmes surloyers ne prenant un
caractère d'obligation légale que dans une loi votée en janvier 1996, donc
postérieurement à la taxation qui devait les frapper.
Même si le prêt à taux zéro pouvait créer l'illusion d'un soutien à l'activité
du bâtiment et d'une aide à l'accession sociale à la propriété, son financement
était alimenté par l'instauration du prélèvement de la totalité de la collecte
du 1 % sur les exercices 1997 et 1998.
Les temps ont heureusement bien changé. Nous avons noté, monsieur le
secrétaire d'Etat, que, lors du débat à l'Assemblée nationale, en réponse à nos
collègues députés, vous aviez pris l'engagement d'ouvrir prochainement une
réflexion au Parlement sur la taxation sur le surloyer, à laquelle nous restons
opposés, et sur le surloyer lui-même, afin d'en limiter les effets pervers en
matière de mixité sociale.
De la même manière, vous envisagez, dès le premier semestre de 1998, de
proposer au Parlement de débattre sur le dispositif du 1 % et sur les modalités
d'amortissement accéléré en faveur de l'investissement locatif.
Lors de la réunion commune des commissions des affaires économiques et du Plan
et des affaires sociales du Sénat, vous nous avez demandé de vous faire des
propositions à cet égard. Croyez, monsieur le secrétaire d'Etat, que nous n'y
manquerons pas.
Toujours à l'Assemblée nationale, vous ne vous êtes pas montré hostile à la
proposition d'organiser une grande conférence nationale sur le logement, idée
chère à certaines associations de locataires.
Tous ces signes constituent, pour ceux qui s'intéressent au logement, un
encouragement après tant d'années de doutes et d'inquiétudes.
Ces inquiétudes portaient essentiellement sur deux points : la solvabilité des
ménages, notamment des plus défavorisés, et le maintien de l'aide à la
construction et à la réhabilitation ; en d'autres termes, sur l'aide à la
personne et sur l'aide à la pierre.
En ce qui concerne la solvabilité des ménages, nous devons constater que la
situation des locataires se dégrade dans le parc social de logement
parallèlement à la longue crise économique dans laquelle notre pays se débat,
même si l'on note des signes encourageants de reprise.
Malgré des discours, en apparence généreux sur la fracture sociale, force est
de constater que la précédente majorité a laissé se dégrader l'aide à la
personne, augmentant d'autant l'effort des ménages modestes.
Il fallait donc, dans ces conditions, engager une action vigoureuse en faveur
de nos concitoyens les plus démunis. Vous avez su le faire dès le mois de
juillet 1997 par une revalorisation sensible de l'APL, et ce conformément aux
engagements pris lors de la campagne électorale conduite par M. Lionel Jospin,
devenu notre Premier ministre.
En année pleine, les effets de cette mesure se traduiront en 1998 par une
augmentation de 9 % de l'APL et de 10,5 % de l'ALS, ce qui - tout le monde doit
en convenir - est considérable.
Le locataire en est le premier bénéficiaire, et c'est bien ainsi, mais
convenons que le bailleur est également intéressé par cette mesure qui devrait
réduire le poids des impayés.
Cependant, ce qui me semble culturellement important, si j'ose dire, c'est
l'annonce que vous avez faite des intentions du Gouvernement de renouer avec
une politique régulière d'actualisation des aides personnelles.
Pour les plus défavorisés de nos compatriotes résidant dans la parc social, le
fonds de solidarité pour le logement, FSL, et l'aide au logement temporaire,
ALT, sont restaurés dans le budget de l'Etat et seront en conséquence alimentés
en fonction des besoins exprimés.
En outre, une enveloppe supplémentaire devrait venir renforcer le dispositif
d'aide à la personne instauré par la loi contre les exclusions.
Toutefois, stimuler une politique du logement, c'est aussi favoriser l'aide à
la pierre.
En augmentant de 2,5 milliards de francs par rapport à la loi de finances
initiale pour 1997 l'investissement locatif social, vous allez permettre,
monsieur le secrétaire d'Etat, de financer 80 000 prêts locatifs aidés, les
PLA, dont 30 000 PLA très sociaux et 120 000 primes à l'amélioration du
logement à usage locatif et occupation sociale, les PALULOS. En rupture avec
les années précédentes, les crédits nécessaires seront inscrits au budget pour
atteindre ces objectifs.
L'extension du système de taux réduit de T.V.A. à l'ensemble de l'acte de
construction, de réhabilitation mais aussi de réparation ou d'entretien du
patrimoine locatif représente un considérable acquis dont les effets seront
bénéfiques tant aux locataires qu'aux acteurs des métiers du bâtiment, grosses
entreprises et artisans.
En effet, cette baisse du taux de TVA à 5,5 % équivaut à une aide de 12 % du
montant des travaux. Les aides par subvention étant maintenues, cela équivaut à
un effort supérieur de 20 % à l'aide actuelle.
Nous sommes nombreux, dans cet hémicycle, à occuper des fonctions de
responsabilités dans le logement social ; c'est mon cas à Montpellier. Sachez
que nous contribuerons à l'application judicieuse du PLA-TS au taux majoré de
20 %, comme à la nouvelle disposition de PLA « démolition-reconstruction » que
vous initiez pour les quartiers les plus dégradés.
Pour l'accession sociale à la propriété, permettez-nous de vous dire notre
accord à la disposition qui réserve aux seuls primo-accédants l'attribution du
prêt à taux zéro. Il faut voir là une certaine moralisation de l'accession
sociale car, après tout, c'est bien de cela qu'il s'agit et non de favoriser
une forme spéculative d'aide.
Par ailleurs, nous apprécions que vous ayez introduit des modalités ouvrant la
faculté à l'acquéreur d'un premier bien et qui désire le vendre au terme de
deux années d'accéder à un nouveau prêt à taux zéro, de même qu'au propriétaire
contraint à la vente pour des impératifs de mobilité professionnelle.
Enfin, l'aide au secteur privé n'a pas été oubliée pour autant.
Le crédit d'impôt alloué pour l'entretien de l'habitation principale devrait
concerner plus d'un million de personnes.
La prime à l'amélioration de l'habitat augmentée de 33 % concerne 80 000
logements.
L'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat connaît, elle aussi, une
aide en forte croissance, de l'ordre de 10 %.
Quant à la résorption de l'habitat insalubre, nous apprécions sa forte
augmentation.
Qu'il nous soit cependant permis, monsieur le secrétaire d'Etat, de soulever,
avec une particulière insistance, le problème des copropriétés dégradées,
notamment dans les grands ensembles urbains, et je rejoins sur ce point les
observations de M. José Balarello.
Les lieux d'habitat, dont la valeur vénale est en forte chute, voient leur
propriétaire occupant fuir afin de limiter la perte sur la revente de leurs
biens. Une politique de peuplement anarchique s'instaure alors avec, le plus
souvent, un effet très marqué de « ghettoïsation ».
Des marchands de biens voient souvent là un moyen de réaliser de substantiels
bénéfices en accueillant des familles sans réponse à leur recherche d'habitat.
Des spéculateurs peu scrupuleux vont même jusqu'à des pratiques inacceptables
telles que la vente de tranches de sommeil. Alors s'installent la misère et
l'insécurité, et l'explosion sociale menace ou même se produit.
Il faut, monsieur le secrétaire d'Etat, mettre un terme à cela avant qu'il ne
soit trop tard.
En conclusion, je me permettrai une nouvelle fois de dire notre très vive
satisfaction de devoir examiner un budget du logement aussi favorable et en
totale rupture avec ceux qui l'ont précédé.
Je remercie M. Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du
logement, et vous-même, monsieur le secrétaire d'Etat, d'avoir su convaincre M.
le Premier ministre et vos collègues du Gouvernement d'arbitrer aussi
positivement en faveur de votre budget. Vous pouvez en éprouver quelque
fierté.
Je suis persuadé que la Haute Assemblée ne pourra qu'approuver ces crédits,
comme l'a fait la commission des finances, comme l'a pratiquement fait la
commission des affaires sociales dans les conclusions remises par son
rapporteur, même s'il a dû en appeler à la sagesse du Sénat. Alors, l'avis
négatif de la commission des affaires économiques ne sera plus qu'un mauvais
souvenir et une regrettable erreur d'appréciation !
(Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
C'est vous, monsieur Chervy, qui aviez raison en incitant
le Sénat à émettre un vote favorable.
Bien évidemment, les socialistes voteront ce budget.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Cléach.
M. Marcel-Pierre Cléach.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le Sénat a réservé un accueil généralement
favorable à votre projet de budget. La commission des finances elle-même, tout
en émettant quelques réserves importantes, ne l'a pas censuré.
Je voudrais, à mon tour, vous féliciter pour les mesures prises en faveur du
logement locatif social dans son ensemble, mais vous dire aussi mes inquiétudes
et celles de plusieurs de mes collègues.
Mes félicitations vont naturellement aux efforts consentis en faveur du
logement locatif social proprement dit, à travers les PLA, les PLA-TS, les
PALULOS, le taux réduit de TVA pour les réhabilitations, etc.
Vous innovez également en annonçant 5 000 PLA réservés aux opérations de
démolition-reconstruction. Mon département est déjà demandeur ; il ne sera sans
doute pas le seul.
En effet, c'est une mesure importante, attendue, et qui marque une volonté
réelle d'aider les constructeurs sociaux à préparer les conditions d'un cadre
de vie digne du troisième millénaire.
Je souhaiterais cependant attirer votre attention sur deux difficultés
importantes auxquelles se trouve encore confronté le logement social.
Il s'agit, tout d'abord, de l'inadéquation de plus en plus forte des plafonds
de ressources qui ne reflètent plus la réalité sociale des demandeurs et
écartent du secteur locatif public une proportion grandissante de ménages aux
ressources légèrement supérieures au plafond, mais cependant modestes.
Une refonte du système permettant de faire coïncider la règle de droit avec la
demande sociale présenterait l'avantage d'améliorer la mixité sociale, à
laquelle je vous sais attaché.
Il reste, également, monsieur le secrétaire d'Etat, le problème délicat des
taux d'intérêt réels des crédits au logement social, qui sont trop élevés.
Les aides à la personne, toutes catégories confondues, bénéficient également
d'une dotation en forte progression favorisant ainsi la solvabilité des
locataires. Je dois néanmoins émettre quelques réserves à leur égard.
La première concerne la pertinence des prévisions budgétaires de ce chapitre.
Je crains que la dépense prévisible pour l'année 1998 ne soit largement
supérieure à l'enveloppe disponible.
La deuxième a trait à l'absence de tout effort de rationalisation de ces aides
à la personne. Il est pourtant indispensable de remédier à certaines anomalies
du régime actuel telles que le versement de l'allocation de logement social aux
étudiants sans aucune condition de ressources ou le fait que les aides soient
versées en tenant compte de la nature des ressources et non pas du seul niveau
de ressources du ménage.
Votre prédécesseur avait lancé une réforme. J'espère, monsieur le secrétaire
d'Etat, que vous continuerez dans cette voie, tant la croissance du volume
financier des aides à la personne est exponentielle et assez largement
imprévisible.
Un bon budget du logement, monsieur le secrétaire d'Etat, doit être équilibré,
et je dois vous dire, à cet égard, que je regrette le sort qu'il réserve à
l'accession à la propriété, sort qui contrebalance fâcheusement l'impression
favorable qui se dégage des mesures évoquées ci-dessus.
Votre projet de budget suscite, en effet, quelques inquiétudes à cet égard.
Le prêt à taux zéro, mis en place par la majorité précédente, connaît un très
grand succès, car il répond à une aspiration profonde de nos concitoyens, qui
souhaitent très largement devenir propriétaires de leur résidence
principale.
Vous avez effectivement défini vos priorités en faveur du logement locatif
social et des aides à la personne, ce qui est parfaitement légitime, mais qui
serait en outre équitable si, en contrepartie, les mesures préparées en matière
d'accession à la propriété n'étaient pas aussi négatives.
Il en est de même de la situation faite au prêt à taux zéro, sur laquelle je
ne reviendrai pas, nos rapporteurs ainsi que plusieurs orateurs qui m'ont
précédé ayant longuement développé leurs arguments, que je partage.
Il en est ainsi également des incertitudes qui pèsent sur le sort du 1 %
logement. Vous en connaissez bien l'importance, et vous savez les services
qu'il rend au logement social et aux bénéficiaires de ses interventions
directes.
Si le prélèvement exceptionnel devait être pérennisé, les constructeurs
sociaux seraient confrontés à de très graves difficultés pour assurer
l'équilibre de leurs opérations. Ce serait, aussi, une remise en cause de
l'aide apportée aux salariés qui souhaitent se rendre acquéreurs de leur
logement.
Ce serait, une fois de plus, une grave remise en cause de la parole de l'Etat,
puisque la convention du 17 septembre 1996, signée avec les partenaires
sociaux, garantissait la pérennité de la participation des employeurs à
l'effort de construction.
Une confirmation des engagements alors pris par l'Etat, pour la réflexion à
mener sur l'avenir du 1 % logement, m'apparaît nécessaire et urgente pour
crédibiliser votre action et rassurer l'ensemble des collecteurs et des
partenaires sociaux.
Un tel engagement nous permettrait de donner crédit aux indications que vous
avez bien voulu nous donner sur votre projet de créer un statut du propriétaire
bailleur privé.
Il est vrai que le propriétaire privé, échaudé par les incessants va-et-vient
de la fiscalité, par l'importance de la fiscalité elle-même et par les excès du
maintien dans les lieux accordé aux locataires indélicats a de plus en plus
tendance à rechercher des placements plus faciles à gérer et souvent plus
rémunérateurs.
Un statut incitatif, mais surtout pérenne, qui lui garantirait que les règles
du jeu seront définies pour une durée contractuellement définie, aurait valeur
d'exemple dans le paysage législatif français et contribuerait
vraisemblablement au retour sur ce marché d'un grand nombre de ceux qui l'on
quitté.
Le système d'amortissement accéléré, accordé par votre prédécesseur aux
propriétaires ayant investi dans l'immobilier locatif neuf, a bien atteint,
nous semble-t-il, son but. Vous nous dites qu'il coûte cher, c'est vrai, mais
il a redonné un coup de fouet à l'activité du bâtiment et contribué à faire
revenir de nombreux investisseurs privés sur ce marché, qu'ils avaient
déserté.
Monsieur le secrétaire d'Etat, si vous voulez réellement que le marché locatif
privé retrouve un équilibre durable, il est indispensable que l'Etat français
prenne l'engagement de ne pas revenir sur les accords qu'il prendra et, bien
entendu, qu'il tienne parole.
Il reste néanmoins que ce budget, malgré ses qualités propres, ne peut être
analysé hors de l'environnement économique et fiscal global qui est beaucoup
plus préoccupant.
L'alourdissement, par exemple, de l'ensemble des prélèvements sociaux, qui
passent de 4,9 % à 10 % sur les revenus fonciers, induit de façon mécanique un
prélèvement supplémentaire de cinq milliards de francs environ. Cette nouvelle
donne fiscale va, je le crains, à l'encontre de votre souhait de relancer le
secteur locatif privé.
Pour conclure, monsieur le secrétaire d'Etat, je reviendrai sur un point qui
me tient tout particulièrement à coeur : les gouvernements successifs, pour le
logement comme malheureusement dans bien d'autres domaines, ne cessent de
changer la règle du jeu et la donne fiscale auxquelles se trouvent confrontés
les agents économiques.
Nous devons absolument, les uns et les autres, hors de tout esprit manichéen
ou dogmatique, nous attacher à remédier à cette insécurité. En ce qui concerne
tout particulièrement le secteur privé immobilier, l'Etat doit définir des
règles du jeu lisibles, mais surtout s'y tenir afin de redonner confiance aux
investisseurs potentiels.
Mes collègues et moi-même vous donnons acte des aspects positifs de ce budget,
mais notre attitude constitue à la fois un encouragement au secrétaire d'Etat,
qui annonce un contrat entre l'Etat et les bailleurs privés, et un appel
exigeant à l'équilibre du budget du logement entre ses diverses composantes.
Nous vous demandons, monsieur le secrétaire d'Etat, de prendre en compte, en
effet, les souhaits et les aspirations de toutes les catégories de Français.
(« Très bien ! » et applaudissements sur les travées des Républicains et
Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
budget du logement, sacrifié par les deux précédents gouvernements.
(Protestations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
connaît une progression très forte de ses
dotations.Celles-ci s'accroissent en effet de 6,7 %, conformément à
l'engagement pris par le Premier ministre.
Le groupe socialiste souligne d'autant plus ce volontarisme politique qu'il
s'exerce en faveur des catégories sociales les moins fortunées, ce qui
constitue une seconde différence avec les lois de finances de ces dernières
années. En effet, l'essentiel de l'effort est axé sur le logement locatif et
sur les crédits destinés à la réhabilitation, avec notamment l'instauration
d'un crédit d'impôt en faveur des foyers non imposables, ce qui assurera des
commandes supplémentaires aux artisans du bâtiment et des travaux publics et
soutiendra l'emploi.
En revanche, il s'agit d'un budget de transition pour l'aide à l'accession
sociale à la propriété. Le montant des crédits alloués au prêt à taux zéro et
au prêt d'accession sociale n'augmente pas de manière significative et,
surtout, la pérennisation du prêt à taux zéro n'est toujours pas assurée. Assis
sur le 1 % patronal, ce mode de financement est à la fois injuste et instable.
D'ici à la fin de 1998, date d'expiration de la convention, il faudra trouver
une solution plus équilibrée et nous savons que vous y pensez, monsieur le
ministre.
Dès à présent, vous avez choisi de corriger une inégalité flagrante dans
l'octroi de ce prêt, puisque vous le réservez aux primo-accédants, et vous avez
raison. Il n'en demeure pas moins que le problème de fond, qui est un legs de
votre prédécesseur, reste posé, et nous souhaiterions vous entendre à ce
sujet.
Faute de rétablir un financement spécifique de ce secteur, c'est toute la
politique du logement qui serait fragilisée. Le coup de pouce donné à une
famille modeste pour acheter permet généralement la libération d'un logement
HLM, et l'on sait l'importance de la mobilité dans le secteur locatif aidé. En
outre, la construction d'une villa ou d'un appartement participe efficacement à
la croissance et à l'emploi. Mais nous comprenons, monsieur le secrétaire
d'Etat, que le Gouvernement ait choisi de se donner un an pour reconstruire ce
qui a été ruiné à la suite de la disparition du prêt d'accession à la
propriété, le PAP. Nous vous faisons confiance.
Mais l'accession sociale à la propriété, ce ne sont pas seulement des prêts
aidés ; ce sont aussi des outils pour les mettre en oeuvre et, parmi eux,
figure le Crédit foncier.
Chacun a en mémoire la tentative de MM. Arthuis et Périssol pour démanteler
cette institution dont l'histoire se confond avec la politique du logement
depuis cent cinquante ans. Grâce au combat exemplaire des salariés, à qui je
veux, une fois de plus, rendre hommage, le processus a été enrayé. Puis, le
changement de majorité a ouvert d'autres perspectives. La bourse a récemment
salué cette résurrection. Je sais de bonne source que plusieurs solutions sont
en vue. Mais ce n'est pas le lieu pour les examiner. Je tenais seulement à vous
dire qu'il y a désormais urgence.
J'ajoute que le scénario retenu devra assurer l'intégrité de l'établissement
et le maintien de l'emploi pour l'ensemble des salariés, ce qui est possible
compte tenu du nombre de départs volontaires.
Bien entendu, ainsi que je l'ai toujours dit, une solution semi-publique
aurait ma préférence. En effet, il est indispensable que la puissance publique
se réserve une forte capacité d'intervention dans un secteur aussi crucial que
le logement. Comme les personnels, je suis confiant dans la solution qui se
prépare sous l'égide du Gouvernement.
Je voudrais, enfin, attirer votre attention, monsieur le secrétaire d'Etat,
sur le haut niveau du taux d'intérêt qui frappe le remboursement des prêts PAP
souscrits voilà dix ou quinze ans. Cette situation fait supporter à des foyers
à petits ou à moyens revenus un loyer de l'argent plus élevé que celui du
marché. En outre, elle produit un mécanisme de remboursement anticipé
préjudiciable au Crédit foncier et aux contribuables. Que comptez-vous faire,
monsieur le secrétaire d'Etat, pour sortir de cet engrenage ?
Comme l'ont indiqué mes collègues du groupe socialiste et notre excellent
rapporteur pour avis, M. William Chervy, nous approuvons votre budget, qui
renoue avec la tradition d'une grande politique du logement.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne reviendrai pas en détail sur le contenu
de votre budget mon collègue M. André Vezinhet l'a excellement fait et partage
tout à fait son analyse : votre budget est un très bon budget, comme l'a
également souligné le rapporteur pour avis, M. William Chervy.
Je souhaite plutôt vous entretenir des problèmes spécifiques du logement à
Paris, et plus particulièrement de ceux que rencontrent les locataires.
J'évoquerai, tout d'abord, le problème de ce qu'on appelle les « congés-ventes
». Comme vous le savez, la question devient de plus en plus cruciale à Paris.
Depuis deux ans environ, des propriétaires institutionnels, tels que les
banques, les sociétés d'assurance ou encore les sociétés d'investissement
immobilier comme la SEFIMEG, ont décidé de mettre en vente les logements dont
ils sont propriétaires par immeubles entiers. Tel est le cas notamment des
immeubles de la rue du Commandant-René-Mouchotte dans le XIVe arrondissement ou
encore de 3 000 logements dans le XIIIe arrondissement. Près de 10 000
locataires seraient concernés à Paris.
Cette décision ne va pas sans poser de lourds problèmes humains. Les
locataires n'ont qu'une alternative : acheter leur appartement ou partir. C'est
la loi.
Malheureusement, on s'aperçoit que nombreux sont les locataires qui ne peuvent
pas acheter le logement qu'ils occupent soit parce qu'ils n'en ont pas les
moyens, soit parce qu'ils sont trop âgés pour avoir droit à un prêt immobilier.
Ils ne peuvent pas non plus trouver dans le parc privé parisien un logement
similaire à louer compte tenu du coût prohibitif des loyers à Paris.
Bien souvent, en effet, les logements qui sont mis en vente sont soit des
logements sociaux de fait, soit des logements dits « intermédiaires », dont les
loyers sont, par conséquent, inférieurs à ceux du marché dit « libre ».
Ces locataires se trouvent donc relégués à Paris, dans des appartements plus
petits, qui ne répondent pas à leurs besoins, ou bien ils sont obligés de
quitter la capitale pour la lointaine banlieue alors qu'ils ne le souhaitaient
pas. Ils sont tout simplement contraints de changer de vie, ce qui est
particulièrement difficile pour les personnes âgées.
Comme je viens de l'évoquer, ces logements sont souvent des logements sociaux
de fait. La plupart d'entre eux ont été construits dans les années
soixante-dix, grâce à des aides publiques, notamment grâce aux prêts du Crédit
foncier à des taux d'intérêt très intéressants, puisqu'ils étaient de 4 %
environ alors que l'inflation dépassait 10 %. Certains ont d'ailleurs pu
rentabiliser leur investissement en quatre ans.
En contrepartie de ces prêts, ces bailleurs ont été tenus, pendant trente ans,
de respecter des obligations locatives, notamment en matière de loyer. Ces
obligations arrivent aujourd'hui à terme. Je juge, pour ma part, très choquant
que ces investisseurs immobiliers, qui ont bénéficié de fonds publics, prennent
prétexte de l'expiration des conventions qui les liaient à l'Etat pour mettre
en vente ces logements et donc mettre un terme au contrat du locataire, sans
tenir compte des situations individuelles.
Je ne souhaite pas qu'il soit porté atteinte au droit de propriété, ni que le
congé-vente individuel soit mis en cause. En revanche, lorsque l'opération
immobilière a été réalisée grâce à des fonds publics et par des investisseurs
institutionnels, je vous propose deux solutions.
La première consisterait à prévoir, comme c'est le cas pour les HLM, que les
locataires qui ne veulent pas ou ne peuvent pas acheter bénéficient d'une sorte
de bail à durée indéterminée, une sorte de droit au maintien dans les lieux dès
lors qu'ils paient leur loyer.
La seconde consisterait à mettre en place une structure qui aurait pour
mission de racheter ces immeubles pour en faire des logements sociaux ou
intermédiaires, ce qui permettrait aux locataires en place de se maintenir dans
les lieux.
Envisagez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, d'aborder ce problème dans le
cadre du futur statut du bailleur privé ?
Je souhaite, en tout état de cause, qu'une solution soit trouvée pour assurer
le respect du droit au logement, qui est un principe à valeur constitutionnelle
et vous êtes mieux placé que quiconque pour le savoir, monsieur le secrétaire
d'Etat.
J'évoquerai maintenant plus largement le problème du logement social à
Paris.
La capitale, vous le savez, monsieur le secrétaire d'Etat, manque de logements
sociaux puisque l'on compte 60 000 demande, pour environ 2 000 constructions
neuves par an.
Le coût du foncier est exorbitant. Monsieur le secrétaire d'Etat,
réfléchissez-vous actuellement à un moyen qui permettrait de construire plus de
logements neufs sociaux dans les zones de marché tendu, comme Paris, et ce à un
coût abordable ?
Par ailleurs, s'agissant des HLM, il nous semble nécessaire d'introduire une
plus grande transparence...
M. Gérard Delfau.
Oh oui !
Mme Danièle Pourtaud.
... d'une part dans le dispositif d'attribution des logements et, d'autre
part, dans les opérations PALULOS, qui sont devenues à Paris de « bonnes
affaires » pour l'OPAC ou les sociétés anonymes d'HLM et le club très fermé de
quelques sociétés du bâtiment et des travaux publics, mais qui se traduisent
souvent par des hausses de loyers insupportables pour les locataires les plus
modestes.
Enfin, j'évoquerai la question du logement des plus démunis.
Pourriez-vous nous préciser, monsieur le secrétaire d'Etat, où en est le plan
de réquisition de logements à Paris et si la loi contre l'exclusion prévoira
des dispositions tendant à mieux prévenir les expulsions ?
M. Gérard Delfau.
Très bien !
Mme Danièle Pourtaud.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le temps me manque pour aborder tous les points
qui nous préoccupent à Paris : la lutte contre le saturnisme et l'insécurité
dans certains groupes d'immeuble... Peut-être pourriez-vous nous indiquer, à ce
propos, si des emplois-jeunes pourront être affectés à des tâches de sécurité
dans les HLM sans qu'il en résulte des hausses de charges pour les locataires
?
Les deux derniers problèmes sur lesquels je ne pourrai pas m'attarder
concernent l'insufissance des crédits du fonds de solidarité pour le logement à
Paris ainsi que les modalités d'application des surloyers, en particulier pour
les retraités.
A l'Assemblée nationale, monsieur le secrétaire d'Etat, vous vous êtes montré
ouvert à la tenue, sous votre responsabilité, d'une conférence nationale sur le
logement. J'estime, pour ma part, que ce serait une bonne chose. Pouvez-vous
nous confirmer cette intention, monsieur le secrétaire d'Etat ?
Sachez, en tout cas, que les élus socialistes parisiens ont confiance en vous
pour mettre en oeuvre une politique du logement plus équilibrée et répondant
aux attentes de nos concitoyens.
Pour toutes ces raisons, nous voterons, bien entendu, votre budget.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat au logement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je
tiens, en commençant à remercier tout spécialement les rapporteurs, MM.
Collard, Chervy et Bimbenet, qui ont présenté les grandes orientations et les
principaux chiffres du budget du logement pour 1998. La qualité de leurs
exposés, que j'ai écoutés avec une grande attention, facilitera grandement ma
tâche.
J'indiquerai les grands choix ayant présidé aux propositions du Gouvernement
qui sont soumises aujourd'hui à votre examen.
Dès sa déclaration de politique générale, le 19 juin dernier, M. le Premier
ministre a clairement placé la politique du logement au premier rang des
priorités gouvernementales et signé, le 10 juillet, le décret d'avances qui
portait sur les aides à la personne et les aides à la pierre dans le secteur de
la réhabilitation, tant des parcs privés que publics.
Le projet de budget du logement pour 1998 confirme cette priorité et la
développe sur l'ensemble du champ de la politique du logement en ouvrant un
ensemble de moyens nouveaux d'intervention.
Pourquoi cet effort de redressement sur la quasi-totalité du champ
d'intervention de l'Etat ?
Parce que les besoins sont criants, les réponses urgentes et les risques
encourus à les différer majeurs ; parce qu'il ne serait pas acceptable que, au
gré des exercices budgétaires, on consolide un pan de la politique du logement
en laissant se lézarder tous les autres ; parce qu'il serait totalement
illusoire de croire que le simple jeu de l'économie de marché résoudrait, comme
par miracle, la question du logement dans notre pays si l'Etat ne s'y
impliquait pas.
M. Gérard Delfau.
Très bien !
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
La politique du logement traduite par le projet de
budget pour 1998 ne se réduira pas au traitement de la seule urgence absolue ;
ce ne sera pas le simple colmatage des brèches les plus apparentes dans la
solidarité et la justice.
Le Gouvernement s'engage par étapes - toutes significatives, en 1997 comme en
1998 - mais avec résolution dans la voie d'une réponse d'ensemble, adaptée aux
attentes de nos concitoyens et à leurs préoccupations économiques et
sociales.
Cette politique prend donc en compte tout à la fois les situations de
précarité et d'exclusion, bien trop nombreuses, et les objectifs de maîtrise
des loyers et des charges du logement, pour que leur poids reste compatible
avec le budget des ménages qui disposent de revenus modestes. Elle soutiendra
significativement l'activité de construction et de réhabilitation indispensable
à l'emploi.
Cette politique sera développée dans un esprit de concertation, d'écoute, avec
toutes les parties concernées : collectivités locales, bailleurs sociaux et
investisseurs, locataires et associations, afin de bâtir un dispositif d'aide
équilibré dans lequel chacun apporte sa contribution et se mobilise pour
l'intérêt général.
Pourquoi, dans cette démarche, ne pas retenir la proposition de Mme Terrade
d'un grand débat national où tous les partenaires que je viens de citer
pourraient s'exprimer et être entendus sur ce vaste dossier du logement ? M.
Jean-Claude Gayssot et moi-même en sommes d'accord.
En tout cas, pour parvenir à un tel dispositif d'aide, il faut que l'Etat
rétablisse au plus haut niveau le budget du logement.
En 1998, les moyens du logement croîtront de 6,7 % - comme l'ont dit MM. les
rapporteurs - si l'on s'en tient aux ressources budgétaires
stricto
sensu
, c'est-à-dire aux crédits inscrits sur le budget du logement et aux
dotations figurant dans les comptes d'affectation spéciale, mais la progression
- comme l'ont observé également MM. les rapporteurs - dépasse 10 % si l'on y
inclut les aides fiscales traduites, en particulier, par la baisse de la
TVA.
Il s'agit effectivement d'un effort considérable, je remercie MM. Chervy et
Collard de l'avoir souligné. Je remercie également M. Bimbenet d'avoir observé
que ce projet de budget comprenait un certain nombre de dispositions dignes
d'intérêt.
Pourtant, comme le soulignent très justement MM. Collard et Chervy, deux
dispositifs pesaient sur la préparation de ce projet de budget pour 1998 en
raison des choix arrêtés par le précédent gouvernement. Il s'agissait, d'une
part, de l'amortissement accéléré conçu en faveur de l'investissement locatif
et, d'autre part, des modalités de financement du prêt à taux zéro accompagnant
l'accession à la propriété pour les ménages.
Si ces deux dispositifs sont menacés, ainsi que vous l'avez dit, monsieur Egu,
c'est parce que leur financement n'a été prévu que jusqu'en 1998.
M. Gérard Delfau.
Bien sûr !
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Ce n'est donc pas nous qui faisons peser une
quelconque menace. Nous sommes appelés, au contraire, à lever les craintes et à
trouver des réponses justes et stables ; c'est ce que nous nous efforçons de
faire.
Si nous avons maintenu dans leur quasi-totalité ces mécanismes pour 1998,
c'est avec la volonté de ne pas faire payer à l'activité du bâtiment la
précarité des mesures en cause - puisqu'elles n'ont été financées que
temporairement - car elle a connu des années très difficiles. Mais nous
comptons bien parvenir à mettre en place, à partir de 1999 - il faut donc les
définir en 1998 -, les mécanismes stables et durables dont notre pays a besoin
tant pour l'accession à la propriété des familles modestes que pour la mise sur
le marché de logements locatifs privés en plus grand nombre. Ces mécanismes
comporteront, messieurs Collard et Ostermann, un dispositif de sécurisation,
comme vous en avez confirmé le souhait.
Bref, consolider les incitations à l'investissement locatif et l'accession
sociale à la propriété sont nos objectifs pour 1998.
En ce qui concerne les accédants à la propriété, le Gouvernement a reconduit
le prêt à taux zéro. L'essentiel de la ressource budgétaire - en provenance du
1 % logement - est donc bien maintenu.
Mais le dispositif tel qu'il avait été institué - j'appelle votre attention
sur ce point car là est le problème - induira, pour 1999, une dépense de 3,5
milliards de francs, alors même que la recette n'existera théoriquement plus.
En 1999, nous aurons en effet à couvrir la moitié du coût des prêts qui auront
été consentis en 1998. Il fallait lucidement reconnaître cette difficulté
majeure et faire un signe à tous les partenaires pour que soit bien mesurée
l'ampleur du problème qui se posera à partir du 1er janvier 1999, ainsi que l'a
remarqué justement M. Cléach, qui connaît particulièrement bien ce sujet.
Ce signal, monsieur Bimbenet, a été volontairement limité en concentrant le
prêt à taux zéro sur les familles qui n'étaient pas propriétaires au cours des
deux dernières années, ce qui ne réduit qu'à la marge l'ensemble du dispositif.
Cela ne crée pas de disparités entre accédants. En effet, le montant du prêt à
taux zéro se situant entre 120 000 francs et 180 000 francs, tous les accédants
qui ont la chance de revendre leur bien se constituent un apport personnel qui,
dans 99 % des cas, dépasse sans doute le montant du prêt.
M. Gérard Delfau.
Bien sûr !
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Ces dispositions ne devraient donc pas entraîner une
contraction de l'accession à la propriété.
En outre, ont été prévues des adaptations, qui permettent aux personnes devant
faire face à une obligation de mobilité professionnelle ou à une obligation
familiale de continuer à bénéficier du prêt à taux zéro.
Mais il est vrai, monsieur Chervy, que je suis preneur de toute proposition
permettant d'assurer, en 1999 et au-delà, l'accession sociale à la propriété.
Cette demande s'adresse bien sûr aussi à MM. Balarello et Collard, qui ont
d'ores et déjà émis quelques idées sur le sujet, que nous étudierons avec
attention.
Comme je l'ai indiqué, le dispositif de l'amortissement accéléré sera, lui
aussi, maintenu en 1998. Le décalage observé - j'appelle votre attention sur ce
point - entre l'ouverture des droits et l'impact fiscal fait que le financement
essentiel de ce dispositif est à prévoir à partir de 1999. Il a encore très peu
coûté. En effet, depuis les difficultés du début de la décennie, les banquiers
ne s'engagent dans un programme que lorsqu'il est largement vendu. Cela
signifie que l'ouverture du droit intervient deux ans, quelquefois trois ans
avant la première année où on percevra des loyers et où on pourra déduire
l'avantage fiscal. Ce dispositif est donc très largement à payer. C'est une
réalité qu'il faut bien évidemment souligner. Il y aura quatre années
difficiles, celles pendant lesquelles l'amortissement représente 10 % de la
valeur du bien.
Ce
statu quo
pour 1998, justifié par les besoins de l'activité du
bâtiment, donnera un délai que le Gouvernement mettra à profit pour bâtir un
dispositif de remplacement qu'il veut équilibré et durable : le statut du
bailleur social privé.
Bien évidemment, tous les partenaires seront associés à sa définition, et je
n'écarte pas l'idée que nous puissions trouver des dispositions qui aident à
sécuriser des bailleurs potentiels qui, aujourd'hui, font une rétention de
logements vacants. En effet, si nous trouvons certains mécanismes apportant des
garanties, tout le monde s'y retrouvera. C'est, en tout cas, un contenu
attractif et équilibré qui nous donnera un dispositif efficace, et c'est bien
évidemment l'objectif que nous cherchons à atteindre.
S'agissant des congés-ventes, je partage vos préoccupations, mesdames Terrade
et Pourtaud. Je suis conscient que la vente du patrimoine d'un investisseur
institutionnel, pour légale qu'elle soit, ne va pas sans poser des problèmes
aux locataires qui ne sont pas en mesure d'acquérir leur logement.
Nous avons confié à un haut fonctionnaire du ministère une mission sur les
congés-ventes collectifs, afin d'avoir une vision globale du problème, et nous
en attendons des conclusions rapides.
Au-delà, je souhaite ouvrir une réflexion sur les modifications éventuelles à
apporter au statut de bailleurs qui, tout en étant des propriétaires de droit
privé, sont des bailleurs institutionnels ayant bénéficié d'aides publiques. Ce
travail s'inscrira, là encore, dans une logique d'équilibre entre les aides de
l'Etat et les contreparties à en attendre.
En ce qui concerne les locataires, le Gouvernement procédera, en 1998, à une
nouvelle actualisation des aides personnelles au logement, après celle qui est
intervenue le 1er juillet 1997, renouant ainsi - et je remercie M. Vezinhet de
l'avoir souligné - avec une politique régulière d'actualisation.
Dans le projet de budget pour 1998, les aides personnelles au logement
s'élèveront à 33 155 millions de francs, soit une augmentation de 11,5 % par
rapport à la loi de finances de 1997, qui les avait arrêtées à 29 730 millions
de francs.
Face à la montée des situations de précarité et d'exclusion, le logement
constitue souvent, vous le savez, le dernier rempart des familles ménacées
avant l'entrée dans la grande pauvreté et bien souvent, hélas ! la perte des
repères sociaux. C'est à partir du logement que peuvent se maintenir ou se
reconstruire les liens avec la société. Anticipant sur le volet « logement » du
prochain projet de loi pour la prévention et la lutte contre les exclusions,
qui, je l'espère, répondra aux justes préoccupations exprimées par plusieurs
d'entre vous, notamment en ce qui concerne les expulsions, le projet de budget
pour 1998, dès à présent, renforce ou met en place différents moyens de soutien
à ces situations dans lesquelles se cumulent le handicap que représentent des
ressources faibles et aléatoires et des difficultés d'intégration sociale.
Une enveloppe de 350 millions de francs est réservée en vue d'améliorer la
solvabilité des bénéficiaires d'aides personnelles dans le cadre du futur
projet de loi contre les exclusions qui sera soumis au Parlement au printemps
prochain.
En outre, le Gouvernement a renforcé les dotations du fonds de solidarité pour
le logement, le FSL, en lui allouant 340 millions de francs et celles de l'aide
au logement temporaire, l'ALT, avec un montant de crédits de 110 millions de
francs. Le financement, qui était assuré en 1997 par la taxe sur le surloyer, a
été réinscrit au budget. Si la solidarité nationale doit à l'évidence jouer
ici, il était, nous semble-t-il, très injuste de ne la solliciter que des seuls
locataires de logements sociaux, même s'ils avaient dépassé les plafonds de
ressources ouvrant droit à l'accès au logement social.
M. Gérard Delfau.
Effectivement !
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Le produit de cette taxe - j'ai bien noté qu'elle
suscitait toujours des oppositions - après une réforme nécessaire du système
des suppléments de loyers, sera, à partir de 1999, apporté à la caisse de
garantie du logement social, afin, madame Terrade, de consolider ce dispositif
et de ne pas exposer davantage les collectivités locales s'agissant des
garanties qu'elles ont accordées.
L'Etat pourra désormais garantir sa participation aux fonds destinés à assurer
dans chacun des départements le droit au logement des ménages en difficultés et
donc honorer ses engagements à l'égard des associations qui assurent
l'indispensable accompagnement social et contribuent à l'hébergement à titre
temporaire des personnes défavorisées.
En ce qui concerne cette taxe sur le surloyer, je partage les préoccupations
exprimées par Mme Terrade et M. Vezinhet. Je vous indique qu'une réflexion est
en cours, afin d'adapter les règles d'évolution des loyers en fonction de
l'évolution des ressources. Cette réforme gommerait ce qui paraît être l'un des
effets les plus pervers du surloyer, c'est-à-dire une remise en cause de la
mixité sociale. Lorsque des locataires voient leurs moyens s'accroître et
vivent dans des quartiers populaires où ils se sentent bien, ne les incitons
pas à partir ! Au contraire, engageons-les à rester.
Nous travaillons à un autre système que nous espérons plus juste, plus
cohérent, et qui s'inscrit dans cet objectif de recherche de la mixité
sociale.
S'agissant des particuliers désirant réaliser dans leur habitation principale
des travaux d'entretien et de revêtement des surfaces, l'article 49 du projet
de loi de finances pour 1998 prévoit d'instituer un crédit d'impôt.
Ce dispositif a le mérite, monsieur Ostermann, de concerner également les
personnes non imposées qui se verront rembourser une partie de leur dépense. Il
présente le double avantage de soutenir l'activité des entreprises artisanales
du secteur du bâtiment, tout en étant équitable vis-à-vis des ménages qui ne
sont pas imposables sur le revenu, innovation qui ne vous a pas échappé.
L'évocation de ce dispositif me permet d'aborder un autre volet de la
politique du logement voulue par le Gouvernement et concrétisée par le projet
de budget qui vous est présenté. Un effort important est consenti en faveur de
la réhabilitation des parcs privé et public et un soutien accru est accordé à
la construction neuve.
La relance de la réhabilitation annoncée par M. le Premier ministre dans la
déclaration de politique générale du Gouvernement trouve désormais toute sa
cohérence dans le projet de loi de finances pour 1998, qui réduit de 20,6 % à
5,5 % le taux de TVA applicable aux travaux de réhabilitation, de
transformation et de rénovation des logements sociaux. Le coût de ces travaux
est ainsi réduit d'environ 12 %.
Je confirme à M. Chervy que la baisse de la TVA concerne tous les logements
locatifs sociaux ayant fait l'objet d'une convention avec l'Etat, qu'ils soient
gérés par un organisme de logement social ou par une commune, par exemple.
Cette baisse du taux de la TVA sur les travaux de réhabilitation représente
l'équivalent de 1,4 milliard de francs de crédits budgétaires. Toutefois, les
crédits budgétaires en question ont été maintenus dans le projet de budget et
partagés entre la réhabilitation et les besoins de construction de logements
locatifs, avec des crédits en faveur de l'aide à la pierre plus importants.
Plusieurs d'entre vous se sont d'ailleurs exprimés dans ce sens.
Le Gouvernement, en abaissant la TVA, mais en maintenant et même en
actualisant les crédits inscrits dans la loi de finances de 1997, ne suit pas
l'exemple de son prédécesseur : en effet, l'année dernière, la création du PLA
fiscal avait été suivie d'une réduction à due concurrence des crédits d'aide à
la pierre. Par conséquent, en 1998, les réhabilitations de logements sociaux
seront mieux financées que lors des exercices précédents.
Pour parvenir à ce résultat, 787 millions de francs sont inscrits sur la ligne
fongible ; lors de l'engagement de ces crédits, une grande attention sera
portée aux interrogations que vous avez formulées, madame Terrade.
Nous souhaitons privilégier les opérations entraînant des baisses de charges
pour les locataires et permettant le retour à une présence humaine dans les
ensembles, par la création de loges de concierges là où elles n'existent
pas.
M. Gérard Delfau.
Très bien !
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Nous privilégierons aussi les travaux qui permettront,
lors des réhabilitations, de dégager ce que nous appellerons désormais des «
logements d'intégration ».
La réhabilitation des logements privés est également confortée. Les crédits de
l'ANAH enregistrent une augmentation de près de 10 % et ceux de la PAH, une
hausse de plus de 33 %. Ces progressions, madame Pourtaud, ont contribué à
renforcer les moyens que M. Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé, et moi-même
mettons en place pour lutter de manière efficace contre le saturnisme.
Au total, si l'on additionne les réhabilitations privées et publiques, 300 000
logements au moins pourront être réhabilités avec subventions en 1998, chiffre
auquel s'ajoutent les quelque 100 000 réhabilitations qui pourront être opérées
grâce à la baisse du taux de TVA.
M. William Chervy.
Très bien !
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
C'est un progrès tout à fait considérable.
J'ai fait état d'un partage des moyens budgétaires supplémentaires entre
réhabilitations et nouveaux logements locatifs. Je souhaite insister sur ce
point, car c'est ce partage qui permettra la réalisation effective d'un
programme de 80 000 logements locatifs aidés.
Avec ces moyens supplémentaires, nous sommes désormais en mesure de présenter
une gamme plus étendue de produits destinés aux bénéficiaires du logement
social, afin d'avoir des réponses adaptées à la diversité des besoins.
Parmi les familles éligibles au logement social, certaines ont simplement des
ressources insuffisantes pour l'accès à un logement privé, en particulier dans
les zones où le marché est tendu. Le PLA ordinaire doit répondre aux besoins de
ces familles.
Mais, pour d'autres familles, il faut arriver à des loyers de sortie plus
favorables, c'est-à-dire plus faibles, plus accessibles. C'est l'objet de ce
que l'on va désormais appeler « le PLA à loyer minoré », qui doit être rétabli
dans une unique vocation : l'accueil de familles à ressources faibles.
Toutefois, notre société comporte aussi des familles qui, en plus d'avoir des
ressources faibles, ont de graves difficultés d'insertion sans que celles-ci
leur soient en quoi que ce soit imputables. Il faut donc, sans s'interdire en
cas de nécessité le recours à la réquisition, aller au-delà de l'approche du «
logement d'urgence » et refuser que des personnes ou des familles soient de
fait considérées comme inlogeables et restent vainement dix ans, douze ans,
quinze ans et parfois même plus longtemps sur des listes d'attente d'HLM, faute
de logements adaptés à leur proposer. Là est en effet la vraie difficulté.
C'est pourquoi le programme de logements sociaux de 1998 comportera pour la
première fois un programme de 10 000 logements subventionnés au taux de 20 %
permettant de loger les familles les plus défavorisées dans des logements
adaptés : c'est ce que nous appellerons « le PLA d'intégration ». Cette action
déterminante sera bien évidemment accompagnée du soutien social souvent
indispensable pour réussir l'insertion.
Pour réussir la mobilisation de ces moyens, nous avons obtenu une fongibilité
totale des crédits qui seront consacrés, bien sûr, aux opérations de
construction neuve, mais aussi aux opérations d'acquisition-amélioration.
S'agissant de ce PLA d'intégration, les acquisitions dans l'immobilier ancien
portant sur des logements de caractéristiques plus diversifiées et
d'implantations plus diffuses sont certainement à privilégier.
De même, les opérations de réhabilitation peuvent être l'occasion, par des
accès autonomes en rez-de-chaussée, par des logements situés en rez-de-chaussée
ou des duplex rez-de-chaussée et premier étage, de dégager ces logements dont
les conditions d'habitabilité favorisent la cohabitation avec les autres
familles plutôt que de les rejeter par la standardisation du produit
proposé.
Les crédits de la ligne fongible « constructions neuves » et les crédits de la
ligne « réhabilitations » doivent donc converger pour cette production de
logements d'intégration.
Je souhaite que les opérateurs HLM, les collectivités locales et les
associations conjuguent leur détermination pour réaliser effectivement ces 10
000 logements d'intégration dont l'Etat dispose désormais du financement et
qu'attendent en urgence les plus oubliés des demandeurs de logements, que ces
derniers soient non logés ou qu'ils doivent bénéficier d'un relogement pour
insalubrité ou suroccupation inacceptable.
Je souhaite parallèlement promouvoir des opérations de construction-démolition
dans les quartiers les plus dégradés, dans les îlots les plus « ghettoïsés »
des quartiers difficiles, qui doivent être réaménagés en profondeur.
Pour reloger les locataires des immeubles détruits, tout en préservant
l'objectif de mixité sociale, il faut pouvoir produire des logements à des
conditions de loyer adaptées. Des PLA assortis de subventions spécifiques
faciliteront la réalisation de telles opérations.
L'intervention des collectivités locales en accompagnement de ces opérations
de construction-démolition, qui devront obligatoirement avoir fait l'objet d'un
plan d'aménagement urbain cohérent et de relogement préalable des familles
concernées, permettra de traduire concrètement la volonté du Gouvernement de
mieux insérer la politique du logement dans une politique plus globale de
l'urbanisme, renouvelant en cela les termes de la coopération entre l'Etat et
les collectivités locales.
Au total, ce sont ainsi 3,3 milliards de francs supplémentaires qui seront
consacrés à la relance de l'activité du secteur du bâtiment en 1998. Quant aux
aides à la personne, elles bénéficieront de 3,5 milliards de francs de plus.
Les aides à la pierre ne sont pas sacrifiées aux aides à la personne ; il y a
au contraire une progression de ces deux types d'aides.
L'importante innovation que constitue l'extension du taux réduit de TVA à la
totalité des gros travaux représente pour les bailleurs sociaux, en régime de
croisière, une aide de 1,3 milliard de francs, qui sera apportée aux organismes
lorsqu'ils réalisent des travaux sur fonds propres.
Après discussion avec l'Union nationale des fédérations d'organismes d'HLM,
j'ai officiellement demandé le 29 octobre dernier à son président, M. Roger
Quilliot, que « le mouvement se mobilise et qu'il développe en contrepartie une
politique d'amélioration de l'habitat social guidée de façon prioritaire par la
recherche de baisses de charges pour les locataires, d'une humanisation -
visant spécialement le développement du nombre des gardiens - et d'une
adaptation de nos ensembles locatifs en les préservant de l'obligation de
lourdes réhabilitations ultérieures ». Cela se conclura, madame Pourtaud, par
la signature, la semaine prochaine, d'une convention prévoyant, grâce à
l'incitation à la réduction du temps de travail et au dispositif des
emplois-jeunes, la création en trois ans de 5 000 emplois de gestion de
proximité non récupérables sur les charges des locataires.
L'ensemble de cette politique aura - tout le monde le conçoit bien - de
réelles retombées sur l'emploi.
Pour répondre aux préoccupations de M. Balarello sur la situation de l'emploi
dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, nos choix permettront de
préserver ou de créer au minimum 30 000 emplois dans ce secteur. Les experts
indiquent que nous retrouvons ainsi la chance de pouvoir inverser la tendance à
la régression ou à la stagnation de l'activité du bâtiment, même si la
croissance sera encore nécessairement modérée.
Ces choix offrent ainsi une première traduction de l'objectif fixé par M. le
Premier ministre dans sa déclaration de politique générale, à savoir la
conciliation de l'efficacité économique et de la solidarité.
Permettez-moi, mesdames, messieurs les sénateurs, de terminer cette
présentation en insistant, même si le projet de budget de l'urbanisme vous a
déjà été présenté par M. Jean-Claude Gayssot, sur la volonté politique du
Gouvernement de faire du logement l'élément central d'une politique urbaine
rénovée. L'habitat est, en effet, un facteur essentiel de l'équilibre des
villes.
Le regroupement des compétences en matière d'urbanisme et de logement, auquel
M. le Premier ministre a donné corps, sur la proposition de M. Gayssot,
permettra de développer une nouvelle approche de ces questions.
Le chantier est immense, à l'échelle des difficultés auxquelles nos villes
sont confrontées en vue de préserver un cadre de vie de qualité pour toute la
population de notre pays.
Nous aurons à en débattre dans le cadre du programme législatif, en 1998. Je
vous indiquerai simplement, en avant-propos de ce futur débat, que notre
préoccupation est de créer des conditions nouvelles de collaboration entre
l'Etat et les collectivités locales, dans le respect de la décentralisation, et
de mettre en oeuvre effectivement, avec pragmatisme mais détermination, la loi
d'orientation pour la ville, qui propose de bonnes réponses à la question de la
mixité urbaine.
« Dans le respect de la décentralisation », ai-je dit. Permettez-moi une brève
parenthèse. L'article 72 de la Constitution prévoit que les collectivités
territoriales s'administrent librement, et ce « dans les conditions prévues par
la loi ». Cela signifie que 36 000 communes doivent participer à la République
et ne pas constituer 36 000 républiques...
M. Gérard Delfau.
Très bien !
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
... dans lesquelles les uns ou les autres, selon le
cas, seraient exclus.
(Très bien ! sur les travées socialistes.)
Telle n'est pas notre conception. La loi d'orientation pour la ville doit donc
être d'application généralisée.
M. René Régnault.
Voilà une précision qui s'imposait !
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Nous devons avoir l'ambition d'agir pour que les zones
rurales soient durablement habitées et les villes durablement habitables. Cela
suppose de nouveaux progrès dans les méthodes de travail, de nouveaux outils,
mais aussi des modes de raisonnement différents en matière foncière,
réglementaire et contractuelle.
Face à la préoccupation majeure des habitants de notre pays, qui désirent
pouvoir disposer d'un logement de qualité à des conditions accessibles et
compatibles avec leurs ressources, la politique du logement doit évidemment,
pour réussir, disposer de moyens à la hauteur de cette attente. Mais elle n'a
de chance de s'inscrire durablement en positif qu'à un certain nombre d'autres
conditions, à nos yeux tout aussi importantes.
Elle doit apporter des réponses crédibles à l'ensemble des questions posées,
du droit au logement des plus démunis jusqu'à la plus grande liberté possible
pour tous dans le choix du logement, en passant par une maîtrise des loyers et
des charges, les limitant à un poids admissible au regard des revenus de
chacun.
Elle doit contribuer à l'harmonie de nos villes, qui passe absolument par des
équilibres de peuplement que seule peut assurer la mixité de l'habitat sur leur
territoire.
Elle doit apparaître, aux yeux de nos concitoyens, comme reposant, dans le
parc social, sur une politique d'attribution tout à la fois juste, pertinente
et transparente.
Elle doit être élaborée dans un esprit de concertation et faire, autant que
possible, de toutes les parties prenantes - l'Etat, les organismes de logement
social, les collectivités locales et, bien évidemment, les locataires eux-mêmes
- de vrais partenaires.
M. René Régnault.
Absolument !
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j'en suis
conscient, je n'ai pas répondu à toutes les questions que vous avez posées,
qu'il s'agisse des copropriétés dégradées, évoquées par M. Vezinhet, de la
vacance et de son éventuelle taxation, abordées par M. Balarello, du niveau des
taux de certains prêts, signalé par M. Delfau, des problèmes spécifiques de
Paris, soulignés par Mme Pourtaud, qu'il s'agisse encore du foncier, des
expulsions, des réquisitions du FSL et de la participation attendue du
département de Paris. Sachez que j'aurai prochainement l'occasion de revenir
plus longuement sur ces sujets.
Nous traiterons ces différents dossiers conformément aux orientations du
budget que je viens de présenter, dans une dynamique de mobilisation de tous
les acteurs, à savoir l'Etat, les collectivités territoriales de tous niveaux,
mais, au premier chef, bien sûr, les communes, les opérateurs, qu'ils soient
constructeurs publics sociaux ou investisseurs privés, les bailleurs
potentiels, qu'il faut intéresser et mobiliser, ainsi que toutes les
associations porteuses d'aspirations qu'il nous faut traduire concrètement dans
le domaine du logement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite que vous adoptiez, dans ce même
esprit, le projet de budget du logement pour 1998.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Mes chers collègues, nous allons procéder à l'examen des crédits concernant le
logement.
J'indique au Sénat que ses crédits, inscrits à la ligne « Equipement,
transports et logement », seront mis aux voix, aujourd'hui même, à la suite de
l'examen des crédits affectés au tourisme.
Un certain nombre d'entre vous ont demandé la parole sur les crédits. Je vous
invite, mes chers collègues, à la plus grande concision, afin que nous
puissions achever l'examen de ces crédits au plus près de vingt heures.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 218 120 651 francs. »
Sur ces crédits, la parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez répondu par avance à quelques-unes de
mes interrogations ; mon propos en sera d'autant plus bref.
Il concerne les plafonds de ressources.
Le groupe communiste républicain et citoyen souhaite en effet une
revalorisation immédiate des plafonds de ressources d'accès aux HLM.
Ces plafonds ne correspondent plus à la réalité sociale et sont devenus, du
fait de leur niveau, un véritable instrument de ségrégation. Alors qu'en 1977
80 % de la population française entraient dans les plafonds de ressources
donnant accès à un logement social, cette proportion n'est plus que de 53 %
aujourd'hui, selon les chiffres de l'union nationale des fédérations
d'organismes d'HLM.
Ainsi, la plupart des techniciens et des cadres moyens, comme une grande
partie des ouvriers et des employés se trouvent dans l'impossibilité d'accéder
à un logement HLM. A titre d'exemple, un couple d'instituteurs, même en début
de carrière, s'en verra écarté.
Une revalorisation est donc nécessaire, de même que la suppression des clauses
qui pénalisent davantage encore les inactifs.
Un déplafonnement total est également nécessaire pour les quartiers qui
concentrent le plus grand nombre de familles en difficulté. Cette mesure est
primordiale pour contribuer au maintien des couches moyennes dans les quartiers
difficiles. Le logement social pourrait, à cet égard, être conçu comme un moyen
essentiel pour briser les mécanismes à la fois de ségrégation et
d'exclusion.
Nous installer dans une situation de ségrégation à l'américaine serait une
solution trop lourde de dangers pour que nous l'acceptions. La mixité sociale
dans l'habitat constitue un enjeu de société. C'est aussi l'un des objectifs du
Gouvernement, notamment de votre département ministériel, comme vous venez de
le rappeler.
La fixation des plafonds de ressources relève du domaine réglementaire ; la
revalorisation de ces plafonds peut donc être immédiate !
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Madame le sénateur, il existe un lien mécanique entre
les plafonds de ressources et le surloyer. La loi qui a institué ce dispositif
prévoit le dépôt d'un rapport d'ici à la fin de l'année faisant le bilan de sa
mise en oeuvre. Nous respecterons les délais.
Ce rapport doit être examiné dans tous les comités départementaux de
l'habitat. Cela nous donnera l'occasion de bien identifier tous les effets
discutables de la mesure, notamment ceux que vous avez soulignés.
Ensuite il s'agira pour nous, sans doute par la voie législative, de revoir la
politique des loyers, et ce dans le sens que j'ai indiqué. Les deux sujets sont
bien évidemment liés.
En ce qui concerne les plafonds de ressources, nous avons d'ores et déjà
parfaitement identifié quelques-uns des principaux problèmes rencontrés.
Aujourd'hui, selon la composition de la famille, les mêmes plafonds de
ressources donnent une éligibilité différente. Ainsi, les petits ménages,
personnes seules ou sans enfant, en particulier, sont pénalisés. Ils sont
exclus dans une proportion beaucoup plus large que les familles très
nombreuses. C'est notamment vrai pour les jeunes ménages et pour les
retraités.
En matière de plafonds de ressources, il existe une autre distinction selon
que le ménage compte un ou deux actifs. Il faut revenir sur cette distinction.
Le travail est en cours.
Qu'il s'agisse des surloyers ou des plafonds de ressources, nous répondrons à
ces deux problèmes qui, je le répète, sont liés, avec, en perspective,
l'objectif de mixité de peuplement sur lequel j'ai insisté tout à l'heure. Nous
en reparlerons de manière plus approfondie et toutes vos contributions seront
très utiles.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 3 829 596 637 francs. »
Sur ces crédits, la parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
Monsieur le président, mon intervention portait encore sur les plafonds de
ressources, le supplément de loyer de solidarité et la mixité sociale. Mais M.
le secrétaire d'Etat vient de répondre par avance à mes questions. Je renonce
donc à la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
M. le secrétaire d'Etat ayant déjà répondu à ma collègue Mme Pourtaud sur les
congés-ventes, mon propos sera très court.
C'est une véritable vague de congés-ventes qui déferle aujourd'hui sur Paris.
Vous avez chargé un haut fonctionnaire d'une mission sur ce problème. J'avais
l'intention précisément de vous demander un moratoire qui permette de trouver
des solutions réelles aux problèmes de ces petits cadres, petits
fonctionnaires, employés et retraités qui sont dans l'impossibilité d'acheter
les logements qu'ils occupent.
Chacun le sait, il s'agit là d'exercer un contrôle sur l'utilisation des fonds
publics. Comme l'a dit ma collègue Mme Pourtaud, certaines situations sont
proprement scandaleuses, par exemple rue du Commandant-René-Mouchotte !
Mais, au-delà, reste à trouver une solution - une structure de type HLM ou
autre - permettant de racheter les immeubles. En attendant, et puisque les
bailleurs sont, en général, de grandes compagnies ou des investisseurs
institutionnels, dont on sait qu'ils ont les reins solides, il serait humain
d'accorder un moratoire.
M. Gérard Delfau.
Très Bien !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 7 311 176 000 francs ;
« Crédits de paiement : 3 850 677 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
M. le président.
« Titre VI - Autorisations de programme : 8 264 547 000 francs ;
« Crédits de paiement : 3 122 311 000 francs. »
Sur ces crédits, la parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Monsieur le secrétaire d'Etat, pardonnez-moi de prolonger un peu le débat,
mais je tenais à vous dire que, globalement, j'apprécie personnellement
l'ensemble des dispositions qui sont prévues dans votre budget.
Celui-ci comporte deux volets : l'un concerne le logement social, l'autre,
l'accession sociale à la propriété.
S'agissant du logement social, nous constatons qu'en définitive les efforts
prévus au titre de 1998 sont à peu près équivalents à ceux de 1997 en ce qui
concerne les PLA et les PLA-TS. Notons cependant les moyens supplémentaires en
faveur de la réhabilitation. L'extension du taux réduit de TVA aux travaux
effectués sur les logements financés grâce aux PLA ainsi que le maintien de
l'avantage fiscal malgré la baisse corrélative de la prime PALULOS devraient
donner une bouffée d'oxygène relativement importante aux organismes d'HLM.
J'espère qu'ils en profiteront pour aller eux-mêmes un peu plus loin, comme
l'ont souhaité MM. Collard et M. Bimbenet.
S'agissant maintenant de l'accession sociale à la propriété, vous changez les
règles du jeu qui avaient été définies par votre prédécesseur, M. Périssol.
Vous réservez aux primo-accédants les prêts à taux zéro. Nous constatons une
diminution de 10 000 de ces prêts par rapport à la situation antérieure.
Dans une conjoncture aussi difficile que la nôtre, on peut comprendre que l'on
réserve l'accession à la propriété à ceux qui en ont le plus besoin. Cependant,
comme on constate, par ailleurs, du fait de l'application des mesures
anciennes, qu'elle profitait également à un certain nombre de jeunes ménages,
je me demande s'il n'y aurait pas lieu, sinon au titre de l'exercice 1998 du
moins le plus tôt possible, de réfléchir, dans le cadre d'une vision plus
globale de la politique du logement, aux moyens d'améliorer la situation des
jeunes ménages qui souhaitent changer de logement.
J'aborderai maintenant un problème d'ordre purement administratif, monsieur le
secrétaire d'Etat, s'agissant des conditions d'accès aux PLA-TS pour les
organismes d'HLM.
Vous le savez, lorsqu'un organisme d'HLM se porte acquéreur d'un terrain ou
d'une construction et qu'il finance l'opération par un PLA, il dispose d'un
délai de dix ans pour réaliser l'opération et déposer sa demande de
financement. Pour les PLA-TS, ce délai de dix ans n'existe pas.
Or, avant de se lancer dans l'acquisition, soit du terrain, soit du logement
qui va faire l'objet d'un PLA-TS, l'organisme d'HLM doit obtenir une décision
favorable sur le financement. Cela pose problème notamment lorsqu'il s'agit
d'acquérir le logement de personnes surendettées.
Il faudrait que les HLM puissent bénéficier d'un délai qui soit au minimum
d'un an.
D'après les éléments portés à ma connaissance en réponse à une question
écrite, il semblerait que, par dérogation au dispositif, on puisse disposer de
ce délai d'un an. Mais l'interprétation des trésoriers-payeurs généraux des
départements est assez variable. Par exemple, dans le département de l'Oise,
dont je suis l'élu, l'interprétation est restrictive et les services refusent
le délai d'un an.
Pourtant, le rachat d'un logement appartenant à des personnes surendettées est
une excellente opération, pour des raisons tant psychologiques que sociales. En
effet, non seulement on permet ainsi à une personne en situation difficile de
garder son logement, mais aussi on la fait bénéficier d'un loyer en rapport
avec ses capacités contributives.
Je tenais à attirer votre attention sur ce point, monsieur le secrétaire
d'Etat, car il serait utile que, par la voie réglementaire, l'ensemble des
services du Trésor soient informés de l'existence de cette souplesse dans
l'utilisation des crédits PLA-TS que constitue le délai d'un an.
Je voudrais attirer votre attention sur un autre point - et je le dis autant à
vous-même, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'à mes collègues de la majorité
actuelle - au sujet du FSL, le fonds de solidarité pour le logement. Je me
souviens du débat qui s'était instauré à la Haute Assemblée à propos de
l'affectation du produit de la taxe sur les surloyers, qui n'a pas été à la
hauteur des espérances du précédent gouvernement : celui-ci en attendait 400
millions de francs environ, et nous sommes aujourd'hui autour de 250 millions
de francs.
J'avais demandé, à l'époque, avec plusieurs de nos collègues - et avec nos
collègues socialistes ! - que ces crédits soient réservés au financement du
logement social. Or, cette année, vous avez rebudgétisé le FSL. En toute
logique, il aurait été souhaitable que cette décision soit accompagnée d'une
mesure de réservation du produit de la taxe sur le surloyer, ainsi libéré, au
financement du logement social. Cela n'a pas été possible cette année. Je
souhaite donc que des mesures soient prises rapidement. Il faut éviter que le
produit de la taxe ne tombe dans les caisses de l'Etat et qu'il soit détourné
de l'affectation que nous avions prévue.
J'en viens à la deuxième partie de mon intervention.
M. le président.
Mon cher collègue, je sais que vous avez renoncé à prendre la parole dans la
discussion générale, mais je vous rappelle qu'un orateur inscrit sur un titre
n'a droit qu'à cinq minutes !
M. Alain Vasselle.
Avec votre indulgence, monsieur le président, je terminerai, en une minute,
par deux remarques.
Tout d'abord, les crédits de l'ANAH font l'objet d'un effort substantiel, et
je m'en félicite. Je souhaite - mais M. le secrétaire d'Etat nous a donné
quelques assurances sur ce point en commission - que nous puissions aller plus
loin en réservant la totalité du produit de la taxe aux propriétaires
privés.
L'amendement qu'a déposé M. Chervy, et que nous allons examiner dans un
instant, me satisfait donc pleinement, même si je regrette qu'il se limite aux
zones de revitalisation rurale. Il serait souhaitable que cette mesure soit
étendue à l'ensemble de l'espace rural, car les besoins sont importants.
Par ailleurs - et je terminerai sur ce point
(Murmures sur plusieurs travées.)
- je regrette que le précédent
gouvernement n'ait pas persévéré dans la voie dans laquelle il s'était engagé :
une réflexion de fond doit être menée sur toutes les mesures relatives au
logement privé.
Vous avez l'intention, je le sais, de proposer aux propriétaires privés de
signer une convention afin d'accroître le parc locatif social à partir du parc
privé. Mais des allégements doivent être prévus, notamment sur les droits de
mutation, pour assurer une meilleure fluidité dans le logement ancien.
J'en termine
(Exclamations sur de nombreuses travées.)
en disant... qu'il y aurait
bien d'autres choses à dire, monsieur le secrétaire d'Etat.
Globalement, j'éprouve une certaine satisfaction, mais je pense qu'il y a des
efforts encore substantiels à effectuer en matière de logement.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
Article additionnel après l'article 67
M. le président.
En accord avec la commission des finances, j'appelle en discussion
l'amendement n° II-74 rectifié, tendant à insérer un article additionnel après
l'article 67.
Par amendement n° II-74 rectifié, MM. Chervy, Fatous, Piras, Vezinhet et les
membres du groupe socialiste et apparentés proposent :
A. - Après l'article 67, d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans l'article L. 321-1 du code de la construction et de l'habitation, après
les mots : "des immeubles à usage principal d'habitation", sont
insérés les mots : "et la transformation en logements locatifs des
immeubles autres que ceux précédemment cités situés dans les zones de
revitalisation rurale telles que définies par l'article 42 de la loi n° 95-115
d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, dès lors
qu'ils sont attenants à un immeuble d'habitation et appartiennent à une zone
bâtie agglomérée". »
B. - En conséquence, de faire précéder cet article additionnel d'une division
ainsi rédigée :
« Equipement, transports et logement.
« III. Logement. »
La parole est à M. Chervy.
M. William Chervy.
La loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire
prévoyait, dans son article 61, le dépôt d'un projet de loi sur l'espace rural.
Ce texte devait notamment traiter du logement locatif en zone rurale.
Le logement en zone rurale comporte des spécificités qui lui sont propres et
qui doivent être prises en compte. Le bâti rural est vétuste à 50 %, alors que
la moyenne nationale n'est que de 32 %. Il est souvent mal équipé et,
s'agissant des bâtiments à usage d'habitation, le nombre de logements vacants
est important.
L'article 62 de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du
territoire a ébauché une première réponse en prévoyant que les concours
financiers de l'Etat à la réhabilitation de l'habitat ancien seraient attribués
par priorité aux communes situées dans les zones de revitalisation rurale, en
vue de développer l'offre de logements locatifs sociaux. A ce jour, ce
dispositif s'est traduit essentiellement par un renforcement des moyens
budgétaires, notamment de ceux de l'ANAH, dans ces zones.
L'amendement que je défends aujourd'hui devant vous va dans le même sens.
Tout d'abord, pour tenir compte de la spécificité d'un bâti rural composé de
nombreuses constructions à vocation agricole, artisanale ou commerciale, je
propose d'autoriser l'ANAH à intervenir sur ce bâti pour permettre sa
transformation en locaux à usage d'habitation. C'est, à mon sens, un moyen
supplémentaire pour répondre à la demande de logements locatifs dans ces zones,
tout en permettant une valorisation de ce patrimoine qui, bien souvent, se
dégrade faute d'adaptation à la demande et aux pratiques actuelles.
Enfin, j'ai souhaité encadrer ce nouveau champ d'intervention de l'ANAH. Ne
seraient concernés que les bâtiments situés dans les zones de revitalisation
rurale et ceux qui sont attenants à un immeuble d'habitation appartenant à une
zone bâtie agglomérée. C'est là, je pense, un moyen intéressant pour
redynamiser les petits bourgs, en y attirant de nouvelles populations.
La portée de cet amendement est modeste, mais il me paraît constituer une
réponse opportune à la nécessaire valorisation du bâti rural.
J'espère que le Gouvernement et le Sénat apporteront leur soutien à cet
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri Collard,
rapporteur spécial.
Cet amendement, comme l'a rappelé M. Chervy, a pour
objet d'autoriser l'ANAH à subventionner les transformations de locaux en
logements dans les zones de revitalisation rurale.
La commission des finances n'ayant pas examiné cet amendement, c'est un avis
personnel que je vais émettre, mais il tient compte de la jurisprudence
constante de la commission en la matière.
Dans le cadre d'une transformation de locaux, cet amendement est déjà
satisfait par la réglementation en vigueur. Dans mon rapport écrit - et je suis
sûr que M. Chervy l'a lu - j'ai relevé que l'ANAH avait participé, en 1996, à
la création et au financement de plus de 2 000 logements à partir de locaux
affectés à un autre usage.
Je le reconnais, 2 000 logements sur un total de 38 000 logements financés par
l'ANAH, c'est insuffisant. Je demande donc à M. le secrétaire d'Etat de nous
fournir d'autres précisions : la loi actuelle permet-elle d'améliorer ce
rapport, ou convient-il de la modifier en adoptant l'amendement n° II-74
rectifié ?
Est-il envisageable de relever les subventions - ce serait nouveau - dans les
zones fragiles de revitalisation rurale ou de redynamisation urbaine ?
Ensuite - et ce serait plus important à mes yeux - ne faudrait-il pas lever
tous les obstacles à l'intervention de l'ANAH sur la totalité du territoire, et
non pas seulement dans certaines zones ? Il existe en effet, en France, des
milliers, pour ne pas dire des dizaines de milliers de logements vacants.
En bénéficiant d'une part plus importante de la taxe additionnelle au droit au
bail - notre collègue Alain Vasselle l'a rappelé, le produit de cette taxe est
de 3,5 milliards de francs, dont seulement 2,2 milliards de francs sont
reversés à l'ANAH - l'agence pourrait sans aucun doute étendre ses activités,
améliorant ainsi d'une manière significative l'économie et l'emploi, surtout
pour les artisans et les entreprises du bâtiment, secteur dont tout le monde
sait qu'il est sinistré.
Je souhaite, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous nous apportiez ces
précisions et qu'à défaut vous nous fassiez des propositions en ce sens.
Il me semble que cet amendement est satisfait, mais, s'il subsistait un doute
après la réponse du Gouvernement, je serais favorable à son adoption.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Le ministère de l'équipement et du logement ne
souhaite pas s'immiscer sur le territoire du ministère de l'agriculture ou du
ministère de l'aménagement du territoire ! Or le plaidoyer très convaincant
développé par le défenseur de l'amendement a surtout mis en avant le
développement rural, qui ne relève pas de la compétence du secrétariat d'Etat
au logement.
Toutefois, j'ai pu constater le souci des auteurs de l'amendement de bien
centrer celui-ci sur les zones de revitalisation rurale, qui sont des zones
délimitées au plan national et dans lesquelles aucune chance de développement
n'est à négliger, sauf à assister à une désertification accrue.
Telles sont les raisons pour lesquelles il n'est pas possible d'être en
désaccord, ni sur la démarche suivie ni sur la qualité de l'argumentation
développée.
M. Collard s'est demandé si les textes actuels ne suffisaient pas en la
matière. Selon les indications que j'ai pu obtenir de l'ANAH, les textes
visent, actuellement, dans le même immeuble, les annexes ; quant aux logements
qui ont été gagnés, ils l'ont été soit par transformation d'un rez-de-chaussée
qui était primitivement à usage commercial et qui se situait au-dessous de
l'habitation, soit par un aménagement de combles, mais il ne pouvait s'agir de
bâtiments attenants indépendants.
Les annexes rurales, qui sont visées par l'amendement de M. Chervy, peuvent
être considérées comme des extensions horizontales plus que comme des
extensions verticales. Il s'agit donc, effectivement, d'une extension du champ
d'application des dispositions actuellement mises en oeuvre par l'ANAH.
Le Gouvernement n'y est pas opposé, même si je persiste à penser que le
ministre de l'agriculture serait plus qualifié que moi pour répondre à une
telle question.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-74 rectifié.
M. José Balarello.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Balarello.
M. José Balarello.
Je souscris entièrement à l'amendement de M. Chervy. Je regrette simplement
qu'il vise exclusivement les zones bâties agglomérées.
J'attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement au sujet de
certaines dispositions du code de l'urbanisme relatives à la loi montagne. En
effet, nombre de bâtiments à usage agricole sont actuellement situés en dehors
des villages, c'est-à-dire en dehors de zones agglomérées. Ils tombent en
ruine, mais on ne peut pas les réhabiliter parce qu'ils ne sont pas situés dans
un village.
Je vous demande donc, monsieur le secrétaire d'Etat, d'entreprendre une
démarche auprès de votre collègue chargée de l'aménagement du territoire.
Mme Nicole Borvo.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
La question qui est posée au travers de cet amendement de nos collègues du
groupe socialiste est tout à fait importante.
Il est en effet connu de tous ici qu'il existe un certain décalage entre le
montant de la subvention accordée à l'Agence nationale pour l'amélioration de
l'habitat et le montant de la taxe additionnelle au droit de bail, qui sert en
principe à l'alimenter.
Le décalage est assez sensible puisqu'il atteint pratiquement 1 milliard de
francs, ce qui pose d'incontestables questions en matière de programmation des
interventions de l'agence.
Pour autant, on ne peut dénier à cet amendement le mérite de porter un
éclairage particulier sur ce qui devrait constituer une intervention
primordiale de l'agence, à savoir la revitalisation du bâti rural dans les
régions du pays les plus confrontées au problème des déséquilibres économiques
et démographiques.
Cette intervention participe à plusieurs objectifs : maintien et stabilisation
des populations, contribution de la politique de rénovation de l'habitat rural
à la politique d'aménagement du territoire elle-même.
Il nous semble, en la matière, nécessaire de sortir de la perspective actuelle
en matière de zones rurales, qui est celle de la multiplication des résidences
secondaires en lieu et place des résidences principales, ce qui dévitalise le
tissu social et économique de nos régions.
Tout cela, néanmoins, ne peut nous faire oublier la nécessité d'intégrer cet
effort en direction du logement et d'une politique d'aménagement du territoire
plus globale, quittant, par exemple, la simple mise en oeuvre de dispositions
fiscales incitatrices pour une approche plus volontariste - osons le mot - de
l'ensemble des questions, qui sont aussi des questions de développement et de
proximité des services publics.
Je souligne ce point pour l'ensemble de mes collègues de la majorité
sénatoriale, qui ont, depuis le début de la discussion de la seconde partie du
projet de loi de finances, soutenu les amendements de suppression de crédits au
titre III, lesquels sont précisément destinés à permettre la présence des
services publics sur tout le territoire.
M. Alain Vasselle.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Je souhaite indiquer que j'approuve l'amendement de M. Chervy. Mais je
nuancerai cette appréciation de deux observations qui, à mon sens, ne sont pas
sans importance.
Tout d'abord, je déplore, je le répète, que cet amendement soit trop
restrictif et ne prenne pas en considération l'ensemble de l'espace rural. En
effet, j'affirme que les zones de revitalisation rurale, qui représentent
d'ailleurs une portion très modeste de notre territoire, ne sont pas les seules
à rencontrer les difficultés évoquées et que nous connaissons des situations
identiques dans les espaces ruraux extérieurs à ces zones. Il est donc
regrettable que le champ d'application de l'amendement soit aussi limité.
Par conséquent, j'espère que nous pourrons aller beaucoup plus loin à
l'occasion de l'examen du texte relatif à l'aménagement du territoire que nous
soumettra Mme Voynet.
Ma seconde remarque, qui est à mon avis plus importante, rejoint les
observations formulées par M. Collard.
La disposition proposée ne donnera sa pleine mesure sur le terrain que si sa
mise en oeuvre est soutenue par des crédits d'un montant significatif. Cela
m'amène à répéter, monsieur le secrétaire d'Etat, que si le produit de la taxe
destinée à assurer le financement de l'ANAH est de 3,55 milliards de francs,
cet organisme ne perçoit que 2,2 milliards de francs. Certes, c'est mieux que
les 2,105 milliards de francs prévus au titre de l'exercice 1997 - la hausse
est sensible - mais cela reste très nettement insuffisant pour financer la
mesure préconisée par M. Chervy.
En conséquence, si nous souhaitons adopter celle-ci, il convient de prévoir
une augmentation des crédits de l'ANAH, sinon nous devrons répartir sur un plus
grand nombre de dossiers l'enveloppe de 2,2 milliards de francs, avec un risque
de perte d'efficacité.
C'est pourquoi j'estime qu'il aurait été souhaitable, monsieur Chervy, que
vous accompagniez votre amendement d'une augmentation des crédits à due
concurrence, afin de parer à ce danger. Sinon, nous nous bornerions, passez-moi
l'expression, à amuser la galerie !
M. André Vezinhet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vezinhet.
M. André Vezinhet.
Je voudrais souligner la pertinence de l'amendement de mon collègue William
Chervy.
En effet, il suffit de se promener dans nos villages pour s'apercevoir qu'ils
sont souvent défigurés par les traces de l'abandon de telle ou telle activité,
notamment commerciale.
Par conséquent, la mesure incitative prévue par cet amendement me paraît
particulièrement intéressante.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-74 rectifié, accepté par la commission et
par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 67.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant le logement.
Le Sénat va maintenant interrompre ses travaux ; il les reprendra à vingt-deux
heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures vingt, est reprise à vingt-deux heures
trente, sous la présidence de M. Jean Delaneau.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
vice-président
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 1998, adopté
par l'Assemblée nationale.
V. - TOURISME
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
l'équipement, les transports et le logement : V. - Tourisme.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Paul Loridant,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, madame le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, en ce dimanche soir, nous voici réunis
pour une séance « de tourisme » en ce beau palais du Luxembourg.
L'examen du budget du tourisme pour 1998 est l'occasion de rappeler que, si la
France a une longue histoire, digne de tous les voyages, elle est aussi une
grande puissance touristique. Encore faut-il qu'elle le demeure. Il n'y a pas,
en la matière, de situation acquise.
Après un début difficile, la saison d'été 1997 se présente bien. Elle
s'annonce un peu moins bonne quant à la fréquentation française, qui connaît un
certain tassement, sans doute révélateur d'un approfondissement de la crise
sociale. En revanche, les résultats sont excellents en ce qui concerne la
clientèle étrangère.
On note que les régions qui ont bénéficié tout particulièrement de la hausse
de la clientèle étrangère au mois d'août ont été l'Auvergne, la région
Rhône-Alpes, le Nord - Pas-de-Calais ainsi que la ville de Paris.
L'excédent de notre balance touristique pour 1997 devrait, en conséquence,
être important.
Au cours du premier semestre de 1997, les recettes internationales ont
représenté 73,4 milliards de francs, contre 65 milliards de francs lors du
premier trimestre de 1996, soit une progression de 13 %.
Les dépenses des touristes français ont également progressé, mais plus
faiblement, puisqu'elles s'élèvent à 42,6 milliards de francs au lieu de 40,9
milliards de francs lors du premier semestre de 1996.
De ce fait, le solde du poste « voyage » de la balance des paiements s'élève,
pour le premier semestre, à 30,8 milliards de francs et connaît une progression
de 27,8 % par rapport à la même période de l'année précédente.
Mes chers collègues, vous trouverez dans le rapport écrit de la commission des
finances, d'autres informations qui, sans devoir déclencher des réactions
exagérées, montrent que cette position est fragile.
Certes, avec 62,4 millions d'arrivées touristiques internationales en 1996, la
France représente près de 10,5 % du marché des flux touristiques mondiaux et 18
% du marché européen. Notre pays confirme ainsi sa position de première
destination touristique internationale, devant les Etats-Unis - 44,8 millions
d'arrivées - et l'Espagne - 41,3 millions d'arrivées. Mais une analyse
attentive devrait nous inciter à ne pas nous endormir sur nos lauriers.
A moyen terme, la France ne capte qu'une part modeste de l'accroissement du
marché mondial du tourisme, dont la composante la plus dynamique se trouve
aujourd'hui en Asie. Il existe d'ailleurs des risques de progression de ce
tourisme vers l'Asie avec la dépréciation des monnaies asiatiques.
Mais il faut aussi souligner que, à court terme, il existe une forte pression
concurrentielle.
L'Espagne, l'Italie, sont des concurrents redoutables. Certes, ces deux pays
ont pu bénéficier, sous l'effet des dépréciations de leur monnaie, d'avantages
compétitifs excessifs. Mais il faut aussi voir dans leur succès une meilleure
adaptation de leur offre à la demande ou le résultat d'un effet de mode sur
l'origine duquel il convient de s'interroger.
A cet égard, le cas des Japonais mérite d'être souligné. En effet, sur 16,7
millions de touristes japonais s'étant rendus à l'étranger en 1996, la France
en a accueilli 855 000, ce qui représente une part de marché de 5 %, qui est
certes importante, mais qui est néanmoins en baisse depuis 1994, année où elle
avait atteint 7 %.
Rappelons que les séjours des Japonais en France représentent à peine 1,5 % de
l'ensemble des séjours des touristes étrangers dans notre pays. Mais leurs
dépenses représentent, quant à elles, près de 5 % de nos recettes
touristiques.
Cet exemple doit nous inciter à surveiller attentivement notre position
concurrentielle dans les pays à fort pouvoir d'achat.
Notons enfin, en termes de recettes touristiques internationales, que si les
Etats-Unis sont en tête avec plus de 15 % du total, en Europe, les positions se
sont rapprochées entre l'Espagne, la France et l'Italie. L'Espagne a progressé
de manière très significative - plus 13,2 % - ses recettes dépassant pour la
première fois celles de la France, qui, selon l'organisation mondiale du
tourisme, se classe en deuxième position.
Je voudrais maintenant attirer l'attention de la Haute Assemblée et de Mme le
secrétaire d'Etat sur un phénomène qui pourrait se révéler inquiétant : les
premiers résultats de l'enquête aux frontières pour 1996 font apparaître,
malgré une progression de 4 % des arrivées, une diminution de la durée moyenne
des séjours de près d'une journée par rapport à 1994. Par ailleurs, on relève
une augmentation importante du nombre des touristes en transit. La France ne
doit pas devenir un simple lieu de passage, un pays que l'on traverse pour
aller soit en Espagne, soit en Italie.
Bref, le secteur du tourisme ne va pas mal dans l'ensemble.
Il y aurait cependant beaucoup à dire sur la situation de la restauration.
Mais je pense que mon collègue M. le rapporteur pour avis de la commission des
affaires économiques développera cet aspect particulier du secteur du
tourisme.
Le secteur du tourisme ne va donc pas mal. Ce n'est pas pour autant une raison
pour que l'Etat continue, comme il l'a fait par le passé, en dépit de la bonne
volonté des responsables, de se désintéresser du budget d'un secteur qui
représente plus d'excédent commercial que l'automobile. Nous ne dirons jamais
assez que le budget du tourisme, tout modeste qu'il soit, est un puissant
catalyseur pour notre économie.
Dans un tel contexte, madame le secrétaire d'Etat, il faut reconnaître qu'en
dépit de vos efforts votre budget n'est pas à la hauteur des besoins et, je
n'en doute pas, à la hauteur de vos ambitions.
Effectivement, les crédits demandés au titre du tourisme pour 1998 s'élèvent à
338 millions de francs, soit une baisse de près de 5 % par rapport à ceux qui
étaient inscrits dans la loi de finances initiale pour 1997.
Si l'on note un effort appréciable en matière de dépenses en capital - nous y
reviendrons - l'essentiel de votre budget, madame le secrétaire d'Etat,
c'est-à-dire les dépenses ordinaires, est en diminution, même si vous parvenez
à maintenir les moyens d'action effectivement disponibles malgré les
annulations de crédits intervenues au cours de l'exercice 1997.
Rappelons que le gel des crédits intervenu en début d'année 1997, sur
l'initiative du gouvernement d'Alain Juppé, avait eu pour conséquence de rendre
indisponibles plus de 38 millions de francs de crédits.
L'arrêté du 9 juillet 1997 pris par le nouveau gouvernement a transformé ces
gels en annulations de crédits, sauf en ce qui concerne le chapitre 44-01 «
Développement de l'économie touristique », pour lequel vous avez obtenu, madame
le secrétaire d'Etat, le rétablissement de 10 millions de francs.
En ce qui concerne les dotations pour 1998, on remarque essentiellement deux
baisses significatives, que je voudrais commenter brièvement, vous renvoyant au
rapport écrit pour le détail de l'évolution des crédits.
La dotation de l'article 20-20 « Valorisation du produit touristique français
- AFIT », qui concerne l'agence française de l'ingénierie touristique, voit son
montant diminuer de près de 25 % par rapport à la loi de finances initiale pour
1997, même si les crédits demandés sont au niveau de 1997, après restrictions
budgétaires. Vous m'avez fait savoir, madame le secrétaire d'Etat, que cette
diminution ne porte pas atteinte à la capacité d'intervention de cet organisme,
étant donné les réserves - 12 793 000 francs sont inscrits au bilan de 1996 -
que celui-ci a pu constituer au cours de ses premières années d'activité.
La dotation de l'article 50 « Promotion à l'étranger - Maison de la France »
régresse de plus de 9 % pour se situer à près de 10 millions de francs, soit un
niveau inférieur à celui de 1997, qui n'avait pas été touché par les mesures de
restrictions budgétaires. Il est précisé que les dotations affectées aux
actions de promotion conduites en partenariat ne doivent diminuer que de 3,6 %,
tandis que la subvention au groupement d'intérêt économique destinée au
fonctionnement de la structure subit une baisse de 12,7 % de ses moyens,
c'est-à-dire une diminution du même ordre que celle qui touche l'administration
centrale.
Compte tenu des enjeux, de la concurrence accrue sur le marché mondial du
tourisme, l'outil que constitue Maison de la France doit être préservé et sans
doute développé. Mais je crois qu'il convient d'examiner les actions de cet
organisme afin d'en apprécier l'efficacité et de voir quelles sont les
conséquences d'une évolution qui tend à donner une part prépondérante aux
financements des partenaires de l'Etat.
A ce sujet, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je vous informe
que je me propose ès qualités de rapporteur spécial de la commission des
finances de mettre à profit l'année 1998, et ce à la demande de M. le président
de la commission des finances, M. Poncelet, pour donner un coup de projecteur
particulier sur l'outil que constitue Maison de la France, contrôle qui
s'exercera sur pièces, mais également sur place.
En définitive, on peut dire que ce projet de budget marque un coup d'arrêt à
la dégradation qu'a connue le tourisme depuis plusieurs années.
Venons-en aux aspects franchement positifs de ce projet de budget.
M. le président.
Je vous demande de conclure, monsieur le rapporteur spécial.
M. Paul Loridant,
rapporteur spécial.
Le tourisme, ce n'est pas seulement un domaine
porteur, c'est aussi une source de devises. Le tourisme, ce n'est pas
uniquement un facteur essentiel du développement régional, c'est également une
source appréciable d'emplois dans des secteurs qui, avec tout leur maillage de
petites et moyennes entreprises, représentent près de 9 % du produit intérieur
brut.
Mais le tourisme, c'est aussi et surtout un mode d'épanouissement, ce sont les
vacances, les vacances pour tous !
A cet égard, comment ne pas se féliciter de l'effort que vous faites, madame
le secrétaire d'Etat, en faveur du tourisme associatif et, d'une façon
générale, de tout ce qui permettra aux Français de partir en vacances, sachant
que 40 % d'entre eux n'ont pas cette joie ?
Les associations jouent un rôle essentiel dans l'effort de redistribution des
services de loisirs en direction des personnes et des familles en
difficulté.
Votre objectif, madame le secrétaire d'Etat, est de définir des orientations
fortes et relayées par des acteurs locaux, pour soutenir les associations, les
comités d'entreprise, les collectivités locales afin qu'elles intensifient les
actions en partenariat pour l'intégration des populations en difficulté ou,
tout simplement, les personnes exclues des vacances.
Vous souhaitez d'abord donner une nouvelle impulsion au plan patrimoine.
Depuis 1990, le ministère contribue à la rénovation des hébergements
touristiques gérés par les associations. Il s'agit des maisons familiales, des
villages de vacances situés en zone rurale, sur le littoral et en montagne.
Environ 10 000 lits par an bénéficient d'une subvention de rénovation et 40 000
places d'hébergement gérées par des associations qui interviennent dans le
tourisme social doivent encore être réhabilitées.
En 1997, la direction du tourisme a engagé une programmation d'un volume de 8
millions de francs, pour dix-huit opérations.
Pour 1998, le projet de loi de finances prévoit l'ouverture de 20,3 millions
de francs d'autorisations de programmes et de 16,9 millions de francs de
crédits de paiement afin de poursuivre la politique engagée en matière de
rénovation des hébergements touristiques à caractère social ou familial.
Vous avez l'intention - et je vous en félicite - de relancer la politique
contractuelle en plus des différentes actions de renforcement du
professionnalisme du secteur du tourisme associatif, que cofinance la direction
du tourisme.
Enfin, vous avez l'intention, et je vous en félicite également, d'étendre le
champ d'application du chèque-vacances aux petites entreprises. Vous ne
manquerez pas, j'en suis sûr, madame le secrétaire d'Etat, d'évoquer ce sujet
dans votre intervention.
Nous souhaiterions aussi avoir quelques informations sur la mise en oeuvre du
plan emplois-jeunes dans le tourisme, secteur qui pourrait contribuer
notablement à la réussite de ce plan.
M. le président.
Mon cher collègue, il vous faut conclure.
M. Paul Loridant,
rapporteur spécial.
Des propositions ont été faites par mon collègues
Jean Vila, mon compatriote des Pyrénées-Orientales.
Je souhaiterais savoir aussi, madame le secrétaire d'Etat, quelles retombées
vous attendez de la Coupe du monde de football sur le budget du tourisme.
Voilà donc les grandes lignes d'un budget qui ne répond, certes pas, à toutes
nos attentes - sans doute pas aux vôtres non plus - mais qui me semble marquer,
au-delà des chiffres, la volonté, que nous apprécions, de donner à votre
secrétariat d'Etat toutes les responsabilités de coordination et d'impulsion
dans un domaine réduit jusqu'à présent à la portion congrue budgétaire.
Malgré les réserves que l'on pourrait faire sur la modestie de ces crédits, la
commission a décidé, par cohérence avec ses positions antérieures, de proposer
l'adoption du budget du tourisme pour 1998.
(Applaudissements sur les
travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées
socialistes.)
M. Emmanuel Hamel.
Elle a bien fait !
M. le président.
Mes chers collègues, je vous demande de respecter scrupuleusement les temps de
parole, car, si la séance durait au-delà de zéro heure trente, le retard se
répercuterait sur la journée de demain.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Charles Ginésy,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, en
1996, le poids économique du tourisme dans l'économie nationale pouvait se
résumer par les chiffres suivants : 62,4 millions d'arrivées de touristes
étrangers, 667 milliards de francs consommés auprès des entreprises du secteur,
soit 8,5 % du PIB, 750 000 emplois permanents.
Compte tenu des très belles performances réalisées en 1997, le solde de la
balance des paiements pourrait s'établir à plus de 60 milliards de francs.
C'est dire que votre projet de budget, arrêté à 338 millions de francs, peut
sembler bien modeste, mais votre rôle est néanmoins essentiel, car vous pouvez
impulser des orientations et surtout corriger des dysfonctionnements.
La reconnaissance d'un département ministériel autonome va donner une
meilleure lisibilité aux décisions prises par l'Etat et favoriser la
coordination des actions des différents ministères menées dans ce domaine.
Les crédits de votre département ministériel sont en baisse apparente de 3,46
%. Toutefois, compte tenu de gels, puis d'annulations, les crédits sont en
réalité reconduits par rapport aux crédits qui furent effectivement disponibles
en 1997.
Dans ce contexte d'économies budgétaires, vous privilégiez le tourisme social
à travers la relance effective du plan-patrimoine, qui finance la rénovation
des hébergements touristiques et sociaux.
Cet effort financier est à saluer, car il devrait aider ce type de structures
d'hébergement à retrouver sa finalité d'origine, à savoir offrir des structures
de loisirs et de vacances à des familles modestes.
Mais, à l'inverse, vous avez décidé des économies sévères sur d'autres lignes
de votre budget, dont certaines nous paraissent porteuses de risques à moyen
terme. Il en est ainsi de la diminution des crédits consacrés au groupement
d'intérêt économique Maison de la France.
En effet, si l'activité du tourisme mondial va connaître une croissance très
soutenue dans les dix ans qui viennent, il ne faut pas sous-estimer la
concurrence effrenée que se livrent les pays entre eux.
Dans ce contexte, la commission des affaires économiques émet les plus grandes
réserves sur la diminution du financement public de Maison de la France, qui va
inéluctablement entraîner une réduction des actions de promotion à
l'étranger.
Ma deuxième mise en garde concernera le secteur de la petite hôtellerie
indépendante, qui connaît de sérieuses difficultés.
Permettez-moi de citer l'exemple de mon département, dans lequel le tourisme
représente une part très importante de l'activité économique. Sur la Côte
d'Azur, le constat est sévère puisque, pour la seule année 1996, vingt-huit
hôtels totalisant 371 chambres ont définitivement fermé.
Il est donc urgent, pour enrayer cette inquiétante diminution, d'accroître de
manière significative les crédits du fonds SOFARIS à travers la convention en
cours de négociation avec le Trésor.
L'hôtellerie, à laquelle j'associerai la restauration, représente un gisement
d'emplois considérable qu'il faut encourager par des mesures adéquates.
L'un des freins à l'emploi est le coût trop élevé de la main d'oeuvre, et il
faut saluer la mesure budgétaire d'allègement des charges sociales sur les
avantages en nature décidée pour 1998 ; cette action devra être poursuivie et
accentuée.
Il faut également obtenir au niveau européen - c'est important - que la
restauration, qui est une activité à fort taux de main d'oeuvre, soit incluse
dans la liste des secteurs éligibles à l'expérimentation sur trois ans de
l'abaissement du taux de TVA.
Nous attendons du Gouvernement, madame la secrétaire d'Etat, qu'il prenne
l'engagement d'appliquer cette mesure. Le coût fiscal immédiat sera compensé
par les créations d'emplois et l'augmentation des rentrées fiscales au titre de
la taxe professionnelle ou de l'impôt sur les sociétés.
Enfin, je voudrais attirer votre attention sur les effets très négatifs qui
résultent de la transmission récente à Bruxelles du régime cadre
d'interventions publiques en faveur du tourisme.
En l'absence d'encadrement communautaire spécifique concernant le tourisme,
c'est le régime d'aide aux petites et moyennes entreprises qui est appliqué à
travers le zonage PAT et hors PAT. Cela a pour effet d'aggraver la situation de
certaines zones géographiques qui sont écartées des subventions zones PAT pour
leur développement industriel et également pour leurs installations
touristiques, alors même que ce secteur constitue une solution alternative
crédible en matière de développement économique local et d'aménagement du
territoire. Il faut donc, très rapidement, obtenir de Bruxelles un zonage
spécifique.
Compte tenu de ces différentes réserves, la commission des affaires
économiques et du Plan a décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat.
M. Emmanuel Hamel.
Moins de cinq minutes : bravo ! Dans les Alpes-Maritimes, on sait être clair
et concis !
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 12 minutes ;
Groupe socialiste, 11 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 5 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 14 minutes ;
Groupe du rassemblement démocratique et social européen, 11 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
La parole est à M. Besson.
M. Jean Besson.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
tiens d'abord, au nom, je crois, de tous les parlementaires attachés au
tourisme, à exprimer le plaisir avec lequel nous avons accueilli l'existence
d'un département ministériel de plein exercice. Ce grand secteur de notre
économie, dont l'importance requiert une présence plus affirmée et efficace de
l'Etat, mérite en effet une telle reconnaissance.
Ces deux dernières années, j'avais commencé mon intervention en regrettant que
les années se suivent et se ressemblent pour le budget du tourisme.
Aujourd'hui, je suis heureux de ne pas avoir à réitérer ce constat.
Votre budget, madame le secrétaire d'Etat, est un budget de transition, encore
marqué par les orientations de la période 1993-1997, mais où l'on voit poindre
de nouvelles priorités, où l'on décèle des infléchissements positifs, même si
des interrogations subsistent.
La première de ces inflexions positives est le coup d'arrêt que vous avez
donné à la baisse brutale des crédits.
Entre 1993 et 1997, les crédits du tourisme ont été amputés de 100 millions de
francs, ce qui correspond à une baisse record de près de 25 %. Y-a-t-il un
autre département ministériel qui ait connu une telle saignée ? Fort
heureusement, cette baisse vertigineuse semble avoir été stoppée puisque les
crédits du projet de loi de finances pour 1998 font apparaître une hausse de 3
millions de francs par rapport aux crédits disponibles de 1997.
Le niveau des crédits restant largement insatisfaisant, le ministère du
tourisme doit être en mesure d'utiliser l'ensemble de ses modestes moyens. Le
budget du tourisme a fait l'objet dans le passé d'annulations massives et
répétées en exécution, qui visaient à masquer des baisses de crédits. Nous ne
comprendrions pas que de tels phénomènes se reproduisent en 1998 et nous
attendons des engagements fermes du Gouvernement sur ce point.
La seconde orientation positive de ce budget pour 1998, c'est qu'il reflète de
véritables priorités, contrairement à la politique de coupes claires et
aveugles qui avaient cours ces dernières années. Madame le ministre, votre
budget et, plus généralement, votre politique reflètent une priorité donnée au
social et à l'emploi conforme à ce pour quoi les Français ont voté en juin
dernier, et conforme aux orientations que s'est données le Gouvernement.
Vous avez annoncé pour 1998 un projet de loi permettant d'élargir l'accès aux
chèques-vacances. Vous affichez votre volonté de voir s'accroître les aides aux
vacances des handicapés. Nous saluons ces orientations, dont nous attendons
impatiemment la traduction concrète.
En outre, vous nous proposez une relance significative du programme de
rénovation des hébergements touristiques à caractère associatif, dont les
dotations vont plus que doubler en 1998. Nous ne pouvons que saluer cette
orientation et la relance de l'investissement touristique de l'Etat qu'elle
implique.
Les dotations du programme de rénovation des hébergements touristiques à
caractère associatif étaient passées de 30 millions de francs par an en 1992 à
quelque 8 millions de francs en 1997, accompagnant une véritable démission de
l'Etat en matière d'investissements touristiques. Ces dotations vont plus que
doubler en 1998, pour répondre aux besoins urgents de réhabilitation des
villages-vacances, des maisons familiales ou des campings associatifs,
notamment pour permettre leur mise aux normes en matière d'hygiène et de
sécurité.
Or nous connaissons tous l'impact positif des dépenses d'investissement public
sur l'emploi, qui représente bel et bien une priorité de votre politique.
Cependant, madame le secrétaire d'Etat, permettez-moi de m'interroger sur deux
questions qui sont essentielles pour l'efficacité de la politique touristique
de l'Etat.
La première concerne la faiblesse, qui a déjà été soulignée par M. le
rapporteur spécial, des moyens d'action de votre secrétariat d'Etat. Je tiens à
vous signaler qu'à nos yeux ces moyens ont atteint leur minimum vital et que
nous nous opposerons à l'avenir à toute nouvelle suppression d'emplois. Il en
va de même en matière de moyens de fonctionnement, et nous considérons que de
nouvelles amputations auraient forcément des conséquences sur l'efficacité,
pour ne pas dire la réalité, de l'intervention de l'Etat.
En outre, je regrette vivement la baisse des crédits d'étude et
d'informatique, alors qu'une meilleure connaissance des comportements
touristiques est nécessaire et que le Gouvernement donne la priorité au
développement des nouvelles technologies.
Mon second sujet d'interrogation concerne la politique territoriale et les
relations entre l'Etat et les collectivités locales. Là encore, la politique du
précédent gouvernement avait été particulièrement négative, et beaucoup parmi
nous se souviennent encore des déclarations de M. Pons selon lesquelles la
politique du tourisme ne devait pas se mêler d'aménagement du territoire. Nous
croyons, pour notre part, que ces deux politiques publiques sont étroitement
liées. Dans le même temps, l'étalement des contrats de plan, la suppression de
la dotation touristique avaient alourdi les charges des collectivités, et
singulièrement des communes.
Vous avez, madame le secrétaire d'Etat, affirmé votre volonté de rompre avec
une telle politique. Toutefois, la faiblesse des moyens accordés aux
délégations régionales du tourisme, dont vous soulignez vous-même le rôle
essentiel comme interlocuteurs des collectivités locales, et du service d'étude
et d'aménagement touristique de la montagne ne sont pas faits pour nous
rassurer. Nous attendons de vous des signes forts dans ce domaine.
En conclusion, madame le secrétaire d'Etat, votre budget porte encore les
traces du traitement qu'il a dû subir entre 1993 et 1997.
M. André Maman.
Oh !
M. Emmanuel Hamel.
Quelle partialité !
M. Jean Besson.
Certes, le contexte budgétaire est difficile, mais nous considérons que avec
l'effort qu'il a déjà fourni, le tourisme a largement payé sa contribution à la
maîtrise des dépenses publiques. Nous attendons pour les années à venir un
renforcement des moyens d'action de l'Etat dans le domaine touristique et une
volonté franche d'établir un partenariat plus sain avec les collectivités
locales.
Compte tenu des contraintes auxquelles il a fallu faire face cette année, la
fin de la baisse des crédits et la priorité donnée au social, qui caractérisent
ce projet de budget sont particulièrement méritoires. C'est pourquoi, madame le
secrétaire d'Etat, le groupe socialiste votera les crédits du secrérariat
d'Etat au tourisme.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées
socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avant
d'aborder notre débat d'aujourd'hui, je tiens à saluer la présence d'un
interlocuteur du Gouvernement en charge de plein exercice du tourisme.
Ce secteur n'a jamais été reconnu à sa juste valeur, alors qu'il représente
pas moins de 200 000 petites et moyennes entreprises, 750 000 emplois
permanents, un million d'emplois indirects et qu'il a dégagé, en 1996, un
chiffre d'affaires global de 700 milliards de francs et un solde excédentaire
de 54,3 milliards de francs.
La renaissance d'un secrétariat d'Etat au tourisme témoigne d'une
reconnaissance de l'importance de ce secteur dans la vie économique et sociale
de notre pays.
Puisque l'activité touristique est marquée par son caractère décentralisé et
la multiplication de ses intervenants, souhaitons qu'il soit aussi la promesse
d'une meilleure cohérence et d'une plus grande coordination des actions.
Malheureusement, l'espoir qu'il suscite est quelque peu démenti par les
chiffres. Avec 338 millions de francs de crédits, ce budget pour 1998 accuse
une baisse de 5 %, la plus forte de tous les budgets de l'Etat. Il est vrai
qu'une partie des crédits de la loi de finances initiale de 1997 avait été
gelée par le précédent gouvernement avant d'être annulée par le vôtre, ramenant
les crédits votés de 355,6 millions de francs à 335,2 millions de francs.
Cette diminution de crédits est d'autant plus remarquable qu'elle s'impute sur
des dotations déjà peu substantielles à l'origine.
Il est assez illogique qu'un secteur aussi bénéfique pour l'économie, que je
n'hésite pas à qualifier d'oasis pour l'emploi, mobilise aussi peu de crédits
budgétaires.
Disons-le tout net, ce budget n'a pas toujours été l'objet d'une attention
soutenue ; on a souvent eu tendance à penser que les acteurs du tourisme
pouvaient se débrouiller seuls.
Certes, les emplois touristiques relèvent, pour l'essentiel, du secteur privé
et l'Etat n'a pas à intervenir sur le terrain. L'impulsion doit venir d'en bas
et du secteur privé, associé aux institutions régionales, départementales et
locales.
Toutefois, le rôle de l'Etat n'en est pas moins essentiel dans la réalisation
des grandes infrastructures nécessaires à la création de gisements touristiques
nouveaux et dans la promotion.
J'adhère bien volontiers, madame le secrétaire d'Etat, aux objectifs que vous
avez retenus, à savoir adapter l'offre touristique, développer le tourisme
social, créer des synergies entre les administrations concernées et favoriser
l'emploi. Tout cela va dans le bons sens et je ne doute pas de votre bonne
volonté.
Mais compte tenu de la faiblesse de vos moyens, je ne crois pas, et nombre de
mes collègues me rejoignent sur ce point, que ce budget est à la hauteur de ces
ambitions. Je le regrette d'autant plus que vous avez été amenée à faire des
choix, dont certains sont critiquables.
Les moyens des services subissent à nouveau la restriction budgétaire, avec
une baisse de 10,3 %, l'essentiel des économies portant sur les dépenses de
promotion et de communication, qui diminuent de 47,8 %. Venant de souligner le
rôle essentiel de l'Etat dans la promotion, je m'étonne bien évidemment de ce
choix mais j'y reviendrai un plus plus loin lors de l'examen d'autres
postes.
Avec 180 millions de francs, les crédits du développement de l'économie
touristique sont, eux aussi, en recul de 9,65 %.
Les seuls rescapés de cette rigueur dans ce domaine sont la promotion en
France, le soutien au secteur associatif et les contrats de plan
Etat-région.
En revanche, tous les autres postes sont en retrait. Deux baisses me semblent
particulièrement préoccupantes : elles concernent la valorisation du produit
touristique et la promotion à l'étranger.
S'agissant du premier point, vous nous avez indiqué que cette diminution ne
porte pas atteinte à la capacité d'intervention de l'Agence française de
l'ingénierie touristique, l'AFIT.
Si cette dernière doit s'attacher à optimiser son expérience et à dynamiser
son partenariat, ses missions ambitieuses et utiles pour la constitution d'une
offre touristique performante nécessiteraient, sinon des moyens plus
importants, du moins des engagements inscrits dans la durée.
Par ailleurs, vous diminuez les crédits attribués au GIE Maison de la France,
ce qui semble paradoxal puisque vous affirmez, par ailleurs, que
l'accroissement de la fréquentation touristique constitue un autre axe fort de
votre politique, et je partage votre avis.
La France, premier pays d'accueil touristique au monde avec plus de 62,4
millions de visiteurs étrangers, représente 10,5 % des flux touristiques
mondiaux et 18 % du marché touristique européen. La bonne tenue de la dernière
saison estivale devrait confirmer cette position, et je m'en réjouis.
Ces résultats très positifs, ajoutés à ceux que j'évoquais plus haut, ne nous
autorisent cependant pas à faire preuve d'un optimisme excessif. Ils doivent
être appréciés avec nuance.
En effet, la France a perdu, depuis 1990, des parts de marché et elle ne
capte, aujourd'hui, qu'une partie relativement faible, puisqu'elle est de
l'ordre de 10 % de l'accroissement de la demande mondiale constatée ces
dernières années.
Par ailleurs, des données récentes montrent une diminution de la durée moyenne
des séjours, en dépit d'une progression des arrivées.
La redistribution des flux touristiques notamment vers les pays asiatiques,
mais aussi vers l'Espagne et l'Italie, doit nous encourager à améliorer
constamment la qualité de notre accueil, de nos prestations et de nos
équipements. Mais elle nécessite aussi d'intensifier nos efforts en faveur de
la promotion pour fidéliser la clientèle qui nous est acquise et aller à la
conquête de nouveaux clients.
J'avoue ne pas comprendre votre choix de diminuer les crédits affectés au GIE
Maison de la France ; il ne peut qu'affecter le niveau de fréquentation
touristique et pénaliser les petites et moyennes entreprises de ce secteur qui
n'ont pas les moyens d'assurer leur promotion à l'étranger.
Certes, d'autres organes participent à la promotion, tels que les comités
régionaux du tourisme, les CRT, qui y ont consacré plus de 200 millions de
francs, soit la moitié de leur budget.
Vous souhaitez mobiliser un nouveau partenariat associant les collectivités
territoriales et les grands opérateurs privés. Mais le désengagement de l'Etat
dans cette structure ne les incitera pas à y participer plus.
Cette contrainte budgétaire devra conduire le GIE Maison de la France à rendre
plus pertinentes ses actions, ce qui est plutôt positif. Mais je crains qu'elle
ne l'amène aussi à se désengager des marchés traditionnels pour pouvoir assurer
notre présence sur les marchés émergents. Pourtant, comme je le notais tout à
l'heure, nous ne devons pas ignorer nos faiblesses sur les premiers.
Je ne voudrais pas conclure sur ce budget, madame le secrétaire d'Etat, sans
évoquer l'un des aspects positifs de celui-ci : je veux parler de
l'accroissement substantiel des crédits en faveur de la rénovation des
hébergements touristiques à caractère associatif et de l'extension de l'accès
au chèque-vacances.
Ces mesures donnent du coeur à un exercice bien souvent austère, et je m'y
associe. Toutefois, la faiblesse du montant des crédits du fonds national
d'aménagement du territoire, le FNADT, et la réorganisation territoriale à
laquelle il doit être procédé nous préoccupent beaucoup.
Au-delà de ces considérations budgétaires, je souhaite évoquer un point auquel
je suis particulièrement attaché et qui rejoint, d'une certaine manière, votre
souci de favoriser l'emploi. Il s'agit du tourisme rural. Bien qu'il soit en
évolution, celui-ci est encore modeste alors qu'il y a des raisons de penser
qu'il pourrait offrir un avenir prometteur.
D'abord, il répond à l'évolution de la société et aux nouvelles aspirations.
La clientèle se détourne progressivement du tourisme « industriel » et de ses
univers surpeuplés de la mer et de la montagne. Les destinations lointaines
souffrent, pour certaines, de l'insécurité qui s'y développe et, en général, de
la crise économique.
Ensuite, la France possède de fortes potentialités, telles que la variété et
la beauté des paysages, la préservation des milieux naturels, la richesse du
patrimoine monumental et la gastronomie.
Considéré jadis comme le tourisme de cueillette, celui du pauvre, le tourisme
de proximité, de découverte, de nature et de randonnée a aujourd'hui ses
adeptes et ses connaisseurs.
Les initiatives et les projets locaux ne manquent pas ; la qualité de
l'accueil, de l'hébergement et de l'animation s'est considérablement améliorée
grâce à la mobilisation de ses acteurs. Je pense là, notamment, aux gîtes
ruraux qui ont su se hisser au niveau des exigences de confort et de modernité
de la clientèle.
Mais ce tourisme vert doit devenir un tourisme de marché, dans le respect de
son authenticité, offert par des professionnels et encouragé par l'Etat.
Les acteurs locaux ont certainement encore beaucoup à faire dans cette voie :
ils doivent notamment identifier et conquérir des clientèles diverses, telles
que les séminaires d'entreprises, les classes vertes, les sportifs, le
troisième âge et les institutions de santé, et trouver des partenariats avec
des opérateurs pour commercialiser ces produits, avec une offre diverse et
répartie sur le territoire.
Mais le développement du tourisme vert comme celui du tourisme en général,
dépend aussi étroitement de la conjonction d'investissements publics et privés
pour l'aménagement de lieux culturels, de zones d'attraction ou de sites
naturels susceptibles de constituer des points d'ancrage dont le tourisme rural
diffus a besoin pour se structurer, la préservation des paysages, la
réhabilitation de l'habitat ancien et de villages, la remise en navigation des
rivières anciennement équipées d'écluses et autrefois empruntées ainsi que
l'amélioration des équipements de transports.
Cette évocation montre à quel point ce secteur ne dépend pas de votre seul
budget, madame le secrétaire d'Etat. Vous avez d'ailleurs annoncé votre volonté
de renforcer la coopération entre les ministères, et je vous en félicite.
Toutes ces précoccupations doivent faire l'objet d'une attention particulière
dans le cadre des schémas d'aménagement du territoire, et j'espère que vous y
veillerez.
Je dirai, enfin, un dernier mot sur la directive Natura 2000. Mme Voynet a
relancé la procédure de classement des sites protégés. Celle-ci provoque les
vives polémiques que vous savez entre certains acteurs qui plaident en faveur
du développement économique et, si j'ose dire, les « intégristes » de
l'environnement qui voudraient en faire des déserts verts. Il n'y a pas
d'incompatibilité de principe entre la protection de l'environnement et le
développement économique.
Des activités adaptées aux caractéristiques, aux contraintes et aux atouts de
l'environnement pourraient s'y développer harmonieusement, et je reviens là au
tourisme rural. Je sais que l'activité touristique est, dans l'esprit de
certains, synonyme de pollution et de destruction des paysages, mais il ne
s'agirait pas de laisser se développer un tourisme à grande échelle ou sauvage.
Je soumets cette observation à votre réflexion, madame le secrétaire d'Etat.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des
Républicains et Indépendants et du RPR. - M. Bony applaudit également.)
M. le président.
La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous
examinons aujourd'hui le budget du tourisme pour 1998.
Ce budget marque un arrêt de la baisse constatée depuis 1993 et qui s'élevait
à plus de 100 millions de francs. Même si les crédits passent encore de 355
millions de francs en 1997 à 338 millions de francs cette année, ils sont en
simple stagnation par rapport à 1997. Il est donc possible de parler, comme l'a
fait l'un des orateurs qui m'a précédé, d'un budget de transition. Je note que
l'augmentation des autorisations de programme laisse présager une politique en
faveur des investissements pour les années à venir.
Madame la secrétaire d'Etat, nous nous félicitons de la volonté qui vous anime
et, d'abord, celle d'affirmer l'importance du rôle de l'Etat dans le secteur
touristique, alors que la France demeure la première destination touristique au
monde et que le chiffre d'affaires produit par ce secteur atteint 700 milliards
de francs. Cette activité est donc essentielle pour notre économie ; elle
nécessite des moyens et une organisation à la hauteur de son enjeu.
Parallèlement, de nombreux objectifs présentés nous semblent particulièrement
pertinents. Je pense à l'augmentation de la fréquentation touristique, au
développement de l'emploi, notamment la participation active à la création
d'emplois-jeunes, à la recherche de l'efficacité optimale dans les
interventions de l'Etat avec la volonté de travailler efficacement avec les
organes responsables décentralisés, tels que les délégués régionaux au
tourisme.
La politique volontariste que vous entendez mener, madame la secrétaire
d'Etat, en faveur de la création d'emplois, mais ausi de la formation et de la
diminution de la précarisation dans cette branche trop souvent à l'écart des
progrès sociaux - je pense, par exemple, aux trente-cinq heures - nous semble
particulièrement nécessaire et adaptée au contexte social actuel.
La formule des conventions-cadres mises en place avec les partenaires
concernés et l'engagement de créations rapides d'emplois et pour le long terme
constituent des premiers pas intéressants. Il reste évidemment à les inscrire
dans la réalité, mais je suis sûr que vous vous y êtes déjà attelée, madame la
secrétaire d'Etat.
Dans le même ordre d'idées, nous nous félicitons de la volonté affirmée
d'étendre le droit fondamental aux vacances à tous les Français par une plus
large diffusion des chèques-vacances. Cela semble d'autant plus une priorité
que près de 40 % des Français ne partent pas en vacances, ce pourcentage ne
reculant pas depuis plusieurs années.
Nous espérons que des mesures seront prochainement prises par votre
secrétariat d'Etat afin d'étendre le dispositif des chèques-vacances jusqu'à
présent très peu utilisés par les employeurs des PMI et des PME en raison des
charges sociales qu'ils doivent payer sur leur participation.
Par ailleurs, nous sommes en complet accord avec l'objectif affiché comme la
priorité « numéro un » : je veux parler de la relance du plan patrimoine. Les
crédits de paiement vont en effet doubler dans ce domaine, ce qui est important
notamment en termes d'emploi dans le bâtiment et les travaux publics et de
développement territorial de zones rurales marginales et de montagne.
Dans ce cadre, la réhabilitation du parc immobilier des associations du
tourisme social nous semble essentielle d'autant plus que ce secteur, capital
en termes de progrès social, avait beaucoup souffert durant ces dernières
années par manque de considération, et donc de moyens.
Au contraire, on peut regretter qu'une place très limitée soit accordée à
l'intégration de la notion de protection de l'environnement dans les projets et
les politiques. Or - et cette tendance est déjà nette dans de nombreux autres
pays européens - le tourisme « durable » est de plus en plus porteur
aujourd'hui.
En outre, je regrette que trop peu de crédits soient disponibles pour aider
les associations, qui ont particulièrement besoin de l'Etat pour survivre. Or,
le secteur associatif constitue un pilier du tourisme social que nous
considérons - et vous aussi, j'en suis sûr, madame la secrétaire d'Etat - comme
une priorité à développer dans une société dans laquelle la marginalisation
sociale s'accentue chaque jour.
D'une façon générale, il semble évident que le présent projet de budget du
tourisme n'est pas à la hauteur de l'importance de ce secteur pour notre
économie nationale, même si, reconnaissons-le, d'autres fascicules budgétaires
comportent des crédits qui contribuent à son développement.
Les crédits du secrétariat au tourisme sont trop faibles, alors que les enjeux
en termes d'emplois, mais aussi de promotion de notre pays à travers le monde
sont plus urgents que jamais.
J'espère cependant que vous saurez oeuvrer au mieux, malgré les contraintes
budgétaires, afin d'atteindre des objectifs que les membres du groupe
communiste républicain et citoyen jugent, avec vous, comme essentiels. C'est ce
qu'ils souhaitent et si telle est également votre ambition, ce que je crois,
ils vous souhaitent bonne réussite. Ils voteront le projet de budget du
tourisme.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain
et citoyen.)
M. Emmanuel Hamel.
Le contraire eût été étonnant !
M. le président.
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, en
baisse de 5 % avec 338 millions de francs, le projet de budget du tourisme,
aujourd'hui soumis à notre examen, est non seulement le plus faible, mais aussi
celui qui subit la plus forte baisse, ce qui est paradoxal quand on connaît la
place de l'industrie touristique dans notre économie.
Ainsi, la consommation touristique représente 7,5 % de notre PIB. Cette année,
les 180 000 entreprises du secteur ont dégagé un chiffre d'affaires de 340
milliards de francs et c'est le premier poste excédentaire des transactions
courantes de notre balance commerciale.
En outre, une étude récente de l'organisation mondiale du tourisme montre que
le potentiel de développement du secteur à l'échelle mondiale est certain : les
recettes touristiques mondiales passeraient ainsi de 260 milliards de dollars
en 1990 à 700 milliards de dollars en l'an 2000 et à près de 1 000 milliards de
dollars en 2010.
Toutefois, selon ces mêmes prévisions, l'Europe - et donc la France - verrait,
hélas ! dans le même temps ses parts de marché réduites.
Il convient donc de rester particulièrement vigilant et de conduire une
politique dynamique et énergique dans ce domaine, d'autant que notre pays est
déjà soumis à une forte concurrence. En témoigne le fait que, si la France
demeure la première destination touristique, l'Espagne vient de lui enlever sa
première place européenne pour les recettes.
Il est donc, dès aujourd'hui, nécessaire d'améliorer la compétitivité de notre
offre touristique et de mener des actions de promotion de la France à
l'étranger.
L'amélioration de la compétitivité passe par un meilleur soutien aux
professionnels du tourisme.
Il s'agit, d'abord, d'encourager les investissements structurels, afin
d'améliorer et la qualité des établissements et les conditions de travail. Les
collectivités locales sont déjà très nombreuses à s'engager dans l'aide aux
améliorations qu'apportent les professionnels à leurs outils de travail, qu'ils
soient hôteliers ou qu'ils pratiquent le tourisme vert. Evitons d'imposer, ici
comme ailleurs, des réglementations nouvelles, qu'elles portent sur la gestion
des salariés ou sur l'outil de travail. Les entreprises, tout en respectant la
réglementation, ont besoin d'un espace de liberté pour travailler.
Il faut, ensuite, un meilleur soutien aux professionnels de l'hôtellerie et de
la restauration, grâce à la réduction des charges qui pèsent sur les salaires
et spécialement sur les plus bas d'entre eux. Il s'agit de permettre ainsi
l'embauche de salariés supplémentaires, ce qui encouragerait fortement
l'aménagement des horaires et l'amélioration des conditions de travail.
Le précédent gouvernement souhaitait étendre le plan textile aux professions
de l'hôtellerie et de la restauration ; nous connaissons l'attitude des
eurocrates qui estiment sans doute que les métiers sans forte qualification
doivent disparaître. Je considère, madame la secrétaire d'Etat, qu'une
intervention forte du gouvernement français s'impose en la matière.
Avec la complexité des procédures administratives, leur multiplication, leur
alourdissement ininterrompu, ce sont les charges diverses sur les salaires qui
non seulement freinent l'embauche, mais détruisent l'emploi. L'activité
irrégulière des professions du tourisme nécessite un maximum de flexibilité.
La compétitivité passe par la recherche constante de nouveaux clients. Par
conséquent, il faut favoriser la promotion à l'étranger.
Or, malheureusement, force est de constater, madame la secrétaire d'Etat, que
vous faites exactement le contraire.
D'abord, les crédits consacrés aux interventions stratégiques et aux actions
de valorisation du produit touristique baissent de 9,04 %.
Plus inquiétant, parmi ces crédits, la subvention versée à l'AFIT, l'Agence
française de l'ingénierie touristique, diminue de 24,7 % alors que cette agence
mène actuellement, entre autres actes, une action très attendue par l'ensemble
des acteurs du secteur, de redéfinition des circuits de commercialisation avec
la réalisation d'un serveur national de réservation.
Plus dramatique encore, les crédits du GIE -Maison de la France, déjà amputés
depuis quelques années, subissent une baisse supplémentaire de 9,4 %. Parmi
eux, et pour la première fois, la contribution aux actions de promotion diminue
de 3,46 %, alors que vous-même, madame la secrétaire d'Etat, en juillet
dernier, devant l'ensemble de la presse professionnelle, vous admettiez qu'« il
n'est pas possible de réduire encore les moyens de Maison de la France sans
mettre en danger les agences à l'étranger ». Quel exemple saisissant de
décalage entre les déclarations et les actes !
Vous aviez raison de croire cela, madame la secrétaire d'Etat, car, grâce à
votre politique budgétaire, Maison de la France va sans doute devoir fermer son
bureau de Berlin, ce qui est d'autant plus dramatique que les Allemands
occupent la première place en termes de fréquentation de la France, avec plus
de 13 millions de touristes.
En outre, face à l'arrivée croissante de touristes en provenance d'Asie du
Sud-Est, Maison de la France avait prévu d'ouvrir un bureau à Pékin d'ici à la
fin de l'année ; cette ouverture est sans doute compromise.
Enfin, ces réductions des crédits de l'AFIT et de Maison de la France sont
d'autant plus surprenantes qu'elles vont servir à alimenter l'augmentation
exclusive et très importante des crédits affectés au programme de rénovation
des hébergements à caractère associatif et social à hauteur de 49,08 % en
autorisations de programme et de 113,92 % en crédits de paiement.
Certes, les besoins sont certainement importants dans ce secteur, mais
pourquoi faire porter exclusivement l'effort sur le tourisme social au
détriment du secteur privé, alors qu'il ne représente que 12 % de l'ensemble
des effectifs du secteur touristique et seulement 8,7 % des lits ? Les deux
types de tourisme doivent cheminer de pair afin de permettre aux touristes
d'adapter leur séjour dans notre pays.
C'est incompréhensible, d'autant plus que les acteurs privés, eux aussi, ont
besoin de s'organiser, de se restructurer, de développer une politique
qualitative, de faire de nouveaux efforts en matière de commercialisation, et
que nombre d'associations du tourisme social, telles que VVF - village vacance
famille - récemment, optent pour un statut privé.
C'est pourquoi, madame la secrétaire d'Etat, le groupe du RPR soumettra au
Sénat deux amendements visant à maintenir les crédits de l'AFIT et de Maison de
la France au niveau de 1997.
Je souhaite que le Gouvernement émette un avis favorable sur ces amendements
afin de rassurer Maison de la France et l'AFIT, ou qu'il apporte toutes
garanties de bon fonctionnement aux organismes cités afin qu'ils puissent
poursuivre leur action.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants,
ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Egu.
M. André Egu.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les
crédits inscrits au projet de budget du tourisme pour 1998 présentent, une fois
de plus, un contour assez flou car, éparpillés entre trop d'intervenants, ils
ne me paraissent pas être à la hauteur de l'importance économique et sociale du
secteur. Je le regrette, car j'y vois le signe que l'Etat ne prend toujours pas
la mesure de cette activité dont le développement spectaculaire en fait, aux
côtés des industries pétrolière et aéronautique, un des postes les plus
importants en termes d'exportation.
Cette réduction des actions et des moyens des pouvoirs publics oblige à
transférer ainsi progressivement les charges aux collectivités locales et aux
professionnels privés. Si l'on n'y prend garde, les activités d'impulsion et de
régulation, qui sont du ressort de l'Etat, ne seront que marginalement
assurées.
Ce désengagement de l'Etat à la veille de l'ouverture complète du marché
unique européen démontre, si besoin était, que le Gouvernement ne tient pas
suffisamment compte du défi auquel est exposé un secteur dynamique mais
fragile.
Examinons ensemble le rôle que devrait remplir votre secteur ministériel. Il
s'articule autour de quatre fonctions.
La première, c'est la fonction d'organisation et de coordination des
politiques nationales, locales et sectorielles, qui permet de fédérer l'action
des divers acteurs du tourisme.
De quels moyens l'Etat se dote-t-il pour mener à bien ces actions ? Eh bien !
mes chers collègues, il dispose de moyens réduits de 5 % cette année et, ce qui
m'inquiète le plus, c'est de voir sa participation dans le domaine de la
formation professionnelle diminuer de 7,5 %.
La deuxième fonction, c'est la fonction de promotion de la France à
l'étranger, mais aussi sur le territoire national.
La France dispose, en matière d'accueil de visiteurs, d'atouts exceptionnels ;
elle demeure la première destination touristique mondiale.
L'excédent de sa balance touristique dépasse 54 milliards de francs et est
encore en augmentation cette année. Dans cet environnement prometteur, on note
toutefois que, en ce qui concerne les recettes, la France n'est que troisième
et que, avec 10,5 % du marché touristique mondial, nous ne récoltons que 7,5 %
des recettes en devises.
Aussi peut-on dire que la position de la France s'affaiblit depuis le début
des années quatre-vingt-dix.
Comment ne pas le regretter, alors que la corrélation entre l'effort consenti
et le niveau de fréquentation atteint encore un niveau exceptionnel en France ?
Ne devrait-on pas plutôt améliorer cet effort ? Je suis au regret de constater,
encore une fois, que les crédits de Maison de la France, qui, ainsi qu'il a
déjà été dit, sont passés de 132 millions de francs en 1987 à 184 millions de
francs en 1997, soit un peu plus de 1 % de progression annuelle, ne sont pas en
rapport avec les besoins et ne favorisent pas le retour sur investissement.
Si l'on prend en compte une inflation qui, même maîtrisée, représente deux ou
trois fois cette progression sur la même période, on constate que l'Etat s'est
retiré progressivement, laissant la place aux autres acteurs, collectivités
locales ou investisseurs privés.
L'avenir de l'agence française de l'ingénierie touristique est également
menacé par la diminution de 8,6 % de sa subvention.
Globalement, on est en droit de souhaiter que Maison de la France et l'AFIT
puissent bénéficier de la stabilité des engagements budgétaires de l'Etat.
La troisième fonction, c'est la fonction de réglementation. Elle a pour objet
d'assurer la sécurité et la protection des consommateurs, et de garantir le
respect des règles de concurrence.
Elle s'exerce à l'intérieur du territoire national, mais aussi au sein des
instances européennes ou internationales. Comment cette fonction peut-elle être
assurée alors que le personnel pour y faire face est insuffisant et que les
moyens des services sont en retrait de 12 % ?
La quatrième et dernière fonction, c'est la fonction de la statistique, qui
est indispensable pour élaborer des plans d'actions et pour donner une image
moins floue d'un secteur encore mal appréhendé.
Là encore, les moyens sont réduits de 9 %. Et pourtant, même si la France
n'est pas particulièrement en retard dans la recherche et l'exploitation des
données statistiques, il n'existe encore aucune observation régulière de la
fréquentation des hébergements touristiques, en dehors des hôtels homologués et
des hébergements de plein air.
Ce constat, madame le secrétaire d'Etat, est, selon moi, alarmant. Il faut que
l'Etat revienne progressivement à un juste niveau de crédits pour assumer tout
son rôle d'impulsion et de régulation.
Pourtant, ce secteur dont semble se désintéresser une partie du Gouvernement
auquel vous appartenez, madame le secrétaire d'Etat, est susceptible de
participer d'une manière efficace et définitive à la création de nouveaux
emplois productifs.
Je regrette, en particulier, que l'on ne cherche pas davantage à favoriser
l'activité plurisaisonnière pour assurer une véritable rentabilité à un secteur
qui investit dans des équipements coûteux alors qu'ils ne sont utilisés que
quelques mois par an.
Je voudrais attirer votre attention, comme les autres orateurs, sur la Coupe
du monde de football, qui sera une occasion exceptionnelle de mettre en valeur
nos richesses touristiques. Il convient de donner le maximum de popularité à
cet événement, sans pour autant méconnaître ses effets pénalisants pour la
clientèle traditionnelle, qui est forte à cette époque.
Un frein au développement de l'accueil des touristes étrangers en France
provient du taux élevé de la TVA. La disparité des taux au sein de l'Union
européenne favorise nos concurrents et constituera un handicap de plus en plus
lourd avec l'arrivée des tour-opérateurs allemands, belges ou hollandais, qui
bénéficient de taux de TVA inférieurs.
M. le président.
Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. André Egu.
Le seul élément positif de ce projet de budget tient à l'augmentation des
crédits affectés au programme de rénovation des hébergements touristiques à
caractère associatif. Voilà qui permettra de poursuivre la réhabilitation du
parc immobilier lancée en 1990.
Le secteur du tourisme associatif est aujourd'hui confronté à un grave
problème de redressements fiscaux qui menacent même l'existence de certaines
associations. Il est indispensable de clarifier le régime fiscal de ces
associations et de trouver un terrain d'entente avec l'administration fiscale
pour ne pas assister à des traitements différents suivant l'appréciation
personnelle de ces lois et de ces circulaires. Une solution équitable, claire
et définitive devrait être trouvée pour ne pas mettre ces associations en
danger.
Avant de conclure,...
M. le président.
Monsieur Egu, vous avez largement dépassé votre temps de parole !
M. Emmanuel Hamel.
C'est si intéressant !
M. André Egu.
... je voudrais aussi m'adresser aux professionnels et à Maison de la France.
Je leur demande instamment de tout mettre en oeuvre pour que le produit France
soit aussi accessible aux Français. Est-il normal de devoir parfois passer par
Londres, Bruxelles ou Luxembourg pour obtenir un forfait
transport-hôtel-excursions à Paris, Lyon ou Marseille ?
Madame le secrétaire d'Etat, votre projet de budget, consacré à l'une des
activités dont le développement économique est fondamental pour favoriser la
reprise de la croissance de notre pays, n'est pas, et de loin, à la hauteur de
l'ambition affichée par les pouvoirs publics. C'est à la fois le budget le plus
faible et celui dont les moyens baissent le plus.
Vous comprendrez donc que nous ne pouvons voter des crédits ne correspondant
pas à l'attente des acteurs qui, chaque jour, se battent pour conquérir des
parts de marché. Vous n'aurez pas, madame le secrétaire d'Etat, les moyens de
la politique active que vous désirez mener et je le regrette.
(Applaudissements sur les travées du RDSE).
M. le président.
La parole est à M. Plasait.
M. Bernard Plasait.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, « le
tourisme, c'est l'art de conduire les visiteurs de nos mayonnaises à nos
cathédrales ». C'est par ces mots que Giraudoux illustrait la vocation de la
France en matière touristique.
M. Emmanuel Hamel.
Quelle culture ! Vous avez déjà cité Péguy, et maintenant, c'est Giraudoux
!
M. Bernard Plasait.
Oui, la France est douée pour le tourisme !
Le tourisme est une activité culturelle et ludique correspondant à nos
traditions et à nos ressources. Mais force est de constater que le potentiel
touristique de notre pays est encore sous-exploité. Pourtant, il est
suffisamment varié pour nous permettre de répondre à tous les types de
demandes. S'il est vrai que la France a le don du tourisme, il est également
vrai que le tourisme est un don pour la France.
Permettez-moi de vous dire quel formidable défi notre pays doit relever pour
que ce tourisme dont on parle tant soit une bonne affaire pour la France.
Le défi du tourisme consiste à l'emporter sur la concurrence et à faire de
cette activité un élément majeur de la prospérité, du bien-être et de la fierté
des Français. L'enjeu touristique s'analyse en termes d'emplois, de devises, de
patrimoine et de rayonnement culturel.
L'utilité du tourisme est économique et fait référence au poids économique de
ce secteur ainsi qu'au nombre d'emplois qu'il représente. Les chiffres énoncés
sont éloquents : 62,4 millions de touristes étrangers arrivés en France l'an
dernier, 700 milliards de francs consommés auprès des entreprises du secteur,
54 milliards de francs d'excédent commercial et près d'un million d'emplois.
L'utilité du tourisme est aussi écologique par sa contribution à la protection
de l'environnement et du patrimoine, même s'il peut aussi - il faut le
souligner - être menaçant. N'a-t-on pas coutume de dire que « le tourisme est
comme le feu. Il peut faire bouillir votre marmite ou mettre le feu à votre
maison » ?
M. Emmanuel Hamel.
Ou éclairer vos nuits !
(Sourires.)
M. Bernard Plasait.
Il convient donc d'en faire un instrument de l'aménagement du territoire.
Enfin, l'utilité du tourisme est culturelle puisqu'il contribue au rayonnement
de la France.
Aujourd'hui, madame le secrétaire d'Etat, le tourisme est menacé, car il doit
affronter une concurrence de plus en plus vive. La fréquentation étrangère
stagne et la durée des séjours se raccourcit.
Capitale mondiale des congrès internationaux pour la dix-huitième année
consécutive, Paris perd néanmoins des parts de marchés au profit de Sydney,
Copenhague, Budapest, sans parler de Vienne ou de Londres.
Dans ces conditions, la question essentielle, madame le secrétaire d'Etat, est
de savoir si votre budget de 338 millions de francs pour 1998 va permettre à la
France de conforter ses positions et de faire en sorte que les lauriers qu'on
lui décerne chaque année ne soient pas des lauriers soporifiques, qui honorent
mais qui endorment, pendant que les concurrents de la France se mettent en
ordre de bataille.
La comparaison des budgets de promotion est éloquente : 429 millions de francs
pour la Grande-Bretagne, 627 millions de francs pour l'Espagne et seulement 320
millions de francs pour la France, en 1997.
L'aveuglement du Gouvernement est grave, madame le secrétaire d'Etat. Il n'y
aura plus de développement naturel et spontané du tourisme. Il n'y aura pas
d'effet France, effet magique, en lui-même suffisant. Aussi n'a-t-on pas le
droit de faire de petites économies sur un investissement aussi rentable, dont
les retours sont aussi rapides, aussi certains et aussi importants.
On n'a pas le droit de faire du budget du tourisme, même si c'est à la marge,
une variable d'ajustement du budget de l'Etat.
La promotion d'aujourd'hui, ce sont les devises de demain.
Depuis des années, la France fait la course en tête. Mais son avance est
chaque année plus réduite. Lorsqu'elle sera dépassée, il ne faudra pas nous
dire : « Je n'ai pas voulu cela ! »
La promotion est non pas un luxe, mais une nécessité, surtout en période de
crise. Or vous infligez une baisse de 9 % aux outils de promotion de la France
à l'étranger. Ainsi, le GIE Maison de la France, dont l'efficacité n'est
pourtant plus à démontrer, verra ses moyens d'action considérablement amputés,
ce qui mettra gravement en péril notamment la politique de prospection des
marchés étrangers, en particulier nord-américains, conduite avec intelligence
depuis une dizaine d'années.
Si mon éminent collègue Ambroise Dupont avait pu intervenir dans ce débat
comme il le souhaitait, il aurait souligné avec plus de talent que moi tant
l'importance primordiale de l'esprit de prospection, de promotion et de
créativité que la nécessité d'augmenter le budget de promotion du tourisme.
Il n'aurait aussi réclamé votre vigilance sur la réforme des fonds structurels
européens pour que la réduction des enveloppes ne nuise pas au développement
touristique des territoires les plus fragiles de notre pays.
M. Emmanuel Hamel.
Il n'aurait pu s'exprimer mieux que vous !
M. Bernard Plasait.
Il aurait surtout évoqué le problème récurrent du taux de la TVA appliqué à la
restauration. Il faut une volonté politique pour trouver le moyen de ne pas
pénaliser la restauration traditionnelle, si importante pour notre économie et
pour la qualité de l'image de la France dans le monde. Vous savez, madame le
secrétaire d'Etat, combien la qualité de l'image est la première des conditions
du développement du tourisme. L'image d'un pays conditionne de nombreux
comportements : ceux des dirigeants politiques, des décideurs, des
consommateurs.
Il est d'ailleurs très intéressant de tenter de comprendre pourquoi, par
exemple, l'image de l'Allemagne et du Japon aux Etats-Unis est meilleure que
celle de la France. Par une véritable stratégie de communication, l'Allemagne
et le Japon ont su surmonter très rapidement le handicap de la défaite de 1945,
et créer, dès les années cinquante, un environnement favorable à des offensives
commerciales, industrielles, scientifiques ou culturelles.
La grande leçon est celle du couple savoir-faire et faire-savoir. Si elle veut
être durable, l'image ne peut s'appuyer que sur une réalité. Mais elle doit
aussi être l'objet d'une politique forte. Certes, l'image est un actif
incorporel d'une entreprise ou d'un pays ; mais cet actif est loin d'être le
moins important. Or la France n'a pas de politique globale et collective pour
son image.
En avril 1991, Michel Rocard notait ceci : « Un grand nombre d'administrations
mènent des actions de promotion de la France à l'étranger. Mais cet ensemble ne
constitue pas une politique cohérente et globale de l'image de la France, et
cela, malgré des moyens importants. Il faut coordonner les initiatives et
assurer la continuité des actions. »
M. Emmanuel Hamel.
Que n'est-il encore ici pour le dire lui-même !
M. Bernard Plasait.
Le rôle de l'Etat est évidemment important pour faciliter la cohérence des
messages et la coordination des actions des acteurs publics, parapublics et
privés. Les efforts dispersés, même de grande qualité, ne constituent pas une
politique d'image.
La première chose est donc d'être convaincu de la nécessité d'une politique
d'image digne de ce nom. La deuxième est d'être lucide sur la perception
actuelle de notre pays dans le monde. La troisième est de définir l'image que
nous voulons donner de la France.
Le projet de budget que vous nous présentez, madame le secrétaire d'Etat, ne
traduit malheureusement aucun de ces trois impératifs.
L'image de la France est certes meilleure qu'on pourrait le craindre, mais
tellement moins bonne qu'on pourrait l'espérer, compte tenu de ses nombreux
atouts.
M. Emmanuel Hamel.
C'est vrai !
M. Bernard Plasait.
Les principaux attraits de la France, les images qui viennent spontanément à
l'esprit des étrangers, à travers le monde, sont le romantisme, la douceur de
vivre, les vignes, la gastronomie, l'art de la table, l'artisanat, les
antiquaires,...
M. Emmanuel Hamel.
Et la beauté des femmes ! (
Rires.
)
M. Bernard Plasait.
... la mode, les parfumeurs, les ponts, les églises, les cathédrales,...
M. Emmanuel Hamel.
Péguy !
M. Bernard Plasait.
... les rues étroites, les marchés de plein air, les fleurs, les bouquinistes,
c'est-à-dire toutes les composantes d'une image d'art de vivre.
Les faiblesses de l'image de la France sont liées à l'accueil, à nos
déficiences pour la maîtrise des langues étrangères et aux prix. Il s'agit, en
fait, des composantes de l'image de « l'arrogance » française, hélas ! souvent
évoquée à l'étranger.
Enfin, il faut noter une caractéristique importante de notre image : la France
est connue surtout par et à travers Paris.
Bien entendu, la France ne se réduit pas à Paris. Avec ses extraordinaires
richesses régionales, la France a toutes les qualités pour gagner la bataille
mondiale du tourisme, sauf peut-être la volonté de faire jouer pleinement
l'effet Paris. Paris est magique. C'est le mariage réussi entre le patrimoine
et la modernité, l'histoire et la vie bouillonnante. Ainsi Paris est-il décrit
par nos visiteurs comme le cadre admirable de l'art de vivre qui n'appartient
qu'à la France. C'est l'atout maître. Il faut, madame le secrétaire d'Etat, que
cela serve à tous les Français.
Les Français devraient préparer tous ensemble les fêtes de l'an 2000. Ils
devraient exploiter Paris pour attirer 100 millions de visiteurs,...
M. Emmanuel Hamel.
Ce n'est pas assez !
M. Bernard Plasait.
... qui viendraient finir le siècle dans la douceur de vivre à la française et
commencer le troisième millénaire une coupe de champagne à la main.
Hélas ! avec votre budget, madame le secrétaire d'Etat, il y a loin de la
coupe aux lèvres !
M. le président.
La parole est à M. Bony.
M. Marcel Bony.
Madame la secrétaire d'Etat, l'évolution à la baisse de votre budget ne le
rend pas enthousiasmant à première vue, à la différence de celui de
l'aménagement du territoire, qui progresse.
Ces deux cadres financiers sont en effet déterminants pour les zones de
montagne.
Je dois cependant dire que vous m'avez rassuré à deux égards : tout d'abord,
par votre volonté de stopper la tendance à la baisse des crédits affectés au
tourisme ces dernières années, ce qui demande d'être vigilant sur les
régulations ultérieures ; ensuite, parce que l'effort de votre secrétariat
d'Etat en faveur de l'aménagement du territoire est manifeste.
Je prends bonne note des avancées en matière de tourisme social, à propos du
plan patrimoine, des chèques vacances et du calendrier scolaire. Je me réjouis
de la mise en oeuvre des emplois-jeunes et de la bonification à taux bas des
prêts consentis à l'hôtellerie de tourisme, soumise à des sujétions pesantes et
à une forte pression financière.
Cependant, un certain nombre de points me préoccupent. J'en évoquerai deux
concernant la montagne. Mais avant tout, madame la secrétaire d'Etat, je
voudrais vous demander d'être vigilante sur certains investissements concernant
le tourisme social. L'exemple d'une association nationale qui a bradé plusieurs
de ses villages de vacances à un promoteur, voilà quelques années, résonne
encore douloureusement dans mon esprit !
Cette parenthèse étant refermée, je dirai que toutes les communes touristiques
- elles sont très nombreuses, y compris dans les zones rurales - oeuvrent à la
fois pour leurs habitants et pour leur clientèle saisonnière. Mais elles sont
limitées par la fiscalité locale et par des dotations hors de proportion avec
leurs charges, qui s'alourdissent rapidement.
Dès lors, elles cherchent à augmenter leur produit en réagissant à la manière
d'entreprises et deviennent de ce fait sensibles aux mêmes contraintes.
Du point de vue de l'aléa climatique, par exemple, les stations de moyenne
montagne sont dans une situation peu confortable en raison du manque
d'enneigement au cours des années quatre-vingt-dix. A cet égard, 1997 fut un
cru médiocre. C'est pourquoi il serait temps de mettre en place un dispositif
d'assurance ou de mutualisation de ce risque.
Dans le même ordre d'idée, le thermalisme souffre au plan national depuis
1992, et de nombreuses stations thermales sont au bord de l'asphyxie. Bien
qu'elles aient nécessairement conscience qu'un curiste est un touriste à
mi-temps, souvent accompagné, elles sont rarement en mesure aujourd'hui
d'attirer une clientèle jeune. Les contrats de plan n'ayant pas réellement
porté leurs fruits jusqu'à présent, j'estime, madame la secrétaire d'Etat,
qu'il serait nécessaire de mettre à plat ce dossier, afin de parvenir à une
meilleure coordination des ministères concernés, et vous savez qu'ils sont
nombreux.
Plus généralement, je citerai pêle-mêle, entre autres objets d'inquiétude, le
fonctionnement du SEATM, le service d'études et d'aménagement touristique de la
montagne, le problème de la dotation touristique au sein de la dotation globale
de fonctionnement, la réhabilitation de l'immobilier touristique et la
régression de l'hôtellerie rurale. La traduction budgétaire d'une ambition
ministérielle en ces domaines n'est pas évidente. Mais il est vrai que le
contexte est difficile. Je ferai une dernière remarque, sur la restauration.
La TVA donne lieu, comme vous le savez, à des distorsions de concurrence
importantes. Les obstacles juridiques et budgétaires ne peuvent-ils être
surmontés ? En tout état de cause, il convient de ne pas laisser ce dossier en
l'état, la restauration traditionnelle étant trop lourdement pénalisée.
Madame la secrétaire d'Etat, de même que le territoire ne s'auto-aménage pas,
le tourisme ne peut se développer seul, j'en suis tout à fait d'accord avec
vous. Même si notre pays demeure la première destination touristique mondiale,
beaucoup reste à faire en ce domaine et l'Etat a un grand rôle à jouer.
Considérant que l'action de votre département ministériel est loin d'avoir
atteint sa pleine maturité, je prends votre budget comme un budget de
transition, qui a le vrai mérite de dégager de grandes orientations. Mais,
comme nombre d'entre nous, si je suis sûr de votre capacité à initier,
impulser, coordonner, je fonde surtout espoir sur votre action dans la durée.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Michelle Demessine,
secrétaire d'Etat au tourisme.
Monsieur le président, mesdames, messieurs
les sénateurs, je souhaite tout d'abord remercier MM. Loridant et Ginésy de la
qualité de leurs rapports, ainsi que Mmes et MM. les sénateurs de leurs
interventions.
Permettez-moi, en préalable à mon propos, de vous rappeler les grandes lignes
de ma politique, qui constituent, en quelque sorte, la philosophie de mon
secrétariat d'Etat.
J'entends considérer le tourisme comme une activité citoyenne. Il concourt à
l'épanouissement de la personne humaine ; il engage à la découverte d'autres
peuples et d'autres cultures ; il contribue à nous rendre davantage conscients
de nos responsabilités ; il nous apprend la tolérance et le respect des autres.
Le tourisme est, de surcroît, un facteur d'émancipation.
Je vois aussi dans le tourisme une source importante de développement
économique et social. La consommation touristique correspond à 7,5 % du produit
intérieur brut et ce pourcentage va augmenter encore dans les années à venir.
L'apport du tourisme en devises et en rentrées fiscales est décisif pour notre
économie. Le tourisme est - j'y reviendrai - créateur d'emplois, et je ne peux
les envisager que durables et qualifiés. Il faut assurer une croissance de
l'économie touristique au service de tout le pays.
Telles sont les deux grands idées qui conduisent mon action. Mes contacts avec
les usagers comme avec les professionnels me laissent penser qu'elles sont
largement partagées. Le Gouvernement propose de fixer les crédits du tourisme à
338 millions de francs. Certes, ils baissent de 5 % par rapport à la loi de
finances initiale pour 1997, mais ils restent stables, si on les compare aux
crédits effectivement disponibles après régulation budgétaire. Je remercie M.
Ginésy d'avoir signalé, dans son rapport, que cette reconduction était déjà un
progrès sur les années précédentes. Je n'entends pas, bien entendu, en rester
là.
Le budget du tourisme a perdu en quatre ans le quart de son montant. Il faut
en chercher la raison dans cette idée reçue que le tourisme pourrait se
développer tout seul. Or, sans une intervention publique forte, il n'y a pas de
promotion de l'image de la France, de toute la France, dans le monde, il n'y a
pas de développement harmonieux du territoire, il n'y a pas de vision à long
terme.
D'où la nécessité de renforcer l'intervention de l'Etat dans le domaine du
tourisme, pour définir une politique, donner les impulsions nécessaires,
fédérer les actions. Tel est mon engagement sur la durée de la législature.
Au vu de l'évolution de la demande, j'ai fixé à mes services l'objectif de
soutenir la diversification de l'offre touristique, tout en assurant un
aménagement et un développement sauvegardant la nature et les paysages. Bien
entendu, monsieur Besse, il faut concilier la protection des paysages et la
nécessité d'une desserte correcte des stations touristiques, ce qui n'est pas
incompatible, surtout si cela se réalise dans la concertation.
Pour assurer le développement local, je m'appuie sur le réseau des délégués
régionaux au tourisme. Ils sont, sur le terrain, les interlocuteurs naturels
des administrations de l'Etat, des collectivités locales et de leurs comités
régionaux et départementaux de tourisme. Les moyens de ces délégations
régionales, dans le contexte budgétaire actuel, ont été préservés.
L'Etat apporte sa capacité d'expertise à travers l'agence française
d'ingénierie touristique, l'AFIT, et le service d'études et d'aménagement
touristique de la montagne. Cette intervention est essentielle, car le
tourisme, par son caractère pluridisciplinaire, suscite une nouvelle approche
de l'aménagement.
L'AFIT n'a rien perdu de sa capacité d'action. Elle a, durant ses premières
années d'existence, accumulé un stock de savoir-faire qu'elle va pouvoir
maintenant exploiter. Elle va pouvoir aussi utiliser une partie de ses réserves
financières.
S'agissant des zones rurales, mon département ministériel soutiendra les
projets de développement local respectueux de la nature et de l'environnement,
qui permettront, d'une part, le maillage de notre territoire national et,
d'autre part, la création de richesses et d'emplois. Oui, monsieur Besson, le
tourisme est partie prenante de l'aménagement du territoire.
Il nous faut cependant rester conscients que les atouts naturels ne suffisent
plus. La concurrence est de plus en plus vive. M. Loridant l'a rappelé, à juste
titre, tout à l'heure. La France ne sera choisie que si elle offre de parfaites
conditions d'accueil et une diversité maximale d'activités : le littoral, la
montagne, la campagne, mais aussi la ville, les cours d'eau, les lieux de
production industrielle... beaucoup de sites peuvent être valorisés sur le plan
touristique.
Cela implique une organisation efficace de l'offre touristique qui, dans
l'espace rural plus qu'ailleurs, passe par un regroupement des acteurs et une
mise en cohérence des moyens.
Notre soutien se traduit au travers des crédits inscrits en investisssement
dans le cadre des contrats de plan Etat-région et, en fonctionnement, au
travers de la ligne budgétaire « Développement territorial du tourisme ». Ces
crédits jouent bien souvent le rôle d'effet de levier pour l'obtention des
fonds européens et plus particulièrement du Fonds européen de développement
régional, le FEDER.
La contribution de l'Etat aux contrats de plan Etat-région est importante. Les
moyens mis en oeuvre seront au même niveau que ceux du budget initial pour
1997, soit 16,66 millions de francs en fonctionnement et 15,1 millions de
francs en investissements.
Certains d'entre vous ont exprimé leur inquiétude sur le nouveau régime-cadre
d'aide publique aux entreprises du tourisme, qui a été adopté par la Commission
européenne, le 5 mars dernier. En effet, s'il garantit une certaine sécurité
juridique, ce régime n'est pas pleinement satisfaisant, notamment parce qu'il
ne fait bénéficier d'un taux d'aide très favorable que les seules zones
éligibles à la prime d'aménagement du territoire dite PAT « industrie », et
parce qu'il n'accorde pas de statut particulier aux très petites
entreprises.
J'ai demandé que ce système soit amélioré. Une concertation a été engagée par
les préfets avec les élus locaux sur ce dossier. Leurs observations nous
permettront de soumettre un nouveau dispositif à la Commission.
Pour accroître la fréquentation touristique, mon objectif prioritaire,
monsieur Pagès, est d'assurer le droit aux vacances à ceux qui en sont
actuellement privés. Je vous rappelle que 40 % des Français ne sont pas partis
en vacances cette année. Nous ne pouvons l'accepter. C'est un droit, je veux le
redire solennellement devant le Sénat, aussi important que le droit au travail,
le droit à l'éducation et le droit à la santé.
Comment peut-on mieux garantir ce droit ? Notamment, et c'est ma première
action, par l'élargissement de l'attribution des chèques-vacances. En 1996, ont
bénéficié de ce dispositif un million de familles, soit quatre millions de
personnes.
Mais les personnels des entreprises dépourvues de comité d'entreprise,
c'est-à-dire ceux des petites et moyennes entreprises de moins de cinquante
salariés - ils sont plus de sept millions et demi -, doivent pouvoir, eux
aussi, accéder à cet avantage. Nous travaillons à une forme d'association à
caractère mutuel ; les partenaires sociaux décideront librement d'y adhérer ou
non. Nous ne voulons pas contraindre, nous souhaitons, au contraire, une
démarche volontaire, citoyenne, négociée.
Dans le même esprit, j'ai souhaité que mon département ministériel participe à
l'élaboration du projet de loi pour la prévention et la lutte contre
l'exclusion, afin que celui-ci comporte un volet « droit aux vacances », ce qui
n'avait pas été le cas précédemment. Je prépare également une action pour le
droit aux vacances des personnes handicapées.
Par ailleurs, nous allons aider les associations du tourisme social à
surmonter leurs difficultés.
C'est pourquoi j'ai fait de la réhabilitation du parc immobilier des
organismes du tourisme social la priorité numéro un de mon budget. Les crédits
affectés au plan patrimoine vont plus que doubler. Ce plan va nous permettre de
rénover les hébergements gérés par les associations. Ces équipements seront
ainsi à même de répondre aux nouvelles aspirations de leurs usagers.
De même, avec l'agence pour le chèque-vacances, nous soutiendrons les
investissements du tourisme associatif et du tourisme social privé, notamment
la petite hôtellerie rurale, le camping, les gîtes ruraux.
Enfin, j'ai souhaité maintenir l'aide de l'Etat au fonctionnement des
associations du tourisme social à hauteur de 7 millions de francs. La dotation
qui se situe au même niveau que dans le budget initial pour 1997, est, en
réalité, supérieure de 2,6 millions de francs, compte tenu des gels de crédits
intervenus en cours d'année.
La France, vous l'avez rappelé, reste le pays le plus fréquenté du monde, avec
62,4 millions de visiteurs cette année, nombre en augmentation de 5 % à 15 %,
selon les régions. Le solde du poste « voyages » de la balance des paiements
est en augmentation de 24,4 % par rapport à la même période de 1996.
Le tourisme français conforte sa place de première destination dans le monde,
mais nous ne pouvons effectivement pas, monsieur le rapporteur, nous « endormir
sur nos lauriers ». Les voyageurs partent moins longtemps, fractionnent leurs
séjours. Ils aspirent à des formes différentes de tourisme. Il sont de plus en
plus vigilants quant aux conditions d'accueil, de sécurité et au rapport
qualité-prix sur les lieux de vacances.
Nous devons être capables d'adapter et de faire connaître notre offre
touristique, qu'elle soit métropolitaine ou d'outre-mer, en fonction de ces
évolutions nouvelles.
C'est là qu'intervient Maison de la France. J'ai bien entendu vos réserves sur
la dotation de l'Etat à Maison de la France. J'aurais préféré me présenter
devant vous avec d'autres chiffres. Mais il faut dire aussi que la performance
de Maison de la France ne se mesure pas seulement à l'aune des subventions.
J'ai souhaité qu'une réflexion stratégique s'engage, visant à la
rationalisation de cet instrument et à la mobilisation d'un nouveau
partenariat.
Oui, monsieur Joly, nous devons maintenir la promotion de la France, de toute
la France, sur nos marchés traditionnels. Compte tenu des contraintes
budgétaires, il devrait y avoir cette année un allégement de nos campagnes de
promotion. J'ai cependant demandé au groupement d'intérêt économique de limiter
les effets négatifs de cette baisse par la recherche d'une meilleure
pertinence. Maison de la France élabore un plan marketing très ciblé, par pays
et par produit, afin d'avoir la meilleure efficacité. En outre, nous avons
décidé un programme ambitieux sur les marchés émergents. Je rassure d'ailleurs
M. Ostermann, le bureau de Pékin doit ouvrir dans quelques jours.
M. Emmanuel Hamel.
Il faudra l'inviter à l'inauguration !
Mme Michelle Demessine,
secrétaire d'Etat.
Il importe, sur la durée de cette législature, de
muscler Maison de la France pour en faire un véritable outil de promotion et
d'ingénierie, nous permettant de conquérir une part plus importante du marché
mondial touristique et de conserver notre rang de pays le plus visité.
Concernant la Coupe du monde de football, je m'apprête à piloter la plus
grande campagne jamais organisée de promotion de la France à l'étranger et dans
notre propre pays. Autour du concept « Bonjour 98, la France accueille le monde
», nous lançons une stratégie très offensive pour mettre la France en fête cet
été.
J'ai commencé à mobiliser l'ensemble des acteurs et je vous demande, mesdames,
messieurs les sénateurs, vous qui jouez un rôle dans les comités régionaux et
départementaux du tourisme et dans les offices du tourisme, de participer à
cette mobilisation générale autour de l'accueil et de l'image de la France.
M. Emmanuel Hamel.
Très bien !
Mme Michelle Demessine,
secrétaire d'Etat.
Adapter notre offre touristique pour les Français
comme pour les étrangers, c'est aussi porter attention aux technologies
nouvelles. Une réflexion est en cours en vue de la mise en place d'un serveur
national de réservation et d'un site d'information. Ces deux outils rendront
ainsi l'offre française plus accessible aux tours-opérateurs et agents de
voyages.
Le suivi statistique des flux et des besoins des touristes actuels et futurs -
M. Egu l'a souligné - est fondamental pour anticiper sur les évolutions de la
demande. Nous y consacrons plus de 11 millions de francs, en dépenses directes
et en interventions.
Je souhaite que notre appareil statistique soit enrichi, en particulier dans
la connaissance de l'emploi dans le tourisme, afin que les décideurs tiennent
compte de cet élément dans leurs investissements et leurs offres de nouveaux
produits.
Ces décideurs sont publics et privés. C'est une des caractéristiques du
tourisme français - et sa grande originalité - que de mettre en mouvement
l'Etat, les collectivités locales, le monde associatif et des entreprises de
toutes tailles. Chacun a son rôle à jouer.
Pour cela, il faut élever le niveau de performance des entreprises
touristiques. Notre secteur économique étant constitué à la fois de grandes
entreprises et d'un tissu de 200 000 petites et moyennes entreprises, les
mesures fiscales prévues dans le projet de loi de finances pour 1998 vont
faciliter la création d'entreprises et l'embauche, notamment dans le secteur de
l'hôtellerie et de la restauration.
Au-delà des mesures fiscales, le processus de restructuration de la dette
hôtelière, garantie par la société française pour l'assurance du
capital-risque, la SOFARIS, donnera aux entreprises de ce secteur la bouffée
d'oxygène indispensable à leur survie, en allongeant la durée de remboursement
des emprunts.
Pour l'endettement nouveau, le Gouvernement a mis en place un dispositif de
prêts bonifiés à destination des entreprises de la restauration. Elles pourront
ainsi financer leurs travaux de mise en conformité avec les règles d'hygiène et
de sécurité. Cela représente une capacité de prêts de l'ordre de 3 milliards de
francs.
Enfin, je dirai d'un mot à M. Bony que je ne baisse pas les bras sur la
question des distorsions de concurrence, qu'elles soient d'ordre fiscal ou
réglementaire.
Il faut aussi engager une réflexion sur les charges sociales et fiscales, afin
qu'elles ne pénalisent pas les entreprises de main-d'oeuvre par rapport aux
entreprises à forte composante en capital fixe. Une mise à plat de ces éléments
est indispensable. Des premières propositions seront faites lors du dépôt de la
prochaine loi de financement de la sécurité sociale, à l'automne 1998.
J'en viens naturellement à la question de l'emploi. Le développement dont je
viens de vous entretenir ne prend en effet pleinement son sens que s'il profite
à l'emploi, aux salariés, aux entreprises.
Au total, 12 000 emplois salariés sont créés annuellement dans le tourisme. Il
est possible de faire plus, et mieux. Le secrétariat d'Etat au tourisme
s'inscrit pleinement dans le plan emplois-jeunes. Des activités ont été
identifiées pour répondre aux besoins peu satisfaits. La réalisation effective
du plan résultera de la concertation en cours avec les élus locaux, les
associations, les organismes consulaires.
La concertation a abouti, déjà, à la signature d'accords-cadres avec la
fédération des offices de tourisme et des syndicats d'initiative, avec la
fédération nationale des pays d'accueil, avec l'association des villes d'eau
et, dernièrement, avec la fédération nationale des sociétés d'économie mixte,
ce qui représente 2 500 emplois.
Je peux vous assurer, mesdames, messieurs les sénateurs, que ces emplois ne
concurrenceront pas des activités déjà offertes par le secteur privé.
Parce que ces emplois répondent à un besoin, parce qu'ils auront des effets
positifs sur l'activité touristique et parce que leurs retombées économiques
seront tangibles, il ne peut s'agir de « petits boulots ». Il s'agira de
contrats débouchant sur la création d'emplois permanents, durables et
qualifiés.
Nous avons l'espoir de pérenniser ces emplois au-delà du délai de cinq ans.
C'est possible si l'effort consenti par l'Etat durant cette période permet aux
régions, aux départements et aux communes d'augmenter leur fréquentation
touristique.
A ce propos, je voudrais souligner combien la perspective de réduction du
temps de travail a de quoi intéresser les professionnels du tourisme. Ce temps
gagné, pour beaucoup, sera du temps pour les loisirs, pour la découverte, pour
les vacances.
La question des trente-cinq heures dans l'industrie même du tourisme est
certes difficile, en particulier dans les très petites entreprises. Mais
j'invite les partenaires sociaux à faire preuve d'imagination et d'audace, dans
une branche où la précarité n'est pas fatale et où la formation professionnelle
peut être capitale pour l'avenir, car les besoins des consommateurs exigent un
service de qualité.
Je tiens d'ailleurs à vous indiquer qu'avec Mme Aubry, ministre de l'emploi et
de la solidarité, nous avons débloqué la situation du fonds
d'assurance-formation pour l'industrie hôtelière, le FAFIH, qui va pouvoir
reprendre ses programmes de formation des jeunes et de réinsertion des chômeurs
de longue durée.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les informations et précisions que
je voulais vous apporter.
Pour conclure, je voudrais rappeler que les vacances ne sont pas un quelconque
supplément de plaisir, mais qu'elles peuvent et doivent devenir un élément
déterminant de l'épanouissement des hommes. C'est seulement en prenant en
compte la situation et les besoins de nos contemporains, de tous nos
contemporains, que nous y parviendrons.
(Applaudissements sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées
socialistes.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant aux états B et
C concernant l'équipement, les transports et le logement.
Je vous rappelle que le Sénat a déjà examiné, jeudi 4 décembre, les crédits
affectés à l'urbanisme, aux transports et à la mer, et, aujourd'hui, les
crédits affectés au logement.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 218 120 651 francs. »
Je vous indique, mes chers collègues, que je suis saisi d'une demande de
scrutin public émanant du groupe des Républicains et Indépendants.
M. Paul Loridant,
rapporteur spécial.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Paul Loridant,
rapporteur spécial.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame
la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, au moment où nous allons nous
prononcer sur les crédits du secrétariat d'Etat au tourisme, je dois rappeler à
l'ensemble de la Haute Assemblée, en tant que rapporteur spécial, la position
de la commission des finances.
Cette dernière a considéré que ce projet de budget devait être adopté en
l'état, c'est-à-dire à l'exclusion de tout amendement. Elle a, en effet, estimé
- du moins dans sa majorité, mais cette position est devenue la loi de
l'ensemble de la commission - que, dans la mesure où ce projet de budget était
en diminution, il allait dans le bon sens, en participant à la baisse des
crédits de fonctionnement de l'Etat, dans le droit-fil de la philosophie
développée par M. le rapporteur général et par M. le président Poncelet.
Je tenais à le rappeler pour que chacun, au moment de se prononcer, ait bien
présents à l'esprit les enjeux et les positions qui ont été définies par les
différents groupes de notre assemblée et par la majorité sénatoriale.
Dans ces conditions, monsieur le président, je ne saurais, au nom de la
commission des finances, qu'inviter la Haute Assemblée à voter le projet de
budget qui nous est proposé en l'état.
Si les amendements qui vont être appelés dans un instant devaient être
maintenus - mais j'aurai sans doute l'occasion de reprendre la parole à cette
occasion - je serais conduit, au nom de la commission des finances, à émettre
un avis défavorable. Je vous laisse imaginer le paradoxe dans lequel nous nous
trouverions !
Je vous invite donc vivement, mes chers collègues, à voter le budget du
ministère du tourisme.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III, modifiés par les
amendements n°s II-61, II-63, II-65, II-66 et II-67, précédemment adoptés par
le Sénat.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe des
Républicains et Indépendants.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
54:
Nombre de votants | 318 |
Nombre de suffrages exprimés | 318 |
Majorité absolue des suffrages | 160 |
Pour l'adoption | 312 |
Contre | 6 |
« Titre IV, 3 829 596 637 francs. »
Par amendement n° II-55, MM. Goulet, Besse,Ostermann et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent de réduire les crédits du titre IV de 12 327 000 francs.
Par amendement n° II-54, MM. Ostermann, Besse, Goulet et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent de réduire les crédits du titre IV de 3 372 000 francs.
La parole est à M. Ostermann, pour présenter ces amendements.
M. Joseph Ostermann. J'ai déjà évoqué mes craintes quant aux capacités de fonctionnement de l'AFIT et du GIE Maison de la France. Je ne pense pas qu'il soit utile d'y revenir longuement.
Les deux amendements que je soumets à la Haute Assemblée tendent au rétablissement des crédits de ces organismes au niveau qui était le leur pour 1997.
Vous avez affirmé, madame le secrétaire d'Etat, que l'activité ne se mesure pas à l'aune des subventions. Cependant, notre groupe estime que les deux organismes précités ne disposeront pas des moyens suffisants pour fonctionner correctement en 1998, à un moment où nous devrions devenir de plus en plus offensifs sur les marchés extérieurs.
Bien sûr, les collectivités locales pourraient, une nouvelle fois, pallier les carences de l'Etat. Mais est-ce souhaitable ? En effet, la promotion internationale de notre pays doit rester du ressort du GIE Maison de la France, et l'AFIT me paraît jouer un rôle indispensable. Par conséquent, ces organismes doivent être financés par l'Etat.
L'image de la France à travers le monde est en cause, et nous souhaitons, madame le secrétaire d'Etat, que vous preniez la mesure du risque que vous faites courir au tourisme français.
Tel est l'objet de nos deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Paul Loridant, rapporteur spécial. Le paradoxe de ces deux amendements, c'est que, en visant au rétablissement de crédits, ils prévoient en fait des restrictions budgétaires. Mais, je comprends que l'ordonnance de 1958 oblige à quelques contorsions procédurales pour faire entendre quel est l'objectif visé par M. Ostermann et ses collègues !
Cela dit, monsieur Ostermann, ainsi que je vous l'indiquais voilà quelques instants, la commission des finances a souhaité que les crédits du secrétariat d'Etat au tourisme soient adoptés en l'état.
Pour cette raison, et bien qu'elle n'ait pas eu à se prononcer sur les amendements n°s II-54 et II-55, je ne peux qu'émettre un avis défavorable sur ceux-ci.
Cela étant, je crois qu'il serait souhaitable, monsieur le sénateur, que vous en envisagiez leur retrait, parce qu'il me semble que leur maintien poserait un problème de cohérence par rapport à l'option qu'avait prise la commission des finances dans sa majorité.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, l'adoption des amendements n°s II-54 et II-55 aboutirait à une réduction des crédits de mon secrétariat d'Etat, et je ne peux donc qu'émettre un avis défavorable.
Je souhaiterais, moi aussi, que vous retiriez vos amendements.
M. le président. Monsieur Ostermann, les amendements n°s II-55 et II-54 sont-ils maintenus ?
M. Joseph Ostermann. Je vais les retirer, mais j'aurais quand même souhaité obtenir des garanties s'agissant du GIE Maison de la France.
En effet, nous sommes nombreux ici à voyager à travers le monde, et nous nous rendons compte de l'importance que revêt Maison de la France pour l'image de notre pays à l'étranger.
Par conséquent, j'aurais souhaité, madame le secrétaire d'Etat, que vous affirmiez plus clairement et plus fortement que vous ne l'avez fait tout à l'heure que cet organisme aura les moyens de fonctionner normalement.
Quoi qu'il en soit, je retire nos deux amendements.
M. le président. Les amendements n°s II-55 et II-54 sont retirés.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre IV, modifiés par les amendements n°s II-62 et II-64, précédemment adoptés par le Sénat.
(Ces crédits sont adoptés.)
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 7 311 176 000 francs ;
« Crédits de paiement : 3 850 677 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 8 264 547 000 francs ;
« Crédits de paiement : 3 122 311 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre VI.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi concernant le
tourisme.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Monsieur le
président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes parvenus au terme de
l'examen des crédits de mon ministère.
Je crois que le travail qui a été accompli par la Haute Assemblée, notamment
par les rapporteurs des différents projets de budget, a témoigné d'une volonté
de s'intéresser au fond et d'améliorer les choses. Je veux en remercier tous
ceux qui ont participé à ces discussions.
Bien évidemment, je ne manquerai pas de souligner la contradiction qui s'est
fait jour lorsque a été proposée une réduction de l'ordre de 1,4 % des dépenses
de fonctionnement. En effet, l'adoption d'une telle disposition aboutirait à la
suppression de plusieurs milliers d'emplois, alors que le Gouvernement fait de
la bataille pour l'emploi un axe majeur de sa politique. Par conséquent, nous
ne pouvions y souscrire.
Les projets de budget qui ont été examinés, qu'il s'agisse des services
communs, de l'équipement, des transports, du tourisme ou du logement,
témoignent de premières inflexions en vue d'apporter des réponses aux besoins
qui s'affirment dans le pays. Dans de nombreux cas, ces inflexions devront être
confirmées et confortées dans les années futures. Nous y travaillerons
ensemble, si vous le voulez bien.
(Applaudissements sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées
socialistes.)
M. le président.
Je tiens à remercier le Gouvernement et les membres de la Haute Assemblée,
qui, par leur sagesse, ont permis de rattraper le retard que nous avions
accumulé.
M. Emmanuel Hamel.
Grâce à vous, monsieur le président, et à votre fermeté !
M. le président.
Mes chers collègues, je crains que Mme Guigou ne puisse être parmi nous demain
pour défendre son projet de budget, mais un membre du Gouvernement la
représentera.
Monsieur le ministre, madame le secrétaire d'Etat, je souhaiterais que vous
lui transmettiez, au nom du Sénat, nos voeux de prompt rétablissement.
3
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée à aujourd'hui, lundi 8 décembre 1997 :
A neuf heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 1998, adopté par
l'Assemblée nationale (n°s 84 et 85, 1997-1998).
M. Alain Lambert, rapporteur général de la commission des finances, du
contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Deuxième partie. - Moyens des services et dispositions spéciales :
Budgets annexes de l'ordre de la Légion d'honneur et de l'ordre de la
Libération :
M. René Régnault, rapporteur spécial (rapport n° 85, annexe n° 40).
Justice et article 67 :
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial (rapport n° 85, annexe n° 32) ;
M. Germain Authié, rapporteur pour avis de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale (services généraux, avis n° 90, tome IV) ;
M. Georges Othily, rapporteur pour avis de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale (administration pénitentiaire, avis n° 90, tome V)
;
M. Michel Ruffin, rapporteur pour avis de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale (protection judiciaire de la jeunesse, avis n° 90,
tome VI).
A seize heures et le soir :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 1998, adopté par
l'Assemblée nationale (n°s 84 et 85, 1997-1998).
M. Alain Lambert, rapporteur général de la commission des finances, du
contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Deuxième partie. - Moyens des services et dispositions spéciales :
Articles de la deuxième partie non joints à l'examen des crédits :
Aucun amendement aux articles de la deuxième partie n'est plus recevable.
Scrutin public à la tribune
En application de l'article 60 bis, troisième alinéa, du règlement, le vote sur l'ensemble du projet de loi de finances pour 1998 aura lieu, de droit, par scrutin public à la tribune, à la fin de la séance du mardi 9 décembre 1997.
Délais limites pour les inscriptions de parole
dans la discussion générale
et pour le dépôt des amendements
1° Proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, consacrant le
placement sous surveillance électronique comme modalité d'exécution des peines
privatives de liberté (n° 285, 1996-1997) ; délai limite pour le dépôt des
amendements, mercredi 10 décembre 1997, à dix-sept heures.
2° Conclusions de la commission des affaires économiques sur la proposition de
loi de M. Gérard César et plusieurs de ses collègues portant diverses mesures
urgentes relatives à l'agriculture (n° 155, 1997-1998) :
- délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
mercredi 10 décembre 1997, à dix-sept heures ;
- délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 10 décembre 1997, à
dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le lundi 8 décembre 1997, à zéro heures vingt.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du dimanche 7 décembre 1997
SCRUTIN (n° 54)
sur le titre III de l'état B du projet de loi de finances pour 1998, adopté par
l'Assemblée nationale, modifié par les amendements n° II-61, II-63, II-65,
II-66 et II-67 (budget de l'équipement, des transports et du logement).
Nombre de votants : | 318 |
Nombre de suffrages exprimés : | 318 |
Pour : | 312 |
Contre : | 6 |
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Pour :
16.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :
Pour :
16.
Contre :
6. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer,
Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. Robert-Paul Vigouroux.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (95) :
Pour :
95.
GROUPE SOCIALISTE (75) :
Pour :
75.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (58) :
Pour :
57.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. René Monory, président du Sénat.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (45) :
Pour :
44.
N'a pas pris part au vote :
1. _ M. Jean Delaneau, qui présidait la
séance.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (9) :
Pour :
9.
Ont voté pour
Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Guy Allouche
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Bernard Angels
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Alphonse Arzel
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Michel Bécot
Henri Belcour
Jacques Bellanger
Claude Belot
Georges Berchet
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
Marcel Bony
James Bordas
Didier Borotra
Nicole Borvo
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Monique Cerisier-ben Guiga
Gérard César
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
William Chervy
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Raymond Courrière
Roland Courteau
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Marcel Debarge
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Bertrand Delanoë
Jean-Paul Delevoye
Gérard Delfau
Jacques Delong
Jean-Pierre Demerliat
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Jean Derian
Dinah Derycke
Charles Descours
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Michel Dreyfus-Schmidt
Alain Dufaut
Michel Duffour
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Claude Estier
Hubert Falco
Léon Fatous
Pierre Fauchon
Jean Faure
Gérard Fayolle
Guy Fischer
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe Francois
Jean Francois-Poncet
Yann Gaillard
Aubert Garcia
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Claude Haut
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Roger Hesling
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Roland Huguet
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Philippe Labeyrie
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Serge Lagauche
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Dominique Larifla
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Pierre Lefebvre
Jacques Legendre
Guy Lèguevaques
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Claude Lise
Maurice Lombard
Paul Loridant
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Hélène Luc
Jacques Machet
Jean Madelain
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Kléber Malécot
André Maman
Michel Manet
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Marc Massion
Paul Masson
Serge Mathieu
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Minetti
Gérard Miquel
Louis Moinard
Michel Moreigne
Jean-Baptiste Motroni
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Robert Pagès
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Jean-Marc Pastor
Michel Pelchat
Guy Penne
Jean Pépin
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Alain Peyrefitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jean Puech
Roger Quilliot
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jack Ralite
Paul Raoult
Jean-Marie Rausch
René Régnault
Ivan Renar
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Roger Rinchet
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Gérard Roujas
André Rouvière
Michel Rufin
Claude Saunier
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Fernand Tardy
Martial Taugourdeau
Odette Terrade
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Henri Weber
Ont voté contre
MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Mme Joëlle
Dusseau et M. Robert-Paul Vigouroux.
N'ont pas pris part au vote
M. René Monory, président du Sénat, et M. Jean Delaneau, qui présidait la
séance.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes
à la liste de scrutin ci-dessus.