M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale.
Dans la suite de la discussion des articles de la première partie, nous en sommes parvenus à l'examen de l'amendement n° I-152, tendant à insérer un article additionnel après l'article 2.
Par amendement n° I-152, M. Ostermann et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le I de l'article 154 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« I. - Pour la détermination des bénéfices industriels et commerciaux et des bénéfices des professions non commerciales, le salaire du conjoint participant effectivement à l'exercice de la profession est déductible en totalité du bénéfice imposable de l'entreprise.
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits figurant aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du code général des impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-48 est présenté par M. Lesein.
L'amendement n° I-183 est déposé par MM. Badré, Arnaud et Egu.
Tous deux tendent à insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La dernière phrase du premier alinéa de l'article 39 AC du code général des impôts est ainsi rédigée :
« Cette disposition s'applique également aux véhicules qui fonctionnent, exclusivement ou non, au moyen du gaz naturel véhicules ou du gaz de pétrole liquéfié. »
« II. - Les pertes de recettes éventuelles pour le budget de l'Etat sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Lesein, pour défendre l'amendement n° I-48.
M. François Lesein. Cet amendement a pour objet d'étendre aux véhicules fonctionnant au gaz pétrolier liquéfié, le GPL, les règles d'amortissement exceptionnel actuellement applicables uniquement à l'achat de véhicules électriques ou fonctionnant au gaz en monocarburation en vertu de l'article 39 AC du code général des impôts. En effet, la quasi-totalité du parc de véhicules GPL fonctionne en bicarburation et se trouve, de ce fait, exclue du bénéfice de cette mesure fortement incitative.
Cet amendement permettrait donc d'étendre significativement l'utilisation du GPL dans les flottes captives urbaines, étant souligné que le prix attractif du GPL engage à le préférer à tout autre carburant, et de mieux préserver l'environnement.
M. le président. La parole est à M. Badré, pour défendre l'amendement n° I-183.
M. Denis Badré. Je n'ai pas grand-chose à ajouter aux propos de M. Lesein, qui a très bien expliqué quelle était notre préoccupation.
Vous connaissez notre attachement à la cause de l'environnement, d'une part, et à l'équité, d'autre part. Je pense qu'il serait bon que les flottes captives urbaines puissent bénéficier de cette mesure dans les mêmes conditions, quel que soit leur mode de carburation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques n°s I-48 et I-183 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le président, attaché, comme les éminents collègues qui viennent de s'exprimer, à l'environnement, je me dois néanmoins, au nom de la commission des finances, de rappeler que l'on nous propose un amortissement accéléré pour les véhicules bicarburés GPL et super.
Cette technologie, mes chers collègues, est déjà largement relancée par la baisse massive du prix du GPL à la pompe, qui se situe - je parle sous le contrôle du Gouvernement - aux alentours de 2,60 francs le litre.
L'admission à l'amortissement accéléré ne se justifie réellement que pour les véhicules électriques, dont le surcoût par rapport à un véhicule ordinaire est de l'ordre de 50 000 francs. Les véhicules bicarburés GPL et super ne présentent un surcoût, selon les informations que j'ai pu recueillir, que de 10 000 francs environ. Ils bénéficient, comme tout véhicule de société, d'un amortissement normal. En outre, ils peuvent prétendre à un allégement de la taxe sur les véhicules de société du quart de son montant, ce qui donne, au nouveau taux de cette taxe, pour les véhicules de plus de sept chevaux, un allégement de 3 700 francs par an. Soit, si mes calculs sont exacts, pour une durée de vie du véhicule de cinq ans, un allégement de 18 500 francs.
Il en résulte un avantage qui se révèle supérieur au surcoût de ces véhicules, ce qui a conduit la commission des finances à émettre, en termes purement économiques - et avec regret ...
M. François Lesein. Mais en termes amicaux !
M. Alain Lambert, rapporteur général. ... un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, le Gouvernement rejoint le point de vue de la commission, et ses arguments sont voisins.
Tout d'abord, la loi sur l'air et sur l'utilisation rationelle de l'énergie, que vous connaissez bien, a pour objet d'encourager l'utilisation de carburants propres et non pas, même indirectement, l'utilisation de l'essence ou du gazole.
Le Gouvernement ne souhaite pas reproduire, à propos du gaz naturel, la dérive qui a été constatée sur le carburant sans plomb. Vous le savez, celui-ci a bénéficié d'un avantage fort coûteux pour les finances publiques, mais il a eu assez peu de conséquences pour l'environnement dans la mesure où il a été utilisé pour des véhicules non dotés du pot catalytique.
De surcroît, si l'on en juge à la façon dont la mesure est conçue, l'amortissement jouerait pour l'ensemble du coût du véhicule, alors que le surcoût de l'équipement spécifique qui peut bénéficier de cet amortissement exceptionnel n'excède pas 10 000 francs à 15 000 francs. La mesure n'est donc pas bien ciblée et risque d'être assez coûteuse.
Reste que le Gouvernement est aussi attaché que les membres de la Haute Assemblée à tout ce qui a trait à l'écologie et qu'il va réfléchir à l'élaboration d'une fiscalité écologique, c'est-à-dire qui soit soucieuse d'un développement durable. Sachez, mesdames, messieurs les sénateurs, que la Haute Assemblée sera associée à cette réflexion.
Le Gouvernement s'oppose donc aux amendements identiques n°s I-48 et I-183.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s I-48 et I-183.
M. Denis Badré. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré. Je suis sensible à l'argumentation présentée tant par M. le rapporteur général que par M. le secrétaire d'Etat, particulièrement sur le fait que la mesure n'a pas été suffisamment ciblée. Dans ce domaine, il est vrai, il nous faut être extraordinairement rigoureux pour ne pas gaspiller nos moyens, ce qui reviendrait à affaiblir la cause de l'environnement que nous voulons servir. Je pense avec vous, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il faut cibler de manière plus précise l'ensemble de la mesure.
En revanche, je ne partage pas complètement votre pessimisme lorsque vous déclarez que ces mesures ne servent pas beaucoup l'environnement. Il faut avoir la foi, monsieur le secrétaire d'Etat, cela viendra !
Cela dit, je retire mon amendement et je pense que M. Lesein acceptera d'en faire autant.
M. le président. L'amendement n° I-183 est retiré.
Monsieur Lesein, l'amendement n° I-48 est-il maintenu ?
M. François Lesein. Monsieur le président, si l'on n'inscrit pas dès maintenant dans le texte dont nous discutons les bases de cette mesure dans la perspective d'une concertation plus large et plus générale et, certes, devenue nécessaire à l'heure actuelle, eu égard à la qualité de l'environnement, cela risque de nous coûter fort cher plus tard.
Je pense donc qu'il faut que le Sénat se prononce aujourd'hui. Je prends le risque d'être battu, mais je veux que l'on prenne date et, en conséquence, je maintiens mon amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-48, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-112, Mme Pourtaud, MM. Régnault, Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 200 du code général des impôts, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art... - Les contribuables qui, à partir du 1er décembre 1997, achètent en France des véhicules ou des kits de bicarburation agréés par arrêté conjoint des ministres chargés des transports, du budget et de l'environnement, utilisant comme carburants les gaz de pétrole et autres hydrocarbures présents à l'état gazeux ou fonctionnant à l'électricité électrique, peuvent bénéficier à ce titre d'un crédit d'impôt.
« Le montant de ce crédit d'impôt est fixé à 10 000 F par contribuable. Il est accordé sur présentation des factures de l'achat du véhicule ou du kit.
« Le crédit d'impôt est imputé sur l'impôt dû au titre de l'année au cours de laquelle les dépenses ont été payées. »
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une hausse des droits prévus aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Par cet amendement, nous proposons d'instituer un crédit d'impôt de 10 000 francs sur les achats de véhicules ou de kits de bicarburation permettant de fonctionner avec des carburants non polluants.
Il s'agit en fait de généraliser les mesures d'incitation qui n'existent pour l'instant que pour les véhicules de société.
J'attire l'attention du Sénat sur l'importance de cet amendement. Ces dernières années, en effet, on a vu se multiplier les rapports mesurant les conséquences de la pollution atmosphérique sur la santé publique. Au-delà des rapports, nous constatons tous dans notre entourage, à Paris en particulier, les difficultés respiratoires et les crises d'asthme, notamment.
Plus grave, dans les grandes villes, on estime que neuf cents personnes par an décèdent de manière prématurée du fait de la pollution automobile. Vous le savez, mes chers collègues, dans les grandes agglomérations, la première cause de pollution est la circulation automobile. En Ile-de-France, 75 % des oxydes d'azote sont émis par les transports, ainsi que la plupart des particules dangereuses pour la santé.
A ce titre, j'évoquerai tout particulièrement les véhicules diesel, qui représentent aujourd'hui plus de 40 % des immatriculations. Un rapport du comité de prévention et de précaution estime que 90 % des émissions de particules que l'on peut attribuer aux transports urbains sont issus de véhicules à moteur Diesel. Or ce carburant continue de bénéficier d'un avantage fiscal qui le rend particulièrement attractif.
M. Louis Schweitzer, président-directeur général de Renault, l'exprimait très bien : « Ce qu'il faut condamner avant tout, disait-il, c'est la part de marché unique que le moteur Diesel a prise chez nous. Les acheteurs ne le choisissent pas sur ses qualités mécaniques, mais pour de pures raisons fiscales, ce qui n'est pas sain, ni pour l'Etat ni pour les constructeurs. » J'ajouterai que c'est encore plus néfaste pour la santé publique.
Force est de constater que le renouvellement du parc en véhicules utilisant des moteurs ou des carburants moins polluants a été insuffisant et n'a pas compensé l'augmentation régulière du trafic au sein des grandes agglomérations.
Quelques chiffres permettront de mesurer la distance qui reste à parcourir. Ainsi, le parc automobile français compte 3 000 véhicules électriques ; plus particulièrement, sur les 2 600 000 véhicules et les 150 000 deux-roues qui se déplacent quotidiennement à Paris, seuls 2 160 étaient des véhicules électriques à la fin de 1996 !
Le GPL, pour ne citer que lui, est un carburant peu cher et sept fois moins polluant que l'essence, tout en conservant les mêmes performances. Pourtant, il n'alimente encore que 5 % des voitures vendues cette année. Avec 70 000 véhicules fonctionnant au GPL, la France se situe loin derrière le Japon ou l'Italie, qui en compte respectivement 1,7 million et 1,2 million.
Un certain nombre de mesures ont déjà été prises pour favoriser les carburants non polluants, en particulier le GPL, on vient d'y faire allusion. Nous ne pouvons que nous en féliciter. Cependant, ces mesures nous paraissent insuffisantes pour combattre le développement du marché du gazole et inciter, sinon au renouvellement du parc automobile du moins, au minimum, à l'équipement des véhicules existants avec des kits de bicarburation.
Il faut donc, et dès aujourd'hui, multiplier les initiatives pour qu'en France les véhicules propres remplacent rapidement les véhicules polluants. La pollution constitue une des préoccupations essentielles des Français, en particulier des Parisiens. Techniquement, nous sommes en mesure de faire en sorte qu'avec un trafic équivalent les véhicules polluent moins. Nous devons donc tout mettre en oeuvre pour promouvoir ces nouvelles carburations. C'est pour accélérer cette évolution balbutiante que nous vous proposons cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Comme pour l'amendement précédent, l'idée est intéressante, mais Mme Pourtaud elle-même reconnaît que le prix à la pompe est peu élevé...
De quoi s'agit-il ici ? Il s'agit de soutenir les redevables de l'impôt pour une démarche qu'ils engagent volontairement, ce en quoi il faut d'ailleurs les encourager et les complimenter, alors que nous constatons, corrélativement, la baisse du prix à la pompe.
Je souhaiterais que le Gouvernement, en la circonstance, vienne, si je puis dire, au secours de la commission des finances au nom de notre souci commun d'assainir les finances publiques.
Cela étant, cet amendement émanant de la majorité nationale et de l'opposition sénatoriale, je ne veux pas apparaître comme l'ayatollah du budget de la France ! (Sourires.)
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Nous serons deux !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de venir à mon secours !
Ces incitations fiscales partent, certes, d'un bon sentiment, mais je ne sais pas si nous faisons de bonnes finances exclusivement avec de bons sentiments.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Madame Pourtaud, j'estime que les deux amendements que vous déposez vont au-delà des bons sentiments. Ils tendent en effet à répondre à un véritable problème de pollution urbaine, qui n'est apparu à certains que le 1er octobre dernier, mais que d'autres, plus éclairés, avaient déjà constaté auparavant.
Le 1er octobre, le Gouvernement a su prendre les décisions rapides qui s'imposaient en mettant en place pendant une journée la circulation alternée. Il esr clair cependant que ce n'est pas une solution durable et qu'il faut chercher ailleurs. Je prends donc les deux amendements que vous et vos collègues avez déposés comme un appel à agir sur ces sujets particulièrement importants. Je considère toutefois qu'ils relèvent, si je puis dire, de l'acupuncture fiscale et qu'ils ne sont pas tout à fait opportuns. En effet, adopter des mesures ponctuelles, c'est se condamner ensuite aux pires difficultés ; j'en veux pour preuve - mais je ne citerai pas de nom - les récentes exonérations consenties pour l'achat d'automobiles, qui ont provoqué des dents de scie considérables dans les courbes de ventes ! (Sourires.)
Je partage donc votre conviction, madame Pourtaud, il faut en effet trouver le moyen de lutter contre la pollution urbaine. La fiscalité doit pouvoir jouer un rôle en ce sens, à la condition d'être considérée dans son ensemble. Des mesures fiscales ont déjà été adoptées ponctuellement, M. le rapporteur général l'a dit. Ainsi, le prix du gaz propane liquéfié est très peu élevé en raison d'une fiscalité particulièrement avantageuse. De même, l'Assemblée nationale a décidé que l'électricité consommée par des véhicules appartenant à des entreprises pourrait bénéficier d'une déduction de TVA. Pour l'heure, je ne juge pas opportun d'ajouter une autre mesure ponctuelle à cette liste, d'autant que le coût de la mesure pourrait s'élever, mais il est difficile de l'estimer avec précision, à plusieurs centaines de millions de francs. Il est vrai, madame Pourtaud, que vous soulevez un problème réel, mais sachez que le Gouvernement est décidé non seulement avec sa majorité, mais, si possible, avec l'ensemble de la représentation nationale, à l'affronter.
Nous devons, non pas dans les années mais dans les mois qui viennent, j'y insiste, réfléchir à une fiscalité écologique. En la matière, je ne peux que renouveler les engagements que j'ai pris il y a quelques minutes.
Je vous demande donc, avec respect, de retirer votre amendement. Dans le cas contraire, je serais obligé de demander son rejet, non pas parce que vous ne vous attaquez pas à un vrai problème, mais parce que vous proposez une solution ponctuelle à un problème qui mérite une solution, certes urgente, mais d'ensemble.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-112.
Mme Danièle Pourtaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai pris acte de l'engagement que vous venez de prendre devant nous et de l'importance que le Gouvernement attache, comme nous tous, à la lutte contre la pollution. Je me permets simplement d'insister sur le fait qu'il est nécessaire, à un moment donné, de prendre des mesures fortes et visibles par l'ensemble de la population pour susciter un appel à l'industrie automobile.
Le problème, aussi bien pour les véhicules propres que pour les simples kits de bicarburation, vient du fait que, pour l'instant, produits en trop petites séries, ils sont trop onéreux pour que des particuliers fassent spontanément la démarche de contribuer à l'effort de santé publique que représente la lutte contre la pollution.
Je rends donc le Gouvernement attentif au fait que les mesures qu'il nous promet devront être prises rapidement, quelle qu'en soit la nature. Cependant, je me rends à sa demande, et je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° I-112 est retiré.
Par amendement n° I-111, Mme Pourtaud, MM. Régnault, Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 39 AC du code général des impôts, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art.... - A compter du 1er décembre 1997, les propriétaires de taxis faisant équiper leurs véhicules de systèmes leur permettant de fonctionner à l'énergie électrique, au gaz de pétrole liquéfié, GPL, ou au gaz naturel véhicules, GNV, ou qui achètent en France des véhicules utilisant ces carburants peuvent bénéficier du remboursement du coût d'achat du véhicule ou de l'équipement, sur présentation des factures d'achat, dans la limite de 15 000 F par véhicule. Les systèmes ouvrant droit à remboursement doivent être agréés par arrêté conjoint des ministres chargés des transports, du budget et de l'environnement. »
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une hausse des droits prévus aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Par cet amendement, sur lequel M. le secrétaire d'Etat s'est pour ainsi dire déjà prononcé par anticipation, nous proposons d'inciter les propriétaires de taxis à utiliser des carburants moins polluants. Cette mesure tend au remboursement d'une partie du coût d'achat d'un kit de bicarburation permettant de fonctionner à l'électricité, au GPL ou au GNV. Pour ceux qui fonctionnent au diesel, qui sont largement majoritaires, nous proposons le remboursement d'une partie du coût d'achat d'un nouveau véhicule : les moteurs Diesel ne peuvent en effet être équipés de kit de bicarburation. Cette mesure représente donc une incitation pour que l'ensemble des taxis circule avec des carburants non polluants.
Dans les grandes agglomérations, la première cause de pollution est la circulation automobile. Or il n'est pas très difficile de comprendre qu'un taxi pollue beaucoup plus qu'une voiture particulière. A Paris notamment, les taxis, qui sont au nombre de 15 000 et dont plus des trois quarts fonctionnent au diesel, ont une importance considérable dans le trafic. Ils sont donc en première ligne si l'on veut mener une politique efficace contre la pollution.
En milieu urbain, la responsabilité du diesel dans la pollution atmosphérique n'est plus à démontrer. Les conséquences de celle-ci sur la santé publique deviennent alarmantes.
Pourtant, les propriétaires de taxis français continuent de bénéficier d'une détaxation importante sur le gazole, détaxation qui les conduit, dans leur grande majorité, à choisir ce carburant. Aujourd'hui, les taxis bénéficient d'une détaxation à hauteur de 5 000 litres de diesel par an. Il faut que nous parvenions à inverser cette tendance au profit des carburants non polluants.
Permettez-moi de rappeler que les taxis de Rome et de Tokyo utilisent tous le GPL.
Les taxis G 7 viennent de lancer sur Paris une première expérimentation de véhicules roulant au GPL. Je souhaite que cette expérience se généralise rapidement et que, à cette fin, le Sénat adopte l'amendement n° I-111, qui vise à rétablir l'équilibre ou du moins une concurrence égale entre les véhicules polluants et les véhicules non polluants.
Notons que les chauffeurs de taxi sont parmi les personnes les plus concernées par la pollution automobile, puisqu'ils la subissent toute la journée.
J'attire l'attention de mes collègues et du Gouvernement sur le fait que cette mesure pourrait avoir un important effet d'entraînement pour l'industrie des voitures roulant au gaz pétrolier liquéfié : en effet, les taxis constituent eux-mêmes un premier parc important ; de plus, leurs chauffeurs sont - nous ne pouvons l'oublier - des relais d'opinion précieux.
Voilà pourquoi je demande au Sénat de bien vouloir voter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le président, la commission des finances a trouvé cette proposition aussi intéressante, voire encore plus intéressante, que la précédente.
Voilà un instant, j'ai écouté M. le secrétaire d'Etat avec intérêt, comme toujours, d'ailleurs : son argumentation a d'ailleurs presque ébranlé ma conviction dans la mesure où M. le secrétaire d'Etat a indiqué combien, au fond, à quelque chose près, le Gouvernement pourrait émettre lui-même un avis favorable sur ces propositions. Je regarde donc M. le secrétaire d'Etat avec une circonspection positive afin de savoir quelle sera sa position sur cette idée plus intéressante encore !
Je voudrais dire le plus sérieusement du monde que, s'agissant des chauffeurs de taxi, la recommandation est plus forte encore que sur l'amendement précédent.
Mais il n'a pas échappé à Mme Pourtaud que les taxis bénéficient déjà d'une dérogation européenne qui leur permet de ne pas acquitter la taxe intérieure sur les produits pétroliers sous un plafond de 5 000 litres par an, ce qui va déjà dans le bon sens.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Madame le sénateur, votre proposition est particulièrement constructive, car elle vise le problème des taxis dans les grandes agglomérations.
Il est vrai que, dans certains pays étrangers, les taxis fonctionnent au gaz pétrolier liquéfié. Je laisse de côté, - vous n'y avez pas insisté - le fonctionnement des taxis à l'électricité, car ce mode de carburation n'est pas tout à fait conforme à leurs besoins. En tout cas, s'agissant du gaz pétrolier liquéfié, nous pouvons nous interroger très sérieusement sur le point que vous évoquez.
Si les taxis bénéficient d'une détaxe à hauteur de 5 000 litres de gazole, ils bénéficient d'une détaxe plus importante encore s'agissant du gaz pétrolier liquéfié : 12 000 litres. La vraie difficulté en la matière me semble donc liée non pas à la fiscalité, mais au nombre encore relativement faible des points d'approvisionnement dans Paris.
De plus, les taxis adaptés au gaz pétrolier liquéfié bénéficient d'un amortissement exceptionnel sur douze mois.
En outre, l'Assemblée nationale, à la demande de sa majorité, notamment du groupe socialiste, a institué pour les véhicules non polluants une déductibilité totale de la TVA sur les carburants et l'exonération de la vignette.
Par conséquent, je suis tout à fait circonspect : la proposition de Mme Pourtaud est l'une des idées les plus sérieuses sur lesquelles nous aurons à travailler dans le cadre de l'étude de la fiscalité écologique ; elle sera parmi les premières dispositions examinées, car elle apporte, me semble-t-il, une solution digne d'intérêt à court terme à un problème tout à fait important. Comme l'a dit Mme Pourtaud, dans certains pays étrangers, les taxis roulent au gaz pétrolier liquéfié ; de plus, l'adoption d'une telle mesure permettrait aux chauffeurs de taxi, au premier chef, de vivre dans une atmosphère plus salubre.
En attendant l'étude du dossier de la fiscalité écologique, que nous allons constituer ensemble, je vous demande donc, madame le sénateur, de bien vouloir retirer l'amendement n° I-111.
M. le président. Madame Pourtaud, l'amendement n° I-111 est-il maintenu ?
Mme Danièle Pourtaud. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre engagement, dont je prends bonne note.
Néanmoins, je voudrais attirer votre attention sur deux choses.
D'une part, les flottes de taxi sont généralement des véhicules diesel, sur lesquels les kits de bicarburation ne s'appliquent pas. Il faut donc parler en termes de renouvellement de la flotte, et il est nécessaire d'inciter les propriétaires de véhicules taxis à changer ces derniers.
Par ailleurs, vous m'avez fait remarquer que le gaz pétrolier liquéfié faisait déjà l'objet d'une incitation fiscale. Néanmoins, vous savez comme moi, monsieur le secrétaire d'Etat, que, pour une même distance, un véhicule roulant au GPL consommera plus de carburant qu'un véhicule utilisant du diesel. (M. le secrétaire d'Etat fait un signe d'assentiment.) Par conséquent, bien que je ne sois pas une spécialiste de l'industrie automobile, les deux mesures sont, à mon avis, équivalentes.
Il y a donc toujours, aujourd'hui, un surcoût à l'achat des véhicules propres qui, me semble-t-il, handicape le développement du parc de véhicules propres. Par conséquent, il est urgent de prendre des mesures plus favorables.
J'ai pris bonne note de votre engagement. Je me permets néanmoins de vous demander quand de telles dispositions pourront intervenir.
Bien sûr, monsieur le président, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° I-111 est retiré.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Madame le sénateur, si je dis que nous allons étudier le dossier de la fiscalité écologique ce n'est pas pour repousser ce sujet à un avenir incertain !
Nous allons étudier ce dossier avec tous ceux qui voudront bien apporter leur contribution, de façon à insérer des dispositions précises de fiscalité écologique dans la loi de finances pour 1999. A cet égard, madame le sénateur, il me semble que la mesure que vous proposez mérite d'être examinée avec un soin particulier.
Tel est donc l'objectif du Gouvernement. Par conséquent, je le répète, ces dispositions ne sont pas repoussées aux calendes grecques !
Demande de réserve