SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Souhaits de bienvenue à une délégation de parlementaires australiens (p. 1 ).

3. Questions d'actualité au Gouvernement (p. 2 ).

POLITIQUE GÉNÉRALE DU GOUVERNEMENT (p. 3 )

MM. Henri de Raincourt, Lionel Jospin, Premier ministre.

LIBÉRALISATION DU TRANSPORT AÉRIEN (p. 4 )

MM. Yvon Collin, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

POLITIQUE DE L'EMPLOI (p. 5 )

Mme Hélène Luc, M. Lionel Jospin, Premier ministre.

CIRCULAIRE SUR L'IMMIGRATION (p. 6 )

MM. Paul Masson, Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

LOGEMENT SOCIAL (p. 7 )

MM. Roland Courteau, Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, auprès du ministre de l'équipement, des transports et du logement.

MÉTHODE DE GOUVERNEMENT (p. 8 )

MM. Maurice Blin, Lionel Jospin, Premier ministre.

CRÉATION D'UN TROISIÈME AÉROPORT PARISIEN (p. 9 )

MM. Jean Grandon, Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.

DROIT DU SOL (p. 10 )

MM. Christian Bonnet, Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

ARRÊT DU SURGÉNÉRATEUR SUPERPHÉNIX (p. 11 )

M. Charles Descours, Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

CANTINES SCOLAIRES ET FERMETURES DE CLASSES (p. 12 )

MM. Paul Raoult, Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

POLITIQUE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE (p. 13 )

MM. Alain Lambert, Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Suspension et reprise de la séance (p. 14 )

PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU

4. Missions d'information (p. 15 ).

5. Politique sociale de l'Union européenne. - Discussion dune question orale avec débat portant sur un sujet européen (p. 16 ).
MM. Jacques Genton, auteur de la question et représentant de la délégation du Sénat pour l'Union européenne ; Pierre Fauchon, James Bordas, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Bernard Joly, Maurice Schumann, Mme Danielle Bidard-Reydet.
MM. Pierre Moscovici, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes ; Maurice Schumann.
Clôture du débat.

6. Dépôt de projets de loi (p. 17 ).

7. Dépôt de propositions de loi (p. 18 ).

8. Retrait d'une proposition de loi (p. 19 ).

9. Dépôt de propositions d'acte communautaire (p. 20 ).

10. Dépôt de rapports (p. 21 ).

11. Dépôt de rapport d'information (p. 22 ).

12. Ajournement du Sénat (p. 23 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY

M. le président. La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ? ...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

SOUHAITS DE BIENVENUE À UNE DÉLÉGATION DE PARLEMENTAIRES AUSTRALIENS

M. le président. J'ai le plaisir de saluer la présence dans notre tribune officielle d'une délégation de parlementaires australiens, composée de sénateurs et de membres de la Chambre des représentants, et qui est présidée par Mme Margaret Reid, président du Sénat australien.
Cette délégation séjourne en France à l'invitation du Sénat.
Je lui présente, au nom du Sénat, nos souhaits de bienvenue et je forme des voeux pour que son séjour en France soit agréable et contribue à renforcer les liens d'amitié existant entre nos deux pays.
Je tiens à ajouter que notre porte est toujours ouverte aux représentants du Sénat australien, assemblée avec laquelle nous entretenons de très bonnes relations. (M. le Premier ministre, Mmes et MM. les ministres, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)

3

QUESTIONS D'ACTUALITÉ
AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
Monsieur le Premier ministre, je suis heureux de saluer votre présence, ainsi que celle de nombreux ministres, à l'occasion de cette première séance de questions d'actualité au Gouvernement. Nous y sommes sensibles. J'ajoute que c'est un plaisir et un honneur pour moi de présider cette séance.
Compte tenu du changement de gouvernement qui est intervenu, il me paraît utile de rappeler la règle du jeu.
Le temps réservé à chaque question est de cinq minutes : deux minutes et demie pour le questionneur et deux minutes et demie pour le répondeur.
Dans ces conditions, vous voudrez bien me pardonner s'il m'arrive de temps en temps de rappeler les orateurs à l'ordre, aussi bien les sénateurs que les ministres d'ailleurs.
Je ne méconnais pas le caractère désagréable de telles interruptions, mais je souhaite vivement que chacun respecte son temps de parole. En effet, si tel n'était pas le cas, certains seraient pénalisés, le temps consacré à la retransmission de cette séance par la télévision nous étant compté.

POLITIQUE GÉNÉRALE DU GOUVERNEMENT

M. le président. La parole est à M. de Raincourt. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste.)
M. Henri de Raincourt. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
La déclaration de politique générale du Gouvernement a été lue devant le Sénat. Elle n'a pas donné lieu à un débat, comme la Constitution l'aurait permis, mais je comprends tout à fait les motifs qui ont conduit le Gouvernement à ne pas en solliciter l'organisation.
Monsieur le Premier ministre, votre participation à notre première séance de questions d'actualité me permet de soulever un certain nombre d'interrogations qui me paraissent importantes.
Le récent sommet d'Amsterdam a confirmé la création de la monnaie unique le 1er janvier 1999, qui impose la poursuite de la réduction des déficits publics. Peu de jours après, dans votre discours de politique générale, reprenant les engagements que vous aviez souscrits durant la campagne électorale, vous avez annoncé, ai-je lu dans la presse, quarante-deux mesures, dont la quasi-totalité va entraîner des dépenses nouvelles, et je ne parlerai pas de l'arrêt de certains grands travaux ou de Superphénix, par exemple. Par ailleurs, des privatisations pourraient être différées ou abandonnées, vous privant des recettes correspondantes.
La seule économie annoncée - pour le moment, elle ne semble d'ailleurs guère faire recette - est le plafonnement des ressources pour l'attribution des allocations familiales. Monsieur le Premier ministre, c'est la remise en cause d'un principe que, pour notre part, nous n'entendons pas abandonner.
J'ajoute que la simultanéité de cette annonce et de la régularisation d'un certain nombre d'étrangers en situation irrégulière est pour le moins maladroite et qu'en tout cas elle en choque plus d'un. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. Posez votre question !
M. Henri de Raincourt. Monsieur le Premier ministre, comment comptez-vous financer les premières mesures que vous avez retenues ? Comment à la fois aller vers la monnaie unique, réduire les déficits, augmenter les dépenses, stabiliser ou diminuer les prélèvements tout en prenant en compte les nouvelles contraintes de la politique nationale que vous entendez conduire ? (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Tout cela en deux minutes trente !
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE)
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, avant de répondre à la question de M. de Raincourt, je voudrais d'abord dire que, si les usages et l'ordre du jour du Parlement m'ont conduit, depuis ma nomination comme Premier ministre, à m'exprimer trois fois devant l'Assemblée nationale, c'est avec un très grand plaisir que je me trouve aujourd'hui au Sénat pour répondre, avec les membres de mon Gouvernement, aux questions qui nous sont posées.
Je suis heureux que l'occasion me soit donnée, avant la fin de la session parlementaire, d'ajouter que j'aurai le souci permanent, dans mon action gouvernementale, d'associer le Parlement, notamment le Sénat, dans le respect, naturellement, de l'indépendance de chacun et de la distinction entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif, aux débats qui précéderont ou qui accompagneront la mise en oeuvre des orientations qui seront les nôtres.
En ce qui concerne plus particulièrement la question posée par M. de Raincourt, et après que Mme Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, fut venue devant le Sénat présenter la déclaration de politique générale, je voudrais dire que, s'il existe un certain nombre de tensions, d'exigences contradictoires, de contraintes face auxquelles va se trouver le présent gouvernement et en raison desquelles, nous a-t-on expliqué, le précédent gouvernement avait préféré écourter la durée du mandat de l'Assemblée nationale, peut-être pour ne pas avoir, justement, à les affronter... (Marques d'approbation et rires sur les travées socialistes. - Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
C'est une explication qu'on nous a donnée ! On ne nous en a pas donné tellement d'autres !
S'il existe des contraintes, disais-je, celles-ci relèvent moins, monsieur le sénateur - il faut nous en convaincre - d'une contradiction qui existerait entre nos engagements de campagne et le réel que de tensions, de contradictions ou d'exigences que recèle le réel lui-même et auxquelles nous sommes tous confrontés, ce gouvernement l'étant après le précédent. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Ce gouvernement a le temps devant lui. Par ailleurs, monsieur le sénateur, au-delà de toutes les promesses, lorsqu'un pays compte 3 millions de chômeurs et subit en même temps un endettement massif qui s'est, pour l'essentiel, envolé dans les années 1993 à 1995... (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Protestations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste) ... lorsque ce même pays a un taux de prélèvements obligatoires considérable et que ce taux s'est accentué au point de constituer un record durant la période 1995-1997... (Nouvelles protestations sur les mêmes travées) ... ces contraintes existent pour tous : elles existent pour mon pays et elles existent pour le Gouvernement.
Nous avons à veiller aux comptes publics, à l'endettement, au risque de creusement du déficit. En même temps, nous devons nous efforcer d'intégrer une croissance qui donne peut-être des signes de reprise - mais ils sont encore fragiles, comme en témoignent des indicateurs contradictoires - alors que nous avons plus de 3 millions de chômeurs.
Ces contradictions existent dans la vie économique, mais aussi dans les rapports entre l'économique et le social, et même dans la société et la vie politique puisque l'on constate qu'une force extrémiste rassemble plus de 15 % des voix dans notre pays ! (« Grâce à vous ! » sur les travées du RPR.)
Nous devons par ailleurs affronter un rendez-vous monétaire, dont j'ai rappelé qu'il nous tenait et que nous nous engagions à le respecter.
Voilà le cadre général dans lequel le Gouvernement va agir. Nous allons affronter ces difficultés.
Monsieur le sénateur, les réponses aux questions précises que vous avez posées vous seront données à l'automne, lorsque nous aborderons le débat qui concernera le collectif budgétaire et la préparation du budget.
A ce sujet, je vous précise que j'ai réuni les ministres avant de vous rejoindre pour évoquer l'exercice budgétaire. Le débat commence entre nous d'abord, parce que c'est nécessaire. En effet, les lettres de cadrage doivent partir bientôt. Or, la procédure budgétaire, en raison de la dissolution - je n'en fais le reproche à personne, mais c'est une donnée - a été retardée de deux mois. Nous devons donc agir dans un délai beaucoup plus restreint.
Vous aurez des indications précises sur vos questions lorsque nous parlerons et du collectif budgétaire et du projet de budget pour 1998.
Je dois ajouter, monsieur le sénateur, qu'il ne m'était pas venu à l'esprit de faire un rapprochement entre la mise sous condition de ressources du versement des allocations familiales et la régularisation de tel ou tel sans-papiers se trouvant dans une situation inextricable. Vous avez opéré ce lien. Il ne m'était pas venu à l'esprit, et je ne suis pas persuadé qu'il soit venu à l'esprit de beaucoup de nos concitoyens !
M. Claude Estier. C'est vrai !
M. Lionel Jospin, Premier ministre. En tout cas, nous allons effectivement tenir ces exigences contradictoires : croissance à soutenir, chômage à faire reculer et, en même temps, maîtrise des comptes publics, qu'il s'agisse du déficit du budget de l'Etat - nous aurons des informations précises sur ce point le 21 juillet quand l'évaluation des magistrats de la Cour des comptes aura été rendue publique - ou des comptes de la sécurité sociale, sur lesquels nous pouvons avoir de sérieuses inquiétudes.
Nous prenons la situation telle qu'elle nous a été laissée et nous travaillerons sur ces bases en espérant léguer à ceux qui nous succéderont une situation meilleure. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

LIBÉRALISATION DU TRANSPORT AÉRIEN

M. le président. Mes chers collègues, il est normal que M. le Premier ministre se soit exprimé longuement, car c'est la première fois qu'il intervient devant le Sénat.
Nous allons maintenant revenir à la règle. Dès lors, monsieur Collin, vous disposez de deux minutes et demie pour exposer votre question. Vous avez la parole.
M. Yvon Collin. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
A la veille des départs en vacances d'été qui, pour les clients du transport aérien, seront les premières à se dérouler dans un contexte de libéralisation totale du ciel européen, je souhaiterais obtenir quelques assurances.
Tout d'abord, je souhaiterais être assuré que cette libéralisation ne s'accompagne pas d'un désengagement excessif de l'Etat qui laisserait se développer des pratiques commerciales anarchiques. Je pense, en particulier, aux surréservations systématiques et mal maîtrisées qui exposent les clients des compagnies à rester en rade ou plutôt en aérogare.
Je crains aussi de voir se dégrader les conditions de la sûreté aérienne et, sur ce point, je souhaiterais savoir dans quelle mesure le retrait déplorable de certains services de l'Etat des aéroports est compensé par l'indispensable mise à niveau des procédures de sûreté.
Ma seconde inquiétude concerne la capacité de nos infrastructures aéroportuaires à faire face à la période estivale. Puisque je vous interroge sur l'évolution récente de la ponctualité et de la sécurité du transport aérien, je profite de l'occasion pour souhaiter que soit assurée la nécessaire adaptation de nos infrastructures à la croissance du transport aérien. (Applaudissements sur les travées du RDSE ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, vous avez bien voulu attirer notre attention sur les conditions dans lesquelles les passagers pourront bénéficier des services de transport aérien, notamment à l'occasion des départs en vacances.
Pour ce qui concerne les services assurés par l'Etat ou placés sous son contrôle, je vous indique tout de suite que les mesures relatives à la sécurité aérienne et à la sûreté seront appliquées avec la même rigueur. Malgré l'augmentation des trafics, qui se traduit actuellement par des journées records, notamment au moment des vacances, une diminution des délais dus aux services de contrôle de la circulation aérienne est observée depuis le début de l'année.
Malheureusement, des incidents peuvent survenir et, ce matin encore, une panne de calculateur a occasionné des retards d'à peu près une heure pour environ soixante-dix avions. Ce retard est en voie d'être résorbé.
Plus généralement, sachez, monsieur le sénateur, que je suis très attentif à la préoccupation que vous exprimez. Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, je ne serai pas le ministre de la déréglementation et de l'ultralibéralisme. Dans ce domaine du transport aérien, les Américains eux-mêmes ont mesuré les effets néfastes de la déréglementation intérieure voilà quelques années en matière de contrôle aérien.
Il nous faut, en revanche, savoir nous adapter ; cela veut dire à très court terme qu'Air France doit pouvoir faire face au développement du trafic. Les avancées réalisées ces derniers jours dans le dialogue entre les pilotes et la direction me paraissent de nature à mieux résoudre ce problème, et je m'en félicite.
De même, il nous faut engager rapidement le débat sur le développement de nos capacités aéroportuaires, car il s'agit là d'un enjeu national.
Mais je suis persuadé que, là comme ailleurs, on gagne du temps à ne pas faire l'impasse du dialogue et de la concertation. C'est à cela que j'ai appelé mes services, et que moi-même je m'engage, avec tous les intéressés et avec vous-même, monsieur le sénateur. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)

POLITIQUE DE L'EMPLOI

M. le président. La parole est à Mme Luc. Mme Hélène Luc. Monsieur le Premier ministre, au nom des sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, je salue votre première venue, avec le nouveau gouvernement de la France, devant la Haute Assemblée.
Nous sommes partie prenante de la majorité pluraliste. Nous voulons être les acteurs efficaces et constructifs de l'oeuvre de changement pour en garantir le succès durable.
Comme les Françaises et les Français, nous sommes ambitieux pour notre pays afin que toutes et tous retrouvent, après tant de souffrances, de déceptions... (Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants)... de promesses non tenues, le chemin de l'espoir, celui d'une vraie vie, pour lequel une formation réussie et un emploi qualifié et stable sont deux piliers indispensables.
Monsieur le Premier ministre, nous avons apprécié le ton décidé, la sérénité...
Plusieurs sénateurs du RPR. La question !
Mme Hélène Luc. ... de votre déclaration de politique générale.
Nous approuvons les orientations et les mesures intéressantes qui se démarquent de l'ultralibéralisme et de l'autoritarisme des gouvernements de droite.
M. Josselin de Rohan. Les 4 % !
Mme Hélène Luc. Eh bien oui...
M. le président. Posez votre question, madame Luc ! (Posez votre question ! sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
Mme Hélène Luc. Dans le même temps, nous trouvons nettement insuffisante l'augmentation de 4 % du SMIC (Ah ! sur les mêmes travées.) et s'agissant du plafonnement des allocations familiales (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées), je vous le dis franchement, monsieur le Premier ministre, pour notre part, et vous le savez, nous n'y avons jamais été favorables. (Très bien ! et applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Alain Gournac. Très bien !
Mme Hélène Luc. Vous ne manquez pas d'audace, vous qui n'avez pas augmenté les allocations familiales ! (Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Posez votre question, madame Luc, s'il vous plaît !
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, c'est la faute de la majorité ! Je vous demande de me décompter le temps de parole dont on m'a privée ! (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
En 1996, les gros portefeuilles boursiers se sont enflés de 1 000 milliards de francs, record jamais atteint !
M. Charles Descours. Ça continue !
M. le président. Votre question, madame Luc !
Mme Hélène Luc. N'est-ce pas là qu'il faut prendre les financements pour le pacte de solidarité que vous voulez mettre en oeuvre, monsieur le Premier ministre ?
M. le président. Votre question, s'il vous plaît, madame Luc !
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, on m'a interrompue. Je vous demande de me permettre de finir ma question.
Notre économie a un besoin impératif de croissance.
M. Philippe François. C'est une déclaration !
Mme Hélène Luc. Le moteur est l'augmentation du pouvoir d'achat pour qu'alors suive la création en chaîne de milliers d'emplois dès la rentrée des classes, par exemple. C'est là le coeur de ma question. (Ah ! sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
Pour permettre cette politique ambitieuse de relance, le refus du carcan des critères de Maastricht...
M. le président. Posez votre question, madame Luc !
Mme Hélène Luc. J'ai commencé à la poser ; je termine, monsieur le président.
M. le président. Votre question, s'il vous plaît ! Vous parlez depuis trois minutes et demie !
Mme Marie-Claude Beaudeau. C'est injuste !
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, je viens de vous le dire, la question qui est au coeur de mon intervention est celle de l'emploi, pour la rentrée des classes par exemple.
Pour permettre cette politique ambitieuse... (M. le président coupe le micro de Mme Luc).
M. le président. Votre question maintenant, madame !
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, vous avez permis tout à l'heure à un orateur de dépasser son temps de parole de cinquante secondes !
M. le président. J'ai laissé parler M. le Premier ministre pendant cinq minutes, ce qui est normal, et M. de Raincourt pendant deux minutes quarante-cinq. Vous, vous en êtes déjà à trois minutes cinquante-cinq !
Mme Hélène Luc. Avec les interruptions !
J'en viens à ma question : comment, monsieur le Premier ministre, le Gouvernement va-t-il associer les députés et les sénateurs à la préparation du collectif budgétaire sur les mesures tant attendues et les chantiers annoncés ? (M. le président coupe à nouveau le micro. - Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, je regrette votre attitude.
M. le président. Je regrette aussi, mais vous êtes intervenue quatre minutes trente !
Mme Hélène Luc. Si vous décomptez les interruptions, cela ne fait pas quatre minutes ! (Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.) Vous commencez très mal votre présidence sous un gouvernement de gauche, monsieur le président !
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre, et à lui seul.
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Madame le sénateur, l'augmentation du SMIC de 4 %, avec un taux d'inflation inférieur à 1 %, est la plus importante depuis quinze ans.
Quant au fait de placer les allocations familiales sous plafond de ressources, il s'agit d'une décision juste (Applaudissements sur les travées socialistes) et comprise par la plus grande partie de l'opinion.
M. Emmanuel Hamel. Certainement pas !
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Elle n'a suscité, à mon sens - je laisse la liberté aux forces politiques - que des réactions extrêmement minoritaires, représentatives d'une proportion de familles extrêmement restreinte.
Sur la base d'une telle annonce, nous pouvons maintenant ouvrir des concertations.
M. Jean Chérioux. C'est un peu tard !
M. Lionel Jospin, Premier ministre. L'action gouvernementale est un dosage entre la décision, nécessaire, l'action et la concertation.
Si j'avais fait une déclaration de politique générale dans laquelle je m'étais contenté d'aborder des thèmes en disant que, sur tous, j'entamerai un dialogue perpétuel avec la population, vous auriez dit : quelle déclaration vague !
Il faut donc articuler un discours, donner des indications, marquer une volonté, la préciser pour que les choses soient claires (Vifs applaudissements sur les travées socialistes.) et, ensuite, ouvrir le dialogue.
Notre politique de lutte contre le chômage - puisque telle est votre préoccupation, madame le sénateur - repose sur deux piliers : retrouver une croissance durable et créer les conditions d'un développement plus riche en emplois.
Aujourd'hui, la demande est insuffisante dans ce pays ; c'est le diagnostic des économistes. Il faut donc agir en faveur de l'investissement et de la consommation pour améliorer l'emploi.
La recherche d'une croissance plus forte ne se décrète pas. Elle se gagne sur une réorientation des politiques européennes. L'espace que nous avons essayé d'ouvrir au sommet d'Amsterdam, sommet qui s'est tenu quelques jours après la formation du Gouvernement, est destiné à rechercher en Europe des concertations en vue de politiques plus dynamiques de croissance.
Elle se gagne aussi par le redéploiement des dépenses de l'Etat pour stimuler la demande et créer des emplois. A cet effet, les réhabilitations de logements annoncées seront engagées dès cette année, notamment pour les HLM, et la consommation sera soutenue grâce à l'augmentation forte de l'allocation de rentrée scolaire.
Elle se gagne encore par un nouveau partage de la valeur ajoutée entre les revenus du travail et les profits, passage qui s'inscrira progressivement dans des mesures fiscales.
Toutes ces dispositions contribueront à relancer la croissance.
Nous mettrons par ailleurs en oeuvre le programme dit des « 700 000 jeunes ». Nous ne voulons pas intégrer artificiellement des jeunes dans les administrations, mais nous souhaitons plutôt partir des besoins recensés effectivement dans les entreprises, les collectivités, les associations et, naturellement, les services publics.
Pour cela, le ministre de l'emploi et de la solidarité, en liaison avec les ministres concernés - nous en avons parlé ce matin - a d'ores et déjà engagé, sur la base de missions confiées à des personnalités, un travail d'évaluation des besoins et de recherche de méthodes susceptibles de susciter des dynamiques communes et plurielles en faveur de la création d'emplois.
Ce premier dispositif sera mis en oeuvre dès l'automne à travers les premiers contrats signés.
M. le président. Monsieur le Premier ministre...
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Enfin, à partir de la conférence sur les salaires, l'emploi et la diminution du temps de travail, nous pourrons, par la négociation et par une loi-cadre, ouvrir le grand chantier de la diminution du temps de travail, qui, lui aussi, servira l'emploi. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Mes chers collègues, je voudrais rappeler un principe : une question d'actualité porte sur un sujet précis, mais elle ne doit pas définir un programme de gouvernement ! Je vous demande par conséquent de faire preuve de discipline, sinon le nombre de questions posées sera limité.

CIRCULAIRE SUR L'IMMIGRATION

M. le président. La parole est à M. Masson. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Paul Masson. Comme ministre de l'intérieur, vous avez accepté, monsieur Chevènement, la lourde mission de déposer d'ici à l'automne de nouveaux textes sur l'acquisition de la nationalité française et sur l'immigration.
J'ai lu ce matin dans le Journal officiel la circulaire que vous avez adressée aux préfets. Je dois dire que c'est un modèle du genre !
Dans ce texte, vous invitez les préfets à délivrer, à titre exceptionnel et pendant une période illimitée, des titres de séjour à des étrangers qui n'y ont pas droit !
Vous posez un grand principe : la France doit lutter contre toutes les formes d'immigration clandestine ; voilà qui est clair.
Malheureusement, sont énumérées ensuite treize catégories d'exceptions pour lesquelles les préfets auront à faire des choix selon des critères subjectifs. Je pourrais citer dix exemples de ce clair-obscur qui s'explique manifestement par le souci que vous avez eu de laisser la responsabilité aux préfets.
Ces derniers porteront en tout état de cause la casquette ou le chapeau, comme vous voudrez : ou ils en feront trop et ils seront opportunistes, ou ils n'en feront pas assez et ils seront obtus. En cas de dérapage, ils seront bien évidemment coupables. Bien sûr, le Gouvernement ne sera pas responsable ! (Exclamations sur les travées socialistes.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Corporatisme !
M. Jean-Louis Carrère. Esprit de corps !
M. Paul Masson. Le plus redoutable dans cette circulaire, monsieur le minisre,...
M. le président. Votre question, monsieur le sénateur !
M. Paul Masson. J'y viens, monsieur le président.
Le plus redoutable, c'est la procédure choisie. Elle est écrite. Chacun devra expédier son dossier par la poste. Aucune décision ne sera prise avant le 1er novembre. Pendant quatre mois, chacun va s'organiser : la rumeur va grossir, la pression va monter, les officines vont fabriquer, les réseaux vont s'activer ; les regroupements vont s'organiser. (Exclamations sur les travées socialistes). Bref, aucun terme n'est fixé à cette procédure.
M. François Autain. La question !
M. Paul Masson. Combien de dossiers attendus, monsieur le ministre ? 20 000, 50 000 ou 100 000 ? Personne ne le sait, pas même vous.
M. Jean-Luc Mélenchon. La question !
M. le président. Votre question, monsieur le sénateur !
M. Paul Masson. En vérité, vous installez dans ce pays, jusqu'à la prochaine consultation électorale, un contentieux permanent sur un thème dont vous dites vous-même qu'il est pernicieux pour la France.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cela vous va bien !
M. Paul Masson. Ma question est simple, monsieur le ministre. (Exclamations sur les travées socialistes.) Pensez-vous que cette récompense à la fraude est de nature à mobiliser vos fonctionnaires, ...
M. Adrien Gouteyron. Très bien !
M. Guy Penne. C'est scandaleux !
M. Paul Masson. ... des fonctionnaires qui, depuis tant d'années, s'échinent à appliquer des procédures ingrates enfermées dans des délais imbéciles ?
Cette procédure, étirée sur de longs mois, ne vous paraît-elle pas de nature à provoquer un appel d'air, où, encore une fois, toute la misère du monde sera tentée par le rendez-vous français ? (Protestations sur les travées socialistes.)
Monsieur le ministre, un de vos collègues s'est donné pour tâche de « dégraisser le mammouth » ;...
Mme Marie-Claude Beaudeau. La question !
M. Paul Masson. Elle est posée la question. (Rires sur les travées socialistes.)
Mme Marie-Claude Beaudeau. Il y a deux poids, deux mesures !
M. Paul Masson. Craignez, monsieur le ministre, d'avoir à nourrir le racisme. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, je pense qu'il faut garder son sang-froid et se tenir à l'écart du surenchères démagogiques ou, le cas échéant, des tentations de l'angélisme...
La circulaire qui a été adressée aux préfets hier répond à des critères très précis. Il s'agit d'une mesure transitoire en attendant le dépôt, à l'automne, d'un projet de loi visant à refondre l'ensemble de la législation relative, d'une part, à l'entrée et au séjour des étrangers et, d'autre part, aux modalités d'accès à la nationalité française.
Vous n'ignorez pas que, après avoir fait l'objet de plus de 40 modifications, l'ordonnance de novembre 1945 est devenue absolument illisible et, de surcroît, inapplicable.
M. Robert Badinter. Très bien !
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Dans ces conditions, pour éclairer le jugement des préfets, deux de mes prédécesseurs - MM. Pasqua et Debré - ont été obligés de procéder par la voie de circulaires, que vous flétrissez aujourd'hui.
La circulaire que j'ai adressée hier répond aux critères définis par la commission consultative des droits de l'homme, dont le Gouvernement a jugé utile de s'inspirer. Les catégories qui y figurent correspondent très exactement à ces critères.
Monsieur le sénateur, voudriez-vous empêcher des conjoints de vivre ensemble ?
M. Paul Masson. Vous oubliez l'article 6 de la loi Debré !
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Mais pas du tout ! Je parle de conjoints d'étrangers ! Si un professeur brésilien, par exemple, veut épouser une Paraguayenne, allez-vous l'en empêcher, surtout s'il enseigne en France ?
M. Michel Caldaquès. Le voilà l'angélisme !
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Les conjoints de réfugiés statutaires qui ont obtenu le droit d'asile sur notre sol n'auraient-ils pas le droit de se marier ? Voulez-vous séparer les familles ? Voulez-vous empêcher les enfants de rejoindre leurs parents ?
Plusieurs sénateurs socialistes. Oui, c'est cela qu'ils veulent !
M. Jean Chérioux. Ce ne sont pas ceux-là qui sont visés !
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Toutes ces questions sont de bon sens, et il faut y répondre de manière claire.
M. le président. Monsieur le ministre, veuillez conclure, s'il vous plaît.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Je vais conclure.
La circulaire ajoute quelques catégories. Il s'agit de familles d'étrangers constituées de longue date en France, de personnes qui n'ont pas le statut de réfugié politique mais qui peuvent courir des risques vitaux si elles retournent dans leurs pays, de malades atteints de pathologies graves, enfin, d'étudiants qui ont fait la preuve de succès significatifs dans le cours de leurs études. La France doit rester un grand pays d'accueil pour les étudiants, les chercheurs, les hommes de culture du monde entier.
Ce n'est pas l'intérêt du pays de mettre toujours l'immigré au coeur du débat public.
M. Paul Masson. C'est ce que vous faites !
M. Jean Chérioux. Vous passer votre temps à ça !
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Croyez-moi, si vous voulez servir la République, évitez de poser le problème sous cet angle ! (Vifs applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du groupe communiste républicain et citoyen et du RDSE.)

LOGEMENT SOCIAL

M. le président. La parole est à M. Courteau.
M. Roland Courteau. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, le logement social, préoccupation majeure des Français, a été, hélas ! sacrifié durant ces quatre dernières années.
La diminution du nombre de réhabilitations, le gel des barèmes des aides au logement, les tensions sur le logement urbain, mais aussi rural, en sont des exemples ô combien consternants.
Or, disposer d'un toit est la condition essentielle de l'insertion sociale de la personne, de son autonomie et de l'exercice de sa citoyenneté.
Je me réjouis donc que, lors de sa déclaration de politique générale, M. le Premier ministre ait fait de l'accès à un logement de qualité pour tous une priorité nationale.
Il y va de la dignité de ceux de nos concitoyens privés de logements de qualité ou résidant dans des quartiers à l'environnement particulièrement dégradé.
Il y va également de la cohésion sociale, et nous avons obligation d'éviter, par une véritable relance du logement, la ségrégation sociale ou la constitution de quartiers qui peuvent devenir autant de ghettos pour pauvres.
Ainsi, pour nous, la mixité sociale et l'accueil des plus démunis sont bien des objectifs prioritaires.
C'est pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaiterais que vous m'apportiez certaines précisions.
Dans quelle mesure les aides personnalisées au logement seront-elles revalorisées ?
Comment, sous quels délais et à quelle hauteur, seront mobilisés les crédits nécessaires à la réhabilitation des logements, notamment des HLM ?
Les zones rurales seront-elles concernées par ce programme ?
Par ailleurs, quelles mesures entendez-vous prendre pour favoriser la mixité sociale ?
Rétablirez-vous les dispositions de la loi d'orientation pour la ville que vous avez vous-même initiées en 1990 et que l'ancienne majorité parlementaire a malheureusement supprimées alors qu'elles visaient à permettre une répartition équilibrée des différents modes d'habitat sur un même territoire ?
Envisagez-vous de relever les plafonds de ressources donnant accès au parc HLM ?
Enfin, prendrez-vous des dispositions pour accroître l'offre de logements et permettre la mise sur le marché des quelque 400 000 logements privés vacants, jugés mobilisables ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, sachez-le, nombreux sont ceux qui espèrent enfin être mieux écoutés et mieux compris. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Je vous félicite d'avoir respecté votre temps de parole.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement auprès du ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, vous m'avez posé toute une série de questions ; vous me permettrez d'y répondre succinctement. Bien entendu, nous pourrons y revenir ultérieurement si vous souhaitez obtenir telle ou telle précision.
En ce qui concerne la revalorisation des aides personnalisées au logement, je tiens à dire à la représentation sénatoriale que, avec Jean-Claude Gayssot, nous en avons fait une priorité. Nous avons été entendus dans les arbitrages rendus par M. le Premier ministre : en fait, c'est une somme de 2,5 milliards de francs qui a été dégagée, alors que la seule actualisation exigeait un peu plus de 1,9 milliard de francs. Ainsi, près de 600 millions de francs constituent un rattrapage.
A tous ceux qui se soucient de la politique familiale, je me permettrai de rappeler que, au 1er juillet 1993, il n'y avait pas eu de revalorisation du barème des aides au logement ; au 1er juillet 1994, ce barème n'avait été que partiellement actualisé, alors qu'au 1er juillet 1995 et au 1er juillet 1996, il ne l'avait pas été du tout. De toutes les prestations familiales, ces aides sont jugées comme les plus redistributrices socialement puisqu'elles bénéficient au tiers le plus pauvre des familles françaises. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
Voilà un point qui méritait, me semble-t-il, d'être explicité.
S'agissant de la réhabilitation, l'effort qui a été décidé en ce domaine l'a été dans un souci de conjuguer solidarité et emploi pour répondre à l'orientation arrêtée par M. le Premier ministre. La réhabilitation a effectivement été privilégiée en tant que moyen de dégager un supplément de capacité.
Outre le programme exceptionnel de réhabilitation de un million de logements qui a été évoqué par M. le Premier ministre, 100 000 logements supplémentaires seront financés dès cette année ; des dispositions sont prises pour que les programmations soient mises en place très rapidement. Il s'agit de 50 000 logements du parc social HLM, des PALULOS, pour employer le sigle approprié, et de 50 000 logements du parc privé.
Je vais détailler brièvement la situation du parc privé afin que vous obteniez la réponse que vous souhaitiez sur la localisation des programmes en zones urbaines et rurales.
Grâce à un complément de crédits destinés aux primes à l'amélioration de l'habitat, les PAH, 35 000 logements pourront être réhabilités. Or vous savez, d'après les statistiques relatives à la consommation de ces crédits, qu'ils sont utilisés pour moitié en zone rurale et pour moitié en zone urbaine.
En ce qui concerne l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat qui, elle, s'intéresse aux seuls propriétaires bailleurs, c'est un programme de 15 000 logements supplémentaires qui est engagé. Par conséquent, 35 000 plus 15 000 logements, cela fait 50 000 logements, chiffre égal à celui des 50 000 PALULOS du secteur social. Alors que le parc urbain représente 85 % du total et le parc rural 15 %, un tiers des interventions de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat en termes de crédits sont destinées au milieu rural.
M. le président. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous demande de bien vouloir conclure.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je vais conclure rapidement, monsieur le président.
Pour ce qui concerne la mixité sociale, nous ferons le point à propos de l'application de la loi d'orientation pour la ville. Dans la mesure où cette loi devait jouer sur les flux et non pas sur les stocks, il faut bien analyser ses effets avant de proposer, éventuellement, des dispositions complémentaires.
Pour ce qui est des plafonds de ressources, M. Gayssot, au Congrès national de l'Union HLM, a clairement indiqué qu'il était ouvert à l'engagement d'une profonde concertation avec le mouvement HLM. Il s'agit évidemment d'un point essentiel puisqu'il faut concilier mixité sociale et accueil des plus démunis.
Je m'en tiendrai là pour respecter la discipline souhaitée par M. le président.
M. le président. Très bien !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Nous pourrons toujours prolonger ultérieurement notre discussion si vous le souhaitez, monsieur le sénateur. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et citoyens. - MM. du Luart et de Raincourt applaudissent également.)
M. le président. Je suis indulgent parce que c'est la dernière séance avant les vacances. A la rentrée, je serai plus sévère ! (Sourires.)

MÉTHODE DE GOUVERNEMENT

M. le président. La parole est à M. Blin, pour deux minutes et demie.
M. Maurice Blin. Je n'utiliserai pas ces deux minutes et demie, monsieur le président.
Depuis votre arrivée à l'hôtel Matignon, monsieur le Premier ministre, vous avez demandé expressément aux membres de votre gouvernement de « pratiquer le dialogue, la concertation et de respecter les droits du Parlement ».
En l'espace de quelques jours, dans trois domaines au moins, cette recommandation, au demeurant tout à fait opportune, semble avoir été oubliée.
Tout d'abord, le projet de loi de finances rectificative, un moment annoncé par M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, pourrait, dit-on, ne pas voir le jour.
Le Parlement en sera donc réduit à avaliser en fin d'année les annulations ou les ouvertures de crédits décidées sans débat par le Gouvernement.
Par ailleurs, Mme le ministre de l'environnement a annoncé, dès sa prise de fonction, l'abandon d'un nombre impressionnant de programmes de travaux qui avaient fait l'objet d'études et d'engagements de crédits importants,...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il fallait lire notre programme !
M. Maurice Blin. ... sans concertation préalable...
M. Serge Vinçon. Aucune !
M. Maurice Blin. ... ni, semble-t-il, avec ses collègues du Gouvernement, ni avec le Parlement, ni avec les responsables des collectivités locales intéressées.
Nous pensons tous à la liaison fluviale Rhin-Rhône, à Superphénix, à l'EPABERRE, l'établissement public d'aménagement de l'étang de Berre, au tracé du TGV-Est, à l'autoroute A 51 Grenoble-Sisteron.
Troisième point d'inquiétude et de surprise : le versement des allocations familiales sous conditions de ressources constitue l'exemple d'une décision prise sans que les partenaires sociaux intéressés aient été ni consultés ni même informés.
La remise en cause d'un élément aussi essentiel d'une politique familiale, vieille aujourd'hui de plus d'un demi-sicècle, et qui pourrait annoncer demain celle de la couverture des dépenses de santé méritait, nous semble-t-il, davantage d'explications.
Certes, monsieur le Premier ministre, gouverner c'est décider, c'est-à-dire trancher. Mais cela suppose préalablement une écoute particulièrement attentive du pays.
Pouvons-nous espérer, monsieur le Premier ministre, que cette leçon, votre leçon, sera mieux entendue à l'avenir des membres de votre Gouvernement ? (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Je vous remercie, monsieur Blin, vous tenez vos promesses.
M. Jean-Louis Carrère. Non, il avait dit qu'il n'utiliserait pas tout son temps de parole ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne sais pas si M. Blin a dit qu'il poserait sa question en moins de deux minutes et demie, mais, pour ma part, il me sera difficile de répondre dans ce laps de temps si les questions posées sont aussi larges - il est vrai qu'aujourd'hui c'est la première fois que le dialogue se noue.
M. le président. Ne répondez pas sur tous les points ! (Rires.)
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Très bien : avec votre autorisation, monsieur le président, je serai donc très lacunaire, et M. Blin me le pardonnera !
Un sénateur de l'Union centriste. Il n'y a qu'une question !
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Pour ne répondre que sur la méthode, je dirai que c'est celle de la concertation : concertation au sein du Gouvernement, concertation entre les membres du Gouvernement et le Parlement, concertation avec les acteurs de la vie économique et sociale et avec les citoyens.
Néanmoins, mesdames, messieurs les sénateurs, engager la concertation ne signifie pas que l'on ne doit pas respecter, notamment dans sa déclaration de politique générale, les engagements majeurs et les annonces claires qui ont été exprimés dans une campagne électorale. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Il n'est pas forcément recommandé de ne tenir aucune des promesses que l'on a faites et il est possible que, lorsqu'on se livre à cet exercice, on ait à subir quelques inconvénients ! (Sourires sur les mêmes travées.)
Il me paraît donc juste que des indications aussi claires que la volonté d'arrêter le surgénérateur Superphénix ou la réalisation du canal à grand gabarit Rhin-Rhône...
M. Emmanuel Hamel. Deux décisions catastrophiques !
M. Lionel Jospin, Premier ministre. ... puissent être confirmées dans une déclaration de politique générale.
Au demeurant, je le précise, en ce qui concerne les grands équipements, à ce stade, ce sont les deux seules annonces qui relèvent d'une décision gouvernementale. (Murmures sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Les ministres remplissent leur rôle en étudiant les dossiers, et le Gouvernement arrête ensuite des décisions. Je réponds donc à M. Blin et, ce faisant, j'informe le Sénat sur l'état d'avancement de ces dossiers.
En outre, compte tenu de la complexité de l'outil que représente Superphénix - un équipement qui, cela mérite d'être tout de même rappelé, n'aura fonctionné normalement que onze mois en douze ans et aura coûté 60 milliards de francs à la collectivité - les choses se feront progressivement et les concertations nécessaires seront conduites.
Pour ce qui concerne le canal Rhin-Rhône, il faut reconnaître honnêtement, monsieur le sénateur, que le débat a eu lieu. Je me suis moi-même rendu à plusieurs reprises dans la région. Au moins pour les élus, les représentants du mouvement associatif et les citoyens de cette partie de l'est de la France, la cause est entendue. C'est une décision que nous avions annoncée et nous la mettrons en oeuvre. Une grande partie de la population de cette région s'en trouvera soulagée. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Absolument !
M. Lionel Jospin, Premier ministre. J'en viens, monsieur le sénateur, à la partie de votre question qui avait trait au collectif budgétaire.
Bien sûr, il est utile de lire les journaux, mais je relève qu'il m'arrive de découvrir dans les gros titres des journaux - et, parfois, ceux-ci reprennent des « informations » parues dans un journal économique et financier étranger - l'annonce de décisions qui seraient, paraît-il, celles d'un Gouvernement que je dirige mais qui n'ont pas encore été prises ! (Sourires.)
Cela relève évidemment des rapports avec une presse libre et attentive, mais parfois inventive. Il ne faut donc pas prendre forcément pour argent comptant ce qui est imprimé.
Ainsi, il n'a pas été décidé par le Gouvernement de présenter un collectif budgétaire. Nous nous sommes posé la question mais, compte tenu des contraintes de temps que j'évoquais tous à l'heure, en raison de la dissolution et de la campagne électorale, ce collectif budgétaire n'aurait pu être prêt avant la seconde quinzaine de juillet. De tout façon, nous voulions attendre les résultats de l'évaluation des comptes publics, qui seront connus le 21 juillet. Si, donc, nous avions effectivement décidé de présenter au Parlement un collectif budgétaire, nous l'aurions obligé à sièger pendant la seconde quinzaine d'août.
M. Jean-Louis Carrère. Ils ont besoin de repos ! (Sourires.)
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Il nous est apparu que vous ne nous l'auriez pas pardonné, (Murmures sur les travées du RPR) et vous auriez eu raison !
Nous avons donc retenu une autre méthode. Quoi qu'il en soit, à l'automne, les droits du Parlement seront parfaitement respectés.
Je ne reviens que rapidement sur les allocations familiales. C'était un engagement clair, pris en 1995, lors d'une autre campagne que j'ai eu l'occasion de mener. Cela a été rappelé dans nos propositions, notamment celles de la formation politique à laquelle j'appartiens. J'ai moi-même évoqué cette mesure et Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité s'est exprimée à plusieurs reprises très clairement à ce sujet.
Une décision de principe est prise. Un certain nombre de parlementaires appartenant à votre champ politique (M. le Premier ministre désigne le centre et la droite de l'hémicycle) ont d'ailleurs approuvé cette mesure. Nous la croyons juste. Elle est comprise par l'opinion.
M. Emmanuel Hamel. Non ! (Si ! sur plusieurs travées socialistes.)
M. Lionel Jospin, Premier ministre. La concertation va s'ouvrir sur les modalités de sa mise en oeuvre. Celles-ci seront décidées et concertées, parfois concertées avant la décision, parfois concertées après la décision : c'est l'art du gouvernement ! (Exclamations sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Au niveau de responsabilité qui est le mien, je prends cette décision. Je m'efforcerai d'être moins maladroit ou peut-être même d'être plus adroit que mes prédécesseurs, si c'est possible ! (Vifs applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe communiste républicain et citoyen.)

CRÉATION D'UN TROISIÈME AÉROPORT PARISIEN

M. le président. La parole est à M. Grandon.
M. Jean Grandon. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Monsieur le ministre, au cours de la récente déclaration de politique générale du Gouvernement, M. le Premier ministre a annoncé qu'il engagerait une révision de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, mais aussi de la procédure des déclarations d'utilité publique.
Ces deux éléments concernent directement les différents projets d'équipement lourd définis par le précédent gouvernement, et notamment celui du troisième aéroport du grand bassin parisien.
Alors que le site de Beauvilliers, en Eure-et-Loir, a été retenu en juin 1996 pour l'implantation de cet aéroport, la déclaration de M. le Premier ministre laisse la population directement concernée par ce projet dans l'incertitude. Au demeurant, c'est l'ensemble des habitants des cantons environnants et du département qui doivent être mieux informés quant à l'avenir précis de ce projet.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, je vous demande de nous préciser vos intentions exactes à cet égard. Envisagez-vous de revenir sur la procédure en cours ? Dans l'hypothèse du maintien de ce projet, pouvez-vous nous indiquer quelles seront les différentes étapes à venir ? (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, comme vous l'avez indiqué, mes prédécesseurs avaient entamé le débat sur la réservation d'un site du grand bassin parisien en vue de la création d'un troisième aéroport.
Il faut tout d'abord rappeler la croissance continue sur longue période du trafic aérien, et pas seulement dans notre pays d'ailleurs, mais à l'échelle du monde. De ce fait, les aéroports d'Orly et de Roissy sont aujourd'hui saturés.
Bien entendu, il ne peut être question de jouer avec la sécurité. Nous devons par ailleurs veiller à ne pas laisser le développement du trafic profiter exclusivement aux aéroports d'Amsterdam ou de Francfort. Voilà pourquoi, sur le long terme, je ne refermerai pas le dossier du troisième aéroport.
M. Paul Masson. Très bien !
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. S'agissant du site qui a été envisagé, à Beauvilliers, chacun sait que des réactions pour ou contre se sont fait jour. Je souhaite donc poursuivre le dialogue et la concertation. J'ai demandé à M. le préfet d'Eure-et-Loir de faire en sorte d'éviter, durant cette période, toute décision qui pourrait être interprétée comme le signe d'une quelconque intention.
Je souligne enfin que le problème me paraît devoir être replacé dans une problématique générale d'aménagement du territoire. Je comprends fort bien ses implications en termes d'enjeux locaux, mais il faut aussi tenir compte des aspects de dynamique régionale, nationale, voire internationale qu'il comporte. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes et sur certaines travées du RDSE et du RPR.)

DROIT DU SOL

M. le président. La parole est à M. Bonnet.
M. Christian Bonnet. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
Monsieur le ministre, chacun vous sait très attaché à la préservation de l'identité nationale et j'ai quelque raison de penser que vous êtes étranger à une décision qui a sonné comme un encouragement à violer les lois de la République. (Murmures sur les travées socialistes.) C'est dire que mon propos se veut exclusif de toute polémique sur un sujet au demeurant trop grave pour être traité avec légèreté.
Alors que M. Tony Blair, dont M. le Premier ministre s'est abusivement réclamé jusqu'au 1er juin - il ne le fait plus depuis, et chacun le comprend (Rires sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.) - ...
M. Claude Estier. C'est Madelin qui s'en réclamait !
M. Christian Bonnet. ... assigne pour mission à son gouvernement de lutter sans merci contre l'immigration irrégulière, le Gouvernement décide de régulariser la situation d'étrangers que l'on n'ose qualifier de clandestins depuis que leurs représentants ont tenu une conférence de presse sur le perron de l'hôtel de Matignon : on croit rêver !
A quand celle de « Nique Ta Police », sur le perron de l'hôtel de Beauvau ?
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous excluez vraiment toute polémique !
M. Christian Bonnet. Mon ami M. Paul Masson ayant évoqué les modalités d'application de cette décision, je souhaite vous poser une question relative au droit du sol, droit du sol dont on notera au passage qu'il n'est paradoxalement appliqué dans aucun des principaux pays d'émigration, très attachés, eux, au droit du sang.
Evoquant le droit du sol, M. le Premier ministre a dit, jeudi dernier : « Nous le rétablirons. » Le terme est impropre au demeurant dès lors que la législation actuelle l'a seulement soumis à une manifestation de volonté.
M. Paul Masson. Très bien !
M. Christian Bonnet. Cette manifestation de volonté vous l'avez, hier - si j'en crois un grand journal du soir - jugée « inutile ».
Est-ce à dire qu'allant plus loin vous estimez, monsieur le ministre, comme Me Henri Leclerc, président de la Ligue des droits de l'homme, que le fait de devoir marquer son désir de devenir français soit « vexatoire » ?
Et le Gouvernement a-t-il du droit du sol une conception restrictive ou extensive ? En d'autres termes, la seule condition pour devenir français risque-t-elle d'être, demain, le fait d'être né sur notre territoire, ce qui aurait de surcroît pour conséquence d'y stabiliser, ipso jure , leurs parents ? (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi que sur quelques travées de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, vous abordez des sujets importants, et je veux vous répondre sans aucun esprit de polémique.
La France est l'un des pays les plus restrictifs d'Europe pour ce qui est de l'accueil des étrangers, à l'exception de la Grande-Bretagne ; il suffit de consulter les statistiques pour le constater.
Les mesures qui seront prises par les préfets sur mes instructions se placeront tout à fait dans le cadre des deux avis donnés par le Conseil d'Etat en 1996, avis qui autorisent le Gouvernement, par mesure gracieuse, à reconnaître le droit au séjour à certaines catégories d'étrangers qui satisfont à des critères précis.
Ainsi que je l'ai dit tout à l'heure en réponse à la question de M. Masson, ce que feront les préfets, ils le feront sous mon autorité.
Le droit du sol n'est pas, contrairement à ce que vous affirmez, monsieur le sénateur, l'apanage de la France. Je considère même que le fait de faire remplir un formulaire entre seize et vingt et un ans, ce qui résulte de la loi Méhaignerie de 1994, ne modifie d'ailleurs pas fondamentalement cette conception du droit du sol. Simplement, cette disposition crée un vide juridique, vous le sentez bien, concernant les parents d'enfants nés en France et qui sont tous appelés à devenir français, car ils remplissent tous un petit formulaire.
Ce que j'ai déclaré hier au journal Le Monde, c'est que le fait de remplir ce formulaire ne suffit pas à manifester la volonté de devenir français. Pour être français, il faut, en effet, avoir la volonté de l'être. Aujourd'hui, cette volonté est-elle claire dans tous les esprits ? Et je ne parle pas seulement des jeunes nés de l'immigration. Avons-nous encore envie d'être français ? Mais pour évoquer plus spécialement les jeunes nés de l'immigration, s'est-on suffisamment adressé à eux en tant que citoyens ? A-t-on assez parlé aux citoyens qu'ils sont ou qu'ils doivent devenir ?
Pour être allé dans de nombreuses villes de province et m'être entretenu souvent avec eux, je constate que leur horizon a été trop souvent limité à leur quartier. Ils connaissent le maire comme autorité responsable, mais on ne leur a jamais parlé de la société dans laquelle ils vivaient, de la République, de la manière dont ils pouvaient réellement s'intégrer en tant que citoyens.
L'objectif principal du Gouvernement sera l'intégration républicaine de ces jeunes, dont beaucoup sont d'ailleurs français, bien que nés de la dernière vague de l'immigration. Je crois très franchement que cette intégration relève davantage de l'éducation civique, d'une démocratie active, d'un militantisme associatif, syndical, politique, et des mariages mixtes. Je rappelle que ces derniers concernent 25 % de ces jeunes de la deuxième génération, ainsi qu'Emmanuel Todd l'a montré, et cela signifie que, malgré quelques ratés, en France, la machine à intégrer fonctionne toujours.
Alors, monsieur le sénateur, il faut avoir confiance dans la République. Il faut avoir confiance dans la France et il faut que, nous-mêmes, nous soyons des républicains convaincus de la modernité du modèle qui est le nôtre, un modèle qui vaut beaucoup mieux que le droit de la filiation qui existe effectivement, à ma connaissance, en Allemagne et dans quelques pays hors d'Europe. Mais, en Europe, et même en Grande-Bretagne, excusez-moi de le dire, c'est le droit du sol qui prévaut.
M. Christian Bonnet. Sous certaines conditions !
M. le président. Je vous en prie, mon cher collègue, pas de dialogue !
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Sous certaines conditions, certes. Il y en a toujours eu. Il ne suffit pas de naître dans un pays. Avant même la loi Méhaignerie, il fallait un délai de cinq ans. Pour moi, ce délai est tout à fait normal. On évitera des paperasseries inutiles puisqu'il faut simplement remplir un formulaire, lequel donne droit à l'obtention d'une carte d'identité et à l'attribution du RMI lorsque l'intéressé a vingt-cinq ans révolus.
Mais devenir français, ce n'est pas cela. Il s'agit d'un processus beaucoup plus conscient que nous devons élaborer et encourager, parce que notre pays mérite de continuer à vivre. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)

ARRÊT DU SURGÉNÉRATEUR SUPERPHÉNIX

M. le président. La parole est à M. Descours.
M. Charles Descours. Je commencerai mon propos en protestant contre la manière dont s'est déroulée cette séance. En effet, nous n'avons pas pu poser nos questions pendant l'heure qui nous était impartie et, désormais, la télévision n'assure plus la retransmission de nos débats.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il vous reste le Journal officiel !
M. Charles Descours. J'avais tout d'abord pensé restreindre ma question mais, finalement, je la poserai entièrement.
Monsieur le Premier ministre, dans votre discours de politique générale, vous avez annoncé votre décision de fermer la centrale de Superphénix.
Cette décision entraîne la perte de 3 000 emplois et la ruine d'une région. Comment peut-on s'élever contre la fermeture de l'usine de Vilvorde et décider d'un trait de plume une telle suppression ?
Monsieur le Premier ministre, dans le même discours de politique générale, vous avez déclaré : « Notre attitude à l'égard des Françaises et des Français doit être celle du dialogue continu, de l'attention scrupuleuse, de la disponibilité constante ».
Vous avez poursuivi un peu plus loin : « La décision doit être préparée avec les personnes qu'elle concerne ; cet impératif est particulièrement net s'agissant des implantations de grands équipements aux retombées économiques. »
Ces nobles pensées, monsieur le Premier ministre, vous semblent-elles avoir été respectées dans la décision de fermer Superphénix ?
Le secrétaire d'Etat à l'industrie a déclaré hier à l'Assemblée nationale, en réponse à une question similaire, que le Gouvernement souhaitait préserver les impératifs d'aménagement du territoire et de maintien de l'emploi.
Pouvez-vous nous dire, monsieur le Premier ministre, quelles dispositions concrètes le Gouvernement compte prendre pour atteindre cet objectif dans une région qui, depuis vingt ans, n'a pas d'autres ressources importantes ?
Comment comptez-vous concilier cette décision de fermeture avec les dispositions de la loi du 30 décembre 1991 sur les déchets nucléaires, à la suite de laquelle le surgénérateur devait être transformé en sous-générateur, décision approuvée par M. Strauss-Kahn, alors ministre de l'industrie ?
Ne pensez-vous pas que les quelque 40 milliards de francs nécessaires à l'arrêt de Superphénix - 20 milliards de francs pour dédommager nos partenaires européens, 6 milliards de francs si on ne produit pas de l'énergie avec les produits fissiles actuellement stockés dans la centrale, auxquels s'ajoutent 12 milliards de francs au moins pour l'arrêt et le démantèlement de cette centrale - sont un énorme gaspillage, alors que nous sommes dans ce domaine les meilleurs du monde et que, au Japon, pays pourtant très antinucléaire, la relance de la filière est toujours en discussion ?
Enfin - et ce point est encore plus important - le secrétaire d'Etat à l'industrie a déclaré hier : «L'engagement de notre pays en faveur de l'électricité nucléaire, qui assure l'indépendance nationale, est irrévocable. »
Pouvez-vous confirmer ces propos, monsieur le Premier ministre, et nous dire quelles mesures vous comptez prendre dans les prochains mois pour préparer les échéances de 2010, date à laquelle les centrales nucléaires actuelles seront en fin de vie ? Etes-vous prêt à engager un débat sur la politique énergétique de notre pays devant le Parlement ?
Je vous remercie, monsieur le Premier ministre, de nous donner des réponses aussi précises que possible. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur certaines travées du groupe communiste républicain et citoyen.) M. Josselin de Rohan. Enfin, la coupable est là ! (Sourires.)
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le sénateur, je vous remercie de l'occasion que vous me donnez de m'exprimer pour la première fois devant des parlementaires, ici même au Sénat.
La décision d'arrêter le surgénérateur Superphénix, que le Premier ministre a annoncée dans sa déclaration de politique générale et qu'il a rappelée ici même, n'est pas une surprise. Elle a été largement débattue et argumentée au cours de la campagne électorale. Et pourtant, il ne s'agit ni d'une décision idéologique ni d'une décision électoraliste.
M. Charles Descours. Je n'ai pas dit ça ; ce n'est pas ma question !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Elle découle d'un constat largement partagé : la filière des réacteurs à neutrons rapides n'a pas justifié à ce jour les espoirs placés en elle, qu'il s'agisse de produire de l'électricité ou d'éliminer du plutonium.
Comme vous l'avez souligné, il s'agit d'une décision grave, qui pose de nombreux problèmes sérieux. Mais ceux-ci ne sont pas forcément plus graves ou plus sérieux que ceux que présenterait la poursuite de l'exploitation du surgénérateur.
M. Charles Descours. Allez le dire aux salariés !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Il s'agit de problèmes juridiques et financiers que nous sommes en train d'examiner. Comme vous l'avez noté, nous devons négocier avec nos partenaires étrangers sur ce point. Il s'agit également de problèmes d'emplois et d'aménagement du territoire car sont concernés quelque 700 salariés d'EDF,...
M. Charles Descours. Salariés directs !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. ... de très nombreux intérimaires et sous-traitants. Par ailleurs, il ne faut pas oublier les emplois induits par l'activité de Superphénix.
Comme le Gouvernement l'a déjà affirmé à plusieurs reprises, l'emploi est l'une de ses priorités sinon sa priorité. C'est pourquoi nous serons extrêmement attentifs et très actifs dans la mise en oeuvre d'une concertation étroite avec l'ensemble des acteurs locaux pour songer à la reconversion industrielle du site et au devenir des cantons qui vivent, comme vous l'avez indiqué, pour l'essentiel de cette activité.
Cela dit, il n'y a pas de risque à court terme pour l'emploi car l'arrêt et le démantèlement de la centrale nécessiteront de longs mois voire de longues années de réflexion, de recherche et de travail. Nous serons d'autant plus attentifs à cette question que cette opération, qui est très lourde du point de vue technique et qui soulèvera des problèmes inédits, nous permettra de mettre en oeuvre des solutions adaptées au problème du démantèlement de la première génération des centrales nucléaires qui sera posé à partir de 2010.
J'en viens maintenant - ce sera ma conclusion - à la mise en oeuvre de la loi du 30 décembre 1991, qui prévoyait trois pistes prioritaires de recherche : la séparation-transmutation - il s'agit de celle qui était explorée dans Superphénix - le stockage dans les couches géologiques profondes et l'entreposage de longue durée en surface.
Il est évident que, désormais, nous devons faire porter notre effort de recherche sur les deux pistes qui demeurent crédibles à cette heure.
Enfin, comme vous l'avez noté, le Gouvernement n'a pas remis en cause les choix énergétiques effectués par le passé. Simplement, il est de ma responsabilité, en tant que ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, de permettre à notre pays, par des choix en matière de recherche, de se doter des moyens de réfléchir de façon plus ouverte à son avenir énergétique, notamment en ce qui concerne les économies d'énergie, les énergies renouvelables et la diversification énergétique. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)

CANTINES SCOLAIRES ET FERMETURE DE CLASSES

M. le président. La parole est à M. Raoult.
M. Paul Raoult. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie et porte sur deux dossiers qui nous préoccupent vivement à deux mois de la prochaine rentrée.
Le premier point concerne les cantines scolaires.
Il n'est pas tolérable qu'en France, aujourd'hui, des enfants ne puissent pas avoir accès à la cantine ou puissent même en être exclus à cause des difficultés de paiement de leurs parents.
La fréquentation des cantines scolaires connaît une baisse inquiétante depuis la réforme des bourses des collèges, intervenue le 1er septembre 1994. L'attribution directe en un seul versement d'une aide à la scolarité aux familles ne permet pas de couvrir régulièrement les frais de demi-pension.
Nous avons dénoncé à de nombreuses reprises cette mesure prise par la précédente majorité et ses conséquences préjudiciables pour les élèves issus de milieux défavorisés.
J'ai noté, monsieur le ministre, l'engagement que vous avez pris, ces derniers jours, de vouloir tout mettre en oeuvre « pour que tous les enfants puissent manger à leur faim à partir de la rentrée prochaine ».
Ni le fonds social collégien, mesure trop ponctuelle, ni les accords locaux entre les caisses d'allocations familiales et les chefs d'établissement ne peuvent, à notre avis, remédier à cette situation.
Il est temps, monsieur le ministre, dans l'intérêt de nos enfants, de revenir au système antérieur de versement trimestriel des bourses directement aux collèges. Ce système permet ainsi aux agents comptables de prélever directement les frais de demi-pension sur le montant de la bourse. Cette mesure est la seule susceptible de pallier le problème de solvabilité des familles et de répondre durablement au constat actuel de désaffection des restaurants scolaires.
Je terminerai mon intervention en évoquant la question des fermetures définitives de classes prévues à la rentrée prochaine.
Le Gouvernement s'est engagé à réexaminer cet été les décisions contestables prises par la précédente majorité. Les baisses de crédits de l'éducation nationale, que nous avons dénoncées alors, ont conduit à programmer des fermetures définitives en milieu urbain, mais aussi et surtout en milieu rural, au regard de la seule notion d'effectifs. L'émotion est grande, monsieur le ministre, parmi la population, les parents d'élèves, les enseignants et les élus locaux soucieux de maintenir leur classe.
Nous demandons que tout projet de fermeture de classe soit, d'abord, d'ordre administratif, c'est-à-dire suspensif, afin de permettre à la rentrée prochaine un comptage précis des effectifs et d'en tirer alors les conséquences dans l'intérêt de nos enfants.
Monsieur le ministre, quels engagements précis pouvez-vous prendre dans ce domaine, compte tenu de vos dernières déclarations fixant les priorités gouvernementales en matière d'enseignement, à savoir la réussite scolaire, la lutte contre les exclusions et l'amélioration des conditions de vie dans les établissements ? (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Philippe François. Il faut dégraisser le mammouth !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Monsieur le sénateur, vous avez évoqué un problème qui nous est très cher, celui des cantines scolaires.
Nous avons pris l'engagement que tous les enfants de notre pays puissent manger à leur faim dans les cantines scolaires. Cet engagement est, pour nous, très grave, très significatif et très important, d'autant plus, et vous l'avez souligné, qu'une réforme malencontreuse a été engagée voilà deux ans.
En outre, à cette situation s'est ajoutée une différence de traitement selon les régions et les départements. Dans certaines régions et dans certains départements, plus riches que d'autres, on a réussi à pallier ce déficit. Autrement dit, dans certains endroits, les enfants issus des familles les plus pauvres peuvent manger mais, dans d'autres, ils ne le peuvent pas.
Je vous donne l'assurance que nous avons d'ores et déjà pris un certain nombre de mesures pour qu'aucun des enfants de notre pays ne soit privé de repas le midi à cause du manque de ressource de ses parents.
Par ailleurs, vous avez évoqué, monsieur le sénateur, les suppressions de classes. En ce domaine, l'éducation nationale a fait face, depuis trente ans, au problème terrible de la croissance des effectifs, et elle l'a fait victorieusement parce qu'elle a amélioré les conditions d'accueil.
Cependant, il est vrai que des réflexes quantitatifs se sont emparés d'un certain nombre de responsables et que la règle de trois est devenue la règle pour gérer les effectifs. Or, nous assistons actuellement à une stabilisation, voire à une décroissance des effectifs, et la grande différence d'approche de ce Gouvernement par rapport au précédent consiste d'abord à faire le pari d'utiliser cette décroissance pour réussir celui de la qualité pour tous.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Très bien !
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Bien sûr, la qualité de gestion ne sera pas oubliée. Mais la fermeture d'une classe dans un village revient parfois à condamner une vallée ; la fermeture d'une classe dans un quartier difficile va accroître la délinquance.
Par conséquent, nous voulons que chaque cas soit examiné et nous comptons sur la représentation nationale, c'est-à-dire sur les députés et les sénateurs, pour nous y aider dans la rigueur de la gestion, mais aussi dans la justice, la dignité et l'honneur de la République. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)

POLITIQUE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

M. le président. La parole est à M. Lambert.
M. Alain Lambert. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, j'ai l'honneur d'appartenir au groupe de l'Union centriste, qui est très attaché à la construction européenne ainsi qu'à la mise en place de la monnaie unique, et ce aux échéances prévues.
Le discours de politique générale que vous avez prononcé jeudi dernier réaffirme cet objectif, ce dont nous réjouissons.
Des décisions importantes et urgentes doivent être prises pour réussir ce passage à l'euro. Or, certaines d'entre elles semblent différées jusqu'à la publication des résultats de l'audit, lesquels ne seront connus que le 21 juillet prochain.
Cependant, monsieur le Premier ministre, nous disposons déjà du rapport préliminaire de la Cour des comptes sur l'exécution du budget de 1996 et des situations mensuelles établies par les services du ministère de l'économie et des finances.
Ces documents nous livrent déjà des informations qui pourraient vous permettre de nous éclairer, avant la clôture de notre session, sur deux points.
Le premier concerne - et je n'avais pas lu Le Monde avant de rédiger ma question - le calendrier de mise sur le marché des actions de France Télécom,...
M. Philippe Marini. Nécessité fait loi !
M. Alain Lambert. ... calendrier qui est nécessaire pour assurer le développement de l'entreprise et faire face aux besoins de financement de l'Etat en vue de la recapitalisation de certaines entreprises publiques : 25 milliards de francs avait été, à ce titre, inscrits au budget pour 1997.
Sur ce point, monsieur le Premier ministre, si vous avez l'intention de mettre sur le marché des actions de France Télécom, dites-le, faites-le, c'est l'intérêt de l'entreprise et de la France.
Ensuite - c'est le second point - je souhaiterais connaître les solutions que vous envisagez de retenir pour procéder aux ajustements rendus nécessaires par les glissements intervenus au cours du premier semestre de 1997 et par ceux qui se produiraient au second semestre si nous ne procédions pas, précisément, à ces ajustements, et pour financer les dépenses nouvelles - elles ont été estimées à 10 milliards de francs - annoncées jeudi dernier.
En conclusion, quels que soient les résultats de l'audit, pouvez-vous dès aujourd'hui nous dire si vous avez choisi le cap des 3 % ou si, dès à présent, vous vous situez plutôt en tendance ?
Par ailleurs, quel calendrier pensez-vous pouvoir respecter pour réduire les 75 milliards de francs de déficit primaire, c'est-à-dire de déficit hors dette, afin de stabiliser précisément notre dette et d'éviter de faire supporter aux générations futures les dépenses que nous n'avons pas pu maîtriser ? (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le rapporteur général, je suis heureux d'entendre ce satisfecit donné au Gouvernement quant à ses intentions européennes. En effet, M. le Premier ministre, dans sa déclaration de politique générale, a rappelé que l'objectif du Gouvernement était de mettre la France en situation de construire avec ses partenaires la monnaie unique à la date prévue.
M. James Bordas. Très bien !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Pour autant, notre situation n'est pas facile, vous le savez. Aussi ai-je été surpris de vous entendre évoquer les situations hebdomadaires du Trésor. En effet, si celles-ci étaient susceptibles de donner régulièrement la mesure exacte de notre situation budgétaire, on ne pourrait que s'étonner de ce que, au cours des mois de février, mars et avril, pour ne pas parler de la campagne électorale, la majorité sortante n'ait pas cru devoir, devant les Français, donner la situation que, selon vous, elle devait connaître.
En réalité, ces documents sont loin d'être parfaits et c'est à bon droit que M. le Premier ministre a souhaité qu'une évaluation des finances publiques soit conduite très rapidement - il ne s'agit pas de traîner - par deux personnalités tout à fait incontestables de la Cour des comptes qui, le 21 juillet, nous rendront une estimation. Ce ne sera qu'une estimation, car dire aujourd'hui ce que sera le déficit à la fin de l'année, toutes choses étant égales par ailleurs, est évidemment aléatoire. Cela dépend d'hypothèses sur la croissance, vous le savez mieux que quiconque. Mais cela donnera tout de même une estimation de la situation.
Comme M. le Premier ministre l'a rappelé lors de sa déclaration de politique générale, la situation est sans doute sérieuse - chacun le pense - aussi bien du côté des dépenses de l'Etat que du côté des dépenses sociales où, là aussi, en dépit des troubles qui ont pu occasionner la mise en place d'un plan de stabilisation, nous voyons que le plan conduit plutôt à un déficit maintenu qu'à autre chose.
Comment ferons-nous ?
D'abord, vous avez posé une question très précise concernant les mesures qui ont d'ores et déjà été annoncées : leur financement.
Vous les avez estimées à une dizaine de milliards de francs. C'est ce que dit la presse. Si cette estimation vous suffit, très bien. Si vous en préférez une plus précise, j'aurai l'honneur d'être devant votre commission des finances dans quelques jours et je vous la fournirai.
Mais restons sur ces chiffres pour l'instant. Ils seront, puisque, comme vient de le rappeler M. Lionel Jospin, aucun collectif budgétaire n'a été décidé pour le mois de juillet, financés par des décrets d'avance. Il s'agit de procédures très classiques qui, comme vous le savez, s'équilibrent. Par conséquent, la dizaine de milliards de francs, ou la quinzaine de milliards de francs - peu importe, nous reverrons ces chiffres la semaine prochaine - aura pour contrepartie une dizaine ou une quinzaine de milliards de francs de dépenses qui ne seront pas engagées et qui seront réaffectées. C'est là un redéploiement qui me paraît nécessaire.
Avec ces dépenses nouvelles, il n'y aura donc en aucune manière aggravation du déficit public, quel que soit celui que révélera l'évaluation en juillet.
Restera l'appréciation à porter sur le niveau du déficit mis en évidence par cette évaluation, les conséquences éventuelles à en tirer pour nous mettre en situation de respecter les engagements européens qui ont été rappelés.
N'ayez aucun doute, monsieur le rapporteur général : si nous souhaitons tous ensemble que la France puisse participer à ce grand mouvement, à ce projet d'une génération qui est celui de continuer à construire l'Europe, nous souhaitons tout autant que le programme du Gouvernement soit mis en oeuvre. Le travail que le Gouvernement aura à faire - et les conseils qui viendront de la Haute Assemblée seront, de ce point de vue, les bienvenus - sera tout à la fois de mettre en oeuvre son programme et de réaliser une partie spécifique de ce programme, qui est d'être capable d'entrer dans la monnaie unique.
M. Philippe Marini. Il faudra choisir !
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Il faudra choisir, dites-vous. Je n'ai malheureusement pas le temps d'en discuter longuement avec vous. Cependant, ce tout ou rien dans lequel vous vous êtes complu dans le passé, et qui a conduit plutôt à rien qu'à tout, n'est pas la politique que nous entendons suivre. Nous aurons, je le pense, de nombreuses heures pour vous le montrer. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.) M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue
(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Jean Delaneau.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

4

MISSIONS D'INFORMATION

M. le président. L'ordre du jour appelle l'examen des demandes d'autorisation de missions d'information suivantes :
1° Demande présentée par la commission des affaires économiques, tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de désigner une mission d'information en Asie centrale pour étudier la situation économique et politique de cette région ainsi que ses relations économiques, commerciales et financières avec la France ;
2° Demande présentée par la commission des affaires sociales, tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de désigner une mission d'information au Danemark afin d'étudier l'organisation des systèmes de soins et l'évolution des dépenses de santé dans ce pays.
Il a été donné connaissance au Sénat de ces demandes au cours de sa séance du jeudi 19 juin 1997.
Je vais consulter sur ces demandes.
Il n'y a pas d'opposition ?...
M. Emmanuel Hamel. Il y a approbation !
M. le président. En conséquence, les deux commissions permanentes intéressées sont autorisées, en application de l'article 21 du règlement, à désigner ces missions d'information.

5

POLITIQUE SOCIALE
DE L'UNION EUROPÉENNE

Discussion d'une question orale avec débat
portant sur un sujet européen

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la question orale avec débat portant sur un sujet européen n° QE-1 de M. Jacques Genton à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes sur la politique sociale de l'Union européenne :
« Constatant que, en France comme chez nos partenaires au sein de l'Union européenne, les citoyens montrent de plus en plus nettement leur souhait que l'Europe place davantage l'aspect social et humain au coeur de ses préoccupations et qu'elle mette l'emploi au rang de ses priorités, M. Jacques Genton demande à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes d'exposer au Sénat quelles doivent être, selon le Gouvernement, les politiques que l'Union européenne doit mener en ce sens, les réformes qu'elle doit mettre en oeuvre, les moyens auxquels elle doit recourir. »
Je rappelle au Sénat que, dans un tel débat, ont droit à la parole, outre l'auteur de la question et le Gouvernement, un représentant de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, un représentant de la commission permanente compétente et un représentant de chaque groupe et, sous réserve de l'accord de la conférence des présidents, un représentant de la commission des affaires étrangères.
Chaque orateur dispose d'un temps de parole de dix minutes et il n'y a pas de droit de réponse au Gouvernement.
La parole est accordée au Gouvernement quand il la demande, sans limitation de durée.
La parole est à M. Genton, auteur de la question.
M. Jacques Genton, auteur de la question et représentant de la délégation du Sénat pour l'Union européenne. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le vaste chantier de la conférence intergouvernementale ouvert à Turin le 29 mars 1996 vient de se conclure, comme il était prévu, par le Conseil d'Amsterdam du 18 juin dernier.
La construction européenne tient donc ses délais et franchit les étapes, non sans mal, mais, malgré les apparences, en continuant d'avancer sur la voie qu'elle s'est fixée. C'est une première constatation que je fais avec satisfaction.
Nous pourrions joindre nos voix à ceux, de tous bords, qui ont estimé, à juste titre, que les résultats obtenus par cette longue négociation restaient insuffisants et bien inférieurs, en tout état de cause, aux espoirs qu'elle portait.
C'est vrai, les réformes institutionnelles en sortent à peine amorcées et sont, pour l'essentiel, reportées à une étape prochaine.
C'est vrai, je déplore que les propositions françaises, constructives et réalistes, visant à améliorer l'efficacité des institutions de l'Union européenne n'aient pas su retenir l'attention de nos partenaires. Nous en avions été régulièrement informés par votre prédécesseur, monsieur le ministre, et nous les avions presque toutes approuvées à l'unanimité des membres de la délégation.
C'est vrai, l'extension nécessaire du vote à la majorité confine au symbolique.
Mais, pour ma part, et avec le recul et l'expérience que je crois avoir, modestement, de l'histoire de la Communauté, je veux voir dans l'accord d'Amsterdam non pas un constat d'échec, mais une pierre de plus dans la consolidation progressive de l'unité européenne : la monnaie unique n'est pas remise en cause, l'adhésion de certains pays d'Europe centrale et orientale demeure un objectif accessible ; la possibilité de coopération renforcée est un acquis essentiel pour qu'aucun Etat membre ne puisse désormais, à lui seul, bloquer l'évolution d'un processus d'intégration, encore que le dispositif adopté dans le nouveau traité laisse des possibilités de paralysie à un Etat voulant vraiment s'opposer.
Il est, de surcroît, un aspect sur lequel les choses ont avancé un peu plus qu'on ne l'imaginait : celui de la prise en compte du facteur humain et social dans la construction de l'Europe que nous voulons pour demain.
Comme je le disais déjà à cette même tribune, en avril dernier, « nous avons depuis longtemps conscience d'un décalage qui s'amplifie entre les attentes des citoyens vis-à-vis de l'Union et les résultats tangibles dont ils constatent l'effet dans leur vie quotidienne. »
Au premier rang de leurs préoccupations, comme des nôtres, se trouve, à l'évidence, le problème du chômage.
Selon les dernières prévisions semestrielles de l'OCDE, la croissance économique devrait atteindre, en 1997, 3 %, en moyenne, soit le niveau le plus élevé depuis dix ans dans le monde industrialisé.
Mais ces mêmes prévisions nous confirment malheureusement que le chômage restera important en Europe. En 1996, 11,3 % de la population active de l'Union était privée d'emploi ; ce pourcentage resterait du même ordre en 1997, soit 11,2 %.
Comment imaginer, mes chers collègues, que les questions sociales ne soient pas au coeur des défis de la construction européenne ? Qui peut soutenir que l'Europe puisse solidement se construire sur fond de chômage et d'exclusion ?
Mme Danielle Bidard-Reydet et M. Maurice Schumann. Très bien !
M. Jacques Genton, représentant de la délégation du Sénat pour l'Union européenne. Contrairement à ce que l'on entend ici ou là, ce souci de l'humain, cette préoccupation de solidarité ne sont pas une découverte récente : un tel esprit animait déjà en 1957 - je peux en témoigner - les auteurs du traité de Rome, ceux que l'on appelle « les pères fondateurs de la Communauté », même si cet aspect s'est un peu perdu par la suite, face aux nombreuses difficultés et aux nombreux avatars auxquelles la construction européenne s'est trouvée confrontée.
La « solution » retenue in extremis, pourrait-on dire, que nous propose l'accord d'Amsterdam tient, d'une part, à l'adoption d'une résolution sur la croissance et l'emploi et, d'autre part, à l'insertion d'un nouveau titre sur l'emploi dans le traité.
Faut-il voir un certain « rééquilibrage entre l'économique et le monétaire » dans l'adoption d'une résolution sur la croissance et l'emploi comme symétrique à celle qui est relative à la mise en oeuvre du pacte de stabilité et de croissance ? C'est, en tout cas, l'opinion défendue par M. le Premier ministre devant l'Assemblée nationale voilà quelques jours. Pour reprendre ces propres mots, il a considéré que c'était bien « une autre exigence économique d'égale importance, une exigence fondée sur une perspective de croissance et d'emploi et sur la nécessité d'opérer des concertations entre les gouvernements de l'Europe pour accompagner les processus monétaires ».
Comment ne pas adhérer à une telle exigence de croissance et d'emploi ?
Toutefois, je ne suis pas certain que cette analyse soit tout à fait semblable à celle qui figure dans les conclusions de la présidence du Conseil européen, suivant lesquelles « des politiques macroéconomiques et budgétaires saines vont de pair avec une croissance forte et durable en termes de production et d'emploi ». J'y vois, pour ma part, non pas deux démarches parallèles, mais simplement l'expression d'un effet automatique d'entraînement de l'une sur l'autre.
Quels sont, d'ailleurs, les objectifs retenus à Amsterdam ? Nous n'y trouvons rien de bien novateur.
On y mentionne notamment des actions de formation et de qualification de la main-d'oeuvre, l'adaptation des marchés du travail aux évolutions de l'économie, la modernisation des régimes de protection sociale, l'amélioration de la compétitivité européenne, notamment par l'innovation technologique et la réduction des coûts non salariaux, et la coordination des politiques nationales, puisque la responsabilité de la lutte contre le chômage incombe avant tout aux Etats membres.
Formation, compétitivité, baisse du coût du travail... : n'y a-t-il pas là quelque contradiction entre ces méthodes d'action très classiques et les déclarations du Gouvernement ? Ne se borne-t-on pas à une simple déclaration d'intention ? Quel type de coordination des politiques nationales peut-on imaginer ?
C'est pourquoi nous aimerions apprendre, monsieur le ministre, comment vous comptez utiliser ces « espaces nouveaux, ouverts dans l'ordre économique et social », pour reprendre les mots du Premier ministre ? Nous le savons, les politiques sociales requièrent des moyens budgétaires souvent importants. Quelle foi peut-on avoir dans la résolution sur la croissance et l'emploi alors que, dans le même temps, il a été très clairement affirmé qu'aucun moyen financier supplémentaire ne serait disponible pour cet objectif ?
L'examen du projet de budget de l'Union pour 1998, que nous avons pu faire voilà deux jours sur rapport de notre collègue M. Badré, nous permet de mettre en doute cette appréciation.
Peut-on croire, avec quelque chance d'aboutir, que les politiques économiques de l'Union seront désormais orientées vers des objectifs sociaux, notamment vers l'emploi ?
Plus précisément encore, va-t-on désormais, avant d'arrêter toute politique européenne, apprécier son impact positif sur la cohésion sociale ?
C'est en tout cas ce que semble préciser l'article 3 du nouveau titre sur l'emploi intégré au traité par le sommet d'Amsterdam, qui prévoit que « l'objectif consistant à atteindre un niveau d'emploi élevé est pris en compte dans la définition et la mise en oeuvre des politiques communautaires ».
Si cette interprétation est bonne, une telle disposition ne peut que rencontrer notre entier assentiment. C'est précisément l'idée que je défendais ici même en avril dernier. Je souhaite toujours que les institutions de l'Union apprécient toutes les conséquences sur l'emploi lorsqu'elles prennent leurs décisions, notamment en application des politiques commerciales ou de concurrence.
J'avais déjà donné mon sentiment sur l'évolution de la production automobile européenne et sur le lien que l'on ne peut manquer d'établir entre les fermetures d'usines dans l'Union et la pénétration des entreprises étrangères, notamment asiatiques, sur notre marché, non plus « ouvert » mais « offert » à la concurrence, pour reprendre la formule de notre éminent collègue M. Maurice Schumann.
J'avais également souligné que, lorsque la Commission européenne s'était opposée au rachat de la société canadienne De Havilland par l'Aérospatiale, au nom d'une stricte orthodoxie des règles de concurrence, elle avait fait preuve d'une bien courte vue sur l'essor à venir du secteur de l'aéronautique européenne.
Plus encore, que doit-on penser des positions de la Commission en faveur du quasi-démantèlement du dispositif de protection anti- dumping, déjà bien modeste, qui me semble être le dernier rempart de l'industrie européenne face à des concurrents bien mieux armés ? Que peut faire, que va faire le Gouvernement français pour infléchir ces tendances à mon avis suicidaires ? Qu'on ne nous dise pas qu'une telle protestation de notre part est contraire à la poursuite de la construction de l'Union européenne.
Je serais également heureux d'avoir votre sentiment, monsieur le ministre, sur une voie de réflexion trop partiellement explorée : celle de la relance des grands travaux. Proposée par la commission, alors présidée par Jacques Delors, dans son Livre blanc pour la croissance, la compétitivité et l'emploi, et supposée permettre la création de pas moins de 15 millions d'emplois d'ici à l'an 2000, cette suggestion est au point mort et bute depuis lors sur des questions de financement.
Doit-on voir dans la récente annulation du projet de Canal Rhin-Rhône le signe de l'abandon définitif de cet ambitieux projet ?
Je voudrais aussi savoir, monsieur le ministre, comment le Gouvernement français compte aborder le sommet exceptionnel sur l'emploi réclamé par le Premier ministre, puisque, à l'évidence, cette initiative n'aura d'intérêt que si l'on y envisage des développements concrets.
Dans une perspective plus vaste, il faut également garder à l'esprit le fait que les questions sociales concernent aussi l'élargissement de l'Union : doit-on considérer qu'un « noyau dur » de normes sociales claires puisse être posé comme conditions à l'adhésion, ce qui suppose que l'Union le définisse pour elle-même ?
En outre, la réalité nous confronte aujourd'hui à la mondialisation de l'économie. Comment déterminer notre « socle social » pour qu'il soit tout à la fois au service de nos concitoyens et qu'il ne constitue pas un obstacle insurmontable pour la compétitivité de notre économie face à celle des pays émergents ?
Bien sûr, on peut se prendre à rêver que l'Union définisse une politique sociale extérieure, une politique qui diffusera progressivement, dans les pays en cours d'industrialisation, les normes sociales en vigueur dans les pays industrialisés. Mais cette diffusion prendra du temps : dix, vingt, cinquante années ? Que restera-t-il de l'économie européenne lorsque les conditions sociales seront égalitaires ? L'échec de ce dossier social à la conférence de Singapour, en décembre 1996, a bien montré les difficultés et les limites de cet exercice.
Telles sont, monsieur le ministre, quelques-unes des questions que m'inspire ce « tournant social » de la construction européenne et qui sont fréquemment évoquées au cours des travaux de la délégation du Sénat. Croyez que je souhaite, au nom de mes collègues, être rassuré sur les chances de succès de ce projet qui, renouant avec l'esprit communautaire de 1957, pourrait enfin réconcilier l'Europe et ses citoyens. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Fauchon.
M. Pierre Fauchon. Monsieur le ministre, permettez-moi, avant de vous souhaiter la bienvenue, de rendre un bref hommage à votre prédécesseur, M. Michel Barnier, auprès duquel nous avons beaucoup appris sur l'Europe et qui, à mon avis, a joué un rôle extrêmement positif au cours de la période qui vient de s'écouler.
M. Emmanuel Hamel. Il a plaidé une mauvaise cause, même s'il l'a fait avec talent !
M. Pierre Fauchon. Monsieur Hamel, il a plaidé la meilleure des causes,...
M. Emmanuel Hamel. Non !
M. Pierre Fauchon. ... et j'aurai à y revenir. J'ai déjà eu l'occasion de dire que la cause à laquelle vous êtes attaché s'est traduite dans la première moitié de ce siècle par trois guerres mondiales successives et que les années 1870, 1914 et 1940 ne sont pas particulièrement glorieuses dans l'histoire de notre pays (MM. Malécot et Maman applaudissent), contrairement à l'idée que vous vous en faites...
M. Emmanuel Hamel. Non !
M. Pierre Fauchon. ... et à celle que vous voulez nous en donner !
M. Maurice Schumann. Quel rapport ?
M. Pierre Fauchon. Mais j'en reviens à mon propos concernant M. Barnier, qui est de vos amis, si je ne me trompe, pour dire qu'il a bien oeuvré pour la cause européenne.
Il l'a fait par la qualité de son action, par son engagement personnel et par le dynamisme qu'il y a apporté.
Mais il a travaillé aussi à la cause européenne par sa présence sur tous les terrains où il était question de l'Europe, notamment les négociations au sein de la Conférence intergouvernementale, par les nombreuses visites qu'il a rendues à des partenaires modestes qui n'étaient probablement pas habitués à recevoir des ministres français et qui, je crois, y ont été sensibles, par sa présence auprès de nos concitoyens à travers une campagne dans les différentes provinces au cours de laquelle il a tenté d'expliquer le complexe mécanisme de la Conférence intergouvernementale.
M. Barnier a travaillé enfin à la cause européenne par sa présence fréquente au Parlement et sa très grande disponibilité à l'égard des commissions des affaires étrangères, et des délégations pour l'Union européenne,...
M. Jacques Genton, représentant de la délégation du Sénat pour l'Union européenne. C'est vrai !
M. Pierre Fauchon. ... ce qui nous a permis de suivre pas à pas l'évolution de cette négociation. Je crois qu'il était bon de procéder à ce rappel.
Cela étant dit, monsieur le ministre, je vous souhaite la bienvenue au nom du groupe de l'Union centriste puisque je suis momentanément son porte-parole et puique les électrices et les électeurs, qui, comme chacun le sait, sont supposés ne jamais se tromper, ont voulu que vous-même et vos collègues du Gouvernement soient désormais nos interlocuteurs.
Je connais, monsieur le ministre, votre ardeur et votre capacité d'action. Ce que nous connaissons moins, c'est le degré de vos convictions européennes et de votre engagement. Nous avons hâte d'être mieux informés sur ce point.
Mon groupe, vous le savez, et M. Genton l'a excellement rappelé tout à l'heure, est de ceux - oui, monsieur Hamel ! - qui sont le plus profondément et le plus intimement convaincus que la construction européenne...
M. Emmanuel Hamel. Laquelle ?
M. Pierre Fauchon. ... est la grande affaire de notre génération, et l'une des plus grandes affaires de l'histoire. (M. Machet applaudit.)
C'est une entreprise nouvelle que de vouloir créer un Etat de droit...
M. Emmanuel Hamel. Lequel ?
M. Pierre Fauchon. ... par des moyens pacifiques à l'échelon de ce qui sera probablement un jour tout un continent. C'est une entreprise admirable (M. Machet applaudit à nouveau) , absolument nécessaire si l'on veut préserver l'autonomie de notre développement économique, et donc notre vitalité culturelle, monsieur Schumann.
M. Maurice Schumann. Je n'ai pas ouvert la bouche ! (Sourires.)
M. Pierre Fauchon. Nous savons aussi que c'est une entreprise difficile à laquelle nous devons apporter un concours actif, précisément parce qu'elle est difficile.
Aux yeux de l'histoire, il s'agit d'un défi invraisemblable, mais il est possible que nous parvenions à gagner ce défi, non sans peine.
S'agissant plus spécialement de l'Europe sociale, je suis tout à fait à mon aise pour m'exprimer puisque, m'adressant ici même à votre prédécesseur, voilà deux mois, c'est ce thème que j'avais choisi d'aborder. J'avais alors évoqué des questions comme l'avertissement qui nous était donné par les manifestations syndicales après l'annonce de la fermeture de Vilvorde.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Eh oui !
M. Pierre Fauchon. J'avais aussi évoqué le Livre blanc publié par la Commission, sous la présidence de M. Delors, en regrettant que, en grande partie du fait de la résistance de nos amis allemands, on n'ait jamais pu mettre sur pied aucun de ces projets de grands travaux qui, j'en ai la conviction, pouvaient être engagés sans peser sur les finances des Etats membres. Grâce au crédit de l'Europe, qui est considérable, et à la faveur de faibles taux d'intérêts, les grands travaux auraient eu un important effet mobilisateur sur le front de l'emploi et auraient constitué, au regard d'une certaine citoyenneté et d'une certaine communauté européenne, un signe appréciable.
J'avais aussi évoqué, à l'époque, le Parlement européen. Toutes ces questions ne sont donc pas nouvelles pour moi. Je suis heureux de les retrouver, et je me réjouis de ce que vous avez pu faire, tout en en mesurant les limites.
Quoi qu'il en soit, il était important que la dimension sociale et, au-delà, la dimension citoyenne de l'Europe soient rappelées, car il est bien vrai que la construction européenne souffre d'un certain déficit de démocratie.
Permettez-moi trois brèves observations sur ce sujet.
Tout d'abord, comme l'a rappelé M. Genton il ne faut pas sous-estimer les avancées et les acquis sociaux que nous devons au protocole social du traité de Maastricht. Sa mise en oeuvre a malheureusement été handicapée, la Grande-Bretagne n'ayant pas voulu y souscrire, mais, grâce à ce protocole, le niveau de vie et les conditions d'existence des travailleurs ont été améliorés dans des pays moins développés, ce qui, pour ceux qui en ont profité, n'était pas négligeable.
Certes, puisque nous sommes probablement le pays qui bénéficie du plus grand nombre d'avantages en la matière, nous n'étions pas concernés dès lors qu'il s'agissait de relever un niveau minimal, mais ce qui a pu être fait dans ce domaine est excellent sur le plan humain et permet, de surcroît, de rétablir la nécessaire égalité des chances et des conditions de travail entre les entreprises européennes, ce qui contribue à diminuer les risques de délocalisation. En effet, à partir du moment où le statut social est le même dans les différents pays de l'Europe, les délocalisations se trouvent, en quelque sorte, découragées.
Il s'agit d'un élément sur lequel on n'a pas suffisamment, me semble-t-il, attiré l'attention. Considérons ainsi le cas de l'entreprise Hoover, qui s'est implantée en Grande-Bretagne parce que le coût du travail y est moins élevé : dans la mesure où l'on tendra vers une égalisation des conditions économiques et sociales, le risque sera moins grand de voir se répéter des affaires de ce type.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Nous en reparlerons !
M. Pierre Fauchon. Je pourrais aussi évoquer le rôle du Fonds social européen, le FSE, qui, pour être peu visible, n'en est pas moins réel, notamment au travers d'activités de formation. Je le constate dans ma propre région, la région Centre : nous bénéficions d'aides qui donnent une chance supplémentaire à certaines personnes qui peuvent ainsi réintégrer le marché du travail. Il s'agit là d'un investissement, et non de dépenses de fonctionnement, comme on a trop tendance à le dire : c'est, en réalité, un investissement humain, c'est-à-dire, selon la formule chère au président de notre assemblée, « le meilleur des investissements ».
Cela étant, vous ne serez pas surpris si je rappelle deux principes auxquels nous sommes absolument attachés et que je résumerai d'une phrase, qui ne fera peut-être pas l'unanimité : il n'y a pas de progrès social possible sans développement économique, pour la simple raison que l'on ne peut distribuer que ce que l'on gagne.
Tous les moyens trouvés par les uns ou par les autres - nous en avons trouvé, ou cru en trouver, nous aussi - et qui permettraient de faire du développement social et de la redistribution sans en avoir véritablement les moyens sont des procédés artificiels qui, finalement, n'aboutissent qu'à des déceptions et qui masquent la réalité des faits. Si l'on veut faire du social, il faut d'abord faire du développement économique, et j'ai éprouvé quelque regret, à cet égard, que, dans sa déclaration de politique générale, M. le Premier ministre n'ait même pas mentionné le rôle de l'entreprise, qui est, tout de même, essentiel.
Il n'y aura pas non plus - c'est ma troisième observation - de développement économique sans assainissement des finances publiques, ayons la franchise de le dire.
Comme elle est bienvenue, la règle des 3 % fixée par Maastricht ! Mais il s'agit de 3 % du PIB, il faut le rappeler, ce qui offre tout de même une assez large possibilité de déficit. Et nous sommes bien contents, finalement, que cette règle nous ait été imposée : sinon, il nous aurait fallu nous l'imposer à nous-mêmes, et nous aurions probablement manqué un peu de courage ! Nous ne sommes donc pas mécontents, au fond, d'avoir à assumer cette discipline.
Rappelons aussi qu'il est tout à fait injuste d'attribuer cette discipline des 3 % ainsi que celle qui concerne le taux d'endettement à l'influence de nos amis Allemands : la vérité historique, dans cette affaire, c'est que, lors des négociations de Maastricht, les Allemands, voyant quelles seraient les conséquences prévisibles de la création d'une unité monétaire, et donc d'une véritable unification économique, avaient proposé de réaliser les réformes institutionnelles correspondantes en créant, dans les domaines concernés, un véritable gouvernement européen par transformation de la Commission. Ainsi réformée et disposant des pouvoirs suffisants, la Commission aurait pu garantir que les politiques économiques nécessaires seraient suivies pour garantir la stabilité de la future monnaie commune.
C'est parce que la France - notamment - n'a pas voulu entrer dans cette voie que l'on a dû mettre en place ces « sécurités automatiques » qui nous paraissent maintenant très contraignantes. Mais nous sommes malvenus de nous plaindre, puisque c'est nous-mêmes - et plus spécialement, d'ailleurs, vos amis, monsieur le ministre ! - qui les avons imaginées à l'époque de la négociation du traité de Maastricht.
Voilà pour ce qui est de l'Europe sociale.
Si j'avais encore une minute,...
M. le président. Vous avez déjà dépassé votre temps de parole, monsieur Fauchon !
M. Pierre Fauchon. Je conclus donc : telles sont les préoccupations sous le signe desquelles, au nom du groupe de l'Union centriste, je vous souhaite non seulement la bienvenue, mais aussi et bien davantage, monsieur le ministre, bonne chance.
Bonne chance, car les temps sont incontestablement très difficiles : vous devez agir avec des partenaires dont le degré de résolution est variable, avec une Grande-Bretagne qui est passée, selon la formule de M. Blair, à l'avant de la voiture - mais parce qu'elle sait qu'à l'avant de la voiture il y a aussi le frein, et pas seulement l'accélérateur - avec une Allemagne en difficulté, avec une France qui ne sait trop comment concilier les engagements que vous venez de prendre - et c'était votre droit de les prendre - et les nécessités d'un assainissement des finances publiques. A ce propos, j'ai d'ailleurs été heureux d'entendre M. Strauss-Kahn dire tout à l'heure : « On fera tout, on fera les deux ». Si j'osais employer une formule anglaise, je dirais : I hope so !
Quoi qu'il en soit, bon courage, monsieur le ministre ! Votre responsabilité est considérable. C'est l'une des plus grandes, me semble-t-il, au sein de ce gouvernement. Bonne chance, donc, car il y va sans doute de notre avenir et, au-delà de notre génération, monsieur Hamel, du destin de la France. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Bordas.
M. James Bordas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite, en premier lieu, au nom de mes collègues du groupe des Républicains et Indépendants, remercier M. Genton d'avoir suscité l'organisation de ce débat européen, peu de temps après le Conseil d'Amsterdam. Sans cette initiative, le Sénat aurait achevé cette session sans avoir pu aborder des enjeux qui ont largement occupé la scène politique et médiatique française et européenne immédiatement après le changement de majorité et de gouvernement en France.
Dans ce contexte politique ouvrant une nouvelle période de cohabitation, le sommet européen d'Amsterdam a pris, d'emblée, un supplément de signification.
Le temps vous était certes compté, monsieur le ministre, pour faire valoir vos nouvelles orientations politiques, et vous n'avez ni attendu ni tergiversé pour les affirmer. Je me dois de vous dire que nous l'avons pas déploré, du moins pas totalement.
S'agissant du pacte de stabilité, le Premier ministre avait tenu à souligner, en son temps, que la parole de la France était engagée et qu'elle serait tenue. Ce pacte est en effet nécessaire pour réaliser l'euro avec la crédibilité nécessaire vis-à-vis de la communauté financière internationale.
Vous aviez reproché au précédent gouvernement d'avoir, à Dublin, trop facilement accepté la procédure des sanctions. En adoptant le pacte, à Amsterdam, vous vous êtes tout de même inclinés.
S'agissant de la résolution sur la croissance et l'emploi, que vous avez fini par obtenir de nos partenaires, puis-je me permettre de vous dire, ou de vous rappeler, monsieur le ministre, que le mémorandum rédigé en mars 1996 par le gouvernement d'Alain Juppé appelait déjà l'Union européenne à faire du modèle social européen sa priorité ? Je le cite : « Faire de l'emploi le critère déterminant des interventions et des politiques de l'Union ; renforcer la dimension humaine de l'Europe ; développer le dialogue social ». Il me semble qu'ici, au Parlement, lieu privilégié du débat démocratique, si j'en crois le Premier ministre, il convient de rétablir la part de vérité.
Cette résolution sur l'emploi et la croissance n'est qu'un premier pas dans une direction que, je dois le dire, nous approuvons, mais elle reste pour l'instant une déclaration de bonnes intentions. Nous y voyons le souci louable de faire avancer une cause d'intérêt national transcendant les clivages de politique intérieure. Depuis le récent sommet du G 8, à Denver, où les Etats-Unis ont encore une fois mené une offensive d'auto-satisfaction, nous prenons conscience que la défense de notre modèle social est également un intérêt commun à tous les pays européens.
Un mot cependant, monsieur le ministre, sur la méthode utilisée pour parvenir à vos fins. Nous savons bien que l'adoption de ces résolutions passait par une entente avec l'Allemagne, ou tout du moins une approbation tacite de celle-ci. Je dois dire que nous avons eu, au départ, quelques inquiétudes. Nous avons vu, malgré le bon accueil du président Monory à Poitiers, et les efforts du Président de la République pour les rassurer, le moment où nos amis allemands prendraient leur distance, et où les chances d'aboutir à Amsterdam seraient gâchées par votre précipitation. La suite a levé nos craintes, mais, dans ces affaires de construction européenne, qui ne sont pas « un long fleuve tranquille », il faut prendre garde de ne pas compliquer l'équilibre de nos relations avec l'Allemagne.
Ce pays est notre partenaire historique, et prendre le risque d'affaiblir l'un des meilleurs tenants d'une construction européenne dynamique et l'un des piliers des coopérations renforcées n'est pas une bonne méthode.
Il faut également éviter, monsieur le ministre, des déclarations par trop ambiguës sur le passage à l'euro, qui continuent d'entretenir, ici et là, un climat de suspicion chez nos voisins. Tant que nous n'aurons pas passé le cap de 1999, nos exigences doivent demeurer réalistes, aussi bien sur le plan national que sur le plan européen.
Vous vous en rendrez compte vous-même : les faits sont têtus, et les finances ne sont pas extensibles. Il faudra bien que vous vous donniez les moyens de remplir les conditions que vous avez vous-même acceptées lors du conseil d'Amsterdam. Les conclusions de la présidence précisent bien, en effet, qu'une meilleure coordination des politiques nationales de lutte contre le chômage passe par une croissance non inflationniste et un assainissement des finances publiques.
L'Europe sociale aura donc un premier rendez-vous en octobre prochain à Luxembourg. D'ici au mois de septembre, des propositions nationales sont attendues par la Commission. Etes-vous en mesure de nous dire, monsieur le ministre, si le Gouvernement a fixé les orientations qu'il entendra défendre à cette occasion ? En particulier, des projets pilotes pourront-ils être définis, dont certains sont déjà cadrés avec des villes et des régions d'Europe ? Quels redéploiements des crédits communautaires la France préconisera-t-elle pour les financer ? Comment ces axes européens pourront-ils s'articuler avec le plan français d'emploi pour les jeunes ?
L'avenir immédiat appelle, en outre, d'autres questions et interrogations !
S'agissant des interrogations, tout d'abord, nous ne manquons pas d'avoir quelques doutes sur la cohérence des actes du Gouvernement. Est-il bien opportun, en effet, de demander à l'Europe la poursuite d'une politique de grands travaux, dans la lignée d'Essen - même si vous avez dû finalement renoncer à les faire mentionner dans la résolution finale - alors qu'en même temps vous annoncez l'arrêt de grands travaux au plan national ? L'Europe, en dépit de son environnement budgétaire restrictif, saurait-elle mieux faire dans ce domaine que le nouveau gouvernement français, qui prône pourtant l'intervention de l'Etat pour préserver l'emploi ?
M. Maurice Schumann. Très bien !
M. James Bordas. Est-ce là votre vision du principe de subsidiarité ? Est-ce là votre méthode pour éviter malgré tout la suppression de 75 000 emplois annoncée dans les travaux publics, si vous remettez en cause le canal Rhin-Rhône, Superphénix, les autoroutes, le bouclage de la francilienne ou l'extension de l'aéroport de Roissy ?
J'en viens aux questions.
Comment le Gouvernement s'y prendra-t-il pour respecter les orientations définies par le Conseil européen ? J'en rappelle quelques-unes : la modernisation des systèmes de protection sociale, notamment par la transformation des systèmes d'allocation en systèmes volontaristes ; la baisse des coûts salariaux des travailleurs les moins qualifiés ; l'encouragement à développer la simplification administrative ; la modération salariale, telle que celle qui est prônée par les partenaires sociaux européens.
Comment le Gouvernement engagera-t-il les négociations sur le temps de travail, alors que la Commission européenne travaille, de son côté, sur un livre vert, en 1997, qui pourrait aboutir à une proposition de directive ? Comment vos échéances s'articuleront-elles avec les siennes ?
Quant au dialogue social en Europe, vous entendez, je suppose, le soutenir et le favoriser. Serez-vous disposé à appuyer la demande des organisations européennes de petites et moyennes entreprises et de cadres pour la représentativité syndicale ?
Je terminerai, monsieur le ministre, sur un satisfecit et sur un regret.
Le satisfecit concerne l'intégration du protocole social dans le futur traité d'Amsterdam, signé, entre autres, par le Royaume-Uni. C'était l'un des objectifs du précédent gouvernement pour la conclusion de la Conférence intergouvernementale, et je suis heureux qu'il ait pu aboutir.
Le regret, c'est l'échec des pays européens à s'entendre sur la réforme des institutions de l'Union. Nous avons toujours plaidé, pour ce qui nous concerne, en faveur d'un approfondissement des institutions avant tout élargissement. Nous savons tous que les phases avancées de cet élargissement vont s'engager dès le début de l'année 1998. Il nous semblait indispensable de parvenir à s'entendre à quinze, avant cette échéance, sur les bases de révision de la majorité qualifiée et de pondération des voix précédemment proposées par la France.
Il convient désormais de travailler à de nouvelles propositions susceptibles d'éviter que l'Union européenne ne soit condamnée à l'inertie par faiblesse ou division, à la veille d'un élargissement historique à l'Est. Sur cet enjeu majeur, quelles solutions votre gouvernement encouragera-t-il ?
En conclusion, je tiens à rendre justice également au Gouvernement d'avoir accepté ce débat légitime au sein de notre Haute Assemblée. Le groupe des Républicains et Indépendants exercera sa vigilance au sein d'une opposition qu'il souhaite constructive sur les sujets européens.
Je vous remercie, monsieur le ministre, des réponses que vous voudrez bien m'apporter. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à quelques jours de la clôture des travaux de notre assemblée, la question dont nous débattons aujourd'hui devrait nous permettre de faire le point sur la période « charnière » que vit la construction européenne à l'issue de cette laborieuse renégociation du traité de Maastricht.
Les termes du débat à propos de cette renégociation étaient les suivants : comment aller vers plus d'intégration de nos économies, au travers d'une monnaie unique avec ce que sous-entend et laisse espérer son instauration, et comment fonctionner dans l'Union, aujourd'hui à quinze, et à laquelle certains entendent donner rapidement la dimension de notre vieux continent ?
Dans ce débat particulièrement technique, et souvent volontairement opaque, les citoyens entendent désormais exprimer avec force leurs aspirations en faveur d'une Europe qui place la dimension sociale, et donc l'homme, au coeur de son évolution, au centre de ses priorités, comme le souligne M. Genton.
Cette exigence s'exprime de différentes manières mais avec constance et de plus en plus de détermination, que ce soit dans le cadre d'échéances électorales, de référendums ou de manifestations. Dernièrement, ils étaient plus de 50 000 dans les rues de Paris, portant cette revendication pour l'emploi.
Il est évident que l'adhésion des citoyens au projet européen dépendra essentiellement de la réponse qu'apporteront les gouvernements européens à cette exigence.
Comment, aujourd'hui, ne pas être inquiets face à la distanciation des citoyens par rapport à ce projet ? Comment ne pas comprendre leur anxiété, voire leur colère, à l'égard de son déficit social ?
Reconnaissons tout d'abord que, à l'exception de quelques rares mesures concrètes relatives à la sécurité des travailleurs, aux comités d'entreprise européens, l'Europe sociale s'apparente davantage à une incantation rituelle qu'à un véritable projet politique.
M. Maurice Schumann. C'est malheureusement vrai !
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Nos textes fondateurs parlaient, certes, de liberté de circulation des travailleurs, de promotion du dialogue social, d'égalité entre les hommes et les femmes, de formation professionnelle. Mais, durant plus de trente ans, la concrétisation de cette dimension sociale fut occultée par les grandes manoeuvres autour de l'édification d'un marché intérieur ; parfois, même, elle fut instrumentalisée à son profit.
Plus récemment, la démarche qui a inspiré la réglementation édictée dans le prolongement de l'Acte unique n'a pas renforcé, tant s'en faut, la perception d'un volontarisme dans le domaine social.
En effet, l'harmonisation de normes nationales autour d'un socle de droits sociaux a minima est loin d'être un projet enthousiasmant et mobilisateur dans des pays comme le nôtre.
Un exemple précis me vient à l'esprit, celui du texte sur le congé maternité. Ce texte ne représentait, en fait, une réelle avancée que pour les femmes de deux pays en Europe, la Grande-Bretagne et le Portugal, la majorité des Etats, dont la France, ayant déjà adopté des dispositifs plus avantageux.
Je ne reviendrai pas sur l'utilisation polémique qu'en ont faite certains dans la campagne sur le référendum de Maastricht. Je me souviens simplement des hésitations sincères de parlementaires européens sollicités pour l'adoption d'un texte qui n'aurait pas de réelle traduction concrète dans leur pays.
Par ailleurs, sans entrer dans les détails, les obstacles institutionnels - règles de majorité, procédures devant le Parlement - qui ont jalonné le processus décisionnel des directives sociales ont entravé le plein épanouissement des potentialités que recelait la charte des droits sociaux fondamentaux initiée par François Mitterrand.
On a évalué qu'il fallait en moyenne deux ans pour aboutir à un compromis, et au pire vingt-cinq ans, à l'exemple du texte, d'une actualité brûlante, relatif à l'information et à la consultation des salariés. J'ajoute que notre Parlement l'a transcrit dans notre législation l'année dernière, deux ans après son adoption par le Conseil.
Bref, s'il fallait schématiser ce qu'un responsable de la Confédération européenne des syndicats appelle « le tango de l'Europe sociale », c'est-à-dire deux pas en avant, un pas en arrière, il faudrait parler d'interventions parcellaires, de mesures a minima difficilement élaborées et votées, et laborieusement appliquées dans les Etats membres.
Aujourd'hui, une autre urgence apparaît : alors qu'il y a deux décennies à peine l'essentiel de nos préoccupations portait sur le renforcement des droits des travailleurs, l'augmentation massive du chômage partout en Europe - il frappe près de 20 millions de personnes, plus particulièrement les jeunes - l'exclusion qu'il génère, la charge de violence qu'il comporte, nous font obligation de placer l'emploi au centre du projet européen.
Les gouvernements ont, certes, arrêté une première plate-forme de propositions lors du sommet d'Essen, en 1994. Mais comment ne pas être sceptique sur les orientations et les résultats de cette plate-forme, qui préconisait, notamment, une flexibilisation du marché du travail, la modération salariale et la réduction des coûts non salariaux ?
C'est pourquoi le récent sommet d'Amsterdam marque une nouvelle étape.
Tout d'abord, la signature par la Grande-Bretagne du protocole social ouvre de nouvelles perspectives en matière de législation sociale européenne.
Mais, surtout, le protocole permet d'intégrer dans le traité un véritable chapitre sur l'emploi. Il est envisagé, notamment, la mise en place de projets pilotes financés par l'Union et la création d'un comité de l'emploi pour coordonner les politiques des Etats membres ; le concours de la Banque européenne d'investissement est également prévu afin de financer des projets innovants et à haute technologie, en particulier dans les PME et les PMI.
Par ailleurs, les fonds structurels, spécialement le fonds social européen, le FSE, et le fonds européen de développement régional, le FEDER, doivent pouvoir concourir plus activement à une politique de l'emploi.
Certes, mes chers collègues, ces engagements peuvent paraître d'une trop grande modestie.
Certes, nous aurions pu aussi ne rien avoir concernant l'emploi dans la renégociation du traité, car rien ne laissait présager, voilà tout juste un mois, que le sujet serait abordé dans des termes aussi positifs. En effet, les textes quasi définitifs auxquels - sans enthousiasme, il est vrai - les pays avaient finalement souscrit étaient étrangement, voire intentionnellement, silencieux et timorés sur ce thème de l'emploi.
Démonstration a été faite que le volontarisme politique peut faire échec à cet autre volontarisme des apôtres de la dérégulation et de la flexibilité. Il a été démontré également qu'il existe une autre ligne de conduite que le fatalisme face à certains poids lourds du libéralisme.
Comment peut-on espérer dynamiser les travailleurs européens en ne leur offrant pour toute perspective que le remboursement de la dette publique, la flexibilité subie, la précarité et la pauvreté, alors que, parallèlement, nous vivons un moment historique où la volonté politique existe - en tout cas chez certains - et alors que, en dépit de l'actuelle atonie de l'activité, les facteurs principaux qui déterminent les perspectives de croissance ne sont pas défavorables puisque la rentabilité des investissements est correcte, l'inflation est maîtrisée, les échanges extérieurs sont excédentaires et la baisse des taux d'intérêts porte ses fruits ?
Il faut noter, cependant, que ces éléments porteurs auront des effets minorés en raison d'une évolution des salaires plus faible que la productivité, ce qui, bien entendu, pénalise la demande et nuit à la croissance.
Je regrette donc la frilosité de certains de nos partenaires face à tout engagement financier concret.
Aujourd'hui, les réseaux transeuropéens, qui concernent les infrastructures, mais aussi les télécommunications, semblent en panne.
Le sommet d'Essen s'était déjà conclu par un blocage sur le projet de « grands travaux » qu'avait proposé M. Jacques Delors.
Par ailleurs, si certains étaient prompts à évoquer la baisse des coûts non salariaux, aucune solution n'avait été avancée pour assurer la compensation budgétaire de ces allégements, bien que l'on ait à un certain moment parlé de taxe sur le CO².
Bien sûr, il n'est pas question pour l'Union européenne d'intervenir dans les politiques sociales, telles que la santé ou la vieillesse. Les systèmes mis en place dans les années trente sont ancrés sur des conceptions différentes et leur rapprochement précipité provoquerait une confusion dans laquelle viendrait se dissoudre tout sentiment d'identité ou d'appartenance pour les citoyens.
Mais l'Union européenne dispose, en matière d'emploi, d'atouts précieux et de marges d'initiative incontestables.
Sous l'impulsion, notamment, de M. Jacques Delors, l'Union a désormais une « culture » de dialogue social à l'échelle européenne. Depuis l'entrée en vigueur du traité de Maastricht, la consultation des partenaires sociaux et la prise en compte de leurs propositions sont des éléments moteurs pour la dynamique européenne, à l'image de ce qui s'est fait pour le texte relatif au congé parental ou les discussions qui se déroulent sur l'encadrement du temps partiel.
En matière de formation professionnelle, l'Union a depuis longtemps mis en place des programmes d'échanges dans le cadre scolaire et universitaire. Elle a également une formidable capacité de mobilisation grâce aux réseaux qu'elle encourage.
La formation professionnelle tout au long de la vie joue un rôle clé pour améliorer la compétitivité de nos entreprises et exploiter les nouveaux gisements d'emplois.
Sur initiative du Gouvernement français, les Européens se sont engagés, à Amsterdam, à prolonger leurs discussions lors d'un sommet qui sera consacré à l'emploi, dès la rentrée prochaine.
J'en viens à mes questions.
Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, dans quel esprit vous participerez à cette rencontre et quelles orientations vous entendez promouvoir ?
Ne serait-ce pas l'occasion de moraliser le circuit des primes communautaires octroyées à certains employeurs qui n'hésitent pas à délocaliser leur production d'un pays bénéficiant d'une protection sociale forte en direction d'un Etat membre où les salaires et cette protection sociale sont plus faibles ?
Pourquoi ne pas soutenir la proposition du commissaire Van Miert de lier l'octroi des aides au respect des directives européennes ?
Quelle stratégie globale entendez-vous préconiser face au dumping des pays émergeants ?
Monsieur le ministre, bien d'autres questions devraient vous être posées.
Nous partageons tous la conviction que l'Europe en mutation doit être celle de tous les citoyens, et non pas celle des seuls financiers. C'est pourquoi nous estimons que la réalisation de cette Europe sociale est la clé de la pérennité de l'Union européenne.
Espérons que la rencontre de Luxembourg, voulue par notre Premier ministre, M. Lionel Jospin, concrétisera les déclarations d'intention du sommet d'Amsterdam.
Nous connaissons votre détermination sur ce point. Nous vous assurons de tout notre soutien dans cette phase délicate et déterminante de la construction européenne. (Applaudissements sur les travées socialistes. - M. le représentant de la délégation du Sénat pour l'Union européenne et M. Pierre Fauchon applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, entre l'outrance de l'Europe du libéralisme et des capitaux et l'Europe du chômage et de la régression, il semble qu'aujourd'hui nous ayons adopté un mode de comportement plus raisonnable. En effet, quelles que soient les difficultés de notre système européen, l'Union des Quinze compte indéniablement dans le monde comme l'une des plus grandes puissances économiques et exportatrices.
Quoi qu'en disent ses plus ardents détracteurs, l'Europe occidentale demeure un des hauts lieux de culture, de création et de liberté. L'Europe figure aussi parmi les acteurs mondiaux majeurs tant du point de vue du volume, de sa population que de son produit intérieur brut, et de son niveau de revenu par habitant. Le rapport de la CNUCED - conférence des Nations unies sur le commerce et le développement - est à cet égard révélateur. Ne vient-il pas de classer la France deuxième pays du monde, après le Canada, pour le niveau de bien-être offert à sa population ?
Cependant, le prix à payer pour cette indéniable réussite pèse lourd. Ce poids nous affaiblit, il nous désoriente et nous confine à l'impuissance. En effet, l'Europe des Quinze, c'est aussi dix-huit millions de chômeurs, des sites industriels en perpétuelle restructuration, un nombre d'exclus intolérables, des systèmes de sécurité sociale ruineux et inadaptés aux besoins, et des démographies dangereusement vieillissantes.
Là réside le problème. L'insupportable différence entre ces deux Europe - celle du bien-être individuel et économique et celle de la régression et de l'impuissance - nous renvoie à un sentiment de fatalisme qui gagne peu à peu les acteurs les plus dynamiques de nos économies.
Beaucoup de choses ont été dites sur la politique sociale européenne : facteur de ruine de l'Europe pour les uns, cache-misère pour les autres. Les textes européens en la matière ne font cependant pas défaut, car le souhait d'instaurer une politique sociale européenne a toujours été présent dans l'Union des Quinze.
M. Jacques Genton, représentant de la délégation du Sénat pour l'Union européenne. C'est vrai !
M. Bernard Joly. Le traité de Rome de 1957 prévoyait déjà, dans son article 117, la nécessité de procéder à l'amélioration des conditions de vie et de travail. Dès 1960, le Fonds social européen, le FSE, visait à l'élargissement des possibilités d'emploi ainsi qu'au relèvement du niveau de vie. L'année 1972 permit la révision du FSE avec l'objectif d'aboutir au plein emploi. La mise en place d'un ensemble de directives dont l'objet était de protéger l'emploi s'égrena pendant quinze ans jusqu'à l'Acte unique, qui tentera de relancer la politique sociale européenne et la cohésion économique et sociale. Vint enfin, en 1987, la signature de la charte sociale européenne, dont le Royaume-Uni jugea bon de s'exonérer jusqu'au récent sommet d'Amsterdam.
Les textes signés tout au long de l'histoire sociale européenne prévoient notamment des dispositions favorables à la mise en oeuvre de mesures d'harmonisation et de convergence relatives à la libre circulation des travailleurs, aux relations dans le travail, au chômage, à l'emploi et à la sécurité sociale, ainsi que des dispositions sociales générales relatives aux conditions de vie et de travail et aux personnes défavorisées et des programmes concrets, dans le cadre du fonds social européen.
Cependant, malgré ces textes dont on ne peut contester l'existence, il faut noter que la plupart des Etats membres n'ont jamais envisagé autre chose qu'une harmonisation sociale minimale, et force est de constater que l'avancement de cette harmonisation n'est, à ce jour, qu'à peine entamée. Si des réussites ont pu voir le jour en matière de politique sociale européenne, comme la création du comité d'entreprise européen, l'essentiel de cette politique reste à matérialiser.
Comment alors s'étonner qu'un fort sentiment de désillusion à l'encontre des promesses européennes prévale parmi nos concitoyens ? D'espoirs déçus en sacrifices ressentis comme inutiles, un fort sentiment de scepticisme et de désintérêt a pris la place des idéaux d'espérance initiaux.
Voilà dix jours se tenait le sommet d'Amsterdam. Moment attendu, moment redouté et décisif, la Conférence intergouvernementale devait nous permettre d'assister à l'effacement de l'Europe de Maastricht devant une authentique Union européenne. Cette nouvelle Union née de ses cendres devait, grâce à une nouvelle appréciation de la dimension sociale de l'Europe communautaire, voir l'avènement d'une conception européenne plus respectueuse de ses populations, plus attentive à leur existence et à leur prospérité.
Le Premier ministre avait affirmé au préalable que la France saurait faire entendre sa voix, pour dire aux quatorze autres Etats de l'union qu'il fallait mettre l'Union économique et monétaire au service de la croissance et de l'emploi. Monsieur le ministre, estimez-vous avoir réalisé cet objectif dont M. Lionel Jospin avait fait l'un de ses thèmes de campagne ?
Le sommet d'Amsterdam nous a également donné l'occasion d'assister à la décision du Royaume-Uni d'adhérer à la politique sociale de l'Union et d'accepter l'ensemble des directives adoptées dans ce cadre. Il faut s'en réjouir.
Cependant, étant donné l'attitude de recul de la Grande-Bretagne à l'égard de mesures en faveur de l'emploi et de la protection des travailleurs, ne craignez-vous pas, monsieur le ministre, de ne voir nos voisins britanniques freiner à l'avenir les progrès de la politique sociale européenne ?
Voilà peu d'années, la France a dû procéder à la relecture d'un texte législatif relatif aux conditions de travail de nuit pour les femmes trop favorable dans le cadre de l'égalité professionnelle stricto sensu. Notre position était pourtant la bonne, celle d'une approche non mathématique.
Par ailleurs, dès lors qu'un socle social minimum semble recueillir l'adhésion des Quinze, est-il envisageable d'assortir l'attribution des soutiens financiers européens au respect de ces règles minimales ?
S'agissant de la résolution du Conseil européen d'Amsterdam sur la croissance et l'emploi, une distinction a été faite entre la lutte contre le chômage, qui est « de la responsabilité des Etats », et la coordination des politiques pour l'emploi, qui semble s'insérer dans une démarche européenne.
Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous expliquer clairement ce que les demandeurs d'emplois peuvent attendre de telles considérations ?
Je souhaiterais savoir dans quels délais et sous quelles formes seront réalisées les actions entreprises dans ce cadre. Pouvons-nous espérer des mesures rapides et concrètes, par exemple, une baisse de la TVA sur les activités de restauration et de tourisme, afin d'améliorer la compétitivité d'un secteur essentiel à l'économie des provinces françaises ? Le Parlement européen a adopté un amendement dans ce sens et cette taxation fait partie des renégociations prochaines.
Il convient d'être clair. Laisser le temps au temps est un luxe que certains de nos concitoyens ne peuvent plus s'offrir.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, une semaine après le sommet du G 8 de Denver, je crois que les Etats de l'Union ont pris conscience que le modèle social européen ne peut en aucune façon s'aligner sur le système américain.
La France et l'Union européenne sont donc aujourd'hui plus que jamais appelées à réfléchir sur le fondement de leur politique sociale. De cette définition, il faudra élaborer des objectifs clairs à court, moyen et long termes. Il faudra expliquer le coût et les sacrifices d'une telle politique, une politique qui entend ne laisser personne sur le bord du chemin, mais qui ne dispensera personne de prendre en charge sa juste part de responsabilités, qu'elles soient financières, civiques ou économiques. C'est au prix d'un tel effort que les pays de l'Union européenne pourront enfin trouver la voie de la convergence entre union économique et monétaire et union sociale européenne. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur celles de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Schumann.
M. Maurice Schumann. Monsieur le ministre, ce débat que je vous remercie, vous, d'avoir accepté, et mon ami M. Jacques Genton, d'avoir provoqué et brillamment ouvert, me fournit l'occasion de vous poser une question précise.
Ne soyez pas étonné si je tiens un langage très comparable à celui que j'ai tenu le 19 avril dernier à cette même tribune, la dernière fois que j'ai rencontré votre prédécesseur et le ministre des affaires étrangères de l'époque. Les majorités changent, les gouvernements se succèdent, mais nous sommes en droit de toujours attacher notre char à la même étoile !
On a beaucoup dit ces derniers temps, on a redit aujourd'hui encore, on a trop dit peut-être, mais on a dit à bon droit, que la parole de la France était engagée, qu'elle avait signé le traité de Maastricht, que les électeurs français s'étaient prononcés - à une faible majorité sans doute mais à une majorité incontestable.
Vous ne serez pas étonné de m'entendre dire que je n'ai pas la moindre intention de critiquer ce vocabulaire ou de revenir sur cette assertion ; on peut regretter un constat, on ne peut pas refuser de le faire. Malebranche a dit : « Le passé, Dieu lui-même n'y pourrait rien changer ».
Cela étant, il importe de se rappeler que, si les électeurs français, dans leur faible majorité, ont approuvé un traité, ils n'ont pas pour autant approuvé ce qui a été ajouté à ce traité depuis lors. Et voilà bien le fond de la question !
Je viens d'entendre et d'écouter avec la plus grande attention Mme Dieulangard, porte-parole du parti politique auquel appartiennent le Premier ministre et la majorité de ses ministres. Qu'a-t-elle dit ? A trois reprises, elle a employé le mot « renégociation ». S'il y a eu en effet renégociation, c'est bien qu'il y avait eu adjonction, c'est bien qu'il y avait eu novation, adjonction et novation sur lesquelles, à ma connaissance, le citoyen français n'a pas eu à se prononcer...
M. Emmanuel Hamel. Pas encore !
M. Maurice Schumann. Je cite les deux exemples essentiels.
Le premier, c'est l'euro.
Chacun parle de l'euro comme s'il était le synonyme de la monnaie unique. Mais l'euro, tel qu'il se présente, ce n'est pas la monnaie unique pour laquelle la majorité des électeurs français s'est prononcée. La majorité des électeurs français s'est prononcée pour la substitution aux monnaies nationales d'une nouvelle monnaie dans les quinze pays membres de l'Union européenne.
Aujourd'hui, l'euro, tel qu'il se présente, soit qu'un certain nombre de pays ne veuillent pas y adhérer, soit qu'un certain nombre d'Etats membres soient considérés comme ne remplissant pas les conditions nécessaires, voire - je pense à l'Italie - soient considérés comme indésirables, l'euro est une monnaie unique mutilée.
La différence est considérable. Les commentateurs, les historiens de l'avenir seront étonnés, j'en suis sûr, d'avoir à constater que l'on parle de l'euro ou de la monnaie unique, à l'heure actuelle, absolument comme s'il s'agissait de la même chose.
Or, il y a deux différences essentielles : dès lors que l'euro ne s'appliquera pas aux quinze Etats membres, les Etats qui ne seront pas membres auront la possibilité - je ne dis pas qu'à coup sûr ils s'en serviront, mais ils en disposeront - de recourir à ces dévaluations compétitives dont chacun sait et dont chacun dit qu'elles ont fait tant de mal.
Ainsi, le premier résultat d'un euro, c'est-à-dire, dans l'état présent des choses, d'une monnaie unique mutilée et partielle, sera de dresser une frontière monétaire au milieu d'un espace économique qui, lui, est un espace sans frontières.
Je passe au second exemple, qui est peut être plus flagrant et peut-être plus important encore : le pacte de stabilité.
On a le droit d'être partisan du pacte de stabilité, comme on a le droit d'être favorable au passage à la troisième étape du traité de Maastricht, bien que l'euro ne reproduise pas la monnaie unique telle qu'elle figurait dans le traité de Maastricht et telle qu'elle a été approuvée par une faible majorité des Français, mais personne ne conteste - à mon avis, ou selon les constatations que nous sommes tous appelés à faire - que le pacte de stabilité comporte des abandons de souveraineté très importants dans le domaine fiscal, dans le domaine monétaire, dans le domaine budgétaire, dans le domaine économique et dans le domaine qui - on peut le dire - a dominé ce débat, à savoir le domaine social.
Or, qui est détenteur de la souveraineté ? C'est le peuple français ! Il a bien entendu le droit d'utiliser sa souveraineté pour la limiter, voire pour la limiter gravement et considérablement. Mais personne ne peut dire qu'à l'heure actuelle il ait approuvé cette novation fondamentale, cet élément essentiel de la renégociation à laquelle faisait allusion tout à l'heure Mme Dieulangard, et qui s'appelle le pacte de stabilité.
Cette constatation est d'ailleurs d'autant plus importante que, jusqu'à présent, on l'a dit - c'est très regrettable mais c'est vrai - l'expérience paraît démontrer qu'un certain nombre de pays européens, en particulier l'Allemagne et la France, peuvent perdre sur les deux tableaux, c'est-à-dire, d'une part, consentir des limitations de souveraineté sérieuses, graves, importantes et, d'autre part, appliquer, pour remplir les conditions posées par les critères de convergence, une politique de rigueur non discriminée et excessive qui, à cause de la diminution des rentrées fiscales et des cotisations sociales, a comme résultat de creuser les déficits bien loin de les combler.
Devant une situation comme celle-là, quelle conclusion importe-t-il de tirer ? C'est l'objet même de la question que je vous pose.
Cette conclusion, c'est que vous avez le droit de signer un pacte de stabilité, comme vous l'avez fait, de même qu'un gouvernement antérieur avait le droit de signer le traité de Maastricht. Mais après avoir signé le traité de Maastricht, ce gouvernement a consulté les Français, et il a eu une réponse. Après le pacte de stabilité, qui est en réalité un nouveau traité, votre gouvernement a le devoir, l'obligation, l'obligation constitutionnelle de procéder à une nouvelle consultation.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. Maurice Schumann. C'est vrai du pacte de stabilité, c'est vrai aussi de l'euro tel qu'il est devenu dans la mesure même où il s'éloigne de la monnaie unique telle qu'elle avait été primitivement conçue.
Dès lors, ma conclusion est très simple, mais elle est en même temps très claire : vous êtes enfermé dans une alternative et, comme toute alternative, celle-là comporte deux branches.
La première, celle qui emporte de loin ma préférence parce qu'elle est la seule qui soit en définitive incontestable et même indiscutable, c'est une nouvelle consultation du peuple français par voie de référendum, qui complète et qui, le cas échéant, corrige la réponse primitivement donnée. Cela est d'autant plus important d'ailleurs que, par la même occasion, les Français pourraient avoir la faculté de proclamer dans la construction de l'Europe la primauté du social à laquelle semblent être attachés aujourd'hui tous les orateurs qui se sont succédé à cette tribune.
Il y a, je le reconnais, une autre branche à l'alternative : c'est la procédure parlementaire, c'est la consultation des élus de la nation. Je vous demande clairement quelle est celle de ces deux branches que vous choisissez.
Mais à l'alternative elle-même, monsieur le ministre, vous ne pourriez pas échapper, vous ne ne pourriez pas vous soustraire sans porter atteinte au principe fondamental de la République : le droit des Français à disposer d'eux-mêmes. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, un débat portant sur la politique sociale de l'Union européenne est au coeur de l'actualité.
Les récentes élections législatives ont en effet été marquées, au-delà des prévisions et des sondages, par l'exigence des Français d'affirmer leur volonté d'une rupture avec les politiques d'austérité antérieures, qui étaient placées sous le signe du libéralisme. Ils ont clairement opté pour un véritable changement.
Oui, l'Europe sociale est de toute évidence au coeur de ce débat. Comment en serait-il autrement alors que la construction actuelle de l'Europe suscite le rejet ou de fortes interrogations de la grande majorité de nos compatriotes ? Si 58 % des Français souhaitent aujourd'hui une renégociation du traité de Maastricht, c'est également le rejet du libéralisme qui les motive plus ou moins consciemment.
Le libéralisme, ce n'est pas ce beau concept de liberté. Bien au contraire, c'est l'écrasante prédominance de la finance sur les valeurs humaines, c'est la remise en cause de principes démocratiques élémentaires au service d'un mécanisme autoritaire et technocratique tourné vers un seul but, le profit, c'est la dure loi du plus fort imposée au plus faible.
Le débat sur la politique sociale européenne n'est donc pas relancé sans raisons en France comme en Europe.
Il est le résultat d'une contestation de plus en plus vive des fondements du traité de Maastricht, contestation exprimée dans les urnes en France, mais aussi en Grande-Bretagne. Il est aussi le résultat des interrogations fortes dans d'autres pays européens, notamment en Allemagne.
L'exigence d'une Europe au service du progrès social, et non pas des financiers, s'est construite sur un constat grave et incontestable : l'Europe d'aujourd'hui, loin de favoriser le respect, voire l'amélioration des droits sociaux, les met en cause ou tend à les supprimer.
Comment faire confiance à cette Europe qui, alors qu'on nous promettait croissance et développement de l'emploi, a produit près de 20 millions de chômeurs et généralise la précarité, pudiquement appelée « flexibilité » ? Aujourd'hui, 50 millions d'Européens sont frappés par la pauvreté.
Nous avons assisté à une véritable prise de conscience européenne de la nécessité d'une autre Europe, qui doit être autre pour être véritablement sociale. L'annonce de la fermeture de l'usine de Vilvorde a été, de ce point de vue, un temps fort dans la prise de conscience de la nécessité de changement.
Cette froide décision a suscité la révolte et la colère de tous ceux qui n'acceptent pas qu'au nom d'intérêts exclusivement financiers la vie de femmes, d'hommes, de familles tout entières soit brisée.
Cette annonce terrible a suscité la réflexion, partout en Europe, sur les gâchis du capitalisme qui, pour favoriser une orientation spéculative de la politique financière de Renault, choisit de détruire l'énergie, la créativité et la dignité humaine. Comment parler de politique sociale européenne si l'on accepte cette fermeture ?
Le maintien du site de Vilvorde aurait une portée symbolique : le choix de la croissance et de l'emploi contre celui de l'austérité et de la spéculation.
Vilvorde, malheureusement, n'est pas le seul exemple de cette politique antisociale qui prévaut aujourd'hui en Europe et qui est impulsée par la monnaie unique, les critères de convergence et le pacte de stabilité.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
Mme Danielle Bidard-Reydet. Peugeot, dès le lendemain des élections législatives, a annoncé la suppression de 2 800 emplois en France. Le groupe suédois Electrolux vient d'annoncer la suppression de 12 000 emplois, alors que, quarante-huit heures plus tard, il informait de l'augmentation de 27 % du cours de son action. Cette année, ce groupe a réalisé 2,6 milliards de francs de bénéfices.
Monsieur le ministre, chaque jour nous confirme le lien entre la mise au chômage de milliers de personnes et l'accroissement des profits. Comment peut-on continuer d'accepter les pleins pouvoirs de dirigeants sur l'avenir de l'entreprise et de ses salariés ?
Nous nous étions prononcés pour l'instauration d'un contrôle non seulement de l'administration mais aussi et surtout des salariés sur les licenciements. Nous avons pris note de l'annonce de M. Jospin d'une nouvelle législation sur ce point. Nous y sommes favorables et nous serons très attentifs à son contenu.
Cette pression du chômage, ce dogme de la réduction du coût du travail favorisent la mise en cause globale des acquis sociaux.
Nous regrettons d'ailleurs que la résolution sur l'emploi adoptée récemment à Amsterdam se situe toujours et pleinement dans cette logique.
M. Santer, président de la Commission européenne, lie l'Europe sociale et la flexibilité. Or, ces concepts sont pour nous antinomiques.
La flexibilité est synonyme de mise en cause du droit à l'emploi à temps plein et d'exploitation renforcée.
Une conception sociale de l'Europe doit être, selon nous, d'améliorer la condition des salariés, et non pas de destructurer progressivement non seulement les conditions de travail, mais aussi le travail. C'est au nom d'une certaine idée de l'égalité que la Commission européenne a tenté de remettre en cause les dispositions de notre législation concernant le travail de nuit des femmes ; il y a déjà été fait allusion.
Une politique sociale européenne, c'est aussi le développement de la protection sociale. Or l'une des conséquences essentielles de la recherche des critères de convergence, c'est la volonté affichée clairement par maintes recommandations de la Commission de Bruxelles de réduire les dépenses de santé.
De même, un récent Livre vert de la Commission relatif au développement des fonds de pensions confirme la volonté de mettre en cause le système de retraite par capitalisation.
Je ne développerai pas ces points précis, car le temps me manque. La politique sociale européenne est directement dépendante de la volonté d'accéder à la monnaie unique et d'appliquer le pacte de stabilité.
Malgré la volonté des peuples, fortement exprimée, de réorienter la construction européenne vers plus de justice sociale, les négociations d'Amsterdam ont abouti à la confirmation du pacte de stabilité.
Nous le regrettons fortement, monsieur le ministre, car il n'y aura pas d'Europe sociale dans le cadre de ce carcan du pacte de stabilité.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Très bien !
Mme Danielle Bidard-Reydet. Le pacte de stabilité, c'est une excroissance de Maastricht qui vise à renforcer l'application des critères de convergence en concrétisant le système des sanctions déjà engagé par le traité lui-même.
Le pacte de stabilité est aussi contradictoire avec l'idée même de relance économique qui seule peut permettre le progrès social. Il s'inscrit dans une logique économique financière et non pas dans celle d'un développement de l'emploi.
Relancer ce défi - celui de l'emploi, celui dont nous parlons tous aujourd'hui - nécessite en Europe comme en France une autre utilisation de l'argent. C'est une question incontournable. Si l'on souhaite honorer nos engagements - et nous le souhaitons, monsieur le ministre, j'en suis persuadé - pour réussir le changement de politique, nous devons sortir de la pensée unique. Nous avons des propositions pour agir en ce sens dans notre pays : baisse de la TVA, redistribution de la fiscalité, accroissement du produit de l'impôt sur les grandes fortunes, taxation des revenus de la spéculation, taxation des délocalisations, et bien d'autres... Nous aurons l'occasion de les présenter et de les soumettre au débat.
Le mouvement social, les diverses prises de position, les fortes manifestations du 10 juin en France, le succès de la marche pour l'emploi à Amsterdam sont révélateurs d'une volonté d'intervenir dans les choix politiques.
Nous apprécions également la réflexion et l'action engagées par de nombreux économistes et syndicalistes qui se sont retrouvés le 22 juin à la Sorbonne pour débattre et proposer pour l'automne des mesures en faveur d'une alternative au libéralisme et pour le renouveau du plein emploi.
Nous serons vigilants pour que le sommet européen prévu sur l'emploi puisse effectivement constituer une véritable nouvelle étape pour l'Europe sociale.
Ce débat intense sur la politique sociale européenne a été porté par les peuples. On ne pourra pas éviter de consulter les Français sur leur avenir européen et sur le passage à la monnaie unique, comme ils le souhaitent. Nous continuons avec eux à vouloir un référendum et j'ai bien cru comprendre que nous n'étions pas les seuls, monsieur le ministre.
M. Emmanuel Hamel. Vous n'êtes pas les seuls, madame.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen sont attachés à la construction d'une Europe du progrès social, de la sécurité et de la paix, à une Europe qui respecte les hommes. Pour cela, justice sociale et démocratie sont intimement liées et notre souveraineté nationale doit être sauvegardée.
C'est bien sur la démocratie, sur l'intervention des peuples, des formations politiques, syndicales et associatives que nous comptons pour rappeler que l'avenir ne se fera pas contre l'homme, mais qu'il se fera pour lui !
Un grand espoir est né, monsieur le ministre. Personne ne nie la difficulté de la tâche ni la complexité de la situation. Ensemble, donnons-nous les moyens efficaces pour réussir. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
M. Pierre Moscovici, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux commencer par vous remercier de votre invitation, remercier le Sénat tout entier et, au premier chef, M. Genton et la délégation du Sénat pour l'Union européenne de m'avoir posé aujourd'hui cette question orale avec débat.
Cette invitation ainsi que votre accueil augurent bien des relations qu'aura ce Gouvernement avec votre délégation et avec la Haute Assemblée tout entière.
M. Fauchon m'a interrogé tout à l'heure sur la nature de mes convictions européennes en rappelant l'action de mon prédécesseur, M. Michel Barnier, que je connais bien. Il a ses convictions, son style ; j'aurai le mien, vous le découvrirez.
Mes convictions sont celles d'un Européen qui est depuis longtemps un militant de l'Europe, d'un socialiste - chacun sait que ce parti a été associé depuis l'origine à la construction européenne - d'un homme qui est né l'année où a été signé le traité de Rome, d'un élu d'une circonscription ouvrière qui voit bien, par rapport à cet enjeu, que les citoyens ont aujourd'hui une attitude à la fois très positive et probablement très exigeante. C'est ainsi que mes convictions s'exprimeront à travers l'action de ce Gouvernement ou, en tout cas, à travers mon action en son sein.
Je me sens en phase avec nombre des appréciations qui ont été exprimées avant moi à cette tribune et qui témoignent de bien d'exigences qui sont aussi les miennes.
Les peuples de notre continent ont sans doute trop longtemps eu le sentiment que l'Europe se bâtissait sans eux et que des approches techniciennes ou exclusivement financières l'emportaient sur la vision politique et la dimension humaine de la construction européenne, qui avaient justement inspiré les pères fondateurs de l'Union européenne. Beaucoup de nos concitoyens sans doute ont encore cette sensation et éprouvent cette réserve. C'est justement le rôle du politique que de faire reculer ce sentiment par l'action et par l'explication, car il est essentiel de convaincre nos concitoyens de tout ce que peut apporter l'Europe.
M. Genton a eu raison de le souligner, les citoyens veulent que les choses changent, que l'Europe place davantage les aspects social et humain au coeur de ses préoccupations et qu'elle mette l'emploi au rang de ses priorités, au moins au même titre que la construction monétaire et que la réduction, certes nécessaire, des déficits publics.
Comment en serait-il autrement dès lors que, comme plusieurs orateurs l'ont rappelé, le chômage frappe dix-huit millions d'Européens et que l'Europe est bien, comme Mme Dieulangard l'a souligné, une Europe du déficit social, une Europe, comme le disait M. Joly, frappée à certains égards de régression et d'impuissance ?
Le Gouvernement partage entièrement cette conception d'une Europe plus sociale et plus humaine, et il s'emploiera à la traduire en actes. Il a d'ailleurs commencé à le faire, comme le prouvent les résultats du Conseil européen d'Amsterdam.
Certes, ceux-ci peuvent paraître insuffisants. Il est vrai qu'ils sont à bien des égards - je reprends là l'expression commune au Président de la République, au Premier ministre et au ministre des affaires étrangères - frustrants, mitigés, et j'ajouterai contrastés.
M. Genton s'interrogeait sur le bilan que l'on pouvait en tirer. S'agissant des aspects institutionnels, ce bilan est décevant, voire inquiétant.
Il est en effet inquiétant que nous n'ayons pu avancer suffisamment pour préparer l'élargissement - des décisions, pourtant nécessaires, sur la repondération des voix ou sur la réduction du nombre de commissaires n'ayant pas été adoptées - même si nous avons progressé s'agissant des coopérations renforcées, coopérations qui seront sans doute un élément positif pour les Etats qui veulent avancer ensemble.
D'autres éléments ont été positifs ; je pense aux approfondissements dans les domaines de l'emploi - j'y reviendrai - de la politique sociale, de la politique étrangère et de sécurité commune, qui devrait pouvoir prendre corps.
Des demandes françaises ont également été satisfaites ; je pense à la reconnaissance du rôle de Strasbourg comme siège du Parlement européen, de la spécificité de nos départements et territoires d'outre-mer, de nos services publics, ainsi que du rôle des parlements nationaux. Ainsi ces derniers seront-ils, demain, associés davantage à la décision européenne. Le Sénat peut, j'en suis certain, s'en réjouir.
De ce bilan contrasté, on pourrait tirer un sentiment quelque peu dubitatif. Il n'en reste pas moins que le nouveau Gouvernement, qui a pris ses fonctions dans des circonstances particulières qu'il n'avait pas provoquées lui-même et, disons-le, dans une certaine urgence, ce Gouvernement, qui n'a pourtant eu finalement que peu de temps depuis sa prise de fonctions pour s'immerger dans les dossiers européens, a pu néanmoins donner au Conseil européen à Amsterdam une tonalité nouvelle dont j'ai la conviction - plusieurs d'entre vous l'ont confirmé - qu'elle est plus proche des aspirations des citoyens européens.
Cela se traduit par le fait que l'Union économique et monétaire commence à se rééquilibrer et que le Conseil européen d'Amsterdam a remis l'emploi au coeur des priorités de la construction européenne.
Cela se manifeste, au premier chef, par une résolution sur la croissance et sur l'emploi qui a été adoptée en même temps - je réponds ainsi à M. Schumann - que le pacte de stabilité. Ce résultat a été atteint, nul n'en doute, grâce à l'action déterminée du gouvernement français. En effet, à l'ouverture du sommet d'Amsterdam, seule la question de la discipline budgétaire était initialement prévue, en matière économique et sociale, à l'ordre du jour. Chacun l'a constaté : s'il n'y avait pas eu de changement de majorité, on n'aurait parlé que de cette question. Le président Jacques Chirac lui-même a souligné à Amsterdam que, de ce point de vue-là, il lui semblait que le changement de gouvernement avait été une bonne chose. C'est dire qu'une inflexion positive a été marquée !
Le nouveau gouvernement, qui en avait discuté la veille, ou presque, avec le gouvernement allemand à l'occasion du sommet de Poitiers, a obtenu que soient mises sur le même plan politique la stabilité budgétaire et la lutte pour l'emploi. Je crois que c'est un succès important.
On a pu critiquer ici ou là la méthode - M. Bordas y faisait allusion - mais nous avons réussi à faire comprendre à nos partenaires, et d'abord aux Allemands, que notre préoccupation d'infléchir la construction européenne dans le sens de la croissance et de l'emploi était une préoccupation forte. Nous avons réussi non seulement à faire comprendre cette préoccupation, mais aussi à la faire partager par beaucoup de gouvernements et, j'en suis sûr, au-delà des gouvernements, par bien des peuples.
Cette résolution, qui doit être placée sur le même plan que le pacte de stabilité, permet désormais à l'Europe de marcher sur deux pieds, car ce sont - je réponds à la question de M. Schumann - deux instruments complémentaires et non substituables.
Vous avez ouvert sur l'euro et sur le pacte de stabilité une discussion importante, sur laquelle je voudrais vous donner mon sentiment, sans me permettre de vous contredire en tout, car il est des éléments de votre intervention que je partage.
S'agissant de l'euro, je ne puis adhérer entièrement à votre vision. Le traité de Maastricht a bien prévu une sorte de similitude entre l'euro, vers lequel nous allons, et la monnaie unique.
En effet, dans l'article 109 J de ce traité, il est précisé que si la décision avait été prise en 1996, la monnaie unique aurait juste rassemblé la moitié des Etats. A l'origine, il n'était donc pas prévu - c'est peut-être dommage, car je suis, moi aussi, favorable à une monnaie unique pour l'Europe entière - que l'euro, la monnaie unique, concerne tous les Etats.
A l'inverse de votre argument, si l'euro est décidé en 1998, il n'est même plus besoin de cette moitié d'Etats membres. Cela figure dans le traité. Deux Etats pourraient décider d'adopter cette monnaie unique qui, reconnaissons-le, dans ce cas de figure-là, ne mériterait en aucun cas ce qualificatif d'« unique ».
S'agissant des dévaluations compétitives, il y aura, à côté de la monnaie unique, un SME bis, et les articles du traité prévoient une convergence forte.
Sur l'euro, je veux le redire à cette tribune, l'engagement du Gouvernement est fort : nous voulons faire l'euro, faire la monnaie unique, et nous voulons le faire à temps, car j'ai la conviction qu'un report aurait des conséquences dramatiques et signifierait, de fait, un renoncement.
Nous acceptons le traité tel qu'il a été voté par les Français, à une courte majorité, mais il a été voté.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Donc 3 % de déficit ?
M. Pierre Moscovici, ministre délégué. Je vais y venir, madame.
M. Emmanuel Hamel. Il ne serait plus adopté aujourd'hui !
M. Pierre Moscovici, ministre délégué. Le peuple a déjà tranché, et il n'y a pas lieu de le consulter à nouveau aujourd'hui sur cette question qui risquerait, comme hier, de le diviser, même si - M. Fabius d'ailleurs l'a suggéré voilà quelque temps - le Parlement pouvait être consulté le moment venu.
S'agissant du pacte de stabilité, en revanche, il est un point indubitable dans l'argumentation de M. Schumann : ce pacte-là n'avait pas été prévu par le traité.
M. Maurice Schumann. Ah !
M. Pierre Moscovici, ministre délégué. C'est d'ailleurs au nom de cette réalité que, pendant la campagne électorale, M. Lionel Jospin avait exprimé des réticences importantes sur le pacte de stabilité signé à Dublin.
Monsieur Schumann, vous avez été la voix de la France, et cela vous acquiert, pour l'éternité, le respect de nos concitoyens : je le dis avec une très profonde sincérité.
La voix de la France, aujourd'hui, dans notre système qui est celui de la Ve République, système auquel vous avez adhéré, c'est celle du Président de la République. Or la parole de la France a été donnée à Dublin. Il s'agit donc d'un engagement international signé par le précédent gouvernement et par le Président de la République, engagement au nom de la France et avec nos partenaires étrangers qui nous a fait mesurer la responsabilité qui est la nôtre.
Croyez que renoncer à la parole de la France en période de cohabitation aurait eu des implications extraordinairement fortes dans nos relations avec nos partenaires, et d'abord avec les Allemands, on a rappelé ici l'importance de cette relation.
C'est pourquoi nous n'avons pas entendu remettre en cause le pacte de stabilité, en demander la renégociation ou le report ; nous avons souhaité le compléter, y ajouter une nouvelle dimension, l'infléchir : tel est le sens de la résolution qui a été adoptée.
Que nul, en effet, ne doute de notre conviction politique ! Si, pour ce Gouvernement, la stabilité monétaire et financière peut constituer l'une des conditions d'un développement durable de l'activité économique et de l'emploi, elle n'est pas une fin en soi ; il faut des compléments politiques et économiques extraordinairement puissants pour éviter que cette logique ne finisse par se tourner contre les peuples.
Dans les mois qui viennent, la France ne ménagera pas ses efforts pour faire vivre ce texte et pour en exploiter toutes les potentialités. « Déclaration d'intention ! », disiez-vous tout à l'heure. Peut-être ! mais, dans ce genre, rappelez-vous, justement, le mémorandum social de MM. Juppé et Chirac, que vous évoquiez et dont je regrette que la France n'ait jamais réussi à le faire examiner par les Quinze.
Cependant, les déclarations d'intention ont aussi du bon, dès lors qu'elles sont également des déclarations politiques. Cette résolution sur la croissance et l'emploi en est une au sens noble, au sens fort du terme, car elle entraînera des conséquences. Lesquelles ?
Ce texte, qui ne correspond pas tout à fait à ce qu'étaient les exigences françaises initiales - je réponds là à une question posée par plusieurs d'entre vous - se traduira par des mesures concrètes pour l'emploi, grâce au renforcement de l'action de la Banque européenne d'investissement en faveur des projets d'infrastructures, de l'innovation technologique dans les PME, dans les domaines de l'éducation, de la santé et de l'environnement urbain, grâce à l'adoption, demain, de lignes directrices et à la possibilité d'adresser des recommandations particulières à chacun des Etats membres.
J'y reviendrai, ce n'est pour nous qu'un début, mais il doit entraîner des conséquences concrètes.
Le deuxième élément que je voulais souligner au titre du rééquilibrage de l'Union économique et monétaire, c'est l'insertion d'un nouveau chapitre consacré à l'emploi dans le traité.
Ce chapitre pose les bases d'une meilleure coordination des politiques nationales contre le chômage avec, en particulier, la création d'un comité de l'emploi qui travaillera en étroite coordination avec le comité de politique économique. Ce comité permettra d'éviter par exemple que des aides publiques pour l'emploi servent à financer des délocalisations à l'intérieur de l'Union.
Par ailleurs, des projets pilotes seront financés par l'Union dans le cadre des fonds communautaires existants.
Ces mécanismes seront mis en oeuvre immédiatement - et c'est important - sans même attendre la ratification du traité.
Ce matin, au conseil « Affaires générales » qui se tenait à Luxembourg, nous avons progressé en ce sens, même s'il faudra examiner les modalités juridiques d'application du texte.
Enfin - troisième point - une réunion extraordinaire du Conseil européen consacrée à l'emploi a été décidée, sur l'initiative de la France. Elle se tiendra sous la présidence luxembourgeoise à l'automne prochain, peut-être en octobre, plus sûrement en novembre.
Que peut-on en attendre ? Je ne suis pas en mesure aujourd'hui, bien évidemment, de vous dire très exactement ce que le Gouvernement inscrira dans ses propositions, mais je peux vous donner quelques éléments d'éclaircissement sur la démarche que nous allons adopter.
La Commission a mis en place les outils nécessaires d'analyse et de suivi pour comparer les politiques de l'emploi menées par les différents Etats membres. Il s'agira pour nous d'en tirer des conclusions opérationnelles.
Ce sommet pourra également permettre de nourrir le dialogue social sur le plan européen, par exemple dans le prolongement du récent accord entre partenaires sociaux intervenu sur la question du travail à temps partiel.
Il pourrait être également envisagé l'organisation de rencontres tripartites au niveau européen sur certains thèmes liés à l'emploi.
Notre démarche plus spécifique, je tiens à le souligner, comme j'ai été amené à le rappeler ce matin-même au conseil « Affaires générales » - consiste à marquer l'extrême importance qu'attache la France à ce Conseil européen consacré à l'emploi.
On ne devra pas y retrouver les sempiternelles petites phrases générales autour de tel ou tel mot soigneusement pesé au trébuchet, qu'il s'agisse de « l'adaptabilité », de « la flexibilité » ou de « l'employabilité ». Si tel était le résultat, il serait décevant pour tous.
Le Conseil doit déboucher sur des mesures concrètes, tangibles et effectives. Je l'ai dit avec fermeté ce matin : le Gouvernement français demande que chaque nation fasse des propositions qui répondent à ses besoins. Nous présenterons les nôtres, et ce dans des délais très brefs. Nous souhaitons que la préparation de ce Conseil obéisse à des modalités originales et qu'il ne s'agisse pas d'un rituel de plus.
A côté de ces avancées sociales, je veux également souligner l'importance donnée, dans la résolution du Conseil d'Amsterdam à la coordination des politiques économiques entre Etats membres. L'Union économique et monétaire ne repose pas seulement sur la monnaie ; elle vise aussi la solidarité économique entre les Etats. Elle est l'expression d'une volonté commune de favoriser la croissance, de maintenir l'emploi au premier plan des préoccupations politiques. Ainsi, la coordination des politiques économiques, le renforcement de ce qu'on appelle le pilier économique sont également inscrits en filigrane dans cette résolution sur la croissance et l'emploi.
Sur ce point, sachez que le Gouvernement considère le compromis d'Amsterdam non pas comme un aboutissement mais comme un point de départ. Non, monsieur Joly, nous n'avons évidemment pas rempli intégralement à Amsterdam, hélas ! l'objectif que se fixait M. Lionel Jospin de rééquilibrer la construction économique et monétaire.
Nous avons ouvert une porte, une brèche dans un certain mur - peut-être celui de l'orthodoxie - mais cela ne nous dispense pas d'aller beaucoup plus loin.
Cela suppose évidemment de dégager des moyens financiers en procédant éventuellement par redéploiements. Or certains de nos partenaires y sont opposés.
Il faudra renforcer le pilier économique pour aller vers ce pôle économique - j'évite à dessein l'expression de « gouvernement économique » qui semble profondément choquer certains de nos partenaires. La mise en oeuvre d'une politique volontariste pour la croissance et pour l'emploi s'impose.
M. Jacques Genton m'a interrogé sur les rendez-vous futurs. L'un des principaux sera pour nous ce Conseil européen de Luxembourg consacré à l'emploi.
Par ailleurs, nous voulons que la logique des grands travaux, engagée à Essen mais jamais consacrée par la suite, trouve un prolongement.
Sur ce sujet, je répéterai les propos tenus ici même tout à l'heure par M. le Premier ministre : il n'y a pas contradiction entre l'arrêt de certains grands travaux et la volonté de poursuivre des grands travaux en Europe.
L'élu franc-comtois que je suis - je m'adresse à d'autres élus francs-comtois ici présents, M. Dreyfus-Schmidt ou M. Joly - sait que, si nous avons arrêté la construction du grand canal Rhin-Rhône, ce n'est pas en raison d'une hostilité quelconque à l'égard d'un secteur économique comme le bâtiment ou les travaux publics. C'est pour des raisons écologiques, pour des raisons économiques, pour des raisons financières. Croyez-moi - beaucoup d'entre vous le savent bien - il fallait le faire...
M. Emmanuel Hamel. Il fallait faire le canal, très bien ! (Sourires.)
M. Pierre Moscovici, ministre délégué. ... il fallait arrêter la construction du canal ; c'est une excellente décision.
Quant à Superphénix, on a également rappelé ici tout à l'heure pourquoi cette fermeture a été décidée et comment elle serait opérée. Il y a tellement d'autres grands travaux à entreprendre ! On a parlé du TGV Est, on pourrait parler du TGV Rhin-Rhône.
Croyez-le, le Gouvernement n'a aucunement la volonté d'arrêter les grands travaux, il a la volonté de les réorienter. Tel est le sens de notre action.
Il est un autre point que je voudrais souligner à propos de l'Europe sociale, à savoir que le contenu social du nouveau traité a été sensiblement étoffé, là encore largement sous l'impulsion de la France.
Madame Bidard-Reydet, vous avez évoqué l'affaire Renault-Vilvorde, à laquelle je suis particulièrement sensible, comme je le suis d'ailleurs au plan social de Peugeot, étant encore pour quelques jours député de la quatrième circonscription du Doubs et demeurant conseiller général de Sochaux, là où seront supprimés 1 500 emplois.
Cette affaire Renault-Vilvorde, ce plan social ont justement et cruellement mis en lumière les insuffisances sociales de la construction européenne, qui ont rendu possible que soit annoncée la décision de fermer un important site de production sans aucune concertation préalable. Vous savez que le Gouvernement a décidé de convaincre l'entreprise Renault, qui l'a accepté, de mandater un expert indépendant pour étudier pendant trois semaines la situation de l'usine. La décision finale appartient, bien entendu, au conseil d'administration de Renault, mais le Gouvernement voulait être sûr que toutes les solutions avaient été examinées en concertation avec les intéressés.
Mais au-delà, il est certain qu'il faut absolument remédier à ces insuffisances. Dans le cadre du prolongement du sommet d'Amsterdam, des travaux sur l'amélioration du dialogue social ainsi que sur l'information et sur la consultation des travailleurs sont déjà en cours. Je crois qu'ils inspireront désormais fortement la priorité sociale du traité.
Il faudra aller plus loin encore et notamment examiner les propositions du commissaire M. Van Miert sur une soumission des aides non plus à telle ou telle logique de concurrence mais à la situation de l'emploi. Ce sera un moment important.
Sur le contenu social du traité, je tiens à souligner encore trois apports nouveaux avant de terminer.
Premier apport : le nouveau gouvernement du Royaume-Uni a adhéré au protocole social annexé au traité, ce qui a permis l'introduction du protocole lui-même dans le traité. Je me réjouis, comme M. Joly, de cette décision qui prouve le rôle positif non seulement du nouveau gouvernement français, mais aussi du gouvernement britannique. Je veux être optimiste pour ma part sur le rôle que peut jouer demain la Grande-Bretagne en Europe.
Comme tout le monde, au Conseil européen d'Amsterdam, j'ai pu observer la persistance de comportements anciens mais aussi l'émergence de comportements nouveaux qui, à mon sens, montrent que l'évolution va bien dans le sens d'une importance accrue de l'Europe en Grande-Bretagne.
Je ne voudrais pas à mon tour évoquer les relations entre MM. Tony Blair et Lionel Jospin, mais nous pouvons être sûrs qu'il s'agit de deux amis qui se parlent et qui sauront sans doute trouver un langage commun.
A partir de cette intégration du protocole dans le traité, les Quinze pourront définir, le plus souvent à la majorité qualifiée - et cela aussi est important - un droit européen relatif aux conditions de travail, d'information, de consultation des salariés de l'entreprise.
Ce dispositif constitue une protection essentielle contre certains risques de dumping social.
Le Conseil européen s'est aussi prononcé avec fermeté en faveur du dialogue social et de l'application intégrale du droit communautaire lors de processus de restructuration dans les entreprises. Il conforte là aussi, me semble-t-il, l'attitude du nouveau gouvernement français à l'égard du projet de fermeture du site de Vilvorde.
Mme Dieulangard a souligné le caractère un peu laborieux du « tango » social en Europe. J'espère qu'avec l'intégration du protocole social dans le traité cet aspect social prendra le rythme lent, mais harmonieux, de la danse sud-américaine que nous aimons tous. (Sourires.)
Deuxième apport : sur l'initiative de la France, le traité mentionne désormais la notion de service public ; un nouvel article 7 D du traité fera référence à la place des services d'intérêt général parmi les valeurs communes de l'Union.
Même si la notion de service public n'est encore évoquée qu'au titre de la réalisation du marché intérieur, ce qui ne correspond pas entièrement, bien sûr, à notre approche, cette référence explicite pourra servir de rempart, demain, contre une déréglementation imposée au nom du droit de la concurrence. C'est, je le souligne, avec les coopérations renforcées, sans doute l'un des acquis les plus importants de la CIG.
Troisième et dernier apport du Conseil d'Amsterdam en matière sociale : le nouveau traité charge la Communauté de promouvoir un niveau élevé d'emplois et de protection sociale ; il consacre - on en a parlé tout à l'heure - l'égalité entre les hommes et les femmes et il affirme son attachement aux valeurs démocratiques. Ces objectifs s'opposent clairement aux tentations de régler tous les problèmes par la concurrence, par la flexibilité.
De même, le renforcement des dispositions relatives à la santé et à l'environnement vont dans le sens d'une meilleure prise en compte par l'Europe des préoccupations des citoyens.
Je voudrais enfin citer l'accord récemment intervenu sur l'Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes ou encore la déclaration du Conseil sur l'interdiction du clonage humain. Ces déclarations et ces accords s'inscrivent également, à des degrés différents, dans la tradition et la vocation humanistes de l'Europe.
J'en viens à ma conclusion.
Les orientations qui se sont dégagées à Amsterdam, qui rejoignent certaines de vos préoccupations, qui n'y répondent pas bien évidemment - pas plus qu'elles ne répondent aux nôtres - doivent maintenant être pleinement mises en oeuvre et amplifiées pour se traduire par des améliorations tangibles dans le vie quotidienne des citoyens et des salariés.
Je voudrais vous dire que telle est la ferme intention du Gouvernement français.
Nous avons obtenu à Amsterdam une première inflexion, souhaitée, dans les choix des priorités de l'Union européenne. Il faudra veiller, à l'avenir, par la concertation mais aussi par la volonté politique à faire en sorte que les décisions d'Amsterdam constituent bien un point de départ et, je le répète, qu'elles ne soient pas un aboutissement, qu'elles ne se limitent pas à quelques lignes dans un texte resté sans suite. L'Union doit aller plus loin encore vers des mesures concrètes et efficaces en faveur de l'emploi. C'est, je le répète, l'enjeu majeur du Conseil européen extraordinaire de Luxembourg, qui sera consacré à l'emploi et auquel nous allons maintenant vouer tous nos efforts.
M. Maurice Schumann. Ah !
M. Pierre Moscovici, ministre délégué. Je ne doute pas que, avec le soutien de la représentation nationale, avec l'attention vigilante - et j'ai compris qu'elle le serait - du Sénat mais aussi, je l'espère, avec son concours actif, nous atteindrons le but que nous nous sommes fixé et que la France pourra enfin donner de la substance à une grande ambition, celle de l'Europe des citoyens, celle de l'Europe sociale, celle de l'Europe de l'emploi. (Applaudissements sur les travées socialistes. - M. Joly applaudit également.)
M. Maurice Schumann. Je demande la parole.
M. le président. La parole est M. Schumann.
M. Maurice Schumann. Je vous remercie de vos réponses, monsieur le ministre, mais elles me paraissent appeler deux observations.
Tout d'abord, s'agissant de l'euro, je ne me suis pas référé à la lettre du traité. Je vous ai simplement dit que, comme le prouvaient tous les discours prononcés à l'époque, notamment par le Président de la République, on avait expliqué aux Français que le résultat de la monnaie unique, étendue à l'ensemble des quinze Etats signataires de l'acte constitutif de l'Union européenne, nous mettrait définitivement à l'abri des dévaluations compétitives.
Il est évident que, à partir du moment où nous sommes en présence d'une version mutilée de l'Union européenne, le résultat ne peut pas être le même et que la promesse ne peut pas être tenue.
Mais je ne m'apesantis pas sur cette partie, malgré tout secondaire, de mon argumentation.
Ma seconde observation porte sur le pacte de stabilité. Je ne vous ai nullement reproché de l'avoir signé : c'était votre droit le plus strict. Je ne reproche nullement au gouvernement précédent de l'avoir approuvé à Dublin, même si j'y suis personnellement hostile, car, là encore, c'était son droit.
En revanche, dès lors qu'il s'agit, comme vous l'avez reconnu vous-même, non pas du traité lui-même mais d'un additif au traité, ce n'est pas le droit du Gouvernement de se passer de l'approbation du peuple, soit du peuple dans son ensemble réuni dans ses comices, soit de la représentation nationale constituée par les deux chambres du Parlement.
Je vous réitère donc ma question : puisqu'il est impossible de se soustraire à cette alternative, quelle branche choisissez-vous ? Les Français sont en droit d'obtenir une réponse de votre part et d'avoir le dernier mot.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué. Monsieur Schumann, s'agissant de l'euro, je crois que nous pouvons être en accord : ainsi que M. Lionel Jospin l'a répété pendant la campagne électorale, nous sommes favorables à une monnaie unique pour l'Europe tout entière.
M. Maurice Schumann. Voilà !
M. Pierre Moscovici, ministre délégué. Nous souhaitons notamment, cela a été affirmé à plusieurs reprises, que l'Italie puisse être partie prenante de cette Europe monétaire dès la mise en vigueur de l'euro.
M. Maurice Schumann. Voilà !
M. Jacques Genton, représentant de la délégation du Sénat pour l'Union européenne. Très bien !
M. Pierre Moscovici, ministre délégué. C'est ainsi et seulement ainsi que l'on pourra effectivement éviter toute dévaluation compétitive. Mon argument de tout à l'heure était, vous l'avez compris, de nature plus juridique.
En ce qui concerne le pacte de stabilité, on peut discuter quant à sa nature juridique. Selon moi, ce n'est pas un additif au traité, en tout cas pas formellement, mais il est clair qu'il prévoit des dispositions qui entreront en vigueur postérieurement à la décision d'entrer dans la monnaie unique. Le pacte de stabilité s'appliquera dans la mesure où nous serons dans la troisième phase, c'est-à-dire la phase de l'euro.
Eh bien, je le répète, à ce moment-là, on pourrait concevoir une consultation des Français. Sous quelle forme ? Il est peut-être tôt pour le dire. J'ai indiqué tout à l'heure que, à mon sens, il serait logique de consulter la représentation nationale : par ce biais, le peuple français, que vous représentez, serait associé à ce débat sur l'euro et, donc, sur le pacte de stabilité.
M. le président. Le débat est clos.

6

DÉPÔT DE PROJETS DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation du protocole additionnel à la convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales (ensemble trois déclarations).
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 371, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant la ratification de la convention relative à l'aide alimentaire de 1995.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 372, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

7

DÉPÔT
DE PROPOSITIONS DE LOI

M. le président. J'ai reçu de MM. Jean-Claude Carle, Nicolas About, Jean-Paul Amoudry, René Ballayer, Bernard Barbier, Jean Bizet, Jean Boyer, Jacques Braconnier, Jacques Chaumont, Marcel-Pierre Cleach, Jean Clouet, Charles-Henri de Cossé-Brissac, Philippe Darniche, Jacques-Richard Delong, Fernand Demilly, Marcel Deneux, Daniel Eckenspieller, André Egu, Jean-Paul Emin, Paul Girod, Daniel Goulet, Alain Gournac, Georges Gruillot, Emmanuel Hamel, Bernard Hugo, Dominique Leclerc, Edouard Le Jeune, Roland du Luart, Kléber Malécot, Serge Mathieu, Louis Moinard, Georges Mouly, Jean Pépin, Bernard Plasait, Alain Pluchet, Guy Poirieux, Jean Puech, François Trucy et Jacques Valade une proposition de loi relative à la négociation collective dans les PME-PMI.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 373, distribuée et renvoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de MM. Georges Mouly, Nicolas About, Michel Alloncle, Louis Althapé, Alphonse Arzel, José Balarello, Bernard Barraux, Bernard Barbier, Henri Belcour, Jean Besson, Jacques Bimbenet, Christian Bonnet, James Bordas, André Boyer, Jean Boyer, Louis Boyer, Mme Paulette Brisepierre, MM. Guy Cabanel, Jean-Claude Carle, Charles-Henri de Cossé-Brissac, Marcel-Pierre Cleach, Jean Delaneau, Ambroise Dupont, Daniel Eckenspieller, Jean-Paul Emorine, François Gerbaud, Paul Girod, Daniel Goulet, Emmanuel Hamel, Claude Huriet, Roger Husson, Pierre Jeambrun, Bernard Joly, André Jourdain, Alain Joyandet, Jean-François Le Grand, Edouard Le Jeune, François Lesein, Roland du Luart, Serge Mathieu, Louis Mercier, Philippe Nachbar, Jacques Oudin, Michel Pelchat, Alain Peyrefitte, Régis Ploton, Alain Pluchet, Henri de Raincourt, Roger Rigaudière, Guy Robert, Jean-Jacques Robert, Jacques Rocca-Serra, Maurice Schumann, Bernard Seillier, Raymond Soucaret, Louis Souvet et Alain Vasselle, une proposition de loi visant à étendre aux centres de soins infirmiers gérés par la Mutualité sociale agricole la subvention prévue à l'article L. 162-32 du code de la sécurité sociale.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 377, distribuée et renvoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

8

RETRAIT
D'UNE PROPOSITION DE LOI

M. le président. J'ai reçu une lettre par laquelle M. Georges Mouly déclare retirer la proposition de loi visant à étendre aux centres de santé gérés par la Mutualité sociale agricole la subvention prévue à l'article L. 162-32 du code de la sécurité sociale (n° 500, 1996-1997) qu'il avait déposé avec plusieurs de ses collègues au cours de la séance du 27 juin 1996.
Acte est donné de ce retrait.

9

DÉPÔT DE PROPOSITIONS
D'ACTE COMMUNAUTAIRE

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- communication de la Commission concernant un programme d'action communautaire relatif aux maladies liées à la pollution dans le cadre de l'action dans le domaine de la santé publique. Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil adoptant un programme d'action communautaire 1999-2003 relatif aux maladies liées à la pollution, dans le cadre de l'action dans le domaine de la santé publique.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-880 et distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition de règlement CE du Conseil modifiant le règlement CEE n° 822-87 portant organisation commune du marché viti-vinicole.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-881 et distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- projet d'état prévisionnel pour l'exercice 1998 (volume 1 - Documentation technique).
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-882 et distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- projet d'état prévisionnel pour l'exercice 1998 (volume 2 - Documentation technique).
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-883 et distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition de règlement (CE) du Conseil portant adaptation des mesures autonomes et transitoires pour les accords d'échanges préférentiels conclus avec la Pologne, la Hongrie, la Slovaquie, la République tchèque, la Roumanie et la Bulgarie en ce qui concerne certains produits agricoles transformés.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-884 et distribuée.

10

DÉPO^T DE RAPPORTS

M. le président. J'ai reçu de M. Hubert Durand-Chastel un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi autorisant la ratification de la révision de la convention internationale pour la protection des obtentions végétales (n° 144, 1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 369 et distribué.
J'ai reçu de M. Lucien Lanier un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi organique, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la fiscalité applicable en Polynésie française (n° 261, 1996-1997).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 370 et distribué.

11

DÉPÔT
DE RAPPORTS D'INFORMATION

M. le président. J'ai reçu de M. Francis Grignon un rapport d'information fait au nom de la commission des affaires et du Plan à la suite d'une mission effectuée aux Etats-Unis, sur les enseignements à tirer pour l'aide aux petites et moyennes entreprises françaises du rôle joué par la Small Business Administration aux Etats-Unis.
Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 374 et distribué.
J'ai reçu de MM. Jacques Genton, Christian de La Malène, Mme Danièle Pourtaud, un rapport d'information fait au nom de la délégation du Sénat pour l'Union européenne sur la XVIe Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires qui s'est tenue à La Haye les 9 et 10 juin 1997.
Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 375 et distribué.
J'ai reçu de M. Jacques Genton un rapport d'information fait au nom de la délégation du Sénat pour l'Union européenne sur les activités de la délégation : suivi de la Conférence intergouvernementale, questions économiques et financières, examen des propositions d'acte communautaire (mars-mai 1997).
Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 376 et distribué.

12

AJOURNEMENT DU SÉNAT

M. le président. Mes chers collègues, je constate que le Sénat a terminé l'examen des questions qui étaient inscrites à son ordre du jour.
Aucune nouvelle demande d'inscription à l'ordre du jour n'est présentée par le Gouvernement.
Dans ces conditions, le Sénat voudra sans doute s'ajourner.
Je vous rappelle qu'en application de l'article 28, premier alinéa, de la Constitution, la session ordinaire de 1996-1997 prendra fin le dernier jour ouvrable de juin, soit le lundi 30 juin 1997. La clôture de la session sera constatée par une communication qui sera publiée au Journal officiel.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures vingt.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





COMMISSIONS MIXTES PARITAIRES

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI RELATIF A` L'INFORMATION ET A` LA CONSULTATION DES SALARIÉS DANS LES ENTREPRISES ET LES GROUPES D'ENTREPRISES DE DIMENSION COMMUNAUTAIRE AINSI QU'AU DÉVELOPPEMENT DE LA NÉGOCIATION COLLECTIVE

Composition de la commission

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le jeudi 3 octobre 1996 et par le Sénat dans sa séance du même jour, cette commission est ainsi composée :

Députés

Titulaires. - M. Bruno Bourg-Broc, Mme Nicole Catala, MM. Yves Van Haecke, Léonce Deprez, Yves Bur, Michel Dessaint, Jean-Jacques Filleul.
Suppléants. - MM. Jean-Yves Chamard, Jean-Paul Anciaux, Jean-Bernard Raimond, Germain Gengenwin, Francisque Perrut, Michel Berson, Maxime Gremetz.

Sénateurs

Titulaires. - MM. Jean-Pierre Fourcade, Louis Souvet, Jean Madelain, Jacques Bimbenet, André Jourdain, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, M. Guy Fischer.
Suppléants. - M. Jean Chérioux, Mme Michelle Demessine, MM. Charles Descours, Roland Huguet, Claude Huriet, Georges Mouly, Bernard Seillier.

Nomination du bureau

Dans sa séance du mercredi 9 octobre 1996, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Bruno Bourg-Broc.
Vice-président : M. Jacques Bimbenet.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale : M. Yves Bur ;
- au Sénat : M. Louis Souvet.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI RELATIF A` LA MISE EN OEUVRE DU PACTE DE RELANCE POUR LA VILLE

Composition de la commission

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mardi 15 octobre 1996 et par le Sénat dans sa séance du jeudi 10 octobre 1996, cette commission est ainsi composée :

Députés

Titulaires. - MM. Bruno Bourg-Broc, Pierre Bédier, François Grosdidier, Pierre Cardo, Rudy Salles, Michel Jacquemin, Laurent Cathala.
Suppléants. - MM. Gérard Hamel, Claude Demassieux, Jean-François Copé, Franck Thomas-Richard, Didier Bariani, Bernard Derosier, André Gérin.

Sénateurs

Titulaires. - MM. Jean-Pierre Fourcade, Gérard Larcher, Serge Franchis, Paul Girod, Philippe Marini, Alain Richard, Guy Fischer,
Suppléants. - José Balarello, Dominique Braye, Gérard Delfau, André Diligent, Alain Dufaut, Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis, M. Robert-Paul Vigouroux.

Nomination du bureau

Dans sa séance du jeudi 17 octobre 1996, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Bruno Bourg-Broc.
Vice-président : M. Jean-Pierre Fourcade.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale : M. Pierre Bédier ;

- au Sénat : M. Gérard Larcher.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSERUN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSIONDU PROJET DE LOI RELATIF A` LA DÉTENTION PROVISOIRE

Composition de la commission

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le vendredi 18 octobre 1996 et par le Sénat dans sa séance du mardi 29 octobre 1996, cette commission est ainsi composée :

Députés

Titulaires . - MM. Pierre Mazeaud, Philippe Houillon, Raoul Béteille, Jacques Limouzy, Léonce Deprez, Xavier de Roux, Jacques Floch.
Suppléants . - MM. Marcel Porcher, Alain Marsaud, Michel Hunault, Daniel Picotin, Jean-Pierre Philibert, Mme Frédérique Bredin, M. Jacques Brunhes.

Sénateurs

Titulaires . - MM. Jacques Larché, Georges Othily, Pierre Fauchon, Maurice Ulrich, Michel Rufin, Michel Dreyfus-Schmidt, Mme Nicole Borvo.
Suppléants . - MM. Robert Badinter, Jean-Patrick Courtois, Luc Dejoie, Paul Girod, Jean-Jacques Hyest, Charles Jolibois, Jacques Mahéas.

Nomination du bureau

Dans sa séance du jeudi 31 octobre 1996, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Jacques Larché.
Vice-président : M. Xavier de Roux.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale : M. Philippe Houillon ;

- au Sénat : M. Georges Othily.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 1997

Composition de la commission

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le vendredi 15 novembre 1996 et par le Sénat dans sa séance du jeudi 14 novembre 1996, cette commission est ainsi composée :

Députés

Titulaires . - MM. Bruno Bourg-Broc, Bernard Accoyer, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, MM. Jean-Luc Préel, Charles de Courson, Denis Jacquat, Claude Bartolone.
Suppléants . - MM. Philippe Auberger, Jean-Yves Chamard, Jean-Michel Dubernard, Germain Gengenwin, Jean-Pierre Foucher, Julien Dray, Maxime Gremetz.

Sénateurs

Titulaires . - MM. Jean-Pierre Fourcade, Charles Descours, Jacques Machet, Alain Vasselle, Jacques Oudin, François Autain, Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis.
Suppléants . - MM. Jacques Bimbenet, Jean Chérioux, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Claude Huriet, Dominique Leclerc, Bernard Seillier.

Nomination du bureau

Dans sa séance du mardi 19 novembre 1996, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Jean-Pierre Fourcade.
Vice-président : M. Denis Jacquat.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale : M. Bruno Bourg-Broc ;

- au Sénat : M. Charles Descours.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI PORTANT DIVERSES DISPOSITIONS RELATIVES AUX MESURES EN FAVEUR DU PERSONNEL MILITAIRE DANS LE CADRE DE LA PROFESSIONNALISATION DES ARMÉES

Composition de la commission

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le jeudi 28 novembre 1996 et par le Sénat, dans sa séance du mardi 19 novembre 1996, cette commission est ainsi composée :

Députés

Titulaires. - MM. Jacques Boyon, Michel Voisin, Charles Cova, René Galy-Dejean, Guy Teissier, Pierre Favre, Paul Quilès.
Suppléants. - MM. Thierry Mariani, Bertrand Cousin, Gilbert Meyer, Antoine Carré, Michel Meylan, Didier Boulaud, Paul Mercieca.

Sénateurs

Titulaires. - MM. Xavier de Villepin, Nicolas About, Michel Caldaguès, Serge Vinçon, Guy Robert, André Rouvière, Jean-Luc Bécart.
Suppléants. - MM. Didier Borotra, André Boyer, Jean Clouet, Claude Estier, Jean Faure, Daniel Goulet, Maurice Lombard.

Nomination du bureau

Dans sa séance du mardi 3 décembre 1996, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Jacques Boyon.
Vice-président : M. Xavier de Villepin.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale : M. Michel Voisin ;

- au Sénat : M. Nicolas About.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI SUR L'AIR ET L'UTILISATION RATIONNELLE DE L'ÉNERGIE

Composition de la commission

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le jeudi 28 novembre 1996 et par le Sénat, dans sa séance du lundi 25 novembre 1996, cette commission est ainsi composée :

Députés

Titulaires. - MM. François-Michel Gonnot, Jacques Vernier, Eric Doligé, Philippe Legras, Jean-François Mattei, Pierre Albertini, Christian Bataille.
Suppléants. - MM. Jean Tiberi, François Grosdidier, Marc Fraysse, Gérard Voisin, Patrick Trémège, Mme Ségolène Royal, M. Jean-Pierre Brard.

Sénateurs

Titulaires. - MM. Jean François-Poncet, Philippe François, Philippe Adnot, Pierre Hérisson, Bernard Hugo, René Rouquet, Félix Leyzour.
Suppléants. - M. Jean Besson, Mme Anne Heinis, MM. Jean Huchon, Jean-François Le Grand, Louis Minetti, Alain Pluchet, Michel Souplet.

Nomination du bureau

Dans sa séance du mercredi 4 décembre 1996, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Jean François-Poncet.
Vice-président : M. François-Michel Gonnot.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale : M. Jacques Vernier.

- au Sénat : M. Philippe François.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI RELATIF À L'EMPLOI DANS LA FONCTION PUBLIQUE ET À DIVERSES MESURES D'ORDRE STATUTAIRE

Composition de la commission

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le jeudi 5 décembre 1996 et par le Sénat dans sa séance du mercredi 4 décembre 1996, cette commission est ainsi composée :

Députés

Titulaires. - MM. Pierre Mazeaud, Dominique Bussereau, Grégoire Carneiro, Jean-Claude Bahu, Michel Meylan, Bernard Derosier, Jean-Pierre Soisson.
Suppléants. - MM. Raoul Béteille, Christian Dupuis, Gilbert Meyer, Léonce Deprez, Paul-Louis Tenaillon, Maurice Depaix, Jacques Brunhes.

Sénateurs

Titulaires. - MM. Jacques Larché, François Blaizot, Michel Rufin, François Giacobbi, Jean-Pierre Schosteck, Jean-Claude Peyronnet, Robert Pagès.
Suppléants. - MM. Guy Allouche, Philippe de Bourgoing, Jean-Patrick Courtois, Patrice Gélard, Daniel Hoeffel, Jean-Jacques Hyest, Jacques Mahéas.

Nomination du bureau

Dans sa séance du mardi 10 décembre 1996, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Pierre Mazeaud.
Vice-président : M. Jacques Larché.
Rapporteur :
- à l'Assemblée nationale : M. Dominique Bussereau ;

- au Sénat : M. François Blaizot.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSTIONS RESTANT EN DISCUSSION DE LA PROPOSITION DE LOI TENDANT, DANS L'ATTENTE DU VOTE DE LA LOI INSTITUANT UNE PRESTATION D'AUTONOMIE POUR LES PERSONNES ÂGÉES DÉPENDANTES, À MIEUX RÉPONDRE AUX BESOINS DES PERSONNES ÂGÉES PAR L'INSTITUTION D'UNE PRESTATION SPÉCIFIQUE DÉPENDANCE

Composition

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mercredi 4 décembre 1996 et par le Sénat dans sa séance du vendredi 29 novembre 1996, cette commission est ainsi composée :

Députés

Titulaires. - M. Bruno Bourg-Broc, Mme Monique Rousseau, MM. Jean-Yves Chamard, Denis Jacquat, Yves Bur, Jean-Luc Préel, Serge Janquin.
Suppléants. - MM. Gérard Cornu, Jean-Claude Lemoine, Jérôme Bignon, Michel Dessaint, Xavier Pintat, Mme Martine David, M. Maxime Gremetz.

Sénateurs

Titulaires. - MM. Jean-Pierre Fourcade, Alain Vasselle, Henri de Raincourt, Michel Mercier, Paul Girod, Jean Chérioux, Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Suppléants. - MM. Guy Fischer, Alain Gournac, Roland Huguet, Marcel Lesbros, René Marquès, Lucien Neuwirth, Bernard Seillier.

Nomination du bureau

Dans sa séance du mardi 10 décembre 1996, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Bruno Bourg-Broc.
Vice-président : M. Jean-Pierre Fourcade.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale : Mme Monique Rousseau ;

- au Sénat : M. Alain Vasselle.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI RELATIF À L'AMÉNAGEMENT, LA PROTECTION ET LA MISE EN VALEUR DE LA ZONE DITE DES CINQUANTE PAS GÉOMÉTRIQUES DANS LES DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER

Composition de la commission

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mercredi 11 décembre 1996 et par le Sénat dans sa séance du jeudi 5 décembre 1996, cette commission est ainsi composée :

Députés

Titulaires. - MM. Yvon Jacob, Philippe Chaulet, Pierre Petit, Pierre Micaux, Jean-Paul Virapoullé, Henry Jean-Baptiste, Patrice Tirolien.
Suppléants. - MM. René André, Pierre Laguilhon, Jacques-Michel Faure, Hubert Grimault, Mme Sylvia Bassot, MM. Camille Darsières, François Asensi.

Sénateurs

Titulaires. - MM. Jean François-Poncet, Jean Huchon, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Michel Doublet, Henri Revol, Rodolphe Désiré, Louis Minetti.
Suppléants. - Mme Janine Bardou, MM. Aubert Garcia, Francis Grignon, Bernard Joly, Edmond Lauret, Félix Leyzour, Louis Moinard.

Nomination du bureau

Dans sa séance du jeudi 12 décembre 1996, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Pierre Micaux.
Vice-président : Mme Janine Bardou.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale : M. Yvon Jacob.

- au Sénat : M. Jean Huchon.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI RELATIF À L'UNION D'ÉCONOMIE SOCIALE DU LOGEMENT

Composition de la commission

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mercredi 11 décembre 1996 et par le Sénat dans sa séance du même jour, cette commission est ainsi composée :

Députés

Titulaires. - MM. Raymond Lamontagne, Gilles Carrez, Raoul Béteille, Jean-Marie Morisset, Léonce Deprez, Yves Coussain, Jacques Guyard.
Suppléants. - MM. Christian Dupuy, Philippe Legras, Claude Girard, Hubert Grimault, Mme Sylvia Bassot, MM. Jean-Pierre Kucheida, Rémy Auchedé.

Sénateurs

Titulaires. - MM. Jean François-Poncet, Marcel-Pierre Cleach, Jean Huchon, Gérard César, Dominique Braye, William Chervy, Félix Leyzour.
Suppléants. - M. Léon Fatous, Mme Anne Heinis, MM. Bernard Joly, Jacques de Menou, Louis Minetti, Louis Moinard, Alain Pluchet.

Nomination du bureau

Dans sa séance du jeudi 12 décembre 1996, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Raymond Lamontagne.
Vice-président : M. Louis Moinard.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale : M. Jean-Marie Morisset ;

- au Sénat : M. Marcel-Pierre Cléach.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION SUR LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1997

Composition de la commission

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le jeudi 12 décembre 1996 et par le Sénat dans sa séance du mardi 10 décembre 1996, cette commission est ainsicomposée :

Députés

Titulaires. - MM. Pierre Méhaignerie, Philippe Auberger, Jean-François Copé, Michel Inchauspé, Jean-Jacques Jegou, Didier Migaud, Jean-Pierre Thomas.
Suppléants. - MM. Gilles Carrez, Yves Deniaud, Daniel Garrigue, Yves Fréville, Gilbert Gantier, Augustin Bonrepaux, Daniel Colliard.

Sénateurs

Titulaires. - MM. Christian Poncelet, Alain Lambert, Maurice Blin, Roland du Luart, Philippe Marini, Jean-Pierre Masseret, Paul Loridant.
Suppléants. - MM. René Ballayer, Roger Besse, Henri Collard, Yann Gaillard, Jean-Philippe Lachenaud, René Regnault, Alain Richard.

Nomination du bureau

Dans sa séance du mardi 17 décembre 1996, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Pierre Méhaignerie.
Vice-président : M. Christian Poncelet.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale : M. Philippe Auberger ;
- au Sénat : M. Alain Lambert.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI RELATIF À LA COLLECTE ET À L'ÉLIMINATION DES CADAVRES D'ANIMAUX ET DES DÉCHETS D'ABATTOIRS ET MODIFIANT LE CODE RURAL

Composition de la commission

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mardi 17 décembre 1996 et par le Sénat dans sa séance du lundi 16 décembre 1996, cette commission est ainsicomposée :

Députés

Titulaires. - MM. François-Michel Gonnot, Jean-Paul Charié, André Angot, Jacques-Michel Faure, Mme Marie-Thérèse Boisseau, MM. Roger Lestas, Alain Le Vern.
Suppléants : MM. Philippe Legras, René André, Yves Rispat, Jean-Claude Lenoir, Michel Vuibert, Charles Josselin, Rémy Auchedé.

Sénateurs

Titulaires. - MM. Jean François-Poncet, Roger Rigaudière, Jean Huchon, Alain Pluchet, Mme Anne Heinis, MM. William Chervy, Félix Leyzour.
Suppléants. - MM. Marcel Bony, Gérard César, Jean-Paul Emorine, Aubert Garcia, Bernard Joly, Jacques de Menou, Louis Moinard.

Nomination du bureau

Dans sa séance du mardi 17 décembre 1996, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Jean François-Poncet.
Vice-président : M. François-Michel Gonnot.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale : M. André Angot ;
- au Sénat : M. Roger Rigaudière.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 1996

Composition de la commission

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mercredi 18 décembre 1996 et par le Sénat dans sa séance du même jour, cette commission est ainsi composée :

Députés

Titulaires. - MM. Pierre Méhaignerie, Philippe Auberger, Augustin Bonrepaux, Gilles Carrez, Gilbert Gantier, Michel Inchauspé, Hervé Mariton.
Suppléants. - MM. Yves Deniaud, Daniel Garrigue, Raymond Lamontagne, Jean-Jacques Descamps, Yves Fréville, Didier Migaud, Daniel Colliard.

Sénateurs

Titulaires. - MM. Christian Poncelet, Alain Lambert, Guy Cabanel, Roland du Luart, Philippe Marini, Mme Maryse Bergé-Lavigne, M. Paul Loridant.
Suppléants. - MM. Philippe Adnot, Denis Badré, Yann Gaillard, Jean-Philippe Lachenaud, Michel Mercier, Gérard Miquel, Alain Richard.

Nomination du bureau

Dans sa séance du jeudi 19 décembre 1996, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Christian Poncelet.
Vice-président : M. Pierre Méhaignerie.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale : M. Philippe Auberger ;

- au Sénat : M. Alain Lambert.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI RELATIF A` LA ZONE FRANCHE DE CORSE

Composition de la commission

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mercredi 18 décembre 1996 et par le Sénat dans sa séance du mardi 17 décembre 1996, cette commission est ainsi composée :

Députés

Titulaires. - MM. Patrick Ollier, Yvon Jacob, Jean-Claude Bonaccorsi, José Rossi, Renaud Dutreil, Jean Proriol, Augustin Bonrepaux.
Suppléants. - MM. Jean-Paul de Rocca-Serra, Jean-Luc Warsmann, Bernard de Froment, Arnaud Cazin d'Honincthun, Daniel Soulage, Emile Zuccarelli, Jean Tardito.

Sénateurs

Titulaires. - MM. Christian Poncelet, Michel Mercier, Philippe Adnot, Roland du Luart, Jacques Oudin, Michel Charasse, Mme Marie-Claude Beaudeau.
Suppléants. - MM. Denis Badré, Roger Besse, Guy Cabanel, Yann Gaillard, Gérard Miquel, Alain Richard, François Trucy.

Nomination du bureau

Dans sa séance du jeudi 19 décembre 1996, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Roland du Luart.
Vice-président : M. Yvon Jacob.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale : M. Patrick Ollier ;

- au Sénat : M. Michel Mercier.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DE LA PROPOSITION DE LOI CRÉANT LES PLANS D'ÉPARGNE RETRAITE

Composition de la commission

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le vendredi 31 janvier 1997, et par le Sénat dans sa séance du jeudi 30 janvier 1997, cette commission est ainsi composée :

Députés

Titulaires. - MM. Pierre Méhaignerie, Jean-Pierre Thomas, Augustin Bonrepaux, Jean-Yves Chamard, Charles de Courson, Daniel Garrigue, Michel Inchauspé.
Suppléants. - MM. Arthur Dehaine, Yves Deniaud, Raymond Lamontagne, Gilbert Gantier, Jean-Jacques Jegou, Julien Dray, Daniel Colliard.

Sénateurs

Titulaires. - MM. Christian Poncelet, Philippe Marini, Guy Cabanel, Alain Lambert, Roland du Luart, Marc Massion, Paul Loridant.
Suppléants. - MM. Denis Badré, Henri Collard, Jacques-Richard Delong, Emmanuel Hamel, Jean-Philippe Lachenaud, Gérard Miquel, Alain Richard.

Nomination du bureau

Dans sa séance du mercredi 5 février 1997, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Pierre Méhaignerie.
Vice-président : M. Christian Poncelet.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale : M. Jean-Pierre Thomas ;

- au Sénat : M. Philippe Marini.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI RELATIF AU RENFORCEMENT DE LA LUTTE CONTRE LE TRAVAIL ILLÉGAL

Composition de la commission

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mardi 4 mars 1997, et par le Sénat dans sa séance du même jour, cette commission est ainsi composée :

Députés

Titulaires. - MM. Jean-Pierre Delalande, Gérard Léonard, Jean-Yves Chamard, Rudy Salles, Xavier Pintat, Léonce Deprez, Jean-Yves Le Déaut.
Suppléants. - MM. Pierre Rémond, Lionel Assouad, Roland Coche, Germain Gengenwin, Charles de Courson, Michel Berson, Maxime Gremetz.

Sénateurs

Titulaires. - MM. Jean-Pierre Fourcade, Louis Souvet, Paul Masson, André Jourdan, Jean Madelain, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, M. Guy Fischer.
Suppléants. - M. Jacques Bimbenet, Mme Michelle Demessine, MM. Charles Descours, Alain Gournac, Roland Huguet, René Marques, Bernard Seillier.

Nomination du bureau

Dans sa séance du mardi 4 mars 1997, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Jean-Pierre Fourcade.
Vice-président : M. Jean-Yves Chamard.
Rappporteurs :
- à l'Assemblée nationale : M. Rudy Salles :

- au Sénat : M. Louis Souvet.

COMMISSION MIXTE PARITAIRE CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DU PROJET DE LOI PORTANT DIVERSES MESURES RELATIVES À L'IMMIGRATION

Composition de la commission

A la suite des nominations effectuées par l'Assemblée nationale le mardi 18 mars 1997 et par le Sénat dans sa séance du jeudi 13 mars 1997, cette commission est ainsi composée :

Députés

Titulaires. - MM. Pierre Mazeaud, Gérard Léonard, Christian Dupuy, Arnaud Cazin d'Honincthun, Jean-Pierre Philibert, Julien Dray, Jean-Pierre Michel.
Suppléants. - M. Jérôme Bignon, Mme Suzane Sauvaigo, MM. Jacques Masdeu-Arus, Yves Marchand, Rudy Salles, Jacques Floch, Patrick Braouezec.

Sénateurs

Titulaires. - MM. Jacques Larché, Paul Masson, Jean-Jacques Hyest, Paul Girod, Lucien Lanier, Guy Allouche, Robert Pagès.
Suppléants. - MM. Robert Badinter, Philippe de Bourgoing, Luc Dejoie, Michel Dreyfus-Schmidt, Pierre Fauchon, Georges Othily, Jean-Pierre Schosteck.

Nomination du bureau

Dans sa séance du jeudi 20 mars 1997, la commission mixte paritaire a nommé :
Président : M. Jean-Jacques Hyest.
Vice-président : M. Arnaud Cazin d'Honincthun.
Rapporteurs :
- à l'Assemblée nationale : M. Pierre Mazeaud ;

- au Sénat : M. Paul Masson.

NOMINATION DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

M. Pierre Hérisson a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 302 (1996-1997) de M. Louis Minetti et plusieurs de ses collègues tendant à assurer l'aménagement, l'équipement et la protection de la nature de la région de l'étang de Berre.
M. Francis Grignon a été nommé rapporteur de la proposition de résolution n° 331 (1996-1997) de M. Claude Billard et plusieurs de ses collègues tendant à créer une commission d'enquête sur l'industrie automobile.
Mme Anne Heinis a été nommée rapporteur de la proposition de loi n° 346 (1996-1997) de M. Roland du Luart et plusieurs de ses collègues relative aux dates d'ouverture anticipée et de clôture de la chasse des oiseaux migrateurs.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Mesures de protection en faveur des facteurs d'orgues

9. - 23 juin 1997. - M. Daniel Hoeffel appelle l'attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur la baisse de 32 % pour 1997 des crédits accordés à la restauration des orgues historiques et sur les vives inquiétudes qui en résultent au sein de la profession des facteurs d'orgues. Alors que l'organisation des « Etats généraux de la facture d'orgues » en 1995 et la création du conseil des métiers d'art en 1996 avaient suscité beaucoup d'espoir, l'annonce de cette décision - sans concertation - a déclenché une vive réaction des facteurs d'orgues qui dénoncent des méthodes destabilisantes pour les entreprises et pour le bon déroulement des procédures d'attribution des marchés. Cette diminution d'un tiers des crédits risque par ailleurs d'entraîner la disparition de 30 % des petites entreprises spécialisées dans cette profession, ainsi que de leur savoir-faire spécifique. L'Alsace, région particulièrement riche en orgues anciens, est aussi, avec le centre de formation des apprentis d'Eschau, un pilier de la facture d'orgues, et se trouve de ce fait particulièrement frappée. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer les mesures qu'elle compte prendre pour protéger cette profession, garante de la survie des plus beaux orgues historiques de France.

Reclassement des personnels civils affectés
par la réorganisation des forces françaises en Allemagne

10. - 23 juin 1997. - M. Daniel Hoeffel appelle l'attention de M. le ministre de la défense sur les incidences pour les personnels civils des mesures de restructuration qui toucheront en 1997 et 1999 les forces françaises stationnées en Allemagne. Deux vagues concerneront ainsi, en 1997 et 1999, plus de 3 600 civils, parmi lesquels de nombreux personnels français particulièrement implantés dans les zones frontalières. Seuls les fonctionnaires et agents publics sont assurés d'un reclassement dans les services et établissements relevant du ministère de la défense. En ce qui concerne les personnels de droit privé allemand, les plans sociaux ont été négociés. Les modalités de licenciement ainsi fixées ont été améliorées par rapport aux règles propres aux établissements. Des mesures d'accompagnement social ont, par ailleurs, été prévues. Cependant, au vu des difficultés rencontrées lors des précédentes dissolutions de garnisons, il est à craindre qu'un grand nombre de ces agents ne pourra assurer sa reconversion en dépit des mesures prises en sa faveur. Il lui demande si d'autres solutions de reclassement qui tiendraient compte des années passées à oeuvrer au service de la France ne pourraient être envisagées pour ces personnels.

Conditions d'exercice de la profession de taxi

11. - 23 juin 1997. - M. Daniel Hoeffel appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le décret n° 95-935 du 17 août 1995 portant application de la loi n° 95-66 du 29 janvier 1995 relative à l'accès à l'activité de conducteur et à la profession d'exploitant de taxi qui dispose que le titulaire d'une autorisation de stationnement peut en assurer l'exploitation en consentant la location du taxi à un conducteur de taxi. Il lui demande de bien vouloir lui préciser si ces dispositions permettent à un artisan taxi de louer une autorisation de stationnement en location-gérance, prévue par la loi n° 56-277 du 20 mars 1956 relative à la location-gérance des fonds de commerce et des établissements artisanaux. Cette possibilité est susceptible d'intéresser les titulaires d'une autorisation de stationnement ne disposant pas de l'ancienneté nécessaire pour présenter, à titre onéreux, un successeur à l'administration et qui soit souhaitent prendre leur retraite, soit ont été déclarés inaptes à l'exercice de la profession de taxi pour raisons médicales.

Bonifications pour campagne double
accordées aux anciens combattants d'Afrique du Nord

12. - 23 juin 1997. - Mme Marie-Claude Beaudeau attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat aux anciens combattants sur l'attribution des bénéfices de campagne double aux fonctionnaires cheminots et agents de services publics, anciens combattants en Afrique du Nord. Elle lui rappelle que le 9 décembre 1974, la loi n° 74-1044 a reconnu, dans des conditions de stricte égalité avec les combattants des conflits antérieurs, les services des anciens d'Afrique du Nord. Elle lui rappelle également que la loi du 14 avril 1924 reconnaît les bonifications pour les campagnes doubles comme un droit à réparation accordé aux anciens combattants fonctionnaires et assimilés, ce bénéfice ayant été étendu progressivement aux agents de certains services publics, tels les cheminots (décision du ministère des transports du 31 mars 1964). Elle lui demande quelles mesures il envisage pour accorder aux anciens combattants fonctionnaires cheminots et agents des services publics ayant combattu en Afrique du Nord le bénéfice de campagne double.

Principe d'égalité d'accès aux services publics

13. - 23 juin 1997. - M. Ivan Renar rappelle à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation que de très nombreuses communes appliquent, dans le cadre de leur politique municipale, des tarifs différenciés selon le quotient familial pour certaines activités comme les activités culturelles ou sportives. Or, une jurisprudence du Conseil d'Etat interdit cette pratique selon lui discriminatoire en matière d'égalité d'accès aux services publics. Cette conception très formelle de l'égalité ignore cependant la réalité d'une situation sociale qui prive pour des raisons financières de très nombreuses personnes, en premier lieu les enfants, de l'accès à la culture ou au sport. L'application du quotient familial est dans l'esprit des municipalités un moyen de dépasser les obstacles sociaux. Dans une réponse à une question écrite déjà posée à ce sujet en juillet 1996, le ministre de la culture alors en exercice annonçait que, « en concertation avec le ministère de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation, il a été décidé d'entreprendre une réflexion de fond sur ce sujet, qui pourrait donner lieu au dépôt d'un projet de loi ». En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui faire part de l'état de la réflexion du Gouvernement à ce sujet et des décisions qu'il entend mettre en oeuvre.

Maintien des services publics
dans les zones en voie de désertification

14. - 26 juin 1997. - M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra souligne auprès de Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement que le service public et plus particulièrement en milieu rural, constitue un élément fondamental de l'aménagement du territoire et du maintien des populations dans les zones en voie de désertification. L'Etat est exclusivement compétent à l'égard des services publics nationaux et le principe de l'égal accès de tous au service public a été réaffirmé par la loi n° 95-115 du 5 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. Les communes sont, quant à elles, très attachées aux services de proximité et oeuvrent quotidiennement pour que ceux-ci soient maintenus dans les meilleures conditions de qualité. De plus en plus fréquement, cette volonté des élus locaux se traduit par une participation aux côtés de l'Etat au financement de ces services. Face au désengagement toujours plus croissant de ce dernier, face à la logique de rentabilité économique invoquée par les grandes entreprises nationales, les collectivités locales ont-elles d'autres choix que d'accepter ce partenariat ? Leur survie, quelquefois, en dépend. Le manque de concertation que l'on a pu déplorer jusqu'à présent entre les différentes parties aboutit à un transfert de charges toujours plus important en direction des communes. Le cas de La Poste illustre semble-t-il le mieux cette situation. Sur le fondement d'un partenariat souvent déséquilibré, ce sont des conventions hybrides au cas par cas qui sont proposées aux maires, dont les termes posent divers problèmes juridiques (notamment en matière de responsabilité). On assiste à une situation qui peut devenir préjudiciable, si l'on y prend pas garde. Les communes ne pourront pas, à elles seules, assumer ces transferts et les usagers pourraient avoir à en supporter les conséquences. Le service public ne pourra plus répondre à ces missions, si tant est qu'on arrive à conserver les réseaux déjà existants. Il souhaiterait obtenir des précisions sur deux points : d'une part quelle sera la position du Gouvernement lorsque le moratoire sur la suppression des services publics sera arrivée à son terme ? Et d'autre part, à quel moment sera pris le décret d'application de l'article 29 de la loi du 5 février 1995, qui pourrait constituer le cadre d'une procédure adaptée en matière de contrôle de suppression ou de modification d'un service ?