M. le président. « Art. 5. - Le silence gardé pendant deux mois par l'autorité administrative sur une demande fait naître une décision implicite d'acceptation dans les cas prévus par décrets en Conseil d'État. Lorsque la complexité ou l'urgence de la procédure le justifie, ces décrets peuvent fixer une durée différente au terme de laquelle la décision implicite intervient. Ils définissent, lorsque cela est nécessaire, les mesures destinées à assurer l'information des tiers.
« Toutefois, ces décrets ne peuvent instituer un régime de décision implicite d'acceptation dans les domaines où les engagements internationaux de la France, l'ordre public, la protection des libertés ou la sauvegarde des principes de valeur constitutionnelle s'y opposent, ou lorsque la demande porte directement sur une dette ou une créance de l'autorité administrative à qui elle est adressée. »
Par amendement n° 30, M. Vasselle propose d'insérer, dans la première phrase du premier alinéa de l'article 5, après les mots : « l'autorité administrative », le mot : « compétente ».
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Je retire cet amendement, qui est satisfaisant en raison de l'adoption de l'amendement n° 9 de la commission, à l'article 3.
M. le président. L'amendement n° 30 est retiré.
Par amendement n° 11, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, dans la première phrase du premier alinéa de l'article 5, de remplacer les mots : « fait naître une décision implicite d'acceptation » par les mots : « vaut décision d'acceptation ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. C'est un amendement d'harmonisation rédactionnelle avec l'article 4.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 12, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, dans la deuxième phrase du premier alinéa de l'article 5, de remplacer les mots : « peuvent fixer une durée différente au terme de laquelle la décision implicite intervient », par les mots : « prévoient un délai différent ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit également d'une harmonisation rédactionnelle avec l'article 4.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 13, M. Amoudry, au nom de la commission, propose, dans le second alinéa de l'article 5, de remplacer les mots : « dans les domaines où » par le mot : « lorsque ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Il s'agit d'une simplification rédactionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 14, M. Amoudry, au nom de la commission, propose d'insérer dans le second alinéa de l'article 5, après les mots : « ou la sauvegarde des », le mot : « autres ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. Cet amendement tend à apporter une précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adoptée.)
M. le président. Par amendement n° 36, M. Cabanel et les membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen proposent, à la fin du second alinéa de l'article 5, de supprimer les mots : « ou lorsque la demande porte directement sur une dette ou une créance de l'autorité administrative à qui elle est adressée ».
Cet amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° 39, MM. Mahéas et Régnault, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter in fine le second alinéa de l'article 5 par les mots : « ou encore lorsqu'elle porte sur des domaines pouvant nuire à la sécurité ou à la santé. »
La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Le dernier alinéa de l'article 5 prévoit que l'acceptation tacite ne peut être établie par décret lorsque « les engagements internationaux de la France, l'ordre public, la protection des libertés ou la sauvegarde des principes de valeur constitutionnelle s'y opposent ». Il l'exclut également pour les demandes portant sur une dette ou une créance de l'autorité administrative. Le champ du règlement reste très large malgré tout, même s'il existe par ailleurs de nombreuses dispositions législatives ; je pense ici aux installations classées. Néanmoins, il me semble que le pouvoir réglementaire devrait être mieux encadré.
En effet, il est d'autres domaines, qui ne sont pas énumérés dans le projet de loi, pour lesquels le pouvoir réglementaire ne doit pas pouvoir instituer de décision implicite d'acceptation.
Une demande émanant, par exemple, d'une société ou d'une industrie polluante doit être dans tous les cas exclue de cette réglementation. Toutes les demandes relevant du domaine de l'environnement et pouvant avoir des conséquences nuisibles sur la sécurité et la santé des consommateurs doivent être exclues.
Nous proposons de mentionner explicitement cette précision dans le projet de loi. Nous voulons être tout à fait sûrs que des secteurs aussi importants ne seront pas soumis à cette règle, d'autant qu'en matière d'environnement le dispositif juridique repose certes sur la loi, mais aussi sur le règlement.
C'est un domaine où l'on ne peut courir le risque d'une décision implicite de l'administration parce qu'une demande n'aurait pas pu être examinée à fond dans le délai qui, je le rappelle, passe de quatre à deux mois, ce qui est, en soi, une bonne chose.
Je me demande également, monsieur le ministre, si l'autorisation implicite d'acceptation ne devrait pas être exclue explicitement pour les interventions portant atteinte à l'intégrité du domaine public routier.
Enfin, s'agissant des limites aux décisions implicites d'acceptations, j'aimerais connaître votre avis sur l'extension de cette règle aux relations entre l'Etat et les collectivités territoriales.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Amoudry, rapporteur. La commission rappelle que la protection de la santé et de la sécurité des personnes et des biens est, suivant la jurisprudence du Conseil constitutionnel, un principe de valeur constitutionnelle que devra respecter le décret, sous le contrôle du Conseil d'Etat, compte tenu de la rédaction de l'article 5. En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 39, puisque toutes les garanties qu'il souhaite sont déjà prévues.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement, non pas pour des raisons de fond, monsieur le sénateur, mais parce qu'une énumération fait courir le risque de l'ambiguïté. Or, la rédaction très juridique qui a été proposée par la commission des lois nous protège complètement, compte tenu des jurisprudences tant du Conseil constitutionnel que du Conseil d'Etat. Il est donc préférable de s'en tenir à cette rédaction.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. Compte tenu des explications de M. le ministre, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 39 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'article 5.
M. Jacques Mahéas. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mahéas.
M. Jacques Mahéas. La plupart des demandes des usagers étant acceptées par l'administration - l'étude d'impact sur le présent projet de loi indique en effet que, sur 1000 régimes d'autorisations, 5 % à 15 % seulement des demandes sont rejetées - on comprend tout à fait la logique qui pousse à vouloir accroître le nombre des décisions d'acceptation tacites en l'absence de réponse de l'administration dans un délai de deux mois.
Il est cependant regrettable qu'à aucun moment l'étude d'impact dont je viens de parler - cela figurait pourtant au menu de la réforme de l'Etat - ne fasse mention des délais moyens de réponse de l'administration par grandes catégories de problèmes. Cela nous aurait permis d'apprécier au mieux la portée de ce projet de loi, notamment à l'égard des usagers. J'espère, monsieur le ministre, que vous pourrez éclairer le Parlement sur ce point, car cette étude d'impact ne va guère au-delà de l'exposé des motifs. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que je fais ce constat.
Sans méconnaître la portée positive de la disposition en cause, il convient de souligner les inconvénients qu'elle risque d'engendrer.
La plupart des demandes sont acceptées car, généralement, l'usager remplit toutes les conditions requises. Néanmoins, avec la généralisation de la déclaration d'aliéner, par exemple, il y a de fortes chances pour que l'usager doive, dans la majorité des cas, attendre deux mois pour jouir de ses droits, ce qui ne va pas obligatoirement dans le sens de ce que devrait être l'amélioration des relations de l'administration avec les usagers. Ainsi, comme mes collègues je pense, lorsque je reçois, en qualité de maire de Neuilly-sur-Marne, une déclaration d'intention d'aliéner et qu'aucun problème n'est manifeste, je réponds, bien évidemment, dans les quarante-huit heures ; désormais, du fait de l'acceptation tacite, ce délai sera porté à deux mois ! En outre, les dispositions prévues exigent de l'administré une meilleure connaissance des lois et des règlements ; celui-ci doit prendre ses précautions. Même si nul n'est censé ignorer la loi, chacun sait à quoi s'en tenir sur cet adage... d'autant que les textes sont multiples et trop souvent inaccessibles au citoyen lambda de par leur formulation.
En l'occurrence on nous annonce déjà plus de 280 décrets d'application. Bonjour la simplification ! A priori, l'usager ne saura pas si la réponse à sa demande fera l'objet d'une réponse explicite ou si elle entrera dans le régime d'une décision implicite de rejet ou d'acceptation. Pour le savoir, il devra attendre d'avoir reçu l'accusé de réception, dont les formules vont être multiples.
Un autre problème est posé du fait du développement des décisions implicites.
Il y a une forte probabilité pour que l'administration se contente de lui adresser un accusé de réception et ne lui réponde pas formellement pour les demandes classées comme relevant du régime de décision implicite d'acceptation, notamment.
L'administration examinera-t-elle, même de manière sommaire, le dossier ? Si elle ne le fait pas, ce sera non par mauvaise volonté, mais faute de temps.
Elle est sommée de faire plus et mieux, de s'adapter. Avec des effectifs réduits, des salaires en baisse, on exige plus des fonctionnaires. En cas de recours contentieux, ne risquent-ils pas de voir leur responsabilité engagée ? Comment pourront-ils justifier qu'ils n'ont pas eu le temps d'examiner à fond la demande dont la réponse est mise en cause ?
Autre point négatif : si cette proposition peut être globalement et statistiquement satisfaisante, puisque un plus grand nombre de demandes seront satisfaites, et ce plus rapidement, nous dit-on, il n'en demeure pas moins que le développement du système de la non-réponse, qu'elle vaille acceptation ou rejet, n'est pas de bonne méthode. Une non-réponse induit toujours un doute, suscite une interprétation. La non-réponse « généralisée » n'est pas la bonne façon de procéder avec les usagers ; elle n'incite pas au respect des lois et des règlements elle ne constitue pas, me semble-t-il, le meilleur moyen de rapprocher l'administration de l'usager.
Je crains qu'il ne s'agisse, sous couvert de simplification, de justifier la baisse des effectifs et de pallier l'insuffisance des moyens donnés à l'administration.
Les usagers vont être mieux et plus rapidement satisfaits alors que, dans le même temps, les services qui disposeront de moins de moyens, verront leurs tâches substantiellement allégés. Je ne crois pas que l'amélioration de relations entre l'administration et les usagers puisse se faire au détriment des fonctionnaires, qui sont d'ailleurs eux-mêmes, des usagers des services publics. L'amélioration ne peut avoir lieu que grâce à une administration de qualité.
Malgré ces réserves, on ne peut néanmoins qu'être d'accord avec l'objectif de ces dispositions. Elles vont dans le bons sens, mais leur mise en forme me paraît extrêmement délicate.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Article 6