Union d'économie sociale du logement
Adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion, après déclaration d'urgence, du projet
de loi (n° 58, 1996-1997) relatif à l'Union d'économie sociale du logement.
[Rapport (n° 78, 1996-1997)].
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Pierre-André Périssol,
ministre délégué au logement.
Monsieur le président, mesdames, messieurs
les sénateurs, permettez-moi, en préalable à la présentation du présent projet
de loi, de rendre un hommage particulier au travail de la commission des
affaires économiques et d'exprimer ma reconnaissance à son rapporteur, M.
Marcel-Pierre Cléach, que je félicite pour la qualité de son rapport.
La participation - dite « 1 % logement » - des employeurs à l'effort de
construction permet d'investir chaque année 13 milliards de francs dans le
logement. Elle contribue, dans le secteur locatif social, à la réalisation de
60 000 logements et à la réhabilitation de 100 000 logements, et, dans le
secteur de l'accession, à la construction, l'acquisition ou la réhabilitation
par les salariés de 150 000 logements.
Le 1 % logement présente ainsi une importance considérable pour la mise en
oeuvre d'une politique du logement répondant aux besoins des salariés et de
l'économie du bâtiment.
Le Gouvernement vous propose aujourd'hui de réformer le 1 % logement afin de
lui redonner toute sa légitimité et d'améliorer son efficacité.
Cette réforme a été conçue et préparée dans un cadre contractuel. Elle a fait
l'objet d'un accord le 17 septembre dernier entre le Gouvernement et l'union
interprofessionnelle du logement, l'UNIL, accord qui a été contresigné par le
CNPF, la CG-PME, la CFDT et la CFE-CGC.
La participation des partenaires sociaux à cet accord mérite d'être soulignée.
Elle est le témoignage de leur attachement au 1 % logement et à son maintien.
Elle constitue la démonstration de la volonté des partenaires sociaux de
s'impliquer désormais plus qu'hier dans la conduite du 1 % logement. Leur
demande est légitime car ils représentent, pour les uns, les entreprises qui
paient la participation et, pour les autres, les salariés qui en bénéficient.
C'est pourquoi l'un des points essentiels de ce projet de loi est la
revalorisation du rôle des partenaires sociaux.
Avec les partenaires sociaux rassemblés dans l'Union d'économie sociale du
logement, nous allons partager les responsabilités. Nous ferons
contractuellement ce que les pouvoirs publics faisaient jusqu'à présent seuls,
c'est-à-dire fixer les grandes orientations de l'utilisation de la
participation des employeurs.
Je voudrais à cet égard dissiper tout malentendu éventuel.
J'ai entendu dire que l'Union d'économie sociale du logement serait une sorte
de collecteur centralisateur qui, depuis Paris, se substituerait ou risquerait
de se substituer aux collecteurs locaux. Il n'en est pas question et le projet
de loi ne le permet pas.
Par leur ancrage territorial, par leurs liens avec les entreprises et les
salariés, avec les collectivités territoriales et les constructeurs, les
collecteurs sont bien placés pour apprécier ce qu'il faut apporter de
financement en complément des aides très réglementées de l'Etat. Cette
appréciation locale des situations est un facteur d'efficacité. L'autonomie de
décision des collecteurs locaux sera donc préservée.
Certains se sont inquiétés de la possibilité de maintenir les politiques
locales. Je tiens à les rassurer de la manière la plus nette.
Il n'est pas question d'imposer une politique uniforme et centralisée qui se
substituerait aux politiques locales. Au niveau de l'Union d'économie sociale
du logement, seules des orientations générales seront fixées.
Je ne crois pas que les politiques locales aient à en souffrir. J'ai au
contraire la conviction que les politiques locales pourront être confortées par
de telles orientations.
Ces orientations pourraient, par exemple, si cela est décidé collectivement,
apporter une réponse à la répartition entre les investissement faits dans le
secteur locatif social et dans le secteur de l'accession. Elles pourraient
concerner la poursuite des actions pour les familles en difficulté mises en
route par la convention dite du 9 %. Il ne s'agit que de quelques
illustrations.
Le second élément fort du projet de loi est qu'avec l'Union d'économie sociale
du logement nous donnons à la profession les moyens de s'organiser et
d'améliorer son efficacité.
Force est de constater que l'organisation collective du 1 % logement peut et
doit être améliorée.
Il est nécessaire de maîtriser et de rationaliser la concurrence entre
collecteurs, principalement là où les capacités des collecteurs locaux sont
suffisantes pour répondre aux besoins.
La gestion coordonnée de celles des fonctions qui peuvent l'être sans remettre
en cause l'autonomie de gestion ainsi que la réduction des frais généraux qui
doit en résulter doivent permettre la réduction des taux d'intérêt des prêts
aux salariés et aux organismes d'HLM. Celle-ci est par ailleurs très
souhaitable dans un contexte où l'ensemble des taux d'intérêt diminuent.
Cette modernisation sera donc conduite de l'intérieur, par les intéressés
eux-mêmes, ce qui est un gage de sa réussite.
Mesdames, messieurs les sénateurs, les fondements de cette réforme ont été
élaborés par le mouvement du 1 % lui-même et ont été reconnus nécessaires
depuis deux ans par les partenaires sociaux et par la très grande majorité des
collecteurs. Je voudrais d'ailleurs, de cette tribune, saluer la lucidité de
cette profession, qui a su faire un diagnostic sans faiblesse et s'engager
résolument dans la voie de la réforme.
Ce projet de loi sera un atout majeur pour redonner tout son sens à la
vocation sociale du 1 % logement. Il permettra d'inscrire, durablement et dans
un cadre stable et clair, l'action du 1 % logement dans la nouvelle politique
du logement.
(Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Cléach, je vous souhaite la bienvenue à cette tribune à l'occasion de votre
premier rapport.
M. Marcel-Pierre Cléach,
rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan.
Je vous
remercie, monsieur le président.
La participation des employeurs à l'effort de construction contribue, chaque
année, à la construction et à l'acquisition de 60 000 logements locatifs
sociaux. Elle permet, en outre, en complément de la prime à l'amélioration des
logements à usage locatif et à occupation sociale, la PALULOS, de réhabiliter
100 000 logements. Elle facilite également l'acquisition, la construction ou la
réhabilitation de 150 000 logements par les salariés. A côté d'un actif de plus
de 106 milliards de francs, ses ressources annuelles avoisinent les 13
milliards de francs.
C'est dire son importance économique, financière et sociale. C'est dire aussi
combien le système du 1 % logement pèse dans un secteur qui connaît, du fait de
la crise économique, des difficultés.
Versée par les employeurs qui occupent au minimum dix salariés - à l'exception
de l'Etat, des collectivités locales, de leurs établissements publics
administratifs, ainsi que des professions relevant du régime agricole de
sécurité sociale - la participation des employeurs à l'effort de construction
constitue un investissement obligatoire des entreprises dont la contrepartie
consiste en un « droit de réservation » de logements au profit de leurs
salariés.
Son montant s'élève actuellement à 0,45 % de la masse salariale. C'est donc
seulement par une commodité de langage et par référence au taux fixé à
l'origine qu'on la désigne sous le nom de « 1 % logement ».
En effet, depuis plusieurs années, le taux de la participation des employeurs
à l'effort de construction a été graduellement abaissé, en cinq étapes. Fixé à
1 % en 1953, ce taux n'est plus que de 0,45 % à partir de 1991. Désormais, les
entreprises s'acquittent en réalité d'une contribution de 0,95 % au titre du
logement, dont 0,45 % au profit du 1 % et 0,5 % au profit du fonds national
d'aide au logement, le FNAL. Il convient de souligner, par surcroît, que le 1 %
a fait l'objet de plusieurs prélèvements, exceptionnels ou permanents, en 1995
et 1996.
La gestion du 1 % a fait l'objet de critiques, parfois justifiées, qui ont
débouché sur la création en 1987 de l'Agence nationale pour la participation
des employeurs à l'effort de construction.
Cette institution chargée d'un contrôle technique ne pouvait cependant
suppléer les partenaires sociaux dans la définition de politiques nationales. A
cette absence, s'est ajouté l'émiettement des responsabilités, qui a, sans nul
doute, constitué un handicap et permis certaines dérives de gestion reprochées
aux organismes collecteurs du 1 %.
Il était temps de mettre un terme à ce mouvement de dégradation. C'est
pourquoi les pouvoirs publics ont conclu, avec les partenaires sociaux et
l'Union nationale interprofessionnelle du logement, l'UNIL, une convention
d'objectifs le 17 septembre 1996. Cette convention permettra de conserver et de
développer le système du 1 % logement, en insufflant un esprit nouveau.
Quel est l'esprit de la réforme dont nous examinons aujourd'hui le volet
législatif ? Elle se résume en trois mots clefs : paritarisme, efficacité,
solidarité.
Le paritarisme, dont témoigne la convention d'objectifs, remet aux partenaires
sociaux la définition des orientations des politiques d'emplois des fonds.
L'efficacité du système procédera, quant à elle, d'une gestion plus efficace
des fonds par les comités interprofessionnels du logement, les CIL. Ceux-ci
poursuivront l'action entreprise, afin d'abaisser les coûts de gestion et de
collecte.
Au titre de la solidarité, les partenaires sociaux ont accepté de verser deux
contributions exceptionnelles de 7 milliards de francs chacune, en 1997 et en
1998, à un compte d'affectation spéciale, dans les conditions prévues par
l'article 29 de la loi de finances pour 1997, que nous seront appelés à
examiner prochainement.
Les auditions auxquelles j'ai procédé m'ont convaincu de la nécessité de
réformer le système de collecte du 1 % en associant à la fois les
contributeurs, les bénéficiaires des logements et les gestionnaires,
collecteurs de la ressource. C'est pourquoi je considère que le dépôt du projet
de loi relatif à l'Union d'économie sociale du logement permet de poser les
bases d'une nouvelle politique de ce que nous appelons le 1 % logement.
Ce projet de loi tend à créer une instance originale, dotée de pouvoirs
exorbitants du droit commun, afin de déterminer les grands axes de la politique
d'emploi des fonds recueillis au titre du 1 %.
Pour la première fois, une instance collective pourra, en concertation avec
l'Etat, définir des politiques d'emploi des fonds du 1 % logement. Il s'agit de
l'Union d'économie sociale du logement, l'UESL.
L'UESL sera une société anonyme coopérative à capital variable. Elle relèvera
donc de la catégorie juridique des unions d'économie sociale, visée par le
titre II
bis
de la loi du 10 septembre 1947 portant statut de la
coopération. Tout comme les autres sociétés coopératives, elle aura pour objet
de contribuer à la gestion des intérêts communs de ses associés et au
développement de leurs activités.
Elle relèvera également du chapitre III de la loi du 24 juillet 1867, première
loi fondamentale sur les sociétés à capital variable, et de la loi du 24
juillet 1966 sur les sociétés commerciales, et ce en tant que société
anonyme.
Parmi les membres de l'UESL, on comptera, d'une part, par libre adhésion, les
organisations représentatives d'employeurs et de salariés et, d'autre part, à
titre obligatoire, les associés collecteurs, c'est-à-dire, en l'état actuel du
texte, les comités interprofessionnels du logement. J'observe que les CIL ont
manifesté leur accord avec la réforme contenue dans ce projet de loi.
Il serait sans doute souhaitable que les autres collecteurs du 1 %, tout
spécialement les chambres de commerce et d'industrie, puissent, s'ils le
souhaitent, entrer dans l'UESL. Ce texte laisse cette possibilité ouverte pour
l'avenir.
L'efficacité du dispositif mis en place nécessite, notamment sur le plan de
l'harmonisation des politiques nationales, que l'ensemble du réseau de collecte
le rejoigne.
Il est donc hautement souhaitable que les conversations en cours avec les
chambres de commerce et d'industrie aboutissent à une adhésion librement
débattue.
Peut-on craindre une concurrence entre les CIL et les autres collecteurs, qui
ne représentent que 10 % de la collecte ? On peut en douter, dans la mesure où
l'Etat s'est engagé à rechercher les voies d'une maîtrise de la concurrence des
organismes collecteurs qui ne participaient pas à l'UESL.
L'UESL est doté d'un conseil d'administration, tout comme les autres sociétés
anonymes.
Elle est également dotée d'organes spécifiques, eu égard à sa mission,
notamment d'un comité paritaire des emplois, qui réunira les organisations
représentatives d'employeurs et de salariés afin de proposer les politiques
d'emplois des fonds au conseil d'administration.
Elle est également caractérisée par la création d'un comité des collecteurs
chargé de représenter les associés collecteurs.
Enfin, l'Etat sera représenté au conseil d'administration par des commissaires
du Gouvernement qui pourront lui demander une seconde délibération.
J'en viens aux pouvoirs de l'Union. Celle-ci passera avec l'Etat des
conventions dont les dispositions s'imposeront à ses membres. En outre, elle
pourra, afin de faciliter la mise en oeuvre des politiques d'emplois des fonds,
demander aux CIL associés de contribuer à un fonds national d'intervention.
Il convient de souligner que le régime des conventions passées entre l'Etat et
l'UESL a d'ores et déjà des équivalents en droit du travail. Ainsi, les
conventions collectives qui ont fait l'objet d'un arrêté d'extension
s'appliquent aux tiers non signataires. Le non-respect de ces conventions Etat
- UESL sera d'ailleurs puni de différentes sanctions prévues par le projet de
loi.
Au total, on peut attendre plusieurs effets positifs de l'entrée en vigueur de
la loi.
Elle permettra d'atténuer la concurrence entre les membres de l'UESL. Cette
concurrence est néfaste et absurde, puisque la ressource qu'ils collectent est
gratuite. Elle permettra également d'harmoniser les politiques d'emplois des
fonds, les modalités de prêt de sommes collectées, ce qui constitue également
une avancée.
La création de l'UESL doit permettre, par l'importance des sommes collectées,
d'assurer la fluidité des marges financières et la solidarité entre
collecteurs, conformément aux objectifs de la convention du 17 septembre 1996,
qui stipule expressément que le dispositif mis en place doit « maintenir la
capacité d'investissement du 1 % logement afin de répondre aux demandes des
salariés et de maintenir l'activité du bâtiment. »
Cette obligation est particulièrement importante, voire essentielle, pour les
collecteurs qui, pour des raisons historiques ou en raison de leur entrée
récente dans le système - c'est le cas de La Poste et de France Télécom - ne
disposent pas de ressources dites de « retour » - il s'agit des remboursements
annuels des prêts antérieurement consentis, des résultats accumulés et des
produits financiers - et pourraient ainsi rencontrer des difficultés à assurer
leurs obligations envers les salariés des entreprises affiliées en raison des
prélèvements effectués par l'UESL.
Le comité paritaire des emplois et le conseil d'administration de l'UESL
devront veiller tout particulièrement, avec les commissaires du Gouvernement, à
l'exécution de ce principe de solidarité qui constitue l'une des bases
fondamentales du nouveau dispositif et dont le respect attendu justifie qu'il
ne soit pas prévu d'exception au principe d'adhésion obligatoire à l'UESL des
collecteurs concernés par ce problème.
Enfin, le texte permettra - et c'est là son principal objet - de rendre la
décision aux représentants des entreprises et des salariés, tout en prenant en
compte l'avis des gestionnaires que sont les collecteurs.
Au total, cette réforme est souhaitable et courageuse. Je tiens à donner acte
au Gouvernement, et tout spécialement à vous, monsieur le ministre, de la
volonté dont le Gouvernement et vous-même avez fait preuve afin d'améliorer le
système sans le détruire.
Je note cependant que, sur plusieurs points, le texte qui est soumis à
l'examen de notre assemblée pourrait faire l'objet d'améliorations que je
souhaite, à présent, vous présenter.
Votre commission des affaires économiques approuve l'économie générale du
projet de loi qui lui a été soumis. Elle estime, en effet, que des progrès
doivent être réalisés dans la gestion du 1 % logement. Aussi, en accédant à la
demande des partenaires sociaux par la création d'une instance spécifique,
véritable tête de réseau pour les CIL, un progrès a-t-il été réalisé.
Votre commission considère cependant que l'existence d'un réseau des CIL sur
tout le territoire et l'existence d'un circuit de financement court entre
financements et besoins locaux présentent des avantages en terme de politique
locale du logement. Le 1 % logement doit continuer à assurer l'équilibre
d'opérations locales en coopération avec les sociétés d'économie mixte, les
offices publics d'aménagement et de construction ou les sociétés anonymes
d'HLM.
C'est pourquoi votre commission vous proposera deux amendements tendant à
préciser qu'à côté des « politiques nationales » définies dans les conventions
signées par l'Etat et par l'UESL des « politiques locales » d'emploi des fonds
devront subsister et prendre en compte la « bonne adaptation des ressources aux
besoins locaux ».
La commission vous proposera également d'adopter une rédaction qui indique que
les politiques d'utilisations du 1 % logement seront appliquées « par les
associés collecteurs ». Ce souci, monsieur le ministre, ne vous étonnera pas de
la part du Sénat.
Ces préoccupations seront également exprimées à l'article L. 313-20 relatif au
fonds d'intervention dont dispose l'UESL. Afin d'éviter toute équivoque, votre
commission vous proposera également d'indiquer clairement que ce fonds
d'intervention contribuera à la bonne adaptation des ressources des associés
collecteurs aux besoins locaux, compte tenu, bien évidemment, des politiques
nationales et locales d'emploi.
Cette rédaction permettra ainsi de concilier à la fois les objectifs nationaux
et les réalités locales, conformément à l'esprit qui s'exprime ici.
Votre commission vous proposera également de doter l'Union d'un pouvoir
consultatif sur la réglementation applicable à ses membres. Elle vous proposera
encore plusieurs modifications d'ordre rédactionnel destinées à éviter qu'un
alourdissement des procédures ne résulte de la lettre du texte.
Votre commission a, au surplus, souhaité que soient respectés les engagements
pris lors de la signature de la convention du 17 septembre 1996. Ce texte
prévoit que l'Etat n'effectera aucun prélèvement sur le 1 % logement en sus de
la contribution exceptionnelle. Or il apparaît que, si aucune disposition
législative ne le prévoit, le régime fiscal de l'UESL serait moins favorable
que celui de l'UNIL et qu'au surplus le transfert du patrimoine de l'une à
l'autre serait onéreux.
C'est pourquoi votre commission vous proposera d'exonérer l'UESL de l'impôt
sur les sociétés et de la taxe professionnelle, et de permettre un transfert du
patrimoine de l'UNIL à l'UESL sans autre coût que le paiement d'un droit fixe
d'un montant minime.
Monsieur le ministre, nécessité faisait loi. Vous avez su cependant, dans un
contexte difficile, tirer le meilleur parti de cette nécessité et répondre à
l'attente d'une profession qui souhaitait s'organiser et se réformer pour
assurer la pérennité d'un dispositif qui a fait ses preuves et qui reste l'un
des piliers de la construction sociale.
Là, comme dans d'autres domaines de ce grand enjeu national, j'ai plaisir à
reconnaître, et à vous le dire, que l'imagination créatrice ne vous a pas
manqué, et il en fallait !
Votre projet de loi, proposé dans les circonstances que l'on sait, a rencontré
l'accord de la très grande majorité des acteurs de la politique du 1 %,
notamment des payeurs et des bénéficiaires. Il donne au dispostif les
meilleures chances d'assurer de façon pérenne sa contribution à la politique
nationale d'aide au logement.
C'est pourquoi je considère, monsieur le ministre, que l'adoption du projet de
loi que vous nous avez soumis constitue une étape importante.
Il restera aux structures mises en place à faire la preuve de leur utilité
sociale pour conforter l'avenir de ce dispositif.
De ce bouquet de roses que je viens de vous offrir, monsieur le ministre, je
dois cependant en retirer une.
L'importance du sujet méritait qu'un temps de réflexion et de préparation plus
important fût donné à la commission. Les délais d'instruction trop courts
risquent, vous le savez, de nuire à la qualité du travail parlementaire. Vous
avez compensé, par la qualité du dialogue et l'esprit de concertation
constructive dont vous avez fait preuve, ce risque de dysfonctionnement. Je
tiens à vous en remercier.
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 39 minutes ;
Groupe socialiste, 32 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 26 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 10 minutes.
La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de
loi, que nous examinons en première lecture, est un texte relativement court,
mais il est important pour le secteur du logement social et doit être lié à la
mise en oeuvre de la loi de finances pour 1997, actuellement en discussion.
C'est pour cela, monsieur le rapporteur, que les choses ont été menées si
rondement.
On ne comprend la philosophie du projet de loi qu'après avoir rappelé ce que
sont la participation des entreprises à l'effort de construction et son
évolution au fil des années.
Plus communément appelée « 1 % logement », la participation des entreprises à
l'effort de construction, la PEEC, qui existait depuis longtemps déjà, comme il
est rappelé dans le rapport fort documenté de M. Cléach, a été rendue
obligatoire en 1953. Elle concerne l'ensemble des entreprises non agricoles de
plus de dix salariés, qui sont ainsi tenues de consacrer un pourcentage de leur
masse salariale à la construction de logements pour leurs salariés. En fait, le
1 % logement n'est plus que 0,45 %, puisque 0,55 % de la masse salariale est
déjà versée à l'Etat au titre du financement du FNAL, le fonds national d'aide
au logement.
Même réduite à 0,45 % de la masse salariale des entreprises assujetties, la
PEEC permet aujourd'hui à 178 comités interprofessionnels du logement, les CIL,
de collecter chaque année près de 7 milliards de francs auprès de 180 000
entreprises regroupant 11,7 millions de salariés. La PEEC, au même titre que
les allocations familiales, est un salaire différé.
L'esprit qui a présidé à sa création est donc le même que celui qui a prévalu
pour la création des allocations familiales : dégager une partie de la richesse
créée dans l'entreprise par le travail des salariés dans l'objectif de répondre
à un besoin social de première importance. Cet argent appartient aux salariés
qui doivent, par l'intermédiaire de leurs représentants, participer à sa
gestion et à la définition des critères de son utilisation.
Les financements réalisés avec le concours du 1 % ou plus exactement du 0,45
%, sont des financements complémentaires. S'ils sont complémentaires de la
politique nationale du logement, ils ne doivent pas se fondre dans -
permettez-moi l'expression - le pot commun.
De manière générale, il devrait y avoir une politique de l'Etat en matière de
logement, complétée par les initiatives des partenaires sociaux des différents
secteurs d'activité.
Jusqu'à présent, la PEEC était redistribuée, d'une part, aux salariés sous
forme de prêts pour les aider à acquérir ou à améliorer leur résidence
principale, d'autre part, aux constructeurs sous forme de subventions, de prêts
à long terme à faible taux d'intérêt ou de souscription à leur capital, en
échange de la réservation d'un contingent de logements en faveur des salariés
des entreprises contributrices.
Les CIL fournissent également des conseils aux accédants à la propriété pour
le financement de leurs projets.
Outre son intérêt sur le plan social, le produit de la PEEC injecté dans le
secteur du bâtiment en crise, concourt indiscutablement au soutien de
l'activité et de l'emploi.
La PEEC représente aujourd'hui 18 % des aides au logement. En termes
d'avantages de taux conférés aux bénéficiaires de prêts, elle a correspondu, en
1994, à 22 % du total des aides à la pierre attribuée dans le pays.
Le texte qui nous est aujourd'hui proposé tend à réglementer les relations
entre les organismes collecteurs, les CIL, et leur organisme fédérateur,
l'UNIL, l'Union nationale interprofessionnelle du logement.
Il pourrait donc, au premier abord, sembler rassembler une série de
dispositions techniques destinées à rationaliser la collecte. En réalité, il
n'en est rien, puisque le véritable objectif du Gouvernement dans cette affaire
est de centraliser les fonds pour pouvoir faire main basse sur l'ensemble de la
collecte des deux prochaines années afin de pallier le désengagement budgétaire
de l'Etat.
L'objectif poursuivi est en fait tout autre que celui qui a été annoncé : il
s'agit de prélever sur la PEEC 7 milliards de francs en 1997 et autant en 1998,
voire pour plus longtemps.
Confronté aux échéances de la monnaie unique et aux critères de convergence
économique qui doivent permettre la mise en place de celle-ci, le Gouvernement
fait des coupes claires dans les dépenses, pourtant utiles, de tous les budgets
sociaux. C'est sans doute ce que voulait signifier M. le rapporteur en disant
que « nécessité fait loi ».
Il s'agit en fait de légaliser la mainmise de l'Etat sur les fonds d'origine
privée destinés à l'aide à la pierre. Avec le texte qui nous est soumis, cet
argent est appelé à être affecté pour moitié au financement des prêts
complémentaires à 0 % et pour moitié au budget général afin de réduire la dette
publique.
Les CIL seraient ainsi privés de la moitié de leurs recettes, ce qui,
contrairement à ce que vous prétendez, monsieur le ministre, ne serait pas sans
conséquences graves sur le logement social et sur l'activité dans le secteur du
bâtiment.
L'objectif étant clairement identifié, le dispositif envisagé se comprend
aisément.
L'actuelle UNIL n'étant qu'une structure associative destinée à représenter et
à défendre les intérêts des organismes collecteurs de la PEEC, elle ne peut
juridiquement exiger de ceux-ci qu'ils versent la totalité de leur collecte
annuelle à l'Etat.
Parce que nous sommes à l'écoute du terrain, nous avons senti qu'un nombre
important de CIL ne voient pas d'un bon oeil ce projet. En effet, s'il est
adopté, ils ne pensent pas pouvoir correctement fonctionner et jouer leur rôle
avec le seul produit, évalué à 7,5 milliards de francs, des retours de
prêts.
Le prélèvement de 7 milliards de francs opéré sur 1997 et 1998, voire au-delà,
coûtera cher aux accédants à la propriété comme aux locataires des HLM puisque,
pour boucler le montage financier des opérations, il faudra faire appel à
d'autres financement plus onéreux. S'en suivront alors des annuités de
remboursement et des loyers plus élevés.
La nouvelle Union d'économie sociale du logement n'est donc en réalité qu'un
nouvel habit juridique taillé sur mesure pour le nouvel organisme fédérant les
collecteurs. D'un statut associatif, elle passerait à un statut de société
anonyme coopérative et serait dotée d'un pouvoir très coercitif à l'encontre
des collecteurs qui bénéficient jusqu'ici d'une relative autonomie, gèrent et
emploient les fonds de manière décentralisée, au plus près des réalités
locales.
Les CIL seraient obligés d'adhérer à l'union et de lui verser, sous
différentes formes, une très grande partie de leurs ressources : au moins
pendant les deux premières années la totalité des sommes collectées, peut-être
même après.
Les statuts proposés obligeraient l'union à passer des conventions avec l'Etat
pour que celui-ci puisse utiliser les fonds collectés comme il l'entend, ce qui
aurait pour effet d'instaurer une véritable tutelle de l'Etat sur l'emploi de
ces derniers.
Nous ne pouvons donc approuver ce projet de loi, Au lieu de détourner le
produit de la PEEC de son but, il aurait fallu améliorer le système existant en
assurant un contrôle plus paritaire, donc plus démocratique, de la gestion et
de l'utilisation des fonds, mais aussi en renforçant le rôle des comités
d'entreprise en matière de logement.
Avec ce texte, nous sommes déjà dans la discussion du projet de loi de
finances pour 1997, qui va s'ouvrir bientôt devant nous. Alors que locataires,
organismes d'HLM et professionnels du bâtiment s'élèvent contre un manque
criant de constructions de logements neufs et de réhabilitations de logements
anciens, vous nous présentez un budget en trompe-l'oeil, dont la présentation
et l'habillage, que vous avez voulus avantageux, ne résistent pas à l'épreuve
des chiffres.
En effet, la ponction de 7 milliards de francs sur la PEEC, qui sera rendue
possible aux termes du présent projet de loi, participe, avec quelques autres
dispositifs, à la diminution de l'effort réel de l'Etat en matière de
financement du logement.
C'est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous
ne pourrons pas approuver ce texte ; nous tenterons cependant, à l'occasion de
la discussion des articles, de l'amender.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet.
Permettez-moi, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, de vous demander
d'accepter mes excuses : j'étais absent de l'hémicycle lorsque vous êtes
intervenu dans la discussion générale. Ce n'est pas dans mes habitudes. Mais
vous connaissez le travail du Sénat durant la période budgétaire. En tant que
membre de la commission des affaires sociales, j'étais obligé d'y assister à la
présentation du projet de budget relatif au travail.
Le projet de loi que vous nous soumettez aujourd'hui fait oeuvre utile en
clarifiant un dispositif essentiel, en le rendant plus efficace.
Ai-je besoin de rappeler combien ce projet de loi est attendu par les
professionnels du logement et du bâtiment ? Ai-je besoin de souligner combien
ces derniers sont attachés au mécanisme du 1 % logement - en fait le 0,45 %,
ainsi que le rapporteur l'a souligné ?
Votre projet de loi, monsieur le ministre, devrait faire l'unanimité au sein
des professionnels du logement et des partenaires sociaux.
M. Félix Leyzour.
Je ne le crois pas.
M. Jacques Machet.
Certes, nous ne sommes pas tous d'accord.
En tout cas, ce texte est l'occasion pour mes collègues du groupe de l'Union
centriste, et moi-même en particulier, d'exprimer notre attachement au
mécanisme financier original qu'est le 1 % logement.
C'est également l'occasion de saluer l'action du Gouvernement qui veut
réformer, en concertation avec les partenaires sociaux, un dispositif
essentiel, mais - disons-le - en voie de perdition !
Les coûts de gestion exorbitants, les prélèvements successifs de l'Etat sur
les fonds du 1 % patronal ont conduit à décrédibiliser et à fragiliser un
dispositif dont l'efficacité a été démontrée à maintes reprises.
Les quelque 13 milliards de francs que le mouvement du 1 % logement investit
chaque année contribuent à la réalisation de 60 000 logements et à la
réhabilitation de 100 000 autres dans le secteur locatif social. Dans le
secteur de l'accession à la propriété, ils participent à la construction,
l'acquisition ou la réhabilitation de 150 000 logements.
Les travaux de bâtiment issus en 1995 des opérations du mouvement du 1 %
peuvent être estimés à 23 milliards de francs pour les ménages occupants et à
24 milliards de francs pour les constructeurs sociaux, soit 47 milliards de
francs au total, dont 35 milliards de francs n'auraient pu être engagés sans le
1 %. Ces travaux représentent environ 85 000 emplois dans le secteur du
bâtiment.
Malgré cette indéniable efficacité, chacun s'accorde aujourd'hui à dire que la
réglementation du 1 % est de plus en plus complexe. Nous manquons de simplicité
! La maîtrise, voire la simple connaissance de la législation est devenue
malaisée, y compris pour les professionnels.
Les dispositions que vous nous soumettez, monsieur le ministre, devraient
permettre de clarifier cette situation. Elles sont en accord avec la volonté
des partenaires sociaux. Dès 1995, ces derniers réclamaient d'ailleurs une
réforme de la gestion du 1 %, afin que le dispositif se voie doté d'un organe
permettant de renforcer la coopération entre les organismes gestionnaires et de
réduire des coûts de gestion évalués chaque année à 1,7 milliard de francs.
Cette volonté s'est concrétisée, au mois de septembre dernier, par la
signature de la convention d'objectifs associant l'Etat et les partenaires
sociaux dans la réforme des structures du mouvement du 1 %.
Le choix d'une Union d'économie sociale empruntant toutes les caractéristiques
des sociétés coopératives répond, je le crois, à la spécificité du 1 %
logement. Ce statut garantit, en tout état de cause, une gestion saine puisque,
périodiquement, l'UESL devra faire procéder à l'examen analytique de sa
situation financière et de sa gestion.
L'étude d'impact réalisée à la demande du Gouvernement montre que les gains de
productivité et la réduction des coûts de gestion des comités
interprofessionnels du logement permettront, à terme, d'accroître de 400
millions à 500 millions de francs par an les capacités d'investissement du 1 %,
celui-ci participant ainsi au maintien ou à la création d'emplois dans le
bâtiment ; nous ne pouvons que nous en réjouir.
Cependant, mes collègues et moi-même resterons très vigilants quant aux
résultats de cette réforme.
M. Félix Leyzour.
Ah !
M. Jacques Machet.
Si les perspectives sont plutôt favorables, il n'en demeure pas moins que le
mouvement du 1 % se trouve dans une situation financière pour le moins
délicate. Sa contribution au financement des prêts à taux zéro sera encore de 7
milliards de francs en 1997 et en 1998. Devra-t-il recourir à des emprunts ou à
des refinancements, grâce à la mobilisation partielle des actifs des
collecteurs ?
Malgré ce besoin de financement, qui nous inquiète, le mouvement du 1 %
logement, grâce à ses nouvelles structures, pourra poursuivre son oeuvre en
faveur des salariés. Aujourd'hui, la plupart des plans de financement de
construction de logements sociaux et des prêts d'accession à la propriété
comportent une participation importante du 1 %. Les entreprises sont toujours
conscientes de la nécessité de contribuer au logement de leurs salariés et de
leurs familles.
Satisfaits de l'avancée réalisée par ce texte, qui renforce le rôle social et
économique du 1 % logement, mes collègues du groupe de l'Union centriste et
moi-même le voterons.
Nous saisissons cette occasion, monsieur le ministre, pour vous renouveler
notre soutien vigilant dans l'action que vous menez et que nous considérons
comme essentielle pour la nation.
Comment le rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille
sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, que nous avons
discuté la semaine dernière, pourrait-il ne pas affirmer en cet instant que le
logement est une condition fondamentale de l'épanouissement de la famille ?
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. César.
M. Gérard César.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, conçue il y
a vingt ans, la politique du logement doit être adaptée en profondeur au
contexte économique et social actuel : elle doit rechercher la plus grande
efficacité dans l'utilisation de toutes les ressources, que ce soient celles de
l'Etat ou celles du 1 % logement, afin de répondre à l'impératif de réduction
de nos dépenses publiques.
Mais elle doit également, on l'oublie trop souvent, contribuer à lutter contre
la désertification rurale.
Une des vocations de l'espace rural - je l'avais souligné en 1994, dans le
cadre de la mission sénatoriale d'information sur l'aménagement du territoire -
est d'accueillir et d'héberger les citadins qui sont à la recherche d'un
logement calme et naturel ou, plus simplement, d'un logement bon marché.
Mettre l'espace rural en mesure de remplir cette fonction résidentielle est
bien une des façons de lutter contre la désertification. On aurait tort de
négliger l'apport de simples résidents en termes de réhabilitation du
patrimoine, de clientèle pour le commerce et l'artisanat et, plus généralement,
de vitalité.
La disponibilité de logements locatifs à des prix abordables, mais dotés du
confort moderne, est donc un élément essentiel pour l'avenir de l'espace
rural.
Malheureusement, l'état des lieux du logement rural fait apparaître
l'existence d'un grand nombre de logements vacants qui ne viennent pas sur le
marché, le vieillissement, le mauvais entretien et l'inconfort de la plupart
d'entre eux ainsi que l'appropriation de ces logements par des ménages qui ne
se soucient ni de les entretenir ni de les louer.
Les conséquences de cette situation sont évidentes : les jeunes ménages et les
personnes âgées à faible revenu sont rejetés vers le marché urbain ; les
entreprises situées dans les zones rurales éprouvent des difficultés à recruter
des salariés, ce qui freine les implantations d'activités nouvelles ; enfin, le
patrimoine bâti de caractère, élément majeur de la qualité de la vie au sein de
l'espace rural, se dégrade faute d'être réhabilité.
Une véritable politique d'aménagement du territoire devrait aller au-delà
d'une révision des aides existantes et inclure un véritable projet spécifique
au logement dans l'espace rural. S'il était conçu en synergie avec les
initiatives prises en faveur du développement économique et de l'insertion
sociale, un tel projet aurait un impact décisif sur la revitalisation de
l'espace rural.
M. Raymond Courrière.
Il ne suffit pas de le dire, il faut le faire !
M. Gérard César.
La politique du logement doit enfin et surtout garantir le droit de chacun de
nos concitoyens à être logé décemment.
A cet égard, le Président de la République a pris un double engagement : celui
de « répondre à l'urgence en faveur des plus démunis, ceux qui ont perdu leur
toit, et souvent leur compagnon ou leur compagne, en même temps que leur emploi
» ; celui aussi de « réformer le financement du logement et de favoriser ainsi
l'accession à la propriété des classes moyennes ».
Depuis dix-huit mois, monsieur le ministre, vous mettez tout votre courage et
votre détermination dans la réalisation de ces engagements, et je tiens à
saluer votre action.
Je veux également dire ici combien votre projet de budget pour l'année 1997
s'inscrit dans cette ambition. Il renforce en effet les deux objectifs que vous
vous étiez fixés dès 1995 : d'une part, offrir à chacun un logement selon son
choix et ses moyens et concrétiser ainsi le droit au logement ; d'autre part,
soutenir, à travers le logement, l'activité et l'emploi.
C'est ainsi que la construction de 80 000 logements sociaux PLA et PLA-TS -
prêts locatifs aidés très sociaux - et la réhabilitation de 120 000 HLM seront
financées en 1997.
C'est ainsi encore que la priorité en faveur des plus démunis sera renforcée,
notamment avec la création d'une ligne budgétaire spécifique, dotée de 348
millions de francs, qui financera l'ensemble des actions les plus sociales, et
d'un compte d'affectation spécial, doté de 450 millions de francs, qui
financera, quant à lui, le fonds de solidarité pour le logement et l'aide au
logement temporaire.
Par ailleurs, les aides personnelles au logement seront clarifiées et
simplifiées.
Quant au soutien de l'activité et de l'emploi, il sera conforté par quatre
dispositions importantes : maintien d'un programme physique élevé de logements
sociaux ; maintien de 120 000 prêts à taux zéro, sans modification des barèmes
d'accès, grâce à la baisse des taux ; maintien des capacités d'intervention du
1 % logement ; enfin, maintien de la politique d'amélioration des logements
anciens, avec notamment 120 000 PALULOS - prime à l'amélioration des logements
à usage locatif et à occupation sociale - pour la réhabilitation des HLM, 600
millions de francs pour la prime à l'amélioration de l'habitat et 2 milliards
de francs inscrits au titre des crédits pour l'agence nationale pour
l'amélioration de l'habitat.
Malgré les contraintes budgétaires que rend indispensables le redressement de
notre pays, les priorités en matière de logement sont ainsi maintenues. La
France aura attendu de nombreuses années, deux mandats présidentiels, avant de
retrouver enfin une véritable politique du logement, et c'est tout à votre
honneur, monsieur le ministre.
(Très bien ! sur les travées du RPR.)
Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui engage la réforme
attendue du 1 % du logement, dont l'Union d'économie sociale du logement sera
le pivot.
Certes, l'union des collecteurs apportera à l'Etat une contribution
exceptionnelle de 7 milliards de francs en 1997, et autant en 1998, pour le
financement des aides à la pierre, mais il s'agit surtout de mener la
réorganisation programmée du 1 % logement dans le sens d'une amélioration de sa
productivité, ainsi que M. le rapporteur en a fait la démonstration.
Tous les acteurs concernés ont maintenant compris que la survie du 1 %
logement passait obligatoirement par un changement radical.
Le 1 % logement investit chaque année 13 milliards de francs dans le logement.
Il présente ainsi une importance considérable pour la mise en oeuvre d'une
politique du logement répondant aux besoins des salariés et de l'économie du
bâtiment.
En outre, le mouvement du 1 % souhaitait réformer ses conditions
d'intervention pour en améliorer l'efficacité, au service des salariés des
entreprises, et pour soutenir la politique nationale en faveur de la
construction et de la réhabilitation.
Il souhaitait, en particulier, qu'on définisse un cadre stable à son
intervention, lui donnant une visibilité à moyen terme.
Il était donc prêt à se réformer, et c'est pourquoi il a donné son accord sur
votre projet de loi, monsieur le ministre. Il s'est d'ailleurs engagé par une
convention d'objectifs conclue le 17 septembre dernier entre le Gouvernement et
l'UNIL et contresignée par le CNPF, la Confédération générale des petites et
moyennes entreprises, la CFDT et la CFE-CGC.
Cette convention vise à renforcer le rôle des partenaires sociaux dans la
conduite du 1 % logement. Ces derniers auront ainsi les moyens de réorganiser
le dispositif. Ils ont d'ailleurs toute légitimité à le faire puisqu'ils
représentent les entreprises qui paient la participation et les salariés qui en
bénéficient.
La convention retient comme objectif de maintenir la capacité d'investissement
du 1 % logement afin de répondre aux demandes des salariés et de soutenir
l'activité du bâtiment, et donc l'emploi.
Le projet de loi s'inscrit dans le prolongement de cette convention. C'est une
démarche contractuelle et consensuelle que vous menez aujourd'hui, monsieur le
ministre, et c'est la bonne façon de procéder.
M. Raymond Courrière.
Vous n'êtes pas difficile !
M. Gérard César.
Avec l'Union d'économie sociale du logement, les cent soixante-treize
collecteurs interprofessionnels agréés pour la collecte du 1 % logement seront
dotés d'un organe fédérateur.
De plus, sous le contrôle des partenaires sociaux, cette union des collecteurs
sera l'interlocuteur privilégié des pouvoirs publics pour la définition d'une
politique contractuelle d'emploi du 1 % logement et elle coordonnera la mise en
oeuvre de cette politique par l'ensemble des collecteurs
interprofessionnels.
Enfin, elle engagera les réformes nécessaires à l'amélioration de l'efficacité
et de la productivité des collecteurs interprofessionnels.
Le 1 % logement sera ainsi pourvu d'un organe qui lui permettra d'asseoir sa
légitimité et d'améliorer son efficacité, gages de pérennité.
Je souhaiterais cependant, monsieur le ministre, attirer votre attention sur
deux points particuliers.
En premier lieu, il serait souhaitable que les chambres de commerce et
d'industrie, organismes collecteurs à hauteur de 5 %, participent à l'Union
d'économie sociale du logement, afin de donner une plus grande efficacité au
dispositif envisagé. J'ai déposé avec M. Jean Bernard un amendement en ce
sens.
En second lieu, il conviendrait que les dispositions proposées puissent
faciliter la cession et le nantissement des créances détenues par l'Union et
ses associés collecteurs. C'est l'objet d'un autre amendement que j'ai signé
avec M. Bernard et les membres du groupe du RPR.
La cession et le nantissement de ces créances pourraient en effet être
réalisés par la remise du bordereau mentionné à l'article 1er de la loi du 2
janvier 1981 modifiée, facilitant le crédit aux entreprises ; une telle
procédure serait, à mon sens, plus simple que celle du nantissement civil.
Monsieur le ministre, tant votre budget pour l'année 1997 que le projet de loi
que vous nous présentez aujourd'hui attestent la dynamique de la politique
publique en faveur du logement ; chacun ne peut que s'en féliciter.
Vous pouvez compter sur le groupe du RPR du Sénat pour soutenir votre action
en faveur du logement.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Vezinhet.
M. André Vezinhet.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
loi qui est aujourd'hui soumis à notre examen en première lecture présente
toutes les apparences de la limpidité, de la simplicité et de l'évidente
nécessité.
En effet, ce texte très court, puisqu'il ne comporte que quatre articles, vise
à doter le mouvement du 1 % logement d'un nouvel outil : l'Union d'économie
sociale du logement, qui revêtirait la forme juridique d'une société anonyme
coopérative. Selon l'exposé des motifs, cette union aurait pour objet d'assurer
une fonction de représentation auprès des services publics, de développer les
politiques contractuelles avec l'Etat pour l'emploi des fonds du 1 % logement
et de réformer de l'intérieur les structures et les méthodes, afin d'améliorer
la productivité et l'efficacité du 1 % logement.
Qui n'approuverait un tel énoncé de bonnes intentions ? Qui n'approuverait un
renforcement du paritarisme de nature à garantir la stabilité du dispositif et
à pérenniser de la sorte le service offert par celui-ci aux salariés ? C'est
dans cet esprit, n'en doutons pas, que des organisations syndicales de salariés
et le CNPF ont été amenés à conclure, le 17 septembre dernier, une convention
avec l'Etat.
Mais l'arbre des bonnes intentions ne cache-t-il pas la forêt des dispositions
qui conduiront en fait à l'exécution capitale du « 1 % logement » ?
M. Félix Leyzour.
Exactement !
M. André Vezinhet.
Il est en effet évident, monsieur le ministre, qu'il n'est pas possible de
porter une appréciation sur les dispositions que vous nous demandez d'adopter
aujourd'hui sans prendre en compte la convention du 17 septembre 1996, plus
particulièrement la disposition inacceptable qui consiste à opérer, en deux
ans, un prélèvement de 14 milliards de francs sur les ressources des CIL.
M. Raymond Courrière.
Très bien !
M. André Vezinhet.
L'article 29 du projet de loi de finances pour 1997 qui a été adopté par
l'Assemblée nationale et dont nous aurons, mes chers collègues, à débattre dans
quelques jours prévoit la mise en oeuvre de ce dispositif. En examinant les
dispositions de ce projet de loi de finances qui portent lourdement préjudice à
la politique du logement social, qu'il s'agisse de la diminution des aides à la
pierre dont le 1 % logement fait partie ou de la baisse des aides à la
personne, nous comprendrons peut-être mieux les véritables intentions du
Gouvernement.
Dans ce contexte qui ne peut pas être dissocié de la mise en place de l'Union
d'économie sociale du logement, il n'est plus permis de douter : il nous est
proposé non pas de rendre plus transparent le fonctionnement du 1 % logement
mais, à terme, de supprimer celui-ci.
M. Raymond Courrière.
Très bien !
M. André Vezinhet.
Le Gouvernement nous assure, de manière quelque peu paradoxale, que la
convention conclue le 17 septembre dernier a été librement négociée et que, de
toute façon, elle constituait la seule solution pour sauver le 1 % logement.
Nous ne pouvons souscrire à de telles affirmations.
Personne n'a oublié que l'UNIL et les partenaires sociaux ont dû se rendre à
la table des négociations un peu comme les bourgeois de Calais, au côté d'un
gouvernement qui projetait, à l'époque, un prélèvement de 11 milliards de
francs, et ce pour la seule année 1997. Cette ponction a été ramené à 7
milliards de francs cette année-là mais elle a été reconduite en 1998. Cette
mesure a un coût très lourd puisqu'il est supérieur à la totalité de la
collecte des CIL.
En 1994, dernière année de référence, cette collecte s'est élevée à 6,3
milliards de francs. Les CIL devront donc puiser dans leurs recettes liées aux
remboursements des prêts à long terme pour faire face aux exigences de
l'Etat.
En tant qu'élu de la nation, mais aussi en tant qu'élu local, j'estime que
cette mesure est prohibitive et inacceptable dans son principe même. En effet,
de quoi s'agit-il sinon d'un nouvel exemple du désengagement financier de
l'Etat à l'égard du logement social locatif ?
Il s'agit, en réalité, du financement déguisé de l'accession à la propriété
par le biais du prêt à taux zéro. Nous assistons donc à un nouveau tour de
passe-passe, qui transforme des ressources extra-budgétaires en ressources
budgétaires et qui permet de faire apparaître une croissance de 1,5 % du budget
du logement.
Il ne s'agit plus, monsieur le ministre, de gestion des affaires publiques,
c'est de la prestidigitation, et permettez-moi de vous dire que personne n'est
dupe !
Si je devais justifier mes propos, je ne trouverai pas meilleur avocat que M.
Philippe Auberger, rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale, qui
déclarait : « La contribution qui est demandée aux organismes collecteurs du 1
% est absolument essentielle à l'équilibre de la loi de finances. »
Ainsi, la collecte du 1 % logement permettra de financer le prêt à taux zéro
en 1997 et en 1998, et ce prélèvement conduira, ce qui est tout de même un
comble, les organismes collecteurs à emprunter sur le marché financier afin de
préserver leurs capacités d'investissement. Quel sera alors le taux de ces
emprunts ? N'y a-t-il pas un risque de cavalerie ?
Tout le monde s'accorde à reconnaître que la participation des employeurs à
l'effort de construction est un élément fondamental d'une politique de
développement du logement locatif social. Elle est même très souvent
indispensable au bouclage financier de nombre d'opérations.
En tant que président d'un OPAC à Montpellier, je me demande si le CIL du
département de l'Hérault pourra contribuer, comme il l'a si souvent fait par le
passé, au montage de mes opérations.
En 1994, la participation des employeurs à l'effort de construction a permis
de contribuer au financement de 187 740 logements locatifs, dont 50 590 en
région parisienne et 137 150 en province. C'est tout ce dispositif qui se
trouvera donc remis en cause.
Si l'effort des employeurs mérite d'être souligné, n'oublions jamais que la
collecte du 1 % logement » concerne également les employés et que ces derniers
ne peuvent que se sentir spoliés par ce « rapt » de la collecte qui nous est
proposé.
Aussi, personne ne peut croire, dans cette enceinte, qu'il est possible de
prélever impunément 14 milliards de francs sur le 1 % logement sans qu'il n'y
ait aucune incidence sur la construction de logements locatifs sociaux,
notamment dans les zones où le montage des opérations est très « tendu » et où
le recours au 1 % logement est incontournable.
Certes, la convention précise que la part du 1 % logement réservée aux
logements locatifs sociaux, soit 40 %, doit être préservée ; mais que vaut
cette promesse face à la réalité économique ? En effet, la part du 1 % logement
qui manquera équivaut en fait à financer 100 000 logements locatifs sociaux en
moins sur dix ans.
Au total, cette politique, qui passe par le présent projet de loi, aggravera
les difficultés de construction pour les HLM et entraînera une diminution du
nombre des constructions de logements locatifs sociaux, pour lesquels les
listes d'attente ne cessent de s'allonger dans nos départements.
La demande locative est une demande prioritaire de notre société urbaine en
crise, contrairement à la demande d'accession à la propriété, même si nous
voudrions, comme vous, que tous nos locataires puissent, demain, devenir
propriétaires. Mais telle n'est pas la réalité.
Le projet de loi que vous nous proposez entraînera la perte de nombre
d'activités et d'emplois dans les entreprises du bâtiment.
M. Gérard Delfau.
C'est vrai !
M. André Vezinhet.
Vous ne pouvez pas, monsieur le ministre, ne pas avoir entendu l'appel de
détresse lancé hier soir dans les colonnes du journal
Le Monde
par le
président de la Fédération nationale du bâtiment. Il demandait en effet au
Gouvernement d'autoriser le départ anticipé à la retraite de 30 000 salariés de
ce secteur, afin de pallier la forte réduction d'activité.
Dans la seule région Languedoc-Roussillon, dont j'ai l'honneur d'être issu, 1
600 licenciements ont été annoncés par le président de la fédération régionale
du bâtiment pour le second semestre de 1996, soit plus qu'au cours des six
dernières années. M. Jacques Chirac, alors candidat à la présidence de la
République, avait bien raison d'appeler de ses voeux un plan Marshall pour la
ville et le logement afin d'éviter la fracture sociale. Comme il y a loin de la
promesse à la réalité à laquelle vous nous confrontez aujourd'hui !
M. Gérard Delfau.
Eh oui !
M. André Vezinhet.
Le présent projet de loi pose beaucoup plus de questions qu'il n'en résout. Je
vous livrerai pêle-mêle quelques interrogations auxquelles je souhaiterais que
vous répondiez, monsieur le ministre.
La restructuration du dispositif, avec la création de l'UESL, ne risque-t-elle
pas d'opérer un changement de nature du 1 % logement ? Le renforcement du
paritarisme ne risque-t-il pas d'être fragilisé par un retour en force de
l'Etat par le biais des conventions ?
Jusqu'à aujourd'hui, le 1 % logement était un mode de financement du logement
social très décentralisé, l'Etat n'en fixant que le cadre réglementaire et le
législateur les grandes orientations.
Par ailleurs, la finalité de ces conventions en matière de politique du
logement ne nous est pas précisée. Certes, ces dernières devront respecter le
cadre législatif - le logement des salariés - mais la rédaction retenue ne
permet pas de répondre clairement à l'un des soucis des partenaires sociaux qui
souhaitent renforcer l'objet social du 1 % logement.
Ainsi, nous pouvons craindre, faute d'encadrement plus précis du dispositif,
que les dérives dénoncées par certains ne perdurent, notamment les prêts à des
dirigeants d'entreprises cotisantes ou l'utilisation des CIL comme outil
financier au service d'intérêts privés étrangers à leur fonction sociale.
Face à la crise créée par le prélèvement sur la collecte, ne peut-on pas
craindre des choix ne reposant sur aucun critère objectif et visant à écarter
des demandeurs du dispositif ?
De fait, la transparence et le paritarisme seraient donc illusoires dans la
mesure où une mainmise de l'Etat, par le biais de ces mêmes conventions, est à
craindre, celui-ci étant tenté de faire pression pour faire prévaloir son point
de vue. Le meilleur exemple de ce comportement ne date-t-il pas de la
convention du 17 septembre dernier ?
Une autre question fondamentale se pose : que se passera-t-il dans deux ans ?
Aucune certitude n'existe à ce jour, pas même un début de réponse.
Permettez-moi de citer notre collègue René Beaumont, rapporteur pour avis du
budget du logement à l'Assemblée nationale : « Si pour 1997 et 1998 la
situation est claire, il n'en va toutefois pas de même pour la période
postérieure à 1998. Il faudra alors prendre des décisions importantes. La
pérennisation au-delà de 1998 d'un prélèvement annuel de 7 milliards de francs
n'étant pas envisageable sans remettre en cause gravement l'équilibre général
du système, il conviendra, si l'on veut maintenir le niveau des aides publiques
au logement, de "retrouver" 7 milliards de crédits budgétaires, ce
qui, pour parler par euphémisme, risque de constituer un exercice difficile
pour le ministre qui sera alors en charge du dossier. » Mais, peut-être
pensez-vous, monsieur le ministre, ne pas être celui-là !
Toutes ces considérations conduisent le groupe socialiste à juger que ce
projet de loi, qui n'est qu'une des facettes de la politique globale du
logement social menée par le Gouvernement, que nous dénonçons, est un pari sur
l'avenir, certes, mais un pari dangereux auquel il ne peut ni ne veut
souscrire.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen. - M. François Giacobbi applaudit
également.)
M. Pierre-André Périssol,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Pierre-André Périssol,
ministre délégué.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens d'ores et
déjà à vous apporter quelques éléments de réponse.
Selon M. Leyzour, ce projet de loi serait la conséquence de la loi de finances
pour 1997. Je tiens à vous préciser, monsieur le sénateur, que, dès le 11
juillet 1994, les partenaires sociaux avaient demandé à mon prédécesseur, M.
Hervé de Charette, la création d'une Union d'économie sociale du logement. Dès
l'été 1995, j'avais moi-même reçu l'ensemble des partenaires sociaux, qui
m'avaient demandé avec force de m'engager dans cette voie. Simplement, le temps
m'avait manqué pour élaborer, puis déposer ce projet de loi. Il s'agit donc
d'une demande ancienne, préexistante au projet de loi de finances pour 1997.
Par ailleurs, vous vous êtes inquiété de savoir, monsieur le sénateur, s'il
n'y avait pas un risque - ce serait même, selon vous, notre objectif, avez-vous
dit - de centraliser des fonds par ce biais. Je puis vous renouveler, de la
manière la plus solennelle qui soit, les propos que je tenais tout à l'heure en
introduction du débat : il n'y a aucune intention, de la part du Gouvernement,
de permettre à cette occasion la centralisation de ces fonds, bien au
contraire, je suis convaincu, je le répète, de l'intérêt d'un ancrage réel des
CIL sur tout le territoire national et, surtout, de la nécessité d'un bon
emploi local des fonds.
En effet, le 1 % a pour vocation de servir les salariés des entreprises, soit
par le biais de prêts à personne physique, lorsqu'il s'agit d'accession à la
propriété, soit par le biais du financement complémentaire du prêt locatif aidé
pour le logement locatif social.
C'est sur le terrain que l'on connaît le mieux les besoins et que les salariés
ont besoin de recevoir les fonds correspondant au 1 %.
Il ne s'agit donc pas, au travers de ce projet de loi, d'une manière
quelconque, j'allais presque dire de prendre le risque d'une centralisation. M.
le rapporteur présentera, lors de l'examen des articles, des amendements
tendant à renforcer les dispositions de nature à écarter ce risque. Il partage
en effet, comme tous les membres de la Haute Assemblée, me semble-t-il, sur
quelque travée qu'ils siègent, ce souci de préserver l'emploi local des fonds
du 1 %.
Monsieur Vezinhet, vous avez parlé avec beaucoup d'aplomb de spoliation, de
rapt, de prestidigitation... Je n'ai pas ici, je l'avoue, le compte rendu de
vos interventions, ou de celles d'autres membres du groupe socialiste, lors des
années précédentes. Mais dois-je vous rappeler que, en 1982, le 1 % a été
ramené par le gouvernement socialiste et communiste à 0,9 %, le 0,1 %
correspondant à la baisse étant affecté au financement du fonds national d'aide
au logement ?
En décembre 1985, vous avez encore abaissé le 1 %, qui était devenu 0,9 %, à
0,77 % !
En 1988, pour la loi de finances de 1989, vous avez ramené le taux, qui était
passé à 0,72 %, à 0,65 %, tout en maintenant la contribution au financement du
fonds national d'aide au logement.
Et le taux a été ramené à 0,55 % en 1991 et, dans la foulée, à 0,45 % en 1992
!
J'entends d'ici vos indignations de l'époque dans un assourdissant silence !
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. Emmanuel Hamel.
Ils persévèrent dans le mal !
M. André Vezinhet.
Vous, vous le ramenez à zéro !
M. Gérard Delfau.
Où est la justification ?
M. Pierre-André Périssol,
ministre délégué.
Vous avez évoqué, monsieur le sénateur, les difficultés
que traverse aujourd'hui le secteur du bâtiment - il s'agit effectivement d'un
problème préoccupant - et vous avez fait allusion au cri d'alarme lancé hier
par la Fédération nationale du bâtiment.
Je connais ces difficultés.
Mais vous savez aussi que, depuis quelques mois, on constate une augmentation
des ventes de logements, pour la première fois depuis bien longtemps. Il
importe de ne pas pratiquer l'amalgame entre les difficultés auxquelles se
trouve confronté le bâtiment et la situation en matière de logement, et,
a
fortiori,
le 1 %.
Soyons clairs : on observe une reprise s'agissant de la vente de logements et
le bâtiment connaît des difficultés, mais, que je sache, la Fédération
nationale du bâtiment ne formule pas d'opposition à ce projet de loi, elle sait
qu'il permettra de mieux organiser une profession et de mieux relégitimer le 1
% logement.
M. André Vezinhet.
Je souhaite que vous ayez raison !
M. Pierre-André Périssol,
ministre délégué.
Vous avez abordé une autre question, monsieur le
sénateur, et je vais essayer d'en reprendre les termes exacts. « Le
renforcement du paritarisme que prévoit ce texte » - je vous remercie de m'en
avoir donné acte - « n'est-il pas menacé par le retour en force de l'Etat par
le biais des conventions ? » J'avoue que je ne comprends pas !
L'Etat est intervenu régulièrement dans le domaine du 1 % au travers des
prélèvements que j'ai cités et en édictant régulièrement, par voie
réglementaire, les emplois de ce 1 %.
Cette année, nous engageons une politique contractuelle et nous prévoyons,
dans le présent projet de loi, que l'emploi des fonds du 1 % fera l'objet de
conventions, c'est-à-dire de documents qui seront signés par les deux
parties.
On ne peut pas dire que le renforcement du paritarisme sera menacé par
l'intervention de l'Etat : dorénavant, celui-ci s'engage à intervenir par le
biais de conventions, c'est-à-dire dans un cadre contractuel.
Je tiens à remercier M. Machet, qui a bien voulu qualifier « d'oeuvre utile »
ce projet de loi et a rappelé qu'il était attendu par les professionnels.
Je souhaite également remercier M. César, qui a rappelé la réforme engagée et
menée à bien par le Gouvernement de M. Juppé depuis dix-huit mois en matière de
logement.
Il a fait part de son souci de ne pas voir tous les efforts concentrés dans
les zones urbaines et demandé que soit pris en compte l'habitat rural, afin
d'assurer de bonnes conditions d'habitat sur l'ensemble de notre territoire. Il
a exprimé le voeu que l'ensemble des actions en matière de logement, qu'il
s'agisse du 1 % ou des aides de l'Etat, concernent également le secteur
rural.
Je suis d'accord avec vous, monsieur le sénateur, pour dire que l'habitat
constitue souvent un élément essentiel d'équilibre de notre territoire.
Enfin, vous avez évoqué le rôle des chambres de commerce et d'industrie dans
la collecte du 1 %. Vous avez déposé un amendement sur ce sujet, me semble-t-il
; vous me permettrez donc d'évoquer ce point lors de la discussion des
articles.
Enfin, je renouvellerai mes remerciements et mes félicitations à M. le
rapporteur pour la manière claire et objective avec laquelle il a posé la
problématique et analysé ce projet de loi.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
M. Marcel-Pierre Cléach,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Marcel-Pierre Cléach,
rapporteur.
Monsieur le président, je sollicite une suspension de séance
de quelques minutes, afin de permettre à la commission d'examiner un amendement
qui a été réservé ce matin.
M. le président.
Le Sénat va, bien sûr, accéder à votre demande, monsieur le rapporteur.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante-cinq, est reprise à dix-huit
heures cinq.)