SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
MM. le président, Bernard Joly.
2.
Candidature à un organisme extraparlementaire
(p.
1
).
3.
Dépôt d'un rapport de la Cour des comptes
(p.
2
).
4.
Contrats de services et de fournitures.
- Adoption d'un projet de loi (p.
3
).
Discussion générale : MM. Yves Galland, ministre délégué aux finances et au
commerce extérieur ; Henri Revol, rapporteur de la commission des affaires
économiques ; Félix Leyzour, Claude Estier.
Clôture de la discussion générale.
Article 1er (p. 4 )
Amendement n° 1 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 2 (p. 5 )
Amendements n°s 2, 3, 4 rectifié, 5, 6, 7 rectifié et 8 de la commission. - MM.
le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption des sept amendements.
Amendements n°s 16, 17 et 15 de M. Grignon. - MM. Grignon, le rapporteur, le
ministre délégué. - Retrait des amendements n°s 16 et 17 ; adoption de
l'amendement n° 15.
Adoption de l'article modifié.
Article 3 (p. 6 )
Amendement n° 9 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 4 (p. 7 )
Amendement n° 10 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 5 (p. 8 )
Amendement n° 11 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 6 (p. 9 )
Amendement n° 18 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles 7 et 8. - Adoption (p.
10
)
Article 9 (p.
11
)
Amendement n° 12 rectifié bis de la commission et sous-amendement n° 19 de M. Grignon. - MM. le rapporteur, Grignon, le ministre délégué. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement rédigeant l'article.
Article 10 (p. 12 )
Amendement n° 13 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 11 (p. 13 )
Amendement n° 14 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. -
Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles 12 et 13. - Adoption (p.
14
)
Vote sur l'ensemble (p.
15
)
M. Edmond Lauret.
Adoption du projet de loi.
5.
Nomination d'un membre d'un organisme extraparlementaire
(p.
16
).
Suspension et reprise de la séance (p. 17 )
6.
Déclaration de l'urgence d'un projet de loi
(p.
18
).
7.
Professionnalisation des armées. -
Adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence (p.
19
).
M. le président.
Discussion générale : MM. Charles Millon, ministre de la défense ; Nicolas
About, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et
des forces armées ; André Rouvière, Jacques Bimbenet, Jean-Claude Carle, Daniel
Goulet, Jacques Habert, Jean-Luc Bécart.
M. le ministre.
Clôture de la discussion générale.
Article 1er (p. 20 )
Amendement n° 1 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article 2. - Adoption (p.
21
)
Article 3
(supprimé)
(p.
22
)
Articles 4 et 5. - Adoption (p.
23
)
Article additionnel avant l'article 6 (p.
24
)
Amendement n° 2 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 6 (p. 25 )
Amendements n°s 3 rectifié à 5 de la commission. - MM. le rapporteur, le
ministre. - Adoption des trois amendements.
Adoption de l'article modifié.
Articles 7, 8, 8
bis
et 9 à 12. - Adoption (p.
26
)
Article additionnel après l'article 12 (p.
27
)
Amendement n° 6 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Articles 13 et 14. - Adoption (p.
28
)
Vote sur l'ensemble (p.
29
)
MM. Emmanuel Hamel, Jacques Machet, Daniel Eckenspieller, Jean-Claude Carle,
André Rouvière.
Adoption du projet de loi.
M. le ministre.
8.
Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
(p.
30
).
9.
Dépôt de propositions de résolution
(p.
31
).
10.
Dépôt de propositions d'acte communautaire
(p.
32
).
11.
Dépôt d'un rapport d'information
(p.
33
).
12.
Ordre du jour
(p.
34
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le procès-verbal de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?
M. Bernard Joly.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly.
Monsieur le président, tel qu'il a été publié au
Journal officiel,
le
résultat du scrutin n° 30 sur l'ensemble du projet de loi relatif au
financement de la sécurité sociale pour 1997 fait apparaître que mon collègue
M. Lesein s'est exprimé en faveur du texte, alors qu'il souhaitait voter contre
ce dernier.
M. le président.
Acte vous est donné de votre mise au point, mon cher collègue.
Il n'y a pas d'autre observation ?...
Le procès-verbal est adopté.
2
CANDIDATURE À
UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président.
Je rappelle que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir
procéder à la désignation d'un sénateur appelé à siéger au sein d'un organisme
extraparlementaire.
La commission des affaires économiques et du Plan a fait connaître qu'elle
propose la candidature de M. Jacques Braconnier pour siéger au sein du comité
de liaison pour le transport des personnes handicapées.
Cette candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l'article 9
du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.
3
DÉPÔT D'UN RAPPORT
DE LA COUR DES COMPTES
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier président de la Cour des
comptes un rapport relatif aux interventions des collectivités territoriales en
faveur des entreprises.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
4
CONTRATS DE SERVICES
ET DE FOURNITURES
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 9, 1994-1995)
complétant, en ce qui concerne certains contrats de services et de fournitures,
la loi n° 91-3 du 3 janvier 1991 relative à la transparence et de la régularité
des procédures de marchés et soumettant la passation de certains contrats à des
règles de publicité et de mise en concurrence, et la loi n° 92-1282 du 11
décembre 1992 relative aux procédures de passation de certains contrats dans
les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des télécommunications.
(Rapport n° 51 [1996-1997]).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Yves Galland,
ministre délégué aux finances et au commerce extérieur.
Monsieur le
président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous
sommes réunis aujourd'hui pour examiner le projet de loi qui constitue la
dernière étape de l'adoption des textes législatifs nécessaires à la
transposition dans notre droit des directives européennes relatives aux
procédures de marchés publics.
Je remercie tout d'abord M. Revol et les membres de la commission des affaires
économiques et du Plan du remarquable travail de présentation et d'analyse
qu'ils ont effectué. En effet, ce travail éclaire le texte, très technique, du
projet de loi déposé en octobre 1994 sur le bureau de la Haute Assemblée.
La tâche n'était pas aisée, dans la mesure où le projet se présente comme un
texte d'amendement et de complément à deux lois de transposition existantes.
L'effort de reformulation et de présentation qui a été opéré par le rapporteur
et la commission des affaires économiques et du Plan au Sénat a été, à cet
égard, tout à fait exceptionnel.
La transposition du volet « services » des directives « marchés publics »
intervient dans un calendrier très contraint. En effet, la directive sur les
marchés de services des opérateurs publics - Etat, collectivités locales,
établissements publics - devait être transposée à compter du 1er juillet
1993.
Le volet « services » de la directive concernant les contrats des opérateurs
de réseaux - gestionnaires de grands services publics dans le domaine de l'eau,
de l'énergie, des transports et des télécommunications - devait l'être au 1er
juillet 1994.
De ce fait, la France a été condamnée, le 4 mai 1996, aux côtés de l'Allemagne
et de la Grèce, par la Cour de justice des Communautés européennes pour
manquement à son obligation de transposer la directive sur les marchés de
services.
J'ajoute que, si la France tardait encore à transposer cette directive, la
Commission pourrait engager une nouvelle procédure, cette fois en manquement,
sur la base de l'article 171 du traité, pour non-exécution de la décision
rendue par la Cour de justice. Cette dernière pourrait ainsi condamner la
France à payer une astreinte.
Par ailleurs, au mois de juin dernier, la Commission a saisi la Cour de
justice d'un nouveau recours en manquement, pour non-transposition du volet «
services » relatif aux opérateurs de réseaux.
Si la plupart des Etats membres avaient, jusqu'à ce jour, pris du retard dans
la transposition de ces directives, je constate aujourd'hui que tous nos
partenaires devraient, à très court terme désormais, avoir achevé leur
processus de transposition.
L'inscription à l'ordre du jour de votre assemblée de ce projet de loi était
donc devenue tout à fait prioritaire. Toutefois, je puis vous indiquer que les
entreprises - tant nationales que ressortissantes des autres Etats membres -
n'ont pas eu à souffrir du défaut de transposition de ces directives, car la
plupart des dispositions de celles-ci, notamment l'obligation de publicité
communautaire, étaient suffisamment claires et inconditionnelles pour être
directement applicables, en vertu d'une jurisprudence constante. La commission
centrale des marchés, au ministère de l'économie et des finances, avait
d'ailleurs donné toutes instructions en ce sens.
Je souhaiterais rappeler, en premier lieu, les grandes étapes du processus
d'adoption et de transposition des directives européennes relatives aux marchés
publics.
Il existe six directives communautaires sur l'ouverture des marchés publics.
Quatre concernent l'harmonisation des procédures de passation des marchés
publics portant sur les marchés de fournitures, travaux et services des
opérateurs publics classiques - Etat, collectivités territoriales et certains
organismes privés d'intérêt général - et, parmi ces quatre directives, une
porte sur l'ensemble des contrats des opérateurs de réseaux, SNCF, EDF, France
Télécom, organismes de distribution d'eau...
Les deux dernières directives harmonisent les procédures de recours
administratifs et contentieux à la disposition des entreprises contre les
procédures des opérateurs publics classiques et des opérateurs de réseaux.
Le processus législatif communautaire d'ouverture des marchés publics est
donc, aujourd'hui, complètement achevé. La Commission s'est engagée,
conformément aux dispositions qui sont prévues dans le texte même des
directives, à les réviser en 1997-1998. A cet effet, la Commission va très
prochainement déposer un Livre vert, qui fera l'objet d'un débat important.
A cette date, comme je l'ai indiqué, seules les dispositions relatives aux
marchés de services des opérateurs publics et des opérateurs de réseaux ne sont
pas transposées, ainsi que quelques corrections qui ont été apportées à la
directive « fournitures » et qui figurent aux articles 1er et 10.
Je tiens, en second lieu, à vous apporter des précisions sur l'articulation
des différents textes qui doivent assurer la transcription en droit interne des
dispositions restant à transposer.
En ce qui concerne, tout d'abord, les pouvoirs adjudicateurs « publics » qui
relèvent de la directive 92-50, il faut distinguer deux catégories.
La catégorie la plus traditionnnelle est celle des pouvoirs adjudicateurs «
publics » : elle comprend l'Etat, les collectivités territoriales, les
établissements locaux publics ayant un caractère autre qu'industriel et
commercial, comme les établissements publics de santé, les établissements
publics d'enseignement, les offices d'HLM. Pour ces collectivités publiques, la
transposition se fera dans le cadre d'un décret autonome modifiant le code des
marchés publics. A cet égard, un projet de décret est en cours de mise au point
au niveau interministériel. Ces dispositions auront une durée de vie brève
puisqu'elles seront refondues dans le nouveau code des marchés publics, que
j'aurai l'honneur de vous soumettre au début de l'année prochaine.
Une seconde catégorie comprend les pouvoirs adjudicateurs des organismes
privés - mais sous contrôle public - chargés d'une mission d'intérêt général,
dont les marchés sont soumis également à des procédures de publicité et de mise
en concurrence. Sont ainsi concernées certaines associations sous contrôle
public, les caisses de sécurité sociale, un certain nombre de sociétés
d'économie mixte.
Ce sont précisément les contrats de ces organismes que vise le titre Ier du
projet de loi, qui complète à cet effet la loi du 3 janvier 1991, soumettant la
passation de certains contrats d'organismes privés d'intérêt général à des
règles de publicité et de mise en concurrence : cette loi voit son champ
d'application étendu aux contrats de services.
Je rappelle, à cet égard, que le projet de loi se borne à définir le champ
d'application des procédures, à la fois à raison des organismes assujettis, du
montant des contrats éligibles et, surtout, de la nature des prestations de
services concernées. En revanche, la description des procédures de publicité et
de mise en concurrence seront fixées par un décret d'application, comme ce fut
le cas, d'ailleurs, pour le texte initial de 1991.
La définition des prestations de services visées - qui concerne l'essentiel de
ce texte - apparaît complexe, dans la mesure où le monde des services est
extrêmement divers et comprend aussi bien les services de nettoyage ou
d'entretien que les services d'assurances ou le conseil juridique.
Si, dans le passé, il a été facile de donner une définition générique des
fournitures et des travaux, cela n'a pas été possible pour les marchés de
services et la Commission européenne a dû établir des listes de services.
Définir un champ d'application par référence à des listes n'est pas très
conforme, je le reconnais, à nos traditions de présentation des textes de loi.
Toutefois, le Gouvernement a dû se résigner à conserver cette présentation car
il est apparu que cette façon de faire était finalement la plus claire pour les
entreprises candidates aux marchés publics.
C'est ainsi que trois catégories de services sont décrites à l'article 2 du
projet de loi.
En premier lieu, les contrats de services qui sont soumis à l'ensemble des
mesures de publicité et de mise en concurrence européenne. Ce sont ceux qui
représentent les enjeux économiques les plus importants dans le cadre de
l'ouverture des marchés publics : les services d'entretien et de réparation,
les services de transports, certains services financiers, les services
informatiques, les services d'étude, les services d'architecture et
d'ingénierie... Des prestations comme les contrats d'assurance, qui ne
relevaient pas du code des marchés publics, devront à présent faire l'objet de
publicité et de mise en concurrence, mais les modalités de passation de ces
contrats seront adaptées à leur spécificité.
En deuxième lieu, les contrats de services dont l'enjeu est supposé moindre,
et qui ne font l'objet que d'une simple information
a posteriori
à
communiquer à la Commission de l'Union européenne lorsqu'ils ont été conclus :
la directive donne pour exemple les services d'hôtellerie et de restauration,
les services sociaux et sanitaires, les services culturels et sportifs...
En troisième lieu, enfin, les contrats de services qui ne sont soumis à aucune
procédure de marché public : services liés à des transactions immobilières,
contrats relatifs à l'achat de temps de diffusion audiovisuelle, contrats ayant
pour objet des services d'arbitrage et de conciliation... Il s'agit en effet de
types de contrats qui sont liés à des biens précis, ou qui sont si fortement
marqués par l'
intuitu personae
qu'ils se prêtent mal à une mise en
compétition de type classique.
Dans cette dernière catégorie, qui, je vous le rappelle, n'est soumise à
aucune procédure particulière, entrent les prestations de services fournies par
une collectivité publique à une autre collectivité publique dès lors que le
prestataire public en cause intervient sur la base d'un droit exclusif, en
application de dispositions législatives ou réglementaires. C'est le cas des
prestations de maîtrise d'oeuvre qui sont apportées par certains services
extérieurs de l'Etat à des collectivités locales.
Ces prestations font aujourd'hui l'objet d'amendements. Nous aurons donc
l'occasion d'en reparler. J'aurais d'ailleurs souhaité que ce débat se déroule
à l'occasion de l'examen du projet de loi, plus général, portant réforme des
marchés publics, qui aura lieu en début d'année prochaine.
L'extension du champ d'application de la publicité et de la mise en
concurrence aux contrats de services des organismes d'intérêt général va
s'accompagner de l'extension corrélative des procédures de recours spécifiques
aux marchés publics, notamment de celles du référé précontractuel, qui s'est
très largement développé au cours de ces dernières années. C'est l'objet des
articles 3 et 4 du projet.
Le titre II du projet de loi a pour objet de modifier la loi du 11 décembre
1992, relative aux procédures de passation de certains contrats - les
opérateurs de réseaux - dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des
transports et des télécommunications.
Là encore, il s'agit d'étendre les procédures de publicité et de mise en
concurrence communautaires aux contrats de services passés par les grands
opérateurs de services publics - j'en ai cité quelques-uns tout à l'heure.
Seuls les contrats de fournitures et de travaux de ces opérateurs faisaient,
jusqu'à présent, l'objet de telles procédures.
Le dispositif prévu aux articles 6, 9, 12 et 13 est le même que pour les
contrats de services des organismes privés d'intérêt général, visés au titre
Ier, puisque l'on retrouve la même classification en trois catégories :
contrats de services soumis à un régime complet de publicité et de mise en
concurrence ; contrats, au contraire, exclus de toute forme de procédure ;
enfin, contrats soumis à un régime allégé.
Des dispositions particulières, prévues aux articles 7 et 11, existent pour
les opérateurs du réseau et pour les opérateurs miniers, qui ont le plus
souvent une gestion d'entreprise et sont de plus en plus largement ouverts à la
concurrence interne et internationale ; les pratiques de prestations de
services « intra-groupes », qui donnent lieu, par exemple, au sein de ces
entreprises, à la constitution de filiales spécifiques - notamment pour les
prestations de transports ou d'informatique pour les besoins du groupe - sont
exclues du champ d'application des procédures communautaires.
Je rappelle, à cet égard, que les conditions de fonctionnement purement
industrielles et commerciales des opérateurs de réseaux ont justifié que soit
appliqué à leurs marchés un régime beaucoup plus souple que celui des
organismes publics
stricto sensu
: le niveau de la publicité
communautaire est nettement plus élevé et il y a toujours possibilité de
recourir à des procédures négociées plutôt qu'à des procédures d'appel
d'offres, ce qui, naturellement, est beaucoup plus conforme à une logique de
gestion d'entreprise.
Je terminerai mon propos en donnant quelques indications sur l'économie des
marchés publics de services, notamment en France.
Les marchés de services représentent environ 10 % du total des montants des
marchés publics - dont environ 47 % pour les travaux et 43 % pour les
fournitures - sur une somme totale - c'est énorme ! - de 700 milliards de
francs par an pour les seules entités publiques. A ce chiffre, il conviendrait
d'ajouter, pour avoir une mesure plus complète de l'enjeu économique constitué
par les marchés de services, les marchés passés par les organismes privés
d'intérêt général ainsi que ceux des opérateurs de réseaux.
J'ajoute que ce chiffre est en évolution à la fois en valeur relative et en
valeur absolue. Il s'agit là d'une conséquence d'un phénomène plus global,
celui de la progression de la part des prestations de services dans notre
économie.
L'ouverture des marchés publics de services dans le cadre de l'Union
européenne, aujourd'hui, et, progressivement, dans le champ de l'Organisation
mondiale du commerce, à travers l'accord sur les marchés publics, constitue une
évolution économique majeure. En effet, les services prennent une part, en
valeur, de plus en plus importante dans les marchés publics, car les
administrations sont par nature de très gros consommateurs de services. Ces
marchés de services ont un contenu en valeur ajoutée de plus en plus important,
notamment du fait du développement des prestations intellectuelles - j'ai
évoqué tout à l'heure les services de conseils et les services d'ingénerie - et
sont de plus en plus le complément indispensable de marchés de fournitures de
haute technologie : informatique, électronique professionnelle, etc.
N'oublions pas que la France est le deuxième exportateur mondial de services,
services qui représentent 25 % du commerce mondial des marchandises. Elle a
donc tout à gagner à une plus grande ouverture des marchés des services au sein
de l'Union européenne, mais aussi au-delà. Il s'agit, à chaque fois, de
favoriser la pénétration de nos entreprises faisant preuve d'une excellence et
d'un savoir-faire dans des marchés difficiles, notamment en Asie ou en
Amérique, alors même que nos marchés européens sont très ouverts.
Lors des accords de Marrakech, qui ont clôturé le cycle de l'Uruguay, un
accord-cadre général sur les services, qu'on appelle GATS, a été signé : il
transpose aux services les règles générales du commerce des biens, préserve
l'exception culturelle, qui nous est si chère, et ouvre des négociations
sectorielles au sein de l'Organisation mondiale du commerce.
Je serai, à la mi-décembre, à Singapour, où j'aurai l'honneur de représenter
la France. Vous pouvez être assurés que j'y défendrai au mieux les intérêts de
la France, dans le prolongement de ce que nous faisons ici, en matière de
services. Nos intérêts sont très clairs : obtenir des ouvertures de marchés
d'autres pays, notamment dans les zones émergentes, afin que nos entreprises
puissent gagner le plus de marchés possibles.
Dans le domaine des marchés publics, nous devons aller au-delà de ce que
contient l'accord de l'Organisation mondiale du commerce, en couvrant un plus
grand nombre de secteurs et de pays, notamment parmi ceux qui sont en voie de
développement.
S'agissant des services financiers, qui étaient prévus dans le cycle de
l'Uruguay, à Marrakech, et pour lesquels les négociations ont échoué en raison
du retrait de l'offre américaine, nous devons, alors que la période de
transition se termine à la fin de 1997, faire aboutir les négociations afin de
favoriser l'internationalisation de nos banques et de nos assurances.
Il en va de même pour les services de télécommunication de base. Là encore,
c'était prévu à Marrakech, mais il y a eu échec des négociations et retrait de
l'offre américaine. A la suite des textes qui ont été présentés par mon
collègue François Fillon, au printemps dernier, nous devons nous réjouir de
l'ouverture d'autres marchés pour France Télécom, qui est le quatrième
opérateur mondial.
Enfin, nous aurons à mener la négociation sur l'accord relatif aux
technologies de l'information et une négociation capitale sur l'investissement.
Actuellement, une telle négociation se déroule à l'OCDE, qui devrait se
terminer au mois de juin. Mais, parallèlement, il faut entamer une négociation
sur l'investissement au sein de l'Organisation mondiale du commerce, car nous
ne pouvons pas imposer à des pays émergents, qui n'appartiennent pas à l'OCDE,
une réflexion qui serait le seul fait des sept pays industrialisés. Ce serait
une mauvaise manière et, de surcroît, ce serait inefficace. Voilà pourquoi nous
souhaitons ouvrir, parallèlement, dans l'intérêt de nos services, cette
négociation sur l'investissement, à Singapour, au début du mois prochain.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les
bases sur lesquelles nous vous invitons à discuter et à voter cette
transposition des directives, et ce dans l'intérêt de nos services publics.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol,
rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur
le président, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons
aujourd'hui est pour le moins aride, M. le ministre l'a souligné. Il tend, vous
le savez, à transposer, quelque peu tardivement, des directives européennes
dans le droit français.
De façon à situer les enjeux, je rappelle, d'abord, que les marchés publics
représentent une part significative de l'activité économique en Europe.
Tant en droit communautaire qu'en droit français, on distingue, d'un côté, les
marchés publics
stricto sensu
et, de l'autre, les contrats passés par
les opérateurs de réseaux ; il s'agit des entreprises exerçant leurs activités
dans les domaines de l'eau, des transports, de l'énergie et des
télécommunications.
Pour fixer les idées, sans vous inonder de chiffres, mes chers collègues,
sachez qu'en 1993, par exemple, on a dénombré en France plus de 180 000 marchés
passés par l'Etat, les collectivités locales, leurs établissements publics et
les entreprises publiques, pour un montant total de l'ordre de 300 milliards de
francs. Cela représentait près de 11 % du produit intérieur brut, les branches
économiques les plus concernées étant le bâtiment, le génie civil, la
construction navale, l'aéronautique et l'armement.
On évalue, par ailleurs, le montant des marchés passés par les opérateurs
publics de réseaux à plus de 90 milliards de francs, somme à laquelle il
convient d'ajouter ceux qui sont passés par les opérateurs à statut privé dans
le domaine de l'eau, également visés par les textes.
A titre d'exemple, les contrats passés par la Lyonnaise des Eaux s'élèvent à
116 millions de francs en matière de recherche et à 27 millions de francs en
matière d'assurance, dans le domaine de l'eau principalement.
Les instances communautaires ont progressivement réglementé l'ensemble de ces
marchés, dont on a vu qu'ils représentent un enjeu économique d'importance.
De 1988 à 1993, le Conseil a ainsi adopté plusieurs directives, dont
l'objectif était d'harmoniser les procédures de passation de ces marchés, en
imposant des mesures de transparence et de mise en concurrence.
Vous trouverez dans mon rapport écrit le détail de cette construction
progressive du droit européen en la matière, qui a donné lieu, au Sénat, au
dépôt de deux rapports, en particulier celui de notre ancien collègue Robert
Laucournet.
Sans entrer dans les arcanes du droit communautaire, je rappelle simplement
que les directives sont classables en trois grandes catégories : les directives
« classiques », qui concernent les marchés de travaux, de fournitures et de
services ; la directive « opérateurs de réseaux », relative aux secteurs de
l'eau, de l'énergie, des transports et des télécommunications, qu'on avait
l'habitude d'appeler auparavant la directive « secteurs exclus », et qui
concerne les marchés de travaux, de fournitures et de services passés par les
entreprises opérant à titre principal dans ces domaines ; enfin, les directives
« recours », qui instaurent des procédures de recours contre les manquements
aux obligations communautaires définies par les directives.
Toutes ces directives se sont inscrites dans la perspective de la construction
du marché unique - on l'a rappelé - et ont visé un même objectif : éviter la
discrimination des candidats aux marchés publics en raison de leur
nationalité.
Cette volonté d'assurer une égalité d'accès aux marchés publics des Etats
membres a pour corollaire la mise en place d'un régime permettant une égalité
de traitement sur la base de critères objectifs préalablement annoncés.
Les règles instituées imposent des obligations de procédure visant - ce sont
là des mesures pratiques - à assurer la publicité des offres par le biais, par
exemple, d'un avis de pré-information publié au
Journal officiel
des
Communautés européennes, à coordonner les spécifications techniques des
produits en instaurant une référence à des normes européennes, afin que le plus
grand nombre possible d'entreprises concurrentes puissent soumissionner en
toute connaissance de cause, à définir le mode même de passation des marchés, à
définir les règles d'attribution du marché, à organiser la publication d'un
avis d'attribution, afin de permettre un fonctionnement transparent du système,
enfin, à ouvrir des procédures de recours en cas de manquement à ces
obligations communautaires.
Le présent projet de loi a pour objet de parfaire la transposition de ces
directives. Cependant, avant de vous en rappeler les grandes lignes, j'aimerais
évoquer les négociations en cours au plan communautaire - M. le ministre en a
fait état - dont l'objectif est, précisément, de modifier certaines de ces
directives.
En effet, c'est la transposition d'un droit communautaire en quelque sorte
déjà dépassé que nous sommes amenés à réaliser aujourd'hui. Le caractère
évolutif des directives doit nous inciter à la vigilance tant en amont, au
stade de leur révision, qu'en aval, au stade de leur transposition en droit
national.
Je rappelle que, outre les clauses de révision prévues par certaines
directives, ces dernières doivent prochainement faire l'objet de modifications,
comme l'exige l'application de l'accord sur les marchés publics passé dans le
cadre de l'Organisation mondiale du commerce, accord dit AMP.
En particulier, s'agissant de la directive relative aux opérateurs de réseaux,
la Commission européenne a dû tenir compte de la position exprimée par le
Gouvernement français et par notre Haute Assemblée dans sa résolution du 12
octobre 1995.
Les modifications qu'elle propose visent, notamment, à ne pas soumettre les
marchés des opérateurs de télécommunication aux règles issues de l'AMP, à
maintenir l'égalité de traitement des opérateurs publics et privés d'un même
secteur et à préserver la possibilité pour les opérateurs d'entretenir un
dialogue technique précontractuel avec les fournisseurs d'équipements.
Je vous propose, mes chers collègues, de réaffirmer fermement la position du
Sénat sur ces projets de révision, qui n'ont pas encore été adoptés
définitivement par les instances communautaires.
En outre, je tiens à souligner les difficultés d'application ou
d'interprétation rencontrées dans la mise en oeuvre des directives concernées.
A défaut de pouvoir modifier le champ d'application et les procédures prévues
par cette directive à l'occasion de sa transposition en droit français, je
souhaite que nous profitions de ce débat pour souligner ces difficultés. Je
prendrai deux exemples qui les illustrent.
Le premier exemple concerne les services financiers, qui recouvrent les
services d'assurance, d'une part, les services bancaires et d'investissement,
d'autre part. Pour ce qui concerne les contrats d'assurance, la directive
impose un formalisme de passation des contrats ainsi que des délais qui ne sont
pas toujours adaptés à ce type de marché. Je pense ici, notamment, au problème
de la confidentialité des risques couverts et à la constitution de pools
d'assureurs pour les risques importants.
Les mêmes critiques valent pour les services bancaires et d'investissement
pour lesquels l'
intuitu personae,
la relation de long terme ou, au
contraire, l'instantanéité sont importants.
Le second exemple a trait aux services de recherche et développement. Ces
marchés sont couverts par les directives si l'entité adjudicatrice les finance
à 100 % et est l'unique propriétaire des résultats. En pareil cas, les
obligations d'information et de mise en concurrence qu'elles comportent posent
des problèmes de confidentialité des actes de recherche. Elles entraînent
également des difficultés d'application lorsque la recherche porte sur des
systèmes complexes et intégrés.
Certes, les directives prévoient que, sous deux conditions, ces marchés
peuvent bénéficier d'une procédure sans mise en concurrence. Le problème est
que ces conditions sont délicates à justifier : il faut que l'entité
adjudicatrice ne cherche pas à assurer une rentabilité ou à récupérer les coûts
de la recherche et que la passation du marché ne porte pas préjudice à la mise
en concurrence des marchés subséquents. Or, comment peut-on présumer les
résultats de la recherche et donc prévoir les éventuels marchés subséquents
?
Dans ces conditions, cette disposition ne risque-t-elle pas de revenir
purement et simplement à interdire toute exploitation commerciale des résultats
? Je souhaite, monsieur le ministre, que le Gouvernement fasse valoir ces
arguments pour obtenir leur prise en compte dans le cadre de la révision des
directives.
(M. le ministre acquiesce.)
J'en viens maintenant à la présentation du projet de loi proprement dit,
qui avait fait l'objet d'une première version déposée au Sénat à la fin de 1993
et à laquelle le Gouvernement a substitué une nouvelle version en 1994. Ayant
tardé à parfaire la transposition des directives précitées, la France a fait
l'objet d'une condamnation en manquement par la Cour de justice des Communautés
européennes, le 2 mai 1996. L'urgence d'adopter ce projet de loi est donc
aujourd'hui réelle. Je le précise, ce n'est que pour les pouvoirs adjudicateurs
non soumis au code des marchés publics qu'une transposition législative est
nécessaire.
Ce projet de loi devrait constituer le dernier texte de nature législative
pris pour transposer les directives adoptées en 1992 et en 1993 sur les marchés
publics.
Le texte qui nous est soumis tend à retranscrire très fidèlement les articles
des directives précitées qui doivent être introduits en droit interne. Il
procède, quand c'est possible, à une simplification, par rapport au texte de la
directive, dans la présentation des obligations applicables.
La caractéristique majeure de ce texte est de procéder par modification et
ajout aux précédentes lois de transposition déjà adoptées en 1991 et en 1992.
Il s'agit, bien souvent, de soumettre des acteurs déjà identifiés à de
nouvelles procédures. Le texte procède donc par renvoi aux dispositions déjà
adoptées.
Le titre Ier du présent projet de loi modifie le titre II de la loi du 3
janvier 1991, qui soumet déjà à des obligations de publicité et de mise en
concurrence la passation de certains contrats de travaux par des organismes
privés sous influence publique, afin d'étendre aux contrats de fournitures et
de services les obligations de publicité et de mise en concurrence.
Quels sont les acteurs concernés ? Le titre Ier s'applique aux personnes qui
sont déjà mentionnées à l'article 9 de la loi du 3 janvier 1991. Il s'agit de
personnes qui, tout en étant de forme juridique privée, ne sont cependant pas
totalement affranchies d'une influence publique. Aussi bien les désigne-t-on
comme personnes « sous influence publique ».
Cette catégorie recouvre les groupements de collectivités publiques qui
auraient une forme juridique privée - on peut imaginer, par exemple, une
association soumise à la loi de 1901, regroupant des collectivités publiques -
et les organismes privés à financement public majoritaire. Il s'agit, entre
autres, des caisses primaires de sécurité sociale, des comités de fêtes ou de
l'Association pour la formation professionnelle des adultes.
Cette catégorie comprend également les organismes privés dont la gestion est
contrôlée par un organisme public, c'est-à-dire par les juridictions
financières. Il s'agit, par exemple, de l'ARC, dont on a beaucoup parlé, et
d'associations faisant appel à la générosité publique, des fédérations
sportives ou des sociétés anonymes d'HLM.
Enfin, elle compte aussi les organismes privés ayant une désignation publique
de leurs dirigeants. C'est le cas de certaines sociétés d'économie mixte
locales qui gèrent un service public administratif.
Parmi les principales dispositions du titre Ier, l'article 1er concerne les
contrats de fournitures dont le montant dépasse 200 000 écus hors taxes, soit
1,3 million de francs. L'article 2 vise les contrats de services supérieurs à
200 000 écus hors taxes, qui sont assujettis suivant leur nature à trois
régimes d'obligations différents - régimes dits « plein » ou « allégé » et «
services exclus ».
Les articles 3 et 4 tendent à soumettre la passation des contrats de services
à des possibilités de recours en cas de manquement aux obligations
communautaires.
L'article 5 définit les contrats exclus des obligations de publicité et de
mise en concurrence, par extension du champ d'application de l'article 12 de la
loi du 3 janvier 1991.
S'agissant du titre II du projet de loi, quels sont les secteurs et les
opérateurs concernés ?
Le titre II transpose les dispositions de la directive « opérateurs de réseaux
» qui sont relatives à la passation des contrats de services.
Je rappelle que cette directive couvre les marchés d'un montant supérieur à
certains seuils qui sont passés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des
transports et des télécommunications, par les pouvoirs publics - les Etats ou
les collectivités territoriales - et par les entreprises publiques et les
entreprises privées lorsqu'elles bénéficient de droits exclusifs ou spéciaux
accordés par les pouvoirs publics.
Les dispositions de cette directive sont transposées par le code des marchés
publics, d'une part, pour ce qui concerne les pouvoirs publics, d'autre part,
pour ce qui a trait aux entreprises publiques constituées sous la forme d'un
établissement public industriel et commercial local.
Les mêmes dispositions ont été transposées par la loi du 11 décembre 1992
s'agissant des entreprises publiques constituées sous la forme d'un
établissement public industriel et commercial national ou sous la forme d'une
société et des entreprises privées bénéficiant de droits exclusifs ou
spéciaux.
Je ne citerai pas tous les opérateurs de réseaux pour lesquels la
transposition de la directive implique la modification de la loi du 11 décembre
1992. Il s'agit de ceux qui interviennent dans les secteurs de la production,
du transport ou de la distribution d'eau potable - notamment la Compagnie
générale des eaux et la Lyonnaise des eaux - de la production, du transport ou
de la distribution d'électricité - EDF - et du transport ou de la distribution
de gaz de chaleur, comme Gaz de France.
Il s'agit encore des opérateurs de réseaux intervenant dans les secteurs de la
prospection et de l'extraction de pétrole ou de gaz, de la prospection et de
l'extraction de charbon et d'autres combustibles solides, tels les Charbonnages
de France et les Houillères de bassin.
Il s'agit enfin des opérateurs de réseaux intervenant dans les transports
ferroviaires - SNCF, RATP, sociétés concessionnaires ou ferroviaires de réseaux
de tramway - les transports non ferroviaires, les installations aéroportuaires,
les sociétés concessionnaires d'un aéroport, les installations portuaires et
maritimes et les télécommunications, notamment France Télécom.
Quelles sont les principales dispositions du titre II ?
Afin de transposer la directive précitée, le titre II du présent projet de loi
tend à modifier la loi n° 92-1182 du 11 décembre 1992 relative à la passation
des contrats de services passés par les opérateurs de réseaux dans les secteurs
de l'eau, de l'énergie, des transports et des télécommunications.
L'article 6 étend le champ d'application de la loi précitée aux contrats de
services.
L'article 7 soumet les contrats passés dans le cadre du régime dérogatoire que
peuvent obtenir les organismes opérant dans les secteurs des hydrocarbures et
des mines aux mêmes possibilités de recours juridictionnels applicables en cas
de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence.
L'article 9 définit les trois régimes d'obligations applicables aux
différentes catégories de services.
L'article 10 étend aux contrats de services le champ des exclusions - achats
déclarés secrets ou passés en vertu d'un accord international - prévues à
l'article 5 de la loi.
L'article 11 tend à tenir compte d'une exclusion spécifique aux contrats de
services passés par les opérateurs de réseaux avec des filiales spécialisées
dans les services, ce que l'on appelle les entreprises liées.
Les amendements présentés par votre commission répondent à trois séries de
préoccupations.
Il s'agit, tout d'abord, de veiller aux attributions du Parlement. Le projet
de loi qui nous est soumis pose tout à la fois le principe et le champ
d'application d'obligations qu'il reviendra au pouvoir réglementaire de
définir.
Il s'agit, ensuite, d'assurer une correspondance rigoureuse entre les règles
posées dans le projet de loi et celles qu'édictent les directives transposées,
afin d'éviter que nos entreprises ne puissent se voir soumises à des
obligations qui ne s'imposeraient pas à leurs concurrents dans d'autres Etats
de l'Union européenne.
Il s'agit, enfin, de rectifier, comme toujours, quelques imperfections de
forme ou de fond des dispositions proposées. Nous devrons, au surplus, nous
prononcer sur quelques autres amendements.
Voilà, mes chers collègues, rapidement présentée l'économie générale de ce
texte tel qu'il a été étudié par la commission des affaires économiques et du
Plan.
M. le président.
La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
loi qui nous est présenté a connu un parcours pour le moins tumultueux. En
effet, après une première présentation à la fin de 1993, il fut retiré, avant
qu'une nouvelle mouture soit déposée en 1994 sur le bureau du Sénat. Puis ce
fut l'enterrement du texte.
Aujourd'hui, le Gouvernement exhume ce projet de loi, qui a pour objet de
modifier deux lois existantes et qui vise à transposer les directives
européennes sur les marchés publics, la directive « fournitures », la directive
« services », la directive « travaux » et la directive « opérateurs de réseaux
».
Le poids des marchés publics confère une grande importance à de tels textes.
Selon M. le rapporteur, plus de 5 500 milliards de francs sont consacrés aux
marchés publics par les quinze membres de l'Union européenne. Pour la France,
les dernières données connues, celles de 1993, font apparaître que les marchés
publics représentent 11 % du produit intérieur brut. Ces quelques chiffres
illustrent la nécessité de ne pas se tromper quand on légifère dans de tels
domaines.
Or toutes les décisions, tous les choix préconisés par la Communauté
européenne, et acceptés par notre gouvernement, s'inscrivent dans une tendance
à l'exacerbation de la concurrence entre opérateurs publics au sein de l'Union.
Cette concurrence, érigée en dogme intangible, montre chaque jour son
impuissance à satisfaire les besoins humains et sociaux. Le mythe de la « main
invisible » qui permettrait de faire coïncider l'intérêt général et l'intérêt
particulier dans un processus d'autorégulation du marché est mis à mal.
Pourtant, tous les actes gouvernementaux sont de plus en plus orientés vers
une construction européenne répondant aux exigences des marchés financiers.
Ainsi, au cours de ces derniers mois, a-t-on vu et entendu des hommes
politiques d'outre-Rhin préconiser un Maastricht II et un Maastricht III, avec
des critères de convergence de plus en plus restrictifs. Mais, surtout, on a vu
les ministres français leur emboîter le pas avec célérité.
Dès lors, il conviendrait, selon certains, de réduire encore le montant du
déficit autorisé et d'instaurer de réels mécanismes de sanction pour ceux qui
s'écarteraient de l'orthodoxie. C'est en fait un appel, dicté par le traité de
Maastricht, à rogner plus encore sur les dépenses publiques et sociales.
Comment ne pas ressentir, avec ce projet de loi, cette prégnance des marchés
financiers ?
En 1992, lors de l'examen du projet de loi visant à permettre la transposition
de la directive « opérateurs de réseaux », il a été expressément indiqué que la
mise en concurrence devait permettre une économie de près de 100 milliards de
francs pour l'ensemble des pays de l'Union européenne.
Nous n'avons pas la religion du déficit public, comme le pensent certains ! En
revanche, nous n'avons pas les mêmes moyens et les mêmes objectifs pour
parvenir à l'équilibre budgétaire.
A-t-on bien mesuré ce que veut dire une concurrence toujours plus forte pour
des secteurs déjà en grande difficulté ? Je pense particulièrement au secteur
du bâtiment et des travaux publics, dont les professionnels ont manifesté leur
inquiétude et leur désarroi quant à l'avenir. Ce choix de l'exacerbation de la
concurrence a également des conséquences sur l'emploi, la qualité des services,
ainsi que sur la sécurité des usagers et des salariés.
L'obsession de la réduction des coûts est destructrice non seulement pour
notre économie nationale, mais aussi pour la recherche de véritables
coopérations fructueuses.
Mais, au-delà d'une volonté idéologique, ce sont tous les mécanismes
institutionnels actuels de la Communauté européenne qui sont conçus pour
favoriser la libéralisation, la déréglementation. Ainsi, la Commission peut
décider seule des directives concernant l'introduction de la concurrence au
sein du secteur public, en vertu de l'article 90 du traité de Rome. Par
ailleurs, le Conseil des ministres européen peut accepter ces directives à la
majorité.
Un pays peut donc se trouver embarqué dans l'aventure malgré son choix
national. Voilà ce que permet la déréglementation, qui met en concurrence les
opérateurs publics entre eux et avec les opérateurs privés, qui met en
compétition les systèmes publics et sociaux et qui encourage le dumping entre
Etats.
Pourquoi, dans un tel contexte, le Gouvernement a-t-il décidé de nous
transmettre ce texte finalisant la transposition des directives précitées ?
Le premier motif, le seul point évoqué par M. le rapporteur, c'est la
condamnation en manquement de la France par la Cour de justice des Communautés
européennes, le 2 mai dernier, en application de l'article 169 du traité de
Rome.
A ce sujet, notre rapporteur a expliqué qu'il était urgent de prendre des
dispositions car « La France pourrait se voir condamnée à verser une amende ou
des astreintes si elle persistait à ne pas transposer la directive
"services" 92-50. »
Ainsi, jour après jour, les Françaises et les Français peuvent découvrir, dans
leur vie quotidienne, jusqu'où peuvent aller les reculs de souveraineté.
On nous explique même que ces directives doivent être totalement transposées
en droit interne, puisque l'article 55 de la Constitution assure la primauté du
droit communautaire sur les lois. En clair, nous, les représentants du peuple
français, nous avons le choix entre transposer les directives et les faire
appliquer, ou ne pas les transposer et verser une amende.
Chacun conviendra qu'il s'agit d'une drôle d'alternative ! Quel que soit le
chemin emprunté, nous serions obligés d'avoir un résultat similaire. La
démocratie, la souveraineté du peuple français n'en sortent pas grandies, c'est
le moins que l'on puisse dire.
Le second motif de ce projet de loi n'apparaît pas dans le rapport, mais
plusieurs de nos collègues l'ont soulevé lors de la réunion de la commission
des affaires économiques et du Plan.
Est-ce un hasard du calendrier si nous devons discuter d'un tel texte, alors
même que le Gouvernement a préparé un projet de loi portant création de
l'établissement public « réseau ferré national », le RFN, et organisant
l'éclatement structurel de la SNCF ?
Est-ce un hasard du calendrier si nous devons discuter de ce projet de loi n°
9, alors même que, le 20 juin dernier, le Gouvernement acceptait un accord
d'ouverture du marché de la distribution de l'énergie qui va affaiblir EDF et
GDF ?
Il est des hasards qui sont plus que troublants ! Concernant les rapports
entre la SNCF et le RFN, je crois qu'il est primordial de donner une réponse
claire. Il ne suffit pas d'opposer les conditions techniques contenues dans un
cahier des charges à la volonté d'ouverture et de déréglementation européenne.
A l'article 11 du présent projet de loi relatif aux entreprises liées, nous
pouvons opposer l'article 2 du projet portant création de l'établissement
public RFN, prévoyant l'indépendance entre le RFN et la SNCF, puisque le RFN
disposerait de son propre conseil d'administration et donc de la liberté de
choix.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen ont consulté les
syndicats et la direction sur cette question. La réponse est claire : tous
estiment que le RFN aura le droit de faire appel à d'autres opérateurs pour la
gestion et l'entretien du réseau, service directement concerné par le texte que
nous examinons aujourd'hui. Or, la direction s'en remet aux conditions
techniques pour écarter cette éventualité.
Vous comprendrez dans ces conditions, monsieur le ministre, mes chers
collègues, que nous soyons inquiets et fortement opposés au texte qui nous est
soumis.
Le second hasard que j'évoquais concerne EDF et GDF, et, là encore, je
voudrais prendre un exemple concret. Hormis l'Etat en tant que collectivité
publique, c'est la SNCF qui est le plus gros client d'EDF, et cela se comprend
aisément.
L'application des directives « services » pour les opérateurs de réseaux, en
liaison avec l'accord européen du 20 juin sur la distribution de l'énergie, va
permettre à la SNCF de négocier avec d'autres opérateurs. Ainsi, c'est la
guerre économique que nous instaurons au lieu de rechercher les conditions
d'une réelle coopération entre la SNCF et EDF.
Enfin, je voudrais souligner ce que dit M. le rapporteur sur le problème de la
réciprocité entre les pays de l'Union européenne et les pays tiers,
principalement les Etats-Unis et le Japon. En effet, dans son rapport du 5
juillet 1995, notre rapporteur expliquait que ces directives « marchés publics
» devraient être modifiées dans le cadre de l'OMC, l'accord sur les marchés
publics, annexé à l'accord du GATT.
Chacun sait les ravages qui se produisent dans un secteur tel que les
télécommunications, où la guerre économique a été largement lancée par les
Etats-Unis. Il y a donc de quoi s'inquiéter en ce qui concerne d'autres
secteurs.
Aujourd'hui, M. le rapporteur nous explique que, malgré les efforts de la
France, « le compromis sur la modification des directives reste insatisfaisant
sur certains points ».
Je crois sincèrement que l'aveu de tels problèmes, qui sont autant d'échecs
pour le gouvernement de la France, devrait nous amener à réfléchir à une autre
organisation des services et du secteur public en Europe. Cette exigence
monte.
N'est-il pas significatif à cet égard que les cheminots européens manifestent
aujourd'hui même à Bruxelles ? Il y aura là de 6 000 à 8 000 cheminots
français, à l'appel de leurs syndicats CGT, CFDT, FO et FMC, ainsi que leurs
collègues d'Allemagne, de Grande-Bretagne, d'Italie, de Belgique, des Pays-Bas,
du Danemark, d'Autriche, du Luxembourg, d'Espagne et du Portugal.
L'objectif commun, à quelques jours du conseil des ministres des transports,
les 12 et 13 décembre, c'est le retrait pur et simple du Livre blanc. Nous
serons attentifs à ce que dira M. Pons, qui a dû manoeuvrer en recul ces
derniers temps sur la création du réseau ferré national.
Les sacro-saints principes de libéralisation, de déréglementation, de
concurrence ne font que renforcer les gâchis humains, sociaux et économiques au
sein de l'Union européenne. Et c'est de plus en plus difficile à faire
passer.
C'est pourquoi, comme en 1990 et en 1992, lors de la transposition de ces
directives, les sénateurs du groupe communistre républicain et citoyen se
prononceront résolument contre ce projet de loi.
M. le président.
La parole est à M. Estier.
M. Claude Estier.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
loi qui nous occupe ce matin, et qui a effectivement connu un parcours
tumultueux, complète les dispositions, d'une part, de la loi du 31 janvier 1991
pour les marchés relevant du droit commun et, d'autre part, de la loi du 11
décembre 1992 pour les secteurs dits « exclus » - à savoir l'énergie, les
télécommunications, les transports et l'eau - tout en respectant leur esprit, à
savoir assurer aux entreprises communautaires l'égalité d'accès aux marchés
publics des Etats membres, tout en tenant compte de la spécificité des marchés
concernés. C'est pourquoi le groupe socialiste ne fera pas obstacle à ce
texte.
Néanmoins, je souhaite vous faire part, monsieur le ministre, de nos
inquiétudes quant aux évolutions possibles de la réglementation des marchés
publics à l'occasion des négociations internationales, notamment de
l'organisation mondiale du commerce et de sa transcription en droit
communautaire.
Le cycle de l'Uruguay a considérablement modifié les règles relatives aux
marchés publics en les étendant aux contrats de travaux et de services ainsi
qu'aux entités des secteurs de l'eau, de l'électricité et des transports. Pour
donner suite à ces négociations, la Commission a proposé des modifications des
directives « marchés publics », notamment de celle qui traite des secteurs dits
« exclus », qui allaient bien au-delà de ce qu'exigeait l'accord sur les
marchés publics, l'AMP. Le Parlement européen a fort heureusement rejeté ce
texte, le 16 juillet dernier.
Je profite donc de l'examen de ce projet de loi pour vous demander, monsieur
le ministre, si le Gouvernement entend bien être très ferme sur les points
suivants : tout d'abord, un respect strict de l'exigence de réciprocité,
d'ailleurs prévu dans l'AMP ; ensuite, la non-application de cet accord au
secteur des télécommunications, qui va devoir faire face à la déréglementation
que vous avez voulue, ce qui n'est pas une mince affaire, et, enfin, pour
l'avenir, la prise en compte, dans toutes les négociations internationales,
notamment lorsqu'il s'agit d'industries de réseaux comme les
télécommunications, l'eau, les transports et l'énergie des missions de services
publics qui sont bien peu défendues ces derniers temps. En un mot, un peu plus
de service public pour un développement plus solidaire des territoires !
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Je voudrais répondre brièvement à MM. Estier et
Leyzour, qui m'ont interpellé.
Tout d'abord, je comprends les raisons pour lesquelles, dans la logique des
textes de 1991 et 1992, M. Estier soutiendra ce projet de loi.
Je voudrais par ailleurs qu'il ne s'inquiète pas quant à la volonté du
Gouvernement français d'être ferme vis-à-vis à la fois de l'Union européenne et
de l'Organisation mondiale du commerce.
A ce propos, je vous indique que je me rendrai à Singapour au début du mois de
janvier et que, sur un certain nombre de sujets qui tiennent à
l'investissement, à la concurrence, aux normes sociales, je m'en tiendrai au
respect strict du calendrier de Marrakech : l'accord de Marrakech, tout
l'accord de Marrakech, rien que l'accord de Marrakech.
Mesdames, messieurs les sénateurs, il n'est pas question d'anticiper une
négociation tarifaire ou de revenir sur des engagements agricoles. La position
de la France est tout à fait claire. Notre intervention dans la négociation
sera extrêmement ferme à Singapour.
Concernant l'Union européenne, vous évoquez, monsieur Estier, la prise en
compte des services publics. Je relève à ce propos que M. le Premier ministre a
utilisé l'expression « service public à la française » ce qui montre bien
l'intérêt du Gouvernement pour la notion de service public.
Vous avez également évoqué l'exigence de réciprocité.
Vous constaterez que nous veillons à son respect à l'occasion de l'examen du
projet de loi relatif à la réforme du code des marchés publics, qui sera
présenté au Parlement au début de l'année prochaine. J'aurai en effet pris le
soin, préalablement, d'écrire à la Commission européenne afin d'être bien
certain que les orientations que nous prendrons feront l'objet d'engagements de
réciprocité. En effet, nous savons très bien qu'un certain nombre d'anomalies
peuvent persister sur le plan européen. Nous souhaitons donc obtenir des
engagements préalables.
Monsieur Leyzour, vous vous êtes engagé dans des voies qui dépassaient
largement les limites de ce texte. Puisque vous en avez parlé, je vais vous
dire un mot de Maastricht, en prenant ma « casquette » de ministre du commerce
extérieur.
Je n'ai pas visité un pays au monde qui n'ait rien à voir avec l'Union
européenne, je n'ai pas rencontré un chef d'Etat ou un ministre des finances
qui ne m'ait annoncé satisfaire à deux ou trois des critères de Maastricht. Ils
n'ont qu'une seule raison de le faire : aujourd'hui, aucun Etat, dans quelque
continent que ce soit, à quelque stade de développement qu'il se trouve - pays
en voie de développement, pays émergeant, pays industrialisé - ne peut faire
l'économie de la rigueur des marchés financiers. Ce n'est pas que cette rigueur
soit un diktat, c'est qu'aucun pays aujourd'hui ne peut vivre sur la lancée des
déficits et de leurs conséquences, qui se payent en terme d'emplois et de
chômage.
Nous payons à l'heure actuelle le laxisme du passé et le redressement que nous
sommes en train d'effectuer maintenant.
Vous avez parlé de la concurrence forte dans le secteur du BTP. C'est pour
cela que, dans ce texte sur la réforme du code des marchés publics, dont vous
aurez à débattre à l'échelon national, un certain nombre de mesures seront
prises, qui font suite à une enquête menée auprès des collectivités locales et
qui a donné lieu à 14 000 réponses des communes, des départements et des
régions. Cela montre bien le souci qu'a eu le Gouvernement de collaborer, de
coopérer, de prendre en compte les soucis des collectivités locales et
l'importance que représente, pour ces dernières, le secteur des marchés
publics. Un certain nombre de dispositions donneront de la souplesse au maître
d'ouvrage en matière de prix anormalement bas, de sous-traitance, de prise en
compte des critères de maintenance et feront en sorte que le moins-disant devra
se transformer en meilleur achat.
Voilà un certain nombre des orientations prises par le Gouvernement. J'espère
que vous aurez l'occasion de les soutenir avec d'autant plus de détermination
que vous les appelez de vos voeux !
M. Félix Leyzour.
On verra !
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Monsieur Leyzour, absolument aucun hasard malicieux de
calendrier n'est à l'origine du retrait du projet relatif au réseau ferré
national ou de la discussion de ce projet concernant l'ouverture maîtrisée de
la distribution de l'énergie. Le rapporteur et moi-même avons expliqué les
raisons pour lesquelles nous examinons ce texte aujourd'hui.
Qu'il me soit simplement permis de vous dire que vous me paraissez bien peu
confiant dans le savoir-faire et la technologie des entreprises françaises !
M. Félix Leyzour.
Pas du tout !
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Lorsque l'on s'attaque à l'ouverture des marchés, à
l'ouverture maîtrisée des marchés, comme cela a été fait sur le plan de
l'énergie - c'est le ministre de l'industrie que j'étais qui est à l'origine de
ces négociations conclues par M. Borotra - lorsque l'on défend fermement, comme
nous l'avons fait, la position française - celle de l'acheteur unique -, face à
l'accès des tiers au réseau, quand on connaît les capacités formidables d'EDF,
il faut savoir que cette société, qui est la première société d'électricité du
monde occidental, va avoir à faire face à une ouverture maîtrisée du réseau,
certes, mais aussi des réseaux de quatorze pays. C'est la société qui me paraît
avoir le plus de compétitivité, de savoir-faire et de technologie, et devoir
gagner dans cette ouverture maîtrisée de la concurrence.
Il en est de même, permettez-moi de vous le dire, pour nombre de nos autres
sociétés. Partout où je me promène dans le monde, je m'aperçois que nous avons
un savoir-faire mondial, par exemple en matière d'eau, avec nos grandes
sociétés d'eau - c'est nous qui aujourd'hui sommes en train de privatiser, de
prendre en concession ou en Built-Operate-Transfer les grands circuits d'eau
dans le monde entier, que ce soit en Amérique latine, en Asie, ou dans les pays
émergents - mais aussi dans d'autres domaines. J'étais récemment dans un pays
où nous devons prendre en concession 800 000 lignes de téléphone.
Monsieur le sénateur, permettez-moi d'avoir cette différence avec vous et de
penser que, pour nos entreprises françaises - à condition naturellement que
nous soyons prudents et que nous assurions, ce dont parlait M. Estier tout à
l'heure, une garantie de réciprocité - c'est une chance et non un handicap de
s'engager dans cette direction !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
TITRE Ier
DISPOSITIONS COMPLÉTANT, EN CE QUI CONCERNE CERTAINS CONTRATS DE SERVICES ET DE
FOURNITURES, LA LOI N° 91-3 DU 3 JANVIER 1991 RELATIVE À LA TRANSPARENCE ET À
LA RÉGULARITÉ DES PROCÉDURES DE MARCHÉS ET SOUMETTANT LA PASSATION DE CERTAINS
CONTRATS À DES RÈGLES DE PUBLICITÉ ET DE MISE EN CONCURRENCE
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. - Il est inséré, dans la loi n° 91-3 du 3 janvier 1991 relative à
la transparence et à la régularité des procédures de marchés et soumettant la
passation de certains contrats à des règles de publicité et de mise en
concurrence, après l'article 9, un article 9-1 rédigé comme suit :
«
Art. 9-1
. - Est soumise à des mesures de publicité ainsi qu'à des
procédures de mise en concurrence définies par décret en Conseil d'Etat la
passation des contrats ayant pour objet l'achat, le crédit-bail, la
location-vente, ou la location, avec ou sans option d'achat, de fournitures que
se proposent de conclure les personnes mentionnées à l'article 9, et dont le
montant est égal ou supérieur à un seuil fixé par arrêté du ministre chargé de
l'économie. »
Par amendement n° 1, M. Revol, au nom de la commission, propose, dans le texte
présenté par cet article pour l'article 9-1 de la loi n° 91-3 du 3 janvier
1991, de remplacer les mots : « que se proposent de conclure les personnes
mentionnées à l'article 9, » par les mots : « que se propose de conclure avec
un fournisseur l'une des personnes mentionnées à l'article 9 de la présente
loi, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol,
rapporteur.
C'est un amendement purement rédactionnel.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, ainsi modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
M. le président.
« Art. 2. - Il est inséré dans la même loi, après l'article 10, un article
10-1 et un article 10-2 rédigés comme suit :
«
Art. 10-1. -
I. - Les dispositions du présent article s'appliquent,
sauf les exceptions prévues à l'article 10-2 ci-après, à tout contrat qui a
pour objet l'exécution, pour un montant égal ou supérieur à un seuil fixé par
arrêté du ministre chargé de l'économie, de services définis au II et au III
ci-après, lorsqu'il s'agit :
« 1° Soit d'un contrat que se propose de conclure, avec un prestataire de
services, l'une des personnes énumérées à l'article 9 de la présente loi ;
« 2° Soit d'un contrat que se proposent de conclure, avec un prestataire de
services, des personnes de droit privé autres que celles qui sont mentionnées
au 1° ci-dessus, lorsque ce contrat est, d'une part, en liaison avec un contrat
de travaux tel que celui-ci est défini au 1° de l'article 10 de la présente loi
et doit être, d'autre part, subventionné directement à plus de 50 % par l'Etat,
des collectivités locales, des organismes de droit public n'ayant pas un
caractère industriel ou commercial, ou les organismes de droit privé énumérés à
l'article 3 de la présente loi.
« II. - Lorsqu'un contrat mentionné au I du présent article a pour objet
l'exécution de services qui entrent dans l'une des catégories de services
énumérées ci-après, la personne qui se propose de passer le contrat est tenue
de se conformer aux mesures de publicité et aux procédures de mise en
concurrence qui sont définies par décret en Conseil d'Etat.
« Sont soumis aux dispositions de l'alinéa précédent :
« 1° Les services d'entretien et de réparation ;
2° Les services de transports terrestres, y compris les services de véhicules
blindés et les services de courrier, à l'exclusion des transports ferroviaires
;
3° Les services de transports aériens : transports de voyageurs de
marchandises et de courrier ;
4° Les services de télécommunications ;
5° Les services financiers :
a) Services d'assurances ;
b) Services bancaires et d'investissement ;
6° Les services informatiques et services connexes ;
7° Les services de recherche et de développement dont les résultats
appartiennent exclusivement à la personne qui se propose de passer le contrat
pour son usage, dans l'exercice de sa propre activité, pour autant que la
prestation soit entièrement rémunérée par cette personne ;
8° Les services comptables, d'audit et de tenue de livres ;
9° Les services d'études de marché et de sondages ;
10° Les services de conseil en gestion et les services connexes ;
11° Les services d'architecture ; les services d'ingénierie et services
intégrés d'ingénierie ; les services d'aménagement urbain et d'architecture
paysagère ; les services connexes de consultations scientifiques et techniques
; les services d'essais et d'analyses techniques ;
12° Les services de publicité ;
13° Les services de nettoyage de bâtiments et les services de gestion de
propriété ;
14° Les services de publication et d'impression sur la base d'une redevance ou
sur une base contractuelle ;
15° Les services de voirie et d'enlèvement des ordures : services
d'assainissement et services analogues.
III. - Lorsqu'un contrat mentionné au I du présent article a pour objet
l'exécution de services qui entrent dans des catégories de services autres que
celles mentionnées au II du présent article ou à l'article 10-2, la personne
qui se propose de passer le contrat est tenue, dans les conditions fixées par
décret en Conseil d'Etat :
- d'inclure dans les documents généraux ou les cahiers des charges propres à
chaque contrat les caractéristiques essentielles de la prestation attendue
qu'elle doit définir par référence à des normes précisées par le même décret
;
- de faire connaître, une fois le contrat conclu, les résultats de la
procédure d'attribution.
Art. 10-2. - Sont exclus du champ d'application de l'article 10-1 ci-dessus
:
1° Les contrats qui ont pour objet l'acquisition ou la location d'immeubles ou
qui concernent les droits sur ces biens ;
2° Les contrats ayant pour objet l'achat, le développement, la production, la
coproduction ou le temps de diffusion de programmes par des organismes de
communication audiovisuelle ;
3° Les contrats relatifs aux services de téléphonie vocale, de télex, de
radiotéléphonie mobile, de radio-messagerie et de communication par satellite
;
4° Les contrats qui ont pour objet les services d'arbitrage ou de conciliation
;
5° Les contrats de services relatifs à l'émission, à l'achat, à la vente, au
transfert de titres et autres instruments financiers, ainsi que les contrats
qui concernent des services rendus par la Banque de France ;
6° Les contrats de travail ;
7° Les contrats de services de recherche et de développement autres que les
contrats mentionnés au 7° du II de l'article 10-1 ;
8° Les contrats de services dont le prestataire est l'une des personnes
énumérées à l'article 9 ci-dessus ou une personne publique, désignée sur la
base d'un droit exclusif dont elle bénéficie en vertu ou sur le fondement de
dispositions législatives ou réglementaires. »
Par amendement n° 2, M. Revol, au nom de la commission, propose, dans le 1° du
I du texte présenté par cet article pour l'article 10-1 de la loi n° 91-3 du 3
janvier 1991, de remplacer le mot : « énumérées » par le mot : « mentionnées
».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol,
rapporteur.
Il s'agit là encore d'un amendement purement rédactionnel.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 3, M. Revol, au nom de la commission, propose, dans le 2° du
I du texte présenté par l'article 2 pour l'article 10-1 de la loi n° 91-3 du 3
janvier 1991, de remplacer les mots : « que se proposent de conclure, avec un
prestataire de services, des personnes de droit privé autres que » par les mots
: « que se propose de conclure, avec un prestataire de services, une personne
de droit privé autre que ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol,
rapporteur.
Il s'agit aussi d'un amendement purement rédactionnel.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 4 rectifié, M. Revol, au nom de la commission, propose, à la
fin du 2° du I du texte présenté par l'article 2 pour l'article 10-1 de la loi
n° 91-3 du 3 janvier 1991, de remplacer les mots : « énumérés à l'article 3 de
la présente loi » par les mots : « mentionnés à l'article 9 de la présente loi
».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol,
rapporteur.
Il s'agit toujours d'un amendement rédactionnel.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 5, M. Revol, au nom de la commission, propose de compléter
le texte présenté par l'article 2 pour l'article 10-1 de la loi n° 91-3 du 3
janvier 1991 par un nouveau paragraphe ainsi rédigé :
« IV. - Les contrats qui ont pour objet à la fois des services mentionnés au
II et des services mentionnés au III du présent article sont passés
conformément aux dispositions applicables aux services constituant la majeure
partie du marché. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol,
rapporteur.
L'article 10 de la directive n° 92-50 prévoit que les marchés
qui ont pour objet à la fois des services figurant à l'annexe I-A, le régime
plein, et des services figurant à l'annexe I-B, des régimes dits allégés, sont
soumis aux règles applicables aux services représentant la majeure partie du
marché.
Notre amendement a pour objet de transposer cette disposition, ce que ne fait
pas le projet de loi.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Il s'agit d'une correction très utile, compte tenu de
l'omission signalée par M. le rapporteur.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 6, M. Revol, au nom de la commission, propose :
A. - Au début du texte présenté par l'article 2 pour l'article 10-2 de la loi
n° 91-3 du 3 janvier 1991, de remplacer la référence : « Art. 10-2 » par la
référence : « V ».
B. - En conséquence, dans le premier alinéa de l'article 2, de remplacer les
mots : « et un article 10-2 rédigés » par le mot : « rédigé ».
C. - En conséquence, dans le premier alinéa du I du texte présenté par
l'article 2 pour l'article 10-1 de la loi n° 91-3 du 3 janvier 1991, de
remplacer la référence : « à l'article 10-2 » par la référence : « au V ».
D. - En conséquence, dans le premier alinéa du III du texte présenté par ce
même article pour l'article 10-1 de la loi n° 91-3 du 3 janvier 1991, de
remplacer les mots : « au II du présent article ou à l'article 10-2, » par les
mots : « au II ou au V du présent article, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel de clarification et de
coordination.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Cette disposition sera en tout état de cause codifiée
ultérieurement. Toutefois, le Gouvernement est favorable à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 7 rectifié, M. Revol, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit le 2° du texte présenté par l'article 2 pour l'article 10-2
de la loi n° 91-3 du 3 janvier 1991 :
« 2° Les contrats qui ont pour objet l'achat, le développement, la production
ou la coproduction de programmes par des organismes de radiodiffusion ou qui
concernent les temps de diffusion. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol,
rapporteur.
Pour les services audiovisuels, le texte du projet de loi
propose une rédaction qui diffère de cette directive.
En effet, la terminologie « communication audiovisuelle » qui est employée
semble plus extensive que celle de « radiodiffusion » qui est utilisée par la
directive, ce qui accroîtrait le champ des services exclus de toute
obligation.
En conséquence, la commission vous propose un amendement visant à harmoniser
le texte du projet de loi avec la rédaction de la directive, en employant le
terme de « radiodiffusion ».
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yves Galland,
ministre délégué.
La rigueur de la commission s'impose au
Gouvernement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 8, M. Revol, au nom de la commission, propose, dans le 7° du
texte présenté par l'article 2 pour l'article 10-2 de la loi n° 91-3 du 3
janvier 1991, de remplacer les mots : « les contrats mentionnés au 7° du II de
l'article 10-1 » par les mots : « ceux mentionnés au 7° du II du présent
article ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol,
rapporteur.
C'est un amendement de coordination.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une
discussion commune.
Par amendement n° 16, MM. Grignon, Lorrain, Ostermann, Richert, Hoeffel,
Eckenspieller et Haenel proposent de remplacer le dernier alinéa (8°) du texte
présenté par l'article 2 pour l'article 10-2 de la loi n° 91-3 du 3 janvier
1991 par trois alinéas ainsi rédigés :
« 8° Les contrats de service dont le prestataire est l'une des personnes
énumérées à l'article 9 ci-dessus ou une personne publique désignée sur la base
:
« - soit d'un droit exclusif dont elle bénéficie en vertu de dispositions
législatives ou réglementaires,
« - soit d'un droit fondé sur des dispositions législatives ou réglementaires
autorisant la fourniture de prestations rémunérées, à condition que ces
contrats aient été préalablement autorisés au cas par cas, après vérification
par le préfet qu'ils ne sont pas de nature à concurrencer, de façon abusive,
l'activité normale du secteur privé. »
Par amendement n° 17, MM. Grignon, Hoeffel, Lorrain, Ostermann, Richert,
Eckenspieller et Haenel proposent de remplacer le dernier alinéa (8°) du texte
présenté par l'article 2 pour l'article 10-2 de la loi n° 91-3 du 3 janvier
1991 par trois alinéas ainsi rédigés :
« 8° Les contrats de service dont le prestataire est l'une des personnes
énumérées à l'article 9 ci-dessus ou une personne publique, désignée sur la
base :
« - soit d'un droit exclusif dont elle bénéficie en vertu de dispositions
législatives ou réglementaires,
« - soit d'un droit fondé sur des dispositions législatives ou réglementaires
autorisant la fourniture de prestations rémunérées, à condition que ces
contrats soient passés dans des conditions compatibles avec le traité, définies
par décret. »
Par amendement n° 15, MM. Grignon, Hoeffel, Lorrain, Ostermann, Richert,
Eckenspieller et Haenel proposent de rédiger comme suit la fin du dernier
alinéa (8°) du texte présenté par l'article 2 pour l'article 10-2 de la loi n°
91-3 du 3 janvier 1991 :
« ... en vertu de dispositions législatives ou réglementaires, à condition que
ces dispositions soient compatibles avec le traité. »
La parole est à M. Grignon pour présenter ces trois amendements.
M. Francis Grignon.
L'amendement n° 16 est relatif à la transposition de l'article 6 de la
directive 92-50 par le 8° de l'article 10-2 de la loi du 3 janvier 1991.
Dans la rédaction proposée par le présent projet de loi pour cet article, il
est question d'un « droit exclusif » attribué « en vertu ou sur le fondement de
dispositions législatives ou réglementaires ». Ces dispositions sont les lois
de 1948, 1983 et 1992, qui autorisent les interventions des services techniques
de l'Etat rémunérées par les collectivités territoriales sans leur conférer
aucun droit exclusif.
L'association des termes « fondement » et « droit exclusif » risque donc, en
fait, de donner une exclusivité aux ingénieries intégrées des pouvoirs
publics.
C'est la raison pour laquelle je vous propose un amendement n° 16, qui a pour
objet de mettre le dernier alinéa de l'article 2 en conformité avec l'article 6
de la directive marchés publics de service n° 92-50 qu'il transpose en droit
français, tout en tenant compte des particularités françaises et en permettant
aux services techniques de l'Etat de fournir des prestations rémunérées dans
des conditions et limites précises. Il permet en effet les interventions des
services techniques de l'Etat visées par les lois du 29 septembre 1948 et du 7
janvier 1983, et la loi n° 92-125 du 6 février 1992 dans le respect des règles
de concurrence mentionnées dans la circulaire interministérielle n° 76-533 du
17 novembre 1976.
Il s'agit donc de rétablir un certain équilibre par rapport aux interventions
des services intégrés de l'Etat, et surtout de se mettre en conformité avec la
directive.
Les amendements n°s 17 et 15 sont relatifs au même problème, à des degrés
différents. Alors que l'amendement n° 16 a pour objet de demander au préfet de
traiter au cas par cas, l'amendement n° 17 vise à mettre en place un décret
pour régler le problème et l'amendement n° 15, en supprimant les termes « sur
le fondement », permet en fait de mettre en conformité la transcription du
droit européen avec notre droit.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?
M. Henri Revol,
rapporteur.
La commission est défavorable à l'amendement n° 16, qui va
trop loin. Elle préfère, on le verra après, l'amendement n° 15. Je crains en
effet que le texte du projet de loi ne soit fragile au regard du droit
communautaire.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 17.
Enfin, elle est favorable à l'amendement n° 15, les arguments de ses auteurs
l'ayant convaincue.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yves Galland,
ministre délégué.
A mon grand regret, je vais être obligé d'être un peu
long sur ces amendements, car il ne s'agit pas du tout, en la circonstance,
d'un problème secondaire.
Je suis en désaccord avec les auteurs des amendements sur le fond et,
peut-être, sur le moment. Mais c'est sans doute sur ce point-là que nous
pourrons finalement trouver un terrain d'entente. Je parlerai d'abord du fond,
puis du moment.
L'objet de ces trois amendements dépasse largement le cadre des contrats des
opérateurs visés par le présent projet de loi. Ce qui est visé en réalité, ne
nous le dissimulons pas, ce sont les concours de services, prestations
d'ingénierie, et de maîtrise d'oeuvre, apportés par les services de l'Etat -
DDA, DDE - aux collectivités territoriales, et tout particulièrement aux plus
petites d'entre elles.
Ces dispositions ont été définies dans la loi du 29 septembre 1948 et par la
loi du 7 janvier 1983. Elles ont été plus récemment réaffirmées dans une
réponse parlementaire à une question écrite d'un de vos collègues de
l'Assemblée nationale, M. Duboc, qui a été posée le 18 septembre 1995 à mon
collègue Bernard Pons. Je vous rappelle ce qu'il écrivait :
« La capacité des services publics à produire ces prestations garantit à
toutes les collectivités et autres organismes publics qui le souhaitent un
accès à un service technique de proximité compétent, efficace et disponible. De
plus, les collectivités peuvent ainsi compter sur un partenaire public neutre,
capable de les épauler dans leurs actions de développement.
« L'ingénierie publique s'inscrit pleinement dans le rôle de l'Etat, garant de
la solidarité et de la cohésion nationales. Elle constitue en effet un élément
de solidarité au bénéfice d'un grand nombre de communes, notamment des plus
petites, qui sont dépourvues de moyens techniques propres. Elle contribue à ce
titre à l'aménagement du territoire. Tout en restant mesuré, le potentiel des
services déconcentrés en matière d'ingénierie permet de maintenir les services
de l'Etat dans les zones les plus défavorisées en contribuant au développement
économique local, notamment dans le secteur rural, et en préservant l'emploi
dans les régions les plus reculées. Il serait en contradiction avec les
engagements pris par le Gouvernement en matière d'aménagement du territoire de
projeter un désengagement de l'Etat dans le domaine de l'ingénierie publique
tout en cherchant à maintenir des unités territoriales dans les secteurs les
plus fragiles.
« Le rôle de l'Etat consiste aussi à assurer le libre choix des maîtres
d'ouvrage dans un contexte de fonctionnement ouvert du marché. Le concours
rendu par les services de l'Etat permet de maintenir une offre publique de
référence dans les domaines où des situations de quasi-monopole sont
susceptibles de fausser les conditions de concurrence. Cette activité
d'opérateurs des services déconcentrés de l'Etat enrichit également leur rôle
régalien. Elle leur permet d'avoir une vision plus opérationnelle et plus
globale des problèmes, mais aussi de pouvoir apporter aux collectivités locales
qui le désirent un soutien technique rapide dans des situations exceptionnelles
d'urgence, voire de crise ou de catastrophe. »
Vous connaissez parfaitement la situation, mais elle méritait d'être rappelée
puisqu'elle est la raison d'être des amendements.
Je rappelle qu'il ne s'agit, à l'occasion de la transposition de la directive
sur les services, ni de restreindre ni d'étendre les possibilités
d'interventions actuelles de l'ingénierie publique.
Monsieur Grignon, je voudrais vous rendre attentif au fait qu'aujourd'hui nous
traitons de la transposition de directives et qu'une réforme du code des
marchés publics doit être opérée, dans le cadre national, sur la base de la loi
de 1948. A l'occasion de cette réforme, bien entendu, je souhaite obtenir des
engagements de réciprocité de la part de l'Union européenne.
Avant de nous engager, nous avons lancé une consultation à laquelle nous avons
reçu 14 000 réponses de collectivités locales. Ce sujet me paraît devoir
trouver sa solution dans le cadre de nos conceptions nationales de l'ingénierie
publique.
Je préférerais donc, monsieur Grignon, que le sujet qui nous oppose soit
débattu lors de cette réforme du code des marchés publics et non pas à propos
de la transposition des directives. Si ce débat doit avoir lieu, autant que ce
soit dans le cadre qui me paraît le plus approprié !
C'est la raison pour laquelle, monsieur le président, je lance un appel à M.
Grignon pour qu'il retire ses amendements. Attendons d'avoir des informations
plus précises sur ce que souhaitent les collectivités locales !
Ne sachant pas si M. Grignon est d'ores et déjà convaincu par mes arguments,
je vais maintenant donner les raisons de mon opposition au fond.
Même si l'objet du titre Ier du projet de loi est limité aux organismes
d'intérêt général à statut privé, le Gouvernement ne peut pas, en l'état, être
favorable à l'amendement n° 15, qui tend à réduire le champ d'intervention des
DDE et des DDA, et qui risquerait, à terme, de remettre en cause le concours
ainsi apporté par l'État aux collectivités locales, notamment aux plus petites
d'entre elles. Par ailleurs, contrairement à M. le rapporteur, je ne considère
pas que cet amendement aille moins loin que les autres.
Le Gouvernement n'est pas plus favorable à l'amendement n° 16 qu'aux deux
autres. En effet, il ne peut y avoir un régime d'autorisation préalable pour
les organismes de droit privé, pas plus que pour les collectivités
territoriales, compte tenu des lois de décentralisation.
En tout état de cause, la notion « d'activité normale du secteur privé » est,
à notre avis, beaucoup trop vague pour fonder les limites d'un régime de
contrôle de la concurrence. Au demeurant, le préfet n'a pas à se substituer au
juge ou au Conseil de la concurrence pour apprécier la régularité d'un contrat
au regard du droit de la concurrence.
Le rôle du préfet doit demeurer, de mon point de vue, celui de chef des
services déconcentrés dans le département, appelé à ce titre à s'assurer de la
légalité de l'intervention des services placés sous son autorité au regard des
textes applicables.
C'est le sens des circulaires mentionnées à l'appui de l'amendement qui ne
peuvent en aucun cas fonder un régime d'autorisation préalable des contrats.
Enfin, s'agissant de l'amendement n° 17, le Gouvernement ne peut accepter
qu'une délégation de telle ampleur soit donnée au pouvoir réglémentaire pour
encadrer la liberté contractuelle des personnes privées visées par le présent
projet de loi, pas plus qu'il ne serait possible de l'envisager pour les
collectivités territoriales qui en seraient, en fait, l'objet principal. Telles
sont les raisons pour lesquelles je suis opposé à ces trois amendements.
M. le président.
Monsieur Grignon, maintenez-vous vos amendements ?
M. Francis Grignon.
J'ai été sensible à une certaine partie des arguments de M. le ministre, tant
il est vrai qu'en qualité de maire j'ai souvent fait appel aux services
techniques de l'Etat avec bonheur.
Néanmoins, j'estime qu'il n'est pas possible de toujours reporter les prises
de décision à des débats futurs. Par ailleurs, les dispositions en cause sur
les marchés risquent de se régler en grande partie par la voie
réglementaire.
En fait, ce qui me gêne vraiment, c'est la non-conformité des textes de
référence avec les textes européens et le risque de procédure que cela peut
engendrer.
Enfin et surtout, le texte revient à instaurer une exclusivité pour les
services intégrés de l'Etat.
Dans ces conditions, pour faire un pas en direction de M. le ministre, je
retire les amendements n°s 16 et 17, mais je maintiens l'amendement n° 15.
M. le président.
Les amendements n°s 16 et 17 sont retirés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, accepté par la commission et repoussé par
le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, ainsi modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 3
M. le président.
« Art. 3. - Au début du premier alinéa de l'article 11-1 de la même loi, les
mots : "des contrats définis aux articles 9, 10 et 11" sont remplacés
par les mots : "des contrats définis aux articles 9, 9-1, 10, 10-1, 10-2
et 11". »
Par amendement n° 9, M. Revol, au nom de la commission, propose, à la fin de
cet article, de remplacer les références : « 10-1, 10-2 et 11 » par les
références : « aux I, II, III et IV de l'article 10-1 et à l'article 11 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol,
rapporteur.
Cet amendement de coordination tend à rectifier une erreur
matérielle.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, ainsi modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
M. le président.
« Art. 4. - A l'article 11-2 de la même loi, les mots : "la passation
des contrats définis aux articles 9, 10 et 11" sont remplacés par les mots
: "la passation des contrats définis aux articles 9, 9-1, 10, 10-1, 10-2
et 11". »
Par amendement n° 10, M. Revol, au nom de la commission, propose, à la fin de
cet article, de remplacer les références : « 10-1, 10-2 et 11 » par les
références : « aux I, II, III et IV de l'article 10-1 et à l'article 11 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, ainsi modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5
M. le président.
« Art. 5. - L'article 12 de la même loi est modifié comme suit :
« I. - Au début de l'article, les mots : "Les dispositions du titre II de
la présente loi ne sont pas applicables aux contrats définis aux articles 9, 10
et 11" sont remplacés par les mots : "Les dispositions du titre II ne
sont pas applicables aux contrats définis aux articles 9, 9-1, 10, 10-1, 10-2
et 11".
« II. - Au début du 2°, les mots : "concernant des travaux" sont
remplacés par les mots : "concernant des travaux, des fournitures ou des
services".
« III. - Au 3°, les mots : "et portant sur des travaux destinés à la
réalisation ou à l'exploitation en commun d'un ouvrage par des Etats
signataires de l'accord" sont remplacés par les mots : "et portant
sur des fournitures, services ou travaux destinés à la réalisation ou à
l'exploitation en commun d'un ouvrage par des Etats signataires de
l'accord". »
Par amendement n° 11, M. Revol, au nom de la commission, propose, au
paragraphe I de cet article, de supprimer la référence : « , 10-2 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol,
rapporteur.
Il s'agit également d'un amendement de coordination.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, ainsi modifié.
(L'article 5 est adopté.)
TITRE II
DISPOSITIONS COMPLÉTANT, EN CE QUI CONCERNE CERTAINS CONTRATS DE SERVICES, LA
LOI N° 92-1282 DU 11 DÉCEMBRE 1992 RELATIVE AUX PROCÉDURES DE PASSATION DE
CERTAINS CONTRATS DANS LES SECTEURS DE L'EAU, DE L'ÉNERGIE, DES TRANSPORTS ET
DES TÉLÉCOMMUNICATIONS
Article 6
M. le président.
« Art. 6. - Le premier alinéa de l'article premier de la loi n° 92-1282 du 11
décembre 1992 relative aux procédures de passation de certains contrats dans
les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des télécommunications
est modifié ainsi qu'il suit :
« Est soumise à des mesures de publicité ainsi qu'à des procédures de mise en
concurrence définies par décret en Conseil d'Etat la passation des contrats de
fournitures, de travaux et, dans les conditions définies aux articles 4-1 et
4-2, des contrats de services, dont le montant est égal ou supérieur à des
seuils fixés par arrêté du ministre chargé de l'économie et que se proposent de
conclure, avec un fournisseur, un entrepreneur ou un prestataire de services,
lorsqu'ils exercent les activités mentionnées à l'article 2, les organismes
suivants : ».
(Le reste sans changement.)
Par amendement n° 18, M. Revol, au nom de la commission, propose, dans le
texte présenté par cet article pour le début du premier alinéa de l'article 1er
de la loi n° 92-1282 du 11 décembre 1992, de remplacer les mots : « aux
articles 4-1 et 4-2 » par les mots : « à l'article 4-1 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol,
rapporteur.
C'est un amendement de coordination, monsieur le
président.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, ainsi modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Articles 7 et 8
M. le président.
« Art. 7. - L'article 3 de la même loi est modifié comme suit :
« I. - Les mots : "Sous réserve d'un accord de la Commission des
communautés européennes, les dispositions de la présente loi ne sont pas
applicables" sont remplacés par les mots : "Les dispositions de la
présente loi, à l'exception de ses articles 7-1 et 7-2, ne sont pas
applicables".
« II. - Les mots : "de ses marchés de travaux et de fournitures"
sont remplacés par les mots : "de ses marchés de travaux, de fournitures
et de services". » -
(Adopté.)
« Art. 8. - Le troisième alinéa de l'article 4 de la même loi est abrogé.
» -
(Adopté.)
Article 9
M. le président.
« Art. 9. - Il est inséré dans la même loi, entre les articles 4 et 5, un
article 4-1, un article 4-2 et un article 4-3 rédigés comme suit :
«
Art. 4-1.
- I. - Lorsqu'un contrat de services mentionné à l'article
1er a pour objet l'exécution de services qui entrent dans l'une des catégories
de services énumérées au II de l'article 10-1 de la loi n° 91-3 du 3 janvier
1991 relative à la transparence et à la régularité des procédures de marchés et
soumettant la passation de certains contrats à des règles de publicité et de
mise en concurrence, la personne qui se propose de passer le contrat est tenue
de se conformer aux mesures de publicité et aux procédures de mise en
concurrence prévues à l'article premier.
« II. - Lorsqu'un contrat de services mentionné à l'article 1er a pour objet
l'exécution de services qui entrent dans l'une des catégories de services
définis au III de l'article 10-1 de la loi du 3 janvier 1991 précitée, la
personne qui se propose de passer le contrat est tenue, dans les conditions
fixées par décret en Conseil d'Etat :
« - d'inclure dans les documents généraux ou les cahiers des charges propres à
chaque contrat les caractéristiques essentielles de la prestation attendue
qu'elle doit définir par référence à des règles précisées par le même décret
;
« - de faire connaître, une fois le contrat conclu, les résultats de la
procédure d'attribution.
«
Art. 4-2.
- Sont exclus du champ d'application de l'article 1er
ci-dessus les contrats de services entrant dans l'une des catégories de
services énumérées à l'article 10-2 de la loi du 3 janvier 1991 précitée à
l'exception de ceux définis au 2° de cet article.
«
Art. 4-3.
- Les contrats mentionnés aux articles 4 et 4-1 peuvent
prendre la forme d'accords-cadres ayant pour objet de fixer le contenu des
contrats particuliers à passer au cours d'une période donnée et notamment les
prix et, le cas échéant, les quantités envisagées. Ces accords sont conclus
pour les fournitures, les travaux ou chaque catégorie de services, dans les
mêmes conditions que les contrats susvisés. Un décret en Conseil d'Etat
précise, en tant que de besoin, les conditions auxquelles est subordonnée la
conclusion de ces accords, de manière à éviter qu'il y soit recouru de façon
abusive avec effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser la concurrence.
»
Par amendement n° 12 rectifié
bis,
M. Revol, au nom de la commission,
propose de rédiger ainsi cet article :
« Il est inséré dans la même loi, après l'article 4, un article 4-1 et un
article 4-2 rédigés comme suit :
«
Art. 4-1. -
I. - Lorsqu'un contrat de services mentionné à l'article
1er a pour objet l'exécution de services qui entrent dans l'une des catégories
de services énumérées ci-après, la personne qui se propose de passer le contrat
est tenue de se conformer aux mesures de publicité et aux procédures de mise en
concurrence prévues à l'article 1er.
« Sont soumis aux dispositions de l'alinéa précédent :
« 1° Les services d'entretien et de réparation ;
« 2° Les services de transports terrestres, y compris les services de
véhicules blindés et les services de courrier, à l'exclusion des transports
ferroviaires ;
« 3° Les services de transports aériens : transports de voyageurs, de
marchandises et de courrier ;
« 4° Les services de télécommunications ;
« 5° Les services financiers :
«
a)
services d'assurances ;
«
b)
services bancaires et d'investissement ;
« 6° Les services informatiques et services connexes ;
« 7° Les services de recherche et de développement dont les résultats
appartiennent exclusivement à la personne qui se propose de passer le contrat
pour son usage, dans l'exercice de sa propre activité, pour autant que la
prestation soit entièrement rémunérée par cette personne ;
« 8° Les services comptables, d'audit et de tenue de livres ;
« 9° Les services d'études de marché et de sondages ;
« 10° Les services de conseil en gestion et les services connexes ;
« 11° Les services d'architecture ; les services d'ingénierie et services
intégrés d'ingénierie ; les services d'aménagement urbain et d'architecture
paysagère ; les services connexes de consultations scientifiques et techniques
; les services d'essais et d'analyses techniques ;
« 12° Les services de publicité ;
« 13° Les services de nettoyage de bâtiments et les services de gestion de
propriété ;
« 14° Les services de publication et d'impression sur la base d'une redevance
ou sur une base contractuelle ;
« 15° Les services de voirie et d'enlèvement des ordures : services
d'assainissement et services analogues.
« II. - Lorsqu'un contrat de services mentionné à l'article 1er a pour objet
l'exécution de services qui entrent dans l'une des catégories de services
autres que celles mentionnées au I ou au IV du présent article ou a pour objet
l'achat, le développement, la production ou la coproduction de programmes par
des organismes de radiodiffusion ou concernant les temps de diffusion, la
personne qui se propose de passer le contrat est tenue, dans les conditions
fixées par décret en Conseil d'Etat :
« - d'inclure dans les documents généraux ou les cahiers des charges propres à
chaque contrat les caractéristiques essentielles de la prestation attendue
qu'elle doit définir par référence à des règles précisées par le même décret
;
« - de faire connaître, une fois le contrat conclu, les résultats de la
procédure d'attribution.
« III. - Les contrats qui ont pour objet à la fois des services mentionnés au
I et des services mentionnés au II du présent article sont passés conformément
aux dispositions applicables aux services constituant la majeure partie du
marché. »
« IV. - Sont exclus du champ d'application de l'article 1er de la présente loi
:
« 1° Les contrats qui ont pour objet l'acquisition ou la location d'immeubles
ou qui concernent les droits sur ces biens ;
« 2° Les contrats relatifs aux services de téléphonie vocale, de télex, de
radiotéléphonie mobile, de radio-messagerie et de communications par satellite
;
« 3° Les contrats qui ont pour objet les services d'arbitrage ou de
conciliation ;
« 4° Les contrats de services relatifs à l'émission, à l'achat, à la vente, au
transfert de titres et autres instruments financiers, ainsi que les contrats
qui concernent des services rendus par la Banque de France ;
« 5° Les contrats de travail ;
« 6° Les contrats de services de recherche et de développement autres que les
contrats mentionnés au 7° du I de l'article 4-1 ;
« 7° Les contrats de services dont le prestataire est l'une des personnes
énumérées à l'article 1er 1° et 2° ou une personne publique, désignée sur la
base d'un droit exclusif dont elle bénéficie en vertu ou sur le fondement de
dispositions législatives ou réglementaires.
«
Art. 4-2. -
Les contrats mentionnés à l'article 4 et aux paragraphes
I, II et III de l'article 4-1 peuvent prendre la forme d'accords-cadres ayant
pour objet de fixer le contenu des contrats particuliers à passer au cours
d'une période donnée et notamment les prix et, le cas échéant, les quantités
envisagées. Ces accords sont conclus pour les fournitures, les travaux ou
chaque catégorie de services, dans les mêmes conditions que les contrats
susvisés. Un décret en Conseil d'Etat précise, en tant que de besoin, les
conditions auxquelles est subordonnée la conclusion de ces accords, de manière
à éviter qu'il y soit recouru de façon abusive avec effet d'empêcher, de
restreindre, ou de fausser la concurrence. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 19, présenté par M. Francis
Grignon, et tendant, au dernier alinéa (7°) du IV du texte proposé par cet
amendement pour l'article 4-1 de la loi n° 92-1282 précitée, après les mots : «
dont elle bénéficie en vertu », à supprimer les mots : « ou sur le fondement
».
La parole est à M. Revol, pour défendre l'amendement n° 12 rectifié
bis.
M. Henri Revol,
rapporteur.
La passation de contrats concernant certains services est
soumise à la totalité des mesures de publicité et de mise en concurrence
décrites par la directive et qui seront définies par décret en Conseil
d'Etat.
L'article 15 de la directive n° 93-38 renvoie à l'annexe XVI A, qui dresse la
liste des services concernés.
Cette liste étant identique à celle qui est établie par l'annexe I A de la
directive n° 92-50, le texte proposé pour le paragraphe I de l'article 4-1 de
la loi du 11 décembre 1992 fait simplement référence aux catégories de services
énumérées au paragraphe II de l'article 10-1 de la loi du 3 janvier 1991 inséré
par l'article 2 dans le projet de loi.
Dès lors que le même projet de loi allait transposer les deux directives, le
Gouvernement avait le choix entre deux solutions : soit mentionner
intégralement les différentes catégories de services dans les deux titres de la
loi, soit ne les mentionner que dans le titre Ier et insérer dans le titre II
un renvoi au titre Ier.
Le Gouvernement a retenu cette dernière solution, qui présente l'avantage de
ne mentionner qu'une seule fois chacune des listes de catégories de services.
En revanche, elle présente deux inconvénients.
D'une part, se pose un problème de principe, lié au fait que tant le droit
communautaire que le droit français ont toujours veillé à maintenir une stricte
séparation, voire une étanchéité entre les textes applicables aux marchés
publics
stricto sensu
et ceux qui concernent les contrats passés par les
opérateurs de réseaux.
Ce choix se justifie pleinement par les spécificités de ces derniers, tenant
notamment au caractère industriel et commercial de leurs activités.
Pour des raisons de clarté et de continuité, la commission ne souhaite pas
qu'il soit fait ici exception à ce principe.
D'autre part, le système de renvoi proposé par le présent projet de loi pose
des problèmes purement pratiques de lisibilité de la loi de 1992. Tant que l'on
n'aura pas procédé à la codification des textes concernés, pensons à la PME
subissant les arcanes de notre droit !
Pour ces différentes raisons, la commission vous propose d'adopter une
nouvelle rédaction de l'article 9, de façon, notamment, à faire figurer la
liste des catégories de services soumises au régime « plein » dans le texte
même de l'article 4-1 de la loi de 1992 plutôt qu'à procéder par renvoi à la
loi de 1991.
Par coordination avec la position exposée précédemment, la commission vous
propose de viser les services mentionnés au paragraphe I de l'article 4-1 de la
loi de 1992 et de soumettre également au régime « allégé » certains services
audiovisuels.
Elle vous suggère également d'insérer un paragraphe III concernant le cas des
contrats de services visés à la fois par les deux listes régime « plein » et
régime « allégé ».
Par ailleurs, s'agissant des services exclus des obligations communautaires,
les listes d'exclusions figurant dans les deux directives concernées étant
identiques à cette exception près, pour les mêmes raisons que celles qui ont
été exposées précédemment, la commission vous propose de faire figurer la liste
de ces services dans le texte même de la loi de 1992.
Enfin et parallèlement à la présentation qu'elle vous a proposée à l'article 2
du présent projet de loi, elle vous demande d'intégrer les dispositions de
l'article 4-2 à l'article 4-1.
M. le président.
La parole est à M. Grignon, pour présenter le sous-amendement n° 19.
M. Francis Grignon.
Il s'agit d'un sous-amendement de coordination.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?
M. Henri Revol,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 12 rectifié
bis
et
sur le sous-amendement n° 19 ?
M. Yves Galland,
ministre délégué.
S'agissant de l'amendement n° 12 rectifié
bis,
j'ai bien noté que M. le rapporteur avait relevé l'avantage que présentait le
texte du Gouvernement. J'ai bien noté également qu'il avait de son point de vue
deux inconvénients.
Je suis favorable à cet amendement dans la mesure où, ces deux inconvénients
une fois levés, le texte n'en aura que plus de clarté.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 19, je ne peux évidemment pas
m'opposer à cette mesure de coordination avec l'amendement n° 15, dont je
déplore le vote.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 19, accepté par la commission.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 12 rectifié
bis,
accepté par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 9 est ainsi rédigé.
Article 10
M. le président.
« Art. 10. - L'article 5 de la même loi est modifié comme suit :
« I. - Au début de l'article, les mots : "aux contrats définis à
l'article 4" sont remplacés par les mots : "aux contrats définis aux
articles 4, 4-1 et 4-3 de la présente loi et au 2° de l'article 10-2 de la loi
du 3 janvier 1991".
« II. - Au 4°, les mots : "Pour des fournitures ou des travaux" sont
remplacés par les mots : "Pour des fournitures, des travaux ou des
services".
« III. - Au 5°, les mots : "et portant sur des fournitures ou des
travaux" sont remplacés par les mots : "et portant sur des
fournitures, des travaux ou des services". »
Par amendement n° 13, M. Revol, au nom de la commission, propose, au
paragraphe I de cet article, de remplacer les mots : « aux articles 4, 4-1 et
4-3 de la présente loi et au 2° de l'article 10-2 de la loi du 3 janvier 1991.
» par les mots : « à l'article 4, aux paragraphes I, II et III de l'article 4-1
et à l'article 4-2. ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 10, ainsi modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Article 11
M. le président.
« Art. 11. - Il est inséré dans la même loi, entre les articles 5 et 6, un
article 5-1 rédigé comme suit :
«
Art. 5-1. -
Les dispositions de la présente loi ne sont pas
applicables :
« - aux contrats de services définis à l'article 4-1 passés par un groupement
constitué de personnes visées à l'article 1er avec l'une des personnes membres
du groupement ;
« - aux contrats passés par une des personnes ou un groupement constitué de
personnes visées à l'article 1er avec une entreprise liée à cette personne ou à
l'une des personnes membres du groupement, à condition qu'au moins 80 % du
chiffre d'affaires moyen en matière de services réalisé par cette entreprise
liée, au sein de la Communauté européenne, au cours des trois dernières années
écoulées, proviennent de la prestation de ces services aux personnes auxquelles
elle est liée.
« Si une des personnes mentionnées à l'article 1er acquiert des prestations de
services identiques ou similaires auprès d'une ou plusieurs entreprises qui lui
sont liées, il est tenu compte du chiffre d'affaires total ainsi réalisé au
sein de la Communauté européenne pour ces services et par ces entreprises.
« Sont des entreprises liées :
« 1° Celles dont les comptes annuels sont consolidés avec ceux d'un des
organismes visés à l'article 1er ;
« 2° Celles qui sont soumises directement ou indirectement à l'influence
dominante d'un organisme visé à l'article 1er ;
« 3° Celles qui peuvent exercer directement ou indirectement une influence
dominante sur un organisme visé à l'article 1er ;
« 4° Celles qui sont soumises à l'influence dominante d'une entreprise
exerçant également une telle influence sur l'organisme visé à l'article 1er.
« L'influence dominante exercée sur une entreprise est celle qui résulte de la
propriété, de la participation financière et des règles qui régissent ladite
entreprise. Il en est ainsi notamment lorsqu'une personne ou un groupement de
personnes détient la majorité du capital de cette entreprise ou dispose de la
majorité des voix attachées aux parts émises par elle ou peut désigner plus de
la moitié des membres de son organe d'administration, de direction ou de
surveillance.
« Un décret précise les conditions dans lesquelles les organismes visés à
l'article 1er notifient à la Commission des Communautés européennes, sur sa
demande, des informations relatives à l'application des dispositions du présent
article. »
Par amendement n° 14, M. Revol, au nom de la commission, propose, au troisième
alinéa du texte présenté par cet article pour l'article 5-1 de la loi du 11
décembre 1992, après les mots : « dernières années écoulées, » d'insérer les
mots : « ou depuis sa création si celle-ci remonte à moins de trois ans, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri Revol,
rapporteur.
L'article 11 tend à exclure du champ d'application de la loi,
donc à ne pas soumettre aux obligations de publicité et de mise en concurrence,
les contrats de services passés par un acheteur avec des entreprises qui lui
sont directement ou indirectement liées. Sont ainsi exclus du champ
d'application de la loi trois types de contrat.
Dans deux cas sur trois, l'exclusion est toutefois soumise à une condition
tenant à la proportion du chiffre d'affaires réalisé entre ces entités.
Il s'agit, par exemple, du cas où un opérateur conclurait un contrat de
services avec une société filiale ou une société dont il serait la filiale ou
une société qui serait filiale de la même société que l'opérateur lui-même, à
condition, toutefois, que 80 % au moins du chiffre d'affaires moyen réalisé par
cette entreprise en matière de services dans la Communauté européenne provienne
de la fourniture de ces services aux entreprises auxquelles elle est liée.
L'évaluation du pourcentage du chiffre d'affaires ainsi réalisé au sein de la
Communauté européenne est effectuée sur les trois dernières années écoulées.
Nous pouvons cependant nous interroger sur la façon dont peut être apprécié le
pourcentage du chiffre d'affaires réalisé avec des entités adjudicatrices par
une entreprise liée créée depuis moins de trois ans.
La directive ne résout pas ce cas, qui a pourtant été soulevé par certains
responsables d'entreprise que j'ai pu auditionner.
En l'absence de dispositions de la directive s'opposant à une telle démarche,
la commission vous propose donc d'adopter un amendement tendant à compléter le
troisième alinéa de l'article 5-1, de façon à préciser que le calcul du seuil
de 80 % du chiffre d'affaires européen réalisé s'effectue, lorsque la filiale a
moins de trois ans d'existence, sur la durée écoulée depuis sa création.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Yves Galland,
ministre délégué.
Le Gouvernement est favorable à cette précision.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 11, ainsi modifié.
(L'article 11 est adopté.)
Articles 12 et 13
M. le président.
« Art. 12. - Au premier alinéa de l'article 7-1 de la même loi, après les mots
: "la passation des contrats définis à l'article 1er", sont insérés
les mots : "ainsi qu'à l'article 3". » -
(Adopté.)
« Art. 13. - A l'article 7-2 de la même loi, après les mots : "la
passation des contrats définis à l'article 1er", sont insérés les mots :
"ainsi qu'à l'article 3". » -
(Adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M.
Lauret, pour explication de vote.
M. Edmond Lauret.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'enjeu du
présent projet de loi est important puisqu'il vise à permettre la transposition
en droit interne d'une partie des dispositions des directives européennes sur
les marchés publics, prises par le Conseil des ministres des Communautés
européennes en 1992 et en 1993 dans la perspective de l'achèvement du marché
intérieur.
Ces directives sont d'autant plus importantes qu'elles sont inscrites dans la
perspective de la construction du marché unique. Elles poursuivent toutes le
même objectif qui consiste à éviter la discrimination entre les candidats aux
marchés publics en raison de leur nationalité.
Toutefois, ce projet de loi ne transpose pas les obligations communautaires
s'appliquant aux établissements publics, ces mesures relevant du code des
marchés publics, dont la réforme devrait être présentée très prochainement au
Parlement.
Je tiens à saluer votre détermination, monsieur le ministre, dans le processus
de réforme du code des marchés publics que vous avez entamé. Vous avez, en
effet, la volonté de donner à la commande publique un cadre juridique cohérent
et adapté à la réalité économique, et ce dans le strict respect des principes
de transparence des choix et d'égalité dans la concurrence.
Pour toutes ces raisons, le groupe du Rassemblement pour la République votera
ce texte.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
M. Félix Leyzour.
Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
(Le projet de loi est adopté.)
5
NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président.
Je rappelle que la commission des affaires économiques et du Plan a proposé
une candidature pour un organisme extraparlementaire.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par
l'article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Jacques
Braconnier membre du comité de liaison pour le transport des personnes
handicapées.
L'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons interrompre nos travaux
; nous les reprendrons à seize heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures cinq, est reprise à seize heures
trente.)
M. le président. La séance est reprise.
6
DÉCLARATION DE L'URGENCE
D'UN PROJET DE LOI
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :
« Paris, le 19 novembre 1996.
« Monsieur le président,
« J'ai l'honneur de vous faire connaître qu'en application de l'article 45,
alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement déclare l'urgence du projet de
loi relatif à l'Union d'économie sociale du logement, déposé sur le bureau du
Sénat le 30 octobre 1996.
« Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute
considération.
« Signé : Alain Juppé. »
Acte est donné de cette communication.
7
PROFESSIONNALISATION DES ARMÉES
Adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 26, 1996-1997),
adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif aux
mesures en faveur du personnel militaire dans le cadre de la
professionnalisation des armées. [Rapport n° 67 (1996-1997).]
J'informe le Sénat que la commission des affaires étrangères, de la défense et
des forces armées m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la
désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la
réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les
dispositions restant en discussion du projet de loi actuellement en cours
d'examen.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai
réglementaire.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Charles Millon,
ministre de la défense.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur,
mesdames, messieurs les sénateurs, le 23 octobre dernier, lors du débat
d'orientation budgétaire, j'ai fait le point de l'état d'avancement de la
réforme de notre défense annoncée et engagée par le Président de la République,
depuis le vote de la loi de programmation militaire.
Aujourd'hui, j'ai l'honneur de soumettre à votre approbation le projet de loi
relatif aux mesures en faveur du personnel militaire dans le cadre de la
professionnalisation des armées.
Ce texte tend, tout comme le projet de loi de finances pour 1997, à accorder
au Gouvernement les moyens nécessaires pour réussir cette réforme.
L'objectif est double.
Il s'agit, d'abord, d'assurer le passage le plus harmonieux possible de
l'armée de conscription à l'armée professionnelle. Il faudra donc programmer la
diminution des effectifs, organiser le doublement du nombre des engagés et
inciter à la diminution du nombre d'officiers et de sous-officiers.
Il s'agit, ensuite, de garantir le caractère attractif du métier militaire.
La nouvelle politique qui est conduite se traduit, en premier lieu, par la
révolution du nombre, puisque la professionnalisation va de pair avec la
réduction du format des forces.
Comme vous le savez, le nouveau modèle d'armée se caractérise par une
diminution de l'effectif global et par le resserrement général des formats, à
l'exception de celui de la gendarmerie. D'ici à 2002, les effectifs du
ministère de la défense seront réduits de près du quart. Ce n'est ni le jour ni
l'heure de rappeler les raisons stratégiques de cette réforme, que vous avez
approuvée en adoptant la loi de programmation ; je n'y reviendrai donc pas.
Cette réduction du format s'accompagne de deux mouvements contraires :
l'augmentation du nombre des engagés, d'une part, la diminution du nombre total
des officiers et des sous-officiers, d'autre part.
Le premier mouvement, à savoir le doublement du nombre des engagés sur six
ans, répond à la décrue des effectifs d'appelés. Pour atteindre un nombre total
de 92 000 engagés en 2002, 48 000 postes nouveaux devront être créés en six
ans, avec un rythme d'accroissement annuel d'environ 7 500. Ce mouvement
commencera dès l'année prochaine avec 7 700 postes ouverts par le projet de loi
de finances pour 1997.
Le second mouvement concerne la diminution du nombre total des officiers et
des sous-officiers : ainsi, l'armée de terre connaîtra une diminution de 1 400
officiers et de 6 300 sous-officiers, l'armée de l'air une réduction de 300
officiers et de 4 400 sous-officiers et la marine une diminution de 2 400
sous-officiers.
Soucieux de ne pas ajouter aux difficultés auxquelles les armées pourraient
être confrontées, le Président de la République a pris l'engagement de recourir
non pas à des mesures de départ autoritaires, mais, au contraire, à une méthode
fondée sur l'incitation : les dispositions facilitant les départs seront mises
en oeuvre sur la seule base du volontariat.
Toutefois, la nouvelle armée ne se résume pas à un simple ajustement des
effectifs, fût-il de cette importance. C'est véritablement un modèle militaire
nouveau qui se construit autour de l'ambition de cohérence, de disponibilité et
d'interopérabilité. La révolution du nombre s'accompagne donc d'un profond
changement qualitatif qui s'exprime, en particulier, par le renforcement du
taux d'encadrement des forces et par le rajeunissement des cadres.
Première évolution : le renforcement du taux d'encadrement des unités des
forces en fonction de l'évolution propre à chacune des armées ; ce point a été
parfaitement décrit par M. le rapporteur. Comme vous le savez, le besoin de
renforcer le taux d'encadrement a été vérifié à l'occasion des opérations
extérieures dans lesquelles la France s'est engagée ces dernières années.
Du fait de la réduction du format des armées et de la disparition des appelés,
le rapport du nombre d'officiers et de sous-officiers avec l'effectif global
s'accroît de façon arithmétique, ce malgré la baisse du nombre total
d'officiers et de sous-officiers.
Cependant - et je remercie M. le rapporteur de l'avoir souligné - un effort
particulier sera accompli en matière d'encadrement pour la marine et la
gendarmerie ; c'est ce qui justifie une augmentation de plus de 100 officiers
dans la marine et de près de 1 400 officiers dans la gendarmerie.
Seconde évolution : le rajeunissement des cadres. Il s'agit là d'une évolution
indispensable dans une armée qui sera consacrée, plus encore que par le passé,
à des activités opérationnelles. Ces dernières années, les armées ont, en
effet, connu un relatif vieillissement qui est dû, d'une part, au
ralentissement du nombre des départs et, d'autre part, aux dispositions
statutaires ou financières qui ont plutôt encouragé les militaires à différer
leur décision de quitter l'uniforme, voire, tout simplement, à y renoncer.
De ce fait, les recrutements et les renouvellements de contrats ont été
sensiblement réduits, en particulier dans les armées de terre et de l'air. Pour
restaurer l'équilibre de la pyramide des âges et maintenir une armée jeune,
nous devons parvenir à un volume annuel suffisant de départs.
Naturellement, pour réussir le grand pari humain que représente l'armée
professionnelle, il est indispensable d'accentuer et de développer le caractère
attractif du métier militaire.
Cela implique, d'abord, l'amélioration des conditions matérielles. C'est dans
cette perspective que le projet de loi de finances pour 1997 prévoit de porter
la rémunération initiale des engagés au niveau du SMIC à partir du 1er juin
1997. Cette mesure sera tout à fait décisive. J'espère, bien évidemment,
qu'elle sera votée par votre Haute Assemblée.
Renforcer le caractère attractif du métier militaire, c'est, ensuite,
restaurer, pour les officiers, les sous-officiers ou les engagés, une vision
plus claire des perspectives d'avancement et de carrière.
Il est en effet nécessaire que, lors de son engagement et en cours de
carrière, chaque militaire puisse être informé des perspectives qui sont les
siennes : la motivation individuelle, l'anticipation de la reconversion et, par
voie de conséquence, sa réussite dépendent de cette vision claire de
l'avenir.
Là encore, l'augmentation du nombre des départs permettra le rééquilibrage de
la pyramide des âges et de la pyramide des grades, ainsi que le rétablissement
d'une meilleure gestion des parcours individuels au sein de chaque corps, de
chaque spécialité.
Enfin, si l'on veut participer à l'amélioration de l'attractivité du métier
militaire, il convient d'instaurer un véritable droit à la reconversion. Sur ce
sujet, M. About, rapporteur, a parfaitement recensé la palette des dispositions
en vigueur et a analysé la portée du projet de loi ; je n'y reviendrai donc
pas.
Chacun devra pouvoir bénéficier, à la fin d'un séjour passé sous l'uniforme,
de conditions favorables pour commencer une deuxième carrière civile. Cela
suppose un effort important de formation et de reconversion.
C'est une mesure tout à fait centrale, qui encouragera sans aucun doute les
jeunes à s'engager. Quoi de plus naturel, si l'armée leur offre une certitude
sur les conditions de leur future insertion professionnelle et si elle devient
la meilleure des formations et des recommandations pour une nouvelle carrière
civile ?
Tout cela correspondra à la multiplication des carrières militaires courtes,
dont le principal avantage est un échange beaucoup plus intense qu'aujourd'hui
entre la vie militaire et la vie civile. C'est là un atout pour le renforcement
du lien entre l'armée et la nation, et la diffusion de l'esprit et de la
culture de défense dans la société.
Pour mettre en oeuvre cette révolution du nombre que je viens d'analyser, pour
construire ce nouveau modèle militaire que je viens d'esquisser, il importe de
décider de mesures transitoires et de mesures définitives.
Les mesures d'adaptation à caractère transitoire s'appliqueront durant toute
la durée de la loi de programmation.
Elles doivent faciliter le déroulement de la phase de transition qui s'ouvre
devant nous et permettre ainsi la réussite de la professionnalisation des
armées.
Il s'agit tout d'abord du pécule, dont le montant sera d'autant plus attractif
qu'il sera sollicité longtemps avant la limite d'âge du grade détenu et en
début de période de transition.
Il s'agit également de la programmation jusqu'en 2002 des dispositifs
législatifs favorisant le départ des militaires : d'une part, la loi dite «
70-2 » permettant l'accès aux corps de la fonction publique et, d'autre part,
les articles 5 et 6 de la loi n° 75-1000 autorisant le départ avec le bénéfice
de la pension du grade supérieur.
La seconde catégorie de dispositions est liée à l'armée professionnelle.
Dotées d'un caractère permanent, ces mesures contribueront à renouveler et à
améliorer l'image et les conditions d'exercice du métier militaire.
Tel est la cas du congé de reconversion, qui deviendra un élément à part
entière du statut militaire.
Tel est le cas également des mesures visant à enrichir le statut général des
militaires : l'assurance d'une meilleure égalité de traitement entre les
différentes catégories de personnel, grâce à l'extension au personnel sous
contrat des dispositions applicables au personnel d'active, l'amélioration de
la protection pénale des militaires, qui pourront jouir de garanties
équivalentes à celles dont bénéficient les autres fonctionnaires de l'Etat, et,
enfin, l'ouverture des possibilités d'option en matière de solde de réforme.
Ces dispositions sont le fruit du dialogue permanent qui a été entretenu
depuis plusieurs mois avec la communauté militaire, plus particulièrement grâce
à la concertation au sein des organismes consultatifs, tel le Conseil supérieur
de la fonction militaire. Elles répondent largement aux attentes qui s'étaient
exprimées et que j'avais pu moi-même noter lors des visites que j'avais
entreprises au printemps dernier au sein des unités.
Mesdames, messieurs les sénateurs, en engageant une réforme de cette ampleur,
le Président de la République a demandé beaucoup à la communauté militaire. En
s'adressant à elle, le 22 février dernier, il soulignait qu'« il y a du courage
et de l'abnégation à renoncer à des habitudes, à des modes de pensée et des
traditions et à s'attacher sans parti pris, sinon sans regret, à la mise en
place d'un modèle d'armée conforme aux exigences actuelles de la défense
nationale. »
Si le Chef de l'Etat a pu demander autant à la communauté militaire, c'est
qu'il a fait la preuve, de Verbanja à Mururoa, qu'il sait faire prévaloir, en
toutes circonstances et au milieu des pressions les plus fortes, des principes
intangibles : priorité à la défense et à la sécurité du pays, détermination à
faire respecter l'honneur des soldats français, souci constant de mettre notre
outil de défense au service d'une volonté politique claire.
Si le Président de la République a pu lui demander autant, c'est que « l'armée
de la République est au service de la nation ». « L'état militaire exige en
toute circonstance discipline, loyalisme et esprit de sacrifice. Les devoirs
qu'il comporte et les sujétions qu'il implique méritent le respect des citoyens
et la considération de la nation. » J'ai cité là les premiers mots de la loi de
1972 portant statut général des militaires.
Mais, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez bien compris que vous
pourrez témoigner de ce respect des citoyens et de cette considération de la
nation en votant le projet de loi que j'ai l'honneur de vous soumettre.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About,
rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers
collègues, le choix de l'armée professionnelle, proposé par le Président de la
République, a été accepté par le Parlement, lors du vote de la dernière loi de
programmation militaire. Je ne reviendrai pas ici sur les raisons qui ont
justifié l'engagement de cette réforme fondamentale de notre outil de défense.
A mes yeux, si la transition est menée à bien, cet outil sera à même de relever
les défis que l'évolution géostratégique ne manquera pas de lancer à nos
ambitions et à nos capacités tant nationales qu'européennes.
« Si la transition est menée à bien », ai-je dit. C'est bien de cela, en
effet, qu'il s'agit aujourd'hui : le projet de loi qui nous est soumis a pour
objet de mettre en oeuvre un dispositif d'accompagnement qui permettra de
réussir sans heurts la transition qui s'ouvre et de gérer de la meilleure façon
possible ce que de nombreux militaires perçoivent à juste titre comme un
bouleversement.
Avec la réduction drastique du nombre de jeunes du service national, l'armée
professionnelle sera moins nombreuse qu'aujourd'hui. Toutes armées confondues,
y compris les civils, ses effectifs passeront en six ans de 573 000 à 440 000,
soit une réduction de 133 000 emplois. Entre 1996 et 2002, le poids des
militaires professionnels sera passé de 52 % à 75 %, notamment par le
recrutement de 48 000 engagés supplémentaires, celui des jeunes du service
national de 35 % à 6 %, et celui des civils de 13 % à près de 19 %.
Plus précisément, il s'agit d'organiser dès maintenant, pour les six ans à
venir, le départ volontaire de 267 officiers et de 15 532 sous-officiers. Tel
est l'objet du présent projet de loi.
Ce texte contient donc trois mesures principales à caractère provisoire,
destinées à soutenir financièrement ceux qui quitteront les armées avant le
terme normal de leur carrière et à faciliter leur reclassement dans la fonction
publique civile. Le projet de loi comporte également un volet important relatif
à la reconversion des militaires dans la vie active, qu'ils soient de carrière
ou sous contrat. Les mesures qu'il propose à cet égard relèvent, pour partie,
de l'incitation au départ. Elles vont aussi bien au-delà. Je les traiterai dans
un second temps.
M. le ministre a rappelé dans le détail l'économie générale des mesures
provisoires d'incitation au départ anticipé, et je ne m'y attarderai donc pas.
Elles sont au surplus décrites dans mon rapport écrit.
Venons-en au pécule.
Les officiers et les sous-officiers de carrière réunissant respectivement
vingt-cinq ans et quinze ans de service militaire effectifs et se trouvant à
plus de trois ans de la limite d'âge de leur grade recevront, au moment de leur
départ des armées, outre le bénéfice d'une pension militaire, une somme
d'argent dénommée « pécule », destinée à faciliter leur retour dans la vie
civile. En effet, les limites d'âge dans les armées sont plus précoces
qu'ailleurs et justifient que les intéressés soient en mesure de rechercher une
nouvelle activité civile.
Le dispositif proposé rendra ce pécule d'autant plus attractif que le départ
se fera au début de la période, soit en 1997-1998, et que le militaire sera
éloigné de la limite d'âge de son grade.
Le bénéfice du pécule intéressera prioritairement les militaires appartenant à
des armées dont les effectifs de cadres contribueront le plus à la déflation
programmée. Dans les faits également, il s'agira de se tourner en premier vers
les officiers et les sous-officiers se situant entre sept ans et trois ans de
la limite d'âge, là où les sureffectifs paraissent les plus importants.
Cette mesure n'a, enfin, qu'un caractère provisoire : elle cessera de
s'appliquer au 31 décembre 2002.
La seconde disposition d'incitation à caractère financier est la prorogation
des mesures dites de retraite au grade supérieur et de congé spécial,
instituées par la loi de 1975. Elles permettent à des officiers, sous certaines
conditions, de prendre notamment une retraite anticipée avec le bénéfice d'une
pension de retraite calculée sur la base du grade supérieur ou de l'échelon
supérieur de leur grade. Là encore, il s'agit d'un dispositif provisoire, le
projet de loi prorogeant cette mesure jusqu'au 31 décembre 2002 et lui
associant le bénéfice d'un pécule réduit des quatre cinquièmes.
Lors de la discussion des articles, je vous proposerai, au nom de la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, un
amendement visant à étendre, avec quelques nuances, cette faculté de retraite
au grade supérieur aux sous-officiers. Ceux-ci devraient en effet légitimement
bénéficier de cette disposition d'incitation au départ, par souci d'équité tout
d'abord, mais aussi parce que c'est dans leur rang que l'on constate les poches
de sureffectifs les plus importantes.
J'aborderai à présent la troisième mesure, qui tend à faciliter le
reclassement des militaires dans la fonction publique civile et qui a été
instituée par la loi n° 70-2 du 2 janvier 1970. Cette loi, qui ouvre la
possibilité pour certains officiers et sous-officiers d'intégrer directement
certains emplois publics civils, sera prorogée jusqu'au 31 décembre 2002.
Parallèlement, le nombre de postes offerts sera élargi jusqu'à 450 environ.
Après les mesures d'incitation, j'aborderai le volet reconversion, qui, lui,
revêtira un caractère permanent. En effet, par-delà les facilités de retour à
la vie civile qu'il permettra pour ceux qui quittent les armées dans le cadre
de la déflation d'effectifs, le dispositif de reconversion constituera, bien
après 2002, un élément essentiel de la nouvelle carrière militaire.
A l'avenir, en effet, la nouvelle armée professionnelle privilégiera les
carrières courtes, et les futurs engagés militaires du rang devront savoir que
leur séjour sous l'uniforme ne pourra, sauf exception, dépasser huit années,
voire onze pour l'armée de terre.
Ces perspectives de carrières courtes entraîneront un état d'esprit nouveau.
La carrière militaire devra être conçue comme un tout : une tâche militaire
intéressante, une capacité de formation de qualité et une préparation de longue
main pour la reconversion dans la vie civile. Le binôme carrière militaire -
reconversion sera désormais indissociable dans la nouvelle conception du métier
- temporaire - des armes.
Le projet de loi prévoit donc, sous la forme d'un premier congé de six mois
éventuellement prorogeable par un congé complémentaire de six mois également,
un délai global de reconversion d'un an maximum au cours duquel le militaire de
carrière ou sous contrat recevra la formation adaptée à son projet
professionnel, comprenant notamment des stages AFPA, l'Association nationale
pour la formation professionnelle des adultes, et des stages en entreprise.
L'un des amendements que je proposerai tout à l'heure à votre approbation, au
nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces
armées, aura pour objet d'inscrire clairement ce droit à la reconversion dans
le titre Ier du statut général des militaires, consacrant ainsi la place
éminente qu'il convient de lui donner dans le texte de base de la vie
militaire. De même, et dans un souci de cohérence, la commission proposera un
amendement visant à étendre de deux à six mois le délai de préavis avant
dénonciation du contrat d'engagement, afin précisément de prendre en compte
cette phase de reconversion de six mois.
Je ne reviendrai pas dans le détail sur les dispositions diverses que contient
le projet de loi et qui ne sont pas liées, à proprement parler, au dispositif
d'accompagnement. La première mesure a pour objet d'étendre aux militaires la
même garantie juridique qu'aux élus locaux et aux fonctionnaires civils,
lorsque leur responsabilité pénale se trouve engagée dans le cadre de délits
d'imprudence ou de négligence ; nous connaissons parfaitement bien ce texte. La
seconde disposition tend à ouvrir à certains engagés ayant servi moins de cinq
ans dans les armées et les ayant quittées pour cause d'infirmité ou de maladie
liée au service la possibilité de choisir entre le bénéfice de la solde de
réforme, d'une part, et la validation de leur période militaire au titre du
système de retraite du régime général, d'autre part.
Avant de conclure, je voudrais rappeler, parmi les modifications adoptées par
l'Assemblée nationale, une disposition que je considère comme particulièrement
importante : les députés ont ajouté au texte initial les articles 8
bis
et 13 tendant à rappeler une nouvelle fois le droit des militaires retraités
ayant repris une activité civile et se retrouvant ensuite privés de cet emploi
à bénéficier des allocations de chômage.
Ces deux articles 8
bis
et 13 signifient clairement, à nos yeux, que
les militaires retraités privés d'emploi ont droit, jusqu'à l'âge fixé par la
loi pour bénéficier de la pension de retraite du régime général, à
l'intégralité des allocations de chômage auxquelles ils peuvent prétendre, et
ce, il faut le répéter, sans condition de ressources. La pension militaire de
retraite est une contrepartie spécifique des carrières courtes - et elles le
seront, rappelons-le, de plus en plus - et elle ne saurait justifier les
réductions d'allocations de chômage qui sont aujourd'hui décidées dans de
nombreux cas par l'organisme gestionnaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce texte
constitue, à mes yeux, une réponse adaptée à l'enjeu des conséquences humaines
de la professionnalisation. Il faut être conscient de l'effort financier
considérable qu'il implique de la part de la nation, mais cet effort est aussi
la juste conséquence d'un bouleversement sans précédent dans l'organisation des
armées.
Ce texte présente l'intérêt de ne pas se limiter aux seules dispositions
financières - et au demeurant temporaires - que constituent le pécule ou la
retraite au grade supérieur. La reconversion y tient en effet une place
importante. Certes, nos armées ne découvrent pas en 1996 l'importance de cette
mission, et mon rapport écrit rappelle les efforts qu'elles y consacrent déjà
ainsi que les initiatives qu'elles ont prises. Cependant, ce texte en formalise
l'importance nouvelle et en consacre le rôle essentiel pour la qualité des
recrutements à venir et la perception nouvelle du métier militaire. Loin
d'enfermer ceux qui le choisissent dans une société coupée du monde civil, le
métier militaire, nouvelle manière, par les flux d'engagements courts d'un
côté, par ses efforts de reconversion de l'autre, crée autant de passerelles
entre l'armée et la société civile. C'est aussi une façon opportune de
renforcer et de renouveler le lien entre la nation et son armée.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR
et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Rouvière.
M. André Rouvière.
Monsieur le ministre, ma réflexion portera sur votre méthode et sur
quelques-unes des mesures que vous nous avez présentées et que M. le rapporteur
a rappelées. Celles-ci me paraissant parfois insuffisantes, je vous en
suggérerai d'autres, qui sont, me semble-t-il, absentes de votre projet de
loi.
En ce qui concerne la méthode, j'avoue, monsieur le ministre, que la démarche
que vous avez adoptée heurte un peu tout esprit un tant soit peu cartésien, car
la logique me paraît un peu bousculée. En effet, hier - je veux dire au moins
de juin dernier - vous nous avez présenté un projet de loi de programmation qui
a défini les objectifs et les moyens. Par rapport à la précédente loi de
programmation, les économies réalisées étaient d'ailleurs importantes : environ
20 %. Aujourd'hui, nous discutons des moyens susceptibles de conduire à l'armée
de métier. Demain - c'est-à-dire dans les premiers jours de 1997 - nous
parlerons, si l'on en croit ce qui nous est annoncé, du devenir du service
national.
J'avoue que cette façon de procéder me paraît assez paradoxale sur le plan de
la cohérence et de la logique. Elle me paraît, en outre, aller à l'encontre du
respect des prérogatives du Parlement. A chacune de ces étapes, monsieur le
ministre, vous avez en effet anticipé la décision des parlementaires. Je dirai
même que vous avez placé le Parlement devant le fait accompli : vous décidez,
il doit s'aligner. Dans la forme, donc, votre méthode me paraît constituer une
gifle à la démocratie et au Parlement.
Je ne comprends d'ailleurs pas, monsieur le ministre, pourquoi vous avez
adopté cette logique inversée. Quels avantages présente-t-elle ? La cohérence
aurait voulu que vous demandiez d'abord au Parlement de se prononcer sur le
service national, puis sur l'armée de métier, et enfin sur la loi de
programmation. Ainsi, me semble-t-il, le bon sens et la démocratie auraient été
respectés.
La logique inversée que vous avez retenue - qu'on ne peut d'ailleurs qualifier
de logique - rabaisse le Parlement à une simple chambre d'enregistrement.
J'invite donc tous les démocrates à condamner ce procéder antidémocratique.
Mais, au-delà de la méthode, je m'interroge sur vos moyens : avez-vous,
monsieur le ministre, les moyens de votre réforme ? Dans la même démarche, vous
voulez économiser, ce qui est bien ; réformer, ce qui n'est pas facile ;
améliorer, ce qui est ambitieux ; moderniser, ce qui demande également un
effort financier.
Vous mettez, certes, l'accent sur les économies entraînées par la baisse
importante des effectifs, soit 132 275 emplois en moins de 1996 à 2002, ce qui
est considérable. Mais dois-je insister sur le fait que cette mesure ne va pas
dans le sens de la diminution du nombre des chômeurs ? Même s'il n'y a pas de
licenciement, les emplois vont incontestablement être moins nombreux. Et il en
est de même des recrutements, en raison de la mise en oeuvre de deux démarches
contraires : une incitation au départ et une incitation au recrutement, afin de
rajeunir et de moderniser.
A cet égard, je souhaite souligner quelques imprécisions qui me semblent
importantes, et relever quelques lacunes.
En ce qui concerne les imprécisions, si le pécule constitue une incitation au
départ, il peut représenter des sommes importantes : 580 000 francs, par
exemple, pour un lieutenant-colonel ayant six ans d'ancienneté dans le grade et
étant à sept ans de la limite d'âge. Des critères objectifs d'attribution me
paraissent donc nécessaires. En effet, si j'ai bien compris, toutes les
demandes ne seront pas forcément retenues, puisque l'intérêt du service
l'emportera sur l'intérêt du militaire. Cela, je peux le comprendre, mais ne
va-t-on pas se heurter à des injustices ? Certains militaires qui auraient pu
prétendre à un pécule important ne pourront en effet plus le faire en raison
des besoins de l'armée. Dès lors, n'y-a-t-il pas là, monsieur le ministre, une
réflexion à mener pour faire en sorte que le militaire qui aura le plus servi
la nation ne soit pas le plus pénalisé ? En effet, le pécule est évolutif : il
diminue chaque année pour, finalement, disparaître au terme de 2002.
Dans ces conditions, des contentieux pourront sans doute surgir. Alors que la
société et la justice exigent beaucoup de rigueur et de transparence dans
l'utilisation des fonds publics, le militaire qui se verra refuser le pécule
pourra-t-il avoir connaissance des raisons qui ont entraîné ce refus et les
contester ? Il y a là un véritable problème étant donné l'importance des sommes
en jeu.
Si le pécule est limité dans le temps, il l'est aussi dans son champ
d'application : seuls les militaires pourront en bénéficier, les civils au
service des armées en sont écartés. Dès lors, comment allez-vous réaliser le
rajeunissement et la modernisation des effectifs concernés ? Le personnel civil
aura-t-il un statut différent du statut actuel ? Pouvez-vous, monsieur le
ministre, nous apporter quelques précisions à ce sujet ?
Par ailleurs, la formation à la reconversion est sans doute une bonne chose.
Mais qui va la financer ? Les régions ont-elles été sollicitées ? Si oui, en
supporteront-elles seules le coût, ou bien avez-vous prévu - mais je n'en ai
pas trouvé trace dans vos propositions - un crédit qui permettra d'accomplir
une mission qui, financièrement, n'est pas neutre ?
Vous ne semblez pas non plus avoir pris en compte une donnée importante : en
effet, en période de raréfaction de l'emploi, seuls les meilleurs éléments vont
pouvoir se reconvertir. La sélection que vous souhaitez, monsieur le ministre,
ne risque-t-elle pas alors de se faire à l'envers, les meilleurs partant et les
autres étant obligés de rester, les reconversions n'étant pas forcément aisées
au moment ou la recherche d'un emploi devient de plus en plus aléatoire ?
Par ailleurs, un militaire pourra-t-il se reconvertir dans le personnel civil
affecté aux armées ? Si oui, bénéficiera-t-il d'une priorité ?
Le texte que vous nous soumettez, monsieur le ministre, comporte d'autres
lacunes. Il n'y est pas fait état, notamment, du difficile problème des
services de santé, services où, actuellement, les appelés jouent un rôle
important. Comment allez-vous les remplacer ? Quel va être le coût de ce
remplacement ?
D'autres faits me portent à penser que vous avez sous-évalué le coût de votre
réforme et que, pour la mener à bien, pour la mener à son terme, vous serez
peut-être tenté d'utiliser d'autres crédits que ceux que vous nous annoncez.
Il est aujourd'hui inquiétant d'entendre la quasi-totalité des industriels de
l'armement, notamment dans l'aéronautique, dire que vous ne commandez plus, que
vous n'achetez plus, que vous n'utilisez même pas les crédits que le Parlement
a votés. Pouvez-vous nous éclairer sur cet inquiétant attentisme qui compromet
l'avenir de nos industries de matériels et d'armements militaires ? Si vous
n'utilisez pas cet argent à ce pour quoi il a été voté, c'est-à-dire pour les
équipements, que comptez-vous en faire, et quand en ferez-vous usage ? Nos
industriels ont un besoin urgent de le savoir !
En conclusion, monsieur le ministre, votre réforme me paraît difficilement
compatible avec une réduction importante de crédits ; elle me semble fragilisée
par le contexte économique, et plus encore par la raréfaction de l'emploi,
raréfaction à laquelle, hélas ! vous contribuez à plusieurs niveaux.
Je crains que vous ne laissiez à vos successeurs une situation très délicate à
gérer.
M. Nicolas About,
rapporteur.
M. Millon se succédera à lui-même !
(Sourires.)
M. André Rouvière.
Le plus difficile, en effet, n'est pas de commencer votre réforme, mais de la
poursuivre. Quant à la terminer, ce ne sera pas une mince affaire ! Pour la
France, je souhaite qu'elle réussisse, mais j'en doute.
En conclusion, monsieur le ministre, la méthode que vous avez utilisée et le
manque de moyens de votre réforme obligent le groupe socialiste à ne pas voter
ce texte.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Bimbenet.
M. Jacques Bimbenet.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'observe
que notre débat d'aujourd'hui s'inscrit dans une logique engagée en juin 1995
par la relance de la campagne sur les essais nucléaires.
Cette première étape fut suivie des déclarations du Président de la République
sur sa vision du nouveau cadre dans lequel devrait s'inscrire la politique de
défense de la France, une fois celle-ci adaptée aux récentes évolutions
géopolitiques européennes et mondiales.
Depuis lors, le Parlement a déjà débattu à trois occasions de la défense de la
France et des nécessaires mutations à opérer en matière de programmation
militaire.
Le Gouvernement nous propose aujourd'hui un quatrième débat sur les conditions
dans lesquelles il serait possible de passer de l'armée mixte, fondée sur la
conscription, qui est encore la nôtre, à une armée de métier, souhaitée par le
Président de la République.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, j'ouvrirai une parenthèse, en marge de
notre débat, pour souligner combien l'exercice auquel nous soumet le
Gouvernement, est difficile.
Rappelons, à cet égard, qu'il nous est demandé aujourd'hui de voter un texte
portant sur une armée française de métier, alors même qu'aucune réflexion du
Parlement sur la suppression du service national de conscription, actuellement
en vigueur, n'a encore été sollicitée.
Je comprends bien que le Gouvernement estime que cette suppression est
acquise, dès lors que la loi de programmation militaire a été votée. Cependant,
il aurait sans doute été plus juste et plus respectueux des règles
démocratiques de donner au Parlement l'occasion de se prononcer au
préalable.
Partant de l'hypothèse de la disparition de la conscription, il nous faut
ainsi envisager le départ de nombreux officiers et sous-officiers d'ici à 2002,
sans avoir recours à une loi de dégagement des cadres. Cette mesure rencontre
mon plein accord, car elle est indispensable à la paix sociale, en particulier
dans la période difficile qui est la nôtre.
J'émettrai cependant quelques inquiétudes. Je crains, en effet, que nous
n'assistions au départ des éléments militaires les meilleurs parmi les
officiers et sous-officiers incités à partir chaque année. Il semble logique de
voir les personnes les plus qualifées profiter de l'aubaine que constituent les
mesures que vous proposez, et sur lesquelles je reviendrai en détail, pour
utiliser les compétences acquises dans leur carrière militaire au profit d'une
carrière civile. Et j'ai bien peur que nous n'assistions, en revanche, au
maintien dans l'armée des personnes disposant de moindres aptitudes et
qualifications.
Ce phénomène de déperdition de ses éléments moteurs représenterait pour la
future armée de métier un grave préjudice, puisqu'il lui faudrait alors
démultiplier ses coûts de formation pour élever le niveau de performance des
personnes subsistant de l'ancien système et des nouveaux entrants.
Je souhaite que vous nous expliquiez, monsieur le ministre, comment vous
pensez pouvoir éviter un tel écueil, c'est-à-dire convaincre les personnes dont
les aptitudes sont les moins utiles de quitter l'armée pour, au contraire,
persuader les plus performants de rester.
De même, s'agissant des 48 000 soldats de 2e classe qui devraient être
recrutés pour une future armée professionnelle plus performante, comment
envisagez-vous d'attirer les éléments les plus capables ? Leur proposerez-vous
des rémunérations plus attractives que dans le civil ou des compensations
suffisamment importantes dont ils disposeraient à la fin de leur contrat ?
J'aimerais, monsieur le ministre, que vous nous apportiez, à ce sujet, toutes
informations utiles.
Un autre point relatif au congé de reconversion pourrait faire l'objet
d'amélioration. En effet, les dispositions de l'article 3 prévoient, pour les
soldats ne disposant pas de qualifications professionnelles transposables dans
le civil, une prise en charge pour une formation de reconversion d'une durée de
six mois, assujettie à la réduction de leur pécule de base d'un montant égal à
trois mois de solde. Etant donné le délai relativement bref accordé à la
formation, il serait certainement plus juste et plus incitatif de supprimer la
réduction du pécule.
Mon dernier point concernera la protection juridique des militaires, que vous
souhaitez aligner sur celle des fonctionnaires civils. J'approuve entièrement
cette mesure d'équité, qui, en permettant l'application aux militaires du
principe de l'appréciation des imprudences ou des négligences en fonction des
circonstances de fait, rétablit la justice entre personnels militaires et
fonctionnaires civils.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
loi dont nous débattons aujourd'hui est essentiel. Par son côté technique, il
fait percevoir toute la difficulté d'opérer une mutation à la fois globale et
individuelle de notre armée.
Votre projet, monsieur le ministre, tente de concilier ces deux niveaux dans
la paix sociale et dans le respect de nos valeurs républicaines et
démocratiques. La tâche est immense et difficile. Votre travail et votre
ténacité pour la mener à bien ne peuvent que susciter le respect.
Pour toutes ces raisons, malgré les quelques réserves que j'ai pu émettre, je
voterai, avec la majorité des sénateurs du groupe du Rassemblement démocratique
et social européen, le projet de loi sur les mesures en faveur des personnels
militaires que vous nous présentez aujourd'hui.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Carle.
M. Jean-Claude Carle.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues,
permettez-moi, d'abord, de saluer l'excellent travail qu'a effectué notre
collègue Nicolas About.
Monsieur le ministre, voilà près d'un mois, vous étiez devant notre assemblée
pour la déclaration du Gouvernement sur la défense. Bientôt, nous aurons
l'occasion de débattre de la réforme du service national autour du rendez-vous
citoyen et du volontariat. Plus tard, ce sera le tour des personnels de
réserve.
Cette réforme de notre système de défense se fait donc par étapes successives,
et il nous reste encore d'autres étapes à franchir et à négocier au mieux.
Il est en effet évident que cette réforme sans précédent s'impose. Chacun de
nous en a pris acte depuis le Livre blanc, qui nous rappelle les grandes
missions désormais dévolues à notre défense nationale, dans un environnement
géopolitique profondément renouvelé et incertain. Ces grandes missions sont la
dissuasion, la prévention, la projection et la protection.
Seront donc concernés, au premier chef, le format de notre armée et sa
nature.
Le passage à l'armée professionnellle, dont notre pays a décidé de se doter,
implique une réduction des effectifs civils et militaires. La loi de
programmation militaire pour les années 1997 à 2002, votée par notre assemblée
en juin dernier, en a précisé le rythme.
D'ici à l'an 2002, une évolution globale tendant à réduire de près d'un quart
les effectifs de votre ministère doit s'opérer par un mouvement comprenant des
départs et des recrutements.
Il est à noter que, plutôt que de recourir aux mesures coercitives d'une loi
de dégagement des cadres, vous avez souhaité, comme le chef de l'Etat l'avait
demandé dans son discours du 22 février dernier, que ce changement de format
soit le résultat de départs volontaires encouragés par des dispositions
attractives.
Je me félicite, monsieur le ministre, que le texte en discussion aujourd'hui,
qui vient compléter l'ensemble des mesures réglementaires prévues par la loi de
programmation, s'inspire directement du dialogue que vous avez su nouer avec de
nombreuses unités lors de vos déplacements.
Le dialogue, la concertation et les échanges ont eu lieu à tous les niveaux.
J'insiste sur ce point, car ils permettent à ce texte de mieux refléter encore
les besoins et les attentes exprimés.
Le dialogue a montré et doit continuer de témoigner du soutien sans réserve de
chacun de nous envers l'ensemble des hommes et des femmes du personnel de
défense. Je veux, ici, signaler l'important travail fait par le Conseil
supérieur de la fonction militaire.
Je sais également qu'un tel effort de dialogue et d'échange est mené avec les
personnels des industries d'armement, puisque la réforme de notre défense a
aussi pour conséquence des restructurations industrielles qui inquiètent les
populations concernées et les élus locaux.
Cette réforme, unique dans l'histoire de notre pays, doit s'appuyer sur un
dispositif lui aussi d'exception. En effet, que s'agit-il de faire ?
Le processus de professionnalisation des armées, qui s'engagera dès l'année
prochaine, doit nous permettre de recruter près de 10 000 engagés par an, alors
que nous n'en recrutions précédemment que 3 000 environ.
Il est donc nécessaire et vital d'instaurer un ensemble de mesures
d'incitation à l'engagement. Ces incitations portent sur un niveau de
rémunération convenable pour les jeunes volontaires à l'engagement et
l'assurance d'une reconversion professionnelle au terme de leur activité
militaire.
En effet, cette réforme permettra à l'armée de recruter des jeunes gens de
qualité si la qualification professionnelle que l'armée leur accordera est au
niveau de celle que la vie civile leur réclamera par la suite.
Nous nous félicitons, sur ce premier point, que la solde des nouveaux engagés
et de ceux qui servent actuellement sous contrat soit portée au niveau du SMIC
à compter du 1er juin prochain et que le droit à la reconversion soit inscrit
dans le statut des militaires.
Si nous voulons des engagés à carrière courte, d'une durée moyenne de huit
ans, il faut des mesures venant renforcer le lien entre l'armée et la nation.
Ce texte les instaure.
Le présent projet de loi met, lui aussi, en oeuvre, à l'instar de la loi de
programmation elle-même, des mesures permettant d'encadrer sans heurts la
période de transition au cours de laquelle une importante réduction des
personnels de défense doit s'opérer. Les effectifs totaux de votre ministère
devraient passer, entre 1996 et 2002, de 573 000 à 440 000.
Ces départs auront trois conséquences : la possibilité de procéder au
recrutement de près de 48 000 engagés volontaires supplémentaires sur six ans ;
le rajeunissement de l'encadrement, atout essentiel d'une armée orientée vers
la mission de projection et les opérations extérieures ; le retour de
perspectives de carrière attrayantes pour les cadres qui choisiront de rester
dans les armées.
Les dispositions permettant d'inciter les militaires aux départs anticipés,
trop ou pas assez attractives selon les craintes des uns ou des autres, sont
tout d'abord une série de mesures à caractère financier.
La première, celle du pécule, concerne les officiers comptant plus de
vingt-cinq ans de services actifs, soit un total de 6 200, et les
sous-officiers comptant plus de quinze ans de services actifs, au nombre
d'environ 55 800.
Ce pécule sera d'autant plus attractif qu'il sera attribué au début de la
période couverte par la loi de programmation militaire. Cela explique et motive
le fait que son montant soit affecté d'un coefficient réducteur de 10 % à
partir de 1999 et de 20 % à partir de 2001.
La transition de notre armée actuelle à une armée professionnalisée en sera
facilitée, d'autant que ce mouvement de départs se déroulera rapidement. Ce
mouvement devrait concerner environ 1 000 officiers et 10 500 sous-officiers
sur la période considérée, soit environ un sur six.
C'est pourquoi différents critères devront s'appliquer aux demandes de pécule,
afin de contenir leur nombre dans le cadre de l'enveloppe budgétaire
disponible, soit 657 millions de francs pour 1997.
C'est pourquoi également il convient, à côté de cette mesure majeure, de
reconduire jusqu'en 2002 la loi du 2 janvier 1970, qui facilite le reclassement
des militaires concernés et leur intégration dans les corps des catégories A et
B de la fonction publique.
La prolongation de la loi du 30 octobre 1975 sur les modalités du bénéfice
d'une pension de retraite au grade supérieur participe de la même volonté de
respect de l'enveloppe budgétaire.
De même, l'important travail qu'a fourni la commission concernant
l'amélioration du dispositif actuel de reconversion traduit notre souci
d'assurer aux militaires du rang sous contrat les conditions d'un retour réussi
à la vie civile, et ce dans le contexte de carrière courte qui sera celui de
l'armée de demain. Il faut, en effet, donner toute sa place, dans le projet de
loi, aux actions d'évaluation et d'orientation professionnelle des
militaires.
Cet ensemble, monsieur le ministre, me paraît être en mesure de relever le
défi du passage harmonieux d'une armée mixte à une autre, entièrement
professionnalisée, en 2002.
Permettez-moi, enfin, d'aborder un dernier point, qui relève davantage de
l'environnement que de l'application même des mesures.
L'initiative que vous avez prise, monsieur le ministre, conduit à prévoir la
dissolution de quarante-quatre régiments de combat et, dans le même temps, à
restructurer d'autres formations afin de créer progressivement ce que l'on peut
appeler le « noyau dur » et stable des cadres d'active.
L'armée de terre sera la plus concernée par ces mesures. Le Président de la
République a souhaité qu'à terme elle soit capable d'intervenir sur des
théâtres d'opérations extérieures où les intérêts de la France seraient en jeu,
c'est-à-dire qu'elle puisse disposer de quelque 50 000 hommes dans un
engagement au titre de l'Alliance atlantique et qu'elle puisse réunir quelque
30 000 hommes pour une durée d'un an sur un théâtre principal et 5 000 autres,
relevables eux aussi, sur un théâtre secondaire.
Aujourd'hui, c'est de 20 000 hommes mobilisables dans les forces de projection
de longue durée que nous disposons.
Pour atteindre l'objectif fixé, auquel nous adhérons, tous les régiments de
combat seront partiellement professionnalisés de manière simultanée. Cette
opération doit commencer dès 1997.
Ainsi, durant l'année prochaine, vingt régiments de l'armée de terre,
comprenant entre 900 et 1 200 hommes au total, seront concernés. A côté de cet
élément, existera, dans chaque régiment, un élément fixe, qui deviendra la base
arrière destinée à faire fonctionner l'unité pendant l'absence des cadres et
des engagés déployés hors de nos frontières.
Enfin, l'armée de terre a aussi prévu de répartir trente à cinquante
personnels civils dans chacun de ces mêmes régiments pour assurer la gestion
quotidienne.
Cela explique en partie que la loi de programmation militaire fasse passer le
nombre des personnels civils de 32 000, en 1996, à 34 000 en 2002.
Cette réforme délicate et courageuse que vous engagez aujourd'hui, monsieur le
ministre, doit permettre à notre armée d'exercer sa fonction majeure, qui est,
qu'on le veuille ou non, d'être prête à faire la guerre, le cas échéant de la
faire et, si possible, de la gagner.
Des périodes récentes de notre histoire ont montré que le manque de courage,
de décision et de volonté du pouvoir politique ont conduit notre pays à
affronter des situations difficiles.
Or, courage, volonté, décision caractérisent votre action, monsieur le
ministre. C'est la raison pour laquelle le groupe des Républicains et
Indépendants vous apporte son total soutien et votera le projet de loi que vous
nous présentez aujourd'hui.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Goulet.
M. Daniel Goulet.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici
réunis de nouveau dans cet hémicycle pour parler de la défense de la France.
En effet, depuis le 22 février dernier, date de l'annonce par le Président de
la République de la réforme majeure qu'il souhaite voir achevée à la fin de son
septennat, nous avons déjà eu l'occasion de débattre de cette réforme et de
nous prononcer sur certains de ses aspects.
Je pense notamment à la loi de programmation qu'il nous a été donné de
discuter ainsi qu'aux moyens de mettre en pratique cette nouvelle politique de
défense. Je pense aussi au débat sur l'avenir du service national et à ses
conclusions parlementaires, dont les orientations devraient être prochainement
concrétisées dans un projet de loi.
La loi de programmation a permis de préciser les caractéristiques de l'armée
française de demain : un format réduit, une armée constituée principalement de
militaires professionnels avec un doublement du nombre d'engagés, la division
par dix du nombre de jeunes provenant du service national, l'augmentation du
nombre des civils afin de concentrer les militaires sur les tâches
opérationnelles et l'appui de réserves plus qualifiées et plus entraînées.
La réduction du format des armées exige, en conséquence, une diminution des
effectifs de cadres militaires. On estime nécessaire le départ d'environ 16 000
officiers et sous-officiers. Le Président de la République s'était
solennellement engagé, dès le 22 février dernier, à faire en sorte que le
Gouvernement ne présente pas de loi de dégagement de cadres et de mesures
impératives. Je me réjouis donc de constater que la promesse est pleinement
tenue et que ce texte traduit bien la volonté du chef de l'Etat.
En effet, le projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui répond de manière
cohérente à la nécessité d'une remodélisation de l'armée française par des
mesures incitant au départ qui doivent marquer, en même temps, la
reconnaissance de la nation à l'égard de ceux qui la servent avec tant
d'efficacité et de dévouement. Nous savons tous les contraintes et mêmes les
risques qui sont attachés à la profession militaire. Chaque année, des soldats
français perdent la vie en défendant les principes et le rôle de la France dans
le monde.
Nous devons donc, mes chers collègues, garder cela à l'esprit en discutant de
ce texte, qui comporte plusieurs dispositions tendant principalement à faire en
sorte que les militaires qui souhaitent revenir à la vie civile puissent
accomplir cette reconversion dans les meilleures conditions. C'est d'ailleurs
pour mieux souligner l'importance de la reconversion que la commission a
souhaité qu'un nouveau chapitre du statut général des militaires y soit
consacré, ce dont je remercie vivement M. le rapporteur.
L'instauration d'un pécule de départ non négligeable et de congés de
reconversion, qui pourront atteindre une année si cela est nécessaire, ainsi
que d'autres dispositions tendant à améliorer le statut des militaires
devraient permettre de réaliser l'objectif fixé par la loi de programmation.
Sans trop entrer dans les détails, je souhaiterais évoquer cependant les
différentes mesures proposées et ce que l'on peut attendre de leur
application.
Premier point de la réforme : le pécule. A la différence du dispositif
existant, le pécule proposé ici ne sera pas soumis à l'impôt. Il s'agit d'une
mesure temporaire, puisqu'elle ne devrait pas excéder la durée de la
programmation après avoir rempli sa fonction.
La somme attribuée variera en fonction de plusieurs critères propres au
demandeur, comme la durée le séparant de la limite d'âge de son grade, mais
aussi en fonction de considérations extérieures, puisque le pécule attribué
sera plus faible au fur et à mesure de l'achèvement de la programmation.
Ce dispositif intéressant est le fruit d'un important effort financier de
l'Etat. Il est en effet prévu de consacrer près de 4,4 milliards de francs au
financement du pécule entre 1997 et 2002, dont 653 millions de francs l'année
prochaine. Cette somme proviendra du fonds d'accompagnement de la
professionnalisation, auquel la loi de programmation a d'ores et déjà alloué
9,1 milliards de francs.
Mais l'attribution du pécule n'est que juste contrepartie pour des hommes et
des femmes qui auront consacré leur jeunesse à servir le pays et qui choisiront
de retourner à la vie civile. Il est d'ailleurs bon de préciser que cette
incitation au départ anticipé n'a rien de commun avec une prime de
licenciement.
Le projet de loi prévoit un autre dispositif qui facilitera le passage à la
vie civile, en modifiant le système du congé de reconversion.
Les militaires qui ont effectué au moins quatre ans de service ont
actuellement la possibilité de préparer leur reconversion pendant une durée
maximale de neuf mois. Cette période étant, dans certains cas, trop courte, le
présent texte prévoit la création d'un congé de reconversion de six mois,
complété si nécessaire par un nouveau congé de la même durée. Pendant les six
premiers mois, le militaire continuera d'être pleinement rémunéré, mais il sera
dégagé de ses obligations de service. Pendant la seconde période, il sera
toujours rémunéré, mais ne percevra plus l'indemnité pour charges
militaires.
Le congé permettra aux personnels qui le souhaitent de diversifier leur
formation et d'effectuer des stages ou des périodes d'essai. C'est donc un
dispositif tout à fait indispensable à la reconversion de ceux qui décideront
d'entamer une deuxième carrière dans le civil.
Au-delà du pécule et du congé de reconversion, le projet de loi prévoit la
prorogation tout à la fois des mesures d'intégration des anciens cadres
militaires dans la fonction publique ainsi que d'un article de la loi du 31
octobre 1975 permettant à des officiers de quitter le service avec une retraite
correspondant à celle du grade supérieur à celui qu'ils détenaient.
Il serait logique de faire bénéficier les sous-officiers de cette dernière
mesure, dans le cadre d'un dispositif d'incitations au départ qui les
concernera tout particulièrement. Même si les conséquences financières en sont
importantes, la décision serait juste et méritée pour les militaires de
carrière. Pourriez-vous faire un geste, monsieur le ministre ?
Je viens d'évoquer les principales mesures d'incitation au départ. Mais ce
projet de loi contient aussi des dispositions qui devraient permettre une
augmentation du recrutement, en ce qu'elles précisent et améliorent certains
aspects du statut des militaires.
L'Assemblée nationale a notamment ajouté au projet de loi des dispositions qui
permettront de préciser la définition des pensions militaires de retraite, en
posant dans un texte de valeur législative que ce type de pension n'est pas
assimilable à un avantage vieillesse avant l'âge de soixante ans. Elle a aussi
souhaité préciser que les anciens militaires pouvaient bénéficier des
allocations chômage et qu'elles seraient pleinement cumulables avec le congé de
reconversion.
Ces dispositions me paraissent aller dans le bon sens, puisqu'elles rendent
plus attractive la carrière militaire, ce qui correspond à l'un des objectifs
du projet de loi, puisqu'il faudra, dans les prochaines années, doubler le
nombre des engagés.
Le Sénat, quant à lui, a souhaité clarifier certaines dispositions pour
améliorer la lisibilité et la transparence du statut des militaires. La
politique de recrutement de la défense française devra en effet reposer
dorénavant sur des incitations à l'engagement. Les mesures permanentes de
reconversion des militaires en font aussi partie, car les jeunes s'engageront
d'autant plus volontiers dans l'armée qu'ils sauront qu'il est désormais plus
facile de changer de carrière et de retourner dans le civil.
(M. René-Pierre Signé s'exclame.)
En conclusion, je voudrais revenir à l'essentiel, c'est-à-dire au défi
que ce passage au nouveau modèle d'armée représente pour la nation ainsi que
pour les hommes et les femmes qui composent notre défense. Pour relever le
défi, il faudra, en effet, mobiliser l'effort de la nation tout entière. Le
groupe du Rassemblement pour la République s'est investi pleinement en ce sens,
et ce depuis longtemps. C'est pourquoi il votera ce projet de loi.
Cela étant, il appartiendra surtout aux militaires professionnels de faire
preuve de cet esprit militaire de haute qualité par lequel le
lieutenant-colonel Charles de Gaulle caractérisait déjà en 1935 l'armée de
métier : une armée de métier digne de ce nom et, surtout, digne de notre pays
!
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en abordant
l'étude de ce projet de loi, j'ai pensé au premier des tableaux célèbres du
grand peintre David, une oeuvre de jeunesse qu'il peignit à son retour du prix
de Rome et qui s'intitule « Bélisaire ».
Bélisaire était un général byzantin au service de l'empereur Justinien. Il
s'était couvert de gloire contre les Vandales, les Ostrogoths et dans d'autres
campagnes ; tant et si bien que l'empereur en devint jaloux, le révoqua, se
fâcha avec lui et le congédia sans pension ni compensation d'aucune sorte qui
puisse l'aider à finir dignement sa vie.
Sur le tableau de David, on voit un vieillard accroupi au pied d'une colonne,
pauvre mendiant plongé dans la misère, mais pourtant encore vêtu de la pourpre
gagnée sur les champs de bataille.
Rassurez-vous, mes chers collègues, après avoir lu le projet de loi qui nous
est soumis aujourd'hui, après vous avoir entendu, monsieur le ministre, tant en
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées que dans
cet hémicycle, et après avoir étudié l'excellent rapport de M. Nicolas About,
nous sommes tout à fait persuadés qu'aucun officier, aucun sous-officier, aucun
soldat de nos armées ne risque de connaître un jour le sort de Bélisaire !
(Sourires.)
Il est heureux, très heureux qu'il en soit ainsi. Car il serait vain de
nier que tous ceux de nos compatriotes qui portent aujourd'hui l'uniforme et
servent dans la marine, l'aviation ou les forces terrestres traversent
actuellement une période difficile et, à beaucoup d'égards, pour eux,
démoralisante.
La réforme du service national et le passage de l'armée de conscription à une
armée professionnelle se concrétisent d'abord - on l'a dit, je le rappelle -
sur une période de six ans, de 1996 à 2002, par des réductions des effectifs,
qui passent de 573 000 à 440 000, soit une diminution de 132 000 postes. Et
donc, pour 132 000 de nos compatriotes, cette réforme se traduit par
l'obligation de quitter l'armée, de renoncer à la carrière qu'ils aimaient et
qu'ils avaient choisie, de prendre leur retraite prématurément ou de chercher
un emploi actuellement très difficile à trouver, bref, de changer de vie et de
se retrouver, eux et leur famille, dans une situation bien moins bonne.
M. René-Pierre Signé.
Ils se retrouvent au chômage !
M. Jacques Habert.
Le Gouvernement et nous-mêmes, législateurs, avons le devoir de veiller à ce
que cette mutation se déroule dans les meilleures conditions possibles, et de
prendre toutes les mesures utiles pour en atténuer la rigueur.
Tel est l'objet du présent projet de loi. Prenant la parole dans les derniers,
je ne vais pas répéter et énumérer les dispositions prises pour faciliter cette
transition.
Envers le personnel, avez-vous dit, monsieur le ministre, ce sera non pas la
coercition qui sera employée, mais l'incitation avec, notamment,
l'encouragement aux départs anticipés, l'instauration et le paiement d'un
pécule ainsi que l'octroi de congés de reconversion. Tout cela a été analysé
par les orateurs qui m'ont précédé, et, pour ma part, je les approuve
entièrement.
M. Xavier de Villepin,
président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Merci !
M. Jacques Habert.
Permettez-moi d'évoquer un souvenir personnel. Voilà cinquante ans exactement,
nous avons été confrontés à une situation en certains points analogue au
contexte actuel. Nous étions en 1946, l'armée française venait de participer à
la victoire, aux côtés des armées alliées, ses effectifs - j'en étais - étaient
considérables, mais il n'était plus utile de les maintenir au niveau qu'ils
avaient atteint.
Ce fut alors, quelques semaines après le départ - un peu soudain, il est vrai
- du général de Gaulle, en janvier 1946, la loi de dégagement des cadres
promulguée par le gouvernement tripartite, communiste, socialiste et MRP, de
Félix Gouin. Souvenez-vous : cette loi était beaucoup plus brutale que le texte
qui nous est proposé aujourd'hui. O combien ! Nombre d'officiers et de
sous-officiers dont les décorations montraient les services rendus au combat,
mais qui n'étaient pas d'active, ne pouvaient être gardés dans les troupes.
M. René-Pierre Signé.
La situation n'était pas comparable !
M. Jacques Habert.
La situation était comparable au moins sur deux points précis : il fallait
réduire les effectifs et dégager des cadres pour une organisation nouvelle de
l'armée.
De nombreux officiers et sous-officiers qui pensaient, après plusieurs années
passées sous l'uniforme, faire peut-être leur carrière dans l'armée furent
démobilisés du jour au lendemain et rendus à la vie civile sans indemnité, sans
pécule, sans préparation, sans emploi. Ceux qui, aujourd'hui, vont devoir
quitter nos forces armées sont heureusement beaucoup mieux traités. Nous nous
en félicitons, car ce n'est que justice.
Avant de conclure, je signalerai que, dans le dispositif d'ensemble qui nous
est proposé, un point me paraît susciter quelques interrogations. Mais
peut-être ce point sera-t-il traité bientôt, lors de l'examen du projet de loi
de finances ?
Pour permettre à l'armée de faire face à ses obligations pendant les six
années de déflation, il sera fait appel au volontariat. Il nous est indiqué que
48 000 engagés volontaires seront nécessaires, soit 8 000 par an. Etes-vous
sûr, monsieur le ministre, que nous les trouverons ? Comment ? Par quelles
mesures d'incitation ? A quel prix ? Que prévoit-on à ce sujet ? Comment
pourrons-nous maintenir à la fois la quantité et la qualité de ces volontaires
?
Pour les Français de l'étranger que j'ai l'honneur, avec le président de notre
commission et quelques autres collègues, de représenter dans cette enceinte,
cette question est particulièrement importante.
Vous connaissez en effet, monsieur le ministre, la place primordiale que
tiennent les volontaires du service national hors de nos frontières. On les
trouve surtout dans les écoles françaises de l'étranger, mais aussi dans les
hôpitaux, les oeuvres publiques, les chambres de commerce, les organismes
humanitaires, bref, en tous lieux où ils participent au rayonnement de la
France dans le monde. Nous tenons naturellement à ce que cette action puisse se
poursuivre.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, au moment où nous sommes amenés à
modifier profondément la structure même de notre armée et à demander des
sacrifices à ceux qui l'ont si bien servie, nous devons lui rendre hommage.
L'armée a joué dans toutes les nations et dans l'histoire un rôle essentiel.
L'orateur qui m'a précédé a cité l'auteur de
La France et son armée
.
Pour ma part, je rappellerai une phrase de cet ouvrage : « Car enfin,
pourrait-on comprendre la Grèce sans Salamine, Rome sans les légions, la
Chrétienté sans l'épée, l'Islam sans le cimeterre, la Révolution sans Valmy...
L'esprit militaire, l'art des soldats, leurs vertus sont une partie intégrante
du capital des humains. »
Dans le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui, tout ce qui concerne
l'humain a été pris en compte ; et donc ce précieux capital sera préservé.
Telle est la raison pour laquelle le groupe au nom duquel je m'exprime votera
le projet de loi relatif aux mesures en faveur du personnel militaire dans le
cadre de la professionnalisation de l'armée.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de
l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Bécart.
M. Jean-Luc Bécart.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec le
projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui, le Gouvernement présente le
premier texte d'application de la loi de programmation militaire votée au mois
de juin dernier, et qui, entre autres dispositions, institue l'armée de métier
et vise à réduire le format de nos armées.
Une fois de plus, monsieur le ministre, nous ne pouvons que nous étonner du
fait que ce projet de loi, qui incite des milliers de cadres militaires à
quitter les armées, vienne en discussion devant le Parlement avant même que
celui-ci n'ait examiné et voté la suppression du service militaire.
Déjà, lors de la discussion de la récente loi de programmation militaire, le
Gouvernement avait introduit à l'Assemblée nationale, par voie d'amendement, la
fixation du nouveau format des armées, qui ne figurait pas dans le projet de
loi initial. Aujourd'hui, ce même Gouvernement nous demande d'entériner des
mesures visant à encourager 17 000 officiers et sous-officiers à quitter notre
outil de défense, comme si, là encore, la suppression du service militaire -
que le Parlement n'a pas encore décidée ! - était un fait acquis, pour ne pas
dire un fait accompli.
On peut se demander, en conséquence, à quoi rimera l'examen du projet de
réforme du service national, au début de l'année prochaine.
Nous l'avions dit en juin dernier, nous le réaffirmons aujourd'hui, cette
méthode n'est pas acceptable. Que se passerait-il, en effet, si, d'aventure, le
Parlement adoptait, en janvier ou en février prochain, ne serait-ce qu'un
amendement entrant en contradiction la loi de programmation militaire ou avec
certaines dispositions du présent projet de loi ? Mais peut-être la discipline
et l'abnégation sont-elles tellement fortes au sein de la majorité
parlementaire que l'on puisse écarter, dès le départ, toute probabilité de
réflexe républicain sur un des aspects fondamentaux de notre défense, donc de
notre société...
Nous pensons plus que jamais que la suppression du service militaire est une
erreur considérable. C'est inefficace, et c'est dangereux.
C'est inefficace, car bon nombre d'unités ne pourront se passer des jeunes
appelés. La perte de qualification et de formation technique qu'apportent
aujourd'hui les jeunes du contingent sera sensible et, par endroits,
difficilement surmontable. Personne ne peut nier que les armées modernes ont
besoin de plus en plus de jeunes hautement qualifiés en mécanique, en
électricité, en électronique, sans parler des médecins, dentistes, infirmiers,
sapeurs-pompiers, etc.
La suppression du service militaire est également dangereuse, car elle va
induire dans ce pays une évolution négative du niveau de conscience civique et
de l'esprit de défense. Elle est dangereuse, car elle va réduire nos armées à
un corps professionnel dont la mission prioritaire sera la projection
extérieure.
Nous ne sommes toujours pas rassurés sur les dérives potentielles d'une telle
conception.
Le Livre blanc de 1994 soulignait à juste titre que « le service national
demeure le meilleur gage de l'attachement de la nation et des citoyens à leur
défense ». Certes, l'actuel service militaire est malade : l'instruction
civique et militaire y est assez souvent médiocre et sommaire. De plus, les
jeunes y perdent beaucoup de temps car il est trop long. Par ailleurs, il
constitue pour nombre de jeunes un obstacle à la recherche du premier emploi ou
un handicap dans le cursus des études et de la formation, car il y a trop de
passe-droits.
Faute d'avoir été réformé à temps, il a perdu l'essentiel de sa crédibilité et
une partie de son efficacité.
Au lieu de le supprimer, avec toutes les conséquences que l'on redoute, il
fallait engager sa réforme pour le mettre à l'heure de cette fin de siècle et
de l'évolution de notre société, pour réduire ses inconvénients et renforcer sa
raison d'être, le lien principal entre le pays et ses forces armées.
Selon nous, je le rappelle encore une fois, il est possible et souhaitable
d'organiser la complémentarité entre appelés du contingent et unités
professionnalisées constituées en nombre plus important, ce que nous comprenons
parfaitement.
La majorité de ceux qui s'intéressent à ces questions s'opposent à la
suppression du service national : la plupart des organisations de jeunesse, la
plupart des syndicats, les partis politiques de gauche, la commission «
armées-jeunesse ». Par ailleurs, nous savons qu'un nombre non négligeable de
cadres militaires et même certains de nos collègues de la majorité
parlementaire ne sont pas persuadés, au fond d'eux-mêmes, de la justesse de la
réforme en cours.
Allez-vous enfin tenir compte de ces avis, tout comme de l'avis d'une bonne
partie de nos compatriotes qui, ne cédant pas à la facilité consistant à «
caresser les jeunes dans le sens du poil », affirment leur attachement aux
valeurs républicaines qui fondent l'esprit de défense ? C'est là, monsieur le
ministre, mes chers collègues, la raison principale qui incite les sénateurs de
mon groupe et moi-même à nous opposer au présent projet de loi.
Toutefois, nous ne sous-estimons pas le bien-fondé de certaines dispositions
de ce texte, notamment celles qui renforcent la protection juridique des
militaires, celles qui donnent de meilleures garanties dans le domaine des
soldes de réforme pour blessures, infirmité ou maladies imputables au
service.
Nous approuvons également certains amendements proposés par M. le rapporteur
et adoptés par la commission, qui confortent certaines dispositions sociales
positives.
De telles dispositions ne peuvent que rencontrer notre assentiment, bien sûr.
Cependant, concernant le pécule, nous avons relevé certaines contradictions.
Tout d'abord, alors qu'on affirme vouloir un certain rajeunissement de
l'armée, ce système du pécule ne va-t-il pas entraîner le départ des cadres les
plus jeunes et les plus techniquement formés, les plus diplômés qui, soyons
clairs, trouveront le plus aisément une reconversion dans les entreprises ?
Ce risque, ajouté à la fin de la conscription des jeunes diplômés et à
l'arrivée d'engagés payés au SMIC et à contrats de courte durée, ne va-t-il pas
« tirer nos armées vers le bas » ?
De plus, comment ne pas déplorer la différence de traitement entre les
différents acteurs de la défense ? Un projet de loi pour les personnels
militaires, c'est fort bien, mais pourquoi le droit commun pour les autres
personnels ?
Comment ne pas penser à ces milliers de salariés des entreprises de la
sous-traitance qui, pour la plupart, auront travaillé des décennies pour la
défense sans bénéficier de mesures particulières lors de leur licenciement ?
N'y a-t-il pas sur ce point des dispositions à prendre ?
En outre, le pécule n'étant pas automatiquement attribué au demandeur, ne
court-on pas le risque qu'il soit distribué à la tête du client ? En effet, il
ne peut pas y avoir de représentation paritaire au sein de l'autorité chargée
de décider de cette attribution. Ne court-on pas également le risque de voir se
ternir le climat des armées si de nombreuses demandes sont refusées ?
Enfin, comment peut-on préparer aussi activement le départ de 17 000 officiers
et sous-officiers sans savoir comment seront recrutés les 48 000 soldats
engagés de la future armée de métier ?
Au-delà de ces interrogations, ce présent projet de loi est d'abord la
conséquence directe du choix de l'armée de métier que Gouvernement et Président
de la République ont voulue, ont quasiment imposé au Parlement, non sans
contorsions.
Vous comprendrez qu'en cohérence avec les valeurs républicaines qui animent
leurs convictions en matière de défense du pays les sénateurs du groupe
communiste républicain et citoyen ne puissent approuver ce projet de loi.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen
ainsi que sur les travées socialistes.)
M. Charles Millon,
ministre de la défense.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Charles Millon,
ministre de la défense.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, permettez-moi tout d'abord de remercier la commission des affaires
étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat pour le travail qu'elle
a accompli sur ce texte sous la présidence de M. de Villepin et qui a abouti,
je l'ai déjà dit, au rapport de grande qualité de M. About.
Je voudrais également exprimer ma reconnaissance à MM. Carle, Goulet, Habert
et Bimbenet pour le soutien qu'ils ont apporté, dans leurs interventions, non
seulement au Gouvernement, mais surtout à la communauté militaire, qui se
prépare à vivre une évolution profonde, et remercier l'ensemble des sénateurs
qui ont bien voulu prendre part à ce débat, car leur participation témoigne de
l'intérêt qu'ils portent à l'avenir de la communauté militaire.
Comme l'ont rappelé à l'instant MM. Daniel Goulet et Jean-Claude Carle, le
Gouvernement s'est attaché à associer étroitement le Sénat à toutes les étapes
de la mise en place de la réforme ambitieuse voulue par le Président de la
République, et il n'est pas une semaine où je ne m'entretienne avec le
président de la commission, M. de Villepin, pour étudier comment il est
possible d'associer le Sénat à la préparation des textes qui vous ont été ou
qui vous seront soumis.
Cette association du Parlement se poursuivra dans les semaines à venir avec le
vote du projet de loi de finances, avec le débat sur le projet de loi portant
réforme du service national et, enfin, avec la discussion du projet de loi
relatif aux réserves.
Permettez-moi de répondre à MM. Rouvière et Bécart qui ont contesté la méthode
utilisée. Je ne sais pas jusqu'à quand il faudra que je redémontre, réexpose,
réexplique la méthode du Gouvernement, laquelle est pourtant claire et simple
!
Si je retenais la méthode suggérée par M. Rouvière, c'est-à-dire de faire
voter d'abord sur le service national ou plutôt sur le service militaire,
lequel vous intéresse plus que le service national, en réalité, ce choix
déterminerait la politique de la défense, le format et la nature des armées.
Ce serait marcher sur la tête ! Il est bien évident que le choix opéré pour la
politique de la défense et le format des armées est subordonné aux analyses des
conditions géostratégiques et de la nature des menaces. Il est en effet demandé
au ministère de la défense de mettre en oeuvre les moyens pour défendre le pays
et le Président de la République lui-même a fait un choix, annonçant qu'il
optait pour l'armée professionnelle.
Le service militaire, tel qu'il existe, ne se justifie plus, puisque toute la
ressource apportée par le service militaire à l'armée n'est plus nécessaire. En
conséquence, le premier choix, opéré en fonction des conditions géostratégiques
et de l'analyse de la défense, et décidé par un vote du Parlement, le vote de
la loi de programmation militaire, a consisté à renoncer à l'armée de
conscription pour l'armée professionnelle.
En conséquence encore, le format des armées est remis en cause et la deuxième
étape consiste donc à examiner les moyens d'inciter un certain nombre
d'officiers et de sous-officiers à quitter les armées, et cela dans les
meilleures conditions.
Quant à la troisième étape, elle consistera effectivement à se déterminer
entre le maintien du service national obligatoire - dont la vocation ne pourra
qu'être civile, puisque la vocation militaire ne correspondrait pas à la
situation future - sa suppression totale ou, enfin, la troisième solution que
j'aurai l'honneur de vous présenter dans quelques semaines.
De grâce, monsieur Rouvière, de grâce, monsieur Bécart, ne dites pas que le
Parlement est une chambre d'enregistrement ! Il a été consulté et la commission
de Villepin a débattu durant plusieurs semaines, au cours de séances très
passionnantes, de l'avenir du service national, sur lequel vous aurez
l'occasion de nous exprimer à nouveau lors de l'examen du projet de loi que
j'aurai l'honneur de vous présenter.
Voila la première observation que je voulais faire à la suite des propos que
vous avez tenus.
Ma deuxième réflexion concerne votre analyse sur le fait que nous allons faire
primer l'intérêt général sur l'intérêt particulier. Je dois reconnaître que
j'ai été étonné d'une telle analyse. Il est évident que nous allons faire
primer l'intérêt de la défense nationale sur l'intérêt individuel et que toute
notre démarche consiste à mettre en oeuvre une défense nationale ! Toutefois,
comme nous ne voulons pas que les officiers, les sous-officiers et les soldats
qui ont dévoué leur vie à la cause de la France en supportent les conséquences
dans leur famille, dans leur vie personnelle, nous vous présentons aujourd'hui
ce projet de loi que nous vous demandons d'adopter.
J'ai entendu M. Bécart dire que s'il n'était pas d'accord sur le service
militaire, il estimait que certaines mesures n'étaient pas trop mauvaises et
que, dans un certain nombre de cas, elles étaient même tout à fait adaptées.
Je relève que vous, monsieur Rouvière, n'avez pas parlé de ces mesures. Qui ne
dit mot consent !
(Sourires.)
M. André Rouvière.
Cette déduction n'engage que vous, monsieur le ministre !
(Nouveaux sourires.)
M. Charles Millon,
ministre de la défense.
C'est la raison pour laquelle je compte bien sur
votre soutien tout à l'heure quand j'aurai donné les explications que vous
attendez sur le pécule.
Je ne reviendrai pas en détail sur ce projet de loi, qui a été décrit et
commenté avec talent et précision par votre rapporteur.
Le premier point que je voudrais évoquer, et qui a été souligné par un certain
nombre de sénateurs, c'est que ce texte est la traduction solennelle de
l'engagement pris par le Président de la République quant aux conditions de la
mise en oeuvre de la professionnalisation. Chose promise, chose due !
Le Président de la République avait, lors de la mise en place de cette
réforme, annoncé un certain nombre de mesures ; elles vous sont aujourd'hui
soumises. M. Nicolas About l'a rappelé dans son rapport, ce projet de loi a
pour objectif de garantir la capacité opérationnelle de nos forces pendant la
période de professionnalisation.
Ainsi, en rendant le métier de militaire attractif, en rajeunissant
l'encadrement, en recrutant les engagés dont les armées ont besoin, il s'agit
bien de contribuer à la disponibilité et à la capacité opérationnelle des
unités.
A cet égard, je voudrais rassurer M. Jean-Claude Carle en rappelant que
l'armée de terre a, depuis cinq ans, procédé à des réorganisations qui lui ont
déjà permis de tirer les conséquences du conflit du Golfe, par exemple en
affectant des engagés dans les unités équipées de matériels lourds, ce qui
n'était pas le cas en 1990.
Les postes d'engagés créés année après année tout au long de la période
couverte par la loi de programmation viendront renforcer encore l'aptitude
opérationnelle des unités.
Pour apaiser les inquiétudes manifestées par Jacques Habert sur le recrutement
des engagés, je voudrais préciser que le maintien du service militaire pendant
toute la durée de la phase de transition va permettre aux armées de continuer à
recruter, pendant de nombreux mois, un nombre significatif d'engagés parmi les
volontaires service long - VSL. Au-delà, il sera évidemment nécessaire de
recourir à des méthodes originales de recrutement pour lesquelles les armées
ont déjà formulé des propositions, telles que la décentralisation au niveau des
unités.
Vous avez tous insisté sur l'importance de l'enjeu de la reconversion,
certains ont parlé de défi, ce qui n'est pas excessif. Comme vous l'avez
constaté, le ministère de la défense possède déjà une certaine expérience dans
ce domaine. Cependant - je le dis à l'attention des sénateurs qui douteraient
de notre volonté en la matière - l'affirmation plus claire d'un droit
statutaire à la reconversion, d'une part, l'amélioration sensible des moyens de
le mettre en oeuvre, d'autre part, constituent toute l'originalité et toute la
portée du projet de loi. Je sais que votre commission a souhaité, par voie
d'amendements, aller encore plus loin dans ce sens. Nous y reviendrons à
l'occasion de la discussion des articles.
S'agissant du pécule, sur lequel MM. Rouvière et Bécart m'ont interpellé, la
procédure d'agrément existe, comme dans bien d'autres domaines. Elle est
toujours fondée sur des candidatures qui sont examinées par l'administration
selon des critères connus. Le pécule donnera donc lieu à une procédure
garantissant la transparence et le droit de recours. Ce sont des obligations
qui s'imposent à toutes les administrations. Sont décrits dans le rapport les
critères qui donneront lieu à directives.
Je précise encore, pour ce qui est de la reconversion dont on débattra
parallèlement aux dispositions sur le pécule, que les propos tenus par certains
comportent une contradiction.
Selon eux, du fait de ce droit statutaire à la reconversion, de cette offre de
possibilité de reconversion, ce seront les meilleurs qui partiront et on se
retrouvera avec une armée que les cadres les plus brillants auront quittée.
Mais, parallèlement, les mêmes expliquent, à cette tribune, qu'il faut laisser
la possibilité à chacun de décider s'il veut rester ou non dans l'armée et
qu'aucun critère ne doit en réalité s'appliquer.
On ne peut pas avoir le tout et l'inverse de tout ! Il y aura des critères,
des acceptations et des refus seront prononcés en fonction des nécessités du
service et de la défense nationale. Ces critères seront objectifs ; ils seront
expliqués. Je rassure donc MM. Rouvière et Bécart : notre approche n'est pas
totalement obscure. Elle est transparente et permettra, j'en suis sûr, à chacun
des officiers et des sous-officiers qui voudront opter pour la reconversion de
le faire en toute clarté.
Je crois maintenant indispensable de réaffirmer, comme certains orateurs l'ont
fait, que les conditions de la professionnalisation des armées garantiront le
maintien du lien entre l'armée et la nation. Que ce soit grâce à l'affirmation
du rôle et de la place des réserves ou grâce à la présence de jeunes Français
volontaires pour le nouveau service national, que j'aurai l'honneur de vous
présenter au cours des semaines à venir, le Gouvernement est en effet attentif
au maintien de ce lien auquel nos armées sont elles-mêmes profondément
attachées.
Ce lien sera également entretenu par les échanges permanents entre société
civile et société militaire, par les échanges permanents que multipliera le
développement des carrières courtes suivies d'une reconversion dans le
civil.
Ce projet de loi, comme vous avez pu le constater, traduit l'attention très
soutenue que porte le Gouvernement aux personnels de la défense et à la façon
dont ils vont vivre cette transformation sans équivalent.
Je tiens maintenant à apporter à la Haute Assemblée des informations relatives
aux conditions faites au personnel civil suite à la concertation qui a abouti à
un accord avec les organisations syndicales.
Hier, la séance solennelle de l'instance de concertation sur les
restructurations a été l'occasion de conclure avec six organisations syndicales
sur sept un accord qui, après plusieurs mois de négociations, traduit le
respect des engagements pris par le Gouvernement à l'égard des personnels
civils : garantie de non-licenciement - je m'adresse là en particulier à M.
Rouvière - garantie du respect du statut, du maintien de la rémunération et des
perspectives de carrière ; garantie quant aux conditions de recours au
dégagement des cadres ou à la cessation anticipée d'activité ; amélioration
substantielle des indemnités de mobilité géographique, laquelle sera fondée sur
le volontariat.
A l'évidence, c'est un même esprit de responsabilité, un même sens de
l'intérêt national qui s'expriment aujourd'hui chez les personnels militaires
comme chez les personnels civils de la défense. C'est ce que le ministère a
voulu acter en prenant ces mesures - j'allais dire parallèlement.
En votant ce projet de loi, mesdames, messieurs les sénateurs, vous donnerez
au Gouvernement les moyens de mener à bien la professionnalisation des armées,
mais vous permettrez aussi à la communauté de la défense tout entière, civile
et militaire, de prendre pleinement sa part dans cette réforme essentielle pour
l'avenir du pays.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
TITRE Ier
DU PÉCULE
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. _ A compter du 1er janvier 1997 et jusqu'au 31 décembre 2002, les
militaires de carrière servant en position d'activité, se trouvant à plus de
trois ans de la limite d'âge de leur grade et faisant valoir leurs droits à
pension militaire de retraite et qui justifient d'au moins vingt-cinq années de
services militaires effectifs pour les officiers et d'au moins quinze années de
tels services pour les sous-officiers, peuvent bénéficier d'un pécule sur
demande agréée par le ministre chargé des armées.
« Le pécule, incitation au départ anticipé, est accordé en fonction des
besoins de la gestion des effectifs au regard des objectifs de la loi n° 96-589
du 2 juillet 1996 relative à la programmation militaire pour les années 1997 à
2002. »
Par amendement n° 1 rectifié, M. About, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit cet article :
« Un pécule d'incitation au départ anticipé est institué à compter du 1er
janvier 1997 jusqu'au 31 décembre 2002. Il peut être accordé, sur demande
agréée par le ministre chargé des armées, au militaire de carrière en position
d'activité, se trouvant à plus de trois ans de la limite d'âge de son grade et
qui fait valoir ses droits à une pension militaire de retraite. La durée
minimum de services militaires effectifs pour prétendre au bénéfice du pécule
est de vingt-cinq années pour les officiers et de quinze années pour les
sous-officiers et officiers mariniers.
« Ce pécule est accordé en fonction des besoins de la gestion des effectifs au
regard des objectifs de la loi n° 96-589 du 2 juillet 1996 relative à la
programmation militaire pour les années 1997 à 2002. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement essentiellement rédactionnel.
La nouvelle formulation proposée permet notamment d'inscrire, dès le début de
l'article 1er, l'objet du dispositif, à savoir la création, à titre provisoire,
d'un pécule. Elle intègre par ailleurs la précision, opportunément apportée par
l'Assemblée nationale, quant à la qualification et à la finalité du pécule,
c'est-à-dire l'incitation au départ anticipé.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon,
ministre de la défense.
L'objet du pécule est bien une incitation au
départ anticipé. La rédaction proposée est mieux équilibrée et plus précise que
celle du Gouvernement. Je ne peux donc qu'être favorable à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 1er est ainsi rédigé.
Article 2
M. le président.
« Art. 2. _ Le montant du pécule institué à l'article 1er de la présente loi
est fixé, pour le militaire qui se trouve à plus de dix ans de la limite d'âge
de son grade, à quarante-cinq mois de la solde indiciaire brute dont il
bénéficie à la date d'attribution du pécule ; ce montant est réduit de cinq
mois de solde par année de service effectuée de dix ans à moins de sept ans de
la limite d'âge du grade, puis de quatre mois par année de service
supplémentaire.
« Les pécules accordés en 1999 et 2000 sont réduits d'un dixième ; ceux
accordés en 2001 et 2002 le sont de deux dixièmes.
« Le pécule est exonéré de l'impôt sur le revenu. » -
(Adopté.)
Article 3
M. le président.
L'article 3 a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Articles 4 et 5
M. le président.
« Art. 4. _ Un pécule réduit des quatre cinquièmes est attribué aux militaires
de carrière admis au bénéfice des dispositions des articles 5 et 6 de la loi n°
75-1000 du 30 octobre 1975 modifiant la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972
portant statut général des militaires et édictant des dispositions concernant
les militaires de carrière ou servant en vertu d'un contrat. » -
(Adopté.)
« Art. 5. _ Le militaire de carrière admis dans un des emplois des
collectivités énumérées à l'article L. 84 du code des pensions civiles et
militaires de retraite ne peut pas bénéficier de l'attribution du pécule prévu
par les présentes dispositions.
« Toute admission ou réintégration dans un de ces emplois entraîne, pour le
militaire bénéficiaire des dispositions des articles premier et 2, l'obligation
de reverser le pécule perçu, dans un délai d'un an. » -
(Adopté.)
TITRE II
DE LA RECONVERSION
Article additionnel avant l'article 6
M. le président.
Par amendement n° 2, M. About, au nom de la commission, propose d'insérer,
avant l'article 6, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 30 de la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972, portant statut
général des militaires, il est inséré un chapitre V ainsi rédigé :
« Chapitre V
« Reconversion
«
Art. 30
bis . - Le militaire de carrière ou sous contrat peut
bénéficier, au cours de son service dans les armées, de dispositifs
d'évaluation et d'orientation professionnelles destinés à préparer, le moment
venu, son retour à la vie civile active.
«
Art. 30
ter. - Le militaire de carrière ou sous contrat, quittant
définitivement les armées, peut bénéficier, pendant une durée maximum de douze
mois, de congés de reconversion lui permettant de suivre les actions de
formation adaptées à son projet professionnel.
« Les articles 53, 57 et 65-2 de la présente loi précisent les conditions
d'application des congés de reconversion. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About,
rapporteur.
Cet amendement tend à insérer au titre Ier du statut général
des militaires, portant dispositions générales, un chapitre V nouveau intitulé
« Reconversion ».
Il importe, en effet, de traduire clairement et de façon visible, dans le
texte de base concernant la vie militaire, l'importance de la reconversion dans
le déroulement du métier militaire, que celui-ci relève de la carrière ou du
contrat.
En l'insérant, dans le cadre du titre Ier du statut, au sein du chapitre, la
notion de reconversion est placée, en quelque sorte, à égalité avec les autres
dispositions que sont, notamment, les droits civils et politiques - chapitre
Ier - ou les obligations et responsabilités du militaire - chapitre II.
Ce chapitre nouveau comporte deux articles : le premier tend à consacrer, dans
le projet de loi, les actions d'évaluation et d'orientations professionnelles
dont les militaires peuvent bénéficier pendant leur service dans les armées.
Ces actions sont nombreuses, diversifiées, et ne relèvent jusqu'à présent que
de dispositifs réglementaires ou conventionnels. L'amendement permet d'en
consacrer l'existence et la pérennité dans la loi.
Le second article vise la période de reconversion qui, à la fin du métier
militaire, sous la forme de deux types de congés - reconversion et
complémentaire de reconversion - peut atteindre un maximum de douze mois. Il
importe de mentionner explicitement cette durée globale à laquelle le militaire
peut prétendre, qui correspond d'ailleurs à la durée du congé de formation
prévu par le code du travail. L'article nouveau précise par ailleurs le contenu
de ces congés. La formation retenue est la plus large possible afin de
n'exclure aucun outil de nature à répondre au projet professionnel du militaire
qui souhaite se reconvertir.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon,
ministre de la défense.
Le Gouvernement est très favorable à cet
amendement. En effet, dans le texte qu'il a présenté, le droit à la
reconversion gagera l'attractivité de l'engagement : les jeunes s'engageront
d'autant plus dans les armées - et je réponds là à des questions qui ont été
posées - qu'ils sauront que, au terme de leur engagement, ils pourront
bénéficier d'une vraie reconversion. Pour reprendre une expression habituelle,
le « ticket de sortie » conditionnera le « ticket d'entrée ». C'est la raison
pour laquelle nous souhaitons que soit reconnu ce droit à la reconversion.
La rédaction proposée par la commission permet de souligner de manière plus
forte encore l'importance de la reconversion, conçue comme un élément à part
entière du statut général des militaires.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, avant l'article 6.
Article 6
M. le président.
« Art. 6. _ La loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des
militaires est ainsi modifiée :
« I. _ L'article 53 est complété par un 5° ainsi rédigé :
« 5° Un congé de reconversion avec solde accordé dans l'intérêt du service,
d'une durée maximum de six mois. Toutefois, la solde est suspendue ou réduite
dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, lorsque le militaire
exerce une activité publique ou privée rémunérée. A l'expiration du congé de
reconversion, le militaire est rayé d'office des cadres ou placé en congé
complémentaire de reconversion prévu au 8° de l'article 57 ci-après. »
« II. _ L'article 57 est complété par un 8° ainsi rédigé :
« 8° En congé complémentaire de reconversion. »
« III. _ Après l'article 65-1, il est inséré un article 65-2 ainsi rédigé :
«
Art. 65-2
. _ Le congé complémentaire de reconversion est la situation
du militaire de carrière qui, ayant bénéficié du congé de reconversion prévu au
5° de l'article 53 ci-dessus, est admis sur sa demande à cesser de servir dans
les armées aux fins de poursuivre sa préparation à l'exercice d'une profession
dès le retour dans la vie civile.
« Ce congé est accordé pour une période d'une durée maximale de six mois,
pendant laquelle le militaire perçoit la solde indiciaire nette, la prime de
qualification, l'indemnité de résidence et les suppléments pour charges de
famille. Ces émoluments sont suspendus ou réduits dans les conditions prévues
par décret en Conseil d'Etat lorsque le bénéficiaire perçoit une rémunération
publique ou privée.
« Le temps passé en congé complémentaire de reconversion compte pour
l'avancement et pour les droits à pension de retraite.
« Les articles 20, 21 et 22 de la présente loi sont applicables aux militaires
en congé complémentaire de reconversion.
« Le militaire en congé complémentaire de reconversion ayant acquis des droits
à pension de retraite peut être mis à la retraite, sur sa demande, en cours de
congé. Il est mis d'office dans cette position à l'expiration de son congé.
Celui qui n'a pas acquis de droits à pension de retraite est tenu de
démissionner de son état de militaire de carrière. »
« IV. _ La seconde phrase du second alinéa de l'article 82 est ainsi rédigée
:
« Néanmoins, les dispositions des articles 32, 35, 43, 51, 53 à 56, 57 (1°,
2°, 7° et 8°), 60, 65-1 et 65-2 lui sont applicables. »
« V. _ L'article 94 est ainsi rédigé :
«
Art. 94
. _ Le premier alinéa de l'article 33 et les articles 35, 53 à
56, 57 (1°, 5°, 7° et 8°), 63, 65-1 et 65-2 de la présente loi sont applicables
aux engagés. »
Par amendement n° 3 rectifié, M. About, au nom de la commission, propose de
rédiger comme suit la dernière phrase du texte présenté par le paragraphe I de
cet article pour le 5° de l'article 53 de la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972
portant statut général des militaires : « A l'expiration du congé de
reconversion, le militaire qui n'est pas placé en congé du personnel navigant
prévu au 5o de l'article 57 ci-après ou en congé complémentaire de reconversion
prévu au 8° de ce même article est soit mis d'office à la retraite, soit tenu
de démissionner de son état de militaire de carrière s'il n'a pas acquis de
droits à pension de retraite. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About,
rapporteur.
Cet amendement rédactionnel a pour objet de préciser la
situation du militaire au moment où se termine son congé de reconversion.
A ce moment, le militaire cessera de se trouver en situation d'activité et,
s'il ne choisit pas les deux situations d'inactivité précédant la retraite que
sont, d'une part, le congé du personnel navigant et, d'autre part, le congé
complémentaire de reconversion, il sera soit mis d'office à la retraite, soit
tenu de démissionner de son état de militaire.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon,
ministre de la défense.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 4, M. About, au nom de la commission, propose de remplacer
les deux dernières phrases du dernier alinéa du texte présenté par le
paragraphe III de l'article 6 pour l'article 65-2 de la loi n° 72-662 du 13
juillet 1972 portant statut général des militaires par une phrase ainsi rédigée
: « A l'expiration de son congé, il est soit mis d'office à la retraite, soit
tenu de démissionner de son état de militaire de carrière s'il n'a pas acquis
de droits à pension de retraite. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About,
rapporteur.
C'est un amendement rédactionnel qui procède du même esprit
que le précédent. Il précise la situation du militaire à l'issue du congé
complémentaire de reconversion.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon,
ministre de la défense.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 5, M. About, au nom de la commission, propose d'insérer,
après le paragraphe IV de l'article 6, un paragraphe additionnel ainsi rédigé
:
«
IV
bis. - Au dernier alinéa de l'article 93, les mots : "deux
mois" sont remplacés par les mots : "six mois". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About,
rapporteur.
Cet amendement vise à prolonger le délai de préavis avant la
dénonciation du contrat d'engagement de deux à six mois, et ce par souci de
cohérence avec la durée du congé de reconversion auquel peut prétendre l'engagé
avant son départ des armées, qui est de six mois maximum.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon,
ministre de la défense.
Cet amendement est très logique puisqu'il vise à
faire correspondre le temps du préavis et la durée du congé de reconversion. Il
est tout à fait conforme à l'exigence de clarté des perspectives individuelles
dont j'ai fait état il y a quelques instants. C'est pourquoi le Gouvernement y
est favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.
M. André Rouvière.
Le groupe socialiste s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, modifié.
M. André Rouvière.
Le groupe socialiste s'abstient également.
(L'article 6 est adopté.)
Article 7
M. le président.
« Art. 7. _ Dans les premier et dernier alinéas de l'article 3 de la loi n°
70-2 du 2 janvier 1970 tendant à faciliter l'accès des militaires à des emplois
civils, les mots : "jusqu'au 31 décembre 1998" sont remplacés par les
mots : "jusqu'au 31 décembre 2002". » -
(Adopté.)
TITRE III
DISPOSITIONS DIVERSES
Articles 8, 8
bis
et 9 à 12
M. le président.
« Art. 8. _ Après l'article 16 de la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972
précitée, il est inséré un article 16-1 ainsi rédigé :
«
Art. 16-1
. _ Les militaires ne peuvent être condamnés sur le
fondement du troisième alinéa de l'article 121-3 du code pénal pour des faits
non intentionnels commis dans l'exercice de leurs fonctions que s'il est établi
qu'ils n'ont pas accompli les diligences normales compte tenu de leurs
compétences, du pouvoir et des moyens dont ils disposaient ainsi que des
difficultés propres aux missions que la loi leur confie. » -
(Adopté.)
« Art. 8
bis
_ L'article L. 55 du code des pensions civiles et
militaires de retraite est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La pension des militaires n'est pas assimilée à un avantage vieillesse avant
l'âge de soixante ans. » -
(Adopté.)
« Art. 9. _ Le 1° de l'article L. 7 du code des pensions civiles et militaires
de retraite est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Toutefois, ils ont la faculté de renoncer à la solde de réforme afin de
bénéficier des dispositions de l'article L. 65 du présent code. L'option
formulée par ces militaires le jour de la radiation des cadres est définitive.
» -
(Adopté.)
« Art. 10. _ I. _ Dans le premier alinéa de l'article L. 65 du code des
pensions civiles et militaires de retraite, après les mots : "pension ou
une solde de réforme", sont insérés les mots : ", ou qui a renoncé à
cette dernière dans les conditions prévues au 1° de l'article L. 7,". »
« II. _ Le troisième alinéa de l'article L. 65 du même code est complété par
les mots : ", ou qui a renoncé à cette dernière dans les conditions
prévues au 1° de l'article L. 7". » -
(Adopté.)
« Art. 11. _ La faculté de renoncer à la solde de réforme et d'opter pour une
affiliation rétroactive au régime général des assurances sociales prévue aux
articles L. 7 et L. 65 du code des pensions civiles et militaires de retraite
s'applique aux militaires dont la radiation des cadres est postérieure à
l'entrée en vigueur de la présente loi. » -
(Adopté.)
« Art. 12. _ Dans chacun des derniers alinéas des articles 5 et 6, et dans le
premier alinéa de l'article 7 de la loi n° 75-1000 du 30 octobre 1975 précitée,
les mots : "jusqu'au 31 décembre 1998" sont remplacés par les mots :
"jusqu'au 31 décembre 2002". » -
(Adopté.)
Article additionnel après l'article 12
M. le président.
Par amendement n° 6, M. About, au nom de la commission, propose d'insérer,
après l'article 12, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le sous-officier ou assimilé de carrière du grade de major, d'adjudant-chef
ou du grade correspondant, du grade de gendarme, réunissant au moins vingt-cinq
ans de services et qui se trouve à plus de quatre ans de la limite d'âge de son
grade, peut, sur demande agréée par le ministre chargé des armées, être admis
au bénéfice d'une pension de retraite calculée sur les émoluments de base
afférents à l'échelon le plus élévé de son grade.
« Le sous-officier ou assimilé de carrière d'un grade au plus égal à celui
d'adjudant ou du grade correspondant et qui réunit les conditions fixées à
l'alinéa précédent peut, sur demande agréée par le ministre chargé des armées,
être admis au bénéfice d'une pension de retraite calculée sur les émoluments de
base afférents à l'échelon de solde du grade supérieur déterminé par
l'ancienneté de services qu'il détient au moment de sa radiation des cadres.
« Le nombre de sous-officiers ou assimilés de carrière appelés à bénéficier
des dispositions des deux premiers alinéas du présent article sera fixé, chaque
année, par grade et par corps. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About,
rapporteur.
Cet amendement est destiné à ouvrir, sous certaines
conditions, le bénéfice de la pension de retraite au grade supérieur à certains
sous-officiers.
Certes, l'amendement proposé ne permet pas, dans la situation budgétaire
actuelle, qui est extrêmement contraignante, d'associer au bénéfice de cette
retraite au grade supérieur celui du cinquième du pécule que l'article 4 du
présent projet accorde aux officiers. Egalement pour la même raison, il
n'aurait pas été réaliste de poser comme ancienneté minimale requise pour
prétendre à cette mesure la durée nécessaire au bénéfice de la pension de
retraite à jouissance immédiate pour les sous-officiers, à savoir quinze ans de
service : la population éligible aurait dépassé dans cette hypothèse les 100
000 personnes.
C'est pourquoi le dispositif proposé s'articule de la façon suivante. Les
sous-officiers ou assimilés de carrière, de grade de major, d'adjudant-chef ou
de gendarme peuvent prétendre à une pension de retraite calculée sur la base de
l'échelon le plus élevé de leur grade s'ils ont vingt-cinq ans de service et
s'ils sont à plus de quatre ans de la limite d'âge de leur grade.
De même, les sous-officiers d'un grade au plus égal à celui d'adjudant ou
assimilé, sous réserve qu'ils réunissent la double condition ci-dessus,
pourront bénéficier d'une pension de retraite calculée sur la base de l'échelon
du grade supérieur.
Dans tous les cas, le bénéfice de ces mesures résultera d'une demande agréée
par le ministre de la défense, sur la base d'un quota fixé annuellement par
grade et par corps.
Cette disposition s'inscrit donc dans une démarche d'équité pour les
sous-officiers et permettra aux armées, au-delà même de la période couverte par
la programmation, de bénéficier d'un bon outil de gestion.
Peut-être l'article 40 de la Constitution pourrait-il être opposé à cette
proposition. Mais, au fond, je ne le crois pas puisque la fixation d'un quota
permet d'encadrer les dispositions proposées. J'espère donc qu'il sera possible
d'insérer cet article additionnel dans le projet de loi pour servir les
intérêts des sous-officiers.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon,
ministre de la défense.
Monsieur le rapporteur, je sais que l'amendement
dont vous proposez l'adoption a été rédigé dans le seul souci d'améliorer le
dispositif que prévoit le projet gouvernemental au profit des militaires. C'est
pourquoi je souhaiterais vous indiquer que les informations que m'ont
communiquées les états-majors confirment que les dispositions prévues dans le
texte qui a été soumis à votre assemblée permettront d'atteindre les objectifs
fixés par la loi de programmation.
Cela me conduit, à considérer que, si attractive soit-elle, la mesure que vous
souhaitez voir mettre en oeuvre au profit des sous-officiers n'est pas
indispensable.
Je voudrais aussi et surtout appeler votre attention sur le fait que
l'adoption de cet amendement introduirait une mesure nouvelle, laquelle
engendrerait deux types de dépenses qui n'ont été prévues ni dans la loi de
programmation militaire, ni dans le projet de loi de finances pour 1997 qui
vous sera bientôt soumis : il s'agit, d'une part, d'une dépense liée à
l'attribution de la retraite au grade ou à l'échelon supérieur et, d'autre
part, d'une dépense induite, en termes de pension, par le départ anticipé à la
retraite des bénéficiaires.
C'est la raison pour laquelle je vous demande, monsieur le rapporteur, sans
soulever la question de la recevabilité de l'amendement ni celle de sa
compatibilité budgétaire avec la loi de programmation, de bien vouloir retirer
votre amendement.
M. le président.
L'amendement n° 6 est-il maintenu, monsieur le rapporteur ?
M. Nicolas About,
rapporteur.
Monsieur le ministre, je crois entendre, à travers vos
propos, les échos de la classique guerre de la raison et du coeur.
J'ai l'impression, pour vous connaître, que vous approuveriez plutôt la
proposition qui vous est faite, mais qu'un impératif vous retient de céder à
cet élan de générosité. Pour ne pas me voir opposer l'article 40, et en
espérant toutefois que vous reviendrez un jour - peut-être en 2002 - sur cette
mesure afin d'offrir un véritable outil de gestion à votre ministère, je retire
aujourd'hui l'amendement.
M. Charles Millon,
ministre de la défense.
Merci !
M. le président.
L'amendement n° 6 est retiré.
Articles 13 et 14
M. le président.
« Art. 13. _ Les militaires pensionnés visés à l'article L. 6 du code des
pensions civiles et militaires de retraite bénéficient du revenu de
remplacement prévu à l'article L. 351-1 du code du travail. » -
(Adopté.)
« Art. 14. _ Le Gouvernement présentera chaque année dans le rapport sur
l'exécution de la loi de programmation militaire, prévu à l'article 4 de la loi
n° 96-589 du 2 juillet 1996, un état de l'exécution de la présente loi. » -
(Adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M.
Hamel, pour explication de vote.
M. Emmanuel Hamel.
Si fidèle soit l'amitié que l'on voue à un homme, si grande soit l'affection
qu'on lui porte, si ses mérites lui ont valu un jour d'accéder à une fonction
importante dans la République et qu'il propose au vote du Parlement une
politique que, en conscience, on croit devoir refuser, le devoir, sans
méconnaître l'amitié et même en l'invoquant, est de dire non.
J'ai voté, pour des raisons que je n'ai pas développées de nouveau, contre la
loi de programmation militaire. Je suis d'une génération qui sait de quel prix
une nation paie l'insuffisance de son effort de défense. Mon âge me permet
d'évoquer les risques que même un pays comme la France peut courir un jour, en
état de décadence ou d'explosion sociale, avec une armée totalement
professionnalisée.
De même que je m'inscris contre la loi de programmation parce qu'elle dénature
ce que devrait être notre armée dans la nation, parce qu'elle ne lui donne pas
les moyens à la mesure des périls qui pèsent sur la France et que notre pays
aura à affronter au cours du deuxième millénaire, de même je vote aujourd'hui,
- hélas ! avec infiniment de tristesse - contre ce projet de loi qui s'inscrit
dans ce dispositif et je voterai contre le texte que vous nous soumettrez dans
quelques semaines.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen. - M. Le Grand applaudit également.)
M. le président.
La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe de
l'Union centriste votera le projet de loi relatif aux mesures en faveur du
personnel militaire dans le cadre de la professionnalisation des armées.
Ce projet de loi constitue la première traduction pratique des dispositions de
la loi de programmation militaire. Le groupe de l'Union centriste ayant voté,
dans sa majorité, cette dernière, il lui a paru cohérent de vous apporter son
soutien concernant ce premier volet législatif, dont nous n'ignorons pas qu'il
sera suivi de deux autres, l'un portant sur les réserves, l'autre sur la
refonte du service national. Vous connaissant, monsieur le ministre, nous
savons que c'est avec le souci des personnels civils et militaires de la
défense que les dispositifs prévus par ces textes de loi seront appliqués.
La réforme des armées était rendue nécessaire par l'évolution du contexte
géostratégique en Europe. Malgré les lourdes restrictions budgétaires qui
pèsent sur votre budget comme sur tous les budgets de l'Etat, nous considérons
qu'une saine professionnalisation, respectant à la fois les contraintes de
diminution d'effectifs et de remodelage en profondeur de nos armées, et
essentiellement de l'armée de terre, que je connais bien, je l'ai déjà dit, qui
est la principale concernée par ces dispositions, s'imposait.
Nous ne doutons pas une seule seconde que la mise en application par
l'autorité gouvernementale, au travers des décrets d'application, des
principales dispositions contenues dans ce projet de loi sera effectuée dans le
respect de ces centaines de milliers d'hommes et de femmes qui ont choisi de
servir leur partie dans l'armée.
Je ne reviendrai pas en détail sur les dispositions car elles me paraissent
découler logiquement et naturellement des grandes options définies par le
Président de la République et actées par le Parlement de la nation.
Le groupe de l'Union centriste souhaite que les autres dispositions
législatives soient rapidement soumises à la représentation nationale afin que,
sans délai, la France puisse procéder d'une façon optimale et profondément
humaine à une redéfinition de sa défense au service non seulement de la
République mais aussi de la construction européenne.
Fort de ces considérations, le groupe de l'Union centriste votera le présent
projet de loi en espérant qu'il permette le maintien de l'armée française au
plus haut niveau des armées du monde occidental. Cette réforme est nécessaire ;
votre Gouvernement, monsieur le ministre, a eu le courage de l'engager, et nous
aurons, quant à nous, le courage de l'approuver et de vous suivre.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et
Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Eckenspieller.
M. Daniel Eckenspieller.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de
loi sur lequel nous sommes appelés à nous prononcer aujourd'hui est l'un des
aboutissements de la démarche volontaire et cohérente du Président de la
République, Jacques Chirac, qui n'a cessé, avant même le début de son mandat,
d'insister sur la nécessité de repenser l'ensemble de la politique de défense
française.
Les deux mots clés de la réforme sont modernisation et professionnalisation.
Ces principes donneront à la France « un instrument militaire capable de
frapper, au besoin sans délai », une armée réduite et mobile telle que la
projetait le général de Gaulle dès les années trente.
Le présent projet de loi est donc l'un des aspects de cette réforme globale,
et non des moindres, puisqu'il s'agit d'un véritable défi humain qui consiste à
assurer la recomposition des armées en six ans par une nette diminution du
nombre des cadres militaires, tout en préparant un doublement du recrutement
des engagés.
Nous ne pouvons donc que nous féliciter de l'effort financier qui est consenti
pour le départ et la reconversion des cadres militaires, et qui permet de
récompenser ceux qui assurent la défense de la nation, parfois au péril de leur
vie.
Le Sénat, conscient de ce que la nation doit à ses soldats, a souhaité mettre
l'accent sur la clarification du statut des militaires et renforcer les
dispositions qui leur permettront de prendre un nouveau départ après une
carrière dans l'armée.
La réforme est ambitieuse et va dans le bon sens. C'est pourquoi le groupe du
Rassemblement pour la République votera, dans sa très grande majorité, ce
projet de loi, avec la conviction de servir ainsi la nation et son armée.
(Applaudissements sur certaines travées du RPR, ainsi que sur celles de
l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Carle.
M. Jean-Claude Carle.
Je confirme le bien-fondé de cette réforme née dans la concertation et le
dialogue afin d'assurer la sécurité et la défense de notre pays.
C'est la raison pour laquelle le groupe des Républicains et Indépendants
votera ce projet de loi, enrichi par les amendements de la commission.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et de
l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Rouvière.
M. André Rouvière.
Monsieur le ministre, vous avez remercié ceux qui ont soutenu ce projet de loi
d'avoir ainsi apporté leur appui à l'armée.
A cet égard, je tiens à ce qu'il n'y ait aucune confusion ni d'interprétation
erronée. Le fait de ne pas soutenir votre projet de loi ne signifie pas que le
groupe socialiste ne soutient pas l'armée. C'est justement parce que nous
soutenons celle-ci que nous sommes hostiles à votre texte. Il faut être très
clair.
Vous nous avez expliqué votre logique. Nous sommes, quant à nous, sensibles à
une autre logique. Nous aurions souhaité, comme d'autres, que la question du
service militaire soit un élément déterminant de la loi de programmation
militaire. Vous avez opéré un autre choix ; c'est votre droit. Nous nous
fondons sur un raisonnement différent, et c'est également notre droit.
Je regrette, monsieur le ministre, que vous ayez omis de répondre à une
question importante que j'ai formulée à plusieurs reprises : pourquoi
n'utilisez-vous pas les crédits votés par le Parlement pour l'équipement de nos
armées ? La réponse est vitale pour l'industrie aéronautique. Allez-vous passer
des commandes ? Quand le ferez-vous ? Quel en sera le nombre ? Il s'agit d'une
question de survie pour nos industries de l'armement et, en particulier, de
l'aéronautique et non d'une question bassement politicienne.
Je regrette, monsieur le rapporteur, que vous ayez retiré l'amendement n° 6
après que M. le ministre vous eut répondu que cette mesure n'était pas
indispensable pour les sous-officiers.
Sur ce point aussi, monsieur le ministre, nous nous situons dans une logique
très différente. Il s'agit, pour nous, d'une question de justice et d'égalité.
Comme vous pouvez le constater, notre vision des choses est tout autre.
C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste votera contre votre projet
de loi.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
M. Charles Millon,
ministre de la défense.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Charles Millon,
ministre de la défense.
Je répondrai brièvement à certaines
interrogations qui viennent d'être exprimées.
Je précise, en particulier, à M. Rouvière que nous avons proposé non pas des
mesures catégorielles, mais des moyens de gestion. Dès lors, et c'est vrai, son
approche ne correspond pas à la nôtre. Toutefois, il ne s'agit pas de justice
ou d'injustice. En effet, la situation sera inchangée pour ceux qui resteront
au sein de l'armée. En revanche, ceux qui pourront ou voudront quitter celle-ci
et qui répondront aux critères requis bénéficieront des dispositions que vous
venez de voter.
Vous m'avez également interrogé à propos de certaines commandes qui n'auraient
pas été passées par le ministère de la défense. Si je ne vous ai pas répondu au
cours de ce débat, c'est parce que tel n'en était pas l'objet. Dans quelques
jours, je viendrai défendre le budget du ministère de la défense pour 1997. Je
répondrai alors à toutes vos questions, mais, d'ores et déjà, je peux vous
affirmer que la réforme que nous avons engagée concerne non seulement les
armées et la délégation générale pour l'armement, mais aussi nos relations avec
les industries de l'armement.
C'est la raison pour laquelle des négociations sont actuellement engagées
entre mon ministère et les industriels de l'armement pour mettre au point les
commandes pluriannuelles et de nouveaux types de relations avec ces derniers,
comme je m'y étais engagé. Voilà ce qui explique peut-être les retards auxquels
vous avez fait allusion.
Enfin, je tiens à dire à M. Hamel que je lui ai déjà répondu lors de l'examen
de la loi de programmation. Celle-ci est devenue la loi de la République
puisqu'elle a été votée par le Parlement et il convient maintenant de définir,
dans le cadre de cette loi de programmation, un certain nombre de mesures.
C'est la raison pour laquelle j'aurais préféré que M. Hamel vote ce texte. En
effet, même s'il était hostile à la loi de programmation, il convient de mettre
en place les mesures qui permettront la professionnalisation des armées,
puisqu'elle a été adoptée par le Parlement français et est devenue une
référence.
Je vous remercie d'avoir souligné l'enjeu humain de ce projet de loi. Vous
connaissez le souci du ministère de la défense à l'égard des personnels
militaires - vous venez de le constater - et des personnels civils. Nous
l'avons démontré hier en concluant un accord avec les organisations syndicales.
Je remercie donc le Sénat qui, dans sa majorité, m'a apporté son soutien.
La communauté militaire, monsieur Rouvière, sera reconnaissante, non seulement
à celles et à ceux qui ont voté ce texte, mais aussi à celles et à ceux qui ont
bien voulu participer à son examen et s'intéresser à l'avenir de la communauté
militaire.
(Applaudissements sur certaines travées du RPR, ainsi que sur celles des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
8
NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de
constitution d'une commission mixte paritaire sur le texte que nous venons
d'adopter.
Il va être procédé immédiatement à la nomination de sept membres titulaires et
de sept membres suppléants de cette commission mixte paritaire.
La liste des candidats établie par la commission des affaires étrangères, de
la défense et des forces armées a été affichée conformément à l'article 12 du
règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat
à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Xavier de Villepin, Nicolas About, Michel Caldaguès, Serge
Vinçon, Guy Robert, André Rouvière et Jean-Luc Bécart.
Suppléants : MM. Didier Borotra, André Boyer, Jean Clouet, Claude Estier, Jean
Faure, Daniel Goulet et Maurice Lombard.
9
DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE RÉSOLUTION
M. le président.
J'ai reçu de Mmes Hélène Luc, Marie-Claude Beaudeau, M. Paul Loridant, Mmes
Danielle Bidard-Reydet, Michelle Demessine, MM. Jean-Luc Bécart, Claude
Billard, Mme Nicole Borvo, M. Guy Fischer, Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis, MM.
Félix Leyzour, Louis Minetti, Robert Pagès, Jack Ralite et Ivan Renar une
proposition de résolution, présentée en application de l'article 73
bis
du règlement, sur la proposition de la Commission en vue d'un règlement du
Conseil relatif au renforcement de la surveillance et de la coordination des
situations budgétaires, sur la proposition de règlement (CE) du Conseil visant
à accélerer et clarifier la mise en oeuvre de la procédure concernant les
déficits excessifs (n° E-719).
La proposition de résolution sera imprimée sous le numéro 83, distribuée et
renvoyée à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une
commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de Mme Hélène Luc, Marie-Claude Beaudeau, M. Paul Loridant, Mmes
Danielle Bidard-Reydet, Michelle Demessine, MM. Jean-Luc Bécart, Claude
Billard, Mme Nicole Borvo, M. Guy Fischer, Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis, MM.
Félix Leyzour, Louis Minetti, Robert Pagès, Jack Ralite et Ivan Renar une
proposition de résolution, présentée en application de l'article 73
bis
du règlement, sur les propositions de règlement du Conseil sur l'introduction
de l'Euro (article 109 1 (4) CE) et sur certaines dispositions y afférentes
(article 235 CE) (n° E-720).
La proposition de résolution sera imprimée sous le numéro 84, distribuée et
renvoyée à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une
commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
10
DÉPÔT DE PROPOSITIONS
D'ACTE COMMUNAUTAIRE
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
Accord entre la Communauté européenne et les Etats-Unis d'Amérique sur la
coopération douanière et l'assistance mutuelle en matière douanière.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-732 et
distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
Proposition de règlement CE du Conseil modifiant les règlements CE n° 3355/94,
CE n° 3356/94 et CE n° 3357/94 relatifs au régime applicable aux importations
dans la Communauté de produits originaires des Républiques de
Bosnie-Herzégovine, de Croatie, de Slovénie et de l'ancienne République
yougoslave de Macédoine.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-733 et
distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
Proposition de décision du Conseil sur les modifications à apporter à
l'arrangement de l'OCDE relatif à des lignes directrices pour les crédits à
l'exportation bénéficiant d'un soutien public.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-734 et
distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
Proposition de décision du Conseil accordant une garantie de la Communauté à
la Banque européenne d'investissement en cas de pertes résultant de prêts en
faveur de projets réalisés à l'extérieur de la Communauté (Europe centrale et
orientale, pays méditerranéens, Amérique latine et Asie, Afrique du Sud).
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-735 et
distribuée.
11
DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION
M. le président.
J'ai reçu de M. Jacques Genton un rapport d'information fait au nom de la
délégation du Sénat pour l'Union européenne sur les activités de la délégation
: suivi de la Conférence intergouvernementale, questions économiques, examen
des propositions d'acte communautaire (juillet-octobre 1996).
Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 82 et distribué.
12
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au mercredi 21 novembre 1996, à quinze heures et, éventuellement, le soir
:
1. - Discussion du projet de loi (n° 57, 1996-1997) d'habilitation relatif à
l'extension et à l'adaptation à la collectivité territoriale de Mayotte des
dispositions législatives du titre premier du livre VII du code de la santé
publique, au statut du personnel et au financement de l'établissement public de
santé territorial de Mayotte ainsi qu'à la réforme du statut de la caisse de
prévoyance sociale.
Rapport (n° 72, 1996-1997) de M. Jean-Louis Lorrain, fait au nom de la
commission des affaires sociales.
Aucun amendement à ce projet de loi n'est plus recevable.
2. - Discussion du projet de loi (n° 493, 1995-1996) portant ratification des
ordonnances prises en application de la loi n° 96-1 du 2 janvier 1996
d'habilitation relative à l'extension et à l'adaptation de la législation en
matière pénale applicable aux territoires d'outre-mer et à la collectivité
territoriale de Mayotte et abrogeant certaines dispositions concernant les îles
éparses et l'île de Clipperton.
Rapport (n° 65, 1996-1997) de M. Jean-Marie Girault, fait au nom de la
commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel,
du règlement et d'administration générale.
Aucun amendement à ce projet de loi n'est plus recevable.
3. - Discussion du projet de loi (n° 56, 1996-1997) portant ratification de
l'ordonnance n° 96-782 du 5 septembre 1996 prise en application de la loi n°
96-87 du 5 février 1996 d'habilitation relative au statut général des
fonctionnaires de la collectivité territoriale, des communes et des
établissements publics de Mayotte.
Rapport (n° 77, 1996-1997) de M. François Blaizot, fait au nom de la
commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel,
du règlement et d'administration générale.
Aucun amendement à ce projet de loi n'est plus recevable.
4. - Discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi (n° 58,
1996-1997) relatif à l'Union d'économie sociale du logement.
Rapport (n° 78, 1996-1997) de M. Marcel-Pierre Cleach, fait au nom de la
commission des affaires économiques et du Plan.
Aucune inscription de parole dans la discussion générale de ce projet de loi
n'est plus recevable.
Aucun amendement à ce projet de loi n'est plus recevable.
Délai limite pour les inscriptions de parole
dans la discussion générale
du projet de loi de finances pour 1997
Le délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale du
projet de loi de finances pour 1997 est fixé au mercredi 20 novembre 1996, à
dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements
aux articles de la première partie
du projet de loi de finances pour 1997
Le délai limite pour le dépôt des amendements aux articles de la première
partie du projet de loi de finances pour 1997 est fixé au jeudi 21 novembre
1996, à seize heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-huit heures quarante.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
ORGANISMES EXTRAPARLEMENTAIRES
Jacques Braconnier pour siéger au sein du comité de liaison pour le transport
des personnes handicapées en remplacement de M. Maurice Lombard.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Utilisation des crédits accordés à l'office franco-allemand
pour la jeunesse au titre de l'année 1996
507.
- 15 novembre 1996. -
M. Daniel Hoeffel
attire l'attention de
M. le ministre délégué à la jeunesse et aux sports
sur l'utilisation des crédits accordés à l'office franco-allemand pour la
jeunesse au titre de l'année 1996. A la suite de l'annonce, il y a un an, de la
diminution de 5 % du budget de cet organisme, la commission des finances de
l'Assemblée nationale lui avait accordé une subvention d'un million de francs
au titre de la réserve parlementaire, aussitôt suivie par le Bundestag allemand
qui avait accordé une somme équivalente. Or il semble que cette subvention ait
été finalement utilisée à d'autres fins par le ministre de la jeunesse et des
sports. Cette situation appelle dès lors plusieurs questions : comment est-il
possible que cette subvention parlementaire ait pu être réaffectée sur décision
du Gouvernement, et quelle en a été l'utilisation ? Comment le ministre
compte-t-il compenser le manque à gagner d'une valeur de 2 millions de francs
qui en résulte pour l'office franco-allemand pour la jeunesse, dont le rôle
essentiel dans la concrétisation de la construction européenne et dans la
coopération franco-allemande ne sont plus à démontrer et devraient au contraire
être soutenus ?
Financement des travaux de prévention
des risques naturels prévisibles
508.
- 15 novembre 1996. -
Mme Janine Bardou
attire l'attention de
Mme le ministre de l'environnement
sur les conditions de l'application de la loi n° 95-101 du 2 février 1995
relative au renforcement de la protection de l'environnement et ce à la suite
d'un éboulement survenu fin 1995, sur une commune de son canton, Barjac en
Lozère, qui a causé la mort d'une personne et des dégâts à plusieurs
habitations. Ce village, d'environ six cents habitants, est en effet surplombé
par une falaise pour laquelle une mission d'expertise technique a été
diligentée par les services de l'Etat. Cette étude, récemment menée sur ce
site, évaluant précisément le risque et définissant les mesures de sécurité
adaptées, a conclu à l'instabilité de cette falaise et à la possibilité de
prévenir les risques d'éboulement par la réalisation d'ouvrages de protection.
L'article 11 de la loi suscitée prévoit, en cas de risques naturels majeurs,
une procédure d'expropriation diligentée par l'Etat à la condition que les
moyens de sauvegarde et de protection des populations s'avèrent plus coûteux
que les indemnités d'expropriation. Or, dans le cas de Barjac, le coût des
ouvrages de protection envisagés, bien que très important, demeure toutefois
inférieur à la valeur vénale des habitations susceptibles d'être atteintes par
des blocs, mais reste hors de proportion avec les moyens financiers de cette
petite commune. Dans une telle situation, il semble qu'aucun financement
spécifique ne soit prévu par la loi, car il n'est pas possible d'émarger au
fonds de prévention des risques naturels majeurs. C'est pourquoi elle lui
demande quels moyens sont à la disposition de la commune, et notamment s'il
n'est pas possible d'envisager de réserver une part de ce fonds aux communes se
trouvant dans cette situation ? Enfin, elle souhaiterait également connaître
les recours financiers qui existent pour assurer les travaux de prévention des
risques naturels prévisibles.
Suppression d'une brigade de gendarmerie
dans le département du Val-de-Marne
509. - 19 novembre 1996. - M. Lucien Lanier attire l'attention de M. le ministre de la défense sur le problème que rencontrent certains maires face à la disparition de brigades de gendarmerie. En effet, dans bien des cantons, les effectifs de gendarmerie demeurent des forces de l'ordre permanentes indispensables. C'est notamment le cas pour le canton comprenant les communes d'Ablon-sur-Seine et de Villeneuve-le-Roi, dont la brigade de gendarmerie est menacée de suppression. Or, il s'agit dans le sud du département du Val-de-Marne de communes où l'insécurité s'accroît, soit du fait de bandes incontrôlées, soit par le nomadisme sauvage. Il souhaiterait savoir quelles solutions pourraient être envisagées pour remédier à ce problème, qui nuit à la sécurité des biens et des personnes.