SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Demande d'autorisation d'une mission d'information
(p.
1
).
3.
Saisine du Conseil constitutionnel
(p.
2
).
4.
Candidatures à un organisme extraparlementaire
(p.
3
).
5.
Dépôt d'un rapport en application d'une loi
(p.
4
).
6.
Retrait de l'ordre du jour d'une question orale sans débat
(p.
5
).
7.
Questions orales
(p.
6
).
EFFETS DES ANNULATIONS CONTENTIEUSES À L'ENCONTRE DE DÉCISIONS ADMINISTRATIVES
RELATIVES À LA RÉALISATION DE GRANDS TRAVAUX D'UTILITÉ PUBLIQUE (p.
7
)
Question de M. Jean-Louis Lorrain. - MM. Jacques Toubon, garde des sceaux,
ministre de la justice, Jean-Louis Lorrain.
AFFLUX EXCESSIF DES ÉTUDIANTS
VERS LES FILIÈRES SPORTIVES (p.
8
)
Question de M. Adrien Gouteyron. - MM. François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ; Adrien Gouteyron.
RENTRÉE À L'UNIVERSITÉ D'ARTOIS (p. 9 )
Question de M. Léon Fatous. - MM. François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ; Léon Fatous.
CRÉATION D'UN COMMISSARIAT DE POLICE
À NOYON (OISE) (p.
10
)
Question de M. Philippe Marini. - MM. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation ; Philippe Marini.
GESTION DU PERSONNEL MUNICIPAL (p. 11 )
Question de M. Joseph Ostermann. - MM. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation ; Joseph Ostermann.
BÉNÉFICE DU FONDS DE COMPENSATION POUR LA TVA
POUR LES COMMUNAUTÉS DE COMMUNES (p.
12
)
Question de M. Marcel Lesbros. - MM. Yves Galland, ministre délégué aux finances et au commerce extérieur ; Marcel Lesbros.
AVENIR DES ÉLÈVES
DE L'ÉCOLE NATIONALE DES CHARTES (p.
13
)
Question de M. Alfred Foy. - MM. Philippe Douste-Blazy, ministre de la culture ; Alfred Foy.
PRIVATISATION
DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PRODUCTION (SFP) (p.
14
)
Question de Mme Hélène Luc. - M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la culture ; Mme Hélène Luc.
REPRÉSENTATION DES RETRAITÉS
AU CONSEIL D'ADMINISTRATION
DES CAISSES DE RETRAITE (p.
15
)
Question de M. Jean-Jacques Robert. - Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué pour l'emploi ; M. Jean-Jacques Robert.
COÛT DES FORMALITÉS ADMINISTRATIVES
LIÉES AUX CONTRATS D'APPRENTISSAGE (p.
16
)
Question de M. Christian Demuynck. - Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué
pour l'emploi ; M. Christian Demuynck.
NÉCESSITÉ D'OCTROYER LE BÉNÉFICE DE LA PRIME À L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE À LA
FLANDRE-LYS(NORD) (p.
17
)
Question de M. Alfred Foy. - MM. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement
du territoire, de la ville et de l'intégration ; Alfred Foy.
RÉALISATION DES TRAVAUX D'AMÉNAGEMENT DU CARREFOUR DE LA RN 213 ET ACCÈS VERS «
LES HAUTS DE NARBONNE » (AUDE) (p.
18
)
Question de M. Roland Courteau. - MM. Pierre-André Périssol, ministre délégué
au logement ; Roland Courteau.
DEVENIR DES CRÉDITS
À LA RÉHABILITATION DE L'HABITAT (p.
19
)
Question de M. Gérard Roujas. - MM. Pierre-André Périssol, ministre délégué au logement ; Gérard Roujas.
NUISANCES OCCASIONNÉES PAR LA CIRCULATION ROUTIÈRE
À CHOISY-LE-ROI (VAL-DE-MARNE) (p.
20
)
Question de Mme Hélène Luc. - M. Pierre-André Périssol, ministre délégué au logement ; Mme Hélène Luc.
SITUATION DE LA DESSERTE FERROVIAIRE
ET DES INSTALLATIONS SNCF DE CRÉPY-EN-VALOIS (OISE) (p.
21
)
Question de M. Philippe Marini. - MM. Pierre-André Périssol, ministre délégué
au logement ; Philippe Marini.
PRISE EN COMPTE POUR LE CALCUL DES DROITS À LA RETRAITE DES SERVICES ACCOMPLIS
DANS LA RÉSISTANCE AVANT L'ÂGE DE SEIZE ANS (p.
22
)
Question de M. Philippe Marini. - MM. Pierre Pasquini, ministre délégué aux
anciens combattants et victimes de guerre ; Philippe Marini.
SITUATION DE DEUX FILLETTES FRANÇAISES
SÉQUESTRÉES EN ÉGYPTE (p.
23
)
Question de Mme Joëlle Dusseau. - M. Pierre Pasquini, ministre délégué aux
anciens combattants et victimes de guerre ; Mme Joëlle Dusseau.
8.
Nomination de membres d'un organisme extraparlementaire
(p.
24
).
Suspension et reprise de la séance (p. 25 )
PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY
9.
Eloge funèbre de Jacques Sourdille, sénateur des Ardennes
(p.
26
).
MM. le président, Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement.
Suspension et reprise de la séance (p. 27 )
10.
Conférence des présidents
(p.
28
).
11.
Décision du Conseil constitutionnel
(p.
29
).
12.
Candidature à un organisme extraparlementaire
(p.
30
).
13.
Institution d'une prestation spécifique dépendance.
- Discussion des conclusions du rapport d'une commission (p.
31
).
M. le président.
Discussion générale : M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des
affaires sociales.
14.
Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire de Slovaquie
(p.
32
).
15.
Institution d'une prestation spécifique dépendance.
- Suite de la discussion des conclusions du rapport d'une commission (p.
33
).
Discussion générale
(suite)
: MM. Jean-Pierre Fourcade, président de la
commission des affaires sociales ; Jacques Barrot, ministre du travail et des
affaires sociales.
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
Mmes Marie-Madeleine Dieulangard, Michelle Demessine, M. Guy Cabanel.
Déclaration de l'urgence du texte
(p.
34
)
Discussion générale
(suite)
(p.
35
)
MM. Philippe Darniche, Henri de Raincourt, Daniel Hoeffel, Jacques Oudin,
Roland Huguet, Henri Collard, Michel Mercier, Joseph Ostermann, Jean-Claude
Peyronnet.
Renvoi de la suite de la discussion.
16.
Nomination d'un membre d'un organisme extraparlementaire
(p.
36
).
17.
Transmission d'un projet de loi
(p.
37
).
18.
Dépôt d'une proposition de loi
(p.
38
).
19.
Dépôt de propositions d'acte communautaire
(p.
39
).
20.
Dépôt d'un rapport
(p.
40
).
21.
Dépôt d'un rapport d'information
(p.
41
).
22.
Ordre du jour
(p.
42
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
DEMANDE D'AUTORISATION
D'UNE MISSION D'INFORMATION
M. le président.
M. le président a été saisi d'une demande conjointe des présidents des six
commissions permanentes aux termes de laquelle ces commissions demandent au
Sénat l'autorisation de désigner une mission d'information commune chargée
d'étudier la place et le rôle des femmes dans la vie publique.
Le Sénat sera appelé à statuer sur cette demande dans les formes fixées par
l'article 21 du règlement.
3
SAISINE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel
une lettre par laquelle il informe le Sénat que le Conseil constitutionnel a
été saisi le 10 octobre 1996, en application de l'article 61, alinéa 2, de la
Constitution, par plus de soixante députés, d'une demande d'examen de la
conformité à la Constitution de la loi relative à l'information et à la
consultation des salariés dans les entreprises et les groupes d'entreprises de
dimension communautaire, ainsi qu'au développement de la négociation
collective.
Acte est donné de cette communication.
Le texte de la saisine du Conseil constitutionnel est disponible au bureau de
la distribution.
4
CANDIDATURES
À UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président.
Je rappelle que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir
procéder à la désignation des sénateurs appelés à siéger au sein de la
commission supérieure du service public des postes et télécommunications.
La commission des affaires économiques propose les candidatures de MM. Gérard
Delfau, Pierre Hérisson, Gérard Larcher et Jean-Marie Rausch.
La commission des affaires culturelles propose la candidature de M. Pierre
Laffitte.
La commission des finances propose les candidatures de MM. René Trégouët et
François Trucy.
Ces candidatures ont été affichées. Elles seront ratifiées si la présidence
n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du
règlement.
5
DÉPÔT D'UN RAPPORT
EN APPLICATION D'UNE LOI
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu le rapport du Conseil national du crédit pour
l'année 1995, établi en application de l'article 24 de la loi du 24 janvier
1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
6
RETRAIT DE L'ORDRE DU JOUR
D'UNE QUESTION ORALE SANS DÉBAT
M. le président. J'informe le Sénat que la question orale sans débat n° 438 de M. Lucien Neuwirth est retirée, à la demande de son auteur, de l'ordre du jour de la séance d'aujourd'hui.
7
QUESTIONS ORALES
M. le président.
L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales sans débat.
EFFETS DES ANNULATIONS CONTENTIEUSES À L'ENCONTRE DE DÉCISIONS ADMINISTRATIVES
RELATIVES À LA RÉALISATION DE GRANDS TRAVAUX D'UTILITÉ PUBLIQUE
M. le président.
M. Jean-Louis Lorrain attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre
de la justice, sur les effets d'annulations contentieuses prononcées au moyen
de simples vices de forme à l'encontre de décisions administratives prises en
vue de la réalisation de grands travaux d'utilité publique.
Il lui demande dans quelle mesure il serait possible d'ouvrir au juge la
faculté de statuer, en offrant à l'autorité administrative un délai pour
régulariser l'acte entaché d'irrégularité, et ce afin de ne pas différer
l'exécution d'opérations présentant un caractère d'intérêt général et
d'urgence.
Cela reviendrait simplement à prendre en matière d'expropriation des
dispositions analogues à celles, introduites en matière d'urbanisme par la loi
n° 94-112 du 9 février 1994 portant diverses dispositions en matière
d'urbanisme et de constructions, qui prévoient que l'illégalité pour vice de
forme ou de procédure ne peut être invoquée par voie d'exécution après
l'expiration d'un délai de six mois à compter de la prise d'effet de la
décision en cause. (N° 429.)
La parole est à M. Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain.
Monsieur le garde des sceaux, les dispositions introduites en matière
d'urbanisme par la loi du 9 février 1994 permettent de mieux encadrer les
recours en annulation.
Une de ces dispositions empêche la remise en cause des documents d'urbanisme
plusieurs années après leur élaboration pour vice de forme ou de procédure,
souvent mineur. Elle institue un délai de six mois au-delà duquel tout recours
par voie d'exception est irrecevable.
Ce texte à été édicté pour éviter, autant que possible, les désordres créés
par les décisions consacrant l'illégalité des documents d'urbanisme. Il permet
de rendre au droit de l'urbanisme une fiabilité et une stabilité qui lui
faisaient défaut.
L'institution d'un système similaire en matière d'expropriation permettrait
d'apporter à la réalisation des grands travaux d'utilité publique une plus
grande sécurité juridique, tout en respectant les garanties offertes à tout
citoyen usager. Cela éviterait des retards parfois considérables et souvent
préjudiciables à l'intérêt général.
De manière plus générale, ne peut-on envisager la possibilité d'ouvrir au juge
la faculté de statuer en offrant à l'autorité administrative un délai pour
régulariser l'acte entaché d'irrégularité ? Ce délai de régularisation, valable
dans les contentieux liés à l'expropriation, permettrait au juge de suspendre
les effets de l'annulation de tout acte entaché d'irrégularité pour vice de
forme ou de procédure, de telle sorte que l'exécution d'ouvrages présentant un
caractère d'intérêt général ne se trouve pas, elle, suspendue.
M. le président.
La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Jacques Toubon,
garde des sceaux, ministre de la justice.
Monsieur le sénateur, votre
question est marquée au coin d'une observation très attentive de la réalité. En
tant qu'élu local, je pourrais moi-même formuler des remarques allant dans le
même sens.
Cependant, pour des raisons touchant à des principes fondamentaux de notre
droit, la proposition que vous faites me paraît devoir appeler une réponse
négative, et je vous remercie de me donner l'occasion de le préciser, car je
sais que ce problème suscite des interrogations chez de nombreux parlementaires
et élus locaux.
Il s'agirait, ainsi que vous venez de l'expliquer, d'appliquer en matière
d'expropriation pour utilité publique les dispositions de l'article L. 600-3 du
code de l'urbanisme, tel qu'il résulte de la loi de 1994, de façon que le délai
durant lequel peut être invoquée l'exception d'illégalité de la déclaration
d'utilité publique pour vice de forme soit enfermé dans des limites
étroites.
Malheureusement, monsieur le sénateur, il n'est pas possible de s'engager dans
cette voie s'agissant des expropriations pour cause d'utilité publique, et cela
pour trois raisons.
D'abord, le Conseil constitutionnel, après avoir examiné l'article L. 600-3 du
code de l'urbanisme, a clairement indiqué, dans sa décision du 21 janvier 1994,
qu'il n'admettait les restrictions posées par cet article que dans la mesure où
la dérogation revêtait un caractère exceptionnel et où elle était limitée au
seul droit de l'urbanisme.
Par ailleurs, l'article XVII de la Déclaration des droits de l'homme de 1789
soumet la privation de la propriété à des conditions procédurales, notamment la
constatation légale de la nécessité publique.
Or, dans une décision bien connue du 13 décembre 1985, le Conseil
constitutionnel a rappelé l'importance de la procédure en cette matière. Il a
indiqué que les intéressés doivent, en particulier, être informés des motifs
qui rendent nécessaire l'expropriation et être en mesure de faire connaître
leurs observations.
Par conséquent, le fait de limiter, à l'issue d'un bref délai, la possibilité
de soulever l'exception d'illégalité à la méconnaissance substantielle ou à la
violation des règles de l'enquête contrevient sans doute au principe posé par
l'article XVII de la Déclaration des droits de l'homme tel que le Conseil
constitutionnel en a conçu l'application dans sa décision de décembre 1985.
Enfin, l'illégalité d'une déclaration d'utilité publique ne peut être invoquée
après l'expiration des délais de recours au soutien de conclusions dirigées
contre un permis de construire pour l'édification d'ouvrages déclarés d'utilité
publique. Autrement dit, même si la déclaration d'utilité publique est
illégale, on ne peut pas invoquer cette illégalité pour demander l'annulation
du permis de construire. Une extension de l'article L. 600-3 n'aurait donc pas
d'incidence sur ce dernier type de contentieux.
En revanche, l'extension des dispositions de l'article L. 600-3 pourrait
aboutir à la situation suivante : au cours d'une même opération d'utilité
publique, des expropriés concernés par un arrêté de cessibilité intervenu plus
de six mois après la déclaration d'utilité publique se verraient privés de la
possibilité d'invoquer certains moyens. Ce droit de recours serait donc
appliqué différemment à des personnes placées dans des situations semblables en
fonction de la seule date d'intervention de cet arrêté. Cette discrimination,
vous le savez, n'est pas compatible avec les principes essentiels d'égalité des
citoyens devant la loi et d'égal accès des citoyens à la justice.
Telles sont les raisons pour lesquelles, monsieur Lorrain, votre proposition
ne peut pas être reçue. Elle aurait, en fin de compte, pour effet une très
grave exception au principe du caractère perpétuel de l'exception d'illégalité,
reconnu par le Conseil d'Etat depuis 1908 et considéré aujourd'hui comme un
principe général du droit.
M. Jean-Louis Lorrain.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain.
Monsieur le garde des sceaux, je vous remercie beaucoup de votre réponse,
certes négative, mais tout à fait éclairante.
Vous l'avez bien compris, ce sont certains problèmes locaux qui m'ont amené à
vous soumettre cette question. En effet, des retards dans la mise en oeuvre
d'initiatives, notamment en matière de sécurité routière, ont pu, dans nombre
de cas, avoir de très funestes conséquences.
AFFLUX EXCESSIF DES ÉTUDIANTS
VERS LES FILIÈRES SPORTIVES
M. le président.
M. Adrien Gouteyron attire l'attention de M. le ministre de l'éducation
nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur l'afflux des
étudiants vers le DEUG de sciences et techniques des activités physiques et
sportives.
Après des disciplines comme l'histoire, la psychologie et la médecine, qui ont
connu un fort engouement des étudiants jusqu'en 1994, les filières sportives
font l'objet depuis deux ans d'une très forte demande des bacheliers, qui
apparaît en fait disproportionnée par rapport aux capacités des UFR - unités de
formation et de recherche - susceptibles de les accueillir et aux débouchés
offerts, qui, pour l'essentiel se réduisent aujourd'hui au professorat. Lors
des dernières inscriptions universitaires, 35 000 candidats se seraient
manifestés dans les trente-deux UFR qui proposent ces formations, leurs
capacités d'accueil ayant été portées de 3 800 à 7 400 places entre 1995 et
1996. Cette demande excessive n'épargne aucune région : 2 000 postulants pour
800 places en Ile-de-France, 800 pour 250 à Aix-Marseille, 1 300 pour 340 à
Rennes, 750 pour 180 à Nice. Afin de répondre à cet afflux, trois nouvelles UFR
ont été habilitées et plusieurs délocalisations ont été décidées.
Il ne peut que s'interroger sur le bien-fondé de la réponse apportée par le
Gouvernement à cet engouement massif et quelque peu irrationnel des bacheliers
pour les filières sportives, compte tenu notamment du coût de leur encadrement,
des infrastructures nécessaires à ces formations et surtout de leurs débouchés
limités.
En conséquence, il exprime la crainte qu'une information des bacheliers ne
soit insuffisante pour enrayer ce mouvement et demande au ministre si un
aménagement de la loi de 1984 sur l'organisation de l'enseignement supérieur ne
serait pas nécessaire pour réduire l'afflux des bacheliers vers les sciences et
techniques des activités physiques et sportives. (N° 442.)
La parole est à M. Gouteyron.
M. Adrien Gouteyron.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis
quelques années, la situation observée à l'entrée à l'université, dans
certaines disciplines, illustre parfois jusqu'à la caricature les difficultés
que rencontre notre système universitaire pour assumer un passage régulier,
raisonné et raisonnable des flux de bacheliers vers l'enseignement
supérieur.
L'afflux de candidats aux études d'histoire ou de médecine qui fut constaté
voilà quelques années se retrouve aujourd'hui dans les unités préparant au DEUG
de sciences et techniques des activités physiques et sportives.
On me dit que, pour cette rentrée, quelque 35 000 candidats se seraient
manifestés dans les trente-deux UFR qui dispensent cette formation. Ce nombre
est beaucoup trop élevé si on le compare en particulier aux possibilités de
débouchés à l'issue de ces formations, qui se réduisent pratiquement aux seules
carrières de l'enseignement. Or, monsieur le ministre, et c'est la raison pour
laquelle j'ai posé cette question, la seule réponse apportée à ce problème a
consisté, d'une part, à augmenter, autant que faire se pouvait, les capacités
d'accueil des UFR qui couvrent ces formations, d'autre part, à habiliter de
nouvelles UFR pour cette filière.
C'est une réponse. Est-ce la bonne, compte tenu des moyens dont nous disposons
? Est-ce la bonne, compte tenu aussi de l'intérêt de ces étudiants, de leur
devenir ?
Tout au long de l'année scolaire qui vient de s'écouler, n'aurait-il pas été
possible de faire en sorte que les futurs bacheliers soient mieux informés sur
ce qui les attendait ? Ne pouvait-on pas prendre des dispositions pour que les
choses se passent un peu mieux ? A la limite, quand se produisent des
phénomènes aussi aberrants que celui-ci, la loi ne mériterait-elle pas quelques
adaptations, fussent-elles limitées, puisqu'il ne s'agit pas de porter atteinte
à son esprit ?
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
Monsieur Gouteyron, nous avons beaucoup parlé ensemble de cette
situation et je suis heureux que vous me donniez l'occasion de faire part à la
Haute Assemblée de quelques réflexions, non pas seulement sur les formations
universitaires d'éducation physique et sportive, mais encore sur un certain
nombre de dysfonctionnements qui doivent être corrigés rapidement.
La filière de l'éducation physique et sportive attire beaucoup d'étudiants et,
pour l'instant, les débouchés ne sont pas ce qu'ils devraient être. Nous
n'offrons en effet que des débouchés dans l'enseignement, ce qui est très peu,
vous avez raison de le souligner. Cette année, 830 places étaient proposées au
concours de professeur d'éducation physique et un certain nombre de candidats
pouvaient espérer également se présenter au concours de professeur des écoles.
L'ensemble représente donc quelques centaines de places, peut-être un peu plus
d'un millier, à comparer aux 5 000 étudiants qui se sont orientés dans cette
voie il y a trois ans, aux 8 000 étudiants inscrits il y a deux ans et aux 11
000 à 12 000 étudiants de cette année ! Nous avons ainsi dû multiplier par
trois en trois ans les places disponibles pour ces formations.
La première réaction de ceux qui ont à gérer les universités est
l'incompréhension : comment se fait-il que tant de jeunes choisissent ces
formations, alors que, vous ne l'avez pas rappelé, mais je me permets de le
faire, nous les avons informés sur ce qui les attendait ? Chaque élève de
terminale a en effet été destinataire d'un dossier complet sur les voies qui
s'offraient à lui, dossier dans lequel nous mettions en garde sur une
éventuelle orientation en éducation physique et sportive. L'incompréhension des
gestionnaires de l'université est donc parfois teintée d'agacement devant la
vanité de ces avertissements.
Avec un peu de recul, on s'aperçoit que la société française tout entière a la
même attirance pour le sport. Quels sont les programmes qui réalisent le taux
d'audience le plus important - supérieur à 50 % - sur toutes les chaînes ?
C'est évidemment le sport ! Quels sont les événements qui font se rencontrer la
nation ? Ce sont les événements sportifs ! Quelles sont les activités qui sont
aujourd'hui valorisées à tous égards dans la vie quotidienne ? Ce sont les
activités physiques et sportives !
Il existe donc une demande sociale pour le sport, dont le nombre
d'inscriptions des étudiants dans les filières d'éducation physique et sportive
n'est qu'une traduction.
Je dis aux étudiants que je rencontre qu'ils n'auront pas de débouché. Mais,
me répondent-ils, en aurons-nous davantage en sociologie et en psychologie,
pour ne prendre que deux exemples sur une très longue liste ? Seulement, vous
considérez, me disent-ils, qu'en sociologie et en psychologie la formation
dispensée peut être utile pour exercer d'autres activités. Permettez,
poursuivent-ils, que nous considérions qu'il en va de même en matière
d'éducation physique. Cette formation pourra nous servir dans d'autres
activités tout au long de notre vie.
Les étudiants n'ont pas tout à fait tort de penser - là, je suis de leur avis
- que de nouveaux métiers d'animation physique et sportive vont apparaître ce
ne serait que logique, dans une société qui a une demande sociale aussi forte
que la nôtre.
Je me rapprocherai de M. le ministre délégué à la jeunesse et aux sports afin
de tenter de codifier ces métiers et d'apporter une formation beaucoup plus
complète.
Voilà pour ce qui est de la réflexion sur l'éducation physique et sportive.
J'en viens maintenant aux procédures d'inscription.
Ce n'est pas la première fois, monsieur Gouteyron, que vous m'entendez dire
que les procédures d'inscription chronologiques sur minitel sont une
aberration. Je ne puis me résoudre à penser qu'en France nous soyons à ce point
démunis, sur le plan administratif, qu'il nous faille consacrer des procédures
qui sont insupportables pour l'esprit et heurtent le bon sens. En effet, selon
que vous vous connectez une seconde plus tôt ou une seconde plus tard, selon
que vous tombez ou non dans un créneau libre sur le serveur vous êtes inscrit
ou non.
J'ai indiqué par toutes les voies possibles que je trouvais cette procédure
insupportable, y compris pour les valeurs universitaires. Cependant, la vérité
m'oblige à dire que, si les universités ont été obligées de l'adopter, c'est
parce que de précédents jugements les y avaient contraintes. Je crois, comme
vous, que nous ne pouvons pas continuer ainsi. En tout cas, je suis déterminé à
mettre un terme à cette procédure.
Ainsi, dès cette année, nous mettrons en place des systèmes nouveaux. Vous le
savez, dans mon esprit, ils sont liés à la réforme de l'université, notamment à
la création de ce semestre initial pendant lequel les étudiants se consacreront
à l'orientation.
C'est cette année que tout va changer.
Certes, un problème immédiat se pose. Nous avons essayé de le résoudre comme
nous le pouvions, en multipliant les places. Ce n'est peut-être pas la
meilleure des solutions, en effet, mais que faire ? Interdire aux étudiants de
tenter leur chance ? Maintenir des procédures absurdes ? Ces deux solutions
étaient, à mes yeux, inacceptables.
Je suis persuadé que nous pourrons trouver des solutions pour le plus grand
nombre d'étudiants et que, l'année prochaine, des systèmes nouveaux seront en
place pour que ces dysfonctionnements ne se pérennisent pas.
M. Adrien Gouteyron.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Gouteyron.
M. Adrien Gouteyron.
Je souhaite remercier M. le ministre de sa réponse. L'analyse quasi
sociologique qu'il a faite pour expliquer cet engouement pour les filières
sportives est, bien entendu, juste, mais l'explication des causes ne justifie
pas le fait.
Monsieur le ministre, vous avez dit que l'information écrite avait été
largement diffusée.
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
Et pour la première fois !
M. Adrien Gouteyron.
C'est vrai, mais ce n'est pas une raison pour s'arrêter là.
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
Bien sûr !
M. Adrien Gouteyron.
Encore faut-il individualiser, personnaliser davantage cette information.
Encore faut-il faire en sorte que les relations entre les universitaires et les
responsables des lycées soient plus étroites.
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
Vous avez tout à fait raison.
M. Adrien Gouteyron.
Il y a encore, à ce niveau-là, j'en suis convaincu, des choses à faire.
Vous avez dit ensuite que tout allait changer - je m'en réjouis - avec la
nouvelle organisation de l'année universitaire. Rendez-vous donc, monsieur le
ministre, l'année prochaine ! Je souhaite en effet que progressivement de
telles situations soient corrigées et que les étudiants ne se fourvoient
pas.
Je souhaite également, tout comme vous, que les formations conduisent à des
débouchés ; ce sera peut-être le cas un jour, mais ce n'est pas vrai
actuellement. Les responsables de collectivités locales que nous sommes le
regrettent, mais savent bien qu'ils ne peuvent pas toujours recruter les
animateurs dont ils auraient besoin.
RENTRÉE À L'UNIVERSITÉ D'ARTOIS
M. le président.
M. Léon Fatous attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale,
de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la rentrée de l'université
d'Artois. Il l'interroge sur la poursuite des efforts en personnel consentis
par le ministère pour rattraper le retard des années précédentes, sur les
subventions financières, qui sont encore largement au-dessous des dotations
théoriques, sur l'absence de crédits d'équipement, qui gêne considérablement la
montée en puissance de l'université, enfin sur le déficit cruel en équipements
sportifs dont souffre l'université. (N° 447.)
La parole est à M. Fatous.
M. Léon Fatous.
Monsieur le ministre, en 1990, M. Lionel Jospin, alors chargé du ministère
dont vous avez la responsabilité aujourd'hui, prenait en considération les
besoins spécifiques et urgents d'un département en pleine crise de reconversion
et dotait le Pas-de-Calais de deux universités de plein exercice, l'une sur le
littoral, l'autre en Artois avec Arras pour siège.
L'investissement important consenti par les collectivités territoriales, et
relayé par l'Etat, a porté ses fruits, comme en témoignent les résultats des
premières promotions d'étudiants.
Ces résultats sont d'autant plus précieux que cette synergie faisait de la
proximité - donc de l'accès aux études supérieures de candidats, jusque-là
financièrement inéligibles - le facteur premier d'une authentique égalité des
chances devant la formation et l'insertion professionnelle.
Après que M. le président de la République a fait du problème de l'emploi des
jeunes l'un des grands thèmes de sa visite dans le Pas-de-Calais, ne
pensez-vous pas, monsieur le ministre, qu'il n'y aurait que des avantages à
conserver à la priorité d'éducation et de formation la pleine réalité de son
potentiel ?
Monsieur le ministre, nous vous en sommes gré, vous avez rattrapé le retard
engendré par M. Fillon, en consentant un effort important en personnel
enseignant et ATOS - administratif, technicien, ouvrier et de service - mais
cet effort sera-t-il poursuivi ?
Par ailleurs, cette bonne intention ne doit pas masquer les autres problèmes
qui se posent aux universités nouvelles.
Par exemple, comment se fait-il que, au titre de 1996, le budget de la
recherche, pour nos universités d'Artois et du Littoral, soit aussi faible par
rapport à celui des autres universités nouvelles ? Ainsi, quand 1 125 000
francs sont dévolus à l'université du Littoral et 1 280 000 francs à celle
d'Artois, l'université de Cergy-Pontoise reçoit plus de 3 millions de francs et
celle de Saint-Quentin-en-Yvelines plus de 7 millions de francs !
Pourquoi l'université d'Artois n'a-t-elle pas reçu de crédits d'équipement, si
nécessaires, tant sa montée en puissance est spectaculaire ? Nous en sommes
aujourd'hui à plus de 10 000 étudiants en quatre années d'exercice seulement
!
Les collectivités locales, notamment le département du Pas-de-Calais, présidé
par mon collègue sénateur Roland Huguet, ont, bien entendu, participé, au côté
de l'Etat, aux constructions nouvelles, mais, aujourd'hui, l'effort demandé
devient insupportable pour le département, qui doit assumer budgétairement le
poids de l'aide sociale, laquelle ne cesse malheureusement de s'accroître.
Notre université d'Artois reflète d'ailleurs parfaitement les difficultés de
nos populations, puisqu'elle compte près de 40 % d'étudiants boursiers, soit le
pourcentage le plus élevé de toute la France.
Enfin, monsieur le ministre, comment et quand comptez-vous combler le déficit
en équipements sportifs universitaires, qui sont inexistants ?
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
Je vous remercie, monsieur le sénateur, d'avoir rappelé les
efforts sans précédent qui sont accomplis cette année en faveur de l'ensemble
des universités françaises.
Quand j'ai pris mes fonctions, j'ai constaté que, sur une longue période, on
avait laissé se creuser de très graves inégalités entre les universités
françaises. Songez que certaines d'entre elles ne disposaient pas même de 50 %
de leur dotation en crédits ou en emplois ! Il m'a semblé qu'il était
impossible de continuer ainsi. Donc, en une seule année, monsieur le sénateur,
la dotation a été portée, pour toutes les universités françaises à au moins 80
% en emplois et presque 90 % en crédits.
Vous me demandez si cet effort sera poursuivi. Oui, il continuera, car j'ai
pris l'engagement d'aller jusqu'au terme du plan de rattrapage et de mise à
niveau de toutes les universités françaises, singulièrement des universités
nouvelles, comme celle d'Artois, à laquelle je rends hommage.
L'université d'Artois s'est vu attribuer, au titre des créations, et pour le
seul budget de 1996, soixante et onze emplois et sa dotation globale de
fonctionnement a augmenté de 10 %. Soixante et une autres créations sont
prévues pour les trois années qui viennent, dont trente-huit postes ATOS pour
cette rentrée. Naturellement, si les effectifs d'étudiants étaient plus
importants que prévu, créations de postes et moyens seraient mis à niveau.
Quant aux équipements sportifs, le programme 1996-1998 en prévoit trois à
Arras, Béthune et Lens, pour un montant de 8 millions de francs - soit au
total, avec les cofinancements, 24 millions de francs. S'y ajoute
l'installation de locaux complémentaires à Lens - Liévain pour les formations
aux sciences et techniques des activités physiques et sportives, pour un
montant de 3 millions de francs.
Reste une dernière question, celle de la recherche. Je suis persuadé que les
nouvelles universités développeront un tissu de recherche aussi performant que
celui des autres universités françaises. Cependant, la recherche ne s'improvise
pas, les équipes de recherche ne se greffent pas mais se développent. Il leur
faut du temps. Mais, pour ma part, je crois à l'avenir des nouvelles
universités comme celle d'Artois.
M. Léon Fatous.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Fatous.
M. Léon Fatous.
Monsieur le ministre, je prends acte de vos déclarations.
Rappelons toutefois que l'université d'Artois a été créée en 1990 : ne
reprochez pas aux gouvernements précédents de ne pas avoir créé de postes !
Je prends acte également de l'annonce de la création prochaine d'équipements
sportifs dans le Pas-de-Calais, et je vous en remercie.
CRÉATION D'UN COMMISSARIAT DE POLICE
À NOYON (OISE)
M. le président.
M. Philippe Marini appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur
l'urgence de la création d'un commissariat de police à Noyon.
Noyon est une ville de 15 000 habitants de l'arrondissement de Compiègne
(Oise), dont 18 % de la population est d'origine immigrée. Elle se trouve
confrontée à d'énormes difficultés en matière de sécurité des personnes et des
biens.
Pour lutter contre la délinquance et les problèmes d'insécurité enregistrés
depuis quelques années, cette cité ne dispose que d'une police municipale non
étatisée de onze personnes et sans officier de police judiciaire, ainsi que
d'une brigade de gendarmerie dont l'effectif ne s'élève qu'à un gendarme pour 1
500 habitants, contre un pour 900 en moyenne en France métropolitaine.
Malgré tous les efforts déployés par la municipalité et son maire en termes de
prévention, force est de constater que certains problèmes subsistent et
s'aggravent, et, en l'absence de moyens accrus, cette ville pourrait connaître,
à terme, les mêmes difficultés et les troubles que rencontrent les grands
ensembles périphériques des grandes agglomérations.
Il est fondamental de pouvoir répondre :
- à une immigration galopante et à ses conséquences, alors que le taux de
population étrangère atteint plus de 36 % dans certains quartiers ;
- à la drogue et à la délinquance, générateurs de prostitution et de
délinquance - ainsi, sur une seule année, 3 000 plaintes ont été déposées, 174
interpellations ont été opérées ; 25 % des affaires judiciaires traitées par le
tribunal de grande instance de Compiègne pour l'arrondissement ont lieu à Noyon
;
- au chômage, un récent rapport de la DATAR considérant cette agglomération
comme « fragile et sinistrée ». L'inactivité forcée d'une partie importante de
la population - près de 15 % - crée des problèmes de mésentente familiale, de
troubles du voisinage, d'alcoolisme, de violence auxquels Noyon ne pourra plus
faire face.
Devant la montée de l'insécurité, on assiste à un développement des ventes
d'armes et certains habitants parlent de création de groupes d'autodéfense.
Dans le cadre de la loi n° 95-73 d'orientation et de programmation relative à
la sécurité du 21 janvier 1995, il est essentiel d'établir à Noyon les missions
et les moyens de la police nationale afin de restaurer le principe républicain
du droit à la sécurité trop souvent bafoué.
En conséquence, il souhaiterait savoir si, conformément au décret
d'application de cette loi, qu'attendent l'ensemble des élus, redéfinissant les
critères de compétence géographique, c'est-à-dire les critères à partir
desquels le Gouvernement peut décider l'étatisation du régime de police dans
une commune, la situation de Noyon sera prise en compte par son ministère et à
quelle échéance. (N° 435.)
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais
tout d'abord souligner qu'il n'est pas dans mes habitudes d'utiliser la
procédure des questions orales sans débat pour aborder des problèmes de
caractère local. Toutefois, deux raisons m'amènent à le faire dans le cas de
Noyon.
D'une part, les nombreuses démarches que j'ai effectuées depuis la fin de 1992
ne m'ont permis d'obtenir que des réponses plus ou moins satisfaisantes des
ministres successifs. D'autre part, la situation de Noyon a, en quelque sorte,
un caractère emblématique : cette ville de 15 000 habitants - c'est la deuxième
commune de l'arrondissement de Compiègne -, dont 18 % sont d'origine immigrée,
se trouve confrontée à des difficultés considérables dans le domaine de la
sécurité.
Sans faire d'amalgame - et bien loin de moi l'idée de faire des amalgames en
la matière - je soulignerai que la ville de Noyon a, hélas ! la triste palme du
record de France des votes en faveur du Front national au premier tour des
élections municipales de 1995 : 44 % des votes au premier tour ! Cela au terme
d'une campagne à mes yeux absolument scandaleuse, au cours de laquelle a
notamment été mis en cause de façon ignoble un conseiller général qui avait été
déporté à Buchenwald pendant un an et à qui on a tenu un langage absolument
invraisemblable que j'aurais peine à répéter dans cette assemblée.
Depuis pourtant près de quatre ans, monsieur le ministre, je tire la sonnette
d'alarme et je mets en garde aussi bien les ministres de l'intérieur que les
ministres de la défense ! J'ai, par exemple, sous les yeux une lettre que
j'adressais au ministre de la défense en juin 1994 pour l'informer qu'aux
élections européennes qui venaient d'avoir lieu cette formation extrémiste
avait obtenu 24 % des voix. Eh bien, un an après, elle en obtenait 44 %.
Pourquoi une telle augmentation ? Parce que des problèmes d'intégration se
combinent avec un sous-effectif criant en matière de sécurité. On compte en
effet un gendarme pour 1 500 habitants, alors que la moyenne en France
métropolitaine est de un pour 900 et qu'elle est dans l'Oise de un pour 1
000.
La municipalité fait ce qu'elle peut avec onze policiers municipaux, dont on
connaît le peu de pouvoirs, et cela sur fond de drogue et de délinquance.
Ainsi, 3 000 plaintes ont été déposées en une seule année dans cette petite
ville de 15 000 habitants ; 174 interpellations ont été effectuées et 25 % des
affaires judiciaires traitées par le tribunal de grande instance de Compiègne
concernaient Noyon.
Je souligne, par ailleurs, que des diagnostics préoccupants sont portés sur
cette agglomération, qualifiée de « fragile » et de « sinistrée » dans un
récent rapport de la DATAR.
Je me permets donc, monsieur le ministre, d'appeler de façon solennelle votre
attention. Depuis près de quatre ans, je reçois des réponses administratives.
Le ministre de l'intérieur me renvoie au ministre de la défense, qui me renvoie
au ministre de l'intérieur. On m'explique que tels ou tels critères doivent
être respectés. Je veux bien ! Je suis moi-même issu de la fonction publique.
Je crois cependant que, dans certains cas, nécessité devrait faire loi.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Je voudrais d'abord demander à M. Marini d'excuser
l'absence de M. Jean-Louis Debré, qui m'a demandé de répondre en son nom.
Dans votre question, monsieur Mmarini, il y a au fond deux éléments : d'une
part, quel doit être le statut de Noyon en termes de police et, d'autre part,
quelle doit être la capacité des services pour faire face à la montée de la
délinquance dans cette commune.
S'agissant de la première question, le passage d'un système de gendarmerie à
un système de police d'Etat ne paraît pas possible aujourd'hui au vu des
textes, qui, vous le savez, ont été modifiés depuis l'adoption de la loi
d'orientation sur la sécurité ; un décret est intervenu au mois de septembre
dernier.
Il semble que la ville de Noyon ne réponde pas aux critères qui, quasiment
automatiquement, la ferait passer au système de police dit d'Etat, avec
installation d'un commissariat de police et donc retrait de la gendarmerie.
D'ailleurs, comme le rappelle le ministère de l'intérieur dans la note qu'il
m'a transmise, un tel changement aurait sans doute des conséquences
relativement importantes en termes de coût. Par conséquent, la réponse qu'il
m'a chargé de vous apporter est que l'on conserve la gendarmerie.
J'en viens à la question qui vous intéresse le plus : quel doit être le niveau
de la riposte pour résoudre les difficultés croissantes de la commune ? C'est
le problème des effectifs et de la capacité d'organisation des services de
gendarmerie.
Ce à quoi je peux m'engager, après vous avoir entendu, monsieur Marini, c'est
à prendre contact avec MM. Millon et Debré pour leur faire part de votre vive
inquiétude. Ils pourront ainsi déterminer ensemble quel est le niveau pertinent
des forces de police ou de gendarmerie - en l'occurrence, plutôt de gendarmerie
- à mettre en place pour ramener la sérénité à Noyon.
En tout état de cause, et malgré les caractéristiques sociales et économiques
complexes de cette commune, que vous avez rappelées, il me semble qu'à son
échelle il devrait être possible de revenir à un taux de délinquance plus
raisonnable. Ce devrait tout de même être plus facile que dans les très grandes
agglomérations, où les gens ne se connaissent pas et n'entretiennent pas de
contacts directs avec les services administratifs.
M. Philippe Marini.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini.
Monsieur le ministre, votre réponse ne me surprend pas.
La formule administrative - étatisation, pas d'étatisation, gendarmerie,
police... - importe peu. L'important, c'est que nous luttions, car l'Etat
républicain ne peut rester désarmé alors que nous sommes confrontés à des
situations où il est en péril.
En effet, il y a sur notre territoire des abcès de fixation. On les traite, à
mon avis, plutôt correctement, notamment par la mise en oeuvre du pacte de
relance pour la ville, qui permettra, dans un certain nombre de lieux bien
identifiés, d'accroître considérablement les efforts. Mais nous ne pourrons
défendre les valeurs auxquelles nous sommes attachés qu'en réduisant
systématiquement ces abcès de fixation.
L'objet de cette question orale est de montrer que les banlieues ne sont pas
les seules à être concernées. Certaines petites villes, certaines petites
agglomérations connaissent aussi de très graves tensions sociales, qui sont
exploitées de façon scandaleuse par certains extrémistes. Il appartient à
l'Etat de se défendre, monsieur le ministre.
GESTION DU PERSONNEL MUNICIPAL
M. le président.
M. Joseph Ostermann attire l'attention de M. le ministre de la fonction
publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation sur la nécessaire
simplification de la gestion des carrières du personnel municipal. Cette
gestion relève aujourd'hui quasi principalement du statut de la fonction
publique territoriale. Celle-ci a été englobée dans la réforme générale du
droit de la fonction publique gérée en 1983-1987 sans, malgré tout, avoir été
complètement adaptée aux besoins réels des collectivités locales. Les
inconvénients ne manquent pas en termes de rigidité du cadre d'emplois ou
encore de mobilité des agents. En outre, les responsables des collectivités
locales se sentent bridés dans la gestion de leurs ressources humaines et ce
spécialement au niveau communal. La détérioration des conditions matérielles
des agents de la fonction publique territoriale, par rapport aux salariés du
secteur semi-public ou des associations contrôlées par les collectivités
locales, conduit à un malaise.
Il lui demande comment rendre la gestion du personnel municipal plus simple,
plus dynamique et plus attractive tout en maintenant l'unité avec l'Etat et le
même idéal du service public. Il lui demande aussi comment permettre au maire,
qui, de plus en plus, doit réagir en chef d'entreprise, d'assumer réellement
ses responsabilités alors que la carrière du personnel est gérée en dehors de
son domaine de compétences. (N° 443.)
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann.
Monsieur le ministre, je reconnais bien volontiers que le problème que je
soulève est assez complexe. J'irai même plus loin en affirmant que l'on entre
là dans l'un des nombreux domaines de l'action publique où des mesures de
simplification seraient bienvenues, où elles sont même indispensables.
Le maire et les élus municipaux sont de plus en plus appelés à gérer leur
collectivité en chef d'entreprise. Or, le personnel est et restera le poumon de
toute entreprise. C'est pourquoi je veux évoquer la philosophie qui sous-entend
le système de gestion du personnel municipal.
Ne serait-il pas possible de davantage prendre en compte dans ce système le
mérite et de favoriser l'avancement au mérite ? Je prends l'exemple d'un jeune
technicien territorial qui, grâce à sa formation professionnelle et grâce à une
pratique quotidienne au sein d'une équipe compétente et dynamique, a acquis,
dans une activité donnée, une expérience qui devrait au moins lui permettre de
diriger une équipe. Cette expérience pourrait être décisive pour sa carrière
mais aussi pour le service public communal. Or sa formation de base ne lui a
pas permis d'acquérir un diplôme suffisamment élevé qui lui permettrait
d'évoluer rapidement d'échelon en échelon. Il sera obligé d'attendre sa
progression à l'ancienneté.
Je considère que l'avancement à l'ancienneté « bloque » les plus doués et même
les démotive. C'est justement l'inverse que l'on devrait faire ! Il est donc
impératif d'adapter la fonction publique territoriale aux besoins de nos
collectivités territoriales, notamment en l'assouplissant.
Il faut donner aux petites communes et aux communes de taille moyenne, qui ne
peuvent pas recourir à la filière de gestion des ressources humaines du fait de
son coût, les moyens de faire avancer le personnel au mérite. Cela suppose une
gestion moins rigide des postes, une certaine forme de liberté salariale afin
d'autoriser la comparaison avec les salaires du secteur semi-public ou des
associations travaillant pour les collectivités locales.
Bref, il faut donner aux élus plus de liberté dans la gestion de leurs
ressources humaines et atténuer, au moins partiellement, les contraintes qui
leur sont imposées et que relayent les centres de gestion. A l'aube du XXIe
siècle, il est temps de moderniser le service public communal.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Monsieur le sénateur, votre question est très vaste en
vérité.
La fonction publique territoriale a été dotée progressivement d'un statut en
deux étapes importantes : 1986-1987 et la loi de 1994.
En 1986-1987, le principe a été établi d'un système de parité entre les
régimes de la fonction publique de l'Etat et la fonction publique territoriale.
Ce choix a rassemblée à l'époque une très large majorité au Parlement et il
semblait recueillir l'accord de l'ensemble des partenaires sociaux. On peut
peut-être le regretter aujourd'hui - personnellement, je ne le regrette pas -
mais il est évident que ce système de parité implique certaines contraintes
pour la fonction publique territoriale dans la mesure où celle-ci doit rester
dans une situation de compatibilité avec les règles de la fonction publique de
l'Etat.
En 1994, mon prédécesseur, M. Daniel Hoeffel, que vous connaissez bien a fait
adopter un projet de loi qui a permis certaines adaptations et certains
assouplissements. A ce texte se sont ajoutés des décrets d'application visant à
moderniser l'ensemble des corps de la fonction publique territoriale.
Ce qui est exact, monsieur Ostermann, c'est que, en quelques années, tout a
changé, et que les services du personnel des collectivités territoriales ont
été amenés à faire, en peu de temps, un travail considérable de reconstitution
de carrières et de modification des positions des personnels. Pour les petites
communes ou les communes moyennes, ce travail a effectivement été très lourd.
Il a parfois entraîné des erreurs, car les textes sont complexes.
Nous avons pratiquement terminé. Seules une ou deux filières très marginales
restent à organiser. Mon intention est de faire une pause statutaire, pour que
les gestionnaires du personnel ne voient pas les réformes se succéder, avec
l'instabilité qui en résulte. Cette situation de stabilité facilitera la tâche
de ces gestionnaires.
Vous avez également évoqué le problème de la souplesse : comment faire en
sorte que les personnels qui donnent entière satisfaction aient quelque retour
? Cette question va bien au-delà de la fonction publique territoriale et
concerne l'ensemble des fonctionnaires. C'est un des sujets sur lesquels, à
travers la réforme de l'Etat, je souhaite effectivement faire quelques progrès,
afin que nous puissions notamment proposer au personnel des systèmes de
notation et d'évaluation qui soient un peu plus sérieux qu'aujourd'hui.
Le système de notation, chacun le sait bien, est actuellement une sorte de
formalité sans aucune signification véritable. Il n'est pas procédé à une
véritable évaluation de la manière de servir des fonctionnaires tant de l'Etat
que de la fonction publique territoriale. En conséquence, la gestion de leur
carrière n'est pas suffisamment liée à leur manière de servir, et donc à la
reconnaissance qui leur est due, compte tenu du travail accompli.
Nous réfléchissons à ce dossier. J'ai même engagé des négociations avec les
organisations syndicales sur ce sujet afin d'améliorer le système. Il ressort
des études d'opinion auxquelles j'ai fait procéder que les fonctionnaires, dans
leur grande majorité, souhaitent une réforme de la notation et du système
d'évaluation afin d'être jugés en fonction du travail accompli et de la qualité
de celui-ci. Je pense que nous devrons nous engager dans cette voie. Peut-être
faudra-t-il dépasser certains blocages ou certaines habitudes. Pour ma part,
j'y suis tout à fait décidé.
Le dernier point que j'aborderai est un peu plus technique. Les modifications
législatives introduites par M. Hoeffel permettent, en matière d'organisation
des concours et de la formation, une décentralisation beaucoup plus large
qu'auparavant. Le renforcement du rôle des centres de gestion dans chaque
département tend, notamment, à redonner aux élus la gestion de l'ensemble du
dispositif de recrutement et de formation, ce qui va dans le sens que vous
souhaitez, monsieur le sénateur.
M. Joseph Ostermann.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse et d'avoir précisé que
vous alliez vous engager dans ce vaste chantier, qui est important.
Au moment où nous cherchons tous et toutes à valoriser le travail manuel, le
mérite devient un élément essentiel. Il est pris en compte dans le secteur
privé. Il faut qu'il le soit dans le secteur public. Nous vous apporterons
notre soutien.
BÉNÉFICE DU FONDS DE COMPENSATION POUR LA TVA
POUR LES COMMUNAUTÉS DE COMMUNES
M. le président.
M. Marcel Lesbros attire l'attention de M. le ministre délégué au budget sur
les conséquences néfastes de l'application de la circulaire interministérielle
du 15 octobre 1993 relative au FCTVA des communautés de villes et de
communes.
Il s'étonne des coups portés aux collectivités rurales les plus modestes qui,
dans la logique de la loi d'orientation n° 92-125 relative à l'administration
territoriale de la République du 6 février 1992 et de celle des pays prévue par
la loi relative à l'aménagement et au développement du territoire du 4 février
1995, s'étaient engagées pleinement dans la coopération intercommunale.
Il rappelle en effet, que le Fonds de compensation pour la TVA permet aux
bénéficiaires de récupérer la TVA versée par eux sur les dépenses réelles
d'investissement. Il bénéficie aux groupements de communes, avec ou sans
fiscalité propre, mais pose parfois certaines difficultés d'application,
notamment lorsque les groupements sont amenés à intervenir pour le compte de
leurs communes membres à travers des opérations de mandat.
Il regrette fortement qu'à compter de cette année ni un syndicat intercommunal
qui réalise les travaux de voirie pour le compte de communes adhérentes, ni une
communauté de communes qui prend en charge dans son budget les dépenses de
voirie des communes qui lui ont délégué la compétence dans ce domaine ne
peuvent bénéficier du FCTVA. Seule la commune dont les travaux entrent dans son
patrimoine sera bénéficiaire de ce concours financier versé dans les deux ans
qui suivent la réalisation, au lieu de un an jusqu'alors dans le cadre des
structures intercommunales.
Il s'insurge contre cette disposition qui altère gravement l'incitation et la
capacité aux actions intercommunales des communes.
Il lui demande de corriger cet état de fait et de lui exposer les dispositions
que le Gouvernement pense proposer pour accompagner de nouveau les communes sur
le chemin de la coopération intercommunale dans des conditions budgétaires
locales satisfaisantes. (N° 431.)
La parole est à M. Lesbros.
M. Marcel Lesbros.
Je me permets d'attirer l'attention de M. le ministre délégué au budget sur
les conséquences néfastes de l'application de la circulaire interministérielle
du 15 octobre 1993 relative au Fonds de compensation pour la TVA, le FCTVA, des
communautés de villes et de communes.
Je m'étonne des coups portés aux collectivités rurales les plus modestes qui,
dans la logique de la loi d'orientation du 6 février 1992 et de la loi relative
à l'aménagement et du développement du territoire du 4 février 1995, s'étaient
engagées pleinement dans la coopération intercommunale.
Je rappelle en effet que le Fonds de compensation pour la TVA permet aux
bénéficiaires de récupérer la TVA versée par eux sur les dépenses réelles
d'investissement immédiatement après la réalisation des travaux. Il bénéficie
aux groupements de communes avec ou sans fiscalité propre mais pose parfois
certaines difficultés d'application, notamment lorsque les groupements sont
amenés à intervenir pour le compte de leurs communes membres à travers des
opérations de mandat.
Je regrette fortement qu'à compter de cette année ni un syndicat intercommunal
qui réalise les travaux de voirie pour le compte de communes adhérentes, ni une
communauté de communes qui prend en charge dans son budget les dépenses de
voirie des communes qui lui ont délégué la compétence dans ce domaine ne
peuvent bénéficier du FCTVA. Seule la commune dont les travaux entrent dans son
patrimoine sera bénéficiaire de ce concours financier versé dans les deux ans
qui suivent la réalisation, au lieu de un an jusqu'alors dans le cadre des
structures intercommunales.
Je m'insurge contre cette disposition qui altère gravement l'incitation et la
capacité aux actions intercommunales des communes.
Je vous demande, monsieur le ministre, de corriger cet état de fait et
d'exposer les dispositions que le Gouvernement compte proposer pour accompagner
de nouveau les communes sur le chemin de la coopération intercommunale dans des
conditions budgétaires locales satisfaisantes.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Yves Galland,
ministre délégué aux finances et au commerce extérieur.
Monsieur le
président, monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence
de M. Lamassoure, qui, pour des raisons que vous devinez aisément dans cette
période budgétaire dense, est retenu par d'autres obligations. C'est avec
plaisir que je répondrai au problème que vous soulevez et qui a été au coeur de
mes préoccupations gouvernementales entre 1986 et 1988, en tant que ministre
chargé des collectivités locales.
Tout d'abord, je rappellerai la situation actuelle, puis je répondrai à la
question relative à la problématique d'avenir, que vous posez à juste titre.
Afin de favoriser le regroupement intercommunal, la loi du 6 février 1992 a
prévu que les communautés de communes et les communautés de villes bénéficient
du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée, le FCTVA, l'année
même de la réalisation de la dépense.
Cette disposition s'ajoute aux règles de versements des attributions du FCTVA
définies à l'article 42 de la loi de finances rectificative de 1988 modifiée et
par le décret du 6 juin 1989 modifié, qui prévoient que les collectivités
locales ne peuvent bénéficier du FCTVA qu'au titre des dépenses réelles
d'investissement qu'elles réalisent pour leur propre compte et afin d'accroître
leur patrimoine.
S'agissant de la voirie, même si une commaunauté de communes s'est vu
transférer la compétence dans ce domaine, elle ne peut devenir propriétaire des
voies.
En effet, en vertu de l'avis du 22 juillet 1975 formulé par le Conseil d'Etat,
le transfert de la compétence voirie n'entraîne pas le transfert de la
propriété des équipements. Il faudrait en effet que les communes déclassent au
préalable la voirie de leur domaine public communal avant de s'en dessaisir. Le
groupement qui recevrait le bien transféré devrait alors l'inscrire dans son
propre domaine public : or il ne peut l'intégrer dans aucune catégorie de
voirie routière existante. Tel est le vide juridique dans lequel nous nous
situons.
Dès lors, les travaux réalisés par les groupements de communes qui se sont vu
déléguer la compétence en matière de création, d'aménagement ou d'entretien de
la voirie doivent être comptabilisés au compte 237 « Travaux pour compte de
tiers » et être transférés aux communes bénéficiaires pour la partie du tracé
qui se trouve sur leur territoire. Ces dernières bénéficient alors des
attributions du FCTVA dans les deux ans qui suivent la réalisation des
travaux.
En l'état actuel de la législation, les remboursements de FCTVA ne peuvent
être attribués aux communautés de communes. Cependant, pour tenir compte du
souhait que vous avez émis, il pourrait être envisagé, dans le cadre du
prochain projet de loi relatif à l'intercommunalité, d'étendre aux communautés
de communes les règles de propriété de la voirie propres aux communautés
urbaines et aux communautés de villes et de permettre ainsi le versement du
FCTVA aux communautés de communes.
M. Marcel Lesbros.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Lesbros.
M. Marcel Lesbros.
Je tiens à remercier tout particulièrement M. le ministre de ses explications
et d'avoir bien voulu faire le point sur ce problème.
La question que je pose se rattache à la philosophie et à l'esprit qui
président actuellement aux communautés de communes. Je souhaite simplement que
le Gouvernement examine cette question et qu'il nous donne, à nous maires,
conseillers généraux, présidents de communauté, des instructions claires. En
effet, après nous avoir incités à la coopération intercommunale, l'Etat doit
maintenant tenir ses engagements.
AVENIR DES ÉLÈVES
DE L'ÉCOLE NATIONALE DES CHARTES
M. le président.
M. Alfred Foy attire l'attention de M. le Premier ministre sur l'avenir des
élèves de l'Ecole nationale des chartes, ENC.
Depuis cent soixante-quinze ans, l'ENC a pour mission de recruter et de former
les futurs conservateurs d'archives et de bibliothèques. Elle est complétée en
cela depuis 1991 par les deux écoles d'application que sont l'Ecole nationale
du patrimoine - ENP - et l'Ecole nationale supérieure des sciences de
l'information et des bibliothèques - ENSSIB -, l'une dépendant du ministère de
la culture, l'autre du ministère de l'éducation nationale.
Or, déjà en novembre 1995, le nombre de postes ouverts aux concours de ces
deux écoles d'application fut de trente et un pour trente-sept chartistes. Six
fonctionnaires stagiaires ne peuvent donc aujourd'hui exercer leurs fonctions,
malgré d'éminentes qualités que chacun s'accorde à leur reconnaître, et ce par
le seul fait d'une situation dont ils sont maintenant les premières victimes.
Par ailleurs, qui peut affirmer avec certitude que le patrimoine de notre pays
n'en sera pas demain la seconde victime ?
De plus, cette année, les craintes sont encore plus fortes en raison du nombre
élevé de chartistes - entre quarante-six et cinquante-sept - qui présenteront
en novembre 1996 ces mêmes concours. En effet, certaines prévisions font état
de dix-neuf postes à l'ENSSIB et de quatre seulement à l'ENP ; c'est donc plus
de la moitié de la promotion sortante de l'ENC qui est menacée.
Or, il n'est ni souhaitable ni normal que des fonctionnaires stagiaires,
recrutés par un concours ardu, formés et payés par l'Etat pour faire d'eux les
conservateurs du patrimoine national, se voient contraints de renoncer à cette
mission pourtant indispensable.
Par conséquent, il souhaiterait connaître ses intentions sur ce sujet, et plus
particulièrement savoir quelles mesures il compte prendre, d'une part, pour
régler la situation des élèves actuels de l'Ecole nationale des chartes et,
d'autre part, pour éviter qu'à l'avenir de tels problèmes ne se reproduisent.
(N° 437.)
La parole est à M. Foy.
M. Alfred Foy.
Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, ma question
porte sur l'avenir des élèves de l'Ecole nationale des chartes.
Depuis cent soixante-quinze ans, l'ENC a pour mission de recruter et de former
les futurs conservateurs d'archives et de bibliothèques. Elle est complétée en
cela depuis 1991 par les deux écoles d'application que sont l'Ecole nationale
du patrimoine - ENP - et l'Ecole nationale supérieure des sciences de
l'information et des bibliothèques - ENSSIB -, l'une dépendant du ministère de
la culture, l'autre du ministère de l'éducation nationale.
Or, déjà en novembre 1995, le nombre de postes ouverts aux concours de ces
deux écoles d'application fut de trente et un pour trente-sept chartistes. Six
fonctionnaires stagiaires ne peuvent donc aujourd'hui exercer leurs fonctions,
malgré d'éminentes qualités que chacun s'accorde à leur reconnaître, et ce par
le seul fait d'une situation dont ils sont maintenant les premières victimes.
Par ailleurs, qui peut affirmer avec certitude que le patrimoine de notre pays
n'en sera pas demain la seconde victime ?
De plus, cette année, les craintes sont encore plus fortes, en raison du
nombre élevé de chartistes - quarante probablement - qui présenteront en
novembre 1996 ces mêmes concours. En effet, les dernières prévisions font état
de dix-neuf postes à l'ENSSIB et de cinq seulement en filière « archives » à
l'ENP ; c'est donc près de la moitié de la promotion sortante de l'Ecole
nationale des chartes qui est menacée.
Or, il n'est ni souhaitable ni normal que des fonctionnaires stagiaires
recrutés par un concours ardu, formés et payés par l'Etat pour devenir les
conservateurs du patrimoine national se voient contraints de renoncer à cette
mission pourtant indispensable.
Hier lundi, les élèves de l'Ecole nationale des chartes, soutenus par ceux de
l'Ecole nationale du patrimoine, ont fait grève et sont même venus manifester
sous les fenêtres du ministère de la culture, afin d'attirer l'attention du
Gouvernement sur les grandes incertitudes qui pèsent sur leur avenir.
Par conséquent, je vous serais reconnaissant, monsieur le ministre, de bien
vouloir me faire part de vos intentions sur ce sujet, et plus particulièrement
des mesures que vous comptez prendre, d'une part, pour régler la situation des
élèves actuels de l'Ecole nationale des chartes et, d'autre part, pour éviter
que, à l'avenir, de tels problèmes ne se reproduisent.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
La qualité scientifique et professionnelle des
jeunes filles et des jeunes gens qui, après une sélection rigoureuse, suivent
la scolarité de l'Ecole nationale des chartes est connue de tous, et vous avez
eu raison, monsieur le sénateur, de la souligner. C'est en effet parmi eux - il
faut le souligner avec force - que se recrutent, pour la quasi-totalité, les
conservateurs d'archives et, pour une large part, les conservateurs de
bibliothèques.
La croissance constatée dans les effectifs de ces corps, notamment en raison
de la création de la Bibliothèque nationale de France, avait permis d'envisager
des recrutements importants, qui furent à la source de l'accroissement, pendant
quelques années, du nombre d'élèves admis à suivre les enseignements dispensés
à l'Ecole nationale des chartes, et rémunérés pendant leur scolarité.
Or, monsieur le sénateur, la situation budgétaire, d'une exceptionnelle
gravité, à laquelle a dû faire face cette année le Gouvernement a imposé un
effort de rigueur dont n'a été exempté aucun département ministériel, pas plus
le ministère de la culture que les autres.
De ce fait, cinq postes seulement ont pu être ouverts pour le concours externe
d'entrée à l'Ecole nationale du patrimoine réservé, pour la spécialité «
archives », aux élèves sortant de l'Ecole nationale des chartes.
Il n'est pourtant pas question de se priver de compétences aussi spécialisées
que celles qu'ont pu acquérir les élèves sortant de l'Ecole nationale des
chartes. Si ceux-ci n'ont pas de droits acquis à être recrutés dans les corps
de fonctionnaires de l'Etat, il est évident que l'Etat et les collectivités
publiques se doivent de leur faciliter l'accès à la fonction publique.
Je me félicite, à cet égard, de constater que le ministre chargé de
l'enseignement supérieur ait pu, conformément à une demande ancienne de mon
département ministériel, augmenter sensiblement la proportion de postes
réservés, à l'entrée du concours de conservateurs de bibliothèques, aux élèves
issus de l'Ecole nationale des chartes. Le ministère de la culture est, en
effet, essentiellement dans les départements spécialisés de la Bibliothèque
nationale de France, le premier employeur de ces chartistes dont il apprécie la
rigueur scientifique comme la compétence intellectuelle et professionnelle.
Mais on doit aussi se réjouir de constater l'effort de diversification réalisé
par l'Ecole nationale des chartes, avec l'appui des ministères intéressés. En
témoigne le taux élevé de réussite aux concours d'agrégation d'élèves sortant
de cette école.
Des capacités d'emploi existent également auprès des collectivités locales,
qu'il convient d'inciter à faire davantage appel aux capacités scientifiques
des chartistes, notamment lorsqu'elles possèdent des fonds d'archives
conséquents et précieux.
Je me suis battu - je viens d'ailleurs d'obtenir satisfaction de la part du
Premier ministre - pour que la liste des fonctions susceptibles d'être
occupées, au sein des collectivités locales, par des conservateurs du
patrimoine de la spécialité « archives » soit sensiblement allongée et soit
surtout adaptée à la réalité des demandes des élus. Cette liste, qui sera
bientôt publiée, comptera vingt-deux postes dans cette spécialité.
J'espère vivement que villes et départements sauront, demain, apprécier les
qualités des élèves sortant de l'Ecole des chartes, comme l'Etat le fait depuis
plus d'un siècle et demi.
M. Alfred Foy.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Foy.
M. Alfred Foy.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Je souhaite que, dans
un avenir quelque peu meilleur, ces gens de haut niveau, extrêmement
spécialisés, puissent enfin obtenir satisfaction. Je sais que nous pouvons
compter sur vous et sur le Gouvernement tout entier.
PRIVATISATION
DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PRODUCTION (SFP)
M. le président.
Mme Hélène Luc tient à attirer l'attention de M. le Premier ministre sur le
risque grave de démantèlement d'un outil essentiel à la production
audiovisuelle qu'entraînerait, s'il était mené à son terme, le projet de
privatisation de la SFP. Les tractations engagées jusqu'à présent mettent en
évidence que le rachat de la SFP ne consiste qu'en une opération financière, au
seul bénéfice de repreneurs privés, auquel s'ajouterait l'engagement par l'Etat
de 1,2 milliard de fonds publics dont 670 millions pour financer la suppression
de 700 emplois très qualifiés. L'indignation devant de tels procédés est grande
chez les salariés, les représentants de la communauté de l'audiovisuel et les
élus, et, bien au-delà, parmi la population.
C'est pourquoi elle lui demande de renoncer à toute perspective de
privatisation en commençant par décider, comme l'a demandé la majorité du
conseil général du Val-de-Marne, un moratoire du processus de privatisation.
Elle lui demande également de créer toutes les conditions pour que la SFP
demeure une entreprise publique de production apte à jouer tout son rôle dans
la création audiovisuelle de notre pays, au moment où s'affirme un besoin accru
de production d'image aussi bien de la part des diffuseurs que des
téléspectateurs. (N° 445.)
La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre présence.
La Société française de production, la SFP, est un formidable potentiel humain
et matériel : des équipements uniques au monde se conjuguent avec le
savoir-faire et le génie artisan de femmes et d'hommes pour faire de cette
entreprise « l'usine à rêves » qui a tant apporté à notre culture et à notre
imaginaire.
Or, depuis nombre d'années, l'Etat s'acharne contre cet outil prodigieux en
créant les conditions de son asphyxie et de son démantèlement : non-respect des
engagements de l'audiovisuel public, délocalisations, plans de restructuration
à répétition, gâchis financiers en tous genres, la liste des mauvais coups n'en
finit pas !
Aujourd'hui, le Gouvernement vient précipiter le bradage de la SFP dans des
conditions scandaleuses d'opacité, de favoritisme envers des repreneurs, qu'il
connaît d'ailleurs bien. Ces repreneurs sont guidés par la seule ambition de la
bonne opération financière et n'ont que faire du rayonnement culturel de la
France. A 50 millions de francs, le prix de reprise équivaut à peine à celui de
deux cars régie ; or, il y en a dix à la SFP, le tout étant offert avec une
prime d'environ un milliard de francs, voire plus, de fonds publics pour
financer des suppressions de centaines d'emplois. C'est totalement scandaleux
!
Les salariés de la SFP, dont une délégation est présente dans les tribunes
avec une délégation de réalisateurs, ont déjà déjoué plusieurs manoeuvres. Avec
mes amis Jack Ralite et Claude Billard, je suis à leurs côtés depuis le coup de
force du Gouvernement qui, dans un texte fourre-tout, a ajouté la SFP à la
liste des entreprises privatisables de 1993. La solidarité avec la SFP se
développe dans la communauté pluraliste de l'audiovisuel, des artistes et bien
au-delà.
Aujourd'hui, avec eux tous, avec le président du conseil général du
Val-de-Marne et sa majorité qui sont à leurs côtés, je vous demande, monsieur
le ministre, d'arrêter cette machine folle en prenant une mesure d'urgence : la
suspension du processus de privatisation inacceptable et l'étude sérieuse d'une
solution maintenant les emplois et le savoir-faire de la SFP dans le service
public de l'audiovisuel. Aucune loi n'empêche l'Etat ou le service public
d'être repreneur de la SFP. Ce serait une mesure de bonne gestion des deniers
publics et d'économie, car cela reviendrait moins cher.
Ma question est donc courte et précise : qu'en pensez-vous, monsieur le
ministre de la culture ?
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
Madame Luc, je voudrais vous répondre aussi
directement que vous m'avez posé la question.
Le commissaire européen, M. Van Miert, m'a bien expliqué que, après avoir vu
trois ou quatre de mes précdécesseurs, il n'accepterait pas un seul instant de
plus que la France joue un double jeu et demande encore à Bruxelles un délai de
quelques semaines dans l'attente de la privatisation. M. Van Miert nous a donc
mis devant l'alternative suivante : ou choisir un repreneur pour la SFP, ou
liquider l'entreprise.
Mme Hélène Luc.
Non, il existe une autre solution !
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
Or je sais, madame le sénateur, que, aujourd'hui,
des centaines de personnes, dont de grands professionnels - vous l'avez rappelé
à juste titre - travaillent à la SFP, et que des familles en vivent. Une grande
compétence est reconnue à la SFP, et j'ai donc envie de sauver cette
dernière.
Après que le Parlement se fut prononcé, au printemps dernier, sur le principe
du transfert de la SFP du secteur public au secteur privé, le Gouvernement a
décidé par décret en date du 16 juillet dernier d'engager le processus de
privatisation de cette entreprise.
M. Schmeltz, conseiller d'Etat, a été désigné comme personnalité indépendante
chargée de veiller au bon déroulement de la procédure et, surtout, au strict
respect des principes de transparence et d'équité de traitement des candidats,
s'agissant en particulier de l'accès aux informations sur l'entreprise et des
délais de remise des offres.
L'appel d'offres ouvert depuis maintenant trois mois a fait l'objet d'une très
large publicité. Le Gouvernement a reçu une offre ferme dès le 5 août. D'autres
candidats se sont manifestés plus récemment. Le Gouvernement dispose de trois
offres qui sont actuellement examinées.
Le Gouvernement a transmis ces offres à la commission de la privatisation, à
la Commission européenne ainsi qu'au président de la SFP, qui a pris
l'initiative de les transmettre au comité d'entreprise et d'engager sa
consultation afin de recueillir son avis.
Le Gouvernement fera très prochainement une recommandation à la commission de
privatisation sur l'offre qui lui paraît préférable.
Les délais de procédure de privatisation devraient permettre au comité
d'entreprise de se prononcer sur les offres reçues avant la décision finale de
privatisation qui sera prise sur avis conforme de la commission de la
privatisation et, comme vous le savez, madame le sénateur, après décision de la
Commission de Bruxelles.
Il est à mon avis très important de recueillir l'avis du comité d'entreprise
pour ne pas lui donner le sentiment d'être mis devant le fait accompli, ce qui
n'est pas du tout le cas.
Le Gouvernement rappelle que, à travers le processus engagé, il s'attachera à
vérifier que ces offres apportent des garanties précises sur le contenu du
projet industriel, sur le maintien de l'identité et des compétences de la SFP,
propres à assurer sa pérennité et son développement, ainsi que sur les aspects
sociaux. La privatisation de la SFP ne signifie pas pour cette dernière un rôle
moins actif dans la création et la production audiovisuelle ; au contraire,
elle peut lui permettre de trouver un nouvel élan autour d'un projet industriel
cohérent et ambitieux. Je compte beaucoup sur cela pour que la SFP continue à
participer au rayonnement culturel de ce pays.
Mme Hélène Luc.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc.
Monsieur le ministre, vous réaffirmez le caractère inacceptable de cette
privatisation, mais les garanties que vous évoquez ne me rassurent pas du tout
! Je vous prends au mot : dites à M. Van Miert qu'il existe un repreneur
public, puisque vous savez que des propositions existent.
Avec les salariés de la SFP, nous serons extrêmement vigilants sur la suite
des événements ; nous ne laisserons pas faire n'importe quoi, n'importe
comment.
Les députés européens ont adopté à une écrasante majorité - vous le savez, je
suppose - un rapport soulignant que « la télévision de service public
représente la pierre angulaire d'une société vivante, interactive et
démocratique ». D'ailleurs, Bruxelles demande non pas la privatisation, mais la
restructuration, qui coûterait moins cher à la France.
Vous ne respectez donc pas vos propres déclarations, dans lesquelles, monsieur
le ministre, vous citiez par exemple la BBC, qui comprend précisément un pôle
public intégré de production. On peut se demander ce que valent tous vos nobles
propos sur la culture si, dans le même temps, les décisions prises ont pour
effet de casser les moteurs et les instruments de celle-ci. Il est bien
évident, monsieur le ministre, que nous continuerons le combat !
REPRÉSENTATION DES RETRAITÉS AU CONSEIL
D'ADMINISTRATION DES CAISSES DE RETRAITE
M. le président.
M. Jean-Jacques Robert attire l'attention de M. le ministre du travail et des
affaires sociales sur les conséquences de l'ordonnance n° 96-344 du 24 avril
1996, portant mesures relatives à l'organisation de la sécurité sociale, qui
impose une limite d'âge de soixante-cinq ans, transitoirement soixante-sept
ans, aux membres désignés au conseil d'administration des caisses du régime
général de sécurité sociale.
Les collèges de retraités de régimes sociaux des travailleurs indépendants,
tels que l'ORGANIC, l'Organisation autonome nationale de l'industrie et du
commerce, dont les membres sont élus, se verraient ainsi fermer les portes des
instances où leur présence est parfaitement légitime.
Cette situation est d'autant plus injuste que les retraités désignés comme
personnes qualifiées à ces mêmes conseils d'administration le sont sans limite
d'âge.
Il partage l'inquiétude des retraités qui sont en droit de participer au
conseil d'administration de leur caisse de retraite comme ils l'ont toujours
fait activement et attendent que soit levée toute ambiguïté sur leur place et
leur rôle au sein des organismes sociaux.
C'est pourquoi il lui demande quelle disposition il entend prendre pour
remédier aux conséquences d'une situation qui lui paraît incompréhensible et
anormale. (N° 439).
La parole est à M. Jean-Jacques Robert.
M. Jean-Jacques Robert.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, je souhaite
évoquer les conséquences imprévues de l'ordonnance du 24 avril 1996 sur
l'organisation de la sécurité sociale. Ce dernier impose une limite d'âge de
soixante-cinq ans, transitoirement de soixante-sept ans jusqu'au prochain
renouvellement des conseils d'administration, sous peine d'inéligibilité.
Jusque-là, il n'y a rien à dire !
En revanche, lorsque l'on constate que cette limite d'âge des administrateurs
nommés dans le régime général devrait s'appliquer aux administrateurs élus dans
le régime d'assurance vieillesse des salariés de l'industrie et du commerce, on
commence à s'étonner. La situation peut s'aggraver avec d'autres régimes des
professions indépendantes, tels que l'assurance retraite des artisans et
l'assurance maladie des professions indépendantes.
L'ORGANIC, au cas particulier, a des membres du conseil d'administration qui
sont élus dans deux collèges : un collège d'actifs et un collège de retraités.
La présence de ces retraités serait donc remise en cause arbitrairement par une
limite d'âge qui apparaît légitime dans la plupart des cas. Mais qui, mieux
qu'un retraité, peut représenter un retraité et une caisse de retraite ?
Telle est la situation que je voudrais voir réglée.
Afin de vous éviter de venir, madame le ministre, je vous avais écrit en
juillet dernier ; mais votre réponse a tardé, puisqu'elle a mis deux mois à me
parvenir.
Elle est, par ailleurs, quelque peu filandreuse
(Sourires.)
- c'est le moins que je puisse dire - car vous appelez mon
attention sur le fait que de telles limites d'âge existent d'ores et déjà dans
beaucoup d'autres structures - je le savais déjà - qu'il s'agisse du secteur
public - je le savais également - ou du secteur privé - je le savais encore.
M. Jean-Claude Gaudin,
ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration.
Il sait tout !
(Sourires.)
M. Jean-Jacques Robert.
En revanche - et ce point est assez confus - je conviens, dites-vous, qu'il
faudra examiner si les textes doivent être adaptés aux spécificités des régimes
des professions indépendantes concernées pour les prochains renouvellements qui
auront lieu en décembre 1997.
Ma question est simple : trouvez-vous légitime de priver ces retraités de leur
droit de représentation, et ces derniers doivent-ils être représentés par des
actifs, ce qui me paraît un peu ubuesque ? Allez-vous engager une procédure
permettant d'assurer cette représentation légitime ? Si la réponse est
négative, je saurai à quoi m'en tenir !
M. Roland Courteau.
C'est clair !
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Anne-Marie Couderc,
ministre délégué pour l'emploi.
Monsieur le sénateur, je vous prie tout
d'abord de bien vouloir excuser l'absence de M. Barrot, ministre du travail et
des affaires sociales, qui n'a pas pu venir vous répondre lui-même.
Vous avez posé une question très claire et rappelé à l'instant les termes de
l'ordonnance du 24 avril 1996, qui précise les conditions d'accès aux fonctions
d'administrateurs des caisses de retraite et le régime des incompatibilités y
afférents.
Vous avez évoqué le problème de la limite d'âge. Comme vous le savez - vous
connaissez en effet très bien tous ces dossiers - les conditions d'éligibilité
et d'inéligibilité des administrateurs des caisses devant relever du domaine
législatif et non réglementaire, comme c'était le cas jusqu'alors, il est
apparu nécessaire, à la suite de l'examen du projet d'ordonnance par le Conseil
d'Etat, de retenir la rédaction proposée par la Haute Assemblée et de créer un
nouvel article du code de la sécurité sociale reprenant les dispositions
précédentes applicables aux conditions de désignation des administrateurs du
régime général.
Néanmoins - vous l'avez d'ailleurs indiqué, monsieur le sénateur - ces
nouvelles dispositions ne s'appliquent pas aux conditions d'exercice des
mandats des administrateurs actuellement en fonctions.
Il a effectivement été répondu à votre interrogation qu'aujourd'hui il paraît
indispensable et nécessaire - je ne peux que répéter ce que vous venez
d'indiquer à l'instant - d'examiner si les textes doivent être adaptés aux
spécificités des régimes des professions indépendantes concernées pour les
prochains renouvellements des conseils d'administration, et cela avant les
élections qui doivent intervenir au mois de décembre 1997 pour les régimes
d'assurance vieillesse et invalidité-décès des professions artisanales,
industrielles et commerciales, notamment en ce qui concerne le collège des
retraités.
Je ne peux que confirmer, monsieur le sénateur, ce qui vous a été répondu par
écrit. Les textes doivent-ils être adaptés ? Ce dossier est actuellement
examiné et j'espère que nous pourrons ensemble avancer des propositions.
M. Jean-Jacques Robert.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Jean-Jacques Robert.
M. Jean-Jacques Robert.
Je suis toujours aussi sceptique compte tenu des termes de la lettre que j'ai
évoquée tout à l'heure, et je ne sens pas en vous la volonté de remettre en
ordre un problème qui est essentiellement d'ordre cartésien. C'est la raison
pour laquelle j'ai souhaité que vous veniez devant notre assemblée aujourd'hui
afin de mettre les points sur les « i » et pour que vous puissiez apporter une
réponse que j'espère définitive à ce dossier.
COÛT DES FORMALITÉS ADMINISTRATIVES
LIÉES AUX CONTRATS D'APPRENTISSAGE
M. le président.
M. Christian Demuynck attire l'attention de M. le ministre des petites et
moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat sur l'importance des frais
de dossier supportés par les petits commerçants et artisans qui ont recours à
un contrat d'apprentissage. Le décret n° 96-671 du 26 juillet 1996 prévoit que
l'accomplissement des formalités administratives ne doit donner lieu à aucun
frais particulier. Cependant, de nombreuses chambres de métiers, de commerce et
d'industrie ou d'agriculture demandent aux employeurs une participation
financière pour les dépenses d'informatique, d'inscription et d'envoi des
contrats. Ces frais peuvent varier de plusieurs centaines de francs d'un
organisme à l'autre, alors que certains ne demandent rien pour ces
démarches.
Il lui demande ce qu'il compte faire pour clarifier la situation et pour
éviter le développement de cette pratique. (N° 446.)
La parole est à M. Demuynck.
M. Christian Demuynck.
Madame le ministre, nous savons que l'emploi des jeunes est l'une des
principales priorités du Gouvernement et que les orientations prises sont
destinées à favoriser leur insertion.
L'apprentissage étant, parmi d'autres, un moyen idéal d'intégration dans le
monde du travail, de nombreux commerçants, artisans ou responsables de petites
entreprises sont prêts à engager des jeunes sous de tels contrats. Tout doit
donc être fait pour inciter et encourager les employeurs dans cette voie.
Cependant, on peut constater que de nombreuses chambres de commerce et
d'industrie, de métiers et d'agriculture demandent une participation pour le
traitement courant des dossiers : frais d'information, d'inscription et
d'envoi. Variables d'un organisme à un autre, ces frais sont plus importants en
province, où ils peuvent s'élever à plusieurs centaines de francs.
Cette pratique constitue un obstacle financier supplémentaire pour les
employeurs qui voudraient faire appel à un apprenti. Par ailleurs, elle semble
être contraire à l'esprit de simplification des procédures relatives à
l'organisations de l'apprentissage.
Je souhaite donc, madame le ministre, que cette situation soit enfin
clarifiée et que soit stoppée l'inflation des frais de dossiers demandés aux
employeurs.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Anne-Marie Couderc,
ministre délégué pour l'emploi.
Monsieur le sénateur, je vous prie tout
d'abord de bien vouloir excuser l'absence de M. Raffarin. Il m'appartient donc
de clarifier ici la position du Gouvernement sur la question effectivement
difficile de la tarification des prestations des établissements consulaires
dans un certain nombre de circonstances.
Vous nous interrogez aujourd'hui sur le dépôt des dossiers d'apprentissage.
Dans plusieurs cas, il nous faut concilier plusieurs impératifs, notamment
l'objectif de limitation des frais supportés par les entreprises pour un
certain nombre de démarches et le nécessaire équilibre financier des
établissements consulaires.
Concernant les contrats d'apprentissage, je rappelle que l'article 5 du
décret du 26 juillet 1996 précise que l'accomplissement de certaines tâches par
l'organisme qui facilite les missions d'accueil, d'examen du dossier, de
transmission des contrats au service chargé du contrôle ne donne lieu à aucun
frais pour l'employeur ou pour l'apprenti.
Toutefois, comme vous l'avez rappelé, aux termes d'un usage établi de longue
date, les chambres consulaires apportent aux chefs d'entreprise qui le
souhaitent une assistance technique et un conseil dans la démarche pouvant
conduire à la signature d'un contrat d'apprentissage.
Les nouvelles dispositions réglementaires ne sont pas appelées à modifier cet
usage. Il est toutefois prévu qu'une prochaine circulaire viendra préciser la
nature et le montant des prestations complémentaires susceptibles de donner
lieu à facturation.
Ce texte devrait très largement s'inspirer de la circulaire sur les centres de
formalités des entreprises, en cours d'élaboration par le ministère des petites
et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat, et par le ministère de
l'industrie, des postes et télécommunications.
Cette circulaire devra préciser que les prestations donnant lieu à
tarification doivent apporter une réelle valeur ajoutée. L'organisme intéressé
devra afficher clairement les prestations gratuites et celles qui ne le sont
pas. Enfin, une certaine homogénéité des tarifs devra être recherchée.
Je pense qu'ainsi nous pourrons éviter les distorsions que vous avez relevées
tout à l'heure dans votre intervention.
M. Christian Demuynck.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Demuynck.
M. Christian Demuynck.
Je tiens à vous remercier, madame le ministre, des informations
particulièrement claires que vous verrez de nous apporter.
J'espère que cette circulaire parviendra bientôt aux différents présidents de
chambres de métiers, de commerce et d'agriculture.
Je suis très satisfait de votre réponse.
NÉCESSITÉ D'OCTROYER LE BÉNÉFICE DE LA PRIME
À L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
À LA FLANDRE-LYS (NORD)
M. le président.
M. Alfred Foy attire l'attention de M. le ministre de l'aménagement du
territoire, de la ville et de l'intégration sur les difficultés que connaît la
Flandre-Lys, secteur géographique qui correspond aux sept cantons de l'ancien
arrondissement d'Hazebrouck, dans le département du Nord.
Le faible taux de chômage de ce territoire n'est pas le reflet d'une situation
privilégiée puisqu'un tiers des actifs travaillent dans les zones voisines -
Béthune-Bruay, Flandre belge, Flandre littorale - très attractives car elles
bénéficient de crédits européens au titre des objectifs 1 ou 2. Qui plus est,
la Flandre littorale et Béthune-Bruay sont également éligibles à la prime à
l'aménagement du territoire.
L'analyse du tissu économique de Flandre-Lys met en évidence des
caractéristiques et des évolutions particulièrement défavorables :
sous-qualification des emplois, attraction et indépendance de la zone en
constante diminution, manque d'emplois tertiaires, taux de création et de
reprise d'entreprises inférieur de 23 % à la moyenne du Nord, chômage élevé
dans les pôles urbains.
La faiblesse des revenus de la population et le potentiel fiscal des communes
très inférieur à la moyenne nationale sont l'illustration d'une situation
économique catastrophique.
Or, en Flandre-Lys, seul le canton de Bailleul Nord-Est bénéficie de la PAT,
la prime à l'aménagement du territoire. Il est donc vital aujourd'hui
d'accompagner les efforts entrepris par les acteurs économiques et les élus
locaux en admettant les six autres cantons du secteur à la PAT. Cela est
d'autant plus nécessaire que le zonage PAT conditionne également l'octroi du
fonds de développement des PMI ainsi que du fonds spécial d'implantation et
permet l'exonération de la taxe professionnelle et de l'impôt sur les résultats
pour certaines catégories d'entreprises.
En conséquence, il souhaiterait savoir si, afin de rééquilibrer les conditions
de concurrence avec les zones voisines, il compte octroyer le bénéfice de la
prime à l'aménagement du territoire à toute la Flandre-Lys, pour sauver cette
région sinistrée. (N° 433.)
La parole est à M. Foy.
M. Alfred Foy.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question
est relative aux graves difficultés que connaît la Flandre-Lys, secteur
géographique qui correspond aux sept cantons de l'ancien arrondissement
d'Hazebrouck, dans le département du Nord.
Le faible taux apparent de chômage de ce territoire n'est pas le reflet d'une
situation privilégiée. En effet, il est très élevé dans les principales
communes du secteur - 16 % à Merville, 14,5 % à Hazebrouck - et un tiers de ses
actifs travaillent dans les zones voisines - Flandre belge, Flandre littorale,
Béthune-Bruay - très attractives car elles bénéficient de crédits européens au
titre des objectifs 1 ou 2. Qui plus est, la Flandre littorale et Béthune-Bruay
sont également éligibles à la prime à l'aménagement du territoire.
L'analyse du tissu économique de Flandre-Lys met en évidence des
caractéristiques et des évolutions particulièrement défavorables :
sous-qualification des emplois, attraction et indépendance de la zone en
constante diminution, manque d'emplois tertiaires, taux de création et de
reprise d'entreprises inférieur de 23 % à la moyenne du Nord et, ainsi que je
l'ai dit précédemment, chômage élevé dans les pôles urbains.
La faiblesse des revenus de la population et le potentiel fiscal des communes,
très inférieur à la moyenne nationale, sont également l'illustration d'une
situation économique catastrophique.
Or, en Flandre-Lys, seul le canton de Bailleul Nord-Est bénéficie de la prime
à l'aménagement du territoire. Il est donc vital aujourd'hui d'accompagner les
efforts entrepris par les acteurs économiques et les élus locaux en admettant
les six autres cantons du secteur à la PAT. Cela est d'autant plus nécessaire
que le zonage PAT conditionne également l'octroi du fonds de développement des
PMI ainsi que du fonds spécial d'implantation et permet l'exonération de la
taxe professionnelle et de l'impôt sur les résultats pour certaines catégories
d'entreprises.
Voilà quelques mois, en déposant une question écrite, j'avais déjà attiré
votre attention sur la nécessité de classer cette région en zone « objectif 2
», mais l'adjonction de la Flandre-Lys à la liste éligible à ces aides
européennes aurait impliqué le retrait des zones existantes.
Vous avez donc estimé que la mise en oeuvre des programmes pour la période
1994-1996 était trop récente pour présenter des résultats justifiant leur
sortie de la carte de l'objectif 2. Par conséquent, elle n'a pas été modifiée
pour les années 1997-1999.
Puisque la possibilité d'obtenir le classement en objectif 2 se trouve ainsi
reportée pour plusieurs années, l'octroi du bénéfice de la prime à
l'aménagement du territoire à toute la Flandre-Lys s'avère encore plus
indispensable, afin de rééquilibrer les conditions de concurrence de ce
territoire sinistré par rapport aux zones voisines.
C'est pourquoi je vous serais très reconnaissant, monsieur le ministre, de
bien vouloir me faire part de vos intentions sur cette question primordiale
pour la survie économique et sociale de cette région.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gaudin,
ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration.
Monsieur Foy, vous avez bien voulu appeler mon attention sur l'absence de prime
à l'aménagement du territoire pour les cantons de la Flandre intérieure.
Bien que la Flandre soit éloignée de ma Provence natale, je connais bien ce
sujet, car j'ai déjà répondu à plusieurs interventions visant à rendre éligible
cette zone à cette prime. Mais vous êtes aujourd'hui le premier à m'interroger
sur ce sujet depuis la tribune de la Haute Assemblée, ce qui prouve votre
détermination personnelle et celle de l'ensemble des élus de Flandre intérieure
à obtenir l'éligibilité à cette prime.
Je comprends d'autant mieux votre préoccupation que de nombreux secteurs de
notre territoire situés en limite de zones éligibles demandent à bénéficier de
la prime à l'aménagement du territoire.
L'existence d'avantages financiers ou fiscaux limités à certaines zones est
cependant une composante nécessaire de l'aménagement du territoire. Ces
avantages permettent, en effet, d'établir une discrimination entre les
territoires, soit pour compenser des handicaps, soit pour orienter des
investissements vers les zones où ils ne s'orientent pas spontanément.
Le zonage actuel résulte d'une approche fondée sur des critères techniques
tels que le taux de chômage, sous le contrôle de la Commission européenne qui
nous impose, depuis 1995, de ne pas dépasser 40,9 % de la population française
dans les zones éligibles à la prime à l'aménagement du territoire au lieu de 45
% pour la carte de 1982.
Malgré cette diminution globale, que la Commission aurait souhaitée plus
forte, le Gouvernement, conscient des difficultés, s'est attaché à couvrir plus
largement le département du Nord. C'est ainsi que les cantons de ce département
frontalier des zones belges éligibles à des taux élevés aux crédits européens
sont devenus éligibles à la prime à l'aménagement du territoire alors qu'ils ne
l'étaient pas avant la révision de la carte.
Il s'agit, comme vous venez de le souligner, d'éviter que tous les projets de
développement industriel quittent notre territoire au profit de nos voisins.
A ce titre, le canton de Bailleul Nord-Est bénéficie depuis 1995 de la prime à
l'aménagement du territoire. L'éligibilité pour la première fois d'un canton de
Flandre intérieure dans un contexte général de réduction mérite d'être
soulignée et témoigne d'une réelle reconnaissance des besoins.
Il n'a malheureusement pas été possible, et croyez que je le regrette, de
rendre la Flandre intérieure entièrement éligible à la prime à l'aménagement du
territoire, en raison des contraintes que je viens d'évoquer.
En revanche, elle est éligible au fonds de développement des PMI, créé dans
les contrats de plan Etat-région en 1994. Or les petites et moyennes
entreprises sont reconnues comme créatrices d'emplois. Ce fonds constitue donc
une contribution au développement économique.
Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments de réponse que je peux vous
apporter.
Pour aller au-delà, comme vous le suggérez, une révision globale de la carte
de la prime à l'aménagement du territoire serait nécessaire. Or il est certain
que la Commission en tirerait parti pour nous demander de diminuer encore la
population couverte par ces zones. Avant de s'engager dans une telle réforme,
il convient de bien en mesurer la portée et d'attendre, en particulier, les
effets de la carte définie en 1995.
Quoi qu'il en soit, je serai heureux de vous rendre visite en Flandre
intérieure - je n'ai pas l'occasion d'aller souvent dans votre département du
Nord, je vais plus facilement dans le département des Hautes-Alpes de M.
Lesbros - et nous examinerons ensemble si, d'une manière ou d'une autre, nous
pouvons vous aider.
Cela étant, j'entendais tout à l'heure Mme Luc évoquer « les conditions qui
nous sont imposées par Bruxelles ». Ne poussons pas le bouchon trop loin ! M.
le commissaire européen Van Miert est en train, ce matin même, de nous donner
satisfaction sur tout ce que nous avons demandé en faveur de la Corse. Ceci
compensant cela, on ne peut pas toujours se plaindre que Bruxelles ne nous
renvoie pas l'ascenseur, même s'il ne le fait pas autant que ce que nous
souhaiterions en la circonstance.
Quoi qu'il en soit, le Gouvernement tâchera tout de même de vous donner un
coup de main, monsieur Foy.
(Applaudissements sur les travées du RPR et de
l'Union centriste.)
M. Alfred Foy.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Foy.
M. Alfred Foy.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de vos paroles encourageantes.
Permettez-moi cependant, afin de renforcer dans votre esprit et dans celui du
Gouvernement la nécessité de voir les cantons de Flandre intérieure devenir
éligibles à ces primes, de vous faire observer que le canton de Bailleul
Nord-Est bénéficie de la prime alors que, de façon incohérente, le canton
voisin de Bailleul Sud-Ouest n'en bénéfie pas, alors qu'il a pourtant vu, voilà
quelques mois, disparaître 150 emplois à France 2000.
Permettez-moi encore, pour faire une analyse un peu plus pointue du tissu
économique, de rappeler que la Flandre-Lys avait, en 1990, le taux le plus
faible d'emplois par actif de la région Nord-Pas-de-Calais, à savoir 68 %,
contre 73 % en 1982, soit une dégradation continue.
Je relève également que le solde des migrations journalières représente le
tiers de la population active. Encore une fois, c'est un triste record que
possède là cette région Nord-Pas-de-Calais, qui compte 4 millions d'habitants
!
Tout cela, monsieur le ministre, résulte d'un manque d'activité et permet de
mieux comprendre la faiblesse du potentiel fiscal de notre secteur.
Cela explique que la ville d'Hazebrouck, ville principale de notre zone,
ancien chef-lieu d'arrondissement, qui compte 23 000 habitants, soit éligible à
la dotation de solidarité urbaine à taux majoré.
Je signale également que 80 % des communes de la Flandre ont un potentiel
fiscal inférieur à la moyenne nationale des communes de même importance.
Enfin, j'ajoute, monsieur le ministre, que le taux de chômage des jeunes
atteint 27 % ! Monsieur le ministre, ce serait un très grand plaisir pour nous
de vous accueillir en Flandre intérieure, afin que vous puissiez constater
de visu
sur le terrain ce que je viens d'énoncer.
RÉALISATION DES TRAVAUX D'AMÉNAGEMENT
DU CARREFOUR DE LA RN 213
ET ACCÈS VERS « LES HAUTS DE NARBONNE » (AUDE)
M. le président.
M. Roland Courteau rappelle à M. le ministre de l'équipement, du logement, des
transports et du tourisme son attachement à la réalisation, dans les délais les
plus brefs, des travaux du carrefour de la RN 213 avec « Les Hauts de Narbonne
».
Comme il l'a déjà souligné, ces aménagements revêtent un caractère d'extrême
urgence pour des raisons de sécurité. En effet, on déplore sur cette partie de
route de nombreux accidents en raison d'un flux important de circulation de 22
000 véhicules par jour en moyenne annuelle.
Aujourd'hui, des informations, parues dans la presse locale, font état d'un
retard d'un an, dû à des problèmes de financement, dans la mise en oeuvre du
chantier de la rocade Nord-Est de Narbonne.
Compte tenu du fait que le contrat de Plan 1994-1998 liait dans le montage
financier cette réalisation et l'aménagement du carrefour de la RN 213 avec «
Les Hauts de Narbonne », il souhaite savoir s'il y a un risque que le retard
annoncé pour les travaux de la rocade Nord-Est concerne également la
réalisation de ce carrefour.
C'est pourquoi il lui demande s'il peut apporter des apaisements aux riverains
et usagers de cette voirie, en confirmant que les travaux afférents au
carrefour démarreront rapidement, et s'il est en mesure de préciser les
différentes phases ainsi que le calendrier de la mise en oeuvre de ce projet.
(N° 441).
La parole est à M. Courteau.
M. Roland Courteau.
Monsieur le ministre, compte tenu du nombre de démarches et d'interventions
que j'ai déjà faites, dans cet hémicycle, ou ailleurs, auprès du ministre de
l'équipement sur la nécessité de procéder d'urgence aux travaux d'aménagement
du carrefour de la RN 213 avec les « Hauts de Narbonne », dans l'Aude, je serai
concis.
Sachez seulement que, sur ce dossier, les limites du raisonnable et de
l'acceptable ont été largement dépassées.
Les ministres successifs ou leurs représentants se veulent, certes, toujours
apaisants, rassurants, mais les délais de réalisation sont sans cesse
reportés.
Je suis bien conscient de l'ampleur du projet et des contraintes techniques et
administratives. Je considère cependant, avec l'ensemble des riverains et des
usagers, que l'administration d'Etat disposait amplement du temps
nécessaire.
En effet, en dépit des aménagements provisoires que j'ai demandés et obtenus
de M. le préfet de l'Aude, l'insécurité va grandissant.
Je rappelle que le contrat de plan signé en 1994 engage quatre partenaires
financiers pour l'aménagement de la rocade Nord-Est de Narbonne - coût : 40
millions de francs - et des carrefours situés sur la RN 213 - coût : 18
millions de francs - à savoir le conseil général à hauteur de 22,5 % de la
dépense, l'Etat à hauteur de 40 %, la ville à hauteur de 22,5 % et la région à
hauteur de 15 %.
Aujourd'hui, monsieur le ministre, des informations circulent selon
lesquelles, du fait de problèmes de financement de l'Etat, l'aménagement de la
rocade Nord-Est prendrait un retard supplémentaire évalué à un an. Qu'en est-il
de ces informations ? Faut-il craindre l'annonce d'un nouveau retard dans la
réalisation des travaux concernant tout particulièrement l'autre volet du
contrat de plan, c'est-à-dire les carrefours sur la RN 213 ?
Ce serait extrêmement grave, monsieur le ministre, car je le rappelle pour la
énième fois, des vies sont en danger.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Pierre-André Périssol,
ministre délégué au logement.
Monsieur le sénateur, je vous prie
d'excuser M. Bernard Pons et Mme Idrac, qui sont retenus par une audition en
commission des finances. Je vais donc vous faire part des éléments de réponse
qu'ils souhaitaient vous communiquer.
Nous connaissons votre attachement à la réalisation rapide du projet de
carrefour entre la RN 213 et les « Hauts de Narbonne ».
J'ai le plaisir de vous faire connaître que, la ville de Narbonne ayant adopté
la variante d'aménagement qui lui a été soumise par les services du ministère
de l'équipement, l'instruction technique et financière de cette opération entre
dans sa phase finale.
Ainsi, l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique du projet sera
lancée au début de l'année 1997 et sera suivie par une phase d'acquisitions
foncières.
Les premiers travaux d'ouvrages d'art pourront alors être engagés dès la fin
de 1997, en vue d'une mise en service de l'ensemble des aménagements au cours
du premier semestre de 1999.
Je tiens à souligner que la mesure provisoire de sécurité, qui a consisté à
supprimer un tourne-à-gauche au droit de l'actuel carrefour des « Hauts de
Narbonne », a notablement réduit les accidents à cet endroit.
Je souhaite cependant, tout comme vous, que la mise en sécurité totale de ce
carrefour soit menée dans les meilleurs délais dans le cadre des travaux
d'aménagement précités.
M. Roland Courteau.
Je demande la prole.
M. le président.
La parole est à M. Courteau.
M. Roland Courteau.
Monsieur le ministre, comprenez l'exaspération des habitants des quartiers
concernés, qui attendent depuis des années qu'on veuille bien résoudre enfin
cet important problème de sécurité !
Cette exaspération, ô combien justifiée !, trouve son origine dans les
annonces répétées de reports dans le calendrier des travaux.
Je ne sous-estime pas - je viens de le dire - les complications locales ou
encore les contraintes techniques et administratives à surmonter pour arriver à
un projet privilégiant le traitement à long terme de l'axe RN 213, dont le flux
de circulation a augmenté de 22 % pour s'élever à une moyenne journalière de 22
000 véhicules.
Il n'empêche ! Quelles que soient les responsabilités dans le retard pris par
ce projet, les riverains et les usagers sont lassés des reports répétitifs dans
le calendrier de réalisation.
Le doute puis la colère se sont installés dans les esprits, et il y a de quoi
! En effet, ce sont bien certaines imprévoyances qui sont à l'origine des
énormes problèmes de sécurité qui n'ont fait que s'accroître depuis 1990, et
surtout depuis la mise en service de la rocade Nord-Ouest.
Je ne situerai pas les responsabilités, par souci d'éviter une polémique,
toujours inutile et néfaste. Voici pourtant ce que M. Besson, ancien ministre,
me précisait en février 1995 : « Bien que l'accord avec la ville ne soit pas
encore finalisé, l'Etat proposait de retenir la solution du carrefour dénivelé
» - vous l'avez confirmé - « et que les enquêtes d'utilité publique devraient
être engagées à l'automne 1995 » - je dis bien « à l'automne 1995, monsieur le
ministre - « les travaux pouvant être, avec réserve, entamés en 1996. »
Le problème, monsieur le ministre, c'est qu'ensuite et tout aussi
officiellement l'annonce m'a été faite que l'enquête d'utilité publique
démarrerait durant le deuxième semestre de 1996 - c'est un premier retard - et
les travaux au printemps de 1998, soit un retard de deux ans.
Aujourd'hui, monsieur le ministre, ma crainte est grande de voir un nouveau
retard s'ajouter au précédent. Vos propos se veulent certes rassurants. Je
décèle cependant les signes d'un retard supplémentaire de six mois à un an par
rapport au dernier calendrier qui m'avait été annoncé.
A la vérité, monsieur le ministre, tout délai supplémentaire, tout retard
ajouté ne fait qu'accroître le nombre d'accidents. Comment s'étonner, dès lors,
après tant d'attentes et de tergiversations, de la rudesse des propos des
riverains et des usagers concernant le traitement de ce dossier ?
Monsieur le ministre, il est des responsabilités qui risquent de peser lourd.
Il ne sera pas dit que je ne vous aurai pas suffisamment prévenu. Craignez que
tout nouveau retard ne se traduise par la multiplication des accrochages et par
de graves accidents !
DEVENIR DES CRÉDITS
À LA RÉHABILITATION DE L'HABITAT
M. le président.
M. Gérard Roujas tient à attirer l'attention de M. le ministre délégué au
logement sur le devenir des crédits à la réhabilitation.
Est-il besoin de rappeler que 25 % des crédits alloués pour 1996 à l'Agence
nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH, sont encore gelés et qu'ils
pourraient être largement diminués en 1997, tout comme les primes à
l'amélioration de l'habitat ?
Or la réhabilitation de l'habitat répond bien à des priorités de cohésion
sociale et d'aménagement du territoire aujourd'hui largement partagées par
tous.
L'aide à la réhabilitation constitue le levier indispensable permettant
d'assurer une politique sociale dans le domaine de l'habitat pour les personnes
les plus démunies, qu'elles soient locataires ou propriétaires. Les aides
concernent plus de 50 000 logements par an, logements qui représentent la base
de la lutte contre l'exclusion pour les familles, les jeunes et les personnes
âgées.
Il est donc indispensable non seulement de s'opposer à une baisse des crédits,
mais encore de s'attacher à promouvoir une politique de réhabilitation
dynamique et d'envergure. Ainsi, de nombreux projets sont en attente faute de
crédits.
Nous avons là une véritable dynamique économique qui ne demande qu'à démarrer
et qui apparaît d'autant plus urgente que le secteur du bâtiment traverse une
grave crise.
Soutenir l'emploi dans le secteur du bâtiment, secteur indispensable à
l'insertion, à la vie économique et sociale locale, doit être une priorité ; ce
sont plus de 45 000 emplois artisanaux qui sont soutenus par le biais des aides
publiques.
C'est pourquoi il lui demande quelles sont les perspectives budgétaires en ce
qui concerne les aides publiques à l'amélioration de l'habitat. (N° 434.)
La parole est à M. Roujas.
M. Gérard Roujas.
Monsieur le ministre du logement, par la présente question, j'ai souhaité
attirer votre attention sur le devenir des crédits de réhabilitation.
Il n'est pas besoin de rappeler que, en 1996, 25 % des crédits alloués à
l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat ont été gelés et que les
orientations budgétaires pour 1997 laissent apparaître, de la même manière, une
baisse importante de ces mêmes crédits. Il en va encore ainsi, d'ailleurs, des
primes à l'amélioration de l'habitat.
Or, nul ne peut contester que la réhabilitation des logements constitue un
élément essentiel de cohésion sociale et d'aménagement du territoire.
Elle permet d'assurer une politique sociale en faveur des plus démunis, qu'ils
soient locataires ou propriétaires. Ces aides concernent plus de 50 000
logements par an et représentent un moyen efficace de lutter contre l'exclusion
des familles, des jeunes, des personnes âgées.
Il convient d'y ajouter la création d'une offre nouvelle de logements très
sociaux dans le parc privé grâce aux subventions données aux bailleurs privés
ou à des associations d'insertion ; plus de 10 000 logements sont concernés.
Envisager une baisse des crédits, c'est renoncer à cette politique sociale,
c'est renoncer à la réhabilitation des quartiers anciens des villes, c'est
renoncer à la lutte contre les déséquilibres territoriaux et à la
revalorisation du patrimoine bâti, c'est renoncer, enfin, à soutenir l'emploi
dans le secteur du bâtiment, alors même que la courbe du chômage a repris son
mouvement ascendant.
Sur ce dernier point, je rappelle que 45 000 emplois artisanaux sont soutenus
par les aides publiques.
Nous avons là une véritable dynamique économique qui ne demande qu'à
redémarrer au moment où le secteur du bâtiment traverse une grave crise et
alors que de nombreux projets sont en attente faute de crédits.
La légitimité de l'intervention de l'Etat en la matière ne saurait être remise
en question au nom de la réduction des déficits budgétaires. En effet, il est
prouvé que les 85 milliards de francs de dépenses fiscales et budgétaires
engagés en 1995 par l'Etat en faveur du logement ont amené, en retour, des
rentrées fiscales et des prélèvements de l'ordre de 123 milliards de francs.
Autrement dit, le budget du logement ne contribue pas à l'aggravation du
déficit budgétaire, bien au contraire.
Je vous demande donc, monsieur le ministre, de tout mettre en oeuvre pour que
le budget du logement de 1997 tienne compte de cette préoccupation majeure que
sont le logement en général et la réhabilitation en particulier, autrement dit
pour que les crédits soient à la hauteur des enjeux économiques et sociaux.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Pierre-André Périssol,
ministre délégué au logement.
Monsieur le sénateur, il ne faut pas
avancer des chiffres à la légère. Il ne faut pas confondre une perspective de
gel des crédits à un moment donné et la réalité des choses.
Je vous demande de faire preuve d'un minimum d'objectivité.
Il est faux d'affirmer que 25 % des crédits de l'ANAH sont annulés. Les
crédits de l'ANAH en 1996 permettront de faire face aux besoins. Ne vous
arrêtez pas à ce qui a été délégué à ce jour : une dernière délégation doit
intervenir prochainement, qui permettra de passer le dernier trimestre.
S'agissant de la réhabilitation de l'habitat ancien au cours de l'exercice
1997, je vais vous donner quatre éléments de réponse.
Premièrement, s'agissant du parc social, en 1997 comme en 1996 et 1995, le
montant des crédits destinés à la réhabilitation du parc HLM est constant. Il y
aura, en 1997 comme les années précédentes, 120 000 PALULOS - primes à
l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale - et le
montant unitaire de ces PALULOS sera inchangé. L'Etat poursuit donc son effort
en faveur de la réhabilitation du parc social.
Deuxièmement, vous avez affirmé que la prime à l'amélioration de l'habitat
baissait ; c'est faux. Le projet de loi de finances initial pour 1997 prévoit
en effet un montant de primes à l'amélioration de l'habitat de 600 millions de
francs, c'est-à-dire un montant identique à celui qui était inscrit dans le
projet de loi de finances initial de 1996.
Dois-je vous rappeler, monsieur le sénateur, qu'en 1992 ce montant était de
400 millions de francs, que nous l'avons porté à 600 millions de francs et que
nous maintenons ce chiffre ?
Troisièmement, pour ce qui est de l'ANAH, et s'agissant de l'année 1997 - je
vous ai répondu pour 1996 - le projet de loi de finances initial prévoit une
dotation de 2 milliards de francs. Celle-ci est certes en réduction de 10 % par
rapport à 1996, mais il convient de la repositionner.
Quatrièmement, je relève une mesure extrêmement favorable à la réhabilitation
du parc privé : les couples engageant des travaux d'amélioration dans leur
logement - le terme « travaux » étant pris au sens très large - jusqu'à
concurrence de 40 000 francs et en une ou plusieurs fois peuvent déduire de
leur impôt 20 % du montant des travaux engagés, ce qui revient à « effacer » la
TVA, si je puis dire. Voilà une disposition d'importance qui vient s'ajouter
aux trois autres mesures que je viens de citer. Elles vont toutes dans le sens
du soutien que le Gouvernement apporte à l'activité dans le logement, notamment
à la politique en faveur de la réhabilitation que vous avez évoquée, monsieur
le sénateur.
M. Gérard Roujas.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Roujas.
M. Gérard Roujas.
Je prends acte de votre réponse, monsieur le ministre. Mais, compte tenu des
problèmes que j'ai pu constater dans mon département, les mesures que vous
venez d'énoncer n'apportent, à mon humble avis, aucun apaisement à mes
préoccupations.
Nous aurons d'ailleurs l'occasion d'évoquer à nouveau ces problèmes lors de
l'examen du budget du logement.
NUISANCES OCCASIONNÉES
PAR LA CIRCULATION ROUTIÈREÀ CHOISY-LE-ROI (VAL-DE-MARNE)
M. le président.
Mme Hélène Luc attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, du
logement, des transports et du tourisme sur la situation insupportable subie
par les habitants de Choisy-le-Roi, due au passage quotidien de 1 000 camions
sur l'avenue de Villeneuve-Saint-Georges se dirigeant vers deux zones
industrielles et les dépôts SNCF de Villeneuve triage. Ces camions empruntent
cette voie étroite de six mètres, en file ininterrompue et dans les deux sens.
Ce quartier est véritablement sinistré par cette circulation de poids lourds,
les accidents se multiplient, les nuisances et l'insécurité sont à leur niveau
maximum.
Avec la population qui a créé un comité de quartier, avec M. le maire et la
municipalité de Choisy, elle lui demande qu'une action immédiate soit engagée
par l'Etat. C'est possible et d'un coût limité : la solution passe par la
construction le plus rapidement possible d'un pont provisoire, au sud du
carrefour Pompadour, assurant la liaison entre la RN 6 et la voirie intérieure
existante de la gare de triage de Villeneuve-Saint-Georges. Dans le même temps,
il est nécessaire d'engager l'étude globale du schéma de desserte de la ZAC
d'Alfortville-Choisy afin que l'accès à celle-ci ne provoque pas de nouvelles
nuisances, puis de programmer la réalisation progressive des ouvrages
définitifs.
C'est pourquoi elle lui demande de lui faire part de ses intentions de
décision pour que soit rétabli rapidement le minimum de calme et de
tranquillité auquel chaque citoyen choisyen a droit. (N° 444.)
La parole est Mme Luc.
Mme Hélène Luc.
Monsieur le ministre, l'avenue de Villeneuve-Saint-Georges, à Choisy-le-Roi,
dont je suis l'élue, est située dans un quartier pavillonnaire, en bordure de
Seine.
Un tel environnement, que la municipalité et le conseil général veulent
conserver, devrait permettre à ses habitants de vivre dans le calme et la
tranquillité. Ce n'est malheureusement plus le cas, et la vie quotidienne y est
devenue insupportable depuis le passage incessant, en file ininterrompue, de
centaines de camions qui empruntent dans les deux sens cette voie, large de six
mètres seulement, que le conseil général s'est refusé à élargir pour ne pas
aggraver la situation.
Les nuisances s'accumulent : bruit, pollution, vibrations dans les maisons et
insécurité : récemment encore, deux fillettes ont été victimes d'un
accident.
Voici des photos spectaculaires que je vous fais porter.
(L'orateur remet à un huissier des documents.)
Elles sont tout à fait
impressionnantes. Comme vous le voyez, on se demande comment une voiture peut
croiser un tel camion.
Monsieur le ministre, je connais bien ce quartier : c'est le mien. Les
habitants, présents aujourd'hui dans les tribunes ; comme les élus représentant
le maire et la municipalité, peuvent témoigner du stress violent subi à
longueur de journée par les riverains.
Pourquoi « cet enfer » ?
L'avenue de Villeneuve-Saint-Georges constitue le seul accès possible à une
zone de fret. Celle-ci s'est développée à Villeneuve-triage sans concertation
avec les communes intéressées et sans prise en compte préalable par les
pouvoirs publics des infrastructures nécessaires et des protections
indispensables pour les habitants de Choisy, comme pour ceux de
Villeneuve-triage d'ailleurs.
Il est de la responsabilité du Gouvernement de remédier au plus vite à cette
imprévoyance coupable en construisant de toute urgence, et au besoin en
provisoire, un franchissement routier partant de la nationale 6, permettant,
par des voies intérieures, d'irriguer les entreprises de cette zone SNCF et
poursuivant vers l'A 6, comme le prévoit le projet « Seine Amont ».
Cette question ne date pas d'aujourd'hui : je l'abordais déjà le 11 avril 1996
devant M. Pons ; en présence du président du conseil général et du préfet du
Val-de-Marne.
Monsieur le ministre, ma question est donc précise et courte : où en est le
classement prioritaire de cette rocade ?
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Pierre-André Périssol,
ministre délégué au logement.
Madame le sénateur, M. Pons aurait souhaité
répondre personnellement à votre question. Vous connaissez en effet toute
l'attention qu'il attache au problème que vous évoquez.
M. le ministre je dois tout d'abord vous préciser que la route que vous
évoquez et qui supporte un trafic important de poids lourds n'est pas de la
compétence de l'Etat : il s'agit de la route départementale 38, qui assure la
desserte fine des zones d'activités et des dépôts de la SNCF.
Cette route départementale comporte un ouvrage sur les lignes SNCF limité à 10
tonnes, ce qui oblige les camions en provenance du sud à passer par le nord,
dans le quartier des « Gondoles », à Choisy-le-Roi.
La reconstruction de cet ouvrage, sans limitation de tonnage, permettrait
d'améliorer la situation, et une réunion s'est tenue à ce sujet, le 25 juillet
1996, sous la présidence du préfet du Val-de-Marne ; elle associait la SNCF, le
conseil général et les maires de Choisy-le-Roi et Villeneuve-Saint-Georges.
D'autres solutions dont, par exemple, celle que vous proposez, et qui consiste
à réaliser un pont provisoire au sud du carrefour Pompadour, assurant la
liaison entre la route nationale 6 et la voirie intérieure de la gare de
triage, doivent être examinées.
Comme il s'agit d'une desserte locale, la mise en oeuvre de la solution qui
sera retenue ne relève pas de la compétence de l'Etat. Elle ne pourra donc se
faire que sous la maîtrise d'ouvrage des collectivités locales.
La mise en oeuvre d'un schéma de desserte globale de ce secteur sera
compatible avec l'action de redéveloppement du site de « Seine amont »,
recensée au schéma directeur d'Ile-de-France et à laquelle l'Etat porte une
attention toute particulière.
Bien entendu, M. Pons a demandé à ses services, notamment à la direction
départementale de l'équipement du Val-de-Marne, de se mettre immédiatement à la
disposition des collectivités locales pour l'élaboration technique des projets,
en particulier pour apprécier leurs impacts sur la route nationale 6.
Madame Luc, M. Bernard Pons se tient à votre disposition pour réexaminer avec
vous ce dossier.
Mme Hélène Luc.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc.
Monsieur le ministre, avec la municipalité et le comité de défense je
répondrai bien évidemment à l'invitation de M. Pons.
Mais, monsieur le ministre, votre réponse me laisse insatisfaite car elle ne
prend pas en compte l'urgence et la gravité de la situation.
Vous avez notamment souligné que la 38 était une route départementale. Sa
vocation n'est donc pas de recevoir une circulation nationale ! Cela ne peut
pas durer.
A Choisy-le-Roi, ville située en plein coeur du département du Val-de-Marne,
nous avons mené un combat acharné pour remédier à des problèmes de circulation
qui sont très graves. Nous avons ainsi réussi à résorber quelques points noirs,
notamment celui de la RN 186 grâce à l'A 86 et au trans-Val-de-Marne.
Il ne faut pas que la circulation que nous avons chassée de la RN 186 arrive
par d'autres routes, c'est-à-dire par la RD 38 et la RN 305 !
En réalité, monsieur le ministre, la politique encourageant le « tout camion »
au détriment du rail entraîne à nouveau l'envahissement de nos villes et
l'avenue de Villeneuve-Saint-Georges n'y échappe pas.
Il faut inverser la tendance, comme le permettrait l'utilisation des voies
ferrées pour le transport des marchandises concernant la gare de Rungis, dont
on veut diminuer la capacité, le port de Bonneuil et l'aéroport d'Orly.
De même, l'ouverture de la troisième voie de l'A 86 à Thiais s'impose plus que
jamais.
Quant à la ZAC d'Alfortville - Choisy, elle appelle l'étude et la réalisation
de nouveaux accès à l'A 86.
Pour ce qui est du pont Wilson, il est devenu dangereux. Le conseil général
effectuera les travaux indispensables de sécurité et renforcera, en même temps,
la limitation actuelle à dix tonnes, qui est trop souvent bafouée faute de la
présence policière que je demande. Ce pont ne doit être réservé qu'au strict
trafic local. Il doit conserver sa vocation.
Monsieur le ministre, que valent toutes les lois sur le bruit, sur l'air, sur
l'aménagement du territoire... si, dans les faits, se multiplient les
situations invivables pour nos concitoyens ? Il faut se donner les moyens
financiers de cette politique ! C'est ce qui fait défaut au projet de loi de
Mme Lepage. Nous le lui avons d'ailleurs dit quand elle l'a présenté.
Avec le maire de Choisy, les Choisyens et le comité de défense, je continuerai
à me battre, comme nous l'avons fait mercredi dernier en stoppant la
circulation, pour que cette proposition aboutisse, ainsi que celle visant à
faire assurer la sécurité et le respect des limitations de vitesse grâce à des
agents supplémentaires.
SITUATION DE LA DESSERTE FERROVIAIRE
ET DES INSTALLATIONS SNCF DE CRÉPY-EN-VALOIS (OISE)
M. le président.
M. Philippe Marini appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, du
logement, des transports et du tourisme sur la situation particulièrement
préoccupante de la desserte ferroviaire et des installations SNCF de
Crépy-en-Valois, dans le département de l'Oise.
S'agissant des installations SNCF, qui n'ont pas du tout évolué depuis
cinquante ans, leur extrême vétusté n'a d'égale que leur dangerosité : des
quais trop courts pour les trains modernes, ce qui oblige une partie des
usagers à descendre hors quais, un accès unique aux quais face à la seule porte
d'entrée de la gare qui concentre la quasi-totalité des usagers aux heures de
pointe, des quais pour l'essentiel en terre battue, presque totalement sans
abri couvert, un hall de gare exigu, un unique guichet permanent, l'absence de
passage souterrain, un parking SNCF payant mais non surveillé et souvent
vandalisé, des voies ferrées jonchées de détritus de toutes sortes, en plein
centre-ville, et qui n'ont pas été nettoyées depuis plus d'un an, un domaine
SNCF de quinze hectares en friche couvert de déchets, d'herbes folles et de
panneaux publicitaires, un passage à niveau à commande manuelle en plein
centre-ville.
Or, il ne s'agit nullement d'une petite gare de campagne, sur une ligne
secondaire, mais d'une gare importante de la ligne Paris-Laon, située dans une
commune de 15 000 habitants qui accueille près de 4 400 voyageurs chaque jour.
La SNCF a déclaré récemment qu'un projet d'amélioration était à l'étude, et
l'annonce d'un contrat SNCF-région-commune a été faite aux mois de mai et juin
derniers. C'est encourageant, mais il faut faire vite, car il s'agit de
rattraper cinquante ans d'abandon du patrimoine. Et il faut que la SNCF prenne
ses responsabilités sur le plan financier.
S'agissant, en second lieu, de la desserte, il est souhaitable que le sens du
service au public l'emporte sur le seul critère de rentabilité immédiate. Il ne
s'agit pas, il est bon de le rappeler, de voyages d'agrément mais d'usagers qui
se rendent et reviennent quotidiennement de leur travail.
Or, déjà, l'arrêt à Crépy-en-Valois a été supprimé unilatéralement sur un
train dans chaque sens, le Paris-Laon de 18 heures 39 et le Laon-Paris de 5
heures 29, alors qu'il s'agit de trains rapides dans des créneaux horaires où
la demande des Crépinois est importante. Pis, depuis septembre 1994, les trains
sont de plus en plus fréquemment terminus à Mitry-Claye, et les liaisons
directes ont été supprimées parallèlement. Le bilan est remarquable, la
correspondance à Mitry-Claye dure entre sept et quinze minutes, le soir cette
gare est fermée aux usagers dès 21 heures, et surtout le temps de trajet,
notamment le soir après 20 heures, atteint une heure dix minutes pour
soixante-quatre kilomètres. Or ces horaires concernent un grand nombre de
cadres et de travailleurs aux horaires décalés, en particulier des femmes. En
matière de desserte aussi, la SNCF doit prendre ses responsabilités.
En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui indiquer dans quelle mesure
les légitimes préoccupations du maire de Crépy-en-Valois et de la population
crépinoise seront prises en compte et dans quel délai précis. (N° 436.)
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini.
Par cette question, je m'efforce d'appeler l'attention de M. le ministre de
l'équipement, du logement, des transports et du tourisme sur une situation qui
ne manque pas d'étonner.
A Crépy-en-Valois, commune de 15 000 habitants, la gare accueille près de 4
400 voyageurs par jour, dont bon nombre se rendent quotidiennement à Paris pour
leur travail. Or, la longueur des quais de la gare SNCF est insuffisante par
rapport à la longueur des trains et certains usagers doivent gagner leur wagon
en marchant sur les voies.
Par ailleurs, en centre-ville, un domaine de 15 hectares reste en friche et
n'est pas entretenu par la SNCF.
En outre, il demeure un passage à niveau à commande manuelle en plein
centre-ville.
En bref, la situation n'est véritablement pas de notre époque et elle n'est
pas supportable.
Dans le contrat de plan passé entre la SNCF et la région, un certain nombre
d'indications ont été données. Mais je n'ai pas souvenir d'engagements bien
précis dans le temps.
J'ajoute que de réels problèmes se posent en matière de desserte depuis 1944,
date à laquelle une modification des liaisons a été opérée.
Je souhaiterais que M. le ministre m'apporte des éléments précis pouvant
répondre aux préoccupations de la municipalité de Crépy-en-Valois et des
usagers de la SNCF.
Monsieur le ministre, en l'occurrence, je crois que l'on atteint les limites
du principe de la participation des régions. Personne ne saurait nier ce
principe, mais il faut considérer le problème que cela pose lorsqu'il s'agit de
liaisons interrégionales, comme c'est le cas pour la liaison entre le sud de
l'Oise et l'Ile-de-France que je viens d'évoquer. Pour le conseil régional de
Picardie, l'amélioration des relations avec Paris est-elle une véritable
priorité ?
Monsieur le ministre, j'attends avec confiance votre réponse.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Pierre-André Périssol,
ministre délégué au logement.
Monsieur le sénateur, M. Bernard Pons
aurait également souhaité vous répondre personnellement. En son nom, je peux
vous assurer que le Gouvernement est particulièrement sensible à la nécessité
d'améliorer la qualité du service ferroviaire, notamment en matière d'accueil
des usagers et de sécurité.
Dans le cadre du contrat de plan Etatrégion 1994-1998, un projet de
modernisation de l'axe Paris-Mitry-Laon est envisagé pour un montant de 285
millions de francs, la participation de l'Etat s'élevant à 70 millions de
francs.
En ce qui concerne la gare de Crépy-en-Valois, le projet inclut l'amélioration
des conditions d'accueil de la clientèle par la création d'un ouvrage
souterrain de franchissement des voies et d'accès aux quais et son prolongement
en passage public, par l'allongement des quais, enfin, par la modernisation du
bâtiment voyageurs, des quais et des abords.
Ces travaux ne pourront être engagés qu'après signature de la convention entre
la SNCF et les collectivités concernées.
S'agissant de la desserte de Paris-Crépy-en-Valois, celle-ci est assurée à la
fois par des trains de grandes lignes et par des trains de la banlieue
parisienne ; elle a été repensée dans le cadre de l'aménagement du bassin
parisien.
La SNCF a par ailleurs examiné la possibilité d'un arrêt à Crépy-en-Valois
pour les trains Paris-Laon de 18 heures 39 et Laon-Paris de 5 heures 29.
De l'étude sur la clientèle effectuée par la SNCF, il apparaît que, compte
tenu du potentiel de trafic et de la capacité trop faible des rames diesel
desservant les villes au-delà de Crépy, il fallait dissocier les relations
Paris-Crépy-en-Valois. Toutefois, il convient de noter qu'il n'y a pas eu de
suppression de trains puisque des rames « banlieue » assurent, dans un horaire
proche, la relation Paris-Crépy. Il s'agit des trains partant de Paris à 18
heures 16 et 18 heures 46. Dans l'autre sens, il s'agit des trains en partance
de Crépy-en-Valois à 6 heures 01 et 6 heures 34.
En ce qui concerne la desserte de soirée par navette entre Mitry et
Crépy-en-Valois, la situation résulte d'un accord avec le conseil régional de
Picardie et le syndicat des transports parisiens. Cette modification de
dessertes, intervenue au service d'hiver 1994, a permis de mettre en service en
soirée trois relations Paris Crépy au lieu de deux antérieurement.
J'ai bien noté que le conseil général de l'Oise et la municipalité de
Crépy-en-Valois, lors de la réunion tenue, le 23 mai dernier au conseil
général, sur les améliorations des infrastructures de la ligne Paris-Laon, ont
exprimé le souhait qu'il y ait en soirée des relations sans changement. Cette
demande a d'ailleurs également été présentée par des élus et des associations
d'usagers.
C'est pourquoi, depuis le 29 septembre, il y a prolongement des derniers
trains de banlieue ayant pour origine ou terminus Mitry-Claye : départ gare du
Nord à 22 heures 51, arrivée à Crépy-en-Valois à 23 heures 46 et, dans l'autre
sens, départ Crépy-en-Valois à 21 heures 35, arrivée à Paris à 22 heures 31.
J'ajoute que la qualité du service public envers l'usager, en matière tant de
dessertes, de fréquence des services que de confort, fait l'objet de la
réflexion que les services du ministère de l'équipement, du logement, des
transports et du tourisme ont lancé dans le cadre de l'expérimentation du
transfert aux régions de l'organisation et du financement des transports
collectifs d'intérêt régional.
M. Philippe Marini.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini.
Je souhaite, monsieur le ministre, que vous soyez mon interprète auprès de M.
Pons pour le remercier de la teneur de cette réponse, qui, sur les deux aspects
que j'ai évoqués, me semble de nature à apaiser les craintes et les
préoccupations exprimées à l'échelon local.
S'agissant des horaires, j'avais rédigé le texte de ma question à la fin du
mois de juillet. Depuis, la situation a progressé. Comme nous nous plaisons
tous deux à le souligner, ce dossier a réellement connu de sérieuses avancées,
grâce notamment, comme vous l'avez rappelé, à l'effort du département de
l'Oise, mais aussi grâce à la compréhension de M. Bernard Pons et de la
direction générale de la SNCF. Ainsi, les problèmes de desserte criants que
j'avais signalés devraient connaître une réelle amélioration.
PRISE EN COMPTE POUR LE CALCUL DES DROITS
À LA RETRAITE DES SERVICES ACCOMPLIS
DANS LA RÉSISTANCE AVANT L'ÂGE DE SEIZE ANS
M. le président.
M. Philippe Marini attire l'attention de M. le ministre délégué aux anciens
combattants et victimes de guerre sur la prise en compte, pour le calcul des
droits à la retraite, des services accomplis dans la Résistance avant l'âge de
seize ans.
En premier lieu, il lui rappelle qu'il était intervenu à maintes reprises
auprès de ses prédécesseurs sans obtenir d'autre réponse que l'annonce d'une «
réflexion interministérielle en cours ».
En l'absence d'homologation des services de la Résistance par l'autorité
militaire, forclose depuis 1951, cette mesure ne pourrait se concevoir que pour
la tranche d'âge comprise entre quatorze et seize ans puisque, à l'époque,
l'obligation de scolarité était fixée à l'âge de quatorze ans. Par conséquent,
cette mesure ne concerne qu'un nombre limité de personnes.
En effet, on estime entre 100 et 200 le nombre des personnes qui ont pu se
trouver dans l'impossibilité d'exercer une activité professionnelle en raison
de leur engagement au sein de la Résistance et ne peuvent actuellement
justifier d'une attestation de durée de services établie par l'Office national
des anciens combattants et victimes de guerre, qui ne délivre ce document que
pour la partie des services de résistance accomplie à partir de l'âge de seize
ans. Ce chiffre doit d'ailleurs être comparé à celui des cartes de combattants
volontaires de la Résistance délivrées à ce jour, soit un peu plus de 260 000.
Tous les titulaires de ce titre ont bénéficié, depuis l'origine, de tous les
avantages édictés par le législateur en faveur des combattants volontaires de
la Résistance. Seule une poignée restante des plus jeunes combattants se heurte
depuis cinquante ans au refus de leur accorder les mêmes droits, alors que les
bénéficiaires sont âgés maintenant presque tous de soixante-cinq ans.
En conséquence, il souhaiterait connaître les perspectives de son action en ce
domaine, s'agissant de personnes qui, dès leur prime jeunesse, ont tant risqué
pour la liberté de notre pays. Cette mesure constituerait un juste témoignage
de reconnaissance pour le courage qu'ils ont manifesté. (N° 432.)
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question
traite d'un sujet sur lequel j'ai appelé l'attention des gouvernements
successifs depuis déjà quelques années.
En fait, nous nous trouvons dans un cas d'incompréhension administrative, qui
concerne un certain nombre de jeunes gens qui se sont engagés dans la
Résistance alors qu'ils n'avaient pas encore seize ans et dont les actes sont
attestés par de nombreux témoins et répertoriés.
Ces jeunes gens d'alors, qui ont été particulièrement courageux - un ouvrage
récent retrace leurs expériences individuelles - arrivent aujourd'hui à l'âge
de la retraite. Or voilà qu'ils ont la surprise de constater que
l'administration refuse de prendre en compte dans le calcul de leurs droits les
services de résistance qu'ils ont accomplis entre quatorze et seize ans.
Sont concernées entre 100 et 200 personnes qui, lorsqu'elles se sont engagées,
n'ont fait aucun calcul, n'ont écouté que leur coeur, que leur sens du
devoir.
Voilà le problème que je vous soumets, monsieur le ministre. Je vous fais
confiance car, comme chacun d'entre nous, je connais votre engagement
personnel, et je sais qu'à l'égard de telles situations vous ne pouvez
qu'éprouver une réelle sympathie.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Pierre Pasquini,
ministre délégué aux anciens combattants et victimes de guerre.
Monsieur
le sénateur, je crains fort que, pour le moment, il ne soit pas possible de
vous donner satisfaction sur une question que vous soulevez depuis pourtant
fort longtemps, ce dont je vous rends hommage.
Vous évoquez la prise en compte pour le calcul des droits à la retraite des
services rendus à la Résistance par de jeunes garçons - j'allais dire des
enfants - qui n'avaient pas seize ans.
On ne peut que regretter que les intéressés aient attendu si longtemps pour
faire valider ces périodes. En effet, si l'administration dont j'ai la charge
ne peut délivrer d'attestation que pour des services accomplis à partir de
l'âge de seize ans, l'autorité militaire pouvait parfaitement homologuer les
titres que vous évoquez, mais ce jusqu'en 1951 seulement, puisque la forclusion
est intervenue à cette date. A supposer que ces jeunes aient eu quinze ou seize
ans à la fin de la guerre, en 1951, ils avaient plus de vingt ans et étaient
donc à même de demander cette homologation.
Vous indiquez, monsieur le sénateur, que vous êtes intervenu à maintes
reprises auprès de mes prédécesseurs sans obtenir d'autre réponse que l'annonce
d'une réflexion interministérielle. J'ai fait rechercher, puisque je ne suis en
fonctions que depuis quelques mois, quel avait pu être l'aboutissement de cette
réflexion interministérielle et je me suis aperçu que les interventions que
vous avez faites, notamment en 1995, avaient déjà fait l'objet d'une réponse,
réponse dont il est possible que vous n'ayez pas eu connaissance.
Ainsi, j'ai trouvé dans les archives de mon ministère une note du ministère
des affaires sociales dont je me permets de vous lire un extrait : « Pour les
personnes qui auraient accompli entre quatorze ans et seize ans des services de
Résistance n'ayant pas fait l'objet d'une homologation par l'autorité
militaire, la validation de ces services ne peut être envisagée, dans un souci
d'équité entre retraités, que si elle est compatible avec les règles propres
aux différents régimes de retraite. »
Le ministère du budget a rappelé de son côté que « c'est dans un souci
d'équité entre les ressortissants des divers régimes qu'ont été harmonisées les
règles de prise en compte des périodes de Résistance ». L'unité de
réglementation dans l'instruction des dossiers a pour principal objet de servir
l'intérêt des anciens Résistants.
Il est peu vraisemblable que, compte tenu de leur situation financière, les
régimes de retraite acceptent de s'engager dans cette voie, même si les
effectifs en cause sont peu nombreux. Il n'est donc pas possible de répondre
favorablement à votre demande.
M. Philippe Marini.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini.
Monsieur le ministre, vous venez de rappeler, avec beaucoup d'honnêteté et de
vérité, les derniers actes de cette affaire.
Si je me suis permis de poser cette question, c'est qu'elle me semble tout à
fait emblématique et significative.
Il s'agissait d'enfants, dites-vous. Mais, en situation de guerre, à quatorze
ans, on est un homme. Dans l'histoire, que de grandes choses ont été faites par
des personnes de quatorze ans !
Il s'agit donc de jeunes gens qui n'ont rien calculé avant de s'engager, qui
ont pris leurs responsabilités, et on ne peut que les remercier de l'avoir
fait.
Après la guerre, bien entendu, ils étaient encore relativement jeunes :
l'administration et la paperasserie ne faisaient certainement pas partie de
leur univers quotidien, d'autant qu'il s'agissait de gens qui avaient un
certain goût du risque ; or goût du risque et démarches administrative sont
plutôt antinomiques...
Bien sûr, il y a des règlements, et je comprends ce qui fonde la réponse des
administrations concernées. Mais deux années de droit à retraite pour quelques
centaines de personnes, on ne va pas me dire que cela met en péril l'équilibre
des régimes !
Quant à l'effet de précédent, on peut le limiter en mettant l'accent sur le
caractère très particulier des situations en cause.
Monsieur le ministre, j'ose espérer que, avec la passion qui vous caractérise,
vous saurez être un avocat de ces quelques centaines de personnes qui attendent
ce signe de reconnaissance.
M. François Giacobbi.
Reportez-vous au
Chant du départ :
Bara et Viala, voilà des précédents
historiques connus !
SITUATION DE DEUX FILLETTES FRANÇAISES
SÉQUESTRÉES EN ÉGYPTE
M. le président.
Mme Joëlle Dusseau attire l'attention de M. le ministre des affaires
étrangères sur la situation particulièrement difficile que connaissent deux
fillettes françaises à l'heure actuelle.
Nées d'une mère française et d'un père égyptien aujourd'hui divorcés, elles se
trouvent actuellement séquestrées en Egypte.
En effet, en décembre 1993, au cours d'un droit de visite, le père les a
emmenées illégalement en Egypte, alors que l'ordonnance de non-conciliation
avait désigné la mère pour garder les enfants et interdit leur sortie du
territoire français.
En février 1994, le juge aux affaires familiales en charge de la procédure de
divorce attribuait l'autorité parentale à la mère seule, ordonnait la
suppression du droit de visite paternel et interdisait la sortie des enfants du
territoire national.
Après de nombreuses démarches, la Cour d'Alexandrie, en mars 1995, décidait
l'exequatur de la décision française.
Malgré cela, les fillettes demeurent toujours en Egypte.
Elle souhaite connaître les mesures que compte prendre M. le ministre afin que
cette affaire soit rapidement résolue. (N° 428.)
La parole est Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Monsieur le président, au risque de contrevenir aux usages de ces séances de
questions orales sans débat, je me permettrai de faire observer à M. Marini,
qui a évoqué les jeunes gens de quatorze à seize ans qui sont entrés dans la
Résistance, qu'il y avait aussi des femmes dans la Résistance, comme
l'affirmait le titre d'un livre célèbre, et que, parmi ces personnes ayant, dès
le plus jeune âge, rejoint la lutte contre l'occupant, il devait se trouver
aussi des jeunes filles.
J'aimerais que, dans ce long combat qu'il mène et qui, visiblement, lui tient
à coeur, M. Marini n'oublie pas que la Résistance s'est aussi « conjuguée » au
féminin.
Priant le Sénat de m'excuser d'avoir ainsi évoqué le sujet abordé par un de
mes collègues, j'en viens à ma propre question, qui concerne le cas de deux
petites filles de nationalité française, Sana et Sabrya, actuellement âgées de
cinq et sept ans.
Nées en France d'une mère française et d'un père qui a obtenu la nationalité
française par son mariage, ces petites filles ont été confiées, en octobre
1993, à la garde de leur mère à la suite de la séparation de leurs parents,
l'ordonnance de non-conciliation interdisant, en outre, leur sortie du
territoire national.
Or, le mois suivant, profitant de l'exercice de son droit de visite, le père a
emmené illégalement ses deux fillettes de quatre et deux ans dans son pays
d'origine, l'Egypte. Depuis, la maman de Sana et Sabrya n'a jamais revu ses
filles.
Le tribunal des Sables-d'Olonne, dans le jugement de divorce, qui est
intervenu après l'enlèvement des deux petites filles, a réitéré l'interdiction
de sortie du territoire et supprimé le droit de visite pour le père.
Par exequatur, la justice égyptienne a reconnu les ordonnances prises par les
magistrats français ; cette décision a d'ailleurs été confirmée en appel et,
tout récemment, en cassation.
Ainsi, pour une fois, contrairement à ce qu'il en est dans bien d'autres
affaires de ce genre, les justices des deux pays sont d'accord. Pourtant, la
situation reste bloquée. Ni ces décisions successives et concordantes, ni les
séjours en Egypte de la mère, qui n'a même pas pu, alors, voir ses enfants, ni
l'intervention personnelle et officielle de M. de Charette n'y ont mis un
terme.
La visite en Egypte du Président de la République française, en avril dernier,
a certes permis de réaliser une avancée puisque le père a été arrêté. Mais,
très vite, celui-ci a été libéré pour de prétendues raisons de santé.
Tous les intervenants sentent bien que, au-delà des décisions de la justice,
il y a une mauvaise volonté évidente de la part de l'Egypte exécuter
véritablement ses propres décisions judiciaires. La police ne coopère
visiblement pas ; on dit que les enfants sont en Arabie, alors qu'on sait très
bien où habite le père et qu'on n'a eu aucun mal à procéder à son arrestation.
La justice n'avait même pas averti les avocats de la mère du pourvoi en
cassation du père. Quant à la presse, elle prend fait et cause pour le père,
présente la mère comme une « impure » qui a volé les biens du père et veut lui
ravir ses enfants.
Monsieur le ministre, se présente aujourd'hui une double opportunité : d'une
part, la décision de la Cour de cassation égyptienne, dont on vient d'avoir
connaissance, va dans le même sens que tous les jugements précédents, qu'ils
soient français ou égyptiens ; d'autre part, le Président de la République
française va de nouveau se rendre en Egypte à la fin du mois. Il faut qu'il
ramène Sana et Sabrya.
Sana va avoir sept ans. Or, d'après la loi islamique, c'est l'âge auquel le
père a tout pouvoir sur ses enfants. Nous n'avons donc pas le droit de laisser
pourrir la situation.
Au nom de la justice, bien sûr, qu'il faut faire respecter, au nom de
l'humanité - on se doute dans quel état est la mère, privée de ses deux petites
filles depuis maintenant trois ans -, au nom aussi de la crédibilité de notre
pays, qui risque de sortir bafouée de cette triste affaire, je demande au
Gouvernement de tout mettre en oeuvre pour que Sana et Sabrya retrouvent enfin
leur mère sur le territoire de leur pays, de notre pays.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Pierre Pasquini,
ministre délégué aux anciens combattants et victimes de guerre.
Madame le
sénateur, j'ai le grand honneur de vous répondre au nom de M. Hervé de
Charette, qui est actuellement absent de France.
Devant une affaire aussi humainement douloureuse que celle-ci, je ne peux
oublier que j'ai passé la plus grande partie de ma vie à exercer la profession
d'avocat et à faire respecter les lois. Or les lois donnent raison à votre
cause.
En effet, les différentes décisions de justice que vous évoquez indiquent que
ces enfants sont confiés à la mère, le père étant même privé de son droit de
visite pour s'être livré à une voie de fait.
C'est là, malheureusement, une mésaventure que connaissent de nombreuses
femmes françaises qui ont eu l'occasion de s'unir par mariage à des Algériens,
par exemple, auxquels elles ont offert, en plus, la possibilité d'obtenir la
nationalité française, et c'est le genre d'affaire où le droit est brimé par le
fait, sinon par la force.
Il reste que tout espoir n'est pas définitivement perdu.
Il convient de souligner que, en application de la convention
franco-égyptienne, l'autorité judiciaire égyptienne soutient la position des
magistrats français. C'est ainsi que, le 30 septembre dernier, la Cour de
cassation égyptienne, saisie par le père d'un recours contre la décision
d'exequatur des mesures prises en France, a rejeté la demande de sursis à
exécution qu'il avait formulée. Donc, l'unanimité des justices française et
égyptienne soutient la cause de la mère.
Vous affirmez, madame le sénateur, que les autorités égyptiennes savent où est
le père. Il s'agit pour elles d'aller chercher les enfants et de les
prendre.
Quoi qu'il en soit, M. de Charette me prie de vous dire que le Président de la
République prendra en charge cette affaire lors de son prochain voyage en
Egypte. Je n'ose vous dire qu'il ramènera les enfants comme vous le souhaitez,
car cela n'entre pas, me semble-t-il, dans son rôle. Mais tout sera mis en
oeuvre pour que tant la loi française que la loi égyptienne soient respectées
et que ces deux enfants puissent revenir vivre auprès de leur mère, dans la
paix.
M. Jacques Habert.
Très bien !
Mme Joëlle Dusseau.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Monsieur le ministre, vous rappelez qu'existe une convention entre la France
et l'Egypte, qui a été signée en 1982. On peut imaginer ce qu'il en est, en
pareil cas, lorsqu'une telle convention n'a pas été passée entre la France et
le pays en cause.
Au moins, dans le cas qui nous occupe, la justice égyptienne a été « tenue »
par cette convention, elle a été « obligée » de prendre ces décisions.
Hélas ! on sent bien que, parallèlement, l'opinion publique égyptienne est
hostile à la restitution des enfants à leur mère, et cette hostilité affecte
même l'appareil judiciaire égyptien. Ainsi, chaque fois que le père a engagé
une procédure supplémentaire, comme par hasard, les avocats de la mère n'en ont
été informés qu'à la dernière minute, de telle sorte qu'il leur était
matériellement impossible d'intervenir. Il y a donc manifestement, en Egypte,
une volonté de bloquer la situation.
Or le père a indiqué très nettement qu'il ne rendrait pas les filles. Dans la
mesure où l'aînée arrive à cet âge de sept ans où la loi islamique place
l'enfant sous la dépendance du père, cela peut permettre au père de lancer une
autre procédure.
C'est pourquoi je me permets de dire que le Président de la République doit
ramener ces petites filles en France. Il va prendre en charge le dossier,
dites-vous, monsieur le ministre. Il l'a déjà fait, et la famille lui en est
très reconnaissante. C'est en effet à la suite de son intervention, lors de son
dernier voyage en Egypte, que, pour la première fois, le père, soudain
retrouvé, a été emprisonné, avant d'être relâché quelques jours après.
Je me permets donc d'insister pour que M. de Charette informe bien le
Président de la République que, à côté du point positif que constitue la
décision de la Cour de cassation égyptienne, subsiste une énorme inquiétude
pour tous ceux qui suivent ce dossier, inquiétude qui justifie que l'on passe à
la vitesse supérieure pour exiger le retour effectif de ces deux petites filles
en France.
8
NOMINATION DE MEMBRES D'UN
ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président.
Je rappelle que les commissions des affaires culturelles, des affaires
économiques et des finances ont présenté des candidatures pour un organisme
extraparlementaire.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par
l'article 9 du règlement.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame MM. Pierre
Laffitte, Gérard Delfau, Pierre Hérisson, Gérard Larcher, Jean-Marie Rausch,
René Trégouët et François Trucy membres de la commission supérieure du service
public des postes et télécommunications.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à midi, est reprise à seize heures, sous la présidence
de M. René Monory.)
PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY
M. le président.
La séance est reprise.
9
ÉLOGE FUNÈBRE DE JACQUES SOURDILLE
SÉNATEUR DES ARDENNES
M. le président.
Mes chers collègues, je vais prononcer l'éloge funèbre de Jacques
Sourdille.
(M. le ministre, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.)
« Là où il y a une volonté, il y a un chemin ». Cette maxime, que Jacques
Sourdille a fait sienne durant les heures sombres de l'Occupation, animera une
vie entière de courage et de détermination.
La maladie dont nous le savions atteint a eu raison de ses forces. Jacques
Sourdille, sénateur des Ardennes, nous a quittés le 8 juillet dernier.
C'est avec une vive émotion que j'évoque aujourd'hui un destin
exceptionnel.
Jacques Sourdille naît à Nantes le 19 juin 1922, dans une famille de médecins.
Après des études secondaires au lycée Georges-Clemenceau, le jeune bachelier
s'apprête à suivre la même voie que son père, professeur, chercheur et membre
de l'Académie de médecine, lorsque la guerre éclate. Sa vie et ses projets vont
être bouleversés. « Septembre 1939, écrira-t-il plus tard, c'est la découverte
pour beaucoup qu'il n'est plus le temps des choix individuels lorsqu'on s'est
laissé acculer à la guerre ».
L'exode le conduit avec sa famille dans le Sud-Ouest, jusqu'au Pays basque. A
l'annonce de l'armistice, répondant à l'appel de ceux qui refusent la défaite,
il tente de s'embarquer pour la Grande-Bretagne. Mais l'enthousiasme de ses
dix-sept ans est déçu : le jeune homme ne peut quitter le port de
Saint-Jean-de-Luz. Revenu à Nantes, il entreprend ses études de médecine. La
ville sera bientôt sous l'émotion du drame des « fusillés de Châteaubriant »,
représailles aveugles qui font suite à l'assassinat d'un officier de la
Kommandantur. Le martyr de ces otages le révolte profondément et l'appelle à la
résistance : « Acteurs ou victimes, ce sera notre choix désormais, »
Jacques Sourdille rejoint Paris et l'hôpital Saint-Louis en 1942. En troisième
année de médecine, sous l'emprise de la nécessité, il devient chirurgien dans
la capitale occupée, marquée par la pénurie.
Réfractaire au STO, il entre dans la clandestinité comme agent de
renseignements dans un réseau anglais, confirmant, à vingt ans, son refus de
toute soumission à l'occupant. Suit alors une inlassable mais dangereuse quête
de renseignements. Le mur de l'Atlantique, le moral des troupes ennemies et
même un site de fusées « V 1 » sont les sujets d'observation du jeune
résistant. Recruté par les hommes du général de Gaulle, il devient lieutenant
des forces françaises combattantes.
Arrêté à Flers en 1944 par la Gestapo, il est déporté au camp de concentration
de Neuengamme. De cette période terrible, qu'il appelait la « sale guerre », il
n'aimait pas parler.
A la Libération, Jacques Sourdille est l'un des trois survivants sur les
quarante-sept hommes que comptait son commando. Cinq années de sanatorium
seront nécessaires au rétablissement d'un homme physiquement brisé, qui ne pèse
plus que trente-trois kilos, mais dont la volonté est intacte.
Jacques Sourdille reprend sa formation médicale, qu'il conduira brillamment
jusqu'à l'internat, puis l'agrégation. Médecin hospitalier à Paris, spécialisé
en ophtalmologie, il s'engage dans l'action syndicale et sera membre du conseil
fédéral de la Confédération générale des cadres. Directeur d'enquête à
l'INSERM, il enseignera à l'université de Dakar, puis à Paris VII.
Ophtalmologiste expert auprès de l'Organisation mondiale de la santé en 1974,
il participera, en tant que professeur détaché à l'UNESCO, au programme de
formation de santé publique de l'Afrique de l'Ouest, de 1983 à 1986.
L'intérêt passionné de Jacques Sourdille pour les questions médicales et pour
les pays en voie de développement ne le quittera pas durant toute sa carrière
parlementaire.
Il entre en politique en 1968, à la demande de Georges Pompidou, qui lui
suggère de présenter sa candidature pour les élections législatives dans les
Ardennes. Il est élu. Membre de la commission des affaires culturelles,
familiales et sociales, puis de la commission des finances, le député des
Ardennes travaille beaucoup, et sur des domaines variés : la santé, la
recherche, l'éducation nationale, la dette des pays en voie de développement.
Il siège au Parlement européen, ainsi qu'à l'assemblée du Conseil de l'Europe.
Il occupe les fonctions de secrétaire national de l'UDR pour les affaires
sociales, puis de secrétaire adjoint du mouvement en 1973 et en 1974.
En mars 1977, Jacques Sourdille est appelé au Gouvernement par Raymond Barre,
qui lui confie le secrétariat à la recherche. Il retrouve son siège de député
de 1978 à 1981, puis de 1986 à 1988.
Elu sénateur des Ardennes en 1989, Jacques Sourdille n'oubliera pas ses
responsabilités de médecin. Rapporteur pour la commission des lois de textes
importants, sur la protection juridique des malades et des handicapés ou sur la
lutte contre le travail clandestin, il intervient aussi longuement dans la
discussion du projet de loi réprimant le trafic illicite de stupéfiants.
Surtout, Jacques Sourdille se distingue par la détermination et l'autorité
avec lesquelles il préside la commission d'enquête sur le système
transfusionnel français, entre 1991 et 1992. Attentif à la situation de
personnes promises à une mort programmée, Jacques Sourdille partage « la
révolte de ceux que des perfusions de sang ou des produits sanguins ont
contaminés dans la confiance ». Il conduit les auditions de la commission
d'enquête avec une grande rigueur, soucieux de mettre à jour la vérité dans un
contexte peu propice à une investigation sereine.
Mais bien d'autres sujets nourrissent la réflexion et les travaux du sénateur
Sourdille. Rapporteur, au nom de la commission des lois, de textes relatifs aux
collectivités locales, il prend en charge le budget de l'aménagement du
territoire à la commission des finances, qu'il a rejointe en 1992. Membre de
l'Office d'évaluation des choix scientifiques et technologiques tout au long de
son mandat, il est l'auteur d'une étude sur la coopération avec les pays de
l'Est, publiée en 1994.
Si sa carrière d'élu national est particulièrement féconde, Jacques Sourdille
reste très attaché à sa circonscription, dans laquelle il s'est solidement
implanté.
D'abord élu conseiller général des Ardennes en 1970, puis conseiller municipal
de Sedan en 1973, il siège aussi au conseil régional de Champagne-Ardenne,
qu'il préside de 1974 à 1981.
Jacques Sourdille participe avec enthousiasme au processus de
décentralisation, défendant ardemment les prérogatives de l'échelon
départemental. Elu à la présidence du conseil général en 1982, il soutient la
cause des Ardennais avec pugnacité.
Luttant pour le développement des infrastructures, il s'attache également au
chantier de dépollution de la Meuse. En 1993, il succède à Pierre Messmer à la
tête du comité de bassin Rhin-Meuse, défend le principe du « pollueur-payeur »
et développe la coopération internationale pour la protection de la Meuse et de
l'Escaut.
Victime en 1995 d'un grave accident cérébral, Jacques Sourdille renonce à la
présidence du conseil général. Lucide sur son état, profondément affecté par le
décès de son fils Jérôme, il ne se sentait plus capable d'assumer pleinement
l'exécutif départemental.
La vie entière de Jacques Sourdille illustre le refus de la soumission.
Cette attitude constante lui a valu de conserver toujours une liberté de ton
certaine et une grande indépendance, allant de pair avec une fidélité jamais
démentie au gaullisme et à l'esprit de résistance.
Au nom du Sénat tout entier, j'assure de notre émotion ses collègues du groupe
du RPR et tous ceux à qui Jacques Sourdille était cher. J'adresse à son épouse,
à ses enfants, à toute sa famille, le témoignage de notre vive affliction.
M. Roger Romani,
ministre des relations avec le Parlement.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Roger Romani,
ministre des relations avec le Parlement.
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, à mon tour, et au nom du Gouvernement, je
voudrais rendre un dernier hommage à Jacques Sourdille, qui fut un grand
patriote et un grand serviteur de la République.
Sa vie fut, en effet, une véritable leçon de volonté, de courage et de
dévouement.
Sur l'essentiel, Jacques Sourdille n'a jamais transigé. A vingt ans, en 1942,
il entre en clandestinité et rejoint les rangs de la Résistance.
Il n'hésite pas à s'exposer et risque sa vie avec beaucoup de courage et
d'audace dans de nombreuses opérations.
Arrêté par la Gestapo en 1944, il connaît les conditions de détention
épouvantables du camp de concentration de Neuengamme. Il lui faut une volonté à
toute épreuve et un acharnement hors du commun pour y survivre. A son retour en
France, il sera hospitalisé pendant cinq années dans un sanatorium.
Jacques Sourdille n'aimait pas parler de sa guerre. Par modestie, bien sûr,
mais plus sûrement parce qu'il considérait qu'il n'avait fait là que son devoir
envers son pays et ses concitoyens.
C'est cette force d'âme, cette attention aux autres qui l'engagent à reprendre
ses études de médecine interrompues par la guerre. Il se spécialise en
ophtalmologie, domaine dans lequel il ne tarde pas à devenir une autorité
reconnue, particulièrement en ce qui concerne la cécité des enfants.
Jacques Sourdille, dont l'apparente rudesse dissimulait bien mal une grande
sensibilité, est très préoccupé par les retards sanitaires des pays en
développement. Il enseigne en Afrique et travaille à l'UNESCO sur des
programmes de formation de santé publique.
Il aurait sans doute consacré sa vie entière à l'ophtalmologie si on ne lui
avait demandé de servir à nouveau son pays.
C'est à la demande du Président Pompidou qu'après la dissolution de
l'Assemblée Nationale en mai 1968 il se présente aux élections législatives
dans les Ardennes. Il est élu député et entame ainsi une nouvelle et grande
carrière au service de la République. Son sens de l'Etat, sa grande
intelligence très intuitive lui permettront d'exercer des responsabilités
nationales en qualité de secrétaire d'Etat chargé de la recherche dans le
gouvernement deM. Raymond Barre.
Lui qui a su convaincre si vite les électeurs ardennais est rapidement conquis
par sa nouvelle région d'adoption. Il s'y consacre entièrement. Conseiller
général deGrandpré, il devient tour à tour président du conseil régional de
Champagne-Ardenne, puis du conseil général des Ardennes.
Avec une incontestable réussite, il met sa force de travail et son
enthousiasme au service du département, plaidant inlassablement dans les
ministères les dossiers qui lui tiennent à coeur, comme le désenclavement et le
développement économique.
En 1989, Jacques Sourdille est élu sénateur.
L'homme de coeur, qui est aussi un homme de conviction et de droiture, sait se
faire apprécier de tous ses collègues. Vous l'avez rappelé, monsieur le
président, il a présidé avec beaucoup de compétence et beaucoup d'impartialité
une commission d'enquête sur la transfusion sanguine.
Jacques Sourdille manquera à votre Haute Assemblée, car c'est un homme de bien
qui s'en va, un grand patriote, un humaniste toujours au service des autres et
de son pays.
Au nom du Gouvernement, j'adresse à son épouse, à ses enfants, à sa famille, à
ses collègues du groupe du RPR, à tous ceux - et il sont nombreux - qui l'ont
apprécié et aimé mes plus sincères condoléances.
M. le président.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants en
signe de deuil.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures
trente.)
M. le président. La séance est reprise.
10
CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS
M. le président.
La conférence des présidents a établi comme suit l'ordre du jour des
prochaines séances du Sénat :
A. -
Mercredi 16 octobre 1996,
à quinze heures :
Ordre du jour prioritaire
Suite des conclusions de la commission des affaires sociales sur la
proposition de loi de M. Jean-Pierre Fourcade et plusieurs de ses collègues
tendant, dans l'attente du vote de la loi instituant une prestation d'autonomie
pour les personnes âgées dépendantes, à mieux répondre aux besoins des
personnes âgées par l'institution d'une prestation spécifique dépendance (n°
14, 1996-1997).
B. -
Jeudi 17 octobre 1996 :
Ordre du jour prioritaire
A neuf heures trente :
1° Suite des conclusions de la commission des affaires sociales sur la
proposition de loi de M. Jean-Pierre Fourcade et plusieurs de ses collègues
tendant, dans l'attente du vote de la loi instituant une prestation d'autonomie
pour les personnes âgées dépendantes, à mieux répondre aux besoins des
personnes âgées par l'institution d'une prestation spécifique dépendance ;
A quinze heures :
2° Eventuellement, suite de l'ordre du jour du matin ;
3° Projet de loi portant réforme de la réglementation comptable et adaptation
du régime de la publicité foncière (n° 499, 1995-1996) ;
La conférence des présidents a fixé au jeudi 17 octobre, à onze heures, le
délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi ;
C. -
Mardi 22 octobre 1996 :
Ordre du jour établi en application
de l'article 48, troisième alinéa, de la Constitution
A dix heures :
1° Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi relative au
placement sous surveillance électronique pour l'exécution de certaines peines
(n° 3, 1996-1997) ;
2° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, améliorant la
protection des acquéreurs de lots de copropriété (n° 320, 1995-1996) ;
La conférence des présidents a fixé au lundi 21 octobre, à dix-sept heures, le
délai limite pour le dépôt des amendements à ces deux propositions le loi ;
A seize heures :
3° Eloge funèbre de Gérard Gaud ;
4° Question orale avec débat portant sur un sujet européen n° QE-7 de M.
Xavier de Villepin à M. le ministre des affaires étrangères sur la politique
étrangère de l'Union européenne ;
La discussion de cette question s'effectuera selon les modalités prévues à
l'article 83
ter
du règlement ;
5° Suite de l'ordre du jour du matin.
D. - Mercredi 23 octobre 1996 :
Ordre du jour prioritaire
A neuf heures trente :
1° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation
de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement
de la République française et le Gouvernement de la République de Corée (n°
425, 1995-1996).
2° Projet de loi autorisant la ratification de l'accord du 18 mars 1993
modifiant l'accord du 3 août 1959, modifié par les accords du 21 octobre 1971
et du 18 mai 1981 complétant la convention entre les Etats parties au traité de
l'Atlantique Nord sur le statut de leurs forces, en ce qui concerne les forces
stationnées en République fédérale d'Allemagne (n° 452, 1995-1996).
3° Projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le
Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relative
au service militaire des doubles nationaux (ensemble une annexe) (n° 453,
1995-1996).
4° Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de
lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de
la République Argentine relatif à l'emploi des personnes à charge des membres
des missions officielles d'un Etat dans l'autre (n° 480, 1995-1996).
5° Projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de
la République française et le Gouvernement de la République d'Afrique du Sud
sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble
un protocole) (n° 481, 1995-1996).
6° Projet de loi autorisant la ratification de la convention relative à
l'admission temporaire (ensemble cinq annexes) (n° 487, 1995-1996).
7° Projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de
la République française et le Gouvernement de la République d'Arménie sur
l'encouragement et la protection réciproques des investissements (n° 495,
1995-1996).
8° Projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de
la République française et le Gouvernement de Hong Kong sur l'encouragement et
la protection réciproques des investissements (n° 496, 1995-1996).
9° Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de
la République française, le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne,
le Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg et le Conseil fédéral suisse
agissant au nom des cantons de Soleure, de Bâle-Ville, de Bâle-Campagne,
d'Argovie et du Jura, sur la coopération transfrontalière entre les
collectivités territoriales et organismes publics locaux (ensemble une
déclaration) (n° 503, 1995-1996).
10° Projet de loi autorisant l'adhésion de la République française à l'accord
portant création de la commission des thons de l'océan Indien (ensemble deux
annexes) (n° 10, 1996-1997).
A seize heures :
La conférence des présidents a fixé :
_ à quinze minutes le temps réservé au président de la commission des affaires
étrangères, de la défense et des forces armées ;
_ à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat,
les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le mardi 22 octobre
1996.
E. - Jeudi 24 octobre 1996 :
Ordre du jour prioritaire
A neuf heures trente :
La conférence des présidents a fixé au mardi 22 octobre 1996, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
A quinze heures et, éventuellement, le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement ;
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la
séance avant onze heures
3° Suite de l'ordre du jour du matin.
F. - Mardi 29 octobre 1996 :
A neuf heures trente :
1° Dix-sept questions orales sans débat :
L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.
N° 450 de M. Ivan Renar à M. le ministre de la culture (Suppression de
l'abattement pour frais professionnels dont bénéficient les journalistes) ;
N° 451 de M. Ivan Renar à M. le ministre de la culture (Versement de la
subvention de l'Etat aux quotidiens à faibles ressources publicitaires) ;
N° 452 de Mme Danielle Bidard-Reydet à M. le ministre du travail et des
affaires sociales (Avenir de l'hôpital d'Avicenne [Seine-Saint-Denis]) ;
N° 453 de Mme Danielle Bidard-Reydet à M. le ministre de l'éducation
nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche (Situation scolaire
du département de la Seine-Saint-Denis) ;
N° 454 de M. Charles Descours à M. le ministre du travail et des affaires
sociales (Régime d'assurance maladie des personnes veuves ou divorcées) ;
N° 456 de M. Ivan Renar à M. le ministre de la culture (Conséquences pour les
musiciens de la suppression de déductions fiscales supplémentaires pour frais
professionnels) ;
N° 458 de M. Jean-Jacques Robert à M. le ministre du travail et des affaires
sociales (Financement des contrats de qualification) ;
N° 459 de M. Jean-Jacques Robert à M. le ministre de la défense (Avenir du
centre de recherches du Bouchet [Essonne]) ;
N° 460 de Mme Nicole Borvo à M. le ministre de l'équipement, du logement, des
transports et du tourisme (Délocalisation des services centraux de la SNCF)
;
N° 461 de M. André Vezinhet à M. le ministre de l'éducation nationale, de
l'enseignement supérieur et de la recherche (Situation des candidats admis sur
les listes complémentaires aux concours d'enseignement du second degré) ;
N° 462 de M. André Vezinhet à M. le ministre de l'économie et des finances
(Avenir du Crédit foncier) ;
N° 463 de M. Yves Guéna à M. le ministre délégué au logement (Plafonds de
ressources pour l'attribution de logements HLM) ;
N° 464 de M. René Rouquet à M. le ministre de l'éducation nationale, de
l'enseignement supérieur et de la recherche (Manque de place dans les écoles
maternelles du Val-de-Marne) ;
N° 465 de M. Lucien Lanier à M. le ministre de l'éducation nationale, de
l'enseignement supérieur et de la recherche (Bonification indiciaire accordée à
certains chefs d'établissement de l'éducation nationale) ;
N° 466 de M. Louis Minetti à M. le ministre de l'agriculture, de la pêche et
de l'alimentation (Difficultés des producteurs de fruits et légumes) ;
N° 467 de M. Hubert Durand-Chastel à Mme le ministre délégué pour l'emploi
(Développement de l'emploi français à l'étranger) ;
N° 468 de M. Jacques Machet à M. le ministre de l'économie et des finances
(Politique de relance de l'immobilier) ;
A seize heures :
Ordre du jour prioritaire
2° Projet de loi relatif à l'emploi dans la fonction publique et à diverses
mesures d'ordre statutaire (n° 512, 1995-1996).
La conférence des présidents a fixé :
_ au lundi 28 octobre 1996, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt
des amendements à ce projet de loi ;
_ à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat,
les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le lundi 28 octobre
1996.
octobre 1996, à quinze heures :
Ordre du jour prioritaire
H. - Jeudi 31 octobre 1996,
à neuf heures trente et à quinze heures
:
La conférence des présidents a fixé :
_ à quinze minutes le temps réservé au président de la commission des affaires
étrangères, de la défense et des forces armées ;
_ à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat,
les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le mercredi 30
octobre 1996.
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence
des présidents relatives à la tenue des séances ?...
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence
des présidents s'agissant de l'ordre du jour établi en application de l'article
48, alinéa 3, de la Constitution ?...
Les propositions de la conférence des présidents sont adoptées.
11
DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
M. le président.
J'ai reçu de M. le président du Conseil constitutionnel le texte d'une
décision rendue par le Conseil constitutionnel le 14 octobre 1996 sur la
conformité à la Constitution de la résolution, adoptée par le Sénat le 3
octobre 1996, modifiant le règlement du Sénat.
Acte est donné de cette communication.
En conséquence, en application de l'article 61 de la Constitution, les
modifications au règlement votées par le Sénat sont devenues définitives.
Le texte de la décision du Conseil constitutionnel sera publié au
Journal
officiel,
à la suite du compte rendu de la présente séance.
12
CANDIDATURE À UN ORGANISME
EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président.
Je rappelle que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir
procéder à la désignation d'un sénateur appelé à siéger au sein d'un organisme
extraparlementaire.
La commission des affaires économiques et du Plan a fait connaître qu'elle
propose la candidature de M. Michel Souplet pour siéger au sein du conseil
d'administration de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de
l'énergie.
Cette candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l'article 9
du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.
13
INSTITUTION D'UNE PRESTATION SPÉCIFIQUE
DÉPENDANCE
Discussion des conclusions du rapport
d'une commission
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport (n° 14,
1996-1997) de M. Alain Vasselle, fait au nom de la commission des affaires
sociales, sur la proposition de loi (n° 486, 1995-1996) de MM. Jean-Pierre
Fourcade, Alain Vasselle, Henri de Raincourt, Maurice Blin, Guy Cabanel,
Josselin de Rohan, Jacques Larché, Christian Poncelet, Paul Girod, Jacques
Oudin, Jean Puech, Jean-Paul Delevoye, Michel Mercier, Jean Chérioux et Lucien
Neuwirth tendant, dans l'attente du vote de la loi instituant une prestation
d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes, à mieux répondre aux besoins
des personnes âgées par l'institution d'une prestation spécifique
dépendance.
Je tiens à remercier la commission des affaires sociales, en particulier son
président et son rapporteur, du travail considérable qui a été accompli et qui
a permis de trouver des solutions semblant répondre à l'attente et du
Gouvernement et des parlementaires.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Vasselle,
rapporteur de la commission des affaires sociales.
Mes chers collègues,
voilà un peu plus de onze mois, très précisément le 9 novembre 1995, la
commission des affaires sociales vous présentait son rapport sur le projet de
loi instituant une prestation d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes.
Mais l'examen de ce texte a été interrompu à l'issue de la discussion générale
car d'aucuns craignaient que sa mise en oeuvre n'entraîne une dérive financière
incontrôlée, incompatible avec l'assainissement des finances publiques.
Toutefois, la commission, avec l'aide de membres d'autres commissions, a
continué avec constance à proposer, dans divers textes, des dispositions
relatives à la dépendance, sujet sur lequel elle oeuvre depuis nombre d'années,
notamment depuis la proposition de loi dite Fourcade-Marini et l'instauration
des expérimentations à l'origine desquelles se trouve, sans conteste, M.
Fourcade, son président.
La commission ne rappellera pas, ainsi qu'elle l'a fait voilà onze mois,
toutes les données et prospectives dans la mesure où elles n'ont pas changé
d'une manière significative. Elle rappellera simplement quelques chiffres qui
lui ont semblé particulièrement évocateurs.
Tout d'abord, en 1995, l'espérance de vie était de 81,9 ans pour les femmes et
de 73,8 ans pour les hommes, alors que, au début du siècle, elle était
respectivement de 47 ans et de 43,4 ans.
En un demi-siècle, alors que la population française est passée d'environ 40
millions à 58 millions, le nombre des personnes de plus de soixante ans est
passé de 6,4 millions à 11,5 millions, soit une augmentation de plus de 80 p.
100, et celui des plus de soixante-quinze ans a été multiplié par 2,5, passant
de 1,3 million à 3,5 millions. Actuellement, la France compterait plus de 5 000
centenaires et les démographes ont fait récemment cette prévision étonnante :
un enfant sur deux né cette année dans notre pays deviendra centenaire. Une
telle évolution, que l'on constate à divers degrés dans tous les pays
développés, ne saurait laisser indifférent.
La commission ne détaillera pas non plus les dysfonctionnements de
l'allocation compensatrice pour tierce personne, qui sont patents et qu'elle
vous a exposés l'année passée dans son rapport sur le projet de loi précité.
Toutefois, elle souhaite mentionner que l'institution d'un contrôle
d'effectivité, même si, pour certains, les dispositions réglementaires prises
ne sont pas totalement satisfaisantes, a permis de retrouver un taux annuel
d'accroissement des montants consacrés à cette prestation beaucoup plus
modéré.
La commission souhaite rappeler simplement, dans un premier temps, son action
constante, celle de son président, M. Jean-Pierre Fourcade, ainsi que celle de
nos collègues qui ont bien voulu s'associer à ses travaux. Ensuite, elle
analysera les principes qui ont guidé les auteurs de la proposition de loi, à
la lumière, notamment, des derniers résultats disponibles des expérimentations.
Enfin, elle présentera ses conclusions, fruit d'un travail en commun avec
l'ensemble de la majorité sénatoriale de la commission et de certains autres
parlementaires.
A cet égard, je me permettrai de saluer particulièrement MM. Jean Chérioux,
Paul Girod, Michel Mercier et Henri de Raincourt, dont les propositions sont la
résultante d'une réflexion commune, comme l'avait été, au printemps dernier, la
conception de la proposition de loi initiale.
Après le report de la suite de la discussion du texte visant à instituer une
prestation d'autonomie, le 9 novembre 1995, le président de la commission, M.
Jean-Pierre Fourcade, moi-même en ma qualité de rapporteur ainsi que plusieurs
parlementaires appartenant ou non à la commission des affaires sociales se sont
efforcés d'obtenir, de la part du Gouvernement, l'assurance qu'un tel texte
interviendrait. C'est pourquoi ont d'abord été déposés, dans le cadre du projet
de loi de finances rectificative pour 1995, des amendements confiant, à titre
transitoire, au président du conseil général le soin d'attribuer l'allocation
compensatrice aux personnes âgées de plus de soixante ans non déjà reconnues
comme handicapées. Ces amendements, signés par MM. Henri de Raincourt, Jean
Chérioux, Michel Mercier et Paul Girod ainsi que par moi-même, faisaient alors
de l'allocation compensatrice pour tierce personne, l'ACTP, attribuée aux
personnes âgées une prestation en nature et prévoyaient l'utilisation d'une
grille mieux adaptée à la situation de dépendance des personnes âgées que le
barème d'invalidité retenu par les COTOREP, les commissions techniques
d'orientation et de reclassement professionnel. Toutefois, ces amendements
n'ont pu être examinés compte tenu de l'invocation d'un article de
procédure.
Ne se décourageant pas, les signataires de ces amendements ont proposé, dans
le cadre du texte qui allait devenir la loi du 28 mai 1996 portant diverses
mesures d'ordre sanitaire, social et statutaire, des amendements, repris par le
rapporteur du texte devant notre assemblée, M. Claude Huriet, puis par votre
commission. Ces amendements visaient, d'une part, à étendre les
expérimentations menées depuis janvier 1995 aux départements qui seraient
volontaires et, d'autre part, à proposer qu'une réforme de la tarification des
établissements accueillant des personnes âgées soit adoptée par le Parlement
avant le 31 décembre 1996.
Si, compte tenu de votre promesse, monsieur le ministre, de proposer un texte
sur la dépendance des personnes âgées avant la fin de la session parlementaire
- on avait parlé des mois de mai et juin - la commission a accepté de retirer
l'amendement concernant l'extension des expérimentations, en revanche, elle a
maintenu celui qui était relatif à la réforme de la tarification, lequel a été
adopté et est devenu l'article 44 de la loi du 28 mai 1996. Il convient
d'ailleurs de rappeler qu'au moment de retirer l'amendement sur les
expérimentations le président de la commission, M. Jean-Pierre Fourcade,
n'avait pas manqué d'indiquer qu'en l'absence d'un texte avant la fin de la
session parlementaire il déposerait, avec plusieurs de ses collègues, une
proposition de loi sur la dépendance. Nous y sommes ! La présente proposition
de loi dont il est le premier signataire est la traduction de cet
engagement.
Prenant acte du fait que l'examen du projet de loi visant à instituer une
prestation d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes avait été
interrompu devant la Haute Assemblée, car les conséquences de la mise en oeuvre
de ce texte risquaient d'entraîner une dérive financière mal contrôlée au
moment même où le Gouvernement s'efforçait de limiter le déficit des comptes
publics et sociaux, les auteurs de la proposition de loi ont souhaité apporter
une première réponse aux besoins des personnes âgées dépendantes, en ciblant la
prestation créée, dite « prestation spécifique dépendance », sur les plus
démunis et les plus dépendants.
Ce n'est donc qu'une première étape, comme l'a déclaré le Premier ministre, M.
Alain Juppé, mais une étape essentielle, qui transforme radicalement le cadre
juridique actuel, en sortant le problème de la dépendance du cadre lourd et peu
adapté de l'examen par la COTOREP à partir d'un barème d'invalidité créé pour
l'évaluation du handicap. Cette initiative permettra - la commission en est
convaincue - de mettre fin à la dérive de l'ACTP et surtout d'accroître la
satisfaction des personnes âgées par l'octroi d'une prestation en nature
répondant à leurs besoins puisqu'elle résultera d'une évaluation précise de
ceux-ci par l'équipe médico-sociale.
A cet égard, la commission note que la présente proposition de loi, dans son
esprit comme dans sa lettre, ne s'écarte guère du texte présenté l'année
dernière. Il n'y a pas, selon la commission, de différence de nature entre les
deux textes ; il y a une simple différence de degré, ce qui ne signifie pas,
bien au contraire, que la représentation parlementaire ne devra pas se
prononcer de nouveau sur l'institution d'une prestation pérenne plus
ambitieuse, qui répondrait également aux légitimes aspirations des classes
moyennes lorsque la conjoncture économique s'améliorera et que les moyens
financiers seront disponibles.
La commission rappellera brièvement les principales caractéristiques de la
prestation spécifique dépendance.
Il s'agit d'une prestation en nature accordée par le président du conseil
général, sous condition de ressources ; le plafond envisagé, mais qui relève du
domaine réglementaire, serait celui qui est requis pour l'ACTP. Elle sera
servie et gérée par le département où la personne a son domicile de secours,
conformément aux règles traditionnelles de l'aide sociale.
A cet égard, dans la mesure où le dispositif est transitoire, il convient,
selon la commission, de se conformer le plus possible, pour des raisons de
simplicité, aux règles de l'aide sociale. Toutefois, il est fait appel non pas
à l'obligation alimentaire, mais seulement au recours sur succession, comme
cela avait d'ailleurs été prévu dans le texte de l'année passée. Ce recours est
renforcé, comme on le constatera au moment de l'examen des articles.
La présente proposition de loi consacre également, par son article 11, l'un
des apports essentiels des expérimentations, à savoir la nécessaire
coordination entre les différents acteurs de la politique en faveur des
personnes âgées. Les expérimentations ont, en effet, fourni la preuve qu'une
telle coordination, qui n'était pas évidente au départ, est non seulement
possible mais fructueuse. Cette coordination, qu'avait prévue la commission
l'année passée, s'inscrit dans le cadre des conventions obligatoires que doit
passer le département avec les organismes de sécurité sociale, comme c'est le
cas aujourd'hui dans les douze départements où est menée l'expérimentation.
Comme l'année passée, afin qu'il y ait homogénéité du cadre général dans
lequel ces conventions sont conclues, elles devront être conformes à un cahier
des charges arrêté par le ministre chargé des personnes âgées après
consultation des parties intéressées. Enfin, il a paru expédient que le comité
d'évaluation, créé pour faire un bilan des expérimentations, puisse suivre la
mise en oeuvre de ces conventions.
Par ailleurs, même si ce n'est pas là la motivation essentielle de la
proposition de loi, la commission souhaite souligner que, en instituant une
prestation en nature, ce dispositif est à l'évidence créateur d'emplois.
Les expérimentations là encore le prouvent : les exemples du département de
l'Oise, dont je suis l'élu, et de celui de l'Ille-et-Vilaine ont montré qu'un
emploi pourrait être créé pour quatre à six personnes aidées. M. le président
de la commission des affaires sociales a lui-même souvent cité l'exemple de sa
ville de Boulogne, où, selon lui, un emploi est créé pour sept personnes
aidées.
Par rapport à l'allocation compensatrice, qui était parfois thésaurisée et
considérée par la personne âgée comme un complément de ressources,
l'instauration d'une prestation en nature est incontestablement un progrès qui
devrait faciliter le contrôle de l'effectivité de l'aide.
Par ailleurs, les auteurs de la proposition de loi ont souhaité réaffirmer la
nécessité d'une grille unique d'évaluation de la dépendance sur l'ensemble du
territoire pour éviter tout arbitraire. La grille AGGIR - autonomie
gérontologique - groupes iso-ressources - qui a été testée pendant les
expérimentations, malgré quelques imperfections, notamment dans la prise en
compte de l'environnement, devrait, selon toute vraisemblance, être celle-ci.
Il conviendra donc, monsieur le ministre, d'apporter quelques améliorations
dans le volet environnement de cette grille.
Les auteurs de la proposition de loi ont également souhaité reprendre une
idée-force qu'ils avaient déjà soutenue lors de l'examen du projet de loi, l'an
passé, à savoir l'entrée en vigueur de cette prestation d'une manière
concomitante à domicile et en établissement. S'agissant du domicile, ils ont
réintroduit le rôle de l'équipe médico-sociale dont la composition est laissée
à la discrétion des présidents de conseil général et qui évalue le besoin
d'aide et en organise le suivi.
S'agissant de l'attribution de la prestation spécifique dépendance en
établissement, celle-ci est subordonnée, en fonction de la tarification en
vigueur, à l'évaluation de l'état de la personne hébergée, qui fait l'objet
d'un réexamen périodique. Cette formulation permettra de mettre en oeuvre cette
prestation en établissement dès avant l'intervention de la réforme de la
tarification, de manière à inciter ces établissements à signer la convention
tripartite et à entrer dans le nouveau système de tarification.
A cet égard, la commission remarque que, pour la première fois, un texte pose
très clairement les principes de la réforme de la tarification des
établissements pour personnes âgées qu'elle a souhaitée, lors de l'examen du
texte de l'année passée puis lors de la discussion de ce qui allait devenir la
loi du 28 mai 1996 portant diverses dispositions d'ordre sanitaire, social et
statutaire.
De ce point de vue également, la présente proposition de loi modifie
profondément la législation actuelle et s'inscrit parfaitement dans le cadre
plus général de la réforme de la loi du 30 juin 1975 relative aux institutions
sociales et médico-sociales, préconisée au début de l'année 1996 par le rapport
de l'inspection générale des affaires sociales et présentée par M. Jacques
Barrot, ministre du travail et des affaires sociales, devant le comité national
de l'organisation sanitaire et sociale, le 3 octobre 1996.
Toutefois, sur le plan de la réforme de la tarification, la commission
souhaiterait que M. le ministre du travail et des affaires sociales puisse, en
vue d'éclairer le Sénat, donner la substance du rapport conjoint de
l'inspection générale des affaires sociales et de l'inspection des finances sur
la tarification des établissements, qui vient de lui être remis.
Par ailleurs - c'était l'une des demandes de la commission, l'an passé, au
Gouvernement - le présent texte prévoit que l'assurance maladie devra financer
les lits de section de cure médicale autorisés à la date d'application de la
loi mais non encore financés dans un délai de deux ans. Ils sont actuellement
14 000. Nous avions également considéré ce point comme un préalable à la mise
en oeuvre de la prestation autonomie en établissement. Monsieur le ministre, la
même demande pourrait d'ailleurs s'appliquer aux places de services de soins
infirmiers à domicile, dont 4 000 sont actuellement autorisées sans être
financées, alors qu'un tel dispositif se révèle essentiel pour favoriser le
maintien à domicile, qui est au coeur de la politique gouvernementale.
Enfin, afin de préserver les droits de ceux qui ont eu le bénéfice de
dispositions plus favorables dans les départements expérimentaux et de ne pas
empiéter sur la faculté des caisses de sécurité sociale à accorder des
prestations sur leurs fonds d'action sociale, les auteurs de la proposition de
loi ont permis que les prestations servies dans le cadre des expérimentations
continuent de l'être.
Ainsi, sous divers aspects, la présente proposition de loi présente des
changements profonds dans le cadre juridique actuel : elle permet notamment de
sortir du système de l'allocation compensatrice pour tierce personne, l'ACTP,
et du passage devant la COTOREP avec évaluation du handicap par le biais du
barème d'invalidité, et elle pose les principes d'une réforme de la
tarification, qui a été souhaitée non seulement par la commission mais aussi
par l'ensemble des intervenants dans ce domaine.
J'en viens aux conclusions de la commission. Au nom de cette dernière, je
développerai brièvement huit points qui lui semblent importants.
Il lui a tout d'abord paru nécessaire de prévoir des dispositions concernant
les étrangers, et il lui a semblé logique de reprendre les dispositions de
l'aide sociale, à savoir quinze ans de résidence ininterrompue avant
soixante-dix ans. Il s'agit là de l'article 1er.
Elle souhaite également donner un rôle au maire dans la mesure où les communes
vont participer, par l'intermédiaire du contingent d'aide sociale, au
financement de cette prestation. En faisant cette proposition, la commission
s'inscrit dans la logique de ce qu'a souhaité le Premier ministre, M. Juppé. Il
s'en est fait l'écho en ce qui concerne le RMI.
La commission propose donc, comme l'an dernier, que le maire puisse donner son
avis sur le dossier du demandeur. Elle suggère également que le maire puisse,
comme le demandeur ou le représentant de l'Etat ou le débiteur des avantages de
vieillesse, faire un recours contre la décision du président du conseil
général. Il s'agit en effet d'obtenir un ensemble parfaitement cohérent.
Parallèlement, il a semblé nécessaire à la commission de prévoir une
disposition indiquant que, si la décision du président du conseil général n'est
pas intervenue dans les deux mois, la prestation spécifique dépendance sera
considérée comme accordée. Nous avons choisi ce délai, car il correspond à
celui qui sera retenu dans le cadre de la réforme de l'Etat. Il pourrait
également être appliqué s'agissant des compétences des collectivités
territoriales. Il faut en effet une cohérence parfaite avec les différentes
dispositions législatives qui seront prises par ailleurs.
Il s'est agi ensuite - c'est là un point essentiel pour la commission - de
préciser la nécessité de moduler la prestation spécifique dépendance d'une
manière beaucoup plus souple que l'ACTP en fonction de l'état de la personne et
de permettre d'aller jusqu'à 100 % de la majoration pour tierce personne en cas
de très grande dépendance au lieu de 80 %, actuellement, pour l'allocation
compensatrice. Il faut rappeler, en effet, que l'instauration de cette
prestation permet de sortir de la logique du barème d'invalidité.
Nous tombons là dans le domaine réglementaire. C'est un voeu que nous
exprimons, et nous souhaitons vivement, monsieur le ministre, qu'il soit repris
dans le cadre des dispositions que vous retiendrez après l'adoption de la
proposition de loi. L'objectif est en effet d'apporter beaucoup plus de
souplesse au dispositif, de mieux coller à la réalité de la situation de la
personne du point de vue de sa dépendance, et, en même temps de vous donner la
possibilité d'aller au moins jusqu'au plafond de la majoration pour aide
constante d'une tierce personne, la MTP, voire de le dépasser lorsque vous
considérerez que la situation le nécessitera et en fonction de la conjoncture,
telle que nous la connaîtrons le moment venu.
Enfin, il convient de préciser quels sont les cas de non-cumul avec la
prestation spécifique dépendance. Dans la mesure où elle pourrait être égale à
la majoration pour tierce personne et remplacerait l'ACTP, il faut qu'elle ne
soit cumulable ni avec l'une ni avec l'autre. Par ailleurs, dans la mesure où,
désormais, la prestation spécifique dépendance pourrait aller jusqu'au montant
de la majoration pour tierce personne, voire la dépasser, il ne semble plus
expédient de prévoir, comme dans le texte de l'an passé, une possibilité de
cumul avec l'aide à domicile départementale, en cas de grande dépendance. Ces
cas de non-cumul figurent à l'article 7 de la présente proposition de loi.
S'agissant du recours sur succession, à l'article 8, la commission a souhaité
reprendre des dispositions qu'elle avait proposées l'an dernier. Elle n'a pas
admis, en effet, de créer une différence entre le séjour en établissement et le
domicile, ni de faire intervenir le recours à partir d'un seuil fixé par
décret.
Mon collègue M. Oudin reviendra sûrement sur ce point, mais je tiens à
rappeler que ce sera du ressort du pouvoir réglementaire. Pour ma part, je ne
fixe pas de seuil.
Par ailleurs, la commission vous propose à l'article 13 - elle avait
d'ailleurs adopté une telle disposition l'an passé - que la prestation
spécifique dépendance, dans une limite fixée par décret, puisse servir à
solvabiliser des dépenses autres que des dépenses de personnel ; je pense à cet
égard à des protections, à des prestations de service comme le port de repas,
ou à la téléalarme.
Enfin, il est vrai que le choix de cette proposition de loi a été de centrer
le dispositif sur les plus démunis et les plus dépendants, pour des
considérations financières. Ce faisant, ladite proposition de loi écarte les
classes moyennes, qui étaient en partie prises en compte par le projet de loi
de l'année passée. Il importe donc pour la commission, tout d'abord, que
celles-ci puissent sauvegarder leurs droits aux prestations offertes sur les
fonds d'action sociale de leurs régimes de retraite. Parallèlement, le fait de
neutraliser, ainsi que vous le propose la commission à l'article 5, comme elle
l'avait déjà fait l'année dernière, lors de l'examen du texte proposé par Mme
Codaccioni, les rentes viagères dépendance dans les ressources des demandeurs
peut constituer une première réponse aux problèmes de ce type de population.
Mais il est bien sûr souhaitable, en attendant l'amélioration de la conjoncture
et le relèvement du plafond des ressources à prendre à compte, de mettre en
oeuvre un dispositif fiscal global visant à encourager la prévoyance dans ce
domaine afin que ceux qui le peuvent puissent épargner pour prendre en charge,
dans le futur, les conséquences de leur propre dépendance ou de celle de leurs
proches.
Voilà certainement la voie d'avenir pour ce qui concerne la dépendance, et
c'est un point sur lequel M. le président de la commission des affaires
sociales avait lui-même proposé, l'an dernier, un amendement en ce sens,
amendement que nous avons repris dans cette proposition de loi.
Je terminerai par les dispositions purement techniques, et serai bref sur ce
point.
Par rapport à la proposition de loi initiale, la commission a souhaité
introduire un certain nombre d'aménagements techniques pour compléter le texte.
Ces aménagements n'appellent pas de développement particulier de ma part.
Ils portent tout d'abord sur la prise en compte des ressources du couple pour
l'attribution de la prestation et de la situation du conjoint ou du concubin,
lorsque la personne âgée dépendante est en établissement, afin que celui qui
reste à domicile dispose de ressources minimales. Prenons l'exemple d'un couple
dont les ressources sont de l'ordre de 15 000 à 18 000 francs par mois et dont
l'un des membres est obligé d'intégrer un établissement ; si le montant à payer
dans cet établissement correspond à l'équivalent des ressources du couple, il
ne restera plus rien pour celui qui demeurera à domicile. Par conséquent, nous
prévoyons de laisser un minimum vital à la personne qui restera à domicile, ce
qui permettra aux classes moyennes de pouvoir accéder au bénéfice de ce
concours.
Les aménagements techniques portent également sur l'institution d'une
possibilité de recours contre les décisions du président du conseil général
devant les commissions départementales d'aide sociale, puis devant la
commission centrale d'aide sociale, sur la tutelle aux prestations sociales, le
secret professionnel et les possibilités de contrôle des agents départementaux,
sur la mention d'un plan d'aide qui peut être refusé par la personne, sur les
conditions de versement de la prestation, sur la création d'une infraction pour
ceux qui géreront un établissement pour personnes âgées non autorisé selon les
modalités prévues par la proposition de loi et, enfin, sur l'exonération des
cotisations de sécurité sociale patronales pour les bénéficiaires de la
prestation spécifique dépendance, afin de ne pas créer de distorsion avec ceux
qui ont l'ACTP.
Telles est, mes chers collègues, l'ensemble des conclusions de la commission
des affaires sociales dont je me suis fait l'écho en ma qualité de
rapporteur.
Je souhaite que le débat que nous aurons sur ce texte soit le plus fructueux
et le plus constructif possible, car il y va, bien entendu, de l'intérêt non
seulement des personnes au bénéfice desquelles nous ouvrons un nouveau droit,
mais également de l'ensemble des collectivités territoriales et de l'Etat. Il
nous faut trouver la juste mesure de ce dispositif, de façon qu'il connaisse
une progression qui à la fois assure une bonne protection des personnes âgées
et soit adaptée aux moyens dont nous disposons dans la conjoncture économique
et sociale que traverse notre pays.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
14
SOUHAITS DE BIENVENUE À UNE
DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE
DE SLOVAQUIE
M. le président.
J'ai le plaisir de saluer la présence dans notre tribune officielle d'une
délégation de parlementaires, membres du Conseil national de la République
slovaque, présidée par M. Lubormir Fogas, président du groupe d'amitié
Slovaquie-France, qui séjourne en France à l'invitation du groupe sénatorial
d'amitié France-Slovaquie, présidé par notre collègue Paul Girod,
vice-président du Sénat.
Nous espérons que ce séjour sera fructueux et positif.
(Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)
15
INSTITUTION D'UNE PRESTATION
SPÉCIFIQUE DÉPENDANCE
Suite de la discussion des conclusions
du rapport d'une commission
M. le président.
Nous reprenons la discussion des conclusions du rapport de M. Alain Vasselle,
sur la proposition de loi tendant, dans l'attente du vote de la loi instituant
une prestation d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes, à mieux
répondre aux besoins des personnes âgées par l'institution d'une prestation
spécifique dépendance.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. le président de la
commission.
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission des affaires sociales.
Monsieur le président,
monsieur le ministre, mes chers collègues, après un très long périple dont
notre excellent rapporteur vient de rappeler les étapes successives, nous
sommes aujourd'hui amenés à débattre des réponses qui doivent être apportées
aux problèmes posés par la dépendance des personnes âgées.
La dépendance des personnes âgées concerne plusieurs centaines de milliers de
nos concitoyens, dont seuls 190 000 reçoivent actuellement l'allocation
compensatrice par tierce personne ; on estime à environ 600 000 à 700 000
celles qui nécessitent une attention quotidienne, des soins, et parfois un
hébergement. C'est donc un domaine fondamental, mes chers collègues, que nous
abordons aujourd'hui.
Le débat important qui nous occupe aujourd'hui résulte d'un dialogue constant
entre le Gouvernement et le Parlement. A cet égard, je vous remercie, monsieur
le ministre, d'avoir prêté une oreille attentive à nos suggestions et d'avoir
accepté de discuter avec nous de ce sujet. Ce dialogue me paraît d'ailleurs si
important que, le Gouvernement s'étant emparé depuis quelques semaines de cette
proposition de loi, personne ne sait plus, dans l'opinion publique, qui est
réellement à l'origine de ce texte,...
M. Jacques Barrot,
ministre du travail et des affaires sociales.
Oh !
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission.
... mais je trouve cela parfait : voilà qui
montre bien que la collaboration entre le Gouvernement et le Parlement est une
bonne chose !
Je voudrais tout d'abord remercier tous ceux qui ont participé à ce travail :
les présidents de groupe, le président de la commission des finances, le
président de la commission des lois, le président de l'assemblée permanente des
présidents de conseils généraux, ainsi que MM. Henri de Raincourt, Michel
Mercier, Jean Chérioux, Jacques Oudin et Paul Girod, de même que tous ceux qui
nous ont aidés à jeter les bases de cette proposition de loi.
Notre excellent collègue M. Alain Vasselle ayant parfaitement précisé l'objet
de la prestation, son champ d'application et ses modalités, je me bornerai à
trois observations.
Première observation : pourquoi n'a-t-on pas créé une nouvelle prestation de
sécurité sociale ? C'est en effet sur ce thème, paraît-il, que devraient
défiler un certain nombre de personnes âgées et de retraités. Mais
permettez-moi de vous dire, mes chers collègues, qu'après avoir beaucoup
réfléchi depuis plusieurs années nous pensons que, d'une part, la création
d'une nouvelle prestation de sécurité sociale n'était peut-être pas une
heureuse initiative en ces temps de déficit de l'ensemble de nos régimes
sociaux et que, d'autre part, le cadre juridique d'une telle prestation ne nous
paraissait pas tout à fait opportun pour traiter le sujet qui nous réunit cet
après-midi.
Aux associations et à leurs dirigeants qui ont quelque peu contesté notre
proposition de loi, je veux répondre que le régime de sécurité sociale qu'il
était envisagé de créer aurait évidemment servi des prestations en espèces. Or,
si nous voulons prendre en charge, avec l'aide des départements et des régimes
de sécurité sociale, la dépendance des personnes âgées, l'idée fondamentale qui
nous guide est de servir des prestations en nature, de manière à pouvoir
adapter la prestation à la situation de la personne et à ne pas créer des
dépenses nouvelles.
La question est non pas de savoir si, au lieu et place d'une vraie prestation
nouvelle, le Parlement propose une aumône, mais de savoir, dès lors que le
principe de la création d'une nouvelle prestation de sécurité sociale est posé,
à qui il appartient de gérer celle-ci.
Notre réponse est claire : nous proposons que les départements gèrent la
prestation spécifique dépendance dès lors qu'ils étaient jusqu'alors chargés de
la gestion de l'allocation compensatrice pour tierce personne.
Les caisses - et pas seulement les régimes nationaux, mais aussi les régimes
agricoles ou les caisses complémentaires - continueront à servir les
prestations qu'elles versent au titre de l'action sociale, et les uns et les
autres s'associeront au mieux - j'aurai l'occasion d'y revenir - en vue de
coordonner leurs efforts.
Les règles de gestion retenues découlant du choix du gestionnaire - et puisque
celui-ci sera le département - nous avons beaucoup emprunté aux règles de
l'action sociale, sauf, bien entendu, en ce qui concerne l'obligation
alimentaire, mais je sais que nous aurons un débat sur ce point.
Cela étant dit j'en viens à ma deuxième observation : ce texte constitue-t-il
un progrès ?
Certains parlent de prestations
a minima
- je l'ai lu dans la presse -
tandis que d'autres pensent qu'il s'agit d'ersatz de prestations. En fait, cinq
points me permettent de montrer que la proposition de loi dont nous débattons
marque un progrès social.
En premier lieu, il n'était plus possible de continuer d'appliquer aux
personnes âgées la législation de 1975 - que j'ai quelques raisons de bien
connaître - concernant les personnes handicapées. C'est en effet par un
détournement de sa vocation initiale que l'allocation compensatrice pour tierce
personne a pu être versée aux personnes âgées dépendantes. Cette situation
n'était pas sans inconvénient, car verser une prestation en espèces ne
permettait pas de s'assurer de l'effectivité de l'aide et des conséquences de
la prise en charge des personnes âgées dépendantes.
Il ne s'agit pas de dénoncer le versement indu de prestations, mais de
regretter qu'en procédant ainsi il n'ait pas été possible, au-delà de
l'appréciation de l'incapacité, de proposer aux personnes concernées un plan
d'aide adapté à leur état.
De ce point de vue, le passage à une prestation en nature est déterminant,
comme le sont le fait d'avoir confié à un gestionnaire local, proche des
bénéficiaires, le soin d'apprécier cet état, ou encore le fait d'associer les
maires, notamment en milieu rural, à l'appréciation de ces situations.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Très bien !
M. Jean-Pierre Fourcade,
président de la commission.
En deuxième lieu, nous savons tous que le
critère d'admission à l'allocation compensatrice pour tierce personne est le
taux d'incapacité, apprécié au sens de l'aptitude à l'exercice d'une activité
professionnelle. Vous avouerez, mes chers collègues, que c'est un curieux
critère en la matière !
Nous proposons, au contraire - et c'est une innovation assez importante - avec
le passage du paiement en espèces à la prestation en nature, de retenir un
outil adapté à l'appréciation de la dépendance, à savoir la grille AGGIR, les
personnes dépendantes étant classées en six catégories, des plus touchées à
celles qui ne peuvent exécuter tous les actes de la vie quotidienne. Les
modalités d'attribution de la prestation spécifique dépendance permettront donc
de prendre en compte la réalité de la dépendance des personnes âgées.
La grille AGGIR a été testée dans douze départements ; elle fonctionne, et
elle permet de doser l'aide en nature à ces différentes personnes.
En troisième lieu, s'agissant de la coordination entre les départements et les
régimes de sécurité sociale, les expérimentations que nous avions suggérées au
gouvernement de M. Balladur ont montré comment, moyennant une contribution
financière faible des fonds d'action sociale des régimes d'assurance
vieillesse, il a été possible d'améliorer grandement le service rendu aux
personnes âgées. Il faut en effet savoir de quoi l'on parle en la matière ! Il
s'agit d'un volume de financement un peu supérieur à 14 milliards de francs,
dont 9 milliards de francs en provenance des départements et 5 milliards de
francs en provenance des régimes d'assurance sociale. De leur meilleur
redéploiement à l'intérieur des départements et des communes, les personnes
âgées devraient retirer un meilleur profit.
En quatrième lieu, au cours de nos discussions avec le ministre du travail et
des affaires sociales et avec le Premier ministre, nous avons souhaité que le
Gouvernement fasse un geste pour venir au secours des départements et des
régimes de sécurité sociale. Ce geste, qui figure dans le texte nonobstant
l'article 40, bien connu ici, est l'accélération du financement des 14 000 lits
de cure médicale et des 4 000 lits de soins infirmiers qui ont été autorisés et
qui ne sont pas financés. Nous avons ainsi la garantie - puisque j'espère bien
que tout le monde votera au moins cette partie du texte - qu'ils seront
financés dans un délai de deux ans. Pour tous ceux qui attendent aujourd'hui
leur hébergement, il s'agit là d'un réel espoir puisque nous pouvons résoudre
leurs problèmes beaucoup plus vite.
Enfin, en cinquième lieu, le dernier facteur de progrès - et, à mes yeux ce
n'est pas le moindre - est que nous rétablissons, avec ce texte, l'égalité de
traitement des citoyens, quel que soit leur lieu de résidence. La loi de 1975
a, en effet, été détournée de son objet et elle a été, vous le savez bien, mes
chers collègues, appliquée de manière disparate sur le territoire. Parce que
les modalités d'appréciation de la dépendance étaient inadaptées, la réponse
apportée était le plus souvent tout aussi inadaptée.
Demain, les droits des personnes âgées dépendantes seront égaux, ils seront
appréciés selon une grille commune applicable sur l'ensemble du territoire. Les
prestations en nature seront adaptées à la situation réelle de chacun et, grâce
à cette proposition de loi, l'égalité sera rétablie sur tout le territoire.
Troisième et dernière observation : ce texte va, bien évidemment, s'inscrire
dans la durée.
Chacun sait bien que ce sujet a suscité beaucoup d'hésitations. C'est avec M.
Teulade que nous avions commencé à parler des problèmes des personnes âgées, et
nous avons continué avec les différents gouvernements successifs.
Peut-être un jour pourrons-nous créer une prestation d'un niveau plus élevé
que celui que nous retenons aujourd'hui, mais rien n'interdit aux gouvernements
de demain ou d'après-demain de jouer sur le montant de la prestation ou de
relever le seuil de ressources à partir duquel elle est accordée ! J'espère
d'ailleurs que, lorsque nous aurons mis en place toutes les coordinations
départementales, constaté l'état des besoins réels et adapté l'ensemble des
mécanismes de prise en charge à la situation réelle des personnes âgées en
fonction de la grille nationale, il sera possible de relever ces seuils et de
satisfaire un plus grand nombre de nos concitoyens : aujourd'hui, 300 000
personnes âgées environ sont concernées ; dans les années à venir, quelques
centaines de milliers de plus pourront ainsi être aidées.
Vu son caractère transistoire, ce texte prévoit d'ailleurs un rendez-vous
ultérieur. Faudra-t-il que nous élaborions une nouvelle loi ou nous
contenterons-nous de modifier les mécanismes réglementaires qui en permettront
l'application ? Il est impossible de le dire aujourd'hui. Ce que je souhaite,
c'est que nous ayons des rendez-vous permanents, monsieur le ministre, et que
nous tentions de tirer de l'expérimentation grandeur nature, qui viendra après
l'expérimentation qui a été menée dans douze départements, les conclusions
nécessaires pour progresser et améliorer le dispositif.
Voilà les quelques réponses que je voulais apporter face aux inquiétudes qui
se sont manifestées, à droite comme à gauche, du côté des associations de
retraités ou d'un certain nombre d'associations d'aide et de soins à
domicile.
Pour conclure mon propos, j'évoquerai deux points importants.
Le premier, c'est que le mécanisme de prise en charge prévu pour l'aide à
domicile permettra de créer rapidement des emplois, notre excellent rapporteur
l'a affirmé, M. Huguet l'a dit également en commission. A partir du moment où
nous passons de la prestation en espèces à une prestation en nature et où nous
attribuons des aides à domicile en fonction de la grille AGGIR et compte tenu
de l'état de la personne, un emploi de services de proximité pourra être créé
pour cinq à sept personnes prises en charge. Cela nous permettra donc, au cours
des prochaines années, d'améliorer à la fois la situation de l'emploi et la
prise en charge des personnes âgées. Il s'agit là d'un élément important de ce
dispositif et il était urgent de l'adopter dans la situation actuelle du marché
de l'emploi.
Second point, ce texte répond avant tout - vous l'avez noté dans le rapport de
M. Vasselle - aux besoins des personnes les plus démunies et les plus
dépendantes. Dans la conjoncture actuelle et compte tenu de la situation
difficile que connaissent aussi bien les finances publiques que les finances
locales, il était en effet opportun et juste de commencer à appliquer ce
dispositif à ces personnes.
Cependant, nous avons tout de même essayé de prendre en compte la situation de
ceux qui se trouvent un peu au-dessus des seuils de ressources que nous avons
pour l'instant proposés ou un peu en dessous des états de dépendance de la
grille AGGIR.
C'est la raison pour laquelle le rapporteur a écarté du champ d'appréciation
des ressources prises en compte pour l'ouverture du droit à la nouvelle
prestation les rentes viagères constituées à titre volontaire pour répondre au
risque de dépendance. Cela permettra de dépasser largement les limites
actuelles.
C'est pourquoi aussi un certain nombre de nos collègues ont, à ma demande,
déposé un amendement tendant à inciter, à l'entrée, à la conclusion de tels
contrats en exonérant de toutes charges fiscales les cotisations versées à ce
titre.
Je compte, monsieur le ministre, sur un accueil favorable du Gouvernement pour
compléter le dispositif avec ce double mécanisme d'exonération des rentes
viagères et d'octroi d'une faveur fiscale pour les personnes qui souscrivent
des contrats d'assurance volontaire.
Rapidement, le nombre des personnes âgées dépendantes dépassera les 300 000,
chiffre dont nous partons aujourd'hui.
Voilà, mes chers collègues, les principaux problèmes posés par cette
allocation.
Pour conclure, je remercie le Gouvernement de la compréhension dont il a fait
preuve après cinq ans de discussions ininterrompues avec lui. Je remercie
également tous nos collègues d'avoir bien voulu nous aider à mettre au point
cette proposition de loi, qui, d'une part, respecte les contraintes économiques
et financières auxquelles nous nous heurtons tous et, d'autre part, peut à la
fois améliorer assez profondément la situation d'un grand nombre de personnes
âgées dépendantes et faciliter assez rapidement la création d'un certain nombre
d'emplois. Face à ce double enjeu, je laisse à ceux qui seraient tentés par un
refus la responsabilité de leur attitude !
(Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et
Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées
du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre du travail et des affaires sociales. Tout un
programme !
(Sourires.)
M. Jacques Barrot,
ministre du travail et des affaires sociales.
Monsieur le président, pour
mener à bien un tel programme, je sais pouvoir compter sur la vigilance et
l'aide du Sénat. La discussion de ce texte montre d'ailleurs, s'il en était
besoin, l'excellente coopération qui peut s'établir entre une assemblée comme
le Sénat et le Gouvernement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je veux d'emblée remercier votre assemblée
et son président - il y a pris sa part, je le sais - de leur travail. En effet,
il m'apparaît, sans vouloir exagérer, que nous inaugurons là une manière de
légiférer beaucoup plus conforme à la société d'aujourd'hui.
M. Charles Revet.
Tout à fait !
M. Jacques Barrot,
ministre du travail et des affaires sociales.
En effet, pour faire
évoluer notre société, pour progresser, il me paraît préférable de « coller »
aux besoins, au vécu, aux réalités, plutôt que de construire de grandes
architectures qui risquent de se trouver ensuite confrontées à une réalité
qu'elles n'avaient pas suffisamment appréhendée initialement.
Ce travail marquera une étape importante dans l'appréhension d'un problème qui
va se poser avec de plus en plus d'acuité à la société française.
Monsieur Vasselle, vous avez rappelé des statistiques qui nous laissent
rêveurs : un enfant sur deux nés en 1996 devrait vivre jusqu'à cent ans !
La réflexion entamée depuis longtemps par votre assemblée a été rythmée par un
certain nombre d'étapes, dont la moindre n'est pas le vote de l'article 38 de
la loi n° 94-637 relative à la sécurité sociale, qui fut adopté sur votre
initiative, monsieur Fourcade.
Ce texte a conduit à la mise en place, dans douze départements pilotes,
d'expériences qui ont permis de valider une approche coordonnée de cette
politique en faveur des personnes âgées dépendantes. Le Centre de recherches,
d'études et de documentation sur la consommation, le CREDOC, vient de rendre un
rapport qui confirme l'importance de la mobilisation de tous les acteurs autour
du bénéficiaire d'une prestation en nature.
Je veux remercier ici tous ceux qui se sont engagés dans cette
expérimentation, dont nous allons pouvoir utiliser les enseignements pour
élaborer la nouvelle législation.
C'est vrai, l'état de nos comptes sociaux a contraint le Gouvernement à
différer la mise en place de la prestation d'autonomie telle qu'elle avait été
conçue initialement. Mais le texte que nous allons examiner reprend, sur de
nombreux points, ce projet.
Cette convergence d'analyse n'est pas étonnante. Il est établi, je viens de le
dire, qu'il faut coordonner les interventions autour de la personne âgée,
dissocier la prise en charge de la dépendance du traitement du handicap et
s'assurer de l'effectivité de l'aide accordée au bénéficiaire. C'est bien
pourquoi la proposition de loi émanant du Sénat a reçu l'agrément du Premier
ministre le 10 juillet dernier.
Par rapport au projet initial, on peut donc parler de différence de degré et
non pas de nature, votre rapporteur l'a bien souligné.
M. Fourcade a rappelé les cinq raisons pour lesquelles ce texte constitue un
réel progrès. Nous connaissons tous les défauts de l'ACTP lorsqu'elle est
versée aux personnes âgées et nous savons tous d'expérience que les commissions
techniques d'orientation et de reclassement professionnel, les COTOREP,
n'étaient pas en mesure d'assurer un traitement rapide des dossiers, alors que,
bien souvent, la gravité de la situation des demandeurs aurait justifié une
réponse accélérée.
Nous allons sortir de ce système qui était un peu à bout de souffle. Dans la
logique de la décentralisation, nous allons conférer au président du conseil
général la responsabilité d'accorder la prestation. M. Vasselle a insisté sur
ce point, et il a eu raison.
Certes, ce choix, qui fait confiance à nos départements, est critiqué par
certains, qui redoutent d'éventuelles inégalités de traitement d'un département
à l'autre. A cet égard, le recours à une grille nationale unique d'évaluation
constitue une garantie, d'autant que le contentieux de l'attribution de la
prestation permettra de dégager une jurisprudence.
Par ailleurs, le département ne sera pas seul. M. le rapporteur a fort
justement rappelé que l'avis du maire sera demandé. C'est normal puisqu'il est
concerné à travers le contingent d'aide sociale.
En cohérence avec le choix d'une approche coordonnée, les départements
pourront d'ailleurs conclure des conventions avec un certain nombre
d'organismes, afin d'organiser l'instruction et le suivi de la prestation
spécifique dépendance.
Pour que ces conventions aient une certaine homogénéité, elles devront
respecter un cadre général, une convention-cadre, même si, dans les détails,
elles pourront avoir une certaine souplesse afin de mieux tenir compte des
spécificités locales.
Au nombre des organismes qui sont appelés à passer ces conventions avec les
départements, les caisses de retraite auront, bien sûr, une place et une
responsabilité particulières.
M. Vasselle, dont le département est pilote, a insisté sur l'apport
fondamental de cette coopération institutionnalisée. La collaboration de ces
organismes, de ces caisses au processus d'instruction et de suivi de la
nouvelle prestation permettra d'apporter aux personnes retraitées la réponse la
mieux adaptée à leurs besoins : prestation spécifique pour les personnes dont
la perte d'autonomie est la plus importante, aide ménagère pour les autres.
Qu'il s'agisse de l'aide ménagère ou d'autres formes d'aide aux personnes
âgées dépendantes, l'instauration de cette nouvelle prestation conduira à une
amélioration de leurs règles, de leurs modalités d'attribution et, donc, de la
qualité au meilleur coût de la prise en charge des personnes âgées
dépendantes.
Après les excellentes interventions de M. le rapporteur et de M. le président
de la commission, je ne veux pas être trop long. A l'occasion de la discussion
des articles et des amendements, je reviendrai plus précisément sur tel ou tel
aspect de la proposition de loi.
Je tiens simplement à souligner deux points.
D'abord, la prestation spécifique dépendance a pour objet de venir en aide
prioritairement aux grands dépendants et à leurs familles. C'est pourquoi, dans
un premier temps, elle devrait être servie aux personnes classées - c'est la
classification « iso-ressources » - dans les groupes I, II et III de la fameuse
grille AGGIR. Ce sont les personnes dont le besoin d'aide est le plus important
; ce sont celles qui posent le plus de problèmes à ceux qui en ont la
responsabilité. Les autres pourront être prises en charge par l'aide ménagère
de leurs caisses de retraite. L'expérimentation a confirmé à quel point ces
dernières étaient impliquées dans l'aide aux personnes âgées. Il y a donc une
bonne répartition des responsabilités. Le second point sur lequel je veux
apporter quelques précisions est la réforme de la tarification des
établissements d'hébergement, annoncée par l'article 44 de la loi du 28 mai
1996, article inspiré par un amendement d'origine sénatoriale.
Comme l'a demandé M. Alain Vasselle, je souhaite en effet pouvoir vous
communiquer très rapidement le rapport dont je suis dépositaire depuis peu.
L'objectif poursuivi est de sortir du système actuel, qui fait apparaître la
dépendance des personnes âgées comme un solde pris en charge par des
prestations mal identifiées.
C'est pourquoi il est prévu que les établissements autorisés à accueillir des
personnes dépendantes qui auront signé une convention tripartite verront leur
tarification arrêtée, s'agissant des prestations remboursables par l'assurance
maladie, par l'autorité compétente dans ce domaine, mais après avis du
président du conseil général, et, concernant ce qui peut ressortir à la
prestation spécifique dépendance, par le président du conseil général, après
avis de l'autorité compétente pour l'assurance maladie.
Il s'agit d'une réforme doublement difficile à mettre en oeuvre, du fait de la
multiplicité des établissements et du fait des enjeux financiers attachés à
tout transfert de charges.
C'est vrai que le rapport conjoint de l'inspection générale des affaires
sociales et de l'inspection des finances sur la tarification des établissements
a un peu tardé à arriver. Il doit maintenant être affiné. Je le transmettrai
dès que possible au Sénat.
Pour déterminer les contributions des différents financeurs, il est possible
de partir d'une distinction claire entre tout ce qui relève du sanitaire et
tout ce qui n'en relève pas. C'est l'option retenue par la mission conjointe.
Elle a sa logique. Mais en demandant à la branche maladie de prendre en charge
l'intégralité des soins relationnels et des soins de base, elle opère un
transfert de charges dont j'ai demandé à mes services de mesurer les effets.
Vous le savez, la situation de la branche maladie ne permet pas de la
solliciter significativement, tout au moins dans les deux ou trois années qui
viennent. Pour autant, je veux le redire devant le Sénat, car j'ai bien entendu
à la fois M. le rapporteur et M. le président Fourcade, je confirme la volonté
de résorber sur un délai de deux ans, le stock des lits médicalisés autorisés
mais non financés.
M. Charles Revet.
Très bien !
M. Jacques Barrot,
ministre du travail et des affaires sociales.
Cela sera fait à partir du
début de l'année prochaine, dans un calendrier qui tient compte, bien sûr, des
contraintes de l'assurance maladie.
J'ai relevé aussi la sollicitation concernant les places de soins à domicile.
Il ne m'appartient pas aujourd'hui de répondre devant le Sénat, mais j'ai pris
bonne note. Je suis aussi attaché que vous à ce que la parole de l'Etat, qui a
notifié ces autorisations par l'intermédiaire de ses préfets, soit suivie
d'effets, par quelque espèces sonnantes et trébuchantes.
(M. Jacques Oudin
applaudit.)
La prudence veut que je ne vous réponde pas aujourd'hui,
monsieur le président Fourcade, mais je confirme que c'est là un grand souci
pour moi. Je suis en train de faire chiffrer cet effort supplémentaire.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, ce que je voulais indiquer en
prologue à ce débat.
L'esprit général de ce texte s'inscrit dans nos priorités en une formule
simple : ne pas renoncer à améliorer la situation des personnes les plus en
difficulté malgré les contraintes financières des temps d'aujourd'hui.
Ce texte permet également de faire coup double puisque ce sont quelque 50 000
créations d'emplois que nous pouvons attendre, d'ici à trois ans, de ces
nouvelles dispositions.
Sans engager de dépenses supplémentaires importantes, mais en améliorant
considérablement l'usage des crédits actuels par quelques dispositions
juridiques aussi simples que nécessaires et par une meilleure coordination des
acteurs en présence, nous allons franchir un pas très important et attendu de
longue date.
Monsieur Fourcade, vous avez évoqué le problème des rentes viagères et celui
des incitations fiscales pour les dispositifs complémentaires. Nous aurons
l'occasion d'y revenir.
Pour les rentes viagères, cela me paraît très souhaitable. S'agissant des
incitations fiscales, je dois, là aussi, faire preuve d'une certaine prudence,
tout en reconnaissant que la question mérite d'être posée.
Je tiens à remercier vivement tous ceux qui ont pris une part très active à
l'élaboration de ce texte. M. Vasselle a cité quelques-uns d'entre eux,
notamment MM. Mercier, de Raincourt, Girod, Chérioux, Marini. J'ai conscience
de ne pas épuiser ainsi la liste de tous ceux qui ont oeuvré pour que ce texte
puisse venir en discussion devant votre assemblée.
Cette proposition de loi présente, je le répète, de grandes qualités. J'ai
bien compris que, par-delà son adoption, il faudrait que nous ayons des «
rendez-vous permanents », pour reprendre l'expression de M. Fourcade.
Il va de soi qu'un texte qui a été élaboré avec un souci de concertation
manifeste devra être appliqué dans un grand esprit de dialogue. Je m'y engage,
au nom du Gouvernement, avec la plus grande détermination.
En allant au-devant des besoins pressants de nombreuses familles qui sont aux
prises avec cette difficulté majeure de la dépendance, nous pourrons, mesdames,
messieurs les sénateurs, franchir une première étape, et je vous en remercie.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
(M. Jean Faure remplace M. René Monory au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
- groupe du Rassemblement pour la République : 57 minutes ;
- groupe socialiste : 49 minutes ;
- groupe de l'Union centriste : 42 minutes ;
- groupe des Républicains et Indépendants : 35 minutes ;
- groupe du Rassemblement démocratique et social européen : 25 minutes ;
- groupe communiste républicain et citoyen : 22 minutes ;
Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe :
10 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes
appelés aujourd'hui à examiner un énième texte qui, théoriquement, aurait dû
nous permettre de définir une politique de prise en charge de la dépendance des
personnes âgées.
Les rapports se sont succédé. Tous ont confirmé l'évolution et les
caractéristiques de ce véritable problème de société. Il n'est pas inutile de
les rappeler, ne serait-ce que pour mettre en évidence l'inadéquation de la
réponse qui nous est proposée avec ce texte à la nature et à l'ampleur de ce
phénomène.
Je citerai tout d'abord quelques chiffres.
L'espérance de vie est passée de vingt à quarante ans en mille ans, et il n'a
fallu qu'un siècle pour qu'elle passe de quarante à quatre-vingts ans. Notre
rapporteur mentionnait tout à l'heure des prévisions démographiques
impressionnantes, selon lesquelles un enfant qui naît aujourd'hui sur deux
deviendra centenaire.
Il y a quelques années encore, lorsque l'on évoquait les personnes âgées, on
les situait dans un troisième âge. Aujourd'hui, on fait la distinction entre le
troisième et le quatrième âge.
Le problème de société lié à la dépendance des personnes âgées résulte du
décalage entre le rythme d'accroissement de l'espérance moyenne de vie et le
rythme de croissance de vie sans inacapacités.
L'enjeu est donc d'importance : il s'agit d'éviter que cet allongement
d'espérance de vie pour chacun d'entre nous, qui constitue un véritable
progrès, ne se transforme en des drames individuels et collectifs faute d'une
prise en charge satisfaisante de ces incapacités.
En tant qu'élus et législateurs, nous devons définir et mettre en place les
moyens de la prévention et de la prise en charge de la dépendance.
Il est urgent d'assumer cette responsabilité. En effet, nous connaissons tous
déjà les trop nombreux drames humains qu'entraîne cette dépendance, les
difficultés dans les familles et la peur qui s'installe chez de plus jeunes,
qui sont angoissés par la perspective de leur propre vieillissement. Personne
aujourd'hui ne peut se prétendre à l'abri du risque de devenir dépendant.
Et pourtant, « il est de ces réformes de société qui, attendues par une partie
non négligeable de la population et unanimement souhaitées par le personnel
politique, ne parviennent jamais à aboutir ». C'est ce que soulignait tout
récemment un quotidien du soir à propos notamment de l'examen, l'année
dernière, du texte présenté par Mme Codaccioni.
Malheureusement, il est bien évident que le texte que nous étudions ne fera
que confirmer cette constatation.
Le titre de la proposition de loi est en lui-même un exercice de style : on
envisage en effet la création d'une prestation spécifique dépendance afin de
mieux répondre aux besoins des personnes âgées. Or nous verrons en quoi, mes
chers collègues, le dispositif proposé ne peut justement pas répondre à cette
ambition.
Mais, me direz-vous, ce dispositif n'est que transitoire, dans l'attente de
l'instauration de la véritable prestation d'autonomie. Or nous n'avons aucune
information sur le terme de cette période transitoire, sur les orientations de
la future et véritable prestation d'autonomie, et encore moins sur le
financement de celle-ci.
Plus étonnant encore, nous constatons depuis quelques semaines que le Premier
ministre et le Président de la République promettent la mise en place, dès
1997, de la prestation d'autonomie. Monsieur le ministre, vous pourrez
certainement nous éclairer sur ces déclarations, dont personne ne connaît
l'exacte signification ni la véritable portée.
Cette prestation autonomie sera-t-elle une version révisée de ce que nous
propose M. le rapporteur aujourd'hui et qui, reconnaissez-le, n'a pas
grand-chose à voir avec les promesses faites par le candidat Chirac, ni même
avec l'amorce de réforme engagée l'année dernière à cette même époque ?
Toute cette campagne ne traduit-elle pas plutôt la volonté de faire croire à
nos concitoyens, au premier rang desquels les personnes âgées et leur famille,
que la loi qui sera issue de nos débats permettra la réalisation d'une promesse
électorale de mai 1995 ? Si tel était le cas, il y aurait, dans cette confusion
sémantique volontairement entretenue, un véritable abus de confiance, une
énorme tromperie, d'autant plus flagrante et scandaleuse que, sur ce
dispositif, l'Etat n'envisage pas de dépenser un centime !
M. Guy Fischer.
C'est exactement cela !
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Comment peut-on imaginer un tel désengagement quand il s'agit d'assumer un tel
risque pour un tel phénomène de société ?
Mais il est vrai que le mois de mars 1998 doit se préparer dès aujourd'hui,
que le Gouvernement souhaite retrouver grâce aux yeux de ses électeurs et qu'il
y a là un potentiel électoral énorme.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
C'est de la provocation !
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Ne vous faites cependant pas d'illusions : les Français ne s'y trompent plus.
Déjà, une première approche faite auprès des personnes concernées, qu'elles
soient représentantes des personnes âgées, intervenants près de cette
population, ou personnes âgées elles-mêmes, a révélé que ce texte suscite une
réaction de rejet et une désapprobation générale.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Ce n'est pas vrai !
M. Henri de Raincourt.
C'est absolument faux !
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Si on lit attentivement à la fois le texte de la proposition de loi et le
rapport, on note que vous annoncez, monsieur le rapporteur, votre volonté
d'atteindre trois objectifs ; deux d'entre eux sont très clairement exprimés,
le troisième étant quelque peu sous-entendu mais non moins explicite.
Vous prétendez, tout d'abord, améliorer la prise en charge de la dépendance,
ensuite maîtriser des dépenses d'action sociale des conseils généraux et,
enfin, créer des emplois.
Comme je le disais tout à l'heure, ce texte ne peut pas répondre à l'ambition
annoncée d'améliorer la situation actuelle des personnes âgées dépendantes.
Avant tout, le nouveau dispositif va devoir fonctionner sans engagement
financier supplémentaire.
Le plafond de ressources reste inchangé et le montant de la nouvelle
prestation sera à peu près identique à l'actuelle ACTP.
En fait, le texte ne fait que reconfigurer, replâtrer, devrais-je dire, le
principal instrument qui fonde l'action des conseils généraux pour la prise en
charge du handicap, à savoir l'allocation compensatrice pour tierce
personne.
Il est désormais prévu de différencier les catégories de personnes handicapées
selon qu'elles auront plus ou moins de soixante ans. Tout d'abord, je remarque
que l'on fait l'impasse sur la légitimité presque philosophique d'une telle
différenciation du handicap, ignorant de ce fait la connotation discriminatoire
de la dépendance des personnes âgées.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
C'est inexact ! Vous n'avez pas bien lu le texte, ma chère
collègue !
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Nous aurons l'occasion de l'étudier article par article, monsieur le
rapporteur.
Par ailleurs, dans le contexte actuel de volonté de maîtrise des dépenses de
santé, l'absence de définition extrêmement précise de la dépendance, ainsi que
des facteurs environnementaux à prendre en compte, risque de provoquer un
désengagement de l'assurance maladie vers la prestation spécifique
dépendance.
Ce risque sera particulièrement important en ce qui concerne les prescriptions
de soins à domicile. Au lieu de deux prestations complémentaires aujourd'hui
fréquemment versées - soins et dépendance - nous risquons d'avoir une
substitution d'une allocation d'aide sociale à une prestation de sécurité
sociale, l'une pouvant faire l'objet d'une récupération, l'autre non.
En outre, le texte prévoit de supprimer le cumul de l'aide à domicile et de la
prestation spécifique dépendance. Cette disposition intervient de façon
restrictive par rapport à l'actuelle ACTP. La modicité de la part résiduelle de
l'heure d'aide ménagère qui incombe à la personne âgée permet de financer un
nombre d'heures de travail à domicile plus important que l'actuelle ACTP.
L'ensemble des acteurs auprès des personnes âgées connaissent bien la valeur
préventive de leurs interventions. On ne peut pas ne pas noter, à ce stade de
cette proposition de loi, que la prévention est la grande oubliée. Mais il est
vrai que le titre même du texte ne fait plus référence à l'autonomie des
personnes âgées, l'autonomie ne pouvant valablement s'envisager que si des
mesures de prévention interviennent de façon régulière et quasi permamente, ce
qui suppose des moyens.
J'ajoute que le bénéfice de la prestation spécifique dépendance se situe dans
le champ de l'aide sociale. S'il n'est pas prévu de récupérer sur les obligés
alimentaires, en revanche, la récupération sur succession se fera avec plus
d'amplitude et d'effectivité que pour l'ACTP. Désormais, la récupération se
fera à l'égard de tout légataire. On ne peut ignorer l'impact dissuasif d'une
telle mesure. Mais peut-être est-ce l'objectif !
La proposition de loi renvoie à un décret la fixation d'un seuil en deçà
duquel le recours sur succession ne s'exercera pas. Face à cette imprécision,
devons-nous conclure que les règles générales en la matière ne s'appliqueront
pas ? Et si tel était le cas, pouvez-vous nous donner une indication sur le
seuil ?
A ce propos, je m'interroge sur la cohérence entre cette mesure attestant la
volonté, pour les conseils généraux, de mettre à contribution le patrimoine de
la personne âgée et la proposition de neutraliser les rentes viagères «
dépendance » dans le calcul des ressources.
Il est vrai que, dans ce domaine précis, le Gouvernement a plutôt tendance à
encourager, voire à privilégier, la prévoyance individuelle - à chacun selon
ses moyens ! - au détriment d'une solidarité organisée et structurée.
Le projet en gestation sur l'épargne-retraite en est une autre illustration.
Il s'agit donc bien d'une démarche générale.
Enfin, comment ne pas évoquer, au titre des carences, des lacunes de cette
proposition de loi, la complexité et les inégalités qui résulteront de la
multiplicité des formules qui seront en vigueur sur le territoire national ?
D'une part, l'actuelle ACTP continuera d'être servie aux actuels bénéficiaires
qui désireront la garder ; d'autre part, la nouvelle prestation spécifique
dépendance s'appliquera à tous les nouveaux entrants dans le dispositif d'aide
à la dépendance.
Pourtant, la prestation expérimentale dépendance offrira toujours un régime
plus favorable à ses bénéficiaires dans les douze départements qui ont mené
l'expérimentation. Doit-on déduire de la rédaction de l'article 21 que les
nouveaux entrants, dans ces départements, se verront proposer la seule
prestation spécifique, dépendance ? Rien ne le signale dans le texte.
J'attendrai votre réponse sur ce point, monsieur le rapporteur.
Comment ne pas éprouver un sentiment d'injustice en imaginant les implications
concrètes d'un tel texte ? Comment, même, ne pas penser à un certain «
bricolage », tant ce texte nous paraît inachevé ?
Quant à l'objectif, moins avoué, de maîtrise des dépenses des conseils
généraux, c'est sans doute celui sur lequel le texte nous donne le plus de
garanties.
En effet, la récupération effective sur succession pour l'ensemble des
légataires vient en atténuation des dépenses engagées, du fait des recettes
qu'elle suscitera mais aussi, et peut-être surtout, par l'effet dissuasif
qu'induit une telle mesure.
De plus, les auteurs de la proposition de loi, conscients des
dysfonctionnements de la COTOREP, prévoient de confier l'évaluation du niveau
de dépendance à une équipe médicosociale qu'il revient au président du conseil
général de nommer.
Sur ce point, toutes les personnes concernées à un titre ou à un autre que
nous avons pu interroger ont estimé qu'il était risqué de confier au financeur
la responsabilité de l'évaluation. Comment ne pas craindre, en effet, qu'en
période de difficulté pour le conseil général ou de montée en charge du
dispositif des consignes restrictives ne soient envoyées par l'employeur,
c'est-à-dire le conseil général, aux salariés composant la commission
médicosociale ?
Au demeurant, cette recherche pour juguler les dépenses d'aide sociale des
départements est tout à fait compréhensible. En effet, comment ne pas percevoir
le sous-dimensionnement de cette collectivité territoriale face à une
responsabilité qui ne peut que s'accroître compte tenu de l'inflation
inéluctable de la charge qu'elle représente ?
C'est une des raisons - ce n'est certes pas la plus fondamentale - pour
lesquelles on peut s'interroger sur l'opportunité de maintenir cette compétence
dans le champ de l'aide sociale assumée par les conseils généraux.
Le sujet n'est pas facile. N'oublions pas qu'en raison de la spécificité de la
dépendance, au croisement du social et du médicosocial, la fidélité aux
conceptions héritées du Conseil national de la Résistance aurait pu nous amener
à inscrire la prise en charge de ce risque dans le champ de la sécurité
sociale. Le texte hybride de Mme Codaccioni ouvrait des pistes dans cette
direction, pistes sur lesquelles le Conseil économique et social, à une très
grande majorité, avait émis un avis favorable.
Il est regrettable qu'au nom des très réelles difficultés qu'engendrent
actuellement les déficits des comptes sociaux vous ayez renoncé à une telle
approche, qui faisait appel à la solidarité nationale, au moins partiellement,
au travers d'une participation du fonds de solidarité vieillesse.
Enfin, le troisième objectif de cette proposition de loi est la création
d'emplois de proximité.
Sur ce point, il est délicat de procéder à des évaluations précises. On évoque
les chiffres d'un emploi créé pour trois à six personnes âgées concernées par
cette mesure.
C'est un aspect qui nous tient particulièrement à coeur puisque l'exploitation
de ce gisement d'emplois de haute « valeur sociale ajoutée », si vous me
permettez cette expression, sera fonction de leur solvabilisation.
Dans cette perspective, nous ne pouvons donc que saluer la disposition
édictant que la PSD sera versée en nature et non plus en espèces. Cela
permettra d'éviter les dérives de thésaurisation qu'autorisait le versement en
espèces de l'ACTP.
Lorsqu'il est fait état d'une projection à l'échelon national des
répercussions de cette mesure sur l'emploi, on cite - notamment vous, monsieur
le ministre - le chiffre de 50 000 emplois créés. Je crains qu'on ne fasse ici
preuve d'un peu trop d'optimisme, d'autant que le texte dont nous sommes saisis
exclut les ménages à revenus moyens du champ d'intervention de la PSD.
Je crois également que, s'il est important de s'attacher au nombre d'emplois
créés, il est tout aussi primordial de s'interroger sur le type d'emplois dont
le développement sera ainsi encouragé.
De toute évidence, ce créneau sera principalement occupé par des femmes, qui
sont plus particulièrement touchées par le chômage.
Malheureusement, il ne s'agira que d'emplois peu qualifiés. Or, dans votre
système, rien ne vient corriger les effets pervers d'une contractualisation de
gré à gré entre l'employeur et son salarié. Si la personne âgée ne fait pas
appel à une association agréée, elle ne disposera pas de la garantie du minimum
de formation que l'on exige des personnels employés par des structures
spécialisées.
De même, la personne aidante devra se contenter d'un statut pour le moins
précaire, tel que la formation la plus élémentaire - sur les gestes à faire ou
à ne pas faire lorsque l'on déplace une personne handidapée, par exemple - ne
lui sera pas dispensée.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Nous allons trouver une solution.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Tant mieux !
Cette orientation vient à l'encontre des efforts menés par les associations et
les établissements autour de l'amélioration et de la valorisation de ce métier
; elle se situe, en revanche, dans la continuité d'une précarisation accrue
autour de « petits boulots ».
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe
socialiste, très sensible aux attentes considérables et justifiées de nos
concitoyens, conscient de l'importance de ce véritable problème de société que
pose le vieillissement de la population, responsable et conséquent dans son
approche et ses propositions, soumettra à votre approbation un certain nombre
d'amendements, afin de rendre acceptable un texte qui, s'il était voté en
l'état, signifierait, dans la plupart des cas de dépendance, une régression par
rapport à ce qui existe aujourd'hui.
Sans prétendre à la perfection, il faudrait, certes, pour cela, un autre «
positionnement » que l'aide sociale.
Le texte modifié par nos amendements améliorerait pourtant de façon
significative la prise en charge des personnes âgées dépendantes.
Nos amendements porteront principalement : sur le niveau de ressources des
bénéficiaires, afin d'intégrer les revenus moyens ; sur l'apport du FSV aux
conseils généraux, afin que ceux-ci puissent assumer les nouveaux entrants
;...
M. Alain Vasselle.
Il n'a plus de sous, le FSV !
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
... sur la suppression de la récupération sur succession, afin de gommer les
différences de traitement au sein de notre collectivité nationale, alors qu'il
s'agit d'un même public, placé dans des situations de dépendance identiques.
Enfin, pour mieux assurer aux personnes âgées un service de qualité et aux
salariés intervenants des garanties quant à leur statut, nous vous proposerons,
comme M. le rapporteur l'avait fait l'année dernière, de mettre sur un pied
d'égalité les emplois assurés dans le cadre d'un service structuré autour
d'associations, par exemple, et les emplois de gré à gré.
Si nos amendements n'étaient pas adoptés, et malgré les avancées
incontestables que représentent, par exemple, la prestation versée en nature et
non plus en espèces, ainsi que la définition du principe de la réforme de la
tarification, le groupe socialiste serait amené à voter contre cette réforme en
trompe-l'oeil.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Sénat est
aujourd'hui réuni une fois de plus pour débattre des moyens à mettre en oeuvre
en vue de pallier la perte d'autonomie des personnes âgées.
Jusqu'à présent, la plupart des discussions parlementaires ayant eu lieu sur
ce sujet se sont heurtées au mur de l'argent et des considérations financières.
La seule chose qui soit ressortie des travaux parlementaires, c'est, à
l'initiative du Sénat, la mise en oeuvre d'une prestation expérimentale de
dépendance dans douze départements. Cette expérimentation, même si elle est
intéressante par bien des aspects, ne semble pas pouvoir être généralisée à
l'ensemble du pays.
Il serait d'ailleurs intéressant qu'une évaluation complète de cette
expérimentation puisse être rendue publique.
En tous cas, aujourd'hui, on ne peut se contenter d'une nouvelle
expérimentation qui maintiendrait les inégalités existantes : l'établissement
d'une prestation destinée à pallier la dépendance des personnes âgées devient
de plus en plus urgente du fait de l'accroissement du nombre des personnes
âgées concernées.
C'est un problème auquel nous sommes confrontés du fait, bien sûr, de
l'allongement de l'espérance de vie depuis un siècle : de vingt-huit ans pour
les hommes et de trente-cinq-ans pour les femmes. Il s'agit là d'une mutation
historique à l'échelle de l'humanité.
Je parlais d'urgence ; le mot n'est pas trop fort quand on sait qu'une étude
réalisée en 1994 par la Caisse nationale d'assurance vieillesse des
travailleurs salariés révélait déjà que 700 000 personnes âgées connaissaient
des problèmes de dépendance.
C'est aussi une question de responsabilité des élus devant l'avenir puisque
les études statistiques annoncent que le nombre de personnes âgées dépendantes
pourrait doubler dans les vingt-cinq prochaines années.
L'exigence d'une vraie prise en charge de la dépendance ne se mesure certes
pas à l'aune des quelques chiffres que je viens de citer ; elle découle avant
tout du désarroi, voire du désespoir des personnes dépendantes, de leurs
proches et de leur famille face à la perte d'autonomie elle-même mais aussi
comme aux multiples démarches administratives qu'il faut accomplir pour
bénéficier des dispositifs existant dans notre pays et dont chacun ne peut que
constater le caractère complexe et très incomplet.
Cette situation est d'autant plus douloureuse que plusieurs conseils généraux
- et parmi ceux-ci l'on en trouve qui sont présidés par des signataires de la
présente proposition de loi - ne respectent pas certaines de leurs obligations
en la matière.
Tout cela ne peut plus durer. Ce qui doit être d'abord pris en considération,
avant toute approche économique du problème, c'est l'intérêt des personnes
âgées. Si la santé a un coût, il convient de considérer qu'elle n'a pas de
prix.
C'est, je le rappelle, à la Libération que des hommes et des femmes courageux
ont construit un système performant de sécurité sociale dans un pays ruiné par
la guerre.
Il serait inhumain de continuer à dire aujourd'hui qu'on ne peut rien faire à
cause des objectifs de maîtrise des dépenses publiques et de santé qu'implique
la réalisation des critères de convergence économique prévus par le traité de
Maastricht.
Les personnes âgées, leurs familles, leurs proches, leurs syndicats et
associations ne peuvent plus, désormais, se contenter des bonnes paroles
électorales. Ils leur faut du concret. Ils ne peuvent plus attendre.
En ce domaine, les promesses encore récentes de M. Chirac, lorsqu'il était
candidat à la présidence de la République, semblaient annoncer une solution : «
Le temps est venu de mettre en oeuvre rapidement, dans le cadre d'une politique
en faveur des personnes âgées, une allocation de dépendance. La dépendance des
personnes âgées est un risque nouveau qui doit être assuré par la collectivité
nationale. »
Un an et demi plus tard, et après qu'une tentative s'est enlisée dans les
sables de la politique de rationnement des soins qui est en vigueur depuis trop
longtemps dans notre pays, il convient d'élaborer une véritable prestation de
solidarité.
C'est à juste titre que le futur Président de la République évoquait un «
risque nouveau ». Cela implique, à mon sens, une possibilité d'évolution et la
prise en compte d'un cinquième risque, qui est d'ailleurs prévu par la sécurité
sociale.
Ce risque n'a pas été institué lors de la création de la sécurité sociale, en
1945, compte tenu de ce qu'était alors la durée moyenne de vie. Pourtant, à
cette époque, le législateur n'excluait nullement la prise en charge de
nouveaux risques dans le futur. Ainsi, l'article L. 112-2 du code de la
sécurité sociale précise : « Des lois pourront étendre le champ d'application
de l'organisation de la sécurité sociale à des catégories nouvelles de
bénéficiaires et à des risques ou prestations non prévus par le présent code.
»
La promesse était claire. La solution était inscrite dans les termes mêmes qui
étaient employés : « risque nouveau », « solidarité nationale ». Cela ouvrait
la possibilité d'une prise en charge par la sécurité sociale d'un nouveau
risque, celui qui est lié à l'état de dépendance dû à la maladie et au
vieillissement.
J'entends déjà certaines objections : « Comment voulez-vous créer une nouvelle
prestation, alors que les déficits de la sécurité sociale ne cessent de croître
? »
Evidemment, cela implique de nouveaux financements.
Vous aviez proposé, en novembre, une augmentation de la CSG : nous vous
proposons une tout autre voie, mais j'y reviendrai, consacrant d'abord mon
propos au dispositif prévu par la proposition de loi de la commission des
affaires sociales.
Que nous propose-t-on aujourd'hui ? S'agit-il de faire droit à la promesse du
Président de la République ou de créer une prestation qui ne serait, en fait,
qu'un simple redéploiement des moyens actuels ? C'est malheureusement la
deuxième hypothèse qu'il faut probablement retenir.
En dépit de l'enthousiasme de M. le présidentFourcade, je n'y vois pas l'ombre
d'un avantage, sauf, à la rigueur, celui d'une meilleure qualité pour le même
prix.
En effet, le texte proposé consiste pour l'essentiel à réformer une allocation
déjà existante, l'allocation compensatrice pour tierce personne, l'ACTP, qui
est actuellement versée selon le niveau de revenus et le degré d'incapacité,
quel que soit l'âge.
Créée à la suite de la loi de 1975 en faveur des handicapés, elle a été
utilisée pour faire face à l'accroissement de la dépendance chez les personnes
âgées ; 187 000 personnes en bénéficient aujourd'hui.
La proposition de loi propose que, pour les personnes de plus de soixante ans,
l'ACTP soit remplacée par une « prestation spécifique dépendance », prestation
en nature, contrairement à l'ACTP, qui est une allocation en espèces.
Il s'agit donc d'une prestation d'aide sociale servie par les conseils
généraux et non d'un droit reconnu à tous, mis en oeuvre et géré par la
sécurité sociale.
Les critères que vous fixez font que cette prestation ne sera attribuée qu'aux
personnes cumulant la plus grande dépendance, la plus grande pauvreté et le
plus grand isolement, et donc exclura la majeure partie de la population qui
non seulement paie taxes, impôts locaux et nationaux, mais également cotise à
la sécurité sociale.
Pour les salariés un peu moins pauvres et les revenus moyens, vous ne
préconisez rien d'autre que le recours aux assurances privées, comme l'a
rappelé tout à l'heure M. Fourcade.
On peut s'interroger sur la dérive d'un tel système, qui, dès lors que l'on
dépasse le revenu minimal, impose de souscrire une assurance pour une
couverture maladie, une autre pour assurer la retraite, une autre encore pour
couvrir le risque dépendance.
Ainsi, avec un plafonnement des revenus fixé par décret à 7 700 francs -
c'est le chiffre annoncé dans le cas de dépendance maximum - l'allocation
serait de 4 300 francs. Un rapide calcul nous montre qu'il faudrait que les
autres ressources de la personne concernée ne dépassent pas 3 694 francs,
c'est-à-dire moins que le minimum vieillesse !
Ainsi se voient exclues du dispositif des centaines de milliers de personnes
dotées d'un pouvoir d'achat modeste si l'on se réfère à l'étude menée sur le
sujet, montrant que les personnes en situation de dépendance disposent de
revenus qui, en moyenne, n'excèdent pas 6 000 francs par mois.
Ne peut-on se poser la question de savoir si cette nouvelle prestation ne
risque pas, dans de nombreux cas, d'être inférieure à l'allocation
compensatrice pour tierce personne ? En effet, la prise en compte dans la
grille AGGIR de l'environnement, notion vague et aléatoire, pour déterminer
l'obtention et le taux de prise en charge de la prestation spécifique
dépendance peut se révéler pénalisante pour les personnes qui ont la chance de
vivre encore dans un contexte de solidarité.
Enfin, pour parachever le tout, et contrairement à ce qui se passe pour les
prestations de la sécurité sociale et l'actuelle allocation compensatrice pour
tierce personne, l'ACTP, la proposition de loi prévoit une prestation
récupérable sur les successions et même sur les donations effectuées par les
personnes âgées dans les dix années précédant la demande.
On voudrait que certaines personnes âgées qui ont pu, par leur travail,
acquérir un petit patrimoine renoncent à bénéficier de la prestation spécifique
dépendance que l'on ne s'y prendrait pas autrement !
En outre, alors que les moyens publics consacrés à la recherche en
gérontologie et à la prévention de la dépendance sont insignifiants dans notre
pays, le texte qui nous est proposé fait l'économie de toute politique à mener
dans ce domaine et fait l'impasse sur les moyens et la programmation de
constructions d'établissements d'accueil.
Pour notre part, nous souhaitons un véritable plan d'investissement destiné à
répondre aux besoins en matière de structures d'accueil et de places en
établissements d'hébergement.
Ainsi, nous proposons d'encourager la construction d'établissements à but non
lucratif par l'accès à des prêts à taux zéro et la diminution du taux de la TVA
de 20,60 % à 5 %.
De plus, la réforme de la tarification qui nous est proposée bouleverse
l'ordre des procédures d'autorisation et de financement instauré par la loi du
30 juin 1975 et fondé sur la reconnaissance des besoins. Dans la mesure où il
n'y a pas de déblocage de moyens supplémentaires au titre de l'assurance
maladie au-delà de l'arriéré des 14 000 places de sections de cure médicale,
tout démontre que la réforme ne se fera pas à la hauteur des besoins exprimés
par les établissements. Au contraire, elle sera déterminée par des orientations
budgétaires qui en sont fort éloignées.
Bien sûr, il faut reconnaître que ce texte permet, au moins, d'unifier les
interventions auprès des personnes âgées dépendantes et de réduire, hélas !
a minima,
les inégalités, en particulier les inégalités géographiques.
Il obligera, c'est quand même le moins que l'on puisse faire, tous les
départements, sans exception, à verser l'allocation aux personnes âgées
dépendantes, y compris si elles sont en établissement.
Pourtant, ce texte reste corseté par la volonté de ne pas créer de dépenses
nouvelles.
Avec cette prestation au nom volontairement proche pour que la confusion
puisse s'opérer entre la promesse et ce qui est réalisé, nous sommes loin de
l'allocation de dépendance promise.
Bien sûr, mes collègues de la majorité vont se défendre en arguant du
caractère temporaire de la nouvelle prestation.
Mais je crains, comme les syndicats et les associations de personnes âgées,
que cette proposition de loi ne permette surtout au Président de la République
et au Gouvernement de ne pas respecter leurs engagements.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Procès d'intention !
Mme Michelle Demessine.
Je crains aussi que, devant l'espoir suscité par la promesse d'une réponse
humaine au problème douloureux pour les personnes âgées et les familles qui les
entourent, cette prestation n'apparaisse comme une nouvelle injustice à ceux
qui ne pourront en bénéficier et qui ne pourront pas s'offrir les services
indispensables à leur autonomie car ils n'en auront pas les moyens
financiers.
Cette proposition de loi permet en outre à l'Etat de ne pas respecter ses
engagements dans l'immédiat concernant les 14 000 places dans les sections de
cure médicale autorisées depuis plusieurs années par les préfets et non
financées.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Ce n'est pas vrai, elles doivent être réalisées dans les deux
ans !
Mme Michelle Demessine.
En effet, l'article 16 prévoit que les places autorisées dans ces sections à
la date d'application de la présente loi seront financées dans un délai de deux
ans par les régimes d'assurance maladie.
Une telle disposition est inacceptable alors que les refus de financement ont
mis les établissements de soins dans des situations difficiles et les ont
obligés à faire assurer les soins infirmiers par des intervenants extérieurs
qui travaillent à titre libéral : ce type d'intervention à l'acte, directement
pris en charge par la sécurité sociale, coûte plus cher que l'ouverture des
places de cure médicale promises.
La volonté affichée des promoteurs de la proposition de loi est de ne créer
globalement aucune dépense supplémentaire et d'enrayer l'escalade de l'ACTP,
tout en tentant d'encadrer, de la manière la plus serrée possible, les dépenses
engagées au titre de la nouvelle prestation, voire de les diminuer.
Comment, en effet, faire face à ces besoins nouveaux, conséquences de
l'évolution de la durée de la vie humaine, si les dépenses liées à la
dépendance des personnes âgées sont laissées à la charge des seuls
départements, lesquels sont déjà asphyxiés par les transferts incessants de la
part de l'Etat, ainsi que par l'accroissement des dépenses sociales qu'ils
prennent en charge ?
Ils assurent déjà 20 % des investissements et une grande part des dépenses
sociales ; ils ont d'ailleurs de grandes difficultés à gérer l'allocation
compensatrice pour tierce personne.
Vouloir faire des départements les maîtres d'oeuvre de l'action en faveur des
personnes âgées dépendantes est, vous le savez bien, un exercice périlleux.
Je crains que le système qui nous est proposé, s'il devait perdurer ou servir
de base, à l'avenir, à la définition d'une nouvelle prestation, ne devienne
ingérable à moyen ou à long terme.
Les prévisions démographiques et l'insuffisance de prévention étant ce
qu'elles sont, tout laisse à penser que les dépenses liées au service de la
nouvelle prestation pourraient s'accroître dans de très fortes proportions
d'ici à quinze ou vingt ans.
Il est donc bien nécessaire, à mon sens, d'assurer les financements au niveau
national, d'une part, et une répartition équitable pour chaque personne,
d'autre part. Qui peut le faire mieux que la sécurité sociale, qui possède les
capacités techniques, juridiques et en personnel nécessaires.
Pour épargner aux départements la gestion de ce risque social qu'est la
dépendance, il faut la confier à la sécurité sociale, qui couvre 65 % du total
des dépenses liées à la dépendance - remboursement des traitements médicaux,
allocations servies par la caisse vieillesse.
C'est l'opinion du Comité national des retraités et personnes âgées,
représentatif de toutes les organisations de retraite, qui s'est déclaré
favorable à une allocation de solidarité nationale gérée par la sécurité
sociale, sans condition de ressources ni obligation alimentaire ni recours sur
succession, et attribuée aux personnes dépendantes vivant à domicile ou
hébergées en établissement.
Notre proposition n'est-elle pas de simple bon sens ? Soigner, c'est gérer et
réduire tous les inconvénients liés à la maladie ; c'est une démarche globale.
Notre proposition a le mérite de la simplicité et de l'efficacité. Il n'est nul
besoin de mettre en place un dispositif si périlleux. Le problème peut être
réglé par la simple adjonction d'un article au code de la sécurité sociale qui
définirait l'état de dépendance.
La sécurité sociale serait chargée de coordonner les intervenants et les
différents soins à apporter aux personnes âgées dépendantes.
Enfin, j'en viens au principal obstacle qui a fait reporter à chaque fois la
mise en place d'une véritable allocation d'autonomie : le financement
nécessaire.
La sécurité sociale souffre non pas d'un excès de la demande de soins qui
exigerait leur rationnement, mais d'une pénurie de ses ressources. C'est donc
en augmentant ses ressources qu'on peut résoudre ses problèmes financiers.
Il faut prendre l'argent à la source de création de la richesse, c'est-à-dire
à l'entreprise et sur les marchés financiers.
Nous proposons donc que les revenus financiers soient imposés au même taux que
les salaires. Cela permettrait non seulement de résoudre le problème du déficit
de la sécurité sociale mais encore de dégager les moyens nécessaires pour faire
face à des dépenses nouvelles et, notamment, aux dépenses de prise en charge du
risque lié à la dépendance des personnes âgées.
Dans l'attente d'une telle réforme, nous préconisons l'assujettissement de
l'ensemble des revenus financiers provenant des titres émis en France à une
cotisation sociale. Par ce biais, nous proposons de ne pas alourdir inutilement
la fiscalité sociale ou de ne pas recourir comme cela avait été prévu dans le
projet de loi avorté du Gouvernement sur la prestation autonomie, à un
alourdissement de la CSG, qui pèse sur les revenus des familles et donc sur la
croissance et sur la consommation.
Ce texte, qui vise à créer l'illusion que les promesses de la campagne
présidentielle ont été tenues, ne répond ni à l'attente des personnes âgées, de
leurs familles, des syndicats et des associations, ni aux possibilités des
collectivités territoriales et des contribuables locaux.
Nous ne sommes pas les seuls à nous opposer à ce texte : la semaine prochaine,
le 22 octobre, treize organisations de retraités appelleront à manifester sous
le slogan : « Les retraités en colère ».
L'ampleur de cette manifestation devrait être sans précédent dans l'histoire
des mouvements sociaux puisque s'y associeront des organisations très
diverses.
C'est dire si la volonté - largement partagée - d'obtenir un véritable droit à
la prestation dépendance et non une mesure d'aide sociale est forte.
Ne pas entendre cet appel est grave : n'est-il pas l'expression de toute une
génération qui a traversé ce siècle au milieu de grandes difficultés, de
grandes tourmentes, une génération qui a été l'artisan du redressement de la
France et de son développement économique ?
Mme Hélène Luc.
Très bien !
Mme Michelle Demessine.
Cette génération qui aborde son quatrième âge voudrait le vivre dignement, en
personne humaine. N'est-ce pas légitime ?
J'espère que mes collègues du Sénat et MM. les ministres sauront écouter cet
appel en acceptant enfin le principe d'une véritable prestation dépendance
prise en charge par la sécurité sociale.
C'est dans ce sens que nous nous exprimerons au cours du débat.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen,
ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel.
C'est un problème difficile que celui du quatrième âge, un problème difficile
qu'il faut aborder avec, à l'esprit, un maître mot : humilité. Monsieur le
ministre, tout à l'heure, vous avez justement fait preuve de cette belle vertu
en disant que le Gouvernement accueillait avec sympathie, pour cette étape
intermédiaire, la démarche d'un certain nombre de sénateurs.
Il faut en effet en être bien conscient, en ce domaine, il n'existe pas de
certitude, car nous sommes à la confluence de trois sciences qui ne sont pas
forcément exactes, surtout quand elles font des prévisions : la démographie, la
physiologie et la sociologie. Aussi, quand ces trois sciences livrent un
certain nombre d'éléments d'information, encore faut-il considérer ceux-ci avec
un esprit critique.
En Occident, l'espérance de vie, entre 1935 et 1991, s'est accrue de vingt à
vingt-cinq ans. C'est vrai. Mais cette progression n'a pas beaucoup de sens
car, entre 1981 et 1991, nous n'aurons gagné que trois années sans incapacités.
Quoi que nous disions et quoi que nous fassions, nous ne pourrons pas effacer
l'inéluctable dégradation de la motilité, de la coordination nerveuse, de
l'idéation et de la fatigabilité. Nous sommes donc bien condamnés à gérer la
dépendance, qui est la grande question sociale de cette fin du xxe siècle.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Parfaitement !
M. Guy Cabanel.
De surcroît, des facteurs sociologiques ont aggravé la situation.
Outre le vieillissement, nous assistons à la disparition des aides
traditionnellement apportées par les familles ou par les voisins. Cela conduit
à l'isolement, si tragique, de ceux qui ont le plus besoin de leurs concitoyens
pour les entourer et pour les aider. Les raisons du phénomène sont connues ;
elles forment la trame de la société française de cette fin de siècle. Citons
l'éloignement géographique des enfants, le travail des femmes, l'éclatement du
noyau familial, l'insuffisance des ressources économiques ainsi que l'exiguïté
des logements, qui interdit l'accueil des ascendants, même quand il est
souhaité, ce qui n'est malheureusement pas toujours le cas.
Tous ces facteurs contribuent à l'isolement de la personne au moment même où
son autonomie diminue.
La longévité augmente, le poids de la dépendance aussi. Le maintien à
domicile, toujours souhaitable, et qui a été notre doctrine à l'égard du
troisième âge, devient de plus en plus difficile.
(M. le ministre acquiesce.)
Il faut donc trouver des solutions.
On peut, certes, en trouver de plus radicales. On nous a proposé, voilà
quelques instants, le cinquième risque. La solution est facile, elle a le
mérite de la clarté.
M. Félix Leyzour.
Oui, elle est claire !
M. Guy Cabanel.
Cependant, elle exige un financement par la protection sociale. Or, l'année
dernière, nous avons vu quel sort dramatique fut réservé à un texte tendant à
instituer une prestation de solidarité nationale, proposition généreuse, mais
qui ne pouvait aboutir, car personne n'était en mesure de dégager les 15
milliards de francs qu'aurait nécessités son application en année pleine tant à
domicile qu'en établissement.
J'étais inscrit dans la discussion générale. J'ai demandé à ce que mon nom
soit rayé de la liste des orateurs. J'ai même déclaré à la presse que ce débat
était surréaliste. Il a d'ailleurs tourné court à la fin de la discussion
générale. Nous étions en novembre 1995.
Aujourd'hui, la situation a évolué. Douze départements ont fait, depuis 1994
l'expérience de la PED, c'est-à-dire de la prestation expérimentale dépendance.
Nos collègues présidents de conseils généraux qui ont vécu cette
expérimentation se sont déclarés satisfaits des conditions dans lesquelles elle
s'est déroulée. A partir de ce moment-là, il a été possible de reconsidérer la
situation.
Si je suis aujourd'hui signataire de cette proposition de loi, c'est parce que
je crois que l'étape intermédiaire proposée ici était indispensable pour sortir
d'une situation par trop confuse, étant toutefois entendu qu'elle ne devrait
pas durer trop longtemps, au risque, sinon, de susciter le désespoir de
certains de nos concitoyens.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Mais si, cela va durer !
M. Guy Cabanel.
Quelle est la condition posée pour franchir une nouvelle étape ? La remise en
ordre des finances de la sécurité sociale. A défaut, il convient d'appliquer
une solution intermédiaire, rendue d'autant plus indispensable que l'allocation
compensatrice pour tierce personne, attribuée depuis la loi de 1975 aux
personnes handicapées et étendue - un peu abusivement, d'ailleurs - aux
personnes âgées dépendantes, ne pouvait être pérennisée sous cette forme.
Naturellement, on peut critiquer ce texte et, en toute humilité, même les
signataires de la proposition de loi pourraient juger bien bas le plafond de
ressources qui sera appliqué pour l'attribution de cette prestation. En effet,
fixé à 7 694 francs, ce plafond est inférieur à celui que prévoyait le projet
de loi présenté par le Gouvernement l'année dernière, qui était de 9 329
francs. On comprend cependant parfaitement que cette somme constitue un premier
objectif pour maîtriser la mise en oeuvre du dispositif.
Cela étant, il faut le reconnaître, les classes moyennes, les cadres, sont
dans la pratique exclus du bénéfice de ce dispositif.
A cet égard, je comprends le souci de M. le rapporteur, notre collègue Alain
Vasselle, qui a souhaité que la prévoyance individuelle, ou celle qui pourrait
être instituée par l'organisation mutualiste, soit prise en compte et permette
d'éviter l'effet de seuil.
Il existe, en Europe, des systèmes de protection sociale très développés, qui
sont fondés justement sur une série de plafonds pour l'attribution des
prestations. C'est le cas, notamment, aux Pays-Bas. Cependant, les effets de
seuil y sont considérables et, s'ils sont bien supportés par nos voisins
néerlandais, ils le seraient peut-être plus difficilement en France, où l'on
n'est pas habitué à ce genre de choses.
Nous attendrons donc avec impatience l'amélioration des finances de la
sécurité sociale pour aller plus loin.
La prestation que nous proposons sera adaptée à chaque personne en fonction de
ses besoins. Ce qui est proposé paraît sage. La grille nationale AGGIR doit
permettre un bon impact du plan d'aide que nous envisageons et, intérêt
indiscutable, cette prestation à domicile sera fournie en nature, c'est-à-dire
éventuellement en soins infirmiers à domicile, en aide ménagère ou en livraison
de repas.
Ainsi, nous avons l'espoir non seulement de répondre aux principaux besoins de
la personne âgée et de rompre sa solitude, mais aussi d'aboutir à la création
d'emplois en nombre non négligeable, puisque la fourchette la plus souvent
retenue est d'un emploi créé pour cinq à sept personnes âgées dépendantes
aidées.
Pour les personnes accueillies en établissement, le dispositif sera, bien sûr,
différent. La prestation devrait être versée en espèces, évaluée lors de
l'admission et réactualisée régulièrement.
Un point suscite néanmoins quelques contestations. Encore une fois, l'humilité
s'impose, car les sénateurs signataires de cette proposition de loi n'ont pas
reçu que des compliments. L'écho de quelques critiques sévères devrait même
encore leur parvenir le 22 octobre prochain, puisque les retraités vont
manifester, paraît-il, contre le dispositif. Il importe d'autant plus de faire
comprendre son contenu et son caractère transitoire. C'est cela ou le vide dans
l'attente du « cinquième risque » qui sera infiniment plus difficile à mettre
en oeuvre, à mon avis.
Le dispositif est bien verrouillé du fait de l'encadrement administratif et
financier. L'expérience est également bien ressentie par les départements, le
président du conseil général prenant sa décision après avis du maire.
Cependant, compte tenu des critiques qui me sont parvenues, il me semble que
certains craignent une personnalisation très forte. Les contacts avec une
administration tout à la fois élue et de proximité sont fort intéressants, mais
peuvent devenir aussi conflictuels.
Donc, monsieur le rapporteur, vous avez très utilement rappelé que les voies
de recours devaient être importantes et bien précisées. Notre société se veut
conviviale, il peut donc y avoir des recours contre les décisions du président
du conseil général. De même, on peut passer outre à un avis motivé du maire
avec lequel on peut ne pas être d'accord. A ces conditions, nous obtiendrons
une meilleure application du système.
Dans le même ordre d'idées, la coordination des organismes d'employeurs nous
paraît fondamentale. C'est, à mon sens, dans l'intérêt non seulement de ceux
qui auront à gérer le risque mais aussi de ceux-là mêmes qui recevront l'aide
en fonction de la grille AGGIR.
Ce texte comporte encore un point positif en ce qu'il invite instamment le
Gouvernement à élaborer dans les meilleurs délais - on m'objectera que, dans la
situation présente, les meilleurs délais, c'est en 1997 ou en 1998 - une
tarification des établissements d'accueil des personnes âgées. Cette
tarification fera cette fois clairement la part entre les prestations relevant
de l'assurance maladie et celles qui relèveront désormais de la prestation
spécifique dépendance.
Ce texte offre un autre intérêt. Le financement des 14 000 lits de section de
cure médicale, autorisé mais non encore réalisé, le sera dans les mêmes délais,
à savoir peut-être en 1997, plus vraisemblablement en 1998.
M. le ministre nous a dit tout à l'heure qu'il était plus réservé sur les 4
400 places de soins à domicile. Même s'il n'a pas pu prendre la décision,
l'examen du dossier se poursuivra. Ces 4 400 places de soins à domicile me
paraissent aussi importantes que les 14 000 lits à créer. Une question me vient
cependant à l'esprit : la mission des directeurs des agences régionales de
l'hospitalisation sera-t-elle limitée à la promesse « sanctuarisée » de ces 14
000 lits à créer ? Je voudrais en être sûr. Mais nous attendrons pour voir
comment fonctionnent les agences de l'hospitalisation.
Quelles autres critiques peut-on faire à ce texte ?
On peut nous dire qu'il entraînera à la longue un gonflement des dépenses
sociales des conseils généraux. Je réponds que nous sommes dans une situation
favorable. Pendant une dizaine d'années, de 1980 à 1990, les contingents d'aide
sociale ont augmenté très rapidement. Or nous avons de la chance puisque,
depuis quatre ou cinq ans, l'augmentation ralentit dans la plupart des
départements. Aujourd'hui, nous souhaitons que cette maîtrise de l'aide sociale
par le département se pérennise et que la prestation spécifique dépendance
n'ait pas d'effet inflationniste et n'entraîne pas une surcharge. Nous
souhaitons surtout que l'on ne laisse pas trop longtemps les départements
seuls, pour assumer cette responsabilité.
Voilà pour ce texte, qui se veut provisoire. Nous espérons, tous comme M. le
président de la République, que la transition sera la plus courte possible.
Nous sommes cependant conscients que la durée de vie du dispositif dépendra des
aléas de la maîtrise des dépenses de protection sociale. Cette situation
transitoire est donc susceptible de perdurer. Si ce devait être le cas, il est
vrai que les discussions se feraient plus vives sur ce texte même.
Quoi qu'il en soit, la majorité des membres de mon groupe le votera, non
seulement parce que M. Paul Girod et moi-même en sommes signataires, mais aussi
parce qu'elle en sent la nécessité. Nous sommes heureux que la commission des
affaires sociales, son président, M. Fourcade, et son rapporteur, M. Vasselle,
aient mis autant d'acharnement, à chaque budget, à chaque DMOS, à présenter des
amendements qui ont permis au Gouvernement de laisser aujourd'hui la voie libre
à notre action.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union
centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Déclaration de l'urgence du texte
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :
« Paris, le 15 octobre 1996.
« Monsieur le président,
« J'ai l'honneur de vous faire connaître qu'en application de l'article 45,
alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement déclare l'urgence de la
proposition de loi tendant, dans l'attente du vote de la loi instituant une
prestation d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes, à mieux répondre
aux besoins des personnes âgées par l'institution d'une prestation spécifique
dépendance, déposée sur le bureau du Sénat.
« Veuillez agréer, Monsieur le président, l'assurance de ma haute
considération.
« Signé : Alain Juppé. »
Acte est donné de cette communication.
Discussion générale
(suite)
M. le président.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Darniche.
M. Philippe Darniche.
Vous n'avez pas oublié, mes chers collègues, que le débat sur le projet de loi
qui nous avait été soumis en 1995, suite aux promesses du Président de la
République, avait été reporté pour des raisons budgétaires. Je comprends fort
bien que des contraintes de ce type aient nécessité de passer par l'étape
législative que nous vivons aujourd'hui. Je tiens à saluer ici l'initiative de
M. le président Fourcade et de ses collègues qui ont déposé cette proposition
de loi de transition.
Trois aspects importants caractérisent cette proposition de loi : elle est
nécessaire et attendue par notre pays ; elle est réaliste et répond globalement
aux besoins de ses futurs allocataires ; elle concourt au renforcement des
solidarités entre les générations, et elle est synonyme d'espoir pour les
familles.
Toutefois, j'émettrai quelques voeux concernant certains aménagements
nécessaires.
Il s'agit d'une réforme nécessaire et attendue par notre pays.
Elle est devenue une nécessité au regard de l'insuffisance des prises en
charge actuelles de la dépendance physique et de l'allongement de l'espérance
de vie dû aux progrès de la médecine.
Aujourd'hui, on dénombre en France entre 500 000 et 900 000 personnes
dépendantes, dont près de 70 % sont des femmes. Pour l'an 2000, les projections
statistiques de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs
salariés évaluent cette population à près de 1,2 million.
Bien évidemment, ce problème n'est pas propre à notre pays puisque, depuis les
années soixante, le nombre de personnes âgées de plus de quatre-vingts ans dans
l'Union européenne a augmenté de 300 % ! Nous savons que lorsqu'un enfant naît
aujourd'hui, il a une chance sur deux de devenir centenaire.
Selon le service des études du ministère des affaires sociales, à la fin de
l'année 1994, près de 600 000 personnes vivaient en maison de retraite ou en
institution, et 377 000 d'entre elles, soit plus de 60 %, devaient avoir
recours à l'aide d'un tiers pour accomplir les actes essentiels de la vie
courante : s'habiller, faire sa toilette, se déplacer.
Depuis 1990, la proportion des personnes hébergées souffrant d'une dépendance
forte n'a cessé d'augmenter, pour atteindre pratiquement le seuil de 50 %. Ces
chiffres doivent être pris en compte au regard du fort recul de l'âge moyen
d'admission : quatre-vingt-quatre ans aujourd'hui contre quatre-vingt-un ans en
1990.
Je tiens, à cet égard, à souligner des éléments très positifs de cette
proposition de loi. Je citerai, d'abord, son souci d'une meilleure prise en
charge des personnes âgées dépendantes - ce qui reste son objectif central -
par des mesures concrètes et de proximité. Je citerai, ensuite, l'émergence
d'une nouvelle source potentielle d'emplois dans notre pays - d'ailleurs, les
expérimentations menées dans douze départements laissent espérer la création
d'un emploi pour six personnes dépendantes concernées. Je citerai, enfin, la
disposition visant à autoriser le financement sur deux ans de 14 000 lits de
section de cure médicale, afin d'accueillir les personnes les plus dépendantes
; cette mesure est unanimement attendue depuis plusieurs années et elle
pourrait entrer en vigueur le 1er janvier 1997. Monsieur le ministre, ainsi que
vous l'avez indiqué au cours de votre intervention et malgré les contraintes du
budget de la sécurité sociale, je souhaite que vous puissiez prioritairement
réaliser cette indispensable mesure et rattraper un retard trop pesant
aujourd'hui. J'étendrai mon souhait, comme tous mes autres collègues, au
financement des 4 400 places de soins infirmiers.
La réforme est réaliste et répond globalement aux besoins de ses futurs
allocataires.
La proposition d'attribuer une allocation en nature, et non en espèces, était
souhaitable. Elle correspond ainsi à une prise en charge plus juste et plus
équitable de la dépendance. L'effectivité de l'aide en sera améliorée par
rapport au système actuel de l'ACTP.
Sa mise en place sera rapide puisque le président du conseil général aura deux
mois pour statuer après que l'avis souhaitable des maires aura été formulé. Qui
n'a en mémoire les longues listes d'attente de dossiers à la COTOREP au point
que l'accord d'attribution était parfois donné après le décès du demandeur ?
L'efficacité du dispositif sera améliorée, car l'évaluation de la dépendance
selon la grille nationale AGGIR placera toutes les personnes concernées à
égalité d'attribution, évitant ainsi les distorsions que le système précédent
entraînait.
L'évaluation par une équipe médico-sociale sera de nature à renforcer la
justesse de la détermination de la dépendance du demandeur.
L'introduction du recours contre les décisions du président du conseil général
devant la commission départementale d'aide sociale reste un élément positif
pour les usagers, élément que le texte précédent ne prévoyait pas.
Enfin, le dispositif de recours sur succession, préféré à l'obligation
alimentaire, difficile à gérer, est parfaitement justifié.
Manifestement, cette proposition de loi concourt au renforcement des
solidarités entre les générations et est synonyme d'espoir pour les
familles.
Qu'est-ce qui mène une famille à se résoudre à faire entrer une personne âgée
en institution ? La réponse est simple puisqu'elle touche, vous vous en doutez,
l'ensemble de la population de notre pays. En effet, dès lors que le maintien à
domicile devient impossible du fait de l'aggravation de la dépendance physique,
les enfants recourent aux structures d'hébergement collectif.
Ainsi, cette proposition de loi doit pouvoir faire réfléchir tant les parents,
les grands-parents que leurs enfants et leurs petits-enfants sur l'évolution de
notre société, où le lien familial se distend progressivement, où la prise en
charge des générations plus âgées par les générations plus jeunes devient de
plus en plus difficile et où, enfin, pouvoir mourir chez soi dans des
conditions décentes devient un véritable luxe.
Toutefois, mes chers collègues, je formulerai deux incertitudes, qui rendent
nécessaires des aménagements complémentaires.
Première incertitude : les caisses d'assurance vieillesse doivent fournir le
personnel compétent nécessaire à la réforme, les dispositifs de la proposition
de loi entraînant obligatoirement, dans les faits, un surcoût en termes de
travail au sein des services départementaux. Or, aucune disposition concrète
n'est prévue afin de prendre en charge ce surcoût dû au renforcement des
équipes à l'échelon du département.
Seconde incertitude : les départements signeront avec les organismes sociaux
des conventions permettant la mise à disposition de personnels au service des
personnes dépendantes. L'élaboration de ces conventions sera déterminante, et
il me paraît souhaitable de les rédiger à partir d'une convention nationale
type.
Enfin, monsieur le ministre, mes chers collègues, je conclurai mon propos en
émettant quelques voeux.
Mon premier voeu concerne l'élargissement souhaitable de cette mesure aux
classes moyennes. En effet, s'il paraît prioritaire, comme cela a été dit tout
à l'heure, que cette loi s'adresse aux personnes les plus démunies et disposant
de faibles ressources - je partage tout à fait ce point de vue - les personnes
dont les ressources annuelles dépassent le seuil de 40 384 francs, ou le double
pour un couple, ne pourront y prétendre. L'effet de seuil sera donc cruel pour
ceux dont les revenus sont immédiatement supérieurs à ces montants.
Mon deuxième voeu est en fait une interrogation. Le montant maximal attribué
pour cette prestation se situant à 4 300 francs par mois, ce qui représente le
montant actuel de l'allocation compensatrice pour tierce personne, les
ressources maximales mensuelles pour une personne seule n'excéderont jamais 7
600 francs. Est-ce vraiment suffisant pour faire face aux dépenses liées à la
grande dépendance ?
Mon troisième voeu tient à la nécessaire amélioration de la grille AGGIR. De
l'avis unanime, elle ne tient pas suffisamment compte des caractéristiques de
l'environnement et de la notion d'incontinence. Une prise en compte rapide de
ces deux facteurs l'améliorerait considérablement.
Mon quatrième voeu porte sur la responsabilité des départements dans la mise
en place de cette prestation, qui doit être totale. Cette responsabilité est
souhaitable, car elle correspond au principe de proximité vis-à-vis des
personnes concernées, auquel nous sommes attachés. Cependant, elle constituera
incontestablement une charge supplémentaire. Ne pourrait-on envisager une
contribution de l'Etat par une mise à disposition de certains personnels, je
pense notamment ici à ceux des COTOREP ?
Mon cinquième voeu tient aux avantages de l'ACTP et au principe de basculement
presque automatique, qui est souhaitable pour assurer l'accès à la prestation
autonomie pour personnes âgées dépendantes. Je soutiendrai les amendements
déposés en ce sens.
J'en viens à mon sixième et dernier voeu : lorsque cette proposition de loi
aura été votée, dans quels délais les décrets d'application permettront-ils de
mettre effectivement en place les mesures qu'elle préconise ? Cette prestation
dépendance est attendue, monsieur le ministre, mes chers collègues, son
application doit être rapide. Je souhaite que les décrets y afférents puissent
être pris dès le vote de la loi par le Parlement.
En dépit de ces quelques remarques, je partage l'avis de M. le président
Fourcade, selon lequel cette proposition de loi constituera une réelle avancée
sociale.
Voilà pourquoi, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers
collègues, les sénateurs non inscrits du Sénat se joindront à moi pour la
soutenir et la voter.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du
RPR.)
M. Jacques Habert.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. de Raincourt.
M. Henri de Raincourt.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, quelle que
soit l'appellation qu'on lui donne - prestation d'autonomie, prestation
dépendance, prestation expérimentale dépendance, prestation spécifique
dépendance - l'important est de nous retrouver ce soir pour discuter au fond
d'un sujet qui, effectivement, intéresse bon nombre de nos compatriotes. Comme
les uns et les autres n'ont pas manqué de le relever, ce texte correspond en
effet à un besoin.
Je voudrais tout de même dire que le besoin lié à la dépendance n'est pas
nouveau. Les éléments en sont connus depuis un certain temps déjà. Il me semble
que depuis que l'on en parle il aurait peut-être été possible d'aller un peu
plus vite, si des gouvernements, appartenant d'ailleurs à des majorités
différentes, avaient bien voulu franchir le pas.
M. Jacques Barrot,
ministre du travail et des affaires sociales.
Eh oui !
M. Henri de Raincourt.
Il est donc un peu dommage que l'on fasse grief au Gouvernement actuel
d'accepter que, sur l'initiative du Sénat, on franchisse une étape importante
et que, même si la discussion est bien sûr ouverte, des critiques nombreuses et
pas toujours justifiées ramènent cette prestation spécifique dépendance à
quelque chose qui serait accordé au rabais, parce qu'on n'aurait pas pu faire
autrement. Cela me semble assez désobligeant à l'égard des personnes qui vont
bénéficier de la prestation spécifique dépendance. A la limite, on aurait pu
porter ce jugement avant que l'expérimentation ait été conduite !
M. Alain Gournac.
Voilà !
M. Jacques Barrot,
ministre du travail et des affaires sociales.
Très bien !
M. Henri de Raincourt.
Un tel jugement aujourd'hui est injustifié, alors que, dans les conclusions du
rapport du CREDOC, il est mentionné que 92 % des personnes interrogées, et
percevant donc la prestation expérimentale dépendance, sont satisfaites ou très
satisfaites. Il faut donc reconnaître que si cette prestation n'est pas parée
de toutes les vertus, elle n'a pas pour autant tous les défauts.
M. Jacques Barrot,
ministre du travail et des affaires sociales.
Excellement dit !
M. Alain Gournac.
Très bien !
Mme Michelle Demessine.
Il ne s'agit pas des mêmes plafonds !
M. Henri de Raincourt.
Après trois ans de luttes marqués par peu de victoires, je le reconnais, et
des succès mitigés, après de nombreux amendements examinés, repoussés ou votés,
après que le président Fourcade eut vraiment mis tout son poids dans la
balance, entraînant derrière lui l'ensemble de la commission, le rapporteur, M.
Alain Vasselle, et le Gouvernement, nous aboutissons à quelque chose qui me
paraît, à moi, éminemment positif.
Le terme utilisé tout à l'heure par M. Cabanel pour caractériser l'état
d'esprit dans lequel nous devons aborder cette discussion - humilité - m'agrée
tout à fait : nous savons effectivement que le besoin est réel, que notre
capacité financière pour y répondre n'est pas infinie et que ce serait sans
doute rendre un bien mauvais service à notre pays que de suivre le conseil
prodigué tout à l'heure par Mme Demessine, qui suggérait - on peut tout à fait
en débattre - d'inscrire ce dispositif dans le cadre du cinquième risque. Le
problème est posé.
En revanche, s'agissant du financement - permettez-moi, madame Demessine, de
vous le dire avec beaucoup de gentillesse - vouloir taxer les produits
financiers au-delà d'une certaine limite, c'est tout de même oublier la chute
du mur de Berlin et le fait que les frontières sont aujourd'hui très largement
ouvertes sur le plan économique et financier. Si vous voulez faire fuir les
capitaux à très grande vitesse,...
Mme Michelle Demessine.
Ils n'attendent pas cela pour fuir !
M. Henri de Raincourt.
... il faut continuer à taxer de manière excessive les résultats financiers !
Vous aboutirez alors au résultat inverse à celui qui était escompté : seuls
resteront les pauvres, qui n'auront pas pu partir et que l'on ne pourra taxer
davantage pour financer une prestation sociale.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
C'est très justement dit !
M. Henri de Raincourt.
Je fais partie de ceux qui ont très bien compris les raisons budgétaires ayant
amené le Gouvernement, l'année dernière, à reporter la discussion de ce
texte.
J'ai naturellement écouté avec un grand intérêt les propos tenus tout à
l'heure tant par M. le rapporteur - notre collègue a accompli un travail de
fond tout à fait remarquable - que par le président de la commission et par
vous-même, monsieur le ministre. Vous nous avez apporté un certain nombre de
réponses à des questions qui restent effectivement encore pendantes.
Je ne reviendrai pas sur le contenu même de la proposition de loi. Je
n'évoquerai que trois points : que faut-il penser des expérimentations ?
Comment peut-on en tirer les meilleures conclusions ? Quelle réforme doit être
envisagée pour les établissements ?
Sur le premier point - que faut-il penser des expérimentations ? - le
président de conseil général que je suis a essayé de saisir la chance que
représentait la mise en place de cette expérimentation pour en faire un outil
vraiment efficace sur le terrain. Le rapport du CREDOC qui fait le point sur
cette expérimentation est à cet égard tout à fait éclairant et positif.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Il aurait fallu généraliser cette expérimentation !
M. Henri de Raincourt.
Mais telle est la finalité du texte dont nous sommes en train de débattre et
que le groupe des Républicains et Indépendants votera !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Tout à fait !
M. Henri de Raincourt.
Cette expérimentation a montré - c'est là que certaines déclarations me
surprennent - qu'il existait une bonne coordination entre les différents
intervenants que sont les caisses de sécurité sociale et les départements. Elle
a également montré que l'on pouvait, avec un coût maîtrisé, répondre beaucoup
mieux que par le biais de l'allocation compensatrice aux besoins qui se
manifestaient, et ce pour deux raisons.
Tout d'abord, comme chacun le sait ici, des dérives financières ont été
relevées : l'allocation compensatrice pour tierce personne ne servait pas
exclusivement à ce à quoi elle était destinée. Elle pouvait être utilisée comme
complément de ressources pour financer l'hébergement, ou elle pouvait être
placée sur un livret d'épargne d'un membre de la famille. J'avais même cité à
cette tribune l'exemple du permis de conduire d'un petit-enfant qui avait été
financé par l'allocation compensatrice !
Le fait qu'un terme soit mis par ce système à la dérive de l'allocation
compensatrice permet de récupérer des crédits sans qu'il en résulte une
diminution des prestations pour les personnes concernées.
M. Jacques Barrot,
ministre du travail et des affaires sociales.
Bien sûr !
M. Henri de Raincourt.
D'autre part, comme un plan individualisé d'aide est proposé par l'équipe
médico-sociale à la personne qui dépose la demande, en liaison avec son
environnement familial, et que ce plan, la plupart du temps, est accepté, on
constate - on peut le vérifier dans les douze départements expérimentaux, et
toutes les réponses sont concordantes à cet égard - qu'il est possible
d'améliorer le service rendu aux personnes âgées tout en rationalisant les
modalités de sa gestion.
Et si l'enjeu, au fond, était de prendre en compte de manière significative la
dépendance sans qu'il en résulte un alourdissement insupportable des dépenses
publiques ? Il s'agit là, à mon avis, d'un point tout à fait essentiel en
termes de coordination.
Je souhaiterais, monsieur le ministre, que l'article 21 soit entendu comme
garantissant que les modalités de l'expérience continueront de s'appliquer dans
des conditions inchangées aux personnes qui en bénéficient actuellement. Il
conviendra donc de donner à cet égard des directives claires aux organismes de
protection sociale, car je ne suis pas sûr que partout, à l'échelon
départemental, ils interprètent la poursuite de l'expérimentation comme se
déroulant dans des conditions financières identiques à celles que nous
connaissons aujourd'hui.
J'en viens à ma deuxième question : comment tirer les meilleures conclusions
de ces expérimentations ?
Comme M. le président de la commission l'a excellemment dit tout à l'heure, ce
sont bien près de 14 milliards de francs qui sont consacrés par l'ensemble des
intervenants - les collectivités locales et les caisses de sécurité sociale - à
la dépendance des personnes âgées. L'aide qui est actuellement apportée par le
département résulte d'un détournement de la loi de 1975, détournement consacré
par des juridictions qui ont interprété la loi dans un sens contraire à la
volonté du législateur,...
M. Jacques Barrot,
ministre du travail et des affaires sociales.
Eh oui !
M. Henri de Raincourt.
... comme on peut le constater à la lecture du
Journal officiel
des
débats de l'époque. Je ferme la parenthèse, mais il faut bien, à un moment, que
les choses soient dites, et ce point me tient particulièrement à coeur !
On constate donc aujourd'hui que les caisses de sécurité sociale, d'un côté,
et les départements, de l'autre, agissent selon des critères qui ne sont pas
forcément les mêmes. La coordination de l'action des départements et des
caisses est donc tout à fait indispensable.
C'est dans cette perspective que Michel Mercier et moi-même avons cosigné un
amendement tendant à mieux consacrer l'importance de la convention qui liera
désormais départements et caisses, en vue de favoriser cette coordination.
M. Jacques Barrot,
ministre du travail et des affaires sociales.
Très bien !
M. Henri de Raincourt.
Je suis donc persuadé qu'à moyens constants pour les départements et moyennant
peut-être une participation accrue, mais sans doute modeste, du fonds d'action
sociale des caisses, l'expérience grandeur nature permettra d'améliorer très
sensiblement le service rendu à nos compatriotes.
Il nous appartiendra, ainsi que M. le président de la commission l'a dit à
juste raison, de franchir les degrés qui nous séparent encore de l'objectif
affiché et recherché par le chef de l'Etat, selon des modalités que les
circonstances nous permettront de préciser.
Mais, à cet égard, je considère qu'il vaut mieux agir comme nous le faisons
aujourd'hui et attendre des jours meilleurs pour aller plus loin, plutôt que
d'attendre des jours meilleurs pour enfin démarrer.
Il y a là, véritablement, en termes de services rendus à nos compatriotes, une
nécessité qui ne doit pas nous laisser perdre de temps.
Enfin, monsieur le ministre - c'est ma troisième question - quelle réforme
doit être envisagée pour les établissements ?
Dans votre propos, vous nous avez apporté un certain nombre de réponses qui,
je crois, sont de nature à rassurer les gestionnaires départementaux. Si je
vous entends bien, vous séparez clairement, à juste raison, la prise en charge
sanitaire des personnes âgées et leur prise en charge sociale : à l'assurance
maladie les dépenses de santé, aux collectivités locales les dépenses de gîte
et de couvert. La prise en charge de la dépendance, quant à elle, serait donc
répartie entre ces deux acteurs selon qu'elle revêt un caractère sanitaire ou
un caractère social.
Il nous appartiendra d'apprécier les textes réglementaires propres à mettre en
oeuvre cet aspect de la réforme. Je note dès aujourd'hui que cette dernière
sera essentiellement fondée sur une adaptation de la prise en charge à l'état
effectif de la personne accueillie en établissement. Il s'agit là - il faut le
souligner - d'un concept nouveau et positif.
Il n'en demeure pas moins qu'une question se pose encore : la proposition de
loi prévoit que la réforme de la tarification s'étale sur plusieurs exercices
et qu'elle s'achève au 31 décembre 1999. Cette échéance pourrait être avancée,
me semble-t-il. Nous en débattrons lorsque nous examinerons un amendement
allant dans ce sens.
Pendant cette période, la prestation spécifique dépendance en établissement
doit être fixée à un niveau qui ne dissuadera ni ledit établissement ni les
gestionnaires d'entrer dans la nouvelle tarification.
Je souhaiterais donc, monsieur le ministre, que vous soyez un peu plus précis
par rapport à votre propos précédent. A cet égard, l'article 15, tel qu'il
résulte des travaux de la commission, me paraît vous donner les moyens
juridiques d'aller dans ce sens.
Vous me permettrez enfin d'évoquer rapidement les compléments que MM. Michel
Mercier, Paul Girod, Jean Chérioux et moi-même avons choisi d'apporter au
dispositif, après concertation avec M. le rapporteur. Nous aurons en effet
l'occasion de les exposer plus en détail au cours de la discussion des
articles.
Je voudrais revenir sur trois d'entre eux qui ont été abordés par un certain
nombre de nos collègues.
Tout d'abord, monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir accepté, sans
attendre la réforme de la tarification, de financer les lits de section de cure
médicale autorisés. Nous savons tous de quoi il retourne, et je n'insiste donc
pas.
D'autres collègues ont également indiqué qu'il conviendrait, simultanément au
financement de ces 14 000 lits de section de cure médicale, de financer les 4
000 lits - certains ont cité le chiffre de 4 400 lits - de soins à domicile.
Nous avons déposé un amendement destiné à permettre ce financement. J'espère,
monsieur le ministre, que vous voudrez bien émettre un avis favorable sur ce
texte, au nom du Gouvernement.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Nous l'espérons aussi !
M. Henri de Raincourt.
Par ailleurs, nous vous proposons, afin d'éviter de gérer simultanément, dans
les douze départements, la prestation expérimentale, l'ACTP maintenue dans
certains cas, la prestation provisoire en établissement et la prestation
nouvelle, de simplifier et d'accélérer le passage de l'allocation compensatrice
vers la prestation spécifique dépendance et d'uniformiser certaines règles de
leur attribution.
C'est ainsi que le contrôle d'effectivité se ferait désormais dans les mêmes
conditions pour l'ACTP et pour la prestation nouvelle. Ce faisant, d'ailleurs,
nous reviendrons très exactement à la disposition adoptée par le Parlement à la
fin de l'année 1994, disposition - je me permets de le rappeler au membre du
Gouvernement ici présent - que nous n'avions pas retrouvée intégralement dans
un décret de 1993 qui traitait de l'effectivité et qui restreignait le champ
d'intervention.
Le troisième point - il a déjà été abordé par M. le président de la
commission, M. le rapporteur et bon nombre de mes collègues, et il le sera
sûrement aussi par les orateurs suivants - concerne les classes moyennes. Ce
texte est dirigé avant tout vers les personnes les plus démunies et les plus
dépendantes, car nous n'avons pas les moyens d'aller au-delà pour le moment.
Je crois, à l'inverse de ce qui a pu être dit par d'autres - ils ont tout à
fait le droit d'avoir un sentiment contraire - qu'il ne faut pas décourager les
classes moyennes, lesquelles attendaient beaucoup de ce texte.
M. le rapporteur a suggéré que les rentes viagères constituées pour prévenir
le risque de dépendance ne soient pas ajoutées au revenu pris en compte pour
l'attribution de la nouvelle prestation. A cet avantage « à la sortie » devrait
s'ajouter, à mon avis, un avantage « à l'entrée », qui consisterait à exonérer
de toute charge fiscale les cotisations versées au titre du risque
dépendance.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Tout à fait !
M. Henri de Raincourt.
Telles sont, mes chers collègues, les quelques remarques que je souhaitais
faire sur ce texte.
J'ai pu lire qu'il avait été taillé sur mesure pour les présidents de conseil
général.
M. Jacques Barrot,
ministre du travail et des affaires sociales.
Merci pour eux !
M. Henri de Raincourt.
Je crois que les présidents de conseil général, contrairement à ce que j'ai
entendu tout à l'heure, sont tout à fait capables d'être à la fois efficaces et
honnêtes intellectuellement,...
M. Jacques Barrot,
ministre du travail et des affaires sociales.
Merci pour eux !
M. Henri de Raincourt.
... en particulier dans la détermination de la composition de l'équipe
médico-sociale. Il ne faudrait pas nous faire de procès d'intention avant
l'heure.
Je crois véritablement aussi que ce texte améliorera d'une manière tout à fait
sensible le sort des personnes âgées dépendantes.
Enfin, pour terminer, monsieur le ministre, permettez-moi de développer une
idée qui m'est chère : cette proposition de loi ne préfigure-t-elle pas ce que
pourrait ou devrait être une politique sociale moderne ?
Mme Michelle Demessine.
Une politique sociale
a minima
!
M. Henri de Raincourt.
Non, madame !
Je veux dire par là que la plupart des textes qui régissent notre politique
sociale ont été adoptés à des moments précis, parce qu'ils correspondaient à un
besoin donné. Mais les choses ont évolué, me semble-t-il. Ouvrir une prestation
correspondant à un besoin dont personne ne nie la nécessité, et le faire non
pas en y répondant d'une manière uniforme mais en individualisant l'aide
apportée par la collectivité, voilà un exemple qui devrait être étendu à bien
d'autres secteurs de notre politique sociale. Cela nous permettrait
certainement de mieux répondre à certains autres besoins, et de le faire à coût
budgétaire sensiblement équivalent.
Mme Michelle Demessine.
Ce n'est pas très ambitieux !
M. Henri de Raincourt.
Il y a là, me semble-t-il, une grande ambition à nourrir pour une politique
sociale généreuse et équitable.
Mais il faudrait, monsieur le ministre, que vous acceptiez que ce soit celui
qui paie qui commande.
Mme Michelle Demessine.
C'est le contribuable qui paie !
M. Henri de Raincourt.
Aujourd'hui, en effet, les départements sont très sollicités en matière de
politique sociale, mais ils ne peuvent discuter aucun des éléments de la
facture. Ce n'est pas de la sorte que l'on mènera une politique sociale
généreuse, équitable et bonne utilisatrice des deniers publics !
Par conséquent, beaucoup reste à faire et vous pouvez faire confiance aux
acteurs de terrain, qu'ils soient élus départementaux, élus municipaux ou
représentants des associations, pour évaluer, à l'intérieur d'un cadre national
bien défini et de façon adaptée, les réponses aux besoins individuels des
personnes qui les sollicitent.
(Applaudissements sur les travées des
Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur
certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte qui
nous est présenté aujourd'hui répond incontestablement à une nécessité.
Depuis de nombreuses années, les départements se sont efforcés, notamment à
travers l'aide sociale, d'améliorer la situation des personnes âgées
dépendantes. Il convient aujourd'hui de leur en être reconnaissants. Mais,
devant les dérives de l'allocation compensatrice pour tierce personne, créée
par la loi de 1975 à destination des personnes handicapées et progressivement
ouverte aux personnes âgées, ce qui la fait peser de manière croissante sur nos
finances départementales, l'instauration d'un dispositif spécifique et adapté
s'est révélée indispensable.
En novembre 1995, lors de la présentation du premier texte sur la prestation
d'autonomie pour personnes âgées, nous avions lié notre approbation à une
définition claire du financement de ladite prestation, à une délimination nette
de la charge financière entre l'Etat et les départements et à la prise en
compte de perspectives démographiques marquées par le développement de la
dépendance.
En réponse à cette triple préoccupation, la prestation spécifique dépendance,
prestation en nature sous condition de ressources instituée par la présente
proposition de loi, constitue, je le crois, une réponse réaliste aux besoins
des personnes âgées dépendantes et vous avez raison, monsieur Vasselle, de
préciser dans votre excellent rapport qu'il n'y a qu'une différence de degré et
non une différence de nature entre le texte de l'an dernier et celui que nous
examinons aujourd'hui.
Selon les termes mêmes des rédacteurs de la proposition de loi, il ne s'agit
que d'une étape, en attendant le vote de la loi instituant la prestation
d'autonomie que la conjoncture économique et l'état des finances publiques ne
permettent pas aujourd'hui.
Nous avons pris connaissance de certaines réactions publiques selon lesquelles
la réponse apportée aux besoins recensés serait décevante. Pourtant, je le
crois, votre proposition de loi, monsieur le président de la commission,
monsieur le rapporteur, représente une avancée.
Dans les circonstances actuelles, le texte sur la prestation spécifique
dépendance a le mérite de fixer un nouveau cadre juridique en mettant en place
des mécanismes adaptés aux personnes âgées. Il permet de sortir de la logique
réductrice et inadaptée de l'invalidité. Il permet l'instauration d'un
dispositif plus efficace, grâce à des procédures moins lourdes susceptibles de
prendre en compte l'urgence des situations individuelles. Il permet, enfin, -
et cela doit être souligné - la nécessaire mise en oeuvre, étant donné
l'éparpillement des moyens disponibles, d'une véritable rationalisation et
d'une coordination des aides autour de la personnes âgée.
Sur ce point, des précisions devaient toutefois être apportées, afin de bien
préciser le cadre dans lequel devront être conclues les conventions entre les
différents partenaires et de conforter le rôle du président du conseil général
en la matière. La responsabilité de celui-ci découle en effet des compétences
qu'il exerce actuellement dans le domaine de la politique en faveur des
personnes âgées, mais il est évident que les présidents de conseil général
auront la volonté d'associer les caisses d'assurance vieillesse, les
associations d'aide aux personnes âgées et les communes à la mise en oeuvre de
cette décision. En matière de concertation, ils n'ont de leçon à recevoir de
personne !
Outre la création d'une nouvelle prestation, le second grand apport de ce
texte tient à la mise en place d'une réforme de la tarification des
établissements accueillant des personnes âgées. Cette réforme, qui avait été
annoncée par la loi du 28 mai 1996 portant diverses mesures d'ordre sanitaire,
social et statutaire, tend à ce que les personnes âgées dépendantes vivant dans
un établissement puissent être prises en charge en fonction de leur état et non
du statut de la structure qui les accueille.
En conclusion, cette réforme est, je le crois, indispensable, et il est
nécessaire que l'instauration d'une prestation pour les personnes âgées
s'inscrive dans une politique globale de la vieillesse.
Cette réforme est modeste, selon certains. Elle n'en représente pas moins un
progrès et une étape adaptée au contexte actuel.
Elle sera, en outre, si elle est bien appliquée, créatrice d'emplois. Cela
mérite aussi d'être rappelé, malgré les problèmes complexes liés à la gestion
du dispositif - en particulier à la gestion par les départements - ainsi qu'aux
dérives financières qu'il faudra bien éviter afin de ne pas peser trop
lourdement sur les finances locales.
On ne peut nier l'opportunité qu'il y a à légiférer rapidement en la matière,
ni omettre de prendre en compte la forte et légitime attente qui existe dans la
population.
C'est la raison pour laquelle je voterai sans état d'âme le texte qui nous est
proposé, fruit du travail remarquable réalisé par la commission des affaires
sociales. Celle-ci mérite, ce soir, toute notre gratitude.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens
d'abord à rendre hommage à l'excellent travail que la commission des affaires
sociales a effectué au cours des dernières semaines et au rapport, non moins
excellent, de M. Alain Vasselle. Grâce à eux, nous assistons aujourd'hui à une
avancée tout à fait sympathique que beaucoup de nos collègues ont déjà
soulignée.
Le projet de loi instituant une prestation d'autonomie en faveur des personnes
âgées dépendantes, dont nous avions commencé l'examen l'an dernier et qui
était, à l'évidence, très attendu, comportait un volet financier qui n'apparaît
plus dans la proposition de loi dont nous discutons aujourd'hui. C'est pour
cette raison que votre commission des finances, qui était saisie pour avis du
projet de loi - elle m'avait désigné à cet effet comme rapporteur - ne l'est
pas pour la présente proposition de loi.
Cette proposition de loi s'inscrivant expressément dans l'anticipation d'un
futur projet de loi, je voudrais donc simplement me faire l'écho, ce soir, du
débat que nous avons eu la semaine dernière en commission des finances. Nous
avons, bien entendu, approuvé l'ensemble du dispositif à la fois généreux et
rigoureux qui est axé sur l'aide en faveur des plus dépendants et des plus
démunis, comme l'a fort bien souligné M. Alain Vasselle dans son rapport.
Nous avons apprécié une proposition de loi qui fait apparaître au moins six
avancées importantes : meilleure appréciation de la dépendance ; meilleure
participation des collectivités locales et des élus à l'octroi de cette
prestation ; meilleure appréciation des charges de la dépendance pour les
établissements ; meilleure affectation des dotations financières à la création
d'emplois de proximité - je me réfère aux propos de M. le ministre, qui a
avancé le chiffre de 50 000 en trois ans : acceptons-en l'augure ! - meilleure
adaptation de cette prestation aux besoins des plus démunis et aux moyens
financiers de la collectivité nationale ; enfin, meilleure utilisation de la
pratique du conventionnement avec les établissements.
Nous avons pris acte du report de la prestation d'autonomie. Cette décision du
Gouvernement peut-être difficile mais sage, a tiré les conséquences du problème
de financement sur lequel j'avais appelé votre attention l'an dernier dans le
rapport pour avis que j'avais présenté dans cet hémicycle.
En effet, le projet de loi ne prévoyait aucune ressource supplémentaire pour
gager la contribution du fonds de solidarité vieillesse au financement de la
prestation d'autonomie. Le coût de cette prestation, en année pleine, était
estimé à 20 milliards de francs, correspondant à 9 milliards de francs de
dépenses redéployées et 11 milliards de francs de dépenses nouvelles.
Or, cette participation du fonds de solidarité vieillesse était essentielle
pour assurer le bouclage financier du dispositif. Elle seule pouvait garantir
que les collectivités locales, essentiellement les départements, ne seraient
pas sollicitées au-delà de leurs engagements actuels en faveur des personnes
âgées dépendantes.
Certes, depuis la création de la caisse d'amortissement de la dette sociale au
début de cette année, le fonds de solidarité vieillesse n'est plus tenu de
verser chaque année à l'Etat 12,5 milliards de francs au titre de la dette du
régime général reprise en 1993. Mais cette marge de manoeuvre financière n'est
plus disponible, car elle a été affectée au redressement de la branche
vieillesse.
De même, le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit que le
gain résultant pour le fonds de solidarité vieillesse de l'élargissement de
l'assiette de la contribution sociale généralisée sera attribué à la branche
maladie, sous la forme de l'affectation d'une fraction des droits sur les
alcools actuellement perçus au profit du fonds.
En fait, il apparaît que la création de la prestation d'autonomie est
conditionnée au retour de l'ensemble des comptes sociaux à un équilibre
financier durable.
Pour autant, la commission des finances relève que l'institution de la
prestation spécifique dépendance ne sera certainement pas sans coût
supplémentaire, notamment pour les départements qui, aujourd'hui, accordent
l'allocation compensatrice pour tierce personne de façon « prudente », dirai-je
- chacun m'aura compris !
Cela s'explique, car l'objet de la présente proposition de loi est non pas de
permettre des économies aux départements, mais de répondre de façon adéquate
aux besoins des personnes âgées dépendantes.
A cet égard, la prestation spécifique dépendance nous est apparue pleinement
satisfaisante. J'ai souligné, tout à l'heure, les avancées telles qu'elles
étaient apparues au cours des débats en commission des finances.
Cette prestation présente des garanties, mais c'est son efficacité que
l'allocation compensatrice est loin d'offrir.
D'une part, son montant est modulé et révisable en fonction du degré de
dépendance du bénéficiaire, évalué périodiquement, ce que certains d'entre nous
demandaient.
D'autre part, elle est versée en nature pour financer une aide concrète et
régulièrement contrôlée.
Ce double principe d'effectivité nous assure que la prestation spécifique
dépendance sera non pas inutilement thésaurisée - certains de mes collègues ont
déjà employé ce terme avant moi - mais contribuera directement à la création
d'emplois de proximité qualifiés. C'est là, je crois, un exemple d'amélioration
de l'utilisation des fonds publics qui mériterait de faire école, ainsi que
l'ont déjà souligné d'autres intervenants.
Je veux toutefois appeler l'attention sur deux aspects de la prestation
spécifique dépendance qui méritent d'être précisés.
Premier aspect : les récupérations sur succession. La présente proposition de
loi prévoit que les sommes versées au titre de la prestation spécifique
dépendance pourront être recouvrées sur la succession du bénéficiaire, au-delà
d'un certain seuil. J'approuve totalement cette disposition, qui apparente la
nouvelle prestation à l'aide sociale traditionnelle.
Je sais que certains auraient préféré que la prestation soit servie « à fonds
perdus », comme l'ensemble des prestations sociales. Ce sont d'ailleurs souvent
les mêmes qui auraient préféré qu'elle soit versée en espèces plutôt qu'en
nature. Ce sont deux philosophies qui, sinon s'affrontent, du moins se
complètent.
Je crois que ce changement de logique est salutaire. Il est urgent que les
Français comprennent que leur protection sociale n'est ni totalement gratuite
ni totalement illimitée.
Le principe de la récupération sur succession est par ailleurs cohérent avec
la tendance actuelle à la concentration du patrimoine sur les générations les
plus anciennes. Ce point est important pour expliquer, justifier le dispositif
qui est adopté.
Il est tout à fait possible actuellement d'avoir un patrimoine important sans
disposer pour autant de revenus élevés. Dans ce cas, le mécanisme proposé
n'empêche pas la solidarité de jouer ; il introduit simplement un correctif
financier légitime et nécessaire.
Cependant, pour que le mécanisme soit efficace, il importe, monsieur le
ministre, que le seuil de récupération soit fixé à un niveau adéquat.
M. Jacques Barrot,
ministre du travail et des affaires sociales.
Bien sûr !
M. Jacques Oudin.
A cet égard, le niveau envisagé de 250 000 ou 300 000 francs me paraît bien
trop élevé et aboutirait à priver le mécanisme de l'essentiel de sa portée. En
effet, selon une enquête de l'INSEE de 1991, la succession moyenne s'élevait,
en France, à 296 000 francs et la succession médiane à 131 000 francs
seulement.
Je souhaite donc, monsieur le ministre, que le décret d'application, dont vous
aurez la responsabilité, puisse fixer le seuil à un niveau sensiblement plus
bas, aux environs de 100 000 francs. Je cite ce chiffre de 100 000 francs, car
c'est celui qui était ressorti du débat que nous avions eu en commission des
finances il y a quelques mois.
Le second point qui me paraît devoir être précisé est relatif au versement de
la prestation spécifique dépendance en établissement.
Dans ce cas, il importe que le calcul du montant de la prestation prenne en
considération l'environnement constitué par l'établissement, qui est par nature
mieux adapté à la prise en charge de la dépendance. Cela implique que, à niveau
de dépendance égale, le montant de la prestation devra être moindre en
établissement qu'à domicile.
Les établissements spécialisés dans l'accueil des personnes âgées ne pourront
prétendre au versement de la prestation spécifique dépendance que pour la
compensation des surcoûts liés à la dépendance qui seront clairement
identifiés, ce qui pose le problème de la comptabilité.
Monsieur le ministre, à cet instant de mon propos, j'attire votre attention
sur l'urgence de la réforme de la tarification et sur la rigueur des principes
qui doivent l'inspirer. Ils étaient prévus dans l'article 44 de la loi du 28
mai 1996, qui précisait : « Une loi réformant la tarification et harmonisant le
statut des établissements qui assurent l'hébergement des personnes âgées est
adoptée au plus tard le 31 décembre 1996. » Nous y sommes, et il se trouve que
c'est une proposition de loi du Sénat qui viendra compléter le dispositif
législatif. Cela étant dit, bien entendu, nous attendons les décrets
d'application.
J'ai entendu avec intérêt que vous acceptiez de transmettre le rapport
conjoint de l'IGAS et de l'IGF à la représentation parlementaire. Je m'étonne
d'ailleurs que ce type de rapport ne soit pas transmis automatiquement. Je ne
vois pas pourquoi il faut une annonce publique pour ce faire.
En vertu du principe de la transparence, de la clarté de l'action
administrative, ce type de rapport devrait nous être adressé le plus rapidement
possible. Mais vous vous êtes engagé à nous le transmettre, et nous en avons
pris bonne note.
Je reviens sur les problèmes de comptabilité, qui me paraissent extrêmement
importants dans l'état actuel de la réforme de nos institutions sociales.
Il faut que nous soyons à même de connaître les coûts. Il faut donc que le
système comptable des établissements mais également le système comptable des
régimes sociaux nous permettent d'avoir une appréhension claire et nette de
l'ensemble de ces coûts.
J'attire également votre attention, monsieur le ministre, sur l'importance de
l'informatisation pour permettre la mise en place de ces dispositifs comptables
et des comptabilités tant générale qu'analytique. L'informatisation, vous le
savez, va de pair avec la réforme comptable générale que nous souhaitons mettre
en oeuvre rapidement dans le cadre du redressement des comptes sociaux.
Sous ces deux réserves, la commission des finances salue comme une avancée la
création de la prestation spécifique dépendance. Cette position me paraît être
conforme à celle de la grande majorité du Sénat.
En effet, face à l'urgence des besoins et aux imperfections des modes de prise
en charge existants, le report de la prestation d'autonomie ne pouvait pas
servir de prétexte à l'immobilisme. Nous pouvons nous honorer de ce mouvement
d'initiative parlementaire, qui a réuni un très large consensus autour de
l'impulsion donnée par le président Jean-Pierre Fourcade, à qui je rends
hommage, et qui a été approuvé et soutenu par le Gouvernement.
Mais nous devons aussi tirer la leçon du report de la prestation d'autonomie,
qui a été imposé
in extremis
par la contrainte financière. J'estime
qu'il serait désormais réaliste, compte tenu du niveau atteint par les dépenses
sociales, d'envisager ce que j'appelle un moratoire sur la création de toute
prestation nouvelle. Cela veut dire que toute prestation nouvelle devrait
pouvoir être gagée par la rationalisation des prestations existantes. C'est un
peu la démarche qui a été adoptée pour les prestations familiales. C'est là un
langage de vérité que nos compatriotes sont désormais prêts à entendre, me
semble-t-il.
Dans le cadre d'une politique sociale qui doit être à la fois généreuse et
rigoureuse, face aux contraintes d'un redressement indispensable de nos
finances sociales, cette prestation spécifique dépendance montre la voie de la
mesure entre les besoins, qui sont par nature illimités, et les moyens, qui,
compte tenu du niveau des prélèvements, ne peuvent être que limités.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Huguet.
M. Roland Huguet.
« L'instauration d'une prestation autonomie pour les personnes âgées
dépendantes est une priorité. C'est pourquoi j'ai tenu à ce que, sans attendre
et malgré les contraintes de redressement de nos comptes budgétaires et
sociaux, une première étape soit franchie dès l'année prochaine. » Ainsi
s'exprimait M. le président de la République, la semaine dernière, à La
Villette, à Paris, devant la fédération nationale des clubs d'aînés ruraux.
Nous pouvons tous mesurer la distance qui sépare cette assertion du texte que
nous examinons. J'accorde cependant d'emblée au Président de la République que
la promesse, contenue dans le texte, de la mise en place effective des 14 000
lits de section de cure médicale autorisés mais non financés peut
éventuellement justifier une partie de sa déclaration.
Néanmoins, monsieur le ministre, je vous avoue mon inquiétude. En effet, si,
devant le congrès des présidents de conseils généraux, vous avez été net et
sans restriction - « 14 000 lits seront financés en deux ans. » Si, tout à
l'heure, ici même, à cette tribune, vous avez repris ce propos, vous avez
toutefois ajouté : « ... selon les possibilités. »
(M. le ministre fait un signe de dénégation.)
Je vous vois faire un signe de dénégation. Tant mieux, car, dans mon
département, nous dépensons chaque année entre 60 et 80 millions de francs de
sommes indues à la place, évidemment, de ce qui est autorisé mais n'est pas
encore financé. J'espère donc que ces 14 000 lits seront financés.
Personne ne peut sérieusement dire que le texte sur la prestation spécifique
dépendance dont nous débattons aujourd'hui constitue une première étape vers la
prestation d'autonomie. Il aurait pu s'intituler : « Modification de
l'attribution de l'allocation compensatrice pour tierce personne versée aux
personnes handicapées après soixante ans ». Car la réalité est là, tout
simplement. J'ai d'ailleurs entendu le mot « humilité » dans la bouche de
collègues de la majorité, et je crois qu'il est assez juste.
Encore que, comme rien n'est simple dans la vie si le dispositif prévu se
révèle efficace au niveau des équipes médico-sociales, du suivi, c'est
peut-être sur cet existant qu'il faudra s'appuyer pour une mise en place
rapide, quand son heure viendra, de la prestation d'autonomie, que, en
conclusion de son propos, M. Fourcade appelait aussi de ses voeux, mais,
ajoutait-il, « dès que possible » et « au moins progressivement. » C'est dans
cette seule perspective que nous pouvons accorder à ce texte le caractère de
première étape.
Venons-en à cette modification de l'ACTP, appelée prestation spécifique
dépendance.
Il s'agirait, finalement - plusieurs collègues l'ont dit - d'une
régularisation puisque l'ACTP avait été créée pour les personnes handicapées
ayant l'âge de la retraite. En fait, cela n'était nullement précisé alors. Mais
il est vrai qu'en 1975 le phénomène de la vieillesse dépendante n'apparaissait
que marginal. La loi d'alors n'a pas été mal faite ; c'est la vie qui a évolué.
Il est cependant indéniable que cette évolution a entraîné des dépenses
considérables pour les conseils généraux.
Ce nouveau texte a-t-il l'ambition de régulariser les choses, de juguler
l'augmentation des dépenses ? Si oui, qu'en est-il réellement ?
Voyons d'abord les dispositions qui peuvent venir en atténuation de ces
dépenses.
Premièrement, étant donné la diversité des interactions et des financeurs en
faveur des personnes âgées dépendantes, une harmonisation des prises en charge
ainsi qu'une rationalisation des coûts associée à la mise en commun des moyens
sont à rechercher à travers les conventions de partenariat prévues.
Deuxièmement, la prise en compte des ressources réelles pour l'attribution de
la PSD, au lieu des seuls revenus imposables, peut faire diminuer le nombre de
prestataires.
Troisièmement, si l'évaluation de la dépendance en établissement est faite par
les mêmes équipes que celles qui procèdent à l'évaluation quel que soit le lieu
de vie de la personne, cela peut éviter que les établissements n'aient la
tentation de majorer le niveau de dépendance, puisque c'est celui-ci qui
déterminera le montant de l'aide.
Quatrièmement, les récupérations sur succession seraient plus importantes
qu'en matière d'ACTP, le projet ne mentionnant aucun héritier susceptible
d'être exonéré alors que les conjoints, les enfants et les personnes ayant
assuré la prise en charge effective et constante du handicapé sont exonérés
s'agissant de l'ACTP. Cette disposition constituera certainement un frein à la
demande de PSD.
Enfin, l'ajout du critère subjectif « d'environnement de la personne », à côté
du critère plus objectif d'évaluation, à partir de la grille AGGIR, peut
permettre à certains départements d'écarter un nombre de bénéficiaires
potentiels s'ils le souhaitent.
Mais, à côté de ces atténuations possibles, on trouve également des facteurs
de hausse.
Premièrement, on peut constater une augmentation des coûts de gestion, puisque
les charges de gestion de l'ACTP sont actuellement supportées par l'Etat à
travers le financement du fonctionnement des COTOREP.
Deuxièmement, il convient de prendre en compte le risque de désengagement des
caisses de retraite, qui financent actuellement l'aide ménagère.
Troisièmement, si, aujourd'hui, l'ACTP n'est pas versée au-dessous d'un taux
de 40 % d'invalidité, en ce qui concerne la prestation d'autonomie, le principe
d'une modulation de l'allocation de 0 % à 80 % avait été retenu. S'il en est de
même avec la PSD, de nouveaux bénéficiaires, actuellement exclus de l'ACTP,
vont apparaître.
Quatrièmement, il faut faire attention aussi au transfert, dans les
établissements, des dépenses de
nursing
, pour le moment financées dans
le cadre des forfaits soins.
Cinquièmement, enfin, avec l'ACTP, contrôleurs et COTOREP avaient parfois
tendance à minimiser le besoin d'aide, dans le mesure où l'allocation était
versée en espèces et qu'il n'y avait pas de garantie d'effectivité d'emploi.
Avec la PSD, qui est versée en nature, le risque de détournement devient nul et
l'attitude des personnes chargées de l'instruction risque d'évoluer en
conséquence.
Cependant, ce texte comporte un intérêt majeur à mes yeux, on l'a dit avant
moi, mais je le répète bien volontiers : le remplacement de l'allocation en
espèces par une allocation en nature. En effet, théoriquement, cela devrait
entraîner la création d'un certain nombre d'emplois.
Monsieur Fourcade, vous avez cité tout à l'heure mon propos en commission ; je
vais l'affiner. (
M. le président de la commission et M. le rapporteur
sourient.)
Je vous livre le résultat de mes calculs : dans le Pas-de-Calais, sur les
douze derniers mois, nous avons versé 173 millions de francs pour l'ACTP, dont
40 millions de francs pour les personnes en établissement.
S'agissant de ces dernières, on peut estimer qu'il n'y aura pas création
d'autres emplois. Il reste donc 133 millions de francs, dont il faut déduire
encore 10 %, puisque c'est le pourcentage généralement admis de personnes
dépendantes à domicile qui emploient effectivement une tierce personne. Il
reste donc finalement 120 millions de francs.
En affectant 130 000 francs par emploi - salaire plus charges - on pourrait
donner du travail à 900 personnes.
Ce résultat recoupe à peu près les chiffres que vous avanciez tout à l'heure,
puisque 2 800 à 3 000 personnes perçoivent actuellement l'ACTP.
Bien sûr, dans ce calcul, on ne tient pas compte de la progressivité de la
mise en place et des inconnues que j'évoquais précédemment. On ne tient pas
compte non plus du fait que ce texte n'apporte aucune précision sur la
nécessité de former les personnels intervenant auprès des personnes âgées ni
sur l'exigence d'encadrement de ces mêmes personnels par des structures
professionnelles garantissant la qualité et la continuité du service offert.
Lors du débat sur la prestation d'autonomie, j'avais déjà souligné
l'importance de la mise en place d'un programme de développement des services
de maintien à domicile des personnes âgées dépendantes afin de rétablir
l'égalité entre ces dernières quant au service offert.
Je ne peux que regretter l'absence de ce type de proposition dans le texte qui
nous est soumis aujourd'hui.
Je regrette aussi le manque de précision sur la composition des équipes
médico-sociales, élément essentiel de la réussite ou non de la mise en
application de la mesure.
Il aurait été utile, je crois, de notifier - on peut toujours le faire, me
direz-vous - la nécessité de la présence dans ces équipes, de professionnels du
secteur et de représentants des personnels de services d'aide à domicile
proches des personnes sollicitant la prestation.
Enfin, reconnaître l'aspect déterminant de l'avis du médecin traitant dans la
décision d'attribution et l'élaboration du type de prise en charge me
paraissait également essentiel. Par sa connaissance de la personne âgée, de ses
manques, de ses besoins réels, le médecin traitant est le véritable garant de
l'efficacité de la réponse apportée à la demande exprimée.
Venons-en à la validité de ce texte en tant que première étape dans la mise en
place de la protection face au risque de dépendance liée à l'âge.
Monsieur le ministre du travail et des affaires sociales, vous avez déclaré,
lors des troisièmes rencontres parlementaires sur la longévité du mois de mai
1996, que l'expérimentation conduite sur la mise en application de la
prestation d'autonomie dans les douze départements volontaires avait permis de
mettre en évidence une réelle amélioration de la prise en charge des personnes
âgées dépendantes. Des personnes qui ne pouvaient bénéficier de l'allocation
compensatrice pour tierce personne en raison du niveau de leurs ressources et
d'autres, lourdement dépendantes, pour qui la combinaison de l'allocation
compensatrice et de la prestation complémentaire avait permis d'atteindre un
montant global supérieur à celui de la seule allocation compensatrice avaient
pu ainsi obtenir une aide.
Or, que trouvons-nous aujourd'hui dans le texte définissant les conditions
d'attribution de la prestation spécifique dépendance ? On l'a dit avant moi :
il est proposé d'abaisser le plafond de ressources de 9 329 francs, montant
prévu par le texte sur la prestation d'autonomie, à 7 694 francs, en
interdisant, de surcroît, le cumul de la prestation avec d'autres aides ! Cela
veut dire que, en son état actuel, la mesure ne s'appliquera à taux plein
qu'aux seules personnes percevant l'équivalent du minimum vieillesse.
Etant donné les résultats de l'expérimentation, il est curieux de trouver de
telles propositions dans un texte qui est normalement destiné à constituer le
premier pas vers la mise en place de la prestation d'autonomie, laquelle
interviendra, cela a été promis, dès que les jours seront meilleurs. Il
m'apparaît nettement que, loin de constituer un premier pas, la prestation
spécifique dépendance représentera un recul pour certaines catégories de
personnes âgées.
De plus, ce texte est totalement injuste et crée une inégalité entre les
départements et les populations de personnes âgées dépendantes.
Que les dispositions très favorables de l'expérimentation soient maintenues
dans les départements où celle-ci est en cours paraît normal au regard des
personnes concernées. Mais qu'il n'y ait pas possibilité de généralisation -
généralisation que vous aviez vous-même souhaitée lors de ces mêmes rencontres,
monsieur le ministre, en complément du versement de l'ACTP en nature pour une
période transitoire - pose un véritable problème car, dès lors, l'injustice est
flagrante.
J'avais déjà attiré votre attention, monsieur le ministre, lors du débat sur
la prestation d'autonomie, sur le danger d'accentuation des inégalités entre
les départements. Aujourd'hui, avec de telles dispositions, nous nous trouvons
confrontés à une véritable inégalité entre les personnes âgées dépendantes,
inégalité tenant uniquement à leur lieu de résidence et, par là même, d'autant
moins supportable.
Cette inégalité se retrouve à tous les niveaux : qualité du service rendu,
choix offert dans le type de prise en charge et possibilité d'y accéder. Cette
injustice, s'ajoutant à un net recul du potentiel d'aide apportée aux plus âgés
d'entre nous, est plutôt inacceptable.
Que dire aussi du changement de référence révélé rien que par l'appellation du
texte ?
En instituant par cette proposition de loi une « prestation spécifique
dépendance », on en arrive à traiter non plus d'autonomie mais de dépendance.
C'est là véritablement une autre façon d'appréhender les choses.
Pourtant, si je me réfère encore à vos propos, monsieur le ministre, tenus
lors de ces rencontres parlementaires sur la longévité, cette nouvelle approche
va totalement à l'inverse de ce que vous souhaitiez vous-même. Vous déclariez,
en effet, préconiser la préparation de la vieillesse dès l'enfance et
l'adolescence, la responsabilisation de la population à l'égard de son corps.
Vous estimiez que chacun devait se préparer à mieux vieillir.
Comment espérer faire évoluer l'état d'esprit de chacun d'entre nous vis-à-vis
du vieillissement, alors que, par exemple, la vieillesse est étroitement
associée à la notion de dépendance et que la ségrégation par l'âge entre les
handicapés se trouve « institutionnalisée » ?
S'attacher à promouvoir le « bien vieillir », prévenir la dépendance liée à
l'âge, c'est effectivement tout à fait souhaitable, et même nécessaire. Mais,
pour ce faire, pour sensibiliser les jeunes, notamment, à une autre vision
possible de la vieillesse, n'aurait-il pas mieux valu conserver à ce texte
objectif de préservation de l'autonomie plutôt que de l'associer à la
dépendance ?
De plus, maintenir l'aide apportée dans le champ de l'aide sociale, c'est
oublier que le vieillissement est l'affaire de tous. La dépendance consécutive
à l'âge est un véritable risque pour chacun d'entre nous. N'oublions pas - on
l'a rappelé avant moi - que c'est la tranche d'âge des plus âgés qui va
connaître la plus forte croissance d'ici à 2010. La prestation d'autonomie
réellement susceptible de nous protéger de ce risque se devra d'être une
allocation de solidarité nationale et non plus d'aide sociale.
Face à cette réalité, la prestation spécifique dépendance n'est pas la réponse
que les personnes âgées sont en droit d'attendre... que nous sommes en droit
d'attendre. Ainsi que l'occurrence, je le disais au début de mon propos, elle
n'est bien qu'une allocation compensatrice pour tierce personne attribuée aux
handicapés de plus de soixante ans. Cette prestation est insuffisante pour
apporter une réponse adaptée aux problèmes des personnes âgées dépendantes,
particulièrement à celles qui disposent de revenus intermédiaires, ces
dernières étant exclues puisque l'accès à la prestation est soumis à des
conditions de ressources. La prestation d'autonomie comportait déjà un risque
pour cette catégorie de personnes. Avec ce texte, le risque aujourd'hui devient
réalité.
Quant au principe de récupération sur succession, outre qu'il va accentuer les
différences entre la prise en charge des personnes âgées de plus de soixante
ans et celle des personnes de moins de soixante ans, il aura un effet dissuasif
indéniable auprès de ceux qui pourraient solliciter cette prestation, bon
nombre de personnes âgées pouvant renoncer à solliciter cette prestation afin
de préserver les relations avec leurs descendants. De ce point de vue, cette
disposition traduit également une véritable régression par rapport à
l'allocation compensatrice pour tierce personne.
Que dire, enfin, de la discrimination apparaissant entre les personnes restant
à domicile et celles qui sont accueillies en établissement ? Le texte ne
prévoit-il pas des modalités différentes entre eux pour la récupération sur
succession en fixant un seuil d'actif net successoral en deçà duquel la
récupération ne serait plus opérée à domicile, alors que les hospitalisés s'y
verraient soumis dès le premier franc ? Il s'agit, là encore, d'un véritable
préjudice, vraisemblablement pour les plus dépendants.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Cela a été corrigé !
M. Roland Huguet.
Merci, monsieur le rapporteur !
En conclusion, bien qu'il soit un sujet de satisfaction pour nous sénateurs -
je le répète bien volontiers après d'autres - puisqu'il s'agit d'un texte
d'initiative parlementaire accepté en urgence par le Gouvernement - ce serait
d'ailleurs une bonne habitude à conserver - ce texte ne peut, en aucun cas - je
le dis une dernière fois - être assimilé à la création de la prestation
d'autonomie, ou alors il faudrait préciser qu'il s'agit d'une prestation
d'autonomie
light !
(Sourires.)
Comme je vous l'ai dit au cours de mon propos, son seul mérite, à mes
yeux, outre qu'il constitue une tentative d'adaptation de l'ACTP, est
d'introduire une prestation en nature. L'avenir nous en montrera les
conséquences sur l'emploi, car le texte, soit dit en passant, ne précise par de
cadre dans ce domaine.
Ce texte, nous pourrions l'adopter suivant la règle « qui peut ou veut le
plus, peut le moins ». Il se trouvera, sans aucun doute, une majorité pour le
faire. Peut-être, d'ailleurs, le voterons-nous, si, comme Mme Dieulangard l'a
dit tout à l'heure, nos amendements sont adoptés.
En tout cas, comme d'autres, nous nous efforcerons sur le terrain de venir en
aide aux personnes âgées dépendantes avec les moyens dont nous disposerons, en
attendant la création de la véritable prestation d'autonomie. Nous estimons que
cette prestation doit s'inscrire dans un véritable projet social pour les
personnes âgées, alliant le médical et le social, dans une politique globale et
communautaire destinée à préserver chacun d'entre nous des conséquences
terribles que peut avoir le vieillissement sur l'autonomie, y compris sur
celle, ne l'oublions jamais, des plus actifs d'entre nous.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Collard.
M. Henri Collard.
Mes chers collègues, l'importance de la proposition de loi qui nous est
aujourd'hui soumise mérite d'être soulignée.
Voilà un peu moins d'un an, le Gouvernement avait déposé un projet de loi
instituant une prestation d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes
faisant, ainsi de cette question l'une des priorités de son action. Peut-être
les difficultés financières, comme vous l'avez indiqué, monsieur le ministre,
vous ont-elles contraint à différer l'examen de ce texte. Mais, en déclarant
l'urgence sur cette proposition de loi, ce dont je vous remercie, vous venez de
reconnaître qu'il devenait urgent de légiférer en cette matière.
Dans l'attente d'un futur projet de loi, cette proposition de loi intervient
pour instaurer un régime transitoire rendu nécessaire par la croissance
constante du nombre des personnes âgées dépendantes, tout particulièrement des
plus dépendantes d'entre elles. Il me paraît néanmoins tout à fait inopportun
et très prématuré de soutenir, comme je l'ai entendu tout à l'heure, qu'une
personne sur deux vivra cent ans à la fin du prochain siècle. En effet, des
progrès médicaux et sociaux aussi rapides que ceux qui sont intervenus depuis
cinquante ans sont peu probables. Ils nécessiteront des efforts techniques et
financiers très importants, inimaginables aujourd'hui, en particulier en
matière de cancérologie, de maladies cardio-vasculaires et, malheureusement,
pourquoi pas ? - de maladies encore inconnues.
Cette proposition de loi devrait être à l'origine d'une meilleure équité entre
les personnes âgées d'un même département et surtout de départements
différents, grâce à l'utilisation de la grille nationale AGGIR, qui définit le
niveau de la dépendance, et à son application généralisée, aussi bien à
domicile qu'en établissement.
Partageant les réflexions et les suggestions des auteurs de la proposition de
loi, complétée par l'important travail de la commission des affaires sociales,
notamment de son président et de son rapporteur, je me bornerai à formuler
quelques observations.
Je commencerai par deux observations qui sont à l'origine de deux amendements
que j'ai déposés.
La première concerne les conventions signées par le département avec les
organismes de sécurité sociale, la mutualité sociale agricole et,
éventuellement, d'autres organismes sociaux ou médico-sociaux, les CCAS par
exemple.
Dans l'article 11, qui reprend l'article 6 de la proposition de loi initiale,
le terme « département » qui est employé me paraît trop vague. Je pense qu'il
serait préférable de le remplacer par les mots « président du conseil général
», afin qu'aucune confusion ne soit possible. En effet, c'est bien le président
du conseil général qui signera cette convention avec les organismes de sécurité
sociale, de mutualité sociale agricole ou avec d'autres organismes.
Je souhaiterais, en second lieu, mes chers collègues, attirer votre attention
sur la question de l'évaluation de la dépendance lors de l'entrée en
établissement.
Toutes les personnes âgées n'ont pas le même niveau de dépendance - celui-ci
sera évalué par la grille AGGIR - ni la même nature de dépendance - je pense
aux différents handicaps, aux différentes maladies notamment à certaines
maladies, mentales spécifiques aux personnes âgées.
Les établissements pour personnes âgées doivent posséder non seulement des
équipements, mais surtout un personnel spécifiques. Il est souhaitable qu'à
l'équipe médico-sociale départementale, éventuellement complétée par la
présence d'un ou plusieurs responsables communaux, soit associé un médecin
attaché à l'établissement. Il est important en effet qu'un médecin, tout au
moins une personne qualifiée, donne son avis avant l'entrée d'une personne âgée
dans un établissement.
Je souhaiterais maintenant, en tant que membre de la commission des finances
et président de conseil général, faire une observation relative à l'aspect
financier de la proposition de loi.
Bien que cette proposition de loi engage
a priori
des dépenses moins
élevées que le projet de loi sur l'autonomie proposé voilà un an, il me paraît
prudent d'introduire une disposition qui permette d'assurer une évaluation
périodique des retombées tant sociales que financières des mesures adoptées. A
cette fin, j'ai déposé un amendement visant au dépôt d'un rapport annuel
d'évaluation devant le Parlement, dans la mesure où, bien entendu, le projet de
loi ne serait pas déposé d'ici à un an.
Cela permettrait de contrôler financièrement la mise en place d'une telle
politique et d'en évaluer les coûts pour l'avenir.
Le texte que nous examinons aujourd'hui doit pallier l'absence d'une loi
spécifique instituant une prestation d'autonomie. Aussi, lorsque ce projet de
loi viendra en discussion, le rapport auquel je viens de faire allusion se
révélerait d'une réelle utilité puisqu'il nous permettra de débattre avec une
meilleure connaissance des données.
Enfin, je me félicite des modifications apportées par la commission des
affaires sociales, notamment en ce qui concerne la récupération sur
succession.
J'avais souhaité déposer également un amendement tendant à limiter la
distinction, qui m'avait un peu étonné, établie en matière de recours en
récupération selon que la prestation est versée à domicile ou en établissement.
Avec satisfaction, j'ai constaté que la commission s'était prononcée dans le
même sens. Les dispositions contenues dans la proposition de loi initiale
risquait en effet d'être à l'origine de profondes injustices. Je rappelle à ce
propos que le seuil envisagé de 250 000 francs correspond au montant moyen des
successions en France.
Je le répète, les personnes âgées en hébergement, les plus dépendantes donc,
se seraient trouvées pénalisées par rapport aux personnes âgées maintenues à
domicile, ou par rapport à celles qui, bénéficiaires de la prestation
spécifique dépendance à domicile, auraient terminé leur vie en
établissement.
En définitive, cette proposition de loi constitue une avancée supplémentaire
dans la mise en oeuvre d'une politique gérontologique globale, amorcée par les
expérimentations prévues par la loi du 25 juillet 1994.
En outre, grâce aux attributions en nature qu'il prévoit, ce texte doit
favoriser la création de nombreux emplois de proximité, ce que nous souhaitons
tous.
Voilà pourquoi, en ce qui me concerne, je le voterai.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Michel Mercier.
M. Michel Mercier.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la
dépendance des personnes âgées est un phénomène que notre société connaît
maintenant depuis de nombreuses années. Comment avons-nous essayé de le traiter
jusqu'à maintenant ?
Sur le terrain, d'abord, nous avons essayé, au hasard des besoins, de bâtir
des réponses tirées de l'expérience, des réponses de bric et de broc. Puis,
nous avons utilisé une loi qui n'était pas faite pour cela. Or ce n'est jamais
satisfaisant dans un Etat de droit d'appliquer un texte à autre chose que ce
pour quoi il a été élaboré.
Sur le plan législatif, de nombreux projets ou propositions de loi relatifs à
la dépendance ont fleuri ces dix dernières années. Les gouvernements successifs
ont élaboré des projets ; aucun n'a pu aboutir. De ce point de vue, notre
collègue M. Huguet a-t-il sans doute été un peu trop sévère. La modestie sied à
chacun...
Par rapport aux textes précédents, la proposition de loi déposée par M. le
président Fourcade et excellement soutenue par M. le rapporteur présente un
avantage immense : elle est applicable. Loin d'être mineur, ce point est
essentiel. C'est la raison pour laquelle cette proposition de loi constitue à
mon sens une étape essentielle dans la prise en charge de la dépendance des
personnes âgées.
Pourquoi une étape essentielle ? Parce qu'elle m'apparaît à la fois fondatrice
et réaliste.
Je n'entrerai pas dans le détail du dispositif, que notre rapporteur a
excellement rappelé et que nous aurons le temps d'examiner en profondeur
pendant deux jours. Mais permettez-moi d'insister sur les caractéristiques
essentielles de cette proposition de loi.
Il s'agit donc d'une étape fondatrice. En effet, pour la première fois dans
notre droit, apparaîtra une définition de la personne âgée dependante. Ce n'est
pas une personne handicapée ; c'est une personne qui, en raison de son âge, a
besoin d'une aide et d'une surveillance particulières.
Le fait que l'on opère une distinction entre le handicap et la dépendance
constitue un progrès, pour les personnes âgées mais aussi pour les handicapés,
qui voyaient avec inquiétude le dévoiement de la loi de 1975.
Autre point fondamental : la proposition de loi sénatoriale prend en compte la
personne dans sa globalité. Si le texte est adopté, la dépendance sera évaluée
selon une procédure unique sur tout le territoire de la République, les
réponses étant adaptées à chaque personne et à son environnement.
Ainsi sera garantie l'égalité entre toutes les personnes dépendantes selon le
degré de leur dépendance.
Enfin, dernier apport fondateur qui me paraît tout à fait essentiel, cette
proposition de loi sénatoriale n'est pas faite pour les départements ou pour
les présidents de conseil général - ce serait la caricaturer que de la
présenter ainsi. Au contraire, elle doit organiser, autour de la personne âgée,
un partenariat regroupant les départements, les caisses de sécurité sociale,
les associations et les services d'aide à domicile. Un tel partenariat est né
de l'expérimentation et, si nous le voulons, il deviendra demain le droit.
Il est tout à fait intéressant de voir comment on peut ainsi faire émerger le
droit.
Cette proposition constitue donc une étape fondatrice. Mais c'est aussi une
étape réaliste.
Cette étape est réaliste parce que la prestation est en nature, et je voudrais
à cet égard préciser un point qui me paraît essentiel.
Aujourd'hui, notre pays, compte tenu de la crise qu'il traverse, a besoin
d'actions sociales et donc de dépenses sociales, nous le savons tous. Mais nous
savons également qu'il est nécessaire de faire accepter ces dépenses sociales
par les populations. Pour cela, existe-t-il un meilleur moyen, dans un pays qui
compte trois millions de demandeurs d'emploi et presque un million de
titulaires du RMI, que de rappeler que les dépenses sociales sont d'abord et
avant tout des dépenses d'emploi ?
M. Jacques Barrot,
ministre du travail et des affaires sociales.
Très bien !
M. Michel Mercier.
Lorsque nous payons des prix de journées, lorsque nous assurons le
fonctionnement des établissements à 80%, ce sont des emplois que nous
finançons. Lorsque nous créons une prestation en nature, cela représente aussi
des emplois.
Y aura-t-il 5 000, 10 000 ou 50 000 emplois ? Il y en aura, et c'est là
l'essentiel. De plus, parce qu'il existera un partenariat entre les
départements et les associations d'aide à domicile, ce seront à la fois des
emplois pérennes et de vrais emplois, comportant une formation et impliquant un
authentique professionnalisme.
Autre apport essentiel de ce texte : le rôle reconnu au maire.
Les communes vont, bien entendu, payer une partie de cette prestation au
travers des contingents d'aide sociale ; mais, au-delà de la question
financière, ce qui est important, c'est que, en matière sociale, la décision
soit prise au plus près des personnes, qu'elle puisse toujours être
expliquée.
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Tout à fait !
M. Michel Mercier.
Certes, ce texte ne règle pas tous les problèmes. Vous avez remarqué, monsieur
le ministre, que l'Etat y est peu sollicité. Probablement les auteurs de la
proposition de loi connaissent bien la situation des finances de l'Etat !
M. Alain Vasselle,
rapporteur.
Voilà !
M. Michel Mercier.
Mais il est un point pour lequel nous ne pourrons pas vous tenir quitte : la
tarification.
Vous avez été relativement vague à ce sujet dans votre intervention, et cela
peut s'interpréter de deux manières. Pour ma part, je préfère ne retenir que
l'interprétation positive : cela signifie que vous n'avez pas encore pris votre
décision.
(Sourires.)
Mais nous, nous savons bien ce que nous voulons.
Il convient de distinguer très clairement ce qui relève du sanitaire et ce qui
relève du social. Il faut que le prix fixé couvre l'ensemble du sanitaire ; le
prix de l'hébergement ne doit pas représenter, tel un solde, tout ce qui n'aura
pas pu être tarifé par ailleurs.
Je souhaite qu'au cours de la discussion vous puissiez nous donner votre
accord sur ce point, monsieur le ministre. Mais nous aurons bientôt l'occasion,
me semble-t-il, lors de l'examen d'un autre texte, de vous dire que, selon
nous, le sanitaire relève de l'Etat et que le social peut être partagé entre
l'Etat et les collectivités locales.
Ce texte constitue une étape fondatrice et réaliste. Il va donc donner lieu à
des avancées. Mais des évolutions sont encore possibles et souhaitables.
Il faudra, en effet, ouvrir plus largement ce droit à la prestation spécifique
dépendance, notamment aux classes moyennes.
Il faudra aussi organiser la péréquation, certains départements abritant plus
de personnes âgées et, parfois, ayant moins de moyens que d'autres.
Mais ce ne sont pas les départements qui peuvent réaliser entre eux la
péréquation, de la même manière que ce ne sont pas les seules finances
départementales qui peuvent répondre à l'attente des classes moyennes.
Il faudra donc organiser un nouveau partenariat entre l'Etat et les
collectivité locales.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et
Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la
dépendance des personnes âgées constitue un véritable problème de société ;
cela a été affirmé tout au long de cette soirée.
Certains estiment en effet à un million et demi le nombre des personnes âgées
dépendantes et à environ 13 % de la population âgée la proportion des personnes
qui ne peuvent effectuer seules les actes essentiels de la vie courante.
En outre, les personnes les plus dépendantes se révèlent être les plus âgées
et ne sont pas les plus aisées parmi les retraités.
C'est à ces personnes âgées que s'adressent prioritairement les dispositions
contenues dans le présent texte.
Les personnes âgées dépendantes et leurs familles ne peuvent plus assumer
l'intégralité de la charge qu'implique la dépendance : celle-ci est trop lourde
financièrement pour les premières et elle représente trop d'heures d'aide pour
les secondes.
Il convient donc non seulement d'apporter un soutien aux personnes dépendantes
elles-mêmes mais aussi et surtout de mener une politique volontariste d'aide
aux aidants.
La création d'une nouvelle prestation est d'autant plus nécessaire que le
système actuel, centré sur l'ACTP, se révèle à la fois inadapté et de plus en
plus lourd pour les finances départementales.
Ainsi, la proportion des personnes âgées de soixante ans et plus parmi les
bénéficiaires de l'ACTP a augmenté de près de 15 % entre 1984 et 1991, pour
atteindre 65 % du total des allocataires.
L'ACTP fait l'objet d'un usage détourné et est soumise à de nombreuses
critiques : critères d'attribution mal définis, procédure trop lente,
allocation peu adaptée pour les personnes âgées qui se trouvent en institution,
etc.
Une réforme est indispensable, car la charge liée à l'augmentation constante
du nombre des bénéficiaires devient insupportable pour les départements,
freinant leur politique d'investissement.
Ces dépenses ont augmenté en moyenne de 6 % par an jusqu'en 1989, puis de 9 %
par an. Les départements supportent donc une charge importante sans la
maîtriser.
Le texte soumis aujourd'hui à notre examen permet de concilier plusieurs
enjeux fondamentaux : la maîtrise de nos déficits publics ; l'adaptation de
l'aide aux besoins et aux attentes des personnes dépendantes ; une plus grande
maîtrise par le département de la distribution de l'aide.
Mes chers collègues, cette proposition de loi, brillamment complétée par le
rapport d'Alain Vasselle, est d'une grande qualité. Elle constitue une avancée
significative, et ce à plusieurs égards.
Premièrement, elle prévoit un contrôle de l'effectivité de l'aide, contrôle
indispensable pour éviter tout risque de thésaurisation.
Deuxièmement, en ce qui concerne les personnes dépendantes vivant en
établissement, l'idée d'introduire une aide en fonction de l'état de la
personne, et non selon la nature du logement, est très pertinente. C'est la
garantie d'une neutralité financière dans le choix de l'hébergement.
Troisièmement, et c'est à mon avis l'aspect le plus remarquable, la
proposition de loi tire les leçons des expérimentations menées depuis plus d'un
an.
Le premier enseignement positif de ces expérimentations réside dans le succès
de la mise en place d'une véritable coopération entre les différents
partenaires concernés, coopération qui tient compte des réalités locales, afin
de répondre au mieux aux besoins des personnes âgées.
Le fonctionnement du dispositif a révélé les points forts de ce partenariat :
la mise en oeuvre d'un travail pluridisciplinaire dans un cadre
interinstitutionnel, la possibilité de faire appel à des professionnels aux
qualifications différentes ainsi que l'amélioration de la connaissance des
situations et des besoins des personnes âgées.
En outre, le principe d'une visite à domicile, l'existence d'une grille
nationale et, surtout, la nécessité de contrôler l'application d'un plan d'aide
constituent de réelles avancées, que la proposition de loi reprend et
perfectionne.
Enfin, monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat d'aujourd'hui nous
donne aussi l'occasion de mener une réflexion sur certaines questions
fondamentales qu'il convient de ne pas trancher à la hâte. Aussi me
permettrez-vous de formuler quelques observations.
Tout d'abord, il me semble qu'il existe une fâcheuse inégalité dans la prise
en charge des personnes selon qu'elles sont accueillies en établissement ou
qu'elles demeurent à domicile.
On note que, si les dépenses augmentent avec le degré de dépendance quand la
personne vit à domicile, elles restent stables quand celle-ci est hébergée en
institution. Ce simple constat prouve qu'il existe un ajustement personnalisé
des aides en fonction des besoins à domicile, ce qui ne semble pas être le cas
en institution.
En outre, il est sans doute regrettable, comme le souligne le Conseil
économique et social dans son avis relatif à la prestation autonomie, que les
maisons d'accueil pour personnes âgées dépendantes, bien adaptées aux besoins,
soient trop peu nombreuses et inégalement réparties sur le territoire. La
création de lits supplémentaires ou le redéploiement de moyens disponibles sont
envisagés. Il est urgent de prendre de telles mesures.
Les personnes âgées dépendantes et surtout leurs familles doivent pouvoir
disposer d'un véritable choix entre l'accueil en institution et le maintien à
domicile, choix que nous nous devons de garantir.
Une politique volontariste, allant au-delà d'une nécessaire réforme de la
tarification, devrait donc être envisagée.
Permettez-moi d'évoquer maintenant la question de la réversibilité de
l'aide.
La dépendance est un processus et non un état. Il convient, par conséquent,
d'être vigilant quant à la construction de grilles. En effet, en fixant la
situation administrative d'une personne à un moment donné, même s'il est
difficile de faire autrement pour verser une prestation, on prend le risque de
voir certaines personnes s'installer dans l'assistanat. Or la situation de
dépendance est parfois temporaire.
Il me paraît ainsi essentiel que l'instauration d'une grille d'évaluation soit
accompagnée, dès le départ, des conditions de sa révision et de la réévaluation
de la prestation dépendance, tant à la hausse qu'à la baisse.
Ma dernière remarque a trait à la formation des aidants.
L'aide à la personne dépendante fait intervenir des emplois qualifiés,
impliquant un rapport de confiance et supposant une réelle formation.
En outre, les personnes dépendantes, notamment lorsqu'elles sont maintenues à
domicile, ont besoin d'une aide personnalisée, d'un aidant unique polyvalent et
« polycompétent ».
Or les formations existantes, trop cloisonnées, ne semblent pas adaptées
actuellement à ce nouveau type d'attente. Il est urgent de remédier à cette
situation pour rendre le versement de la prestation véritablement efficace.
Une telle adaptation est d'autant plus urgente, que l'instauration de la
prestation prévue doit s'accompagner de la création de nombreux emplois.
Le texte dont nous débattons aujourd'hui ouvre la voie à une réflexion
profonde sur ce nouveau défi que notre pays se doit de relever. C'est la raison
pour laquelle mes collègues du groupe RPR et moi-même le voterons.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le présent
débat montre bien qu'il est difficile de parler de la prestation spécifique
dépendance sans évoquer d'autres prestations : l'allocation compensatrice pour
tierce personne, la prestation dépendance, la prestation autonomie ou la
prestation expérimentale dépendance.
Lorsque, à l'automne 1994, le Gouvernement décida que douze départements
participeraient à une expérimentation, le département dont je suis l'élu, la
Haute-Vienne, fut tout de suite candidat, et cela essentiellement pour deux
raisons.
D'abord, la Haute-Vienne présente une structure d'âge qui préfigure ce que
sera celle de la France dans quelques années puisque, d'ores et déjà, 20 % des
habitants ont plus de soixante-cinq ans et près de 10 % plus de soixante-quinze
ans.
Ensuite, nous accomplissons depuis quinze ans un effort important en faveur
des personnes âgées, non seulement en vue de l'humanisation des structures
d'hébergement existantes et de la création de lits, mais aussi et surtout pour
le maintien à domicile. En effet, depuis quatorze ans, existent des structures
de coordination gérontologiques qui couvrent l'ensemble du département et un
ensemble de services performants s'est mis en place : services de soins,
nursing,
travaux ménagers, repas à domicile, télésécurité et téléalarme,
etc.
Or, vous le savez, la PED était réservée aux personnes maintenues à domicile
et, qui plus est, à législation constante ; autrement dit, l'ACTP restait le
pilier de cette intervention. Elle l'a été effectivement puisque, lorsqu'on
dresse le bilan d'un an d'expérimentation dans mon département, on constate que
78 % des versements proviennent bien de cette allocation compensatrice.
Malgré tout, il était intéressant de tester ce dispositif, d'évaluer dans
quelles conditions un partenariat pouvait s'établir avec les caisses, dans
l'instruction comme dans le suivi, d'affiner, avec la grille AGGIR,
l'évaluation de la dépendance dans une perspective évolutive, d'envisager les
effets de la nouvelle prestation sur l'emploi.
Tous ces aspects de l'expérience ont été relativement positifs, même si
l'évaluation des résultats est très diverse d'un département à l'autre et si
elle a été perturbée par l'annonce intempestive de la création prochaine d'une
prestation d'autonomie, qui, vous le savez, ne s'est finalement pas
réalisée.
On enregistre des effets positifs sur l'emploi, surtout lorsqu'un effort très
scrupuleux a été réalisé pour mesurer l'effectivité et pratiquer le paiement en
nature. Il est vrai que, dans bien des cas, il s'est agi de régulariser des
situations plutôt que de créer des emplois nouveaux.
On note un autre effet positif : le raccourcissement, très souhaitable, des
délais d'instruction, même si, là encore, le passage obligé en COTOREP - obligé
parce que l'on était à législation constante - a continué à imposer sa
lourdeur.
Au passage, monsieur le rapporteur, je m'inquiète malgré tout un peu du
raccourcissement des délais à deux mois, même s'il a sa cohérence par rapport à
d'autres projets de réforme de l'Etat ; je crains en effet que les départements
ne voient s'alourdir, de ce fait, fortement les frais de gestion.
Je retiendrai de cette expérimentation, pour le texte actuellement en
discussion et pour le futur, trois orientations qui me semblent
indispensables.
Il est, premièrement, indispensable que la nouvelle prestation fasse l'objet
d'un partenariat effectif et renforcé avec les caisses. Le texte le prévoit.
Mais il est nécessaire que les caisses locales et régionales soient contraintes
par des instructions nationales formelles à collaborer et, éventuellement, à
compléter la prestation spécifique dépendance. J'y vois un avantage certain
pour la prévention, qui n'est absolument pas abordée dans la présente
proposition de loi, mais qui me paraissait l'un des aspects les plus
intéressants de la prestation expérimentale.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Absolument !
M. Jean-Claude Peyronnet.
Il est en effet évident que la dépendance et, surtout, la dépendance psychique
peuvent être retardées par des mesures adaptées et précoces. A tout le moins,
il faudra veiller à ce que les caisses ne profitent pas de la prestation qui
sera versée par les départements pour se désengager vis-à-vis des services
d'aide ménagère,...
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Très bien !
M. Jean-Claude Peyronnet.
... ce qu'elles n'ont déjà que trop tendance à faire, notamment pour des
raisons d'ordre financier, au reste bien compréhensibles. Je citerai la MSA,
qui devrait verser beaucoup d'allocations au titre de l'aide ménagère dans les
différents départements ruraux.
Deuxièmement, l'analyse de la dépendance, son évolution et son suivi doivent
être réalisés par des équipes médico-sociales qui prennent en compte non
seulement les ressources mais aussi l'environnement des personnes âgées. Le
texte le prévoit, ce qui est une bonne chose. Mais il faudra veiller à ce que
ce soit les mêmes équipes - j'y insiste à mon tour - qui interviennent en
établissement et à domicile, à partir de la même grille.
Enfin, troisièmement, il est indispensable de développer la notion de plan
d'aide, qui, dans mon esprit, devrait être un véritable contrat d'objectif,
lorsque c'est possible, passé avec le bénéficiaire ou sa famille.
Monsieur le ministre, je serais malhonnête si je soutenais qu'en tant que
président de conseil général et, par conséquent, responsable des finances de
mon département, je ne trouve pas, dans l'immédiat et à courte vue, certaines
vertus à ce texte. Mais ces vertus sont purement comptables et ne sauraient
entraîner mon adhésion.
Il est vrai que la situation des départements et donc, par ricochet, des
communes est devenue absolument intenable et que, pour des raisons
démographiques évidentes, elle ne peut que s'aggraver.
La plupart des départements pour « limiter les dégâts », et quoi qu'on en
dise, trichent avec l'interprétation jurisprudentielle de la loi de 1975
relative au paiement en établissement, soit en ne payant pas du tout, soit en
apportant leur contribution après écrêtement, c'est-à-dire en acquittant le
différentiel entre le revenu de la personne et le coût effectif de
l'hébergement, soit en ne payant qu'après avoir été condamnés en commission
centrale, réussissant ainsi une perte en ligne de 50 % des dossiers de
demandes.
Il est vrai qu'il peut y avoir des abus, qu'il y a des abus. Il est vrai aussi
que des bas de laine se remplissent, et même si je veux souligner le rôle très
important d'amortisseur de la crise sociale que peuvent jouer ces bas de laine,
il ne s'agit pas moins d'abus eu égard à l'objectif poursuivi.
Il est vrai encore que les départements ne sauraient supporter plus longtemps
- M. Mercier l'a indiqué - que leur participation aux frais d'hébergement des
personnes âgées en établissement soit une tarification par solde, dont ils sont
toujours les victimes.
Je suis pleinement d'accord avec mes collègues qui ont abordé cet aspect des
choses : il était indispensable, faute d'une réelle prestation d'autonomie, de
mettre un terme à la dérive de l'ACTP et de clarifier les responsabilités
tarifaires des uns et des autres. Je fonde beaucoup d'espoirs sur le texte dans
ce domaine.
Par ailleurs, je ne puis que me féliciter que le Gouvernement s'engage, dans
les deux ans, à médicaliser les lits pour lesquels existait un accord, tout en
soulignant fermement que cela ne saurait suffire et que, très vite, il faudra
aller plus loin, probablement doubler encore le nombre de lits à
transformer.
Pour le reste, je ne trouve guère de mérites à ce texte. Il est bien clair que
les avantages comptables que l'on peut en espérer entrent en contradiction avec
les conséquences sociales négatives qui en résulteront. Et, dans la balance, ce
sont les effets négatifs qui l'emportent.
En fait, ce texte, qui essaie d'être économe pour les finances locales, est, à
coup sûr, beaucoup plus économe pour les finances de l'Etat, qui se trouve
ainsi complètement exonéré. Dès lors, il faut une certaine audace verbale, la
courtoisie m'interdit d'aller au-delà - de la part du Premier ministre pour
parler de « prestation d'autonomie », expression que reprend le Président de la
République, comme si l'on parlait du même texte que celui qui nous avait été
soumis l'an dernier à pareille époque. Or, ce texte était tout autre chose, il
était ample et généreux. Il était, certes, difficile d'évaluer son coût, mais
il était mieux adapté à l'importance majeure du problème posé.
Sur quoi va porter la maîtrise des dépenses ainsi réalisées ? Sur les
bénéficiaires et leur famille ! C'est évident si l'on se réfère à la prestation
d'autonomie dont nous avions abordé l'examen l'an dernier. On annonçait un coût
de 9 milliards de francs pour les départements. Ces 9 milliards de francs
demeurent. Mais les 11 milliards de francs que l'Etat devait ajouter ont
disparu. Il s'agit là d'un manque à gagner pour les familles.
Le recul est également réel par rapport à la prestation expérimentale
dépendance développée dans douze départements.
J'ai été étonné d'entendre M. de Raincourt considérer que, de fait, la
prestation qui nous est proposée par cette proposition de loi était une
extension de la PED. Si c'était le cas, il n'y aurait pas lieu de prévoir dans
le texte que la prestation expérimentale dépendance sera poursuivie dans les
départements où elle existe actuellement et il n'y aurait pas lieu, de la part
de M. de Raincourt, de s'inquiéter de l'atittude des caisses dans ce
domaine.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Tout à fait !
M. Jean-Claude Peyronnet.
Enfin, par rapport à la situation existante dans l'ensemble des autres
départements, il est parfaitement clair que l'obligation de recevoir la
prestation en nature - même si j'y suis favorable - et, surtout, la
récupération sur succession, que l'on peut comprendre, vont avoir des effets
puissamment dissuasifs : les familles renoncent à demander le bénéfice de la
prestation dépendance.
Cette dernière disposition, je la comprends, car nous sommes dans une logique
d'aide sociale et non plus de solidarité nationale. C'est bien d'ailleurs le
principal reproche que je ferai à cette proposition de loi. Outre qu'elle ne
répond pas à l'ampleur du problème qui se pose aux familles, elle prétend
régler la redoutable question de la dépendance, qui se pose à notre société
tout entière au niveau purement local alors qu'à l'évidence il s'agit d'un des
problèmes nationaux les plus importants de ces prochaines années.
Cette manière d'aborder la question interdira toute péréquation au profit des
départements peu peuplés et vieillissants, qui sont aussi les plus
besogneux.
On me répondra que cette loi est transitoire. Je crains trop qu'il ne s'agisse
que d'une promesse, pour mieux faire passer ce texte qui, c'est le moins que
l'on puisse dire - c'est en tout cas mon avis - ne constitue pas un progrès
social.
J'espère simplement que, lorsqu'il s'agira de prendre réellement le problème à
bras-le-corps, en tenant compte de tous les bénéficiaires potentiels et avec un
financement convenable - c'est-à-dire du double ou du triple des montants
actuels - les sommes nécessaires ne seront pas laissées à la seule charge des
collectivités locales, comme c'est le cas actuellement.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard.
Très bien !
M. Jean-Claude Peyronnet.
Les propos qui ont été tenus au début de cette séance, tant par le rapporteur
que par le président de la commission des affaires sociales, m'inquiètent.
Je suis inquiet quand j'entends M. le rapporteur nous indiquer qu'il n'y a pas
de différence de nature entre la prestation spécifique dépendance et la
prestation d'autonomie.
Je suis inquiet aussi lorsque j'entends M. Fourcade, président de la
commission, confirmer qu'en réalité il ne devrait pas nécessairement y avoir
une nouvelle loi et qu'il suffira d'adapter les plafonds figurant dans le
présent texte à la situation future si l'on veut vraiment rendre service à tous
ceux qui ont besoin d'une aide importante.
Je suis inquiet, car ces affirmations recèlent, je le crains, les germes d'une
dérive forte. L'alternative sera la suivante : ou bien nous en resterons là, ce
qui ne satisfera pas les populations, ou bien nous opérerons une avancée, mais
à la seule charge des départements.
Pour toutes ces raisons, si des modifications subtantielles ne sont pas
apportées au texte au cours de la discussion, je serai amené à ne pas le
voter.
(Applaudissements sur les travées socialistes. - Mme Michelle Demessine
applaudit également.)
M. le président.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
16
NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président.
Je rappelle que la commission des affaires économiques et du Plan a présenté
une candidature pour un organisme extraparlementaire.
La présidence n'a reçu aucune proposition dans le délai d'une heure prévu par
l'article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Michel
Souplet membre du conseil d'administration de l'Agence de l'environnement et de
la maîtrise de l'énergie.
17
TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI
M. le président.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, modifié par
l'Assemblée nationale, portant transposition dans le code de la propriété
intellectuelle des directives du Conseil des communautés européennes n°s 93/83
du 27 septembre 1993 et 93/98 du 29 octobre 1993.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 28, distribué et renvoyé à la
commission des affaires culturelles.
18
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de M. Christian Demuynck une proposition de loi tendant à modifier
l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et
de séjour des étrangers en France.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 29, distribuée et renvoyée
à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage
universel, du règlement et d'administation générale, sous réserve de la
constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues
par le règlement.
19
DÉPÔT DE PROPOSITIONS
D'ACTE COMMUNAUTAIRE
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil concernant la conclusion d'un accord sous
forme d'échange de lettres relatif à l'application provisoire de l'accord de
coopération en matière de pêches maritimes entre la Communauté européenne et la
République islamique de Mauritanie, paraphé à Bruxelles le 20 juin 1996.
Proposition de règlement (CE) du Conseil concernant la conclusion de l'accord
de coopération en matière de pêches maritimes entre la Communauté européenne et
la République de Mauritanie et arrêtant des dispositions pour son
application.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-708 et
distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion du protocole à
la quatrième convention ACP-CE de Lomé à la suite de l'adhésion de la
République d'Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède à
l'Union européenne.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-709 et
distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
- Proposition de règlement (CE) du Conseil modifiant le règlement (CEE) n°
1408/71 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux
travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur
famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, et le règlement (CEE)
n° 574/72 fixant les modalités d'application du règlement (CEE) n° 1408/71.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-710 et
distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
- Projet de règlement (EURATOM, CECA, CE) de la Commission modifiant le
règlement n° 3418/93 de la Commission du 9 décembre 1993 portant modalités
d'exécution de certaines dispositions du règlement financier du 21 décembre
1977.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-711 et
distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
- Lettre rectificative n° 1 à l'avant-projet de budget pour 1997.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-712 et
distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
- Proposition de directive du Conseil relative à la charge de la preuve dans
des cas de discrimination fondée sur le sexe.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-713 et
distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil autorisant certains Etats membres à
appliquer ou à continuer à appliquer à certaines huiles minérales utilisées à
des fins spécifiques des réductions ou des exonérations d'accise conformément à
la procédure prévue à l'article 8, paragraphe 4, de la directive 92/81/CEE.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-714 et
distribuée.
20
DÉPÔT D'UN RAPPORT
M. le président.
J'ai reçu de M. Jean-Jacques Hyest un rapport fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur le projet de loi portant réforme de la
réglementation comptable et adaptation du régime de la publicité foncière (n°
499, 1995-1996).
Le rapport sera imprimé sous le numéro 30 et distribué.
21
DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION
M. le président.
J'ai reçu de M. Daniel Hoeffel un rapport d'information fait au nom des
délégués élus par le Sénat sur les travaux de la délégation française à
l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe au cours de la session
ordinaire 1995 de cette Assemblée, en application de l'article 108 du
règlement.
Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 31 et distribué.
22
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au mercredi 16 octobre 1996, à quinze heures :
Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, des conclusions du
rapport (n° 14, 1996-1997) de M. Alain Vasselle, fait au nom de la commission
des affaires sociales, sur la proposition de loi (n° 486, 1995-1996) de MM.
Jean-Pierre Fourcade, Alain Vasselle, Henri de Raincourt, Maurice Blin, Guy
Cabanel, Josselin de Rohan, Jacques Larché, Christian Poncelet, Paul Girod,
Jacques Oudin, Jean Puech, Jean-Paul Delevoye, Michel Mercier, Jean Chérioux et
Lucien Neuwirth tendant, dans l'attente du vote de la loi instituant une
prestation d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes, à mieux répondre
aux besoins des personnes âgées par l'institution d'une prestation spécifique
dépendance.
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus
recevable.
Aucun amendement à cette proposition de loi n'est plus recevable.
Délai limite pour le dépôt des amendements
1° Projet de loi portant réforme de la réglementation comptable et adaptation
du régime de la publicité foncière (n° 499, 1995-1996).
Délai limite pour le dépôt des amendements : jeudi 17 octobre 1996, à onze
heures.
2° Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi relative au
placement sous surveillance électronique pour l'exécution de certaines peines
(n° 3, 1996-1997).
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 21 octobre 1996, à dix-sept
heures.
3° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, améliorant la
protection des acquéreurs de lots de copropriété (n° 320, 1995-1996).
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 21 octobre 1996, à dix-sept
heures.
4° Déclaration du Gouvernement sur la défense.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 22 octobre
1996, à dix-sept heures.
5° Projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, sur l'air et
l'utilisation rationnelle de l'énergie (n° 435, 1995-1996).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 22 octobre 1996, à dix-sept
heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures vingt-cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES DU SÉNAT
établi par le Sénat dans sa séance du mardi 15 octobre 1996 à la suite des
conclusions de la conférence des présidents
Mercredi 16 octobre 1996,
à
quinze heures :
Ordre du jour prioritaire
Jean-Pierre Fourcade et plusieurs de ses collègues tendant, dans l'attente du
vote de la loi instituant une prestation d'autonomie pour les personnes âgées
dépendantes, à mieux répondre aux besoins des personnes âgées par l'institution
d'une prestation spécifique dépendance (n° 14, 1996-1997).
Jeudi 17 octobre 1996 :
Ordre du jour prioritaire
Jean-Pierre Fourcade et plusieurs de ses collègues tendant, dans l'attente du
vote de la loi instituant une prestation d'autonomie pour les personnes âgées
dépendantes, à mieux répondre aux besoins des personnes âgées par l'institution
d'une prestation spécifique dépendance ;
A
quinze heures :
2° Eventuellement, suite de l'ordre du jour du matin ;
3° Projet de loi portant réforme de la réglementation comptable et adaptation
du régime de la publicité foncière (n° 499, 1995-1996) ;
(La conférence des présidents a fixé au jeudi 17 octobre 1996, à 11 heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)
Mardi 22 octobre 1996 :
Ordre du jour établi en application de l'article 48,
troisième alinéa, de la Constitution
A dix heures :
1° Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi relative au
placement sous surveillance électronique pour l'exécution de certaines peines
(n° 3, 1996-1997) ;
2° Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, améliorant la
protection des acquéreurs de lots de copropriété (n° 320, 1995-1996) ;
(La conférence des présidents a fixé au lundi 21 octobre 1996, à 17 heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à ces deux propositions de loi)
;
A
seize heures :
3° Eloge funèbre de Gérard Gaud ;
4° Question orale avec débat portant sur un sujet européen, n° QE-7 de M.
Xavier de Villepin, à M. le ministre des affaires étrangères sur la politique
étrangère de l'Union européenne ;
(La discussion de cette question s'effectuera selon les modalités prévues à
l'article 83
ter
du règlement) ;
5° Suite de l'ordre du jour du matin.
Mercredi 23 octobre 1996 :
Ordre du jour prioritaire
1° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation
de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement
de la République française et le Gouvernement de la République de Corée (n°
425, 1995-1996) ;
2° Projet de loi autorisant la ratification de l'accord du 18 mars 1993
modifiant l'accord du 3 août 1959, modifié par les accords du 21 octobre 1971
et du 18 mai 1981 complétant la convention entre les Etats parties au traité de
l'Atlantique Nord sur le statut de leurs forces, en ce qui concerne les forces
stationnées en République fédérale d'Allemagne (n° 452, 1995-1996) ;
3° Projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le
Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relative
au service militaire des doubles nationaux (ensemble une annexe) (n° 453,
1995-1996) ;
4° Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de
lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de
la République argentine relatif à l'emploi des personnes à charge des membres
des missions officielles d'un Etat dans l'autre (n° 480, 1995-1996) ;
5° Projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de
la République française et le Gouvernement de la République d'Afrique du Sud
sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble
un protocole) (n° 481, 1995-1996) ;
6° Projet de loi autorisant la ratification de la convention relative à
l'admission temporaire (ensemble cinq annexes) (n° 487, 1995-1996) ;
7° Projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de
la République française et le Gouvernement de la République d'Arménie sur
l'encouragement et la protection réciproques des investissements (n° 495,
1995-1996) ;
8° Projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de
la République française et le Gouvernement de Hong Kong sur l'encouragement et
la protection réciproques des investissements (n° 496, 1995-1996) ;
9° Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de
la République française, le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne,
le Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg et le Conseil fédéral suisse
agissant au nom des cantons de Soleure, de Bâle-Ville, de Bâle-Campagne,
d'Argovie et du Jura sur la coopération transfrontalière entre les
collectivités territoriales et organismes publics locaux (ensemble une
déclaration) (n° 503, 1995-1996) ;
10° Projet de loi autorisant l'adhésion de la République française à l'accord
portant création de la commission des thons de l'océan Indien (ensemble deux
annexes) (n° 10, 1996-1997) ;
A
seize heures :
(La conférence des présidents a fixé :
- à quinze minutes le temps réservé au président de la commission des affaires
étrangères, de la défense et des forces armées ;
- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat,
les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun
groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 22 octobre
1996.)
Jeudi 24 octobre 1996 :
Ordre du jour prioritaire
1° Deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, sur
l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie (n° 435, 1995-1996) ;
(La conférence des présidents a fixé au mardi 22 octobre 1996, à 17
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi)
;
A quinze heures
et, éventuellement, le soir :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de
la séance avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3° Suite de l'ordre du jour du matin.
Mardi 29 octobre 1996 :
A
9 heures trente :
1° Dix-sept questions orales sans débat (l'ordre d'appel des questions
sera fixé ultérieurement) :
- n° 450 de M. Ivan Renar à M. le ministre de la culture (Suppression de
l'abattement pour frais professionnels dont bénéficient les journalistes) ;
- n° 451 de M. Ivan Renar à M. le ministre de la culture (Versement de la
subvention de l'Etat aux quotidiens à faibles ressources publicitaires) ;
- n° 452 de Mme Danielle Bidard-Reydet à M. le ministre du travail et des
affaires sociales (Avenir de l'hôpital d'Avicenne [Seine-Saint-Denis]) ;
- n° 453 de Mme Danielle Bidard-Reydet à M. le ministre de l'éducation
nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche (Situation scolaire
du département de la Seine-Saint-Denis) ;
- n° 454 de M. Charles Descours à M. le ministre du travail et des affaires
sociales (Régime d'assurance maladie des personnes veuves ou divorcées) ;
- n° 456 de M. Ivan Renar à M. le ministre de la culture (Conséquences pour
les musiciens de la suppression de déductions fiscales supplémentaires pour
frais professionnels) ;
- n° 458 de M. Jean-Jacques Robert à M. le ministre du travail et des affaires
sociales (Financement des contrats de qualification) ;
- n° 459 de M. Jean-Jacques Robert à M. le ministre de la défense (Avenir du
centre de recherches du Bouchet [Essonne]) ;
- n° 460 de Mme Nicole Borvo à M. le ministre de l'équipement, du logement,
des transports et du tourisme (Délocalisation des services centraux de la SNCF)
;
- n° 461 de M. André Vezinhet à M. le ministre de l'éducation nationale, de
l'enseignement supérieur et de la recherche (Situation des candidats admis sur
les listes complémentaires aux concours d'enseignement du second degré) ;
- n° 462 de M. André Vezinhet à M. le ministre de l'économie et des finances
(Avenir du Crédit foncier) ;
- n° 463 de M. Yves Guéna à M. le ministre délégué au logement (Plafonds de
ressources pour l'attribution de logements HLM) ;
- n° 464 de M. René Rouquet à M. le ministre de l'éducation nationale, de
l'enseignement supérieur et de la recherche (Manque de place dans les écoles
maternelles du Val-de-Marne) ;
- n° 465 de M. Lucien Lanier à M. le ministre de l'éducation nationale, de
l'enseignement supérieur et de la recherche (Bonification indiciaire accordée à
certains chefs d'établissement de l'éducation nationale) ;
- n° 466 de M. Louis Minetti à M. le ministre de l'agriculture, de la pêche et
de l'alimentation (Difficultés des producteurs de fruits et légumes) ;
- n° 467 de M. Hubert Durand-Chastel à Mme le ministre délégué pour l'emploi
(Développement de l'emploi français à l'étranger) ;
- n° 468 de M. Jacques Machet à M. le ministre de l'économie et des finances
(Politique de relance de l'immobilier) ;
A
seize heures :
Ordre du jour prioritaire
2° Projet de loi relatif à l'emploi dans la fonction publique et à diverses
mesures d'ordre statutaire (n° 512, 1995-1996).
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 28 octobre 1996, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des
amendements à ce projet de loi ;
- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat,
les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun
groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 28 octobre
1996.)
Ordre du jour prioritaire
Jeudi 31 octobre 1996,
à
9 heures trente
et à
quinze heures
:
Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur les affaires étrangères
;
(La conférence des présidents a fixé :
- à quinze minutes le temps réservé au président de la commission des affaires
étrangères, de la défense et des forces armées ;
- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat,
les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun
groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 30 octobre
1996.)
A N N E X E
Question orale avec débat portant sur des sujets européens,
inscrite à l'ordre du jour du mardi 22 octobre 1996
N° QE-7. - A la suite du rapport d'information consacré à la politique
étrangère de l'Union européenne établi par la commission des affaires
étrangères, de la défense et des forces armées en avril dernier, M. Xavier de
Villepin souhaiterait que M. le ministre des affaires étrangères puisse faire
part au Sénat des positions du Gouvernement français sur cette question et
tenir informée la Haute Assemblée des évolutions intervenues, le cas échéant,
dans ce domaine dans le cadre des négociations de la conférence
intergouvernementale réunie à Turin.
NOMINATION DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES, DE LA DÉFENSE
ET DES FORCES ARMÉES
Nicolas About a été nommé rapporteur du projet de loi n° 26 (1996-1997), adopté par l'Assemblée nationale, relatif aux mesures en faveur du personnel militaire dans le cadre de la professionnalisation des armées.
COMMISSION DES FINANCES
Michel Mercier a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 463
(1995-1996) de Mme Hélène Luc relative aux finances locales.
M. Henri Collard a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 479
(1995-1996) de M. Albert Foy tendant à modifier la fiscalité du bail à
réhabilitation.
M. Jean-Philippe Lachenaud a été nommé rapporteur de la proposition de loi n°
491 (1995-1996) de MM. Jean-Philippe Lachenaud et Jean Puech relative à la
transformation progressive des actuels centres d'information et d'orientation
départementaux en services d'Etat.
M. Alain Lambert a été nommé rapporteur de la proposition de résolution n° 508
(1995-1996) de Mme Marie-Claude Beaudeau tendant à créer une commission
d'enquête sur la situation du Crédit foncier de France.
Organismes extraparlementaires
Gérard Delfau, Pierre Hérisson, Gérard Larcher, Jean-Marie Rausch, René
Trégouët, François Trucy et Pierre Laffitte pour siéger au sein de la
Commission supérieure du service public des postes et
télécommunications.
Lors de sa séance du mardi 15 octobre 1996, le Sénat a désigné M. Michel
Souplet pour siéger au conseil d'administration de l'Agence de l'environnement
et de la maîtrise de l'énergie.
Décision n° 96-381 DC du 14 octobre 1996
(Résolution modifiant le règlement du Sénat)
Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 4 octobre 1996, par le président du
Sénat, conformément aux dispositions de l'article 61, alinéa 1, de la
Constitution, d'une résolution en date du 3 octobre 1996 modifiant le règlement
du Sénat ;
Le Conseil constitutionnel,
Vu la Constitution dans sa rédaction résultant notamment de la loi
constitutionnelle n° 96-138 du 22 février 1996 ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique
sur le Conseil constitutionnel ;
Vu la loi organique n° 96-646 du 22 juillet 1996 relative aux lois de
financement de la sécurité sociale ;
Vu le code de la sécurité sociale en son article L.O. 111-3 ;
Vu l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des
assemblées parlementaires dans sa rédaction résultant notamment de la loi n°
96-517 du 14 juin 1996 ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
Sur l'article 1er de la résolution :
Considérant que l'article 1er crée dans le règlement du Sénat un article 22
ter
définissant les modalités d'application de l'article 5
ter
de
l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958, inséré par la loi n° 96-517 du 14
juin 1996 tendant à élargir les pouvoirs d'information du Parlement et à créer
un Office parlementaire d'évaluation des politiques publiques ; qu'en vertu de
cet article 5
ter
les commissions permanentes ou spéciales peuvent
demander à l'assemblée à laquelle elles appartiennent, pour une mission
déterminée et une durée n'excédant pas six mois, de leur conférer les
prérogatives attribuées aux commissions d'enquête définies par l'article 6 de
l'ordonnance précitée, dans les conditions et limites prévues par cet article
;
Considérant qu'en raison des exigences propres à la hiérarchie des normes
juridiques dans l'ordre interne, la conformité à la Constitution des règlements
des assemblées parlementaires doit s'apprécier au regard tant de la
Constitution elle-même que des lois organiques prévues par celle-ci ainsi que
des mesures législatives prises, en vertu du premier alinéa de l'article 92 de
la Constitution alors en vigueur, pour la mise en place des institutions ;
qu'entre dans cette dernière catégorie l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre
1958 susvisée relative au fonctionnement des assemblées parlementaires ainsi
que les modifications apportées par la loi à ladite ordonnance, postérieurement
au 4 février 1959 ; que toutefois ces dernières ne s'imposent à une assemblée
parlementaire lorsqu'elle modifie ou complète son règlement qu'autant qu'elles
sont conformes à la Constitution ;
Considérant que le premier alinéa de l'article 22
ter
dispose que la
demande présentée par une commission permanente ou spéciale en application de
l'article 5
ter
de l'ordonnance précitée doit déterminer avec précision
l'objet et la durée de la mission qui ne peut excéder six mois ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 43 de la Constitution
: « les projets et propositions de loi sont, à la demande du Gouvernement ou de
l'assemblée qui en est saisie, envoyés pour examen à des commissions
spécialement désignées à cet effet » ; qu'il résulte de cette disposition que
ces communes cessent d'exister lorsque le Parlement s'est définitivement
prononcé sur le texte qui a provoqué leur création ou lorsque ce dernier a été
retiré ; que, dès lors, la durée maximale de six mois prévue au premier alinéa
de l'article 22
ter
ne saurait être étendue comme leur permettant de
poursuivre leurs travaux au-delà de la date de la décision définitive du
Parlement sur le texte qui a provoqué leur création ou de la date de retrait de
ce dernier ;
Considérant que le deuxième alinéa de l'article 22
ter
se borne à
déterminer les conditions dans lesquelles la demande est portée à la
connaissance du Sénat et inscrite à son ordre du jour ; que le troisième alinéa
prévoit seulement pour sa part que lorsque la demande n'émane pas d'elle, la
commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel,
du règlement et d'administration générale est appelée à émettre un avis sur la
conformité de cette demande avec les dispositions de l'article 6 de
l'ordonnance du 17 novembre 1958 précitée ;
Considérant qu'en vertu de l'article 5
ter
de l'ordonnance du 17
novembre 1958 les prérogatives des commissions d'enquête susceptibles d'être
conférées aux commissions permanentes ou spéciales doivent l'être « dans les
conditions et limites » prévues par l'article 6 de ladite ordonnance ; qu'il en
résulte que l'ensemble des dispositions prévues par cet article s'impose aux
travaux d'une commission permanente ou spéciale effectués dans le cadre d'une
mission pour laquelle lui ont été conférées les prérogatives attribuées aux
commissions d'enquête ;
Considérant que pour autant qu'elles n'attribuent aux commissions permanentes
et spéciales qu'un simple rôle d'information pour permettre au Sénat d'exercer,
pendant les sessions ordinaires et extraordinaires, son contrôle sur la
politique du Gouvernement, dans les conditions prévues par la Constitution, les
dispositions de l'article 1er de la résolution, sous les réserves mentionnées
ci-dessus, ne méconnaissent aucune règle de nature constitutionnelle ;
Sur l'article 2 de la résolution :
Considérant que l'article 2 complète l'article 45 du règlement du Sénat par
trois alinéas ;
Considérant que les deux premiers déterminent les conditions dans lesquelles
est constatée l'irrecevabilité des amendements aux projets de loi de
financement de la sécurité sociale au regard du domaine de ces lois tel que
défini par l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale ; que ces
conditions sont identiques à celles qui sont prévues par les alinéas 1 et 12 de
l'article 45 du règlement pour l'application de l'article 40 de la
Constitution, la commission des affaires sociales exerçant les responsabilités
qui sont dévolues à la commission des finances en application de ces dernières
dispositions ; que dès lors les deux premiers alinéas de l'article 2 doivent
être regardés comme conformes à la Constitution ;
Considérant que le troisième alinéa de l'article 2 prévoit l'application de la
même procédure que celle instituée par ces deux premiers alinéas aux
propositions de lois déposées par les sénateurs ; que cette disposition qui
doit être entendue sans préjudice de l'application des prescriptions de
l'article 24 du règlement n'est pas dès lors contraire à la Constitution
;
Sur l'article 3 de la résolution :
Considérant que cet article qui a pour objet de modifier, à l'article 9 du
règlement, l'appellation des sénateurs siégeant au sein d'organismes extérieurs
au Parlement en vertu d'un texte législatif ou réglementaire n'est contraire à
aucune disposition constitutionnelle ;
Décide :
Art. 1er. _ La résolution soumise à l'examen du Conseil constitutionnel
est déclarée conforme à la Constitution sous les réserves indiquées dans les
motifs de la présente décision.
Art. 2. _ La présente décision sera notifiée au président du Sénat et publiée
au
Journal officiel
de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 14 octobre 1996 où
siégeaient : MM. Roland Dumas, président, Maurice Faure, Georges Abadie, Jean
Cabannes, Michel Ameller, Jacques Robert, Alain Lancelot et Mme Noëlle Lenoir.
Le président,
Roland Dumas
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Difficultés des producteurs de fruits et légumes
466.
- 11 octobre 1996. -
M. Louis Minetti
attire l'attention de
M. le ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation
sur la nouvelle année dramatique pour les fruits et légumes qui vient de se
dérouler. Pour quelles raisons le Gouvernement n'a-t-il pas pris les mesures
nécessaires suivantes à savoir : 1° mettre en place un meilleur contrôle de
l'application des accords préférentiels ; 2° travailler pour la complémentarité
des importations et des productions communautaires ; 3° combattre le dumping
social en instituant des dispositifs fiscaux qui égalisent les conditions de
concurrence ; 4° responsabiliser fortement la grande distribution qui par sa
puissance financière écrase sans vergogne les producteurs ; 5° interdir la
commercialisation des produits d'importation au moment de la montée en
production des pays européens, détruire sans compensation financière tous les
fruits et légumes importés se trouvant encore sur le territoire des Etats de
l'Union européenne. Ces notions devraient être incluses dans les certificats
d'importations. Quelles mesures concrètes et vraies compte prendre le ministre
de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation pour aller dans ce sens.
Développement de l'emploi français à l'étranger
467.
- 11 octobre 1996. -
M. Hubert Durand-Chastel
attire l'attention de
Mme le ministre délégué pour l'emploi
sur le fait que la création d'emplois en France dépend beaucoup de nos
exportations et des parts de marché à l'extérieur. La mondialisation de
l'économie nécessite d'accentuer la présence française à l'étranger ; il
existe, en effet, une corrélation entre les flux de notre commerce extérieur
dans une zone donnée et le nombre de ressortissants français installés dans
cette zone. Or, le nombre de Français résidant à l'étranger reste très
insuffisant, en particulier dans les pays émergents. Un des obstacles au
développement de l'expatriation tient au fait que le nombre des offres d'emploi
à l'international est très inférieur au nombre de candidats au départ.
Conscient de cette difficulté, le Président Jacques Chirac, en déclarant le 29
août aux ambassadeurs de France : « Vous êtes aussi des ambassadeurs de
l'économie française et c'est sur ce terrain que votre action sera jugée », a
porté la préoccupation de l'emploi au niveau de l'action diplomatique. Déjà, un
regroupement des organismes de soutien au commerce extérieur au sein d'un
groupement d'intérêt public été réalisé, pour mieux coordonner et redéployer
les actions visant à l'internationalisation des entreprises. S'agissant de
l'emploi à l'étranger, deux grandes structures en France gèrent les offres et
les demandes : l'office des migrations internationales (OMI) et l'ANPE
International ; ce dernier organisme a, au cours du premier semestre 1996,
traité 2 601 offres d'emploi ; mais la faiblesse de son effectif en personne,
19 employés au total, limite son activité. Ne conviendrait-il pas de le
renforcer sensiblement avec des membres du nombreux personnel de l'ANPE, qui
compte plus de 15 000 personnes ? Ne serait-il pas également souhaitable de
coordonner les actions et les moyens de ces services, et de rechercher une
synergie avec les comités consulaires pour l'emploi et la formation et les
autres acteurs qui sont situés à l'étranger ? Ces mesures prenant en compte la
mondialisation du travail faciliteraient l'expatriation des Français, avec
l'accroissement de nos exportations et un meilleur emploi en France.
Politique de relance de l'immobilier
468.
- 14 octobre 1996. -
M. Jacques Machet
interroge
M. le ministre de l'économie et des finances
sur le projet de loi de finances pour 1997. Plusieurs mesures prises par le
Gouvernement concernant l'immobilier inquiètent les acteurs de ce secteur de
notre économie. Tout d'abord, la décision de ne pas reconduire pour 1997 la
baisse de 30 % des droits de mutation à titre onéreux, ainsi que l'allègement
des droits de succession ou de donation pour les logements locatifs anciens
tandis que l'obligation pour les investisseurs de pratiquer des loyers
intermédiaires est maintenue. Ensuite, la loi de finances pour 1997 ne prévoit
pas la reconduction de la possibilité d'obtenir un prêt à taux zéro dans
l'ancien avec peu de travaux et supprime la déductibilité des intérêts
d'emprunt pour l'achat de la résidence principale. Le marché de l'immobilier ne
cesse de régresser malgré plusieurs annonces d'une reprise qui malheureusement
se fait toujours attendre. Certaines mesures pourtant pourraient relancer ce
secteur d'activité dont celles-ci : un dispositif d'aide simple, correspondant
à une déduction d'impôt de 10 % du prix du logement ancien acquis ; la
déduction forfaitaire des charges portée à 15 % ; l'alignement du plafond
d'imputation des déficits fonciers sur le revenu global du logement ancien et
du logement neuf, soit 100 000 francs au lieu de 70 000 francs ; que la mesure
visant à une déductibilité de 20 % des travaux engagés avec un plafond de 40
000 francs puisse être faite plus d'une fois tous les cinq ans et que la
définition des travaux soit élargie. Ces mesures permettraient de relancer le
bâtiment et l'immobilier et de mettre un terme à la progression constante des
suppressions d'emplois constatée ces dernières années.
Application de la convention
relative aux droits de l'enfant
469.
- 15 octobre 1996. -
Mme Marie-Claude Beaudeau
attire l'attention de
M. le ministre du travail et des affaires sociales
sur l'application de la convention relative aux droits de l'enfant, adoptée par
l'assemblée générale de l'ONU, le 20 novembre 1989, et ratifiée par 180 Etats,
dont la France. Elle lui rappelle que chaque Etat signataire s'est engagé à
publier annuellement un plan national d'action en faveur des droits de
l'enfant. Elle lui demande de lui faire connaître les résultats obtenus par
chaque plan depuis 1990 et les termes et objectifs de celui de 1996, toujours
en attente de publication.
Dégradation de l'activité du secteur du bâtiment
et des travaux publics
470.
- 15 novembre 1996. -
M. Gérard Delfau
souhaite interroger
M. le ministre délégué au logement
sur la dégradation dramatique que connaît, en cette rentrée, l'activité du BTP,
de même d'ailleurs que celui des grands travaux d'infrastructures de
communication. La chute confirmée des mises en chantier de logements neufs
s'accompagne d'une baisse des réhabilitations du patrimoine bâti ancien. Les
causes en sont multiples mais la hausse de la TVA et des prélèvements sur les
ménages explique largement ce climat de récession. Or, le projet de loi de
finances pour 1997 aggrave cette perspective. Il faut craindre que les dépôts
de bilan se multiplient et que l'emploi, dont ce secteur est riche, ne continue
à se détériorer brutalement. C'est pourquoi, il voudrait savoir quelles mesures
immédiates il compte prendre pour redresser cette situation avant qu'il ne soit
trop tard pour des dizaines de milliers de PME et d'artisans.
Politique de la France au Soudan
471. - 15 octobre 1996. - M. Bernard Plasait attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la situation au Soudan. En effet, une junte islamique fondamentaliste y a pris le pouvoir par un coup d'Etat. Depuis 1990 le pays est déchiré par une effroyable guerre civile qui aurait déjà fait deux millions de morts civils et près de quatre millions et demi de personnes déplacées ou réfugiées. De plus, il apparaît que le Gouvernement soudanais soutient le terrorisme international. Il lui demande donc de bien vouloir lui préciser la position du Gouvernement français dans ce conflit et les initiatives qu'il entend prendre afin d'oeuvrer à la pacification du Soudan.