CONVENTION FISCALE AVEC LA BOLIVIE
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 223, 1995-1996),
adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention
entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la
République bolivienne en vue d'éviter les doubles impositions en matière
d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole). [Rapport n°
384 (1995-1996).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Xavier Emmanuelli,
secrétaire d'Etat à l'action humanitaire d'urgence.
Monsieur le
président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la
convention franco-bolivienne en vue d'éviter les doubles impositions en matière
d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée le 15 décembre 1994, a été
négociée, à la demande des autorités boliviennes, en complément de l'accord sur
la protection des investissements et immédiatement après la conclusion de
celui-ci. Ces négociations avec la France s'inscrivent dans le cadre de la
politique d'ouverture de l'économie bolivienne aux capitaux étrangers. Cette
politique vise aussi bien les Etats européens que les Etats de la région comme
les membres du Pacte andin ou du MERCOSUR.
Cet accord respecte, dans ses grandes lignes, le modèle de convention élaboré
par l'OCDE. Cela représente une évolution considérable pour la Bolivie qui,
tout comme les autres Etats du Pacte andin, n'acceptait pas certains principes
de ce modèle. Ces Etats, en effet, se sont toujours opposés à l'imposition des
revenus par l'Etat de résidence du bénéficiaire et ont toujours été partisans
d'une taxation aussi large que possible par l'Etat de la source.
La convention fiscale, faite de concessions réciproques, établit donc un
équilibre entre deux conceptions opposées.
Désormais, la Bolivie admet, avec quelques aménagements, la notion
d'établissement stable qui restreint le droit d'imposer de l'Etat dans lequel
s'exerce l'activité.
Pour tenir compte des préoccupations boliviennes, l'Etat d'où proviennent les
dividendes, intérêts et redevances pourra taxer ces revenus au taux maximum de
15 p. 100. Dans le modèle de l'OCDE, en revanche, la taxation des dividendes et
intérêts est de 5 p. 100, alors que les redevances sont imposables
exclusivement dans l'Etat où est située la source.
La méthode d'élimination des doubles impositions est, pour la Bolivie, celle
de l'exemption et, pour la France, celle du crédit d'impôt qui permet de
sauvegarder la progressivité de l'impôt.
L'intérêt de cette convention réside dans la nécessité d'encourager les
échanges économiques franco-boliviens. En effet, si le dialogue politique avec
la Bolivie se renforce, comme en témoigne une récente rencontre à Paris entre
le Président de la République française et le président bolivien, M. Sanchez de
Lozada, nos échanges économiques mutuels restent néanmoins modestes et
déficitaires. La Bolivie est une source non négligeable de minerais pour la
France, mais notre pays détient moins de 1 p. 100 du marché bolivien. Or ce
pays s'est engagé dans de grandes réformes de structures, comportant une
libéralisation de l'économie, une restructuration du secteur public, une
réforme fiscale et un important programme de privatisations lancé en 1992 et
accentué en 1995, ouvrant ainsi une large place à l'investissement étranger.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention
en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et
sur la fortune, signée avec la Bolivie, et dont le Gouvernement vous recommande
d'autoriser l'approbation.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jacques Chaumont,
rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des
comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la Bolivie représente deux fois la
France en superficie mais ne compte que sept millions d'habitants, dont la
plupart vivent dans l'Altiplano.
La vie politique de ce pays, indépendant depuis 1825, a été marquée par un
rythme soutenu de coups d'Etat de 1825 à 1982. Depuis cette dernière date, la
Bolivie a effectué un retour à la démocratie, qu'il convient d'aider et de
maintenir. Ce pays, en effet, s'est engagé dans un grand programme de réformes,
que M. le secrétaire d'Etat a évoqué à l'instant. Il continue néanmoins à être
très pauvre puisque le revenu par habitant n'excède pas, selon les dernières
estimations, 920 dollars par an.
Les performances macro-économiques actuelles de la Bolivie sont plutôt
satisfaisantes, avec un taux de croissance de 3,5 p.100 par an et une inflation
de 6,5 p. 100, ce qui est relativement modéré. Il n'en demeure pas moins qu'en
matière de développement économique la Bolivie est, sans doute avec Haïti, l'un
des pays les plus défavorisés.
Si la détention de Régis Debray, l'assassinat de l'ambassadeur de Bolivie à
Paris et, plus récemment, l'affaire Klaus Barbie ont constitué, à certaines
époques, des contentieux délicats entre la France et la Bolivie, les relations
actuelles entre ces deux pays sont néanmoins tout à fait amicales. Le nombre
des résidents français en Bolivie et des résidents boliviens en France est
d'environ cinq cents de part et d'autre.
Nos échanges sont peu importants : les flux cumulés représentent quelque 500
millions de francs par an, ce qui est très modeste. L'intention du Gouvernement
est cependant de tout mettre en oeuvre pour aider la Bolivie, dans un contexte
très difficile, à mettre en place les réformes nécessaires.
C'est dans cet esprit qu'a été signée le 15 décembre 1994, à La Paz, cette
convention, qui reprend pour l'essentiel les solutions du modèle de convention
de l'OCDE. Toutefois, une particularité figure à l'article 23, lequel fixe le
recours à la méthode du crédit d'impôt pour éliminer les doubles
impositions.
M. le secrétaire d'Etat a bien voulu expliquer toutes les modalités techniques
de cet accord parfaitement classique. La commission des finances, unanime, a
approuvé ce dispositif et vous invite, mes chers collègues, à faire de même.
M. le président.
La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
nous pourrions faire à propos de la Bolivie des déclarations et des réserves
analogues à celles qui ont été exprimées pour le Pakistan. En effet, depuis que
la Colombie s'est efforcée de supprimer les plantations de cocaïne et s'est
attaquée au cartel de Medellin, la Bolivie est devenue l'un des centres
essentiels de production de la drogue.
Nous estimons néanmoins qu'il s'agit là d'un autre problème, qui ne concerne
pas les conventions fiscales dont nous discutons ce matin.
Par ailleurs, intervenant pour la dernière fois ce matin, je tiens à remercier
M. Jacques Chaumont, rapporteur de la commission des finances, de la pertinence
de ses rapports dans lesquels il a mis toutes ses connaissances d'ancien haut
fonctionnaire du Quai d'Orsay, ainsi que la concision et la clarté dont il a
toujours fait preuve dans ses fonctions sénatoriales.
Nous voterons naturellement le présent projet de loi.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
«
Article unique
. - Est autorisée l'approbation de la convention entre
le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République
bolivienne en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le
revenu et sur la fortune (ensemble un protocole), signée à La Paz le 15
décembre 1994, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
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