N°
373
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès verbal de la séance du 31 mai 2000
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le débat d'orientation budgétaire pour 2001 ,
Par M.
Philippe MARINI,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Marcel Charmant, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.
Politique économique.
INTRODUCTION GÉNÉRALE
Il y a
un an, votre rapporteur général, à l'occasion du
précédent débat d'orientation budgétaire, avait
souhaité que le gouvernement passe " des intentions aux
faits ".
Le bilan tracé au terme d'une année marquée notamment
par l'épisode de la " cagnotte ", révélateur de
graves dysfonctionnements et d'une absence chronique de transparence dans le
domaine budgétaire ne va pas dans ce sens.
Après que trois ministres de l'économie se furent
succédés en moins de six mois, bon nombre des intentions
affichées ont été démenties par la
réalité et les analyses faites, tant par votre commission des
finances que par la Cour des comptes, des experts indépendants ou les
institutions européennes.
Le présent rapport, par son organisation même, permet de porter
un regard rétrospectif sur la gestion des finances publiques depuis
1998, et prospectif, puisqu'il analyse les évolutions pour
l'année 2001, jusqu'au terme de l'actuel programme pluriannuel des
finances publiques en 2003.
Cette discussion s'articule ainsi autour de l'examen de deux projets de loi et
d'un débat consécutif à une déclaration du
gouvernement sur ses orientations budgétaires pour 2001 et la
façon dont il entend se conformer au programme pluriannuel des finances
publiques.
Le projet de loi de règlement pour 1998 est l'occasion pour le
Sénat, utilement assisté en ce domaine par la Cour des comptes,
de porter un regard critique, car détaillé et précis, sur
le premier exercice budgétaire entièrement conduit par l'actuel
gouvernement.
De même, la discussion du projet de loi de finances rectificative pour
2000, annoncé quelques semaines seulement après le vote de la loi
de finances initiale, est révélatrice des intentions
réelles du gouvernement. Le surplus de recettes fiscales et non-fiscales
(51,4 milliards de francs au total) tardivement reconnu par ce dernier, mais
non encore perçu à ce jour, puisque ce sont des recettes
espérées, est ainsi affecté pour une large part
(80 %) à des baisses ponctuelles d'impôts sans grande
cohérence d'ensemble, mais également pour 20% à une
augmentation très significative de la dépense publique, sans que
le niveau affiché de déficit budgétaire ne soit en rien
modifié.
A l'occasion du débat d'orientation budgétaire pour 2001, le
gouvernement affiche un certain nombre de ses priorités.
Votre
commission des finances s'est attachée à en relever les limites
et les contradictions puisque bon nombre des préconisations se trouvent
d'ores et déjà démenties par la réalité
,
qu'il s'agisse de la maîtrise des dépenses, de la
nécessité d'une politique durable de diminution des
prélèvements obligatoires, notamment de l'imposition directe, ou
de la réduction des déficits et, partant, de celle de la dette.
Ainsi le gouvernement affiche-t-il, à l'occasion du débat
d'orientation budgétaire, "
six raisons de réduire les
déficits publics
" mais il n'en tire aucune conséquence
dans le collectif pour 2000 dont le niveau de déficit budgétaire
n'a aucunement été modifié. Il reste, de ce fait, toujours
supérieur de près de 10 milliards de francs à celui
atteint l'année dernière. Une telle contradiction ne peut que
nuire à la qualité, voire à l'intérêt, de la
discussion budgétaire, et relancer inévitablement le débat
sur la nécessité de la transparence et les limites,
imposées en l'espèce par le gouvernement.
Dès lors, face à ces " non-choix " du gouvernement qui
bénéficie d'une conjoncture économique favorable et qui,
faute de réformes structurelles, contribue à perpétuer
" l'exception française " marquée par un niveau de
prélèvements obligatoires historiquement élevé, une
absence de maîtrise de la dépense et un déficit
insuffisamment contrôlé,
votre commission des finances tient
à réaffirmer ses priorités et à les traduire en
actes dans le projet de loi de finances rectificative pour 2000.
Qu'il s'agisse de la diminution des prélèvements obligatoires,
pour laquelle une méthode sera proposée :
une baisse
massive et durable d'impôts et des cotisations sociales à hauteur
de 2,9 points de PIB d'ici 2003 qui soit centrée sur l'impôt sur
le revenu et l'allégement des cotisations sociales.
Les analyses
fournies en ce domaine par les observatoires économiques confirment, en
effet, que de telles baisses sont compatibles avec un retour à
l'équilibre des comptes publics à l'horizon 2003 et
nécessitent pour cela une réduction annuelle de 0,95% en volume
de la dépense publique. Un tel " policy-mix " apparaît
en effet à même de favoriser les créations d'emplois, tout
en améliorant la situation de nos finances publiques. Votre commission,
dans le respect des dispositions constitutionnelles et organiques qui limitent
strictement ses possibilités d'amendement, ne s'opposera donc pas aux
réductions d'impôts figurant dans le collectif 2000 tout en
estimant qu'il aurait été possible de faire mieux et d'aller plus
loin.
Qu'il s'agisse de la limitation de la progression des dépenses publiques
pour laquelle
votre commission, estimant qu'il n'est pas de bonne politique
budgétaire de financer en cours d'année des dépenses
supplémentaires par un surcroît de recettes non encore
perçues, vous proposera d'en assurer le financement par un
redéploiement portant sur les dépenses de fonctionnement des
budgets civils non-régaliens.
La marge de manoeuvre ainsi dégagée, de 10 milliards de francs,
devra être affectée à la réduction du déficit
budgétaire et donc des " impôts de demain ", avec pour
objectif de porter le montant du déficit pour 2000 à un niveau
inférieur à celui exécuté en 1999 (- 206 milliards
de francs).
Une telle attitude est en effet la seule qui soit respectueuse de l'avenir
de notre pays, le rende crédible en Europe et contribue à un
débat budgétaire, de fond, transparent et utile.