II. DEUX ENJEUX POUR L'ÉQUILIBRE À MOYEN TERME DES FINANCES PUBLIQUES : LES EFFECTIFS PUBLICS ET LES DÉPENSES DE SANTÉ
1. L'évolution des effectifs publics
Les
experts de l'OFCE ont retenu une hypothèse d'augmentation des
effectifs
publics sur la période 1999-2004 de 1 % par an.
Cette hypothèse, combinée à celles sur l'évolution
des rémunérations publiques (cf. ci-dessus, page 68), porte
à 2,7 % par an la croissance en volume de la masse salariale
publique.
Cette augmentation annuelle moyenne des effectifs se décompose, par
hypothèse, en 0,7 % d'augmentation tendancielle (soit
+ 40 000 emplois publics par an environ) et 0,3 %
d'augmentation liée à la mise en oeuvre des 35 heures dans la
fonction publique (soit + 15 000 emplois par an).
Il faut convenir qu'une évaluation de l'impact de la mise en oeuvre des
35 heures dans la fonction publique apparaît, au regard de la
rationalité économique, extrêmement délicate :
comment, par exemple, peut-on avancer un pronostic quant aux
conséquences en termes de
productivité
, de la
réduction du temps de travail dans le secteur
non marchand
?
On peut d'ailleurs considérer l'hypothèse d'augmentation des
effectifs publics de 0,3 % par an, suite à la mise en oeuvre des 35
heures, comme très minimaliste. Mais on peut en déduire
qu'implicitement, les experts de l'OFCE ont considéré que
l'introduction des 35 heures se traduirait de manière globale par une
reprise de la croissance des effectifs publics au rythme observé sur
longue période.
Or, la
vraisemblance
de ce raisonnement semble à votre rapporteur
particulièrement
inquiétante
. En effet, la
maîtrise
nécessaire des effectifs publics, au regard d'un
objectif à moyen terme de retour à l'équilibre des comptes
publics dans un contexte de forte croissance, a toutes les chances d'être
compromise par la réduction de la durée du travail
appliquée au secteur public.
Selon les calculs de votre rapporteur, une
stabilisation des effectifs
publics permettrait, à l'horizon de la projection, une économie
de l'ordre de 1 point de PIB, et une réduction du déficit
public ainsi très supérieure à celle affichée par
la projection.
2. Les dépenses de santé
Les
dépenses de santé ne sont pas susceptibles d'une maîtrise
aussi parfaite par les pouvoirs publics que d'autres catégories de
prestations ou de dépenses publiques. Les dépenses sont en effet
rendues aléatoires à la fois par la nature du risque, par les
choix des assurés et par la relation " particulière "
entre " offreurs " de soins et " consommateurs " de soins
(relation caractérisée par ce que les économistes
qualifient d'" asymétrie d'information ").
Depuis 1995, la tendance d'évolution des dépenses de santé
connaît un infléchissement avec une augmentation en volume
inférieur à 2 % par an.
Cependant, la forte augmentation des dépenses de santé
observée au dernier trimestre 1998 et au premier trimestre 1999 conduit
à s'interroger sur le caractère durable de ce ralentissement.
Celui-ci a en effet été obtenu au prix d'un effort
extrêmement volontariste des pouvoirs publics pour freiner la
dérive des dépenses. Ce contrôle est dû à un
contingentement tant du volume que du prix des soins médicaux.
Cet effort est-il
tenable
, en particulier dans une période
d'accélération de la croissance et du
revenu
des
ménages ? On observe en effet sur le passé qu'une phase de
croissance soutenue a pour effet de détendre la contrainte de
financement des comptes de l'assurance-maladie, les professionnels de
santé et les assurés percevant d'ailleurs eux-mêmes la
détente de cette contrainte.
En réponse à la question posée ci-dessus, on peut formuler
deux hypothèses " polaires " :
- soit on considère que le ralentissement de la période 1995-1998
est
durable
et que les pouvoirs publics, grâce à la
poursuite des contingentements sur l'hôpital et à la
réussite des réformes plus qualitatives sur la médecine
ambulatoire et la consommation des médicaments, réussiront
totalement à contrôler la dépense de santé. Dans ce
cas, la progression en volume des dépenses de santé serait de
l'ordre de 1 % par an sur le moyen terme (soit sensiblement
l'hypothèse retenue dans le programme triennal présenté
par le Gouvernement qui se fixe un objectif d'augmentation de 1,15 % par
an).
Sous cette hypothèse, les comptes de l'assurance-maladie seraient
excédentaires
à l'horizon 2004 (de l'ordre de
30
milliards de francs
) et le déficit public de l'ensemble des
administrations publiques représenterait
1,2 % du PIB
.
- soit on considère que le ralentissement de 1995-1998 est le
résultat de réformes
exceptionnelles
, que la dérive
de la dépense de santé est inévitable,
a fortiori
dans une phase d'accélération du revenu des ménages.
Dans ce cas, la progression des dépenses maladie retrouverait sa
progression tendancielle d'avant 1995, soit 4,2 % par an en volume.
Sous cette hypothèse, le déficit de la branche-maladie en fin de
période atteindrait
100 milliards de francs
et le
déficit de l'ensemble des administrations publiques
2,5 % du
PIB
.
Votre rapporteur a déjà indiqué (cf. pages 68 et 69)
que l'OFCE avait retenu un diagnostic intermédiaire entre les deux
scénarios d'évolution de dépenses de santé
décrits ci-dessus, soit une augmentation en volume de 2,25 % par
an. C'est sous cette hypothèse que le déficit de l'ensemble des
administrations publiques représente, au terme de la projection,
1,5 % du PIB.
Les développements ci-dessus sont néanmoins
éclairants : ils permettent en effet de donner une
" fourchette " quant à l'évolution du déficit
public en fonction des évolutions possibles des dépenses de
santé et d'apprécier ainsi l'
enjeu
que représente
leur
maîtrise
pour l'équilibre à moyen terme des
finances publiques.