N° 464
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 30 juin 1999 |
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces Armées (1) sur les premiers enseignements de l' opération « force alliée » en Yougoslavie : quels enjeux diplomatiques et militaires ? ,
Par M. Xavier de VILLEPIN,
Sénateur,
(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Serge Vinçon, Guy Penne, André Dulait, Charles-Henri de Cossé-Brissac, André Boyer, Mme Danielle Bidard-Reydet, vice-présidents ; MM. Michel Caldaguès, Daniel Goulet, Bertrand Delanoë, Pierre Biarnès, secrétaires ; Bertrand Auban, Michel Barnier, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Daniel Bernardet, Didier Borotra, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Robert Del Picchia, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Emmanuel Hamel, Roger Husson, Christian de La Malène, Philippe Madrelle, René Marquès, Paul Masson, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Jean-Luc Mélenchon, René Monory, Aymeri de Montesquiou, Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Michel Pelchat, Alain Peyrefitte, Xavier Pintat, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Gérard Roujas, André Rouvière.
Traités et conventions . |
QUELS PREMIERS ENSEIGNEMENTS DES OPÉRATIONS AU KOSOVO ?Les enjeux politiques et diplomatiques La crise du Kosovo a favorisé l'appropriation, par des instances diplomatiques comme le groupe de contact et le G8, du rôle de régulateur des conflits traditionnellement dévolu au Conseil de sécurité des Nations Unies. Celui-ci, fragilisé comme instrument et source de légalité internationale pour le recours à la force, doit retrouver cette fonction essentielle en amont de toute opération de rétablissement de la paix et demeurer, en tout état de cause, le cadre exclusif de mise en oeuvre de son règlement final. D'organisation de défense collective, l'OTAN s'implique désormais comme instrument politico-militaire au service d'objectifs diplomatiques dans la gestion de crises régionales ; cette évolution doit être encadrée dans des limites juridiques (Conseil de sécurité) et géographiques (zone euro-atlantique) précises ; - la non-participation de la France à l'organisation militaire intégrée n'a pas affecté l'efficacité du concours des forces françaises. Notre pays a, à cette occasion, démontré son aptitude technique à s'intégrer dans un dispositif militaire ad hoc tout en faisant prévaloir le principe de responsabilisation politique et militaire nationale au sein d'une structure militaire dont certains modes de fonctionnement restent marqués par un contexte géostratégique aujourd'hui dépassé ; - notre position spécifique au sein de l'Alliance ne doit cependant pas occulter certaines interrogations, telles la place qui sera concédée à la France dans les PC de groupes de forces interarmées multinationales (GFIM). Enfin et surtout, la crise du Kosovo a cristallisé l'expression d'une volonté politique européenne en vue de l'édification d'une défense commune, appuyée sur des outils décisionnels efficaces et des moyens militaires crédibles, capable d'agir avec l'OTAN ou en dehors d'elle. La mise en oeuvre de cette volonté doit se traduire notamment : - par la définition de critères de convergence dans les politiques nationales de défense et les stratégies budgétaires suivies par les Quinze dans ce domaine ; - par l'inscription de la politique étrangère et de sécurité commune, y compris dans ses implications militaires, dans le champ d'application des « coopérations renforcées » créées par le traité d'Amsterdam ; - par le développement en commun de structures européennes de commandement interarmées projetables, appuyées sur des capacités accrues de renseignement, de communication et de surveillance de théâtre. |
Les leçons militaires Une participation française ambitieuse dans un contexte marqué par l'écart technologique entre Américains et Européens : - avec un dispositif aérien global qui l'a placée en tête des contributeurs européens à « Force Alliée » (10,9 %), la France a pris une large part aux missions de transport et de soutien (21,8 %), aux missions de reconnaissance (20,2 %) et aux missions offensives (12,8 %) ; - faute de moyens cependant, nos forces aériennes n'ont pas participé aux missions de commandement aéroporté ou aux missions contre les actions de défense sol-air, tandis que l'absence de missiles de croisière dans nos équipements est, une nouvelle fois, apparue comme une déficience majeure. Des facteurs limitatifs de capacités ont été mis en lumière qui doivent notamment conduire à faire porter l'effort d'équipement à venir sur : . l'acquisition de capacités antiradars efficaces ; . la détention d'armements capables, par tous temps, d'atteindre leurs cibles, compte tenu des contraintes météorologiques à l'emploi des armements guidés laser ; . la disponibilité de stocks suffisants de munitions ; . l'accroissement de nos moyens de ravitaillement en vol ; . l'acquisition d'un nombre accru de drones. Des choix essentiels de politique de défense ont été validés par la crise : - la décision, prise en 1996, de professionnaliser nos forces s'est confirmée être un choix indispensable ; - les programmes d'armements permettant des frappes de précision à grande distance, de jour comme de nuit et par tous temps : missiles de croisière Apache et Scalp-EG, armements air-sol modulaires (AASM) ; - l'effort accompli par la France pour se doter d'une panoplie relativement complète de moyens d'observation et de renseignement, qui doit, impérativement, être approfondi et renforcé à l'échelle européenne. Des interrogations budgétaires récurrentes persistent : - la France consentira-t-elle l'effort nécessaire pour se doter d'un second porte-avions ? - quelle solution apporter, en construction budgétaire, au financement du surcoût d'opérations extérieures ? |