2. La prise en compte des mesures environnementales et des coûts sociaux
a) La multiplication des mesures environnementales
La
Communauté a mis en place depuis 1992 des mesures
agro-environnementales. En outre, la France poursuit d'importants efforts pour
parvenir à mettre en place une agriculture dite durable. La mise en
place de plus de 700 plans de développement durable répartis
dans cinquante départements illustrent cette volonté d'associer
agriculture et environnement.
Cette démarche est mise en oeuvre, en France, non seulement par les
pouvoirs publics, mais aussi par l'ensemble des organisations professionnelles
agricoles.
La mission d'information estime que l'agriculture Européenne se trouve
confrontée, toutefois à "
un contexte
contradictoire
" :
- l'Union Européenne développe des
contraintes
environnementales
(milieu naturel, bien-être des animaux)
qui
renchérissent les coûts de production
. Or, cette tendance est
bien moins développée dans d'autres pays,
caractérisés par des espaces agricoles vastes et par une moindre
densité démographique (Etats-Unis, Australie, Argentine) ;
- les pays tiers exportateurs et
l'Organisation mondiale du
Commerce
exercent une pression en faveur d'une libéralisation des
échanges agricoles qui exige
la recherche du moindre coût
en agriculture.
Il faut donc que l'Union Européenne :
- fasse mieux prendre en compte la réalité environnementale
communautaire dans les négociations internationales ;
- prévoie, dans le cadre de la discussion sur l'évolution de
la PAC,
des soutiens environnementaux spécifiques
et distincts
des aides économiques accordées aux productions
végétales et animales.
b) Des coûts sociaux non négligeables
Les pays
Européens ne supportent pas les mêmes coûts sociaux que bon
nombre de leurs concurrents.
Cette disparité se répercute inévitablement sur le niveau
des prix et fausse la concurrence.
Si en matière de fiscalité, la mission d'information
considère qu'il appartient à la Communauté
Européenne et à ses Etats membres, dont la France, de mener
à bien certaines réformes,
elle estime nécessaire que
les prochaines négociations, au sein de l'OMC, prennent en compte les
coûts sociaux
. En effet, ceux-ci sont révélateurs d'un
certain état de développement. Or, est-il admissible de
tolérer des importations de produits dont le prix excessivement bas
provient à la fois d'une absence totale de couverture sociale et d'une
rémunération très faible pour les personnes qui vivent
dans ces pays ?
Deux solutions ont été déjà
préconisées pour faire face à ce problème :
l'une globale par le CNJA, l'autre, plus sectorielle, par le groupe de travail
" fruits et légumes " de la Commission des Affaires
économiques.
La mission d'information tient à rappeler brièvement ces deux
options :
Le CNJA a proposé depuis quelques années la
création d'une TVA emploi.
Celle-ci est présentée dans
le rapport d'orientation du CNJA des 24, 25 et 26 juin 1997 sous la
forme suivante :
" Aujourd'hui, les charges sociales sont financées par la
production à travers les charges sur les salaires. Ce système a
pour principal inconvénient de nuire à la
compétitivité de nos produits tant sur le marché
intérieur (concurrence des produits moins onéreux qui sont
importés) que sur le marché mondial (concurrence des produits
à faibles coûts de production des autres grands pays exportateurs).
C'est pourquoi nous proposons que soit instaurée au niveau national, une
" TVA-emploi ". Cette TVA-emploi repose sur le transfert de tout ou
partie des charges sociales vers une augmentation proportionnelle du taux de
TVA. Le coût de production de nos produits diminue tandis que le prix
payé par le consommateur reste identique.
Les avantages de ce système sont multiples
:
il permet de préserver l'emploi et de lutter contre le travail
clandestin ;
les exportations étant réalisées en prix hors taxes,
l'Union Européenne devient plus compétitive sur le marché
mondial ;
il tend vers une équité de charges sociales entre
production intérieure et extérieure, puisque les produits
importés sont soumis à cette même TVA ; la TVA-emploi
permet ainsi de réduire les distorsions de concurrence entre produits
Européens et produits importés. Ceci est particulièrement
bénéfique pour les secteurs peu ou pas protégés
comme les fruits et légumes dans le domaine agricole ;
il permet d'affronter plus facilement l'élargissement de l'Union
Européenne et les prochaines négociations au sein de l'OMC.
Après avoir été expérimentée
préalablement dans le secteur agricole, cette " TVA-emploi "
ou " sociale " serait à terme étendue à tous les
secteurs économiques, voire à l'Europe. Elle permettrait de
renforcer la compétitivité de notre économie et de faire
appel à davantage de solidarité, sans hausse de prix ".
La mission d'information chargée d'étudier le secteur
des fruits et légumes avait préconisé en 1993 la mise en
place d'une TVA sociale afin de compenser le coût du dumping
social
58(
*
)
.
MM. Jean Huchon, Jean-François Le Grand et Louis Minetti ont
préconisé :
" La mise en place à l'entrée dans la Communauté
d'une
taxe complémentaire destinée à rapprocher le prix
d'entrée du prix communautaire
.
Le produit de cette taxe pourrait, pour tout ou partie être
ristournée au pays exportateur pour aider à son
développement, notamment agricole en aidant à l'essor des
cultures vivrières. Une fraction pourrait être conservée au
sein de la Communauté pour l'amélioration de la gestion des
marchés des produits considérés.
Une telle taxe aurait un double objectif. Elle permettrait tout d'abord de
rétablir une concurrence acceptable
entre produits d'importation
et produits communautaires en réduisant l'avantage procuré par
l'utilisation d'une main-d'oeuvre bon marché. Elle permettrait, d'autre
part, de
réellement aider au développement du pays
exportateurs
".