b) Une orientation jugée plutôt favorable sous réserve de quelques modifications
Les
Pays-Bas
sont globalement favorables aux propositions du " Paquet
Santer " mais restent vigilants sur certains points : ce pays,
deuxième ou troisième exportateur mondial de produits
agro-alimentaires, est très dépendant de ses
débouchés extérieurs. Devenu contributeur net au sein de
l'Union Européenne, les Pays-Bas ont placé la question agricole
au coeur du débat public.
La réflexion menée par le ministre néerlandais se
situe dans un contexte national spécifique, caractérisé
par trois contraintes majeures :
- l'avance technique de l'agriculture néerlandaise sur ses
partenaires Européens s'est considérablement réduite ces
dernières années ;
- des contraintes environnementales fortes pèsent de plus en plus
lourdement sur les coûts de production dans des secteurs aussi
différents que l'horticulture sous serre ou l'élevage hors sol.
Cette évolution se traduira, dans les années à venir, par
une réduction du cheptel porcin néerlandais et une
délocalisation partielle des cultures sous serres vers le nord ou le sud
du pays ;
- un assainissement des finances publiques qui se traduit par une
diminution des soutiens aux secteurs productifs, entre autres agricole et une
plus grande responsabilisation des différents acteurs économiques.
La réforme " Mac Sharry " a eu un impact globalement
défavorable sur les retours du budget communautaire en faveur des
Pays-Bas, les versements à son profit diminuant de 38 %. Ils sont
donc devenus le deuxième pays contributeur net au budget communautaire
après l'Allemagne et le
premier contributeur net par habitant
.
Cette situation explique que le Gouvernement néerlandais, quel qu'il
soit, doive rester très réservé vis-à-vis de tout
projet de dépense nouvelle, et très demandeur d'une
réforme du financement des politiques communes.
Cette attitude a une conséquence directe sur le devenir de la PAC :
alors que les Pays-Bas adoptent sur de très nombreux dossiers
Européens (Conférence intergouvernementale, Euro...) des
positions voisines de celle de l'Allemagne, La Haye montre, au contraire de
l'Allemagne, une grande prudence sur les élargissements à venir,
demandant que l'Union agisse sans hâte et -cela concerne tant les fonds
structurels que la PAC- que de longues périodes de transition soient
ménagées, sur le modèle de ce qui avait été
appliqué il y a dix ans à l'intégration de l'Espagne et au
Portugal.
Les objectifs de la politique agricole néerlandaise pour les
années à venir sont une plus grande responsabilisation des
agriculteurs, une restructuration autour des plus performants ainsi qu'une
orientation accrue de l'agriculture vers le marché et une meilleure
prise en compte de l'espace rural. Pour les autorités
néerlandaises ces dernières options devraient également
guider les évolutions et les choix en matière de politique
agricole commune.
Les Pays-Bas ont le mois dernier salué la " bonne
orientation " du projet de Bruxelles.
Ils reconnaissent la
nécessité de procéder à des changements, à
la veille de l'élargissement de l'Union Européenne et du prochain
cycle de négociations de l'OMC relatif à la libéralisation
des échanges. La volonté exportatrice des autorités
néerlandaises les conduit à prôner un rapprochement
à terme des prix Européens et des prix du marché mondial,
accompagné d'une compensation partielle des baisses de revenu des
agriculteurs Européens par des aides directes, qui pourraient être
elles-mêmes subordonnées à des contreparties
environnementales. Ces nouvelles orientations devaient être suivies sans
dérapage des dépenses communautaires.
Ce pays considère que la baisse des prix agricoles est la seule option
sérieuse pour la PAC après l'an 2000, pour éviter un
renforcement de la maîtrise de la production.
Une aide directe aux revenus est jugée acceptable, à la condition
d'un traitement uniforme de tous les agriculteurs. Bien que
M. Van Aartsen, Ministre de l'agriculture, soutienne la Commission
dans le choix d'une politique plus libérale, il juge que le mode de
compensation proposé de la baisse des revenus agricoles ne convient pas
; la compensation devant à son sens être proportionnelle à
la production totale, faute de quoi les pertes des agriculteurs
néerlandais seraient plus fortes que celles de leurs collègues
Européens. Ainsi, la perte du revenu doit être calculée par
secteur et par pays. La compensation doit représenter un certain
pourcentage de cette perte, les Etats-membres devant avoir la liberté de
la répartir eux-mêmes entre leurs agriculteurs, dans les limites
d'un cadre fixé par l'Union Européenne. Une compensation
proportionnelle à la production est jugée logique, du fait que
tous les producteurs seront confrontés à des baisses de prix.
Le ministre néerlandais n'est
pas prêt à accepter de
dégradation de la position financière néerlandaise
face aux versements de l'Union Européenne, à la suite de
compensations de baisses de prix. Il a, de plus, marqué sa ferme
opposition à l'augmentation des quotas et à la baisse
supplémentaire des prix de 5 % envisagée dans le secteur
laitier. Il s'est dit, en outre, préoccupé par le fait que
l'éleveur de veau doive supporter la majeure partie de la
réduction des prix de soutien de la viande bovine.
M. Jozias Van Aartsen souhaite par ailleurs une compensation accrue pour le
producteur de fécule de pommes de terre (produit d'une grande importance
aux Pays-Bas) qui aurait plus à perdre à la réforme que le
cultivateur de céréales.
Les organisations agricoles
sont beaucoup plus critiques que le
Gouvernement. Le principal syndicat agricole néerlandais (LTO)
prévoit une
forte dégradation des revenus
des exploitants
agricoles
si la proposition de la Commission était adoptée en
l'état.
Il trouve injuste que l'agriculture soit le seul secteur qui
doive, dans l'Agenda 2000, supporter la charge budgétaire
liée à l'élargissement de l'Union Européenne et
à la réforme des fonds structurels.
Le LTO
s'oppose
à ce que certaines
actions structurelles
(notamment les objectifs 5a et 5b) soient
financées sur le budget
agricole.
Concernant le
secteur laitier, le LTO est très réticent
sur le principe d'une
prime à la vache laitière
qui ne
tiendrait
pas compte du rendement par vache laitière.
Par ailleurs, le LTO s'interroge sur l'absence, dans l'Agenda 2000,
d'étude sur l'avenir des productions des PECO et leurs
conséquences sur les secteurs de productions communautaires.
Le LTO est également attaché au rôle multifonctionnel de
l'agriculture. En matière d'objectifs à atteindre pour
l'agriculture (compétitivité, environnement,
multifonctionnalité...), le LTO souligne les limites engendrées
par une politique unique.
La réflexion sur le découplage est
ainsi engagée.
Le LTO observe également la plus grande prudence quant au coût
budgétaire des mesures envisagées par la Commission.
L'Autriche
, composée de petites exploitations familiales d'une
moyenne de 13 hectares, dont 35 % situées en zone de montagne,
défend la
multifonctionnalité de l'agriculture
(production, activité rurale, paysage, environnement,
bio-énergie, agriculture biologique, agri-tourisme). Elle est donc
très attachée aux mesures d'accompagnement de la réforme
de la PAC.
Ce pays a souvent modifié ses positions durant ces premiers mois de
négociations. Dans un premier temps hostile, il s'est montré peu
à peu plus favorable au projet de la Commission. Après un examen
détaillé, il a réalisé que les diverses aides
compensatoires seraient favorables à ses agriculteurs, qui travaillent
plutôt en secteur extensif (en lait ou en viande) et dont les structures
d'exploitations sont petites et familiales (et à faible rendement). En
outre, il voit d'un bon oeil la possibilité de moduler les aides en
fonction de critères environnementaux et de critères locaux (la
montagne par exemple). L'Autriche souhaite que les pertes de revenus
liées à la baisse des prix soient pleinement compensées,
et que les aides soient pérennisées afin qu'elles ne soient pas
remises en question par l'OMC. Les propositions de la Commission
présente également l'avantage de développer la politique
de l'espace rural qui constitue une priorité pour le Gouvernement.
L'Autriche souhaite néanmoins peser sur le Commissaire Fichler afin
d'orienter les propositions de la Commission vers un modèle agricole
Européen.
Les nouvelles propositions de la Commission ont ensuite entraîné
une réaction à nouveau très réservée de ce
pays. Le ministre autrichien a, en effet, demandé, au mois de mars
dernier, à la Commission d'adapter son projet pour parvenir à une
réforme " supportable ". M. Wilhelm Molterer, ministre de
l'agriculture, a récemment jugé
" incompréhensible " l'ampleur des baisses de prix
préconisées et a réclamé des compensations
intégrales.
Signalons qu'il est difficile au Gouvernement autrichien de s'opposer au projet
de M. Fischler, qui appartient à la majorité politique qui
dirige actuellement ce pays.
Dans l'ensemble, le " Präsidentenkonferenz der Landwirtschaftkammen
Osterreichs " (PLO) conduit une
analyse très critique
des
propositions de la Commission Européenne, considérant qu'elles
conduisent à une baisse du revenu des agriculteurs.
Même si le PLO indique partager avec la Commission Européenne
l'objectif essentiel d'assurer le revenu des agriculteurs et de leur famille,
il souligne en revanche la nécessité de considérer
davantage les agriculteurs comme des occupants et des aménageurs de
l'espace rural.
Il estime que les baisses de prix compensées par des aides directes,
dépendantes du budget communautaire, n'ont aucune raison d'être et
qu'elles ne résoudront pas les problèmes auxquels va être
confrontée l'Union Européenne.
Le PLO regrette que l'Union Européenne propose de baisser les prix
intérieurs pour les rapprocher du niveau des prix mondiaux, sans prendre
en compte le niveau de compétitivité des agriculteurs
Européens. En outre, il déplore que l'Union Européenne ne
se donne pas de marge de négociation en vue des discussions au sein de
l'OMC.
IL considère, de plus, que les baisses de prix proposées par la
Commission Européenne sont telles qu'une pleine compensation ne serait
pas supportable par le budget Européen. En parallèle, il fait
valoir qu'il n'est pas possible de demander aux agriculteurs de remplir des
objectifs croissants en matière d'environnement et de protection des
animaux et, dans le même temps, d'introduire le principe du plafonnement
des aides ou celui de l'instauration de nouvelles taxes sur la production, dans
le but de réduire les paiements compensatoires, d'autant que le PLO
craint que les compensations ne soient de plus en plus remises en question et
dénoncées comme subventions aux agriculteurs, augmentant ainsi
fortement la dépendance des exploitations.
En matière de modulation des aides, le PLO souhaite, avant de se
prononcer, attendre des propositions plus détaillées de la
Commission Européenne.
Enfin, le PLO estime qu'il n'y a aucune nécessité de changement
radical de la PAC, mais qu'il faut poursuivre le développement des
instruments actuels, simplifier les règlements et renforcer les liens
entre la politique de l'espace rural, l'agriculture et la forêt.