ANNEXE N° 1 -
EXAMEN EN COMMISSION
Au cours
de sa réunion du mardi 2 juin 1998, la commission a
procédé à l'examen du rapport d'information de MM.
Philippe François, Marcel Deneux et Jean-Paul Emorine, sur l'avenir
de la politique agricole commune.
M. Philippe François, Président, MM. Marcel Deneux et
Jean-Paul Emorine, rapporteurs, ont tout d'abord présenté les
conclusions de leur rapport. Puis un débat s'est instauré.
Après l'exposé, par le président et les rapporteurs, des
conclusions de la mission d'information,
M. Jean
François-Poncet, président,
s'est interrogé sur
l'évolution de l'équilibre entre l'offre et la demande de
denrées alimentaires.
M. Marcel Deneux, rapporteur,
a indiqué que, parallèlement
à cette évolution démographique incontestable,
l'augmentation du niveau de vie suscitait le développement d'une
" économie de gaspillage " en denrées alimentaires.
S'agissant de l'offre de produits agricoles,
M. Jean François-Poncet,
président,
a insisté sur l'importance de l'augmentation de la
productivité due au progrès scientifique, en particulier à
la génétique. Il a rappelé à cet égard le
rôle que pourrait jouer le développement des organismes
génétiquement modifiés.
Après avoir souscrit ces propos,
M. Marcel Deneux et M. Jean-Paul
Emorine, rapporteurs,
ont précisé que la mission avait
entendu le président de l'institut national de recherche agronomique
(INRA) et des représentants des industries du secteur de
l'agro-alimentaire. Ils ont ajouté que les perspectives, sur les
cinquante prochaines années, de l'évolution de la production,
établies par la FAO (Food and agriculture organisation) et
l'Organisation de la coopération et du développement
économique (OCDE) avaient été intégrées dans
le rapport de la mission d'information.
M. Dominique Braye
a souligné qu'il était en tout
état de cause très difficile de prévoir les
évolutions de l'offre et de la demande en matière alimentaire.
M. Jacques de Menou
a indiqué qu'il fallait tenir compte, de
l'augmentation de la production due à une meilleure mise en valeur des
surfaces agricoles aujourd'hui sous-exploitées, comme par exemple dans
les pays d'Europe centrale et orientale (PECO).
M. Jean Bizet
a précisé que l'augmentation prévue
de la population mondiale, ainsi que l'élévation des niveaux de
vie, entraîneraient une consommation accrue de protéines animales,
par rapport aux protéines végétales. Il a
considéré qu'en raison du volume supérieur de
protéines végétales nécessaire à la
production d'une quantité donnée de protéines animales, la
demande de productions végétales s'accroîtrait d'autant.
Par ailleurs, il a jugé que la meilleure préservation des
biotopes et de l'environnement était une condition indispensable de
l'acceptation des progrès scientifiques par le consommateur.
M. Hilaire Flandre
a souligné que les consommateurs acceptaient
de moins en moins certaines nouvelles techniques de production. Revenant sur le
bilan de la réforme de la PAC de 1992, il a indiqué que le
maintien des revenus agricoles s'était accompagné d'une baisse de
la population agricole et d'un agrandissement des exploitations, le niveau de
revenu à surface constante n'ayant pas été
préservé. Il a, en outre, jugé que la compensation des
baisses de prix, opérée par la réforme de 1992, n'avait
pas été réellement intégrale, la
référence de revenu retenue pour le calcul de cette compensation
étant globalement défavorable.
Au sujet des aides directes,
M. Hilaire Flandre
a
considéré qu'elles pouvaient avoir des effets néfastes,
tel que l'agrandissement des exploitations au détriment de l'occupation
de l'espace et de l'installation des jeunes. Dans le secteur de la viande
bovine, il a estimé que la prime à l'herbe favorisait
l'occupation de l'espace, qu'une prime indexée à l'unité
de gros bétail (UGB) favoriserait la production et qu'une prime
indexée au nombre d'actifs employés favoriserait le maintien du
nombre d'agriculteurs. Enfin, il a considéré qu'une
réforme de la politique agricole commune avant l'ouverture du cycle de
négociations multilatérales de l'organisation mondiale du
commerce revenait à " mettre la charrue avant les boeufs ".
M. Désiré Debavelaere
, considérant que la
réforme proposée de la politique agricole commune visait à
préparer l'Europe aux futures négociations internationales,
s'est
interrogé sur son but, redoutant qu'il s'agisse uniquement
de " copier " la politique agricole américaine. S'opposant
à une limitation de la production, il a ensuite souhaité que soit
clairement réaffirmée la nécessité d'une
conquête, par l'Europe, des marchés agricoles mondiaux. Citant
l'exemple du secteur betteravier, il a rappelé qu'à
l'époque où la production française n'était que de
40 millions de tonnes, un " plan de maîtrise " du secteur
avait été évoqué, alors que l'accroissement de la
capacité d'absorption du marché réalisé depuis lors
avait permis à la France de produire aujourd'hui 120 millions de
tonnes, dont une bonne partie était exportée.
M. Désiré Debavelaere
a donc jugé que la
vocation exportatrice de l'Europe devait être l'horizon de la politique
agricole commune.
M. Philippe François
a indiqué que le rapport de la
mission d'information prônait la conquête des marchés
extérieurs par les productions Européennes.
M. Jean François-Poncet, président
, a
considéré que le choix de la mission d'information qui
s'écartait le plus des propositions de la Commission Européenne
était la proposition d'une instauration d'un système de
" double quotas double prix" dans le secteur laitier. Evoquant les propos
tenus par M. Guy Legras, directeur général de l'agriculture
à la Commission Européenne, lors de son audition devant la
commission et la délégation à l'Union Européenne,
au sujet des quotas, le président a rappelé que la
généralisation d'un tel système risquait de conduire
à une répartition de la production entre les Etats membres telle
que chacun dispose d'un volume de production égal à sa
consommation, chaque pays étant incité à produire son
quota. Le président a, par ailleurs, déclaré partager
entièrement le choix d'un développement de la vocation
exportatrice Européenne, qui avait toujours été, a-t-il
précisé, l'orientation française.
M. Jean François-Poncet, président
, a, d'autre part,
regretté que la réforme de la PAC de 1992 ait fait supporter aux
contribuables un soutien à l'agriculture jusqu'alors financé par
le consommateur.
M. Hilaire Flandre
a, sur ce point, précisé que le
consommateur n'avait en fait que peu bénéficié de la
baisse des prix des produits agricoles.
M. Jean François-Poncet, président
, a rappelé la
conjoncture exceptionnelle dont avait bénéficié
l'agriculture depuis 1992, avec des prix mondiaux élevés, alors
que les primes Européennes avaient été instituées
en compensation de la baisse des prix garantis.
M. Marcel Deneux, rapporteur
, a précisé que le cours du
dollar durant cette période avait, en outre, accentué l'effet de
" surcompensation " décrit par le président.
M. Jean François-Poncet, président
, a rappelé le
succès de la réforme de 1992 en ce qui concerne le marché
Européen de l'alimentation animale, partiellement reconquis par les
céréales communautaires.
Répondant à
M. Gérard Braun
qui s'inquiétait
de cet aspect
,
M. Marcel Deneux, rapporteur,
a indiqué que
les propositions de la mission d'information réservaient une place
importante à l'agriculture de montagne.
M. Jacques de Menou
a insisté sur le rôle essentiel que
jouaient sur les marchés mondiaux les productions hors sol ainsi que le
secteur de l'aviculture. Il a rappelé que ces productions connaissaient
une croissance importante et représentaient, dans certaines
régions, une activité considérable.
M. Marcel Deneux, rapporteur,
a indiqué que l'importance de ces
productions au niveau mondial était évoquée dans le
rapport. Il a, en outre, précisé que ce secteur
bénéficierait de la baisse du prix des céréales.
M. Jean Bizet
a fait état du danger qu'impliquaient les
propositions de la commission en matière de subsidiarité. Il a
ensuite abordé le problème de la dépendance
protéique de l'Europe et s'est enquis de l'accueil reçu par les
différents Etats membres quant à la proposition de double-prix
double-quota en matière laitière.
M. Philippe François et M. Marcel Deneux, rapporteur,
ont admis
qu'une trop grande subsidiarité risquait en effet de conduire à
une " renationalisation " de la PAC et qu'il convenait d'être
attentif à ce danger. Ils ont ensuite rappelé les enjeux que
représentait le développement pour l'Europe des
oléo-protéagineux et ont fait état des avantages
procurés par le système du double prix double quota pour le lait.
M. Jean-Paul Emorine, rapporteur,
a souligné que 10 % de la
production de viande bovine était stocké chaque année. Il
a ensuite insisté sur le fait que 90 % de cette même
production était consommée en Europe. Il en a conclu que les
propositions de la commission risquaient de faire perdre à ce secteur
des débouchés sur les marchés tant Européens que
mondiaux. Il a ensuite précisé les modalités de mise en
oeuvre d'une prime unique à l'unité gros bétail.
M. Marcel Deneux, rapporteur
, a rappelé qu'actuellement
20.000 bovins étaient abattus chaque semaine en Angleterre, et
transformés en farines animales stockées, ensuite, dans des
entrepôts.
M. Jean Bizet
s'est interrogé sur le mode de reconstitution du
cheptel anglais.
En réponse,
M. Jean-Paul Emorine, rapporteur
, a indiqué
que ce renouvellement ne se faisait pas avec une nouvelle race bovine qui
aurait la faveur des consommateurs, mais avec les jeunes animaux, en principe
indemnes. De plus, évoquant le risque d'une délocalisation des
productions agricoles, il a insisté sur la nécessité de
lier les productions aux territoires.
M. Marcel Deneux, rapporteur,
s'est réjoui d'avoir
rencontré, dans la plupart des postes d'expansion économique
visités à l'étranger, outre d'excellents attachés
agricoles, des vétérinaires chargés du contrôle des
mesures sanitaires.
M. Jean François-Poncet, président
, a conclu la
réunion de la commission en remerciant les auteurs du rapport pour la
qualité de leurs travaux.
La commission a ensuite adopté les conclusions du rapport
d'information et décidé sa publication.