5. Budget
Proposition E 833
(*(
*
) )
(Réunion de la délégation du 24 juin 1997)
Présentation du texte par M. Denis
BADRÉ :
M. Denis Badré
rappelle tout d'abord les conditions dans
lesquelles la délégation s'est penchée, dans le cadre de
l'article 88-4 de la Constitution, depuis trois ans, sur le budget
européen.
En 1995, l'avant-projet de budget général des Communautés
européennes n'a pas été transmis au Parlement et la
délégation s'en est émue.
En 1996, le projet a bien été transmis, mais avec un retard trop
important pour que le Parlement puisse en débattre. La
délégation s'est alors prononcée sur la base d'une autre
proposition communautaire portant sur la révision des perspectives
financières communautaires. La délégation, suivie par la
commission des finances, a pris position contre le projet
présenté par la Commission européenne qui, à ses
yeux, ne reflète pas un souci suffisant de rigueur budgétaire et
le Sénat a adopté une résolution insistant sur la
nécessité de procéder au niveau européen avec la
même exigence d'économie qu'au niveau national, à un moment
où les Etats devront faire des économies budgétaires
drastiques pour répondre aux exigences de la monnaie unique.
Cet avis a été entendu par le Gouvernement qui s'est
prononcé dans ce sens au " Conseil Budget " de l'Union
européenne ; et le projet définitif pour 1997 a finalement
répondu à l'exigence de rigueur souhaitée par le
Sénat.
M. Denis Badré indique que l'avant projet de budget
général des Communautés européennes pour 1998 fera
l'objet d'une première lecture par le " Conseil Budget " le
24 juillet 1997 ; s'il est à présent difficile d'adopter une
résolution, en revanche le Sénat pourra encore donner son avis
lors de la prochaine discussion budgétaire à l'occasion de
l'examen de la contribution française au budget communautaire pour 1998,
telle qu'elle résultera des décisions du Conseil et du Parlement
européen.
M. Denis Badré, rapporteur, indique que l'avant-projet s'insère
très en deçà du plafond des perspectives
financières pluriannuelles valables jusqu'en 1999 et s'inscrit dans le
prolongement du budget pour 1997. Les crédits de paiement atteignent un
montant de 84,727 milliards d'écus contre 82,365 milliards
d'écus en 1997, soit une progression de près de 3 %. En
crédits d'engagement, le projet de budget progresse de 2,43 %
atteignant 94,744 milliards d'écus. Le rapporteur trouve cette
progression excessive et estime qu'un budget en croissance nulle est possible.
M. Denis Badré explique que la bonne référence est non pas
le budget proposé l'année précédente, mais le
budget réellement réalisé, qui est de 3 à
4 milliards d'écus inférieur aux prévisions. Or, on
peut être d'autant plus exigeant à l'égard du budget
communautaire que les contraintes qui pèsent sur lui sont plus faibles
que celles qui pèsent sur les budgets nationaux. D'abord parce que son
équilibre est automatiquement assuré par les contributions des
Etats ; ensuite parce qu'il n'est pas soumis à la charge de la dette et
que les dépenses de personnel y occupent une plus faible place.
L'augmentation des crédits du budget européen, alors même
que l'on constate et déplore des gaspillages, ne peut que renforcer les
critiques des adversaires de la construction européenne. Si on veut
faire plus d'Europe, il faut aussi faire moins de budget, ce qui permettra
d'éviter que les pays contributeurs nets comme l'Allemagne, la France,
l'Italie ou les Pays-Bas ne soient conduits, un jour ou l'autre, à se
révolter contre les pays qui profitent de ces gaspillages.
M. Denis Badré indique que, sur les 84,727 milliards d'écus
envisagés par la Commission, 40,937 milliards seront
consacrés à la politique agricole commune (PAC), en progression
de 0,45 % par rapport à 1997. Ces crédits pourront
être réduits car il existe des marges importantes du fait de la
diminuation de la différence entre les prix agricoles européens
et les prix mondiaux. Le rapporteur indique, à titre d'exemple, que les
conséquences budgétaires (environ 2,5 milliards
d'écus) de l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) ont pu
être entièrement financées dans le cadre de la PAC.
Les actions structurelles progressent de 6,30 % par rapport à 1997
et atteignent 33,461 milliards d'écus. Sur ce poste, M. Denis
Badré, rapporteur, exprime de vives réserves alors que se
prépare le prochain élargissement de l'Union européenne.
Il s'étonne notamment du fait que, dans ce domaine, l'Europe prône
le principe d'additionnalité. Les crédits qui devront être
préservés en priorité sont ceux qui, fortement
créateurs d'emplois, sont consacrés aux grands travaux
d'investissement (comme les ports, les aéroports ou les grandes voies de
communication). Ces investissements renforcent en outre l'unité
géographique de l'Europe.
La progression de 0,5 % des crédits des politiques internes (de
5,6 milliards d'écus en 1997 à 5,629 milliards
d'écus) est tellement symbolique qu'elle pourra être
limitée à 0 %, d'autant que l'examen détaillé
des politiques concernées (comme l'environnement ou la recherche) laisse
à penser que des économies importantes pourront être
réalisées sur la plupart des postes budgétaires.
Au regard des dépenses de fonctionnement, qui ne progressent que de
1,12 %, le rapporteur estime qu'il est inutile d'entrer dans une
polémique à ce sujet, malgré l'ampleur des crédits
en cause qui atteindront la somme de 4,331 milliards d'écus pour
les seuls services de la Commission européenne.
M. Michel Caldaguès
, rejoignant l'analyse du rapporteur, a
estimé qu'il serait en effet paradoxal que le budget communautaire
augmente plus vite que l'inflation alors que les critères de
convergence, qui sont imposés par le traité, obligent les Etats
à une politique de restriction budgétaire très rigoureuse
et que la contribution des Etats membres constitue un poste budgétaire
pour chacun d'entre eux.
M. Pierre Fauchon
a estimé, comme le rapporteur, que l'Europe se
fourvoyait trop souvent dans un saupoudrage des crédits des fonds
structurels, finançant des projets qui ne sont pas à
l'échelon d'une politique européenne, ni même parfois d'une
politique nationale, mais devraient relever d'actions locales ; il a
également interrogé le rapporteur sur le bien-fondé du
maintien du versement de compensations en matière de politique agricole
commune alors que les cours mondiaux se sont rapprochés des prix
européens.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
s'est interrogée, comme le
rapporteur et M. Pierre Fauchon, sur la dispersion des crédits des
fonds structurels, notamment au titre de l'objectif 2, ainsi que sur les
conditions de leur progression en cours de programmation pluriannuelle ; elle a
également souhaité que la délégation se penche sur
les conditions de répartition des crédits du fonds social
européen (FSE).
Mme Danièle Pourtaud
, partageant les préoccupations du
rapporteur au regard de la nécessaire maîtrise du budget
communautaire et de l'intérêt des crédits affectés
aux grands travaux européens, a interrogé M. Denis Badré
sur la possibilité, pour l'Union européenne, d'emprunter sur les
marchés financiers afin de financer de grands projets européens
d'investissement. Par ailleurs, Mme Danièle Pourtaud s'est
étonnée que l'on critique le principe d'additionnalité qui
s'applique constamment en France pour la coopération entre l'Etat et les
collectivités territoriales.
M. Christian de La Malène
a de son côté
approuvé le souci du rapporteur de réduire le budget
communautaire ; l'augmentation du budget ne pourrait être acceptable que
si la Commission proposait de mener des actions nouvelles et
supplémentaires par rapport à ce qu'elle fait actuellement ; il
n'est par conséquent pas satisfaisant de répondre à ses
demandes permanentes de saturation des marges budgétaires.
Répondant aux différents intervenants,
M. Denis
Badré
a insisté sur la nécessité d'imposer
à la Commission européenne une réduction des marges
budgétaires qu'elle demande, ce qui permettrait de diminuer d'autant le
déficit des budgets nationaux à un moment où les finances
publiques sont soumises à de fortes pressions pour rester dans les
limites des critères du traité.
Sur la question des fonds structurels, M. Denis Badré a insisté
sur l'importance du principe de subsidiarité et du choix entre
l'additionnalité et la subsidiarité. Il a souligné
l'importance des crédits inscrits au budget communautaire et non
dépensés dans le domaine des grands projets ; il a enfin
évoqué la nécessité de réfléchir
à la responsabilité qu'a chaque Etat en matière de
cohésion économique et sociale. Et, évoquant les
conséquences du prochain élargissement, il s'est demandé
si la France ne serait pas amenée reprendre à sa charge une
partie des actions budgétaires qui sont actuellement menées dans
le cadre européen.
Un débat s'est alors engagé sur les risques d'une
éventuelle remise en cause de l'attribution de fonds provenant de
l'Union européenne aux départements et territoires d'outre-mer
dans la perspective de l'élargissement de l'Union européenne.
M. Daniel Millaud
a rappelé que, pour le territoire de la
Polynésie française, les pertes de recettes douanières sur
les Etats de l'Union européenne correspondaient à près de
cinq fois les ressources reçues du fonds européen de
développement (FED).
M. Pierre Lagourgue
, quoique comprenant la réflexion d'ensemble
du rapporteur, a manifesté la crainte que les départements
d'outre-mer ne perdent le bénéfice des aides structurelles sans
que l'Etat français ne vienne compenser ces pertes de ressources. Il a
notamment donné l'exemple du fonds d'intervention pour les
départements d'outre-mer (FIDOM), dont la dotation a été
presque totalement supprimée en cinq ans. Il a ajouté que, l'Etat
n'ayant pas respecté son engagement de financement de sa part dans les
dépenses d'intervention, les collectivités locales et la
Communauté avaient été obligées de compenser cette
défection ; on peut ainsi craindre qu'un désengagement
européen ne soit pas réellement compensé par un
réengagement de l'Etat, auquel cas les départements d'outre-mer
seraient perdants.
M. Denis Badré
a souhaité que l'on engage, dès
à présent, une réflexion sérieuse sur cette
question afin que le Gouvernement et les départements d'outre-mer ne
soient pas pris de court par des évolutions qui sont loin d'être
hypothétiques.
Proposition E 910
Com(97) 343 final
(Procédure écrite du 24 septembre 1997)
Ce texte tend à
modifier le règlement
n° 1552/89 du Conseil
portant application de la décision 94/728
du Conseil relative au système des ressources propres des
Communautés.
Ces ressources propres, au moyen desquelles le budget communautaire est
financé, sont prélevées par les Etats membres, puis
rétrocédées ou transférées à la
Communauté. En conséquence, chaque Etat membre est tenu de
prendre toute mesure pour que la constatation, la comptabilisation, le
recouvrement et la mise à disposition de ces ressources soient
assurés dans les meilleures conditions.
La gestion du mécanisme de perception des ressources propres
présentant certaines faiblesses, la proposition E 910 tend à y
remédier sur deux points concernant, d'une part, les conditions de
constatation des ressources propres et, d'autre part, la procédure de
mise en non-valeur de celles-ci.
1 - Conditions de constatation des ressources propres
Les dispositions actuelles ne prévoient rien pour le cas où la
constatation des ressources propres est rendue impossible du fait d'une erreur
des autorités douanières de l'Etat membre chargé de les
constater. Il en est ainsi, par exemple, lorsque, à cause d'une erreur
de l'administration, la communication du montant des droits au redevable n'est
pas effectuée dans le délai de trois ans prévu à
cet effet par le Code des douanes communautaires.
La proposition E 910 tend à instaurer un nouveau dispositif
destiné à responsabiliser financièrement les Etats membres
à l'occasion de la mission de recouvrement des ressources propres qui
leur incombe.
Il consiste, pour les Etats membres, à procéder à une
inscription ad hoc dans la comptabilité des ressources propres, avec
dispense de communication au redevable des droits dont le montant ne peut
être recouvré du fait d'une erreur de l'autorité
douanière. L'Etat membre supporterait la responsabilité
financière des erreurs administratives portant sur un montant
supérieur à 2 000 Ecus en mettant à disposition de la
Communauté, au titre des ressources propres recouvrées, un
montant équivalent.
2 - Procédure de mise en non-valeur des ressources propres
La procédure de mise en non-valeur dispense les Etats membres de mettre
à disposition de la Commission les montants qui s'avèrent
irrécouvrables, soit pour des raisons de force majeure, soit pour des
raisons qui ne leur sont pas imputables.
Toutefois, dans un souci d'équité, la Commission est
informée des motifs du non-recouvrement afin d'apprécier la
diligence des Etats membres dans le recouvrement des créances.
La proposition E 910 propose d'apporter plusieurs modifications aux
dispositions en vigueur.
En particulier, il est envisagé d'ajouter une date butoir, pour
l'examen, par la Commission, des créances dont le recouvrement est
douteux, mais qui n'ont pas encore été formellement reconnues
comme irrécouvrables.
Par ailleurs, lorsque le montant des ressources propres en jeu
dépasserait 50 000 Ecus (au lieu de 10 000 Ecus actuellement), les Etats
membres devraient communiquer à la Commission les cas admis en
non-valeur ou non recouvrés dans les délais impartis, ainsi que
les motifs du non-recouvrement. Il appartiendrait alors à la Commission
d'apprécier si l'Etat a fait preuve d'une diligence suffisante pour
protéger les intérêts financiers de la Communauté.
Dans la négative, la Commission demanderait à l'Etat de mettre
à sa disposition le montant en cause.
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Ce texte devrait conduire les Etats membres à faire
preuve d'une plus grande rigueur dans le recouvrement des ressources propres
des Communautés puisqu'il introduit le principe d'une responsabilisation
financière.
Le Gouvernement y est favorable, même s'il souhaite que certains
aménagements rédactionnels lui soient apportés afin de
lever toute ambiguïté. Il souligne que les douanes
françaises font preuve de beaucoup de diligence dans le recouvrement des
ressources propres ce qui n'est pas toujours le cas de leurs homologues
européens.
La délégation a donc décidé de ne pas intervenir
sur la proposition E 910.