- SYNTHÈSE
- LISTE DES 14 RECOMMANDATIONS
- LISTE DES BONNES PRATIQUES
- AVANT-PROPOS
- I- L'ANCT EST PEU ET MAL CONNUE DES ÉLUS
LOCAUX, MÊME SI CERTAINS ONT SU S'EN SAISIR
- A. LES ÉLUS CONNAISSENT PEU L'ANCT ET SON
OFFRE DE SERVICES
- B. LES ÉLUS ONT UNE IMAGE INCERTAINE ET
BROUILLÉE DE L'ANCT ET DE SON OFFRE
- 1. Une difficulté d'identifier le statut de
l'Agence : agence nationale ou délégation territoriale ?
- 2. Une difficulté d'identifier les services
de l'État et le préfet comme délégation
territoriale de l'Agence
- 3. Une difficulté d'identifier la
cohérence de l'agence : un acteur intégré ou une
collection de labels ?
- 4. Une difficulté de saisir la nature de
l'agence : administration centrale ou boite à outils à
disposition des collectivités ?
- 5. Une difficulté à identifier la
spécificité de l'intervention de l'agence en matière
d'ingénierie, parmi celle d'autres acteurs publics et parapublics
- 6. La politique de la ville qui tend à
passer en arrière-plan ?
- 7. Des difficultés qui pèsent sur la
connaissance et l'accès à ses offres
- 8. Une perception floue symptomatique d'une
incarnation locale à géométrie variable
- 1. Une difficulté d'identifier le statut de
l'Agence : agence nationale ou délégation territoriale ?
- C. DES BÉNÉFICIAIRES CIRCONSCRITS
MAIS GLOBALEMENT SATISFAITS
- A. LES ÉLUS CONNAISSENT PEU L'ANCT ET SON
OFFRE DE SERVICES
- I. II. MALGRÉ DES APPORTS POSITIFS, LES
ÉLUS ONT UN JUGEMENT CRITIQUE DE L'ACTION DE L'ANCT
- A. DES APPORTS POSITIFS RECONNUS
- B. LES ÉLUS PORTENT UN JUGEMENT CRITIQUE DE
SON ACTION ET RÉAFFIRMENT LES ATTENTES FORTES AYANT
PRÉSIDÉ À SA CRÉATION
- 1. Une implication inégale et partielle en
matière d'ingénierie qui suscite des critiques
- a) Rappel des modalités de mise en oeuvre,
par l'ANCT, de sa mission de soutien à l'ingénierie
- b) Une intervention critiquée à
plusieurs titres
- (1) Une implication de l'ANCT à
géométrie variable dans le recensement et l'animation de
l'écosystème local
- (2) Une implication parfois superflue ou
perturbante
- (3) En cas de défaillance de
l'écosystème local, des interventions palliatives plutôt
qu'un renforcement de cet écosystème
- (4) Le financement de postes, modalité
appréciée, mais à la pérennité incertaine
- c) Un malentendu persistant entre les attentes des
élus et la réponse de l'État
- a) Rappel des modalités de mise en oeuvre,
par l'ANCT, de sa mission de soutien à l'ingénierie
- 2. Une approche encore trop descendante et peu
attentive aux dynamiques locales
- a) Respecter les dynamiques locales et venir les
appuyer
- b) Respecter le temps de l'appropriation des
collectivités
- c) Réaliser des choix en commun pour
créer de la cohésion
- d) Renouveler la contractualisation : les
CRTE à mi-chemin
- (1) Une philosophie saluée
- (2) Une réalisation critiquée
- (3) Un résultat questionné
- (4) Un devenir incertain
- e) Accompagner les dynamiques coopératives
plutôt qu'agir sur chaque strate de collectivité
- f) Trouver une articulation avec le niveau
régional
- a) Respecter les dynamiques locales et venir les
appuyer
- 3. Une simplification et un meilleur soutien aux
projets locaux qui n'a pas eu lieu
- a) L'espoir de simplification s'est
transformé en sentiment de complexification
- b) L'ANCT utilise et relaie les appels à
projet (AAP) au lieu de chercher à les diminuer
- c) Le guichet unique insuffisamment
opérationnel
- d) Le besoin de pluriannualité et de
fongibilité toujours insatisfait
- e) Le besoin non couvert de financements nouveaux
- a) L'espoir de simplification s'est
transformé en sentiment de complexification
- 1. Une implication inégale et partielle en
matière d'ingénierie qui suscite des critiques
- A. DES APPORTS POSITIFS RECONNUS
- I. III. PROPOSITIONS
- 1. Rapprocher l'agence des élus
locaux
- a) Organiser des temps d'échange avec les
élus locaux pour nourrir le débat national et aboutir à
une feuille de route 2023-2026
- (1) Des temps d'échanges avec les
élus locaux
- (2) Un débat au sein du Conseil
d'Administration de l'agence
- b) Accentuer la mobilisation du corps
préfectoral
- c) Doubler le nombre de chargés de mission
territoriaux de l'ANCT qui sont en lien avec les préfets et
sous-préfets
- d) Établir un lien avec les
Régions
- e) Refondre la communication
- a) Organiser des temps d'échange avec les
élus locaux pour nourrir le débat national et aboutir à
une feuille de route 2023-2026
- 2. Viser prioritairement le développement
de l'ingénierie des territoires
- a) En réalisant le recensement de
l'ingénierie locale
- b) En mettant en place un système de
recueil des demandes
- c) En organisant le dialogue entre acteurs locaux
- d) En solidifiant le maillage existant et en
veillant à son extension aux territoires désarmés
- (1) Soutenir financièrement
l'écosystème local
- (2) Doter les préfets, en lien avec la DDT,
de moyens financiers
- (3) Doter les préfets, en lien avec la DDT,
de moyens humains
- (4) Doter les préfets de capacités
de décision dans l'application des programmes, en lien avec la
DDT
- (5) Outiller l'ANCT en experts mobilisables sur
les territoires
- (6) Appeler à une couverture accrue du
territoire par des Agences Techniques Départementales et les CAUE
- (7) Mobiliser le tissu universitaire
- (8) Simplifier le recours à
l'ingénierie externe du marché national
- e) En promouvant les mutualisations
- f) En recherchant l'efficience
- (1) Une formalisation des partenariats
- (2) Une vision stratégique et collective de
l'évolution de l'ingénierie
- (3) Le pari d'une plus grande intégration
avec des acteurs locaux
- (4) La mise à disposition ponctuelle
- g) En renforçant la coordination avec ses 5
principaux partenaires
- a) En réalisant le recensement de
l'ingénierie locale
- 3. Consolider et simplifier l'existant
- c) Conforter les CRTE comme cadre de
référence du dialogue avec l'État
- d) Sortir de la vision en silo et mieux
intégrer les dynamiques territoriales
- e) Simplifier et prioriser l'existant
- f) Intensifier le dialogue interministériel
- g) Renforcer l'évaluation
- (1) Mesurer la satisfaction des programmes par les
élus locaux sur une base permettant l'étalonnage
- (2) Développer des évaluations
externes déconnectées des enjeux de promotion de l'agence par
elle même
- c) Conforter les CRTE comme cadre de
référence du dialogue avec l'État
- 1. Rapprocher l'agence des élus
locaux
- I- L'ANCT EST PEU ET MAL CONNUE DES ÉLUS
LOCAUX, MÊME SI CERTAINS ONT SU S'EN SAISIR
- EXAMEN EN DÉLÉGATION
- LISTE DES PERSONNES ENTENDUES LORS DE
DÉPLACEMENT
- · LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
AU SÉNAT
- LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES
REÇUES
- EXEMPLE DE CAHIER DES CLAUSES TECHNIQUES
PARTICULIÈRES D'UNE MISSION D'ANALYSE SUR LES OUTILS D'INGÉNIERIE
ET D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET PLAN STRATÉGIQUE
D'ÉVOLUTION DE CES OUTILS
N° 313
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023
Enregistré à la Présidence du Sénat le 2 février 2023
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation (1) relatif à l'ANCT,
Par Mme Céline BRULIN et M. Charles GUENÉ,
Sénatrice et Sénateur
(1) Cette délégation est composée de : Mme Françoise Gatel, présidente ; MM. Rémy Pointereau, Guy Benarroche, Mme Agnès Canayer, MM. Jean-Pierre Corbisez, Bernard Delcros, Mmes Corinne Féret, Michelle Gréaume, MM. Charles Guené, Éric Kerrouche, Antoine Lefèvre, Mme Patricia Schillinger, M. Pierre-Jean Verzelen, vice-présidents ; MM. François Bonhomme, Franck Montaugé, Cédric Vial, Jean Pierre Vogel, secrétaires ; Mmes Nadine Bellurot, Céline Brulin, MM. Bernard Buis, Laurent Burgoa, Thierry Cozic, Mmes Chantal Deseyne, Catherine Di Folco, MM. Thomas Dossus, Jérôme Durain, Mme Dominique Estrosi Sassone, MM. Fabien Genet, Hervé Gillé, Jean-Michel Houllegatte, Mmes Muriel Jourda, Sonia de La Provôté, Christine Lavarde, Anne-Catherine Loisier, MM. Pascal Martin, Hervé Maurey, Franck Menonville, Jean-Marie Mizzon, Philippe Mouiller, Olivier Paccaud, Philippe Pemezec, Didier Rambaud, Mme Sylvie Robert, MM. Jean-Yves Roux, Laurent Somon, Lucien Stanzione.
SYNTHÈSE
ANCT : SE METTRE AU DIAPASON DES ÉLUS LOCAUX !
De M Charles GUENÉ, Sénateur de la Haute-Marne (Les Républicains) et Mme Céline BRULIN, Sénatrice de Seine Maritime (communiste républicain citoyen et écologiste).
« Je veux un État facilitateur de vos projets, c'est précisément le rôle que je veux assigner à l'agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) » déclarait le Président de la République devant le congrès des maires de France le 24 novembre 2017. Trois ans après la création de cette agence au 1er janvier 2020, un nombre encore trop important d'élus locaux est toujours à la recherche de ce facilitateur. Le besoin d'ANCT sur les territoires reste prégnant.
1. L'ANCT EST PEU ET MAL CONNUE DES ELUS LOCAUX
A- Les élus locaux connaissent peu l'ANCT et son offre de services
À la question « connaissez-vous l'ANCT ? » plus de la moitié des élus (52 %) répondaient par la négative, lors d'une consultation des élus locaux sur la plateforme du Sénat, tandis que les trois quarts des répondants (74 %) reconnaissaient ne pas avoir fait appel à ses services. Ce déficit de notoriété a été confirmé par les auditions et déplacements, ainsi que par les associations d'élus. La tonalité est unanime : l'agence reste largement méconnue par les élus locaux, son image est floue et elle apparait éloignée du terrain. Enfin, les services déconcentrés de l'État, sollicités par la mission, estiment, malgré leurs propres efforts pour faire connaitre ses offres, qu'il existe des marges de progrès en la matière. Ainsi, l'évaluation, par les préfectures, de la connaissance qu'ont les élus de l'ANCT et de ses offres, n'est que de 5 sur 10.
B- les élus locaux peinent à comprendre son fonctionnement et ses dispositifs
Même lorsque l'existence de l'ANCT est connue, les élus locaux peinent à comprendre son organisation et à s'approprier ses dispositifs et son offre de services. Se cumulent les difficultés d'identifier :
- l'assise de l'agence : agence nationale ou délégation territoriale?
- les services de l'État et le préfet comme délégation territoriale de l'agence ;
- la cohérence de l'agence : un acteur intégré ou une collection de labels ?
- la nature de l'agence : administration centrale ou boite à outils à disposition des collectivités ?
- la spécificité de l'intervention de l'agence en matière d'ingénierie, parmi celle d'autres acteurs publics et parapublics comme l'Ademe, le Cerema, la Banque des Territoires...
L'absence de visibilité de l'agence n'est pas en soi un problème si les élus trouvent des solutions à leurs difficultés. Le problème est bien, à l'image du défaut de notoriété dont souffre l'agence, que ses «produits », ses offres et ses dispositifs sont peu ou mal connus et donc difficilement accessibles aux élus.
Les difficultés de perception analysées précédemment ne s'expliquent pas seulement du fait de la nouveauté de l'ANCT. Elles tiennent aussi au fonctionnement de l'agence aux niveaux local et central et aux interactions entre ces échelons. Pour les acteurs locaux, l'agence souffre d'un réel déficit d'incarnation par certains préfets et/ou certains services déconcentrés.
C- L'agence est connue de ses bénéficiaires
Les collectivités ayant bénéficié d'un dispositif ANCT appréhendent mieux l'agence et sont globalement satisfaites. Il s'agit surtout des collectivités dans un programme national : Petites Villes de Demain, Action Coeur de Ville, Territoires d'Industrie... Il s'agit aussi des collectivités ayant bénéficié d'un accompagnement sur mesure : 1 162 projets qui ont pu être soutenus au bénéfice de 494 communes, 594 EPCI et 74 collectivités d'autres strates. Lorsque l'ANCT est sollicitée, 95 % des réponses trouvent une solution d'accompagnement selon des modalités variables.
2. LES ELUS ONT UN JUGEMENT CRITIQUE DE L'ACTION DE L'AGENCE SUR 3 POINTS
Les élus auditionnés ont été majoritairement critiques sur l'action de l'ANCT, au-delà de certains témoignages positifs sur son intervention. Cette appréciation s'illustre dans les résultats du questionnaire adressé aux associations d'élus, qui reflètent un éventail assez large de perceptions de l'agence et de sa plus-value. Les qualifications négatives dominent (13 en rouge) suivies de qualifications positives (11 en vert) et neutres (7 en noir).
A- Une implication des préfets inégale et partielle en matière d'ingénierie et des modalités d'intervention de l'agence qui suscitent des critiques
Si, dans plusieurs départements, les services déconcentrés animent le dialogue entre les élus et l'ingénierie locale, c'est loin d'être une généralité. L'intervention de l'agence est parfois accusée de générer des effets contreproductifs lorsqu'elle se déroule en décalage avec les équilibres locaux ou en substitution de leurs acteurs. L'annonce de prestations d'ingénierie gratuites a, par exemple, entrainé une forte confusion chez les élus locaux et une forme de pénalisation des écosystèmes organisés. Le recours à une majorité de bureaux de consultants privés est parfois adapté, mais il ne contribue pas à renforcer l'écosystème local. Ces consultants ont tendance à livrer des prestations « copier-coller », sans ancrage dans le territoire et sans lendemain. Ces prestations n'équivalent pas à un accompagnement de proximité : « les cabinets extérieurs, on est à leur merci, ils disent ce qu'ils veulent » résume un maire.
B- Une approche encore trop descendante et peu attentive aux dynamiques locales
Le sentiment général des élus est que l'ANCT repose sur des logiques trop descendantes, quand bien même le discours est bien rôdé sur le « cousu main », l'attention aux projets des territoires et la promotion d'une logique de confiance plutôt que de contrôle. Les élus attendent que l'État respecte les dynamiques et les coopérations existantes, pour venir les appuyer, plutôt que d'en lancer de nouvelles. Ils voudraient aussi que ses interventions ne se déroulent pas à marche forcée comme l'ont été les Contrats de Relance et de Transition Écologique (CRTE) et une partie des programmes nationaux. Enfin, l'agence doit trouver une articulation avec le niveau régional qui est celui des grandes contractualisations en matière d'aménagement du territoire et de cohésion territoriale.
C- Une promesse de simplification et de meilleur soutien aux projets locaux non tenue
L'espoir de simplification s'est transformé en sentiment de complexification, de lourdeur et de bureaucratie sur les trois missions de l'agence : programmes, CRTE et accès à l'ingénierie. Comme le résume un maire : « On avait promis aux élus la simplification des démarches et, à ce stade, c'est une nouvelle strate un peu opaque qui s'est ajoutée. ». L'ANCT n'a pas contenu le recours aux appels à projets (AAP), son guichet unique est inégalement et insuffisamment opérationnel. De plus, les élus estiment qu'elle n'a pas apporté plus de soutien financier à leurs projets mais qu'elle recycle des financements existants.
3. LES PROPOSITIONS
A- Une première série de recommandations vise à rapprocher l'agence des élus locaux
L'ANCT ne pourra réussir qu'au niveau local, dans la proximité avec les élus. L'agence parisienne, tête de réseau, ne sera en capacité de donner sa pleine mesure qu'en étant en appui d'un réseau local efficace et reconnu, ce qui n'est pas encore le cas. Il convient donc de :
- Créer du dialogue direct avec des temps d'échange hors préfecture avec les élus locaux, sur des réalisations de l'agence par exemple.
- Utiliser ces échanges dans le débat État/Territoires à mener au sein du Conseil d'Administration de l'agence pour élaborer une feuille de route stratégique 2023-2026 qui fixera les grandes priorités de l'ANCT.
- Positionner par défaut le sous-préfet d'arrondissement comme interlocuteur de premier niveau sur les questions d'ingénierie : orientation, relai des offres, suivi des projets.
- Délivrer une instruction ministérielle aux préfets pour les remobiliser et les accompagner sur leurs missions de délégué territorial de l'agence.
- Doubler le nombre de « référents territoriaux » qui sont en lien avec préfets et sous-préfets.
- Engager un dialogue avec les conseils régionaux et les préfectures de régions pour intégrer le niveau régional dans le fonctionnement de l'agence d'ici à mi-2023.
- Privilégier une communication plus simple, plus sobre et déconcentrée, qui repose aussi sur le retour d'expérience des élus locaux et de leurs associations. Elle pourrait notamment prendre la forme d'un guide pratique pour les élus locaux.
B- Une deuxième série de recommandations porte sur l'accès des collectivités à cette ingénierie
Il est temps que l'agence opère un rééquilibrage entre ses missions. Les programmes nationaux sont bien installés et les efforts de l'agence doivent maintenant porter sur la principale attente des collectivités relative à l'ingénierie. Face aux enjeux de complexification de l'action publique, de densification de l'environnement réglementaire et technique, de transition environnementale et de resserrement des marges de manoeuvre financières, l'accès à l'ingénierie doit devenir une grande cause nationale.
- Étudier la mise en place d'un fonds national qui apporterait un soutien en ingénierie à toutes les collectivités demandeuses et qui serait financé par les dépenses d'investissement (financement à hauteur de 0,1% environ). C'est une recommandation qui découle d'une proposition réalisée par l'Association Nationale des Pôles territoriaux et des Pays - (ANPP) qui a reçue plus de 11 000 signatures d'élus et d'acteurs locaux.
- Terminer les recensements départementaux de l'ingénierie par les préfets.
- Sur les territoires où la dynamique d'animation et de structuration de l'ingénierie locale a fait défaut, encourager le préfet à l'impulser, notamment via les Comités Locaux de Cohésion des Territoires (CLCT) et leur déclinaison dans une instance technique (revue de projets) régulière.
- Prioriser les interventions qui permettent de structurer durablement l'ingénierie locale existante.
- Doter les préfets de moyens humains ou financiers de soutien à l'ingénierie.
- Développer une ingénierie propre à l'agence, facilement mobilisable sur le terrain.
- Accroitre la couverture du territoire en agences techniques départementales et en conseil d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement.
- Instituer un comité de direction régulier commun entre ANCT, ADEME et CEREMA pour réaliser et mettre en oeuvre une feuille de route stratégique partagée.
- Mettre en place une interface numérique pédagogique s'adressant aux élus pour les guider dans le « qui fait quoi » des acteurs publics et parapublics.
C- Enfin une troisième série de recommandations vise à consolider et simplifier l'existant
L'agence est aujourd'hui un empilement de programmes, de politiques publiques, de dispositifs, d'expérimentations, de labels... qui contribuent à nourrir la confusion des élus. Les élus réclament une pause pour bien intégrer l'existant et gagner en cohérence et en transversalité :
- Conforter l'outil des CRTE, notamment élargis à la dimension sociale, comme le cadre de référence de la mise en oeuvre des politiques publiques de l'État.
- Sortir de la vision en silo induite par des programmes spécialisés (petites villes, villes moyennes, villes de montagne...) pour mieux identifier les dynamiques locales de coopération entre ces catégories de collectivités, les valoriser, les soutenir et y inscrire les interventions de l'agence.
- Renforcer l'évaluation à travers un système simple de mesure de satisfaction (réponse aux attentes), pour les programmes nationaux et les dispositifs, et instituer un calendrier pluriannuel d'évaluations externes.
La philosophie sous-jacente à ces trois séries de recommandations est que l'État fasse plus confiance aux acteurs locaux : aux élus, aux collectivités et même à ses propres services déconcentrés.
LISTE DES 14 RECOMMANDATIONS
N° |
Recommandations |
Destinataire(s) de la recommandation |
Acteur(s) concerné(s) |
Calendrier prévisionnel |
Support / action |
1- RAPPROCHER l'AGENCE DES ELUS LOCAUX |
|||||
1 |
Échanger en direct avec les élus locaux sur le bilan et les perspectives de l'agence, pour nourrir le débat national État/territoires et élaborer une feuille de route stratégique 2023 -2026 de l'ANCT. |
Échanges en direct avec les élus locaux: ministère Cohésion des Territoires et ministère Intérieur (DGCL/DMAT) * Feuille de route : Président / Conseil d'Administration de l'ANCT |
Échanges en direct avec les élus locaux: Préfectures, (organisateurs) et ANCT Feuille de route : Direction de l'agence |
Échanges en direct avec les élus locaux: 1er semestre 2023 * Feuille de route : Finalisation à l'été 2023 |
Échanges en direct avec les élus locaux: Instruction ministérielle demandant l'organisation de rencontres organisées par les préfectures, avec la présence de représentants locaux et nationaux de l'Agence, ouvertes aux élus locaux (exécutifs) * Feuille de route 2023-2026 |
N° |
Recommandations |
Destinataire(s) |
Acteur(s) concerné(s) |
Calendrier prévisionnel |
Support / action |
2 |
Positionner le sous-préfet d'arrondissement comme interlocuteur de 1er niveau sur les questions d'ingénierie : orientation des élus et relai des offres. Remobiliser les préfets sur leur rôle de délégué territorial (formation, évaluation, instructions du ministère de la cohésion des territoires). |
Ministère Cohésion des Territoires et ministère Intérieur (DGCL/DMAT) |
DMAT, DGCL, ANCT, corps préfectoral |
Septembre 2023 au plus tard |
Instruction interministérielle : - mobilisation des sous-préfets - désignation d'un sous-préfet ingénierie - modalités de formation, évaluation, animation, du corps préfectoral |
3 |
Doubler le nombre de chargés de mission territoriaux de l'ANCT |
ministère Cohésion des Territoires (DGCL) |
ANCT |
Courant 2023 |
Préparation budgétaire ou redéploiements |
4 |
Engager un dialogue pour intégrer les Conseils Régionaux dans le fonctionnement de l'Agence |
ministère Cohésion des Territoires (DGCL et ANCT) |
Régions de France, Régions |
1er semestre 2023 |
Dialogue à mener à l'initiative de la DGCL. |
5 |
Privilégier une communication plus simple et déconcentrée, reposant sur le retour d'expérience des élus locaux et de leurs associations d'élus. |
Direction de l'ANCT |
Préfet en tant que délégué territorial de l'Agence, Associations d'élus locaux |
2023 |
Création d'un guide pratique pour les élus locaux Utiliser dans la communication de l'Agence des retours d'élus locaux et le relais des associations d'élus locaux |
N° |
Recommandations |
Destinataire(s) |
Acteur(s) concerné(s) |
Calendrier prévisionnel |
Support / action |
2- DEVELOPPER LES TERRITOIRES EN MATIERE D'INGENIERIE |
|||||
6 |
Étudier la proposition « 1% ou 0,1% ingénierie » envisagé comme un fonds national alimenté par les collectivités pour les collectivités |
Ministère Cohésion des Territoires (DGCL/ ANCT) |
Consultation de l'ANPP |
1er semestre 2023 |
Étude sur la proposition, présentation de scénarios chiffrés. |
7 |
Terminer les recensements départementaux de l'ingénierie |
Ministère Cohésion des Territoires (DGCL/DMAT) |
Délégués territoriaux de l'Agence ANCT et Services déconcentrés de l'État en lien avec les partenaires |
Fin 2023 |
Instruction ministérielle demandant qu'un catalogue en ligne soit mis en place dans toutes les préfectures, et diffusé à tous les élus et leurs collectivités.
|
8 |
Sur les territoires où la dynamique d'animation et de structuration de l'ingénierie locale a fait défaut, encourager le préfet à l'impulser, notamment via les Comités Locaux de Cohésion des Territoires (CLCT) et leur déclinaison dans une instance technique (revue de projets) régulière. |
Ministère Cohésion des Territoires (DGCL/DMAT) |
Délégués territoriaux de l'Agence Services déconcentrés de l'État et partenaires ANCT |
Permanent |
Instruction ministérielle de rappel des principes et diffusion des bonnes pratiques |
9 |
Doter le préfet de moyens humains et financiers en matière d'ingénierie et doter l'Agence d'une ingénierie propre mobilisable sur le terrain. |
Pour les préfets : DMAT Pour l'ANCT : DGCL |
ANCT Services déconcentrés de l'État |
courant 2023 |
Instruction ministérielle aux préfets sur les bonnes pratiques * Fonds dédié pour les préfets * Redéploiements internes à l'agence ou relèvement du plafond d'emplois via le Projet de Loi de Finances |
10 |
Instituer un comité de direction commun régulier entre ANCT, ADEME et CEREMA. |
Ministères de tutelle : Transition écologique (Cerema, Ademe), Enseignement supérieur et de la Recherche (Ademe), Cohésion des Territoires (ANCT, Cerema) |
Directions ANCT, CEREMA, ADEME |
1er semestre 2023 pour une feuille de route partagée à la rentrée 2023 |
Réalisation d'une feuille de route partagée notamment pour une meilleure coordination |
11 |
Créer une interface numérique pédagogique sur le « qui fait quoi » |
Direction ANCT |
CEREMA, ADEME, BdT, et aussi ANRU, ANAH |
Engager les travaux en 2023 |
Interface expérience utilisateur |
N° |
Recommandations |
Destinataire(s) |
Acteur(s) concerné(s) |
Calendrier prévisionnel |
Support / action |
3 - CONSOLIDER ET SIMPLIFIER L'EXISTANT |
|||||
12 |
Conforter l'outil CRTE, élargi notamment à la dimension sociale, comme cadre de référence de la mise en oeuvre des politiques publiques de l'État. |
Premier ministre ministère Cohésion des territoires |
Préfets |
2023 |
Avenant aux CRTE actuel |
13 |
Identifier et valoriser les dynamiques de coopération entre territoires. |
Direction ANCT |
Associations d'élus locaux |
2023 |
À définir par l'ANCT : recensement des initiatives, refonte de programmes nationaux, programme dédié, instructions dans les programmes nationaux... |
14 |
Mesurer le niveau de satisfaction des programmes nationaux et mener des évaluations externes des dispositifs. |
DGCL/direction ANCT |
1er semestre 2023 |
Grille de satisfaction à réaliser par l'ANCT commune aux programmes (baromètre annuel par exemple) * Calendrier d'évaluations externes à prioriser sur les programmes et missions de l'Agence |
LISTE DES BONNES PRATIQUES
N° |
Bonne pratique |
Destinataire(s) |
Acteur(s) concerné(s) |
Calendrier prévisionnel |
Support / action |
1 |
Accroitre la couverture du territoire en Agences Techniques Départementales et en Conseils d'architecture, d'Urbanisme et de l'Environnement |
Assemblée des départements de France, Présidents et DGS de Départements |
Courant 2023 |
Guide de création d'une agence technique départementale basée sur le retour d'expérience des Agences existantes. |
AVANT-PROPOS
Le Président de la République annonçait, à l'occasion de la Conférence nationale des territoires, organisée au Sénat le 17 juillet 2017, le principe d'une nouvelle agence pour les collectivités territoriales. L'intention était celle du « retour de l'État dans les territoires ». Il déclarait ainsi que l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) devait apporter un « appui, en particulier en ingénierie publique, indispensable dans le rural et dans les territoires les plus périphériques » dans une « logique de guichet unique et de simplification de projets pour les territoires ruraux et les villes moyennes en difficulté »
Le groupe Rassemblement démocratique et social européen (RDSE) déposa ensuite la proposition de loi portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires1(*) en s'inscrivant dans la continuité du travail sénatorial relatif aux enjeux de cohésion des territoires et dans le droit fil de l'annonce présidentielle. La loi n° 2019-753 du 22 juillet 2019 portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires, qui a été votée par les deux assemblées, traduisait l'ambition partagée de ce retour de l'État dans les territoires. Cependant, les débats soulevaient déjà une interrogation sous-jacente : l'ANCT aurait-elle les moyens de répondre aux attentes des élus locaux ?
Présentation de l'Agence Nationale de la Cohésion des Territoires (ANCT)
L'ANCT est créée le 1er janvier 2020, en application de la loi n°2019-753 du 22 juillet 2019. Issue de la fusion du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET), de l'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux (Epareca) et de l'Agence du numérique (ANUM), l'ANCT a pour mission le conseil et l'accompagnement des collectivités territoriales et leurs groupements dans leurs projets de développement. Dotée d'une équipe nationale, l'Agence s'appuie territorialement sur le maillage des délégués territoriaux c'est-à-dire des préfets de départements, et leurs services.
Conformément à L.1231-1 du Code général des collectivités territoriales (CGCT), l'Agence a pour domaine d'intervention « les territoires caractérisés par des contraintes géographiques, des difficultés en matière démographique, économique, sociale, environnementale ou d'accès aux service publics ».
Son conseil d'administration est composé de trente-trois membres avec voix délibératives et dix membres avec voix consultative : seize représentants de l'État, dix représentants des collectivités territoriales et leurs groupements dont au moins un élu représentant une collectivité d'outre-mer, deux députés et deux sénateurs, deux représentants du personnel, un représentant par opérateurs opérationnels.
L'ANCT accompagne les territoires dans leur démarche de projets, grâce à l'appui financier et technique des cinq partenaires opérationnels avec lesquels elle a conventionné : Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), Agence nationale de l'habitat (ANAH), Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA), Caisse des dépôts et consignations (CDC). L'évaluation de la mise en oeuvre opérationnelle des projets portés par l'ANCT et les cinq opérateurs est effectuée par le comité national de coordination.
En complément des comités nationaux, il existe deux instances locales. Le comité local de la cohésion des territoires (CLCT) réunit, à l'échelle départementale, les acteurs de l'ingénierie publique locale ainsi que des représentants des collectivités territoriales et des partenaires opérationnels afin d'identifier les ressources mobilisables en ingénierie et définir une stratégie d'intervention en cohérence avec les enjeux locaux. Le comité régional des financeurs (CRF) permet la coordination des acteurs locaux sur le plan financier. Les deux comités sont présidés par le préfet de département, en sa qualité de délégué territorial de l'agence.
Les missions de l'ANCT s'articulent autour de trois axes : la déclinaison des programmes nationaux pilotés par l'ANCT ; l'accompagnement à une démarche de projet de territoire, notamment via les contrats de relance et de transition écologique (CRTE) et enfin l'appui en ingénierie « sur mesure ».
Dotée d'un budget d'environ 60 millions d'euros pour 2022, l'action de l'agence est organisée en trois grands pôles : « territoire et ruralité » (qui regroupe notamment des programmes nationaux tels que Petites villes de demain et Frances Service) ; « politique de la ville » ; et « numérique », (qui regroupe notamment des programmes nationaux tels que France Mobile et France Très Haut Débit).
Du 4 octobre au 13 décembre 2022, vos rapporteurs ont entendu une centaine d'élus et de personnalités qualifiées dans le cadre d'auditions réalisées au Sénat ou en déplacement à Châlons-en-Champagne (Haute Marne) en octobre 2022. Nos travaux ont également intégré un questionnaire réalisé auprès des préfectures, ainsi que des éléments d'une consultation des élus locaux réalisée sur le site du Sénat.
Le présent rapport dresse un premier bilan de l'action de l'ANCT du point de vue des élus locaux avec une double problématique : perception et plus-value de l'Agence pour ces derniers.
En matière de perception, vos rapporteurs dressent tout d'abord le constat que l'ANCT reste peu connue des élus locaux. Pour ceux qui la connaissent, son rôle et ses dispositifs restent flous et difficilement accessibles. Sans surprise, ce sont ses bénéficiaires qui l'appréhendent le mieux (première partie).
En matière de plus-value, vos rapporteurs signalent des éléments positifs mais retiennent surtout que le sentiment général des élus est que l'Agence n'a pas atteint les attentes qui avaient présidé à sa création (deuxième partie).
Enfin, sur la base de ces constats, vos rapporteurs formulent 14 préconisations et une bonne pratique pour rapprocher l'agence des élus locaux, renforcer son rôle dans l'accompagnement des collectivités en matière d'ingénierie et simplifier, consolider et améliorer l'existant. (troisième partie).
Nous signalons enfin que ce rapport est présenté alors que l'Agence fête ses trois ans et renouvelle totalement sa gouvernance :
- Christophe Bouillon a été élu le 13 décembre 2022 à la présidence de l'ANCT par les membres du conseil d'administration. Il est Maire de Barentin (76) et président de l'Association des petites villes de France (APVF).
- Stanislas BOURRON a été nommé le 5 décembre 2022 directeur général de l'ANCT. Depuis 2016, il était directeur général des collectivités locales au ministère de l'Intérieur.
I- L'ANCT EST PEU ET MAL CONNUE DES ÉLUS LOCAUX, MÊME SI CERTAINS ONT SU S'EN SAISIR
« Je veux un État facilitateur de vos projets, c'est précisément le rôle que je veux assigner à l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) » déclarait le Président de la République devant le congrès des maires de France le 24 novembre 2017.
Trois ans après la création de cette Agence au 1er janvier 2020, un nombre encore trop important d'élus locaux est toujours à la recherche de ce facilitateur.
A. LES ÉLUS CONNAISSENT PEU L'ANCT ET SON OFFRE DE SERVICES
L'idée force qui ressort des échanges avec des élus de toutes strates, de plusieurs territoires et de sensibilités différentes, est que l'ANCT reste peu connue de ces derniers et tout particulièrement lorsqu'ils ne sont pas à la tête d'un exécutif. À titre d'exemple, certains élus ont découvert l'existence de l'ANCT du fait de l'audition prévue avec vos rapporteurs.
1. Une méconnaissance illustrée par la consultation des élus locaux sur la plateforme du Sénat
Une récente consultation des élus locaux inscrits sur la plateforme du Sénat apportait un ordre de grandeur de cette méconnaissance2(*). À la question « connaissez-vous l'ANCT ? » plus de la moitié des élus (52%) répondaient par la négative tandis que les trois quarts des répondants (74%) reconnaissaient ne pas avoir fait appel à ses services.
Source : consultation des élus locaux, plateforme du Sénat (1414 réponses)
2. Un déficit de notoriété confirmé dans le cadre de la mission
Dans le cadre de notre mission, un questionnaire a été diffusé aux associations d'élus locaux et certaines l'ont relayé auprès de leurs adhérents.
À titre d'exemple, la Fédération Nationale des Schémas de Cohésion Territoriale (FNSCoT) a signalé un taux de retour de ses membres anormalement bas comparativement à ceux habituellement enregistrés, malgré un délai long, une relance et une mobilisation spécifique du Club technique de la Fédération. Elle a donc relancé une consultation qui a mis en évidence que la plupart des élus n'avaient pas répondu car ils ne connaissaient pas l'ANCT.
Autre exemple, parmi les 30 retours d'élus recueillis par l'Association Nationale des Pôles d'équilibre territoriaux et ruraux et des Pays (ANPP), seuls deux identifient l'ANCT comme une structure de soutien pour les territoires. Les autres contributeurs n'y voient qu'une agence « très peu connue et éloignée des territoires ».
Les associations d'élus confirment ce constat dans leurs contributions écrites (voir encadré ci-dessous).
Contributions écrites des associations d'élus
« Elle n'est pas encore suffisamment identifiée par les communes et leurs groupements. » Association des Maires de France (AMF)
« De nombreux élus méconnaissent encore l'ANCT dans son rôle et ses missions. (...) La faible empreinte territoriale de l'ANCT est ce qui marque le plus les maires des petites villes. » Association des Petites Villes de France (APVF)
« L'Agence reste largement méconnue par les élus locaux. » Association Nationale des Pôles Territoriaux et des Pays (ANPP)
« Les élus locaux ne comprennent pas ou ne connaissent pas son rôle et son positionnement : elle semble être invisible surtout pour les plus petites collectivités et très éloignée. » Fédération Nationale des Scot (FNSCOT)
« La plupart des maires des villes moyennes n'ont pas une connaissance précise de l'Agence (...). En dehors du programme ACV, les collectivités territoriales connaissant encore assez mal l'ANCT. » Villes de France
« La perception est partagée entre fortes attentes et un certain déficit de lisibilité. » Fédération Nationale des Agences d'Urbanisme (FNAU)
« Pour de nombreux élus locaux, l'image de l'ANCT est floue. (...) Elle apparait comme éloignée du terrain. » Assemblée des Départements de France (ADF)
« La perception de l'ANCT par les élus régionaux n'est globalement pas très positive. (...) Elle est perçue comme une structure plutôt éloignée du terrain, laissant les agents de l'État territorial souvent seuls face à leurs responsabilités. » Région de France (RF)
3. Les services déconcentrés confirment la marge de progression
La mission, par l'entremise de la direction de la modernisation et de l'action territoriale du ministère de l'intérieur, a diffusé un questionnaire aux préfectures. La mission a eu un bon taux de retour avec 60% de réponses.
L'une des questions était libellée ainsi : « sur une échelle de 1 à 10, pensez-vous que les élus locaux sont au courant de la possibilité de solliciter les offres de l'ANCT et de ses partenaires (1 = pas du tout connu, 10 = connu de tous) ?
Les résultats mettent en évidence que, malgré leurs propres efforts, les services déconcentrés constatent que l'ANCT et ses offres restent moyennement connues.
ÉVALUATION, PAR LES PRÉFECTURES, DE LA CONNAISSANCE
QU'ONT LES ÉLUS DE L'ANCT ET DE SES OFFRES
Indicateur |
Note sur 10 |
Nombre de réponses |
Note moyenne |
5,7 |
s.o. |
Note médiane |
5,0 |
s.o. |
Plus mauvaise note |
3 |
3 fois |
Meilleure note |
8 |
5 fois |
Source : enquête auprès des préfectures
B. LES ÉLUS ONT UNE IMAGE INCERTAINE ET BROUILLÉE DE L'ANCT ET DE SON OFFRE
Globalement, même lorsque l'existence de l'ANCT est connue, les élus locaux peinent à comprendre son organisation et s'approprier ses dispositifs et son offre. Seuls les élus des plus grandes structures témoignent d'une compréhension relativement correcte du fonctionnement de l'ANCT, au niveau local et national. Ce flou se manifeste par de multiples approximations et confusions.
1. Une difficulté d'identifier le statut de l'Agence : agence nationale ou délégation territoriale ?
L'ANCT repose sur un fonctionnement déconcentré. Il s'appuie sur le préfet en tant que délégué territorial (DT) de l'Agence et les services déconcentrés de l'État placés sous son autorité. Ceux-ci ont donc vocation à être, au quotidien, les représentants naturels de l'ANCT auprès des élus.
Les équipes nationales de l'Agence, qu'elles soient dans les territoires au sein des services déconcentrés ou au siège parisien, n'interviennent au service des collectivités territoriales « que faute d'une offre locale suffisante en termes d'ingénierie ou en renfort sur la gestion de projets complexes ou multithématiques » comme l'explique son vade-mecum.
Comme le mentionne l'introduction de sa feuille de route du 17 juin 2020, le « succès de l'ANCT reposera ainsi sur sa capacité à fonctionner comme une `'équipe ANCT'' » entendue comme articulation du local et du national avec pour principe de fonctionnement la complémentarité et la subsidiarité.
Ce double niveau présente une première difficulté de compréhension pour les élus.
Il existe une assez large méconnaissance du fait que les services déconcentrés de l'État représentent l'Agence au plus près des territoires. De plus, le niveau national est lui, lorsqu'il est connu, perçu comme éloigné des territoires, relativement inaccessible et trop abstrait pour avoir un impact sur les besoins concrets opérationnels des collectivités. Dans l'ensemble, les élus peinent à exprimer ce que fait l'Agence au-delà des quelques programmes bien identifiés (voir point 3).
Ce point est aussi relevé par des acteurs nationaux qui estiment que l'ANCT est un opérateur plus institutionnel que territorial : « l'ANCT est très territorialisée si on considère que les préfets en sont les délégués territoriaux. Mais, quand on compte les apports réels ... il s'agit au final de moins de 10 ETP projetés sur le terrain et in fine rattachés tout de même au siège ».
Verbatim de maires
« Qui représente l'ANCT : on ne sait pas. »
« Nous avons écrit à l'ANCT qui nous a répondu de nous adresser à la DDT. Si c'est cela, ce n'est pas la peine d'avoir créé une agence».
« Il semble difficile de s'y retrouver au niveau des interlocuteurs entre le niveau national ou départemental ». FNSCoT
2. Une difficulté d'identifier les services de l'État et le préfet comme délégation territoriale de l'Agence
Le travail avec les services déconcentrés de l'État est rarement identifié par les élus comme un échange sur les offres ou dispositifs de l'ANCT. De nombreux élus n'associent pas encore le rôle de préfet à celui de délégué territorial de l'Agence. Il est peu sollicité à ce titre.
Les missions portées par l'Agence sont assimilées à des missions des services de l'État. La contractualisation est par exemple perçue comme engageant l'État, via son préfet, mais sans référence à l'ANCT.
Pour l'assister opérationnellement dans cette mission, le préfet a la possibilité de nommer des délégués territoriaux adjoints (DTA) de l'Agence.
QUI SONT LES DÉLÉGUES TERRITORIAUX ADJOINTS ?
Fonction |
Nombre |
Direction Départementale des Territoires (et de la Mer) |
87 |
Secrétaire Général de préfecture |
46 |
Sous-préfet d'arrondissement |
23 |
Direction départementale de l'emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations |
4 |
Préfet délégué à l'égalité des chances |
4 |
Autre |
5 |
Source : Anct (octobre 2022), traitement Sénat
Verbatim de maires
« Est-ce que les techniciens de la Direction Départementale des Territoires (DDT) travaillent dans le cadre de l'ANCT quand ils nous accompagnent ? Je n'en sais rien. »
« Il y a ambiguïté sur ce que fait l'État en soi, l'État en tant qu'ANCT, ce que font les autres avec le soutien de l'ANCT. »
« Personnellement on n'osera jamais déranger le préfet. On aimerait bien connaitre vers qui se tourner lorsqu'on se pose des questions sur l'ANCT ».
« On observe beaucoup de confusion sur les nouveaux rôles exercés par les préfectures (relance, ANCT, déclinaison locale de l'agenda rural) ». AMF
3. Une difficulté d'identifier la cohérence de l'agence : un acteur intégré ou une collection de labels ?
Les élus identifient bien quelques-uns des programmes ou des « produits » de l'ANCT : le duo « Action Coeur de Ville (ACV) » et « Petites Villes de Demain » (PVD), les « Maisons France service » et les « Territoires d'Industrie » sont les plus couramment cités.
Mais ils sont perçus comme une action de l'État, en ignorant bien souvent que ces dispositifs sont portés par l'ANCT.
De plus, les labels et les programmes propres à l'ANCT se croisent, s'empilent et se confondent avec d'autres qui ne sont pas portés par l'agence à l'image de « France relance », « France rénovation » ou encore « France Tiers Lieux ».
A ces programmes, s'ajoutent la gestion d'un marché à bon de commande pour des missions de conseil en ingénierie, la gestion de la politique de la ville et des missions d'observatoire, donnant un tout difficile à saisir.
Il en résulte chez les élus, un sentiment de profusion d'initiatives, de labels, de dispositifs qui alimentent l'image floue de l'agence.
Verbatim de maires
« À notre échelle il n'y a ni connaissance, ni visibilité des dispositifs : on est perdu dans les couches des programmes ACV, PVD, France Service, qui fait quoi, qui finance quoi, a qui doit on s'adresser ? »
« La multiplication des programmes, dispositifs ou labels nationaux empêche d'en dégager une cohérence d'ensemble ».
« En dehors des programmes, on est incapable de comprendre la ligne directrice ».
4. Une difficulté de saisir la nature de l'agence : administration centrale ou boite à outils à disposition des collectivités ?
L'intention du législateur lors de la loi portant création de l'agence était double : d'un côté, le respect par l'ANCT d'une dynamique « ascendante » avec l'accompagnement des projets émergents des territoires ; de l'autre, une logique « descendante » de pilotage par l'ANCT de programmes nationaux à décliner aux niveaux territoriaux.
Pourtant, il semble que cet équilibre ne se retrouve pas dans les perceptions des élus locaux.
En effet, l'ANCT est plutôt vue comme une administration centrale relai de l'État mettant en oeuvre une ambition gouvernementale. C'est le cas des programmes bénéficiant d'une communication soutenue, mais aussi d'autres actions comme la feuille de route ruralité qui est une ambition politique nationale déclinée dans les territoires.
Une partie des élus reconnait tout de même le rôle de facilitateur, d'incubateur, d'expérimentateur, « d'agitateur d'idées », d'accélérateur d'apprentissages. Mais ils considèrent que ces rôles sont un peu en retrait.
Verbatim de maires
« L'ANCT ce sont des programmes de l'État qui déroule sa logique. »
« L'ANCT nous semble d'abord être un lieu de portage de différents programmes qui s'adressent avant tout à des strates très ciblées : villes moyennes, petites villes, territoires de montagne... »
« Au niveau national : l'ANCT balance entre piloter des programmes nationaux ; produire des réflexions ; gérer des crédits spécifiques politique de la ville ; proposer une offre d'ingénierie... l'identité de l'ANCT reste floue, pas assez affirmée ».
5. Une difficulté à identifier la spécificité de l'intervention de l'agence en matière d'ingénierie, parmi celle d'autres acteurs publics et parapublics
Le vade-mecum ANCT rappelle que l'agence « facilite l'accès des porteurs de projets aux différentes formes, publiques ou privées, d'ingénierie stratégique, juridique, financière et technique, qu'elle recense localement ou met à disposition via ses partenaires opérateurs ou ses propres marchés d'ingénierie. Elle apporte un concours humain et financier aux collectivités territoriales et à leurs groupements. »
L'intervention de l'ANCT s'inscrit dans un paysage où il existe de nombreux acteurs publics aux niveaux local et national. En effet, de grandes agences proposent des solutions d'accompagnement aux collectivités : la Banque des territoires consacre environ 150 millions d'euros par an à l'appui de l'ingénierie publique locale ; le CEREMA propose plusieurs offres dont des mises à disposition gratuites d'experts ; l'ADEME accompagne les collectivités dans leur transition avec divers outils comme des formations ou des fiches actions à destination des élus ...
Le rapport « France territoires : un engagement au service des dynamiques territoriales » de juin 2018, confié par le Premier ministre au préfet Serge Morvan, commissaire général à l'égalité des territoires, était destiné à préfigurer ce que pourrait être l'ANCT. Sur la question du périmètre institutionnel, ce rapport proposait que l'ANCT résulte de la fusion du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) avec l'Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (ANRU), l'Agence Nationale de l'Habitat (ANAH), l'Agence du numérique et l'Établissement public de restructuration et d'aménagement des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA), l'Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Énergie (ADEME), le Centre d'Études et d'expertise sur les Risques, l'Environnement, la Mobilité et l'Aménagement (CEREMA), Atout France, Business France, l'Agence française de développement (AFD) et même des acteurs de production d'études territoriales (pôle développement de France stratégie, Agence des villes et territoires méditerranéens durables, etc.).
Le choix initial opéré lors de la mise en place de l'ANCT a été de fusionner le CGET, l'EPARECA et l'Agence du numérique et de maintenir les autres opérateurs de l'expertise territoriale de l'État. La loi du 22 juillet 2019 a souhaité que l'agence travaille étroitement avec cinq opérateurs partenaires (ANRU, ANAH, ADEME, Banque des Territoires et CEREMA) pour la mise en oeuvre de ses missions. Cela se traduit par 5 conventions-cadres qui fixent ces modalités de coopération. Chaque mois, les 6 opérateurs se réunissent au sein du comité national de coordination pour suivre les programmes et chantiers communs, menés dans les territoires.
Dans ce paysage institutionnel, chaque opérateur obéit à des logiques propres (dispositifs, calendriers, procédures...). Ce foisonnement soulève des difficultés du point de vue du parcours utilisateur. Il n'est pas simple pour un élu - et parfois même les opérateurs eux-mêmes - de comprendre qui fait quoi ? Qui apporte quel type d'aide ? Quelle est la cohérence des offres de chacun ? Quel est le mode d'accès à ces structures ?
L'ANCT a vocation, sur le territoire, à être le guichet unique qui permet de rediriger certaines demandes vers des opérateurs partenaires (notamment le CEREMA). Mais, en réalité, ces acteurs disposent de directions régionales, et donc d'interlocuteurs de proximité, qui sont en lien direct avec les collectivités. Les demandes qui leur sont adressées ont généralement leur circuit propre sans passer par le délégué territorial de l'ANCT. On peut imaginer que la récente réforme du CEREMA3(*) va accentuer cette tendance pour cet opérateur, quand bien même le préfet devient le délégué territorial de l'agence.
ACTEURS DE L'INGÉNIERIE
ET POSITIONNEMENT PAR RAPPORT AUX BESOINS DES COLLECTIVITÉS
Source : Anct
Il en résulte une multiplication des circuits et des offres difficilement lisible pour les principaux concernés : les élus et leurs administrations. Le système crée également de la complexité. À titre d'exemple, un interlocuteur nous a signalé qu'en 2022 « il faut passer par 8 étapes - et presque autant de mois - pour espérer voir aboutir un accompagnement d'un projet de collectivité via une convention d'appui opérationnel » c'est-à-dire via le modèle contractuel d'accompagnement des projets « ANCT » par le Cerema.
Verbatim de maires et contribution écrite
« Il faut rendre les choses plus lisibles pour l'utilisateur. »
« Pour ACV chaque partenaire dit « c'est mon action » et l'ANCT dit que c'est une action ANCT. Les élus ne savent plus trop de qui c'est l'action »
« L'ingénierie soutenue par l'ANCT est en général mal articulée avec celle apportée par les régions ou départements. L'ingénierie apportée par la CDC suit également des logiques propres. » FNAU
6. La politique de la ville qui tend à passer en arrière-plan ?
Un autre élément qui marque la perception des élus sur l'agence est une forme de mise à l'arrière-plan de la politique de la ville. Quand les élus pensent ANCT, ils pensent rarement politique de la ville. Le fait d'avoir intégré cette politique publique à l'agence semble l'avoir fait un peu disparaitre derrière des programmes nationaux qui captent toute la lumière : Petites Villes de Demain, Action Coeur de Ville... Peu d'élus, même si leur collectivité était concernée par un Quartier Prioritaire Politique de la ville (QPV) ont évoqué son intervention.
Pourtant la politique de la ville représente un quart des effectifs de l'agence (92 ETP sur 345) et une partie importante de ses financements.
Certains observateurs nationaux estiment que la politique de la ville a quelque peu disparu dans ce nouvel ensemble administratif et pointent les risques d'une comparaison, voire d'une concurrence, entre la politique destinée aux quartiers prioritaires de la politique de la ville et les dispositifs de soutien à la ruralité. Il a été noté de plusieurs sources que les discussions en Conseil d'Administration de l'ANCT concernaient rarement les enjeux de politique de la ville.
Verbatim de maire
« On a des relations avec l'ANRU mais le lien avec l'ANCT est inexistant ; pour les cités éducatives je ne sais pas qui est l'interlocuteur par exemple »
« L'ANCT c'est un ANRU canada-dry pour la politique de la ville ».
7. Des difficultés qui pèsent sur la connaissance et l'accès à ses offres
L'absence de visibilité de l'agence n'est pas en soi un problème si les élus trouvent des solutions à leurs difficultés. Il n'y a aucun intérêt à promouvoir une structure ou un label pour lui-même et par principe.
L'Inspection Générale de l'Administration estimait ainsi , dans son rapport de janvier 2022 intitulé « L'ANCT : l'État déconcentré au service de la cohésion des territoires »4(*), que cette absence peut être vue « comme un facteur de simplification de l'action publique locale, préservant le préfet comme seul interlocuteur des collectivités territoriales ». Elle peut aussi être interprétée comme un fonctionnement efficace du principe de subsidiarité : l'agence n'a pas vocation à intervenir lorsque localement des solutions préexistent. Si elle n'est parfois pas connue, ce serait parce qu'elle n'a pas vocation à l'être dans les territoires dont l'écosystème fonctionne bien. Si ces interprétations sont probablement pertinentes sur certains contextes locaux, elles ne peuvent être généralisées.
Le problème est bien, à l'image du défaut de notoriété dont souffre l'agence, que ses « produits », ses offres et ses dispositifs sont peu ou mal connus et difficilement accessibles.
Les élus partagent le sentiment que peu d'informations leur parviennent sur cette offre. Ils signalent qu'il est difficile de comprendre la cohérence des dispositifs et d'identifier ce que peut leur apporter l'ANCT.
Verbatim de maires et contributions écrites
« En préparant cette audition, j'ai découvert que l'ANCT fournissait des prestations d'ingénierie gratuites pour les communes de moins de 3500 habitants ! ». Un maire
« Il n'y a pas eu d'information relative à l'offre de l'ANCT dans notre département. » Un maire
« Les élus n'identifient pas toujours l'aide que peuvent leur apporter les services de l'État en la matière ». AMF
« Au niveau local : l'ANCT n'est pas lisible. Le lien entre préoccupations locales, demandes d'appui de la part des collectivités locales et l'agence ne fonctionne pas. Résultat : les élus locaux ne comprennent pas le rôle, l'intérêt, la plus-value de cette agence ». Intercommunalité de France
8. Une perception floue symptomatique d'une incarnation locale à géométrie variable
Les difficultés de perception analysées précédemment ne s'expliquent pas seulement du fait de la nouveauté de l'ANCT. Elles tiennent aussi au fonctionnement de l'agence en local et en central et aux interactions entre ces deux niveaux.
Pour les acteurs locaux, il existe un réel déficit d'incarnation de l'ANCT par certains préfets et/ou certains services déconcentrés.
Certains territoires demeurent en retrait des attentes et des missions qui leur sont confiées. Certains préfets se sont contentés de présenter l'agence au moment de sa création, comme un exercice imposé, sans plus investir le sujet.
Contributions écrites d'associations d'élus
« Les élus des Petites Villes font part d'un investissement très hétérogène des préfets selon les territoires. » APVF
« L'hétérogénéité entre les départements dans le portage de l'offre de l'ANCT tient beaucoup, semble-t-il, dans les capacités de développeurs territoriaux ou de simples gestionnaires du préfet. La connaissance par les préfets de l'offre de l'ANCT est une chose. Se l'approprier et développer leur propre vision territoriale en est une autre ». ADF
« Les réunions de lancement ou de suivi ont été bien souvent des séquences très descendantes, sans débat, sans décision et sans véritable valeur ajoutée ». RF
L'État déconcentré peut aussi « faire de l'ANCT sans le dire » selon les mots d'un secrétaire général de préfecture. Ils ne mettent pas forcément en avant le label ANCT. « Communiquer ANCT » n'est pas identifié comme un enjeu au niveau local. C'est même l'inverse qui se produit parfois, avec le niveau local qui rappelle que l'ANCT doit communiquer avec les symboles de l'État5(*).
Le questionnaire de la mission adressé aux préfectures comportait une question relative aux actions entreprises par la préfecture pour faire connaître les offres de l'ANCT. L'analyse des réponses reçues révèle une grande diversité de pratiques, avec plus de 20 modalités de communication différentes citées. Certains territoires6(*) ont fait l'effort de présenter l'offre de l'agence en construisant des documents ad hoc de communication : lettre d'information, brochure, information par mail ou courrier ou circulaire ... Mais ces préfectures sont assez minoritaires. L'essentiel de la communication passe par des réunions de travail, dont les CLCT (deux réunions par an grand maximum...) et par des rencontres lors de forum ou d'évènement. Il semble que la communication sur les offres de l'agence ne soit pas très formalisée.
ACTIONS DE LA PRÉFECTURE POUR FAIRE CONNAITRE LES OFFRES DE L'ANCT
Actions entreprises par la préfecture pour faire connaitre l'offre de l'ANCT |
Cité ... fois |
% sur l'échantillon |
Réunions de travail dont CLCT |
55 |
35,7% |
Forums, évènements, rencontres |
32 |
20,8% |
Documentation (brochure, plaquette, flyer ...) |
20 |
13,0% |
Site internet |
15 |
9,7% |
Circulaire ou courrier du préfet |
11 |
7,1% |
Lettre d'information régulière |
7 |
4,5% |
mail et réseaux sociaux |
6 |
3,9% |
Réseau professionnel |
6 |
3,9% |
visites de terrain |
2 |
1,3% |
Source : Enquête Sénat sur les préfectures
Ce défaut d'incarnation se traduit logiquement par un déficit d'animation sur certains territoires. Ceux-ci essayent de communiquer régulièrement, notamment via une lettre d'information ANCT. Cependant, globalement, les démarches proactives et constantes dans le temps restent rares. Certains élus soulignent le manque de transmission directe d'informations ou à intervalles trop irréguliers. Ils regrettent qu'il leur incombe d'aller chercher l'information disponible.
Par ailleurs, plusieurs témoignages relatent que le travail en transversal dans les territoires entre les services de la préfecture et les DDT n'est pas toujours fluide et parfois, le cloisonnement et les logiques de pré carré conduisent à rendre impossible toute tentative de faire exister l'ANCT dans le département.
Trois témoignages opposés de DDT
« L'ANCT c'est nous ! Cela nous donne une légitimité complémentaire dans notre rôle d'accompagnement des élus. »
« Sur le papier, le DDT est délégué territorial adjoint. En réalité ce n'est pas cela. L'animation est atone, on découvre les dossiers au dernier moment et la plupart ne nous sont pas confiés ».
« Nous DDT, nous arrivons en bout de course, sans information sur les dossiers, nous n'avons la main sur rien. Nous avons proposé de faire l'inventaire de l'ingénierie locale, les services du préfet ont refusé ».
Enfin, les circuits d'information ne sont pas toujours optimaux entre le local et le central. D'un côté, les services centraux de l'ANCT constatent que certains territoires ne font rien remonter. De l'autre, les services déconcentrés regrettent de ne pas être suffisamment associés ou informés de dispositifs qu'ils doivent ensuite porter au plus près des élus. Il nous a été remonté des situations où les préfectures précisent qu'elles ne possèdent pas toutes les informations en amont pour pouvoir éclairer les élus locaux.
C. DES BÉNÉFICIAIRES CIRCONSCRITS MAIS GLOBALEMENT SATISFAITS
La mise en place de l'agence et le déploiement de son action ont ouvert plusieurs opportunités aux acteurs locaux et certains élus ont bénéficié de ses dispositifs. C'est essentiellement le cas des territoires retenus dans le cadre d'un programme, que les élus aient été proactifs pour l'intégrer ou bien désignés pour en bénéficier. Le fait d'être doté d'un chef de projet est aussi un bon moyen de faire le lien avec les ressources de l'agence. Les collectivités hors programme peuvent être orientées vers l'offre d'ingénierie sur mesure. Plus globalement, les élus peuvent bénéficier d'un accompagnement de l'État, composé de plusieurs briques, dont certaines relaient des possibilités offertes par l'agence.
Verbatim DDT
« Les 15 communes, sur plus de 300, du département qui ont reçues une aide de l'ANCT ou sont dans un programme de l'ANCT connaissent l'agence et sont satisfaites ».
1. Les élus bénéficiaires des programmes nationaux expriment généralement leur satisfaction
Globalement, il ressort des auditions que les programmes jouent un rôle de catalyseur de la connaissance ANCT.
Le programme ACV affiche par exemple des taux de satisfaction des élus importants. Dans une consultation auprès des élus des villes ACV7(*), l'ANCT avance des chiffres flatteurs : 91 % des élus se déclarent satisfaits du programme, dont 26 % très satisfaits ; 95 % estiment que les axes du programme sont cohérents avec les réalités du territoire ; 83 % déclarent que les partenaires financeurs ont été des facilitateurs dans le déploiement du programme, 66 % des élus estiment que le programme a atteint ses objectifs initiaux alors que cette consultation date seulement de début 2022. L'ANCT signale par ailleurs « de nombreuses interventions des maires de toutes tendances politiques se félicitant d'une nouvelle méthode publique d'action qui leur fait confiance ». Pour PVD, le constat sur la méthode et les ambitions est aussi positif : « Globalement, les élus des petites villes tirent un bilan positif du programme.8(*) »
Même pour ces deux programmes, l'essentiel des critiques qui leur sont relatives vise en réalité bien plus leur renforcement que leur remise en cause. Pour les villes ACV et PVD, c'est une demande de « plus de programme » qui s'exprime : plus de financements, plus de souplesse, plus de lisibilité, etc. Pour les villes non retenues, la critique révèle surtout une envie d'intégrer l'un des programmes, comme le relaie l'APVF : « de nombreuses communes, petites villes centres ou n'exerçant pas de fonction de centralité, ne se retrouvent dans aucun dispositif et ont le sentiment d'être laissées pour compte ».
Les programmes ne sont pas exempts de critiques, notamment sur les aspects financiers. Néanmoins, ils exercent une forme d'attraction vers les collectivités qui n'en sont pas partie prenante. À titre d'exemple, l'AMRF porte la proposition de créer un programme « Villages d'avenir pour booster les maires développeurs », ouvert à toutes les communes rurales, qui serait une forme de duplication du programme PVD à l'échelle de plus petites communes.
Cette démonstration sur ACV et PVD est tout aussi valable sur les autres programmes. France Urbaine regrette par exemple que « métropoles et grandes agglomérations sont absentes du dispositif Territoires d'Industrie, alors qu'elles accueillent et soutiennent 50 % de l'emploi industriel français ».
En résumé, malgré les critiques qu'ils suscitent, les programmes constituent plutôt pour les élus des modèles à étendre ou dupliquer sur d'autres strates.
2. Des prestations d'ingénierie sur mesure appréciées par les élus à de rares exceptions
Concernant cet accompagnement sur mesure, ce sont 1 162 projets qui ont pu être soutenus au bénéfice de 494 communes, 594 EPCI et 74 collectivités d'autres strates9(*). Malgré la méconnaissance de l'agence, les circuits qui permettent de faire remonter et financer les demandes fonctionnent.
NATURE DE L'ACCOMPAGNEMENT DE L'ANCT
Nature |
Nombre |
% |
Mise à disposition d'un prestataire externe |
538 |
47% |
Expertise d'un opérateur partenaire de l'ANCT |
340 |
30% |
Subvention directe |
212 |
19% |
Expertise interne ANCT |
50 |
4% |
Source : ANCT
Les sollicitations des collectivités sont naturellement en croissance depuis 2020. De même, les champs sur lesquels l'ANCT est saisie se diversifient. Ils étaient concentrés sur la revitalisation commerciale en 2020. La thématique principale des saisines en 2021 portait sur l'accompagnement à l'élaboration de projet de territoire. En 2022, d'autres sujets ont émergé tels que la mobilité, l'accessibilité, la transformation de friches ou le tourisme.
L'ANCT vérifie la satisfaction des collectivités avant la mise en paiement des prestataires. Cette étape permet de déceler, si cela n'avait pas été le cas avant, d'éventuelles difficultés rencontrées au cours de l'accompagnement. Cette vérification a conduit l'agence, fin 2021, à ne pas reconduire deux prestataires pour lesquels plusieurs alertes avaient été reçues.
La mission a contacté certaines de ces collectivités, notamment des petites communes, afin de recueillir leur retour d'expérience. Il apparait que l'opportunité ouverte par l'agence a permis la réalisation de projets qui étaient alors peu formalisés, mal définis, ou bloqués. Ces éléments sont d'autant plus appréciés que la collectivité ne disposait pas de solution locale pour l'ingénierie, notamment lorsque le projet était d'intérêt communal et n'avait pas vocation à être traité au niveau intercommunal. Le fait que l'agence prend en charge à des niveaux très élevés le recours à une expertise privée (80 ou 100 %) permet à la collectivité d'accéder à une prestation qu'elle n'aurait jamais eu les moyens de s'offrir.
Dans le panel auditionné, la plupart des collectivités estiment que les procédures ANCT sont assez rapides en comparaison avec d'autres circuits d'aides. Entre le moment de la demande et le résultat de son traitement, il se passe entre 10 et 30 jours. Le déclenchement de l'aide intervient dans les semaines qui suivent.
Il est exceptionnel qu'un avis soit négatif. À titre d'exemple, sur l'année 2022, il y a eu 5 % d'avis défavorables (16 réponses négatives sur les 307 accompagnements positifs au 24 novembre 2022). Dans la quasi-totalité des cas, une demande trouve une réponse par l'agence, même si ce n'est pas une réponse prévue par le marché : « on réoriente, on recompose, on propose des choses complémentaires, on fait une proposition alternative dans tous les cas. » déclarait l'agence lors de son audition.
Cependant, lors d'une audition, un maire (AMF Pas-de-Calais) a évoqué une situation ou les services centraux de l'agence s'étaient engagés sur le soutien d'un de ses projets et ont finalement renoncé, en cours de procédure, à le soutenir malgré l'appui du niveau local. La situation a été portée à la connaissance du niveau national comme cas d'école d'une pratique à ne pas reproduire. Mais cette situation semble exceptionnelle.
Verbatim de maires
« L'accompagnement de l'ANCT nous a été très bénéfique, mais le bémol c'est que le prestataire semblait détaché par rapport à l'enjeu que représentait le projet pour la commune. »
« L'ANCT propose du soutien en ingénierie de projet. Cette mission est plutôt appréciée par les territoires bénéficiaires »
3. Les élus du bloc communal coeur de cible de l'ANCT
Les programmes touchent plusieurs collectivités de différents niveaux. Mais l'offre d'ingénierie sur mesure est spécialement destinée au bloc communal : communes et communautés de communes de taille modeste.
TYPOLOGIE DES COLLECTIVITÉS ACCOMPAGNÉES
Source : bilan ANCT
Les collectivités de plus grande taille (agglomérations, métropoles, régions) sont souvent dotées de l'ingénierie nécessaire et sollicitent peu l'ANCT. L'agence déclarait volontiers lors de son audition que « le coeur de métier de l'agence est d'aider les petites communes ». Depuis 2020, la part des collectivités de moins de 1 500 habitants sollicitant l'appui de l'agence a d'ailleurs augmenté de 4 points.
L'enquête du Sénat auprès des préfectures permet de mesurer que le nombre de dossiers relatifs à l'ingénierie sur mesure ayant bénéficié d'une instruction par les services de l'État reste modeste, pris département par département, même s'il est en augmentation, avec un effet volume en 2021 lié à l'accompagnement des CRTE. Certains territoires sont cependant peu présents sur l'accompagnement sur mesure. Une préfecture déclarait ainsi « l'accompagnement sur mesure reste relativement peu sollicité en dépit des actions d'information qui ont été organisées par la préfecture ».
NOMBRE DE DOSSIERS « INGÉNIERIE SUR MESURE » PAR DÉPARTEMENT
Dossiers "ingénierie sur mesure" |
2020 |
2021 |
2022 |
Demandes dont la solution a été trouvée avec l'ingénierie locale |
0,9 |
4,5 |
2,3 |
Demandes, sans solution locale, ayant remonté à l'ANCT |
1,1 |
5,4 |
3,3 |
Source : bilan ANCT
ANCT et outre-mer
Les interventions de l'ANCT sont renforcées et adaptées dans les territoires d'outre-mer.
À titre d'exemple, les programmes y portent une attention particulière avec une feuille de route ultramarine pour ACV et PVD. Les programmes y sont massivement déployés : 35 communes sur un total de 129 sont concernées par le programme PVD et 15 par le programme ACV, 8 EPCI sont concernés par le programme Territoires d'industrie, 2 territoires sont lauréats de l'AMI Avenir montagnes ingénierie, 45 contrats de ville sont déployés avec 16 cités éducatives, plus de 90 France services, plus de 250 conseillers numériques....
L'appui à l'ingénierie l'est aussi avec 6 lots territoriaux ultra-marins dans le marché d'ingénierie de l'ANCT. Les prestations sont financées à hauteur de 80% pour les communes de plus 3500 habitants et EPCI de plus de 15000 habitants. Environ 50 postes de chef de projet y sont financés.
Ces territoires partagent, peut être avec encore plus d'acuité que pour les collectivités de métropole, le besoin de renforcement de l'ingénierie des communes et des intercommunalités dans leurs fonctions de maîtrise d'ouvrage et de portage de leurs projets. D'autant plus qu'un grand nombre de ces collectivités sont en difficulté financière, ce qui obère leurs capacités d'investissement et leurs possibilités de recrutement alors même qu'il est constaté un déficit de compétences.
I. II. MALGRÉ DES APPORTS POSITIFS, LES ÉLUS ONT UN JUGEMENT CRITIQUE DE L'ACTION DE L'ANCT
Il faut d'abord rappeler que les attentes étaient nombreuses et fortes. Que ce soit dans les travaux à la genèse de l'agence10(*), que ce soit dans les discours du Président de la République annonçant la création de l'agence11(*) ou que ce soit dans les débats parlementaires, les attentes des élus et les ambitions de l'État sont clairement exprimées. Elles peuvent se résumer en cinq points principaux :
- L'objectif principal de l'agence doit être de lutter contre les fractures territoriales. L'idée d'une « alliance entre les territoires pour favoriser leur meilleure complémentarité » et d'une meilleure cohésion est avancée par le Président de la République12(*). La proposition de loi vise à permettre la concrétisation du principe d'égalité « dans de nombreux territoires fragiles, qu'ils soient ruraux ou urbains »13(*). Les échanges lors de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat rappellent cet objectif de « remédier aux fractures multiples qui traversent le pays ».
- L'agence doit incarner cet « État facilitateur ». L'ANCT doit « faciliter la mise en oeuvre de projets par les élus locaux ou les porteurs de projets » comme l'exprime le président de la République au 100ème congrès des maires. Les sénateurs rappellent que l'agence doit aider les élus « à développer leurs projets, en tenant compte de leurs spécificités et de leurs atouts »14(*).
- La création de cette agence doit permettre de simplifier les choses pour les élus locaux. Il est question de développer la « logique de guichet unique et de simplification de projets pour les territoires ruraux et les villes moyennes en difficulté ». L'ANCT doit être une réponse au cloisonnement des différents ministères et services déconcentrés, en adoptant une posture transversale et interministérielle. Elle doit aussi permettre la rationalisation des interventions de l'État dans les territoires.
- Cette agence « d'un type nouveau » doit être l'occasion de renouveler les relations entre État et collectivités : confiance et logique ascendante. Les sénateurs appellent à « une relation de confiance, partenariale et de respect entre l'État et les territoires. ». Il s'agit aussi de mettre en place des démarches ascendantes fondées sur les besoins des territoires afin de sortir des « approches en silo », c'est-à-dire des décisions prises au niveau central sans que leurs impacts sur les territoires soient étudiés ou anticipés. Enfin, l'agence doit fonctionner avec l'association des élus locaux dans sa gouvernance nationale.
- Les sénateurs expriment dès le départ de fortes attentes sur les moyens de l'agence au vu de l'ampleur de ses missions.
Face à ces attentes, comment sont perçues les trois années d'action de l'agence ?
Au-delà de la mise en avant d'éléments positifs du bilan de l'action de l'agence (A), les élus auditionnés ont été majoritairement critiques sur l'action de l'ANCT (B). Cette appréciation s'illustre aussi dans les résultats du questionnaire adressé aux associations d'élus.
Il était demandé à ces derniers de décrire l'ANCT en trois mots. Sur les 33 mots cités : seuls deux sont cités à deux reprises (« silo » et « ingénierie »), ce qui reflète un éventail assez large de perceptions de l'agence et de sa plus-value. Les qualifications négatives dominent (13 en rouge) suivies de qualifications positives (11 en vert) et neutres (7 en noir).
NUAGE DE MOTS « L'ANCT EN TROIS MOTS »
Source : questionnaire et traitement Sénat
A. DES APPORTS POSITIFS RECONNUS
1. Les élus saluent plusieurs éléments positifs de son bilan
De façon analytique, en considérant le niveau national et local et l'ensemble de ses missions, il ressort les éléments suivants à mettre au crédit de l'agence :
- Capacité à formuler des enjeux nationaux (ré-industrialisation, déploiement d'infrastructures de télécommunication, revitalisation des centres-villes, transition environnementale...) et à poser des actes d'aménagement du territoire par des politiques publiques et des financements concrétisés dans des programmes. L'intention du retour de l'État dans les territoires est saluée par les élus, après des décennies de désengagement. Plusieurs acteurs soulignent aussi une meilleure prise en compte de la ruralité et des petites communes dans une logique de rééquilibrage avec ce qui était perçu comme un développement national à sens unique au bénéfice des métropoles. Même si certains élus estiment que cela ne va pas assez loin, nombreux soulignent avec satisfaction le retour d'une « politique d'aménagement du territoire même si elle ne dit pas son nom ».
- Capacité à entrainer et fédérer les acteurs publics, parapublics et privés dans des dynamiques structurées, collectives et partenariales. L'ANCT s'est montrée en mesure d'assembler et de faire coopérer des opérateurs et des partenaires tant au niveau national qu'au niveau local. Par exemple, au niveau national, le réseau France services agrège 9 partenaires nationaux (La Poste, Pôle Emploi, DGFiP...) autour d'un cahier des charges commun exigeant l'implication financière de chacun. Au niveau local, le programme Action Coeur de Ville parvient quant à lui à réunir autour d'une table des opérateurs publics et privés au service d'une même cause : la revitalisation des centres-villes. Dans un autre secteur ou l'agence est peut-être moins attendue, celui de la santé, elle vient en soutien des acteurs locaux, pour fédérer les dynamiques collectives (soutien à des projets de maison médicale, organisation des réseaux de soins ou de télémédecine...).
- Capacité à impulser de la vision stratégique et transversale et de la méthodologie de projet. Les programmes essayent de sortir de la logique de guichet et du financement de plusieurs projets qui se succèdent. L'agence entend promouvoir une vision globale, plus stratégique, plus transversale, plus intégrée en matière de politique publique. Elle vise à ce que les acteurs se projettent dans des enjeux d'avenir, enrichissent leurs réflexions locales. Elle recherche aussi à développer la logique de projet, tant dans l'État déconcentré que sur les thématiques d'échange avec les collectivités. Les données, analyses et études de l'ANCT forment un autre vecteur, encore trop peu connu et trop peu utilisé par les collectivités, mais porteur d'une véritable valeur ajoutée pour celles qui s'en sont saisies : elles enrichissent les connaissances sur les dynamiques territoriales et permettent de mieux appréhender les défis à venir.
- Capacité à proposer des produits innovants, expérimenter, capitaliser des bonnes pratiques et favoriser le partage des connaissances. Les Fabriques prospectives15(*) sont par exemple très appréciées, car elles allient production intellectuelle et pratiques territoriales. Très qualitatives - seulement 3 fabriques sont lancées par an - elles affichent un bilan de 56 territoires accompagnés depuis 2018.
Les fabriques prospectives
Elles permettent aux élus et aux territoires d'être accompagnés, individuellement et collectivement, afin de travailler sur une transition (écologique, démographique, économique...) d'intérêt national et territorial. Pendant un an, chaque Fabrique Prospective regroupe quatre à huit territoires volontaires accompagnés par un prestataire qualifié, piloté et financé, en tout ou partie, par l'ANCT. Elles débouchent sur une feuille de route incluant un programme d'actions à mener à court terme. Elles aboutissent également à des enseignements méthodologiques utiles à tous les territoires ou sur des pistes d'évolution de la législation.
- Capacité à mettre en réseau les acteurs, organiser des communautés d'échanges, les accompagner dans leur montée en compétence et capitaliser sur les réussites. L'ANCT et ses programmes génèrent des effets d'apprentissage positifs pour les participants. Ses actions de mise en réseau contribuent à être des éléments de plus-value mis en avant. Le Club PVD par exemple est souvent cité comme une plus-value concrète au service des acteurs locaux.
L'accompagnement des élus locaux : l'exemple de l'Académie des territoires16(*)
L'ANCT, Sciences Po et la Banque des Territoires réunissent leurs expertises pour proposer aux élus une nouvelle offre de formation transversale avec l'ambition de créer une communauté apprenante au service des dynamiques territoriales. L'Académie des territoires dispense des formations pour permettre aux élus locaux de mieux appréhender les grandes transitions, écologique, démocratique, sociétale, numérique et territoriale, pour construire des projets de territoire durables et inclusifs. Ces formations sont regroupées en trois blocs : vision, stratégie et action, avec des formats pédagogiques interactifs et variés pour confronter les savoirs scientifiques et opérationnels et favoriser l'intelligence collective : intervenants de haut niveau, visites sur site, ateliers collectifs et cas pratiques. Le rythme est adapté pour alterner des modules en présentiel dans les campus de Sciences Po en régions et des modules à distance.
- Capacité de mise en récit et de communication sur ses produits, ses labels. Les productions de l'agence sont nombreuses, de qualité, et mettent en valeur ses actions et son bilan. Une partie des élus le soulignent, même si d'autres estiment que l'agence est plus dans le récit que dans le concret et que sa communication accroit le sentiment de déconnexion avec le terrain.
De façon plus thématique, les élus citent presque toujours les 4 programmes les plus connus : ACV, PVD, France services, Territoires d'Industrie, et plus rarement les autres. En outre, deux dispositifs annexes sont cités comme très appréciés : les Fabriques prospectives et les Volontaires Territoriaux en Administration17(*).
2. L'impact de la mise en place de l'agence interroge
La difficulté d'évaluer la plus-value de l'ANCT subsiste pour plusieurs raisons.
D'une part, certains de ces programmes et services existaient avant la mise en place de l'ANCT et étaient déjà appréciés : commissariat de massifs, programmes France très haut débit, France mobile, ACV, tout le volet politique de la ville, l'expertise de l'EPARECA... Les élus ont du mal à mesurer la valeur ajoutée de l'ANCT en tant que telle par rapport aux dispositifs précédents déployés par le CGET ou d'autres structures. Les élus peinent à verbaliser ce que leur a apporté le rattachement de ces dispositifs à l'agence.
Verbatim et contribution écrite
« Les programmes n'avaient pas besoin d'une agence pour exister. » Un maire
« L'ANCT a été bâti sur une administration centrale et il n'est pas surprenant qu'elle conserve les réflexes d'administration centrale des agents qui la composent ». Un acteur national
« L'apport, par rapport aux dispositifs précédents est loin d'être évident. » Ville et Banlieue.
D'autre part, certains éléments cités plus haut, au crédit de l'ANCT, sont avant tout liés aux caractéristiques d'une action étatique et ne doivent pas forcement à la mise en place de l'agence. Par exemple la capacité à entrainer acteurs publics, parapublics et privés dans des dynamiques collectives et partenariales s'illustre dans l'accord historique « New Deal Mobile» porté par l'ANCT et signé par l'État, les opérateurs mobiles - Bouygues Telecom, Free, Orange et SFR - et l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep). Mais en réalité, sa signature n'a rien à voir avec l'agence puisqu'elle est intervenue en janvier 2018, deux ans avant la mise en place de l'ANCT.
Il est donc difficile de repérer les éléments de plus-value proprement liés au regroupement de plusieurs services sous le chapeau ANCT.
Il ne faut sans doute pas avoir un regard trop sévère sur l'ANCT compte tenu de sa mise en place récente et des conditions dans lesquelles elle s'est constituée. Trois ans pour une organisation représentent très peu de choses, particulièrement dans un contexte de fusion d'organismes très différents. Les transformations sont toujours susceptibles d'être anxiogènes pour les équipes et demandent du temps pour bâtir une culture commune. D'autant plus que sa mise en place est intervenue dans une période de crise sanitaire particulièrement pénalisante pour structurer des collectifs de travail, partager en présentiel et se déplacer sur les territoires. Le plan de relance, en faisant porter par l'ANCT certains dispositifs, a aussi perturbé, alourdi et complexifié la mise en place de l'agence alors que ses dispositifs propres n'étaient pas encore stabilisés.
3. Une plus-value à rapporter aux moyens mis en oeuvre
a) L'affaiblissement continu de l'État local
Dans leur rapport « À la recherche de l'État dans les territoires », Mme Agnès CANAYER et M. Éric KERROUCHE constataient que « si chaque réforme de l'État déconcentré a été portée par l'ambition d'améliorer le fonctionnement de ces services et de répondre au mieux à la demande d'État dans les territoires, la réalité constatée est celle d'une baisse des moyens de l'État dans les territoires ». La chute de 36 % des effectifs physiques des directions départementales interministérielles entre 2011 et 2020 (de 39 796 agents à 25 474 agents) n'en est qu'une illustration. Près d'un maire sur deux des communes de moins de 1 000 habitants estime que l'offre de services publics sur son territoire est défaillante, rappelle ce rapport.
Les acteurs locaux auditionnés ont tous souligné que les services de l'État déconcentré ne disposaient plus des effectifs, ni même des compétences techniques, pour remplir leur mission. Le préfet cumule de plus en plus de missions et voit ses moyens se réduire. Les directions départementales des territoires (DDT) sont parfois dans des situations de fragilité. Des DDT ont même signalé à la mission de devoir se limiter dans l'évocation de l'ANCT et de ses offres auprès des élus pour ne pas les « décevoir ».
Cette fragilité freine le développement de la logique d'accompagnement de l'agence. Certains interlocuteurs ont évoqué les préfets « verrous » qui éteignaient les possibles sollicitations des collectivités, faute d'avoir les moyens de les traiter.
Verbatim et contributions écrites
« Au niveau local, le positionnement de l'ANCT n'est pas lisible. Les services déconcentrés de l'État sont dans l'incapacité de relayer les offres et travaux de l'ANCT. » Intercommunalité de France
« La DDT c'est le bras armé de l'ANCT mais dans notre département, cela représente un ingénieur TPE qui porte avec beaucoup de conviction l'accompagnement, mais aussi à bout de bras, jusqu'à qu'il s'épuise ». Une agence départementale d'ingénierie
« Au-delà des grands programmes (ACV, PVD ...), force est de constater une vraie déception quant à l'animation au quotidien des dispositifs sur le terrain et des moyens humains réellement disponibles pour porter les projets ». Régions de France
« On s'occupe de décliner les programmes et on a pas les moyens de faire plus. Si on ne veut pas décevoir, il ne faut pas survendre l'ANCT ». Une DDT
« Les programmes présentés sont parfois complexes et nécessitent un investissement local très important et réactif afin de les appréhender en profondeur et les faire correspondre aux réalités et besoins de chaque territoire, tant au niveau des collectivités que des services de l'État qui ne disposent pas d'effectifs supplémentaires pour assurer cette mission ». Une préfecture
« La création de l'ANCT a entraîné un appel d'air, créatif et bienvenu, auprès des collectivités qui se sont empressées de déposer des projets en vue d'un accompagnement en ingénierie, alors que les effectifs des services de l'État local n'ont pas vu leurs effectifs augmenter. Une préfecture
Le questionnaire du Sénat diffusé dans les préfectures comportait une interrogation relative à la charge de travail consacrée à accompagner les demandes des élus relatives à ces questions d'ingénierie. La réponse moyenne est de 2,7 ETP et la réponse médiane de 2,5 ETP pour 55 réponses.
b) Les moyens limités de l'agence en centrale
Les élus locaux reconnaissent la compétence et l'engagement des équipes de la tête de réseau parisienne de l'ANCT.
Cependant, le plafond d'emplois est de 345 agents, quand les trois structures fusionnées représentaient 389 agents (CGET : 30618(*), Agence du numérique : 40, EPARECA : 43) alors que les missions sont largement plus étendues.
En matière de budget, l'agence se finance grâce à une pluralité de recettes. L'une des plus importantes est la subvention pour charge de service public (SCSP) dont le montant était au budget initial pour 2022 de 58,7 millions d'euros. Le produit des autres recettes peut être fortement fluctuant d'un exercice budgétaire à l'autre. Les dépenses, qui doivent être couvertes par la SCSP (masse salariale, crédits d'ingénierie, fonctionnement courant...), sont d'environ 70 millions. Comme le note l'agence « il en résulte une incapacité structurelle à financer l'ensemble des dépenses prévues ». L'équilibre atteint lors des exercices précédents ne s'explique que par la faiblesse des dépenses en 2020 lors de la crise covid qui a permis de constituer une cagnotte qui a été utilisée depuis.
Les auditions ont permis de mesurer, sur des exemples précis, que l'ajout de nouvelle missions ou dépenses aux activités de l'agence était réalisé sans compensation par des recettes supplémentaires. Le caractère fortement interministériel des missions de l'agence l'expose à des demandes régulières visant à élargir ses missions, malgré sa création récente.
- À titre d'exemple, l'agence a récupéré la gestion administrative et budgétaire des programmes France Très Haut débit et France Mobile, auparavant confiés à la Caisse des Dépôts et Consignation, sans pour autant avoir reçu la masse salariale correspondante pour rémunérer les postes de gestionnaires nécessaires à l'exercice de ces nouvelles missions, du fait des arbitrages budgétaires intervenus en PLF 2022 (estimation 10 postes).
- Autre exemple : un dispositif expérimental déployé sur une dizaine de collectivités a fait ses preuves et il est maintenant question de le généraliser sur une centaine de collectivités, mais cela à moyens constants...
- En 2022, l'ANCT a pris, par exemple, en charge deux missions nouvelles structurantes : la gestion de la réserve d'ajustement du Brexit et la gestion administrative et budgétaire du fonds pour une société numérique d'un montant de 3,5 Mds €. A l'inverse, des exemples précédents, l'ANCT a reçu des postes pour ces missions (respectivement 9 et 4 équivalents temps plein).
La contribution écrite de l'ANCT conclut ce point en ces termes : « Sans abondement de la SCSP, l'agence risque en 2023 de ne pouvoir assurer sur la base de ces crédits que les paiements liés à des engagements des années antérieures ».
Extrait de la contribution écrite de l'Assemblée des Départements de France
« Elle est aujourd'hui sans doute trop parisienne et dotée de trop peu de moyens pour avoir un véritable impact dans de nombreux territoires qui nécessitent des moyens (humains et financiers) suffisants et déconcentrés pour être proche des acteurs. »
B. LES ÉLUS PORTENT UN JUGEMENT CRITIQUE DE SON ACTION ET RÉAFFIRMENT LES ATTENTES FORTES AYANT PRÉSIDÉ À SA CRÉATION
En dépit de plusieurs points positifs, l'évocation de l'action de l'ANCT avec les élus locaux suscite rapidement des réserves et des réflexions qui dépassent la seule question de l'agence. Les élus estiment que les services déconcentrés de l'État et la tête de réseau nationale n'ont pas les capacités de répondre aux attentes qui avaient présidé à sa création.
Verbatim et contributions écrites
«Au fil des mois et des années, l'agence ne répond pas aux attentes de départ. Elle reste un outil de l'État qui n'est pas encore au service des collectivités ». Un maire
« En dépit de cette collaboration avec les équipes nationales de l'ANCT, l'APVF collecte des retours contrastés concernant l'action de terrain de l'ANCT ». APVF
« Les dispositifs semblent être mis en oeuvre sans cadrage préalable ce qui amène à des situations complexes où tout est réfléchi au fur et à mesure de leurs mises en oeuvre et l'accompagnement est parfois limité. » FNSCoT
1. Une implication inégale et partielle en matière d'ingénierie qui suscite des critiques
L'article 2 de la loi du 22 juillet 2019 portant création de l'ANCT débute ainsi : « Elle a pour mission (...) de conseiller et de soutenir les collectivités territoriales et leurs groupements dans la conception, la définition et la mise en oeuvre de leurs projets. À ce titre, elle facilite l'accès des porteurs de projets aux différentes formes, publiques ou privées, d'ingénierie juridique, financière et technique, qu'elle recense ».
La mission la plus attendue de l'agence est sans doute celle relative à l'ingénierie. Toutes les auditions ont très largement tourné autour de cette dernière tant la préoccupation des élus est forte compte tenu de l'ampleur des enjeux qui s'adressent à eux, particulièrement dans un contexte de transition environnementale et de resserrement des marges de manoeuvre financières.
En la matière, la plus-value de l'ANCT est très discutée et sujette à un malentendu persistant entre ce qui est attendu de l'État et ce qu'il peut réaliser.
a) Rappel des modalités de mise en oeuvre, par l'ANCT, de sa mission de soutien à l'ingénierie
L'Anct a pour mission de faciliter l'accès des collectivités à l'ingénierie. Plusieurs situations témoignent de la façon dont l'agence s'est saisie de cette mission.
Les collectivités retenues dans les programmes disposent d'un accès privilégié à plusieurs dispositifs, crédits, formules d'ingénierie qui sont cumulatifs. Elles bénéficient du financement de postes dans des collectivités (essentiellement de chef de projet), elles ont accès à l'offre spécialisée des partenaires de l'ANCT (Banque des Territoires, CEREMA...), parfois elles ont l'accès à une offre privée via des formules avantageuses en terme de coût et ont des prestations en régie avec les équipes de l'agence (notamment sur les questions de revitalisation commerciale).
Pour toutes les autres collectivités non intégrées à un programme, le système est à double niveau :
- l'ANCT a pour mission d'organiser un guichet unique local de l'ingénierie d'Etat destiné à coordonner les demandes des collectivités avec les offres existantes. La quasi-totalité des demandes peuvent et doivent pouvoir trouver une solution dans l'écosystème local. Cela implique que ce dernier soit à l'écoute des besoins et se coordonne pour répondre aux demandes. C'est l'objet des Comités locaux de cohésion des territoires (CLCT)19(*). Ils sont par ailleurs l'instance du dialogue entre l'État, les élus des collectivités locales, les opérateurs nationaux et des acteurs de l'ingénierie locale, (agences d'urbanisme, conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE), Agences Techniques Départementales (ATD), Établissements Publics Fonciers (EPF), etc.). Ces CLCT doivent se mettre d'accord sur les priorités d'intervention de l'agence, tant en matière de thématiques que de territoires, et les formaliser dans une feuille de route partagée. Cette feuille de route repose sur le recensement des ressources en ingénierie mobilisables localement (offre) et l'identification des besoins des collectivités (demandes). Pour tout projet qui trouve son débouché dans l'ingénierie locale, le délégué territorial de l'agence (préfet) désigne alors un interlocuteur unique chargé du suivi du projet (sous-préfet, DDT, opérateur, aménageur local...).
- pour les demandes sans solution locale, le délégué territorial sollicite l'appui national de l'ANCT en le justifiant par la fragilité de la collectivité porteuse, l'insuffisance de ressources locales, le caractère innovant ou particulièrement complexe du projet, la nécessité d'une expertise pointue, ou d'un accompagnement spécifique. Cet apport d'ingénierie s'effectue sous la forme de mobilisation de l'ingénierie de l'État (les équipes de l'ex- EPARECA par exemple) ou ses agences nationales (ADEME, CEREMA...) et sous la forme de mobilisation d'ingénierie privée sur la base de marchés à bons de commande avec des bureaux d'étude privés.
Le marché d'ingénierie
Il comprend pour les prestations les plus couramment délivrées, trois lots qui se déclinent par région : 1) Diagnostics territoriaux et définition des enjeux et orientations stratégiques ; 2) Association des habitants au projet, concertation ; 3) Accompagnement au pilotage et à la mise en oeuvre des projets de territoire.
Il comprend aussi pour les prestations plus spécifiques en termes de thématiques des lots qui sont nationaux : 1) Accompagnement au cadrage et au montage de projets/opérations ; 2) Favoriser un développement économique et commercial équilibré ; 3) Développer l'offre culturelle et de loisirs et le tourisme ; 4) Développer l'accès aux équipements et aux services publics et à la santé ; 5) Développer l'accès au numérique ; 6) Transition écologique et biodiversité ; 7) Transition énergétique et gestion énergétique des bâtiments ; 8) Développer l'accessibilité, la mobilité et les connexions ; 9) Accompagner l'implantation des grands projets stratégiques (GPS) étrangers à fort potentiel de création d'emplois ; 10) Appui au potentiel touristique des territoires : valorisation du patrimoine naturel et culturel et transformation des offres.
Ce système fait théoriquement l'objet d'une évaluation à double niveau : « Le délégué territorial veillera à mettre en place un dispositif de suivi de l'exécution du projet et d'évaluation de ses impacts sur le territoire. Une plateforme unique rassemblant l'ensemble des indicateurs de suivi et d'impact sera créée et accessible aux délégués territoriaux. »
b) Une intervention critiquée à plusieurs titres
Les situations sont très contrastées d'un département à l'autre. Si certains départements semblent s'être organisés, ce schéma, qui repose sur une mise en oeuvre encore récente, semble peiner à s'appliquer localement (1). De plus, l'intervention de l'agence suscite des critiques et parfois même, pour les appréciations les plus sévères, est accusée de générer des effets contreproductifs (2). Surtout les modalités de cette intervention sont analysées comme ne contribuant pas à renforcer suffisamment l'écosystème local (3).
(1) Une implication de l'ANCT à géométrie variable dans le recensement et l'animation de l'écosystème local
Le rôle de l'ANCT est d'identifier offres et demandes afin de mieux les articuler, par une animation régulière en CLCT destinée à mettre en réseau les acteurs.
Si dans certains départements ce schéma commence à prendre forme, la majorité des retours sont plutôt réservés voire critiques :
- L'ANCT a repris et développé la plateforme « Aides-Territoires » 20(*). Cet outil avait été mis en place par la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN) dans le cadre de La Fabrique Numérique. Cette base de données référence plus de 1 500 aides en ingénierie technique et financière à destination des collectivités. Une recherche, ou une alerte, peut être faite sur cette plateforme en fonction du type d'aide, du thème ou du territoire. Services de l'État et acteurs de l'ingénierie sont invités à référencer leurs dispositifs. Cependant, l'information n'est pas toujours complète lorsque les partenaires n'inscrivent pas leur dispositif. De plus, collectivités et opérateurs eux-mêmes évoquent des difficultés à visualiser la manière dont ces aides peuvent être sollicitées et se compléter le cas échéant afin d'accompagner un projet sur la durée. Pour poursuivre ce travail, l'ANCT s'est engagée à travailler étroitement avec les représentants de l'ingénierie privée (Fédération Cinov et Syntec-Ingénierie) pour réfléchir à la façon dont les aides proposées par ces acteurs pourraient être intégrées dans cette base de données. Ce travail de référencement de l'ingénierie privée est en cours.
- Les recensements sous format catalogue n'ont pas tous été réalisés et certains sont de qualité discutable. Au-delà des recensements, le lien avec les acteurs locaux peine à s'effectuer. L'Association nationale des Directeurs d'Agences techniques départementales (AnDAtd) estime que l'ingénierie locale, notamment départementale, a été associée aux démarches « dans des cas de figure minoritaires ». Elle ajoute que sur d'autres territoires, le partenariat a été plus ou moins recherché mais « ne fonctionne pas faute, notamment, de moyens humains coté ANCT ». Elle regrette que parfois les ATD « n'ont pas du tout été associées »
- Les besoins des collectivités n'ont pas souvent fait l'objet d'un travail collectif.
- Les feuilles de route qui doivent être réalisées dans le cadre des CLCT, lorsqu'elles existent, ressemblent plus à des modes opératoires descriptifs axés sur le « comment » qu'à de véritables plans d'action centrés sur le « quoi ».
Contribution écrite sur l'offre d'ingénierie
« L'ANCT doit encore travailler à structurer l'offre en la matière. L'ANCT doit notamment mettre en réseau les différents acteurs de l'ingénierie locale (...).» AMF
« La mission de recensement de l'ingénierie locale est un angle mort de l'action de l'agence. Il y aurait en effet un potentiel de mutualisation important si un tel recensement existait, ce qui implique une plus grande empreinte territoriale de l'ANCT ». APVF
- Les CLCT sont souvent décrites comme des instances d'information descendantes, à la fréquence trop éloignée pour être opérationnelles, sans réel débat ou échange et ne jouant pas le rôle d'animation de l'écosystème local, ni de coordination des acteurs.
Contribution écrite sur les CLCT
« Les CLCT ne se sont que très peu réunies - une réunion d'installation seulement dans un grand nombre de département - l'information est généralement descendante et les projets locaux peu construits. » AMF
« L'usage du CLCT et son utilité varient grandement d'un territoire à un autre. Le rôle du préfet est à cet égard décisif. » APVF
« Les remontées montrent un bilan très inégal et mitigé des CLCT. Certains fonctionnent bien, mais il semble que nombre d'entre eux soient plutôt des coquilles vides. » FNAU
- Le dispositif évaluatif n'a pas été mis en place. L'ANCT ne suit pas les demandes locales, aussi il est impossible de savoir si les départements qui ne remontent presque jamais rien en central sont des territoires au fonctionnement optimal de l'écosystème local ou à fort déficit de visibilité de l'offre de l'ANCT.
(2) Une implication parfois superflue ou perturbante
Au-delà des difficultés de fonctionnement du schéma prévu, deux grandes critiques pointent.
D'une part, certaines auditions ont mis en évidence que l'intervention de l'État n'était pas souhaitée partout et qu'elle suscitait parfois des interrogations. Des territoires sont déjà organisés et les acteurs de l'ingénierie y fonctionnent déjà en réseau. Aussi l'intervention de la puissance publique interroge et peut déstabiliser.
Contributions écrites
«Nous n'avons pas besoin de l'État pour nous réunir, pour qu'on se connaisse et qu'on travaille ensemble. On a le sentiment que l'État prend la main pour proposer nos offres à notre place. » Un acteur du développement local
« [Le message de l'ANCT] peut brouiller la compréhension qu'ont les élus de la structuration qui peut exister au sein de chaque département et qui a été parfois ignorée par les services de l'État ! ». AnDAtd
D'autre part, les acteurs estiment que l'action de l'agence, au lieu de renforcer l'écosystème local, peut avoir des effets « contreproductifs » comme le soulignent ces exemples :
- « Des cas de plus en plus nombreux nous remontent relatifs à des situations de concurrence entre la stratégie de déploiement du Cerema (soutenu par le financement de l'ANCT) et l'action des agences d'urbanisme présentes, alors que leurs interventions pourraient être utilement géographiquement complémentaires voire coordonnées » relève la FNAU.
- Le financement de postes de chefs de projet à certaines petites villes, retenues dans le cadre de PVD, et pas à leurs voisines, a pu déstabiliser des écosystèmes locaux : en déséquilibrant les schémas de coopération existant, en instaurant des jalousies sur la base d'une sélection parfois difficilement justifiable et en créant des distorsions d'accès aux dispositifs de l'ANCT au profit des communes dotées d'un chef de projet.
- Parfois les relais locaux de l'ANCT « découragent » le recours aux acteurs locaux par les collectivités qui souhaitent les mobiliser. À titre d'exemple, plusieurs agences d'urbanisme avaient proposé d'accueillir les chefs de projets PVD voire, dans certains cas, les mutualiser au bénéfice de plusieurs territoires. « Cette solution a généralement été refusée par les services de l'État ou cela a été réalisé mais sans l'appui de l'ANCT » souligne la FNAU.
- L'intervention, via l'ANCT, de prestataires privés sur des prestations qui auraient pu être réalisées par des acteurs locaux crée de la confusion. La Fédération Nationale des Conseils d'Architecture, d'Urbanisme et de l'Environnement (FNCAUE) estime que le principe de subsidiarité est rarement mis en application au point de questionner la réalité de la volonté de travailler avec les ingénieries locales. L'absence de tour de table et de recherche de coordination des acteurs locaux traduisent une forme de facilité en faisant intervenir des prestataires privés sur commande.
Contributions écrites
« L'ANCT a eu tendance à exacerber la concurrence entre les ingénieries plutôt qu'à faciliter les complémentarités » FNAU
« Dès lors que l'analyse initiale n'a pas été suffisamment bien appréhendée, que les moyens humains n'ont donc pas été déployés correctement et avec une approche parfois très descendante, la déclinaison de l'action de l'ANCT dans les territoires est chaotique, inégale. (...) La méconnaissance de cette ingénierie locale a engendré, non pas une complémentarité des offres d'ingénierie, mais un potentiel recouvrement de certaines offres et pire, une concurrence. » AnDAtd
- L'annonce de prestations d'ingénierie gratuites contribue aussi à créer une forme de distorsion qui interroge (voir encadré ci-dessous).
L'annonce de prestations d'ingénierie gratuites : une fausse bonne idée ?
Le conseil d'administration de l'ANCT a décidé, le 10 mars 2021, la gratuité des prestations d'ingénierie de l'ANCT, opérées pour les communes de moins de 3 500 habitants et pour les EPCI de moins de 15 000 habitants dans l'Hexagone et outre-mer. Son offre de services recouvre, par exemple, ses expertises internes - en matière de réalisation d'études de potentiel commercial, de diagnostics territoriaux, de montage d'opérations immobilières -, l'appel à l'expertise de partenaires ou le recours à des prestataires de son marché d'ingénierie dans les domaines variés dont l'ingénierie de projet.
Trois difficultés ont été soulevées lors des auditions :
- La confusion créée par cette annonce chez les élus locaux. Cette ingénierie gratuite n'est accessible que faute d'une réponse locale. Ce qui signifie que des collectivités ont pu s'adresser l'ANCT pour en bénéficier et se sont vues renvoyées au niveau local. Mis dans la boucle, les opérateurs de l'ingénierie locale proposent des réponses. Réponses qui sont parfois payantes, compte tenu par exemple du modèle économique de l'acteur (comme une Agence Technique Départementale). Il est donc facile de saisir l'incompréhension des élus. L'enquête diffusée dans les préfectures confirme que les élus qui se voient renvoyés de la sorte vers l'accompagnement de proximité « ont le sentiment d'avoir été exclus d'un dispositif attrayant ».
- La pénalisation des écosystèmes locaux organisés. Faute de réponse locale, la collectivité peut bénéficier de cette offre gratuite. Mais dans ce cas, il y a une différence de traitement entre une collectivité dans un département qui se retrouve à devoir financer le recours à une prestation auprès des acteurs locaux, et celle qui, faute de réponse locale, bénéficie de cette prestation gratuitement. Les départements qui ont développés une ingénierie publique au service des communes semblent pénalisés.
- La gratuité n'a pas que des effets positifs sur le résultat. La non implication financière des collectivités pouvaient les rendre moins exigeantes dans la définition du besoin, l'expression des attentes, le pilotage du prestataire et l'appropriation des éléments. À l'inverse, les collectivités devant contribuer à la prestation sont souvent plus exigeantes.
(3) En cas de défaillance de l'écosystème local, des interventions palliatives plutôt qu'un renforcement de cet écosystème
En cas de défaillance de l'offre locale, l'ANCT propose soit de réorienter les demandes vers ses partenaires (26% des situations), de traiter avec son expertise interne (6% des cas), d'opérer via une subvention (21% des cas) ou enfin de solliciter son marché qui propose de l'ingénierie d'accompagnement via des consultants privés sur un certain nombre de jours (46% des situations).
NATURE DE L'ACCOMPAGNENENT DU DISPOSITIF « SUR MESURE » DEPUIS 2020
Source ANCT
C'est bien ce recours aux prestataires externes qui interroge. D'autant qu'en 2022, près de 65 % des projets accompagnés sur mesure par l'agence bénéficient d'un recours à un prestataire externe, notamment par l'activation des prestataires retenus dans le cadre du marché d'ingénierie de l'ANCT. Cette part est en augmentation puisque le recours aux prestataires représente en effet 47% des projets depuis la création de l'agence, au détriment de l'accompagnement par un opérateur partenaire de l'ANCT : 21 % des accompagnements en 2022 contre 30 % lors de la création de l'agence. Ce point est important pour comprendre ensuite les critiques des élus sur le recours à cette modalité d'intervention.
Dans certains cas, ces modalités d'intervention peuvent résoudre un problème ponctuel. Comme le signale l'AnDAtd, « le recours à une ingénierie privée de qualité n'est pas à blâmer et peut être une très bonne solution lorsqu'elle est pilotée correctement, en complémentarité et/ou subsidiarité de ce qui existe déjà ».
Mais ces interventions font aussi l'objet de critiques :
- Ces prestations collectives présentent un risque « d'industrialisation » : les prestataires privés déroulent parfois des prestations similaires. L'analyse des projets de territoire réalisés dans le cadre des CRTE souligne, par exemple, une certaine forme d'homogénéisation : états des lieux standardisés, avec les mêmes données, thématiques imposées, stratégies qui se ressemblent toutes, effet de « copier-coller » sur les propositions...
- La qualité n'est pas toujours au rendez-vous, notamment du fait de la déconnexion avec le terrain ou d'interventions trop ponctuelles. « Le prestataire à un peu bâclé le travail, il n'était pas les pieds dans le terrain » résume un maire.
- Elles ne s'inscrivent pas dans la continuité, dans la connaissance du territoire. C'est pourtant ce chaînage qui vient enrichir la connaissance et la compréhension des dynamiques locales. A l'inverse, les acteurs locaux assurent une présence permanente sur le terrain, connaissent le territoire, sont mieux à même de lire les enjeux et d'inscrire des solutions adaptées aux situations locales.
- Elles soulèvent la question de la capacité de pilotage par le niveau local. Lorsque cette capacité est insuffisante, la prestation peu décevoir, ne pas répondre à la commande. Elle peut aussi conduire un sentiment de dépossession des élus locaux. Comme le résume l'APVF, « certains maires de petites villes notent surtout la difficulté pour leurs équipes à garder la main-haute sur les projets et d'imposer leurs choix face aux consultants externes ». Un maire exprime ce sentiment avec cette formule : « les cabinets extérieurs, on est à leur merci, ils disent ce qu'ils veulent ».
- Elles ont le principal défaut d'être des interventions ponctuelles sans lendemain qui n'apportent ni continuité, ni capitalisation dans le temps. Elles laissent des documents et des schémas, des études et des préconisations, mais n'ont pas durablement renforcé la capacité de la collectivité en ingénierie. Elles ne contribuent en rien à augmenter la capacité d'ingénierie de la collectivité, ni à renforcer l'écosystème qui était et demeure défaillant.
Verbatim et contributions écrites
« Les élus ont besoin d'être accompagnés concrètement tout au long de la vie du projet et pas seulement par une ingénierie très ponctuelle. » ADF
« Est-ce que ce type d'intervention crée une culture de développement dans les communes impactées ? Comment une toute petite commune gère un consultant ? Évidement que le conseil municipal sera content, mais quelle pérennité et quelle appropriation ? » Un acteur du développement local
« Le recours à des marchés de prestation à bons de commande est une mauvaise solution. Elle est le plus souvent déconnectée des territoires et les prestataires viennent consulter les outils locaux, dont les agences d'urbanisme, pour revendre des solutions `copier - coller'. » FNAU
Il est légitime que plusieurs acteurs de l'ingénierie locale se posent la question du rôle que l'ANCT pourrait jouer pour soutenir le développement et l'enracinement d'une ingénierie territoriale publique pérenne et mutualisée (celles des collectivités, des agences d'urbanisme, des EPF, des SPL, des ATD, des CAUE..) plutôt que de privilégier une ingénierie d'État (centralisée et limitée en moyens) et le recours à des prestataires privés par marché à bons de commande.
(4) Le financement de postes, modalité appréciée, mais à la pérennité incertaine
Le financement de postes dans les collectivités est apprécié et considéré comme une bonne pratique par les élus : chef de projet ACV ou PVD ou territoire d'industrie, manager de centre-ville, ... même si l'absence de financement pérenne de ces postes inquiète.
La consultation des élus par le Sénat réalisée dans le cadre du rapport « Revitalisation des centres-villes et des centres-bourgs : entre enthousiasme et frustrations » de M. Rémy POINTEREAU, Mme Sonia de LA PROVÔTÉ, MM. Serge BABARY et Gilbert-Luc DEVINAZ, démontre à quel point ces financements sont essentiels pour les villes concernées, notamment PVD.
PERCEPTION DES ÉLUS SUR LES POSTES D'INGÉNIERIE : DIRIEZ-VOUS QUE... ?
Sources : consultation Sénat, traitement Opinion Way
Les critiques qui s'adressent à l'agence sont aussi le signal d'écosystèmes locaux qui ne sont pas encore totalement constitués. Comme le déclarait l'ANCT lors de son audition : « le jour où les territoires seront organisés, il n'y aura plus besoin de l'ANCT sur la question de l'ingénierie ».
c) Un malentendu persistant entre les attentes des élus et la réponse de l'État
Vos rapporteurs ont le sentiment que l'ANCT ne peut pas, seule, répondre aux attentes qui présidaient à sa création.
Tous les élus interrogés font état de besoins en ingénierie plus élevés que jamais compte tenu de la complexification de l'action publique et de la densification de l'environnement réglementaire et technique. Ce besoin touche toutes les strates de collectivités et même les collectivités les mieux dotées qui ont des besoins spécifiques ou spécialisés.
Les enjeux de la transition environnementale, doublés d'une crise énergétique qui affecte durement les finances des collectivités, ajoutent aux besoins traditionnels d'une ingénierie de premier niveau, des besoins d'une ingénierie de second niveau, que vos rapporteurs pourraient qualifier de « passeur d'époque ».
Or, face à ces besoins, l'ingénierie publique est parfois atrophiée et l'offre privée défaillante sur certains segments thématiques ou certains territoires. Une étude récente de la SCET, filiale de la Caisse des Dépôts,21(*) met en évidence que dans 26 départements, il existe « un manque critique en expertises pour porter des projets territoriaux »22(*).
26 DÉPARTEMENTS CONNAISSENT UN MANQUE CRITIQUE EN EXPERTISE
Source : étude SCET
Derrière le mot générique d'ingénierie, se cachent des besoins très différents. Parfois besoins des territoires et offres des acteurs de l'écosystème ne s'accordent pas, tout simplement parce qu'il ne s'agit pas de la même ingénierie. L'ANCT via son marché propose essentiellement de l'ingénierie amont. Cette ingénierie de projet, dont l'utilité n'est pas remise en cause, ne répond que très partiellement aux besoins des collectivités ce qui peut susciter un malentendu.
L'INGÉNIERIE TERRITORIALE (EN ROUGE)
DANS LA CHAINE DE VALEUR DE L'INGÉNIERIE
Source : étude SCET23(*)
Il ressort des auditions et des analyses ce qui est illustré par ce schéma. Le besoin d'ingénierie des élus est triple :
- L'ingénierie amont qui permet de passer de l'idée au projet. Un projet n'est pas réductible à sa phase opérationnelle. Il y a un intérêt à le questionner vis-à-vis de son intégration dans les enjeux de demain, le mettre en perspective avec les enjeux des territoires, le repositionner dans un contexte plus global, d'interroger sa dimension financière sur le moyen terme, de travailler à sa faisabilité.
- Une ingénierie administrative et financière qui permet d'avancer le projet au plus près de sa phase de réalisation. Elle intègre une dimension de recherche de financements permettant sa réalisation.
- L'assistance à maîtrise d'ouvrage du projet. Afin de piloter le projet dans sa phase opérationnelle, la collectivité doit être armée par une assistance à maitrise d'ouvrage.
Et au-delà de ces trois types d'ingénierie, ce qui fait défaut c'est aussi leur combinaison en cas de projets complexes et transversaux.
Que ce soit en termes de densité de l'écosystème local ou en termes de diversité de l'ingénierie nécessaire, les défaillances affectent particulièrement les petites communes, les communautés de communes et les zones rurales. Ces collectivités n'ont pas la surface financière pour avoir de l'ingénierie elle-même. Les maires ont une nostalgie d'un temps ou les divisions territoriales, les DDE étaient dans l'assistance pour l'exercice opérationnel des compétences.
L'État local ne répond plus vraiment à cette demande. Et ces collectivités n'ont pas les moyens d'y pourvoir par elles même : que ce soit par des postes ou par des crédits. Il existe donc une grande frustration de ces élus, parfois nouveaux dans la fonction, qui ne trouvent pas les leviers leur permettant d'exercer leurs compétences et de déployer les projets envisagés.
Il y a donc un profond écart entre les besoins des élus et la capacité d'intervention de l'État. En ce sens, l'intervention de l'ANCT est vue comme insuffisante et son offre partielle ou inadéquate face à l'ampleur des besoins. La communication de l'ANCT qui se dit avoir pour mission de « conseiller et de soutenir les collectivités territoriales et leurs groupements dans la conception, la définition et la mise en oeuvre de leurs projets » semble bien trop au-delà de ses capacités.
Dans son rapport « À la recherche de l 'État dans les territoires », Mme Agnès CANAYER et M. Éric KERROUCHE dressaient un constat sévère de l'action de l'État au niveau territorial. « L'offre d'État répond mal, voire pas du tout, aux besoins des collectivités territoriales »
Verbatim de maires et contribution écrite
« Il y a un décalage entre l'accompagnement proposé et les besoins réels des territoires. »
« On faut des balades urbaines, on colle des post-it, mais ce n'est pas ce que l'on attend, on a des problèmes de voirie. »
« L'ingénierie doit tendre à couvrir l'ensemble des projets portés par les maires. Il apparaît tout aussi important de disposer d'un soutien dans la phase préparatoire du projet que dans sa mise en oeuvre opérationnelle. » APV
« Les petites collectivités restent en attente d'une offre de « petite ingénierie » désertée depuis l'arrêt de l'ATESAT et non reprise, ni par le département, ni par les EPCI. » Une préfecture
2. Une approche encore trop descendante et peu attentive aux dynamiques locales
Le sentiment général des élus est que l'ANCT repose sur des logiques trop descendantes quand bien même le discours est bien rôdé sur le « cousu main », l'attention aux projets des territoires et la promotion d'une logique de confiance plutôt que de contrôle. L'attente des élus est que l'État privilégie le soutien, dans le cadre des priorités qu'il définit, à l'initiative ascendante : que ce soit dans ses programmes, dans ses contrats ou dans ses accompagnements.
Verbatim de maires et contribution écrite
« On doit laisser l'initiative locale, car les territoires sont dynamiques. »
«L'ANCT doit laisser le territoire s'emparer de ce qui marche, elle doit lâcher. »
« Le fonctionnement de l'ANCT est trop centralisé, ne fait pas assez confiance aux élus locaux et organismes locaux et aux services déconcentrés de l'État. » FNAU
a) Respecter les dynamiques locales et venir les appuyer
En terme de méthode, les élus locaux s'accordent à considérer que l'État central devrait être plus attentif aux démarches existantes. L'ANCT a lancé plusieurs programmes nationaux alors que des initiatives locales préexistaient, parfois de longue date, avec des objectifs ou des ambitions similaires. L'ANCT a largement ignoré ces dynamiques locales. Les élus estiment qu'il eut mieux valu apporter des moyens supplémentaires aux initiatives en cours, plutôt qu'en lancer de nouvelles avec parfois des effets de concurrence ou de compétition.
Contributions écrites des associations d'élus
« Les régions regrettent ainsi l'existence même de certains programmes mis en oeuvre par l'ANCT, sans véritable concertation préalable et qui recoupent parfois totalement les politiques qu'elles conduisent dans certains domaines depuis de nombreuses années. Le soutien aux villes moyennes et aux petites centralités et encore plus les contrats de relance et de transition Écologique (CRTE) constituent des exemples significatifs des dysfonctionnements engendrés par l'intervention de l'ANCT. (...). D'une manière générale, l'intervention de l'État dans ces domaines, en direct et à travers ses opérateurs, a de toute évidence largement perturbé les politiques menées par les Régions et rendu, en partie, illisible l'action publique pour un grand nombre d'élus et d'acteurs locaux, contribuant à générer et accentuer un mécontentement de la part de ces derniers. » RF
« La concentration des moyens sur quelques dispositifs peut avoir des effets pervers lorsqu'elle va rebours des organisations et priorités des territoires. » Ville et banlieue
«L'ANCT ne considère pas les territoires comme des territoires mais comme un lieu d'atterrissage de dispositifs nationaux silotés » Un maire
Les élus estiment que l'État devrait mettre en place des concertations sur les opérations à mettre en oeuvre et la manière de les réaliser avant de dérouler ses propres programmes.
De même, il devrait se contenter de fixer les grands objectifs et laisser les modalités d'organisation aux acteurs locaux là où chaque programme est très prescriptif sur les attendus et les dispositifs.
Cela passe aussi par une capacité à dérouler une communication équilibrée. Des élus estiment que l'agence à une certaine tendance à s'approprier les réussites, plutôt que de valoriser les dynamiques locales. L'ADF suggère de « mettre en place des communications adaptées aux contextes locaux et reconnaissant l'action des partenaires plutôt que déployer ce qui est souvent perçu comme une communication gouvernementale. »
b) Respecter le temps de l'appropriation des collectivités
Les programmes ou les dispositifs sont déployés au rythme qui correspond aux impératifs que se fixe l'État.
Beaucoup d'acteurs locaux ont signalé, par exemple, que les programmes ACV et PVD avaient été mis en oeuvre à « marche forcée ».
Les CRTE, qui auraient dû donner lieu à un travail de fond, nécessitant du temps et de la maturation, ont aussi été menés, conclus et signés à un rythme relativement incompatible avec ce type de démarche. Les acteurs qui en ont un sentiment positif soulignent souvent que le CRTE est venu conclure un processus local engagé antérieurement. Les élus qui n'étaient pas investis dans ces démarches ont souvent trouvé l'exercice superficiel et moyennement pertinent.
France service qui avait un objectif de déploiement de 2 000 maisons fin 2022, l'a atteint un an avant l'échéance.
Au final, ce sont les collectivités qui sont tenues de s'adapter à l'État. Par exemple, le travail fait sur les CRTE conduit la région Nouvelle Aquitaine à ne pas lancer, dans le cadre de sa nouvelle phase de « contrats de territoires » 24(*) 2023 -2025, de bilan ni de diagnostic face à la saturation des élus locaux vis-à-vis de ces démarches. La Région a été contrainte de passer directement de quelques grandes orientations stratégiques générales aux projets ou actions à soutenir pour ses contrats de territoire.
c) Réaliser des choix en commun pour créer de la cohésion
L'action de l'agence est perçue comme trop centralisée. Elle aurait pu ouvrir un dialogue avec les collectivités les plus importantes pour viser des choix partagés.
Le choix des villes retenues dans les programme PVD et ACV aurait pu être plus concerté, par exemple. Certes, il y a eu des discussions, notamment sur PVD, avec les conseils régionaux et les conseils départementaux, les associations d'élus (AMF, ADCF et AMRF) et les partenaires du programme. Mais, au final, certaines villes affectées d'un avis négatif des services de l'État (préfecture de département et de région) ont été retenues dans le programme ACV, comme des villes qui n'avaient rien demandé de particulier. Pour PVD, des villes initialement non retenues ont finalement été sélectionnés «après un coup de fil au préfet » au même titre que des villes qui ne souhaitaient pas l'être. L'avis des collectivités de niveau supérieur n'a pas réellement compté dans le processus.
L'AMF qualifiait cette méthodologie de « peu transparente » et concluait qu'elle créait un « sentiment d'iniquité sur les territoires ».
Une plus grande concertation, avec des choix partagés avec les régions ou les départements par exemple, aurait pu permettre d'améliorer le dialogue national/local.
d) Renouveler la contractualisation : les CRTE à mi-chemin
L'exemple des CRTE illustre ce mélange d'enthousiasme et de désillusion : entre promesse d'une approche différenciée et méthode globale dupliquée dans les territoires.
(1) Une philosophie saluée
La plupart des élus et de leurs associations saluent la philosophie des CRTE : une approche globale, ascendante, différenciée qui part des besoins du territoire et de ses réalités propres, et une volonté intégrative de l'ensemble des contrats existants.
La démarche a permis de fédérer les élus, parfois très différents (élus ruraux, élus urbains, élus de métropole...) en début de mandat autour d'un projet de territoire. Elle a permis de recenser tous les projets communaux et intercommunaux d'un territoire dans une vision à « 360° ». Parfois, les acteurs locaux ont souligné que c'était la première fois qu'une telle démarche était initiée. L'idée de disposer d'un contrat intégrateur, devant permettre la mise en cohérence des différents dispositifs existants, est appréciée. Elle a aussi permis de mettre les sujets liés aux transitions un peu plus au centre de la réflexion. Ces projets couvrent tout le territoire métropolitain et ultramarin, ce qui est aussi à souligner.
(2) Une réalisation critiquée
Les élus adressent trois critiques principales à cette réalisation :
- Une réalisation dans l'urgence sous la pression des préfectures, parfois relayée par les intercommunalités, alors que l'appropriation d'une démarche demande du temps.
- Un travail qualitatif inégal. Certains maires saluent le travail fait en commun à l'échelle intercommunale pour prioriser les projets et écarter ceux qui ne correspondaient pas à la philosophie du CRTE. D'autres regrettent une addition de projets communaux, sans mise en perspective, sans priorisation, sans stratégie et sans réelle plus-value.
- Une dimension « transition écologique » parfois très en retrait de l'objet initial. La logique de « relance » a clairement pris le pas sur l'ambition de « transition écologique ». Les projets soutenus étaient souvent déjà ficelés, même s'ils n'étaient pas forcément aussi vertueux qu'espérés.
Contributions écrites des associations d'élus
« Leur élaboration est perçue comme catastrophique par une partie des élus communaux et intercommunaux, notamment parce qu'elle a été menée dans l'urgence. » FNSCoT
« La déception générée par les CRTE (...) est à la hauteur de l'espoir suscité par la proposition simplificatrice en termes de guichet et des effets leviers attendus ». RF
(3) Un résultat questionné
Au final, les élus s'interrogent sur la réelle plus-value du CRTE d'un triple point de vue :
- Quelle cohérence y-a-t-il à s'interroger à nouveau sur la stratégie territoriale de façon déconnectée des démarches antérieures ou parallèles ? Il a été demandé aux élus de faire ou refaire un projet de territoire parfois sans lien avec la stratégie territoriale de long terme déjà engagée dans d'autres documents ou démarches.
- Est-ce que ce contrat qui se veut global se traduira en financements globaux ? Les élus souhaitent pouvoir s'appuyer sur des enveloppes globales territorialisées, fongibles et pluriannuelles. L'enveloppe financière CRTE devrait permettre de venir appuyer les projets de territoire, suivant leur état d'avancement et de priorisation, avec agilité et toujours au service de l'atteinte des objectifs partagés. Le financement devrait concrétiser ce changement de méthode : favoriser une dynamique ascendante grâce à la globalisation, l'agilité et la fongibilité des crédits et se défaire d'une logique opportuniste imposée par les appels à projets. Les territoires pourraient rendre compte de l'atteinte des objectifs ensuite.
- Est-ce que les services de l'État tireront toutes les conséquences de la méthode CRTE ? Les CRTE doivent permettre d'avoir un cadre stratégique de dialogue avec l'État au niveau territorial, pour sortir du dialogue en silo, politique publique par politique publique, et d'une attribution des crédits par des dispositifs aveugles les uns des autres. Or, le lien entre les CRTE et l'ensemble des programmes nationaux de l'agence n'est pas non plus évident, comme le souligne l'AMF qui évoque une « déconnexion » entre les deux. Les élus souhaitent notamment que les CRTE marquent la fin des appels à projets au profit de financements globaux. Le lien entre les CRTE, qui ont vocation à constituer la déclinaison territoriale des Contrats de Plan État Région (CPER) et ces derniers est aussi à revoir. Les CRTE sont actuellement pilotés par l'ANCT au niveau national mais suivis de manière hétérogène au plan local, chaque SGAR ayant développé son propre dispositif de pilotage, de suivi financier et d'évaluation. Les CPER sont pilotés par la DGCL. Cette dichotomie gagnerait à être mieux coordonnée.
Trois verbatim représentatifs de ces trois points :
Sur le point 1 : « La logique qui consiste à refaire régulièrement un nouveau projet de territoire ou un nouveau contrat qui sous prétexte de déclencher le développement et de faire prendre conscience aux élus ce qui est important pour leur territoire est absurde. » Un élu local
Sur le point 2 : « Nous avons créé la coquille, c'est une bonne chose ; mais maintenant il faut lui donner du contenu. Et cela ne peut être que de la valorisation de crédits, ce qui pourtant n'est aujourd'hui majoritairement pas le cas. » France Urbaine
Sur le point 3 : « Chaque catégorie de territoire se retrouve dans sa case, dans son programme. (...) Cette tendance à la gestion par programmes catégoriels s'oppose à la logique contractuelle, globale et transversale portée par les CRTE. » Un maire
(4) Un devenir incertain
Le portage politique des CRTE semble très inégal d'un territoire à l'autre. Il est souvent vécu plus comme un outil de rationalisation qu'un outil d'aménagement du territoire. Le temps sera un paramètre important pour que les élus s'approprient les CRTE afin d'en faire un réel outil stratégique d'aménagement du territoire. Le fait d'y adjoindre des moyens sera également un paramètre essentiel de leur devenir.
Contributions écrites des associations d'élus
« Les CRTE ne sont pas, à date, des outils que les Maires des Petites Villes se sont appropriés. » APVF
« Les intercommunalités attendent de savoir ce que l'État fera de ces contrats dans les prochains mois. » Enquête de l'AMF relative aux CRTE25(*)
e) Accompagner les dynamiques coopératives plutôt qu'agir sur chaque strate de collectivité
Il apparait aux acteurs, et en premier lieu aux élus locaux, que l'ACNT déploie une politique très sectorisée, là où au niveau local les collectivités sont dans des logiques imbriquées. Elle intervient par catégorie : petites villes, villes moyennes, villes de montagne, villes d'industries...
Or, un développement local réussi est à l'opposé d'une logique de silo, car il embarque toutes les collectivités d'un territoire, quelles que soient leurs caractéristiques, dans une dynamique globale.
Les élus font état d'un besoin plus net de favoriser les coopérations plutôt que d'aider chaque acteur de son niveau. L'ANCT devrait mieux appréhender cette logique de coopération des acteurs locaux et venir l'appuyer avec des dispositifs adaptés.
Contribution écrite
« Au-delà d'une approche par programme et donc par strate de collectivités, c'est la capacité de donner une réalité opérationnelle à la notion de cohésion dans la méthode, et donc d'accompagner aussi des logiques de coopération interterritoriale à l'échelle de systèmes territoriaux. Car une petite ville, une ville moyenne ou une grande ville sont toutes confrontés aux charges de centralité et à la responsabilité de structurer un bassin de vie, indépendamment de leur taille démographique (...). Les urgences nous obligent encore plus en ce sens. Alimentation, mobilité, énergie, sécurisation et préservation de la ressource en eau, zones à faible émission, objectif zéro artificialisation nette ... tout cela se pense en complémentarité au-delà des frontières institutionnelles. » France Urbaine
f) Trouver une articulation avec le niveau régional
L'agence doit imaginer une forme d'articulation avec le niveau régional.
C'est au niveau régional que sont en principe définies les grandes orientations politiques et stratégiques en matière d'aménagement du territoire et, plus largement, de cohésion territoriale (SRADDET, SRDEII, CPIER massifs et fleuves, politique européenne de cohésion FEDER/FSE, politique européenne de développement rural FEADER dont LEADER...).
C'est avec le Conseil régional que sont négociées les contractualisations les plus structurantes (CPER dont le volet territorial, contrats interrégionaux de bassins et massifs, politiques territoriales contractualisées spécifiques des Régions...).
C'est au niveau régional que se coordonnent les financeurs des projets majeurs du territoire, dont les aides européennes, la déclinaison financière des contrats cités ci-dessus et divers financements : programme national de reprise et de résilience (PNRR), plan de relance, dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT), etc.
C'est enfin au niveau régional qu'est organisée la gouvernance territoriale des grands opérateurs nationaux partenaires de l'ANCT comme le CEREMA, l'ADEME, la Banque des Territoires, etc.
Le comité des financeurs de l'agence
Prévu par les textes, le comité des financeurs commence seulement à se mettre en place en 2022. Il ne semble pas être une instance opérationnelle malgré l'intérêt qu'il présente. Régions de France estime que le rôle des Régions ne peut pas se cantonner à participer à un tour de table financier en fin de procédure, sans prendre part à un dialogue amont sur les projets à soutenir et la vision d'aménagement du territoire à promouvoir.
Les élus estiment qu'un dialogue stratégique et interministériel avec l'État sur les territoires serait pertinent, afin de déterminer des modalités d'accompagnement intégrées et globales répondant aux grandes transitions à conduire. L'ANCT doit réfléchir à intégrer le niveau régional.
3. Une simplification et un meilleur soutien aux projets locaux qui n'a pas eu lieu
L'une des vocations de l'ANCT était de simplifier les démarches des collectivités et porteurs de projets en leur assurant un interlocuteur unique, via son délégué territorial, pour les accompagner dans leurs projets et démarches. Il existait aussi l'espoir, à travers la mise en place de programmes et dispositifs, qu'un niveau de financement plus important serait mis en oeuvre.
a) L'espoir de simplification s'est transformé en sentiment de complexification
Globalement les élus ont le sentiment de complexité, de lourdeur et de bureaucratie sur les trois missions de l'agence : programmes, CRTE et accès à l'ingénierie.
Sur les programmes : « L'ANCT est un outil de centralisation et des procédures, inutilement lourdes. Tous les départements doivent-il clore leur appel à projet politique de la ville le même jour ? Et sous la même forme ? Les « produits administratifs » descendants sont voulus comme homogènes par l'État central : Cité Éducative, Cité de l'Emploi... » Ville et Banlieue
Sur les CRTE : « La dimension « intégratrice » du CRTE est jugée trop complexe et lourde à gérer : multiplicité des durées, des périmètres et des acteurs concernés les différents dispositifs publics et ne répond pas à la simplification attendue. » Enquête AMF relative aux CRTE
Sur l'ingénierie : « On avait promis aux élus la simplification des démarches pour accéder à l'ingénierie, et à ce stade, c'est une nouvelle strate un peu opaque qui s'est ajoutée. » Un maire
b) L'ANCT utilise et relaie les appels à projet (AAP) au lieu de chercher à les diminuer
Les appels à projet (AAP) sont unanimement décriés, et depuis longtemps, par les élus et leurs associations. Nombreux sont les rapports du Sénat qui relaient la recommandation de les réduire.
Les élus attendaient que la structure garante de la cohésion des territoires et du lien avec les collectivités, évite, a minima, de recourir à cette modalité de fonctionnement. Or, force est de constater que non seulement l'ANCT ne semble pas avoir ralenti l'usage, par les ministères et les opérateurs, de cette modalité d'intervention vis-à-vis des collectivités, mais, qu'en plus, elle appui ses propres programmes et dispositifs sur des appels à projets.
Verbatim et contribution écrite
« Ne sous-estimons pas la fatigue et la lassitude générée par les AAP, voire la défiance parfois dans les conditions de contractualisation avec l'État. » France Urbaine
« Elle n'a pas empêché le fonctionnement par AAP qui pourtant était nommément décrié. » Un maire
« Les AAP sont sans doute intellectuellement satisfaisants vus de Paris, mais souffrent de faiblesses majeures localement : l'opportunisme est valorisé sur le travail de fond. » Une préfecture
c) Le guichet unique insuffisamment opérationnel
« L'agence est une porte d'entrée unique, facilitatrice des projets locaux. Les objectifs de clarté et de lisibilité seront au coeur de notre action » déclarait Caroline Cayeux, la première présidente de l'ANCT, dans le vade-mecum de l'agence.
Pourtant cette mission de guichet unique espérée n'est pas clairement identifiée par les élus. Pour certains d'entre eux, le sentiment que les informations sont éparpillées selon les ministères compétents, entre les agences de l'État (ANCT et les autres) et même entre services de l'ANCT, demeure vivace. Le guichet unique ne semble pas une réalité opérationnelle.
Contribution écrite
« Sous prétexte de les simplifier, l'État ne fait que complexifier les dispositifs alloués aux territoires, conduisant à un véritable maquis administratif. » Région de France
« Il y aurait intérêt à préciser les rôles respectifs de l'ANCT et du CEREMA qui nous paraissent se chevaucher dans leurs missions d'autant que le CEREMA rentre en 2023 en tant que prestataire « in house » dans les collectivités adhérentes. » Association des Ingénieurs Territoriaux de France
La mission a interrogé les préfectures sur ce point. À travers les réponses collectées, il semble en effet que les outils de type « mail unique » ou « plateforme dédiée » ne sont pas généralisés.
MODALITÉS DES DEMANDES D'INGÉNIERIE FAITES PAR UN ÉLU LOCAL
Modalité de recueil |
Cité ... fois |
% sur l'échantillon |
Modalités traditionnelles (courrier, mail, discussion lors de réunions, visite de terrain...) |
42 |
76% |
Mail unique |
21 |
38% |
Autre outil : plateforme dédiée, numéro dédié, outil collaboratif |
11 |
20% |
Source : Questionnaire Sénat auprès des préfectures
d) Le besoin de pluriannualité et de fongibilité toujours insatisfait
Les élus sont en attente de visibilité financière afin de mener à bien leurs projets. Ils estiment que des enveloppes globales et fongibles sur la durée du mandat, reposant sur des indicateurs et des objectifs partagés, seraient de nature à leur simplifier la tâche.
Cette pluriannualité existe parfois chez les partenaires de l'État, parfois même pour l'État (comme les CPER), mais de façon trop limitée. Les élus attendent que l'ANCT relaye et concrétise cette attente auprès des ministères.
Sur le Fonds vert, par exemple, s'il semble acquis que son attribution ne se fera pas par AAP, plusieurs acteurs souhaitent qu'il puisse inaugurer un nouveau fonctionnement : enveloppe globale, crédits fongibles, attribution déconcentrée.
e) Le besoin non couvert de financements nouveaux
Les élus estiment que le niveau de financement des projets est inadapté.
Ils ont exprimé leur incompréhension face au déploiement de programmes nationaux, d'actions, de dispositifs et de contrats nouveaux, qui ne reposent, au final, que sur des sources de financement traditionnelles (DSIL, DETR...).
Pire, ils estiment que l'aide à l'ingénierie vient parfois nourrir cette frustration : l'ANCT apporte une aide en amont pour préparer le projet mais pas de soutien réel pour sa réalisation.
Le rapport du Sénat « Revitalisation des centres-villes et des centres-bourgs : entre enthousiasme et frustrations » 26(*) précédemment cité, a montré que cette attente déçue entrainait une forme de frustration des élus. À titre d'exemple, une ville retenue dans le programme PVD se voit bien financer l'ingénierie, notamment à travers son poste de chef de projet, mais n'obtient pas de financement complémentaire pour ses projets. Elle doit solliciter les dotations déconcentrées de l'État comme toute autre collectivité. Au final, certains élus locaux finissent par considérer qu'être retenu dans ces programmes nationaux n'est qu'une forme d'habillage de crédits de droit commun.
Verbatim
« On ne voit pas l'intérêt des nouveaux dispositifs qui vont chercher leur financement sur les outils traditionnels DETR et DSIL. On complexifie pour rien. » Un maire
« Sans financement spécifique nos maires n'ont pas vu d'intérêt au CRTE. » Un maire
« L'appel d'air en ambitions de projets à mener ne s'est pas accompagné de moyens dédiés pour la réalisation des travaux » Une préfecture
Les Maisons France service représentent bien ce sentiment d'ambivalence des élus locaux. Les élus expriment une satisfaction sur ce dispositif qui permet de maintenir du service public au plus près des territoires et des critiques liés à la faiblesse de l'aide de l'État (30 000 euros) qui les conduit à financer elles-mêmes ces missions parfois éloignées de leur compétences traditionnelles.
Les programmes nationaux qui proposent des financements nouveaux génèrent naturellement un niveau de satisfaction très supérieur. Ainsi, le Plan Avenir Montagne a été salué car « il repose sur du vrai argent qui est réel, des crédits vraiment nouveaux » selon les termes d'un élu local. Le Fonds vert est une première réponse sur les questions de transition écologique secteur où cette attente est particulièrement forte. Le dernier rapport d'I4CE27(*) montre que l'investissement des collectivités en matière de transition devrait être rehaussé de 6,5 Md€ par an pour être dans les trajectoires de la neutralité carbone.
Verbatim de maires
« L'État met en place des machins qui sclérosent la capacité des élus à oeuvrer. Le principe même de libre administration n'existe plus face à ces dispositifs. »
« Les élus locaux ont souvent le sentiment d'exercer leurs fonctions « à la demande de l'État » sur des programmations dont les exigences sont de plus en plus lourdes (définition du projet, fiches techniques, temps, ressources...) et dont les résultats s'avèrent souvent décevants. »
I. III. PROPOSITIONS
La conviction de vos rapporteurs, c'est que l'ANCT ne pourra réussir qu'au niveau local, dans la proximité avec les élus. L'agence parisienne, tête de réseau, ne sera en capacité de donner sa pleine mesure qu'en étant en appui d'un réseau local efficace et reconnu, ce qui n'est pas encore le cas. Notre première série de recommandations vise ainsi à rapprocher l'agence des élus locaux.
Il est aussi temps que l'agence opère un rééquilibrage entre ses missions. Vos rapporteurs considèrent que les programmes nationaux sont bien installés et que les efforts de l'agence doivent maintenant porter sur la principale attente des collectivités relative à l'ingénierie. Voilà pourquoi notre deuxième série de recommandations porte sur l'accès des collectivités à cette ingénierie.
Enfin notre troisième série de recommandations vise à consolider et simplifier l'existant.
La philosophie sous-jacente à ces trois séries de recommandations est que l'État fasse plus confiance aux acteurs locaux : aux élus, aux collectivités et même à ses propres services déconcentrés. L'ANCT doit venir appuyer l'existant plutôt qu'empiler programmes, contrats et dispositifs sur une impulsion nationale.
Contribution écrite et verbatim
« Il faut une confiance dans les capacités des territoires et des élus locaux à concevoir, dans le respect des objectifs nationaux, des solutions et des démarches communes plutôt que le parachutage et la gestion rigide de dispositifs `prêts à porter'. » Ville et banlieue
« Les bons projets, ce sont les élus qui les mènent en ratissant le terrain et ils ne sortent pas des contrats. » Un maire
« Laissons aux territoires la capacité d'imaginer les solutions. On sait faire, on connait nos forces et faiblesses ». Un maire
1. Rapprocher l'agence des élus locaux
a) Organiser des temps d'échange avec les élus locaux pour nourrir le débat national et aboutir à une feuille de route 2023-2026
(1) Des temps d'échanges avec les élus locaux
La conviction de vos rapporteurs est que des temps d'échange entre l'ANCT et les élus locaux pourraient être bénéfiques à l'agence. Ces échanges pourraient prendre la forme de réunions déconcentrées hors préfecture. L'enjeu serait d'évoquer, avec les élus locaux, le bilan et les perspectives de l'agence.
Ces réunions auraient le mérite de projeter l'agence sur le terrain, de la faire connaitre, de la confronter aux perceptions locales et sans doute de renforcer la cohésion entre niveau local et national de l'ANCT. Elles permettraient aussi de recueillir la perception des élus locaux sur leurs besoins et attentes, ainsi que des suggestions pertinentes pour l'avenir.
Le discours critique des élus et des associations d'élus doivent nourrir le débat qui doit aboutir à des choix.
Verbatim de maires
« Cette agence, les élus ne s'y sont pas intéressés car ils ont reçus du papier. Il fallait leur expliquer, aller vers eux. »
« Il y a un besoin d'accompagnement des territoires : il faut des gens en face des flyers ! »
« Une agence, c'est ésotérique, elle doit être incarnée par des hommes et des femmes. »
(2) Un débat au sein du Conseil d'Administration de l'agence
Les élus apprécient l'innovation au niveau de la gouvernance de l'agence avec la présence d'associations d'élus des territoires au sein de son conseil d'administration (CA) et sa présidence confiée à un élu local.
Le CA a été salué pour la qualité de ses membres par tous les interlocuteurs ayant eu à interagir avec lui.
Il y a aussi un sujet d'ouverture de ce CA à certains acteurs de l'ingénierie locale qui gagneraient à y porter une voix consultative comme la Fédération nationale des agences d'urbanisme (FNAU), l'Association nationale des Directrices et Directeurs des Agences Techniques Départementales (AnDAtd), ou d'autres acteurs de ce type à identifier.
Pour autant, il ressort clairement des auditions que ce CA, y compris pour ses acteurs, n'est pas suffisamment l'instance de débats et de réflexions entre État et Territoires qu'il devrait être.
Recommandation n° 1 : Organiser des temps d'échange déconcentré avec les élus locaux relatifs au premier bilan et aux perspectives de l'agence, afin de nourrir le débat national État/Territoires et permettre à son conseil d'administration d'élaborer une feuille de route stratégique 2023-2026 de l'ANCT. Ces temps d'échange pourraient être organisés par région et de préférence hors des préfectures pour éviter que ce soit des temps d'information descendante. Ils pourraient être organisés dans une collectivité lauréate d'un programme, bénéficiaire d'un dispositif, en invitant les élus des autres collectivités. Il faut une pédagogie qui se base sur le retour d'expérience et la preuve par l'exemple. L'initiative de l'ANCTour, organisé en janvier à Paris, ne semble pas répondre à ce besoin. La nouvelle feuille de route doit s'écarter du document précédent, qui était centré sur les modalités d'action de l'agence, pour fixer des objectifs à atteindre et retenir des priorités lisibles. L'agence doit prendre le temps de construire ce document en lien avec les contributions des délégués territoriaux adjoints, des élus locaux et de ses différents partenaires pour la présenter avant l'été 2023. Cette recommandation devra s'articuler avec la recommandation 10. |
b) Accentuer la mobilisation du corps préfectoral
La priorité semble d'assurer la déclinaison territoriale de l'action de l'ANCT. Cela passe par un délégué territorial mieux identifiable et une action réellement proactive en direction de l'ensemble des élus et acteurs des territoires.
Certains préfets s'en sont remarquablement saisis et ont fait exister l'ANCT au niveau local avec des résultats encourageants. Mais ce n'est pas une généralité tant l'investissement des préfets apparait, à tous les observateurs, inégal d'un département à l'autre.
Plusieurs pistes peuvent être avancées :
- Positionner le sous-préfet d'arrondissement comme point d'entrée principal dans l'accompagnement des projets des élus et les questions d'ingénierie, de par le lien direct et privilégié qu'ils entretiennent avec eux. Cela induit qu'ils orientent et relaient les offres de l'ANCT ou de ses partenaires. Cela implique qu'ils soient en lien étroit avec les DDT. Ils doivent être l'interlocuteur de premier niveau sur l'ingénierie.
- Adresser aux préfets une instruction, réalisée par le ministère de la Cohésion des Territoires et le ministère de l'Intérieur, relative aux attendus en termes de fonctionnement de l'agence au niveau territorial.
- Intégrer plus systématiquement, dans les feuilles de route interministérielles des préfets, des objectifs liés à l'action de l'ANCT au-delà de seuls éléments quantitatifs liés aux programmes de l'ANCT (nombre de créations d'espaces France Services par exemple). Les enjeux de contribuer à la structuration de l'écosystème local d'ingénierie pourraient être rappelés dans les départements concernés. Pour rappel, l'atteinte de ces objectifs sert à déterminer 50 % de la part variable de la rémunération annuelle des préfets.
- Poursuivre le travail de conviction en le faisant aussi reposer sur l'émulation collective. L'ANCT pourrait animer des temps d'échange, au moins annuel, entre préfets : retour d'expérience, échange de bonnes pratiques, mobilisation de l'intelligence collective pour dégager des pistes de progression. Cette animation pourrait être plus régulière pour les sous-préfets « ingénierie » et des sous-préfets d'arrondissement.
- Améliorer la formation des préfets et, particulièrement, des sous-préfets. L'IGA dans son rapport28(*) insistait plus largement sur les carences des décideurs locaux, de l'État territorial comme des élus locaux et des administrateurs territoriaux, en matière de formation aux questions d'aménagement, de développement et de cohésion du territoire, alors que ce sont des enjeux majeurs dans les territoires urbains et ruraux et qu'ils sont très évolutifs. Des initiatives existent et vont dans le bon sens29(*). Elles doivent être amplifiées et surtout dirigées vers l'intégralité du corps préfectoral, à commencer par les préfets. L'intégration de ces sujets dans les formations initiales des grandes écoles de la fonction publique (INSP, INET...) doit progresser.
- Travailler à la mobilité entre les fonctions publiques, notamment en poursuivant les mobilités entre fonction publique d'État et territoriale, et l'ouverture des postes de sous-préfets à des profils de développeur.
- Intégrer dans l'évaluation des préfets et des sous-préfets des objectifs plus précis autour de leurs rôles relatifs aux missions de l'agence. La direction de la modernisation et de l'administration territoriale (DMAT) souligne que la procédure d'évaluation des préfets est une des plus aboutie parmi les procédures d'évaluation de l'encadrement supérieur de l'État30(*). Il semble utile à vos rapporteurs qu'il faille accentuer fortement les éléments relatifs aux missions ANCT, au moins le temps de la montée en puissance de l'agence.
- Être également attentif à l'appropriation des dispositifs par les services déconcentrés. Trop souvent, ces derniers découvrent les dispositifs alors qu'ils sont lancés, sont informés après les collectivités, se retrouvent face à celles-ci sans réponse ou sans élément de langage. Une préfecture suggère que soient créés, auprès de l'ANCT, des groupes « tests » ou « miroirs », issus des administrations déconcentrées de l'État et ayant des compétences confirmées en matière juridique, financière et de perception des politiques publiques auprès des élus, afin d'affiner l'élaboration des dispositifs, voire des programmes, menés à l'avenir par l'Agence.
- Favoriser le lien entre les niveaux centraux et locaux. Une préfecture suggère par exemple « d'établir une » rencontre annuelle ou bisannuelle entre l'ANCT et les délégués territoriaux, pour resserrer les liens entre les niveaux central et local et échanger sur l'actualité des politiques portées par l'Agence, dans un sens ascendant et descendant. »
Recommandation n° 2 : Positionner par défaut le sous-préfet d'arrondissement comme interlocuteur de premier niveau sur les questions d'ingénierie : orientation, relai des offres, suivi des projets ; Mieux intégrer la mission de délégué territorial de l'agence dans la formation, l'animation et l'évaluation des préfets et sous-préfets et dynamiser cette mission par des instructions régulières. |
c) Doubler le nombre de chargés de mission territoriaux de l'ANCT qui sont en lien avec les préfets et sous-préfets
De nombreuses missions sont concentrées sur les préfets de département. Leur rôle de délégué territorial de l'agence est loin d'être la plus prioritaire. Vos rapporteurs proposent que les chargés de mission territoriaux (chargés de mission de l'Agence qui sont en interface avec les territoires) puissent venir appuyer localement les préfets.
Un schéma à étudier pourrait être le suivant :
- Doubler le nombre de chargés de mission territoriaux (8 actuellement) pour qu'il y en ait au moins un par région.
- Conserver leur rattachement et supervision au niveau national, mais les organiser par pools territoriaux de niveau supra-régional pour éviter leur isolement.
- Opérer ce renforcement au bénéfice des territoires le nécessitant le plus.
- Renforcer la dimension de projection sur le terrain dans leur fiche de poste, au plus près des préfets et sous-préfets. Ils pourraient être présents sur des évènements, sur des projets structurants.
- Orienter leur mission à une assistance du préfet et sous-préfets, un peu à l'image du réseau des chefs de projet ANRU. Ils doivent intervenir pour accompagner les dynamiques locales, rassurer, apporter leur expertise et leur connaissance des dispositifs de l'agence. Ils doivent avoir une bonne connaissance des offres d'ingénierie mobilisables. Ils pourraient aussi accompagner la réalisation des inventaires de l'ingénierie, l'animation des CLCT, la coordination des acteurs, ... quand ce n'est pas encore fait au niveau local. Ils seraient chargés d'assurer la coordination des actions des services, de s'intégrer aux démarches partenariales et d'assurer un rôle de pivot entre les acteurs.
Ce système pourrait aussi avoir l'intérêt de faciliter une vision régionale et donc le dialogue avec les Régions, notamment pour mieux mobiliser les DREAL sur certains enjeux.
En complément, le fait de nommer -comme délégué territorial adjoint- un agent de la direction départementale des territoires (et de la mer) semble une bonne pratique. Les acteurs soulignent que, lorsque c'est le cas, la transversalité entre les services déconcentrés de l'État est améliorée, les échanges plus fluides et le fonctionnement en mode projet mieux établi.
Recommandation n° 3 : Doubler le nombre de chargés de mission territoriaux afin d'appuyer les préfets et sous-préfets. La mesure se chiffre à environ 670 000 euros/an. |
d) Établir un lien avec les Régions
Recommandation n° 4 : Engager un dialogue avec les Conseils régionaux et les préfectures de régions pour intégrer le niveau régional dans le fonctionnement de l'agence d'ici à mi-2023. |
e) Refondre la communication
Les précédentes recommandations visent déjà à améliorer la visibilité et l'incarnation de l'agence, notamment au niveau local. Mais cela doit sans doute s'accompagner d'une communication plus ciblée, moins foisonnante, moins dispersée et moins silotée par programme.
Comme le résume une préfecture « la lisibilité des dispositifs de l'ANCT est fondamentale pour permettre l'acculturation, d'abord par les agents de l'État, puis par les collectivités locales, du champ des possibles. Il importe vraiment d'avoir un bouquet de dispositifs simples, peu nombreux et stables, pour que les acteurs locaux puissent se les approprier ».
Il apparait à vos rapporteurs que l'ANCT gagnerait à :
- Réaliser un guide pratique pour les élus locaux. Ce guide pratique aurait vocation à actualiser et remplacer la version du vade-mecum élaborée au démarrage de l'agence. La grande majorité des élus a besoin d'appréhender, de façon pédagogique, la logique de l'agence vue comme un tout cohérent, des offres qu'elle propose et des moyens d'y accéder.
- Veiller à une communication plus fluide et plus lisible auprès des services déconcentrés de l'État qui ont du mal à suivre la communication de l'agence et du mal à s'approprier ses dispositifs. La diffusion d'information devrait viser les services de l'État avant même les élus pour leur permettre de se l'approprier et de la relayer. À titre d'exemple, l'enquête réalisée auprès des préfectures faisait ressortir plusieurs demandes de « catalogue unique des prestations offertes par l'ANCT classées par thèmes ».
- Réduire le nombre de supports nationaux et fournir plutôt des éléments pour nourrir une communication déconcentrée, réalisée par les services de l'État. Ces supports réguliers peuvent être des lettres d'informations adressés aux maires et exécutifs des territoires. Une newsletter régulière, facilement réutilisable, pour les DTA serait pertinente.
- Faire connaitre l'offre d'assistance à maitrise d'ouvrage publique en matière de revitalisation commerciale, y compris aux délégués territoriaux, car elle reste trop confidentielle même si les besoins en la matière sont nombreux.
- Valoriser ses offres dans le domaine des données, des études, des éléments documentaires qu'elle peut apporter aux territoires.
- Adjoindre à cette communication écrite des temps de rencontres physiques. Une réunion ouverte à tous les exécutifs des collectivités organisées par chaque sous-préfet d'arrondissement, une fois par an, de présentation des possibilités offertes par l'ANCT -localement et nationalement- serait utile. Elle pourrait aussi intégrer la présence physique de l'agence, à chaque fois que cela est possible, à des évènements départementaux ou régionaux où les élus locaux sont présents.
- L'agence devrait utiliser davantage le retour d'expérience d'élus ayant bénéficié de ses offres. Leur témoignage est plus à même d'impacter leurs pairs. Les maires et les élus bénéficiaires des dispositifs de l'ANCT doivent être des ambassadeurs de ces dispositifs.
- Activer, lorsque c'est pertinent, le relai des associations d'élus qui sont prêtes à jouer ce rôle et ont un meilleur impact sur les élus de terrain. Comme l'écrit Ville de France, «les meilleurs ambassadeurs de l'ANCT, en dehors des préfets, restent les différentes associations d'élus membres du Conseil d'administration de l'agence, qui relaient assez largement dans leurs réseaux d'adhérents respectifs les appels à projets et initiatives de l'ANCT. » De nombreuses associations d'élus pourraient jouer ce rôle et, notamment, l'AMF avec son réseau d'associations départementales, qui confirme qu'elle « peut-être un point d'ancrage de l'ANCT ».
Recommandation n°5 : Privilégier une communication plus simple, plus sobre et déconcentrée qui repose aussi sur le retour d'expérience des élus locaux et de leurs associations. Elle pourrait notamment prendre la forme d'un guide pratique pour les élus locaux. |
2. Viser prioritairement le développement de l'ingénierie des territoires
Face aux enjeux de complexification de l'action publique, de densification de l'environnement réglementaire et technique, de transition environnementale et de resserrement des marges de manoeuvre financières, l'accès à l'ingénierie doit devenir une grande cause nationale.
Vos rapporteurs veulent rappeler qu'il est stratégique, pour la cohésion du pays et la réussite des grandes transitions, que les territoires soient dotés d'un socle minimal d'ingénierie nécessaire à l'exercice de leurs compétences, au montage de leurs projets, à la recherche de financements et leur permettant d'accéder à une ingénierie de second niveau.
À ce titre, l'audition de l'ANPP a permis de revenir sur une proposition faite par l'Association sous forme de pétition qui a recueilli un fort succès auprès des élus locaux, avec 11 500 signatures à ce jour31(*). La principale proposition de cette pétition consiste à demander que seulement 1 % des volumes financiers dédiés aux politiques d'investissement soit consacré au financement de l'ingénierie territoriale.
Vos rapporteurs veulent saluer et relayer cette proposition et demandent que sa faisabilité soit sérieusement étudiée. Il pourrait s'agir d'une cotisation sur l'investissement des collectivités, qui serait sans doute très inférieure à 1 % dans la réalité, qui permettrait de financer un fonds mutualisé ou renforcer les structures d'ingénierie locale au service des collectivités.
Recommandation n°6 : Missionner l'ANCT/DGCL pour étudier les scénarii de mise en place d'un système « 1 % ou plutôt 0,1 % ingénierie » sous forme d'un fonds national, financé par les crédits d'investissement destiné à financer l'ingénierie mutualisée. |
L'ANCT doit jouer un rôle à chaque étape de la structuration de l'ingénierie lorsque c'est nécessaire et doit solidifier les écosystèmes par des moyens complémentaires.
a) En réalisant le recensement de l'ingénierie locale
L'ingénierie locale existe et s'est développée depuis le retrait de l'État32(*) essentiellement au niveau régional, départemental et intercommunal.
L'ingénierie est portée par une pluralité d'acteurs locaux : nous venons d'évoquer le rôle des départements et de leurs agences techniques, il existe aussi les intercommunalités qui constituent une échelle de mutualisation des services assez évidente, les régions qui peuvent jouer sur un effet d'échelle, les conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE), les agences d'urbanisme et les centres de gestion, les structure plus spécialisées (SEM, EPF...) et évidement tous les acteurs de l'ingénierie privée (selon la fédération professionnelle Syntec-Ingénierie, l'ingénierie privée concentre 70 000 établissements, qui comptent près de 312 000 collaborateurs). Chaque département présente une configuration différente.
Recenser est une tâche qui demande un peu de temps et de travail collaboratif. Parfois, le travail a été réalisé par la région, le département, certains services déconcentrés de l'État ou encore par ces acteurs en lien les uns avec les autres.
L'ANCT avait bien pour mission de contribuer à ces recensements, comme le rappelle son vade-mecum. Elle s'appuie notamment, à ce titre, sur la plateforme « Aides-Territoires » 33(*).
Des services déconcentrés sont allés plus loin en réalisant des inventaires locaux. Certains34(*) sont clairs, pédagogiques, distinguant à la fois les grands types d'ingénierie, présentant les acteurs et les offres.
Ces recensements locaux semblent indispensables. Ils permettent :
- de se connaitre et de commencer à se mettre en réseau.
- de repérer les manques, les doublons, les complémentarités.
- de mettre en perspective ses savoir-faire et de réfléchir à la mise en valeur de cette diversité.
- d'appréhender la suite, pour une collectivité bénéficiant d'un soutien de l'ANCT sur la phase amont de son projet : avec quel opérateur et via quel levier d'accompagnement sera-t-il le plus pertinent de prendre le relai afin d'assurer la réalisation du projet ?
Les acteurs locaux confirment l'utilité d'une telle démarche. Ces catalogues ont fait l'objet d'un envoi à tous les maires. Ils sont utilisés par certains élus et par les administrations (DGS et chefs de projet, par exemple). Ils constituent un outil de référence aussi pour les praticiens de l'ingénierie.
Cette tâche est notamment attendue dans les territoires ultramarins. De façon à mieux identifier le « qui fait quoi », les conditions d'intervention respectives de ces différentes aides, leurs articulations et complémentarités, l'ANCT, dans le cadre de son partenariat avec la DGOM, nous a signalé conduire actuellement un travail de recensement des offres d'ingénierie publiques et parapubliques mobilisables du côté des ministères et opérateurs nationaux pour les outre-mer. L'objectif est de disposer d'une cartographie comparée de l'offre des nombreux acteurs : ANCT, Banque des Territoires, AFD, ADEME, CEREMA, ANAH, ANRU, DGOM, Atout France, OFB...
Le problème vient du fait qu'ils sont trop rares. La plupart des départements n'a pas engagé cette démarche. Les retours obtenus au questionnaire du Sénat diffusé aux préfectures permettent de documenter ce point.
RÉALISATION D'UN INVENTAIRE DE
L'INGÉNIERIE LOCALE
Existence d'un inventaire de l'ingénierie locale |
Nombre |
Pourcentage |
Absence d'inventaire |
32 |
51% |
Actions éparses (réunion de coordination, échanges informels...) mais pas d'inventaire |
18 |
29% |
Inventaire déjà réalisé par les services de la préfecture ou existant |
11 +2 en cours |
21% |
Source : Questionnaire du Sénat auprès des préfectures
Le travail doit donc être poursuivi.
Recommandation n°7 : Terminer les recensements départementaux de l'ingénierie, en partenariat avec les acteurs locaux, en particulier les conseils départementaux et régionaux, pour l'été 2023. |
b) En mettant en place un système de recueil des demandes
La situation est très différente d'un département à l'autre. Un point essentiel semble être la capacité de recueil des demandes des élus.
C'est ce qui explique que vos rapporteurs formulent la recommandation n° 2 relative au rôle de premier contact que devrait jouer le sous-préfet d'arrondissement. Il doit être l'interlocuteur de premier niveau des élus sur toutes les questions de ces derniers relatives à l'ingénierie.
À l'image de certains départements qui se sont organisés, des bonnes pratiques peuvent être promues, comme par exemple la mise en place d'un guichet unique, d'une plateforme type « démarche simplifiée » de recueil, traitement et suivi des besoins des collectivités, la mise en place d'une adresse mail générique destinée à recevoir questionnements et demandes relatives à l'ingénierie.
c) En organisant le dialogue entre acteurs locaux
Certains départements ont des pratiques établies de dialogue entre acteurs. « Ils ont monté des comités très opérationnels qui permettent de répartir les projets des collectivités entre différents acteurs locaux de l'ingénierie pour des appuis sans concurrence » affirme le Cerema.
A défaut de pratiques établies et à certaines conditions, le préfet peut contribuer à impulser une dynamique d'animation et de structuration de l'ingénierie locale. L'objectif est de renforcer le lien entre les acteurs, la coordination des interventions et la diffusion des réussites. Le CLCT peut offrir le cadre et quelques bonnes pratiques permettraient d'améliorer leur fonctionnement :
- Une coprésidence avec le département (en cohérence avec la recommandation précédente) et une meilleure association à rechercher avec les associations d'élus locaux : association départementale des Maires de France, Association départementale des Maires Ruraux notamment.
- Un dédoublement du CLCT avec une formation en mode plus stratégique et une formation de revue de projets. Les formations « stratégiques » pourraient adopter des approches par thématique peut-être plus concrètes pour les élus. Les formations « revue de projets » auraient pour objet de flécher très concrètement les ressources, pour les collectivités, avec les représentants de l'ingénierie locale. Il s'agirait bien de dispatcher les opérations en fonction de leur complexité, et de s'organiser en mode projet, en désignant un responsable par projet - qui n'est pas nécessairement un agent de l'État ou de ses opérateurs - avec des objectifs clairs et des comptes rendus réguliers.
- Une fréquence de réunions régulières pour les instances techniques qui deviendraient alors des lieux de débat et de travail.
- Une véritable animation pour renforcer le partage d'expérience, la mise en réseau, la réflexion prospective. L'animation locale doit trouver son point d'équilibre entre collectivités, acteurs de l'ingénierie et État. Les référents territoriaux, une fois leur nombre augmenté, pourraient être plus impliqués dans le fonctionnement de ces CLCT.
- Ces échanges doivent permettre, comme cela était prévu, de réaliser des feuilles de route.
Au niveau national, l'ANCT a organisé deux éditions du club de l'ingénierie. Cet évènement a pour mission de faciliter l'accès des porteurs de projets à l'ingénierie juridique, financière et technique, publique ou privée. Il se compose des têtes de réseau de l'ingénierie publique et privée et des opérateurs partenaires de l'ANCT. C'est un lieu d'échanges, d'information, de partage des capacités d'action, mais aussi des difficultés rencontrées par les acteurs de l'ingénierie dans les territoires d'intervention de l'Agence. Ce dialogue doit contribuer à structurer l'offre d'ingénierie existante, afin de la rendre plus visible et plus accessible pour les acteurs locaux. Les retours entendus lors des auditions sont mitigés sur cet évènement. Cette initiative semble plutôt éloignée du véritable enjeu qui consiste à susciter ce dialogue au niveau local.
Recommandation n°8 : Sur les territoires où la dynamique d'animation et de structuration de l'ingénierie locale a fait défaut, encourager le préfet à l'impulser, notamment via les Comités Locaux de Cohésion des Territoires (CLCT) et leur déclinaison dans une instance technique (revue de projets) régulière. Ce dialogue entre élus/acteurs de l'ingénierie et l'État doit permettre la rencontre entre demandes des élus et offres de l'ingénierie locale et échanges sur la structuration de cette dernière. |
d) En solidifiant le maillage existant et en veillant à son extension aux territoires désarmés
À l'image de la maxime de Confucius qui écrivait « Quand un homme à faim, mieux vaut lui apprendre à pêcher que de lui donner un poisson », citée lors d'une audition, il faut armer durablement les territoires en ingénierie au-delà des réponses au coup par coup. Si le recours à des bureaux d'étude privés sur des besoins ponctuels et spécifiques peut se justifier, le principal besoin est que les collectivités se dotent ou aient accès à une ingéniée pérenne.
Il convient, d'une part, de solidifier l'existant en priorisant le soutien à l'ingénierie locale publique mutualisée et pérenne : agences d'urbanisme, parcs naturels régionaux, Agences de Développement, Agences Techniques Départementales... Il est nécessaire, d'autre part, de soutenir l'élargissement du maillage de ces outils locaux, notamment dans les zones blanches où dans les territoires désarmés.
L'ANCT dispose des supports pour le faire puisqu'elle a signé sept conventions avec des opérateurs spécialisés35(*) pour une durée de 3 ans. Ces conventions prévoient la participation de ces opérateurs aux CLCT et permettent théoriquement de les mobiliser pour les actions de l'Agence. À titre d'exemple, la FNAU a contribué à des actions de cartographie et de communication sur l'ingénierie territoriale partenariale en appui des programmes ACV et PVD, à une réflexion sur les politiques locales du commerce et de l'aménagement commercial, à la production d'analyses et de méthodologie pour développer des observatoires locaux du commerce etc. Autre exemple avec les échanges avec la FEDEPL, qui ont préfiguré le dispositif 100 foncières et le fonds de restructuration des locaux d'activité dont l'ANCT est l'autorité de gestion dans le cadre du Plan France Relance.
Verbatim et contributions écrites
« L'ANCT devrait autant que possible renforcer ce qui existe et ne pas créer des nouvelles portes d'entrée. » Une Agence départementale d'urbanisme
« Consolider l'existant coûterait moins cher. » Un maire
« L'ANCT doit encore travailler à structurer l'offre en la matière. » AMF
(1) Soutenir financièrement l'écosystème local
Bien que minoritaires, il est possible de citer plusieurs actions de l'ANCT qui conduisent à financer et soutenir les acteurs locaux. Vos rapporteurs estiment que ce sont ces démarches qui sont à prioriser. Plusieurs pistes, déjà en cours ou à développer, peuvent être évoquées :
- Parmi les interventions de l'ingénierie sur mesure, l'ANCT peut adresser son soutien à des structures locales. À titre d'exemple, la convention entre la commune de Luri et l'ANCT a pour objet une subvention à l'Agence d'Urbanisme et d'Énergie de Corse pour une étude relative à l'aménagement et la mise en valeur d'une partie de son territoire. L'intégralité du montant de l'étude est pris en charge par l'ANCT et l'étude réalisée par cet acteur local.
- La préfecture peut aussi contractualiser avec des acteurs locaux de l'ingénierie. À titre d'exemple, le CAUE du Loir-et-Cher, sur la base de son action volontariste, est venu en appui du programme PVD. La préfecture a ensuite signé une convention cadre d'une durée de deux ans avec cet acteur. Le CAUE s'engage à mobiliser sa capacité d'expertise et d'animation, à favoriser la mobilisation de son équipe pour accompagner les collectivités dans la réalisation d'une stratégie de revitalisation et à travailler en coordination avec les services et opérateurs de l'État. L'application de la convention se traduit ainsi par un soutien financier de la préfecture au CAUE (versement sur le support du FNADT), lui permettant de consolider et pérenniser cette expertise interne.
- Cette recherche de consolidation des écosystèmes pourrait aussi aller jusqu'à l'identification des besoins de recrutement et de formation de personnels qualifiés dans cet écosystème pour le renforcer. Les préfectures et le CNFPT pourraient mener ce travail conjointement.
- Le dispositif de service civique ou de VTA pourrait aussi être étendu à des collectivités non strictement rurales ou à d'autres acteurs pour des missions d'appui à l'ingénierie.
- Sur la situation des collectivités des DROM, particulièrement affectées par des difficultés de recrutement de personnels qualifiés, il pourrait être étudié -en lien avec la DGOM- la possibilité de constituer une bourse des emplois publics dans le cadre de la cohésion des territoires et, corrélativement, un vivier de jeunes diplômés pour les outre-mer. La nouvelle Chaire outre-mer de Sciences Po, avec laquelle l'ANCT est en contact, pourrait utilement être associée à ces réflexions.
- L'État pourrait aussi inciter ses partenaires à soutenir les actions de l'ingénierie locale. À titre d'exemple, l'État pourrait assurer une mobilisation ciblée sur des territoires à enjeux du Fonds outre-mer (FOM), doté par le ministère des Outre-mer (15M€ en 2022) et géré par l'AFD, pour conforter les capacités pérennes des collectivités dans le portage et la réalisation de leurs projets : appui à la structuration de leurs fonctions marchés public, ressources humaines et structuration de leurs services par exemple.
- L'État pourrait aussi augmenter sa participation financière aux acteurs locaux, comme les Agences Techniques Départementales, ou entrer dans le financement de structures, comme les Conseils d'Architecture, d'Urbanisme et de l'Environnement (CAUE).
Il faudrait élargir les solutions possibles (subventions, conventions, partenariats...) pour que, dans le respect du droit de la concurrence, ces acteurs soient sollicités plus directement, car le recours à la commande publique n'est pas une modalité qui leur est adaptée.
Des suggestions, comme celle faite par la FNAU, lors de son audition, peuvent aussi être étudiées. Pour la mise en oeuvre du Fonds vert, la Fédération propose de conventionner avec l'ANCT sur la planification écologique territoriale, en dotant cet objectif de moyens d'ingénierie. Une telle convention permettrait aux collectivités les moins dotées d'accéder à une ingénierie pérenne et mutualisée, de bénéficier de l'expérience d'un socle existant (observation, planification, animation...) et favoriserait les coopérations territoriales.
Proposition de la FNAU : flécher une partie du Fonds vert pour soutenir l'ingénierie locale
« Pourquoi l'ANCT, qui dispose d'effectifs limités en nombre, non déconcentrés et non spécialisés sur les domaines de la planification, du foncier, de l'habitat, de la biodiversité et de la renaturation, serait l'organe de distribution des financements du Fonds vert alors qu'il existe des services déconcentrés qui semblent plus directement compétents sur cette question ? Est-ce la solution la plus efficace ? Comment vont s'articuler les niveaux ? Les agences d'urbanisme souhaitent, du fait de leurs missions, pouvoir être éligibles au financement de l'ingénierie du futur Fonds vert qui appuiera les collectivités locales. »
(2) Doter les préfets, en lien avec la DDT, de moyens financiers
Afin de développer ce type d'interventions, il convient de doter les préfets de plus de marges de manoeuvre localement. Vos rapporteurs recommandent de l'outiller, dans son rôle de développeur, avec une petite enveloppe de crédits nouveaux, complémentaires aux autres crédits de l'État consacrés au soutien à l'investissement local (DETR, DSIL, DSID, FNADT...).
Ces crédits spécifiques lui permettraient de développer la vision territoriale de l'État sur une thématique ou un pan du territoire. Ils permettraient de lancer des diagnostics, des études, de réaliser de la prospective sur des sujets d'intérêt locaux, de façon complémentaire, avec les besoins des collectivités. Ils pourraient aussi permettre d'expérimenter des mini-programmes locaux, adaptés à des thématiques très locales, dans une logique d'expérimentation et d'exploration, quand aucune autre solution n'existe. Ils pourraient solliciter les structures locales d'ingénierie pour les renforcer et les amener sur des problématiques conformes aux priorités nationales.
La direction de la modernisation et de l'administration territoriale (DMAT) du ministère de l'Intérieur confirme qu'il est prévu de travailler à une augmentation du fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT), visant à doter le préfet de département de cette capacité d'appui financier via un fonds d'ingénierie des préfectures.
Enfin, comme le soulignait l'Inspection Générale de l'Administration dans son rapport précédemment cité, il serait possible de déconcentrer une partie des crédits du marché d'ingénierie de l'ANCT. Il conviendra tout de même de bien cadrer cette déconcentration en fixant des règles, des sujets et des montants précis, pour éviter des différences de traitement d'un territoire à l'autre. La déconcentration implique aussi que les indicateurs soient renseignés pour permettre leur consolidation au niveau national.
(3) Doter les préfets, en lien avec la DDT, de moyens humains
Il est nécessaire dans certains départements d'opérer un renforcement ciblé des services de l'État en moyens humains.
La DMAT a déployé une trentaine de postes d'experts de haut niveau auprès des préfets. Ces agents sont un soutien concret particulièrement apprécié au tissu local pour les exemples qu'a étudié la mission.
Ils sont présents sur le terrain, bien identifiés des élus. Ils tissent des relations de proximité, de confiance avec les élus et les services de l'État. Ils permettent une présence dans la durée qui garantit une bonne appréhension de l'écosystème local et offre l'occasion de dépasser les blocages locaux. Ils disposent de la capacité et de la légitimité pour mobiliser les services de l'État et des collectivités locales et se poser comme animateur neutre.
Trois exemples de ces postes :
1) Le poste d'expert de haut niveau en gestion départementale des déchets en Indre et Loire. Depuis 2019, les collectivités d'Indre et Loire étaient dans une impasse concernant les perspectives de traitement de leurs déchets ménagers compte-tenu des échecs successifs pour faire émerger un projet d'incinérateur. Les élus ont interpellé l'État à plusieurs reprises pour les aider à surmonter cette situation de blocage, bien que le préfet ne soit plus responsable de ces questions. L'État a pu cofinancer une étude suite à ces interpellations. Mais l'intervention d'un cabinet privé n'a pas réellement fonctionné puisque l'étude n'a pas été suivie d'effet. Finalement, l'Indre et Loire obtient l'ouverture d'un poste d'expert de haut niveau pour une durée de 3 ans, rattaché directement à la préfète, avec la mission d'accompagner les collectivités dans la définition d'une stratégie de gestion des déchets sur le département. Il est pourvu en décembre 2021.
Après un an de mission d'expertise, le bilan paraît plus positif que le seul apport d'un cabinet d'étude. La présence d'une experte sur le territoire s'est traduite par des relations régulières avec les élus, les services des collectivités et de l'État concernés, ce qui a permis d'élaborer et de partager un diagnostic et une méthode de travail avec toutes les collectivités compétentes et le Conseil Régional. Le positionnement de l'État a apporté une garantie de neutralité au diagnostic posé, et a permis de rétablir un dialogue entre les collectivités et les associations fortement opposées à toute nouvelle installation. La montée en expertise et la constitution progressive d'un réseau avec les acteurs locaux ont permis à l'État de jouer un rôle de catalyseur pour inciter les collectivités à approfondir leurs efforts de prévention, pour un meilleur respect des normes environnementales et une plus grande acceptabilité locale.
Ce positionnement d'un expert de l'État en accompagnement des collectivités est particulièrement apprécié des élus. C'est bien ce positionnement qui permet de construire une réelle qualité de dialogue et un climat de confiance avec les élus des collectivités. Cet investissement de l'État à leur côté a fait l'objet d'un accueil et d'un retour positifs de leur part. Il a permis à l'État de jouer un rôle d'animateur, de facilitateur et de garant sur un champ prioritaire pour les élus locaux. L'expert a mené une réflexion partenariale avec tous les EPCI du département et avec le Conseil Régional, qui a accepté de re-questionner le SRADDET au regard du diagnostic partagé, en articulant les enjeux réglementaires et les réalités techniques et politiques du territoire. Cela a permis à l'État d'établir une synthèse des échanges de plusieurs comités de pilotage, un porter à connaissance et une note d'enjeux, permettant de clarifier la feuille de route pour les collectivités locales.
2) Le laboratoire de la ruralité. La mise à disposition d'un administrateur général a permis de mettre en place ce laboratoire en 2021 en partenariat avec l'ANCT et l'association des maires ruraux des Vosges36(*). Cet outil expérimental est une instance de réflexion, d'expérimentation et de construction de solutions sur tous les sujets relatifs à la ruralité. Il est chargé d'adapter l'action publique au regard du constat de l'inadéquation de certains dispositifs nationaux aux problématiques rurales. Il travaille sur la lutte contre le bâti dégradé, le développement de l'économie de proximité en milieu rural, la structuration de la filière bois, le maintien et le développement des services publics en milieu rural et de la couverture sanitaire, la valorisation du patrimoine touristique rural, le développement de l'offre culturelle, aussi bien en termes d'équipements que d'animation, etc. Ces actions ont vocation à essaimer dans d'autres territoires ruraux.
3) Le sous-préfet chargé du plan particulier pour la Creuse. La préfecture a disposé du renfort d'un sous-préfet pour le plan particulier pour la Creuse (PPC). Ce soutien concret apporté aux projets du territoire est particulièrement apprécié au niveau local, par l'ensemble des élus et acteurs locaux, et joue un rôle essentiel dans un département rural où l'ingénierie est relativement modeste.
Il apparaîtrait opportun de pouvoir généraliser ce type de mission ponctuelle d'accompagnement en ingénierie, dans les services de l'État, avec des possibilités d'affectation à définir selon les thématiques et degrés de sensibilité politique : auprès du préfet (de département ou de région) ou au sein de la DDT, de la DDETS, de la DREAL ou d'une sous-préfecture, voire même de structures d'ingénierie existantes et déjà mutualisées, en mobilisant des moyens indépendants des cadrages d'effectifs des structures, et avec des modalités de gestion RH adaptées.
Le rapport du Sénat conduit par Bernard DELCROS, Jean-François HUSSON, Franck MONTAUGÉ et Raymond VALL intitulé « Les collectivités locales, engagées au service de nos ruralités » de janvier 2020 avançait la recommandation suivante : « Constituer, dans chaque région, des plateformes territoriales mutualisées d'aide à l'ingénierie formées de membres des corps de contrôle de l'État et pouvant être saisies par les collectivités territoriales ou par l'ANCT ». En plus de ces plateformes territoriales mutualisées d'aide à l'ingénierie, formées de membres de ces corps de contrôle, il serait possible, pour des missions ponctuelles, de mettre en place des référents territoriaux, dans chaque corps de contrôle, en capacité d'intervenir au bénéfice des territoires qui ont des besoins d'ingénierie et mobilisables par les préfectures concernées.
Les outre-mer offrent un autre exemple d'intervention qui pourrait être déployé par l'État dans des territoires en manque d'ingénierie. En Guyane et à Mayotte, l'État a créé en 2020 deux plateformes d'appui aux collectivités placées auprès des préfectures. Dotées de 3 et 6 ETP, mis à disposition par le ministère de la Transition Écologique, le ministère de l'Intérieur et le ministère de la Solidarité et de la Santé, ces deux plateformes apportent un appui aux collectivités du bloc communal en matière d'ingénierie administrative, financière, voire technique, comme sur les sujets fonciers. Ainsi, à Mayotte, la plateforme dispose de profils économiques, juridiques et administratifs. Elle apporte une véritable plus-value dans l'accompagnement technique des collectivités. Son périmètre d'intervention est particulièrement large et couvre toutes les phases du projet : conception et formalisation du projet, rédaction de la délibération, accompagnement à la réception effective de subventions accordées, assistance à maitrise d'ouvrage, appui durant la livraison du projet, etc.
Au-delà de certaines difficultés tenant notamment au turn-over de leur personnel, la réussite de ces plateformes repose sur leur capacité à s'appuyer sur un large réseau de partenaires, notamment pour des aides techniques complémentaires en ingénierie, et sur leur contribution à la nécessaire montée en compétences des collectivités pour le portage de leurs projets.
Ces démarches pourraient être transposées moyennant adaptation aux autres DROM, en particulier aux Antilles, voire même sur des territoires peu dotés d'ingénierie en zones rurales ou périurbains en métropole.
Enfin, il faut signaler que les postes des « sous-préfets relance » sont en train d'être redéployés, selon une instruction du 13 octobre 2022. Une partie est fléchée vers des sous-préfectures (soit par déjumelage de sous-préfectures existantes, soit par création nouvelle). L'essentiel est fléché vers des fonctions de SGA, pour renforcer les équipes des départements les plus ruraux, les moins dotés, ou les plus dynamiques en matière d'activité ou de démographie. L'objectif est que ces 24 nouveaux postes de sous-préfet soient nommés au plus tard fin janvier 2023.
(4) Doter les préfets de capacités de décision dans l'application des programmes, en lien avec la DDT
Le préfet devrait pouvoir moduler la gestion des programmes nationaux, notamment quand ils se traduisent par du financement de postes d'ingénierie. À titre d'exemple, un territoire peut se retrouver bénéficiaire de plusieurs postes de chefs de projets (ACV, PVD, Territoires d'industrie, Avenir montagne...) quand un autre territoire du département se trouve démuni. La mise en cohérence voire la mutualisation, quand c'est possible, peut contribuer à assurer un meilleur maillage du territoire en ingénierie.
Par ailleurs, le financement de l'ingénierie sur plusieurs postes de chefs de projet peut conduire à un maillage important du territoire départemental ou régional, mais sans que l'efficience globale soit au rendez-vous : isolement du chef de projet, manque de formation, manque de soutien ou de relai interne, vision centrée sur la seule collectivité, difficulté de dégager du temps pour faire réseau... Afin de pallier à ces difficultés, l'ANCT mène des activités d'animation et de formation importante sur ces agents. Mais, il faut se demander si, par exemple pour une région qui comprend une centaine de chefs de projets tous dans des collectivités différentes, il n'aurait pas été plus judicieux de placer un petit nombre de ces postes dans les services de l'État (DDT notamment) où ils auraient été intégrés à un fonctionnement déjà ancré et auraient pu être en accompagnement des collectivités.
(5) Outiller l'ANCT en experts mobilisables sur les territoires
Enfin, l'agence pourrait également internaliser une expertise sur certaines thématiques correspondant aux priorités nationales et pour lesquelles les collectivités sont en attente.
Plusieurs sujets se prêtent à être examinés. Les retours sur le marché à bon de commandes et sur les attentes des collectivités peuvent aider à identifier ces secteurs. Les questions de diagnostic territorial et de projet de territoire peuvent en être, même si la couverture du territoire par des CRTE peut signifier que le besoin est désormais résiduel. D'autres sujets peuvent aussi être explorés : les problématiques de santé et de désert médicaux, les sujets d'enseignement supérieur, les enjeux fonciers, les enjeux patrimoniaux, les questions de mobilité ... Les questions relatives à la transition écologique, notamment avec la mise en place du Fonds vert, pourraient être pertinentes, mais à bien expertiser avec les partenaires de l'ANCT que sont l'ADEME et le CEREMA. L'ADEME est souvent le premier interlocuteur généraliste pour les collectivités quand le CEREMA va sans doute accroitre ses liens directs avec les collectivités, suite à la réforme de son statut.
Ce type de solution permettrait de limiter le recours aux prestataires privés et donnerait surtout une incarnation à l'agence qui projetterait sur le terrain des agents estampillés « ANCT ». Ainsi, l'Agence pourrait suivre les collectivités dans le temps, capitaliser les expériences et constituer une mise en réseau des territoires.
En résumé, il convient de doter les préfets, en lien avec les DDT mieux à même d'apprécier les dynamiques de l'écosystème local, de moyens complémentaires. Tous les départements ne sont pas forcément concernés. L'Agence pourrait concentrer son action sur les départements les plus en difficulté, qu'ils soient ruraux ou d'outre-mer par exemple.
Cette idée est en phase avec l'une des missions prioritaires confiées au préfet. Les priorités d'action des préfectures et sous-préfectures sont fixées dans un référentiel (Missions prioritaires des préfectures - MPP 2022-2025) publié en avril 2022. La 4ème de ces missions est « la mobilisation de l'expertise interministérielle au bénéfice des territoires ».
Recommandation n° 9 : Prioriser les interventions qui permettent de structurer durablement l'ingénierie locale existante ; doter les préfets de moyens humains ou financiers de soutien à l'ingénierie ; développer une ingénierie propre à l'agence, facilement mobilisable sur le terrain. |
(6) Appeler à une couverture accrue du territoire par des Agences Techniques Départementales et les CAUE
Vos rapporteurs estiment que, face aux enjeux, il conviendrait d'encourager la couverture du territoire en ATD et en CAUE.
Il existe aujourd'hui 75 Agences Techniques Départementales (ATD) selon l'Association nationale des Directeurs d'Agences techniques départementales (AnDAtd) sous différentes formes : ce sont majoritairement des Établissements publics administratifs, mais aussi des syndicats, des Sociétés d'économie mixte, des régies... C'est une base solide à consolider.
Il existe 92 Conseils d'Architecture, d'Urbanisme et de l'Environnement (CAUE). Sept départements (Alpes-de-Haute-Provence, Ardennes, Aube, Ille-et-Vilaine, Loire, Marne, Territoire de Belfort) n'en disposent toujours pas, alors même que l'article 6 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture définit une obligation en la matière. Leur mise en place dans ces départements doit faire figure de priorité, comme le rappelait déjà le rapport du Sénat intitulé « État du patrimoine religieux » réalisé par M. Pierre OUZOULIAS et Mme Anne VENTALON en juillet 2022.
Grâce à leur gouvernance plurielle, instaurée par Loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture, alliant élus, représentants de l'État, professionnels et société civile, les CAUE s'apparentent à des conférences territoriales départementales. Leurs conseils d'administration sont un lieu de débat sur le territoire, ainsi que sur les moyens de mettre en oeuvre les projets locaux en articulation avec les politiques publiques nationales.
La mise en oeuvre des politiques publiques nationales au niveau local est prévue dès la loi de 1977. Elle est parfois mise au second plan dans la reconnaissance portée aux CAUE et méconnue des départements. Pourtant, forts de leur connaissance du territoire et des acteurs locaux, les CAUE pourraient encore plus contribuer à la déclinaison territorialisée des politiques publiques nationales, dont celles portées par l'ANCT.
Une réaffirmation de l'engagement de l'État dans les conseils d'administration des CAUE, assortie d'un renforcement de leur rôle et de leurs moyens pour la déclinaison des politiques nationales, conforterait cet ancrage. Elle pourrait intervenir par une circulaire, des conventions programmatiques, des ressources fléchées pour ces politiques publiques. Leur modèle économique permet l'octroi de subventions, outre le financement par la taxe d'aménagement.
Bonne pratique n°1 : Accroitre la couverture du territoire en ATD et en CAUE. Sur la base de leur compétence en matière de solidarité territoriale, de nombreux départements mettent à disposition une ingénierie de base, dont ils disposent le plus souvent pour l'exercice de leurs propres compétences, afin d'accompagner les plus petites collectivités. L'Assemblée des Départements de France pourrait capitaliser sur les réussites pour réaliser un guide pratique, voire monter une task force d'accompagnement, pour inciter les Départements à renforcer la couverture du territoire en ATD et en CAUE. Les services de l'État devraient soutenir localement ces initiatives. |
(7) Mobiliser le tissu universitaire
La recherche peut constituer un partenaire cardinal pour accompagner les besoins d'ingénierie et de développement des territoires. « La recherche est un levier extrêmement riche pour réaliser des diagnostics territoriaux, pour alimenter les opérations d'aménagement et le renouvellement des politiques publiques » rappelle Jean-Baptiste MARIE, directeur général Europe des projets architecturaux et urbains au Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA).
La recherche présente plusieurs avantages : elle porte la mémoire et l'archive des projets, politiques précédentes et de leur évaluation. Elle forme les professionnels de demain dont certains seront recrutés par des collectivités. Par l'expérimentation, elle contribue à l'innovation et à sa diffusion.
Les rapprochements entre mondes universitaire et opérationnel peuvent prendre des formes multiples : ateliers pédagogiques, projets de recherche-action, recherche embarquée dans des opérations, expérimentations, doctorats Cifre, etc. Parmi ces modalités, le groupement d'intérêt public « L'Europe des projets architecturaux et urbains » propose des applications pratiques mobilisables pour les élus et les collectivités :
- Le concours d'idées en architecture « Europan » mobilise les jeunes concepteurs, designers, urbanistes, par un concours d'idées auprès des opérateurs et des collectivités territoriales pour ouvrir les imaginaires et porter des innovations architecturales dans tous les territoires français ;
- La Plateforme d'observation des projets et stratégies urbaines (POPSU) organise la mobilisation d'équipes de recherche auprès des élus autour de questions concrètes d'action publique locale. Par exemple, comment organiser la résilience de mon tissu commercial ? Comment organiser mon territoire face à la pression foncière et touristique ? Trente-quatre territoires ont déjà été accompagnés. Ces travaux ont été diffusés à travers une politique de valorisation multimédias (livres, documentaires, audio) et multi-supports (outils méthodologiques, jeux sérieux, événements). Fondamentalement conçus pour les territoires et leurs élus, et en complémentarité avec l'ingénierie développée par l'ANCT, ces projets pourraient faire l'objet d'une consolidation nationale et disposer de moyens dédiés ;
- Le programme d'expérimentation dans le logement « engagés pour la qualité du logement de demain », a fait le choix d'associer des équipes de recherche directement dans les consortiums de maître d'oeuvre et d'ouvrage des projets de construction afin de bénéficier des apports des travaux de recherche tout au long des étapes du projet : en amont et pendant la conception, pendant les phases de mise en oeuvre, et souvent après la livraison du projet. Il a permis la réalisation de 9 000 logements expérimentaux.
Il faudrait que la délégation locale de l'ANCT puisse contractualiser, et même financer, les universités pour à la fois mobiliser de l'ingénierie externe mais aussi faire venir des jeunes talents sur des territoires peu attractifs, ce qui peut être de nature à susciter des vocations professionnelles.
Quels enseignements de ces programmes selon le groupement d'intérêt public « L'Europe des projets architecturaux et urbains » ?
1. Afin de rapprocher recherche et opérationnel, il est nécessaire de se donner des modalités de travail conjointes, ainsi que des lieux d'échanges et de débat qui s'installent sur le long terme, afin de favoriser l'interconnaissance et l'apprentissage mutuel (principe de la recherche action et/ou de recherche embarquée) ;
2. Les liens entre recherche, action et montée en généralité nécessitent la création de rôles de passeurs, de traducteurs, capables de tisser les liens entre les mondes et de produire des supports appropriables par tous. C'est le rôle des plateformes comme POPSU, par exemple.
3. La diffusion, la valorisation des travaux est un axe clé de la réussite des projets et de leur appropriation par d'autres. Elle implique de recevoir des moyens appropriés.
(8) Simplifier le recours à l'ingénierie externe du marché national
L'ANCT va réaliser en 2023 un bilan de la mise en place de son marché national qui arrive à son terme début 2024. Il reste pertinent lorsque le besoin ne peut pas être satisfait localement afin que la collectivité puisse, en subsidiarité, recourir à cette offre.
En termes de méthode, ce marché pourrait constituer un sujet de travail avec un panel d'élus, en lien avec les préfectures et surtout les DDT. Les sujets seraient notamment : améliorer les offres, préciser des modalités de procédure comme le lien avec l'ANCT locale lors de la réalisation de prestations (ce qui n'est pas toujours fait), réorienter certains dispositifs. Cette réflexion peut être l'occasion de clarifier les diverses offres (Banque des Territoires, ANCT...) pour proposer des prestations parfois un peu plus soutenues. À titre d'exemple, l'ingénierie externe mobilisée pour préparer les dispositifs contractuels (PVD, PTRTE), via des marchés nationaux de l'ANCT, ne couvre pas l'ensemble des étapes. Les prestations couvrent les phases diagnostic et orientation mais ne comprennent pas la rédaction d'un plan d'actions ni la préparation de la convention. Autres exemples : la Banque des Territoires, qui dispose d'une offre très intégrée, comme la prise en charge réalisée dans le cadre des programmes nationaux pour des territoires moins matures et plus fragiles, propose une « assistance au management de projet » (AMP) sur une durée de 2 ans minimum. Plus de 80 villes Action Coeur de Ville en ont bénéficié de même que 350 villes PVD, et tous les territoires de la montagne. Ces accompagnements au long court sont appréciés des élus.
Les maires ont parfois signalé qu'ils auraient préféré confier l'étude à un bureau d'étude qui connait le territoire et qu'ils avaient été contraints de « se plier » au marché de l'ANCT en national, alors que pour la même enveloppe, voire pour une enveloppe moindre, ils auraient pu être accompagnés par un acteur local. Il y a donc peut-être quelque chose à imaginer au niveau de l'allotissement. Consulter les acteurs locaux de l'ingénierie permettrait peut-être de trouver le meilleur moyen de circonscrire les prestations du marché national à des sujets ne trouvant pas de solution au niveau local.
e) En promouvant les mutualisations
Il n'est pas possible de reconstituer de l'ingénierie dans chaque collectivité. Les mutualisations sont le chemin naturel d'un système viable. Le support de ces mutualisations est pluriel : intercommunalité, services communs, agences, syndicats ...
Verbatim et contribution écrite
« L'ingénierie opérationnelle des petites communes ne peut plus relever de l'État. Il faut privilégier l'appui à la structuration intercommunale, mobiliser l'action des régions, des départements et des outils mutualisés des collectivités ». Un maire
« Il faut d'abord organiser les réciprocités entre collectivités, ce qui passe notamment par la facilitation du partage d'ingénierie et de compétences entre collectivités, et par une valorisation des carrières lorsque l'expertise d'un agent est mise à profit d'un territoire sous-doté. Cela crée du lien et du projet partagé. » France Urbaine
« Un accompagnement intensif est nécessaire auprès des petites communes pour faire émerger leurs projets, et formaliser leurs besoins. La création d'un pool ingénierie placé dans chaque EPCI de zones rurales serait utile pour franchir cette étape, sur le modèle des PVD. Dupliquer ce modèle PVD aux zones rurales, via l'Agenda rural par exemple, pourrait ainsi permettre de mieux faire mûrir les projets et de mieux cibler l'accompagnement de l'ANCT afin de le rendre plus efficace. » Une préfecture
L'ANCT pourrait viser prioritairement, ou même conditionner, une démarche de mutualisation à un soutien en ingénierie. Il s'agit d'une recommandation pour certains programmes, comme par exemple les PVD, où il est conseillé aux communes PVD « d'avoir une approche, une gouvernance et une maîtrise d'ouvrage à l'échelle intercommunale et mutualisée, afin d'appréhender les problématiques à des échelles de bassin de vie, de travailler dans la complémentarité plutôt que la concurrence et d'avoir à disposition des moyens humains plus conséquents »37(*). Aujourd'hui, environ 60 % des chefs de projets PVD sont rattachés à l'intercommunalité (chiffres ANCT).
L'ANCT est parfois allée plus loin, comme dans l'exemple de la Creuse qui a mis en oeuvre une mutualisation atypique de l'ingénierie de projet à l'échelle départementale. Afin d'accompagner 19 des 22 communes lauréates du programme PVD, une solution de mutualisation a été envisagée au niveau des EPCI, mais n'a pas eu de suite. Les discussions entamées par la préfecture auprès du Conseil départemental sont intervenues en 2021. L'Agence départementale a proposé de recruter 7 chefs de projets en mixant les profils autour de 7 thématiques (Usages numériques, architecture, urbanisme-planification, commerce-artisanat, environnement, énergie, services-mobilité). Parallèlement, le Conseil départemental a financé un poste de coordinateur et a pris en charge 12,5 % des coûts salariaux des chefs de projet, ce qui, ajouté aux 75 % apportés par l'ANCT et aux contributions (cotisations annuelles) des 19 communes devenues membres de l'agence, a permis d'assurer le financement des postes. Les communes seules ne pouvaient s'offrir cette expertise. Chaque chef de projet s'est vu affecter 2 ou 3 communes en tant que référent. Cette mise en place, parce qu'elle n'entrait pas dans le cadre national prédéfini, a nécessité un arbitrage ministériel. À cet égard, les services déconcentrés de l'État ont constitué un relai efficace des intentions des élus du territoire. Cette équipe de chefs de projet a, en outre, pu bénéficier d'un accompagnement au management de projet sur 125 journées assuré par la SCET et pris en charge à 100 % par la Banque des Territoires.
La réflexion sur la pérennité des postes pourrait être engagée avec les acteurs locaux. Lorsque leur pérennisation n'est pas possible au sein de la collectivité d'accueil, pour des raisons financières, une recherche de pérennisation, pour peu que le poste soit toujours pertinent, au sein des outils d'ingénierie locale (CAUE, ATD, délégation locale de l'ANCT, DDT...) pourrait être promue, si c'est le choix des collectivités. Cette solution contribuerait à leur intégration dans le territoire, leur ferait bénéficier de la connaissance et des savoir-faire de ces organismes et renforcerait l'écosystème global d'ingénieries.
Cet exemple encourage, pour les départements les moins denses en ingénierie, d'imaginer des systèmes de chefferie de projet mutualisée qui permet de mobiliser des compétences diversifiées et complémentaires de manière plus efficiente. La thématique foncière constitue un exemple de secteur de mutualisation pertinent selon la FNAU, qui suggère à l'agence de soutenir financièrement les outils de mutualisation comme les observatoires du foncier et de l'habitat à une échelle pertinente.
f) En recherchant l'efficience
En matière d'efficience, il est manifeste que des progrès sont possibles dans une logique de chaîne ou continuum d'intervention. Le CEREMA déclarait, lors de son audition, que «la recherche de complémentarité est essentielle compte tenu de la masse des demandes et des besoins d'appuis des collectivités. C'est la clé d'un système efficace. » Vos rapporteurs veulent en donner quatre exemples.
(1) Une formalisation des partenariats
Une pluralité de structures d'ingénierie locale coexiste à l'échelle territoriale, ayant comme bénéficiaires communs les collectivités locales. Avec des types d'offres différents (services gratuits, prestations) sur des champs connexes (aménagement du territoire, urbanisme, environnement, architecture, transports...), ces structures participent à la chaîne d'acteurs qui fabriquent le cadre de vie.
Une formalisation écrite des relations entre acteurs locaux peut faciliter l'articulation de leurs actions et permettre de déterminer des projets en commun. À titre d'exemple, la Fédération nationale des Conseils d'Architecture, d'Urbanisme et de l'Environnement (CAUE) propose à son réseau un protocole-type pour définir les relations entre les structures d'ingénierie départementale dans leurs actions pour les collectivités.
(2) Une vision stratégique et collective de l'évolution de l'ingénierie
En annexe, vos rapporteurs ont souhaité reproduire le cahier des charges d'une étude réalisée par un département (annexe 3). Cette étude s'inscrit dans l'ambition d'efficience du fonctionnement des différents acteurs et outils de l'ingénierie territoriale. Elle vise à identifier une cartographie des outils intervenant ou investiguant le territoire, y compris ceux non rattachés au département, pour mettre en évidence les problématiques territoriales existantes, repérer les opportunités et signaler les risques de concurrence entre outils. Le prestataire est ensuite invité à proposer un plan d'évolution stratégique. Ce plan pourra suggérer de réorganiser les outils pour mieux répondre aux enjeux de territoire, de renforcer les interactions entre ces outils - tant en matière d'intervention que d'organisation - en intégrant, le cas échéant, des acteurs non affiliés au département. Il pourra aussi s'intéresser aux modèles économiques des outils ou groupes d'outils. L'étude devra aussi regarder les besoins en financement liés aux investissements projetés et les conséquences juridiques.
Il nous semble que cette étude reflète une démarche courageuse et nécessaire : affronter la réalité du paysage des acteurs, regarder les enjeux et les perspectives et viser un éco système plus efficient en accompagnant et en anticipant les évolutions nécessaires.
(3) Le pari d'une plus grande intégration avec des acteurs locaux
L'audition de l'Agence des Pyrénées a permis d'illustrer cette idée en ouvrant d'autres perspectives.
Présentation de l'Agence des Pyrénées
L'Agence des Pyrénées est une structure interrégionale, créée en 2021, consacrée au développement, à la valorisation et à la préservation du massif des Pyrénées. Elle est issue de la fusion de 3 associations préexistantes : le Cidap (Comité interrégional pour le développement et l'aménagement des Pyrénées), l'Adepfo (Agence de développement par la formation) et la Confédération Pyrénéenne du Tourisme. Elle permet aux collectivités publiques d'avoir une vision à 360 ° des enjeux du massif et de décloisonner les approches et les outils d'intervention, de renforcer les synergies entre les missions de formation-développement, de promotion touristique et de développement numérique des zones de montagne. Son ambition majeure est « d'inspirer, encourager et soutenir une nouvelle dynamique de développement dans le massif pyrénéen en s'appuyant sur ses richesses naturelles, patrimoniales, économiques et humaines ».
L'Agence des Pyrénées et le Commissariat de massif de l'ANCT sont deux acteurs ayant vocation à accompagner les acteurs publics et privés en charge d'un projet de développement, chacune parfois avec leurs équipes, leurs moyens et leurs dispositifs. Si la coordination est fluide, grâce à la qualité des relations et des personnels, l'institution et la structuration de l'action publique ne reflète pas la meilleure articulation possible.
L'ANCT pourrait oser l'expérimentation qui consisterait à venir appuyer des acteurs locaux sur des objectifs partagés, en les renforçant plutôt qu'en les doublonnant sur certains aspects. Agir conjointement permettrait de démultiplier l'accompagnement, de capitaliser sur les succès et les essaimer, d'internaliser certaines compétences nouvelles et de développer de nouveaux accompagnements.
(4) La mise à disposition ponctuelle
Une dernière illustration de cette recherche d'efficience, serait dans la mise à disposition d'agents experts issus de grandes collectivités pour aider les territoires plus modestes à bénéficier de leurs retours d'expérience afin de structurer leurs projets et les conduire dans la durée.
Plusieurs modalités de mise en oeuvre de cette idée peuvent exister. L'Association des Ingénieurs territoriaux de France (AITF) propose, par exemple, un « mécénat de compétences » pour la Fonction Publique, permettant notamment à des agents, au profil sénior par exemple, de consacrer une partie de leur temps de travail en « Temps Partiel Solidaire » pour faire partie d'un programme ou projet d'intérêt général. La FNAU propose que soit mis en place un système de parrainage afin de permettre aux agences d'urbanisme d'accompagner des communes rurales.
De façon plus générale, il y a sans doute des assouplissements à imaginer pour que des collectivités non membres de structure d'ingénierie, puisse bénéficier ponctuellement de l'appui de réseaux d'acteurs de façon plus souple.
g) En renforçant la coordination avec ses 5 principaux partenaires
Dans ce maquis d'acteurs locaux et nationaux, de procédures et de circuits, il en résulte parfois un manque de lisibilité et une difficulté dans les processus de mobilisation de ces structures. « La multiplicité des opérateurs nationaux et locaux ne facilite pas l'action des élus faute de lisibilité des acteurs compétents sur tels ou tels sujets » résume la DGCL.
Le travail d'intermédiation n'est pas à sous-estimer : mal communiquée, la meilleure des offres ne trouvera pas son public. Il est donc important de veiller à mettre en valeur l'existant et faire connaitre les initiatives aux élus et à leurs administrations. Là encore, les associations d'élus locaux peuvent aider l'ANCT dans cette tâche.
Dans l'accompagnement des collectivités, la synergie entre les cinq opérateurs38(*) reste un enjeu, trois ans après la création de l'ANCT.
D'un côté, l'ANCT et la DGCL estiment qu'il s'agit de rendre effective la promesse d'une agence jouant un rôle d'assemblier : « Le rôle moteur de l'ANCT dans l'accompagnement des collectivités vis-à-vis de ces opérateurs doit encore s'affirmer (...). L'ANCT doit progressivement devenir, en lien avec le préfet ou le sous-préfet, le guichet d'entrée des opérateurs » (contribution écrite).
De l'autre côté, si cette idée est séduisante, elle ne correspond pas à la réalité. Les élus s'adressent tout azimut à chaque opérateur. L'existence de délégations régionales, pour plusieurs d'entre eux, contribue à ce phénomène. Le CEREMA affirme qu'il continuera à intervenir si l'ANCT le souhaite dans le cadre des programmes nationaux. Mais, concernant l'appui à l'ingénierie sur mesure, il a vocation à développer des relations directes avec ses collectivités adhérentes. Afin de s'articuler, il propose de s'entendre avec l'ANCT « sur 5 territoires ANCT/CEREMA prioritaires par département » et de laisser le reste des interventions du CEREMA « sous son unique pavillon ». Il a aussi été signalé par de très nombreux interlocuteurs -au-delà des seuls élus- que la Banque des Territoires, localement, obéissait à ses propres logiques et priorités et que la coordination avec l'ANCT ne se faisait pas si naturellement que cela.
Entre ces positions, l'agence devra trouver un chemin.
Le débat pourrait avoir lieu au sein du comité national de coordination, qui réunit mensuellement les 6 opérateurs, pour suivre les programmes et chantiers communs menés dans les territoires.
Les conventions de partenariat entre l'ANCT et ces opérateurs, qui arrivent à leur échéance en 2023, fourniront aussi un lieu de dialogue. Leur actualisation pourrait être l'occasion de clarifier le « qui fait quoi » et de fixer des engagements chiffrés, notamment en nombre de collectivités suivies et de montants prévisionnels, comme c'est déjà le cas pour le CEREMA. Les modalités de fonctionnement entre chaque opérateur devront être questionnées et devront peut-être être différenciées.
Un renforcement de la coordination s'impose : a minima instituer un comité de direction commun pour les sujets collectifs (recommandation 10), aller plus loin en fusionnant les gouvernances, ou enfin fusionner les trois agences.
Il semble aussi indispensable, quelles que soient les modalités retenues, que l'ANCT et ses 5 principaux partenaires travaillent à une interface numérique partant du point de vue de l'expérience utilisateur. C'est le sens de la recommandation 11.
Recommandation n° 10 : Instituer un comité de direction commun constitué des DG et DGA de l'ANCT, de l'ADEME et du CEREMA avec l'enjeu de faire une feuille de route stratégique partagée et articulée avec la feuille de route de l'agence (recommandation 1). Ce rapprochement par la gouvernance doit permettre une meilleure coordination des actions, une plus grande complémentarité des offres, un meilleur maillage territorial collectif, une promotion du mode projet en constituant des équipes ad hoc par exemple, un meilleur soutien collectif aux dynamiques locales. Il doit aussi permettre de contribuer à une meilleure lisibilité des offres et des possibilités pour les élus, les collectivités et les acteurs de l'ingénierie locale. La gestion de la part ingénierie du fonds vert peut être le premier des sujets de travail commun. |
Recommandation n°11 : En matière d'ingénierie, mettre en place une interface numérique pédagogique s'adressant aux élus pour les guider dans le « qui fait quoi » des acteurs publics et parapublics. |
3. Consolider et simplifier l'existant
L'agence est aujourd'hui un empilement de programmes, de politiques publiques, de dispositifs, d'expérimentations, de labels... qui contribuent à nourrir la confusion des élus. Les élus réclament une pause pour bien intégrer l'existant.
La conviction de vos rapporteurs est aussi que l'agence a besoin d'un travail en interne pour réinterroger son action, gagner en transversalité et faire évoluer si besoin son organisation. Elle doit prioriser son action et avoir une approche plus collective, transversale et moins en silo. Son intervention dans des programmes séquencés les uns des autres semble toucher à ses limites au moment où les politiques publiques elles mêmes sont de plus en plus imbriquées et demandent des réponses globales. Comme le commentait un acteur national « Il faut réussir à `faire ANCT' : passer d'un éparpillement d'actions isolées à un ensemble cohérent au service d'un projet de territoire ».
c) Conforter les CRTE comme cadre de référence du dialogue avec l'État
Les CRTE sont un outil pertinent pour nombre d'élus, à condition qu'ils s'inscrivent dans le temps et que l'État en tire toutes les conséquences. Ils doivent être élargis à d'autres thèmes pour refléter l'intégralité des projets de territoire (social, mobilité...) et permettre à l'État d'avoir une action, vis-à-vis des collectivités, plus intégrée et plus globale.
Recommandation n° 12 : Conforter l'outil CRTE, notamment élargi à la dimension sociale, comme le cadre de référence de la mise en oeuvre des politiques publiques de l'État. |
d) Sortir de la vision en silo et mieux intégrer les dynamiques territoriales
Il a été signalé dans ce rapport que l'ANCT avait à la fois des logiques trop sectorisées par catégorie de collectivité et des logiques pas suffisamment respectueuses des dynamiques locales.
A ce double titre, il semble essentiel que l'ANCT s'intéresse aux coopérations territoriales.
L'ANCT pourrait commencer par être un lieu d'observation et d'objectivation de ces logiques de coopération interterritoriale. France Urbaine suggère que l'ANCT reprenne les engagements du Pacte État-métropoles signé en juillet 2016, qui prévoyait la mise en ligne d'une cartographie interactive des coopérations interterritoriales, pour donner à voir cette réalité et contrer les discours d'opposition urbain/rural. Un premier recensement en 2019 a permis d'identifier près de 180 coopérations territoriales que France Urbaine propose d'ouvrir à l'actualisation et l'enrichissement collectif.
L'ANCT pourrait ensuite être un lieu de soutien de ces dynamiques de coopération, ce qui semble aller dans le sens de l'efficacité de l'action publique, plutôt que de venir recréer sans cesse de nouveaux dispositifs. C'est peut-être là une évolution naturelle de certains programmes nationaux. Un programme national « coopérations territoriales » pourrait valoriser et soutenir ce type de dynamiques comme, par exemple, les « contrats de réciprocité ». Ces contrats, entre collectivités urbaines et rurales, permettent de conduire des actions communes de coopération dans les champs de l'ingénierie, l'économie, l'énergie, l'aménagement territorial et urbain, l'alimentation, les mobilités... Leur soutien irait dans le sens des objectifs de l'agence, notamment en termes de transition environnementale et de cohésion des territoires. Il aurait aussi pour mérite de dépasser la sectorisation de ses interventions actuelles. Il conduirait à renforcer les outils d'ingénierie partenariaux et mutualisés de type Agence d'urbanisme, PNR.... Appuyer ce type d'initiative pourrait prendre la forme d'un soutien financier à du mécénat d'ingénierie, en permettant à une collectivité urbaine de contribuer à des outils d'ingénierie partenariaux et mutualisés. Cette proposition vient conforter les développements précédents relatifs au renforcement de l'ingénierie.
Recommandation n° 13 : Identifier les dynamiques locales de coopération entre territoires, les valoriser, les soutenir et y inscrire les interventions de l'agence. Cette tâche pourrait à terme prendre la forme d'une refonte de programmes au sens de l'organisation de l'agence mais a aussi vocation à infuser les programmes existants et à venir. |
e) Simplifier et prioriser l'existant
Vos rapporteurs relaient certaines pistes évoquées par les élus locaux :
- Concrétiser le guichet unique en travaillant au dossier unique. Une piste pour l'ANCT serait de travailler, comme certaines préfectures et départements l'ont réussi, à proposer aux élus un dossier unique de demande de subvention pour leur recherche de financement. Ce dossier pourrait aussi être le même pour l'agence, ses partenaires, les départements et la région. Un seul dossier à déposer et un seul calendrier pour obtenir DSIL, DETR, FNADT, financement départemental et régional, serait une simplification grandement appréciée des élus. Le comité régional des financeurs pourrait porter cette amélioration concrète.
- Clarifier offres et dispositifs et calibrer les procédures selon la taille des collectivités. Les offres de l'ANCT sont multiples, couvrent de nombreux champs. Cette diversité peut générer des confusions et un défaut d'information, notamment auprès des petites communes qui ne disposent pas de services dédiés. Une offre orientée différemment selon la taille de la commune pourrait permettre d'encourager les petites communes à déposer des demandes : dossier simplifié, travail administratif moins conséquent.
- En finir avec les AAP et AMI. Compte tenu des effets pervers connus des AAP et AMI, il devient essentiel de repenser les modalités de soutien de l'État et ses partenaires aux projets des collectivités. Il est possible d'imaginer des modalités plus partenariales de coopération et de soutien des projets locaux correspondants aux priorités nationales. Les services déconcentrés seraient plus responsabilisés, repositionnés dans un rôle de partenaire valorisant et motivant. Il ressort d'ailleurs du questionnaire aux préfectures qu'ils sont demandeurs de sortir de cette modalité de travail.
- Porter une expérimentation sur le pluriannuel. Certains programmes pourraient s'engager dans cette voie. À titre d'exemple, ACV comprend déjà des éléments de pluriannualité pour Action Logement et l'ANAH39(*). Les dotations de soutien à l'investissement des collectivités territoriales (DSIL, DETR, FNADT), comme les outils ad hoc (Fonds Friche, FRLA) pourraient faire l'objet de programmations pluriannuelles prévisionnelles, à l'instar du CEPER. La mise en place des CRTE, des financements du FNADT sur certains projets et les perspectives de déploiement du Fonds vert vont nécessairement rendre indispensable la mise en place du comité des financeurs qui pourrait explorer ce champ de la pluriannualité.
- Renforcer le lien collectivités/Europe. Intercommunalité de France estime qu'il est possible de progresser pour « peser encore plus fort à Bruxelles et aider les territoires et les entreprises à capter des crédits européens et à s'engager dans des programmes européens ». Elle poursuit : « même chose concernant l'impact territorial et l'application en France des lois, des directives et des règlements européens : la France devrait être en capacité de suivre les projets de loi susceptibles de modifier la capacité de nos territoires à se développer. Nous devrions nous mettre d'accord sur une stratégie commune plutôt que des initiatives individuelles éparpillées. Un observatoire des politiques européennes pourrait, par exemple, alerter sur les évolutions possibles de la loi européenne et donc française, diffuser les opportunités offertes par l'Union européenne, porter la voix de la France (ministères, agences, collectivités territoriales) sur les grands défis de demain et mieux faire connaître ce que font les autres territoires européens. Ces missions pourraient être confiées à l'ANCT. »
- Alléger l'agence de certaines tâches de gestion administrative pour éviter le grossissement de ses fonctions ressources. L'empilement de missions confiées à l'agence fait courir le risque de transformer une structure qui se veut légère et agile en une « administration de gestion » chargée de la mise en oeuvre de dispositifs toujours plus nombreux. « Le caractère d'opérateur au service du développement des territoires de l'ANCT pourrait également être réaffirmé si elle était déchargée de certaines missions qui, par leur caractère régalien et fortement interministériel, semble davantage relever d'une administration centrale » résume la DGCL. Les missions d'autorité nationale de coordination des fonds européens répondent à ces caractéristiques et pourraient ainsi à terme être rattachées à une administration centrale. Le pôle Politique de cohésion européenne (32 ETPT à fin 2021), majoritairement composé de profils juridiques, en relation étroite avec les collectivités locales (notamment régionales) et autorités de gestion des fonds, pourrait ainsi être transféré sans que sa cohérence d'ensemble n'en soit altérée.
L'agence doit apprendre de ces trois premières années : elle doit notamment, avant de lancer de nouveaux programmes, prendre un temps de réflexion et de concertation pour voir comment un nouveau dispositif de l'État peut s'appliquer au mieux, en apparaissant comme cohérent et complémentaire des dispositifs existants. Cette déclinaison plus pragmatique et différenciée donnerait plus de crédits aux différentes annonces de l'agence. Les dispositifs seraient également davantage mobilisés, car mieux inscrits dans les territoires, mieux compris et mieux accompagnés.
f) Intensifier le dialogue interministériel
Les élus rappellent qu'un attendu fort de l'agence était de faire progresser l'inter-ministérialité des dispositifs et des actions. Il apparait que cette ambition initiale n'est pas complétement réalisée.
Comme le résume Intercommunalité de France, « la capacité de l'ANCT à coordonner de l'interministériel, ou la capacité de l'ANCT à influer sur la territorialisation des politiques portées par les autres ministères, est loin d'être évidente. C'est pourtant le coeur de l'ambition initiale de l'agence. »
Ce dialogue interministériel, porté par la direction générale des collectivités locales (DGCL) -qui exerce la tutelle sur l'ANCT en lien avec l'agence nationale-, existe pourtant sur certains sujets comme la feuille de route sur la ruralité. Il y a, par ailleurs, 16 représentants des ministères dans le CA de l'ANCT. Enfin, les Réunions des Administrateurs de l'État (RAE) précédent les réunions du CA et sont destinées à les préparer.
Au terme de trois ans d'existence, la discussion entre ministères et ANCT/DGCL semble avoir perdu en consistance et mérite d'être réactivée. Il semble que de meilleures coordinations pourraient naitre de ces discussions : échange d'informations, croisement et coordination des dispositifs et des financements, identification de nouvelles initiatives, propositions conjointes d'expérimentations de dispositifs, ... Pour illustrer ce point, un des exemples abordés lors des auditions était le manque de liant entre les dispositifs du ministère de l'Agriculture et les interventions de l'agence sur les questions de soutien à la transition agricole.
Vos rapporteurs appellent à une remobilisation des acteurs pour se ré-emparer de ces instances d'échange, afin de nourrir un dialogue plus intense et régulier.
g) Renforcer l'évaluation
(1) Mesurer la satisfaction des programmes par les élus locaux sur une base permettant l'étalonnage
Il serait possible de constituer, sous forme de baromètre, une mesure de satisfaction simple qui serait applicables à chaque programme.
Sur une base annuelle, les bénéficiaires des programmes seraient amenés à faire part de leur satisfaction en répondant à un nombre très limité de questions simples : le programme répond-il aux besoins ? Le programme est-il fluide dans son fonctionnement ? Le programme est-il sur un rythme adapté ? Les évolutions récentes du programme vont-elles dans le bon sens ? Etc.
De même sur l'ingénierie, une fiche de satisfaction et d'évaluation du déroulé de la mission et de l'efficacité ressentie pourrait être utile.
(2) Développer des évaluations externes déconnectées des enjeux de promotion de l'agence par elle même
L'ANCT déploie de nombreux programmes. Des évaluations externes permettant d'objectiver apports, limites et dysfonctionnements, afin que la direction puisse opérer les modifications nécessaires, et peut être même l'extinction progressive de certains, semble nécessaire.
Recommandation n°14 : Mettre en place un système de mesure simple de satisfaction (réponse aux attentes) pour les programmes nationaux et les dispositifs et instituer un calendrier pluriannuel d'évaluations externes. |
EXAMEN EN DÉLÉGATION
Lors de sa réunion du 2 février 2023, la délégation aux collectivités territoriales a autorisé la publication du présent rapport.
Mme Françoise Gatel, présidente. - Mes chers collègues, nous examinons le rapport d'information relatif à la perception, par les élus locaux, de l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), dont M. Rémy Pointereau et Mme Céline Brulin sont les rapporteurs. Cette réunion intervient après l'examen du rapport d'information sur la simplification des normes imposées aux collectivités territoriales, que nous avons produit avec le vice-président Rémy Pointereau, rapport qui a eu un certain écho. Il s'agit d'éviter l'inflation des normes - à ce titre, cette semaine de travaux fut un régal.
Nous préparons des États généraux de la simplification des normes applicables aux collectivités territoriales : nous espérons y conclure une charte d'engagement ; nous invitons aussi le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN), le Parlement et le Gouvernement à y définir une conduite collective sur la fabrique de la loi. L'ensemble des associations d'élus nous soutiennent.
L'ANCT a été créée au Sénat, à partir d'un constat toujours valable : les élus locaux ont besoin d'ingénierie face au désengagement des services de l'État. Nous pensions que l'ANCT serait la solution. Lors des débats, il s'agissait de définir la forme que prendrait l'agence, notamment vis-à-vis de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) et du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema).
Nous exerçons sur l'ANCT une « filature bienveillante mais exigeante ». L'ANCT existe, elle s'ancre dans les territoires, mais elle n'a pas atteint la profondeur de nos campagnes et de nos villes.
Par ailleurs, au sein du groupe de travail sur la décentralisation, groupe transpartisan sur l'initiative du Président Larcher, nous réfléchissons à l'efficience de l'action publique. Au sein de ce groupe, Mathieu Darnaud et moi-même encourageons une fusion de toutes ces agences et plaidons pour une meilleure territorialisation.
Mme Céline Brulin, rapporteure. - Nous reviendrons sur ce que nous proposons pour le Cerema, l'Ademe et l'ANCT à la fin de notre présentation.
La promesse du Président de la République faite au Congrès des maires de France en novembre 2017 était claire : l'ANCT avait pour mission d'être cet État facilitateur des projets des élus locaux. Trois ans après la création de cette agence, les élus locaux sont toujours à la recherche de ce facilitateur.
La première chose qui nous a frappés est que l'ANCT reste largement méconnue des élus locaux ; son image est floue. À titre d'illustration, à la question « connaissez-vous l'ANCT ? », 52 % des élus répondent par la négative, tandis que 74 % reconnaissent ne pas avoir fait appel à ses services.
Même lorsque l'existence de l'ANCT est connue, les élus locaux peinent à comprendre son organisation et à s'approprier ses dispositifs et son offre de services. Ces difficultés s'expliquent certes par la nouveauté de l'ANCT, mais sont surtout liées à un déficit d'incarnation de l'ANCT sur nos territoires et au rôle joué par les préfets.
Par ailleurs, les collectivités qui connaissent et apprécient l'Agence sont la plupart du temps les collectivités bénéficiaires des programmes nationaux, comme Petites Villes de demain (PVD) ou Action coeur de ville (ACV), ou bénéficiaires de dispositifs d'ingénierie sur mesure. Je précise que 1 162 projets ont pu être soutenus au bénéfice de 494 communes, 594 établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et 74 collectivités d'autres strates en trois ans.
La perception de l'Agence par les élus locaux est donc très variable. Mon collègue Charles Guené va maintenant présenter la façon dont les élus locaux apprécient son action.
M. Charles Guené, rapporteur. - Il est vrai que certains élus locaux ont mis en avant des éléments positifs du bilan de l'action de l'ANCT. Cependant, les élus auditionnés ont surtout été majoritairement critiques à l'égard de l'action de l'Agence.
Trois critiques s'adressent à l'Agence. La première est une implication des préfets inégale en matière d'ingénierie et une action qui ne vient pas suffisamment soutenir les écosystèmes locaux. Si dans plusieurs départements les services déconcentrés animent le dialogue entre les élus et l'ingénierie locale, c'est loin d'être une généralité. L'intervention de l'Agence est parfois accusée de générer des effets contreproductifs lorsqu'elle se déroule en décalage avec les équilibres locaux ou en substitution de ses acteurs. L'annonce de prestations d'ingénierie gratuites a, par exemple, entraîné une forte confusion chez les élus locaux et une forme de pénalisation des écosystèmes organisés. Le recours en majorité à des bureaux de consultants privés est parfois adapté, mais il ne contribue pas à renforcer l'écosystème local. Ces consultants ont tendance à livrer des prestations « copier-coller », sans ancrage dans le territoire et sans lendemain. Les territoires ont besoin d'être accompagnés par des acteurs dans la durée.
La deuxième critique est une approche encore trop descendante, peu attentive aux dynamiques locales. Les élus attendent que l'État respecte les dynamiques et les coopérations existantes, et vienne les appuyer plutôt que d'en lancer de nouvelles. Que ce soit les programmes nationaux ou les contrats de relance et de transition écologique (CRTE), l'Agence déroule ses actions à marche forcée selon les élus. Enfin, elle doit trouver une articulation avec le niveau régional, qui est celui des grandes contractualisations en matière d'aménagement du territoire et de cohésion territoriale.
La troisième critique est une promesse non tenue de simplification et de meilleur soutien aux projets locaux. En un mot, l'espoir de simplification s'est transformé en sentiment de complexification.
Mme Françoise Gatel, présidente. - Du moins, c'est le ressenti du terrain.
M. Charles Guené, rapporteur. - Même si ce tableau est un peu décevant, trois ans d'existence, pour toute organisation, cela reste très court, et l'Agence s'est constituée pendant la crise du covid. En trois ans, les attentes qui pesaient sur elle n'ont fait que se renforcer. Le besoin d'ANCT dans les territoires reste très fort, particulièrement pour les territoires défavorisés.
Notre mission propose 14 recommandations, regroupées en trois grandes idées : rapprocher l'Agence des élus locaux, faire de l'ingénierie la priorité et consolider et simplifier l'existant.
Notre première série de recommandations vise à rapprocher l'Agence des élus locaux. Nous avons été frappés par la différence de perception et de discours entre les élus et l'ANCT.
Les besoins sont les suivants : créer du dialogue direct entre l'ANCT et élus locaux, au cours de temps d'échange, hors préfecture, par exemple sur des réalisations de l'Agence ; utiliser ces échanges dans le débat entre l'État et les territoires au sein du conseil d'administration de l'Agence, pour élaborer une feuille de route stratégique 2023-2026 qui fixera les grandes priorités de l'ANCT ; délivrer une instruction aux préfets pour les remobiliser et positionner par défaut le sous-préfet d'arrondissement comme interlocuteur de premier niveau sur les questions d'ingénierie ; enfin, de façon plus générale, privilégier une communication plus simple, plus sobre et déconcentrée, qui repose aussi sur le retour d'expérience des élus locaux et de leurs associations. Cette communication pourrait prendre la forme d'un guide pratique pour les élus locaux.
Mme Céline Brulin, rapporteure. - Notre deuxième série de recommandations porte sur l'accès des collectivités à cette ingénierie. Nous avons pris conscience qu'il existe un immense besoin des collectivités en matière d'ingénierie opérationnelle, stratégique et financière. La fin de l'assistance technique de l'État pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire (Atésat) représente un manque pour beaucoup.
Il est temps que l'Agence opère un rééquilibrage entre ses missions. Les programmes nationaux sont bien installés et ses efforts doivent maintenant porter sur la principale attente des collectivités relative à l'ingénierie. Le moment est charnière, alors que l'ANCT change de gouvernance.
Nous recommandons d'étudier la mise en place d'un système de fonds national « 1 % ingénierie » ou plus vraisemblablement « 0,1 % ingénierie », qui serait financé par les dépenses d'investissement des collectivités. Il s'agit d'une proposition de l'Association nationale des pôles d'équilibres territoriaux et ruraux et des pays (ANPP), qui a reçu plus de 11 000 signatures d'élus et d'acteurs locaux.
Ensuite, nous préconisons de terminer les recensements départementaux de l'ingénierie - mission de l'ANCT qui n'est pas encore menée à bien - et de positionner la délégation locale de l'ANCT en animateur de l'ingénierie locale.
Nous suggérons de doter les préfets de moyens humains ou financiers de soutien à l'ingénierie. Nous pourrons revenir sur des exemples précis de soutien sur mesure assuré par les préfets.
Nous proposons aussi d'accroître la couverture du territoire en agences techniques départementales et en conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE).
Enfin, il faudrait instituer un comité de direction commun, trimestriel, entre l'ANCT, l'Ademe et le Cerema, pour réaliser une feuille de route stratégique partagée. La fusion ne nous a pas semblé être la réponse idéale.
M. Charles Guené, rapporteur. - Notre troisième série de recommandations vise à consolider et simplifier l'existant.
L'Agence est aujourd'hui un empilement de programmes, de politiques publiques, de dispositifs, d'expérimentations et de labels qui contribuent à nourrir la confusion des élus. Les élus réclament une pause pour bien intégrer l'existant et gagner en cohérence et en transversalité.
Nous souhaitons conforter l'outil des CRTE, notamment élargis à la dimension sociale, comme le cadre de référence de la mise en oeuvre des politiques publiques de l'État.
Il faut sortir de la vision en silo induite par des programmes spécialisés - pour les petites villes, les villes moyennes, les villes de montagne - pour mieux identifier les dynamiques locales de coopération entre ces catégories de collectivités, les valoriser, les soutenir et y inscrire les interventions de l'Agence.
Nous souhaitons enfin renforcer l'évaluation à travers un système de mesure simple de satisfaction et de réponse aux attentes, pour les programmes nationaux et les dispositifs, et instituer un calendrier pluriannuel d'évaluations externes.
La philosophie sous-jacente à ces trois séries de recommandations est que l'État fasse plus confiance aux acteurs locaux : aux élus, aux collectivités et même à ses propres services déconcentrés. Nous avons entendu des critiques à cet égard.
Mme Céline Brulin, rapporteure. - En conclusion, signalons que l'Agence a renouvelé sa gouvernance politique, avec la désignation de M. Christophe Bouillon, maire de Barentin et président de l'Association des petites villes de France (APVF), et administrative, avec la nomination de M. Stanislas Bourron, ancien directeur général des collectivités locales (DGCL) au poste de directeur général.
Nous aurons le plaisir de remettre ce rapport, avec vous, madame la présidente, le mercredi 8 février à 13 heures à Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.
Mme Françoise Gatel, présidente. - Chers collègues, je vous remercie pour cet excellent bilan et la qualité de votre binôme.
La constance de la « filature bienveillante » de la délégation est très importante, a fortiori au moment du changement de gouvernance.
Je me réjouis de la cohérence de la réflexion des sénateurs. Les services déconcentrés sont parfois dans un état de fatigue avancé. Vous avez insisté sur le besoin d'ingénierie des collectivités, ingénierie qui peut être financière, technique, sous forme d'assistance à maîtrise d'ouvrage - voyez le cas des ponts, qui exige l'expertise des ingénieurs du Cerema. Les élus ont besoin de s'appuyer sur une ingénierie neutre, et non de se mettre entre les mains de business men. Des intercommunalités instaurent déjà des fonctions d'ingénierie au service des communes membres, comme la communauté d'agglomération de Saint-Malo. Les mutualisations sont ainsi encouragées.
Mathieu Darnaud et moi-même poussons à la fusion. Nous avons décidé d'être un peu disruptifs, car, même si le Cerema est un organisme de grande qualité, il faut partir des besoins des usagers avant tout, et non se focaliser sur les réticences des personnels. Le préfet de département pourrait piloter le guichet unique de cette ingénierie. Le Cerema dit pouvoir organiser des réunions de concertation, mais ce n'est pas la meilleure manière de créer des dynamiques pour les territoires - lors de réunions pour organiser l'installation d'une entreprise dans un territoire, on trouve bien souvent plus de fonctionnaires que de représentants des entreprises. Soyons agiles. Si l'État souhaite accompagner les collectivités, les élus doivent accéder facilement aux services compétents.
M. Laurent Burgoa. - Je serai peut-être un peu provocateur. Avez-vous envisagé la suppression de cette agence ?
M. Thierry Cozic. - Quel art de la concision !
Mme Muriel Jourda. - Cela valait-il la peine de supprimer la direction départementale de l'équipement (DDE) pour la remplacer par trois agences différentes ? La DDE fonctionnait plutôt bien, son action avait du sens.
M. Rémy Pointereau. - L'ANCT est une coquille vide. Les préfets n'ont pas de moyens supplémentaires, notamment humains. Il n'y a pas de dialogue avec les départements, les services ne se parlent pas, tout est fait en silo. L'utilité de l'Agence est vraiment en question ; la fusion entre le Cerema et l'ANCT serait sûrement une bonne chose. Les élus ne connaissent pas cette agence et il n'y a aucun référent dans les territoires.
M. Charles Guené, rapporteur. - Vous avez la tentation de jeter le bébé avec l'eau du bain. Nous nous sommes posé la question. Je rappelle que le Sénat est à l'origine de l'Agence ! Il est légitime de voir ensuite si elle répond bien aux besoins. Entre 60 et 70 départements n'ont pas besoin d'ingénierie, soit parce que les territoires se sont déjà organisés, puisqu'ils en avaient les moyens, soit parce que des personnels motivés, dans les conseils départementaux, ont pris les choses en main. Cependant, 30 départements sont dans un dénuement presque total en la matière. Je serai plus précis : dans ces 30 départements, en général, les grandes villes et grandes communautés d'agglomération se sont organisées, tandis que règne autour un no man's land, où les petites communes ne bénéficient pas de cette ingénierie. Quand les départements, ensuite, essaient de mettre en place des agences départementales, ils n'ont plus assez de masse critique pour organiser les choses.
Ainsi, faut-il donner la main aux départements ou aux préfets ? Ce serait aujourd'hui difficile pour les départements ; les préfets semblent les mieux placés pour organiser le terrain et travailler avec tous les acteurs, dont le département. Voilà le bon niveau d'action.
L'ingénierie regroupe des réalités différentes. Dans les 30 départements évoqués, nous parlons souvent d'ingénierie classique, celle qui correspond au retrait de la DDE et à l'ancien périmètre de l'Atésat. Aujourd'hui, une nouvelle ingénierie émerge, sur la transition énergétique, le numérique, la démographie et la désertification médicale. Enfin, l'ingénierie du Cerema est une ingénierie d'expertise, dont les petites communes n'ont pas besoin, mais qui répond à des demandes importantes des grandes collectivités.
Mme Céline Brulin, rapporteure. - Quoi qu'il en soit, il convient d'apporter une réponse à tous les besoins d'ingénierie que Charles Guené vient d'évoquer. Cela nous a conduits à réfléchir à des moyens humains et financiers supplémentaires dans les préfectures. Je pense à des experts sur certains sujets très pointus, mais aussi à de l'ingénierie opérationnelle, énormément recherchée par les petites communes.
Au-delà du phénomène de « copier-coller » pour ce qui concerne les études, l'ANCT doit être en mesure d'avoir des référents régionaux connaissant mieux le terrain et apportant des réponses sur mesure.
Avant une fusion entre le Cerema, l'Ademe et l'ANCT, ces trois acteurs doivent se mettre « au chevet des territoires », conformément à la logique des CRTE. À l'heure actuelle, ils travaillent en silo et ne considèrent pas l'ensemble des problématiques du territoire.
Je ne suis pas sûre que la fusion de grands organismes contribue de fait à un décloisonnement. Je pense notamment aux agences régionales de santé (ARS), résultat de la fusion de sept entités différentes, qui n'ont pas vraiment donné les résultats attendus.
Nous avons privilégié un travail en commun, sans passer par une fusion, qui demande du temps.
M. Pascal Martin. - Je salue le travail des deux rapporteurs, qui traduit bien ce que nous vivons sur le terrain.
Dans le département de la Seine-Maritime, qui compte un peu plus de 700 communes, dont 600 ont moins de 1 000 habitants, l'immense majorité des maires ignore totalement l'existence de l'ANCT. Et ceux qui la connaissent s'interrogent sur son utilité !
Nous retrouvons le constat que vous avez dressé pour de très nombreuses agences, avec une approche en silo, une simplification manquée, une démarche descendante et presque jamais ascendante, qui ne répond pas à l'attente des maires et une absence d'évaluation.
L'empilement des agences pose un véritable questionnement. J'entends ce que disent nos collègues de manière quelque peu provocatrice concernant la raison d'être et la plus-value de l'ANCT.
M. Antoine Lefèvre, vice-président. - Dans mon département, l'ANCT est également méconnue par les acteurs, notamment du monde rural.
Vous proposez une sorte de modèle type, en faisant référence à des agences existantes. Toutefois, d'un département à un autre, la situation est très contrastée. En effet, certains besoins ont d'ores et déjà été pris en compte. Je rappelle à cet égard le rapport d'information intitulé Faire confiance à l'intelligence territoriale. Dans ce contexte, sans doute un modèle type n'est-il pas applicable partout.
Certes, en évoquant une agence nationale, on rêve peut-être d'un modèle idéal. Cependant, il convient d'introduire davantage de pragmatisme.
Enfin, si l'objectif est d'arriver au résultat des ARS, cela laisse songeur !
M. Jérôme Durain. - Nous devons retrouver quelques principes simples : proximité, solidarité territoriale et égalité de traitement.
Finalement, plusieurs niveaux d'ingénierie cohabitent : l'État, mais aussi des structures de niveau départemental, lesquelles ont été déconstruites par l'émergence des intercommunalités, et la « ligue des champions » de l'ingénierie, avec les intercommunalités de premier niveau, qui ont leurs propres structures. Les structures départementales vieillissent mal, parce qu'il n'y a plus de solidarité territoriale. Quant aux petites intercommunalités, elles disposent d'une ingénierie « déportée », qui est un peu trop loin.
Sans doute existe-t-il une solution avec certains financements associés à des postes dédiés localement, dans le cadre d'une politique contractuelle.
Il semble que l'ANCT n'ait pas répondu complètement à cette problématique.
Mme Françoise Gatel, présidente. - À un moment donné, l'État a décidé d'externaliser ses fonctions, en créant des agences, sources, semblait-il, d'efficience. Or aujourd'hui, ces dernières, quelle que soit la diversité des territoires, n'assurent pas le service.
Face aux directions régionales du Cerema, structure remarquable, comment une commune située au coeur de la région peut-elle se faire connaître ?
Je ne suis pas étatiste ni nostalgique. Simplement, nous avons besoin d'un accompagnement de l'État et des collectivités pour la réalisation des missions.
Vous avez évoqué la fusion de ces énormes « machins », qui nous prendrait des années. Certes, mais la crise montre l'importance d'un État déconcentré à une échelle d'efficacité de proximité, qui correspond très souvent à l'échelle départementale, que je ne confonds pas avec le conseil départemental. Les services doivent être largement déconcentrés, avec la capacité d'agir. Quant au préfet, il doit être l'interlocuteur privilégié, le chef d'orchestre.
Mme Céline Brulin, rapporteure. - Vous avez qualifié nos propos, mon cher collège, de « provocateurs ». À mes yeux, ils ne le sont pas !
Le premier enjeu, c'est la différence de perception des élus locaux et la façon dont l'Agence se voit elle-même. Il convient de faire en sorte que chacun s'appuie sur la même réalité.
Nous n'envisageons absolument pas un modèle type ! Au contraire, il convient de doter les territoires, au niveau départemental, d'une ingénierie développée, afin de répondre aux différents besoins. Il est d'abord nécessaire de coordonner ce qui existe déjà, ensuite de compléter les solutions, l'Agence apportant une ingénierie propre, mobilisable sur le terrain, à la demande des collectivités territoriales. Enfin, l'État doit se positionner sur les grands domaines stratégiques : comment aider les territoires à affronter les enjeux à venir ?
M. Charles Guené, rapporteur. - Permettez-moi d'apporter une autre approche.
En réalité, l'Agence possède trois secteurs d'action. Tout d'abord, elle est le promoteur des politiques publiques. Dans ce rôle de missi dominici, elle a assez bien réussi.
Ensuite, s'agissant du service qu'elle rend aux territoires, l'Agence possède des moyens relativement faibles. Elle oeuvre à une sorte de mise en cohérence des grands acteurs et apporte une réponse, lorsqu'elle est demandée par le territoire.
Enfin, elle doit faire l'analyse du terrain, dans chaque département, pour évaluer les besoins, les mettre en cohérence, afin de répondre à l'attente des élus. Si l'Agence accomplissait partout cette mission, ce serait déjà très bien !
Ainsi, dans quelques départements, il existe un guichet unique pour l'État, le département et la région. Or c'est exactement ce que les élus souhaitent ! En la matière, la marge de progression est énorme.
M. Olivier Paccaud. - L'Oise a eu le privilège de traiter avec une présidente de l'ANCT issue de son territoire, qui a fait beaucoup de « propagande ». Nous avons ainsi eu droit à quelques grands-messes en préfecture. Toutefois, à l'arrivée, l'ANCT n'a quasiment rien fait dans l'Oise ! La nature ayant horreur du vide, les collectivités se sont dotées elles-mêmes de leur propre ingénierie.
Mme Catherine Di Folco. - Seulement les grandes collectivités !
M. Olivier Paccaud. - Cela dépend ! Jérôme Durain a évoqué une « ligue des champions ». Ainsi, Beauvais ou Compiègne disposent de moyens d'ingénierie qui fonctionnent très bien. Les intercommunalités de taille plus restreinte ont aussi mis en place des systèmes d'ingénierie fonctionnant plus ou moins bien. Quant au département, il avait instauré une assistance départementale pour les territoires de l'Oise, qui propose ses services moyennant cotisation. Cela fonctionne plus ou moins bien.
Une agence n'est pas là pour remplacer l'État ! Est-ce un « machin » ? C'est vraiment le sentiment qu'en ont les élus de l'Oise !
M. Bernard Buis. - Le cas de la Drôme ressemble fort à ceux qui viennent d'être décrits. Au moment de la disparition de l'Atésat, un service d'ingénierie plutôt efficace avait été mis en place pour les petites communes au niveau du département. Dans ce contexte, l'ANCT n'a pas su trouver sa place : les maires ne la connaissent pas. Les rares qui savent de quoi il s'agit sont ceux des Petites Villes de demain.
M. Bernard Delcros, vice-président. - Je partage l'essentiel des remarques qui ont été faites. Lorsqu'il a été décidé de créer l'ANCT, il s'agissait de répondre au besoin réel de mieux accompagner les élus locaux et les territoires dans leurs démarches, qui sont de plus en plus complexes. Le besoin d'ingénierie a changé : au temps de l'Atésat, les petites communes avaient surtout besoin d'accompagnement en matière de voirie communale...
Les résultats ne sont pas au rendez-vous, sachant que la situation est très différente d'un département à l'autre. La création de l'ANCT ne s'est pas assortie de moyens supplémentaires ; on aurait pu au moins imaginer une réorganisation des services de l'État... Ce besoin d'accompagnement n'a pas disparu ; il concerne essentiellement les petites communes, qui sont précisément celles qui ne savent pas du tout ce qu'est l'ANCT. Cette dernière est identifiée seulement par les communes qui bénéficient de programmes nationaux, Petites Villes de demain notamment ; mais, justement, celles-là n'ont pas besoin de l'ANCT...
L'ANCT ne répond pas complètement au besoin : les petites communes ne tirent aucun bénéfice de sa création, les grandes s'en passent très bien. Il faut donc réorienter l'action de l'ANCT en redéfinissant son rôle ; ce chantier reste à mener.
Je rejoins ce qui a été dit sur l'évaluation : aucun miracle n'est à attendre de la fusion.
Une question sur le « 1 %o » : comment imaginez-vous concrètement un tel dispositif, sachant que l'accompagnement en ingénierie qui a été mis en place dans le cadre du programme Petites Villes de demain s'est révélé efficace ?
Mme Céline Brulin, rapporteure. - Vos exemples, mes chers collègues, vont dans le sens de ce que nous proposons : les préfets et sous-préfets doivent s'impliquer beaucoup plus et beaucoup mieux pour répondre aux besoins de tel ou tel territoire ; même en supposant qu'elle soit parfaite, ce ne peut être le rôle de l'Agence, depuis Paris, d'y pourvoir.
À la faveur de l'apparition de nouveaux enjeux complexes - gestion de l'afflux touristique, problèmes écologiques, etc. -, on en oublie qu'il faut répondre aussi aux problèmes de voirie. Or, telle n'est pas la vocation de l'ANCT, dont le rôle est plus général - il est d'organiser la réponse.
Pour ce qui est du 1 %o, l'idée est la suivante : à chaque fois que des investissements sont réalisés, on prélèverait une toute petite partie - 1 %o - des montants dépensés pour abonder un fonds commun national d'ingénierie. Comme on dit, il pleut toujours là où c'est mouillé : les grandes collectivités, qui ont les moyens de développer de l'ingénierie, ont par là même accès à des financements dont les petites collectivités sont privées. Nous appelons de nos voeux une forme de ruissellement vertueux : comment faire en sorte que les dépenses globales d'investissement profitent aux territoires qui ont moins de moyens d'ingénierie ?
M. Charles Guené, rapporteur. - Il existait une règle, autrefois, qui faisait obligation de réserver 1 % des dépenses engagées dans le cadre d'un grand chantier à la réalisation d'une oeuvre d'art... C'est un peu le même principe que nous proposons d'appliquer à l'ingénierie. Vu le montant des investissements locaux, la somme ainsi dégagée ne serait pas neutre.
Bernard Delcros a dit que les politiques publiques nationales n'avaient pas besoin de l'ANCT. Mon sentiment est que l'inaction ou la méfiance des préfets vient de là : eux aussi se sont demandé ce que c'était que ce « bidule ». Il a été assez difficile de leur expliquer que l'ANCT avait vocation à se décliner localement, à leur niveau, son rôle étant de mettre en cohérence l'ingénierie mobilisée sur le terrain. Des ressources sont souvent déjà en partie disponibles au niveau de leur département, mais elles ne sont pas toujours utilisées de façon judicieuse...
Les préfets disent avoir besoin à la fois de « petites mains » et de chefs de projet ; l'ANCT, qui met beaucoup de monde, désormais, sur le terrain, pourrait mettre certains de ses agents à leur disposition. Gardons en tête, néanmoins, que les collectivités se sont longtemps battues pour disposer, en interne, de leurs propres ressources d'ingénierie.
Dans les départements où il ne « pleut » pas assez, où le niveau d'ingénierie est faible, les marges de progression sont considérables ; il peut suffire, y compris à moyens constants, de mieux organiser les choses. Et les préfets sont les mieux placés pour conduire ce travail.
Mme Françoise Gatel, présidente. - Lors de l'examen du projet de loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale (3DS), il a beaucoup été question des relations du préfet avec les ARS ou avec l'Ademe : nous avons fait officiellement du préfet le « référent Ademe », mettant fin à une situation dans laquelle une agence fonctionnait pour ainsi dire en autonomie, définissant elle-même ses propres objectifs sans comptes à rendre à personne.
Dès lors qu'une agence est financée par l'État et exerce des fonctions pour son compte, il me semble normal que celui-ci ait une réelle autorité sur les services de ladite agence. Mais, comme l'Ademe nous l'a expliqué, dépendre du préfet, quand on a pris goût à l'autonomie, peut se révéler insupportable...
Dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur de M. Darmanin, un progrès énorme a été accompli : dorénavant, le préfet de département, en cas de crise, aura autorité sur tous les établissements publics de l'État et services déconcentrés. De la même façon, le préfet doit exercer une autorité réelle sur l'ANCT. Abstraction faite de la bonne volonté de chacun de travailler en intelligence, il faut une véritable chaîne d'efficience à l'échelle déconcentrée. Le préfet doit avoir à sa disposition des chefs de projet compétents et les prérogatives de chacun doivent être clairement établies.
Pour ce qui est du programme Petites Villes de demain, je n'ai eu que des échos très positifs de la fonction de chef de projet, qui donne aux élus la capacité de réfléchir à ce qu'ils vont faire avant de le faire...
Je pense notamment au financement de la transition écologique, qui va reposer sur les collectivités. Quid de l'efficience de la dépense ? On l'estime à 12 milliards d'euros par an. Il est évidemment nécessaire, et d'ailleurs obligatoire, d'agir en la matière, mais ce sujet emporte aussi des questions d'image. À cet égard, confier le travail aux seuls cabinets privés est dangereux : ceux-ci peuvent répugner à vous dire non et vous laisser vous engager dans des investissements dont la pertinence n'a pas été mesurée.
Je plaide ainsi pour que le Cerema intervienne en tant qu'assistant à maîtrise d'ouvrage. Le recours à des sociétés privées ne doit pas être systématique.
M. Bernard Delcros. - Aucun maire d'une petite commune ne sait que le Cerema existe...
Mme Céline Brulin, rapporteure. - Les collectivités ont désormais la possibilité d'adhérer directement au Cerema ; cela fait partie du paysage complexe qu'elles ont à s'approprier...
M. Charles Guené, rapporteur. - Un mot sur la complexité des chaînes de commandement : l'ANCT est sous tutelle de la direction générale des collectivités locales quand les préfets sont rattachés au ministère de l'intérieur. Autrement dit, il n'est pas toujours facile de communiquer et d'imposer des décisions...
Le nouveau directeur général de l'ANCT est confronté à ce problème : quel véhicule utiliser pour dialoguer avec les préfets ?
Mme Françoise Gatel, présidente. - C'est précisément la raison pour laquelle nos collègues Agnès Canayer et Éric Kerrouche, dans leur rapport d'information déposé en septembre dernier, ont proposé que les préfets soient dorénavant rattachés au Premier ministre, ce qui favoriserait l'exercice de leur mandat interministériel. Une telle recommandation est si disruptive qu'elle n'a pas été sans créer quelques malaises, mais la question mérite d'être posée, car le fonctionnement en silos n'est pas efficace !
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES LORS DE DÉPLACEMENT
Jeudi 20 octobre 2022 : déplacement dans la Marne
Audition des élus locaux en partenariat avec l'Association des maires de la Marne
· Mme Caroline ISSENHUTH, maire de Vanault-Les-Dames
· M. Patrice VALENTIN, maire d'Esternay et président du Syndicat mixte à vocation unique (SIMU) d'Anglure
· M. René SCHULLER, maire de Saint-Germain-La-Ville et vice-président de l'Association des maires de la Marne
· M. Jean-Pierre FORTUNÉ, maire de Tinqueux et vice-président de la communauté urbaine du Grand Reims
· M. Etienne DHUICQ, maire de Montmirail et président de la communauté de communes de la Brie Champenoise
· Mme Pascale CHEVALLOT, maire de Gigny-Bussy et présidente de la communauté de communes Perthois Bocage et Der
· M. Frédéric ESPINASSE, maire d'Anglure
· M. Daniel STOLL, adjoint au maire de Pargny sur Saulx
· M. Pierre SABLON, 2è adjoint au maire de Dormans
· Mme Karine ROLLAND, directrice de l'Association des Maires et Présidents d'intercommunalités de la Marne
Audition des services de l'État dans la Marne
· M. Morgan BOUCHER, secrétaire général de la sous-préfecture d'Epernay
· M. Jean-Jack FÈVE, secrétaire général de la sous-préfecture de Vitry-le-François
· M. Nicolas KIEFFER, directeur de la Direction de la Coordination des Politiques Publiques et de l'Appui Territorial de la préfecture de la Marne
· Mme Caroline PRON, chef du pôle Sécurité et Territoires de la sous-préfecture de Reims
· Mme Claire CHAFFANJON, directrice départementale du territoire (DDT) de la Marne par intérim et déléguée territoriale adjointe de l'Agence National de la Cohésion des Territoires
· M. Pierre FOURCADE, chef de service en charge des politiques territoriales de la Direction départementale du territoire (DDT) de la Marne
· M. Pierrick LOZÉ, directeur de la Maison de la Région de Châlons-en-Champagne
· LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES AU SÉNAT
Mercredi 21 septembre 2022
· M. Zacharia ALAHYANE, directeur des programmes France Mobile et France THD de l'Agence nationale de la cohésion des territoires
Mercredi 28 septembre 2022
· M. Bruno ACAR, inspecteur général de l'administration de l'Inspection générale de l'administration
· Mme Marion PUJAU-BOSQ, inspectrice de l'administration de l'Inspection générale de l'administration
· M. François-Antoine MARIANI, directeur général délégué à la politique de la ville de l'Agence nationale de la cohésion des territoires
· M. Eric DE MOLLANS, directeur de cabinet de l'Agence nationale de la cohésion des territoires
· M. Nicolas SORNIN-PETIT, responsable du Pôle Interface et contrats territoriaux de l'Agence nationale de la cohésion des territoires
Mardi 4 octobre 2022
· Mme Simone SAILLANT, directrice du programme Ruralités-Montagne de l'Agence nationale de la cohésion des territoires
· M. Paul-Henry DUPUY, commissaire de massif pour le massif central de l'Agence nationale de la cohésion des territoires
· Mme Hélène DE KERGARIOU, commissaire de massif pour le massif du Jura de l'Agence nationale de la cohésion des territoires
Lundi 10 octobre 2022
· M. Claude GRIVEL, président de l'Union nationale des acteurs et des structures de développement local
· M. Rémi DE MONTAIGNE, délégué national de l'Union nationale des acteurs du développement local
Mardi 11 octobre 2022
Table ronde avec Ville de France et France Urbaine
· M. Jean-François DEBAT, président délégué de Villes de France
· M. Jean-Sébastien SAUVOUREL, conseiller de Villes de France
· Mme Frédérique BONNARD LE FLOCH, vice-président de Brest Métropole en charge de la Coopération territoriale et des Politiques contractuelles, membre de la Commission « Alliance des territoires » de France Urbaine
· M. Emmanuel HEYRAUD, directeur de la cohésion sociale et du développement urbain, en charge du Logement, de la politique de la ville, du sport et de la santé de France Urbaine
· M. Jean DEYSSON, conseiller en charge de la Cohésion des territoires, de la réforme territoriale, de la Santé, des Solidarités et de l'Europe de France Urbaine
· Mme Sarah BOU SADER, conseillère relations parlementaires de France Urbaine
Table ronde « Politique de la ville » avec France Urbaine et l'Association des maires Ville et Banlieue de France
· M. Michel BISSON, vice-président de France Urbaine, maire de Lieusaint et président de l'Agglomération Grand Paris Sud
· M. Emmanuel HEYRAUD, directeur de la cohésion sociale et du développement urbain, en charge du Logement, de la politique de la ville, du sport et de la santé de France Urbaine
· M. Jean DEYSSON, conseiller en charge de la Cohésion des territoires, de la réforme territoriale, de la Santé, des Solidarités et de l'Europe de France Urbaine
· Mme Sarah BOU SADER, conseillère relations parlementaires de France Urbaine
· Mme Sylvie THOMAS, déléguée générale de l'Association des maires "Ville & Banlieue" de France
· M. Damien ALLOUCH, secrétaire général de l'Association des maires "Ville & Banlieue" de France
Jeudi 13 octobre 2022
Audition de la Fédération Nationale de l'Aménagement et de l'Urbanisme (FNAU)
· M. Jean ROTTNER, président de la Fédération nationale des agences d'urbanisme et président de la Région Grand Est
· Mme Catherine BARTHELET, vice-présidente de Grand Besançon métropole
· M. Patrice VERGRIETE, président délégué de la Fédération nationale des agences d'urbanisme
· Mme Karine HUREL, déléguée générale adjointe de la Fédération Nationale des Agences d'Urbanisme
· Mme Brigitte BARIOL-MATHAIS, directrice de la Fédération nationale des agences d'urbanisme
Mardi 18 octobre 2022
Table ronde avec l'Association des Maires Ruraux de France (AMRF), l'Association des Petites Villes de France (APVF) et l'Association Nationale des Pôles territoriaux et des Pays (ANPP)
· M. Michel FOURNIER, président de l'Association des maires ruraux de France
· M. Cédric SZABO, directeur de l'Association des maires ruraux de France
· M. Harold HUWART, maire de Nogent le Rotrou et vice-président du Conseil Régional), vice-président de l'Association des petites villes de France
· M. Elias MAAOUIA, conseiller de l'Association des petites villes de France
· M. Serge MECHIN, vice-président Territoires de projet de l'Association nationale des pôles territoriaux et des pays
· M. Michaël RESTIER, directeur de l'Association nationale des pôles territoriaux et des pays
Audition de l'Association des Départements de France
· M. Patrick WEITEN, vice-président de l'Association des Départements de France et président du Conseil départemental de la Moselle
Mardi 25 octobre 2022
Table ronde avec les Acteurs de l'ingénierie locale
· Mme Anne-Sophie CARTON-LAPORTE, présidente de l'Association nationale des Directeurs d'Agences techniques départementales et directrice de l'Agence Départementale d'ingénierie pour les Collectivités de l'Aisne
· Mme Cécile CALIN, directrice de Meurthe-et-Moselle Développement 54
· M. Laurent NAUDY, directeur de l'Agence Technique Départementale de l'Aude
· M. Thierry PAY, directeur d'IngéEAU Calvados
· Mme Stella GASS, directrice de la Fédération nationale des Schémas de Cohésion Territoriale
Audition de l'Association des Maires de France
· Mme Catherine LHERITIER, Vice-Présidente de l'Association des Maires de France
Mercredi 26 octobre 2022
Audition de la Banque des Territoires
· Mme Gisèle ROSSAT-MIGNOD, directrice du réseau de la Banque des territoires
· M. Michel-Francois DELANNOY, directeur du département appui aux territoires de la Banque des Territoires
· M. Philippe BLANCHOT, directeur des relations institutionnelles de la Banque des Territoires
Jeudi 27 octobre 2022
Audition des Directions Départementales des Territoires (et de la Mer)
· Mme Cécile BRENNE, directrice adjointe de la Direction Départementale des Territoires de la Loire
· M. Yves SCHENFEIGEL, administrateur général de la Direction Départementale des Territoires de la Haute Garonne
· Mme Lucie CHADOURNE-FACON, directrice de la Direction départementale des territoires de Tarn-et-Garonne
· M. Sébastien SAILLENFEST, délégué territorial de l'Agence départementale des pays de Redon et des Vallons-de-Vilaine
· M. Thierry CHATELAIN, directeur de la Direction départementale des territoires et de la mer du Calvados
Audition d'Intercommunalités de France
· Mme Virginie CAROLO-LUTROT, maire de Port-Jérôme-sur-Seine, présidente de Caux Seine agglo, vice-présidente en charge du Budget et des Finances de la Région Normandie, vice-présidente d'Intercommunalités de France
Audition de Région de France
· Mme Laurence ROUEDE, vice-présidente du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine, déléguée à l'aménagement du territoire, politiques contractuelles
· M. Pascal GRUSELLE, conseiller affaires européennes, aménagement du territoire et Outre-mer de Régions de France
Jeudi 3 novembre 2022
Audition de l'Agence des Pyrénées
· M. John PALACIN, président de l'Agence des Pyrénées et co-président du comité de massif des Pyrénées
Lundi 7 novembre 2022
Audition du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA)
· M. Pascal BERTEAUD, directeur général du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement
· M. Eric LAJARGE, directeur des programmes et DGA en charge de la coordination territoriale du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement
Mardi 8 novembre 2022
Audition de la Direction générale des collectivités locales
· M. Stéphane BRUNOT, adjoint au directeur général des collectivités locales de la Direction générale des collectivités locales
· M. Olivier BENOIST, sous-directeur de la cohésion et de l'aménagement du territoire de la Direction générale des collectivités locales
Audition de l'Agence de la transition écologique (ADEME)
· M. Nicolas SOUDON, directeur exécutif des territoires de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie
Jeudi 10 novembre 2022
Table ronde avec l'AMF de Haute-Saône et l'AMF de la Drôme
· Mme Martine GAUTHERON, 1ère adjointe au maire de Champlitte
· M. Fabien PERRUSSEL, directeur de l'Association des Maires de France de Haute-Saône
· Mme Marianne ROUX, maire de Villebois les Pins
· Mme Christine PRIOTTO, directrice de l'Association des Maires et Présidents d'Intercommunalités de la Drôme
Jeudi 10 novembre 2022 (suite)
Audition de l'AMF du Pas-de-Calais
· M. Frédéric LETURQUE, maire d'Arras et Conseiller Régional des Hauts de France, président de l'AMF du Pas-de-Calais
· M. Julien BELLENGIER, maire de Berneville
· M. Jean Jacques COTTEL, maire de Bapaume
Mardi 13 décembre 2022
Audition de l'Agence Nationale de la Cohésion des Territoires (ANCT)
· M. Stanislas BOURRON, directeur général de l'Agence nationale de la cohésion des territoires
Audition de collectivités bénéficiaires de dispositifs de l'Agence :
· Mme Barbara NETO, Maire de Vic-Fezensa
· Mme Lionella GALLARD, Maire de Cheverny
· M. François COLLART, Maire de Suippes
· M. Didier HEINIMANN, adjoint au Maire
· M. Jean-Marc ROSCIGNI, Directeur Général des Services d'Ardenne Métropole ;
· Mme Christine SCHRAMM, Directrice Générale des Services de la Communauté de communes de la Vallée de Kaysersberg
LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES REÇUES
Agence Nationale de la Cohésion Territoriale (ANCT)
Agence nationale de l'habitat (ANAH)
Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (ANRU)
Agence de la transition écologique (ADEME)
Assemblée des départements de France (ADF)
Association des Ingénieurs Territoriaux de France (AITF)
Association des Maires de France (AMF)
Association des Maires Ville & Banlieue de France
Association nationale des Directeurs d'Agences techniques départementales (AnDAtd)
Association Nationale des Pôles territoriaux et des Pays (ANPP)
Association des petites villes de France (APVF)
Association Villes de France
Banque des Territoires
Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA)
Direction de la modernisation et de l'administration territoriale (DMAT)
Direction Générale des Collectivités Territoriales (DGCL)
Fédération Nationale des Agences d'Urbanisme (FNAU)
Fédération nationale des Schémas de Cohésion Territoriale (SCOT)
France Urbaine
Intercommunalités de France
Régions de France
M. Stéphane Barré, Maire d'Oissel en Seine-Maritime
EXEMPLE DE CAHIER DES CLAUSES TECHNIQUES PARTICULIÈRES D'UNE MISSION D'ANALYSE SUR LES OUTILS D'INGÉNIERIE ET D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET PLAN STRATÉGIQUE D'ÉVOLUTION DE CES OUTILS
Cahier des Clauses Techniques Particulières (C.C.T.P.)
Département de [?]
Mission d'analyse sur les outils d'ingénierie et d'aménagement du territoire de [?] et plan stratégique d'évolution des outils
Numéro de la consultation
Procédure de passation
Préambule
Le Département de [?] est engagé dans une démarche de transformation de son territoire en vue de le rendre plus attractif, d'une part, et de faciliter la transition écologique et numérique du territoire d'autre part. Il souhaite aussi saisir l'opportunité des différents contrats du plan de relance dont il est signataire : Contrat départemental de relance, Contrats de relance et de transition écologique, Conventions petites villes de demain, Pacte de [?], Plan d'actions Coeur de Ville..., pour répondre aux nouveaux enjeux sociétaux, imaginer de nouveaux modèles économiques et faire du Département de [?] un territoire innovant, fort d'une économie renouvelée.
Afin que les outils d'ingénierie existants puissent jouer un rôle de levier et un rôle d'accélération des processus, de permettre la mobilisation de l'ensemble des collectivités, et la saisie d'opportunités, il convient, dans un premier temps, de faire un état des lieux des outils d'aménagement et d'ingénierie, de leurs compétences respectives et des trajectoires retenues à cet instant.
Dans un deuxième temps, il s'agit de définir collectivement quels sont les axes prioritaires à développer pour le territoire et, dans un troisième temps, il convient d'identifier les moyens tant humains que financiers, les compétences disponibles dans chacune des structures, de repérer les différents besoins et d'analyser les impacts d'un point de vue juridique et viabilité économique.
Le but de la démarche est de pouvoir répondre à une ambition d'efficience du fonctionnement des différents outils et d'aboutir à une stratégie commune avec des moyens en adéquation avec les objectifs, de mettre en synergie l'ensemble des acteurs et de se saisir de tout type d'opportunités. De son côté, le Département veillera à adapter ses propres outils, notamment ses politiques d'accompagnement financier pour assurer l'atteinte des objectifs.
Une présentation du territoire issue de l'observatoire national des territoires est joint en annexe.
Pour répondre à ces enjeux, le territoire de [?] dispose des satellites avec des statuts, financements et champs d'action variés.
L'état des lieux concernera, notamment :
- L'OPH de [?] : bailleur social du département, avec des enjeux patrimoniaux de réhabilitation et de diversification à la suite de la loi ELAN.
- La [?] : SEM d'aménagement départementale. La [?] gère actuellement la [?] et la [?]. Elle a engagé récemment une réflexion stratégique dans le but de dynamiser son modèle économique
- La [?] : SEM foncière départementale, son positionnement et sa compatibilité avec la loi Notre sont interrogés, notamment au regard de son périmètre d'activité et de l'actionnariat du Département. Un plan stratégique est en cours de réflexion. Le pacte d'actionnaires est à redéfinir.
- L'[?] : Union des secteurs d'énergie du département de [?], syndicat mixte ouvert garant du service public de la distribution des énergies et du très haut débit, en phase d'élaboration d'une réflexion autour de la ville intelligente et d'un plan d'actions en faveur de la transition énergétique, en particulier pour développer des projets autour des énergies renouvelables.
- Le [?], financé par la taxe d'aménagement (actuellement 20% de la taxe) qui fluctue en fonction des investissements sur le territoire, qui s'adresse aux particuliers et aux collectivités en amont des projets,
- L' [?], dont l'objet est de favoriser le développement des investissements en matière touristique et d'accompagner les porteurs de projets, financée en majeure partie par le Département et en phase de réflexion pour définir une nouvelle stratégie afin de répondre aux nouveaux enjeux du tourisme, aux clients mais aussi aux objectifs du conseil départemental qui est porteur d'une stratégie de développement touristique,
- L'agence départementale d'ingénierie, dont les prestations s'adressent aux communes, aux communautés de communes et syndicats intercommunaux et qui portent principalement sur ...
- L'Agence Locale de l'Énergie et du Climat qui intervient sur le territoire de la communauté d'agglomération de [?], dont certaines missions peuvent se croiser avec celles de l'ATD.
- .../..
En matière d'aménagement foncier, l'ensemble du territoire de [?] n'est pas couvert par un établissement public foncier. Un des enjeux pour [?] est d'encourager l'adhésion des collectivités restantes à l'établissement public foncier de [?] ou à l'[?] afin qu'elles disposent d'une ingénierie foncière spécialisée, d'une expertise technique et d'une participation au financement des études préalables et des travaux de proto-aménagement.
• Le Syndicat Mixte de [?] et de [?] dont la vocation consiste en l'exploitation de ....
Pour mémoire, le Département assure sa compétence assistance à maîtrise d'ouvrage en matière d'assainissement, conformément au code de l'environnement et a délégué l'assistance technique dédiée aux milieux aquatiques à l'[?].
Afin de répondre à l'ambition du Conseil Départemental d'efficience du fonctionnement des différents outils, la mission devra :
• identifier une cartographie des outils intervenant ou investiguant le territoire, y compris ceux non rattachés au Département ([?],[?],[?],[?]...)
• mettre en évidence les problématiques territoriales non adressées
• identifier celles susceptibles de faire l'objet de concurrence entre outils
• les risques et opportunités propres à chaque outil.
Le plan d'évolution stratégique devra proposer :
• Un schéma de réorganisation des outils à mettre en oeuvre en réponse aux enjeux de territoire,
• les interactions renforcées entre les outils, tant en matière d'interventions que d'organisations, intégrant le cas échéant des acteurs non affiliés au département,
• Le modèle économique de l'outil ou du groupe d'outils, tout en ayant une attention sur la viabilité et le modèle économique de chacun d'entre eux,
• Les besoins en financement liés aux investissements projetés et les conséquences juridiques.
I- CONTENU ET OBJECTIFS
Phase 1 : État des lieux des outils d'aménagement / analyse économique et financière
Cette première phase aura pour objectif d'élaborer un diagnostic institutionnel, financier et opérationnel des structures existantes.
Le prestataire établira dans un premier temps une fiche d'identité précise de chaque structure en précisant les périmètres d'intervention, en intégrant les composantes financières, juridiques, fiscales, organisationnelles et sociales et en identifiant les articulations existantes avec d'autres structures et leurs modalités de rémunération.
Cet état des lieux identifiera également les moyens d'ingénierie disponibles dans les EPCI.
Les points suivants feront notamment l'objet d'une attention particulière :
- le champ de compétence détaillé et le périmètre d'intervention territorial
- l'expertise des statuts, la structuration de l'actionnariat le cas échéant, la gouvernance, les modalités du contrôle analogue, les limites et potentialités de l'objet social notamment au regard de des compétences des collectivités territoriales ;
- la perception de l'outil et de son positionnement par les bénéficiaires/adhérents/ actionnaires ;
- l'analyse de l'activité et ses modalités de financements (taux de rémunération, phasage et modalités de versement) ;
- le volet ressources humaines : liste du personnel, règlement de gestion, analyse des compétences métiers, GPEC, plan de charge du personnel ;
- le bilan financier et d'activité sur les trois dernières années et plan à moyen terme le cas échéant.
Phase 2 : Les enjeux du territoire et la pré-identification d'opérations /actions sur le foncier
Cette phase devra permettre d'identifier d'une part les enjeux du territoire, en s'attachant à mettre en perspectives les dynamiques démographiques et les besoins en foncier, qu'il s'agisse de foncier à faire muter, de foncier destiné à expérimenter des solutions fondées sur la nature. L'objectif est de pouvoir mettre en cohérence les perspectives de développement du territoire avec les enjeux d'aménagement, dans le cadre d'une approche opérationnelle visant à pré-établir des axes de développement concrets, avec des pistes d'opérations.
Cette démarche a vocation à identifier les enjeux et espaces de développement futurs et d'identifier les compétences nécessaires à leur développement/reconversion, visant à mettre en lien les perspectives de développement de l'offre des structures, avec le potentiel d'opérations sous-jacent en capacité d'alimenter leur portefeuille, tout en appréhendant les enjeux liés au modèle économique de ces opérations.
Elle portera notamment sur :
- l'identification des besoins des collectivités territoriales au regard de l'existant, mais aussi au regard des évolutions réglementaires, de la volonté du Département de faciliter la transition écologique et numérique du territoire et d'en faire un territoire innovant et attractif, et des différentes stratégies nationales;
- la validation du positionnement stratégique (activités existantes à conserver et à développer, activités nouvelles répondant aux besoins des actionnaires pour chaque société) ;
- identification / prospective foncière permettant de cartographier les opérations à réaliser et de les traduire en portefeuille d'activités potentiel pour les outils, en prenant en compte les critères suivants : nature du foncier et de ses enjeux / surface, type de client, cadre juridique d'intervention, degré de probabilité / maturité, champs d'activité, niveau de technicité, calendrier et mode d'intervention, volet financier ;
A l'issue de cette phase, est attendue une synthèse permettant de mesurer les écarts entre :
- Les outils, leur positionnement actuel
- Les enjeux du territoire et les natures d'intervention nécessaires à déployer, notamment en prenant en compte la réalité des fonciers disponibles ou à requalifier
- Les enjeux en termes de compétences, de gouvernance, de financements et de modèles économiques.
Phase 3 : Propositions de scénarios d'évolution des outils
En fonction des enjeux et de la synthèse réalisés en phase 2, il est attendu que soient proposés 3 schémas de réorganisation des outils visant à favoriser l'organisation d'une offre de service cohérente au service du développement territorial.
Cette présentation a vocation à mettre en exergue la ou les valeurs ajoutées dégagées par ces scénarios, et d'analyser les pré-requis en termes de bon fonctionnement.
Dans cette optique, les scénarios donneront lieu à une analyse avantages/inconvénients, assis sur une analyse des conséquences de chaque scénario :
• Volet juridique et gouvernance,
- Conséquence pour les contrats (commande publique, contrats financiers, garanties d'emprunts, avances, .....)
- Poursuite des contrats passés avec les donneurs d'ordres,
- Réflexion sur la gouvernance et la recomposition de l'actionnariat le cas échéant,
- Rédaction des nouveaux statuts et du pacte d'actionnaires le cas échéant,
- Précision sur la période transitoire.
• Volet organisationnel et Ressources humaines :
- Fonctions opérationnelle et support : compétences à compléter
- Modalités d'organisation de la nouvelle structure
- Analyse des éventuelles adaptations rendues nécessaires des contrats de travail des salariés et accords d'entreprise
• Volet financier et fiscal :
- Incidence de la réorganisation sur le plan financier pour le Conseil Départemental et sur les différents actionnaires
- Intégration des impacts fiscaux.
Ces différents scénarios pourront également prendre en compte différentes temporalités de mise en oeuvre, et ce en fonction des critères et impacts visés d'une part, et des pré-requis de bonne réussite d'autre part.
A l'issue de cette phase, l'analyse devra permettre d'élaborer des préconisations, tout en formulant des pré-requis nécessaires à la réussite du scénario préconisé. Il sera pris soin de procéder à une analyse multicritère sur la base des impacts visés suivants :
- Coûts
- Délais et complexité de mise en oeuvre (fusion, cession d'actions/actifs, évolutions statutaires,....)
- Évolutions organisationnelles et impacts sur les personnels....
Des itérations pourront avoir lieu quant à la stabilisation du scénario à privilégier.
Phase 4 : Accompagnement à la mise en place de la réorganisation des outils et projections des plans d'affaires à moyens termes des structures
En fonction des axes de positionnement validés et de l'évolution organisationnelle retenue, le titulaire procédera à la formalisation du ou des plans d'affaires à moyens termes comprenant :
- les comptes de résultat prévisionnel
- les évolutions de bilan des structures ;
- l'évolution des emplois et des ressources mettant en évidence les flux de trésorerie.
L'objectif est de préciser les conditions et modalités de réalisation de la réorganisation, en fonction du schéma retenu, en tenant compte de l'analyse effectuée sur toutes les dimensions (juridique, financière, fiscale, organisationnelle).
Une feuille de route opérationnelle sera proposée, en prenant soin de décliner le rétro-planning présentant les différentes étapes de mise en oeuvre du schéma de réorganisation (décisions des actionnaires, délibérations des collectivités, démarches auprès des administrations, communication, accompagnement au changement,....) .
II- PILOTAGE DU MARCHE
Le comité de pilotage assurera :
- la coordination générale et le suivi de l'étude ;
- la définition des orientations stratégiques ;
- la validation des propositions d'entretiens et/ou questionnaires auprès des actionnaires, représentants de l'administration ;
- la validation des éléments de chaque phase et le rapport final.
Le titulaire assurera la rédaction du compte-rendu de chaque réunion.
6 COPIL en présentiels sont prévus pour le présent marché, dont un COPIL de restitution finale.
Un comité technique constitué des financeurs sera également instauré pour le suivi de la prestation et se réunira en présentiel préalablement à chaque COPIL. Un suivi d'avancement des travaux pourra se faire en tant que de besoin par visioconférence.
III- LIVRABLES
Le Titulaire devra fournir a minima les documents cités ci-dessous :
- un rapport par phase, puis un rapport final accompagné d'une synthèse,
- le rapport final devra contenir une annexe comprenant notamment la liste des acteurs rencontrés et les comptes rendus d'entretiens et de réunions.
Les rapports seront fournis en deux exemplaires « papier » plus un reproductible et une version informatique. Le(s) prestataire(s) remettra(ont) en version informatique tous les fichiers sources. Les bases de données doivent être fournies au format Excel et les rapports en format Word.
IV- CALENDRIER ET RENDU
Durée totale du marché (hors phase de validation du maitre d'ouvrage) : 10 mois
Phase 1 Etat des lieux des outils d'aménagement y compris analyse économique et financière ; identification des enjeux du territoire et des opérations 4 mois
Phase 2 Scénarios d'évolution des outils 4 mois
Phase 3 Accompagnement à la mise en place de la réorganisation des outils et préparation des orientations stratégiques 2 mois
Annexes
- Présentation du territoire : observatoire des territoires-ANCT
- Schéma d'amélioration de l'accessibilité des services au public :
- Délibération - cadre transition écologique et solidaire
- Rapports d'activités des différentes structures et sites internet
* 1 Proposition de loi n° 2 (2018-2019) de M. Jean-Claude Requier et plusieurs de ses collègues, déposée au Sénat le 2 octobre 2018.
* 2 Consultation réalisée dans le cadre du rapport d'information de septembre 2022 d' Agnès CANAYER et Éric KERROUCHE « À la recherche de l'État dans les territoires».
* 3 En application de l'article 159 de la loi dite « 3DS », un décret du 16 juin 2022 procède à une importante réforme du statut du CEREMA. Le décret modifie l'organisation et le fonctionnement du CEREMA de façon à créer les conditions d'une relation de quasi-régie entre, d'une part, l'État et certaines collectivités territoriales ou groupements de collectivités et, d'autre part, cet établissement public.
* 4 Auteur : Bruno ACAR (IGA) - Marion PUJAU-BOSQ (IGA)
https://www.interieur.gouv.fr/fr/Publications/Rapports-de-l-IGA/Rapports-recents/L-ANCT-l-Etat-deconcentre-au-service-de-la-cohesion-des-territoires
* 5 Rapport IGA : « Plusieurs préfets ont d'ailleurs signalé qu'ils doivent veiller à ce que la contribution de l'État, matérialisée notamment par l'apposition de la Marianne tricolore (logo de la préfecture) ou du France relance, qui pourrait parfois avoir tendance à être perdue de vue, soit bien associée aux projets soutenus par l'État et figure aux côtés du logo de l'ANCT (par exemple, préfet de Sarthe) »
* 6 Voir par exemple : Hautes-Alpes, Loire Atlantique, Vosges, Haute Provence....
* 7 Source : enquête ANCT
* 8 Belin, B. et Babary, S. (2022, 16 mars). Rapport d'information fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable et de la commission des affaires économiques sur les perspectives de la politique d'aménagement du territoire et de cohésion territoriale, sur le volet « attractivité commerciale en zones rurales », N° 577 (2021-2022), http://www.senat.fr/rap/r21-577/r21-577.html.
* 9 Bilan ANCT du 1er janvier 2020 au 20 octobre 2022.
* 10 Comme le rapport d'information des sénateurs Hervé MAUREY et Louis-Jean de NICOLA• « Aménagement du territoire : plus que jamais une nécessité » de 2017,
* 11 Voir son discours à la conférence des territoires, le 17 juillet 2017 et au 100ème congrès de maires.
* 12 Voir son discours à la conférence des territoires, le 17 juillet 2017 et au 100ème congrès de maires.
* 13 Proposition de loi déposée par les sénateurs du groupe Rassemblement Démocratique et Social Européen (RDSE).
* 14 Proposition de loi.
* 15 https://agence-cohesion-territoires.gouv.fr/les-fabriques-prospectives-accompagner-les-territoires-dans-les-transitions-211
* 16 https://www.academiedesterritoires.fr/
* 17https://www.vie-publique.fr/en-bref/279543-lancement-du-volontariat-territorial-en-administration-vta
* 18 Dont 25 agents mis à disposition.
* 19 Leur composition, fixée par décret, comprend des représentants de l'État, des collectivités, les cinq grands opérateurs nationaux - la Banque des Territoires, l'Anah, l'Ademe, le Cerema ainsi que l'Anru -, ainsi que des représentants des acteurs locaux de l'ingénierie. Sa composition précise est laissée à l'appréciation du préfet, en fonction des réalités locales.
* 20 https://aides-territoires.beta.gouv.fr/
* 21 « L'ingénierie territoriale Une aubaine pour les territoires (et pour la France !), étude de le SCET, filiale de la Caisse des Dépôts https://www.cadredeville.com/announces/2022/04/29/scet_ingenierie-territoriale.pdf
* 22 Étude « L'ingénierie territoriale Une aubaine pour les territoires (et pour la France !) » de la SCET, filiale de la Banque des Territoires
* 23 Étude « L'ingénierie territoriale Une aubaine pour les territoires (et pour la France !) » de la SCET, filiale de la Banque des Territoires
* 24 Ces contrats sont destinés à accompagner une cinquantaine de communes pour favoriser l'émergence des projets sur le terrain.
* 25 https://www.amf.asso.fr/documents-enquete-intercommunalites-sur-les-crte-un-dispositif-la-croisee-chemins/41322
* 26 La consultation des élus par le Sénat réalisée dans le cadre du rapport « Revitalisation des centres-villes et des centres-bourgs : entre enthousiasme et frustrations » de M. Rémy POINTEREAU, Mme Sonia de LA PROVÔTÉ, MM. Serge BABARY et Gilbert-Luc DEVINAZ, démontre à quel point ces financements sont essentiels pour les villes concernées, notamment PVD.
* 27 https://www.i4ce.org/publication/collectivites-investissements-ingenierie-neutralite-carbone-climat/#:~:text=I4CE%20estime%20que,budget%20d'investissement%20total%20actuel
* 28 Op. cit.
* 29 Le ministère de l'intérieur signale avoir engagé plusieurs initiatives : un module de formation à l'organisation territoriale de l'État, qui sera opérationnel fin 2022 sur la plateforme interministérielle de formation e learning Mentor, une formation des sous-préfets à la relance relative aux subventions et dotations visant à garantir la pleine mise en oeuvre des « mécanisme financiers de correction » des inégalités territoriales, des formations à destination des sous-préfets à la relance organisées par la SDRF co-animées par l'ANCT et le ministère de la transition écologique relatives à l'ingénierie territoriale et la transition écologique. D'autres modules existent tels que la présentation de l'ANCT et son offre de service aux territoires et son mode de saisine, l'observatoire des territoires et ont été installés sur la plateforme de e learning ForMI.
* 30 Elle est confiée au conseil supérieur de l'appui territorial et de l'évaluation rattachée directement au ministre. Elle repose sur une approche individualisée à 360°. Des acteurs fonctionnellement ou structurellement en lien avec le préfet (élus, collaborateurs, acteurs économiques, représentants professionnels et sociaux ...) sont entendus. Les acteurs locaux qui suivent les programmes de l'ANCT sont interrogés lors de ces évaluations et peuvent s'exprimer sur les résultats obtenus par le préfet, son engagement en tant que développeur et facilitateur des projets locaux.
* 31 https://www.mesopinions.com/petition/nature-environnement/urgence-ecologique-financement-changement-financons-ingenierie/184296
* 32 Les prestations d'ingénierie publique en faveur des collectivités territoriales étaient initialement considérées comme des missions de service public. Elles sont entrées dans le champ du secteur concurrentiel à la fin des années 1990 en raison du droit communautaire de la concurrence. La loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (MURCEF) permet toutefois à des prestations d'assistance technique fournie par l'État pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire (« l'ATESAT») de subsister. Les collectivités sans ingénierie pouvaient bénéficier du concours des services de l'État sans passer par un marché public. Les choix budgétaires successifs ont fini par avoir raison de l'ATESAT, supprimé en 2014.
* 33 https://aides-territoires.beta.gouv.fr/
* 34 Deux exemples parmi d'autres : les Hautes-Alpes et la Meurthe et Moselle : https://www.hautes-alpes.gouv.fr/catalogue-des-ressources-d-ingenierie-locale-r2246.html et https://www.meurthe-et-moselle.gouv.fr/content/download/17901/125031/file/guide%20de%20l%27ing%C3%A9nierie%20publique%20territoriale%20de%20Meurthe-et-Moselle.pdf
* 35 Avec la Fédération nationale des agences d'urbanisme (FNAU), la Fédération des Entreprises publiques locales (FED EPL), l'Agence France locale (AFL), la Fédération des Agences locales de l'Énergie et du Climat (FLAME), l'Association pour l'emploi des cadres (APEC) ; l'Agence du Droit à l'Initiative Économique (ADIE), la Fédération nationale des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (FNCAUE).
* 36 https://www.vosges.gouv.fr/Actualites/Presentation-du-Laboratoire-de-la-Ruralite-et-de-Jerome-Normand-directeur-de-projet-Ruralite
* 37 Rapport Pointereau opt. Cit.
* 38 L'article L1233-3 du CGCT prévoit que l'agence conclue des partenariats avec l'ADEME, l'ANAH, l'ANRU, la CDC et le CEREMA.
* 39 Pour Action Logement, les engagements financiers pluriannuels concernaient (au 1er juin 2022) 63 villes pour un montant de 160 millions d'euros. Pour l'ANAH, ses financements réalisés dans le cadre des opérations programmées (OPAH/OPAH RU) s'inscrivent dans le cadre de conventions pluriannuelles (5 ans, plus une année de prolongation possible). Le budget global de l'opération est inscrit dans la convention de programme décliné avec un phasage annuel.