B. MIEUX DÉFINIR L'ASSIDUITÉ ET LA COMPLÉTER OU LA REMPLACER PAR UNE OBLIGATION DE RÉSULTAT

1. Préciser ce qui est attendu des établissements

Si l'assiduité ne constitue pas une fin en soi et n'est pas une garantie de réussite des étudiants , elle y contribue fortement et permet de s'assurer du fait que les aides versées par l'État sont bien destinées à des boursiers qui suivent réellement des études .

Comme cela a été mis en évidence, la circulaire annuelle qui définit l'assiduité des étudiants laisse une marge d'appréciation très importante aux établissements pour fixer les modalités du contrôle qu'ils doivent assurer, expliquant, pour partie, l'hétérogénéité des pratiques .

La volonté de certains établissements de renforcer leurs contrôles, comme celle des CROUS d'impulser une harmonisation des pratiques, s'avère parfois difficile, compte tenu des réticences rencontrées et de la souplesse laissée par les dispositions établies au niveau national.

C'est pourquoi il semble nécessaire que le ministère chargé de l'enseignement supérieur définisse plus précisément les modalités de contrôle attendues et applicables à l'ensemble des établissements .

Ainsi, la présence à tous les examens pourrait être requise , et non seulement à une seule épreuve.

Bien entendu, il devrait toujours être tenu compte des situations dérogatoires , tels que les étudiants inscrits en contrôle terminal ou disposant de dispenses spécifiques (par exemple, sportifs de haut niveau). Il en est de même pour ceux suivant un enseignement à distance, situation qui est loin d'être anecdotique puisqu'elle correspond, par exemple, à 2 000 étudiants à l'université de Rennes 2.

Recommandation n° 1 : Définir plus précisément les modalités du contrôle d'assiduité attendues des établissements d'enseignement supérieur au niveau national.

Comme le rapport d'audit partenarial de la DGFiP et de l'IGAENR de novembre 2013 et la Cour des comptes dans son rapport public annuel pour 2015, votre rapporteur spécial considère que l'amélioration du système de contrôle d'assiduité peut passer soit par un renforcement de ses modalités concrètes d'application par les établissements actuellement défaillants, soit par l'instauration d'une obligation de résultat dès la première année.

En tout état de cause, il convient de mettre fin à la pratique selon laquelle la présence à un seul examen , avec remise d'une copie blanche , suffirait à justifier de l'assiduité de l'étudiant.

2. Consolider les exigences en matière d'assiduité

Pour le cas où les établissements maintiendraient une obligation d'assiduité , tous les intervenants s'accordent à dire que l'assiduité aux cours magistraux ne peut aisément être contrôlée , en particulier pour les cours de première année où les effectifs sont les plus nombreux et où le risque de fraude à la bourse est le plus élevé.

Sauf à installer une badgeuse qui, à partir d'une carte multiservices (servant à la fois pour la bibliothèque ou la restauration par exemple), permettrait à tous les étudiants de « pointer » à l'entrée des amphithéâtres et même, pourquoi pas, des autres salles de cours, il n'est pas réaliste d'imposer un tel contrôle qui ne semble, par ailleurs, pas indispensable .

En revanche, l'assiduité aux travaux dirigés et aux travaux pratiques doit s'imposer à l'ensemble des établissements et pour l'ensemble des étudiants, boursiers ou non . En effet, aucun argument ne peut justifier qu'il ne soit pas fait systématiquement l'appel ou, à tout le moins, qu'une liste d'émargement ne circule pas dans la salle à chaque cours.

Certes, la mise en oeuvre de nouvelles procédures de contrôle d'assiduité se heurterait aux moyens limités et au faible nombre, comparé à celui des effectifs étudiants, de personnels administratifs chargés des bourses. Pour autant, les nouvelles technologies et le développement des systèmes d'information devraient permettre de faciliter la remontée des informations vers les secrétariats des UFR.

Dans certains établissements, la principale difficulté pourrait provenir des réticences voire de l'opposition des enseignants . Il a, notamment, pu être indiqué à votre rapporteur spécial, que ceux-ci avaient « autre chose à faire que l'appel pendant leurs cours » et qu'ils étaient supposés avoir, en face d'eux, des adultes responsables. Fort heureusement, cette vision ne semble pas trop largement répandue.

En tout état de cause, ces arguments semblent parfaitement irrecevables , au regard des pratiques des enseignants des classes préparatoires, de sections de technicien supérieur ou des écoles qui s'adressent tout autant à de jeunes adultes. De même, les sessions de formation professionnelle assurées dans le cadre de l'activité des salariés prévoient généralement un émargement permettant de s'assurer de la présence des inscrits.

L'État , et à travers lui les contribuables, dépense des sommes considérables pour le financement des établissements universitaires . À ce titre, il semble parfaitement logique de s'assurer que les enseignements sont bien suivis par les étudiants , qu'ils soient boursiers ou non.

Pour les formations qui réalisent déjà ce contrôle de présence dans les travaux dirigés ou les travaux pratiques, celui-ci devrait nécessairement être pris en compte pour déterminer l'assiduité du boursier, en sus de la présence aux examens.

Le constat d' absences répétées aux travaux dirigés aurait pour avantage d' anticiper , avant la fin du semestre, l'identification des étudiants non assidus et donc de suspendre plus rapidement la bourse qui leur est, le cas échéant, versée.

Bien entendu, les procédures doivent être encadrées , afin de permettre aux étudiants de fournir éventuellement des justificatifs. Un seuil d'absences acceptées doit également être défini. Pour ceux qui l'appliquent déjà, deux à trois absences par semestre et par travaux dirigés/travaux pratiques, semblent le plus souvent acceptées. Le principe d' interdire le passage des examens terminaux en cas d'absences répétées aux cours pourrait également contribuer à garantir l'assiduité des étudiants.

Avec le renforcement du contrôle de l'assiduité aux cours, le « syndrome de la copie blanche », actuellement constaté lors de certains examens, pourrait se déplacer dans le cadre des travaux dirigés . En effet, il ne faut pas exclure que certains étudiants, inscrits uniquement pour percevoir la bourse, ne soient présents dans ces cours que pour respecter l'obligation d'assiduité, avec le risque qu'ils ne perturbent les classes . Cette situation existerait d'ailleurs déjà dans certaines universités.

Pour autant, ce risque ne doit pas aboutir à affaiblir les conditions de maintien des droits à bourse , d'autant que le renforcement du contrôle d'assiduité pourrait également dissuader certains « faux » étudiants boursiers de s'inscrire.

Votre rapporteur spécial juge également intéressante l'expérimentation du contrôle continu intégral (sans session d'examens terminaux ni de rattrapage) dans certaines formations universitaires. Très volontariste sur ce sujet, la Conférence des présidents d'université a estimé que le développement de cette pratique permettrait, de facto , de réduire le nombre de « faux » étudiants boursiers . Votre rapporteur spécial y voit également un bon moyen de suspendre les bourses plus rapidement qu'actuellement . En effet, la non-assiduité serait susceptible d'être repérée plus rapidement dans le cadre du contrôle continu, comme dans les écoles ou les classes préparatoires et les sections de technicien supérieur des lycées.

Plus globalement, s'il ne fait pas de doute que le contrôle continu intégral serait bénéfique en termes de réussite des étudiants, sa généralisation, à court ou moyen terme, semble difficile à envisager, certaines universités ayant émis des réserves, compte tenu principalement du coût supplémentaire qu'il induirait.

S'agissant de la présence aux examens , il apparaît évident que cette condition pour déterminer l'assiduité d'un étudiant ne peut être considérée comme remplie avec l'émargement à une seule épreuve, pour laquelle une simple copie blanche serait rendue . Il importe donc qu'il soit mis fin à la pratique d'un nombre trop important d'universités qui s'en contente. À tout le moins, toute absence d'un étudiant boursier à un examen sans justification autorisée (maladie, décès d'un proche...) devrait être sanctionnée.

Recommandation n° 2 : Développer un véritable contrôle d'assiduité des étudiants, y compris dans les universités, en :

- concentrant le contrôle d'assiduité aux cours sur les travaux dirigés et les travaux pratiques (par opposition aux cours magistraux) et en faire un critère obligatoire pour poursuivre le versement de la bourse sur critères sociaux. Le recours aux nouvelles technologies (cartes multiservices avec système de badge, système d'information permettant aux enseignants d'informer directement le service administratif des étudiants absents) pourrait être envisagé ;

- exigeant que la condition de présence aux examens implique l'émargement par l'étudiant à toutes les épreuves de fin de semestre.

3. Introduire la notion de résultat ?

Pour les universités réticentes ou dans l'incapacité de faire appliquer des règles d'assiduité plus exigeantes, une autre option pourrait être l'introduction d'une obligation de résultat. Tant la Cour des comptes que la mission menée par la DGFiP et l'IGAENR ont également fait une telle préconisation.

Il n'existe actuellement qu'une obligation de progression à compter de la demande du troisième droit à bourse de l'étudiant et qui consiste à exiger la validation de 60 crédits ECTS, deux semestres ou une année.

Dans l'hypothèse où l'université ne tiendrait pas compte de l'assiduité aux cours , le contrôle de la présence de l'étudiant aux examens pourrait alors être renforcé avec l'instauration d'une obligation de résultat . Celle-ci pourrait, par exemple, se concrétiser par l'atteinte d'une moyenne minimale à l'ensemble des épreuves, ou au moins à certaines, voire à l' obtention d'un certain nombre d'ECTS à chaque semestre.

Les représentants du CNOUS entendus en audition estimaient ainsi que la présence aux examens constituait le moyen de contrôle le plus efficace en termes d'égalité de traitement des boursiers dans les universités, car il est le seul dénominateur commun à toutes les disciplines.

La Cour des comptes propose de remplacer purement et simplement l'assiduité de l'étudiant par une obligation de résultats comme condition de maintien au droit à bourse. Cette proposition est séduisante et mérite effectivement d'être étudiée . Elle aurait probablement pour avantage de réduire le nombre de « faux » étudiants et surtout la pratique de la « copie blanche » aux examens . En outre, elle serait moins source de divergences d'interprétation que ne l'est actuellement la condition d'assiduité aux cours.

Toutefois, cette nouvelle règle ne permettrait pas de déceler plus tôt dans l'année universitaire les étudiants non assidus et donc de suspendre plus rapidement les bourses . Au contraire, elle aurait pour conséquence de devoir attendre la correction de l'ensemble des épreuves des sessions d'examens pour déterminer la liste des étudiants non assidus.

En tout état de cause, comme le souligne également la Cour des comptes et le rapport d'audit partenarial de novembre 2013, si une obligation de résultat devait être introduite , il conviendrait de prévoir une moyenne à atteindre probablement assez basse , afin de permettre aux étudiants, non pas non assidus, mais « décrocheurs » et ayant fait une erreur d'orientation, de poursuivre leurs études en bénéficiant d'une bourse.

Recommandation n° 3 : En l'absence de contrôle régulier d'assiduité aux cours, coupler l'obligation de présence à tous les examens à celle de résultat , en obtenant, par exemple, une moyenne minimale ou un certain nombre de crédits ECTS à chaque semestre.

Il pourrait également être envisagé que, dans certains cas, l'assiduité de l'étudiant comme condition de maintien des droits à bourse soit remplacée par une simple obligation de résultat minimal .

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