C. VOS RAPPORTEURS FORMULENT DIX RECOMMANDATIONS

1. Plutôt que de chercher à encadrer par des normes, il convient de communiquer et d'orienter

Le développement des MAM se fait selon le principe de la tâche d'huile, par la diffusion des exemples de réussite. L'essor des MAM au-delà des départements pionniers montre qu'une partie des réticences des acteurs locaux est en passe d'être vaincue.

Vos rapporteurs estiment qu'il est souhaitable de renforcer l'effort de communication et d'information des différents acteurs. Le guide ministériel s'inscrit dans cette perspective.

Il n'apparaît pas opportun de remettre en cause le contenu de ce document, issu d'une concertation. Au demeurant, les orientations et les recommandations qu'il formule correspondent pour l'essentiel aux besoins identifiés par vos rapporteurs au cours de leurs travaux.

Toutefois, certaines des recommandations du guide peuvent apparaître discutables. Ainsi, le guide recommande qu'un des assistants maternels ait au moins deux ans d'expérience dans le domaine de la petite enfance. Si vos rapporteurs voient bien l'intérêt de cette recommandation, elles ont pu constater que des équipes n'ayant jamais exercé cette profession auparavant peuvent également très bien fonctionner. Au demeurant, l'absence d'habitudes et d'idées préconçues sur l'exercice du métier peut réduire les risques de frictions entre assistants maternels.

Il serait donc dommage que cette recommandation, si elle était lue comme une exigence par les services de PMI, conduise à bloquer certains projets.

Le guide n'aborde pas non plus la question du nombre maximum d'assistants maternels pouvant exercer au sein d'une même MAM, alors que les interprétations des services de PMI divergent sur ce point.

Vos rapporteurs estiment donc souhaitable que le guide ministériel soit régulièrement mis à jour afin de tenir compte des retours d'expérience et, le cas échéant, de modifier ou de préciser les recommandations qu'il formule.

Recommandation n° 1 : Mettre à jour régulièrement le guide ministériel afin de tenir compte des retours d'expérience et d'actualiser, de modifier ou de préciser les recommandations qu'il formule.

Par ailleurs, si vos rapporteurs considèrent qu'imposer de nouvelles règles et normes contraignantes serait de nature à remettre en cause la souplesse du cadre juridique des MAM, et donc à remettre en cause leur développement, il convient toutefois de lever certaines ambiguïtés législatives et règlementaires qui donnent lieu à des interprétations divergentes. Cela doit passer par des orientations données au niveau national mais pas par l'ajout de dispositions normatives.

Il est notamment nécessaire de clarifier le cadre dans lequel les assistants maternels peuvent avoir recours à la délégation d'accueil, afin de préciser que cette délégation peut permettre d'organiser des arrivées décalées, sans nécessairement que l'enfant soit accueilli chaque jour par son assistant maternel référent.

Il faudrait par ailleurs rappeler que la loi permet à plus de quatre assistants maternels d'exercer au sein de la même MAM. Il revient aux services de PMI d'apprécier le nombre maximum qui semble raisonnable.

Recommandation n° 2 : Lever, par une communication au niveau national et sans recourir à des textes normatifs, les ambiguïtés juridiques qui donnent lieu à des interprétations divergentes de la part, notamment, des services de PMI.

2. Les initiatives prises par la Cnaf doivent être poursuivies et complétées

Monter un projet d'ouverture de MAM n'est pas une chose facile. Il s'agit d'une démarche qui mobilise des compétences qui ne sont pas nécessairement celles de professionnels de la petite enfance. Dès lors, afin d'éviter les échecs et les fermetures, il convient d'accompagner les porteurs de projet. Cet accompagnement relève de la politique des départements et des caisses d'allocations familiales (Caf). Il ne saurait donc être question de l'imposer de manière uniforme au niveau national. Toutefois, la désignation d'un référent parmi les agents départementaux ou au sein de la Caf, qui existe dans certains départements semble une bonne initiative.

Accompagnement des porteurs de projet :
l'exemple de la Loire-Atlantique

Le service de protection maternelle et infantile de la Loire-Atlantique a engagé, en partenariat avec la caisse d'allocations familiales, une démarche d'accompagnement des porteurs de projets et des MAM en fonctionnement.

Au sein de la Caf, un demi-poste est dédié au développement des MAM sur le territoire départemental.

Des vacataires du service de PMI, qui participent régulièrement à la formation initiale des assistants maternels, proposent une référence technique pour les porteurs de projet. Cet accompagnement démarre au stade de la construction du projet, en particulier pour les porteurs de projet en difficulté, permet de soutenir le démarrage de l'activité et propose une analyse de pratiques pour les MAM déjà en fonctionnement.

Vos rapporteurs se félicitent de la décision du conseil d'administration de la Cnaf de créer une aide au démarrage des MAM. Ils souhaitent que les orientations dessinées par la circulaire du 6 avril 2016 soient rapidement suivies par l'ensemble des Caf, y compris celles qui pouvaient être, jusqu'à une date récente, réticentes à ce développement.

Au-delà de cette aide il serait intéressant que la Cnaf puisse accorder le prêt d'amélioration du lieu d'accueil (Pala) 47 ( * ) non plus individuellement à chaque assistant maternel, mais plutôt à la structure associative dans laquelle s'inscrit la MAM. Cette mutualisation pourrait avoir un effet de levier sur la capacité à emprunter.

Recommandation n° 3 : Permettre l'attribution du prêt à l'amélioration du lieu d'accueil à la personne morale propriétaire ou locataire du local affecté à l'usage d'une MAM.

La loi du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes 48 ( * ) a prévu l'expérimentation du versement du complément de libre choix du mode de garde en tiers payant. Cette expérimentation, mise en oeuvre dans onze départements 49 ( * ) , doit s'achever le 1 er juillet 2016. Une telle mesure semble de nature à favoriser le recours à un assistant maternel par les familles les plus modestes. S'il convient d'attendre l'évaluation de cette expérimentation, vos rapporteurs estiment que la généralisation de cette expérimentation pourrait permettre de renforcer la liberté de choix des familles, et notamment des plus modestes, tout en les orientant vers un mode d'accueil qui est moins coûteux pour les finances publiques et sociales.

Plus largement, le Haut-Conseil à la famille s'est positionné en 2014 50 ( * ) en faveur d'une refonte des aides aux familles afin de les rendre plus lisibles et de réduire la disparité qui existe dans le soutien de l'accueil en EAJE et de l'accueil individuel. Un système d'aides fondé sur le reste à charge permettrait de renforcer la liberté de choix des familles. Une telle réforme, complexe et potentiellement coûteuse, mériterait néanmoins qu'on s'y intéresse.

Recommandation n° 4 : Engager, après en avoir fait le bilan, la généralisation du versement du complément de mode de garde (CMG) en tiers-payant.

Recommandation n° 5 : Engager une réflexion sur une réforme en profondeur des aides à la garde d'enfant afin d'assurer une réelle liberté de choix aux familles.

3. Il est nécessaire de renforcer la formation des assistants maternels, dans une optique de professionnalisation

Ainsi que l'ont constaté vos rapporteurs, le souhait de renforcer et d'enrichir la formation des professionnels est unanimement partagé.

La formation initiale, de deux fois soixante heures, qui correspond au premier module du certificat d'aptitude professionnelle (CAP) petite enfance, n'aborde pas spécifiquement la question de l'exercice en MAM. Or, dans la mesure où un nombre croissant de demandeurs d'agrément envisagent ce mode de travail, il conviendrait d'y consacrer une partie de cette formation initiale.

Ce renforcement de la formation initiale doit s'inscrire dans la réforme du CAP petite enfance, actuellement en cours d'élaboration, qui doit entrer en vigueur en septembre 2017.

Par ailleurs, les personnes qui bénéficient d'une dispense de formation initiale 51 ( * ) , n'ont souvent accès à aucune formation sur l'exercice en MAM. S'il est difficile d'exiger des départements qu'ils acceptent de financer la formation initiale de ceux qui en sont dispensés, il pourrait s'agir là d'une bonne pratique, permettant de compléter une formation initiale qui peut être lointaine et qui correspond à un métier différent.

En matière de formation continue, il existe une réelle demande de la part des professionnels. La fédération des particuliers employeurs de France (Fepem) a indiqué à vos rapporteurs avoir développé des formations spécifiques à l'exercice en MAM. Par un accord de branche conclu le 17 décembre 2014 52 ( * ) , les partenaires sociaux ont convenu de porter la contribution employeurs visant à financer la formation professionnelle à 0,35 % au lieu de 0,15 %.

Toutefois, il peut être difficile de dégager du temps afin de participer à des formations, surtout lorsque le nombre d'enfants accueillis limite les possibilités de délégation.

Une solution à ce problème peut être, comme c'est par exemple le cas en Mayenne, l'autorisation par les services du département de remplacements ponctuels par des assistants maternels agréés et disponibles 53 ( * ) .

Un autre obstacle est le fait que le coût des formations doive souvent être avancé par les parents employeurs. Il serait donc intéressant de s'interroger sur la possibilité de mettre en oeuvre un système de tiers-payant.

Recommandation n° 6 : Mieux former les assistants maternels à l'exercice en MAM à l'occasion de leur formation initiale et proposer systématiquement cette formation aux personnes qui en sont dispensées.

Recommandation n° 7 : Favoriser le recours à des formations professionnelles, en autorisant les remplacements temporaires et en mettant en place un système de tiers-payant.

En plus de sécuriser l'accueil des enfants dans les maisons d'assistants maternels, une meilleure formation aurait pour effet de modifier le regard porté sur le métier d'assistant maternel, dans le sens d'une plus grande reconnaissance.

4. Il convient d'intégrer les MAM dans une politique de développement des modes d'accueil, au niveau local comme au niveau national

Les MAM sont des initiatives individuelles, voire communales, mais ne s'inscrivent pas dans le cadre d'une politique de développement des services aux familles au niveau d'un territoire.

Afin d'éviter tout risque de concurrence des modes de garde et de favoriser une répartition équilibrée des modes d'accueil, il est souhaitable que le soutien des collectivités à l'implantation de maisons d'assistants maternels s'inscrive dans le cadre d'une réflexion plus large sur les services offerts aux familles. Le développement des schémas territoriaux des services aux familles doit donc être poursuivi et être l'occasion de s'interroger sur la place des MAM dans l'offre proposée aux parents au niveau du territoire. Cela suppose de développer un outil de recensement permettant d'avoir une idée plus précise du nombre de MAM en fonctionnement, en s'appuyant sur les agréments délivrés par les présidents de conseils départementaux ou encore sur les bases de données des Caf.

Maisons d'assistants maternels et relais d'assistants maternels

Les relais d'assistants maternels (RAM) sont des lieux d'information, de rencontre et d'échange au service des parents et des assistants maternels. Les MAM n'ont donc pas vocation à concurrencer l'action des RAM. Au contraire, les assistants maternels exerçant en MAM peuvent bénéficier de l'appui et du soutien des RAM, notamment en participant aux ateliers éducatifs ou en utilisant les équipements mis à disposition.

Dans la pratique, toutefois, les assistants maternels travaillant en équipe éprouvent moins le besoin de solliciter les RAM qui, à l'inverse, peuvent donner la priorité aux professionnels les plus isolés. Quoi qu'il en soit, MAM et RAM constituent deux éléments complémentaires d'une politique de l'accueil du jeune enfant.

Enfin, la prochaine convention d'objectifs et de gestion (COG) Etat-Cnaf devra tirer les leçons des résultats pour le moment décevants enregistrés en matière de création de places d'accueil des jeunes enfants, qui est pourtant un objectif prioritaire de la COG 2013-2017. Les solutions apportées par le regroupement d'assistants maternels pourront être un axe de réflexion intéressant.

Recommandation n° 8 : Prendre en compte, dans les schémas départementaux de services aux parents, l'offre représentée par les MAM et développer un accompagnement incitatif permettant d'orienter les ouvertures de MAM vers les zones où des besoins particuliers sont identifiés.

Recommandation n° 9 : Prendre en compte le développement des MAM dans la future convention d'objectifs et de gestion qui devra être signée entre l'Etat et la Cnaf.

5. La réflexion sur les MAM conduit à s'interroger sur la fragmentation du secteur

La coexistence de maisons d'assistants maternels, de micro-crèches et de crèches familiales ou parentales, dont le statut est différent mais dont le fonctionnement concret l'est moins peut ainsi laisser penser qu'une convergence des modèles est souhaitable.

De même, une réflexion peut être menée sur la filière des métiers
de la petite enfance et sur les différents diplômes et qualifications existant.
C'est le sens de l'engagement de développement de l'emploi et des compétences (Edec) pour la période 2015-2018 signé en février 2015 avec les partenaires sociaux par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle
et du dialogue social et la secrétaire d'Etat chargée de la famille.

Par ailleurs, une refonte du CAP petite enfance a été engagée sous la direction du ministère des familles et doit entrer en vigueur à la rentrée 2017. Cette réforme concerne directement les assistants maternels, dans la mesure où leur formation initiale est généralement basée sur ce CAP. Parallèlement, la direction générale de l'offre de soin (DGOS) travaille à une réforme du diplôme d'Etat de puériculture.

Vos rapporteurs souhaitent que ces réflexions permettent de favoriser
les passerelles entre des métiers qui sont trop souvent étanches les uns aux autres.

Ces travaux devront en outre prendre en compte les apports du débat scientifique mené au cours du 1 er semestre 2016 et qui a conduit à la remise, par Mme Sylviane Giampino, d'un rapport à la ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes 54 ( * ) . Ce rapport, qui comporte 108 propositions, doit éclairer les réflexions futures sur les politiques en matière d'accueil du jeune enfant.

Recommandation n° 10 : Interroger la structuration des métiers de la petite enfance pour lutter contre la segmentation de ce secteur.


* 47 Il faudrait pour cela modifier l'article L. 542-9 ou l'article D. 542-35 du code de la sécurité sociale.

* 48 Loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, article 31.

* 49 Il s'agit des départements des Ardennes, de la Creuse, de l'Hérault, de l'Indre-et-Loire, de la Haute-Loire, de la Meurthe-et-Moselle, de l'Oise, des Pyrénées-Orientales, de la Seine-Maritime, de l'Essonne
et de la Seine-Saint-Denis.

* 50 HCF, L'opportunité et les contours d'un éventuel reprofilage des aides à l'accueil du jeune enfant, avis adopté le 10 avril 2014.

* 51 Les titulaires du diplôme professionnel d'auxiliaire de puériculture, du certificat d'aptitude professionnelle petite enfance, ou de tout autre diplôme intervenant dans le domaine de la petite enfance homologué ou inscrit au répertoire national des certifications professionnelles au moins au niveau III sont dispensés de suivre la formation initiale.

* 52 Cet accord de branche a été étendu, par un arrêté du 29 juin 2015 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

* 53 Il peut s'agir d'assistants maternels agréés mais ne disposant temporairement pas de contrat, ou encore de retraités qui souhaitent conserver une activité intermittente.

* 54 Développement du jeune enfant, Modes d'accueil, formation des professionnels. Rapport de Mme Sylviane Giampino remis à la ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes le 9 mai 2016.

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