II. LES DÉPENSES ÉLECTORALES SONT DIFFICILEMENT MAÎTRISABLES
A. DES PARAMÈTRES DE COÛT DIFFICILES À PILOTER
La dépense électorale varie en fonction de paramètres difficilement pilotables par l'administration . En effet, le coût d'une élection dépend avant tout du nombre d'électeurs, du nombre de candidats par circonscription et par tour de scrutin, du nombre de candidats obtenant le seuil requis pour bénéficier du remboursement de leurs frais de propagande officielle ou du remboursement forfaitaire de leurs dépenses de campagne et du montant des dépenses de campagne déclarées faisant l'objet d'un tel remboursement.
À titre d'exemple, lors de la dernière élection présidentielle de 2012, cinq candidats ont obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés au premier tour, alors que les hypothèses de budgétisation avaient été construites en retenant un chiffre de quatre candidats comme lors de l'élection présidentielle de 2007. Ceci aurait pu avoir pour conséquence d'augmenter de 7,2 millions d'euros le montant des remboursements forfaitaires versés aux candidats, avant que les comptes de compagne d'un candidat soient rejetés suite à la décision du Conseil constitutionnel du 4 juillet 2013 29 ( * ) .
De même, les élections municipales de 2014 ont coûté 10,6 millions d'euros de plus que la budgétisation initiale en raison notamment de remboursements forfaitaires des dépenses de campagne de candidats plus importants que prévus, le nombre de candidats ayant obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés ayant augmenté de 18 % par rapport aux précédentes élections municipales et les dépenses des candidats ayant été supérieures de 4 000 euros en moyenne à celles effectuées en 2008.
S'agissant du montant des dépenses des candidats, le tableau suivant montre la grande variabilité des dépenses déclarées selon les scrutins et du nombre de candidats ayant déposé un compte de campagne. Cela se traduit par une évolution de la dépense moyenne par candidat erratique, qui suit toutefois une tendance haussière s'agissant de l'élection présidentielle et des élections législatives .
Évolution des dépenses déclarées des candidats
Nombre de candidats |
Dépenses déclarées (en euros 2014) |
Évolution de la dépense moyenne par candidat (+/-) (en pourcentage) |
|
Présidentielle 2007 |
12 |
84 177 142 |
+ 10,86 % |
Législatives 2007 |
7 634 |
86 883 320 |
+ 13,51 % |
Cantonales 2008 |
5 784 |
29 347 655 |
- 8,06 % |
Municipales 2008 |
4 126 |
87 955 788 |
- 10,76 % |
Européennes 2009 |
160 |
35 374 669 |
- 23,53 % |
Régionales 2010 |
254 |
55 332 000 |
- 13,3 % |
Cantonales 2011 |
7 047 |
39 785 327 |
+ 2,08 % |
Présidentielle 2012 |
10 |
75 175 500 |
+7,71 % |
Législatives 2012 |
4 382 |
80 837 252 |
+ 25,98 % |
Municipales 2014 |
4 748 |
102 416 239 |
- 0,54 % |
Européennes 2014 |
105 |
26 716 505 |
- 20,88 % |
Source : réponse au questionnaire de votre rapporteur spécial
Cette variabilité se traduit par une difficulté pour l'administration à anticiper le coût réel du scrutin et donc à inscrire en loi de finances initiale les crédits budgétaires correspondants . La budgétisation de la dépense est donc complexe, et s'effectue sur la base des crédits consommés lors des dernières élections de même nature et de l'évolution annuelle moyenne du nombre d'électeurs.
À l'issue de chaque élection, le ministère de l'intérieur doit actualiser le coût estimé en fonction de ces différents paramètres, à partir des programmations actualisées des dépenses que lui communiquent les services préfectoraux, et procéder aux ajustements nécessaires des dotations de crédits déléguées aux préfectures 30 ( * ) .
Il est ainsi arrivé que les crédits fixés en loi de finances pour l'organisation des élections se révèlent insuffisants . Ainsi, en 2007, plusieurs facteurs ont concouru à ce que la dépense électorale dépasse la prévision budgétaire : le nombre d'électeurs a crû de 4,2 % en un an, le nombre de formulaires de procuration envoyés a été deux fois supérieur à celui de 2002, et les tarifs d'acheminement de la propagande électorale ont été doublés par rapport au montant attendu. Un abondement de crédits par décret d'avance puis par décret de virement a donc été nécessaire 31 ( * ) .
* 29 Conseil Constitutionnel, décision n° 2013-156 du 4 juillet 2013.
* 30 80 % des crédits du programme 232 sont consommés localement par les préfectures.
* 31 Le décret d'avance du 25 octobre 2007 a ouvert sur le programme 232 un montant de 13 millions d'euros de crédits de titre 2 et de 51,8 millions d'euros de crédits hors titre 2. Le décret de virement du 6 décembre 2007 a abondé le programme 232 d'un montant de 5,5 millions d'euros de crédits hors titre 2 en provenance du programme 307 « Administration territoriale ».