LES DIX AXES D'UNE RÉFORME
I. GARANTIR LA PRÉSENCE DE L'ÉTAT SELON DES MODALITÉS RENOUVELÉES
A. DOUBLONS OU DIFFICULTÉ D'ACCÈS AUX SERVICES DE L'ÉTAT : UNE PRÉSENCE QUI GAGNERAIT À ÊTRE OPTIMISÉE
Un récent rapport de la Cour des comptes 6 ( * ) a mis en exergue les nombreux doublons de services entre l'État et les collectivités territoriales, par exemple dans le domaine du sport ou de la cohésion sociale. Cette situation est source de gaspillages et d'inefficacité de l'action publique, alors même que celle-ci est perçue comme étant de plus en plus complexe.
Par ailleurs, la révision générale des politiques publiques (RGPP) et la modernisation de l'action publique (MAP) qui lui a succédé ont pour objectif de redéfinir les moyens des interventions de l'État et donc leur périmètre sans qu'au préalable une réflexion sur les missions relevant exclusivement de celui-ci ait été conduite.
De ces réformes a résulté un éloignement de l'État de certains territoires, notamment les zones rurales et péri-urbaines. Ainsi, le rapport remis au Premier ministre relatif à « la stratégie d'organisation à 5 ans de l'administration territoriale de l'État 7 ( * ) », qui a souhaité interroger les associations d'usagers sur leurs attentes, met notamment en évidence deux préoccupations des citoyens : la question des horaires d'ouverture des services publics et la création de points d'accès physiques temporaires. C'est donc bien la question de la présence, ou plus précisément de l'accès aux services publics, qui se pose.
B. LES MODALITÉS RENOUVELÉES DE LA PRÉSENCE DE L'ÉTAT
1. Vers une répartition plus claire des compétences entre l'État et les collectivités
Ce constat conduit à deux préconisations : d'une part, recentrer les missions de l'État sur des fonctions d'accompagnement et de conseil et, par conséquent, répartir les moyens humains dans les services correspondants ; d'autre part, supprimer les services qui empiètent les compétences transférées aux collectivités, afin de mettre fin aux politiques concurrentes.
En outre, dans certains domaines, l'État n'a plus les moyens d'assumer certaines missions qui relèvent encore de sa compétence.
La création d'un service unique pourrait naître d'une contractualisation entre l'État et les collectivités, garantissant ainsi à la fois la suppression des doublons et la non disparition des services.
Pour sortir de la confusion du cumul de services au niveau local, prévoir un service unique contractualisé entre l'État et la collectivité dans chacune des compétences transférées. |
Dans cette perspective, votre mission se prononce également en faveur d'un « choc de subsidiarité », qui serait le signe de la confiance de la République et de l'État dans les territoires et les élus locaux, et qui permettrait de sortir d'un cadre parfois considéré comme « kafkaïen ». Un tel « choc de subsidiarité » favoriserait l'exercice de compétences « à la carte » et démontrerait que les collectivités peuvent exercer, de façon responsable, de telles compétences.
Car une répartition plus claire des compétences entre l'État et les collectivités territoriales doit également permettre un meilleur partage des responsabilités ; il s'agit, pour l'État de veiller à la réalisation de la République sans se substituer aux collectivités territoriales.
2. Garantir l'accès à la République au plus près des citoyens
Dans son rapport 8 ( * ) sur l'État territorial, Marcel Gauchet souligne la nécessité, pour l'État, d'adopter un fonctionnement visant « plus de proximité, d'accessibilité , de lisibilité, de réactivité et d'efficacité ». Selon lui, l'éloignement de l'administration - non seulement physique mais aussi en termes de compréhension - est de moins en moins bien accepté par les citoyens.
Alors que l'accès aux services publics constitue une demande forte des citoyens, il est, de fait, plus difficile, dans des territoires particulièrement enclavés. L'État devrait, à moyen terme, s'intéresser aux moyens de garantir l'accès aux services publics par des populations éloignées, physiquement et « culturellement », des services publics.
À cet égard, une réflexion plus large sur le rôle des réseaux et l'utilisation des nouvelles technologies de l'information et de la communication devrait être menée, car dans un contexte de maîtrise des dépenses publiques, si la présence des services de l'État ne saurait être uniforme sur tout le territoire, il demeure indispensable de garantir, par des moyens renouvelés, l'accès à ses services à chaque citoyen .
Rendre obligatoire un schéma d'accessibilité des territoires, notamment les plus enclavés, aux services publics. |
Un tel schéma pourrait être conclu entre le préfet et le président du conseil général, et pourrait notamment s'appuyer sur une utilisation beaucoup plus ambitieuse des possibilités offertes par les technologies de l'information et de la communication.
3. Vers une modulation de la présence de l'État
La présence de l'État et l'accès aux services publics sont deux faces d'un même sujet mais qui peuvent être appréhendées et gérées différemment. En effet, si l'égal accès aux services publics est un impératif, la possibilité de moduler la présence de l'État en fonction des spécificités territoriales devra être approfondie.
Marcel Gauchet a proposé une nouvelle définition du rôle de l'État territorial : « La fonction du représentant de l'État sur le territoire est idéalement d'incarner l'intérêt général dans la proximité. Il lui revient de conjuguer une connaissance fine du terrain avec la pédagogie des enjeux généraux ».
Pour répondre à ces deux missions, il paraît nécessaire de garantir une proximité avec le citoyen qui doit être adaptée en fonction des spécificités du territoire.
* 6 Rapport public thématique relatif à l'organisation territoriale de l'Etat, juillet 2013.
* 7 « La stratégie d'organisation à 5 ans de l'administration territoriale de la République », Jean-Marc Rebière, Jean-Marc Weiss, juillet 2013.
* 8 « L'Etat territorial et les attentes des Français : éléments de réflexion à l'horizon 2025 », novembre 2010.