X. L'INSTRUCTION UNIQUE : LA RECHERCHE D'UNE ACTION PUBLIQUE LOCALE EFFICACE ET MODERNE
A. UNE ACTION PUBLIQUE COMPLEXE ET LONGUE
Les acteurs locaux rencontrés par votre mission, élus et représentants des entreprises, ont mis en exergue la complexification croissante de l'action publique, aussi bien nationale que locale. Or, ils ont, parallèlement, relevé la nécessaire recherche d'une action publique efficace, afin de répondre aux soucis de compétitivité et de réactivité des acteurs locaux.
Au-delà du débat, ancien et récurrent, sur le poids des normes dans la vie économique et administrative de notre pays, nos interlocuteurs ont regretté le nombre élevé de services à prendre en compte pour la réalisation d'un projet. En effet, lorsqu'il est envisagé la construction d'un équipement local, les porteurs du projet sont amenés à négocier avec plusieurs niveaux de collectivités territoriales ou leurs groupements. La multitude des interlocuteurs ralentit l'avancement des projets envisagés et peut parfois conduire à la renonciation, ce qui affaiblit la vitalité économique des territoires avec ses conséquences, notamment en matière d'attractivité ou d'implantation des services publics.
B. LA RECHERCHE D'UNE MODERNISATION DE L'ACTION PUBLIQUE LOCALE
Une répartition claire des compétences est souvent présentée comme l'unique outil permettant d'aboutir à une action publique locale efficace et pertinente. Votre mission estime que d'autres dispositifs peuvent concourir à cet objectif : celui de l'instruction unique est apparu, aux yeux de votre mission, comme un moyen incontournable pour parvenir à une décentralisation responsable, efficace et réactive.
1. Le principe de l'instruction unique
Pour mettre fin à l'atomisation de la décision, source d'inertie et de délais inutiles, votre mission propose la mise en place d'un dispositif d' instruction unique destinée à faciliter la simplification des procédures et des démarches engagées par un acteur local.
Ainsi, lorsqu'une entreprise ou une collectivité territoriale solliciterait l'État et des collectivités territoriales pour bénéficier de subventions, celle en charge de la compétence serait chargée de l'instruction du dossier auprès des autres niveaux de collectivités et de l'État. L'objectif est de permettre à tout acteur de disposer d'un seul et unique interlocuteur de la « porte d'entrée » à la décision et ainsi d'éviter la multiplication des mêmes démarches auprès des différents partenaires.
Le principal avantage attaché à ce dispositif serait la simplification des circuits de financement, sur le modèle existant des agences régionales de santé (ARS) ou de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME).
Votre mission estime que, pour chacune des principales politiques publiques, seraient constituées un dispositif d'instruction unique au niveau d'une collectivité territoriale ou de l'État, celui qui serait principalement chargé de l'exercice de la compétence considérée. La collectivité, qui serait ainsi « chef de file », aurait une mission d' « agence de financement », en étant l'unique interlocuteur du porteur de projet tout au long de la mise en oeuvre.
L'instruction unique favorise également la coopération entre collectivités ainsi que la coproduction de services. En effet, elles seraient amenées à définir, en commun, les critères d'instruction par convention. Il apparaît indispensable, aux yeux de votre mission, que l'instruction unique des dossiers s'accompagne d'un processus de coordination et de fixation en commun des principes guidant un tel dispositif.
Les conférences territoriales de l'action publique, qui sont actuellement en cours de discussion au Parlement, pourrait être le lieu au sein duquel les différents niveaux de collectivités territoriales et de leurs groupements définiraient ensemble les modalités de l'organisation d'une instruction unique.
Le dossier aboutirait dans un service d'instruction unique.
Instaurer progressivement l'instruction unique pour certaines politiques publiques. |
2. La mise en place de guichets inter-collectivités territoriales
L'instruction unique pourrait s'accompagner, dans certains cas, de la mise en place de guichet interrégional ou interdépartemental , pour permettre notamment aux entreprises qui possèderaient plusieurs sites répartis sur différents territoires, de bénéficier d'un unique interlocuteur. Un tel outil permettrait de faciliter les demandes d'instruction des demandes d'aides aux entreprises et d'assurer le suivi de leur développement
Si la mise en place de tels outils n'est pas nouvelle, force est de constater que sa généralisation mériterait d'être engagée, en particulier vis-à-vis des entreprises ou des acteurs du monde économique.
En effet, le Sénat a, depuis plusieurs années, recensé plusieurs expériences, dans des domaines autres que l'économie, qui démontrent le succès et la nécessité d'une mutualisation adaptée aux besoins des collectivités territoriales.
On citera, par exemple, celui de « 276 », contraction du « 27 » (code INSEE du département de l'Eure) et du « 76 » (code INSEE de la Seine-Maritime). Ces deux départements et la région Haute-Normandie ont pris en charge un aspect de la gestion des agents techniciens, ouvriers et de service (TOS) : le recrutement et la mobilité pour la Seine-Maritime, l'action sociale pour l'Eure et la formation professionnelle pour la Haute-Normandie.
La désignation de « guichets inter-collectivités » et le choix du dossier d'instruction unique, participeraient de la simplification et à la clarification des modalités de financement des projets. Dans ce cadre, la conférence territoriale de l'action publique jouerait un rôle majeur et indispensable pour assurer la coordination des interventions entre les échelons.
Par ailleurs, la mise en place de l'instruction unique et de guichets interterritoriaux mérite d'être analysée au regard de la notion de « chef de file » à laquelle elle donne du sens sans remettre en cause la capacité d'action des niveaux de collectivités territoriales.
Mettre en place des guichets inter-collectivités territoriales. |