9. Dr Patrick Romestaing, Président de la section « santé publique » et démographie médicale de l'ordre national des médecins
Jeudi 12 juillet 2012
Les travaux démographiques du conseil national de l'ordre des médecins sont réalisés à partir des données du tableau de chiffres départemental.
Actuellement, 268 072 médecins en exercice, 92 477 médecins généralistes sont en activité régulière, ce qui représente une diminution de 5 % en 5 ans.
Les projections pour les cinq ans à venir conduisent à un chiffre de 88 860 médecins généralistes.
77 départements ont vu, entre le 1 er janvier 2007 et le 1 er janvier 2012, leurs effectifs de médecins généralistes diminuer, alors que 13 l'ont vu augmenter et 6 stagner.
55,7 % des médecins exercent en activité libérale (contre 60,3 en 2007), 34,2 % sont salariés (contre 31,8 % en 2007) et 6 % ont une activité mixte (contre 6,5 %en 2007).
Dans 44 départements, la part des médecins généralistes libéraux sur l'ensemble des généralistes à l'échelle départementale est supérieure à la moyenne ; cette part est inférieure dans 34 départements, et égale dans 18.
De 2007 à 2012, les effectifs de médecins généralistes en exercice libéral ont diminué dans 84 départements de France métropolitaine, pour augmenter dans 10.
Enfin, l'activité salariée a augmenté de 2,5 % sur les 5 dernières années et l'on attend une diminution de 5,5 % de la médecine libérale au cours des 5 ans à venir.
Ces données traduisent la tendance des jeunes médecins à se diriger vers l'activité salariée ainsi qu'un relatif désintérêt, non seulement pour l'exercice libéral, mais aussi pour la médecine générale.
Ces évolutions peuvent être vérifiées sur plusieurs départements.
Ainsi, dans la Creuse, l'exercice libéral a diminué de 34,2 % au cours des 5 ans passés ; on s'attend à une nouvelle diminution de 29,1 % dans les 5 prochaines années. Les chiffres respectifs sont, pour le Jura, de - 1,4 % et - 0,9 %, pour les Côtes d'Armor, de - 4,2 % et - 3,5 % ; pour le Rhône de - 4,1 % et - 3,4 %, pour Paris, de - 12,7 % et - 10,7 %.
Les zones rurales ne sont donc pas les seuls territoires à recenser des déserts médicaux.
Ces chiffres peuvent être corrélés avec la moyenne d'âge des praticiens afin d'identifier d'éventuels besoins selon les zones géographiques. Elle est de 53 ans sur l'ensemble du territoire ; 52 départements dépassent cette moyenne, et 38 sont en dessous.
De ce point de vue, les départements potentiellement en danger sont ceux dont une forte proportion de généralistes dépasse 60 ans, ce qui est le cas, entre autres, des Côtes d'Armor (29,8 %), de la Creuse (31,6 %) et de Paris (35,6 %).
D'après l'analyse ordinale, 39 départements bénéficient d'une forte densité de médecins généralistes libéraux et mixtes, 17 se caractérisent par une densité moyenne et 40 présentent la particularité d'avoir une densité faible. A l'échelle des 2 215 bassins de vie, on recense 808 bassins de vie en densité forte, 159 en densité moyenne et 1247 en densité faible (1 bassin de vie ne dispose d'aucun médecin généraliste libéral ou mixte).
L'aspect financier n'est donc pas un déterminant important de l'installation.
Parmi les 927 médecins qui ont décroché prématurément leur plaque au cours de l'année 2011, la moyenne d'âge est de 49 ans. Les hommes représentent 54 % des effectifs et les femmes, 46 %. La féminisation du corps médical n'a pas d'influence sur l'offre de soins.
62,7 % des médecins ayant décroché leur plaque deviennent médecins salariés, 35,9 % effectuent des remplacements. Les raisons répertoriées sont : un travail trop lourd, des charges financières trop importantes, des charges administratives trop envahissantes.
En ce qui concerne les attentes des jeunes médecins nouvellement inscrits (53 % de femmes) et qui choisissent l'exercice libéral (79,2 % exercent la médecine générale), les motivations avancées pour pratiquer en secteur libre sont l'indépendance, le contact privilégié avec la patientèle et la gestion du temps.
A noter les possibilités de stage en milieu rural suscitent des installations dans les régions où elles existent.
La coercition est la dernière mesure à prendre pour résoudre le problème des déserts médicaux. Il faut agir avant tout sur les conditions d'exercice et sur la formation, en particulier favoriser la découverte et les conditions des modes d'exercice en dehors de l'hôpital. Les jeunes ne veulent pas travailler seuls, il faut créer la possibilité de médecins collaborateurs, favoriser les maisons de santé pluriprofessionnelles, la mixité des rémunérations peut-être, créer une profession d'aide aux tâches administratives.