2. Créer un fonds de développement coopératif
Ce type d'outil existe déjà en Italie, où la loi 59/92 a créé des fonds mutuels pour la promotion et le développement de la coopération, financés grâce à la perception de 3 % des bénéfices réalisés par les coopératives. Ces fonds sont gérés par des sociétés par actions, constituées par les associations nationales représentatives du mouvement coopératif. Ils peuvent soutenir la création de sociétés coopératives, prendre des participations dans des sociétés coopératives, ?nancer des programmes de développement ou encore organiser et gérer des cours de formation professionnelle.
En s'inspirant de l'exemple italien, le fonds de développement coopératif français pourrait être financé par les coopératives elles-mêmes par le versement d'une cotisation obligatoire proportionnelle à leurs bénéfices , dont le montant serait évidemment fixé à l'issue de toutes les concertations et expertises nécessaires.
Ces ressources pourraient être complétées de diverses manières. Le fonds coopératif pourrait par exemple drainer des fonds issus de l'épargne sociale et solidaire ou de la gestion des réserves d'épargne constituées dans le cadre de la participation des salariés aux bénéfices des entreprises. On peut également envisager que soit dévolu à ce fond l'actif net subsistant après dissolution des coopératives (puisque, dans le droit coopératif, cet actif net n'appartient pas aux investisseurs en capital).
Les règles de gouvernance de ce fond restent à déterminer, mais elles devront respecter une double contrainte. Il faut une structure ayant une dimension nationale pour opérer les péréquations nécessaires (entre régions et entre secteurs) et en même temps une gestion décentralisée pour que les prises de décision soient rapides et proches des nécessités du terrain. Il convient aussi de veiller à ce que la diversité des familles coopératives puisse bénéficier de cette mutualisation de nouveaux moyens.
Ce fond, c'est important de le souligner, aurait vocation à financer des entreprises dont le projet est économiquement viable, en leur proposant des financements adaptés à la temporalité et à la gouvernance spécifiques des coopératives. L'argent engagé par le fond serait donc non seulement récupéré mais aussi rémunéré. Comme on l'a dit, les coopératives sont en effet des entreprises capables de dégager des excédents d'exploitation et de financer dans la durée leur croissance. Ce qu'elles ont du mal à faire, en revanche, c'est à mobiliser ponctuellement un volume de capital important auprès de marchés financiers qui exigent un retour sur investissement rapide et un taux de rémunération élevé. La finalité du fond de développement coopératif serait donc d'offrir des financements patients obéissant à des normes de rémunération déconnectées des exigences actuelles des marchés financiers. Cela a un sens dès lors qu'on admet que la recherche d'une forte rentabilité immédiate conduit à sacrifier des projets productifs porteurs de rentabilité, de développement économique et d'emploi dans la durée.
Bien entendu, l'accès aux prestations de ce fond serait conditionné au respect par les bénéficiaires des principes de la coopération, qui pourrait notamment être attesté par la mise en oeuvre de la procédure de révision coopérative.
Enfin, le législateur devra préciser l'articulation entre le Fonds de développement coopératif et les dispositifs publics de financement, qu'il s'agisse de la future BPI mais aussi des crédits de développement économique des régions - les aides régionales ayant une vraie justification dans la mesure où les coopératives ont un ancrage territorial fort. L'objectif est de dégager des synergies entre les différents acteurs et outils du financement coopératif. On peut imaginer que le Fonds de développement coopératif soit gestionnaire par délégation de certaines lignes de crédits publics et éventuellement co-financeur des actions, tout en veillant à ce que les interventions financées sur ressources publiques restent compatibles avec les règles sur les aides publiques.